Comptes Rendus D'audience Du Procès En Appel De Pascal
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FAC-SIMILÉ Comptes rendus d’audience du procès en appel de Pascal SIMBIKANGWA (octobre-décembre 2016) Par Alain GAUTHIER Source : http://www.collectifpartiescivilesrwanda.fr/pascal- simbikangwa-proces-en-appel-a-bobigny/ Page 1 sur 220 FAC-SIMILÉ Procès en appel de Pascal SIMBIKANGWA: communiqué de presse. 14/10/2016 Le 14 mars 2014, les jurés de la Cour d’assises de Paris condamnaient monsieur Pascal SIMBIKANGWA à 25 ans de prison pour “génocide et complicité de crimes contre l’humanité“. Son procès en appel se déroulera du 25 octobre au 9 décembre à la Cour d’assises de Bobigny. Monsieur Pascal SIMBIKANGWA, qui a nié tous les faits qui lui étaient reprochés, a fait appel de sa condamnation? Occasion nous sera donnée de rappeler qu’en 1994, au Rwanda, plus d’un million de personnes ont été exterminées parce qu’elles étaient Tutsi. Cette première condamnation a été plus récemment suivie de celle de messieurs NGENZI et BARAHIRA. Ces deux anciens bourgmestres de Kabarondo ont écopé, le 6 juillet dernier, de la réclusion criminelle à perpétuité . Ils ont aussi fait appel. Ces deux décisions judiciaires n’ont pas eu le retentissement qu’elles auraient dû avoir: le silence d’un grand nombre de médias a été assourdissant. Ce “génocide sans importance” n’intéresserait pas nos concitoyens? C’est ce qu’aurait laissé entendre le directeur de l’information d’une radio nationale. Il faut dire que, de leur côté, les autorités politiques françaises d’hier et d’aujourd’hui ne veulent toujours pas reconnaître le rôle que le gouvernement de cohabitation de l’époque a joué dans ce drame qui a emporté hommes, femmes, enfants, vieillards, bébés, tous innocents. Des nazis auraient été jugés et condamnés, aurions-nous assisté à la même indifférence? Aux assises de Bobigny, monsieur Pascal SIMBIKANGWA aura de nouveau à rendre des comptes à la justice. Pourra-t-il continuer à nier toute responsabilité personnelle dans l’extermination de milliers d’innocents? L’avenir nous le dira. Souhaitons toutefois que les débats ne restent pas confinés dans une salle de Cour d’assises. Nos concitoyens, mais aussi les citoyens du monde entier, doivent savoir qu’un génocide a été perpétré au Rwanda en 1994. Ils doivent savoir aussi que certains responsables de ces crimes contre l’humanité ont trouvé refuge en France où ils doivent être jugés. Le CPCR s’engage à publier très régulièrement sur son site les comptes-rendus d’audience. Mais ce travail ne peut remplacer celui de la presse qui a aussi le devoir d’informer. www.collectifpartiescivilesrwanda.fr Alain GAUTHIER, président du CPCR Contact: 06 40 57 09 44 [email protected] Page 2 sur 220 FAC-SIMILÉ Qui est Pascal SIMBIKANGWA ? 21/10/2016 Des identités multiples Pascal SIMBIKANGWA est né en 1959 à Rambura, dans le Nord du Rwanda, d’une famille de cultivateurs relativement aisés. Son père est Hutu, sa mère Tutsi, mais du fait de la patrilinéarité instaurée par les belges à partir de 1932, lui-même est Hutu. Pascal SIMBIKANGWA dit être né sous l’identité de Pascal SAFARI SEYANIUKARA. Il dit avoir, à 15 ans, changé son nom pour faciliter son entrée au Lycée et se serait dès lors fait connaître sous le patronyme de Pascal SIMBIKANGWA. Des informations démenties par son père, selon lequel son fils aurait été nommé Pascal SIMBIKANGWA dès la naissance. En 1992, devenu particulièrement méfiant après une tentative d’attentat dont il réchappe de peu, il aurait à nouveau changé d’identité et repris son nom de naissance, SAFARI, auquel il aurait adjoint celui de son grand père, SEDINAWARA. Enfin, lors de son entrée à Mayotte, il se présente aux services de l’OPFRA sous une quatrième identité : Safari SENYAMUHARA. Des liens « du sang et du sol » avec le président HABYARIMANA et son entourage Le père de Pascal SIMBIKANGWA était issu du même village et du même clan que Juvénal HABYARIMANA. Leurs grands pères étaient frères, ce qui fait de Pascal SIMBIKANGWA, selon ses propres dires, un cousin de l’ancien président, auquel il a toujours voué une loyauté et une affection sans bornes. Pascal SIMBIKANGWA est également le beau-frère d’Elie SAGATWA, chef d’Etat major particulier du président HABYARIMANA, lequel était le cousin d‘Agathe HABYARIMANA et membre du « noyau dur » de son réseau d’influence, l’Akazu. Une carrière militaire prometteuse, brisée à 29 ans À l’âge de 18 ans, Pascal SIMBIKANGWA intègre l’ESM (Ecole Supérieure Militaire). Il en sort 4 ans plus tard, avec le grade de sous-lieutenant. Il poursuit ses études pendant deux années supplémentaires, à la gendarmerie de Kigali. Durant cette période, il aurait réalisé plusieurs stages dans des prisons étrangères. En 1983, il intègre la garde présidentielle et devient instructeur commando. Son travail consiste à assurer l’entraînement des militaires et la protection du président Juvénal HABYARIMANA au sein de l’escorte présidentielle. Page 3 sur 220 FAC-SIMILÉ Sportif accompli, un accident de la route, le 27 juillet 1986, le rend paraplégique et met un terme à son ascension professionnelle. De l’armée au civil : de la garde présidentielle au Service Central de Renseignement (SCR) Après un séjour d’un an à l’hôpital, en Belgique, où il se découvre un goût pour l’écriture, il est affecté au service des renseignements militaires de l’État-Major de l’armée. En 1988, il bascule dans le civil, en tant que directeur du Service Central de Renseignement (SCR), qui était à l’époque attaché directement à la Présidence du Rwanda. En avril 1992, à la suite de l’instauration d’un gouvernement multipartite, le renseignement intérieur est transféré à la Primature (services du Premier ministre) : Pascal SIMBIKANGWA quitte le giron du Palais présidentiel pour travailler sous les ordres d’Augustin IYAMUREMYE, membre du PSD (parti d’opposition au régime). Pascal SIMBIKANGWA, dit « Le tortionnaire » De 1988 à 1992, Pascal SIMBIKANGWA s’illustre par le surnom qui lui est donné par les opposants politiques et particulièrement les journalistes qui ont eu affaire à lui. « Le tortionnaire » semble avoir une prédilection pour les sévices appliqués sur les membres inférieurs, et certains témoins relatent son ardeur à frapper leurs plantes de pieds, jusqu’à les empêcher de marcher. Le changement de direction à la tête de son service, passé à l’opposition du fait du multipartisme, permet de faire cesser la torture. Celle-ci aurait aussi pris fin, selon l’ambassadeur français MARLAUD, grâce à l’intervention des français : informés des actes perpétrés par le colonel Pascal SIMBIKANGWA, ces derniers auraient demandé qu’il soit écarté du Centre de recherche criminelle et de documentation (CRCD). Pascal SIMBIKANGWA, auteur, éditeur et journaliste Pascal SIMBIKANGWA devient progressivement un idéologue, une « éminence grise » selon certains témoins, gagnant cette nouvelle dimension avec la publication, en 1989, de son premier ouvrage « L’homme et sa croix », son autobiographie, puis en 1991, de « La guerre d’octobre » sur la guerre avec le Front Patriotique Rwandais (FPR) de 1990. Sa position privilégiée au cœur de la surveillance des médias aurait dépassé le seul travail de censure. Il aurait participé à la création de UMURAVA Magazine, apporté un soutien financier au journal KANGURA et rejoint la rédaction du journal INTERA, qui a publié, en décembre 1990, quasi-simultanément avec KANGURA, les « dix commandements du Hutu ». Pascal SIMBIKANGWA se serait surtout illustré par la création du journal « L’indomptable IKINANI », dont les propos étaient si violents, notamment à l’encontre de la ministre de l’enseignement de l’époque, que le premier numéro fut mis au pilon peu après son impression. Enfin, Pascal SIMBIKANGWA faisait également partie des 50 premiers actionnaires- fondateurs de la radio-télévision des Mille Collines ( RTLM), la « radio du génocide ». Page 4 sur 220 FAC-SIMILÉ D’après un article initialement publié sur “Procès Génocide Rwanda”, un site conçu et réalisé par Stéphanie Monsénégo (SCM Conseil) et Sophie Chaudoit pour le procès de Pascal Simbikangwa en 2014. Page 5 sur 220 FAC-SIMILÉ Pascal SIMBIKANGWA : Procès en appel à Bobigny 21/10/2016 […] Arrêté à Mayotte pour trafic de faux papiers alors qu’il était déjà recherché par Interpol pour génocide, cet ancien capitaine de l’armée rwandaise, membre des services de renseignements du régime de Juvénal Habyarimana était un proche du défunt président, surnommé “le tortionnaire” par les opposants au régime qui allait conduire au génocide des Tutsi en 1994. • Qui est Pascal SIMBIKANGWA ? • Tous les comptes rendus du procès en appel, jour par jour La cour d’assises était présidée par M. Régis DE JORNA. Le Parquet Le Parquet était représenté par l’avocat général, M. Rémi CROSSON du CORMIER et Ludovic HERVELIN-SERRE. La Défense La défense de M. SIMBIKANGWA était assurée par Me Fabrice EPSTEIN et Me Alexandra BOURGEOT. Page 6 sur 220 FAC-SIMILÉ Les parties civiles • Collectif des Parties Civiles pour le Rwanda (C.P.C.R), ayant pour avocats Me Simon FOREMAN et Domitille PHILIPPART. • Fédération Internationale des Ligues des Droits de l’Homme (F.I.D.H), ayant pour avocat Me Léa RABAUX. • SURVIE, ayant pour avocats Me Jean SIMON et Me Safya AKORRI • Ligue Internationale contre le Racisme et l’Antisémitisme (LICRA), ayant pour avocats Me Rachel LINDON. Page 7 sur 220 FAC-SIMILÉ Procès en appel de SIMBIKANGWA: mardi 25 octobre 2016. J1 25/10/2016 Le procès en appel de Pascal SIMBIKANGWA s’est ouvert ce matin aux assises de Bobigny. Les médias ont dû se donner le mot: personne au rendez-vous, ou presque. Il est vrai que “le génocide des Tutsi au Rwanda n’intéresse personne“. La matinée a commencé par un bref interrogatoire concernant l’identité de l’accusé.