UNIVERSITE DE LIEGE FACULTÉ DES SCIENCES INSTITUT DE ZOOLOGIE UNITÉ DE RECHERCHES ZOOGÉOGRAPHIQUES

Etude comparée de l’écologie de deux espèces jumelles de Chiroptères (Mammalia : Chiroptera ) en Belgique: l’oreillard roux ( Plecotus auritus ) (Linn., 1758) et l’oreillard gris ( Plecotus austriacus ) (Fischer, 1829).

Grégory Motte

Thèse présentée en vue de l'obtention du grade de Docteur en Sciences Promoteur : Dr Roland Libois A mon père, Jean-Pierre Motte (24/11/1949 - 10/10/2010)

Citation : G. Motte (2011). Etude comparée de l’écologie de deux espèces jumelles de Chiroptères (Mammalia : Chiroptera ) en Belgique : l’oreillard roux (Plecotus auritus ) (Linn., 1758) et l’oreillard gris (Plecotus austriacus ) (Fischer, 1829). Thèse. doct. Université de Liège. 123p. Remerciements

Au terme de cette thèse, je remercie très chaleureusement le Docteur Roland Libois pour sa confiance et sa patience accordées du début à la fin des travaux. Dépassant son rôle de promoteur, ses encouragements répétés et ses relectures critiques ont été capitales pour me permettre d'aboutir.

Je suis également très reconnaissant, au Docteur Thierry Kervyn pour m'avoir fait découvrir le monde fascinant des chauves-souris, m'avoir initié au radiopistage et à l'étude du régime alimentaire, au Docteur Vincenzo Verrardi (Université Libre de Bruxelles et Facultés Universitaires Notre-Dame de la Paix) et Mr François Libois (Facultés Universitaires Notre-Dame de la Paix) pour l'aide apportée lors de l'élaboration des traitements statistiques, au Docteur Andreas Kiefer (Université de Johannes Gutenberg à Mainz), Md Orly Razgour (Université de Bristol) pour l'identification génétique de cadavres d'oreillards. au Professeur Caroline Nieberding et au Docteur Michaël Ovidio, pour avoir accepté de faire partie de mon comité de thèse.

En outre, ce travail à bénéficié de l'aide de nombreuses personnes,

Jean Doucet pour m'avoir initié à la reconnaissance des deux espèces d'oreillards et m'avoir facilité l'accès aux gîtes localisés en Famenne et en Ardenne, Frédéric Forget, Yves Latinne, Paul Michaux, Rudy Vanherck pour l'aide apportée lors des récoltes de déjections en Wallonie ainsi que toute les personnes qui m'ont permis d'accéder aux combles des églises,

Gabby Bollen , Alex Lefèvre, Ghis Palmans, Constant Verbeeck pour m'avoir fait parvenir les déjections des colonies d'oreillards localisées en Flandres et Michel Barataud pour les restes alimentaires de Lépidoptères provenant de France,

Arnaud Laudelout pour son aide régulière apportée sur le terrain,

Maurice Wuidar du Département de la Nature et des Forêt pour l'aide logistique apportée lors du suivi des oreillards de Gembes.

Pour leur soutien, la mise à disposition de bibliographie, les discussions et les relectures qu’ils m’ont offerts, je remercie également,

Etienne Baras, Etienne Branquart, Jean-Yves Baugnée, Jean-Marie Cordy, Marc Dufrêne, Thierry Kinet, Pierrette Nyssen, Gilles San Martin, Stéphanie Sobry, John O. Whitaker ainsi que les collègues du Département de l’Etude du Milieu Naturel et Agricole.

Enfin, je remercie particulièrement Magali Lequeux pour sa compréhension et sa patience ainsi que mes parents pour m'avoir permis de suivre ces études.

Cette thèse a été financée par le Fond pour la Recherche dans l'Industrie et l'Agriculture (1998 – 2002), le Bat Conservation International (2001), la Direction de la Nature du Service Public de Wallonie, l’Unité de Recherches Zoogéographiques et des financements personnels. Table des matières

Table des matières. 1 Table des illustrations. 4

Introduction. 7

Chapitre 1 : Présentation des espèces. 10

1. Position systématique et détermination. 10 2. Distribution des Plecotus dans le monde et en Europe. 13 3. Eco-éthologie. 15 3.1 Gîte estival. 15 3.2 Gîte hivernal. 16 3.3 Cycle de vie. 16 3.4 Déplacements. 16 3.5 Structure des populations, échange de gènes. 17 3.6 Utilisation de l'habitat. 18 3.7 Régime alimentaire et techniques de chasse. 20 3.8 Détection des proies. 21 3.9 Sons et ultra-sons. 22 3.10 Démographie. 23

Chapitre 2 : Régime alimentaire estival. 24

1. Introduction. 24 2. Sites d'étude. 24 3. Méthodologie. 26 3.1 Limites de la méthode. 28 3.2 Échantillonnage. 28 3.3 Traitements statistiques. 30 4. Résultats. 35 4.1 Composition. 35 4.2 Variations spécifiques et temporelles : modèle 1. 37 4.3 Variations spécifiques, colonie mixte vs colonies monospécifiques : modèle 2. 39 5. Discussion. 43 5.1 Introduction. 43 5.2 Comparaison interspécifique indépendamment des conditions de cohabitation. 44 5.3 Comparaison interspécifique : colonies monospécifiques. 45 5.4 Comparaison interspécifique : colonies monospécifiques vs colonie mixte. 46 5.5 P. austriacus et la capacité de glaner. 47 5.6 Les similitudes avec l’étude de deux espèces jumelles de Myotis : allopatrie vs sympatrie. 48 5.7 Variations annuelles. 49 5.8 Variations saisonnières, phénologie et écologie des proies 49 5.9 Variations saisonnières et cycle de vie en syntopie. 52 6. Conclusions. 53

Table des matières et des illustrations 1 Chapitre 3 : Régime alimentaire pré-hivernal et hivernal. 54

1. Introduction. 54 2. Méthodologie. 55 3. Résultats. 55 4. Discussion. 56 4.1 Les déjections récoltées correspondent elles à des proies réellement consommées en hiver ? 56 4.2 Analyse qualitative et quantitative des résultats. 57 5. Conclusions. 59

Chapitre 4 : Exploitation de l'espace et du temps. 60

1. Introduction. 60 2. Méthodologie. 60 2.1 Échantillonnage. 62 2.2 Traitements statistiques. 63 3. Résultats : Morphométrie des individus capturés. 64 4. Résultats : Exploitation de l'espace. 65 4.1 Description des terrains de chasse. 65 4.2 Aire d’activité individuelle. 66 4.3 Aire d’activité des colonies. 71 4.4 Sélection de l’habitat. 72 4.4.1 Les éléments surfaciques. 72 4.4.2 Les élément linéaires. 75 5. Résultats : Exploitation du temps. 76 5.1 Période d’activité nocturne : émergence et durée. 76 5.2 Retour nocturne au gîte : nombre et durée. 79 5.3 Utilisation de reposoirs nocturnes : fréquence et durée. 80 5.4 Durée des périodes de vol. 81 5.5 Durée des pertes de signal radio. 81 6. Effets des émetteurs sur le comportement des oreillards. 82 7. Discussion. 84 7.1 Avertissement. 84 7.2 Introduction. 84 7.3 Terrains de chasse et aire d'activité. 86 7.4 Sélection et utilisation de l'habitat. 87 7.5 Liens entre l’exploitation de l'espace et le régime alimentaire. 89 7.6 Exploitation du temps. 91 8. Conclusions. 93

Chapitre 5 : Discussion générale. 95

Les mécanismes permettant la cohabitation. 95 Q1 : La syntopie est-elle responsable du changement de comportement observé ? 96 Q2 : Pourquoi, en condition syntopique, la différentiation du régime alimentaire observée entre les colonies monospécifiques ne s’est-elle pas maintenues ? 97 Q3 : La sélection des habitats est le principal mécanisme de partage des ressources ? 98 Q4 : D'autres facteurs peuvent-ils expliquer nos résultats ? 99 Q5 : La coexistence intime entre les deux espèces est-elle stable ? 100 Q6 : Quels sont les mécanismes d’exclusion possibles entre les deux espèces ? 100 Q7 : La morphologie des espèces permettrait-elle de prédire l’utilisation des ressources ? 102

Table des matières et des illustrations 2 Chapitre 6: Conclusions générales. 103

1. Recommandations pour la protection des oreillards. 103 2. Conclusions générales. 105 3. Perspectives. 107

Résumé. 107 Abstract. 109

Bibliographie. 112

Annexes.

Annexe 1 : Répartition des dates de collecte de déjections. Annexe 2 : Détail du régime alimentaire de P. austriacus. Annexe 3 : Détail du régime alimentaire de P. auritus. Annexe 4 : Détail du régime alimentaire de P. austriacus jusqu'au degré systématique d'identification le plus fin. Annexe 5 : Détail du régime alimentaire de P. auritus jusqu'au degré systématique d'identification le plus fin. Annexe 6 : Ecologie et phénologie des proies sur base de la littérature Annexe 7 : Ventilation des Lépidoptères identifiées à partir des restes d'ailes collectées sous des reposoirs en fonction des plantes nourricières recherchées par les chenilles. Annexe 8 : Ventilation des Lépidoptères identifiées à partir des restes d'ailes collectées sous des reposoirs en fonction des habitats utilisés par les adultes. Annexe 9 : Morphométrie des individus capturés.

Table des matières et des illustrations 3 Table des illustrations

Fig. 1.1 : Comparaison de critères morphologiques chez P. auritus et P. austriacus par C. Dietz & O.von Helversen 2004. 12 Fig. 1.2 : Répartition de Plecotus auritus en Europe. Source : Agence européenne pour l’environnement, selon Mitchell-Jones et al. 1999. 14 Fig. 1.3 : Répartition des Plecotus austriacus en Europe. Source : Agence européenne pour l’environnement, selon Mitchell Jones et al. 1999. 14 Fig. 1.4: Localisation des données estivales de P. auritus et P. austriacus en Région Wallonne. Sources : SPW/DGO3/Demna et GT Plecotus. 14 Fig. 1.5: Pourcentage du temps de vol passé dans les différents types de bois, repris de Entwistel et al. 1996. 19 Fig. 1.6 : Nature des terrains de chasse exploités par P. austriacus en Allemagne, repris de Keifer & Veith 1998. 19 Fig. 1.7 : Régime alimentaire global de P. auritus et P. austriacus reconstitué à partir des publications de Swift & Racey 1983, Rydell 1989, Shiel et al. 1991, Ashrafi et al. 2011, Bauerova 1982. 21 Fig. 1.8 : Régime alimentaire global de P. auritus et P. austriacus en Suisse reconstitué à partir de la publication de Beck 1995. 21 Fig. 2.1 : Localisation des colonies étudiées. 25 Fig. 2.2 : Proportion des habitats disponibles dans un rayon de 1, 2 et 3 km autour des colonies étudiées classée par ordre décroissant de la proportion d’habitat urbanisé. 26 Fig. 2.3 : Cycle de vie annuel simplifié des oreillards. 28 Fig. 2.4 : Évolution de la richesse taxonomique et de la fréquence relative de chaque proie en fonction de la taille de l’échantillon. 30 Fig. 2.5 : Régime alimentaire estival global des colonies étudiées. 35 Fig. 2.6 : Comparaison graphique des coefficients prédits pour chaque groupe de proies entre le groupe des P. auritus provenant des colonies monospécifiques (référence) et celui des P. auritus de Pondrôme, des P. austriacus provenant des colonies monospécifiques et des P. austriacus de Pondrôme. 40 Fig. 2.7 : Comparaison graphique des coefficients prédits pour chaque groupe de proies entre le groupe des P. austriacus issus de colonies monospécifiques (référence) et celui des P. auritus de Pondrôme, des P. auritus provenant des colonies monospécifiques et des P. austriacus de Pondrôme. 41 Fig. 2.8: Variation saisonnière moyenne de la composition du régime alimentaire des P. auritus et des P. austriacus de Pondrôme. 42 Fig. 2.9 : Ventilation des 176 espèces de Lépidoptères identifiées à partir des restes d'ailes collectés sur des reposoirs en fonction des plantes nourricières recherchées par les chenilles. 51 Fig. 2.10 : Ventilation des 176 espèces de Lépidoptères identifiées à partir des restes d'ailes collectés sous des reposoirs en fonction des habitats utilisés par les adultes. 51 Fig. 3.1: Représentation graphique de la proportion des proies dans le régime alimentaire pré-hivernal et hivernal. 56 Fig. 4.1 : Comparaison du poids (g), de la largeur du tragus (mm), de la longueur du pouce (mm) entre les femelles de P. auritus et de P. austriacus capturées. 65 Fig. 4.2 : Aire d’activité des individus et des colonies de Gozin, Pondrôme et Gembes. 68 Fig. 4.3 : Surface de l’aire d’activité individuelle en fonction du nombre de nuits de suivi. 69

Table des matières et des illustrations 4 Fig. 4.4 : Évolution de l’aire d’activité individuelle en fonction du nombre de nuits de radiopistage. 69 Fig. 4.5 : Relation entre le nombre de terrains de chasse par individu et la durée du radiopistage. 70 Fig. 4.6 : Évolution entre l’aire d’activité de la colonie et le nombre d’individus suivis dans la colonie. 72 Fig. 4.7 : Proportion de la période d’activité journalière des femelles répartie en bandes concentriques de 500m autour du gîte. 79 Fig. 4.8 : Terrains de chasse exploités par des P. auritus de Gozin. Alignements d’arbres, bocages et, en arrière plan, le bois mixte de Martouzin exploités par les individus J, K, O, P, Q, X. 82 Fig. 4.9 : Terrain de chasse exploité par des P. auritus de Gozin. Bois de résineux, Ban de Malkof. 82 Fig. 4.10 : Terrains de chasse exploités par des P. austriacus de Gembes. Prairie de fauche, et en arrière plan, le bois de feuillus, Virée de l’Almache. 82 Fig. 4.11 : Terrain de chasse exploité par des P. austriacus de Gembes. Prairies humides de fond de vallée situées le long du ruisseau d’Halmidon. 82 Fig. 4.12 : Terrains de chasse exploités par des Plecotus de Pondrôme. Cordon rivulaire, prairie pâturée intensive et le bois de feuillus, Taille Mathias. 83 Fig. 4.13 : Terrains de chasse exploités par les P. auritus de Pondrôme. Prairies pâturées intensives et de fauche et réseau bocager. 83 Fig. 4.14 : Terrain de chasse exploité par des P. auritus de Pondrôme. Zone humide pâturée intensivement au lieu dit Les Stappes, exploitée par les individus C et D. 83 Fig. 4.15 : Cordon arboré utilisé comme route de vol par un P. austriacus (individu A) situé au lieu dit La ferme des Quatres Quarts. 83 Fig. 4.16 : Terrain de chasse exploité par les P. austriacus de Pondrôme. Bois de feuillus matures à caractère hydromorphe, fortement drainé situé au lieu dit Les Stappes. 83 Fig. 4.17 : Terrain de chasse exploité par des P. austriacus de Pondrôme. Jeune chênaie calcicole de plaine avec poches humides située au lieu dit Les Goules. 83

Tab. 1.1 : Description des Plecotus auritus et Plecotus austriacus selon Stebbings 1970 et Dietz & von Helversen 2009. 10 Tab. 1.2 : Critères morphologiques caractérisant les P. auritus et P. austriacus . 12 Tab. 1.3: Pourcentage de pays signataires de l'espace EUROBATS où des espèces de chauves-souris dépendent fortement des gîtes épigés de chauves-souris dépendent fortement des gîtes épigés. Repris de Marnell & Presetnik (2010), Eurobat. 15 Tab. 1.4 : Identification acoustique de P. auritus (n = 26) et P. austriacus (n = 55). Repris de Russo & Jones, 2002. 24 Tab. 2.1 : Résultats des comptages réalisés à l’intérieur du gîte de mai à septembre, entre 15h00 et le coucher du soleil. 25 Tab. 2.2 : Fragments de proies identifiées pour les résultats semi-quantitatifs. 27 Tab. 2.3 : Répartition des échantillons après reclassement dans le mois correspondant à la période pendant laquelle les proies ont été consommées. 29 Tab. 2.4 : Nombre d’échantillons en fonction du mois et de l’année. 29 Tab. 2.5 : Nombre moyen de jours séparant deux collectes en fonction des colonies. 30 Tab. 2.6 : Déduction des coefficients en fonction de l'identité spécifique et de l'appartenance à la colonie de Pondrôme. 33 Tab. 2.7 : Calcul de la proportion moyenne prédite des proies consommées par les quatre groupes en référence au groupe des P. auritus hors Pondrôme. 33 Tab. 2.8 : Calcul de la proportion moyenne prédite des proies consommées par les quatre groupes en référence au groupe des P. austriacus hors Pondrôme. 33 Tab. 2.9 : Fréquences relatives moyennes (%) des catégories de proies dans chaque colonie (130 échantillons). 36 Tab. 2.10 : Fréquence relative des proies identifiées dans l’échantillon du mois d’avril/ 37 Tab. 2.11 : Résultats de l’analyse de régression de la proportion des proies par rapport aux années, aux mois, à l’espèce et à l’appartenance à la colonie de Pondrôme. 38

Table des matières et des illustrations 5 Tab. 2.12 : Résultats bruts de l’analyse de régression de la proportion des proies par rapport aux années, aux mois, à l’espèce ( P. austriacus) et à l’appartenance à la colonie de Pondrôme. 39 Tab. 2.13 : Comparaison des coefficients prédits pour chaque groupe de proies entre colonies de P. auritus monospécifiques (référence) et les P. auritus de Pondrôme, les P. austriacus appartenant aux colonies monospécifiques et les P. austriacus de Pondrôme. 40 Tab. 2.14 : Comparaison des coefficients prédits pour chaque groupe de proies entre colonies de P. austriacus monospécifiques (référence) et les P. auritus de Pondrôme, les P. auritus appartenant aux colonies monospécifiques et les P. austriacus de Pondrôme. 41 Tab. 2.15 : Comparaison des fréquences relatives moyennes des proies entre les P. auritus de Pondrôme et les P. austriacus ventilées en fonction des mois. 42 Tab. 3.1 : Proportion des proies identifiées dans les échantillons pré-hivernaux et hivernaux. 55 Tab. 4.1 : Description des individus équipés d’un émetteur. 62 Tab. 4.2 : Répartition des nuits de radiopistage en fonction des colonies et des années. 63 Tab. 4.3 : Morphométrie des individus capturés. 64 Tab. 4.4 : Description quantitative des terrains de chasse exploités. 65 Tab. 4.5 : Relation entre la durée d’utilisation des terrains de chasse et l’éloignement par rapport au gîte, entre la surface des terrains de chasse et l’éloignement par rapport au gîte, entre la surface des terrains de chasse et la durée moyenne d’utilisation. 66 Tab. 4.6 : Aire d’activité totale et moyenne par nuit des individus radiopistés. 67 Tab. 4.7 : Nombre moyen de terrains de chasse visités par nuit par les individus pistés. 71 Tab. 4.8 : Sélection des habitats surfaciques des individus radiopistés des colonies de Gozin et Gembes. 73 Tab. 4.9 : Sélection des habitats surfaciques des individus radiopistés de la colonie syntopique de Pondrôme. 73 Tab. 4.10 : Proportion (%) moyenne du temps passé par les individus radiopistés dans les différentes catégories d’habitats. 74 Tab. 4.11 : Comparaison entre les colonies du temps moyen relatif passé par les individus radiopistés dans les catégories d’habitats. 74 Tab. 4.12 : Sélection des habitats linéaires des individus radiopistés à Gozin et à Gembes. 75 Tab. 4.13 : Sélection des habitats linéaires des individus radiopistés à Pondrôme. 75 Tab. 4.14 : Sélection des lisières des individus radiopistés à Gozin et Gembes. 76 Tab. 4.15 : Sélection des lisières par les individus radiopistés à Pondrôme. 76 Tab. 4.16 : Durée moyenne et médiane des activités nocturnes des Plecotus . 77 Tab. 4.17 : Durée moyenne et médiane des activités nocturnes des P. auritus de Gozin. 77 Tab. 4.18 : Durée moyenne et médiane des activités nocturnes des P. auritus de Gembes. 78 Tab. 4.19 : Durée moyenne et médiane des activités nocturnes des P. austriacus et P.auritus Pondrôme. 78 Tab. 4.20 : Nombre de nuits de suivi télémétrique en fonction du nombre de retour au gîte. 79

Table des matières et des illustrations 6 Introduction

Avec 1150 espèces, les chiroptères sont, après les rongeurs (env. 2250 espèces), l'ordre le plus diversifié de la classe des Mammifères (C ORBET 1978, IUCN 2008).

Malgré la diversité des régimes alimentaires (carnivore, frugivore, insectivore, nectarivore, piscivore, pollinivore, hématophage,…) la quasi totalité des espèces de chauves-souris ont adopté un mode de vie nocturne. La prédation potentielle par les oiseaux diurnes, les risques d'hyperthermie liés au vol et la compétition avec les oiseaux insectivores diurnes sont les trois facteurs cités pour expliquer cette évolution (R ANSOME 1990, S PEAKMAN 1995, V OIGT &LEWANZIK 2011).

Le haut coût énergétique imposé par le vol actif des chauves-souris peut laisser supposer que la compétition pour les ressources a dû être une force significative dans l'évolution des différentes espèces. Chez les vespertilionidés, famille dont le régime alimentaire est insectivore, la plus importante en nombre d'espèces et la plus répandue dans le monde, la limitation des ressources alimentaires aurait eu comme conséquence le fait que le nombre de jeunes est généralement limité à un seul (B ARCLAY & H ARDER 2003).

Néanmoins, la diversité locale des chauves-souris peut être très élevée, voire exceptionnelle. Jusqu'à 110 espèces sympatriques ont ainsi été relevées dans une seule localité située en région néotropicale (S IMMONS & C ONWAY 2003).

En Europe, on dénombre actuellement une trentaine d'espèces. Depuis une dizaine d'années, ce nombre augmente peu à peu par le développement et la démocratisation des méthodes de génétique moléculaires permettant de découvrir de nouvelles espèces jumelles ou cryptiques parmi les genres Pipistrellus, Plecotus ou Myotis (e.a .BARRAT et al. 1997, K IEFFER et al. 2002, RUEDI et al. 2002).

Comment peut-on expliquer une telle diversité d'espèces ? Comment ces espèces interagissent entre elles ? Quelle espèce peut coexister avec une autre ?

Issus des travaux de Gause (1935) sur les paramécies, le principe d'exclusion compétitive, une des principales règles en écologie, stipule que les populations de deux espèces ayant des exigences écologiques identiques, c'est-à-dire exploitant une ressource limitée et commune, ne peuvent coexister indéfiniment dans un milieu stable et homogène, la plus compétitive des deux finissant à plus ou moins long terme par éliminer l'autre. Le corollaire du principe de l'exclusion compétitive, appelé également principe de Gause-Volterra, consiste à dire que si deux espèces écologiquement semblables coexistent, c'est qu'elles ont nécessairement réalisé une différenciation de leurs niches écologiques, définies comme un espace multidimensionnel représentant l'ensemble des ressources utilisées par une espèce (H UTCHINSON 1957, S CHOENER 1986).

Pour tenter de répondre à ces questions, les écologistes se sont donc concentrés sur l'étude des différences dans la façon dont les espèces d'une même communauté exploitent leurs ressources. Comprendre les mécanismes qui permettent le partage des ressources contribue à comprendre les mécanismes qui régulent la diversité des espèces. De par leur diversité morphologique, des régimes alimentaires ou des techniques de chasse, l'étude du comportement des chauves-souris constitue donc une opportunité idéale pour la compréhension des mécanismes qui structurent les communautés animales.

Introduction 7 Le concept de communauté regroupe un ensemble de populations ou d'espèces contemporaines qui coexistent en un lieu donné. Cette définition regroupe donc aussi bien les autotrophes que les hétérotrophes (R ICKLEFS 1979 in P ATTERSON et al. 2003).

L'étude de l'ensemble des espèces appartenant à une même communauté ne peut s'envisager dans le cadre d'un doctorat en raison des coûts en temps et financiers que cela représente. Il est donc nécessaire de limiter l'étude à un sous-ensemble d'une communauté défini par une caractéristique fonctionnelle commune, celui de la guilde des chauves-souris insectivores. Cependant, dans la nature, il reste toujours très difficile d'étudier un groupe aussi large.

Chez les chauves-souris insectivores, les études sur le partage des ressources parmi différents assemblages d'espèces sympatriques se sont focalisées sur la morphologie (F REEMAN 1981, K INGSTON et al. , 2000, A GUIRRE et al. 2002, S EVCIK 2003), l'écholocation (H ELLER & VON HELVERSEN 1989, NEUWEILER 1990), la morphologie et l'écholocation (A LDRIDGE & R AUTENBACH 1987, N ORBERG & RAYNER 1987, B ODGANOWICZ et al. 1999), la morphologie et le comportement de chasse (F ENTON & BOGDANOWICZ 2002), le comportement de chasse et l'écholocation (N EUWEILER 1989), l'habitat (L EHMANN 1985, SWIFT & R ACEY 1983, R USSO et al . 2005), le régime alimentaire (S WIFT & R ACEY 1983, R YDELL 1989b, S HIEL et al. 1991, H ICKEY et al. 1996, Z HANG et al. 2005, 2007), la technique de chasse, le régime alimentaire et l'habitat (S CHNITZLER & K ALKO 1998) ou plus récemment l'écologie sensorielle (S IEMERS & S CHNITZLER 2004, S AFI & S IEMERS 2010, J ONES et al. 2011).

Ces études interprètent les différences entre espèces comme étant la conséquence du partage des ressources et, indirectement, comme une démonstration du principe d'exclusion compétitive.

Cependant, même si la compétition pour les ressources est supposée être un facteur clé dans la structuration des relations entre espèces de chauves-souris (M CNAB 1971, F LEMING et al. 1972, K UNZ 1973), selon F INDLEY (synthèse en 1993), peu d'études sur ces animaux parviennent à prouver l'existence de la compétition entre les espèces, même si parmi les espèces animales des preuves irréfutables ont été obtenues (synthèse de S CHOENER 1974, 1983). Chez les chauves-souris, les preuves sont indirectes, issues généralement de corrélations entre le comportement et la morphologie et font fi de toute manipulation expérimentale. Finalement, certains pensent que la compétition interspécifique pourrait ne jouer qu’un rôle mineur dans la structuration des assemblages spécifiques de chauves-souris (S CHUM 1984, F INDLEY 1993, A RITA 1997).

De plus, comme le fait remarquer A RLETTAZ (1995), la plupart des études ont été consacrées à des assemblages syntopiques, en incluant des espèces dont la morphologie ou la phylogénie n'était pas nécessairement comparable.

L'étude des exigences écologiques, du partage des ressources entre deux espèces jumelles constitue donc une aubaine pour vérifier le principe de similarité limitante. La mise en évidence de différences interspécifiques devrait en effet avoir une certaine valeur adaptative dans le contexte de la séparation des niches (A RLETTAZ 1999). Notre étude va donc se limiter à un sous-ensemble simplifié de la guilde des chauves-souris insectivores, celui défini par nos deux espèces jumelles d'oreillards, l'oreillard roux (Plecotus auritus ) et l'oreillard gris ( Plecotus austriacus ). Ces deux espèces sympatriques sur la majorité de leur aire de répartition sont morphologiquement et phylogénétiquement très proches.

Chez les espèces jumelles ou cryptiques de chauves-souris, la prédiction des exigences écologiques et du partage des ressources ne peut aisément se déduire de leur morphologie. La sélection des forêts sans sous-bois par le Grand murin ( Myotis myotis ) et des prairies non fauchées ou des steppes par le Petit murin ( Myotis blythii ) n'aurait pu être prédite par des différences morphologiques (A RLETTAZ et al. 1997, A RLETTAZ 1999). De même, parmi le genre Pipistrellus , P. pipistrellus consomme des proies de plus grande taille que P. pygmaeus (B ARLOW 1997). S'il existait une relation univoque entre l'écologie trophique et la morphologie, on aurait pu prédire que la taille du crâne, de l'appareil dentaire ou encore l'ouverture des mâchoires de P. pipistrellus devraient être supérieures. B ARLOW et al. 1997

Introduction 8 ont cependant démontré que la morphologie crânienne des deux espèces se chevauchait de façon importante. L'utilisation de données morphologiques pour déduire les exigences écologiques des chauves-souris doit donc être utilisée avec la plus grande précaution. En conséquence, pour comprendre les mécanismes qui permettent le partage des ressources entre espèces de la communauté des chauves-souris, il paraît indispensable d'avoir recours à des études empiriques sur le régime alimentaire et l'utilisation de l'habitat.

Afin de déterminer les mécanismes de partage des ressources entre les deux espèces jumelles d'oreillards, nous avons comparé trois dimensions importantes de leur niche écologique : l'utilisation des ressources trophiques, par l'analyse fécale, et l'utilisation de l'espace et du temps, par radiopistage.

Notre terre fait face aux changements climatiques et à une détérioration des habitats sans précédent. Dans le monde, les chauves-souris font partie des espèces les plus menacées, 22% des espèces étant classées comme en danger ou quasi en danger (Liste rouge IUCN 2008). Les oreillards, comme beaucoup d’autres espèces, ont ainsi fait face à un déclin de leurs populations (D AAN 1980, STEBBINGS 1988, K ERVYN et al. 2009).

Plus qu'une simple étude d'écologie fondamentale, les résultats obtenus permettront également d'apporter des recommandations pour la protection de ces deux espèces. Pour protéger nos deux espèces d'oreillards et répondre aux obligations de la Directive Habitat 92/43/CEE, il est en effet important de pouvoir distinguer l'écologie des deux espèces. Actuellement, les exigences écologiques des P. austriacus sont encore peu connues (B ECK 1995, S WIFT 1998, D IETZ et al. 2009).

Après avoir présenté les deux espèces d'oreillards, notre étude s'articule autour de quatre chapitres.

Nous débutons par l'étude du comportement alimentaire de 10 colonies de reproduction monospécifiques et d'une colonie mixte localisées en Belgique. Les questions portent sur l’existence de variations saisonnières et interannuelles du régime alimentaire, la différenciation interspécifique du régime indépendamment des conditions de cohabitation et, enfin, sur le maintien des éventuelles différences lorsque les deux espèces coexistent intimement.

En second lieu, l'étude porte sur le comportement alimentaire pré-hivernal et hivernal des deux espèces. La discussion s'articule autour de deux points : savoir si les déjections récoltées correspondent à des proies réellement consommées en hiver (W ITHAKER 1993) et analyser les proies consommées.

Dans un troisième temps, nous avons étudié l'utilisation de l'espace et du temps dans trois colonies : une colonie monospécifique de P. auritus, une colonie monospécifique de P. austriacus et une colonie mixte de P. auritus et P. austriacus . Les comparaisons interspécifiques portent sur 1) la nature des terrains de chasse exploités, l'aire d'activité individuelle et coloniale et la sélection des habitats, 2) la durée de la période d'activité, le nombre et la durée des retours au gîte, l'utilisation de reposoirs nocturnes et la durée des périodes de vol et 3) la comparaison des résultats obtenus dans les colonies monospécifiques avec ceux de la colonie mixte. La discussion s'articule autour de trois points : l'exploitation de l'espace, ses liens avec le régime alimentaire et l'activité nocturne.

Enfin, la discussion générale permet, après avoir répondu à plusieurs questions supplémentaires, de mieux comprendre les modes de partage des ressources entre les deux espèces jumelles d'oreillards.

La conclusion porte sur les recommandations pour la protection des deux espèces et la synthèse des résultats.

Introduction 9 Chapitre 1 : Présentation des espèces

1. P osition systématique et détermination

L’oreillard roux, Plecotus auritus (Linnaeus, 1758) et l’oreillard gris, Plecotus austriacus (Fischer, 1829) sont deux microchiroptères qui font partie de la famille des Vespertilionidae .

Les chauves-souris du genre Plecotus sont facilement identifiables grâce à leurs grandes oreilles vascularisées qui, lorsqu’elles sont dressées, mesurent plus de 30 mm. Ceci correspond environ aux ¾ de la longueur du reste du corps (S CHOBER &GRIMMBERGER 1991).

P. auritus et P. austriacus sont deux espèces de petite taille. La longueur tête + corps de P. auritus est de 42-53 mm et l'envergure est de 245-300 mm. Chez P. austriacus , la longueur tête + corps est de 41- 58 mm et l'envergure de 240 à 300 mm. Le poids des deux espèces oscille entre 6 et 14 g (Tab 1.1).

Plecotus auritus Plecotus austriacus Longueur tête + corps 42 - 53 mm 41 - 58 mm Longueur des oreilles 31 - 41 mm 31 - 41 mm Envergure 245 - 300 mm 240 – 300 mm Avant-bras 35,5 - 42,8 mm 36,5 - 43,5 mm Tibia 19,5 - 21,8 mm 18,3 - 21,0 mm Pied 8,2 - 9,7 mm 7,0 - 8,8 mm Poids 6 - 9 g (max 14 g) 6 - 10 g (max 14 g) Tab. 1.1 : Description des Plecotus auritus et Plecotus austriacus selon S TEBBINGS 1970, et D IETZ & VON HELVERSEN 2009.

La distinction entre nos deux espèces d’oreillards n’est pas aisée et nécessite généralement d’avoir l’ en main pour l’identification. Certains critères morphologiques se superposent (Tab. 1.1), il est donc indispensable d’en utiliser plusieurs simultanément (S WIFT 1998). De plus, des variations intraspécifiques peuvent exister en fonction des régions d’Europe. Ainsi, dans les Alpes suisses, où P. auritus , P. austriacus et P. macrobullaris coexistent, la couleur des poils sur le dos et la gorge, la densité et la disposition des poils sur les pieds et les orteils ne permettent pas de séparer les espèces sur le terrain (A SHRAFI et al. 2010).

Swift, dans sa monographie sur les Plecotus publiée en 1998, reprend comme caractères morphologiques discriminants et pratiques la largeur du tragus, la longueur du pouce, le ratio entre la longueur du pouce et la longueur de l’avant-bras, la proportion de la prémolaire P² par rapport à la prémolaire P 4 et la variation de la pigmentation sur les poils dorsaux. M ORETTI &MADDALENA (1994), à l'aide d'une analyse discriminante multivariée réalisée sur des données biométriques, ont proposé comme meilleurs caractères discriminants, par ordre décroissant, la longueur du pouce, la longueur du pied, la longueur de la griffe et du pouce et la longueur de l’avant-bras.

Ci-dessous, le tableau 1.2 reprend les critères discriminants entre P. auritus et P. austriacus mentionnés dans la littérature.

Chapitre 1: Présentation des espèces 10 Plecotus auritus Plecotus austriacus Références Longueur du baculum 0,8 mm 0,6 mm T OPAL 1958 repris de S WIFT 1998 Longueur condylo-basale < 15,6 mm > 15,6 mm GREENAWAY & H UTSON 1990 repris de S WIFT 1998 14,3 - 15,6 15,2 - 17,1 DIETZ & VON HELVERSEN 2004 Rapport entre le diamètre < 29 % > 29 % P IECHOKI 1966 1966 repris de des bulles tympaniques et SWIFT 1998 la longueur condylo- basale MENU 1983 Longueur C - M³ < 5,6 mm > 5,6 mm CORBET 1964 5,0 – 5,8 mm 5,4 – 6,5 mm DIETZ & VON HELVERSEN 2004 < 5,6 mm > 5,7 mm ARTHUR & L EMAIRE 2009 Longueur C – M 3 < 6,2 mm > 6,2 mm C ORBET 1964 Rapport (%) entre la P² et 50 % < 50 % S WIFT 1998 remis en cause par la P 4 MENU 1993 Largeur tragus < 5,5 mm > 5,5 mm STEBBINGS 1986 SCHOBER & G RIMMBERGER 1991 4,4 – 5,5 mm 5,2 – 6,6 mm DIETZ & VON HELVERSEN 2004 Forme du tragus Étroite et en forme de Bord antérieur étroit et SCHOBER & G RIMMBERGER 1991 lance bord postérieur large STEBBINGS 1967 STEBBINGS 1986 Pigmentation du tragus Blanc jaune avec des Gris noir, presque depuis SCHOBER & G RIMMBERGER 1991 pigments gris à la base DIETZ & VON HELVERSEN 2004 l’extrémité Tragus non noir Longueur du pouce > 6 mm < 6 mm PIECHOKI 1966 repris de S WIFT 1998 MORETTI & M ADDALENA 1994 > 6,5 mm < 6,5 mm SCHOBER & G RIMMBERGER 1991 DIETZ & VON HELVERSEN 2004 ARTHUR & L EMAIRE 2009 Longueur de la griffe 2,5 – 3 mm SCHOBER & G RIMMBERGER 1991 > 2 mm < 2 mm MORETTI & M ADDALENA 1994 ARTHUR & L EMAIRE 2009 Formule de Corbet : Y ≅≅≅ 17 % Y ≅≅≅ 14 % CORBET 1964 Y = Pouce / Avant bras Formule de Masson : Y > 1 Y < 1 M ASSON 2001 Y = (0,82 x long. pouce) - (0,63 x larg. tragus) Pigmentation de la peau Rose, couleur chair « Sale », gris noir S TEBBING 1967 sur le nez JORIS 1980 Sans gris ni noirs DIETZ & VON HELVERSEN 2004 Masque sombre autour des Absent Présent SCHOBER & G RIMMBERGER 1991 yeux ARTHUR & L EMAIRE 2009 Coussinet sur la lèvre Coussinet glabre, Pas de coussinet D IETZ & VON HELVERSEN 2004 inférieure brillant et non ARTHUR & L EMAIRE 2009 pigmenté Protubérance entre les Saillie au-dessus de Petite protubérance DIETZ & VON HELVERSEN 2004 yeux l'œil importante. Diam : inférieure au diamètre des ARTHUR & L EMAIRE 2009 1,5-2 mm yeux Forme du museau vu de Court et boursouflé, Plus allongé et plat, en ARTHUR & L EMAIRE 2009 profil comme un boxeur forme de tête de chien Couleur du pelage dorsal Brun clair, brun, brun Gris, gris brun, gris noir, STEBBINGS 1967 roux. Gris pâle chez les noir JORIS 1980 jeunes SCHOBER & G RIMMBERGER 1991 DIETZ & VON HELVERSEN 2004 Répartition de la Bande de coloration Répartition uniforme de la GREENAWAY & H UTSON 1990 pigmentation sur les poils plus claire à la base et pigmentation des poils dorsaux au sommet des poils

Chapitre 1: Présentation des espèces 11 Couleur du pelage ventral Brun crème, jaunâtre Blanc gris J OORIS 1980 sans limite claire GREENAWAY & H UTSON 1990 DIETZ & VON HELVERSEN 2004 ARTHUR & L EMAIRE 2009 Longueur du pied (mm) > 8 < 8 M ORETTI & M ADDALENA 1994 DIETZ & VON HELVERSEN 2004 ARTHUR & L EMAIRE 2009 Longueur des poils sur les Longs poils sur les Poils courts à peine DIETZ & VON HELVERSEN 2004 pieds et orteils pieds et orteils visibles à l’œil nu ARTHUR & L EMAIRE 2009 Forme du pénis Rétréci à l’extrémité Enflé à l’extrémité S CHOBER & G RIMMBERGER 1991 DIETZ & VON HELVERSEN 2004 ARTHUR & LEMAIRE 2009 Tab. 1.2 : Critères morphologiques caractérisant les P. auritus et P. austriacus .

Fig. 1.1 : Comparaison de critères morphologiques chez P. auritus et P. austriacus . 214 et 217 : Couleur de la peau, des oreilles et du tragus. Présence absence de la saillie au-dessus de l’œil. 215 et 218 : Absence / présence d’un coussinet triangulaire lisse sur la lèvre inférieure. 216 et 219 : Forme et coloration du tragus. 229 et 232 : Longueur du pouce et de la griffe. 230 et 233 : Présence / absence de longs poils sur le pied et les orteils. 231 et 234 : Forme du pénis. Extrait modifié de la clé d’identification illustrée des chauves-souris d’Europe, par D IETZ & VON HELVERSEN 2004.

Chapitre 1: Présentation des espèces 12 2. D istribution des Plecotus dans le monde et en Europe

Le genre Plecotus , Goeffroy Saint-Hilaire 1818 occupe la zone paléarctique ; il est commun et largement distribué dans la zone tempérée de l’Eurasie (H ANAK 1966, C ORBET 1978, T UMLISON & DOUGLA 1992). On le retrouve également sur la partie nord du continent africain, sur la ceinture côtière qui s’étale du Sénégal à l’Éthiopie, en passant par le bassin méditerranéen (K IEFER 2007). Au moins une espèce du genre est présente en Asie, à Taiwan, au Népal et en Inde (Y OSHIYUKI 1991 repris de S WIFT 1998).

En Europe, durant la première moitié du 20 ième siècle, on considérait qu’une seule espèce était présente, l'oreillard roux ( P. auritus ). L’oreillard gris ( P. austriacus ), bien qu'initialement décrit par Fischer en 1829, n’a été reconnu comme espèce à part entière que dans les années soixante (B AUER 1960, C ORBET 1964, S TEBBINGS 1966). En Belgique, suspectée dès 1966 par De Block, la publication par D E BLOCK & D OUCET (1974) de la découverte d’un cadavre de P. austriacus (24 janvier 1971, Cul des Sarts, Province de Namur) identifié par V. Aellen date de 1974. F AIRON (1975) confirmera par la suite la présence de l’espèce à Bruxelles et dans les provinces du Brabant, Namur et Hainaut par l’examen de spécimens conservés à l’IRSNB.

En Europe, on compte maintenant au moins 6 espèces 1 de Plecotus ( www.faunaeur.org ) dont trois ont été décrites depuis le début des années 2000 grâce au développement de techniques bio-moléculaires comme le séquençage de l’ADN mitochondrial. L’oreillard montagnard, Plecotus macrobullaris 2, synonyme de Plecotus alpinus est décrit simultanément par K IEFER et al. (2002) et S PITZENBERGER et al. (2002). L’oreillard de Sardaigne, Plecotus sardus est décrit par M UCEDDA et al. (2002) et l’oreillard des Balkans, Plecotus kolombatovici est maintenant reconnu comme une espèce à part entière (S PITZENBERGER et al. 2001, K IEFER et al. 2002). On retrouve également Plecotus teneriffae endémique des îles Canaries (I BANNEZ & F ERNANDEZ 1986). Dans la péninsule ibérique, P. auritus begognae , mériterait également le statut d'espèce selon J USTE et al. (2004). La découverte de nouvelles espèces de Plecotus dans les années à venir est plausible (K IEFER 2007). L'utilisation conjointe de techniques moléculaires et de l'étude de la morphologie ont conduit S PITZENBERGER et al. (2006) à estimer qu'il existerait au moins 19 espèces cryptiques parmi le genre Plecotus .

Selon J USTE et al. (2004), on distingue dans la partie ouest du paléarctique deux clades qui se sont divisés, comme chez les espèces du genre Myotis, au Pliocène il y a 5 Mo d'années. Ces deux clades se sont ensuite subdivisés en sous-groupes. Le groupe « auritus », qui inclut P. auritus et son taxons sœur P. macrobullaris , tandis que l'autre clade reprend le groupe « austriacus » et ses deux taxons sœurs, P. teneriffae et P. kolombavitci. PESTANO et al. (2003), J USTE et al. (2004), K IEFER (2007) ont confirmé par la suite que P. teneriffae est bien issu de l’évolution insulaire d’un P. austriacus. L'oreillard de Sardaigne ( P. sardus ) serait par contre un taxon sœur du groupe des « auritus ».

P. auritus est une espèce eurasiatique, largement répandue de l’Europe de l’ouest jusqu'à l’Oural et aux montagnes du Caucase (Fig. 1.2). On le retrouve du sud de la Scandinavie au bord de la Méditerranée, en Sardaigne mais pas en Corse. Il ne serait pas présent dans le sud de la péninsule ibérique. Il s’étend également en Mongolie, en Chine, au Japon et dans certaines parties de l’Inde. (C ORBET 1978, M ITCHELL -J ONES et al. 1999, K IEFER 2007).

P. austriacus est réparti de l’Atlantique jusqu'à l’Oural et atteint le nord de l’Afrique (Fig. 1.3). Dans cette région, son statut reste peu clair, de nouvelles espèces sont décrites (K RUSKOP &

1Plecotus auritus, Plecotus austriacus, Plecotus teneriffae, Plecotus macrobullaris, Plecotus sardus, Plecotus kolombatovici. En Afrique du Nord : Plecotus gaisleri (Maghreb) et l’oreillard d’Hemprich, Otonycteris hemprichii. On mentionne également, en Autriche, P. microdontus qui proviendrait de P. auritus. (S PITZENBERGER et al., 2002). 2Plecotus macrobullaris comportent deux sous groupes qui pourraient comporter d'autres espèces cryptiques (K IEFER 2007).

Chapitre 1: Présentation des espèces 13 LAVRENCHENKO 2000, J USTE et al. 2004, S PITZENBERGER et al. 2006, M AYER et al. 2007). Vers le nord, il se limite au sud de l’Angleterre et de la Suède (M ITCHELL -J ONES et al. 1999, K IEFER 2007).

Dans la plupart des régions d'Europe, P. auritus est considéré comme une espèce qui occupe les régions de plus haute altitude, jusqu'à 1100 m au-dessus du niveau de la mer (valeur modale à 600 m), tandis que P. austriacus est limité aux régions moins élevées, jusqu'à 400 m (valeur modale à 300m) (K IEFER 2007).

En Belgique, nous nous trouvons au cœur de l’aire de répartition de P. auritus , mais en limite nord de celle de P. austriacus.

P. auritus est considéré comme une espèce commune en Belgique tandis que P. austriacus serait rare à très rare dans le nord du pays et au Grand-Duché de Luxembourg (V ERKEM et al . 2003, A RTHUR & LEMAIRE 2009). Les deux espèces sont répandues en Région Wallonne mais P. austriacus semble plus rare en Ardenne (Fig. 1.4). Vu de la difficulté de différentiation des Plecotus, ces données doivent-être interprétées avec précaution.

Fig. 1.2 : Répartition de Plecotus auritus en Europe. Fig. 1.3 : Répartition des Plecotus austriacus en Europe. Source : Agence européenne pour l’environnement, Source : Agence européenne pour l’environnement, selon M ITCHELL -J ONES et al. 1999. selon M ITCHELL JONES et al. 1999.

Fig. 1.4 : Localisation des données estivales de P. auritus et P. austriacus en Région Wallonne. Sources des données : SPW/DGO3/Demna et GT Plecotus (Natagora).

Chapitre 1: Présentation des espèces 14 3. E co-éthologie

3.1 Gîte estival

L’utilisation des gîtes est importante pour les chauves-souris : ils procurent une protection contre les conditions climatiques, la prédation et sont le foyer où les jeunes naissent et sont élevés. Les Plecotus sont sans conteste deux espèces anthropophiles, mais peut-être à des degrés différents (H ORACEK 1975).

P. auritus utilise régulièrement les greniers de maisons anciennes, d’églises ou de granges (S WIFT 1991). Les gîtes ne sont pas choisis au hasard. La proximité d’arbres, de cours d’eau et de massifs boisés influence la sélection du gîte. La température dans le gîte est aussi un facteur important, les bâtiments plus chauds, qui ont une meilleure capacité à retenir la chaleur, sont sélectionnés (E NTWISTLE et al. 1997). Les cavités dans les arbres sont également utilisées comme gîtes de mise bas (B AUER 1960, F LUCKIGER &BECK 1995) ce qui correspondrait à son gîte originel (HORACEK 1975). On le retrouve également fréquemment dans les nichoirs placés en milieu forestier (e.a. B OYD & STEBBINGS 1989). S WIFT (1998) émet l’hypothèse d’une utilisation plus intensive des bâtiments lorsque la latitude augmente afin d’obtenir suffisamment de chaleur pour la production et l’élevage des jeunes. E NTWISTLE (1994) a mesuré des températures journalières moyennes dans le gîte de maternité comprises entre 6,3°C et 40,6°C.

En région méditerranéenne, P. austriacus est une espèce qualifiée de «cave-dwelling». Après son expansion vers l’Europe centrale, durant le Néolithique 3, l’espèce a colonisé les bâtiments, en particulier les greniers (H ANAK 1969, H ORACEK 1975). Ces gîtes sont occupés de la fin avril à la fin septembre mais il n’est pas rare d’y observer des individus après le mois de novembre (S TEBBINGS 1970, S CHEUNERT et al. 2009, obs. pers. ).

Lorsqu'elles sont établies dans des bâtiments, la taille des colonies est généralement de 30 à 50 individus (maximum 80) pour P. auritus (E NTWISTL E et al. 2000) et de 10 à 100 pour P. austriacus (H ORACEK 1975, R USSO &JONES 2002).

Dans le gîte, les deux espèces occupent souvent la poutre faîtière, tout comme les espaces libres dans les mortaises, entre les chevrons ou dans le creux des linteaux. On peut aussi les observer en grappes sur les murs ou pendant librement, seuls ou en petits groupes, accrochés sous la charpente de la toiture.

Des gîtes secondaires, situés à proximité des terrains de chasse, sont aussi utilisés temporairement, probablement pour des raisons de thermorégulation ou peut-être pour diminuer le niveau d’infestation par des parasites (E NTWISTLE 1994, SWIFT 1998). Comme pour les gîtes principaux, ce sont des greniers d’habitations, des hangars, etc. qui sont utilisés.

Extrait du rapport Eurobat de M ARNELL &PRESETNIK (2010), une synthèse de l’importance des bâtiments épigés pour les deux espèces est présentée ci-dessous (Tab. 1.3).

Château/ Église Maison/ Grange/ Pont Arbre fortification immeuble écurie P. auritus + + + + + + + + / + + P. austriacus + + + + + + + + / + Tab. 1.3 : Pourcentage de pays signataires de l'espace EUROBATS où des espèces de chauves-souris dépendent fortement des gîtes épigés. Forte dépendance dans : 1 – 20 % des pays (+) ; 21-40 % (++) ; 41 – 60 % (+++). Repris de M ARNELL &PRESETNIK (2010), Eurobat, www.eurobats.org .

3 -7000 à –2500 av. J-C., idem pour Myotis myotis, Myotis emarginatus, Rhinolophus hipposideros

Chapitre 1: Présentation des espèces 15 L'utilisation conjointe d'un gîte par deux espèces du genre Plecotus n'est pas rare. Des cas de syntopie sont connus entre P. auritus et P. austriacus (S TEBBINGS 1966, B ECK &SCHELBERT 1994, J ANSSENS com. pers. ), entre P. marcrobullaris et P. auritus (A SHRAFI et al. 2011), entre P. macrobullaris et de P. kolombavici (T VRTKOVIC et al. 2005), ainsi qu’entre P. kolombavici e t P. austriacus (T VRTKOVIC et al. 2005).

3.2 Gîte hivernal

Les chauves-souris des zones tempérées sont des animaux hétérothermes qui font face à une chute des températures et à un déficit de nourriture en hiver (e.a. R ANSOME 1990). Sédentaires, pour y faire face, les Plecotus entrent en léthargie entre octobre et décembre, jusqu’en mars-avril. Ils occupent alors des sites d’hibernation où la température est inférieure à 6-7°C et l’hygrométrique proche de la saturation (H ARMATA 1973 repris de S WIFT 1998, W EBB et al. 1995). La période de léthargie est cependant entrecoupée de réveils fréquents. Les Plecotus sont réputés pour rester davantage actifs en hiver et pour changer de site plus fréquemment que la plupart des autres chauves-souris européennes (H AYS et al. 1992).

Les sites d’hibernation des deux Plecotus sont localisés dans des grottes, caves, abris sous roche, failles rocheuses, anciennes glacières, anciennes carrières, mines, dans les interstices entre les briques des tunnels ferroviaires, les trous d’arbre, éboulis rocheux mais les publications concernent essentiellement les P. auritus . En Pologne, les caves situées à l'extérieur ou sous les bâtiments sont des sites d’hibernation pour les deux espèces de Plecotus (L ESINSKI et al. 2004). En Bohême, P. auritus utilise des galeries plus froides (+ 2 à + 7°C), plus larges où il s’enfonce profondément dans les fissures. Par contre, P. austriacus est retrouvé dans des galeries plus étroites ou la température est légèrement plus élevée (+ 2 à + 9°C) et moins constante (D AAN &WICHERS 1968, S TEBBINGS 1970, HARMATA 1985).

3.3 Cycle de vie

Le cycle de vie des oreillards suit celui des espèces de chauves-souris des zones tempérées (R ACEY 1982, S WIFT 1998, E NTWISTLE et al. 1998, R ACEY &ENTWISTLE 2000). Après la léthargie hivernale, les oreillards réintègrent leur gîte au printemps, entre la fin avril et la mi-mai pour former une colonie de mise bas. Les femelles en gestation depuis le début du printemps mettent bas un unique jeune entre la fin juin et la mi-juillet. Les femelles allaitent environ jusqu'à la mi-août, ce qui correspond, chez les mâles, à la fin de la spermatogenèse (E NTWISTLE et al. 1998). Les jeunes sont alors capables d'effectuer leur premier vol. En septembre, la colonie se disperse et les oreillards sont moins faciles à observer. Ils constituent des plus petits groupes dans le gîte d'été, dans des gîtes secondaires, dans les sites d'hibernation ou peuvent se rassembler en nombre sur les sites de swarming 4. La période d’œstrus s'étend surtout de l'automne à l'hiver mais l'ovulation, la fécondation et la gestation est différée jusqu'au printemps. Chez P. auritus , on observe encore des accouplements en février-mars alors que chez P. austriacus la période serait limitée à l'automne (H ORÀCEK 1975, STEBBINGS 1970).

3.4 Déplacements

D'après les résultats de recaptures de Plecotus bagués en République Tchèque et en Slovaquie entre 1948 et 2000, 35 déplacements de P. auritus ont été enregistrés. Plus de 75 % des mouvements étaient

4Le terme swarming ou essaimage désigne les rassemblements importants de chauves-souris qui ont lieu quelques mois avant la période d'hibernation. Un site de swarming est un site d'hivernage potentiel où l'activité des chauves-souris augmente de façon importante à la fin de l'été et durant l'automne (V EITH et al . 2004). Ces sites peuvent accueillir simultanément des centaines d'individus, en provenance de régions parfois éloignées et d'espèces différentes, dont la majorité des mâles sont sexuellement actifs.

Chapitre 1: Présentation des espèces 16 inférieurs à 20 km, le maximum étant de 77-88 km. Chez P. austriacus , 36 déplacements ont été enregistrés. La moitié était éloignée de moins de 20 km de l'endroit de capture, le record étant de 61 km enregistrés chez un jeune mâle recapturé un an après avoir été bagué (G AISLER et al. 2010). ARTHUR &LEMAIRE (2009) renseignent une distance maximale de près de 100km et 62km pour, respectivement, P. auritus et P. austriacus.

3.5 Structure des populations, échange de gènes

Chez les chauves-souris, les colonies de mise bas sont des petits groupes d'individus qui peuvent être en relation avec d'autres colonies voisines, qui sont elles-mêmes éventuellement en connexion avec d'autres colonies, formant ainsi des sous-populations de taille plus importante. Les populations s'organisent ainsi à différents niveaux hiérarchiques, jusqu'à regrouper tous les individus de l'espèce. La façon dont ces différents niveaux hiérarchiques s'organisent s’appelle la structure des populations (D IETZ et al . 2009).

Quelle est l'importance des échanges de gènes entre colonies ? Quel est le degré de parenté qui lie les oreillards d'une même colonie ?

L'observation directe d'oreillards roux bagués (capture-marquage-recapture) indique que les mâles et les femelles montrent un haut degré de fidélité à leur gîte de mise bas. E NTWISTLE et al. (2000), après avoir bagué 1365 P. auritus provenant de 30 gîtes (Écosse), ont pu recapturer 720 oreillards sur une période de 15 ans. Seuls 5 P. auritus (1 %) avaient changé de colonie pour s'établir à seulement 300 m de la colonie d'origine. De même, des combles sont occupés depuis parfois plus de 30 ans (B URLAND et al. 2001).

Cependant, chez les chauves-souris des zones tempérées, l'observation directe n'est pas aisée lorsqu’en fin de saison, les chauves-souris quittent le gîte de mise bas pour regagner leurs sites de reproduction et d'hivernage. Il est ainsi impossible de savoir dans quelle mesure des individus appartenant à des colonies différentes se reproduisent entre eux.

Dès le milieu des années 90, le développement de la génétique moléculaire fut toutefois une opportunité permettant de mieux comprendre la structure des populations de chauves-souris.

En étudiant des marqueurs ADN (micro-satellites) provenant de 20 colonies écossaises d'oreillards roux, B URLAND et al. (1999) ont ainsi pu démontrer l’existence d'un flux de gènes important entre les différentes colonies, suggérant des populations pratiquement panmictiques 5. Cette découverte parait contradictoire avec les résultats du baguage (E NTWISTLE et al. 2000), qui ont montré que les échanges entre colonies devaient être très rares (« natal phylopatry »). Les résultats de l'observation directe (baguage) et indirecte (ADN) ne sont en réalité pas contradictoires. En effet, cela s'explique par l'existence d'échanges de gènes avec des individus extérieurs à la colonie de mise bas (« extra-colony copulation ») et non par une dispersion des jeunes vers d'autres colonies (« male or female natal dispersal 6 »). L'étude a également montré qu'il existe une corrélation négative entre le niveau de flux de gènes et l'éloignement géographique qui sépare les colonies (isolation par la distance). Ceci confirme que l'oreillard roux n'est pas une espèce migratrice mais qu'elle reste généralement à proximité de son gîte d'été durant toute l'année. Ces découvertes suggèrent donc qu'il faut considérer les colonies de mise bas comme des sous-populations distinctes. Cette caractéristique, similaire à celle des rongeurs, est expliquée par des contraintes liées à la morphologie des ailes et le type de vol, lent et papillonnant, des oreillards, qui ne leur permettraient pas d'effectuer de longs déplacements.

5 Panmictique se dit d’une population où tous les individus peuvent se croiser au hasard (D ANNEWITZ et al . 2005). 6 Cette étude est cependant contredite par les résultats de H EISE &SCHMIDT 1988 (Allemagne) qui montre que les jeunes mâles quittent la colonie et ne sont pas des membres « permanents ».

Chapitre 1: Présentation des espèces 17 Une autre caractéristique des Plecotus , rare parmi les chauves-souris des zones tempérées, est l’absence de ségrégation sexuelle dans les colonies d'été, des mâles adultes pouvant être présents dans les colonies de mise bas (S TEBBINGS 1970, H ORACEK 1975, S PEAKMAN et al. 1991, PARK et al. 1998, ENTWISTLE et al. 2000, S CHEUNERT et al. 2009, obs. pers .). Ceci constitue une occasion idéale pour l'étude des relations de parentalité entre les membres d'une colonie. B URLAND et al. (2001) et V EITH et al. ( 2004) ont ainsi confirmé qu'il existait un lien de parenté étroit entre les membres d'une colonie, une partie des mâles et les femelles restant fidèles à leur colonie de mise bas. Par contre, la plupart des jeunes ne descendent pas des mâles avec qui ils partagent la colonie. Ceci confirme donc les premiers résultats de B URLAND et al. (1999). Les échanges de gènes ont lieu avec des individus qui n'appartiennent pas à la colonie de mise-bas. Les risques de consanguinité semblent donc être évités par la copulation extra-coloniale.

Les échanges de gènes entre colonies ont donc été démontrés, mais se pose alors la question de savoir où se déroulent les échanges de gènes ? Les Plecotus n'effectuent pas de migration et la faible mobilité de l'espèce suggère que les échanges de gènes sont possibles uniquement entre colonies géographiquement proches.

Les sites de swarming utilisés en automne, quand des centaines de chauves-souris se rassemblent devant un site d'hibernation, ont été récemment présentés comme « hot-spot » permettant un brassage des gènes entre différentes populations. En République Tchèque, P. auritus fait d'ailleurs partie des espèces les plus fréquemment capturées au filet sur les sites de swarming, particulièrement en mars et d’août à octobre (R EITER et al. 2010).

L'importance des sites de swarming pour le brassage des gènes entre différentes populations de P. auritus fut démontrée par la suite, à la fois par V EITH et al. 2004 et F URMANKIEWICZ &ALTRINGHAM 2007. Cependant, la proportion de femelles inséminées sur les sites de swarming reste faible (14 %), ce qui suggère que les accouplements dans les sites hivernaux contribueraient également au brassage des gènes (V EITH et al. 2004).

En conclusion, les colonies estivales de P. auritus se caractérisent par une fidélité importante des mâles et des femelles au gîte de mise bas, le caractère mixte des colonies et l'isolement des colonies d'été entre elles, qui pourraient être considérées comme des sous-populations. Dans une colonie, il existe un degré de parenté élevé entre les femelles et les mâles adultes, mais la plupart des jeunes ne descendent pas des mâles avec qui ils partagent la colonie. Malgré l'isolement estival des colonies entre elles, la consanguinité est évitée, non pas par la dispersion des jeunes mâles ou femelles, mais par un brassage de gènes important entre les différentes colonies. Ce brassage se produit en partie lors des rassemblements sur les sites de swarming et, probablement, lors de la reproduction hivernale.

3.6 Utilisation de l’habitat

Les deux espèces d'oreillards sont réputées pour chasser à proximité de leurs gîtes (S WIFT 1998). Les études par radiopistage en Allemagne montrent que l'éloignement de terrains de chasse de P. auritus par rapport au gîte diurne ne dépasse pas quelques centaines de mètres (A RNOLD 1999, E ICHSTAD 1995 repris de MESCHEDE &KELLER 2003) et reste généralement inférieur à 1500m. Les distances maximales séparant les gîtes des terrains de chasse montrent cependant que les oreillards sont capables de parcourir plusieurs kilomètres (F UHRMANN &SEITZ 1992).

Au départ du gîte, les deux espèces d’oreillards utilisent des éléments linéaires tels que des haies, des bandes feuillues, des ripisylves... On peut également les observer en vol rapide le long de murs. Ces éléments linéaires pourraient leur permettre de se diriger dans leur environnement, de se protéger contre les prédateurs volants mais peuvent également constituer des habitats riches en proies.

P. auritus exploite une large variété d'habitats, les milieux forestiers stratifiés, y compris les forêts de résineux, les lisières, les vallées alluviales, les vergers, les parcs, les jardins, ect., semblant donc

Chapitre 1: Présentation des espèces 18 préférer les habitats boisés. En Allemagne, 8 P. auritus suivis par radiopistage ont passé 55 % du temps sous des pinèdes pauvres en sous étage et 29 % dans des forêts denses ; le reste du temps dans des jardins, le long de routes, dans des vergers (FUHRMANN &SEITZ 1992). L’oreillard roux est ainsi classé comme l'espèce la plus commune dans les forêts de Bavière et du Bade-Wurtemberg (K ULZER 1989 repris de M ESCHEDE &KELLER 2003). En Écosse, le suivi de 16 P. auritus provenant de 6 gîtes a pu confirmer la préférence pour les milieux boisés : les terrains de chasse étaient situés soit en milieu boisé, soit autour d'arbres isolés (E NTWISTLE et al . 1996). En Irlande, pays pauvre en forêts, H OWARD (1995) classe cependant cette espèce comme chasseur sur des prairies primaires.

La figure 1.5 illustre les différents types de bois qui ont été utilisés lors de l'étude d’ENTWISTLE et al . 1996.

45 40 35 30 25 20 15 10 5 0 % du%temps detotalvol Bouleaux Conifères indigènes Lisières mixtes Feuillus matures Bois mixtes Bordures de plantations

Fig. 1.5 : Pourcentage du temps de vol passé dans les différents types de bois (65 nuits de suivi, 16 P. auritus ), repris de E NTWISTLE et al. 1996.

L'utilisation de l'habitat par P. austriacus est moins connue. On le retrouve aussi bien dans les jardins, les vergers, le long des routes et des lisières forestières, mais aussi au-dessus des prairies, dans les bâtiments et même autour des réverbères, attiré par les papillons nocturnes (B AUEROVA 1982). Plus rarement, on le retrouve également en milieu forestier (B AUEROVA 1982, B ARATAUD 1990, FLÜCKIGER & B ECK 1995). F LÜCKIGER &BECK 1995, dans le Jura suisse, lors du suivi d'un individu par radiopistage, l'ont observé chasser aussi bien dans le confinement de la végétation qu'en plein air au-dessus de zones ouvertes. La figure 1.6 synthétise les résultats du suivi par radiopistage de 9 P. austriacus par K IEFER &VEITH (1998).

30

25

20

15

10

5

0

% des% terrains dechasse Bois mixtes Prés arborés Jachères Bois feuillus Vergers et jardins Prairies Divers

Fig. 1.6 : Nature des terrains de chasse exploités par P. austriacus en Allemagne (65 nuits de suivi, 9 P. austriacus ), repris de K IEFER &VEITH 1998.

Chapitre 1: Présentation des espèces 19 3.7 Régime alimentaire et techniques de chasse

Le régime alimentaire de P. auritus a été bien étudié par l'analyse fécale (S WIFT &RACEY 1983, RYDELL 1989b, S HIEL et al. 1991, T AAKE 1992, B ECK 1995, A SHRAFI et al. 2011). Bien que les résultats soient exprimés sous des formes différentes (volume relatif, occurrence relative, fréquence relative), la figure 7 fournit un aperçu global du régime alimentaire et illustre les variations géographiques. Les avantages et inconvénients des différents modes d'expression des résultats du régime alimentaire des chauves-souris ont été présentés par W HITAKER (1988). Le régime alimentaire de P. auritus se compose majoritairement de Lépidoptères, de Diptères, de Coléoptères et de proies diurnes comme certains Diptères (ex : Scatophaga stercoraria ) ou non volantes comme des Dermaptères et des Arachnides.

P. auritus utilise régulièrement des reposoirs pour décortiquer les proies trop volumineuses avant de les ingérer. Ce sont presque exclusivement des ailes de Lépidoptères qui y sont retrouvées (R OER 1969, K RAUSS 1978, T HOMPSON 1982, R OBINSON 1990, M EINEKE 1992, R OSTOVSKAYA et al. 2000, BARATAUD com.pers. ). L'identification des ailes de Lépidoptères apporte un complément d'information en permettant une identification des proies jusqu'à l'espèce, ce que l'analyse fécale ne permet pas. H OWARD (1995) a synthétisé les résultats de 6 études sur l’identification de restes de proies collectées sous des reposoirs utilisés par P. auritus : plus de 90 % des ailes proviennent de la famille des Noctuidae, principalement Noctua pronuba . Les Arctiidae et les Geometridae sont, bien après les Noctuidae, les familles les plus souvent identifiées.

P. auritus utilise deux techniques pour capturer ses proies : la capture en plein vol et le glanage, un peu à la manière d'un colibri, sur le feuillage, les troncs, voire occasionnellement au sol (S HIEL et al. 1991). L'estimation de la proportion de proies capturées par glanage varie, selon les auteurs, entre 40 et 58 % (R YDELL 1989b, A NDERSON &RACEY 1991, S WIFT 1998). A NDERSON &RACEY (1991), lors d'une étude sur le comportement alimentaire de P. auritus en captivité, ont montré que 56 % des papillons capturés l'étaient par glanage contre 44 % en plein vol. S WIFT (1998) considère que la plupart des Coléoptères, ainsi que la moitié des Trichoptères sont également capturés par glanage.

Le régime alimentaire de P. austriacus est moins connu. Il a été étudié par analyse fécale par BAUEROVA (1982), B ECK (1995), K IEFER (1996) et A SHRAFI et al. 2011. En République Tchèque (B AUEROVA 1982) et en Suisse (B ECK 1995), ils consomment intensivement les Lépidoptères et secondairement les Diptères et Coléoptères (Fig.1.7 et 1.8). A titre indicatif, en Israël, l'analyse de 5 déjections provenant d'un individu capturé au filet a montré qu'elles contenaient exclusivement des restes Lépidoptères (W HITAKER 1994).

L'analyse de restes de proies collectées sous des reposoirs utilisés par des P. austriacus montre, que ce soit en République Tchèque ou en Allemagne (Basse-Saxe), que les Lépidoptères sont largement dominants. A partir des restes d'ailes, B AUEROVA (1982) a identifié 137 espèces, dont la majorité étaient des Noctuidae (n = 98), suivis par des Notodontidae (n = 14), des Geometridae (n = 13) et des Arctiidae (n = 4). De même, en Allemagne, C ASTOR et al. (1993) ont identifié 40 espèces de Noctuidae, 2 espèces de Geometridae et 2 espèces d'Arctiidae. Toujours en Allemagne, M EINEKE (1992) a collecté des restes de proies provenant de 17 localités (5 colonies de P. auritus , 5 colonies de P. austriacus et 7 colonies de Plecotus sp ). Sur les 1424 restes de proies, 1415 sont des ailes de Lépidoptères. Soixante-six espèces appartenant à 11 familles ont été identifiées. Les Noctuidae, Nymphalidae et Hepialidae représentent 97 % des occurrences. Les trois espèces de Noctuidae les plus fréquentes sont Noctua pronuba , Apamea monoglypha et Autographa gamma . Les deux espèces les plus fréquentes de Nymphalidae sont Inachis Io et Aglais urticae tandis que celles d'Hepialidae sont Hepialus humuli et Triodia sylvina .

Le vol de P. austriacus est aussi très agile mais il n'est pas évident de déterminer la proportion de proies capturées par glanage. Au vu des proies identifiées dans le régime alimentaire, selon BAUEROVA (1982) et B ECK (1995), il serait moins enclin à les prélever sur le feuillage.

Chapitre 1: Présentation des espèces 20 Q Q `:H.J1RV Q !V`I:] V`V Q QCVQ] V`V Q !1] V`::% `V Q !1] 8&VI: QHV`V Q 'V]1RQ] V`V Q (`1H.Q] V`V Q !10V` Q Q 8:%`8 8:%`8 8:%`8 8:%`8 8:%`8 8:% 8 8:% 8

   ` .V 

Fig. 1.7 : Régime alimentaire global de P. auritus (P. aur.) et P. austriacus (P. aust.) reconstitué à partir des publications de S WIFT &RACEY 1983 (UK), R YDELL 1989 (S), S HIEL et al. 1991 (Ir), A SHRAFI et al . 2011 (Che), BAUEROVA 1982 (Czc). Les résultats originaux sont exprimés en % de la surface occupée par les restes identifiés d'un taxon (B AUEROVA 1982), en pourcentage du nombre de fragments identifiés (S WIFT &RACEY 1983), en fréquence relative (S HIEL et al. 1991) et en volume relatif (R YDELL 1989, A SHRAFI et al . 2011).

Q `:H.J1RV Q !V`I:] V`V Q QCVQ] V`V Q !1] V`V Q 'V]1RQ] V`V Q QHQ] V`V Q &V%`Q] V`V Q *7IVJQ] V`V Q !10V` Q Q 8:% `1:H% 8:%`1 %

Fig. 1.8 : Régime alimentaire global de P. auritus (P. aur.) et P. austriacus (P. aust.) en Suisse reconstitué à partir de la publication de B ECK 1995. Les résultats sont exprimés en % du nombre de déjections analysées.

3.8 Détection des proies

Beaucoup d'espèces de chauves-souris consomment de grandes quantités de Lépidoptères. V AUGHAN (1997) cite P. auritus et P. austriacus comme les deux espèces européennes de chauves-souris qui se sont spécialisées dans la consommation des Lépidoptères avec la barbastelle, Barbastellus barbastellus.

Comment les Plecotus détectent-ils les papillons nocturnes ?

D'après l'identification des restes de proies récoltés sous des reposoirs utilisés par des Plecotus, ce sont essentiellement des espèces de la famille des Noctuidea qui sont consommés (e.a. R OBINSON 1990,

Chapitre 1: Présentation des espèces 21 HOWARD 1995...). Cette famille, comme celle des Geometridae, des Notodontidae et des Pyralidae, se caractérise par la présence d'un organe tympanique sur le troisième segment thoracique, en-dessous de l'insertion des ailes (R OEDER 1974, S URLYKKE 1984). Les interactions entre les chauves-souris et les insectes tympaniques, particulièrement les papillons, ont servi d'exemple de co-évolution entre proie et prédateur (R YDELL 1995). La présence d'un tympan permet aux papillons de détecter les ultrasons produits par le prédateur, la chauve-souris, et d'adopter des comportements d'évitement afin d'échapper à la capture. Cette adaptation est particulièrement efficace contre la plupart des chauves-souris de grande et moyenne taille qui capturent leurs proies en plein vol et qui utilisent des ultrasons entre 20- 40 kHz. Les Lépidoptères tympaniques ont moins de risque (environ 40 % en moins) d'être capturés par une chauve-souris qu'un papillon sans organe tympanique (R OEDER &TREAT 1962).

Les oreillards roux ont contrecarré cette stratégie adaptative : la taille de leurs oreilles et leur sensibilité auditive 7 est plus importante que celles des autres espèces de chauves-souris. Les basses fréquences générées par certains papillons en mouvement (0 Hz à 23 kHz) appelé «fluttering » sont suffisantes pour permettre à P. auritus de localiser sa proie et différencier un papillon au repos sur un support d'un papillon en mouvement (C OLES et al. 1989). En volant silencieusement, sans produire d'ultrasons, ou très peu, et en écoutant les sons générés par le déplacement de ses proies, P. auritus est ainsi capable d'exploiter une ressource peu utilisée par les autres espèces de chauves-souris du Paléarctique.

L'ouïe n'est cependant pas le seul sens utilisé pour repérer les proies. Une étude expérimentale en captivité a montré l'importance de la vue chez P. auritus qui est capable de repérer visuellement ses proies lorsque l'intensité lumineuse est d'au moins 4 lux, alors qu'il est incapable de les repérer en utilisant uniquement son sonar (E KLOF &JONES 2003). Le rôle de l'olfaction dans la détection des proies n'est pas connu mais on sait qu'il joue un rôle chez Mystacina tuberculata, une espèce de Nouvelle-Zélande adaptée à rechercher une partie de ses proies au sol, tels que des vers et des larves de Coléoptères (J ONES &RYDELL 2003).

3.9 Sons et ultra-sons

Émis par les narines ou la gueule, les ultrasons produits par les oreillards sont de faible intensité et de faible portée. Le cri est émis en fréquence modulée et montre deux harmoniques. La première, émise en milieu ouvert, se situe de 80 kHz à 40 kHz. La seconde, utilisée en milieu fermé, de 55 kHz à 25-20 kHz chez P. auritus. Chez P. austriacus, les deux harmoniques ne se superposent pas, elles s’étendent de 70 kHz à 38 kHz pour la plus haute et de 35 à 20 kHz pour la plus basse (D IETZ et al. 2009).

Équipé d’un détecteur d’ultrasons, on estime qu’il faut être à moins de 5m de l'oreillard pour pouvoir percevoir ses cris. Chez P. auritus, des cris sociaux émis aux alentours de 12 kHz peuvent cependant être nettement plus puissants, donc plus facilement détectables, et pourraient servir à la communication à longue distance (C OLES et al. 1989).

En pratique, les caractéristiques des ultrasons émis par les deux espèces d'oreillards se superposent en grande partie et sont difficilement différentiable sur le terrain.

Le tableau 1.4 reprend les statistiques descriptives issues de l'enregistrement des ultrasons produits par 26 P. auritus et 55 P. austriacus (R USSO &JONES 2002). Deux cris sont enregistrés par individu, un dans un milieu ouvert et l'autre en milieu plus fermé.

7 Le maximum de sensibilité de P. auritus se situe entre 8 – 18 kHz (C OLES et al. 1989).

Chapitre 1: Présentation des espèces 22 Structure SF (kHz) EF (kHz) FMAXE (kHz) MF (kHz) D (ms) IPI (ms) P. auritus FM 44.7 ± 5.52 26.0 ± 1.60 33.1 ± 4.94 33.0 ± 4.51 2.3 ± 0.73 76.8 ± 38.71 28.0 - 57.8 23.1 - 29.4 25.5 - 42.1 24.7 - 41.8 1.2 - 3.8 21.8 - 172.4 P. austriacus FM 41.4 ± 2.08 23.6 ± 2.87 32.6 ± 8.67 29.8 ± 2.58 3.8 ± 1.36 105.0 ± 32.90 37.6 – 46.5 19.0 – 30.3 26.3 – 60.5 24.7 – 39.2 1.4 – 7.0 35.8 – 194.0 Tab. 1.4 : Identification acoustique de P. auritus (n = 26) et P. austriacus (n = 55). Deux cris sont enregistrés par individu, dans un milieu ouvert et fermé. La moyenne ± écart-type est indiquée au-dessus du range. SF : start frequency, EF : end frequency, FMAXE : frequency of maximum energy, MF : middle frequency, D : duration, IPI : inter-pulse interval. Repris de R USSO &JONES 2002.

3.10 Démographie

Comme la majorité des espèces de chauves-souris des zones tempérées, les femelles d'oreillards donnent généralement naissance à un jeune unique par an (stratégie K). L'investissement en énergie pour la reproduction étant très important, ce trait commun s'expliquerait, d'une part, par le fait que les femelles gestantes doivent garder une certaine manœuvrabilité en vol et, d'autre part, parce que les chauves-souris exploitent des ressources limitées (BARCLAY &HARDER 2003). Mâles et femelles de P. auritus sont sexuellement matures, en général, après le second été mais, chez les mâles, il existe une variabilité en fonction des gîtes étudiés (S TEBBINGS 1966, S PEAKMAN &RACEY 1986, E NTWISTLE et al. 1998).

Une autre caractéristique des chauves-souris, est leur longévité importante. L'espérance de vie à la naissance de P. auritus est estimée à 7 ans pour les mâles et 16 ans pour les femelles, celle de P. austriacus à 5 ans pour les mâles et 9 ans pour les femelles. Le record de longévité de P. auritus est de plus de 30 ans, contre 25 ans chez P. austriacus (S TEBBINGS 1970, A ELLEN 1984, LEHMANN et al. 1992, H ORACEK et al. 2004 repris de D IETZ et al. 2009).

Malgré cette longévité importante, la prédation par les chats domestiques et les collisions avec le trafic routier, particulièrement dans les zones peu éclairées, sont sans conteste des facteurs de mortalité importants chez les oreillards (L ESINSKI 2008, G AISLER et al. 2009, A RTHUR &LEMAIRE 2009). Malgré une très faible représentation des chauves-souris dans le régime alimentaire des rapaces, la prédation exercée, principalement par Strix aluco, Tyto alba, Asio otus et Falco tinnunculus est estimée à 11 % de la mortalité naturelle des chauves-souris au Royaume U nis et pourrait donc également jouer un rôle non négligeable dans la dynamique des populations (S PEAKMAN 2008).

Les autres facteurs de mortalité connus sont le dérangement dans les gîtes d'été (ex : restauration de bâtiments, illuminations extérieures,…) et d'hiver (ex : tourisme souterrain, extension de carrières,…), la compétition pour le gîte avec d'autres espèces (ex : pigeons domestiques), l'intoxication par des pesticides, les parasites et les maladies (K UNZ 1982).

Chapitre 1: Présentation des espèces 23 Chapitre 2 : Régime alimentaire estival

1. I ntroduction

Selon la littérature (voir chapitre 1), le régime alimentaire de P. auritus se compose essentiellement de Lépidoptères ( Noctuidae ), de Diptères, de Trichoptères, de Coléoptères, de Dermaptères et d'Arachnides. C’est une espèce glaneuse : 40 % à 58 % des proies consommées seraient capturées sur le feuillage, sur les troncs, les murs ou encore dans les bâtiments (R YDELL 1989b, A NDERSON & RACEY 1991, S WIFT 1998).

Le régime alimentaire de P. austriacus serait moins varié et se distingue par une consommation plus importante de Lépidoptères ( Noctuidae ), ceux-ci représentant 70 à 90 % des proies consommées, le solde étant dominé par les Coléoptères et les Diptères. L’espèce est capable de glaner ses proies (B ARATAUD 1990) mais elle utiliserait cette technique moins souvent que P. auritus . Le nombre d’études publiées reste cependant faible.

Nos deux espèces de Plecotus coexistent dans une même région et, parfois, dans un même gîte. Nous posons l’hypothèse qu’il existe une différenciation du régime alimentaire entre les deux espèces pour permettre la cohabitation, relâchant la pression de la compétition interspécifique.

Dans ce chapitre, nous voulons répondre à 3 questions :

1. Existe-t-il des variations saisonnières et annuelles ? 2. Le régime alimentaire des P. auritus est-il qualitativement et quantitativement différent de celui des P. austriacus ? 3. En condition syntopique (colonie mixte), le régime alimentaire des P. auritus est-il différent de celui des P. austriacus ?

Pour ce faire, après avoir présenté les sites d'étude et la méthodologie, la présentation des résultats s'articule autour de trois points :

1. La composition du régime alimentaire. 2. Les variations spécifiques, saisonnières et interannuelles indépendamment des conditions de cohabitation (modèle 1). 3. Les variations spécifiques en fonction des conditions de cohabitation (modèle 2).

2. S ites d’étude

Entre 1999 et 2001, 11 colonies de mise-bas (10 colonies monospécifiques et 1 mixte) localisées en Belgique sont concernées par la collecte des déjections. Ces colonies se répartissent de l’Ardenne, pour les colonies les plus méridionales, à la Campine pour les plus nordiques (Fig. 2.1). Elles sont toutes localisées dans les combles d’églises, excepté à Neerpelt, où la colonie de P. auritus est localisée dans les combles du collège St Hubertus.

Le nombre moyen d’oreillards comptés à l’intérieur du gîte, entre mai et septembre, est de 18,6 ± 13,6 (maximum = 66, nombre de comptages = 104). Dans les colonies de P. auritus le nombre moyen

Chapitre 2 : Régime alimentaire estival 24 d’individus est de 19,1 ± 11,8 (maximum = 48, nombre de comptages = 48) et de 18,2 ± 13,6 (maximum = 66, nombre de comptages = 57) dans les colonies de P. austriacus (Tab. 2.1).

La colonie mixte de Pondrôme est constituée, en moyenne, de 26,3 ± 10,5 P. auritus (maximum = 42, nombre de comptages = 20) et de 19,8 ± 12,9 P. austriacus (maximum = 38, nombre de comptages = 21). Lorsqu’ils sont visibles, les individus sont répartis en deux groupes correspondant à leur identité spécifique et situés, l'une à l'extrémité ouest du comble, et l'autre à l'est. Les individus sont observés le long et au-dessus de la poutre faîtière ou sur la pointe des fermes de la charpente. Occasionnellement, des individus peuvent être observés entre les deux grappes. Lors de journées caniculaires, quelques oreillards roux sont également accrochés sur les pignons de pierre (n = 3 : 1/07/1999, 3/07/1999, 3/08/1999).

Fig. 2.1 : Localisation des colonies étudiées.

N moyen N Région naturelle Gîte Abréviation Espèce Ec-t Min-max d’ind. de comptage Baillamont Ba P. auritus 8,7 7,3 8 0 – 22 Ardenne Gozin Gz P. auritus 17,6 10,4 16 0 – 31 Famenne-Calestienne Lovenjoel L P. auritus - - - - Région limoneuse Neerpelt (collège) N P. auritus - - - - Campine Roly Ry P. auritus 10,7 7,5 3 2 - 15 Fagne-Calestienne Pondrôme Pr P. auritus 26,3 10,5 20 0 – 42 Famenne-Calestienne Pondrôme Pg P. austriacus 18,8 12,5 21 0 – 38 Famenne-Calestienne Antheit A P. austriacus 11,9 8,6 8 4 - 33 Région limoneuse Gembes G P. austriacus 15,9 9,7 10 2 – 34 Ardenne Neerpelt (kerk) Nk P. austriacus - - - - Campine Richelle R P. austriacus 12,0 10,5 9 1 – 34 Sillon sambro-mosan Thy T P. austriacus 29,1 19,2 9 0 – 66 Condroz Tab. 2.1 : Résultats des comptages réalisés à l’intérieur du gîte de mai à septembre, entre 15h00 et le coucher du soleil.

Chapitre 2 : Régime alimentaire estival 25 Les proportions des habitats situés autour des gîtes dans un rayon de 1, 2 et 3 km sont présentées ci- dessous (Fig. 2.2). Les colonies implantées en bordure (R) et au nord du sillon sambro-mosan (L, A, NK, N) montrent une proportion d’habitat urbanisé plus importante que les autres colonies (U = 21, z = 2,739, p = 0,006).

Fig. 2.2 : Proportion des habitats disponibles dans un rayon de 1, 2 et 3 km autour des colonies étudiées. Les colonies sont classées par ordre décroissant de la proportion d’habitat urbanisé (source : Corine land-cover 2000, modifié).

3. M éthodologie

Deux bâches plastiques en polyéthylène basse densité de 4m x 5m chacune sont placées en-dessous des colonies dès le début du mois d'avril. La bâche est localisée en fonction de l’emplacement des chauves-souris, de la quantité de déjections déjà présentes au sol et de l’accessibilité de la zone.

De 1999 à 2001, d’avril à décembre, les bâches sont récupérées tous les mois, excepté en 1999 où les deux colonies de Pondrôme et la colonie de P. auritus de Neerpelt ont été suivies plus intensivement.

Une fois récoltées, les déjections d’une collecte sont séchées 2 à 5 jours à l’air libre avant d’être transvasées dans un bocal en verre et entreposées dans un congélateur quelques semaines avant d’être analysées.

Vingt à quarante déjections entières sont choisies au hasard parmi l’échantillon à analyser. Chaque déjection est ensuite placée sur une lame de verre avec quelques gouttes d’eau et disséquée sous un binoculaire (Stereo Microscope XTL-1, 7x à 60x) à l’aide d’une pince brucelles.

Le nombre de déjections à analyser par collecte est vérifié systématiquement par un test graphique portant en abscisse le nombre de déjections examinées et en ordonnée les fréquences relatives des taxons identifiés. Le nombre minimum de déjections à analyser est donné par le nombre de déjections nécessaires pour atteindre un plateau (K ERVYN 2001).

Chapitre 2 : Régime alimentaire estival 26 L’identification des restes de proies se fait par comparaison avec les illustrations des ouvrages de CHINERY (1986), A LBOUY &CAUSSANEL (1990), D UCHATENET (1990), S HIEL et al . (1997), H AUPT & HAUPT (2000) et grâce à la constitution d’une collection de référence d’insectes provenant de terrains de chasse de Plecotus et d’études antérieures sur les chauves-souris (K ERVYN 1995, KERVYN 1996, MOTTE 1997, M OTTE &LIBOIS 2002).

La présence d’une proie est notée pour chaque déjection en fonction des fragments retrouvés, conformément au tableau 2.2 ci-dessous.

Classe Ordre Sous-ordre Famille Espèce Fragments retrouvés Arachnida Araneida Patte Opiliones Patte, chelicerae, ovipositor (femelle) Chilopoda Patte, maxillae et forcipule Insecta Coleoptera Exosquelette fortement sclérotisé Adephaga Carabidae Antenne, patte, mandibule Polyphaga Scarabaeoidea Antenne, aile, patte Amphimallon Antenne, patte, fragments de l’exosquelette solstitialis Aphodius rufipe s Patte, fragments de l’exosquelette Rhizotrogus Patte, fragments de l’exosquelette aestivus Serica brunnea Antenne, patte avec griffe dentée Chrysomelidae Antenne, patte Staphylinidae Antenne, patte Dermaptera Antenne, forceps, patte, fragments d’ailes Forficulidae Forficula Patte auricularia Diptera Cyclorrhapha Tête, antenne Calliphoridae Antenne, fragments d’ailes, patte Scathophagidae Scathophaga Antenne, patte, fragments d’ailes, palpe stercoraria maxillaire. Nematocera Ani so podidae Antenne, patte, fragments d’ailes Chironomidae/ Antenne Ceratopogonidae Culicidae Antenne, fragments d’ailes Mycetophilidae Antenne, fragments d’ailes Tipulidae Haltères, antenne, palpe maxillaire Homopter a Aphidoidea fragments d’ailes Cercopidae Fragments de l’hémélytre, patte Hymenoptera Formicidae Complet Ichneumonidae Antenne, fragments d’ailes, patte Adulte Ecailles, patte Chenille « patte », fragments du prolegs avec crochets Neuroptera Chrysopidae Antenne, fragments d’ailes Hemerobiidae Antenne, fragments d’ailes Psocoptera Fragments d’ailes Trichoptera Antenne, pattes, palpes. Hydropsychidae Fragments d’ailes, patte Tab. 2.2 : Fragments de proies identifiées pour les résultats semi-quantitatifs.

Les proies ont ensuite été regroupées en 9 catégories : Arachnide, Dermaptère, Coléoptère, Tipule, Cyclorrhaphe, autres Diptères, Lépidoptère, Divers et Inconnu.

Dans le texte, lorsque des abréviations seront utilisées, on écrira : Ar = Arachnides ; D = Dermaptères ; Co = Coléoptères ; D sp = Diptères sp. ; D cycl = Diptères Cyclorrhaphe ; D tip = Tipules ; L : Lépidoptères ; Div = Divers ; Inc = Inconnu.

Chapitre 2 : Régime alimentaire estival 27 Les résultats sont exprimés en fréquence relative, ce qui correspond au nombre de déjections contenant la proie divisée par le nombre total d’occurrences dans l’échantillon analysé. Pour les lépidoptères, en raison du nombre important d’écailles dans les déjections, la présence n’est pas prise en compte si on estime que moins de 5 % de la surface de la lame est occupée par des écailles.

Aucun essai n’a été tenté pour estimer la fréquence d'un type de proie dans une déjection ni le pourcentage du volume occupé par une proie car une part importante des fragments ne peuvent être identifiés (R OBINSON &STEBBINGS 1993).

En fonction de la date de la collecte les échantillons ont été répartis dans les catégories estivale, pré- hivernale ou hivernale, en fonction des étapes du cycle de vie d’un oreillard (Fig. 2.3).

1. Estival : proies consommées du 1/04 au 1/10 2. Ph : proies consommées du 1/10 au 1/12 3. H : proies consommées après le 1/12 Avril II Avril I Mai II Mai I Juin II Juin I Juil. II Juil. I Août II Août I Sept II Sept Oct I Oct II I Nov II Nov I Dec II Dec I Jan II Jan I Fev II Fev I Mars II Mars I Avril Période Estivale Pré hibernation Hibernation Femelles Ovulation, gestation Lactation et élevage Accouplement, sw arming, hibernation, déplacements Jeunes Naissance 1er vol (Accouplement) Sw arming, hibernation et déplacements ? Mâles Spermatogenèse Accouplement, sw arming hibernation, déplacements Fig. 2.3 : Cycle de vie annuel simplifié des oreillards.

Les échantillons pré hivernaux et hivernaux ont été traités séparément en raison du plus faible nombre de chauves-souris présentes dans le gîte pendant ces périodes.

3.1 Limites de la méthode

Chez les mammifères, et en particulier les chauves-souris, l'étude du régime alimentaire par l'analyse fécale permet d'obtenir une bonne estimation des proies ingérées, particulièrement pour les catégories de proies les plus communes (R ABINOWITZ & T UTTLE 1982, K UNZ &WHITAKER 1983, D ICKMAN & HUANG 1988). Les limites de la méthode sont un risque de sur évaluation de la proportion des gros insectes ou des insectes dont les fragments résistent mieux à la digestion. Un autre biais réside dans la sous-estimation des proies consommées en première partie de la nuit. En effet, chez les chauves-souris le transit de la nourriture est rapide, entre 25 et 120 min (K OVTUN &ZHUKOVA 1994). Ceci peut avoir pour conséquence une sous-estimation des proies consommées au crépuscule et une sur représentation des proies consommées en fin de nuit. Ce biais est cependant réduit lorsque les chauves-souris rentrent au gîte pendant la nuit comme, par exemple, durant la lactation (voir résultats du radiopistage).

3.2 Échantillonnage

Cent trente échantillons provenant de 11 colonies (4688 déjections, 6388 occurrences) sont pris en compte dans l’analyse du régime alimentaire estival. On trouvera dans l’annexe 1 la répartition des dates de collectes pour chaque colonie en fonction du mois et des années. Les 130 échantillons ont été reclassés en fonction du mois et de la période du cycle de vie (Tab. 2.3 et 2.4).

L’écart moyen entre deux collectes est de 29,1 ± 11,9 jours pour l’ensemble des Plecotus . La périodicité des collectes n’est pas différente entre les P. auritus (moyenne = 27,3 ± 11,5, n = 51) et les P. austriacus (moyenne = 30,6 ± 12,1, n = 61) (U = 51, z = 1,006, p = 0,314). L’écart moyen est le plus important à Antheit car, en 2000 et 2001, la colonie avait quitté le gîte étudié durant le mois de juillet. L’écart est le plus faible pour la colonie de Neerpelt, suivie tous les 14 jours (Tab. 2.5).

Chapitre 2 : Régime alimentaire estival 28 Avril Mai Juin Juillet Août Sept TOT

1999 29-mai 30-juin 6-août 3-sept 6-oct 5

Ba 2000 29-mai 28-juin 2-août 4-sept 4

2001 28-juin 30-juil 5-sept 3

1999 25-mai 10-juil 31-juil 3-sept 6-oct 5

Gz 2000 28-mai 28-juin 2-août 4-sept 4

2001 25-avr 28-juin 30-juil 4-sept 10-oct 5

L 1999 1-juil 26-juil 8-sept 3

P. auritus P. 1999 18-juin 2-juil 16-juil 30-juil 30-août 27-août 10-sept 24-sept 8 N 2001 9-juil 25-juil 6,17 août 5-sept 15-sept 29-sept 7

Ry 2001 28-mai 28-juin 6-août 4-sept 10-oct 5

1999 20-mai 5-juin 22-juin 19-juil 5-août 3-sept 6 Pr 2000 29-mai 28-juin 2-août 4-sept 5-oct 5 2001 28-juin 4-août 4-sept 3

1999 20-mai 5-juin 22-juin 19-juil 5-août 18-août 3-sept 7

Pg 2000 29-mai 28-juin 2-août 4-sept 5-oct 5

2001 28-juin 4-août 4-sept 14-oct 4

1999 30-mai 1-juil 7-août 1-sept 4

A 2000 31-mai 3-juil 5-sept 30-oct 4

2001 6-juin 6-juil 5-sept 3

1999 2-juin 30-juin 31-juil 3-sept 6-oct 5 G 2001 6-juin 4-juil 30-juil 6-sept 10-oct 5

P. austriacus austriacus P. Nk 1999 30-juin 9-août 7-sept 3

1999 1-juin 3-août 31-août 7-oct 4

R 2000 5-juin 29-juin 4-août 31-août 9-oct 5

2001 5-juil 11-août 4-sept 4-oct 4

1999 31-mai 3-juil 4-août 2-sept 5-oct 5

T 2000 6-juin 26-juin 2-août 4-sept 5-oct 5

2001 9-juil 14-août 4-sept 7-nov 4 TOT 1 21 27 29 32 20 130 Tab. 2.3 : Répartition des échantillons après reclassement dans le mois correspondant à la période pendant laquelle les proies ont été consommées.

P. auritus P. austriacus 99 00 01 tot TOT 99 00 01 tot TOT avril 0 0 1 1 1 0 0 0 0 1 mai 5 3 1 9 21 6 4 2 12 21 juin 5 3 5 13 27 5 4 5 14 27 juillet 7 3 5 15 29 7 3 4 14 29 août 6 3 7 16 32 7 4 5 16 32 sept 4 1 4 9 20 3 4 4 11 20 TOT 27 13 23 63 130 28 19 20 67 130 Tab. 2.4 : Nombre d’échantillons en fonction du mois et de l’année.

Chapitre 2 : Régime alimentaire estival 29 P. auritus P. austriacus Ba Gz L N Ry Pr Pg A G Nk R T N collecte 12 14 3 15 5 14 16 11 10 3 13 14 Moyenne 33,0 36,5 34,5 13,8 33,8 27,6 26,4 42,1 31,5 34,5 34,5 33,5 Ecart-type 3,0 10,8 13,4 5,7 4,6 0,8 9,3 15,4 4,0 7,8 11,5 11,5 Min 28 21 25 3 29 16 13 25 26 29 24 20 Max 37 64 44 28 39 37 40 64 38 40 63 64 Médian 33 34 35 14 34 30 30 35 32 35 33 33 Tab. 2.5 : Nombre moyen de jours séparant deux collectes en fonction des colonies.

Comme présenté sur la figure 2.4, à travers l'exemple de l'échantillon de Gozin collecté le 28/05/2000, le nombre de déjections minimales à analyser se situe entre 20 et 40.

70% Arachnida Araneida

60% Arachnida Opiliones

Coleoptera 50% Coleoptera Polyohaga Chrysomelidea 40% Dermaptera Forficulidea

Diptera Nematocera 30% Anisopodidae Diptera Nematocera Tipulidae percentage frequency percentage 20% Inconnu

Lepidoptera 10%

Lepidoptera larvae 0% D1 D4 D7 D10 D13 D16 D19 D22 D25 D28 D31 D34 D37 D40

Fig. 2.4 : Évolution de la richesse taxonomique et de la fréquence relative de chaque proie en fonction de la taille de l’échantillon (Gozin, 28/05/2000).

3.3 Traitements statistiques

L’objectif est de comprendre quels sont les facteurs qui expliquent la proportion des proies identifiées dans le régime alimentaire.

L’emploi d’un modèle de régression est adapté à notre objectif car il permet d’étudier une relation de dépendance entre une variable expliquée et une série de variables explicatives. Notre variable d’intérêt sous-jacente est le régime alimentaire des oreillards et nous l’étudions par l’entremise de neuf variables dépendantes, à savoir les neuf catégories de proies. Ces variables dépendantes sont quantitatives continues (bornées entre 0 et 1).

Nous devons maintenant définir les variables explicatives.

Le régime alimentaire des chauves-souris est potentiellement soumis à des variations saisonnières en relation avec la phénologie des proies. En outre, des conditions climatiques différentes d'une année à l'autre ont plus que probablement un effet sur la disponibilité en proies. Le modèle élaboré se doit donc de prendre en comptes ces variations. Le modèle inclut donc des variables indépendantes correspondant aux mois et aux années, auxquelles s'ajoutent des variables relatives à l’espèce et aux conditions de cohabitation (colonie monospécifique, colonie mixte). Ces variables indépendantes sont qualitatives binaires.

Chapitre 2 : Régime alimentaire estival 30 La relation entre la proportion de proies et les variables indépendantes ne peut cependant pas être expliquée par un modèle statistique linaire classique car ce dernier prédirait des valeurs qui pourraient être situées en dehors des valeurs possibles pour la variable dépendante (e.g. plus de 100% ou moins de 0%). L’utilisation d’un modèle logistique permet de résoudre ce problème par la forme sigmoïde de sa courbe de liens. La fonction de répartition est alors : F (x) = exp (x) / 1 + exp (x). Le champ des valeurs possibles reste compris entre 0 dans sa partie inférieure et 1 dans sa partie supérieure (e.a. PREUX et al ., 2005). Ce type de modèle permettant de modéliser les proportions s’appelle un modèle linéaire généralisé ayant comme fonction lien la logistique et comme famille la binomiale.

L’utilisation d’un modèle linéaire généralisé impose l’étude de l’effet marginal, à savoir, de détecter quel est l’effet d’une modification mineure, d’une unité, de la variable explicative X sur la probabilité de la variable Y, toute les autres variables explicatives étant égale par ailleurs (L ONG &FREESE 2006).

De plus, après la régression, les coefficients des paramètres de notre équation ne peuvent être lus tels quels puisque nous utilisons une échelle « logit ». Il est donc nécessaire de retransformer les données sur une échelle de valeur bornée entre 1 et 0 1.

Les estimateurs des coefficients associés aux variables explicatives dans le modèle de régression sont des variables aléatoires qui sont donc caractérisées par une moyenne et un écart-type. Il est donc possible de faire de l’inférence statistique et de regarder si le coefficient estimé est significativement différent de zéro à un niveau de confiance donné (95%).

La qualité d’ajustement des modèles de régressions linéaires est généralement résumée par le R² (i.e. le pourcentage des variations de la variable dépendante expliqué par les variations dans les variables explicatives).Toute fois, l’emploi de régressions logistiques ne permet pas de calculer un R² 2. On substitue donc le calcul du R² par celui d’un pseudo R². Nous avons choisi celui d’Efron dont sa valeur est comprise entre 0 et 1 et parce qu’il est adapté à un modèle qui utilise des proportions (L ONG & FREESE 2006). Tous les estimateurs que nous considérons ici sont robustes à l’hétéroscédasticité par l’application de la correction de Huber White 3.

Deux modèles sont testés pour expliquer la proportion des catégories de proies en fonction :

1) de l'espèce, P. auritus vs P. austriacus. 2) des conditions de cohabitation, colonie mixte (Pondrôme) vs colonies monospécifiques.

Ces deux modèles doivent permettre de répondre à trois questions.

1) Existe-t-il des variations saisonnières et annuelles dans le régime alimentaire ?

2) Les P. auritus ont-ils le même régime alimentaire que les P. austriacus ? Nous envisageons cette question sans distinction des conditions de cohabitation, c'est à dire sans individualiser le comportement de la colonie mixte de Pondrôme.

3) Quel est le comportement alimentaire des P. austriacus et des P. auritus de la colonie mixte de Pondrôme en référence aux colonies monospécifiques ?

1 Stata, fonction = mfx compute. 2 Un modèle non linéaire utilise les maximum de vraisemblance et donc ne calcule pas des variances minimales nécessaires au calcul du R². 3 Stata, fonction = robust. La correction de White consiste en une pondération des variables pour retrouver des variances et des écarts types non biaisés. Aucun effet en cas d’homoscédasticité mais une correction est appliquée (via pondération) en cas d’hétéroscédasticité. Cette correction n’affecte pas la valeur des coefficients.

Chapitre 2 : Régime alimentaire estival 31 Modèle 1 :

Pour le premier modèle, on crée trois variables en fonction de l’année étudiée (1999 ou 2000 ou 2001), six variables pour le mois (avril, mai, juin, juillet, août, septembre) et une variable pour l’appartenance à l'espèce.

On choisit de prendre comme année de référence 1999, comme mois de référence avril et comme espèce P. auritus.

La forme fonctionnelle de l’équation de régression, où Y est la proportion d'une catégorie de proie est :

Y = α0 + α1∗(2000) + α2∗(2001) + α3∗(mai) + α4∗(juin) + α5∗(juillet) + α6∗(août) + α7∗(septembre) + α8∗(P. austriacus ) + e

La valeur du coefficient α8 permet donc de connaître directement la proportion prédite de proies consommées par P. austriacus en référence à P. auritus .

Modèle 2 :

Afin d'individualiser le comportement des deux espèces de la colonie mixte de Pondrôme, une variable est créée pour la colonie de Pondrôme, en interaction avec l’espèce (Pondrôme ∗ P. austriacus ), ainsi qu’une variable pour l'appartenance à la colonie de Pondrôme, sans distinction de l'espèce. En fonction des résultats de la première analyse, les variables temporelles mois et année seront maintenues.

La forme fonctionnelle de l’équation de régression est :

Y = α0 + α1∗(2000) + α2∗(2001) + α3∗(mai) + α4∗(juin) + α5∗(juillet) + α6∗(août) + α7∗(septembre) + α8∗(P. austriacus ) + α9∗( Pondrôme ∗P. austriacus ) + α10 ∗( Pondrôme) + e

Comme précédemment, on choisit comme espèce P. austriacus . Le comportement des P. auritus peut toute fois être déduit grâce aux interactions entre coefficients (voir ci-dessous).

Comment interpréter la valeur des coefficients liés à l'espèce et à ses interactions avec la colonie mixte de Pondrôme ?

Contrairement au modèle précédent, pour connaître la quantité de proies consommées par les trois groupes ( P. austriacus , Pondrôme ∗ P. austriacu s, Pondrôme), il ne suffit pas de lire les coefficients tels quels, en raison des interactions entre les variables explicatives de l'équation.

Rappelons l'équation du modèle dont on omet, pour simplifier l'explication, les variables temporelles mois et années : Y = α0 + α1∗ P. austriacus + α2∗ P. austriacus ∗Pondrome + α3∗ Pondrome + e

Le groupe de référence pour l'équation modèle est celui pour lequel la variable espèce et Pondrôme ont la valeur « 0 », c'est-à-dire un échantillon qui n'est pas celui d'un P. austriacus et qui ne provient pas de Pondrôme. La valeur de α0, la constante, l’intercepte, correspond donc au coefficient d'un P. auritus « non » Pondrôme. Le Tableau 2.6 montre comment se comporte l’équation dans les quatre cas de figures envisageables.

Chapitre 2 : Régime alimentaire estival 32 P. austriacus P. auritus (P. austriacus = 1) (P. austriacus = 0) Colonie mixte de Pondrôme α0 + α1 +α2 + α3 α 0 + α3 (Pondrôme = 1)

Colonies monospécifiques α0 + α1 α 0 (Pondrôme = 0) Tab. 2.6 : Déduction des coefficients en fonction de l'identité spécifique et de l'appartenance à la colonie de Pondrôme ou aux colonies monospécifiques.

Pour déduire la proportion de proies consommées par les quatre groupes, en référence au groupe des P. auritus qui n'appartient pas à la colonie de Pondrôme, c'est-à-dire au groupe des P. auritus appartenant aux colonies monospécifiques, on se réfère aux calculs présentés dans le tableau 2.7 ci- dessous.

Groupe considéré (A) Groupe de référence (B) Différence entre le groupe considéré et le groupe de référence (= A – B) P. auritus de Pondrôme α3 = α 0 + α3 P. austriacus α1 (colonies monospécifiques) P. auritus = α 0 + α1 (colonies monospécifiques) P. austriacus de Pondrôme = α 0 α1 +α2 + α3 = α 0 + α1 +α2 + α3 P. auritus 0 (colonies monospécifiques) = α 0 Tab. 2.7 : Calcul de la proportion moyenne prédite des proies consommées par les quatre groupes en référence au groupe des P. auritus hors Pondrôme.

De la même manière, il est également possible de comparer les coefficients en prenant cette fois-ci comme référence le groupe des P. austriacus qui n'appartient pas à la colonie de Pondrôme (Tab. 2.8).

Groupe considéré (A) Groupe de référence (B) Différence entre le groupe considéré et le groupe de référence (= A – B) P. auritus de Pondrôme α3 − α1 = α 0 + α3 P. auritus − α1 (colonies monospécifiques) P. austriacus = α 0 (colonies monospécifiques) P. austriacus de Pondrôme = = α 0 + α1 α2 + α3 α0 + α1 + α2 + α3 P. auritus 0 (colonies monospécifiques) = α 0 Tab. 2.8 : Calcul de la proportion moyenne prédite des proies consommées par les quatre groupes en référence au groupe des P. austriacus hors Pondrôme.

Chapitre 2 : Régime alimentaire estival 33 Comment déduire les valeurs de p ?

Lorsque la proportion moyenne de proies consommées se lit telle quelle dans les résultats de la régression, comme c'est le cas pour les deux premières lignes du tableau 2.7 et la deuxième ligne du tableau 2.8, la valeur de p se lit instantanément dans le tableau des résultats.

Par contre, lorsque la proportion moyenne de proies consommées est déduite grâce aux interactions entre plusieurs coefficients, on utilise la méthode suivante : le principe est de tester l'hypothèse nulle (H0) qui suppose que les deux groupes sont égaux, c'est-à-dire que les coefficients ne sont pas différents.

Il existe un cas lorsque le groupe de référence est celui des P. auritus appartenant aux colonies monospécifiques (Tab. 2.7) et trois cas lorsque le groupe de référence est celui des P. austriacus appartenant aux colonies monospécifiques (Tab. 2.8).

Cas 1 : on désire savoir si la différence de proportion moyenne des proies consommées est significativement différente entre le groupe des P. austriacus de Pondrôme et celui de P. auritus « colonies monospécifiques » (Tab. 2.7).

Le groupe des P. austriacus de Pondrôme (Y1) = α0 + α1 + α2 + α3. Le groupe des P. auritus hors Pondrôme (Y2) = α0

La différence entre les deux groupes, Y1 – Y2 = α1 + α2 + α3 H0 : Y1 – Y2 = 0, soit α1 + α2 + α3 = 0

On teste donc l'équation P. austriacus + P. austriacus * Pondrôme + Pondrôme = 0, ce qui permet d'obtenir une valeur de chi carré et le p associé.

Cas 2 : P. auritus Pondrôme vs P. austriacus « colonies monospécifiques » (Tab. 2.8).

Le groupe des P. auritus Pondrôme (Y1) = α0 + α3 Le groupe des P. austriacus hors Pondrôme (Y2) = α0 + α1

La différence entre les deux groupes, Y1 – Y2 = α3 − α1 H0 : Y1 – Y2 = 0, soit α3 − α1 = 0

On teste donc l'équation Pondrôme - P. austriacus = 0

Cas 3 : P. austriacus de Pondrôme vs P. austriacus « colonies monospécifiques » (Tab. 2.8).

Le groupe des P. austriacus de Pondrôme (Y1) = α0 + α1 + α2 + α3 Le groupe de référence reste un P. austriacus hors Pondrôme (Y2) = α0 + α1

La différence entre les deux groupes, Y1 – Y2 = α2 + α3 L'hypothèse nulle est Y1 – Y2 = 0, soit α2 + α3 = 0

On teste donc l'équation P. austriacus * Pondrôme + Pondrôme = 0

Autres tests statistiques utilisés

En complément des analyses de régression, un test non paramétrique de U Mann-Whitney est utilisé lors des comparaisons deux à deux d’un faible nombre d’échantillons.

Les analyses ont été effectuées avec STATA 10 (StataCorp LP, Texas USA).

Chapitre 2 : Régime alimentaire estival 34 4. R ésultats : régime alimentaire estival

4.1 Composition

Chez les P. auritus , l’ordre des Lépidoptères est le groupe dont la fréquence relative moyenne est la plus élevée (53,6 %). Les Diptères Tipulidae (21,1 %) et les Cyclorrhaphes (7,1 %) sont ensuite les plus représentés. Les autres proies sont des Coléoptères (5,4 %), des Diptères sp. (3,8 %), des Arachnides (3,7 %) et des Dermaptères (3,7 %). La proportion des « Divers » et des « Inconnus » est de 1,4 et 1,2 % (Tab. 2.9).

Chez les P. austriacus , ce sont également les Lépidoptères (57,8 %) et les Tipules (14,8 %) qui sont le plus fréquemment consommés. Le troisième groupe est celui des Coléoptères (8,8 %), suivi des Cyclorrhaphes (5,6 %), des Arachnides (4,6 %), des Diptères sp. (3,4 %) et des Dermaptères (2,4 %). La fréquence relative moyenne des « Divers » et des « Inconnus » est de 1,4 et 1,3 % (Tab. 2.9).

Vu la très faible proportion des Divers et des Inconnus, les résultats de ces deux catégories de proies ne sont plus présentés par la suite mais ils sont intégrés dans les analyses statistiques.

Le tableau détaillé de la proportion de proies identifiées dans chaque échantillon est présenté dans l’annexe 2 ( P. auritus ) et 3 ( P. austriacus ). L'annexe 4 ( P. auritus ) et 5 ( P. austriacus ) détaille l’occurrence des proies identifiées jusqu'au degré systématique le plus fin.

Ci-dessous, on trouvera le régime alimentaire moyen (Fig. 2.5) et les fréquences relatives moyennes (Tab. 2.9) des proies retrouvées dans les échantillons en fonction des colonies (130 échantillons).

100%

90%

80% Ar 70% D Co 60% D sp 50% D cycl D tip 40% L 30% Div Inc 20%

10%

0% Ba Gz L N Ry Pr Pg A G Nk R T

<<------P. auritus | P. austriacus ------>>

Fig. 2.5 : Régime alimentaire estival global des colonies étudiées (N occurrences d'un taxon/ N total d'occurrence de la colonie). Les colonies de P. auritus vont de Ba à Pr, celles de P. austriacus de Pg à T.

Chapitre 2 : Régime alimentaire estival 35 Colonie Statistique Arachnide Dermaptère Coléoptère Diptère sp. Cyclorrhaphe Tipule Lépidoptère Divers Inc. (n=64) (n=45) (n = 92) (n=94) (n= 83) (n=102) (n = 129) (n= 48) (n=51)

Ba Moyenne 5,167 3,261 7,953 3,600 9,735 24,547 42,427 2,156 1,155 (n=12) Max 14,118 12,676 24,590 8,197 68,182 70,492 62,903 12,903 4,918 Min 0,000 0,000 0,000 0,000 0,000 0,000 9,836 0,000 0,000 Ec-t 4,806 3,749 7,383 2,769 18,732 23,388 16,794 3,714 1,496 Médiane 3,458 1,639 5,988 3,311 5,276 17,772 43,369 0,769 0,746 Gz Moyenne 5,758 6,787 2,330 4,730 9,750 24,935 41,620 2,067 2,024 (n=14) Max 14,286 17,910 8,000 13,333 32,692 68,519 79,592 5,714 9,333 Min 0,000 0,000 0,000 0,000 0,000 0,000 12,500 0,000 0,000 Ec-t 4,590 5,997 2,658 3,614 9,915 22,923 18,771 2,240 2,832 Médiane 5,157 5,524 1,781 4,280 7,390 16,372 40,714 1,667 0,602 L Moyenne 4,663 2,301 6,981 8,194 5,788 19,893 47,475 2,948 1,756 (n=3) Max 6,780 5,085 10,526 9,091 12,281 35,088 60,000 5,455 1,818 Min 1,754 0,000 3,636 7,018 0,000 11,864 31,579 0,000 1,695 Ec-t 2,605 2,577 3,449 1,065 6,171 13,166 14,507 2,754 0,062 Médiane 5,455 1,818 6,780 8,475 5,085 12,727 50,847 3,390 1,754 N Moyenne 0,568 0,152 4,412 1,713 8,357 9,699 74,276 0,557 0,267 (n=15) Max 4,348 2,273 23,077 7,692 33,333 61,538 95,238 4,348 4,000 Min 0,000 0,000 0,000 0,000 0,000 0,000 34,615 0,000 0,000 Ec-t 1,498 0,587 6,397 2,496 12,241 16,385 17,146 1,470 1,033 Médiane 0,000 0,000 3,846 0,000 2,041 4,444 78,261 0,000 0,000 Ry Moyenne 3,560 3,163 0,870 3,160 5,227 35,741 45,130 1,922 1,227 (n=5) Max 8,333 6,250 2,222 7,143 14,286 72,222 80,000 5,357 2,222 Min 0,000 0,000 0,000 0,000 0,000 4,167 11,111 0,000 0,000 Ec-t 3,341 2,648 1,192 2,726 5,482 33,144 32,326 2,661 1,132 Médiane 2,128 2,222 0,000 2,128 4,167 23,214 44,643 0,000 1,786 Pr Moyenne 3,696 0,633 8,493 4,471 2,108 21,325 57,362 0,517 1,395 (n=14) Max 19,355 3,846 35,714 9,259 6,122 86,957 80,000 3,704 4,348 Min 0,000 0,000 0,000 0,000 0,000 0,000 0,000 0,000 0,000 Ec-t 6,195 1,324 9,539 3,387 2,515 27,436 27,503 1,118 1,811 Médiane 0,893 0,000 5,704 4,061 0,893 12,140 71,955 0,000 0,000 Pg Moyenne 17,871 9,598 2,280 4,815 5,037 19,186 38,809 0,869 1,536 (n=16) Max 37,778 24,138 25,806 13,095 18,889 62,264 67,857 3,947 7,547 Min 0,000 0,000 0,000 0,000 0,000 0,000 9,375 0,000 0,000 Ec-t 12,007 8,586 6,434 4,344 5,563 20,430 17,344 1,563 2,476 Médiane 14,286 8,854 0,000 2,835 3,452 10,558 40,714 0,000 0,000 A Moyenne 0,97 0,222 16,577 3,489 2,436 7,262 65,657 1,870 1,518 (n=11) Max 3,922 2,439 46,875 7,813 12,727 27,273 90,909 13,115 5,172 Min 0,000 0,000 1,818 0,000 0,000 0,000 20,313 0,000 0,000 Ec-t 1,282 0,735 13,534 2,569 4,088 10,717 21,323 3,922 1,853 Médiane 0,000 0,000 16,393 3,448 0,000 3,279 70,909 0,000 1,56 G Moyenne 0,412 0,152 4,679 4,812 5,076 25,960 55,641 1,181 2,086 (n=10) Max 2,273 1,515 17,778 16,667 24,138 56,522 77,273 6,061 8,475 Min 0,000 0,000 0,000 0,000 0,000 0,000 30,435 0,000 0,000 Ec-t 0,875 0,479 4,921 5,493 7,129 19,934 16,159 2,115 2,755 Médiane 0,000 0,000 3,852 2,106 3,638 20,886 55,976 0,000 1,042

Chapitre 2 : Régime alimentaire estival 36 Colonie Statistique Arachnide Dermaptère Coléoptère Diptère sp. Cyclorrhaphe Tipule Lépidoptère Divers Inc. (n=64) (n=45) (n = 92) (n=94) (n= 83) (n=102) (n = 129) (n= 48) (n=51)

Nk Moyenne 0,000 0,000 2,626 0,758 3,182 1,869 91,566 0,000 0,000 (n=3) Max 0,000 0,000 4,545 2,273 5,000 3,333 95,000 0,000 0,000 Min 0,000 0,000 0,000 0,000 0,000 0,000 86,364 0,000 0,000 Ec-t 0,000 0,000 2,354 1,312 2,765 1,703 4,582 0,000 0,000 R Moyenne 0,145 0,000 13,377 2,462 14,434 6,026 59,009 2,790 1,755 (n=13) Max 1,887 0,000 57,143 10,345 62,222 21,739 90,909 8,000 6,897 Min 0,000 0,000 0,000 0,000 0,000 0,000 14,286 0,000 0,000 Ec-t 0,523 0,000 18,669 3,442 17,929 7,755 23,588 2,519 2,398 Médiane 0,000 0,000 3,448 1,786 7,143 2,326 53,448 2,273 0,000 T Moyenne 0,290 0,000 10,104 2,140 1,366 18,469 66,468 0,865 0,298 (n=14) Max 2,174 0,000 48,148 8,333 4,478 78,261 93,023 4,651 2,174 Min 0,000 0,000 0,000 0,000 0,000 1,852 17,391 0,000 0,000 Ec-t 0,739 0,000 14,813 2,631 1,831 24,943 25,259 1,394 0,759 Médiane 0,000 0,000 4,257 0,943 0,000 7,428 78,542 0,000 0,000 P. aur Moyenne 3,725 2,666 5,372 3,779 7,170 21,049 53,605 1,410 1,224 (n=63) Max 19,355 17,910 35,714 13,333 68,182 86,957 95,238 12,903 9,333 Min 0,000 0,000 0,000 0,000 0,000 0,000 0,000 0,000 0,000 Ec-t 4,669 4,188 6,893 3,279 11,423 23,592 24,370 2,376 1,865 Médiane 2,041 0,000 3,279 3,571 4,000 12,000 57,778 0,000 0,000 P. aust. Moyenne 4,577 2,351 8,789 3,400 5,589 14,761 57,790 1,413 1,330 (n=67) Max 37,778 24,138 57,143 16,667 62,222 78,261 95,000 13,115 8,474 Min 0,000 0,000 0,000 0,000 0,000 0,000 9,375 0,000 0,000 Ec-t 9,468 5,797 13,282 3,820 9,852 18,938 23,808 2,382 2,133 Médiane 0,000 0,000 3,333 2,083 2,778 5,769 54,454 0,000 0,000 Total Moyenne 4,164 2,504 7,133 3,584 6,355 17,808 55,762 1,412 1,279 (n=130) Max 37,778 24,138 57,143 16,667 68,182 86,957 95,238 13,115 9,333 Min 0,000 0,000 0,000 0,000 0,000 0,000 0,000 0,000 0,000 Ec-t 7,518 5,064 10,772 3,159 10,630 21,470 24,080 2,370 2,001 Médiane 0,000 0,000 3,333 2,020 3,550 9,151 57,152 0,000 0,000 Tab. 2.9 : Fréquences relatives moyennes (%) des catégories de proies dans chaque colonie (130 échantillons). La somme des moyennes des catégories de proies égale à 100.

4.2 Variations spécifiques et temporelles : modèle 1

Comme expliqué dans la méthodologie, la variable indépendante « année 1999 » est sortie du modèle pour permettre la comparaison avec les années 2000 et 2001. L’unique échantillon récolté en avril (Gozin, 2001) est choisi comme échantillon de référence afin de permettre la comparaison avec les autres mois. Ses caractéristiques sont détaillées dans le tableau 2.10.

Mois Arachnide Dermaptère Coléoptère Diptere sp. Dipt. Dipt. Tipulidae Lepidoptère Cyclorrhaphe Avril 0,058 0,096 0,019 0,019 0,327 0,000 0,481 Tab. 2.10 : Fréquence relative des proies identifiées dans l’échantillon de référence du mois d’avril (Gozin, avril, 2001).

Chapitre 2 : Régime alimentaire estival 37 Ar D Co D sp D cycl D tip L Variables coef p > t coef p > t coef p > t coef p > t coef p > t coef p > t coef p > t 2000 0,010 0,502 0,014 0,191 0,062 <0,0005 0,014 0,013 -0,011 0,545 -0,013 0,690 -0,091 0,010 2001 -0,005 0,751 -0,006 0,560 -0,003 0,881 -0,002 0,817 -0,023 0,239 0,059 0,097 -0,001 0,979 Mai -0,025 0,199 -0,057 <0,0005 0,105 <0,0005 -0,003 0,725 -0,193 <0,0005 0,227 <0,0005 -0,171 0,015 Juin -0,020 0,145 -0,064 <0,0005 0,036 0,067 0,015 0,064 -0,165 <0,0005 0,120 <0,0005 0,090 0,052 Juillet -0,009 0,605 -0,048 <0,0005 0,046 0,027 0,021 0,000 -0,125 <0,0005 0,029 <0,0005 0,150 <0,0005 Août -0,042 0,010 -0,030 <0,0005 0,009 0,672 0,007 0,219 -0,133 <0,0005 0,045 <0,0005 0,204 <0,0005 Septembre -0,042 0,052 -0,030 0,046 -0,030 0,216 -0,017 0,157 -0,048 <0,0005 0,195 <0,0005 -0,092 0,041 P. austriacus 0,009 0,487 -0,003 0,693 0,029 0,040 -0,004 0,407 -0,014 0,379 -0,078 0,008 0,064 0,057 pseudo R² 0,527 0,467 0,561 0,092 0,404 0,371 0,479 Tab. 2.11 : Résultats de l’analyse de régression de la proportion des proies par rapport aux années, aux mois et à l’espèce (130 échantillons).

La lecture des pseudo R² (Tab. 2.11) indique que les variables indépendantes années, mois et espèce ont un pouvoir explicatif pour les Dermaptères, les Arachnides, les Coléoptères, les Cyclorrhaphes, les Tipules et les Lépidoptères, respectivement, de 52,7 %, 46,7 %, 56,1 %, 40,4 %, 37,1 % et 47,9 %. Une part importante de la variance totale de l’échantillon est donc prise en compte par le modèle. Par contre, pour les Diptères sp., la part de la variance prise en compte par le modèle reste très faible (9,2 %).

Des variations annuelles sont prédites pour les échantillons collectés en 2000. Les Coléoptères (+ 6,2 %) et les Diptères sp (+ 1,4 %) sont davantage représentés tandis que les lépidoptères le sont moins (- 9,1 %).

Des variations mensuelles significatives sont prédites pour toutes les catégories de proies. Pour les Arachnides, la consommation moyenne est la plus faible (- 4,2 %) en août et septembre. Les Dermaptères sont, graduellement davantage consommés au cours de la saison mais la valeur des coefficients reste cependant très proche, la différence entre le coefficient de mai et de septembre n'étant que de 2,7 %. Les Coléoptères sont consommés principalement durant le mois de mai (+ 10,5 %) et leur représentation dans le régime alimentaire diminue progressivement jusqu'en septembre. Au vu des valeurs insignifiantes des coefficients des Diptères sp. on ne montre pas de variations saisonnières. La diminution de la fréquence relative des Cyclorrhaphes est graduellement moindre au fur et à mesure de l’avancement de la saison. Autrement dit, la proportion prédite des Cyclorrhaphes augmente pendant l'été pour atteindre un pic en fin de saison, la diminution la plus faible correspondant au mois de septembre (- 4,8 %).

L’abondance des Tipules dans le régime alimentaire montre clairement une distribution bi modale avec un pic en mai (+ 22,7 %) et en septembre (+ 19,5 %), le pic de mai étant le plus important. A l’inverse, la consommation des Lépidoptères est la plus faible en mai (-16,7 %) et septembre (-13,9 %).

Concernant les différences interspécifiques, la lecture des coefficients des P. austriacus indique que l’appartenance à ce groupe implique de consommer des quantités statistiquement plus importantes de Coléoptères (+ 2,9 %), de Lépidoptères (+ 6,4 %) et moindre de Tipules (- 7,8 %). Les autres groupes de proies, Arachnides (+ 0,9 %), Dermaptères (- 0,3 %), Diptères sp. (- 0,4 %) et Cyclorrhaphes (-1,4 %) ne sont pas statistiquement différentes et la valeur des coefficients reste insignifiante.

Chapitre 2 : Régime alimentaire estival 38 4.3 Variations spécifiques, colonie mixte vs colonies monospécifiques : modèle 2

Pour ce modèle, on intègre dans l'équation une variable pour l'appartenance à l'espèce, une variable pour l'espèce en interaction avec la colonie de Pondrôme et enfin une variable pour l'appartenance à la colonie de Pondrôme.

On propose un modèle où la variable espèce est P. austriacus. Pour rappel (voir méthodologie), l'individu de référence est un P. auritus qui n'appartient pas à la colonie de Pondrôme, c'est-à-dire un P. auritus « moyen » d’une colonie monospécifique .

Comme précédemment, l’unique échantillon récolté en avril est choisi comme échantillon de référence pour les variables « mois » tandis que 1999 reste l'année de référence pour les variables « années ».

La lecture des pseudo R² indique que les variables indépendantes années, mois, espèces, « Pondrôme ∗espèce » et « Pondrome » ont, par ordre décroissant, un pouvoir explicatif pour les Dermaptères, les Arachnides, les Coléoptères, les Lépidoptères, les Tipules, les Cyclorrhaphes respectivement, de 64,2 %, 62,1 %, 56,2 %, 54,3 %, 43,8 %, 39,0 %. Une part importante de la variance totale de l’échantillon est prise en compte par ce modèle à l'exception des Diptères sp. pour lesquels la part de la variance prise en compte par le modèle reste plus faible (26,6 %) (Tab. 2.12).

Comme dans le modèle précédent, des variations annuelles et mensuelles significatives sont mises en évidence. Ces variations sont semblables au modèle précédent et ne seront pas commentées à nouveau pour alléger la lecture.

Ar D Co D sp D cycl D tip L Variables coef p > t coef p > t coef p > t coef p > t coef p > t coef p > t coef p > t <0,000 0,01 - - - 0,009 0,398 0,017 0,009 0,061 0,013 0,949 0,630 0,001 2000 5 0 0,001 0,016 0,097 - <0,000 0,90 - - 0,897 -0,006 0,423 -0,007 -0,001 0,228 0,061 0,079 0,900 2001 0,001 5 5 0,024 0,005 - <0,000 <0,000 0,62 - <0,000 <0,000 - 0,202 -0,051 0,094 -0,004 0,274 0,003 Mai 0,019 5 5 4 0,182 5 5 0,194 - <0,000 0,08 - <0,000 <0,000 0,242 -0,056 0,025 0,184 0,014 0,104 0,067 0,131 Juin 0,012 5 1 0,157 5 5 - <0,000 0,00 - <0,000 <0,000 0,528 -0,043 0,038 0,084 0,019 0,024 0,134 <0,0005 Juillet 0,007 5 2 0,116 5 5 - <0,000 0,29 - <0,000 <0,000 0,002 -0,025 0,000 0,985 0,006 0,044 0,187 <0,0005 Août 0,036 5 7 0,126 5 5 - 0,14 - <0,000 - 0,023 -0,021 0,036 -0,041 0,079 -0,018 0,022 0,197 0,011 Septembre 0,031 8 0,043 5 0,116 - <0,000 <0,000 0,18 - - -0,088 0,050 0,001 -0,009 0,176 0,009 0,144 <0,0005 P.austriacus ( α1) 0,083 5 5 1 0,023 0,095 P.aust.Pondr.( α2 <0,000 <0,000 0,14 - 0,150 0,155 -0,128 0,005 0,014 0,068 0,034 0,067 0,269 <0,0005 ) 5 5 3 0,336 - 0,21 - 0,803 -0,042 0,002 0,017 0,351 0,008 0,006 0,012 0,785 0,079 0,075 Pondrôme ( α3) 0,005 1 0,070 pseudo R² 0,621 0,642 0,562 0,266 0,390 0,438 0,543 Tab. 2.12 : Résultats bruts de l’analyse de régression de la proportion des proies par rapport aux années, aux mois, à l’espèce ( P. austriacus) et à l’appartenance à la colonie de Pondrôme (130 échantillons).

A partir du tableau 2.12, comme nous l’avons expliqué dans la méthodologie (Tab. 2.7), il est maintenant possible de déduire les consommations moyennes prédites en référence aux colonies de P. auritus monospécifiques (Tab. 2.13, fig. 2.6).

Chapitre 2 : Régime alimentaire estival 39 Ar D Co D sp D cycl D tip L coef p > t coef p > t coef p > t coef p > t coef p > t coef p > t coef p > t

P. auritus Pondr. -0,005 0,803 -0,042 0,002 0,017 0,351 0,008 0,211 -0,070 0,006 0,012 0,785 0,079 0,075 (α3)

P. austriacus -0,083 <0,0005 -0,088 <0,0005 0,050 0,001 -0,009 0,181 -0,023 0,176 -0,095 0,009 0,144 <0,0005 (α1)

P. austriacus Pondr. 0,062 0,000 0,025 0,000 -0,061 0,164 0,013 0,036 -0,025 0,190 -0,016 0,624 -0,112 0,006 (α1 + α2 + α3) Tab. 2.13 : Comparaison des coefficients prédits pour chaque groupe de proies entre colonies de P. auritus monospécifiques (= groupe de référence) et les P. auritus de Pondrôme ( P. auritus Pondr.), les P. austriacus appartenant aux colonies monospécifiques ( P. austriacus ) et les P. austriacus de Pondrôme ( P. austriacus Pondr.).

Référence = P. auritus colonies monospécifiques

20%

15% *

10% * * Ar 5% * D * 0% Co D sp -5% * D cycl * D tip -10% * * * L -15% *

-20%

-25%

-30% P. auritus (P) P. austriacus P. austriacus (P)

Fig. 2.6 : Comparaison graphique des coefficients prédits pour chaque groupe de proies entre le groupe des P. auritus provenant des colonies monospécifiques (référence) et celui des P. auritus de Pondrôme (P), des P. austriacus provenant des colonies monospécifiques et des P. austriacus de Pondrôme (P). * : p < 0,050.

La lecture du tableau 2.16 et de la figure 2.6 indiquent que l'appartenance au groupe des P. auritus de Pondrôme, en référence aux autres P. auritus , implique une consommation moyenne d'Arachnides, de Coléoptères, de Diptères sp. et de Tipules quasi équivalentes. Par contre, à Pondrôme, les P. auritus ont une consommation moyenne prédite moindre de Dermaptères (- 4,2 %), de Cyclorrhaphes (- 7,6 %) et supérieure de Lépidoptères (+ 7,9 %). Seules les différences de consommation prédites des Dermaptères et des Cyclorrhaphes sont statistiquement significatives.

L'appartenance au groupe des P. austriacus issus des colonies monospécifiques implique de consommer moins d'Arachnides (- 8,3 %), de Dermaptères (- 8,8 %), de Cyclorrhaphes (- 2,3 %), de Tipules (- 9,5 %) mais plus de Coléoptères (+ 5,0 %) et de Lépidoptères (+ 14,4 %). La différence de consommation prédite des Diptères sp reste par contre identique. Seules les différences de consommation prédites des Diptères sp. et des Cyclorrhaphes ne sont pas statistiquement significatives.

Enfin, le modèle prédit pour les P. austriacus de Pondrôme une consommation plus importante d'Arachnides (+ 6,2 %), de Dermaptères (+ 2,5 %), de Diptères sp. (+ 1,3 %) et moindre de Coléoptères (- 6,1 %), de Cyclorrhaphes (- 2,5 %) et surtout de Lépidoptères (- 11,2 %). La différence de consommation prédite de Tipules reste pratiquement nulle. Les différences de consommation d'Arachnides, de Dermaptères, de Diptères sp. et de Lépidoptères sont significatives.

Chapitre 2 : Régime alimentaire estival 40 Comme nous l’avons expliqué dans la méthodologie (Tab. 2.8), il est possible de déduire les consommations moyennes prédites en référence aux colonies monospécifiques de P. austriacus (Tab. 2.14, Fig. 2.7).

Ar D Co D sp D cycl D tip L coef p > t coef p > t coef p > t coef p > t coef p > t coef p > t coef p > t

P. auritus Pondr. 0,079 0,000 0,047 0,028 -0,033 0,029 0,017 0,016 -0,046 0,073 0,107 0,024 -0,065 0,121 (α3 − α1)

P. auritus 0,083 0,000 0,088 0,000 -0,050 0,001 0,009 0,181 0,023 0,176 0,095 0,009 -0,144 0,000 (− α1)

P. austriacus Pondr. 0,145 0,000 0,113 0,000 -0,111 0,009 0,022 0,001 -0,002 0,936 0,079 0,034 -0,256 0,000 (α2 + α3) Tab. 2.14 : Comparaison des coefficients prédits pour chaque groupe de proies entre colonies de P. austriacus monospécifiques (référence) et les P. auritus de Pondrôme ( P. auritus Pondr.), les P. auritus appartenant aux colonies monospécifiques ( P. auritus ) et les P. austriacus de Pondrôme ( P. austriacus Pondr.).

Référence = P. austriacus colonies monospécifiques

20% 15% * * 10% * * * * * * Ar * 5% * D * Co 0% D sp -5% * * D cycl -10% D tip * L -15% * -20%

-25% * -30% P. auritus (P) P. auritus P. austriacus (P)

Fig. 2.7 : Comparaison graphique des coefficients prédits pour chaque groupe de proies entre le groupe des P. austriacus issus de colonies monospécifiques (référence) et celui des P. auritus de Pondrôme (P), des P. auritus provenant des colonies monospécifiques et des P. austriacus de Pondrôme (P). * : p < 0,050.

La lecture du tableau 2.14 ou de la figure 2.7 indique que l'appartenance au groupe des P. auritus de Pondrôme, en référence aux P. austriacus issus de colonies monospécifiques, implique de consommer des quantités supérieures d'Arachnides (+ 7,9 %), de Dermaptères (+ 4,7 %) et de Diptères sp. (+ 1,7 %). Par contre, la consommation prédite est moindre pour les Coléoptères (- 3,3 %), les Cyclorrhaphes (- 4,6 %) et les Lépidoptères (- 6,5 %). Les différences ne sont cependant pas significatives pour les Cyclorrhaphes et les Lépidoptères.

Les différences prédites par rapport au groupe des P. auritus non syntopiques ont déjà été commentées précédemment (Tab. 2.13, fig. 2.6). Les coefficients sont identiques, seul le signe change.

Enfin, les P. austriacus de Pondrôme ont une consommation moyenne prédite plus importante d'Arachnides (+ 14,5 %), de Dermaptères (+ 11,3 %) et de Diptères sp. (+ 2,2 %). La consommation des Coléoptères (- 11,1 %) et surtout des Lépidoptères (- 25,5 %), est nettement plus faible que celle des P. austriacus micro allopatriques. On ne détecte pas de différences pour les Cyclorrhaphes. Les différences sont significatives pour toutes les catégories de proies à l'exception des Cyclorrhaphes.

Chapitre 2 : Régime alimentaire estival 41 Afin d'approfondir l'étude des différences interspécifiques du régime alimentaire de la colonie mixte, le tableau 2.18 compare les fréquences relatives moyennes mensuelles des 6 catégories de proies provenant des échantillons de Pondrôme (n = 30). Il apparaît que la composition du régime alimentaire n’est pas différente en mai et en septembre (Tab. 2.15, Fig. 2.8). C’est en juin, juillet et août que des différences significatives apparaissent. En juin et juillet, les P. austriacus consomment plus d’Arachnides (moyenne juin = 0,237 ± 0,141, p = 0,046 ; moyenne juillet = 0,303 ± 0,067, p = 0,046) tandis qu’en juillet, les P. auritus consomment plus massivement les Lépidoptères (moyenne juillet = 0,750 ± 0,050, p = 0,020). En août, ce sont les Dermaptères qui sont les plus consommés par les P. austriacus (moyenne = 0,166 ± 0,068, p= 0,019), alors que les Coléoptères et surtout les Lépidoptères sont plus consommés par les P. auritus (moyenne Coléoptères = 0,044 ± 0,027, p = 0,032 ; moyenne Lépidoptères = 0,756 ± 0,035, p = 0,034).

Mai Juin Juillet Août Septembre Pr Pg p Pr Pg p Pr Pg p Pr Pg p Pr Pg p (n=3) (n=3) (n=3) (n=3) (n=4) (n=4) (n=3) (n=4) (n=1) (n=2) Ar Moy 0,085 0,124 0,275 0,007 0,237 0,046 0,050 0,303 0,020 0,014 0,070 0,142 0 0,143 0,157 Ec-t 0,095 0,109 0,013 0,141 0,076 0,067 0,024 0,055 - 0,000 . D Moy 0,017 0,038 0,512 0,011 0,033 0,121 0,000 0,058 0,091 0,013 0,166 0,019 0,000 0,213 - Ec-t 0,016 0,050 0,000 0,032 0,000 0,069 0,022 0,068 - 0,023 Co Moy 0,159 0,099 0,658 0,113 0,012 0,121 0,060 0,008 0,131 0,044 0,000 0,032 0,000 0,000 0,221 Ec-t 0,174 0,139 0,086 0,021 0,052 0,017 0,027 0,000 - 0,000 D sp Moy 0,012 0,006 0,796 0,060 0,077 0,513 0,065 0,072 0,139 0,038 0,044 0,858 0,019 0,016 0,221 Ec-t 0,021 0,011 0,021 0,050 0,030 0,034 0,049 0,038 - 0,003 D cycl Moy 0,006 0,000 0,317 0,014 0,019 0,817 0,025 0,073 0,375 0,039 0,066 0,480 0,019 0,098 0,221 Ec-t 0,010 0,000 0,024 0,018 0,030 0,083 0,034 0,031 - 0,063 D tip Moy 0,585 0,524 0,827 0,084 0,180 0,275 0,035 0,028 1,000 0,085 0,094 0,858 0,585 0,234 0,221 Ec-t 0,283 0,122 0,073 0,081 0,057 0,032 0,098 0,110 - 0,250 L Moy 0,114 0,174 0,513 0,687 0,412 0,127 0,750 0,428 0,020 0,756 0,537 0,034 0,358 0,296 1,000 Ec-t 0,108 0,082 0,065 0,219 0,050 0,085 0,035 0,116 - 0,17 Tab. 2.15 : Comparaison des fréquences relatives moyennes des proies entre les P. auritus de Pondrôme (Pr, n = 14) et les P. austriacus (Pg, n = 16), ventilées en fonction des mois. Les valeurs de p sont issues du test de Mann-Whitney.

100%

90% * * * * 80%

70% * Ar * D 60% Co 50% D sp D cycl 40% D tip 30% L Div 20%

10%

0% Pr (3) Pg (3) Pr (3) Pg (3) Pr (4) Pg (4) Pr (3) Pg (4) Pr (1) Pg (2) Mai Juin Juillet Août Septembre

Fig. 2.8 : Variation saisonnière moyenne de la composition du régime alimentaire des P. auritus (Pr) et des P. austriacus (Pg) de Pondrôme. Le chiffre entre parenthèses indique le nombre d'échantillons. * : p < 0,050.

Chapitre 2 : Régime alimentaire estival 42 5. D iscussion : régime alimentaire estival

5.1 Introduction

Différents exemples de partage des ressources trophiques entre espèces de chauves-souris ont été publiés.

En Suède, l'étude de 6 colonies de Eptesicus nilsonii et de P. auritus a montré que la sérotine boréale consomme de petits diptères (47 % en volume), alors que l'oreillard roux consomme des insectes diurnes ou des insectes non volants comme les Calliphoridae, les Dermaptères et les Arachnides. Ces différences sont mises en relation avec des techniques de chasse différentes. P. auritus glane une partie de ses proies et E. nilsonii les capture en plein vol (R YDELL 1989b).

En Irlande, Myotis natterreri et P. auritus se partagent les ressources alimentaires en consommant en quantités différentes des proies non volantes capturées par glanage. La part de proies glanées chez M. natterreri atteint 68 % contre 42 % chez P. auritus, qui compense en consommant davantage de Lépidoptères (S HIEL et al. 1991). En Écosse, le partage des ressources alimentaires a été démontré chez une colonie syntopique de P. auritus et M. daubentonii. Alors que M. daubentonii exploite préférentiellement les insectes volants comme les diptères, P. auritus exploite également les insectes non volants comme les Coléoptères. Ce partitionnement s'accompagne d'une utilisation différente de l'habitat, les ripisylves et les cours d'eau pour M. daubentonii et les bois pour P. auritus (S WIFT & RACEY 1983).

En Chine, pour deux espèces du genre Tylonycteris , T. pachypus et T. robustula (Z HANG et al. 2005, 2007), la taille des proies consommées par ces deux espèces diffère de 5mm. Cette différence, mise en relation avec la morphologie des ailes, les caractéristiques de l'écholocation et les habitats de chasse exploités, serait suffisante pour permettre un partage des ressources alimentaires.

Un autre exemple de partage sur la base de la taille des proies est donné par l'étude du régime alimentaire de Lasurius cinereus et Lasurius borealis au Canada. La première, plus grande, capture des Lépidoptères de plus grande taille tandis que l'espèce la plus petite consomme les Lépidoptères plus petits (H ICKEY et al. 1996).

Qu'en est-il pour nos deux espèces d'oreillards ?

Pour tenter de répondre à cette question, la discussion s'articuler autour de 8 paragraphes :

1. La comparaison interspécifique du régime alimentaire, indépendamment des conditions de cohabitation. 2. La comparaison interspécifique du régime alimentaire restreinte aux colonies monospécifiques. 3. La comparaison interspécifique du régime alimentaire des colonies monospécifiques vs colonie mixte. 4. P. austriacus et la capacité de glaner. 5. Les similitudes avec l'étude de deux espèces jumelles de Myotis. 6. Les variations annuelles de la composition du régime alimentaire. 7. Les variations saisonnières du régime alimentaire en relation avec la phénologie et l’écologie des proies. 8. Les variations saisonnières du régime alimentaire de la colonie mixte, en relation avec le cycle de vie.

La discussion des résultats du régime alimentaire se clôture par une première conclusion concernant le partage des ressources trophiques.

Chapitre 2 : Régime alimentaire estival 43 5.2 Comparaison interspécifique indépendamment des conditions de cohabitation

La spécialisation de la prédation des oreillards sur les Lépidoptères confirme les résultats des études antérieures. Chez P. auritus, nos résultats (53,6 %, Tab. 2.9) sont comparables aux résultats de S WIFT &RACEY 1983 (40,5 %), B ECK 1995 (61 %), A SHRAFI et al. 2011 (41 %) mais plus élevés que ceux des études de R YDELL 1989 (27,2 %) et S HIEL et al. 1991 (27,4 %). Ces différences géographiques dans le régime alimentaire des oreillards roux peuvent s'expliquer par des différences liées au climat et aux habitats. L'étude de R YDELL s'est déroulée à une latitude plus élevée (57° 45'N)4, tandis que l'étude irlandaise de S HIEL et al. (1991) a été menée dans un environnement dominé par des prairies et des arbres matures isolés.

La proportion de Lépidoptères consommés par P. austriacus dans notre étude (57,8 %, Tab. 2.9) est par contre plus faible que celle des études précédentes : 72,3 % chez B AUEROVA (1982), 90 % chez BECK (1995) et 87,4 % chez A SHRAFI et al. (2011).

Le modèle 1 prédit que les P. austriacus consomment un peu plus de Lépidoptères (+ 6,4 %, p : 0,057) que les P. auritus . Cette différence, peu significative, confirme donc partiellement l'idée selon laquelle P. austriacus consomme plus de Lépidoptères que P. auritus .

Les autres différences interspécifiques portent sur les Coléoptères et les Tipules. Les premiers sont consommés un peu plus intensivement par P. austriacus (+ 2,9 %, p = 0,040) et les secondes par P. auritus (+ 7,8 %, p = 0,008). La consommation des autres groupes de proies n'est pas statistiquement différente. Les catégories de proies consommées par les deux espèces sont qualitativement identiques et leurs proportions similaires.

De ce point de vue, on infirme l'idée que le régime alimentaire des P. auritus se distingue des P. austriacus par une diversification de son régime avec des Arachnides, des Dermaptères et des Diptères diurnes comme les Cyclorrhaphes.

Une autre différence, en comparaison avec le régime alimentaire de P. austriacus étudié en Europe centrale (B AUEROVA 1982) réside dans la consommation des Diptères. Bauerova avait identifié 10,7 % de Diptères tandis que notre étude montre une consommation moyenne de 23,8 % de Diptères (Tipules, Cyclorrhaphes, divers, Tab. 2.9). Cela met donc en évidence l'existence de variations dans le régime alimentaire des P. austriacus .

Sur la base de ces résultats, on peut considérer que les exigences trophiques des deux espèces semblent assez similaires, les trois différences significatives étant comprises entre 2,9 % (Coléoptères) et 7,8 % (Tipules). Le régime alimentaire des deux espèces se recouvre davantage qu'il ne se différencie 5. De ce point de vue, on pourrait donc considérer que le principe d'exclusion compétitive n'est que partiellement vérifié. On pourrait en déduire, si on postule que les ressources ne sont pas illimitées, que la coexistence des deux espèces sympatriques ne peut être stable et durable.

Que se passe-t-il si on individualise le comportement alimentaire de la colonie mixte (syntopique) ? Le comportement alimentaire des deux espèces provenant de colonies exclusivement monospécifiques est- il toujours similaire, comme nous venons de le montrer ?

4Belgique = 50°N 5Calcul du chevauchement de niche selon Pianka = 0,9 (résultats non présentés).

Chapitre 2 : Régime alimentaire estival 44 5.3 Comparaison interspécifique : colonies monospécifiques

Contrairement au premier modèle, le modèle 2 permet d'individualiser le comportement alimentaire des deux espèces provenant de colonies monospécifiques et de la colonie mixte (syntopique).

Dans un premier temps, on s'intéresse aux différences de régime alimentaire des deux espèces lorsqu'elles appartiennent à des colonies monospécifiques.

Alors que le modèle 1 ne prédisait que des légères différences parmi les Coléoptères, Lépidoptères et Tipules, la prise en compte des conditions de cohabitation permet de mettre en évidence des différences quantitatives plus marquées.

Par rapport à P. auritus , P. austriacus consomme plus de Coléoptères (+ 5,0 %) et de Lépidoptères (+ 14,4 %) et moins d'Arachnides, de Dermaptères et de Tipules (- 8,3 % à - 9,5 %).

La consommation plus importante de Coléoptères et de Lépidoptères par les P. austriacus était déjà prédite par le premier modèle. Ces différences de régime montrent donc une tendance lourde entre les deux espèces. Chez P. austriacus , en Europe centrale, B AUEROVA (1982) et A NDREAS (2010) avaient également montré que les Coléoptères étaient, après les Lépidoptères, le groupe de proies le plus fréquemment consommé.

Nos résultats concernant le régime alimentaire de P. auritus confirment également ceux des études antérieures (S WIFT &RACEY 1983, B AUEROVA 1982, R YDELL 1989b, S HIEL et al. 1991, B ECK 1995). On retrouve en effet l'idée selon laquelle les P. auritus se spécialisent davantage sur des proies non volantes, comme les Arachnides et les Dermapères, au détriment des Lépidoptères.

Ces résultats sont aussi concordants avec ceux de l'étude suisse de A SHRAFI et al . (2011) qui ont montré que la niche trophique des P. auritus (Indice de Levin = 1,90) est plus large que celle des P. austriacus (indice de Levin = 1,22) 6 essentiellement en raison d’une consommation plus importante de proies diurnes ou non volantes.

Ces différences peuvent-être mises en relation avec des techniques de chasse différentes. Chez les P. auritus , on estime qu'environ 50 % des proies sont capturées par glanage (R YDELL 1989b, A NDERSON &RACEY 1991, S WIFT 1998). La moitié des Lépidoptères, la plupart des Coléoptères, tout comme les proies non volantes (Arachnides, Dermaptères) ou diurnes (Cyclorrhaphes) seraient capturées sur le feuillage, sur le tronc voire au sol. Les P. austriacus seraient par contre moins enclins à prélever leurs proies sur le feuillage et les captureraient essentiellement en plein vol (B AUEROVA 1982, B ECK 1995, ASHRAFI et al ., 2011).

Toutefois, ces comportements de chasse sont fortement modulables. En Suisse (A SHRAFI et al ., 2011), l'estimation de la proportion de proies glanées est de 27,8 % pour les P. auritus et de 2,7 % pour les P. austriacus, alors qu'en Belgique, lors de notre étude des colonies monospécifiques, cette proportion est de 15,6 % chez P. auritus contre 6,3 % chez P. austriacus. Le rapport est donc de 10 en Suisse et seulement de 2,5 en Belgique.

Néanmoins, les exigences alimentaires des deux espèces se différencieraient donc permettant d'expliquer comment ces deux espèces peuvent coexister. Sur la base de ce constat, on pourrait donc admettre que le comportement alimentaire des deux espèces permettrait d'expliquer pourquoi les deux espèces peuvent partager le même gîte et coexister de façon durable en limitant la pression de compétition pour les ressources trophiques. Pour le vérifier, les résultats du régime alimentaire des deux espèces en condition syntopique et des colonies monospécifiques doivent être opposés.

6Calcul de l'indice de Levin ( = 1/ 5 pi²) dans notre étude : P. auritus = 2,49 et P. austriacus = 1,99 (U = 2216,5, z = -2,475, p = 0,0133) (résultats non présentés).

Chapitre 2 : Régime alimentaire estival 45 5.4 Comparaison interspécifique : colonies monospécifiques vs colonie mixte

Comparé aux colonies monospécifiques de P. auritus , le modèle 2 indique que les P. auritus issus de la colonie mixte de Pondrôme ont un régime alimentaire très similaire. Ils consomment un peu moins de Dermaptères (- 4,2 %, p = 0,002) et de Cyclorrhaphes (- 7,0 %, p = 0,006). La consommation prédite des autres groupes de proies n'est pas statistiquement différente et la valeur des coefficients reste inférieure à 1 %, hormis pour les Lépidoptères ou elle atteint 7,9 % (Tab. 2.13, Fig. 2.6).

Toujours en comparaison avec les colonies monospécifiques de P. auritus , les différences de régime alimentaire des P. austriacus provenant de la colonie mixte de Pondrôme sont par contre plus marquées. Ces oreillards gris consomment des quantités plus importantes d'Arachnides (+ 6,2 %, p < 0,0005) et de Dermaptères (+ 2,5 %, p < 0,0005), au détriment des Lépidoptères (- 11,2 %, p = 0,006) (Tab. 2.13, Fig. 2.6).

Ceci paraît encore plus évident lorsque l'on compare le comportement alimentaire des P. austriacus de Pondrôme aux P. austriacus issus des colonies monospécifiques (Tab. 2.14, fig. 2.7). En syntopie, P. austriacus montre une consommation prédite en Arachnides et en Dermaptères supérieure de 14,5 % (p < 0,0005) et 11,3 % (p < 0 ,0005), tandis que la consommation de Lépidoptères est largement inférieure : - 25,6 % (p < 0,0005). On prédit également des différences parmi les Tipules (+ 7,9 %, p = 0,034), consommés plus massivement par les P. austriacus syntopiques, et les Coléoptères (- 11,1 %, p = 0,009) consommés plus massivement par les P. austriacus provenant des colonies monospécifiques.

La comparaison des coefficients du tableau 2.14 entre les P. auritus « monospécifiques » et les P. austriacus syntopiques montre, que les signes des coefficients sont identiques et que leurs valeurs absolues sont plus importantes chez les P. austriacus de Pondrôme. Les Cyclorrhaphes et les Tipules font cependant exception.

On peut ainsi considérer que, sur la base des catégories de proies distinguées dans le régime alimentaire, les P. austriacus syntopiques de Pondrôme ont modifié leur comportement alimentaire en devenant des « super » P. auritus .

Le fait que le régime alimentaire des P. auritus syntopiques ne se distingue que faiblement des P. auritus « non syntopiques» (Tab. 2.13, Fig. 2.6), permet d'affirmer que l'adaptation des P. austriacus à la syntopie paraît plus importante que celle des P. auritus.

En condition syntopique, les deux espèces ont donc un régime alimentaire différencié. Cependant, pour P. austriacus , les différences interspécifiques observées entre les colonies monospécifiques ne se sont pas maintenue. Le comportement des P. austriacus ne semble donc pas figé et se modifie en fonction des conditions de cohabitation. Cette variabilité pourrait indiquer que le moteur sous-jacent responsable de la ségrégation trophique entre les deux espèces jumelles n'est pas indépendant de la compétition interspécifique. Autrement dit, cette adaptation du régime alimentaire pourrait induire que la compétition est encore active entre les deux espèces.

5.5 P. austriacus et la capacité de glaner

Contrairement aux colonies de P. austriacus monospécifiques, la proportion de proies glanées (proies diurnes et non volantes) par la colonie de P. austriacus syntopique est plus importante (Fig. 2.6 ou 2.7). En syntopie, la proportion moyenne observée de proies glanées est de 32,5 % contre 6,3 chez les P. austriacus issus de colonies monospécifiques. On postule cependant que la totalité des Lépidoptères est capturée en plein vol.

En réalité, ce postulat paraît peu crédible puisque si P. austriacus est capable de glaner des Dermaptères, des Arachnides ou des Diptères, pourquoi ne pourrait-il pas glaner des Lépidoptères ?

Chapitre 2 : Régime alimentaire estival 46 D'après l'identification de restes d'ailes de Lépidoptères récoltées sous un reposoir, 75,9 % à 90,1 % des ailes appartiennent à la famille des Noctuidae (B AUEROVA 1982, M EINEKE 1992, C ASTOR et al. 1993). Cette superfamille se caractérise notamment par la présence d'un organe tympanique. On peut donc supposer que ces papillons sont capturés par écoute passive (sans émettre d'ultra-sons), soit par le bruit qu'ils génèrent lorsqu'ils sont en mouvement sur le feuillage, soit par le bruit que font leurs ailes lorsqu'ils se déplacent. Une autre hypothèse serait que l'intensité ou la fréquence des ultra-sons produits par P. austriacus est inférieure à la sensibilité de l'organe tympanique des Noctuidae, ce qui permettrait de les capturer en plein vol, à l'instar de la barbastelle d'Europe ( Barbastellus barbastellus ) (D ENZINGER et al , 2001). Les caractéristiques des ultra-sons produits par les deux espèces d'oreillards sont cependant très proches et généralement non différentiables sur le terrain. Actuellement, à notre connaissance, il n'existe aucune étude expérimentale publiée comparant les ultra-sons produits par les deux espèces d'oreillards lors de la capture de lépidoptères.

Il est donc difficile de savoir quelle est la proportion réelle de Lépidoptères glanés par l'oreillard gris. L'estimation de 32,5 % des proies capturées par glanage chez les P. austriacus syntopiques doit être considérée comme une proportion minimale.

La proportion de proies non volantes observées dans le régime alimentaire des P. auritus syntopiques n'est que de 6,4 % (Arachnides, Dermaptères, Cyclorrhaphes) ou 35,1 % (Tab. 2.9) si on considère que 50 % des Lépidoptères pourraient être capturés par glanage comme cela a été démontré par ANDERSON &RACEY (1991). Cette proportion atteint 51,1 % pour les colonies monospécifiques de P. auritus, ce qui correspond aux estimations faites par R YDELL (1989b), A NDERSON &RACEY (1991) et SWIFT (1998).

Sur la base de nos résultats, lorsque les deux espèces coexistent intimement, on ne peut donc affirmer qu'elles se différencient par l'utilisation de techniques de chasse différentes. Pour cela, il faudrait connaître la part de Lépidoptères capturés par glanage chez les deux espèces.

P. austriacus a également la capacité de glaner ses proies. Certains oreillards gris ont déjà été observés en train de chasser dans le feuillage des arbres (BARATAUD 1990, F LUCKIGER &BECK 1995, obs. pers. ) et des restes de papillons diurnes (ex : Inachis io, Aglais urticae ) ont été retrouvés en dessous de reposoirs (B ARATAUD 1990, MEINEKE 1991, obs. pers. ).

L'intensité avec laquelle il glane ses proies à Pondrôme peut paraître surprenante. Pourtant, des proportions importantes d'insectes capturés par glanage ont également été observées dans une autre colonie de P. austriacus, mais dans des conditions différentes. En effet, lorsque la disponibilité des ressources alimentaires est plus limitée, comme en période pré-hivernale et hivernale, le régime alimentaire des P. austriacus de Richelle en 1999, 2000 et 2001 se compose de 79,1 %, 63,8 % et 85,7 % de Diptères Cyclorrhaphes (Chapitre 3, Tab. 3.1). Ces diptères sont diurnes et ne peuvent être capturés que par glanage. Nous l'avons observé en fin de journée le 14/11/2001. Un oreillard gris faisait des allers-retours entre la poutre faîtière et un pignon en pierre où se trouvait une grappe de plusieurs centaines de mouches en diapause. La capture des mouches, directement sur le mur, était précédée de vols stationnaires de quelques secondes devant la grappe.

De même, pendant la période estivale, on retrouve occasionnellement d'autres insectes diurnes ou non volants dans le régime alimentaire des P. austriacus . Ces insectes sont très probablement capturés sur le feuillage des arbres, des buissons, sur les troncs ou encore au sol. A titre d'exemple, des Chilopodes ont été identifiés dans les échantillons du 2 août 2000 de la colonie de Thy, du 28 juin et du 2 août 2000 de la colonie de Pondrôme, des Homoptères aphidiodea (pucerons) dans les échantillons du 5 juin et du 4 août 2000 de Richelle, des chenilles dans les échantillons du 2 août 2000 de Thy et du 4 septembre 2000 de Pondrôme, un Chrysomelidae dans l'échantillon du 9 août 1999 de l'église de Neerpelt ou encore des Carabidae dans les échantillons du 6 juin 2001 et 5 septembre 2000 de Antheit ainsi que dans ceux du 4 et 30 juillet 2001 de la colonie de Gembes.

Chapitre 2 : Régime alimentaire estival 47 Quels sont les avantages du glanage ?

Glaner ses proies au lieu de les capturer en plein vol fournit au moins trois avantages (S WIFT 1998) :

1 ) Cela permet de capturer des Lépidoptères tympaniques lorsqu'ils sont au repos sur le feuillage. Les espèces glaneuses comme M. bechsteinii consomment d'ailleurs des quantités importantes de Lépidoptères (S IEMERS &SWIFT 2006, B ARATAUD et al . 2009).

2 ) Cela permet de chasser toute la nuit, en étant indépendant des deux pics d'activité observés chez les insectes nocturnes volants correspondant au crépuscule et à l'aube. De même, cela procure une plus grande indépendance face aux températures nocturnes. En effet, des températures inférieures à 10°C provoquent une diminution de l'activité des insectes volants (R YDELL 1989a).

3 ) Enfin, cela permet d'élargir la gamme de taille des proies qu'il est possible de capturer et de diversifier le régime alimentaire. Il est en effet plus facile de manipuler des Lépidoptères de grande taille lorsqu'ils sont capturés sur un support qu'en plein air et des proies non volantes comme les Arachnides, Dermaptères, chenilles, Chilopodes ou encore les Carabes enrichissent le régime alimentaire.

5.6 Les similitudes avec l'étude de deux espèces jumelles de Myotis : allopatrie vs sympatrie

A notre connaissance, une adaptation du régime alimentaire observée à une échelle micro géographique n'a jamais été constatée chez des chauves-souris insectivores à l'exception d'une étude au Nouveau Mexique. Myotis evotis (Western Long-eared Myotis ) et M. auriculus (Southwestern Myotis ) sont deux espèces jumelles qui n'ont été distinguées qu'à la fin des années soixante (G ENOWAYS & JONES 1969).

Myotis evotis est considérée comme une espèce glaneuse repérant ses proies par écoute passive et les capturant sur le feuillage, les troncs ou au sol. Elle peut également capturer ses proies en plein vol. C'est un consommateur important de papillons tympaniques. On le trouve dans la partie ouest de la zone tempérée du nord de l’Amérique. Il chasse dans les bois de pins et au-dessus des prairies (F AURE &BARCLAY 1992, 1994).

Myotis auriculus occupe la partie sud-est et sud-ouest de l'Arizona et l'ouest du Nouveau Mexique. Cette espèce peu étudiée, aussi considérée comme glaneuse, s'est spécialisée sur les Lépidoptères (F INDLEY 1987). Il chasse dans les bois de pins et dans le bois semi-arides mais peut aussi exploiter les prairies et les maquis des zones semi-désertiques.

Ces deux espèces ont des exigences alimentaires très proches en allopatrie : ils consomment principalement des Lépidoptères et des Coléoptères. Par contre, en syntopie (capture au filet sur des terrains de chasse exploités par les deux espèces), les deux espèces modifient leur comportement alimentaire. M. evotis se spécialise dans la prédation des Coléoptères tandis que M. auriculus accentue sa consommation de Lépidoptères (H USAR 1976). Trente ans plus tard, l'étude comparative de la morphologie des mâchoires et du crâne des deux espèces a mis en évidence qu'en sympatrie, les différences morphologiques entre les deux espèces sont plus accentuées. La mâchoire et les molaires de M. evotis sont plus robustes, lui permettant de consommer plus efficacement des proies plus coriaces, comme les Coléoptères (G ANNON &RÁCZ 2006). On peut donc supposer que pour réduire la pression de la compétition interspécifique entre ces deux espèces jumelles, la ségrégation de la niche trophique s'est accompagnée d'un déplacement de caractère (B ROWN &WILSON 1956).

Chapitre 2 : Régime alimentaire estival 48 5.7 Variations annuelles

En 2000, les deux modèles testés ont prédit une consommation moyenne significative plus faible de Lépidoptères. Les différences sont de – 9,1 % selon le modèle 1 et de – 9,7 % selon le modèle 2. Étant donné que ces différences se répètent dans les deux modèles, on considère que ces résultats sont robustes.

La consommation plus faible de Lépidoptères en 2000 peut-être mise en relation avec des conditions météorologiques particulières. Le mois de juillet 2000 est considéré comme le 5ième mois le plus sombre enregistré par l'IRM depuis 1883. Le début du mois de juillet 2000 s'est également caractérisé par des températures moyennes anormalement fraîches, plus fraîches de 1°C, ainsi que par une pluviosité exceptionnelle, avec 87,8 l/m² enregistrés à Uccle. Ce phénomène n'avait plus été enregistré depuis 1980 et l'IRM considère que le mois de juillet 2000 fut très anormal. A contrario, en 1999, les températures moyennes mensuelles furent toutes supérieures aux valeurs normales. Le mois de juillet 1999 est ainsi considéré comme le cinquième mois le plus chaud jamais enregistré à Uccle (http://www.meteo.be/meteo/view/fr/1084696-Statistiques.html ).

L'activité des Lépidoptères est négativement influencée par la pluie et des températures fraîches (G ROUPE DE TRAVAIL DES LÉPIDOPTÉRISTES 1999). On peut donc admettre que les mauvaises conditions météorologiques du mois juillet 2000 ont influencé négativement la disponibilité en Lépidoptères. En conséquence, les oreillards en ont consommé des quantités moindres.

Cette sous-représentation des Lépidoptères en 2000 semble compensée par une consommation significativement plus importante de Dermaptères, Coléoptères et Diptères sp. Selon le modèle 2, les différences annuelles prédites sont toutefois très faibles pour les Dermaptères (+ 1,7 %) et les Diptères sp. (+ 1,3 %). L'augmentation des Coléoptères, en 2000, est par contre plus importante (+ 6,1 %). La diminution de consommation de Lépidoptères en 2000 a donc été compensée essentiellement par une consommation plus importante de Coléoptères.

5.8 Variations saisonnières, phénologie et écologie des proies

Des variations saisonnières sont prédites pour toutes les catégories de proies. Les faibles valeurs et variations des coefficients des Arachnides, des Dermaptères et des Diptères sp. rendent cependant l’interprétation délicate.

Par contre, pour deux catégories de proies clés, les Tipules et les Lépidoptères, des variations saisonnières sont mises en évidence. De même, la représentation des Coléoptères et des Cyclorrhaphes montre également des fluctuations au fur et à mesure de la saison.

On trouvera ci-dessous, sur la base de la littérature, la phénologie et l’écologie du principal groupe de proie identifié dans le régime alimentaire, les Lépidoptères. Les écailles des ailes retrouvées dans les déjections ne permettent pas d’identifier les espèces. Pour contourner ce problème, on propose de passer en revue l’écologie des espèces qui ont été retrouvées en dessous de reposoirs à partir des publications de K RAUS 1978, ROBINSON 1990, MEINEKE 1992, THOMPSON 1982, BARATAUD com.pers.

L’objectif est de pouvoir expliquer les variations saisonnières du régime alimentaire, d’établir si les oreillards sont opportunistes ou spécialistes, et de prédire la nature de leurs habitats de chasse. La phénologie et l’écologie des autres groupes de proies est présentée dans l’annexe 6 pour alléger la lecture. Seule une synthèse est présentée à la fin de ce paragraphe.

Chapitre 2 : Régime alimentaire estival 49 Les Lépidoptères

C'est en juillet et août que leur proportion est la plus importante dans le régime alimentaire, respectivement + 13,4 % et + 18,7 % par rapport au mois d'avril, selon le modèle 2.

Les cycles de développement des nombreuses espèces de Lépidoptères hétérocères sont très variables, si bien qu'en Belgique, on peut observer des papillons de nuit toute l'année et dans tous les milieux. A la fin de l'hiver, les espèces qui ont hiverné sous forme de chrysalides apparaissent dès février-mars, au moment où fleurissent les chatons de saules et de noisetiers. Le nombre d'espèces augmente ensuite au fur et à mesure de l’avancement de la saison. C'est en juillet et en août que l'on rencontre le plus grand nombre d'espèces et d'individus. Les premières nuits froides de septembre réduisent considérablement le nombre d'espèces actives et les papillons de nuit se font rares dès les premières gelées (G ROUPE DE TRAVAIL DES LÉPIDOPTÉRISTES 1999).

On trouvera en annexe 7 et 8, la compilation des espèces de Lépidoptères identifiées à partir de restes d’ailes retrouvées sur des reposoirs utilisés par P. auritus (K RAUS 1978, ROBINSON 1990, MEINEKE 1992, THOMPSON 1982, BARATAUD com.pers.) et P. austriacus (B AUEROVA 1982, MEINEKE 1992).

Au total, 176 espèces appartenant à 13 familles ont été identifiées : Endromidae (n = 1), Nolinae (n = 1), Drepanidae (n = 2), Lasiocampidae (n = 2), Lymantriidae (n = 2), Thyatiridae (n = 2), Hepialidae (n = 3), Nymphalidae ( n = 3), Sphingidae (n = 4), Arctiidae (n = 5), Notodontidae (n = 14) Geometridae (n = 16), Noctuidae (n = 121). Ce sont des Noctuidae qui constituent la plus grande partie du régime alimentaire des oreillards. En Belgique, 379 espèces de Noctuidae ont été recensées (D E PRINS &STEENMAN 2001).

Parmi les 176 espèces mentionnées ci-avant, 55 espèces (30,1 %) ont été identifiées chez les deux espèces d'oreillards, 28 espèces uniquement chez P. auritus (15,9 %) et 93 espèces (53,4 %) identifiées uniquement chez P. austriacus.

Sur la base des plantes nourricières des chenilles (www.nic.funet.fi , http://ukmoths.org.uk , www.phegea.org , www.lepinet.fr ), les 176 espèces ont été réparties en 8 catégories : ubiquistes (9,1 %), conifères (2,3 %), feuillus (25,0 %), feuillus et buissons (9,1 %), feuillus et herbacées (5,1 %), buissons et herbacées (1,7 %), buissons (0,6 %) et enfin herbacées (47,2 %) (Annexe 7).

Parmi les 55 espèces consommées par les deux oreillards, 54,5 % sont liées à la végétation herbacée (Dactylis, Festuca, Galium, Lamium, Plantago, Polygonum bistorta, Primula, Rumex, Stellaria, Taraxacum, Urtica, Vicia... ). Sur les 28 espèces consommées uniquement par P. auritus , on constate également que la majorité des plantes hôtes (64,3 %) sont herbacées. En revanche, la proportion des 93 espèces de papillons uniquement consommée par P. austriacus est nettement moindre : 37,6 % des chenilles nécessitent des végétaux herbacés, la même proportion (37,8 %) de chenilles mangeant des feuilles d'arbres comme Alnus, Acer, Betula, Fagus, Populus, Quercus, Salix, Tilia (Fig. 2.9).

Le même exercice est réalisé sur la base des habitats utilisés par les papillons adultes (R OBINEAU 2007, F ICHEFET et al. 2008, W ARING et al. 2010) (Annexe 8). Les espèces ont été réparties en 7 catégories : ubiquistes (18,8 %), bois de conifères (2,3 %), bois de feuillus (26,1 %), bois en contexte humide ou alluvial (8,0 %), prairies (25,8 %), zones humides (17,6 %), inconnus (1,7 %) (Fig. 2.10).

Sur les 54 espèces consommées par les deux espèces d'oreillards, 32,1 % sont liées à des prairies, 25,0 % n'ont pas d'habitat préférentiel, 21,3 % sont liées aux bois de feuillus ou aux zones humides. Sur les 28 espèces consommées uniquement par P. auritus , c'est la majorité des espèces (53,6 %) qui sont liées à des habitats ouverts ou semi-ouverts comme les praires (32,1 %) et les zones humides (21,4 %) tandis que les habitats boisés constituent l'habitat clé pour 21,3 % des espèces. Concernant les 94 espèces consommées par P. austriacus , les habitats boisés constituent le principal habitat (46,2 %), les

Chapitre 2 : Régime alimentaire estival 50 prairies et les zones humides (38,7 %) constituent des habitats clés dans des proportions comparables (Fig. 2.10).

En dépit des différences inhérentes aux 5 sites d'étude, ces observations écologiques indirectes, tant pour les chenilles que pour les adultes, indiquent que les bois, tout comme les prairies constituent des habitats clés pour les deux espèces d'oreillards. P. austriacus pourrait cependant être davantage dépendant des feuillus et des massifs boisés alors que P. auritus le serait pour des habitats caractérisés par de la végétation herbacée : prairies et zones humides.

Habitats des plantes nourricières des Lépidoptères identifiés dans le régime alimentaire des Plecotus par Kraus 1978, Bauerova 1982,, Thomson 1982, Robinson 1990, Meineke 1992, Barataud com.pers.

100% 90% Herbacées 80% Buissons et herbacées 70% Buissons 60% Ubiquistes Feuillus et herbacées 50% Feuillus et buissons 40% Feuillus 30% Conifères 20% 10% 0% P. aur P. aur + aus P. aus Total

Fig. 2.9 : Ventilation des 176 espèces de Lépidoptères identifiées à partir des restes d'ailes collectés sur des reposoirs en fonction des plantes nourricières recherchées par les chenilles.

Habitats des Lepidoptères identifiés dans le régime alimentaire des Plecotus par Kraus 1978, Bauerova 1982, Thomson 1982, Robinson 1990, Meineke 1992, Barataud com.pers.

100% 90% Inconnu 80% Zones humides 70% Prairies 60% Bois contexte humide 50% Bois de feuillus 40% Bois de conifères 30% Ubiquistes 20% 10% 0% P. aur P. aur + aus P. aus Total

Fig. 2.10 : Ventilation des 176 espèces de Lépidoptères identifiées à partir des restes d'ailes collectées sous des reposoirs en fonction des habitats utilisés par les adultes.

Synthèse de l’ensemble des groupes de proies (voir annexe 5)

La confrontation des résultats du régime alimentaire avec la phénologie des proies montre que les oreillards ont adopté un comportement opportuniste, en consommant des Lépidoptères, des Tipules et des Coléoptères lorsqu'ils sont les plus abondants. Les Lépidoptères en juillet et août, les Tipules en mai et septembre, les Coléoptères en mai.

Les Opilions et les Dermaptères peuvent se rassembler pour former des agrégats de plusieurs centaines d'individus. Consommer ces deux catégories de proies permettrait donc aux oreillards d'exploiter une ressource localement abondante et de maximiser les gains énergétiques (« optimal foraging theory »,

Chapitre 2 : Régime alimentaire estival 51 MCARTHUR &PIANKA 1966). Nous ne disposons cependant pas de preuve prouvant que ces deux catégories de proies sont capturées dans des agrégats.

Parmi les Cyclorrhaphes , Scatophaga stercoraria est disponible tout l'été ; sa consommation plus importante en fin de saison permettrait, avec les Tipules, les Arachnides et les Dermapères, de compléter le régime alimentaire des oreillards alors que la disponibilité en Lépidoptères décline.

Les habitats arborés tels que les parcs, jardins, massifs boisés, buissons, haies vives, lisières, tout comme les prairies, sont des habitats utilisés par les Opilions, Dermaptères, Coléoptères, Tipules, Lépidoptères.

Sur la base de l’écologie des proies, nous pouvons déduire que les habitats exploités par les oreillards sont aussi bien les prairies, les haies, les buissons, les jardins que les massifs boisés et ce, sans distinction évidente entre les deux espèces. Les Lépidoptères font peut-être exception puisque les espèces consommées par P. austriacus semblent-être davantage liées au milieu forestier que celles consommées par P. auritus .

5.9 Variations saisonnières et cycle de vie en syntopie

La comparaison des proies consommées mensuellement par les P. auritus et les P. austriacus de Pondrôme montre que les différences entre les deux espèces ne sont pas toujours significatives (Tab. 2.15, Fig. 2.8). Concernant les Arachnides, les différences le sont en juin (p = 0,046) et juillet (p = 0,020), en août pour les Dermaptères (p = 0,019) et les Coléptères (p = 0,032), en juillet (p = 0,020) et août (p = 0,034) pour les Lépidoptères.

Chez les femelles de P. auritus , on sait que la demande énergétique est plus importante à la fin de la gestation et à la fin de la lactation (M CLEAN et al . 1999), soit pendant la mi-juin et le début du mois d'août. A notre connaissance, aucune publication ne permet d'affirmer que les besoins énergétiques des P. austriacus diffèrent des P. auritus .

Nos résultats montrent donc que la différentiation du régime alimentaire est plus marquée lorsque la demande énergétique est plus importante.

A la fin de la gestation, les P. austriacus orientent leur régime alimentaire vers les Arachnides tandis que les P. auritus se spécialisent davantage dans la consommation de Lépidoptères. Après la lactation, en août, alors que les P. auritus maintiennent leur spécialisation sur les Lépidoptères (75,6 %), les P. austriacus diversifient leur régime alimentaire essentiellement avec des Dermaptères (16,6 %) et des Arachnides (14,3 %) en septembre.

La valeur énergétique des Arachnides (Opilions) est de 25,1 kJ/g de poids sec. Celle des Dermaptères est de 26,8 kJ/g tandis que celle des Lépidoptères est de 21,25 kJ/g (C UMMINS &WUYCHECK 1973, TÖRÖK &LUDVIG 1988). D'un point de vue énergétique, la consommation plus importante d'Arachnides et de Dermaptères par les P. austriacus leur apporte donc des proies au moins aussi intéressantes que les Lépidoptères.

Chapitre 2 : Régime alimentaire estival 52 6. C onclusions : régime alimentaire estival

Notre étude met donc en évidence que :

3) Le régime alimentaire des deux espèces jumelles est très proche. Lorsque l'on ne tient pas compte des conditions de cohabitation, les seules différences significatives portent sur les Coléoptères, les Tipules et les Lépidoptères. Les P. austriacus consomment un peu plus de Coléoptères (+ 2,9 %, p = 0,040) et de Lépidoptères (+ 6,4 %, p = 0,057) et moins de Tipules (- 7,8 %, p = 0,008).

4) P. austriacus est également capable, comme P. auritus , de glaner une part importante de ses proies, contrairement à ce que les études précédentes laissaient présager.

5) P. austriacus, et, dans une moindre mesure, P. auritus, modifient leur niche alimentaire lorsqu'ils coexistent intimement. Ceci laisse présager que les deux espèces se partagent les ressources trophiques et permettent la cohabitation, diminuant la pression de compétition interspécifique pour les ressources alimentaires.

6) La différentiation du régime alimentaire ne semble pas figée puisque le régime alimentaire des P. austriacus « monospécifiques » diffère sensiblement de celui de la colonie mixte. Le mécanisme sous-jacent expliquant la ségrégation trophique entre les deux espèces jumelles pourrait donc être dépendant de la compétition interspécifique, si l'on admet que les ressources sont limitées.

7) Les variations mensuelles des proies consommées en syntopie montrent que la différentiation du régime alimentaire est plus marquée lorsque la demande énergétique est plus importante. Ceci pourrait apporter une preuve supplémentaire de l'existence de la compétition entre les deux espèces.

8) La consommation saisonnière des Lépidoptères, Tipules, Coléoptères et Cyclorrhaphes met en évidence le comportement opportuniste des deux espèces d'oreillards.

9) Nos résultats montrent que la ségrégation alimentaire entre les deux espèces d’oreillards, même si elle reste parfois ténue lorsque l’on ne tient pas compte des conditions de cohabitation, est un mécanisme qui contribue probablement à rendre possible la cohabitation de ces deux espèces jumelles.

Sur la base de ces constats, on peut donc maintenant poser l’hypothèse de l’existence d’une ségrégation spatiale de l’activité de chasse. De même, une ségrégation de l’activité temporelle des chauves-souris peut également constituer un autre mécanisme de partage des ressources (A DAMS & THIBAULT 2006, R AZGOUR et al. 2011).

Pour vérifier ces hypothèses, le chapitre 4 concerne l’étude de l'utilisation de l'espace et du temps par radiopistage des deux espèces d’oreillards provenant de deux colonies monospécifiques et de la colonie mixte.

Chapitre 2 : Régime alimentaire estival 53 Chapitre 3 : Régime alimentaire pré-hivernal et hivernal

1. I ntroduction

En hiver, lorsque la disponibilité en proies diminue drastiquement, les chauves-souris insectivores des zones tempérées utilisent principalement deux stratégies : migrer vers des latitudes plus basses, des régions plus chaudes ou rester et entrer en hibernation dans les sites d'hivernage (M CNAB 1982). Endothermes hétérothermes, elles ont la faculté de maintenir leur température corporelle ou de la laisser chuter jusqu'à une valeur proche de la température ambiante. Une fois que la température corporelle tombe sous un certain niveau, elles entrent en léthargie (R ANSOME 1990).

Selon A LTRINGHAM (1996), la torpeur hivernale se caractérise, en terme physiologique par : 1) une réduction de la température corporelle, de 1 à 2°C par rapport à la température ambiante, 2) une diminution du rythme cardiaque, de la respiration et du métabolisme, 3) une vasoconstriction périphérique lorsque les températures sont très basses. La circulation sanguine est réduite à son minimum et limitée à certains organes vitaux. Durant la torpeur, le coût énergétique de la thermorégulation est largement réduit et, par conséquent, les chauves-souris subsistent en consommant leurs réserves de graisse (T HOMAS 1995).

En hiver, il est donc généralement admis que les chauves-souris insectivores des zones tempérées sont généralement inactives, se maintiennent dans leur site d'hibernation et ne se nourrissent pas.

Pourtant, au Canada, une étude par suivi acoustique réalisée dans le sud-est de l’Alberta a montré que des chauves-souris ( Myotis ciliolabrum, Myotis evotis et Eptesicus fuscus ) sont actives durant tous les mois de l'année, y compris lorsque les températures ambiantes ne dépassent pas 0ºC durant le jour et la nuit, voire jusqu’à des températures nocturnes étonnamment froides (-8ºC) (L AUSEN &BARCLAY 2006). En Nouvelle-Zélande (climat tempéré froid), le radiopistage hivernal de 22 Mystacina tuberculata, une espèce de microchiroptère omnivore dont les gîtes sont situés dans les trous d'arbres, a montré que l'espèce restait active à des températures extérieures de -1,4°C. La majorité des individus émergent du gîte, se nourrissent, interagissent socialement et certains animaux changent de gîte (S EDGELEY 2001, TURBILL 2008). En Europe, une activité hivernale est également renseignée chez différentes espèces : Rhinolophus ferrumequinum , Rhinolophus hipposideros, Pipistrellus pipistrellus, Plecotus sp., Nyctalus noctula (R ANSOME 1968, AVERY 1985, H ARMATA 1985, S PEAKMAN &RACEY 1989, P ARK et al. 1999, SENDOR et al . 2000, KANUCH et al. 2005, W ILLIMAS et al. 2011).

P. auritus et P. austriacus sont deux espèces sédentaires qui entre en torpeur dans des sites d'hibernation situés généralement à faible distance (quelques kilomètres) des quartiers d'été. Cependant, nos deux espèces de Plecotus sont également connues pour se déplacer fréquemment en hiver, que ce soit en modifiant leur emplacement à l'intérieur du site ou en se déplaçant vers d'autres sites (S TEBBINGS 1966, 1970, DAAN 1970, KUIPERS &DAAN 1970, H ARMATA 1985). La période d'hibernation est donc entrecoupée de réveils. La fréquence de ces réveils est régie par le métabolisme propre à chaque espèce et, surtout, par la température ambiante (R ANSOME 1968, TWENTE et al. 1985, PARK et al. 1999).

HAYS et al. (1992) ont montré que, dans une colonie des P. auritus maintenue en captivité, la fréquence des vols nocturnes en hiver (janvier à mars) était quasi quotidienne et corrélée avec l'heure

Chapitre 3 : Régime alimentaire hivernal 54 du coucher du soleil. En Angleterre, un vol diurne d'un Plecotus sp. a même été observé en janvier, alors que la température extérieure était négative et le sol couvert de neige (S TEBBINGS 1966, 1970).

L'activité hivernale de certaines espèces de chauves-souris implique donc logiquement de compenser les pertes énergétiques liées au réveil et aux déplacements (B RIGHAM 1987).

Très peu d'études ont cependant vérifié si les chauves-souris chassent activement et se nourrissent, ni a fortiori, quelle était la nature de leurs proies.

Dans ce chapitre, après avoir présenté les résultats, la discussion s'articule autour de deux points :

1. Les déjections récoltées correspondent-elles à des proies réellement consommées en hiver ? 2. L'analyse qualitative et quantitative des proies consommées qui est, sur base de la littérature, mise en relation avec leurs disponibilités et leur écologie respectives.

La discussion se clôture par une synthèse de l'écologie trophique hivernale des oreillards.

2. M éthodologie

La méthodologie est identique à celle décrite pour l'étude du régime alimentaire estival (chapitre 2).

3. R ésultats du régime alimentaire pré-hivernal et hivernal

Entre novembre et février, 15 échantillons provenant de 6 colonies ont été collectés dans les gîtes de maternité (577 déjections, 785 occurrences, 4 colonies de P. auritus , 2 colonies de P. austriacus ). Les gîtes concernés sont Baillamont (Ba), Gozin (Gz), Roly (Ry), Pondrôme (Pg), Richelle (R) et le collège de Neerpelt (N) (Tab. 3.1).

Colonie Espèce Date Année Période Araignée Coléoptère Dermaptère Diptère sp. Cyclorrhaphe Tipule Lépidoptère Divers Ba P. aur 16-déc 1999 Hiv 0,022 0,000 0,089 0,000 0,822 0,000 0,044 0,022 Ba P. aur 28-févr 1999 Hiv 0,000 0,000 0,000 0,000 0,909 0,000 0,000 0,091 Ba P. aur 6-nov 2001 Pré-hiv 0,074 0,000 0,265 0,015 0,324 0,029 0,279 0,015 Ba P. aur 8-janv 2001 Hiv 0,156 0,000 0,125 0,031 0,266 0,000 0,406 0,016 Gz P. aur 4-nov 1999 Pré-hiv 0,164 0,000 0,295 0,000 0,410 0,033 0,082 0,016 Gz P. aur 5-nov 2000 Pré-hiv 0,048 0,000 0,081 0,016 0,258 0,290 0,290 0,016 Gz P. aur 7-déc 2000 Hiv 0,056 0,000 0,074 0,019 0,611 0,000 0,204 0,037 Gz P. aur 6-nov 2001 Pré-hiv 0,105 0,000 0,228 0,000 0,456 0,000 0,193 0,018 N P. aur 3-déc 1999 Hiv 0,000 0,118 0,000 0,059 0,176 0,000 0,647 0,000 Ry P. aur 6-nov 2001 Pré-hiv 0,034 0,000 0,069 0,086 0,379 0,000 0,414 0,017 Pg P. aust 4-nov 1999 Pré-hiv 0,262 0,000 0,557 0,000 0,016 0,000 0,164 0,000 Pg P. aust 7-déc 2000 Hiv 0,229 0,000 0,398 0,036 0,084 0,000 0,253 0,000 R P. aust 13-déc 1999 Hiv 0,000 0,000 0,047 0,000 0,791 0,000 0,163 0,000 R P. aust 15-déc 2000 Hiv 0,021 0,000 0,000 0,000 0,638 0,021 0,213 0,106 R P. aust 14-nov 2001 Pré-hiv 0,000 0,000 0,000 0,000 0,857 0,048 0,048 0,048 Total Plecotus 0,097 0,003 0,182 0,018 0,422 0,031 0,224 0,024 Tab. 3.1 : Proportion des proies identifiées dans les échantillons pré-hivernaux (Pré-hiv) et hivernaux (Hiv). P. aur : P. auritus , P. aust : P. austriacus.

Chapitre 3 : Régime alimentaire hivernal 55 Globalement, les proies les plus fréquemment identifiées sont les Diptères Cyclorrhaphes (42,2 %), les Lépidoptères (22,4 %) et les Dermaptères (18,2 %). Viennent ensuite les Araignées (9,7 %), les Tipules (3,1 %), les Divers (2,4 %) et les autres Diptères (1,8 %) (Fig. 3.1).

Pour chaque catégorie de proie, on utilise un test non paramétrique de Mann-Whitney afin de détecter des différences entre les échantillons de P. austriacus (n = 5) et de P. auritus (n = 10), ainsi qu’entre les échantillons pré-hivernaux (n = 7) et hivernaux (n = 9) sans distinction de l’espèce. Hormis les Tipules (U = 49,5, z = 1,998, p = 0,046) quasi inexistants dans les échantillons hivernaux (Fig. 3.1), il n’y a aucune autre différence significative, l’hypothèse nulle est acceptée.

1. Pré-hiv (n=7) 2. Hiv (n=8) Total

Araignée Coléoptère Dermaptère Diptère sp. Cyclorrhaphe Tipule Lépidoptère Divers

Fig. 3.1 : Représentation graphique de la proportion des proies dans le régime alimentaire pré-hivernal et hivernal des Plecotus . Le chiffre entre parenthèses indique le nombre d'échantillons analysés.

4. D iscussion

4.1 Les déjections récoltées correspondent elles à des proies réellement consommées en hiver ?

Lorsque des déjections sont collectées en hiver, la première question à se poser est de savoir si les déjections sont réellement produites suite à l'ingestion récente de nourriture (W ITHAKER 1993). En effet, les proies ingérées durant l'automne peuvent-être retenues dans le tube digestif durant l'hiver et être rejetées sous forme de « winter pellets ». Chez Myotis lucifugus, Myotis septentrionalis et Eptesicus fuscus , ces « winter pellets » sont récoltées occasionnellement durant l'hiver. Ces déjections sont facilement reconnaissables par leur couleur verdâtre et par l'aspect décoloré des fragments de proies. On y retrouve également des amas plus foncés, probablement de la bile (W ITHAKER , com. pers. ). Malgré la production de déjections, sur la base d'analyses de contenus stomacaux récoltés sur des individus capturés en hiver, W ITHAKER &RISSLER (1992) ont estimé que ces trois espèces ne se nourrissent pas en hiver.

Dans notre étude, les restes de proies n'étaient pas plus décolorés que ceux provenant des échantillons estivaux et la quantité de déjections collectée était importante. A titre indicatif, sur la base d'un poids moyen d'une déjection d'oreillard estimé à 0,005 g (n = 200, 20 déjections x 5 échantillons de P.

Chapitre 3 : Régime alimentaire hivernal 56 auritus + 20 déjections x 5 échantillons P. austriacus ), l'estimation du nombre de crottes collectées dans les échantillons pré-hivernaux et hivernaux est comprise entre 102 et 1024 déjections ( P. auritus : Baillamont, 16/12/1999 : 356 déjections ; Baillamont, 6/11/2001 : 688 déjections ; Gozin, 4/11/1999 : 1024 déjections ; Gozin, 7/12/1999 : 508 déjections. P. austriacus : Pondrôme, 7/12/2000 ; 102 déjections ; Richelle, 14/12/2000 : 452 déjections ; Richelle, 14/11/2001 : 504 déjections). Ceci indique que les déjections ont bien été produites suite à l'ingestion récente de proies.

Le nombre de chauves-souris observées en hiver à l'intérieur du gîte, lors de la récolte des bâches, était cependant faible en comparaison avec la période estivale. Lorsque des oreillards ont pu être observés, le maximum d'individus était de 5 à Gozin ( P. auritus, 4/11/1999) et de 3 à Richelle ( P. austriacus , 14/12/2000).

4.2 Analyse qualitative et quantitative des résultats

Étant donné que nous n'avons pas mis en évidence de différence entre les deux espèces, ni entre les échantillons pré-hivernaux (octobre – novembre) et hivernaux (décembre – février), à l'exception des Tipules plus abondantes dans les échantillons pré-hivernaux (p = 0,046), la discussion porte sur la composition globale du régime alimentaire.

La fréquence relative des Diptères Cyclorrhaphes (42,2 %), des Dermaptères (18,2 %) et des Araignées (9,7 %) représente 70,1 % des proies identifiées. Ce sont donc des arthropodes diurnes ou non volants qui composent l'essentiel du régime alimentaire (pré-) hivernal. On en déduit qu’elles sont capturées par glanage. Nous l'avons observé à Richelle (14/11/2001) : un oreillard gris faisait des allers-retours entre la poutre faîtière et un pignon en pierre pour glaner des Cyclorrhaphes au repos, présents par centaines.

Parmi les Cyclorrhaphes, un genre de la famille des Calliphoridae a été identifié grâce aux poils jaunâtres du mésonotum : Pollenia sp. (L IBERT , com. pers .). Ce genre représente au moins 66,4 % des Cyclorrhaphes identifiés à Baillamont, 41,5 % à Richelle, 25 % à Gozin et 12,5 % à Pondrôme. Les Pollenia sont des parasites de vers de terre qui peuvent se regrouper en masse à l’intérieur des bâtiments pour y passer l’hiver en diapause (R OGNES 1991). Cinq espèces sont connues en Belgique (G ROOTAERT et al. 1991), dont Pollenia rudis , la mouche des greniers, qui est largement répandue dans le paléarctique et le néarctique (H AUPT &HAUPT 1998). Les autres Cyclorrhaphes n’ont pu être déterminés plus précisément.

Les Dermaptères en activité sont très rares en hiver mais ils peuvent coloniser en masse les bâtiments et hiverner en groupes dans des anfractuosités ou dans le sol où ils creusent des abris sous des supports variés (pierres, bois...) (A LBOUY &CAUSSANEL 1990). Nous n'avons cependant pas pu vérifier leur présence à l'intérieur des bâtiments si bien qu'il est impossible d'établir s'ils ont été capturés à l'intérieur des bâtiments, au sol, sur les murs, sous des écorces...

Parmi les Arachnides, ce sont exclusivement des Araignées qui ont été identifiées alors qu'en été les Opilions constituaient 85,1 % des Arachnides consommées. Cela s'explique probablement par le fait que dès la fin de l'automne, les Opilions adultes ne sont plus disponibles. Seuls subsistent les œufs, déposés à la fin de l'été et en automne, qui vont éclore au printemps suivant (H ILLYARD 2005). Par contre, chez les araignées, certaines espèces restent actives durant l'hiver en se réfugiant sur les troncs d'arbres, sous les écorces, dans les buissons, dans la litière ou encore dans les bâtiments (H UHTA et al. 1979, A ITCHISON 1984). En Allemagne (Hesse), B LICK (2011) a observé une activité importante des araignées sur les troncs de hêtres en forêt, entre décembre et mars avec 140 espèces identifiées. En Europe centrale, l'installation de pièges sur les troncs de pommiers en hiver a également montré que des araignées restaient actives durant l'hiver. Septante-deux pourcents des invertébrés capturés étaient des araignées (K ORENKO &PEKAR 2010). En hiver, des Araignées sont donc encore disponibles et peuvent être capturées, à l'intérieur des bâtiments mais aussi sur les troncs d'arbres. L'absence de restes

Chapitre 3 : Régime alimentaire hivernal 57 de toiles d'araignées dans les déjections indique qu’elles pourraient être capturées à l'extérieur des bâtiments contrairement à ce qui a été observé chez Myotis emarginatus , une espèce glaneuse qui peut en consommer massivement durant l'été (G ODIN 2000, B ODIN et al. 2002).

Les Lépidoptères représentent 22,4 % des proies et constituent, comme en été, une part importante du régime alimentaire. Durant l'hiver, plusieurs espèces d'hétérocères et de rhopalocères en diapause sont disponibles. Triphosa dubitata, Scoliopteryx libatrix, Aglais urticae, Inachis io, Polygonia c-album peuvent hiverner à l'état adulte dans les bâtiments, les crevasses des murs, les grottes, les glacières (F ELDMANN 1972 repris de K ANUCH et al. 2005). D'autres espèces d'hétérocères, les « winter » sont actives durant l'hiver ; elles appartiennent à la famille des Geometridae. En Belgique, au moins 5 espèces sont recensées, Epirrita autumnata, E. christyi, E. dilutata, Operphetra brumata et O. fagata . Les chenilles vivent sur les aulnes, bouleaux, hêtres, chênes, buissons et taillis de saules et de noisetiers. Les adultes volent et se reproduisent la nuit d'octobre jusqu'à novembre – décembre (D E PRINS et al. 2011). Ces espèces sont pourvues d'un organe tympanique, ce qui pourrait laisser supposer que cette adaptation est liée à la pression de prédation exercée par les chauves-souris, à l'instar de ce qui est observé chez les Noctuidae en été (R YDELL et al. 1997, S VENSSON et al. 1999).

Même en hiver, les oreillards peuvent donc trouver des Lépidoptères, que ce soit à l'intérieur des bâtiments pour les espèces en diapause ou à l’extérieur des bâtiments pour les Geometridae pourvu que des massifs feuillus soient présents. Le fait que ces espèces sont munies d'un organe tympanique suffisamment sensible pour percevoir les ultra-sons produits par les chauves-souris laisse supposer que ces espèces peuvent également être capturées par glanage à la surface des feuilles ou des troncs.

Pour compenser les dépenses énergétiques liées à l'activité (pré) hivernale, les oreillards ont donc à leur disposition des proies présentes dans leur environnement.

Pour se préparer à la saison hivernale, en automne, P. auritus utilise également une autre stratégie, en augmentant la durée des périodes de torpeur diurne (S PEAKMAN &ROWLAND 1999). Pour ce faire, il choisit des gîtes plus frais d'environ 10°C en comparaison avec la température des gîtes estivaux. La diminution de la température ambiante permet aux P. auritus d'entrer en torpeur plus aisément. En réduisant leur activité, l'économie réalisée est suffisante pour affecter positivement leur poids (S PEAKMAN &ROWLAND 1999).

Si les oreillards, actifs une partie de l'hiver, peuvent consommer des proies, les dépenses énergétiques occasionnées par cette activité hivernale (réveils, vols, détection et capture de proies, reproduction) ne sont cependant que partiellement compensées par la prise de nourriture. En effet, en fin de période hivernale, les deux espèces enregistrent une perte de poids : - 22 % chez P. auritus et -29 % chez P. austriacus (S TEBBINGS 1970). L'auteur pose l'hypothèse de réveils et de changements de sites plus fréquent chez les P. austriacus, impliquant davantage de dépenses énergétiques et donc une perte de poids plus importante.

En Slovaquie et en République Tchèque, l'étude de l'écologie trophique hivernale d'une autre espèce, la Noctule commune ( Nyctalus noctula ), a également montré que les Lépidoptères, les Diptères et les Araignées constituaient l'essentiel du régime alimentaire, pour respectivement 53 %, 38 % et 15 % (322 déjections collectées de novembre à mars, résultats exprimés en occurrence relative) (K ANUCH et al. 2006).

La Grande noctule ( Nyctalus lasiopterus) utilise une autre stratégie : elle diversifie son régime insectivore en devenant carnivore. En Italie, à partir de 59 déjections collectées entre septembre et novembre pour deux individus de Nyctalus lasiopterus , D ONDINI &VERGARI (2000) ont montré qu'elle pouvait se nourrir d'oiseaux. Septante-neuf pour-cent des déjections collectées contenaient essentiellement des restes de Rouge-gorge ( Erithacus rubecula) ou de Mésange bleue ( Cyanistes caeruleus) . Les autres fragments de proies identifiés provenaient de Libellules ( Sympetrum flaveolum ), de Lépidoptères, d'Araignées et d'Opilions.

Chapitre 3 : Régime alimentaire hivernal 58 Au Royaume-Uni, l'analyse de restes de proies collectées sous des perchoirs situés dans des grottes et utilisés par Rhinolophus ferrumequinum d'octobre à la fin novembre, a permis d'identifier des Géotrupes (R ANSOME 1968).

Enfin, au Royaume-Uni, l’analyse de 683 déjections collectées durant les hivers 1995/96 et 1998/99 sous 5 colonies de Rhinolophus hipposideros a montré que le petit rhinolophe se nourrissait essentiellement de Diptères (86%) dont des Sphaeroceridae (24%), Tipulidae (23%), Mycetophilidae (12%) et des Scathophagidae (11%) (résultats exprimés en fréquence relative) (W ILLIMAS et al. 2011).

5. C onclusion

De par le nombre important de déjections collectées dans les gîtes de mise bas, nous avons confirmé que les deux espèces d’oreillards sont bien actives et se nourrissent durant une partie de l'hiver.

Pour la première fois, à notre connaissance, des éléments clés de l'écologie hivernale des oreillards sont ainsi mis en évidence. Diptères, Lépidoptères, Dermaptères et Araignées sont les quatre groupes de proies clés. Ces résultats confirment le caractère opportuniste des deux espèces, en consommant des proies localement abondantes, comme les Pollenia sp. à Baillamont, Richelle et Gozin.

La grande majorité (minimum 70 %) des proies sont supposées être capturées par glanage. Cette technique de chasse utilisée par les deux espèces d'oreillards leur confère un avantage certain par rapport aux espèces chassant par poursuite aérienne, en leur permettant de consommer des proies en hiver lorsque la disponibilité en proies volantes est quasi nulle.

La raison pour laquelle des oreillards peuvent rester actifs une partie de l'hiver serait donc liée à leur capacité à glaner leurs proies. En glanant, les oreillards assurent une disponibilité en proies suffisante pour maintenir une activité hivernale.

Les bâtiments constituent probablement un terrain de chasse important où, au moins, des Diptères en diapause peuvent-être capturés aisément. De même, la présence de massifs de feuillus, de bosquets ou d'arbres isolés aux alentours des sites d'hibernation et des gîtes de mise bas pourrait également être de première importance pour les Lépidoptères hivernaux et les Araignées.

Chapitre 3 : Régime alimentaire hivernal 59 Chapitre 4 : Exploitation de l’espace et du temps

1. I ntroduction

L’oreillard roux est réputé être une espèce forestière qui chasse à proximité de son gîte, essentiellement dans un rayon de 500m. L’oreillard gris, en Europe centrale, est qualifié d’espèce « villageoise », qui évolue dans les milieux agricoles extensifs et les jardins mais qui évite les grands massifs forestiers. Les deux espèces changent fréquemment de terrains de chasse pendant la nuit et chassent généralement du crépuscule jusqu'à l'aube (S WIFT 1998, D IETZ et al. 2009 et chapitre 1).

En Belgique, les deux espèces coexistent dans une même région (micro-allopatrie supposée ou sympatrie) mais aussi dans un même gîte (syntopie). Pour pouvoir coexister, des espèces sympatriques doivent, en principe, différer par certains aspects de leur niche écologique (M CNAB 1971).

Le but de ce chapitre est de caractériser, à l'aide du radiopistage, l’utilisation de l’espace et du temps dans trois colonies d’oreillards : une colonie monospécifique de P. auritus , une colonie monospécifique de P. austriacus et une colonie mixte (syntopique).

Après avoir présenté la méthodologie, la présentation des résultats engrangés s'articule autour de quatre paragraphes :

1. Les données morphométriques des individus capturés. 2. Les données relatives à l'exploitation de l'espace, à travers la description des terrains de chasse, des aires d’activité (individuelles et coloniales), la sélection et l’utilisation des habitats. 3. Les résultats de l'exploitation du temps : la durée de la période d'activité, le nombre et la durée des retours nocturne au gîte, l'utilisation de reposoirs nocturnes et, finalement, la durée des périodes de vol. 4. Les effets éventuels des émetteurs sur l'exploitation de l'espace et du temps.

2. M éthodologie

La période d’étude débute au mois de mai, lorsque les femelles réintègrent le gîte de mise bas, et s’étend jusqu’au mois de septembre, lorsque les chauves-souris délaissent le gîte pour regagner les sites de transition ou de swarming (V EITH et al . 2004).

Les colonies étudiées sont les colonies monospécifiques de P. auritus situées à Gozin (Famenne) et de P. austriacus à Gembes (Ardenne) ainsi que la colonie mixte de Pondrôme (Calestienne). Les villages de Gozin et Pondrôme sont distants de 3km tandis que le village ardennais de Gembes est situé à 12 km vers le SSE de Pondrôme.

Des individus de la colonie mixte de Pondrôme ont été suivis en 1999 et 2000, ceux de Gozin en 2000 et 2002 et ceux de Gembes en 2000 et 2001. Il n’a pas été possible d’étudier une même colonie durant toute une année car le nombre d’individus observés dans les gîtes était parfois nul (Tab. 4.1) ou parce que les oreillards étaient inaccessibles.

Les chauves-souris ont été capturées (référence de la dérogation : dérog/GF/vert.15) pour les munir d’un collier émetteur et pour comparer les deux espèces sur le plan de la morphométrie. Les captures

Chapitre 4 : Exploitation de l’espace et du temps 60 se font à partir de l’intérieur du gîte. Une à deux heures avant le coucher du soleil, la chauve-souris est capturée en amenant lentement un filet muni d’un manche télescopique de fabrication artisanale par- dessous, au niveau de la tête. Après quelques secondes, l’individu se détache et tombe dans le filet. Une fois capturé, l’animal est emmené dans une autre pièce pour être manipulé. La manipulation dure 20 à 30 min.

Les individus sont pesés grâce à un dynamomètre (Pesola, précision 0,1g). La longueur du pouce, mesurée par dessous, et de l’avant-bras sont mesurés à l’aide d’un pied à coulisse (précision 0,1 mm). La plus grande largeur du tragus est mesurée à l’aide d’une règle métallique (précision 0,5 mm), selon les recommandations reprises de l’ouvrage de S WIFT (1998).

Les émetteurs (Holohil LB-2T systems, Ontario Canada) sont collés au milieu du dos avec une colle chirurgicale souple à l’hexane et au caoutchouc naturel ( Smith et Nephew, Skin-Bond ). Ils ont une masse de 0,54–0,56 g, ce qui représente 4,5 à 8,3 % du poids de la chauve-souris (moyenne : 6,6 ± 0,9 %) et dépasse quelque peu la limite de 5 % recommandée par A LDRIDGE &BRIGHAM (1988). La portée de l’émetteur annoncée par le fabriquant est de 1000m en milieu ouvert et sa période de vie est de 13 jours.

Les chauves-souris sont suivies à pied et en voiture, en utilisant la méthode du « homing-in » (W ILKINSON &BRADBURY 1988, W HITE &GARROTT 1990) grâce à un récepteur Stabo XR 100 (modifié par Gesellschaft für Telemetriesysteme, Mbh, Bordesholm, Germany ) et une antenne aérienne Yagi à 3 éléments (gain : 7,6 dB, longueur 1,19m) fixée sur un porte-bagages de voiture. Un seul véhicule est utilisé.

Durant le suivi, les informations sont notées dans un cahier de terrain ou enregistrées sur dictaphone et retranscrites le lendemain dans le cahier de terrain avant d’être encodées dans un fichier Excel.

Excepté deux individus de la colonie de Pondrôme marqués simultanément en 1999 et suivis une nuit sur deux, une seule chauve-souris à la fois est suivie jusqu’au détachement ou la perte de l’émetteur.

Les terrains de chasse (polygones, lignes et points) ont été pointés en fonction de l'intensité du signal du récepteur et en utilisant des repères visuels évidents sur le terrain (routes, haies, alignements d’arbres, lisières, chemins forestiers, rivières, maisons, pylônes, ligne électriques…). Ils sont ensuite reportés sur une carte IGN 1/25.000, avant d’être encodés dans un SIG (ArcView 3.3) en utilisant la typologie du top 10v de l’Institut Géographique National comme référentiel.

L’éloignement des terrains de chasse par rapport au gîte est calculé à partir du centre du polygone correspondant au terrain de chasse. L’aire d’activité nocturne, individuelle et coloniale, est tracée par la méthode des polygones minimums convexes (H AYNE 1949).

L’espace autour du gîte est découpé en 7 bandes circulaires équidistantes dont le centre correspond au gîte (0-500m, 500-1000m, 1000-1500m, 1500-2000m, 2000-2500m, 2500-3000m, > 3000m). En fonction de l’emplacement du terrain de chasse, le temps relatif (proportion de la période d’activité) passé dans une des bandes est calculé pour chaque nuit de suivi.

La période d’activité journalière est définie comme le laps de temps écoulé entre le départ crépusculaire et le dernier retour au gîte principal ou dans un gîte secondaire. La durée de la période d’activité est découpée en quatre, en fonction des comportements suivants : 1) le temps passé dans le gîte lors de retours nocturnes, 2) le temps passé sur des reposoirs, 3) le temps passé en vol et 4) la durée des pertes de signal radio. Concernant l’utilisation de reposoirs, on considère que si la position du signal radio persiste dans un même endroit et que l'intensité reste constante pendant plus de 10 min, indiquant une absence de mouvement, l’oreillard utilise un « reposoir ». Cela ne signifie pas nécessairement que l’oreillard est totalement immobile, mais on considère qu’il ne s’éloigne pas d’un point fixe, le reposoir.

Chapitre 4 : Exploitation de l’espace et du temps 61 2.1 Échantillonnage

Vingt-huit Plecotus (5 mâles dont 1 jeune et 23 femelles) ont été munis d’un émetteur. En raison du détachement précoce de l’émetteur ou de la perte rapide du signal radio, seuls vingt-deux individus ont été utilisés pour les analyses, sept P. auritus à Gozin, six P. austriacus à Gembes, cinq P. auritus et quatre P. austriacus à Pondrôme (Tab. 4.1).

Individu Gîte Espèce Statut reproducteur Poids Sexe Date de N jours de N jours N jours de fixation (g) capture suivi utilisés de l’émetteur pour les analyses Hors analyse Gozin P. auritus Gestation ? 8,5 F 6/05/2000 1 0 0 J Gozin P. auritus Gestation ? 9,0 F 11/05/2000 3 3 3 Hors analyse Gozin P. auritus Adulte 7,0 M 18/05/2000 1 0 0 Hors analyse Gozin P. auritus Gestation ? 8,5 F 31/05/2000 1 0 1 K Gozin P. auritus Adulte 6,5 M 6/06/2000 3 3 3 Hors analyse Gozin P. auritus Allaitante 8,0 F 26/07/2000 1 0 0 N Gozin P. auritus Non allaitante 8,0 F 28/08/2000 4 4 4 O Gozin P. auritus Non allaitante 10,5 F 11/09/2000 3 2 4 P Gozin P. auritus Adulte 7,5 M 13/05/2002 6 3 6 Q Gozin P. auritus Gestation 9,5 F 21/05/2002 5 5 6 X Gozin P. auritus Gestation ? 8,0 F 28/05/2002 5 3 5 Tot 33 23 32 M Gembes P. austriacus Post allaitante 10,0 F 14/08/2000 5 4 6 R Gembes P. austriacus Gestation ? 9,5 F 5/06/2001 4 4 4 S Gembes P. austriacus Gestation 11,3 F 14/06/2001 4 4 4 T Gembes P. austriacus Gestation 12,0 F 4/07/2001 4 2 4 U Gembes P. austriacus Jeune 7,5 M 30/07/2001 4 4 4 V Gembes P. austriacus Post allaitante 8,8 F 17/08/2001 11 8 13 Hors analyse Gembes P. austriacus Non allaitante ? 9,5 F 29/08/2001 3 0 3 Tot 35 26 38 A Pondrôme P. austriacus Inconnu 7,5 F 7/05/1999 20 4 20 G Pondrôme P. austriacus Allaitante 8,5 F 19/07/1999 7 7 9 H Pondrôme P. austriacus Jeune 7,5 F 30/08/1999 2 2 3 L Pondrôme P. austriacus Allaitante 9,8 F 12/07/2000 10 9 13 Tot 39 22 45 B Pondrôme P. auritus Inconnu 7,5 F 26/05/1999 6 3 9 C Pondrôme P. auritus Adulte 8,5 M 9/06/1999 7 7 11 D Pondrôme P. auritus Inconnu 8,0 F 10/06/1999 3 2 3 Hors analyse Pondrôme P. auritus Non allaitante 9,0 F 5/07/1999 1 0 1 F Pondrôme P. auritus Allaitante 9,5 F 6/07/1999 2 2 2 I Pondrôme P. auritus Post allaitante 9,0 F 6/08/1999 4 4 4 Tot 23 18 26 TOT 130 89 141 Tab. 4.1 : Description des individus équipés d’un émetteur.

Les oreillards ont été suivis pendant 130 nuits, dont 89 sont utilisées dans les analyses. Les nuits où le signal radio de l’individu est perdu pendant plus de 50 % de la période d’activité, définie comme le temps écoulé entre le départ crépusculaire et la rentrée au gîte, ne sont pas prises en compte.

La durée moyenne de fixation des émetteurs est de 5,2 ± 4,6 jours (maximum 20 jours, n = 28) et est significativement plus importante pour les P. austriacus (7,5 ± 5,6 jours, n = 11) en comparaison aux P. auritus (3,7 ± 3,1 jours, n = 17) (U = 202,5, z = -2,095, p = 0,036).

Chapitre 4 : Exploitation de l’espace et du temps 62 La répartition des nuits de suivi n’est pas homogène (Tab. 4.2). A Gozin, le nombre de nuits de suivi en mai est sur-représenté par rapport aux autres mois. L'été 2000, exceptionnellement humide et pluvieux, n’a pas permis de capturer d'oreillards avant la fin août. A Gembes, le printemps 2001, très pluvieux et frais, a eu pour conséquence une rentrée plus tardive des chauves-souris dans les gîtes, ce qui explique l’absence de suivi en mai.

A Pondrôme, alors que P. auritus a été suivi de mai à août, P. austriacus l'a été en mai puis, intensivement, en juillet et en août.

Colonie Espèce Année Mai Juin Juillet Août Sept. Gozin P. aur. 2000 Gozin P. aur. 2002 Gembes P. aust. 2000 Gembes P. aust. 2001 Pondrôme P. aust. 1999 Pondrôme P. aust. 2000 Pondrôme P. aur. 1999 Tab. 4.2 : Répartition des nuits de radiopistage en fonction des colonies et des années. Une cellule correspond à 1 jour de suivi. Seules les nuits de pistage réellement utilisées dans les analyses sont prises en compte.

Des différences de comportement en fonction du statut reproducteur ou du sexe ont déjà été mises en évidence chez des chiroptères (e.a F UHRMAN &SEITZ 1992, C LARK et al. 1993, W ATTS et al. 2005, SCHOFIELD &MORRIS 2000, B ARATAUD et al. 2009). C'est la raison pour laquelle les comparaisons interspécifiques et intercoloniales ont été systématiquement testées en incluant et en excluant les données issues du suivi des mâles, minoritaires. Si les résultats diffèrent, on le renseigne dans le texte.

2.2 Traitements statistiques

La sélection de l’habitat est étudiée pour chaque oreillard pisté en comparant la proportion des habitats visités avec celle des habitats disponibles à l’intérieur de son aire d’activité.

A l’aide du calcul matriciel, la proportion de chaque habitat utilisé est pondérée par sa durée d’utilisation définie comme le temps moyen passé par la chauve-souris à chasser dans cet habitat On obtient ainsi une nouvelle unité surface x temps (ARLETTAZ 1995, K ERVYN 2001). Le résultat de ce produit matriciel est alors comparé avec la composition en habitats du domaine vital de chaque individu par la méthode décrite par N EU et al . (1974).

Il s’agit alors de tester à l’aide d’un 0² l’hypothèse Ho suivante : l’individu utilise chaque catégorie d’habitat en proportion exacte de sa disponibilité. Si l’hypothèse est rejetée, on peut conclure que l’individu n’utilise pas les catégories d’habitat proportionnellement à leur disponibilité et qu’il sélectionne donc son habitat.

L’étape suivante permet de tester le degré de préférence d’un habitat et donc d’identifier quels sont les habitats sélectionnés, positivement ou négativement. Pour ce faire, on calcule un intervalle de confiance de Bonferroni autour de la proportion de chacun des habitats (N EU et al . 1974, W HITE & GARROTT 1990). On compare alors cet intervalle à la proportion des habitats disponibles. Si l’intervalle de confiance comprend cette valeur, on conclut à une absence de sélection. S’il est supérieur, la sélection est négative et, s’il est inférieur, la sélection est positive.

Les autres tests statistiques utilisés dépendent de la nature des données et du nombre de populations à comparer.

Si les données sont quantitatives et continues, on utilise simultanément un test paramétrique et un test non paramétrique. Pour comparer des échantillons appariés appartenant à deux populations, on utilise un T-test et le test non paramétrique sur les moyennes de Mann-Whitney, identifiables dans le texte

Chapitre 4 : Exploitation de l’espace et du temps 63 par la valeur de t et U. Lorsque plus de deux groupes sont comparés, on utilise un test sur la variance, une ANOVA à un facteur et le test sur les moyennes des rangs de Kruskal-Wallis identifiable dans le texte par la valeur de F et H. Les résultats des tests paramétriques et non paramétriques sont systématiquement confrontés. Lorsque les résultats des tests d’hypothèse sont contradictoires, la condition de normalité de l’échantillon est vérifiée par la statistique de Bartlett. Si la normalité est vérifiée, on retient le résultat d’un des deux tests paramétriques. Lorsque le niveau de signification est inférieur à 5 % et que l’on compare plus de deux populations, on effectue un test post-hoc de Scheffé permettant de comparer les échantillons deux à deux afin de détecter où se situent les différences.

Pour les données quantitatives discrètes décrivant le comportement du nombre d’un événement se produisant dans un laps de temps fixé, on utilise un modèle de régression basé sur la statistique de distribution binomiale de gamma-Poisson.

Les analyses ont été effectuées avec STATA 10 (StataCorp LP, Texas USA).

3. R ésultats : morphométrie

Trente-quatre P. auritus (17 mâles et 17 femelles, 30 adultes et 4 jeunes) et vingt-et-un P. austriacus (2 mâles et 19 femelles, 12 adultes et 9 jeunes) ont été capturés dans les gîtes de Gozin (n = 20), Gembes (n = 15), Roly (n = 2) et Pondrôme (n = 14) (Tab. 4.3, Annexe 9).

P. auritus P. austriacus Mâle Femelle Jeune Mâle Femelle Jeune (n = 15) (n = 15) (n = 4) (n = 1) (n = 11) (n = 9) Pouce (mm) Moy 7,1 6,7 7,0 5,3 5,0 5,1 Ec-t 0,7 1,1 0,7 . 0,6 0,3 Min 5,5 5,0 6,0 . 4,0 4,5 Max 8,0 9,0 7,5 . 6,0 5,5 Avant-bras (mm) Moy 38,9 39,4 38,9 42,0 41,5 40,2 Ec-t 1,9 1,3 2,8 . 0,6 1,0 Min 37,0 37,0 36,0 . 40,5 38,0 Max 45,0 41,0 42,0 . 42,5 41,0 Pouce/av. bras Moy 0,18 0,17 0,18 0,13 0,12 0,13 Ec-t 0,02 0,03 0,02 . 0,01 0,01 Min 0,14 0,12 0,16 . 0,10 0,12 Max 0,21 0,24 0,20 . 0,15 0,14 Tragus (mm) Moy 4,2 4,3 5,2 5,5 5,5 5,7 Ec-t 0,6 0,8 1,4 . 0,5 0,4 Min 3,0 3,0 4,0 . 4,5 5,0 Max 5,5 5,5 6,5 . 6,5 6,0 Poids (g) Moy 7,5 8,6 7,0 8,8 9,3 7,6 Ec-t 1,5 0,8 0,7 . 1,5 0,5 Min 5,5 7,5 6,3 . 7,0 6,8 Max 11,0 10,5 7,9 . 12,0 8,3 Tab. 4.3 : Morphométrie des individus capturés.

Des différences intraspécifiques ont été détectées : les mâles adultes de P. auritus ont un poids moindre que les femelles adultes (U = 179,5, z = 2,216, p = 0,027) et les jeunes de P. auritus tendent à être plus légers que les adultes (U = 35, z = 1,881, p = 0,060).

Chapitre 4 : Exploitation de l’espace et du temps 64 Chez les P. austriacus adultes, aucune différence entre les sexes n’est mise en évidence, mais le nombre de mâles est limité (n = 1). Par contre, les jeunes sont plus légers que les adultes (U = 61, z = 2,707, p = 0,007) et ont un avant-bras moins long (U = 55, z = 3,207, p = 0,001).

Pour les comparaisons interspécifiques, vu les différences mises en évidence ci-dessus, les données des jeunes ont été omises de l’analyse (Fig. 4.1). Comparés aux P. auritus (n = 30), les P. austriacus (n = 12) sont plus lourds (poids : P. auritus : 8,1 ± 1,3 g ; P. austriacus : 9,3 ± 1,5 g ; U = 349, z = 2,544, p = 0,011), ont un avant-bras plus long ( P. auritus : 39,2 ± 1,8 mm ; P. austriacus : 41,6 ± 0,6 mm ; U = 416, z = 4,430, p = 0,0001), un pouce plus court ( P. auritus : 6,7 ± 1,0 mm ; P. austriacus : 5,3 ± 0,7 mm ; U = 109,5, z = -4,062, p = 0,008), le tragus moins large ( P. auritus : 4,5 ± 0,5 mm ; P. austriacus : 5,5 ± 0,5 mm ; U = 387,5, z = 4,259, p = 0,006) et le ratio pouce/avant-bras moins élevé (P. auritus : 0,17 ± 0,1 ; P. austriacus : 0,12 ± 0,0 ; U = 68, z = -3,959, p < 0,0005). 12 10 8 6 4 2

P. auritusP. austriacus poids (g) pouce (mm) tragus (mm)

Fig. 4.1 : Comparaison du poids (g), de la largeur du tragus (mm) et de la longueur du pouce (mm) entre les adultes de P. auritus (n = 30) et de P. austriacus (n = 12). Les rectangles de couleur montrent les percentiles 25 et 75, la médiane étant indiquée par la ligne horizontale. Les traits verticaux donnent les percentiles 5 et 95. Les individus situés en dehors des percentiles 5 et 95 sont représentés par un point.

4. R ésultats : exploitation de l’espace

Dans ce chapitre, seront présentés successivement les résultats 1) de la description des terrains de chasse, 2) des mesures de l’aire d’activité individuelle, 3) de l’aire d’activité coloniale et 4) de la sélection des habitats surfaciques et linéaires.

4.1 Description des terrains de chasse

Cent trente-sept terrains de chasse ont été découverts dont 111 ont été utilisés pour les analyses : vingt-et-un à Gozin, vingt-quatre à Gembes, trente-six et trente pour, respectivement, les P. austriacus et les P. auritus de Pondrôme (Tab. 4.4).

La distance moyenne entre le gîte et les terrains de chasse est de 1646 ± 1231 m (médiane = 1480 m, n = 111). Des différences entre les colonies existent (F = 2,75, ddl = 110, p = 0,047). Les terrains de chasse exploités par les P. austriacus de Pondrôme tendent à être plus éloignés du gîte que ceux de Gembes (Tab. 4.3) mais le test de Scheffé est en limite de signification (p = 0,063). Aucune différence interspécifique n’est détectée (t = -0,830, ddl = 109, p = 0,410).

Chapitre 4 : Exploitation de l’espace et du temps 65 Distance entre le gîte et le centre Surface du terrain de chasse Durée mo yenne d’utilisation

du terrain de chasse (m) (ha) des terrains de chasse (min) N total N TC Colonie Espèce Moy Ec -t Min Max Moy Ec-t Min Max Moy Ec-t Min Max TC utilisé Gozin P. aur. 28 21 1540 981 57 3470 9,6 12,1 1,4 51,4 79 100 1 386 Gembes P. aust. 29 24 1214 808 146 2660 7,2 5,6 0,3 20,0 99 112 2 454 Pondrôme P. aust. 40 36 2083 1521 105 5455 4,8 3,0 0,3 12,9 47 63 2 359 Pondrôme P. aur. 40 30 1540 1166 105 4118 7,2 6,5 0,2 26,9 60 66 1 275 Plecotus 137 111 1646 1231 57 5455 6,8 7,1 0,2 51,4 56 59 1 454 Tab. 4.4 : Description quantitative des terrains de chasse exploités. TC : Terrain de chasse. Bien que la surface moyenne des terrains de chasse à Gozin soit plus importante qu’ailleurs (Tab. 4.4), les différences entre colonies ne sont pas significatives (F = 2,11, ddl = 110, p = 0,103). On ne détecte pas non plus de différences entre les deux espèces (moyenne P. auritus = 8,1 ± 1,3 ha, médiane P. auritus = 5,6 ha ; moyenne P. austriacus = 5,6 ± 0,6 ha, médiane P. austriacus = 4,4 ha) (t = 1,889, ddl = 110, p = 0,062).

La durée moyenne d’utilisation d’un terrain de chasse est de 56 ± 59 min (médiane = 30 min) et ne diffère pas entre les colonies (H = 4,059, ddl = 3, p = 0,255) ni entre les espèces (U = 2952,5, z = 0,571, p = 0,568).

Le Tableau 4.5 montre l’absence de corrélation linéaire entre l'éloignement des terrains de chasse par rapport au gîte et leur durée moyenne d'utilisation ou leur surface. De même, il n'existe pas de corrélation entre la surface des terrains de chasse et leur durée moyenne d'utilisation.

Distance vs tps Distance vs Surf. Surf vs tps Colonie Espèce n R p R p R p Gz P. aur. 21 0,230 0,187 0,260 0,255 0,280 0,220 Ge P. aust. 24 0,092 0,670 -0,171 0,426 0,450 0,274 Pg P. aust. 36 0,188 0,274 0,347 0,381 -0,012 0,944 Pr P. aur. 30 -0,249 0,185 0,159 0,402 -0,004 0,983 Tot 111 0,037 0,701 0,147 0,125 0,191 0,450 Tab. 4.5 : Relation entre l’éloignement des terrains de chasse par rapport au gîte (Distance) et la durée d’utilisation (Tps), entre l’éloignement du gîte (Distance) et la surface des terrains de chasse (Surf) et, enfin, entre la surface des terrains de chasse (Surf) et la durée moyenne d’utilisation (Tps). Les valeurs de R et de p sont issues du test de corrélation sur les rangs de Spearman.

4.2 Aire d’activité individuelle (totale et journalière)

La surface de l’aire d’activité individuelle totale est en moyenne de 379,8 ± 298,3 ha (médiane = 347,4, n = 22). Cette surface varie entre 38,0 ha (une femelle de P. austriacus en gestation de Gembes) et un peu plus de 1050 ha mesurés chez deux femelles de P. auritus de Pondrôme, les individus B (26/05/1999) et I (6/08/1999). Ces deux femelles ont exploité des terrains de chasse s’étalant de la plaine de Focant à un massif forestier feuillu situé au sud de Honnay, à plus de 4000m du gîte (Tab. 4.6).

Malgré une aire d’activité individuelle totale moyenne plus faible des individus de Gembes (moyenne = 198,8 ± 168,1 ha), les différences entre colonies ne sont pas significatives (F = 2,01, ddl = 21, p = 0,150) 1. De même, les différences interspécifiques (U = 110, z = -0,330, p = 0,742) et entre mâles (n = 3) et femelles de P. auritus ( n = 9) ne sont pas significatives (U = 9, z = 0,277, p = 0,782).

1En excluant les mâles, les résultats du test d’hypothèse restent similaires.

Chapitre 4 : Exploitation de l’espace et du temps 66 La surface moyenne de l’aire d’activité individuelle journalière est de 168,5 ± 131,2 ha (n = 89) et reste comprise entre 25,7 ha pour la femelle S de Gembes et 441,00 ha pour la femelle allaitante B de Pondrôme. Il n’y pas de différence significative entre les colonies (F = 2,40, ddl = 88, p = 0,0733) 2, entre les deux espèces (t = 1,619, ddl = 87, p = 0,109) ni entre sexes de P. auritus (t = 1,919, ddl = 39, p = 0,063).

Individu Sexe Colonie Surf. totale du PMC Surf. moy. du PMC Ec-t N terrain de N de jour (ha) par nuit (ha) chasse J F Gz 263,5 138,4 112,1 5 3 K M Gz 265,1 194,1 97,3 5 3 N F Gz 156,6 101,2 45,4 5 4 O F Gz 398,6 279,5 129,4 8 2 P M Gz 392,0 186,4 115,5 7 3 Q F Gz 506,3 243,3 130,9 10 5 X F Gz 332,2 230,5 124,2 8 3 Tot: 330, 6 ±±± 114,3 192,5 110,3 21 23 M F Ge 388,6 164,2 120,7 12 4 R F Ge 135,0 59,7 40,9 6 4 S F Ge 38,0 25,7 8,0 2 4 T F Ge 64,0 61,9 2,3 3 2 U M Ge 114,4 76,6 25,5 7 4 V F Ge 423,0 184,7 66,6 8 8 Tot: 198,8 ±±± 168,1 111,8 86,2 24 26 A F Pg 502,5 157,1 157 12 4 G F Pg 891,9 195,9 121,3 14 7 H F Pg 362,6 228,9 157,3 11 2 L F Pg 534,9 192,9 100,4 13 9 Tot: 573,0 ±±± 225,4 190,6 114,5 36 22 B F Pr 1067,3 441,0 358,4 14 3 C M Pr 198,1 73,8 42,4 4 7 D F Pr 110,5 50,3 9,2 5 2 F F Pr 134,9 134,8 0,0 2 2 I F Pr 1076,2 315,5 54,8 15 4 Tot: 517,4 ± 507,1 192,9 198,3 30 18 Total Plecotus 379,8 ±±± 298,3 168,5 131,2 111 89 Tab. 4.6 : Aire d’activité totale et moyenne (+ écart-type) par nuit des individus radiopistés.

L’illustration des aires d’activité des colonies et des individus de Gozin, Pondrôme et Gembes est présentée à la figure 4.2.

2En excluant les mâles, les résultats du test d’hypothèse restent similaires.

Chapitre 4 : Exploitation de l’espace et du temps 67 Fig. 4.2 : Aire d’activité des individus et des colonies de Gozin, Pondrôme et Gembes. Les terrains de chasse exploités mais exclus de l’analyse sont illustrés mais ne sont pas englobés dans l’aire d’activité de la colonie. Ces terrains ont été exploités par des individus dont le signal radio a été perdu pendant plus de 70 % de la durée de la nuit. HR : Home range, ind.: individu.

Chapitre 4 : Exploitation de l’espace et du temps 68 La figure 4.3 montre qu’il n’existe pas de corrélation (R² = 0,069, p = 0,239) entre la surface de l’aire d’activité individuelle totale et le nombre de nuits de radiopistage. 1000 800 600 400 Aire d'activité Aire individuelled'activité (ha) 200 0

2 3 4 5 6 7 8 9 Nombre de nuits

Fig. 4.3 : Surface de l’aire d’activité individuelle en fonction du nombre de nuits de suivi.

On constate (Fig. 4.4) que l’aire d’activité individuelle tend à rester constante après 3-5 nuits de pistage. Il apparaît cependant que les individus B, G, et I de la colonie de Pondrôme n’ont pu être suivis assez longtemps pour une estimation correcte de leur aire d’activité.

1200 A 1100 B C 1000 D

900 F G 800 H I 700 J K 600 L 500 M N 400 O Aire Aire d'activité individuelle (ha) P 300 Q 200 R S 100 T U 0 V 123456789 X Nombre de nuits de suivi

Fig. 4.4 : Évolution de l’aire d’activité individuelle en fonction du nombre de nuits de radiopistage. Gris : P. austriacus de Pondrôme ; orange : P. auritus de Pondrôme ; rouge : P. auritus de Gozin ; vert : P. austriacus de Gembes.

Chapitre 4 : Exploitation de l’espace et du temps 69 La figure 4.5 indique qu’il n’existe pas de corrélation évidente entre le nombre de terrains de chasse découverts par individu et le nombre de nuits de suivi (R² = 0,132, p = 0,097). 16 14 12 10 8 6 Nb TCNb individu par 4 2 0

0 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 Nb nuits de suivi

Fig. 4.5 : Relation entre le nombre de terrains de chasse (Nb TC) par individu et la durée du radiopistage.

Le nombre de terrains de chasse visités par nuit est compris entre 1 et 11, pour une moyenne de 4,0 ± 2,1 (n = 89) (Tab. 4.7).

Les P. austriacus de Pondrôme visitent plus de terrains de chasse par nuit (p = 0,009, pseudo R² = 0,019, n = 89) que les trois autres colonies (p > 0,091). Il n’y a pas de différence significative entre les deux espèces (p = 0,557, pseudo R² = 0,001, n = 89)3. En revanche, les trois mâles de P. auritus utilisent moins de terrains de chasse par nuit (moyenne = 2,8 ± 1,4, n = 13), que ce soit en comparaison avec l'ensemble des femelles (moyenne = 4,3 ± 2,1, n = 72) (p = 0,016, pseudo R² = 0,016, n = 89) ou uniquement avec les femelles de P. auritus (moyenne = 4,8 ± 2,2, n = 28 ) ( p = 0,002, pseudo R² = 0,056, n = 41 ).

Lorsque les mâles sont soustraits du test statistique, ce sont à la fois les P. auritus (moyenne = 5,8 ± 3,1, n = 11, p < 0,0005) et les P. austriacus (moyenne = 4,7 ± 2,0, n = 22, p = 0,008) de Pondrôme qui visitent significativement plus de terrains de chasse par nuit en comparaison avec les autres colonies.

Le nombre de terrains de chasse visités par nuit est faiblement corrélé à la durée de la période d'activité (R² = 0,096, p = 0,001, n = 89).

Un terrain de chasse exploité par un individu peut également avoir été exploité par d’autres individus appartenant à la même colonie. Ainsi, à Gozin, les 74,7 % des terrains de chasse ont été exploité par au moins deux individus. A Gembes (n = 6) et à Pondrôme ( P. auritus n = 5, P. austriacus n = 4), cette proportion est, respectivement, de 61,9 %, 53,1 % et 57,5 %. Ces différences ne sont cependant pas significatives (H = 2,755, ddl = 3, p = 0,431), pas plus que les différences entre espèces, ou entre mâles et femelles de P. auritus (espèce : U = 105, z = -0,664, p = 0,507) (sexe : U = 25, z = -1,024 = 1, p = 0,932).

3En excluant les mâles, les résultats du test d’hypothèse restent similaires

Chapitre 4 : Exploitation de l’espace et du temps 70 Colonie Individu Sexe Moy Ec-t Méd Max Min N nuit J F 3,7 1,2 3 5 3 3 K M 4,0 1,0 4 5 3 3 N F 4,0 0,8 4 5 3 4 Gz O F 5,0 1,4 5 6 4 2 P M 4,0 1,0 4 5 3 3 Q F 4,2 0,8 4 5 3 5 X F 4,3 1,5 4 6 3 3 Tot 4,1 1,0 4 6 3 23 M F 4,8 2,5 6 6 1 4 R F 2,8 1,5 3 4 1 4 Ge S F 1,3 0,5 1 2 1 4 T F 2,5 0,7 2,5 3 2 2 U M 3,8 1,3 6 5 2 4 V F 3,6 1,2 4 5 2 4 Tot 3,2 1,7 3,5 6 1 26 A F 4,0 1,8 4 6 2 4 Pg G F 5,0 2,0 5 8 2 7 H F 7,0 4,2 7 10 4 2 L F 4,3 1,5 5 7 2 9 Tot 4,7 2,0 2,5 10 2 22 B F 6,0 4,4 4 11 3 3 C M 1,7 0,5 2 2 1 7 Pr D F 5,0 0,0 5 5 5 2 F F 2,0 0,0 2 2 2 2 I F 8,0 1,4 8,5 9 6 4 Tot 4,2 3,1 2,5 11 1 18 TOT 4,0 2,1 4 11 1 89 Tab. 4.7 : Nombre moyen de terrains de chasse visités par nuit par les individus pistés.

4.3 Aire d’activité des colonies

Les deux colonies monospécifiques de Gozin et Gembes ont une aire d’activité de, respectivement, 1388 ha et 813 ha. La colonie mixte de Pondrôme montre des aires d’activités plus élevées pour les deux espèces : 1723 ha pour P. austriacus et 1733 ha pour P. auritus (Fig. 4.6).

L’aire d’activité de la colonie de Gozin se superpose partiellement à celle des oreillards de Pondrôme. Le recouvrement entre l'aire d'activité de la colonie de Gozin et la colonie de P. auritus d e Pondrôme est de 304 ha, soit 21,9 % (304 ha / 1388 ha) de l'aire d'activité des P. auritus de Gozin et 17,5 % (304 ha / 1733 ha) de l’aire d’activité des P. auritus de Pondrôme. Le recouvrement entre l'aire d'activité de la colonie de Gozin et la colonie de P. austriacus de Pondrôme est de 129 ha, ce qui représente 9,2 % (129 ha / 1388 ha) de l'aire d'activité des P. auritus de Gozin et 7,5 % (129 ha / 1723ha) de celle des P. austriacus de Pondrôme. A Pondrôme, le recouvrement de l'aire d’activité entre les P. auritus et les P. austriacus est de 499 ha, soit 29 % de l'aire d’activité coloniale.

Ci-dessous, la figure 4.6 montre qu’à Gozin, la surface de l’aire d’activité de la colonie se stabilise après 5 individus radiopistés, tandis qu’à Gembes, la surface ne semble pas stabilisée, même après 6 individus. Le suivi d’individus supplémentaires aurait probablement conduit à augmenter l’aire d’activité de la colonie. A Pondrôme, l’aire d’activité des P. austriacus devient stable avec le deuxième individu suivi, tandis qu’elle pourrait être sous-estimée pour les P. auritus .

Chapitre 4 : Exploitation de l’espace et du temps 71 2000 1800 1600 1400 Gz 1200 Ge 1000 Pg 800 Pr 600 400 200 Aire Aire d'activité la de colonie (ha) 0 1 2 3 45 6 7 Nombre d'individu radiopisté

Fig. 4.6 : Evolution entre l’aire d’activité de la colonie et le nombre d’individus suivis dans la colonie. Rouge : P. auritus de Gozin (Gz) ; vert : P. austriacus de Gembes (Ge) ; gris : P. austriacus de Pondrôme (Pg) ; orange : P. auritus de Pondrôme (Pr).

4.4 Sélection de l’habitat

Dans ce paragraphe, sont abordés en premier lieu la sélection des habitats surfaciques ainsi que le temps passé dans les différentes catégories d’habitat. Ensuite, on aborde les résultats de la sélection des habitats linéaires et des lisières.

4.4.1 Les éléments surfaciques

Les résultats de la sélection des habitats surfaciques (Tab. 4.8 et 4.9) indiquent que les oreillards sélectionnent certains types d'habitats.

Tous les individus sélectionnent négativement les zones de cultures. Cependant, des différences de sélection existent entre individus et entre colonies.

A Gozin, les oreillards (roux) sélectionnent positivement les bois mixtes ou de conifères mais sous- utilisent les bois feuillus, les prairies et, pour quatre individus sur les sept, les jardins.

Le comportement des P. austriacus suivis à Gembes est plus varié. Quatre oreillards sélectionnent les massifs boisés, feuillus ou de conifères. Parmi eux, la femelle M, ex-allaitante, montre un comportement mixte : elle sélectionne les bois de conifères et les prairies. Les deux autres femelles sélectionnent positivement les prairies. Les jardins ont été évités par cinq oreillards sur six.

Les P. austriacus de Pondrôme montrent une sélection de l’habitat contrastée, semblable aux P. auritus de Gozin. Tous les individus suivis sélectionnent positivement les massifs boisés, feuillus ou résineux. Les individus A et L ont également sélectionné positivement les pelouses et jardins. En revanche, les prairies sont sous-utilisées par les 4 individus par rapport à leur disponibilité.

Les P. auritus de Pondrôme ont par contre un comportement mixte : les individus B et F sélectionnent aussi bien les prairies que les massifs boisés feuillus. Les femelles D et I sélectionnent les pelouses et jardins et évitent les prairies et les bois. L’individu C, un mâle, sélectionne uniquement les prairies et rejette les autres habitats.

Chapitre 4 : Exploitation de l’espace et du temps 72 Colonie Gozin, P. auritus Gembes, P. austriacus Sexe F M F F M F F F F F F M F Date de capture 11-mai 6-juin 28-août 11-sept 13-mai 21-mai 28-mai 14-août 5-juin 14-juin 4-juil 30-juil 17-août Individu J K N O P Q X M R S T U V Routes et carrefours / / / / Bâtiments / Bois feuillus ------/ + + - Bois de conifères - + + + + + + - / + + Bois mixtes + + + + + + + / / / / / Vergers / / / / / Peupleraie / / / / / Landes, buissons… - Prairies ------+ + + - - / Pelouses et jardins - / ------Cultures ------Tab. 4.8 : Sélection des habitats surfaciques des individus radiopistés des colonies de Gozin et Gembes. Les cellules en vert correspondent à une sélection positive, en rouge à une sélection négative. Les cellules notées “/” correspondent à une absence de sélection. Les cellules vides sont celles pour lesquelles la surface est inférieure à 3 % de la surface de l’aire d’activité de l’individu considéré.

Colonie Pondrôme, P. austriacus Pondrôme, P. auritus Sexe F F F F F M F F F Date de capture 7-mai 19-juil 30-juil 12-juil 26-mai 9-juin 10-juin 6-juil 6-août Individu A G H L B C D F I Routes et carrefours / / / Bâtiments Bois feuillus + + + + + - / + - Bois de conifères - / + + - - - - / Bois mixtes - / - - / Vergers / / / / / / / / / Peupleraie / / / / Landes, buissons…s / / / / / / Prairies - - - - + + - + - Pelouses et jardins + - - + / - + - + Cultures ------Tab. 4.9 : Sélection des habitats surfaciques des individus radiopistés de la colonie syntopique de Pondrôme. Les cellules en vert correspondent à une sélection positive, en rouge à une sélection négative. Les cellules notées “/” correspondent à une absence de sélection. Les cellules vides sont celles pour lesquelles la surface est inférieure à 3 % de la surface de l’aire d’activité de l’individu considéré.

La proportion moyenne du temps passé dans chacune des catégories d’habitat est différente entre les colonies. Les habitats pour lesquels des différences sont mesurées concernent les bois de conifères (p = 0,019), de feuillus (p = 0,015), mixtes (p = 0,027) et les prairies (p = 0,026) (Tab. 4.10). Entre les deux espèces, aucune différence n’est constatée (test de Mann-Whitney sur les 7 catégories d'habitats, p = 0,075) pas plus qu’entre les mâles et femelles de P. auritus (p = 0,187, n = 12).

Chapitre 4 : Exploitation de l’espace et du temps 73 Gz (n= 7) Ge (n= 7) Pg (n= 4) Pr (n= 5) Kruskal Wallis (ddl = 3)

Moy Ec-t Moy Ec-t Moy Ec-t Moy Ec-t 0² p Surf. urbanisée 15,5 21,6 5,4 12,2 17,3 16,7 15,7 27,1 4,762 0,190 Bois conifères 26,2 32,7 2,9 4,4 3,2 6,5 0,0 0,0 9,976 0,019 Bois feuillus 0,1 0,3 35,4 40,1 48,7 15,6 11,5 17,8 10,484 0,015 Bois mixte 42,7 30,8 4,1 9,3 31,3 16,4 9,0 20,1 9,091 0,023 Prairie 15,5 16,4 51,4 42,2 9,4 5,6 63,8 34,0 9,287 0,026 Culture 0,0 0,0 0,8 1,9 0,0 0,0 0,0 0,0 2,667 0,446 Tab. 4.10 : Proportion (%) moyenne du temps passé par les individus radiopistés dans les différentes catégories d’habitats.

Lorsque l’on compare deux à deux le temps moyen relatif passé dans chacune des catégories d’habitats par les différentes colonies, des différences significatives sont également détectées (Tab. 4.11).

P. auritus P. auritus P. auritus P. auritus P. austriacus vs vs P. austriacus vs vs vs vs P. austriacus P. austriacus P. auritus P. austriacus P. auritus P. austriacus Pondrôme Pondrôme Syntopie Allopatrie Gz vs Pr Ge vs Pg Pg vs Pr Gz vs Ge Gz vs Pg Ge vs Pr Surf. urbanisée 0,569 0,078 0,461 0,043 0,850 0,319 Bois de conifères 0,009 0,719 0,264 0,051 0,066 0,082 Bois feuillus 0,066 0,521 0,027 0,034 0,004 0,350 Bois mixtes 0,035 0,028 0,125 0,028 0,257 0,816 Prairies 0,019 0,055 0,014 0,116 1,000 0,410 Cultures - 0,262 - 0,280 - 0,361 Tab. 4.11 : Comparaison entre les colonies du temps moyen relatif passé par les individus radiopistés dans les catégories d’habitats. Les valeurs de p sont issues du test de Mann-Whitney.

Ainsi, les deux colonies de P. auritus , à Gozin et Pondrôme, utilisent différemment les bois de conifères (U = 17,5, z = 2,600, p = 0,009) ou mixtes (U = 20, z = 2,105, p = 0,035) et les prairies (U = 31, z = -2,355, p = 0,019). Ces deux premiers habitats sont utilisés plus intensivement par la colonie de Gozin, tandis que les prairies le sont pour la colonie de Pondrôme.

Les deux colonies de P. austriacus , à Gembes et à Pondrôme, n’utilisent pas les habitats de façon identique mais la seule différence significative porte sur les bois mixtes (U = 23, z = -2,200, p = 0,0278), utilisés plus fréquemment par les individus de Pondrôme.

De même, des différences d’utilisation existent entre les deux colonies syntopiques pour les bois feuillus (U = 16, z = -2,214, p = 0,027) et les prairies (U = 10, z = 2,449, p = 0,014). Les P. auritus exploitent plus longtemps les prairies tandis que les P. austriacus utilisent plus intensivement les massifs boisés mixtes.

La comparaison des deux colonies monospéficiques de Gozin et Gembes montrent que les deux espèces exploitent différemment les zones urbanisées (U = 28, z = - 2,028, p = 0,043) ainsi que les bois de conifères (U = 28,5, z = -1,956, p = 0,051), de feuillus (U = 36, z = 2,117, p = 0,034) et mixtes (U = 27, z = -2,204, p = 0,028). Les zones urbanisées et les bois de conifères et mixtes sont exploités plus longtemps par les P. auritus de Gozin, tandis que les P. austriacus de Gembes exploitent davantage les bois feuillus et les zones urbanisées.

La seule différence entre les P. auritus de Gozin et les P. austriacus de Pondrôme porte sur l’utilisation des bois de feuillus plus importante à Pondrôme (U = 28, z = -2,885, p = 0,004).

Chapitre 4 : Exploitation de l’espace et du temps 74 Enfin, aucune différence entre les P. austriacus de Gembes et les P. auritus de Pondrôme n’est détectée.

4.4.2 Les éléments linéaires

Concernant les éléments linéaires autres que les lisières (Tab. 4.12 et 4.13), dix-sept oreillards sur les vingt-deux suivis ont exploité des terrains de chasse où au moins un habitat linéaire est représenté en proportion supérieure à sa disponibilité.

Les rangées d’arbres et les haies sont le plus souvent sélectionnées, seul l’individu B ( P. auritus, Tab. 4.13) évite ces deux éléments.

Colonie Gozin, P. auritus Gembes, P. austriacus Sexe F M F F M F F F F F F M F Date de capture 11-mai 6-juin 28-août 11-sept 13-mai 21-mai 28-mai 14-août 5-juin 14-juin 4-juil 30-juil 17-août Individu J K (ns) N O P Q X M R (ns) S T U (ns) V Crêtes de grand talus / / / / Bases de grand talus / / / / Petits talus - - / / / + - - / - Murs / Rangées d'arbres / + + + / + + Haies + + - / / - - + / Tab. 4.12 : Sélection des habitats linéaires des individus radiopistés à Gozin et à Gembes. Les cellules en vert correspondent à une sélection positive, en rouge à une sélection négative. Les cellules notées “/” correspondent à une absence de sélection. Les cellules vides sont celles pour lesquelles la proportion est inférieure à 3 % du linéaire dans l’aire d’activité de l’individu considéré.

Colonie Pondrôme, P. austriacus Pondrôme, P. auritus Sexe F M F F F F F F F Date de capture 26-mai 9-juin 10-juin 6-juil 6-août 7-mai 19-juil 30-juil 12-juil Individu A G H L B C D F I Crêtes de grand talus / / - + - - Bases de grand talus / / / / - / - Petit talus - - - / + / - - / Murs Rangées d'arbres + + / + - + + / + Haies - - + - - - - / / Tab. 4.13 : Sélection des habitats linéaires des individus radiopistés à Pondrôme. Les cellules en vert correspondent à une sélection positive, en rouge à une sélection négative. Les cellules notées “/” correspondent à une absence de sélection. Les cellules vides sont celles pour lesquelles la proportion est inférieure à 3 % du linéaire dans l’aire d’activité de l’individu considéré.

Concernant l’utilisation des lisières (Tab. 4.14 et 4.15), les P. auritus de Gozin sélectionnent des habitats avec des lisières feuillues, au détriment des lisières mixtes ou résineuses, excepté le mâle P qui évite ces deux types de lisières. Sur les trois P. austriacus de Gembes pour lesquels les résultats sont significatifs, les individus M et R sélectionnent les lisières feuillues et rejettent les lisières de résineux, tandis que l’individu T montre l'inverse. A Pondrôme, les deux P. austriacus dont les résultats sont significatifs sélectionnent soit les lisières résineuses (individu A) ou feuillues (individu B) tout comme les deux P. auritus dont les résultats sont significatifs (individu B et C).

Chapitre 4 : Exploitation de l’espace et du temps 75 Colonie Gozin, P. auritus Gembes, P. austriacus Sexe F M F F M F F F F F F M F Date de capture 11-mai 6-juin 28-août 11-sept 13-mai 21-mai 28-mai 14-août 5-juin 14-juin 4-juil 30-juil 17-août Individu J K (ns) N O P Q X (ns) M R S (nd) T U (ns) V (ns) Lisière feuillue + + + - + + + - Lisière mixte - - - - Lisière résineuse ------+ Tab. 4.14 : Sélection des lisières des individus radiopistés à Gozin et Gembes. Les cellules en vert correspondent à une sélection positive, en rouge à une sélection négative. Les cellules notées “/” correspondent à une absence de sélection. Les cellules vides sont celles pour lesquelles la proportion est inférieure à 3 % du linéaire dans l’aire d’activité de l’individu considéré. ns : non significatif, nd : pas de données.

Colonie Pondrôme, P. austriacus Pondrôme, P. auritus Sexe F M F F F F F F F Date de capture 26-mai 9-juin 10-juin 6-juil 6-août 7-mai 19-juil 30-juil 12-juil Individu A G H (ns) L (ns) B C (ns) D (ns) F I (ns) Lisière feuillue - + + / + - + - - Lisière mixte / / / / - + - - Lisière résineuse + - - / / + + + + Tab. 4.15 : Sélection des lisières par les individus radiopistés à Pondrôme. Les cellules en vert correspondent à une sélection positive, en rouge à une sélection négative. Les cellules notées “/” correspondent à une absence de sélection. Les cellules vides sont celles pour lesquelles la proportion est inférieure à 3 % du linéaire dans l’aire d’activité de l’individu considéré. ns : non significatif.

5. R ésultats : exploitation du temps

Dans ce paragraphe, seront présenté successivement les résultats 1) du début et de la durée de la période d’activité, 2) du nombre et de la durée des retours au gîte, 3) de la fréquence et de la durée d’utilisation de reposoirs nocturnes, 4) de la durée des périodes de vol et 5) de la durée des pertes de signal radio.

5.1 Période d’activité nocturne : émergence et durée

En moyenne, les oreillards quittent le gîte 34 ± 17 min (n =106) après le coucher du soleil (Tab. 4.16 à 4.19). L’heure de départ n’est pas constante entre les colonies (F = 20,11, df = 105, p < 0,0005) : les P. auritus de Gozin sortent plus tardivement (moyenne = 52 ± 18 min), en comparaison avec les autres colonies (p < 0,0005) 4. Il n’y a pas de différence significative entre les heures de départ des trois mâles de P. auritus (n = 14) et celles des 10 femelles (n = 28) de P. auritus (U = 280,5, z = 0,547, p = 0,584).

La durée de la période d’activité nocturne, est en moyenne de 332 ± 130 min (Tab. 4.15). Il n’y pas de différence entre les colonies (H = 3,303, ddl =3, p = 0,347), ni entre les espèces (U = 1688, z = 1,292, p = 0,196) 5.

4En excluant les mâles, les résultats du test d’hypothèse restent similaires. 5En excluant les mâles, les résultats du test d’hypothèse restent similaires.

Chapitre 4 : Exploitation de l’espace et du temps 76 La période d’activité des trois femelles allaitantes (individus F, G et L) de la colonie de Pondrôme (357 ± 100 min) n’est pas significativement plus importante que celle des individus non allaitants (332 ± 136 min) (U = 944,5, z = 1,374, p = 0,170). 6

Les trois mâles de P. auritus , deux à Gozin et un à Pondrôme, montrent par contre une période d’activité moyenne plus faible (195,8 ± 99,8 min, n = 13) que les femelles de l’espèce (373,8 ± 89,1 min, n = 28) (U = 123, z = 4,203, p < 0,0005) (Tab. 4.15 et 4.18).

Il n'existe pas de relation entre l'heure de départ et la couverture nuageuse (H = 1,291, ddl = 2, p = 0,525) ou la température au coucher du soleil (H = 2,563, ddl = 6, p = 0,861). Par contre, la durée de la période d'activité est significativement corrélée avec la durée de la nuit (R² = 0,206, p < 0,0005, n = 89).

Plecotus sp. n = 89 (108)* moy Ec-t méd. Emergence après cs* (min) 34 17 30 Période activité (min) 332 130 352 Période activité (% nuit) 64,9 23,6 70,4 Retour au gîte (nb) 1,2 0,5 1,0 Retour au gîte (min) 8 20 0 Retour au gîte (% de pa) 0,0 0,1 0,0 Reposoir (nb) 1,4 2,2 0,0 Reposoir (min) 32 48 10 Reposoir (% de pa) 12,9 22,0 2,6 Période de vol (min) 265 145 298 Période de vol (% de pa) 76,4 27,1 86,9 Tab. 4.16 : Durée moyenne et médiane des activités nocturnes des Plecotus . * nombre de données pour le calcul de l'heure d'émergence. Pa : période d'activité, n : nombre de nuits, cs : coucher du soleil.

Gz ( P. auritus ) Femelles n = 17 (18)* Mâle n = 6 (8)* Colonie moy Ec-t méd. moy Ec-t méd. moy Ec-t méd. Emergence après cs* (min) 55 18 51 45 16 46 52 18 48 Période activité (min) 386 69 362 202 92 197 338 110 342 Période activité (% nuit) 71,2 8,2 70,4 40,9 16,5 39,9 63,1 17,2 69,0 Retour au gîte (nb) 1,0 0,0 1,0 1,0 0,0 1,0 1,0 0,0 1,0 Retour au gîte (min) 1 200 000 20 Retour au gîte (% de pa) 0,1 0,5 0,0 0,0 0,0 0,0 0,1 0,4 0,0 Reposoir (nb) 1,8 3,7 0,0 0,0 0,0 0,0 1,3 3,3 0,0 Reposoir (min) 13 28 0 0 0 0 10 25 0 Reposoir (% de pa) 3,2 7,0 0,0 0,0 0,0 0,0 2,3 6,1 0,0 Période de vol (min) 365 76 352 192 82 183 320 108 337 Période de vol (% de pa) 94,5 9,9 100,0 96,6 8,3 100,0 95,1 9,4 1,0 Tab. 4.17 : Durée moyenne et médiane des activités nocturnes des P. auritus de Gozin (Gz). * nombre de données pour le calcul de l'heure d'émergence. Pa : période d'activité, n : nombre de nuits, cs : coucher du soleil.

6La période d’activité des jeune P. austriacus de la colonie de Pondrôme et de Gembes qui est de 329,83 ± 89,20 min est pratiquement identique de celle des adultes (331,87 ± 132,62 min) (t = 0,037, ddl = 87, p = 0,971).

Chapitre 4 : Exploitation de l’espace et du temps 77 Ge ( P. austriacus ) Femelles n = 22 (29)* Mâle ( j ) n = 4 Colonie moy Ec-t méd. moy Ec-t méd. moy Ec-t méd. Emergence après cs* (min) 25 8 27 32 3 32 26 8 28 Période activité (min) 373 154 392 331 114 357 36 148 392 Période activité (% nuit) 70,6 26,3 77,1 63,8 22,3 69,1 69,6 25,5 77,1 Retour au gîte (nb) 1,1 0,3 1,0 1,0 0,0 1,0 1,1 0,3 1,0 Retour au gîte (min) 3 14 0 0 0 0 2 13 0 Retour au gîte (% de pa) 1,8 8,5 0,0 0,0 0,0 0,0 1,5 7,8 0,0 Reposoir (nb) 1,2 1,7 0,5 1,3 1,5 1,0 1,2 1,6 0,5 Reposoir (min) 27 47 5 14 19 9 25 44 5 Reposoir (% de pa) 13,8 24,7 1,3 6,4 10,1 2,1 12,6 23,1 1,1 Période de vol (min) 305 183 326 308 120 337 305 173 326 Période de vol (% de pa) 75,0 28,6 88,5 91,7 10,3 94,0 77,6 27,2 90,5 Tab. 4.18 : Durée moyenne et médiane des activités nocturnes des P. auritus de Gembes (Ge). * nombre de données pour le calcul de l'heure d'émergence. Pa : période d'activité, n : nombre de nuits, j : juvénile, cs : coucher du soleil.

Pg ( P. austriacus ) Pr ( P. auritus ) Femelles n = 22 (31)* Femelles n = 11 Mâle n = 7 Colonie moy Ec-t méd. moy Ec-t méd. moy Ec-t méd. moy Ec-t méd. Emergence après cs* (min) 31 15 28 27 11 26 33 12 30 29 12 27 Période activité (min) 318 115 329 355 114 395 190 113 153 303 123 343 Période activité (% nuit) 64,8 24,1 64,3 71,7 23,2 76,4 42,1 25,0 34,0 60,2 24,1 68,2 Retour au gîte (nb) 1,5 0,7 1,0 1,4 0,7 1,0 1,4 0,5 1,0 1,4 0,6 1,0 Retour au gîte (min) 22 29 0 14 27 0 0 0 0 9 29 0 Retour au gîte (% de pa) 6,7 9,9 0,0 3,5 6,7 0,0 0,0 0,0 0,0 2,1 5,4 0,0 Reposoir (nb) 1,2 1,8 1,0 2,5 2,0 3,0 1,0 0,6 1,0 1,94 1,73 1,5 Reposoir (min) 34 40 25 48 41 52 95 86 83 66 64 56 Reposoir (% de pa) 11,9 16,1 5,8 16,2 19,2 13,1 46,3 38,6 42,0 27,9 31,1 15,8 Période de vol (min) 204 107 197 280 119 326 110 128 72 214 146 198 Période de vol (% de pa) 63,6 25,3 67,9 74,2 25,2 83,5 53,7 38,6 58,0 66,2 31,7 71,4 Tab. 4.19 : Durée moyenne et médiane des activités nocturnes des P. austriacus et P.auritus Pondrôme. * nombre de données pour le calcul de l'heure d'émergence. Pa : période d'activité, n : nombre de nuits, cs : coucher du soleil.

Les femelles de P. auritus de Gozin passent 77,6 % de leur période d'activité dans un rayon de 0 à 2000 m, tandis que les femelles de P. austriacus de Gembes y passent 98,4 %. A Pondrôme, la proportion atteint 84,2 % pour les P. auritus et 60,9 % les P. austriacus . Pour ces derniers, 16,5 % de la période d’activité est dépensée dans un rayon supérieur à 3000 m. (Fig. 4.7). Les tranches pour lesquelles des différences inter-colonies sont significatives sont 1000-1500 m (H = 13,247, ddl = 3, p = 0,003), 1500-2000 m (H = 12,665, ddl = 3, p = 0,004) et > 3000 m (H = 5,685, ddl = 3, p = 0,004).

En syntopie, seul le temps passé dans un rayon de 2000-2500m diffère significativement : il est plus important chez les femelles de P. austriacus (P. auritus : 0,20 ± 0,8 % de pa ; P. austriacus : 18,4 ± 22,9 % de pa) (U = 137,5, z = -2,144, p = 0,032).

Les deux P. auritus mâles n'ont pas montré de différences par rapport aux cinq femelles. A Pondrôme, le mâle P. auritus a par contre passé moins de temps dans la tranche de 1500-2000m que les femelles (H = 59,5, z = 3,048, p = 0,002).

Chapitre 4 : Exploitation de l’espace et du temps 78 Gz (17 nuits, 5 ind.) Ge (22 nuits, 5 ind.) .5 .4 .3 .2 .1 0 Pr (11 nuits, 4 ind.) Pg (22 nuits, 4 ind.) .5 .4 .3 .2 Proportion de la période d'activité période la de Proportion .1 0 >3,0 >3,0 0 - 0,5 0 - 0,5 0,5 - 1,0 1,0 - 1,5 1,5 - 2,0 2,0 - 2,5 2,5 - 3,0 0,5 - 1,0 1,0 - 1,5 1,5 - 2,0 2,0 - 2,5 2,5 - 3,0 km Fig. 4.7 : Proportion de la période d’activité journalière des femelles répartie en bandes concentriques de 0,5 km autour du gîte (nb. nuits = 72).

5.2 Retours nocturnes au gîte : nombre et durée

Le nombre de retours au gîte au cours d’une nuit varie entre 0 (nuit unimodale) et 2 (nuit trimodale) et est, en moyenne, de 1,2 ± 0,5 (n = 89) (Tab. 4.16). Sur les 89 nuits de suivi, les oreillards ont ainsi montré un patron d’activité unimodale durant 73 nuits, une activité bi et trimodale durant respectivement 12 et 4 nuits (Tab. 4.20). Le nombre moyen de retours n’est pas différent entre colonies (p > 0,256, pseudo R² = 0,017) 7, ni entre espèces (p = 0,609, pseudo R² = 0,001), ou entre sexes (p = 0,806, pseudo R² < 0,0005).

Gz Ge Pondrôme Pondrôme P. auritus P. austriacus P. austriacus P. auritus Individu JK°N O P° Q X M R S TU°V AG*H L* BC°DF* I nb nuits unimodales 2 3 4 2 3 5 3 4 3 4 2 4 8 4 4 2 2 2 4 1 0 4 (n = 73) nb nuits bimodales 1 1 3 4 1 11 (n = 12) nb nuits trimodales 3 1 (n = 4) Tab. 4.20 : Nombre de nuits de suivi télémétrique en fonction du nombre de retours au gîte. Les trois femelles allaitantes sont identifiées par une *, les mâles par une °.

Seuls les individus L et F sont rentrés deux fois au gîte principal au cours d’une même nuit. Il s’agit de deux femelles allaitantes. Le nombre de rentrées au gîte des trois femelles allaitantes (19 nuits) n’est cependant pas différent des individus non allaitants (70 nuits) (p = 0,082, pseudo R² = 0,014).

A titre d’exemple, voici le résumé de l’activité des 2 femelles allaitantes avec un patron d’activité tri- modale. Il s’agit des femelles F et L de Pondrôme. Le 6 juillet 1999, 190 min après la sortie crépusculaire, la femelle F ( P. auritus) de Pondrôme est rentrée au gîte pendant 24 min. Après une deuxième période de chasse de 63 min, elle rentre à nouveau au gîte pendant 35 min avant de repartir une dernière fois chasser pendant 98 min.

7En excluant les mâles, les résultats du test d'hypothèse restent similaires.

Chapitre 4 : Exploitation de l’espace et du temps 79 Le 12, 15 et 17 juillet 1999, la femelle L ( P. austriacus ) de Pondrôme a également réintégré le gîte deux fois pendant la nuit avant de rentrer à l’aube. Au cours de ces trois nuits, la durée moyenne de la première période de chasse est de 70 ± 58 min. Elle rentre ensuite au gîte pendant 21 ± 9 min avant de repartir chasser pendant 145 ± 53 min. La deuxième rentrée au gîte dure 23 ± 15 min et la troisième période de chasse dure 159 ± 45 min. Le 13, 14, 15, 16, 19 et 21 juillet le patron d’activité est par contre bi (n = 4) ou unimodal (n = 2).

Si un patron d’activité trimodal est uniquement observé chez deux femelles allaitantes, les femelles non allaitantes R, V, D ont également entrecoupé leur nuit d’une rentrée au gîte principal.

Le temps moyen passé dans le gîte lors des retours nocturnes (44 ± 27 min, médiane = 51 min) est hétérogène entre les colonies (F = 3,83, ddl = 88, p = 0,013) (Tab. 4.16 à 4.19). On ne détecte pas de différence interspécifique (t = 1,932, ddl = 87, p = 0,057).

Il n'y pas de corrélation entre la durée des retours au gîte et la durée de la période d'activité (R² = 0,009, p = 0,380, n = 89).

5.3 Utilisation de reposoirs nocturnes : fréquence et durée

Sur les 22 oreillards suivis, seuls les individus K, P, Q, X de Gozin et l’individu A, un P. austriacus de Pondrôme, n’ont pas utilisé de reposoir ou, du moins, cela n’a pu être détecté. Le nombre de reposoirs utilisés par nuit varie entre 0 et 14. Il est, en moyenne, de 1,4 ± 2,2 reposoirs par nuit (n = 89) (Tab. 4.16 à 4.19). Il n’existe pas de différence entre les colonies (p > 0,302, pseudo R² = 0,013, n = 89) 8 ni entre les espèces (p = 0,392, pseudo R² = 0,003, n = 89).

Il n'y a pas de corrélation entre la durée de la période d'activité (point C1) et le nombre de périodes de repos (R² = 0,078, p = 0,067).

Sur les quatre-vingt-neuf nuits de suivi, le temps moyen d’utilisation d’un reposoir par les oreillards est de 32 ± 48 min (médiane = 11 min, moyenne en % de pa = 12,9 ± 22,0) (Tab. 4.16). Ce sont les individus C, un mâle P. auritus de Pondrôme, et T, une femelle gestante de Gembes, qui ont passé le plus de temps sur des reposoirs au cours d’une seule nuit, avec, respectivement 229 et 190 min, soit 91 et 53 % de leur période d’activité. Le reposoir utilisé par l’individu C est situé dans un cordon d’aulnes le long du ruisseau de Snaye. Il a été utilisé au cours de deux nuits, 229 min le 16 juin et 184 min le 17 juin 1999. Le reposoir utilisé le 5 juillet 2001 par l’individu T est un cabanon en bois.

La durée d’utilisation de reposoirs par nuit, mesurée en proportion de la période d'activité (pa), est différente entre les colonies (F = 5,23, ddl = 88, p = 0,002) 9. En comparaison avec la colonie de P. auritus de Pondrôme, les P. auritus de Gozin utilisent moins intensivement les reposoirs (p = 0,002) (Tab. 4.16 et 4.18). Concernant les deux autres colonies (Tab. 4.18 et 4.19), les différences ne sont pas significatives (p = 0,120).

Les différences interspécifiques (t = -0,271, ddl = 87, p = 0,787) 10 et de sexes chez P. auritus ne sont pas significatives (t = -1,247, ddl = 39, p = 0,220) (Tab. 4.17 à 4.19).

Il n'y a pas de corrélation entre la durée d’utilisation de reposoirs et la durée de la période d'activité (R² = 0,026, p = 0,078, n = 89).

8En excluant les mâles, les résultats du test d’hypothèse restent similaires. 9En excluant les mâles, les résultats du test d’hypothèse restent similaires. 10 En excluant les mâles, les résultats du test d’hypothèse restent similaires.

Chapitre 4 : Exploitation de l’espace et du temps 80 5.4 Durée des périodes de vol

En moyenne, la durée journalière de la période de vol est de 265 ± 145 min ou 76,4 ± 27,1 % de la période d'activité (médiane = 298 min, n = 89) (Tab. 4.16). La durée relative des périodes de vol n'est pas identique entre les quatre colonies (F = 7,51, ddl = 88, p < 0,0005) 11 .

La durée relative des périodes de vol des P. auritus de Gozin est plus importante que celle des P. auritus et P. austriacus de Pondrôme (p = 0,001) (Tab. 4.17 et 4.19). A Pondrôme, on ne mesure pas de différence entre les deux espèces syntopiques (p = 0,990). De même, la colonie de P. austriacus de Gembes ne montre aucune différence avec la colonie de P. austriacus (p= 0,284) et de P. auritus (p = 0,520) de Pondrôme (Tab. 4.17 à 4.19).

Des différences existent entre les deux espèces (U = 1866, z = -2,454, p = 0,0141). La durée relative des périodes de vol des P. auritus (moyenne en % de pa = 82,4 ± 26,1, moyenne en min = 273 ± 136, médiane = 326 min, n = 41) est légèrement plus importante que celle des P. austriacus (moyenne en % de pa = 71,2 ± 27,0, moyenne en min = 259 ± 154, médiane = 270 min, n = 48) 12 .

La durée relative des périodes de vol des trois mâles de P. auritus ne diffère pas de celle des femelles (t = 1,511, ddl = 39, p = 0,139) mais, en valeur absolue (minutes), ils volent nettement moins longtemps (mâle : 148 ± 114 min, médiane : 119 min, n = 13 ; femelle : 331 ± 103 min, médiane : 311 min, n = 28) (U = 137, z = 3,811, p = 0,0001).

5.5 Durée des pertes de signal radio

En moyenne, la durée journalière des pertes de signal radio est de 8,2 ± 16,2 % de la période d'activité (moyenne en min = 50 ± 71). Des différences existent entre les colonies (F = 4,37, ddl = 88, p = 0,007) (H = 15,093, ddl = 3, p = 0,002). La durée des pertes est ainsi plus importante chez les P. austriacus de Pondrôme (moyenne en % de la pa = 17,8 ± 22,5, moyenne en min = 58 ± 80), en comparaison avec les P. auritus de Pondrôme (moyenne en % de pa = 3,7 ± 10,9, moyenne en min = 38 ± 66, p = 0,049) et les P. auritus de Gozin (moyenne en % de pa = 25,2 ± 8,0, moyenne en min = 31 ± 45, p = 0,015).

La comparaison interspécifique indique que les pertes de signal sont plus importantes chez les P. austriacus (moyenne en % de pa = 12,6 ± 19,4, moyenne en min = 55 ± 76, n = 48) que chez les P. auritus (moyenne en % de pa = 3,0 ± 9,3, moyenne en min = 35 ± 55, n = 41) (U = 1528, z = 3,248, p = 0,001).

On ne distingue pas de différence entre les sexes (t = 2,879, ddl = 87, p = 0,005).

Il n'y a pas de corrélation entre la durée des pertes de signal radio et la durée de la période d'activité (R² = 0,017, p = 0,175).

11 En excluant les mâles, les résultats du test d’hypothèse restent similaires. 12 En excluant les mâles, les résultats du test d’hypothèse ne montrent plus de différence significative entre les gris et les roux (p = 0,077).

Chapitre 4 : Exploitation de l’espace et du temps 81 6. E ffet des émetteurs sur le comportement des oreillards

Aucune corrélation n'a été mise en évidence entre le ratio poids de l'émetteur/poids de l'oreillard (e/o) et l'heure d'émergence (R² = 0,017, p = 0,560), la distance maximale parcourue (R² = 0,129, p = 0,102), l'aire d'activité journalière (R² = 0,030, p = 0,443) ou la durée de vol journalière (R² = 0,061, p = 0,270).

Après avoir créé deux catégories en fonction du ratio poids de l'émetteur/poids de l'oreillard (5 – 7 % n = 13, et supérieur à 7 % n = 9), aucune différence entre les deux groupes n'est mise en évidence concernant l'heure d'émergence (U = 124, z = - 1,369, p = 0,171), la distance maximale parcourue (U = 116, z = - 0,837, p = 0,402), l'aire d'activité journalière (U = 99, z = 0,301, p = 0,764) ou la durée des vols (U = 99, z = 0,301, p = 0,764).

Aucune des études antérieures sur les oreillards ne mentionne d'effets des émetteurs sur le comportement ou la survie des oreillards. Le ratio e/o d’E NTWISTLE et al. (1996) était de 6,4 à 9,5 % tandis que celui de notre étude est de 4,5 à 8,3 %.

Ci-dessous (Fig 4.8 à 4.17), on trouvera des illustrations de terrains de chasse les plus utilisés par les individus radiopistés.

Fig. 4.8 : Terrains de chasse exploités par des P. auritus Fig. 4.9 : Terrain de chasse exploité par des P. auritus de de Gozin. Alignements d’arbres, bocages et, en arrière Gozin. Bois de résineux, le Ban de Malakof, exploité par plan, le bois mixte de Martouzin exploités par les les individus J, P, Q et X. (G.Motte, 13/07/2011). individus J, K, O, P, Q, X. (G.Motte, 13/07/2011).

Fig. 4.10 : Terrains de chasse exploités par des P. Fig. 4.11 : Terrain de chasse exploité par des P. austriacus de Gembes. Prairie de fauche, exploitée par austriacus de Gembes. Prairies humides de fond de les individus S, U, V et en arrière plan, le bois de vallée situées le long du ruisseau d’Halmidon exploitées feuillus, Virée de l’Almache exploité par les individus par les individus M et V. (G.Motte, 22/06/2001). M, T, U, V. (R. Libois, 10/07/2011).

Chapitre 4 : Exploitation de l’espace et du temps 82 Fig. 4.12 : Terrains de chasse exploités par des Plecotus Fig. 4.13 : Terrains de chasse exploités par les P. auritus de Pondrôme. Cordon rivulaire, prairie pâturée intensive de Pondrôme. Prairies intensives et cordon rivulaire le (P. austriacus : individus G et H ; P. auritus : individus long du ruisseau de Snaye exploité par les individus B et D et C) et le bois de feuillus, Taille Mathias, situé en C. (G.Motte, 13/07/2011). arrière plan ( P. austriacus : individus H et L). (G.Motte, 13/07/2011).

Fig. 4.14 : Terrain de chasse exploité par des P. auritus Fig. 4.15 : Cordon arboré utilisé comme route de vol par de Pondrôme. Zone humide pâturée intensivement au un P. austriacus (individu A) situé au lieu dit La ferme lieu dit Les Stappes, exploitée par les individus C et D. des Quatre Quarts. (G.Motte, 13/07/2011). (G.Motte, 13/07/2011).

Fig. 4.16 : Terrain de chasse exploité par les P. Fig. 4.17 : Terrain de chasse exploité par des P. austriacus de Pondrôme. Bois de feuillus matures à austriacus de Pondrôme. Jeune chênaie calcicole de caractère hydromorphe, fortement drainé, exploité par plaine avec poches humides exploitée par l’individu G, les individus H et L, situé au lieu dit Les Stappes. située au lieu dit Les Goules. (G.Motte, 13/07/2011). (G.Motte, 13/07/2011).

Chapitre 4 : Exploitation de l’espace et du temps 83 7. D iscussion

7.1 Avertissement

La délimitation des terrains des chasse par la méthode du « homing-in » et par l'utilisation de repères visuels évidents sur le terrain (routes, haies, alignements d’arbres, lisières, chemins forestiers, maisons, arbres, lignes électriques, voies de chemin de fer,…) peut avoir pour conséquence une surestimation de la surface des terrains de chasse. Ce biais parait plus important lors du suivi en milieu forestier où les chemins, sentiers et coupe feux ont été utilisés comme repère.

Par ailleurs, ce protocole est coûteux en temps et limite le nombre d'individus suivis. De plus, la capture des animaux dans les quatre gîtes étudiés reste périlleuse en raison des difficultés d'accès aux combles. En conséquence, le statut reproducteur et le sexe des oreillards radiopistés dans les quatre colonies étudiées n'est pas identique. Vingt-deux oreillards ont été suivis : deux jeunes, trois femelles gestantes, trois autres probablement gestantes, trois femelles allaitantes, trois encore post allaitante, deux non allaitantes, trois dont le statut de reproduction est inconnu et quatre mâles, dont un était un jeune (Tab. 4.1).

En syntopie, pour des raisons pratiques, il n'a pas été possible de pister simultanément les deux espèces et les oreillards n'ont pu être suivis pendant la totalité de la saison estivale (Tab. 4.2). Bien que la littérature ne mentionne pas de variation saisonnière de l'utilisation de l'espace chez les oreillards, si de telles variations existent dans notre zone d'étude, nous n'avons pu les mettre en évidence.

7.2 Introduction

Dans la littérature, plusieurs exemples d'utilisation différenciée des ressources spatiales parmi des assemblages syntopiques ou sympatriques de chauves-souris sont rapportés. Ceci laisse entendre que c'est un mécanisme important permettant de structurer les communautés de chiroptères.

Ainsi, après avoir mis en relation le régime alimentaire et l'utilisation de l'habitat de 26 espèces de chiroptères insectivores dans le Parc National de Kruger (Afrique du Sud), A LDRIDGE & RAUTENBACH (1987) ont proposé une répartition de l'espace en fonction des types d'habitat exploité par ces espèces. Quatre groupes fonctionnels ont été définis : «open foragers, woodland-edge, intermediate clutter and clutter ». En fonction de l’appartenance à un de ces groupes fonctionnels, le régime alimentaire diffère, tandis que les espèces appartenant à la même guilde tendent à avoir un régime alimentaire non différencié.

En Finlande, Myotis brandti, Myotis daubentonii et Eptesicus nilsonii , trois espèces sympatriques, se répartissent l'espace en utilisant, respectivement, les forêts claires, les plans d'eau et rivières et les milieux ouverts (L EHMANN 1985).

En Écosse, deux espèces partageant le même gîte, P. auritus et Myotis daubentonii utilisent des habitats de chasse différents : l'une les bois et l'autre les rivières et le long des cordons rivulaires (S WIFT &RACEY 1983).

En Espagne, l'étude d'une colonie syntopique de deux espèces jumelles de Rhinolophes, Rhinolophus euryale et R. mehelyi a mis en évidence que ces deux espèces sélectionnent différents types de forêts. La première préfère les forêts latifoliées et la seconde sélectionne des « dehasas », à savoir des forêts de chênes lièges ( Quercus suber ) à large écartement permettant le développement d'une strate herbacée dense (R USSO et al . 2005).

En Suisse, la sélection de l'habitat par deux espèces jumelles occupant le même gîte, Myotis myotis et M. blythii est présentée comme le principal mécanisme permettant le partage des ressources. M. myotis

Chapitre 4 : Exploitation de l’espace et du temps 84 sélectionne les forêts sans taillis et les prairies fraîchement coupées où il capture ses proies au sol, tandis que M. blythii sélectionne les habitats ouverts comme les prés non fauchés ou les steppes (A RLETTAZ 1999).

Enfin, chez les deux espèces cryptiques de Pipistrelles, Pipistrellus pipistrellus exploite une large gamme d'habitats, c'est une espèce généraliste, tandis que P. pygmaeus s'est spécialisée dans l'exploitation des zones rivulaires. Outre une sélection différenciée des habitats, le patron d'utilisation de l'espace peut aussi différer. En comparaison avec P. pygmaeus, P. pipistrellus utilise une aire d'activité trois fois plus importante et visite un plus grand nombre de terrains de chasse par nuit (W ATTS et al. 2005, NICHOLLS &RACEY 2006).

Plusieurs études mettent donc en évidence l'existence d'un partage des ressources spatiales entre espèces sympatriques ou syntopiques de chauves-souris. Par contre, celles sur le partage de la niche temporelle sont nettement plus rares. Le partitionnement de la niche temporelle n'est pas souvent perçu comme un mécanisme évident pour expliquer la coexistence entre espèces supposées en compétition (S CHOENER 1974, KRONFELD -S CHOR &DAYAN 2003). Pourtant, l'étude de deux espèces syntopiques de rongeurs ( Acomys cahirinus et Acomys russatu s) dans le désert israélien a démontré que le partitionnement de la niche temporelle peut résulter d'une pression de compétition interspécifique. Ainsi, A. cahirinus est une espèce nocturne, alors que A. russatus est diurne. Pourtant, après le retrait expérimental de la première espèce (utilisation d'enclos étanches de 1000m² placé dans le désert), A. russatus adopte également un comportement nocturne (S HARGAL et al. 2000, GUTMANN &DAYAN 2005).

Parmi les chauves-souris, on ne connaît pas d'exemple aussi spectaculaire. Cependant, l'étude de l'utilisation de deux points d'eau par 4 espèces de Myotis dans le Colorado par captures au filet (12 nuits réparties sur 3 ans) a montré que deux espèces, M. thysanodes et M. voltans , se partageaient la niche temporelle en décalant leurs visites, la première espèce arrivant plus précocement au-dessus du point d'eau que la seconde (A DAMS &THIBAULT 2006). En Écosse, R YDELL et al. (1996) ont observé que l'heure d'émergence de colonies sympatriques de P. pipistrellus et P. auritus était décalée d'environ 30 min, la première espèce partant plus tôt que la seconde. Cette différence a été mise en relation avec des techniques de chasses différentes. De même, l'étude d'une colonie syntopique de M daubentonii et de P. auritus a montré que le premier partait chasser bien après le crépuscule alors que le second avait déjà quitté le gîte (S WIFT &RACEY 1983). Ces différences de comportement sont interprétées comme un mécanisme permettant le partage des ressources.

Qu’en est il chez nos deux espèces jumelles d’oreillards ?

Dans un premier temps, notre propos s'articule autour de trois points :

1. Discussion des résultats de l'exploitation de l'espace : terrains de chasse, aire d'activité, sélection et utilisation de l'habitat. 2. Discussion sur les liens entre l’exploitation de l’espace et le régime alimentaire. 3. Discussion des résultats relatifs à l'activité nocturne.

Dans un second temps, sur la base des résultats de ce chapitre 4, une conclusion permettant d'aborder les mécanismes de coexistence entre les deux espèces est proposée.

Chapitre 4 : Exploitation de l’espace et du temps 85 7.3 Terrains de chasse et aire d'activité : aspects quantitatifs

Les deux espèces d'oreillards sont réputées pour chasser à proximité de leurs gîtes, les individus passant la plupart de leur temps dans un rayon de quelques centaines de mètres autour du gîte (S WIFT &RACEY 1983, F UHRMANN &SEITZ 1992, E ICHSTÄDT 1995 repris de M ESCHEDE &KELLER 2003, FLUCKIGER &BECK 1995, E NTWISTLE et al . 1996, S WIFT 1998).

Cependant, nous avons enregistré des distances supérieures à ce que les auteurs précédents ont publié.

Chez P. auritus, la distance maximale parcourue par les individus de Gozin (n = 7) et de Pondrôme (n = 5) était, respectivement de 3470 m et 4120 m. Les 67 observations visuelles de P. auritus équipés de bagues réfléchissantes (S WIFT &RACEY 1983), le radiopistage de 16 oreillards roux en Écosse (E NTWISTLE et al . 1996) et de 8 oreillards roux en Allemagne (F UHRMANN &SEITZ 1992) ont montré que l'éloignement maximal des terrains de chasse était, respectivement, de 1100 m, 2800 m et 1100 m.

Chez P. austriacus , l'éloignement maximal des terrains de chasse des individus de Gembes (n = 6) et Pondrôme (n = 4) était, respectivement de 2660 m et 5455 m. L'unique individu radiopisté par FLUCKIGER &BECK (1995) s'était éloigné au maximum de 1400 m du gîte. Le suivi télémétrique de 9 P. austriacus par K IEFER &VEITH (1998) avait cependant permis de localiser un terrain de chasse éloigné de 5500 m du gîte. Cette distance est similaire à celle parcourue par deux femelles (individu A et G) de Pondrôme.

L'utilisation de terrains de chasse éloignés de plus de deux kilomètres du gîte avait aussi été mise en évidence chez une espèce nord-américaine dont le genre est morphologiquement très proche des oreillards, Corynorhinus townsendii (ozark big-eared bat). Le radiopistage de 44 individus a montré qu'une femelle pouvait s'éloigner jusqu'à 2500 m du gîte (W ILHIDE et al. 1998).

Cependant, dans notre cas, nous avons constaté que les terrains de chasse les plus éloignés du gîte ont été exploités par des individus de la colonie mixte, qu'ils soient gris ou roux.

L’éloignement moyen des terrains de chasse n'est pas non plus homogène entre les quatre colonies. Les P. austriacus de la colonie mixte de Pondrôme ont exploité des terrains de chasse plus éloignés du gîte que les P. austriacus de la colonie monospécifique de Gembes (p = 0,063). Cette différence de comportement de la colonie mixte se reflète davantage lorsqu'on compare la proportion de la période d'activité dépensée par les femelles en fonction de l'éloignement du gîte (Fig. 4.7). Pour les deux colonies monospécifiques, 79,8 % ( P. auritus , Gozin) à 98,8 % ( P. austriacus , Gembes) de la période d'activité ont été dépensés dans un rayon de 2000m autour du gîte. Ces résultats sont comparables à ceux d ’ENTWISTLE et al . (1996) où 92 % du temps de vol des P. auritus se sont déroulés dans un rayon de 1500 m autour du gîte (60 % dans un rayon de 500 m). En condition syntopique, le patron diffère : la répartition du temps de chasse n'est plus concentrée autour d'une tranche principale mais elle est plus étalée dans l'espace, de 0 à plus de 3000 m (Fig 4.7). A l'exception de la tranche de 2000- 2500 m, délaissée par les P. auritus au profit des P. austriacus (p = 0,032) , les autres tranches sont exploitées avec la même intensité par les deux espèces (p > 0,050).

La surface moyenne des terrains de chasse n’est pas statistiquement différente entre les deux espèces ni entre les colonies. La surface des terrains de chasse enregistrée pour les P. auritus (médiane : 5,6 ha, moyenne : 8,1 ha) et les P. austriacus (médiane : 4,4 ha, moyenne : 5,6 ha) ne semble pas différente des résultats de F UHRMANN &SEITZ (1992). Ceux-ci ont mesuré des surfaces de 0,3 à 10,5 ha chez P. auritus en forêt de Lenneberg. La surface moyenne mesurée par E ICHSTÄDT (1995) dans la forêt des Grandes Landes (Brandebourg) est par contre plus importante, 20 ha avec un maximum de 40 ha. Chez P. austriacus , K IEFER &VEITH (1998) ont délimité des terrains de chasse jusqu’à 75 ha. Ceci démontre que la superficie des territoires de chasse des oreillards peut varier selon les endroits et les individus.

Chapitre 4 : Exploitation de l’espace et du temps 86 La durée d’utilisation des terrains de chasse n’est pas statistiquement différente entre les deux espèces (p = 0,568) ni entre les colonies (p = 0,255). Le temps médian d’exploitation des terrains de chasse de l’ensemble des oreillards de notre étude est de 30 min (médiane P. auritus = 33 min, médiane P. austriacus = 27 min) et ne semble pas différent des autres études. En effet, S WIFT &RACEY (1983) ont enregistré un temps de chasse moyen de 30 min, B ARATAUD (1990) a pu observer un P. auritus chasser pendant 35 min dans la frondaison d'un jeune tilleul et E NTWISTLE et al . (1996) ont enregistré un temps médian de chasse de 30 à 50 min.

Le nombre de terrains de chasse exploités au cours d'une nuit varie de 1 à 11 (moyenne = 4,0 ± 2,1, n = 89) et n'est pas différent entre les deux espèces (p = 0,557). Ces résultats sont similaires à ceux obtenus en Écosse pour P. auritus , 1 à 9 terrains de chasse (médiane = 3) étaient exploités par nuit (E NTWISTLE et al . 1996). Par contre, le comportement des femelles (n = 8) de la colonie mixte se distingue des autres femelles par une exploitation statistiquement significative d'un plus grand nombre de terrains de chasse par nuit (p < 0,008).

Par ailleurs, les individus issus d'une même colonie partagent en grande partie les mêmes terrains de chasse. La proportion de chevauchement varie de 53,1 % ( P. auritus, Pondrôme) à 74,7 % ( P. auritus , Gozin) et n'est pas statistiquement différente entre les colonies ni entre espèces. Ces valeurs sont comparables aux observations d’E NTWISTLE et al. , 1996. Les suivis simultanés de deux P. auritus ont montré que 68 % des terrains de chasse étaient utilisés par deux individus à la fois. De plus, jusqu’à cinq P. auritus ont été observés en train de chasser simultanément sur une même zone.

L'aire d'activité individuelle totale des oreillards (moyenne = 379,7 ± 298,3 ha, n = 22) n'est pas différente entre espèces (p = 0,742) ni entre colonies (p = 0,150). En comparaison, nos résultats sont nettement plus élevés par rapport à une espèce morphologiquement proche, Myotis bechsteinii : 132,0 ± 82,9 ha (n = 10) (B ARATAUD et al. 2009) ou 46 ha (min : 16,1 ha, max : 37,4 ha) (D IETZ &PIR 2009). Pour une autre espèce, plus grande, Eptesicus serotinus, KERVYN (2001) a obtenu une estimation de 296 ± 308 ha (n = 19), une surface proche de l'aire d'activité de la colonie de Gozin.

L’aire d'activité de la colonie de P. auritus de Gozin et des oreillards de la colonie mixte est comparable ( P. auritus Gozin : 1388 ha ; P. auritus Pondrôme : 1733 ha, P. austriacus Pondrôme : 1723 ha) mais elle est environ deux fois plus grande que celle de Gembes (813 ha). En comparaison avec nos données, une aire d'activité d'une colonie luxembourgeoise de M. bechsteinii a été estimée à 300 ha (D IETZ &PIR 2009). Nos résultats se rapprochent davantage de l'aire d'activité d'une colonie écossaise de M. natterreri , évaluée à 1200 ha (S MITH &RACEY 2002) ou de colonies belges de E. serotinus allant de 890 ha à 2580 ha (K ERVYN 2001) ou encore de celle d'une colonie américaine de Corynorhinus townsendii, évaluée à 1600-1900ha (C LARK e t al. 1993).

Durant la période estivale, les P. auritus de Gozin sont potentiellement en contact avec les P. auritus et les P. austriacus de Pondrôme. Ainsi, de 9,3 à 22 % de l'aire d'activité de la colonie de Gozin se superposent avec, respectivement, celle des P. auritus et P. austriacus de Pondrôme. Nous n'avons cependant jamais observé d'échange entre les colonies : les individus radiopistés sont toujours rentrés au gîte principal ou dans des gîtes secondaires éloignés de 150 m (une femelle de P. auritus de Pondrôme, individu C) à 2500 m (un mâle de P. auritus de Gozin, individu K) du gîte. En syntopie, le recouvrement est plus important et atteint 29 % de l'aire d'activité totale des oreillards gris ou roux.

Chapitre 4 : Exploitation de l’espace et du temps 87 7.4 Sélection et utilisation de l'habitat

La sélection des bois mixtes et de conifères par les 7 P. auritus de Gozin confirme que les massifs boisés constituent un habitat clé pour cette espèce. Cela avait été démontré précédemment dans d'autres pays. Ainsi, les 75 terrains de chasse découverts par ENTWISTLE et al. (1996) étaient tous associés à des bois ou à des arbres isolés et plus de 80 % du temps de vol étaient enregistrés dans les bois (feuillus 42 %, mixtes 30 % et conifères 10 %). De même, les 8 P. auritus radiopistés par FUHRMANN &SEITZ (1992) ont passé 84 % de leur temps dans les bois et après avoir bagué 84 P. auritus avec des bagues réfléchissantes, S WIFT &RACEY (1983) mentionnent que 90% des observations étaient localisées dans les bois.

A Gembes, les 6 P. austriacus ont montré une sélection mixte de l'habitat : sélection des bois de feuillus, de conifères ou des prairies, l’individu M ayant sélectionné à la fois les bois de conifères et les prairies. Ces résultats renforcent ceux de la littérature. Le suivi d’un P. austriacus en Allemagne a montré qu’il chassait au-dessus des arbres, dans des zones ouvertes, tout comme dans les massifs boisés (F LUCKIGER &BECK 1995). K IEFER &VEITH (1998) ont également montré que les 8 P. austriacus qu’ils ont pistés ont passé 37,7 % de leur temps dans des bois feuillus ou mixtes, 24,3 % au-dessus de prés et de pâtures, 16,3 % dans les parcs et jardins et 8,1 % au-dessus de jachères. BARATAUD (1990) écrit que les habitats de chasse des 3 P. austriacus suivis à l'aide de capsules chimioluminescentes collées sur le dos se caractérisent par des boisements lâches sur prairies, ainsi que des vergers et des parcs. Dans le Palatinat, K USH &SCHOTTE (2007), lors d'une étude sur les communautés de chiroptères en milieu forestier, ont enregistré des ultrasons produits par P. austriacus sur 18 % des transects (4/23). Ceci démontre la capacité des P. austriacus à chasser aussi bien en milieu fermé, comme dans les bois, qu'en milieu ouvert ou semi-ouvert, comme les prairies et les jardins.

La comparaison de la proportion du temps passé dans les différentes catégories d'habitats, mesurée en pourcentage de la période d'activité nocturne, montre que les deux espèces d'oreillards issus des colonies monospécifiques n'utilisent pas les habitats avec la même intensité (Tab. 4.9). Les P. auritus de Gozin ont passé plus de temps dans les bois ( P. auritus , Gozin : 69,0 % vs P. austriacus Gembes : 42,4 %) et au-dessus des zones urbanisées ( P. auritus , Gozin : 15,5 % v s P. austriacus Gembes : 5,4 %), tandis que les P. austriacus de Gembes ont exploité davantage les prairies ( P. auritus , Gozin: 15,5 % v s P. austriacus Gembes : 51,4 %).

En syntopie, les deux espèces ne sélectionnent pas les mêmes catégories d’habitats mais la sélection est différente de celle des individus provenant des colonies monospécifiques. Les P. auritus sélectionnent les bois de feuillus mais, contrairement aux oreillards roux de Gozin, ils sélectionnent également les prairies. Le comportement des P. austriacus est par contre plus tranché : ils sélectionnent les bois (feuillus ou conifères). Les P. austriacus ont ainsi passé largement plus de temps dans les bois que les P. auritus ( P. austriacus : bois feuillus 48,7 %, bois mixtes 31,3 % vs P. auritus bois feuillus 11,5 %, bois mixtes 9,0 %), bien que seule l'utilisation des bois feuillus soit statistiquement différente (Tab. 4. 10). En revanche, les P. auritus ont passé significativement plus de temps au-dessus des prairies que les P. austriacus, respectivement 63,8 % et 9,4 %.

Il existe cependant une caractéristique commune aux quatre colonies étudiées : l'importance d'éléments linéaires arborés. Ainsi, 77 % (17/22 individus) des oreillards ont sélectionné des terrains de chasse où les rangées d'arbres ou les haies étaient supérieures à leur disponibilité. Les lisières (feuillues : 8 individus, conifères : 3 individus) sont également sélectionnées positivement par les deux espèces. Les éléments linéaires sont utilisés comme route de vol, comme terrain de chasse et pourraient apporter une protection contre les prédateurs aériens, contre le vent ou encore servir de repère visuel pour faciliter la navigation (L IMPENS &KAPTEYN 1991, E NTWISTLE 1994, H OWARD 1995, ENTWISTLE et al. 1996, S WIFT 1998).

Chapitre 4 : Exploitation de l’espace et du temps 88 7.5 Liens entre l’exploitation de l’espace et le régime alimentaire

P. auritus à Gozin

Le régime alimentaire de la colonie de Gozin est typique d’une colonie de P. auritus : Lépidoptères (41,6 %) et Diptères (37,7 %) sont les deux catégories de proies clés. Dermaptères (6,8 %), Arachnides (5,8 % dont 65 % d’Opilions) et Coléoptères (2,3 %) complètent le régime alimentaire (Tab. 2.9).

La sélection des habitats montre que les 7 individus radiopistés ont, tous, sélectionné les massifs boisés, mixtes ou de conifères (Tab. 4.8). Selon la littérature, l’utilisation intensive des massifs boisés est également typique des P. auritus (synthèse dans M ESCHEDE &KELLER 2000).

On peut toutefois se poser la question de savoir pourquoi les massifs de résineux ont été sélectionnés puisque l’on considère que la disponibilité en Lépidoptères est plus importante dans les bois feuillus (E NTWISTLE et al. 1996). L’utilisation des forêts de résineux (épicéas, pins) est cependant bien documentée chez les oreillards roux qui y installent régulièrement leurs gîtes de mise bas (e.a. H ENZE 1963, NAGEL &NAGEL 1993, SCHMIDT 1990). L'utilisation de gîtes secondaires dans les bois de résineux pourrait donc expliquer la sélection de cet habitat. En 2000, durant l'été anormalement frais et pluvieux, la colonie avait d'ailleurs quitté la chapelle de Gozin jusqu'au mois d'août. Bien qu'un individu fût équipé d'un émetteur avant le départ de la colonie, nous n'avons jamais pu la retrouver dans les villages avoisinants.

Dans notre étude, la caractérisation des territoires de chasse reste cependant limitée au macro habitat. En réalité, la sélection des résineux peut également s'expliquer par leur structure, la présence d'un sous étage feuillus constituant un habitat propice aux Lépidoptères. En effet, les bois résineux sélectionnés par les oreillards de Gozin sont constitués de peuplements âgés à large écartement d’épicéas ( Picea abies ), de sapins de douglas ( Pseudotsuga menziesii ), de pins sylvestres ( Pinus sylvestris ) ou de mélèzes ( Larix decidua ) permettant le développement d’un sous bois diversifié d’aubépines (Crataegus monogina ), de charmes ( Carpinus betulus ), de cornouillers mâles ( Cornus mas ), d’érables champêtres ( Acer campestre ), de frênes ( Fraxinus excelsior ), de merisiers ( Prunus avium ) et de noisetiers ( Corylus avellana ). De plus, les bois mixtes ont également été sélectionnés. Il est donc tout à fait plausible que la sélection de ces deux types d'habitats ait permis aux oreillards de trouver des Lépidoptères en suffisance.

En étudiant l’écologie des proies (Chap 2, 5.9), il s'avère que les Tipules sont disponibles aussi bien au-dessus des prairies que dans les milieux forestiers et que les Opilions se rencontrent fréquemment sur les troncs d’arbres et dans les bois de préférence humides. De même, les Dermaptères ( Forficula auricularia ) sont liés au milieu forestier (chênes, noisetiers…) et ils se rencontrent également dans les jardins, sur les ombellifères, plantes herbacées, fougères, arbustes.

Parmi les Cyclorrhaphes, les Scatophagidae, très probablement Scatophaga stercoraria , représentent 22 % des déterminations. Cette espèce vit essentiellement au-dessus de prairies pâturées. Bien que les prairies n’aient pas été sélectionnées, on sait cependant que les oreillards y ont passé 15,5 % de leur temps de vol (Tab. 4.9). De plus, durant la nuit cette espèce se pose dans la végétation herbeuse ou ligneuse à proximité des praires.

A Gozin, les résultats de l’exploitation de l’espace ne contredisent donc pas ceux du régime alimentaire. L’utilisation des massifs boisés peut correspondre à la consommation d'Opilions, Dermaptères, Tipules et Lépidoptères. La consommation des Cyclorrhaphes, du moins pour 22 % d’entre eux, et probablement d'une partie des Tipules, pourrait correspondre aux 15,5 % de la période d’activité passée au-dessus de prairies.

Chapitre 4 : Exploitation de l’espace et du temps 89 P. austriacus à Gembes

Le régime alimentaire de la colonie de Gembes est typique de celui d’une colonie de P. austriacus . Les Lépidoptères dominent (55,6 %) et les proies non volantes ou diurnes sont anecdotiques (5,6 %) (Tab. 2.9). Les Tipules (26,0 %), les Coléoptères (4,7 % dont 52,2 % sont des Scarabaeoidea) et les autres Diptères (3,9 %) complètent le régime alimentaire.

La sélection des habitats montre une utilisation mixte des bois et des prairies (Tab. 4.8). Pour les mêmes raisons que celles exposées précédemment, on considère que les résultats du radiopistage ne contredisent pas ceux du régime alimentaire.

P. auritus à Pondrôme

Le régime alimentaire des P. auritus de la colonie mixte de Pondrôme se différencie peu de celui d’une colonie monospécifique de P. auritus (Fig. 2.6). Les Lépidoptères (57,3 %) et les Tipules (21,3 %) sont les catégories de proies principales. On note cependant, par rapport aux colonies monospécifiques, une plus faible consommation en Cyclorrhaphes (2,1 % ou – 7 %, p = 0,006) et la quasi inexistence des Dermaptères (0,6 % ou – 4 %, p = 0,002) (Tab. 2.9 et 2.13).

La sélection des habitats montre que les P. auritus de Pondrôme ont sélectionné aussi bien des prairies que des bois (feuillus) (Tab. 4.9). En comparaison avec la colonie voisine de Gozin, dont la consommation en Dermaptères est plus de dix fois plus importante, il serait tentant de faire le lien entre exploitation de milieux forestiers et consommation de Dermaptères. En effet, la proportion de la période d’activité passée dans les bois par les oreillards roux de Pondrôme est de 20,5 % contre 69,0 % à Gozin (Tab. 4.9).

Concernant la plus faible consommation de Cyclorrhaphes (dont au moins 15,4 % sont des Scatophaga stercoraria ) par les oreillards roux de Pondrôme, la qualité de nos données ne permet pas de mettre aisément en relation les résultats du radiopistage et le régime alimentaire. Les Cyclorrhaphes sont des insectes diurnes et sont donc capturés par glanage, probablement sur le feuillage des arbres et buissons voire au sol parmi, la végétation herbacée.

Une diminution moindre de la consommation des Cyclorrhaphes pourrait donc être mise en relation avec les faibles quantités de Dermaptères consommés et, donc, une utilisation moindre de la technique du glanage par les oreillards roux de Pondrôme. Il faut toutefois rester prudent car il est, actuellement, impossible d'estimer la proportion des Lépidoptères, proies principales, capturés par glanage.

P. austriacus à Pondrôme

Le régime alimentaire des P. austriacus de la colonie mixte de Pondrôme se différencie nettement de celui de colonies monospécifiques de P. austriacus par une consommation moindre de Lépidoptères (38,8 % ou – 25,6 %, p < 0,0005) et de Coléoptères (2,3 % ou – 11,1 %, p = 0,009). A contrario, les Arachnides (17,9 % ou + 14,5 %, p < 0,0005), les Dermaptères (9,6 % ou + 11,3 %, p < 0,0005) et les Tipules (19,2 % ou + 7,9 %, p = 0,034) sont consommés plus massivement. Concernant les autres Diptères, la différence reste négligeable même si elle est significative (4,7 % ou + 2,2 %, p = 0,001) (Tab. 2.9 et 2.14).

La sélection des habitats montre une nette préférence pour les massifs feuillus, les jardins et le rejet des prairies (Tab. 4.9). Comme précédemment, on note que la capture des Dermaptères, tout comme celle des Arachnides (dont 92,7 % sont des Opilions), les deux catégories de proies pour lesquelles les différences quantitatives sont les plus marquées après les Lépidoptères, sont à mettre en relation avec l’exploitation des habitats boisés. Les Tipules, peuvent par contre être capturées aussi bien au-dessus de prairies, que le long des lisières ou dans les bois, si bien que nous ne pouvons rien en déduire. Néanmoins, les résultats du régime alimentaire semblent corroborer ceux de l'exploitation de l'espace.

Chapitre 4 : Exploitation de l’espace et du temps 90 Synthèse

Globalement, les résultats de l’utilisation de l’espace ne contredisent pas ceux du régime alimentaire. Si les variations du régime alimentaire, particulièrement celles des Arachnides (Opilions) et des Dermaptères sont en relation avec l’intensité d’exploitation d’habitats boisés, on peut affirmer que le lien entre exploitation de l’espace et ressources trophiques est établi. En effet, la présence d’arbres, de buissons, de massifs boisés ou de lisières permet de répondre aux exigences écologiques de ces deux groupes de proies. Ces habitats sont également favorables aux Lépidoptères, Coléoptères et Tipules. L'utilisation de prairies, des lisières, des alignements d'arbres permet également aux deux espèces d'oreillards de trouver Tipules et Cyclorrhaphes.

7.6 Exploitation du temps

Les oreillards ont quitté le gîte 34 ± 17 min après le coucher du soleil ce qui correspond aux observations des études antérieures (S WIFT &RACEY 1983 : 40 ± 7 min, F UHRMANN 1992 : 26 ± 9 min, H OWARD 1995 : 26 min, S CHEUNERT et al. 2009 : médiane de 30 à 36 min). A titre de comparaison, l'heure de départ de la sérotine commune est plus précoce, entre 11 et 15 min après le coucher du soleil (K ERVYN 2001).

L'heure de départ des P. auritus de Gozin est cependant plus tardive que celles des autres colonies : il est différé d’environ 20 min. Ils quittent le gîte en moyenne 52 ± 26 min après le coucher du soleil, ce qui se rapproche de l'heure d'émergence de 14 P. auritus étudiés en Écosse (60 ± 21 min, latitude 57°N) (R YDELL et al. 1996). La disponibilité des terrains de chasse peut influencer l'heure de départ. L'heure moyenne d'émergence de 6 colonies de P. auritus en Écosse était positivement corrélée à la distance les séparant du bois le plus proche (R² = 0,79, p < 0,020) (E NTWISTLE et al. 1996). Dans notre étude, les bois les plus proches du gîte sont situés à 750 m, 700 m et 300 m des gîtes de Gozin, Pondrôme et Gembes. L'éloignement moyen des bois exploités par les oreillards pendant le suivi télémétrique est de 2167 ± 840 m pour les P. auritus de Gozin (n = 12), de 1996 ± 1147 m pour les P. auritus de Pondrôme (n = 11), de 2475 ± 1368 m pour les P. austriacus de Pondrôme (n = 28) et de 1508 ± 745 m pour les P. austriacus de Gembes (n = 16). La relation entre l'heure d'émergence des oreillards et l'éloignement des bois n'est donc pas confirmée (R² = 0,14, p = 0,619).

Le départ plus tardif des oreillards de Gozin s'explique probablement par la présence de lampadaires situés le long de route nationale, 10 m devant le gîte. Si certaines espèces de chauves-souris peuvent tirer profit de l’éclairage artificiel en exploitant les insectes qui y sont attirés (R YDELL 1992, HICKEY et al. 1996 13 ), d’autres sont négativement affectées en modifiant leurs routes de vol, les terrains de chasse ou encore en retardant leur départ (J ONES et al. 1995, F URE 2005 , BOLDOGH et al . 2007, STONE et al. 2009). La sensibilité de certaines espèces de chauves-souris à la lumière est également démontrée par le fait que la couverture nuageuse peut influencer l'heure d'émergence (K UNZ & ANTHONY 1996). De plus, l'oreillard roux fait partie des espèces pour lesquelles un comportement de « light sampling » a été décrit. Avant le départ crépusculaire, les chauves-souris tournoient à l'intérieur du gîte devant les accès ou en sortent pour y rentrer quelques secondes après (S WIFT 1981, obs. pers. ). Ce comportement est également régulièrement décrit chez Corynorhinus townsendii (T WENTE 1955, LACKI et al . 1994, W ILHIDE et al. 1998). R ICH &LONGCORE (2005), d'après l'étude de R YDELL (1992), considèrent ainsi que P. auritus est une espèce qui évite de chasser à proximité des éclairages. Ceci pourrait indiquer que les oreillards sont particulièrement sensibles à l'intensité lumineuse et expliquer les départs plus tardifs de la colonie de Gozin.

La pression de prédation exercée par les rapaces diurnes est souvent avancée pour expliquer que les chauves-souris attendent que l'intensité lumineuse soit suffisamment faible pour partir chasser (e.a. SPEAKMAN 1991). De plus, qualifiée de « slow flying species », le vol papillonnant des oreillards

13 E. nilsonii, E.serotinus, Vespertilio.murinus, Lasurius cinereus et Lasurius borealis,

Chapitre 4 : Exploitation de l’espace et du temps 91 pourrait également les rendre plus vulnérables face aux attaques de rapaces nocturnes. La pression de prédation exercée par les rapaces nocturnes sur les chauves-souris reste cependant très faible, 0,053 % (n total de proies = 103.043) dans le régime alimentaire de Tyto alba en Belgique (L IBOIS 1984). Cependant, en Pologne, K ASPRZYK et al. (2004) ont montré que les chauves-souris (principalement la sérotine commune et le grand murin) représentaient de 0,19 % ( T. alba , n total de proies = 35.258) à 0,54 % ( S. aluco , n total de proies = 1645) des proies identifiées.

La durée de la période d'activité enregistrée chez les femelles d'oreillards est de 356 ± 121 min (médiane = 386 min) et n'est pas différente entre colonies ni entre espèces. On peut donc considérer que les oreillards exploitent généralement la totalité de la durée de la nuit. Cette caractéristique est à mettre en relation avec une technique de chasse utilisée par les deux espèces, le glanage (voir chapitre 2). En effet, en capturant des insectes lorsqu'ils sont au repos sur le feuillage ou les troncs, les oreillards peuvent trouver des proies durant toute la nuit.

Le patron d'activité des oreillards est décrit comme uni-modal, à l'exception de celui des femelles allaitantes (B AUEROVA 1982, F UHRMANN &SEITZ 1992, F LUCKIGER &BECK 1995, E NTWISTLE et al. 1996, S CHEUNERT et al. 2009). Les trois femelles allaitantes G, L et F de la colonie syntopique ont effectivement montré une activité bi ou tri modale durant au moins une nuit de suivi. Nos résultats sont toutefois plus nuancés, puisque une activité bi-modale a également été observée chez trois femelles non allaitantes, deux femelles de P. austriacus de Gembes (individu R et V) et une femelle P. auritus de Pondrôme (individu D). Des retours nocturnes au gîte en dehors de la période de la lactation ont déjà été observés chez P. auritus et d'autres espèces comme N. noctula et R. hipposideros (e.a. KRONWITTER 1988, H OWARD 1995, M OTTE non publié ). On note également que les P. auritus de Gozin, à l'exception de l'individu J qui a effectué un bref retour de 9 min quelques minutes après son départ, n'ont jamais entrecoupé leur activité nocturne de rentrée au gîte. Aucune femelle allaitante n'a cependant été intégrée dans l'analyse. En dehors de la période de lactation, K UNZ (1982) a identifié cinq fonctions possibles des gîtes nocturnes : économie d’énergie, digestion, protection contre les prédateurs, transferts d'information et interactions sociales.

La durée des périodes de vol des P. auritus est de 273 ± 136 min (médiane = 326 min) contre 259 ± 154 min pour les P. austriacus (médiane = 270 min). Bien que significative, la différence provient des périodes de vol plus longues observées chez les P. auritus de Gozin. La durée du vol des P. auritus est plus importante que celles observées en Écosse (E NTWISTLE et al. 1996, médiane = 253-197 min) mais plus faible que celles mesurées en Allemagne (FUHRMANN &SEITZ 1992, moyenne = 353,6 ± 208,7 min).

Les périodes de vol des oreillards ont été régulièrement entrecoupées de périodes où l'activité a été interprétée comme « stationnaire », localisées dans des arbres ( Aesculus hippocastanum, Alnus glutinosa, Corylus avellana, Salix sp., Fagus sylvatica, Fraxinus excelsior, Quercus sp., Tilia platyphyllos… ), des bâtiments agricoles et des hangars. Sans distinction entre les espèces, au cours d'une nuit, 0 à 14 reposoirs ont ainsi été utilisés (moyenne 1,4 ± 2,2 reposoir/nuit). Les rares observations visuelles (n = 4) ont eu lieu à l'aube, en dessous d'arbres situés le long de voiries et ont permis d'observer P. auritus (Pondrôme et Gozin) et P. austriacus (Gembes) en train de voler sous la canopée en frôlant le feuillage. Ce comportement est observé quelques secondes à quelques minutes avant de perdre visuellement l'oreillard, pour ensuite l'observer de nouveau voler sous les branches.

La durée médiane d'utilisation de reposoirs par les oreillards est de 10 min (moyenne = 36,6 min), une médiane de 10 min avait été enregistrée par E NTWISTLE et al. (1996). Cependant, les P. auritus de Gozin se distinguent par une utilisation plus brève des reposoirs : en moyenne, ils y passent 10 min par nuit contre plus de 25 min pour les oreillards des trois autres colonies (Tab. 4.17 à 4.19). La différence est significative avec la colonie de P. auritus de Pondrôme. Durant le suivi, les P. auritus de Gozin ont exploité essentiellement des bois et les P. auritus de Pondrôme des prairies. Il est à noter que la qualité du signal radio est meilleure en milieu ouvert et l'accessibilité souvent plus aisée. Une moins bonne perception du signal radio peut avoir comme conséquence une sous-estimation du temps de repos.

Chapitre 4 : Exploitation de l’espace et du temps 92 8. C onclusions

Les résultats de l'étude mettent en évidence que l'utilisation de l'espace par les P. auritus et les P. austriacus comporte des similitudes. L'éloignement des terrains de chasse, le nombre de terrains visités par nuit, leur durée d'utilisation, leur surface et l'aire d'activité individuelle journalière sont similaires.

Les résultats observés sur les oreillards issus des deux colonies monospécifiques sont concordants avec les études étrangères, bien que les publications concernant les P. austriacus sont encore peu nombreuses.

Par contre, le comportement des oreillards syntopiques se singularise par un éloignement plus important des terrains de chasse, un nombre de terrains de chasse visités par nuit plus important, une aire d'activité coloniale plus vaste et, enfin, une utilisation temporelle de l'espace plus dispersée autour du gîte.

En syntopie, sous réserve de variations saisonnières de l'utilisation de l'habitat non détectées, l'utilisation plus intense des prairies par les P. auritus et des bois par les P. austriacus met en évidence l'existence de variations intraspécifiques. Les P. auritus possèdent la capacité d'exploiter les milieux ouverts ou semi-ouverts comme les prairies entourées d'éléments linéaires arborés, tandis que les P. austriacus celle d'exploiter les milieux plus fermés comme les bois de feuillus ou de conifères. Ceci traduit une grande flexibilité qu'ont les deux espèces dans la sélection d'habitats de chasse 14 .

En 1975, Horacek avait déjà émis l'idée que l'utilisation différentiée entre les milieux fermés pour les P. auritus et les milieux ouverts de type « steppe » pour les P. austriacus devait plutôt être une tendance qu'une ségrégation nette. En Allemagne, le fait que l'on considère l'oreillard roux comme abondant en forêt pourrait être lié à sa faculté de coloniser très rapidement, et avec succès, des gîtes artificiels. Il est donc plus facilement détectable que d'autres espèces (M ESCHEDE &HELLER 2003). Les études relatives à l'utilisation de l'habitat par P. auritus dans des forêts où ont été installés en nombre des nichoirs pourraient donc, dans une certaine mesure, être biaisées.

Concernant l'exploitation des ressources temporelles, on ne détecte pas de différence entre les deux espèces ni de comportement propre à la colonie syntopique. Les différences mises en évidence dépendent soit du sexe, soit, probablement, des particularités locales, comme la présence d'un éclairage artificiel, ou encore de la faiblesse d'échantillonnage, puisqu'aucune femelle allaitante n'a pu être suivie à Gozin.

Le fait que la période d’activité des P. austriacus s’étale toute la nuit pourrait être une preuve indirecte, supplémentaire (voir chapitre 2 et 3), de l’utilisation du glanage comme technique de chasse. En effet, ce sont typiquement les espèces glaneuses qui peuvent se permettre de chasser toute la nuit, puisque la disponibilité en proies est sensée être plus constante (C HRUSZCZ &BARCLAY 2003). Les espèces qui capturent leurs proies en vol montrent, en général, une activité bi-modale, en exploitant les deux pics d’abondance des insectes, le crépuscule et l’aube (e.a. S WIFT 1980, K ERVYN 2001)

14 Cette flexibilité qu'ont les deux espèces à utiliser aussi bien des habitats ouverts ou semi-ouverts (prairies, zones urbaines, cultures) et plus fermés (bois feuillus, mixtes et conifères) est confirmée par l'absence de différence interspécifique d'utilisation des habitats lorsque l'on teste le temps passé par les 22 oreillards dans les 6 catégories d'habitats (p > 0,157).

Chapitre 4 : Exploitation de l’espace et du temps 93 La cohabitation serait donc possible grâce à trois mécanismes :

1. La flexibilité des deux espèces, qui sont aptes à exploiter une large gamme d'habitats, aussi bien les milieux semi ouverts que fermés. Cette plasticité de comportement est plus importante que ce que laissait présager la littérature et de plus, elle semble s'exprimer lorsque les deux espèces coexistent étroitement.

2. En syntopie, le comportement des deux espèces se singularise des deux colonies monospécifiques. Alors que la disponibilité en habitats est identique pour les deux espèces, P. auritus et P. austriacus exploitent un espace plus vaste (éloignement des terrains de chasse, aire d'activité, intensité de l'utilisation des terrains de chasse en fonction de l'éloignement du gîte) et visitent plus de terrains de chasse par nuit. On constate donc une adaptation similaire des deux espèces face à la cohabitation étroite.

3. En syntopie, bien que le jeu de données reste limité, une ségrégation des habitats exploités est mise en évidence. Ce partage des habitats peut permettre aux deux espèces de coexister. De ce point de vue, nos résultats semblent rencontrer la prédiction de la théorie de la sélection des habitats : à des densités comparables, deux compétiteurs, pouvant choisir entre deux habitats, vont opérer une sélection diminuant les interactions interspécifiques.

Chapitre 4 : Exploitation de l’espace et du temps 94 Chapitre 5 : Discussion générale

Les mécanismes qui permettent la cohabitation

Indépendamment des conditions de cohabitation, nous avons montré que le régime alimentaire des deux espèces n'était que peu différencié (Tab. 2.11). Les résultats de l'utilisation de l'espace ont également montré que les exigences spatiales des deux espèces étaient semblables : P. auritus et P. austriacus ont la capacité d'exploiter aussi bien les milieux ouverts ou semi-ouverts comme les prairies que les massifs boisés (Tab. 4.8 et 4.9).

Indépendamment des conditions de cohabitation, les deux espèces ont donc montré des capacités similaires dans leur façon d’exploiter les ressources trophiques et spatiales.

Lorsque l’on compare les exigences trophiques des deux espèces, en prenant en compte les conditions de cohabitation, nous avons montré que les différences interspécifiques sont plus marquées (Tab. 2.13). Les P. austriacus consomment plus de Lépidoptères (+ 14,4 %, p < 0,0005), de Coléoptères (+ 5,0 %, p = 0,001) et moins d'Arachnides (- 8,3 %, p < 0,0005), de Dermaptères (- 8,8 %, p < 0,0005), de Cyclorrhaphes (- 2,3 %, p = 0,176) et de Tipules (- 9,5 %, p = 0,009) (Tab. 2.13).

Ces résultats globaux ont été confirmés par l'étude de l’utilisation des ressources trophiques et spatiales de deux colonies monospécifiques, la colonie de P. auritus à Gozin et celle de P. austriacus à Gembes. Le régime alimentaire de P. auritus se différencie par une consommation plus importante de proies non volantes ou diurnes tandis que celui des P. austriacus par une consommation plus importante de Lépidoptères (Tab. 2.9). Ce partage des ressources trophiques s'est accompagné d'un partage des ressources spatiales par une sélection différenciée des habitats de chasse : les massifs boisés préférentiellement sélectionnés par les P. auritus de Gozin et une sélection mixte bois-prairies par les P. austriacus de Gembes (Tab. 4.8).

Nous avons également expliqué qu’il est plausible d'admettre que P. austriacus glane une partie de ses proies. Cette capacité qu’ont les P. austriacus à glaner leurs proies s’est révélée clairement dans le cas de l'étude de la colonie mixte par une consommation importante d’Arachnides (17,9%) et de Dermaptères (9,6 %) (Tab. 2.9). A l’inverse, les P. auritus syntopiques ont délaissé les Dermaptères en compensant par une exploitation plus importante des Lépidoptères. L'utilisation des habitats par les deux espèces de la colonie mixte de Pondrôme semble également en adéquation avec les résultats du régime alimentaire.

Le principe d'exclusion compétitive ou principe de Volterra-Gause semble donc se vérifier. Si deux espèces écologiquement semblables coexistent durablement, c'est qu'elles ont mis en place un mécanisme permettant d’exploiter différemment les ressources. Nos résultats montrent que cela s'est vérifié pour les ressources trophiques et spatiales.

Ceci soulève néanmoins plusieurs questions :

1. La syntopie est-elle responsable du changement de comportement observé ? La compétition interspécifique serait-elle le moteur sous-jacent du changement ?

2. Le régime alimentaire des deux espèces, lorsqu’elles appartiennent à des colonies monospécifiques se différencie en partie. Pourquoi, en condition syntopique, les différences ne se sont-elles pas maintenues ?

Chapitre 5 : Discussion générale 95 3. La sélection des habitats est le principal mécanisme de partage des ressources. L'habitat de chasse impose-t-il le régime alimentaire ? Y a-t-il d'autres dimensions de la niche écologique des oreillards à prendre en compte ?

4. D'autres facteurs peuvent-ils expliquer nos résultats ?

5. La coexistence intime entre les deux espèces est-elle stable ?

6. En syntopie, les résultats de l'exploitation de l'espace ont montré que les deux espèces utilisent et sélectionnent des habitats différents. Cela laisse supposer qu'une espèce pourrait exclure l’autre. Quels sont les mécanismes possibles ?

7. La morphologie des espèces permettrait-elle de prédire l’utilisation des ressources trophiques et spatiales ?

Question 1 : La syntopie est-elle responsable du changement de comportement observé ? La compétition interspécifique serait-elle le moteur sous-jacent du changement ?

Selon la synthèse de F INDLEY (1993), peu d'études sur les chauves-souris parviennent à prouver l'existence de la compétition entre les espèces. Des études éco-morphologiques sur les communautés de chauves-souris ont souvent révélé que des espèces morphologiquement très semblables coexistent, exploitent les mêmes proies (A LDRIDGE &RAUTENBACH 1987, B ARLOW et al. 1997, K INGSTON et al. 2000), ce qui laisse supposer que la compétition interspécifique ne joue qu’un rôle mineur (S CHUM 1984, A RITA 1997).

Pour vérifier que le patron d’utilisation des ressources résulte bien de la compétition, les écologistes utilisent deux approches, l'approche expérimentale et l’observation sur le terrain (S CHOENER 1974). Selon les expérimentalistes, l’observation ne permet d’étudier que des cas à l’équilibre et ne permet pas de révéler le processus sous-jacent. Il faut, pour connaître ce processus, perturber l’équilibre en ajoutant ou supprimant les individus. Si des différences compensatoires sont observées, cela montre comment la compétition maintient la différenciation des niches. Pour des raisons éthiques et pratiques, il ne paraît pas possible d’avoir recours au retrait de populations dans le cas des chauves-souris. Nous avons donc utilisé un moyen indirect : la comparaison du comportement des colonies monospécifiques vs syntopique (mixte). Si des changements sont observés (modification des exigences) et corrélés avec la présence ou l’absence d’une espèce similaire, on peut présager l’existence d'une compétition interspécifique.

En syntopie, en comparaison avec le régime alimentaire des colonies monospécifiques, nous avons observé des modifications des exigences alimentaires des P. austriacus et, dans une moindre mesure, des P. auritus . La syntopie provoque-t-elle réellement un stress, une pression supplémentaire et suffisante pour expliquer nos résultats ?

Nous pensons qu'il existe bien une réelle pression car les deux espèces ont montré des réponses communes face à la syntopie, réponses susceptibles d’engendrer davantage de dépenses énergétiques (Chap. 4, point 7). En effet en comparaison avec les deux colonies monospécifiques de Gozin et de Gembes, à Pondrôme, les oreillards ont montré 1) un éloignement des terrains de chasse plus important, 2) une aire d’activité plus vaste, 3) une répartition de l’intensité d’utilisation des terrains de chasse plus étalée dans l’espace et, enfin, 4) un nombre supérieur de terrains de chasse visités par nuit.

Puisqu'a priori, chez les chauves-souris des zones tempérées il n'existerait pas de raison de penser que les ressources sont illimitées (K UNZ 1982, ARLETTAZ 1999, BARCLAY &HARDER 2003), on peut donc supposer que le moteur sous-jacent responsable du changement de comportement est bien la compétition interspécifique.

Chapitre 5 : Discussion générale 96 Question 2 : Le régime alimentaire des deux espèces, lorsqu’elles appartiennent à des colonies monospécifiques, se différencie en partie. Pourquoi, en condition syntopique, les différences ne se sont-elles pas maintenues ?

Bien que la comparaison interspécifique entre colonies monospécifiques a montré que des différences existent dans l’utilisation des ressources alimentaires et spatiales, nous estimons qu’à Pondrôme, ces différences ne sont pas suffisantes pour permettre un partage des ressources lorsque les deux espèces coexistent étroitement. Autrement dit, les similitudes resteraient trop importantes pour permettre un partage des ressources en condition syntopique.

Puisqu’en syntopie, les oreillards ont modifié leur comportement (déplacement de niche selon SCHOENER 1974), c’est qu’ils ont un avantage à le faire pour augmenter leur fitness. L’effort accompli par les deux espèces, en particulier par P. austriacus , doit être compensé par des gains qui rendent cette dépense viable à long terme.

Les oreillards se sont différenciés pendant le Pléistocène (J USTE et al. 2004). Leur spéciation est probablement allopatrique dans la mesure où les populations ont été éloignées les unes des autres lors de périodes glaciaires. A l'Holocène, ces populations désormais bien différenciées, ont recolonisé de grandes régions et se sont mises en contact. Ces espèces vicariantes ont, sans doute, gardé leur plasticité comportementale héritée de leur ancêtre commun. Elles leur permettent, encore actuellement, d'adapter leur comportement alimentaire et l'utilisation de l'espace sous la pression de la compétition interspécifique.

Cependant, une réponse plus logique au contexte de la syntopie aurait pu être une accentuation des différences mises en évidence lors de la comparaison interspécifique des colonies monospécifiques. Pourtant, nous avons constaté une inversion des exigences trophiques et spatiales. P. austriacus s’est transformé en un « super P. auritus » en consommant massivement Arachnides et Dermaptères, tandis que P. auritus les délaisse au profit des Lépidoptères. P. austriacus a sélectionné des massifs boisés tout comme les P. auritus de Gozin tandis que P. auritus a sélectionné des bois et des prairies, comme les P. austriacus de Gembes.

Ceci est, à notre connaissance, un cas unique d’inversion des exigences permettant aux espèces de coexister. Ce mécanisme serait possible par le fait que les exigences des deux espèces sont restées suffisamment plastiques au cours du temps. Si la différenciation de leur niche ne s'est pas (encore ?) fixée, c'est que la compétition pour les ressources trophiques et spatiales, bien qu’on suppose qu'elle existe, n'a pas été un moteur évolutif suffisamment puissant.

Trois arguments pourraient expliquer pourquoi les oreillards ont gardé un comportement plastique :

1) Les oreillards passent l'essentiel de leur temps de vol à proximité de leur gîte et les colonies de Gozin et Pondrôme ont montré une aire d'activité qui ne se chevauche que partiellement (Fig. 4.2). Ceci laisse supposer que la distribution estivale est en réalité (micro-)allopatrique, voire parapatrique. Dans ce contexte, la compétition pour les ressources peut être supposée comme une pression évolutive peu puissante.

2) Bien que l'on suppose que les ressources soient limitées, l'utilisation du glanage, cumulée avec une consommation opportuniste de proies saisonnières (Coléoptères, Tipules, Cyclorrhaphes) ou pouvant être localement abondantes (Lépidoptères, Dermaptères, Opilions), permet probablement aux oreillards de disposer de ressources plus constantes et moins limitées.

3) Les groupes de proies clés consommées montrent des niches écologiques lâches, c'est particulièrement le cas pour les Tipules et les Lépidoptères. Puisque ces proies peuvent être capturées par les Plecotus aussi bien au-dessus de prairies que dans les bois, la pression évolutive n'a probablement pas contraint nos deux espèces à se spécialiser définitivement dans l'exploitation d'un

Chapitre 5 : Discussion générale 97 type d'habitat particulier.

Pour ces raisons, la coexistence entre les deux espèces n’implique pas d’avoir conduit à une différenciation des exigences trophiques et spatiales très marquées, ni définitivement fixées.

Question 3 : La sélection des habitats est le principal mécanisme de partage des ressources. L'habitat de chasse impose-t-il le régime alimentaire ? Y a-t-il d'autres dimensions de la niche écologique des oreillards à prendre en compte ?

La réponse à cette question trouve en partie réponse dans la publication de S CHOENER (1974) intitulée « Ressource partitioning in Ecological communities ». L’auteur a montré, après avoir analysé 81 publications, que, dans la grande majorité des cas, la ségrégation des ressources selon la niche spatiale était plus importante que celle de la niche trophique qui est, elle, plus importante que celle de la niche temporelle et ce, particulièrement chez les mammifères. C’est donc un mécanisme de partage de l’habitat qui est généralement adopté par les compétiteurs.

Chez les chauves-souris insectivores, il existe peu d'indication prouvant qu'elles sélectionnent activement leurs proies (R YDELL et al. 1996). On tend à montrer qu'elles consomment une gamme de proies plus ou moins sans sélection en fonction de leur abondance, de leur taille, de leur détectabilité et de leur facilité de capture. Par contre, la sélection des habitats est couramment mise en évidence, par exemple chez Pipistrellus sp. (O AKELEY &JONES 1998), R. hipposidero s (R EITER 2004), M. bechsteinii (B ARATAUD et al. , 2009, D IETZ &PIR 2009) ou E. serotinus (K ERVYN 2001).

Dans le cas de nos oreillards, d’après les résultats du radiopistage issus de l'étude des deux colonies monospécifiques (Gozin et Gembes), les (macro-)habitats exploités diffèrent. Si la disponibilité en Arachnides et Dermaptères est effectivement plus importante dans les bois, et si la sélection exclusive des bois par les P. auritus reflète bien ses son comportement, on pourrait effectivement expliquer que les différences observées dans le régime alimentaire sont dictées par une utilisation différenciée des habitats. Le même raisonnement vaut pour la colonie syntopique.

Nos résultats seraient donc une illustration du principe de compression de la théorie du fourragement optimal. L’idée est que lorsque les compétiteurs se recouvrent dans l’espace, leur régime alimentaire va tendre à être similaire. Par ailleurs une proie profitable en allopatrie le sera également lorsqu’elle est rencontrée en sympatrie, les proies les plus profitables étant alors identiques pour les deux compétiteurs (N EET 1989). De ce fait, chaque espèce a intérêt à se spécialiser au niveau de l’habitat, de manière à ce que chacune puisse exploiter les ressources alimentaires, en l’épuisant, au point de rendre l’habitat inintéressant pour l’espèce concurrente. Ce principe de compression de l’habitat peut, par la suite, favoriser l’apparition de spécialisations trophiques (S CHOENER 1986).

Les oreillards font partie des espèces qui chassent à proximité de leur gîte, essentiellement à moins de 3 km (Fig. 4.7). Afin de disposer d'habitats adéquats à proximité, le choix du gîte pourrait aussi être un facteur capital, pour lequel les deux espèces d'oreillards pourraient entrer en compétition. Il a ainsi été démontré que P. auritus sélectionne ses gîtes en fonction de la proximité des massifs boisés, de la présence de plans d'eau mais aussi en fonction de l'âge du bâtiment et de la température moyenne sous les combles (E NTWISTLE et al. 1997).

KUSH &SCHOTTE (2007) proposent d’ailleurs, comme facteur influençant la diversité des espèces de chauves-souris forestières, la structure de la végétation mais aussi, pour P. austriacus , la localisation de ces structures en relation avec l’emplacement du gîte. Ceci paraît d’autant plus plausible que P. austriacus n’est pas connu pour occuper des gîtes dans les cavités d’arbres : ses gîtes sont presque exclusivement situés dans des bâtiments, alors que P. auritus occupe aussi bien les bâtiments que les trous d’arbre ou les nichoirs. Pour minimiser les déplacements, le choix de l’emplacement du gîte par les P. austriacus pourrait donc être un facteur important.

Chapitre 5 : Discussion générale 98 De plus, P. austriacus se trouve en limite nord de son aire de répartition et dans le nord de l'Europe, n'occupe que des gîtes anthropiques chauds. A la compétition pour les ressources spatiales et alimentaires s’ajoute peut-être la compétition pour le gîte, dont la disponibilité pourrait être limitée. En effet, pour maintenir une balance énergétique positive, le comportement de chauves-souris en limite nord de leur aire de répartition peut s'adapter en sélectionnant des gîtes offrant des températures plus chaudes la journée (K URTA et al. 1993).

Si le partage des habitats est un moteur puissant qui structure les communautés de chiroptères, chez les oreillards, le choix du gîte pourrait également être une force compétitrice non négligeable. Cela permettrait d'expliquer pourquoi P. austriacus se maintient dans le gîte de Pondrôme malgré les modifications observées de ses exigences trophiques et spatiales.

Question 4 : D'autres facteurs peuvent-ils expliquer nos résultats ?

Si on peut admettre que deux espèces modifient leur comportement lorsqu'elles sont en syntopie, on doit aussi admettre que la présence d'autres espèces concurrentes peut aussi influencer l'utilisation de l'espace et des ressources trophiques.

Selon E ICHSTÄDT (1995), la similitude de stratégie et des habitats de chasse entre P. auritus et M. emarginatus fait que ces deux espèces doivent être considérées comme concurrentes. Les forêts représentent un habitat clé pour les M. emarginatu s où ils capturent l'essentiel de leurs proies au sol ou sur le feuillage. L'espèce chasse également fréquemment sur les murs des granges et étables. On retrouve cependant peu de Lépidoptères dans le régime alimentaire (B AUEROVA 1986, BECK 1995, GODIN 2000) ce qui le distingue de nos deux espèces d'oreillards.

Myotis natterreri et M. bechsteinii ont une morphologie, un style de vol et des habitats de chasse similaires à ceux de P. auritus et des P. austriacus . Ces deux espèces ont une répartition sympatrique avec celles des Plecotus sur une grande partie de l’Europe.

Le régime alimentaire de M. natterreri est constitué de Diptères diurnes, Lépidoptères et d’arthropodes non volants comme les Charançons, Chenilles de papillons, Coléoptères, Opilions, Araignées récoltés sur la végétation, de la strate arbustive à la canopée. Ce murin est lié aux habitats forestiers que ce soit pour les gîtes ou pour ses habitats de chasse. (S HIEL et al. 1991, synthèse dans M ESCHEDE &KELLER 2003). P. auritus et M. natterreri ont cependant un régime alimentaire légèrement différent. En Irlande, l’estimation de la proportion de proies glanées est plus importante chez M. natterreri , 68 % contre 42 % chez P. auritus (S HIEL et al. 1991). En Écosse, M. natterreri consomme moins de lépidoptères que P. auritus (S WIFT &RACEY 2002). Cette différence est expliquée par une technique de détection des proies différente. M. natterreri émet continuellement des ultrasons (« feeding buzz ») lorsqu’il glane ses proies tandis que P. auritus stoppe l’émission d’ultrasons lors de ses approches. M. natterreri n'utiliserait donc pas le son généré par le vol des papillons (« fluttering moth ») et ne pourrait pas capturer les papillons tympaniques (S WIFT & RACEY 2002, MELCON et al. 2007). Ceux-ci détectent les approches du Myotis et y répondent par un comportement d'évitement. Les techniques de chasse sont différentes et cela pourrait contribuer à différencier les niches alimentaires (S WIFT &RACEY 2002).

Le régime alimentaire de M. bechsteinii est dominé par des Lépidoptères, Coléoptères, Diptères, Orthoptères, Opilions et Dermaptères (S IEMERS &SWIFT 2006, BARATAUD et al. 2009). Il capture ses proies en vol stationnaire sur le substrat et pourrait grimper le long des troncs et des branches à la recherche de proies. Ses terrains de chasse sont situés principalement en milieu forestier, dans des peuplements riches en strates et bien structurés. Il évite les forêts cathédrales sans sous étage et les peuplements équiens (synthèse dans M ESCHEDE &KELLER 2003).

Le partage des ressources alimentaires entre M. bechsteinii et M. natterreri a été étudié en Allemagne

Chapitre 5 : Discussion générale 99 par S IEMERS &SWIFT (2006). M. bechsteinii détecte ses proies grâce aux sons qu’elles génèrent, contrairement à M. natterreri qui consomme des proies « non bruyantes ». Comme précédemment, une différence d’écologie sensorielle contribue au partage des ressources.

Le partage des ressources entre les deux espèces d'oreillards et M. natterreri et M. bechsteinii mériterait certainement d'être approfondi. A titre indicatif, le régime alimentaire d'un M. bechsteinii présent dans le gîte de Gembes durant le mois de juin 2001 (date de collecte 30/06/2001, 60 déjections analysées) se composait d'Araignées (3,4%), d'Ichneumons (3,4%), de Coléoptères (10,2%), de divers Diptères (15,3%), de Tipules (18,6%) et de Lépidoptères (49,2%). Le régime alimentaire est donc très proche de celui d'un oreillard. De même, grâce aux captures à l'aide de filets, on sait que P. auritus et M. natterreri peuvent exploiter en même temps l'intérieur d'un bâtiment (Fumal, obs. pers. 2007) ou un massifs boisés (Beloeil, GT Plecotus 2011). Nous ne pouvons donc pas exclure que la présence estivale de M. natterreri et M. bechsteinii ait pu influencer nos résultats.

Dans ces conditions, on ne peut rejeter l'hypothèse d'une ségrégation de la niche écologique selon plusieurs dimensions. En effet, dans un système compétitif, lorsque le nombre d'espèces s’accumule, ces espèces doivent éventuellement se séparer sur plus d’une dimension de leur niche pour éviter un recouvrement trop important dans l’utilisation des ressources (M CARTHUR 1965, LEVINS 1968 repris de S CHOENER 1974). Le nombre de dimensions importantes séparant les espèces est généralement de 2, rarement 3. S CHOENER (1974) montre effectivement une corrélation significative entre le nombre d’espèces appartenant à un groupe et le nombre de dimensions séparant ces espèces, les exemples allant des myxomycètes aux lions ( Panthera leo ).

Question 5 : La coexistence intime entre les deux espèces est-elle stable ?

La modification de comportement observée en syntopie laisse supposer qu’elle demande un effort de la part des espèces qui semblent quitter leur optimum écologique, optimum défini par les résultats de l’étude des colonies monospécifiques et par la littérature. En conséquence, la cohabitation entre les deux espèces pourrait ne pas être durable.

Nous pensons cependant que la coexistence est actuellement stable. En effet, la répartition des deux espèces se chevauche sur la majorité de leur aire, à l’exception du nord de l’Europe, et des gîtes syntopiques sont connus ailleurs qu'en Belgique (e.a. S TEBBINGS 1966, B ECK &SCHELBERT 1994) et sont probablement sous détectés vu la ressemblance morphologique des deux espèces. De plus, plusieurs études ont également montré que les deux espèces pouvaient également coexister sur un même terrain de chasse (B ARATAUD 1990, A NDREAS 2010) comme cela a été observé chez Sorex araneus et S. coronatus (N EET 1989, L IBOIS com. pers. ). Enfin, dans notre cas, les deux espèces ont coexisté au moins pendant 4 années successives ce qui démontre une certaine stabilité.

Question 6 : En syntopie, les résultats de l'exploitation de l'espace ont montré que les deux espèces utilisent et sélectionnent des habitats différents. Cela laisse supposer qu'une espèce pourrait exclure l’autre. Quels sont les mécanismes possibles ?

Les résultats du radiopistage de la colonie mixte ont montré que les habitats exploités par les deux espèces étaient différents et que l'aire d'activité spécifique ne se recouvrait que partiellement (29 % de l'aire d'activité de P. auritus et 29 % de celle de P. austriacus ). Si l'on considère que les résultats de l'exploitation de l'espace issus des deux colonies monospécifiques correspondent à l'optimum écologique des deux espèces, on peut supposer qu'en condition syntopique, il doit exister un mécanisme permettant aux deux espèces de sélectionner différemment leurs habitats de chasse. Le changement observé implique donc que les espèces doivent se détecter mutuellement pour éviter d'utiliser des habitats identiques.

Chapitre 5 : Discussion générale 100 Les chauves-souris obtiennent de l’information venant d’autres chauves-souris à propos de leur environnement, que ce soit pour la localisation des ressources alimentaires ou des gîtes, pour signaler la présence de prédateurs ou pour la reproduction.

Quatre mécanismes de transfert d’information sont proposés par W ILKINSON (1995) : 1) le transfert local (écoute passive des cris d'écholocation, suivi des individus entre eux vers une ressource alimentaire), 2) la facilitation sociale (augmentation du nombre de tentatives de prise de nourriture d'un individu lorsque la taille du groupe augmente), 3) l'apprentissage par imitation (technique de chasse, vocalisation) et 4) le signalement volontaire ou intentionnel (cris de reproduction, cris d'alarme, cris territoriaux).

A travers l'émission de cris territoriaux, les deux espèces d'oreillards peuvent signaler leur présence aux individus de leur espèce et également à d'autres espèces. Ce type de communication est particulièrement répandu parmi les chauves-souris tropicales, probablement parce que la dispersion des ressources alimentaires est plus stable que celle des chauves-souris des zones tempérées. En effet, lorsque les ressources sont plus stables, il est probable que la sélection naturelle favorise des mécanismes de transfert d’informations plus poussés (W ILKINSON 1995).

Dans le cas des oreillards, vu qu’ils glanent une partie de leurs proies, ils font aussi face à des ressources alimentaires plus stables, plus indépendantes de la température. On peut donc supposer que ce type de comportement a pu prendre une importance particulière chez nos deux espèces.

On sait d'ailleurs que P. auritus est capable d’émettre des ultrasons à 5 pulsations par seconde, détectables à 40 m, dont on suppose qu'ils jouent un rôle dans la communication à longue distance (C OLES et al . 1989). Il est donc plausible que P. auritus soit détectable par P. austriacus grâce à ce type d'ultrasons.

Chez les chauves-souris, les odeurs jouent également un rôle important dans l'identification individuelle ou de groupes. Cela a été démontré pour la reconnaissance mère-enfant chez P. auritus et P. pipistrellus (D E FANIS &JONES 1995a) ou chez E. fuscus, pour la reconnaissance des individus appartenant à une même colonie de reproduction (B LOSS et al . 2002).

Chez P. auritus , S TEBBINGS (1966) et H ORACEK (1975), ont remarqué que la glande nasale sécrète une substance huileuse très odoriférante. Horacek pense que cette sécrétion sert, avant tout, à marquer les gîtes de reproduction. En reconnaissant cette odeur, les oreillards roux peuvent ainsi repérer olfactivement les gîtes de reproduction utilisés par les conspécifiques. Les odeurs pourraient donc jouer un rôle important en tant que marqueur de territoire.

Vu le nombre important de reposoirs utilisés par les oreillards, il serait important de savoir si les reposoirs utilisés sont empreints des odeurs de l'individu qui l'exploite. Les reposoirs pourraient ainsi jouer un rôle dans le marquage territorial en agissant comme des balises. Ce type de comportement est relaté par A RTHUR &LEMAIRE (2009) à propos d'un M. myotis qui semblait marquer olfactivement un arbre.

Chapitre 5 : Discussion générale 101 Question 7 : La morphologie des espèces permettrait-elle de prédire l’utilisation des ressources trophiques et spatiales ?

Le spectre alimentaire des chauves-souris peut être influencé par la taille, la manœuvrabilité en vol, le type d'habitats exploités, les ultrasons produits (e.a. A LDRIDGE &RAUTENBACH 1987, B ODGANOWICZ et al. 1999, F ENTON &BODGANOWICZ 2002, SIEMERS &SCHNITZLER 2004). De même, le lien entre la morphologie des ailes et le type d’habitats exploités par les chauves-souris a souvent été documenté (F INDLEY et al. 1972, N ORBERGER &RAYNER 1987). L'écomorphologie permettrait donc de prédire comment les espèces se partagent les ressources.

Cependant, d'autres études ont démontré que la prédiction des exigences écologiques selon des différences morphologiques (A RLETTAZ 1999, B ARLOW et al. 1997, D AVIDSON -W ATTS et al. 2006) ou des cris d'écholocation (A SHAFRI et al. 2011) ne permet pas de prédire correctement les exigences écologiques. Ces études concernent des espèces jumelles ou cryptiques ( M. myotis et M. blythii, P. pipistrellus et P. pygmaeus ainsi que P. auritus, P. austriacus et P. macrobullaris ).

L'exemple de P. macrobullaris , une espèce cryptique de Plecotus découverte récemment dans les Alpes (K IEFER et al. 2002) est assez frappant. Alors que les similarités morphologiques (A SHARFI et al. 2010) et des ultrasons émis laissaient supposer que P. macrobullaris devaient être une espèce glaneuse (D IETRICH et al. 2006), les résultats de l'étude d’A SHAFRI et al. (2011) ont montré que P. macrobullaris capture la majorité de ses proies en plein vol.

Dans le cas de nos deux espèces jumelles, de légères différences morphologiques au niveau des ailes existent (S EVCIK 2003). P. austriacus a une aile plus longue, plus large et le 4 ième doigt plus grand que celui de P. auritus . La surface de l’aile, le « wing tip index » (longueur du 3 ème doigt / longueur de l'avant-bras) est également plus important chez P. austriacus. Les différences sont de 1 à 6 % pour les 5 variables (p < 0,01). La différence de surface de l’aile est attribuée au fait que P. austriacus est légèrement plus grand (S CHOBER &GRIMMBERGER 1991). Par contre, la différence de « wing tip index » pourrait être corrélée à une différence de performance en vol. Ces différences pourraient être le résultat d’une adaptation pour le vol plané et pour la chasse dans les espaces ouverts.

Nos résultats ont montré que les deux espèces pouvaient chasser aussi bien dans des habitats (semi)ouverts que dans des habitats plus fermés, comme les massifs boisés. De même, nous n'avons pas pu démontrer que l'utilisation du glanage comme technique de chasse était exclusivement réservée à une des deux espèces. Il ne paraît donc pas évident de mettre en relation les différences morphologiques des ailes de P. austriacus et le type d'habitat exploité ou la technique de chasse utilisée.

Chez les chauves-souris, jusqu'à présent, la plupart des études qui tentaient de relier la morphologie et le type de vol s’intéressaient principalement à la membrane de l'aile. Cependant, la morphologie des oreilles et de l'uropatagium des oreillards pourraient être en relation avec leurs performances au vol et leur technique de chasse. Deux études récentes, dont une réalisée à partir d'un modèle 1 de P. auritus placé dans une soufflerie (Département d'aérospatiale et mécanique de l'ULg) ont démontré que la morphologie des oreilles et de l'uropatagium des chauves-souris est fortement reliée (analyse de variance canonique) à la stratégie de recherche de nourriture, elle-même corrélée avec le style de vol. Etant donné que le vol avec de grandes oreilles peut être coûteux en énergie, particulièrement aux vitesses de vol élevées, il est vraisemblable que seules les chauves-souris à vol lent, recherchant leur nourriture par glanage, peuvent se permettent d'avoir de grandes oreilles (G ARDINER et al. 2011a et 2011b).

Ceci confirme notre idée selon laquelle les deux espèces d'oreillards utilisent le glanage comme technique de chasse.

1Ce modèle a été constitué à l'aide de polywood pour le corps, en fil d'acier pour les doigts, les bras et les jambes et en latex pour les membranes.

Chapitre 5 : Discussion générale 102 Chapitre 6 : Conclusions générales

1 R ecommandations pour la protection des oreillards

Sur la base des résultats engrangés par l'étude des exigences alimentaires, de l'écologie des proies (chapitre 2 et 3), de la sélection des habitats et de l'utilisation de l'espace (chapitre 4), nous sommes à même de proposer des recommandations pour la protection des oreillards.

Régime alimentaire estival et sélection de l'habitat

Les catégories de proies consommées par les deux espèces sont qualitativement identiques et quantitativement assez proches malgré les différences mises en évidence dans le chapitre 2. Il semble donc délicat de définir des recommandations différentes pour les deux espèces.

Ce sont avant tout les Lépidoptères qui constituent la principale catégorie de proies. Sur la base des restes d'ailes retrouvés sous des reposoirs (données de la littérature), le point 5.8 (chapitre 2) synthétise les exigences alimentaires des chenilles et les habitats recherchés par les adultes. Pour les chenilles, on montre l'importance d'une végétation herbacée ( Dactylis, Festuca, Galium, Lamium, Plantago, Polygonum bistorta, Primula, Rumex, Stellaria, Taraxacum, Urtica, Vicia... ), de buissons et d'arbres feuillus comme Alnus, Acer, Betula, Fagus, Populus, Quercus, Salix, Tilia . Pour les imagos, ce sont aussi bien les prairies, les zones humides que les forêts feuillues et alluviales qui sont importantes. Dans les forêts, pour répondre aux exigences des chenilles et des imagos, on favorisera donc le développement d'un sous-bois, de taillis et d'arbres matures, ainsi que la création de layons forestiers et de clairières permettant à la végétation herbacée de se développer.

En revanche, les cultures et les zones urbaines sont néfastes pour les Lépidoptères (e.a. L ERAUT 2006, GROUPE DE TRAVAIL DES LÉPIDOPTÉRISTES 1999). Cependant, certaines villes comme Neerpelt et Antheit, dont les zones urbaines représentent au moins 50% des habitats dans un rayon de 1km autour du gîte, accueillent des colonies d'oreillards gris et roux (Fig 2.2.). La présence de jardins, de parcs, d'alignements d'arbres, de friches offre des habitats de substitution pour les Lépidoptères. Favoriser les jardins écologiques, extensifier l'entretien des espaces verts en créant des zones de refuges non fauchées et en évitant l'application d'herbicides et de pesticides sont des actions favorables pour les Lépidoptères.

Les Tipules constituent le second groupe le plus consommé. Comme pour les Lépidoptères, ce groupe de proies montre une écologie diversifiée. Ce sont les zones humides, les bords des cours d'eau, les prairies et les forêts feuillues qui constituent les habitats préférentiels. On évitera donc le drainage et le remblaiement des zones humides, la conversion des habitats prairiaux en cultures de céréales, de colza ou de maïs et la conversion des feuillus en résineux.

Parmi les Coléoptères, près de la moitié des proies identifiées appartiennent à la super-famille des Scarabaeoidea. Quatre espèces ont été identifiées : Amphimallon solstitialis, Aphodius rufipes, Rhizotrogus aestivus et Serica brunnea . Pour ces espèces, ce sont les jardins, les parcs, les prés, les buissons, les lisières forestières et les clairières qui sont recherchés.

L'utilisation des antihelminthiques de type avermectine, ivermectine, abamectine peut poser problème pour Aphodius rufipes dont les larves se développent dans les excréments des grands herbivores. Ces antihelminthiques administrés aux bovins se retrouvent dans les bouses, puisque 50% des produits ne sont pas métabolisés : ils portent atteinte au développement larvaire des coléoptères, à la survie de

Chapitre 6 : Conclusions générales 103 leurs larves et provoquent des malformations au stade adulte, notamment au niveau de l'appareil sexuel. Enfin, ils augmentent la mortalité des adultes (H OULDING et al. 1991, B LOOM &MATHESON 1993, H ALLEY et al. 1993, M CCRACKEN 1993). D’autres auteurs ont également plaidé pour obtenir une limitation à l'utilisation de ces antiparasitaires car la sérotine commune, le grand murin et le grand rhinolophe sont friands d’ Aphodius (R ANSOME &HUTSON 2000, K ERVYN 2001).

Les Diptères cyclorrhaphes forment un vaste groupe de plusieurs centaines d'espèces (G ROOTAERT et al. 1991). Parmi ce groupe, au moins 10% des proies consommées sont des mouches à merde, Scatophaga stercoraria . Pour cette espèce abondante, dont les larves se développent dans les excréments de vaches, chevaux, moutons, la présence de prairies pâturées suffit probablement à assurer le maintien des populations. Les larves de Diptères sont aussi touchées par les antihelminthiques : un argument de plus pour en limiter l'utilisation (H ALLEY et al. 1993).

Les Arachnides, dont la grande majorité (86 %) appartiennent à l'ordre des Opilions, et les Dermaptères ( F. auricularia ) recherchent les prairies, les landes, les haies, les buissons, les jardins, les bois ou encore les bâtiments, avec une préférence pour les habitats humides.

Pour répondre aux exigences du régime alimentaire estival, il est donc nécessaire de maintenir une mosaïque d'habitats diversifiés composée de jardins, de prairies permanentes, des zones humides, des haies, de buissons, d'alignements d'arbres, des bois feuillus ou mixtes, de préférence hygrophiles, permettant le développement d'un sous-bois et de clairières.

Les résultats de la sélection des habitats surfaciques (chapitre 4) ont, globalement, confirmé l'importance de ces habitats utilisés comme terrains de chasse. La sélection des habitats linéaires tels que les rangées d'arbres, les haies, les lisières feuillues met également en évidence l'importance du maillage écologique et les effets potentiellement néfastes de la fragmentation des habitats sur les populations d'oreillards.

Régime alimentaire hivernal

Nous avons démontré que les oreillards peuvent rester actifs et se nourrir pendant une partie de la période hivernale. Diptères Cyclorrhaphes, Lépidoptères, Dermaptères, Araignées sont les quatre groupes de proies clés.

Une majorité des Cyclorrhaphes capturés, le sont probablement à l'intérieur des bâtiments. Il en est de même pour les Lépidoptères rhopalocères, en diapause hivernale, que l'on retrouve aussi dans les combles ou les greniers. D'autres espèces (Geometridae) sont actives durant l'hiver et recherchent des aulnes, des bouleaux, des hêtres, des chênes, des buissons et des taillis. Concernant les Araignées, certaines espèces restent actives durant l'hiver et se réfugient sur les troncs d'arbres, sous les écorces, dans les buissons, dans la litière ou encore dans les bâtiments.

Les bâtiments constituent donc des terrains de chasse importants. Pendant la période hivernale, maintenir la quiétude et l’accessibilité pour les oreillards leur donne la possibilité de trouver des ressources alimentaires. De plus, tout comme en été, afin d'assurer une disponibilité en Lépidoptères, Araignées et Dermaptères suffisante, il est important de disposer de massifs feuillus, bosquets, arbres isolés à proximité des bâtiments et des gîtes hivernaux.

Périmètre de protection autour des colonies

Sur la base des résultats du radiopistage (chapitre 4), nous avons montré que 60,1% ( P. austriacus à Pondrôme) à 98,4% ( P. austriacus à Gembes) de la période d'activité sont dépensés dans un rayon de moins de 2000 m. Les P. austriacus de Pondrôme ont cependant passés près de 20% de leur période d'activité au-delà de 3000 m (maximum 5455m).

Chapitre 6 : Conclusions générales 104 Les résultats du suivi de deux jeunes de P. austriacus ont montré que leur rayon d'activité s’étalait de 1500 m pour l'individu de Gembes à 3500 m pour l'individu de Pondrôme, ce dernier ayant concentré 66% de sa période d'activité dans la tranche des 3000-3500 m.

Afin d'intégrer les exigences spatiales des jeunes P. austriacus , nous préconisons donc l'établissement d'un périmètre minimum de protection de 3500 m autour du gîte.

Concernant les P. auritus , il serait judicieux de protéger un périmètre d'au moins 2000 m de rayon. Ceci permettrait en effet d'intégrer 78% (Gozin) à 86% (Pondrôme) de le la période d'activité des adultes.

Protection des gîtes

Les déplacements de colonies vers des gîtes secondaires ont été observés pour les deux espèces (n = 8). Pour protéger une colonie, il est donc important de disposer d’un réseau de gîtes autour du gîte principal. Lorsque des gîtes secondaires ont pu être découverts (n = 2), ils étaient éloignés de 150 à 2500 m du gîte principal. D'autres gîtes secondaires n'ont cependant pas pu être localisés comme ce fut le cas durant l'été 2000 et le printemps 2001 pour les colonies de Gozin et de Gembes.

2 C onclusions générales

L'étude du régime alimentaire estival de 11 colonies (10 monospécifiques et 1 mixte) et de l'activité nocturne de 3 colonies (2 monospécifiques et 1 mixte) nous a permis de cerner les exigences trophiques et spatiales des deux espèces jumelles d'oreillards en Belgique.

Indépendamment des conditions de cohabitation, l'étude du régime alimentaire a démontré que les deux espèces ont des exigences très similaires.

Seules de légères différences quantitatives, comprises entre 3% et 8%, ont été mises en évidence : P. austriacus consomme un peu plus de Coléoptères et de Lépidoptères, et moins de Tipules que P. auritus . Les proies non volantes ou diurnes (Arachnides, Dermaptères, Cyclorrhaphes) ont par contre été consommées par les deux espèces sans différence. Ceci nous a amené à supposer que les oreillards utilisent deux techniques de chasse : la capture des proies en plein vol et le glanage.

Toutefois, lorsque l'on prend en compte les conditions de cohabitation, en limitant la comparaison du régime alimentaire aux colonies monospécifiques, des différences interspécifiques plus marquées ont été mises en évidence. Les Lépidoptères (+ 14%) et les Coléoptères (+ 5%) sont davantage consommés par P. austriacus et la proportion de proies non volantes ou diurnes consommée par P. auritus est 2,5 fois plus importante.

L'étude du cas particulier de la colonie mixte nous a également montré que P. austriacus possède des capacités d'adaptation surprenantes. En comparaison avec les colonies monospécifiques, P. austriacus a augmenté sa consommation en Arachnides de 15%, en Dermaptères de 11% et en Tipules de 8%, au détriment des Coléoptères (- 11%) et des Lépidoptères (- 26%). Nous avons estimé que les oreillards gris ont consommé 5 fois plus de proies non volantes ou diurnes que les roux avec qui ils partagent le gîte. Le régime alimentaire des P. auritus de la colonie mixte n'a, par contre, montré que des variations plus légères.

Sur base de la littérature, le lien entre la phénologie des proies et les variations saisonnières du régime alimentaire nous a permis de mettre en évidence un autre trait de caractère commun aux oreillards : l'opportunisme. En effet, ils consomment leurs proies (Lépidoptères, Tipules, Coléoptères, Cyclorrhaphes) lorsqu'elles sont le plus abondantes.

Chapitre 6 : Conclusions générales 105 Les résultats de la sélection des habitats nous ont permis de démontrer que les deux espèces d’oreillards sont, toutes deux, aptes à exploiter une large gamme d'habitats surfaciques, des prairies aux massifs boisés (feuillus, résineux et mixte), et de milieux linéaires comme les talus, les rangées d'arbres, les haies et les lisères.

A travers l'écologie des proies, nous avons pu mettre en relation les résultats de la sélection des habitats et du régime alimentaire. Ceci nous a permis de supposer que les différences observées dans le régime alimentaire sont, comme c'est généralement le cas d’après la littérature, probablement dictées par une utilisation différenciée des habitats.

Nos résultats constituent donc une belle illustration du principe d'exclusion compétitive. Que ce soit dans le cas des colonies monospécifiques ou de la colonie mixte, les deux espèces se partagent les ressources trophiques et spatiales ce qui leur permettrait de coexister durablement.

En syntopie, puisque les exigences trophiques et spatiales se sont modifiées, particulièrement chez P. austriacus , nos résultats laissent supposer que la compétition est encore active entre les deux espèces jumelles. Chez les chauves-souris des zones tempérées, ceci constituerait une des rares études qui ont permis de le démontrer.

Dans ce contexte, la pression de la compétition interspécifique pourrait cependant être considérée comme une force évolutive peu puissante, puisqu'elle n'a pas permis de fixer le comportement des deux espèces. Cela pourrait s'expliquer par 1) le patron d'utilisation de l'espace montrant une distribution estivale (micro)allopatrique voire parapatrique, 2) l'exploitation opportuniste de proies saisonnières abondantes (Tipules, Lépidoptères) cumulée avec l'utilisation du glanage leur permettant de chasser durant toute la nuit des proies, indépendamment des températures nocturnes, 3) la consommation de proies disponibles à la fois dans des habitats semi-ouverts et fermés.

La plasticité des exigences trophiques et spatiales, l'opportunisme et l'utilisation du glanage sont donc quatre traits comportementaux communs des oreillards qui permettent de comprendre comment ces espèces se partagent leurs ressources et coexistent pacifiquement, que ce soit à l'échelle de leur aire de répartition mais aussi intimement lorsqu'elles partagent un même gîte.

Aucune différence dans l'exploitation des ressources temporelles n'a été détectée, les départs plus tardifs de la colonie de Gozin ont été attribués à la présence de réverbères devant le gîte.

En complément, notre étude a également permis de découvrir un aspect très peu connu de l'écologie des chiroptère : l'écologie trophique hivernale. Les résultats ont montré que les oreillards peuvent disposer de proies en hiver en glanant une partie de leurs proies dans les bâtiments (Araignées, Diptères, Lépidoptères rhopalocères) ou à l’extérieur, en exploitant des proies actives en hiver comme les Geometridae et les Araignées.

Enfin, cette étude constitue un remarquable exemple illustrant les capacités d’adaptation étonnantes des chauves-souris, que ce soit à la coexistence intime ou à la raréfaction des proies en période hivernale.

Chapitre 6 : Conclusions générales 106 3 P erspectives

Au terme de cette étude, des questions subsistent :

• Comment les deux espèces d'oreillards partagent-ils leur ressources avec deux autres représentants de la guilde des glaneurs, Myotis natterreri et Myotis bechsteinii ? • Quelle est l'écologie sensorielle de P. austriacus ? Diffère-elle sensiblement de celle de P. auritus ? Comment P. austriacus localise-t-il et capture-t-il les Lépidoptères, par écoute passive, par glanage ? • Comment P. austriacus peut-il repérer les Arachnides et les Dermaptères ? • Comment les oreillards délimitent-ils leurs aires de chasse, comment les deux espèces se détectent-elles dans l'espace ? • Dans le contexte des découvertes régulières des nouvelles espèces cryptiques d'oreillards, avons-nous, en Belgique, d'autres espèces de Plecotus ? • Les résultats sont ils transposables aux autres colonies mixtes ?

Résumé

Introduction

L'objectif de cette étude est de vérifier une des règles principales en écologie : le principe de la compétition exclusive, en utilisant comme modèle les deux espèces jumelles d'oreillards présentes en Belgique : l'oreillard roux ( Plecotus auritus ) et l'oreillard gris ( Plecotus austriacus ). Deux espèces similaires présentes dans une même région et, a fortiori, pouvant partager un même gîte doivent différer selon certains aspects de leur niche écologique pour pouvoir coexister (MacNab 1971)

Afin de déterminer les mécanismes de partage des ressources entre les deux espèces, nous avons comparé les trois dimensions importantes de leurs exigences écologiques : l'utilisation des ressources trophiques par l'analyse fécale, l'utilisation de l'espace et du temps par radiopistage.

Ressources trophiques

Cent trente échantillons (4688 déjections, 6388 occurrences) provenant de 5 colonies monospécifiques de P. austriacus , 5 colonies monospécifiques de P. auritus et d'une colonie mixte ont été pris en compte dans l'analyse du régime alimentaire estival.

A l'aide d'un premier modèle construit à l’aide de régressions linéaires généralisées, nous avons montré que, indépendamment des conditions de cohabitation (colonies monospécifiques, colonie mixte), les deux espèces ont des exigences alimentaires proches. Qualitativement, ce sont les mêmes catégories de proies qui sont consommées : Lépidoptères, Diptères (Tipules, Cyclorrhaphes et autres), Coléoptères, Arachnides et Dermaptères. De légères différences quantitatives, comprises entre 3% à 8%, ont été mises en évidence : P. austriacus consomme un peu plus de Coléoptères et de Lépidoptères, et moins de Tipules que P. auritus .

A l'aide d'un second modèle, permettant la comparaison interspécifique du régime alimentaire en fonction de l'appartenance aux colonies monospécifiques ou à la colonie mixte, nous avons montré que les différences étaient plus marquées.

Lorsqu'ils appartiennent à des colonies monospécifiques, en référence à P. auritus , P. austriacus consomme plus de Coléoptères (+ 5,0 %, p = 0,001) et de Lépidoptères (+ 14,4 %, p < 0,0005) et moins d'Arachnides (- 8,3 %, p < 0,0005), de Dermaptères (- 8,8%, p < 0,0005) et de Tipules (- 9,5 %,

Chapitre 6 : Conclusions générales 107 p = 0,009). Ceci nous a amené à estimer que la proportion de proies non volantes ou diurnes glanées par P. auritus est 2,5 fois plus importante que celle des P. austriacus .

Par contre, lorsqu'ils proviennent de la colonie mixte, en référence aux colonies monospécifiques, P. austriacus a modifié son comportement alimentaire. La consommation prédite en Arachnides et en Dermaptères est supérieure, respectivement, de 14,5 % (p < 0,0005) et 11,3 % (p < 0,0005), tandis que la consommation de Lépidoptères est largement inférieure (- 25,6 %, p < 0,0005). Les P. austriacus syntopiques consomment également plus de Tipules (+ 7,9 %, p = 0,034) mais moins de Coléoptères (- 11,1 %, p = 0,009). Ceci démontre que P. austriacus possède des capacités d'adaptation surprenantes. Le régime alimentaire des P. auritus de la colonie mixte, par rapport aux P. auritus monospécifiques, n'a par contre, montré que des variations légères : - 7% (p = 0,006) pour les Cyclorrhaphes et - 4% (p = 0,002) pour les Dermaptères.

En syntopie, l'étude des variations saisonnières du régime alimentaire a montré que les différences quantitatives étaient significatives à la fin de la gestation et de la lactation, lorsque la demande énergétique est plus importante. En juin P. austriacus consomme plus d'Arachnides (p = 0,046), en juillet plus d'Arachnides (p = 0,020) et moins de Lépidoptères (p = 0,020). En août, ils consomment plus de Dermaptères (p = 0,019), moins de Coléoptères (p = 0,032) et de Lépidoptères (p = 0,034).

Écologie trophique hivernale

Notre étude a également permis de découvrir un aspect très peu connu de l'écologie des chiroptères : l'écologie trophique hivernale. Les résultats ont montré que les oreillards consomment au moins 70% de leurs proies qu'ils capturent par glanage (Araignée, Dermaptères, Cyclorrhaphes). Ces résultats ont permis de confirmer que les deux espèces possèdent la capacité de glaner leurs proies.

Ressources spatiales et temporelles

Vingt-deux Plecotus ont été utilisés pour les analyses : sept P. auritus à Gozin, six P. austriacus à Gembes, cinq P. auritus et quatre P. austriacus à Pondrôme (colonie mixte). Quatre-vingt-neuf nuits de suivi correspondant à la découverte de 111 terrains de chasse ont été retenues pour les analyses.

Les résultats mettent en évidence que l'utilisation de l'espace par les P. auritus et les P. austriacus comporte des similitudes. L'éloignement des terrains de chasse, le nombre de terrains visités par nuit, leur durée d'utilisation, leur surface et l'aire d'activité individuelle journalière sont similaires.

De même, contrairement à ce que laissait présager la littérature, il apparaît que les P. auritus possèdent la capacité d'exploiter les milieux ouverts ou semi-ouverts comme les prairies entourées d'éléments linéaires arborés, tandis que les P. austriacus celle d’exploiter aussi bien les milieux fermés comme les bois que les prairies.

En syntopie, les deux espèces ont montré une sélection différenciée des habitats (prairies, bois feuillus, jardins, lisières pour P. auritus et bois feuillus ou de conifères, jardins, lisières pour P. austriacus ), P. auritus dépensant 64% du temps de chasse au dessus de prairies contre 83% dans les bois pour P. austriacus. D'autre part, en comparaison avec les deux colonies monospécifiques, la répartition du temps de chasse autour du gîte est plus étalée dans l'espace et le nombre de terrains de chasse visités par nuit est plus important.

Aucune différence dans l'exploitation des ressources temporelles n'a été détectée, les départs plus tardifs de la colonie de Gozin sont attribués à la présence de réverbères placés devant le gîte.

Chapitre 6 : Conclusions générales 108 Les mécanismes permettant le partage des ressources

Dans le cas des colonies monospécifiques, nous avons mis en évidence l'existence d'un partage des ressources trophiques. En effet, P. austriacus a montré un régime alimentaire moins riche en Arachnides, Dermaptères, Tipules et plus riche en Coléoptères et Lépidoptères que P. auritus . Cependant, en syntopie, P. austriacus a clairement modifié son régime alimentaire en consommant davantage d'Arachnides et de Dermaptères au détriment des Coléoptères et des Lépidoptères. La consommation en Arachnides et Dermaptères reste supérieure à celles des P. auritus monospécifiques.

Que ce soit pour les colonies monospécifiques ou pour la colonie mixte, un partage des ressources trophiques est assez évident. Comme les exigences dans le contexte de la syntopie ont été modifiées, les résultats laissent supposer l'existence d'une compétition interspécifique encore active entre les deux espèces jumelles.

Les différences observées dans le régime alimentaire sont probablement dictées par une utilisation différenciée des habitats. En relation avec l’écologie des proies, les résultats de l'utilisation des habitats ont effectivement permis de démonter que les deux espèces d’oreillards se partagent les ressources spatiales.

Nos résultats constituent donc une belle illustration du principe d'exclusion compétitive. Que ce soit dans le cas des colonies monospécifiques ou de la colonie mixte, les deux espèces se partagent les ressources trophiques et spatiales ce qui leur permet de coexister durablement.

Recommandations pour la protection des espèces

Pour répondre aux exigences du régime alimentaire estival, il est nécessaire de maintenir une mosaïque d'habitats diversifiés composée de jardins, de prairies permanentes, des zones humides, des haies, de buissons, d'alignements d'arbres, des bois feuillus ou mixtes, de préférence hygrophiles, permettant le développement d'un sous-bois et de clairières. Les résultats de la sélection des habitats surfaciques ont, globalement, confirmé l'importance de ces habitats utilisés comme terrains de chasse. La sélection des habitats linéaires tels que les rangées d'arbres, les haies, les lisières feuillues met également en évidence l'importance du maillage écologique et les effets potentiellement néfastes de la fragmentation des habitats sur les populations d'oreillards.

Afin d'intégrer les exigences spatiales des P. austriacus , nous préconisons l’'établissement d'un périmètre minimum de protection de 3500 m autour du gîte. Concernant les P. auritus , il serait judicieux de protéger un périmètre minimal de 2000m de rayon.

Abstract

Introduction

The purpose of this study is to verify one of the principal rules of ecology: the principle of exclusive competition, by using the sibling species of long-eared bats present in Belgium as a model: the brown long-eared bat ( Plecotus auritus ) and the grey long-eared bat ( Plecotus austriacus ). Two similar species present in the same region and, what is more, share the same roost, must differ according to certain aspects of their ecological niche in order to be able to co-exist (MacNab 1971).

In order to determine the resource sharing mechanisms between the two species, we have compared the three important dimensions of their ecological requirements: the use of trophic resources by means of faecal analysis and the use of space and time by radio-tracking.

Chapitre 6 : Conclusions générales 109 Trophic resources

One hundred and thirty samples (4688 droppings, 6388 occurrences) taken from 5 single-species colonies of P. austriacus , 5 single-species colonies of P. auritus and from a mixed colony have been taken into account in the analysis of the summer diet.

With the help of a first model constructed with the aid of generalized linear regressions, we have shown that, independently of the cohabitation conditions (single-species and mixed colonies), the two species have similar dietary requirements. Qualitatively, the same types of prey are consumed : Lepidoptera, Diptera (Craneflies, Cyclorrhapha and others Diptera), Coleoptera, Arachnids and Dermaptera. Small quantitative differences of between 3% to 8%, were seen to exist : P. austriacus consumes slightly more Coleoptera and Lepidoptera and fewer Craneflies than P. auritus .

With the help of a second model enabling interspecific comparison of the diet according to whether the animal belonged to the single-species colonies or the mixed colony, we were able to show that the differences were more marked.

When P. austriacus belong to single-species colonies, with reference to single-species colonies of P. auritus , predicted value indicate that they consume more Coleoptera (+ 5,0 %, p = 0,001) Lepidoptera (+ 14,4 %, p < 0,0005) and fewer Arachnids (- 8,3 %, p < 0,0005), Dermaptera (- 8,8%, p < 0,0005) and Craneflies (- 9,5 %, p = 0,009). This leads us to believe that the proportion of non-flying or diurnal prey gleaned by P. auritus is 2,5 times greater than that of P. austriacus .

On the other hand, when P. austriacus belongs to the mixed colony, in reference to the P. austriacus single-species colonies, it changed its feeding behaviour. The predicted consumption of Arachnids and Dermaptera is higher, 14,5 % (p < 0,0005) and 11,3 % (p < 0,0005) respectively, while the consumption of Lepidoptera is much less (- 25,6 %, p < 0,0005). The syntopic P. austriacus also consume more craneflies (+ 7,9 %, p = 0,034) but fewer Coleoptera (-11,1 %, p = 0,009). This shows that P. austriacus posesses surprising adaptation abilities. The diet of the P. auritus of the mixed colony in relation to the single-species P. auritus , only showed slight variations on the other hand : - 7% (p = 0,006) for the Cyclorrhapha and - 4% (p = 0,002) for the Dermaptera.

In syntopy, the study of seasonal variations has shown that the quantitative differences were significant at the end of gestation and lactation when the energy requirement is at its highest. In June, P. austriacus consumes more Arachnids (p = 0,046), in July, more Arachnids (p = 0,020) and fewer Lepidoptera (p = 0,020). In August, they consume more Dermaptera (p = 0.019), fewer Coleoptera (p = 0.032) and Lepidoptera (p = 0.034).

Winter trophic ecology

Our study has also led to the discovery of a little-known aspect of the ecology of chiroptera: winter trophic ecology. The results have shown that long-eared bats consume at least 70% of their prey which they capture by gleaning (Spiders, Dermaptera, Cyclorrhapha). These results have made it possible to confirm that the two species possess the ability to glean their prey.

Spatial and temporal resources

Twenty-two Plecotus were used for the analysis : seven P. auritus in Gozin, six P. austriacus in Gembes, five P. auritus and four P. austriacus in Pondrome (mixed colony). Eighty-four nights of monitoring corresponding to the discovery of 111 hunting grounds were used for the analyses.

The results show that the use of space by P. auritus and P. austriacus contain similarities. The distance of the hunting grounds, the number of grounds visited per night, the duration of their use, their surface and the individual area of daily activity are similar.

Chapitre 6 : Conclusions générales 110 In the same way, contrary to what the literature suggests, it seems that P. auritus possesses the ability to exploit the open or semi-open areas like the meadows surrounded by linear woodland elements, while P. austriacus possesses the ability to exploit equally well the closed areas such as woods.

In syntopy, the two species showed a different selection of habitats (grasslands, leafy woods,, gardens, edges for P. auritus and leafy or coniferous woods, gardens and edges for P. austriacus ), P. auritus spending 64% of hunting time above the grassland against 83% in the woods for P. austriacus. On the other hand, in comparison with the two single-species colonies, the division of hunting time around the roost is more spread out in terms of space and the number of hunting grounds visited by night is more important.

No difference in the exploitation of temporal resources was detected; the later departures from the Gozin colony were attributed to the presence of artificial lighting placed in front of the roost.

The mechanisms allowing resources partitioning

In the case of single-species colonies we have shown the existence of trophic resources partitioning. In fact, P. austriacus showed a diet less rich in Arachnids, Dermaptera, Craneflies and richer in Coeloptera and Lepidoptera than P. auritus . However, in syntopy, P. austriacus clearly modified its diet by consuming more Arachnids and Dermaptera to the detriment of Coleoptera and Lepidoptera. The consumption in Arachnids and Dermaptera remains higher than those of single-species P. auritus .

Whether for single-species colonies or mixed colonies, trophic resources partitioning is quite evident. As requirements in terms of syntopy were modified, the results lead us to assume that inter-specific competition exists between this sibling species.

The differences observed in the diet are probably dictated by a different use of the habitats. Indeed, in relation with the ecology of prey, the results of habitats use have made it possible to show that habitat partitioning occurs between the two species of long-eared bat.

Our results therefore constitute a good illustration of the principle of competitive exclusion. Whether in the case of single-species colonies or mixed colonies, the two species share the trophic and spatial resources which allow them to co-exist.

Recommendations for the conservation of the species

To satisfy the requirements of the summer diet, it is necessary to maintain a network of diverse habitats composed of gardens, meadowlands, humid zones, hedges, bushes, tree alignments, leafy or mixed woodlands, preferably hygrophilous, allowing for the development of undergrowth and clearings. The results of the selection of surface habitats have globally confirmed the importance of these habitats used as hunting grounds. The selection of linear habitats such as tree-lines, hedges, bushes and edges also show the importance of ecological networks and the potentially damaging effects of the fragmentation of habitats on the bat population.

In order to integrate the spatial requirements of P. austriacus , we recommend the establishment of a minimum protection perimeter of 3500 metres around the nest. With regard to P. auritus , it would be judicious to protect a minimum perimeter of a radius of 2000 metres.

Chapitre 6 : Conclusions générales 111 Bibliographie

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