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LeMonde Job: WMQ0306--0001-0 WAS LMQ0306-1 Op.: XX Rev.: 02-06-97 T.: 09:39 S.: 111,06-Cmp.:02,09, Base : LMQPAG 53Fap:99 No:0499 Lcp: 196 CMYK

LÉGISLATIVES a Tous les résultats région par région

CINQUANTE-TROISIÈME ANNÉE – No 16282 – 7 F MARDI 3 JUIN 1997 FONDATEUR : HUBERT BEUVE-MÉRY – DIRECTEUR : JEAN-MARIE COLOMBANI a nommé premier ministre b La gauche obtient 319 députés contre 257 pour la droite b Le PS n’a pas la majorité absolue sans les 37 élus communistes b Avec 8 députés, les écologistes entrent pour la première fois à l’Assemblée, où 62 femmes ont été élues b Le nouveau chef du gouvernement promet une « réorientation de la construction européenne » b L’échec de la dissolution ouvre une crise à droite, où le RPR est le principal perdant

b La gauche « plurielle » victo- Ne pas décevoir rieuse : reportages, analyses et réactions. p. 2 et 3 LA DISSOLUTION, prononcée Français, voulait perpétuer une b L’Elysée veut mettre en place par Jacques Chirac, n’était pas un culture politique, celle de l’Etat- rapidement la cohabitation. p. 4 scrutin organisé pour faire naître parti, en l’occurrence l’Etat-RPR. b A la télévision, les prémices un nouveau régime. Au contraire. Au fond, Jacques Chirac a tenté, d’une guerre des vaincus. p. 5 Mais par leur vote, les Français et manqué, une restauration, celle b La droite menacée d’implosion ; ont peut-être, de la présidence absolue, dans la réélection de ; l’hy- le 1er juin, une période où tout laissait pen- pothèque du FN. p. 6 à 8 dessiné eux- ser que les Français, à travers no- b Sondage : les attentes des Fran- mêmes les tamment deux expériences de co- çais, selon la Sofres. p. 9 contours habitation, semblaient devoir b Dossier : M. Jospin ou le refus d’une nou- préférer une présidence limitée. du cynisme ; Six visages d’une velle Répu- Au-delà, c’est une analyse, celle gauche rose, rouge et verte ; Une ÉDITORIAL blique. En du président, qui est forclose. A pensée économique keynésienne prônant un ses yeux, l’a-t-il assez répété pen- pimentée de marxisme. p. 10 à 13 nouvel équilibre des pouvoirs, dant sa propre campagne électo- b Résultats complets, cartes élec- ainsi qu’en réclamant une nou- rale, nous étions, et serions en- torales, liste des élus, biographies velle manière de faire de la poli- core, en 1958. C’est-à-dire à un des nouveaux députés. p. 29 à 55 tique. moment de notre histoire propice La demande d’équilibre est pa- à une remise en ordre générale et tente : dans une politique tous azimuts. Cela supposait une LIONEL JOSPIN a été nommé rielle » : le PS, n’ayant que 245 élus, lippe Séguin et Charles Pasqua de- cédait 4,52 %. Le franc reculait face qui était la propriété quasi exclu- autre restauration, celle du gaul- premier ministre par le président de aura besoin du soutien des ex-radi- mandent une refondation du mou- à la monnaie allemande, à sive de la droite – Assemblée, Sé- lisme. Mais n’est pas gaulliste qui la République, lundi 2 juin, en fin caux de gauche, des divers gauche, vement néogaulliste. Edouard 3,3850 francs pour 1 deutschemark. nat, la plupart des régions et dé- veut, pas même lorque l’on se de matinée. Jacques Chirac a ainsi des amis de Jean-Pierre Chevène- Balladur préfèrerait un parti unique Les opérateurs s’inquiètent de l’ab- partements –, l’idée de s’enfermer prévaut de cet héritage. La réalité tiré, sans tarder, la conséquence de ment, des écologistes – ils sont 8 – de l’opposition ou, à défaut, un sence de majorité absolue pour le pour cinq ans dans un système a été celle de dirigeants néo-gaul- la nette défaite de la droite aux et des communistes. Les Verts et le pôle des libéraux. François Léotard PS et de la présence probable de déjà si étroitement contrôlé a été listes incapables de faire du gaul- élections législatives. Le RPR, l’UDF PCF doivent décider, lundi, de leur veut préserver la spécificité de ministres communistes au gouver- récusée. La dissolution référen- lisme ; ou plutôt, éternelle ironie et les divers droite, qui avaient participation au gouvernement. Le l’UDF. François Bayrou envisage la nement. daire a été repoussée. Le pouvoir de l’Histoire, dans le fait qu’il re- 477 députés sortants, n’en auront futur gouvernement de gauche de- création d’un groupe centriste dans L’incertitude sur l’avenir de l’euro absolu que donnent les institu- venait aux héritiers du gaullisme plus que 257. Le Front national vra tenir compte de l’attente des la nouvelle Assemblée. domine les commentaires de la tions à un président pourvu d’une de fermer la parenthèse gaulliste. n’obtient qu’un élu, le maire de Français. Selon un sondage réalisé Lors des premières transactions presse étrangère. A Bruxelles, les majorité absolue a été refusé. A ce Toulon. par la Sofres pour et TF 1, entre professionnels, avant l’ouver- hauts fonctionnaires de la Commis- constat, il faut ajouter que la dé- J.-M. C. La gauche détiendra 319 sièges, la lutte contre le chômage et la ré- ture des cotations officielles, la sion européenne semblent sereins, faite est d’abord pour celui qui, soit 30 de plus que la majorité ab- novation de la vie politique sont en Bourse de s’inscrivait en forte jugeant acceptables les conditions par le blanc-seing demandé aux Lire la suite page 14 solue. Cette gauche est « plu- tête de leurs priorités. A droite, Phi- baisse lundi matin. L’indice CAC 40 posées par les socialistes français. Titre a Privatisations : LES RÉSULTATS SELON « LE MONDE » La nouvelle Assemblée (sur la totalité des circonscriptions de métropole et d’outre-mer) RÉPARTITION DES SIÈGES Algérie : campagne Bonn accélère Inscrits : 38 440 714 ; Votants : 27 343 902 L’Allemagne s’apprête à continuer la Exprimés : 25 614 717 319 sièges 258 sièges Abstentions : 28,87 % ; Blancs et nuls : 6,32 % DIV. G. 9 privatisation de Deutsche Telekom et sanglante ECOLOGISTES 8 de Lufthansa et à engager celle de la Nombre 7 DIV. D. Suffr. expr. Inscrits Nombre PRS 13 ALORS QUE les Algériens Postbank. p. 21 FAMILLES POLITIQUES de voix (%) (%) de sièges a sont appelés à élire une obtenues UDF nouvelle Assemblée nationale, et apparentés Total gauche ...... 12 387 262 48,36 32,22 319 jeudi 5 juin, la campagne a été a dont PS ...... 9 950 039 38,85 25,88 245 PS marquée, dimanche, par l’explo- Turquie : le départ PC ...... 963 915 3,76 2,51 37 et apparentés 109 sion de bombes en plein cœur Ecologistes ...... 414 871 1,62 1,08 8 245 RPR d’Alger. Six passants auraient été de M. Erbakan Divers gauche 1 058 437 4,13 2,75 29 et apparentés tués et des dizaines d’autres bles- Le premier ministre turc annonce des Total droite ...... 11 792 571 46,04 30,68 257 sés. La campagne électorale s’est élections législatives anticipées et son dont RPR ...... 6 057 761 23,65 15,76 140 MDC 7 140 déroulée sous le contrôle des au- torités, sans qu’une réelle opposi- remplacement rapide par Mme Tansu UDF ...... 5 374 563 20,98 13,98 109 Divers droite ... 360 247 1,41 0,94 8 PC 37 577 SIÈGES 1 LDI tion puisse s’exprimer. Ciller p. 17 et apparentés Front national...... 1 434 884 5,60 3,73 1 FN 1 Lire page 15 a Manifestation à Hongkong La révélation Des milliers de Hongkongais ont défilé, Le « champ de ruines » dimanche, pour la démocratie. p. 16 du tennis belge de la droite a Le suicide en prison LA GAUCHE était sortie ga- faire élire celui de la gauche, les Un programme de prévention des sui- gnante du premier tour des élec- électeurs du Front national ont, cides de prisonniers est expérimenté, tions législatives, le 25 mai. Ga- dans leur grande majorité, choisi pour la première fois, dans onze éta- gnante, puisqu’elle devançait le de prendre ce risque. Même si ce- la n’est pas allé sans déperdition blissements pénitentiaires. p. 18 RPR et l’UDF, ramenés au plus bas niveau que la droite a connu de voix – jusqu’à plus de 7 points, depuis le début de la Ve Répu- d’un tour à l’autre, dans certaines blique ; mais minoritaire dans le circonscriptions –, la position a Un train régional pays, puisque la droite et l’ex- adoptée par M. Le Pen, qui n’avait trême droite totalisaient plus de pas fait mystère de sa volonté de sans frontières 60 % des voix. Au second tour, le sanctionner la droite et de contri- FILIP DEWULF PS, le PCF, les Verts et le MDC ont buer à la victoire de la gauche, a La ligne du « Regio-S-Bahn », inaugu- pourtant remporté 318 sièges qui, donc été suivie par ses électeurs. RÉVÉLATION de la première rée dimanche, reliera trois régions, s’ajoutant au député communiste La barrière dressée par le Front semaine de Roland-Garros, le française, suisse et allemande. p. 20 réunionnais élu le 25 mai, leur as- national entre lui-même et la Belge Filip Dewulf, issu des quali- surent une majorité confortable à droite s’est révélée efficace dans fications, a accédé aux quarts de l’Assemblée nationale. les deux tiers des circonscriptions finale après avoir battu l’un des fa- a Faut-il pour autant considérer, où se disputait une triangulaire, voris, l’Espagnol Alex Corretja. Passion médiévale comme l’a fait Jean-Claude Gau- mais, dans les circonscriptions où Avec un tel renfort, la Belgique Les musiques du Moyen Age attirent din, qu’« en maintenant ses candi- deux candidats s’affrontaient au risque de donner du fil à retordre à un public de plus en plus large. p. 26 dats (...) Jean-Marie Le Pen a nom- second tour, le constat est beau- l’équipe de France de Coupe Da- mé de facto Lionel Jospin premier coup moins évident. Nombre de vis, qu’elle doit affronter en match ministre » députés de droite réélus dans des Allemagne, 3 DM ; Antilles-Guyane, 9 F ; Autriche, ? Sur les 76 circonscrip- barrage pour le maintien dans le 25 ATS ; Belgique, 45 FB ; Canada, 2,25 $ CAN ; tions où s’affrontaient au second « duels » face à des candidats de groupe mondial, du 19 au 21 sep- Côte-d’Ivoire, 850 F CFA ; Danemark, 14 KRD ; Espagne, 220 PTA ; Grande-Bretagne, 1 £ ; Grèce, tour un candidat de droite, un gauche l’ont été grâce à un apport tembre. 400 DR ; Irlande, 1,40 £ ; Italie, 2900 L ; Luxembourg, candidat de gauche et un candi- de voix des électeurs Front natio- 46 FL ; Maroc, 10 DH ; Norvège, 14 KRN ; Pays-Bas, 3 FL ; Portugal CON., 250 PTE ; Réunion, 9 F ; dat du Front national, la gauche nal du premier tour. Inversement, Lire page 24 Sénégal, 850 F CFA ; Suède, 15 KRS ; Suisse, 2,10 FS ; l’a emporté dans 47 cas (36 PS, là où l’extrême droite était seule Tunisie, 1,2 Din ; USA (NY), 2 $ ; USA (others), 2,50 $. 5 PC, 2 MDC, 2 Verts, 1 radical-so- en lice face à la gauche, elle a bé- France ...... 2 Entreprises ...... 21 cialiste, 1 divers gauche) et la néficié du renfort d’électeurs de la Horizons ...... 10 Aujourd’hui...... 22 droite dans 29 (16 RPR et droite au premier tour. International...... 15 Jeux ...... 24 13 UDF). Société...... 18 Culture...... 26 Autrement dit, là où ils avaient Patrick Jarreau Carnet...... 19 Radio-Télévision..... 27 la possibilité de voter de nouveau Régions...... 20 Abonnements...... 36 pour leur candidat, au risque de Lire la suite page 14 LeMonde Job: WMQ0306--0002-0 WAS LMQ0306-2 Op.: XX Rev.: 02-06-97 T.: 08:39 S.: 111,06-Cmp.:02,16, Base : LMQPAG 49Fap:99 No:0959 Lcp: 196 CMYK

2 FRANCE LE MONDE / MARDI 3 JUIN 1997

ALTERNANCE Jacques Chirac de l’échec de la droite lors des élec- est majoritaire dans la nouvelle As- gouvernement que souhaitent pour une recomposition du RPR. devait nommer Lionel Jospin premier tions législatives qu’il avait provo- semblée. Le RPR, l’UDF et les divers et . Edouard Balladur s’est montré favo- ministre, lundi 2 juin en fin de mati- quées en prononçant, le 21 avril, la droite sont 257. L’extrême droite a b LA DROITE a étalé ses divisions à rable à un parti unique de l’opposi- née. Le président de la République a dissolution de l’Assemblée natio- un élu. Le PCF et les Verts doivent dé- l’annonce de ces résultats. Philippe tion, une idée récusée par François ainsi tiré très vite les conséquences nale. b LA GAUCHE, avec 319 sièges, cider, lundi, de leur participation au Séguin et Charles Pasqua ont plaidé Léotard et par François Bayrou. La gauche « plurielle » devient majoritaire à l’Assemblée nationale Avec 319 sièges contre 257 à la droite et 1 à l’extrême droite, le PS, le PCF, les radicaux-socialistes, les écologistes et le MDC se préparent à participer au gouvernement, dont Jacques Chirac devait confier la direction à Lionel Jospin, lundi 2 juin en fin de matinée

LA DÉFAITE est consommée. à faire-face à ses nombreuses diffi- communiste disposera ainsi de 282 avec leurs 37 élus alors qu’ils n’en leur conseil national pour le déci- déjà. Philippe Séguin et Charles Nette. Sans appel. Le général en cultés. Dans l’Assemblée dissoute, sièges. Certes, ce n’est pas la majo- comptaient que 24 dans la précé- der, mais Dominique Voynet, elle- Pasqua proposent, chacun à sa chef responsable de la déroute de il y avait 258 députés RPR, 206 rité absolue (289 voix) que lui dente Assemblée. Leur appui va même brillamment élue à Dole, a manière, de refonder le RPR au- ses troupes et, donc, de la sienne, UDF et 13 divers droite. Dans celle avaient, un temps, promis les pro- permettre à la gauche de détenir dit y être favorable. La situation tour de lui. Edouard Balladur pro- ne pouvait qu’en tirer les consé- qui se réunira le 12 juin, il y aura jections du début de la soirée du 319 sièges, donc de dépasser est semblable au PCF. Robert Hue, pose, à mi-mot, la création d’un quences. Très vite. C’est ce qu’a 140 RPR, 109 UDF et 8 divers dimanche 1erjuin. Mais c’est beau- d’exactement 30 voix la majorité qui va aussi faire son entrée à l’As- parti unique de l’oppposition. fait Jacques Chirac. Dès lundi droite. Ainsi le total des élus de coup plus que la droite (25 sièges absolue. C’est une situation semblée nationale, a déclaré sou- François Léotard plaide pour l’uni- 2 juin au matin, il a reçu la démis- l’opposition parlementaire − c’est- de plus) et cela permettra donc à confortable, si personne ne tire à haiter que les communistes « par- sion d’Alain Juppé de son poste de à-dire non compris le seul député Lionel Jospin de gouverner, même hue et à dia dans la nouvelle majo- ticipent au gouvernement de la premier ministre et il devait, à mi- d’extrême droite, Jean-Marie Le si les écologistes et les chevène- rité. Eviter les divisions sera pro- France ». Mais, en conformité avec Deux fois plus de femmes di, nommer Lionel Jospin chef du Chevallier – ne sera que de 257, in- mentistes ne seront pas des alliés bablement un des soucis constants les décisions du dernier congrès, gouvernement. Ainsi a pris fin ce férieur au nombre des seuls élus faciles ; ils se sont d’ailleurs fait en- de Lionel Jospin. Cela lui sera plus tous les adhérents du PCF doivent au Palais-Bourbon qui restera comme une tragi- RPR renvoyés devant les électeurs tendre dès dimanche soir pour exi- facile si toutes les composantes de être consultés ce lundi. comédie politique, dont la pre- par celui qui fut longtemps le diri- ger la réalisation rapide de cer- la gauche sont représentées au Comme souvent, si ses alliés sus- Le nombre de femmes sié- mière scène s’était jouée le 21 avril, geant de leur mouvement. taines revendications. gouvernement. Or, ce n’est pas en- citent quelques inquiétudes chez geant à l’Assemblée nationale lorsque le président de la Répu- En tout état de cause, les core définitivement acquis, même Lionel Jospin, ses adversaires pa- va quasiment doubler : il passe blique avait prononcé la dissolu- ÉVITER LES DIVISIONS communistes sont bien décidés à si c’est en bonne voie. raissent décidés, sans le vouloir de 32 à 62. Sur l’ensemble du ter- tion de l’Assemblée nationale. Lio- La progression de la gauche est, soutenir le futur gouvernement Les Verts doivent réunir, lundi, bien sûr, à lui faciliter la tâche. ritoire français, la proportion de nel Jospin a pu déclarer, au soir du bien entendu, parallèle. Le Parti Lorsque, dimanche soir, les diri- femmes était précédemment de second tour de ces législatives an- socialiste n’avait que 56 députés ; il geants du RPR et de l’UDF ont 5,3 %. Sur un total de 577 sièges, ticipées : « Il y a toujours un risque en aura 245. Ses alliés du PRS (ex- LES RÉSULTATS SELON LE MINISTÈRE DE L’INTÉRIEUR constaté que l’amélioration du elle passe à 10,74 %. Le Parti so- à donner la parole au peuple ; on la radicaux de gauche) étaient 5, ils taux de participation – l’abstention cialiste, qui présentait 27,6 % de (sur 567 circonscriptions) lui a donnée ; il l’a prise, et nous seront 13. Les divers gauche a été au second tour de 28,87 %, candidates, compte 41 députés. avons gagné ; il nous reste à le ser- étaient 9 et conservent ce nombre I. : 37 947 508 ; V. : 27 088 620 ; E. : 25 382 475 ; Abs. : 28,61 % contre 32,04 % au premier tour – Sur un total de 245 sièges, cela vir. » de sièges. Les écologistes font leur ne leur avait pas été profitable, ils donne une proportion de Quelques chiffres suffisent à me- entrée au Palais-Bourbon, où ils en % en sièges en % en sièges n’ont eu de cesse de rejeter sur les 16,73 %. Quatre élues socialistes surer un résultat qui n’avait certai- détiendront 8 sièges. Le PS peut autres la responsabilité de la dé- seulement sont sortantes, les Com. 3,84 38 RPR 22,77 131 nement pas été prévu par ceux qui compter aussi sur le soutien des 7 faite et de proposer des plans autres étant de nouvelles candi- Soc. 38,38 240 UDF 20,97 108 ont imaginé que la dissolution élus du Mouvement des Citoyens concurrents de remise en ordre dates. Les Verts ont 2 femmes PRS 2,21 12 Div. d. 2,38 14 pourrait donner un « nouvel élan » de Jean-Pierre Chevènement qui d’un camp qui donnait l’impres- sur 7 députés ; 3 sur 8, si l’on Div. g. 2,14 16 FN 5,65 1 à une majorité sortante qui ne par- n’en comptait que 4 avant le sion d’être KO debout. tient compte de Michèle Rivasi, Ecol. 1,63 7 venait plus, depuis de longs mois, 21 avril. Au total, la gauche non Les mauvaises nouvelles, il est qui bénéficiait du soutien de la vrai, tombaient les unes après les formation écologiste et du PS. autres. Sept ministres sur trente- Le RPR n’a plus que 5 femmes trois battus. Jean-François Mancel, sur 140 élus (3,57 %), et l’UDF 7 « Une exigence profonde qui vient de notre peuple » le secrétaire général du RPR, écra- sur 109 (6,42 %). Le PC en compte sé par l’ancienne chef de cabinet 5 sur 37 (13,51 %), en incluant le DEPUIS la salle des fêtes de Cintegabelle (Haute- mais plus encore une certaine façon, à mon sens exigence raisonnée et pressante de progrès réels de François Mitterrand. Deux cir- Parti communiste réunionnais. Garonne), dont il est le conseiller général, Lionel Jos- irrémédiablement dépassée, de concevoir la poli- dans la durée pour les Françaises et les Français, conscriptions de Corrèze sur trois pin a fait, dimanche 1er juin, une fois connus les ré- tique. en particulier pour les moins favorisés d’entre eux. arrachées par le PS. Quatre sur sultats des élections législatives, la déclaration sui- » La victoire des forces du changement de la » Exigence de justice, exigence d’une profonde cinq de Charente qui suivent le té d’une UDF qu’il avait rangée vante : majorité nouvelle, à laquelle chacun a pris part rénovation de la vie publique et de notre démo- même chemin. Le Limousin, l’Au- derrière Alain Juppé. Alain Made- « Je dis ma gratitude aux – radicaux-socialistes, communistes, Mouvement cratie, exigence d’une politique économique et so- vergne, Midi-Pyrénées, le Langue- lin veut reprendre sa « liberté ». Françaises et aux Français des citoyens, Verts, Parti socialiste à travers ses ciale mise au service de l’homme, exigence d’une doc-Roussillon qui retrouvent leur François Bayrou réclame une re- qui ont accordé leur très nombreux élus – vient couronner une cam- réorientation de la construction européenne à la- tradition de gauche. Le Nord-Pas- composition de la droite autour de confiance à tant de candi- pagne pendant laquelle nous avons respecté les quelle nous tenons, exigence d’une attention scru- de-Calais qui réduit à la portion trois familles : la gaulliste, la libé- dates et de candidats du Parti Français, engagé le dialogue avec eux, fait puleuse aux problèmes rencontrés par les Français congrue une droite qui avait cru rale, la centriste, c’est-à-dire la socialiste, de la gauche et des constamment des propositions positives pour dans leur vie quotidienne. s’y implanter durablement en 1993. sienne. Et lance : Verts. Qu’ils sachent ma joie, l’avenir. » Cette exigence, avec méthode, nous y répon- Que pèse, face à cela, la bonne « Ce ne sont pas nos idées qui ont ma fierté, le sentiment de » Au-delà du bonheur éprouvé par moi et par drons en écoutant nos concitoyens, en dialoguant résistance en Champagne-Ar- été battues, mais la manière dont responsablité à leur égard bien d’autres ce soir, le sentiment fort que m’ins- avec eux, en leur proposant des démarches nova- denne, en Provence-Alpes-Côte- elles ont été défendues. » De qui nous habite tous. pire cette élection très importante est celui d’une trices et réalisables. Nous aurons l’obligation de d’Azur, en Ile-de-France ? Même la M. Chirac, il est à peine question, » J’imagine l’immense joie de ceux qui ont voté exigence profonde qui vient de notre peuple. Ce mobiliser toute notre énergie, tout notre cœur, réélection de Jean Tiberi ne par- comme s’il ne restait pas, à l’Ely- pour nous. Je mesure et comprends la déception n’est pas la demande d’un « tout » tout de suite toute notre compétence, pour mettre en œuvre vient pas à faire oublier que le RPR sée, le meilleur appui de la nou- de ceux qui ont fait, le 1er juin, un autre choix. La auquel personne ne croit plus. Ce n’est pas la cette politique différente pour laquelle une majo- et l’UDF ont dû, à Paris, concéder velle opposition. défaite électorale de la coalition RPR-UDF sanc- croyance naïve à des promesses qui ont été, à plu- rité nouvelle vient d’être élue. Nous le ferons avec sept nouveaux sièges au PS en plus tionne sans doute un échec du gouvernement, sieurs reprises, démenties dans le passé. C’est une le souci de tous, dans l’intérêt de la France. » des deux que la gauche détenait Thierry Bréhier Lionel Jospin a éclaté de rire quand on lui a dit que le nom de code AU RENDEZ-VOUS des deux guez. Là, on entend des tam-tam toutes les conversations : « chan- vats à l’annonce de la défaite de t-il. Un membre du bureau natio- cer dans son commentaire le nom gauches, les CRS montent la et L’Internationale. gement » et « avenir ». Bruno Mégret (FN). Les « on a ga- nal raconte la réunion de l’état- de Hitchcock, « c’est que c’est bon garde. Alignés devant la Maison de La Maison de l’Amérique latine Drôle de foule, à vrai dire. Heu- gné, on a gagné » entonnés par les major socialiste juste avant les ré- pour nous ». A l’heure dite, per- l’Amérique latine, promue quartier est un endroit cossu, voire reuse sans être euphorique. plus enthousiastes trouvent un sultats de 20 heures alors que, dès sonne, à l’extérieur, ne comprend général du PS en cette soirée élec- luxueux, décoré de tableaux et de Presque surprise d’être là, à fêter écho limité. « C’est carrément bien, 18 h 15, , le hurlement de joie qui secoue le torale, ils forment une sorte de dorures du meilleur goût. D’un sa- l’impensable. Bien sûr, quelques carrément génial ! », insiste pour- convaincu dès la dissolution de la huis-clos de la permanence. « Il a barrage, séparant la foule des lon à l’autre, des écrans de télévi- nostalgiques évoquent le 10 mai tant Pascale, une étudiante de victoire de la gauche, lançait sur dit Hitchcock ! Est-ce que vous avez vainqueurs en deux camps bien sion ont été installés. Les invités se 1981 et la victoire de François Mit- vingt-deux ans, membre du Mou- son portable, à partir des pre- entendu ? » distincts. A l’intérieur, dans les sa- promènent, un verre à la main, en terrand, mais ils se veulent lu- vement des jeunes socialistes mières sorties des urnes : « C’est lons bourgeois de ce qui fut autre- prenant soin de ne pas glisser sur cides : « C’est différent, il n’y a pas (MJS) depuis huit mois. plié ! » « C’était inédit, dit-il. Cela « PAS DE GLORIOLE » fois l’hôtel de Guerchy, quelques le parquet. Les plus jeunes ar- le même espoir », admettent-ils, Il faut en fait attendre l’arrivée n’avait rien à voir avec 1981, 1988 Dès lors, le reste n’est plus centaines de privilégiés célèbrent borent des T-shirts « Changeons conscients des « erreurs passées ». des premières têtes connues pour ou bien sûr 1993. Vaillant et Fabius qu’une confirmation. Lionel Jospin la victoire autour des buffets, en d’avenir ». Les élégantes portent « Nous espérons que, cette fois, ils que l’ambiance monte d’un cran. étaient très chaleureux l’un avec téléphone à ses amis à Paris. La guettant les « vedettes » socia- des roses, la fleur des soirs de suc- sauront faire ce que les autres n’ont fait un bref pas- l’autre. Tout le monde avait consigne est claire : « Pas d’ironie listes. A l’extérieur, sur le boule- cès. Les messieurs en costume dis- pas su faire », prévient l’écrivain sage. Jack Lang, moins applaudi, conscience de la lourde responsabi- contre les perdants, pas de gloriole. vard Saint-Germain, règne une cutent sous les platanes du parc, Michel Angel. « Il faut bien ad- répond à quelques questions. Sé- lité qui nous échoit. » Les Français ont un problème avec ambiance de kermesse, une sorte comme au soir d’un mariage réus- mettre qu’avant d’être une victoire golène Royal est l’une des plus sol- A Cintegabelle, Lionel Jospin a la politique, ne l’oubliez pas. » Il de Fête de L’Huma improvisée au si. Noëlle Chatelet, la sœur de Lio- de la gauche, glisse une jeune licitées. « Qu’avez-vous ressenti ce éclaté de rire quand on lui a ra- descend de son pigeonnier pour cœur des beaux quartiers. Plu- nel Jospin, se déclare « fière et femme, c’est une défaite de la soir ? », demande-t-elle à un jeune conté qu’un code avait été mis au entendre à la télévision la confir- sieurs milliers de personnes, la émue » et raconte que sa mère a droite. » Pas d’excès, donc. Juste homme radieux. « Une odeur de point avec un présentateur de té- mation de résultats qu’il connaît gauche de la gauche, s’agglutinent préféré rester seule chez elle pour un bonheur sage et quelques vi- fraîcheur, de pureté », lui explique- lévision : si à 19 h 30, il arrive à pla- déjà. Entre ses dents, face aux la- derrière les barrières de sécurité, à écouter les résultats. « On pouvait mentos de Nicolas Sarkozy ou deux pas des vendeurs de mer- parler du pari stupide de Pascal, d’Edouard Balladur, il glisse : « Ils maintenant on pourra dire le pari sont terribles, ils ne changent pas. Ils stupide de Chirac. Mais c’est tant Les antinucléaires du Carnet se méfient n’ont rien compris... » mieux », lâche un militant âgé. A 21 heures, ils ne sont pas en- Une dame bon chic bon genre NANTES teurs 37 000. Pas question de se contenter d’attendre core très nombreux au carrefour appelle de son portable : « Venez de notre correspondant qu’une victoire des socialistes entraîne l’annulation du boulevard Saint-Germain et de vite, j’ai des cartons pour vous faire « Nous, on est là pour dénoncer la pratique de l’Etat du projet du Carnet, comme l’a promis Lionel Jospin. la rue du Bac, à Paris, pour saluer à entrer. » « Tiens, commente un mi- et leur dire, là-haut, d’arrêter de se foutre de notre Sur un dossier défendu successivement par la droite leur manière, à la fois riante et litant « gauche réelle » en contem- gueule. » Dimanche, en fin d’après-midi, Patrick est et par la gauche depuis dix ans, les promesses électo- grinçante, cette victoire. Déjà les plant la scène, la gauche caviar est venu en famille sur le site du Carnet (Loire-Atlan- rales ne suffisent pas. Au sein de la Fédération anti- banderoles donnent le ton : le syn- de retour. » En moins d’une heure, tique), manifester son opposition au remblaiement nucléaire de Loire-Atlantique, l’apolitisme n’est pas dicat SUD-PTT demande l’aban- les buffets dressés dans les jardins d’une zone humide de la Loire qu’EDF veut effectuer un vague à l’âme, mais un dogme farouchement re- don du processus de privatisation et aux étages n’offrent plus ni ca- pour pouvoir décider, le moment venu, d’implanter vendiqué : « La manifestation du Carnet de ce week- de France Télécom ; les militants napés ni boissons aux invités. Les une centrale électrique. Ce qui le choque ? Que l’on end, c’est un rassemblement de citoyens organisé hors du DAL (droit au logement) et bouteilles de vin sont désespéré- puisse envisager de saccager un site naturel sensible, des partis politiques pour lutter contre un projet de ceux de Droits devant ! réclament ment vides. Et il n’y a nulle trace simplement pour se garder un fer au feu, alors centrale nucléaire », explique son porte-parole, Pas- la réquisition des logements vides, de champagne. Çà et là, des qu’aucune décision de construction n’est prise. cal Braud. la régularisation des sans-papiers, groupes se forment, dans le sillage A midi, Patrick participait avec sa famille et ses en- A quelques centaines de mètres de là, plusieurs l’égalité d’accès à la justice, à des caméras, chacun espérant fants à la « chaîne humaine » déployée sur la rive groupes débarquaient pour organiser une « rave » la santé. « Nous ne donnons pas un apercevoir « Lionel », puisqu’il a sud de la Loire, à l’appel de la fédération antinu- avec leur sono, leurs groupes électrogènes et leurs chèque en blanc à la gauche, pré- promis de venir. En attendant, on cléaire de Loire-Atlantique. Pendant cinq minutes, « DJ », affolant les oiseaux dans les roselières voi- vient Micheline. Elle a la majorité. refait le monde, la France et son 20 000 à 30 000 personnes se sont tenu la main, bras sines. Là, il n’était plus question de centrale nu- On attend maintenant des résultats gouvernement. Y aura-t-il des mi- tendus, au long des quarante-sept kilomètres sépa- cléaire et encore moins de politique, mais de deux rapides ». Annie Pourre, une autre nistres communistes ? Et des éco- rant Corsept, près du pont de Saint-Nazaire, et jours et deux nuits de dance, et uniquement de militante du DAL, se veut pru- logistes ? Et Chirac, que va faire Saint-Jean de Boiseau, à l’ouest de l’agglomération dance. dente : « Le PS a aussi prouvé Chirac ? Chacun y va de son ana- nantaise. Les gendarmes ont compté 12 000 maillons qu’il est capable d’autocratie. lyse. Deux mots, reviennent dans humains à cette chaîne antinucléaire, ses organisa- Adrien Favreau Les mauvaises habitudes, ça se LeMonde Job: WMQ0306--0003-0 WAS LMQ0306-3 Op.: XX Rev.: 02-06-97 T.: 08:32 S.: 111,06-Cmp.:02,16, Base : LMQPAG 49Fap:99 No:0960 Lcp: 196 CMYK

LE SECOND TOUR DES ÉLECTIONS LÉGISLATIVES LE MONDE / MARDI 3 JUIN 1997 / 3 Robert Hue défend le principe d’une participation au gouvernement CETTE FOIS, les sourires sont nationale pour qu’il puisse créer Gayssot ont de nouveau rencontré sincères. On sert le champagne. son propre groupe. MM. Vaillant et Cambadélis Robert Hue est moins seul. « Per- Symboliquement, comme pour samedi. sonne, ce soir, ne va faire son Pierre montrer que le PCF aura désor- Le secrétaire national a toujours Juquin », commente dans un sou- mais son mot à dire à la gauche – été favorable à une participation rire un membre du comité national le PS n’a pas à lui seul la majorité ministérielle. Il n’a jamais envisagé au siège de L’Humanité, où l’on au Palais-Bourbon –, le secrétaire la formule italienne d’un simple fête, dimanche soir, la victoire de la national a devancé, dimanche soir, soutien, évoquée en revanche par gauche. Comme toujours, il y a l’heure prévue pour sa déclaration. l’ancien président du groupe beaucoup de journalistes étran- Cinq minutes après les résultats, communiste de l’Assemblée natio- gers, que M. Hue fascine. Les Ita- avant que Lionel Jospin ne nale, Alain Bocquet, qui fait ainsi liens sont des voisins compréhen- s’exprime de Cintegabelle, M. Hue, écho aux réticences de nombreux sifs, les Allemands éberlués : il faut entouré de ses proches, Pierre Blo- militants. leur expliquer pourquoi, en France, tin et Bernard Vasseur, du direc- Le bureau national du PC le communisme vit encore. Un teur de L’Humanité, Pierre Zarka, compte d’autres opposants à la rédacteur du Washington Post de Jean-Claude Gayssot, chargé participation, comme Annick Mat- agace M. Hue, brillamment élu à des négociations avec le PS, com- tighello (Nord) ou Maxime Gre- avec plus de 57 % des mente la « cuisante » défaite de la metz (Somme). Au secrétariat voix : « Franchement, est-ce que je droite et affirme qu’un « grand national, seuls Jean-Claude Gays- Le PS double le nombre de ses élus vous fais peur ? », sourit-il. espoir » s’est levé. sot (élu avec 67,4 % des voix) et La déception de la semaine pré- Marie-George Buffet (65 %) ont cédente semble oubliée : malgré QUELQUES RÉTICENCES tenté leur chance devant les urnes : ses contorsions arithmétiques, le « Je suis pour que les communistes ni Francis Wurtz, ni Jean-François dans quarante-quatre départements PC n’a pas dépassé les 10 % de suf- puissent contribuer à tous les Gau, ni Jean-Paul Magnon frages exprimés. Au second tour, niveaux des institutions, y compris n’étaient candidats à la députation. AVEC 268 ÉLUS – dont 245 socia- cluse), Alain Claeys (Vienne), Véro- en Corrèze, en Dordogne, dans le avec 37 députés, auxquels il faudra au gouvernement », indique claire- Patrick Braouezec, réélu député listes –, le Parti socialiste et les di- nique Neiertz (Seine-Saint-Denis). Haut-Rhin (par contraste avec le ajouter le maire de Montreuil, ment M. Hue, en précisant qu’il de Seine-Saint-Denis (70 % des vers gauche font plus que quadru- En dehors des huit socialistes qui, Bas-Rhin où seule Catherine Traut- Jean-Pierre Brard (CAP), et au faudra que, « très vite, des mesures voix), a indiqué dimanche soir qu’il pler le nombre de sortants seuls en lice, ont été élus avec 100 % mann est élue, de justesse), dans les moins un élu apparenté des DOM- soient prises ». « La gauche se doit est « favorable » à l’entrée de (56 membres et 7 apparentés). Pour des exprimés le 1er juin, Lionel Jospin Yvelines, dans le , dans la TOM, le PC réalise un joli tour de de répondre aux attentes de notre ministres communistes dans un autant, ils ne retrouvent pas les arrive en vingt-deuxième position Vienne. Il grimpe de zéro à trois force. peuple. Il faut, pour cela, faire le gouvernement Jospin. « Il ne suffit 276 élus de 1988 qui lui avaient don- parmi les mieux élus avec 63,37 % dans la Drôme, dans l’Eure, dans le Pour la première fois depuis choix d’une politique radicalement pas d’un ravalement de façade. né une majorité relative. Mais avec en Haute-Garonne. Gard, dans la Sarthe, en Seine-et- 1978, il ne réduit pas sa représenta- nouvelle, résolument à gauche », Pour vraiment réussir à gauche et les 7 élus du Mouvement des ci- (72,91 %, Seine-Maritime) trône en Marne, dans la Somme, dans le Val- tion parlementaire. Il atteint son insiste-t-il, en jugeant que, sur la changer quelque chose à cette toyens et les 8 Verts et écologistes, il première place des dix mieux élus d’Oise. Il passe de zéro à quatre meilleur score depuis 1981 base de la déclaration commune société, le pluralisme sera néces- atteint 282 élus auxquels s’ajoute- devant Augustin Bonrepaux (69,9 %, dans le Doubs, et de zéro à cinq (44 députés) et efface l’inconfor- PS-PCF, « c’est possible ». Il indique saire », a expliqué le maire de ront pour constituer la majorité «de Ariège), Bruno Le Roux (68,04 %, dans l’Hérault, en Moselle, dans le table souvenir de 1993, lorsque, qu’il « a fait ces derniers jours des Saint-Denis. changement » chère à Lionel Jospin Seine-Saint-Denis), Véronique Puy-de-Dôme. Sa progression est avec 24 députés, il avait fallu modi- propositions en ce sens à Lionel Jos- les 37 communistes, à la différence Neiertz (67,94 %, Seine-Saint-De- de un à trois dans l’Aisne, l’Ille-et- fier le règlement de l’Assemblée pin et au PS » : MM. Blotin et Ariane Chemin de 1988 où les 27 communistes nis), Alain Rodet (67,69 %, Haute- Vilaine, l’Indre-et-Loire, les Pyré- étaient restés en dehors de la majo- Vienne), Jean-Pierre Balligand nées-Atlantiques, les Pyrénées- rité. (67,32 %, Aisne), Jean-Marc Ayrault Orientales, la Saône-et-Loire, le Pour M. Jospin, qui avait toujours (66,73 %, Loire-Atlantique), Michel Tarn, le Val-de-Marne, de un à Les Verts, le PRS et le MDC songent à former un groupe assuré que, même en cas de majori- Liebgott (66,39 %, Moselle), Jean- quatre dans le Calvados, les Côtes- té absolue pour le seul PS, le gou- Claude Bateux (65,28 %, Seine-Ma- d’Armor, l’Oise, le Rhône. POUR la première fois, les Verts gouvernement devrait y être large- tions risquent en revanche d’être vernement devrait refléter toutes les ritime) et Bernard Seux (64,91 %, D’autres progressions sont encore entrent à l’Assemblée nationale. Et ment approuvé. Seule l’aile plus difficiles avec le Mouvement composantes de cette gauche « plu- Pas-de-Calais). plus fortes : il double ses élus dans pas subrepticement. L’écologie « gauche » du mouvement, emme- des citoyens. rielle », le succès du premier tour les Bouches-du-Rhône (4), passe de peut en effet compter sur huit élus née par Philippe Boursier, candidat « Les Verts et le MDC ont chacun s’est transformé en une victoire DÉCEPTIONS un à six dans le Finistère, en Haute- au total, dont six appartiennent à malchanceux en Vendée contre intérêt à constituer un groupe pour dont le mérite lui revient largement. En revanche, le PS enregistre plu- Garonne, de un à huit à Paris, de la formation de Dominique Voy- , avait en effet préserver les différences », a déclaré Pour autant, cet événement ne se sieurs déconvenues avec les échecs deux à cinq en Isère et en Meurthe- net, tandis que deux autres, Noël exprimé des réticences. Forts de Jean-Pierre Chevènement. Le traduit pas par une nouvelle vague de Bernard Poignant dans le Finis- et-Moselle, de deux à six en Loire- Mamère, président de Conver- leur entrée à l’Assemblée, les res- MDC compte désormais sept dé- rose. Le PS seul compte, en métro- tère, de Marie-Noëlle Lienemann, Atlantique, de deux à huit en Gi- gence Ecologie Solidarité (CES), et ponsables des Verts plaident pour putés – quatre sortants et trois pole, 189 élus, 50 réélus mais aussi dans l’Essonne – ce qui renforce la ronde, de trois à quinze dans le Michèle Rivasi, militante antinu- un gouvernement de coalition, in- nouveaux – et veut également faire deux battus (Jean-Marc Salinier et déception de la gauche socialiste Nord, de cinq à onze dans le Pas-de- cléaire, en sont proches. « C’est tégrant la sensibilité écologiste et entendre sa voix. Le maire de Bel- Michel Berson dans l’Essonne). avec les défaites de Laurence Ros- Calais. Il emporte tous les sièges l’aboutissement d’une stratégie allant du Parti radical-socialiste au fort n’a pas attendu la formation Trois secrétaires nationaux de signol dans l’Oise et de Harlem Dé- dans neuf départements : Ariège, d’ouverture qui date de dix ans », Parti communiste. du gouvernement pour exiger «un l’équipe Jospin se trouvent égale- sir, à peine compensées par la réé- Aude, Charente, Gers, Landes, Lot- s’est félicité , l’initia- La formation de Mme Voynet en- mémorandum sur la construction ment battus : Adeline Hazan lection de Julien Dray dans et-Garonne, Meuse, Nièvre, Haute- teur de ce rapprochement avec le tend défendre sa spécificité après européenne », rappelant que « les (Marne), Harlem Désir (Seine-Saint- l’Essonne et l’élection de Yann Galut Vienne. En revanche, dans dix-neuf PS. « L’alliance rose, rouge, verte a le second tour. Elle se veut aiguil- quatre conditions mises par le Parti Denis) et, dès le premier tour, Ma- dans le Cher –, de Jean-Pierre Sueur, départements, il n’a aucun élu : bien fonctionné », a souligné, pour lon, notamment sur la réduction socialiste lui-même à l’entrée en vi- nuel Valls (Val-d’Oise). Autour de dans le Loiret, et de Jean-Paul Hu- Alpes-Maritimes, Aube, Aveyron, sa part, Dominique Voynet, porte- immédiate du temps de travail. Di- gueur de la monnaie unique doivent Lionel Jospin, dix secrétaires natio- chon, dans les Yvelines. L’ancien Cantal, Corse-du-Sud, Haute-Corse, parole nationale, qui a été élue manche soir, Mme Voynet réclamait être tenues strictement ». Pour naux sont élus : Laurence Dumont trésorier du PS, André Laignel, est Jura, Haute-Loire, Loiret, Maine-et- avec 55,95 % des voix à Dole (Jura). des « changements rapides et de constituer un groupe parlemen- (Calvados), François Hollande (Cor- aussi battu dans l’Indre. Loire, Marne, Haute-Marne, Les Verts devaient convoquer grande ampleur » après la victoire taire, le MDC doit rallier à sa cause rèze), (Doubs), Dans quarante-quatre départe- Mayenne, Orne, Haute-Saône, Sa- comme prévu, lundi 2 juin, leur de la gauche. Pour ne pas être ré- au moins treize députés, objectif Bernard Roman (Nord), Daniel Vail- ments, le PS double au moins son voie, Haute-Savoie, Vendée et conseil national interrégional duits au seul rôle de force d’ap- qu’il dit pouvoir atteindre avec lant et Jean-Christophe Cambadélis nombre d’élus. Il passe de zéro à Hauts-de-Seine. (CNIR), qui se réunira à huis clos point, les Verts réfléchissent à des l’appui de députés d’outre-mer. à Paris, Frédérique Bredin (Seine- deux députés en Ardèche, dans les afin de définir leur stratégie. Le alliances avec d’autres partenaires Verts, MDC, PRS et divers Maritime), Elisabeth Guigou (Vau- Ardennes, en Charente-Maritime, Michel Noblecourt principe d’une participation au en vue de constituer un groupe gauche, qui représentent au total parlementaire autonome. Des 35 élus, entendent profiter de l’ab- contacts vont être pris avec les ra- sence de majorité absolue du PS dicaux de gauche (les treize élus pour faire avancer leurs idées. Nul de la victoire était « Hitchcock » PRS) qui, comme les écologistes, doute que le PS suivra avec atten- ont passé un accord programma- tion les discussions tactiques au- reprend très vite. » « Nous ne nous commente le leader trotskiste de la pour attendre, tout de même, l’ar- j’allais abolir la chasse, la pêche. » tique et électoral avec le PS. Après tour de la constitution d’un éven- fondrons pas dans leur fête, ex- Ligue communiste révolutionnaire, rivée du futur nouveau premier Elle évoque les voix du Front na- la défaite de Jean-Luc Bennah- tuel groupe parlementaire. plique Jean-Claude Amara, le fon- Alain Krivine. ministre. tional et le quartier qu’on appelle mias, candidat en Seine-Saint-De- dateur de Droits devant ! Que la Derrière une large banderole Dès 19 heures, à Dole, les pre- « le ghetto », car « un mur passe au nis, qui assurait la liaison avec « la Alain Beuve-Méry gauche soit heureuse d’avoir rem- rouge s’approchent Marina Vlady, miers résultats sont tombés. Assez milieu ». « Beaucoup de ceux qui gauche de la gauche », les tracta- et Caroline Monnot placé une droite stupide et brutale, Léon Schwartzenberg, Mgr Gaillot tangents d’abord, puis de plus en votent Front sont plus désespérés que c’est bien. Mais dès ce soir la gauche – « La gauche est condamnée à plus favorables à Dominique Voy- d’extrême droite, ils veulent qu’enfin doit savoir qu’on la surveille. » A ses réussir », dit-il –, Maya Surduts, net. Au siège des Verts, Didier Cha- quelque chose se passe. » yeux, il faut abroger sans attendre responsable du collectif pour les teau, conseiller municipal, compta- les lois Pasqua-Debré. L’un des di- femmes. La foule demande encore bilise les voix : « Quelle claque il LA VISITE DE MAZARINE rigeants de SUD-PTT, Pierre Khal- l’abrogation des lois Debré-Pas- prend, le Barbier ! » Gilbert Barbier Lui parle-t-on d’un avenir minis- fa, voit dans la victoire de la qua. Une tribune improvisée ac- (UDF-AD) est maire de Dole. La tériel, elle contient un certain aga- gauche « un effet différé du mouve- cueille les chefs de file des mouve- porte-parole des Verts arrive en fa- cement : « J’ai trente-huit ans, ça va ment social de 1995 ». Et de rappe- ments associatifs. Sono à fond : les mille, prend connaissance des vite pour moi. Vivre ce qu’a vécu La- ler que la seule garantie des sala- socialistes ne pourront pas dire chiffres et soulève sa fille : « On a londe, j’ai pas envie. Si on veut que riés est le rapport de forces qu’ils qu’ils n’ont pas entendu le mes- gagné, Jeannette ! » Les caméras et la gauche et les écologistes ensemble peuvent créer. Ce qu’ils ont fait, ils sage. « Tenez vos promesses ! », crie les micros l’engloutissent, elle changent quelque chose, il ne faut pourront le refaire, au cas où... Léon Schwartzenberg sous les vi- parle du rouge, du rose et du vert pas qu’il y ait de parti godillot, aux « La gauche a peur de la dynamique vats. Ce cortège repart ensuite vers qui vont si bien ensemble. « On a ordres. » Elle replonge dans la de la victoire. Nous sommes séparés l’Odéon avant de se disperser ou vécu une semaine incroyable. Des foule qui l’attend, elle embrasse d’elle par des grilles et des CRS », de revenir par petits morceaux tracts dégueulasses. On disait que des tas d’enfants. Avant minuit, Mazarine Pingeot, la fille de François Mitterrand, tente une entrée sur la pelouse de Les syndicats entendent faire pression la Maison de l’Amérique latine. Elle fait vite demi-tour, se cachant LES ORGANISATIONS syndi- par la fédération SUD-PTT, selon hausses de salaires afin de relancer le visage devant l’assaut des pho- cales n’ont pas attendu la formation laquelle « il appartient à la nouvelle l’activité économique et le niveau tographes. Laurent Fabius repart d’un nouveau gouvernement pour majorité de tenir ses engagements ». de production nationale. sous les vivats. « C’est pas ta vic- livrer leurs réactions et leurs at- « Dès lundi, dans les services, SUD- La CFTC a appelé à « une dé- toire, mon bonhomme, c’est celle de tentes. Elles ont appelé à « prendre PTT organisera des réunions du per- marche de négociation et de partici- Lionel », lance néanmoins un mili- à bras le corps la question sociale » sonnel pour débattre de la nouvelle pation, avec l’emploi comme priorité tant. apparaît et sont prêts à « maintenir la pres- situation et des initiatives à absolue ». L’Union nationale des peu avant que la pluie oblige la sion » pour que la nouvelle majorité prendre », prévient le syndicat, qui syndicats autonomes (UNSA) a as- foule à quitter le jardin. A 1 h 15, respecte ses engagements. «Le « prendra toutes les initiatives pour signé « un impératif » au prochain Lionel Jospin est annoncé. Lionel mouvement social ne doit pas regar- que le mouvement social puisse faire gouvernement : « Traiter d’urgence Jospin arrive. Les militants l’ova- der passer les trains », a averti Louis entendre sa voix ». L’Union syndi- la question sociale », et demandé tionnent. Ils crient : « Lionel au bal- Viannet, tandis que Marc Blondel a cale-Groupe des dix appelle la nou- « la fin du gel des salaires aussi bien con!»Lionel va au balcon. Il ne dit indiqué qu’il ira « porter les revendi- velle majorité à mettre en œuvre dans le secteur public que le secteur rien, part puis revient. « Je ne vais cations [de FO] au gouvernement » « des mesures rapides et efficaces privé », ainsi qu’une « forte réduc- pas rajouter des déclarations à dès que celui-ci sera formé. contre le chômage, les précarités et tion du temps de travail ». Pour la d’autres déclarations. (...) C’est une Dimanche soir, sur TF 1, le secré- les inégalités », notamment par la FEN, « la nouvelle majorité doit re- chance historique qui est donnée à taire général de la CGT a demandé réduction du temps de travail. donner la priorité à l’éducation ». la gauche de diriger le pays. » La l’arrêt immédiat du processus de Pour M. Blondel, la défaite de la Seules la CFDT et la CFE-CGC soirée s’achève. Dehors, sur le privatisation en cours de France Té- droite aux élections est « l’expres- n’ont pas immédiatemment réagi boulevard Saint-Germain, la fête lécom et de Thomson. Selon sion de la fracture sociale ». A la aux résultats des élections légis- continue. M. Viannet, ces « dossiers brûlants » conférence salariale que les socia- latives. appellent « des mesures immé- listes ont prévu de convoquer, Force Récit des services diates ». Sur ce point, il a été rejoint ouvrière entend demander des A. B.-M. France et Société LeMonde Job: WMQ0306--0004-0 WAS LMQ0306-4 Op.: XX Rev.: 02-06-97 T.: 09:41 S.: 111,06-Cmp.:02,15, Base : LMQPAG 46Fap:99 No:0870 Lcp: 196 CMYK

4 / LE MONDE / MARDI 3 JUIN 1997 LE SECOND TOUR DES ÉLECTIONS LÉGISLATIVES Jacques Chirac compte remettre en ordre la droite autour de lui Sans tarder, lundi 2 juin au matin, l’Elysée a pris contact avec Lionel Jospin pour organiser sa nomination comme premier ministre après la démission d’Alain Juppé. La présidence minimise les « rodomontades » des responsables de la nouvelle opposition critiquant le chef de l’Etat Le président de la République s’attendait à fonctions de premier ministre. Les résultats dimanche soir avec M. Juppé, ainsi qu’avec mier ministre après avoir reçu la démission firme confiante dans la remise en ordre de la défaite de la majorité sortante depuis le du second tour n’ont donc pas surpris l’Ely- Philippe Séguin et René Monory. Il a décidé de M. Juppé. La passation des pouvoirs la nouvelle opposition autour du chef de premier tour des élections législatives, le sée, malgré l’espoir d’un « sursaut », cares- très vite de prendre contact avec Lionel Jos- était prévue lundi après-midi. La prési- l’Etat, quelles qu’aient pu être, dimanche 25 mai, qui l’avait obligé à demander à sé dans les tout derniers jours de la cam- pin, lundi à la première heure, et de le rece- dence de la République estime toujours jus- soir, les « rodomontades » de ceux qui ont Alain Juppé d’annoncer qu’il quitterait ses pagne. Jacques Chirac s’est entretenu voir en fin de matinée pour le nommer pre- tifiée la dissolution de l’Assemblée et s’af- mis en cause implicitement M. Chirac.

TOUT EST ALLÉ très vite, lundi mier ministre travailliste britan- depuis le dimanche noir du 25 mai marquait l’échec de la stratégie de La victoire de la gauche, di- Paris, pourrait être l’un des pre- matin 2 juin, à l’Elysée. Dès 8 h 30, nique, Tony Blair. De retour de Sar- n’avait été anticipé. On attendait un la dissolution, dont l’un des princi- manche soir, a ouvert une autre miers à faire les frais de cette réor- le secrétaire général, Dominique de ran, en Corrèze, où il était allé premier tour médiocre, il s’est révé- paux objectifs était, justement, la boîte de Pandore, dont la soirée té- ganisation. Villepin, a appelé le premier secré- voter, en compagnie de son épouse, lé terriblement sévère pour la majo- reconduction à Matignon d’un pre- lévisée a donné les prémices. A Quant aux batailles ouvertes, dès taire du PS, Lionel Jospin, pour il avait retrouvé ses collaborateurs rité sortante, contraignant M. Jup- mier ministre puisant dans la vic- l’Elysée, on n’a pas manqué d’en- 20 heures et quelques secondes, di- convenir d’un rendez-vous avec le à l’Elysée en début d’après-midi. pé à annoncer, dès lundi, qu’il toire une nouvelle légitimité. Le tendre la plupart des ténors du RPR manche, au sein du RPR, pour ten- président de la République, en fin Peu après 17 heures, ils ont su, n’était pas le futur premier mi- soutien affiché de M. Chirac au et de l’UDF ouvrir l’heure des règle- ter de s’approprier la rue de Lille, de matinée. De son côté, Alain Jup- grâce aux premières estimations nistre. A la veille du deuxième tour, nouveau « ticket » Philippe Séguin- ments de compte. En plus de la ges- on affirme ne pas les prendre trop pé est arrivé vers 9 heures pour pré- dont ils disposaient, que le pari lan- samedi en fin d’après-midi, on vou- , à partir de mardi, tion de ses relations avec la nou- au sérieux, en rappelant que, très senter la démission de son gouver- cé le 21 avril était perdu. « La disso- lait encore croire à un sursaut des dissimulait mal, en effet, les ré- velle majorité socialiste, M. Chirac vite et malgré « les rodomontades », nement. Avant midi, M. Jospin lution s’imposait. Nous voulions pas- électeurs de droite et à une inver- serves qu’il suscitait au plus haut ni- va devoir faire face à deux fronts : l’opposition aura besoin de se re- devait être nommé premier mi- ser une nouvelle étape et il fallait, sion de tendance dont, paraît-il, té- veau de l’Etat. L’on ne cachait les attaques qui visent son entou- mettre en ordre de marche derrière nistre, et la passation de pouvoirs pour cela, redonner la parole aux moignaient les derniers sondages guère, non plus, l’amertume ressen- rage, dont au premier chef, le secré- le président de la République. entre M. Juppé et lui était prévue Français car on ne peut pas gouver- qualitatifs parvenus à l’Elysée. tie à l’égard de certaines personna- taire général de l’Elysée. Et, au sein M. Chirac a en effet tranché très dans l’après-midi. Le chef de l’Etat ner sans leur aval. Pendant deux ans, lités de la majorité auxquelles on du RPR, celles qui visent le pré- vite le débat qu’il avait lui-même n’envisageait pas de s’exprimer Alain Juppé a mené une politique dif- ÉCHEC D’UNE STRATÉGIE reprochait d’avoir un peu trop at- sident du mouvement néo-gaul- entrouvert, le 6 novembre 1994, dans la journée de lundi. ficile. Ça ne rend pas populaire », Mais même si l’on pensait encore tendu pour se battre. Tout se pas- liste, M. Juppé. On dit ne s’inquiéter lorsque, invité de « 7 sur 7 », il avait Les réunions et les coups de télé- observait-on, dimanche soir, dans possible de sauver d’extrême jus- sait dès lors comme si, quelle que ni des unes, ni des autres. Pour af- observé qu’en cas de victoire de la phone se sont succédé, dimanche, à l’entourage du chef de l’Etat. tesse la majorité, la vraie défaite, soit l’issue du scrutin, l’Elysée se fronter la cohabitation, une équipe gauche aux législatives, il serait l’Elysée, jusque très tard dans la soi- Officiellement, les crises et les pour M. Chirac, avait été signée le préparait à une forme de cohabita- plus resserrée pourrait être mise en « amené à réfléchir très sérieusement rée. Jacques Chirac s’est entretenu, mauvaises nouvelles qui pleuvent 26 mai. L’obligation dans laquelle tion, institutionnelle et politique place autour de M. de Villepin. sur les raisons qui ont amené le géné- notamment, avec Philippe Séguin, depuis une semaine n’entament pas s’est trouvé le chef de l’Etat de de- avec M. Jospin, officieuse mais Jean-Pierre Denis, secrétaire géné- ral de Gaulle à se retirer en 1969 ». Alain Juppé et René Monory. Il a la sérénité des troupes de l’Elysée. mander à M. Juppé d’annoncer pré- peut-être tout aussi compliquée ral adjoint de l’Elysée, l’un des également reçu un appel du pre- Pourtant, rien de ce qui s’est passé maturément son remplacement avec M. Séguin. chiraquiens venus de la Mairie de Pascale Robert-Diard Une stricte lecture de la Constitution Les hauts fonctionnaires européens sont sereins LA COHABITATION, c’est tout à tion trouve une justification dans pouvait être modifié que selon la la fois un retour au texte formel de l’article 15 de la Loi fondamentale, même procédure, a accru le droit de Pour Bruxelles, les « conditions » socialistes sont acceptables la Constitution de 1958 et une en- qui indique que « le président de la regard de l’hôte de l’Elysée. torse à la pratique institutionnelle République est le chef des armées », Pour les nominations, il en va de L'Europe à gauche de la Ve République. Les deux expé- et dans son article 52, qui prévoit même. Le pouvoir général appar- riences qu’a vécues François Mitter- qu’il « négocie et ratifie les traités ». tient au premier ministre, le pré- Après la victoire des socialistes en France et celle des travaillistes en Grande-Bretagne, la gauche dirige dix rand, avec Jacques Chirac de 1986 à Il est un domaine comparable, qui a sident de la République n’en dispo- des quinze gouvernements de l'Union européenne, six toute seule, quatre autres à la tête de coalitions avec 1988 et avec Edouard Balladur de eu peu d’influence dans les deux sant que dans les cas où le choix des partis centristes ou conservateurs. Elle est représentée au total dans treize gouvernements européens. La droite gouverne en Espagne et en Allemagne. En Belgique, au Luxembourg et en Irlande, elle partage 1993 à 1995, ont dressé un cadre ju- premières expériences, mais qui doit être fait en conseil des mi- le pouvoir avec des socialistes. (Pour chaque pays, pourcentage obtenu par le principal parti de gauche). ridique précis, qui devrait servir de pourrait en avoir beaucoup cette nistres. Ils sont strictement limités, référence. fois : la justice. L’article 64 prévoit, par la Constitution, par une loi or- La gauche ... seule au pouvoir , dirige une coalition, participe à une coalition, Apparemment, les choses sont en effet, que le chef de l’Etat « est ganique et par un décret pris pour SUÈDE PAYS-BAS IRLANDE simples. « Le gouvernement déter- garant de l’indépendance de l’auto- son application. Au fil des ans, le Parti social. démocr. / 1994 45,4% LABOUR /1992 19,3% mine et conduit la politique de la na- rité judiciaire ». nombre de postes devant être ainsi Pvd A P. travailliste /1994 24% LUXEMBOURG tion », proclame l’article 20 de la pourvus n’a fait que croître. PORTUGAL DANEMARK Parti socialiste / 1995 43% POSL /1994 24,8% Constitution, dont l’article 21 pré- POUVOIRS PARTAGÉS M. Chirac, au cours de la campagne Parti social-dém. /1994 34,6% BELGIQUE cise : « Le premier ministre dirige Tout est plus compliqué pour les présidentielle, avait promis de le ré- GRÈCE 41,5% AUTRICHE Parti socialiste /1995 24,5% l’action du gouvernement. » Ces pouvoirs partagés. Il en va ainsi duire considérablement. Il n’en a Pasok / 1996 SPÖ /1995 38,3% ITALIE dans l'opposition. deux principes qui, dans les faits, pour le choix des ministres. Théo- rien fait, préservant ainsi une des 21,1% FINLANDE n’ont pas cours quand l’hôte de riquement, ils sont nommés par le prérogatives d’un président cohabi- PDS / 1996 Parti social-dém. /1995 28,3% ALLEMAGNE Matignon est du même camp poli- président de la République « sur la tant. GRANDE-BRETAGNE 36,4% tique que celui de l’Elysée, re- proposition » du chef du gouverne- Pour les autres signatures prési- Parti travailliste /1997 43,2% SPD /1994 prennent toute leur force pendant ment. En 1986, François Mitterrand dentielles, il n’y a plus de vrais dé- FRANCE ESPAGNE une cohabitation. Le chef de l’Etat en avait déduit qu’il pouvait exercer bats. Le chef de l’Etat « promulgue Parti socialiste /1997 38,85% PSOE /1995 37,5% n’est pas, pour autant, réduit à une une sorte de droit de veto sur le les lois dans les quinze jours » suivant présidence-potiche. D’abord, il choix de ceux qui auraient à gérer la leur vote définitif, précise la Consti- BRUXELLES rieurs, renchérit un haut fonction- d’équilibrer les pouvoirs de la conserve les pouvoirs que la Consti- défense et les affaires étrangères. tution. Même si de nombreux ju- de notre correspondant naire de la Commission, n’oublient banque centrale européenne, dont tution lui a confiés en propre : l’ar- C’est aussi, de par la Constitution, ristes le contestent, il est probable Les milieux communautaires en- pas que ce sont les socialistes qui on redoute à Paris qu’elle ne né- ticle 16, en cas de menace grave le chef de l’Etat qui préside le que le refus de François Mitterrand visageaient sans véritable inquié- ont signé le traité de Maastricht. glige les exigences de la croissance pour les institutions ou l’indépen- conseil des ministres. Il est acquis de signer trois , prises tude une victoire de la gauche aux Les socialistes se montrent plutôt et de l’emploi. dance de la nation ; la dissolution que c’est lui qui en fixe l’ordre du par le gouvernement Chirac en ver- élections législatives, considérant favorables à une appréciation « en Les Français comprendront vite de l’Assemblée nationale, mais il ne jour, mais il ne le fait qu’après dis- tu d’une délégation de pouvoir du qu’elle ne remettrait pas fonda- tendance » des critères du traité et, qu’ils seraient complètement isolés peut pas le faire dans l’année qui cussion avec le secrétaire général du Parlement, fera « jurisprudence ». mentalement en cause l’orientation en particulier, de ceux concernant s’ils demandaient de modifier les suit une première dissolution ; l’en- gouvernement, voire avec le pre- La cohabitation, en revanche, européenne de la politique fran- la réduction des déficits publics et termes du « pacte de stabilité », voi d’un message au Parlement. mier ministre lui-même en cas de rend difficilement utilisables deux çaise ni, singulièrement, l’engage- de la dette. M. Kohl et Theo Wai- adopté en décembre par le Conseil Théoriquement figure aussi dans difficultés. François Mitterrand instruments de la Constitution : le ment sur la monnaie unique. Le gel, son ministre des finances, jus- européen à Dublin, et dont l’objet cette liste la nomination du premier avait obtenu ainsi le report de no- référendum et la révision constitu- seul souci exprimé portait sur le qu’ici partisans de la plus stricte or- est de garantir sur le long terme la ministre, mais, politiquement, il ne minations ou de décrets qui ne lui tionnelle. Le président de la Répu- poids des communistes dans la thodoxie, mais rattrapés par une discipline budgétaire. En revanche, peut le choisir que dans la majorité convenaient pas. blique ne peut user du premier que nouvelle majorité et la crainte de se conjoncture maussade, semblent rien n’empêche de mieux organiser parlementaire et il est même pra- Le pouvoir du chef de l’Etat est sur proposition du gouvernement retrouver face à un gouvernement prêts à les rejoindre : compte tenu la coordination des politiques tiquement contraint de désigner ce- pourtant, en la matière, limité. ou sur celle, « conjointe, des deux faible dans le cas où les socialistes du niveau de chômage, du refus ca- économiques des pays de la zone lui qu’elle veut voir siéger à Mati- Même si les juristes débattent à sa- Assemblées ». Le second nécessite, auraient besoin de leurs voix à l’As- tégorique opposé par les libéraux, « euro », comme l’exige d’ailleurs gnon. tiété pour déterminer s’il a l’obliga- de fait, un accord entre le Sénat, semblée nationale. membres de la coalition, à toute l’article 103 du traité. « C’est le bon Au-delà de cette lecture stricte de tion ou non de signer les décrets dé- l’Assemblée nationale et le chef de Personne ne néglige, bien sûr, le augmentation d’impôts, ils n’ont sens même que les ministres des fi- la Constitution, il y a une pratique libérés en conseil des ministres, l’Etat. Cet accord, lorsque la gauche volontarisme exprimé par les pas d’autre choix s’ils veulent assu- nances disposant d’une monnaie qui n’est pas mise en cause par la François Mitterrand avait probable- ne détient qu’un seul de ces trois forces de gauche en matière d’em- rer vaille que vaille le respect de la unique se concertent davantage », cohabitation. Ainsi, ni M. Chirac ni ment créé un précédent en ne refu- lieux de pouvoirs, ne peut être ob- ploi et de politique sociale – et, sur date du 1er janvier 1999. commente un banquier belge. M. Balladur n’avaient contesté le sant jamais sa signature en bas d’un tenu qu’au terme d’un bras de fer ce thème, s’agissant de l’action à La prochaine échéance euro- rôle particulier de François Mitter- tel texte. Cependant, le Conseil politique. mener au niveau européen, on CRITÈRES DE MAASTRICHT péenne se situe les 16 et 17 juin à rand en matière de politique étran- d’Etat, en décidant en 1992 que tout peut s’attendre à quelques remous, « C’est incroyable de voir com- Amsterdam. Les chefs d’Etat et de gère et de défense. Cette concep- décret signé par le chef de l’Etat ne Thierry Bréhier notamment avec les Allemands –, ment la Bundesbank et le gouverne- gouvernement devraient alors mais l’attention des partenaires de ment s’égorgent mutuellement. Il est conclure la CIG. Jacques Chirac et la France porte principalement sur impensable qu’on ne trouve pas un le premier ministre socialiste, qui le sort de l’Union économique et compromis. Dans un conflit de ce représenteront la France, retarde- « Sale journée » à Roland-Garros monétaire (UEM). genre, les Allemands sont toujours ront-ils l’accord s’ils en estiment le Sauf présentation particulière- derrière la Bundesbank », se la- contenu insuffisant, notamment LA FRANCE est coupée en deux jusque dans les un socialiste au village ? », raillent deux jeunes ment maladroite, ils ne rejetteront mente l’ambassadeur déjà cité. En celui du nouveau chapitre du traité travées de Roland-Garros, où téléphones et transis- hommes déçus, avant de revenir aux choses sé- pas a priori les conditions posées résumé, Français et Allemands, sur l’emploi ? Certains n’écartent tors portables avaient exceptionnellemment rem- rieuses : « Demain, mes actions vont chuter de par le PS au lancement de l’euro. quelle que soit leur volonté, désor- pas une telle éventualité, mais pas placé les paires de jumelle, dimanche 1er juin en fin 500 balles », s’emporte l’un d’eux. La version qu’en a proposée mais commune, de considérer avec forcément pour s’en désoler. Après d’après-midi. En haut des tribunes du court central, n’a choqué per- une certaine souplesse les critères deux ans de travaux, la CIG est en les spectateurs attendent sagement l’heure dite LE CHAMPAGNE AU FRIGO sonne. Elles paraîtront d’autant de Maastricht, n’auront pas les train d’accoucher d’une souris, et pour obtenir les premiers résultats des élections sur Un jeune homme en tenue d’employé de l’entre- moins sulfureuses que les ratés de mains libres. En avril 1998, lorsque plusieurs pays partenaires ne se- leur baladeur ou sur leur téléphone. Plus bas, dans tien lance à la cantonade un énigmatique « Faites la consolidation budgétaire en Al- sera établie la liste des pays quali- raient pas fâchés si le président de les loges disposées au ras du terrain sur lequel Mary marcher la planche à billets ». Un passant joue l’af- lemagne et le conflit qui en résulte fiés pour l’euro, les marchés se re- la République et le nouveau pre- Pierce donne la réplique à Monica Seles, quelques folement : « L’année prochaine, c’est la grève ! » Sur entre la Bundesbank et le chance- belleraient si les gouvernements, mier ministre s’entendaient pour personnalités pressées cherchent à devancer l’ap- l’un des rares stands ouverts de l’allée centrale, l’hô- lier Helmut Kohl plaident pour une pour passer en force, faisaient donner un sérieux coup de pied pel. Dès 19 heures, chaque interruption du match tesse range sa bouteille de champagne au frigo. La relecture du traité plutôt favorable preuve de laxisme. Le volontarisme dans la fourmilière. est pour elles l’occasion de faire jouer une relation, fête n’aura pas lieu. aux thèses françaises. D’une cer- socialiste n’élimine pas la puis- de solliciter au téléphone un ami bien placé : « J’ap- Sur le court central, Mary Pierce est en mauvaise taine manière, ces tensions germa- sance déterminante des marchés ! Philippe Lemaître pelle la sœur d’un ami qui travaille au Nouvel Obs », posture. Elle a perdu le premier set et, à 20 heures no-allemandes ou, même, l’atti- L’Italie figurera-t-elle sur la liste précise l’un de ces initiés de l’information qui, esti- tapantes, elle doit défendre son service pour ne pas tude restrictive des nouveaux des élus, comme le réclame Paris ? mations en tête, s’en va porter la nouvelle jusqu’au être définitivement distancée. A ce moment du dirigeants britanniques dans la Personne n’est exclu, répond-on, « village ». match, une partie du public soutient distraitement conférence intergouvernementale en ajoutant qu’on avisera le mo- Dans les tentes des partenaires du tournoi, pra- sa favorite, l’oreille collée qui au téléphone, qui au (CIG) chargée de reviser le traité de ment venu. C’est le moment venu tiquement désertes, l’attente est résignée. Chez La- casque du baladeur, retenant son souffle. Elle prend Maastricht préoccupent davantage aussi, et en fonction du marché, coste, deux téléviseurs ont été allumés. L’un montre tout son temps : trop au goût de l’arbitre, qui lui in- que le changement de gouverne- que s’établira la parité de l’euro par la fin du match de tennis, sans le son, pendant que flige un avertissement. Lorsque la dernière Fran- ment en France. rapport au dollar. Y aura-t-il un l’autre est branché sur France 3. On scrute les vi- çaise en compétition a fini son point, la nouvelle de « Fondamentalement, ils sont pro- problème avec les Français ? La sages des présentateurs pour confirmer ce qu’on la victoire de la gauche se répand peu à peu dans les européens » : ce raccourci d’un di- crainte est balayée quasi unanime- pressent. « Regarde bien à droite de l’écran, à tribunes, mais sans jamais perturber le match. Mal- plomate belge, qui rappelle que ment à Bruxelles : personne, af- gauche on s’en fout ! », dit une dame au moment où gré une « ola » électrique destinée à la relancer, Jean-Luc Dehaene, le premier mi- firme-t-on, ne plaide pour un euro doivent apparaître les « camemberts » illustrant les Mary Pierce rend les armes, en deux sets. « J’en ai nistre belge, a fort bien travaillé fort par rapport au dollar. Il devrait projections en sièges. Même attendus, ces résultats marre, c’est vraiment une sale journée ! », soupire avec François Mitterrand, résume être possible de trouver sans diffi- font l’effet d’une douche froide : « Ils sont fous ! » ; une de ses fans doublement déçue. les raisons du calme avec lequel culté majeure un compromis sur la « Qu’est-ce qu’on va faire de nous ? » ; « Les Français promettait d’être accueilli le vote demande de la France d’un « gou- ne savent vraiment pas ce qu’ils veulent... » « Y a-t-il Eric Collier français. Les observateurs exté- vernement économique » afin LeMonde Job: WMQ0306--0005-0 WAS LMQ0306-5 Op.: XX Rev.: 02-06-97 T.: 08:09 S.: 111,06-Cmp.:02,15, Base : LMQPAG 46Fap:99 No:0871 Lcp: 196 CMYK

LE SECOND TOUR DES ÉLECTIONS LÉGISLATIVES LE MONDE / MARDI 3 JUIN 1997 / 5 A la télévision, la modestie des vainqueurs Courtoisie à France 3 et les prémices d’une guerre des vaincus Bretagne : « Normal, Le FN mise sur l’échec de la gauche et une présidentielle anticipée ce n’est pas 1981 »» Sur toutes les chaînes, Edouard Balladur, Phi- tion » de la droite. Tandis que les socialistes s’ef- poussaient à des changements rapides et lippe Séguin, Charles Pasqua et Alain Madelin forçaient à l’humilité afin de ne pas décevoir concrets, revendications relayées dans la rue par ont proposé leurs services pour la « refonda- leurs électeurs, les communistes et les Verts les sans-papiers et les sans-logis. L’avertissement de Pierre Méhaignerie

QUI sont « les plus à plaindre » ? sans-papiers ! », « Des papiers RENNES cautérisé la plaie. » Pour autant, il Les vaincus ou les vainqueurs ? pour tous. Jospin, tes promesses, tu de notre correspondante estime que les vraies difficultés Avant même que Philippe Séguin les tiens ! » régionale commencent demain. C’est ce qui ne se la pose à haute voix, en di- Tous les porte-parole du PS ma- Dans les couloirs de France 3 explique, sans doute, les profils rect d’Epinal, cette question avait nifestèrent donc une humilité cal- Bretagne, à Rennes, il est de bon modestes des visages socialistes déjà trouvé une réponse dans la quée sur celle de Lionel Jospin en ton de rester sur son quant-à-soi sur les images qui arrivent de Lo- bouche d’Edouard Balladur. L’an- se déclarant d’emblée conscients au moment des estimations de rient, Lannion ou Brest, où le nou- cien rival malheureux de Jacques de leurs responsabilités vis-à-vis 20 heures. Tout juste se permet-on veau député de gauche est déjà in- Chirac dans la course à l’Elysée de leurs électeurs. Ils le procla- quelques plaisanteries sur «TF1, vité à rassurer, à l’antenne, les fut en effet le premier à occuper mèrent sur tous les tons de la mo- qui va pouvoir diffuser son film de salariés de l’arsenal. les écrans de France 2 et TF 1. Il destie : « Il va de soi, par exemple, bonne heure », tant les résultats se était visiblement pressé de déplo- que l’engagement pris pour l’em- révèlent nets. Il faut attendre les SOURIRES rer le manquement aux pro- ploi de jeunes sera tenu. » (Jack premières données régionales Seuls les nouveaux, comme Kofi messes de 1995, de tirer un trait Lang). « Il faut des gestes significa- pour que fusent les points d’excla- Yamgnane à Châteaulin, dans le sur la faillite électorale de son tifs, car les gens ont voté pour une mation : « L’UDF Ambroise Guellec Finistère, laissent pointer leur joie. successeur à l’Hôtel Matignon et certaine relance de la consomma- est vaincu ! Mais alors, il ne va pas Son adversaire malheureux, Jean- de poser sa candidature au lea- tion qui, elle-même, amènera un vouloir venir pour le direct de Yves Cozan (UDF), soupçonne cet dership de la nouvelle opposi- certain développement de la crois- Quimper ! » originaire du Togo d’avoir « ré- tion : « Il nous faut être cohérents, sance. » (Laurent Fabius). « Nous Les journalistes craignent de cupéré toutes les voix du FN ». A ne pas affirmer une chose et son ferons ce que nous avons dit. » voir les représentants de la droite Douarnenez, Françoise Lazard ar- contraire. Tout montre que les (). « Les Français ne bouder leur soirée électorale. Au bore un sourire radieux. Adjoint formes d’organisation de l’an- veulent plus de promesses non te- moins ont-ils pris soin d’inviter au maire du bourg de Penmarch, cienne majorité ne sont plus repré- nues. » (Ségolène Royal). Etc. Pierre Méhaignerie (UDF-FD), totalement inconnue jusqu’à sentatives des différents courants Tous furent si convaincants que réélu dès le premier tour, à ce dé- présent, elle remercie Lionel Jos- de pensée qui la composent. » leurs partenaires les prirent au bat de soir de second tour. Après pin « d’avoir envoyé des femmes à Premier à régler ses comptes, avec... le « nous » de majesté : Le Pen. La « perle » de la soirée mot sur-le-champ. On vit les avoir regretté le moment choisi l’Assemblée nationale ». En duplex M. Balladur ne fut pas le dernier. « Nous, nous serons naturellement fut l’œuvre de , communistes réclamer par la voix par Jacques Chirac pour dissoudre de Paris, Alain Madelin (UDF) sou- M. Séguin lui-même n’avait pas toujours là pour espérer qu’un jour invité de TF 1, qui eut le raisonne- de Jean-Claude Gayssot, un « re- l’Assemblée nationale, l’ancien mi- rit lui aussi, comme souvent, pour d’autre but que de briguer la l’espoir nous revienne. » Il n’y eut ment suivant : « Si le processus du lèvement sensible des bas salaires » nistre en vient rapidement à évo- annoncer qu’il a « envie de re- conduite de la nouvelle opposi- que François Léotard pour abor- traité de Maastricht va jusqu’à son et le vote « tout de suite » d’une quer le changement du mode de prendre [sa] liberté » avec ses tion parlementaire quand, à son der sans biaiser la question ma- terme, l’Assemblée nationale n’au- loi-cadre visant à réduire la se- scrutin des élections régionales. « amis de la majorité ». tour, il intervint plein écran. Sans jeure, en récusant, au nom de ra pas plus de pouvoir qu’un maine hebdomadaire de travail « Attention, la roue tourne vite », Interrogés sur le cumul des emphase, avec une gravité tran- l’UDF, « toute hypothèse d’alliance conseil de sous-préfecture, et, par « à trente-cinq heures sans perte de lance-t-il à ses adversaires réunis mandats, les ténors comme Ed- quille. Résolu et, bien sûr, volon- ou de rapprochement avec le Front conséquent, ce traité, d’une cer- salaire ». Tandis que les Verts, par sur le plateau, tout en leur souhai- mond Hervé, maire de Rennes, taire pour rassembler « tous ceux national. » Ravis d’avoir précipité taine façon, c’est la revanche l’intermédiaire d’Yves Cochet, tant « bon courage ». bottent en touche. « Vous croyez qui partagent » sa « conception de la défaite du RPR et de l’UDF, les d’Adolf Hitler : nous allons être souhaitaient « l’arrêt immédiat de A tout cela, Charles Josselin (PS) que c’est la première mesure que va la France ». M. Séguin aura de la préposés à la parole lepéniste ne gouvernés depuis l’Allemagne. » l’extension de l’aéroport de Roissy » acquiesce. Malgré son score de prendre Jospin ? », s’inquiète concurrence. Charles Pasqua a faisaient d’ailleurs pas mystère de Sagement, les vrais vainqueurs ainsi que des restrictions à la cir- plus de 60 % dans la circonscrip- Charles Josselin depuis la cabine lancé : « J’entends me consacrer à leur stratégie : « Le résultat de ces ne criaient pas victoire. Et même culation « pour diminuer la place tion de Dinan, le président du de maquillage. la nécessaire refondation. » L’UDF élections sonne le temps du Front s’ils en avaient éprouvé l’envie, les de la bagnole en ville »... C’est ain- conseil général des Côtes-d’Armor Progressivement, les équipes de non plus ne sera pas en reste. national », a dit Bruno Mégret. Il images en provenance du boule- si que le « changement » nouvelle a le triomphe plus modeste que journalistes rentrent de leurs tour- Alain Madelin a pris date : « Je re- misera sur l’échec de la gauche et vard Saint-Germain les en au- formule commença par des ses alliés communistes, venus en nages. A les entendre, les villes trouve ma liberté et j’en ferai bon sur les difficultés de la cohabita- raient dissuadés. La fête improvi- préoccupations terre-à-terre, ce nombre. bretonnes, massivement socia- usage pour redonner des raisons tion. Dans l’espoir d’une élection sée devant la Maison de qui ne constitue pas forcément la « Le plus surpris aurait été Fran- listes, n’ont guère fêté l’événe- d’espérer à ceux qui ont voté pour présidentielle anticipée, ainsi l’Amérique latine avait déjà des plus mauvaise façon de commen- çois Mitterrand, sourit-il néan- ment : « Normal, ce n’est pas la majorité comme à ceux qui l’ont qu’en témoigne l’appel au « re- accents protestataires annoncia- cer à progresser. moins autour du buffet. On avait 1981. » quittée. » Valéry Giscard d’Estaing groupement des forces saines de la teurs de lendemains turbulents : mal mesuré la performance de Lio- s’est senti rajeunir. Il a renoué nation » lancé par Jean-Marie « Urgent ! Des papiers pour les Alain Rollat nel Jospin à la présidentielle : elle a Martine Valo LeMonde Job: WMQ0306--0006-0 WAS LMQ0306-6 Op.: XX Rev.: 02-06-97 T.: 08:52 S.: 111,06-Cmp.:02,15, Base : LMQPAG 46Fap:99 No:0872 Lcp: 196 CMYK

6 / LE MONDE / MARDI 3 JUIN 1997 LE SECOND TOUR DES ÉLECTIONS LÉGISLATIVES La droite est menacée d’implosion après une défaite qu’elle n’avait pas prévue L’ampleur du recul a pris de court les dirigeants du RPR et de l’UDF. Chacun a déjà sa solution pour construire une force d’opposition. Philippe Séguin et Charles Pasqua plaident pour une refondation de leur mouvement. Edouard Balladur envisage un regroupement des libéraux Renvoyés dans l’opposition après quatre et Charles Pasqua sont tous deux décidés à lundi 2 juin ses amis, semble préférer un est un des rares dirigeants de la droite à entre les trois familles de la droite qu’il ans au pouvoir, les dirigeants de la droite « refonder » le mouvement néogaulliste, parti unique de l’opposition, ou à défaut avoir rendu hommage à Alain Juppé, tient distingue : les gaullistes, les libéraux et les divergent profondément sur la manière de mais chacun à sa manière. Alain Juppé, qui un pôle libéral. L’UDF est tout autant divi- à conserver l’unité et la spécificité de centristes. Son parti, Force démocrate, reconstruire une force capable de s’oppo- reste président du RPR, n’entend pas être sée. Alain Madelin a déjà annoncé qu’il re- l’UDF, qu’il préside. Mais François Bayrou pourrait créer son propre groupe dans la ser à la nouvelle majorité. Philippe Séguin oublié. Edouard Balladur, qui doit réunir prenait sa « liberté ». François Léotard, qui plaide pour une distinction organique nouvelle Assemblée.

CETTE FOIS, au moins, les deux secrétaire général du Rassemble- ment dévouée au premier ministre. hommes sont tombés d’accord. Phi- ment, Jean-François Mancel, est Pour faire un essai de voix, di- lippe Séguin s’est dit « déterminé, battu dans l’Oise, dont il préside le manche soir, au QG de campagne, définitivement déterminé, à (...) créer conseil général, par une candidate avant d’intervenir sur une chaîne de les conditions politiques » d’un re- socialiste parachutée. Le secrétaire télévision, l’un d’eux a eu cette ré- bond pour la droite. Pour Alain Jup- général adjoint, Patrick Stefanini, flexion : « On va essayer de sur- pé, il faut « entamer la reconstruc- l’un des proches conseillers de vivre. » Non loin de là, une jeune tion d’une force politique ». Il n’est M. Juppé, lui-même parachuté dans militante constatait : « Ils ont sorti pas sûr que leurs projets le 18e arrondissement de Paris, est Séguin du placard, il y a trois jours. convergent, mais le sentiment de victime de l’anticipation du scrutin. Ça ne pouvait pas marcher. La droite l’urgence est le même. Après avoir Les délégués généraux du RPR char- s’est sanctionnée elle-même, di- rempli sa mission originelle – per- gés des fédérations, Pierre Bédier, manche dernier. » mettre le retour d’un héritier du des élections, Frédéric de Saint-Ser- gaullisme à l’Elysée –, le RPR est nin, des élus, Jérôme Bignon, sont « UNE PAGE EST TOURNÉE » promis, depuis dimanche 1er juin, au battus, tout comme le porte-parole Bien que très populaire chez les mieux, à un nouveau destin, au pis, de la campagne, Jean-François Co- militants, M. Séguin avait considéré, à un éclatement. pé. Au total, quatre-vingt-seize dé- en octobre 1995, cinq mois seule- La tâche se présente mal pour son putés sortants du RPR sont battus. ment après l’élection présidentielle, président en titre, M. Juppé. Lui- Sévèrement jugée par les poids qu’il ne pouvait pas aller à l’affron- même est affaibli par son retrait lourds du mouvement, cette jeune tement avec M. Juppé, lors de la dé- contraint du gouvernement, et la di- génération de cadres néogaullistes, signation du successeur de Jacques rection, qu’il avait mise en place en qui s’appelaient eux-mêmes la Chirac à la tête du RPR. Sauf à pré- 1995, est durement affectée par le « task force » dans les couloirs de cipiter les échéances, comme les l’avait été au cours de la campagne. triste, déjà expérimenté dans le pas- dans la nouvelle Assemblée. Les résultat des élections législatives. Le l’Assemblée nationale, était totale- statuts le prévoient, les prochaines Rendant hommage à la « détermi- sé, pourrait consister à créer un centristes pourraient donc avoir in- assises nationales du RPR n’auront nation » d’un premier ministre au- groupe indépendant à l’Assemblée térêt à faire prévaloir leurs forces. Titre lieu qu’en 1998. Le débat pourra-t-il quel l’histoire « rendra raison », il a nationale. Force démocrate en a la A l’autre extrémité de l’UDF, L'Assemblée dissoute attendre un an ? C’est peu probable. affirmé la « solidarité » de l’UDF possibilité, puisqu’elle conserve Alain Madelin a dressé un constat Dès lundi matin, l’état-major balla- avec M. Chirac, qu’elle se promet quarante-trois élus au Palais-Bour- qui l’éloigne un peu plus de ses an- RÉPARTITION DES 576 SIÈGES AU 21 AVRIL 1997 durien devait se réunir. Plusieurs hy- d’aider « dans sa tâche jusqu’à la fin bon. ciens amis. La majorité sortante en nombre de sièges pothèses, de ce côté-ci, sont envisa- de son septennat ». En revanche, les Cette décision, toutefois, ne ferait n’exprimant pas toujours ses gées : une véritable rénovation du pôles libéral et centriste de la confé- sans doute pas l’unanimité. Claude propres convictions, l’ancien mi- UDF mouvement, une réorganisation des dération ont manifesté des velléités Goasguen, nouveau député de Pa- nistre a jugé, dimanche, qu’« une et apparentés deux formations de la majorité, de remettre en question l’organisa- ris, secrétaire général de FD et de page est tournée ». Il « retrouve sa li- voire la constitution d’un pôle libé- tion actuelle de la majorité, et donc l’UDF, y est hostile. « La vocation de berté » pour défendre ses idées. DIV. D. 12 RPR ral. Il faudra aussi compter avec de l’UDF. François Bayrou, pré- Force démocrate est l’élargissement, Comment ? La constitution d’un et apparentés Charles Pasqua, cofondateur du sident de Force démocrate, veut évi- pas l’enfermement », fait-il valoir. De groupe à l’Assemblée nationale re- mouvement, qui n’a jamais fait ter de parler d’« implosion », mais il fait, cette stratégie constituerait un quiert un minimum de vingt dépu- DIV. G. 10 206 mystère que, le moment venu, il a souhaité que la majorité sortante changement de cap pour M. Bay- tés. Or M. Madelin a perdu quel- PRS* 5 faudrait refonder un autre parti. construise « des forces politiques rou, qui ambitionnait de conquérir, ques-uns de ses amis dans la PS 257 Au soir du second tour, les têtes nouvelles ». à partir de sa propre composante, bataille. Si les marges de manœuvre se sont aussi échauffées à l’UDF. Le Le président délégué de l’UDF a l’ensemble de la confédération. semblent étroites à l’UDF, M. Léo- MDC 4 56 bureau politique devait se réunir ainsi souhaité que, dans le futur, la D’autant que les centristes ont tard devra tenir compte de ces aspi- PC 24 577 SIÈGES 2 dès lundi matin. Son président, droite permette l’expression de ses mieux résisté que le Parti républi- rations au renouveau. et apparentés LDI François Léotard, s’est certes voulu trois courants politiques : gaulliste, cain, dont les effectifs, qui étaient aussi exemplaire, à l’égard de libéral et centriste. L’une des ma- de quatre-vingt-un avant la dissolu- Cécile Chambraud * ex-MRG Reste un siège vacant (siège de M. Noir, ex-RPR) M. Juppé, dans la défaite, qu’il nières de faire entendre le pôle cen- tion, ont fondu presque de moitié et Jean-Louis Saux Sept ministres battus, seize élus parfois sans gloire Philippe Séguin, grognon : « J’ai eu trois jours... » IL Y A les battus, bien sûr, mais sans avoir perdu dix points par rap- Guy Drut (jeunesse et sport) est ÉPINAL sentait « un homme libre ». « Et moi donc ! », s’ex- aussi ceux qui ont été élus sans port au scrutin de 1993. réélu en Seine-et-Marne (45,31 %) de notre envoyée spéciale clame le maire d’Epinal. Il n’en dira pas plus. A gloire dans des circonscriptions où En Seine-Saint-Denis, la défaite dans le cadre d’une triangulaire « Je ne veux pas jouer les pythies, mais ça me pa- peine un grommellement à usage privé sur le ils faisaient d’habitude des scores annoncée d’Eric Raoult (ville) s’est RPR-PS-FN, ainsi que Jean-Louis raissait plié. » Philippe Séguin, dimanche soir, thème de la dissolution, qui « n’était pas une erreur, bien supérieurs. Pour les vingt-trois confirmée (40,57 %). Celles de Pierre- Debré (intérieur) dans l’Eure cache sous un sourire l’amère satisfaction du dé- mais un contresens ». ministres sortants qui se présen- André Périssol (logement) dans l’Al- (53,65 %), Philippe Douste-Blazy sastre prévu. Sa réélection dans les Vosges, la cin- L’après-midi, lors d’un match de football amical taient (sur trente-deux), le second lier (45,65 %) et de Jean-Jacques de (culture) dans les Hautes-Pyrénées quième en dix-neuf ans, n’est qu’une maigre opposant l’équipe d’Epinal à celle de Metz, il avait tour des législatives a été à l’image Peretti (outre-mer), un proche (52,85 %) et François Fillon (poste consolation. Son suppléant, Jean-Luc Cuny, plai- commenté, grinçant : « Nous manquons de cohé- des résultats de l’ensemble de la d’Alain Juppé, en Dordogne (43,72 %) et télécommunications) dans la sante : « Je vais pouvoir me remettre au golf. » Puis sion... Des garçons qui jouent pour la première fois droite : périlleux et, pour certains, sont aussi sans surprise après leur Sarthe (52,73 %). Le ministre du se reprend, sérieux : « Il faut faire tout péter au RPR. ensemble. » A la soixante-septième , Epinal catastrophique. Huit ministres ont mauvais résultat au premier tour. En travail et des affaires sociales, Et tout de suite ! » Dans les studios d’Image Plus, la égalise. Un but partout. « La cohésion a été trouvée. été éliminés : sept ont été battus et revanche, Alain Lamassoure, ministre , garde sa cir- chaîne locale, Philippe Séguin n’a pas dit autre Bien tardivement ! » Aux questions sérieuses, il ne un – Pierre Pasquini (anciens du budget et porte-parole du gouver- conscription de Haute-Loire chose : « Avec tous ceux qui partagent la même répond guère. Quelques grognements – « J’ai eu combattants) – avait décidé de ne nement, a créé la surprise en se fai- (54,71 %) avec près de trois points conception de la France, et de la France dans l’Eu- trois jours... » –, beaucoup de pirouettes et un for- pas se représenter à l’issue du pre- sant battre de justesse (49,27 %) dans de plus qu’en 1993, mais il est en rope, pour préparer d’autres lendemains, je suis dé- midable scepticisme : « Pas la peine de rêver... » mier tour. Seize ministres ont été les Pyrénées-Atlantiques. net recul par rapport à 1988. terminé, définitivement déterminé, à en créer les Le temps s’est couvert. Il faut repartir avant la fin élus, auxquels s’ajoute Alain Juppé, Plusieurs membres de l’équipe de François d’Aubert (recherche) conditions politiques. » du match. Un jeune homme l’encourage : « Alors, réélu à Bordeaux. M. Juppé sont certes réélus, mais conserve sa circonscription de monsieur Séguin, en forme pour prendre... » Il s’ar- Jacques Toubon, ministre de la sans faire des scores de 1988 ou de Mayenne (53,63 %), Philippe Vas- « NOUS MANQUONS DE COHÉRENCE » rête, intimidé. Le maire d’Epinal a souri en haus- justice, symbolise, à lui seul, cette 1993, comme François Bayrou, mi- seur (agriculture) est réélu dans le Dans l’après-midi, il voyait venir la bagarre. «La sant les épaules d’un geste fataliste. A l’évidence, il défaite de la droite, puisqu’il a été nistre de l’éducation, dans les Pyré- Pas-de-Calais (53,42 %), Dominique question est de savoir contre qui », disait-il. Mainte- s’attendait au pire. Il n’a pas été déçu. Dans la ville battu à Paris (48,53 %), dans une cir- nées-Atlantiques, avec seulement Perben (fonction publique) de jus- nant il sait. Mais il préfère se taire. Il a appris les désertée, après l’annonce des résultats, ses der- conscription où il avait toujours été 50,92 % des suffrages. Charles Mil- tesse en Saône-et-Loire (51,03 %) et résultats nationaux, seul, dans son bureau, à l’hôtel niers supporters ne désespèrent pas : « Après tout, élu, difficilement, depuis 1981. lon (défense) et Hervé de Charette Jacques Godfrain (coopération) de ville. Il a aussitôt téléphoné à Lionel Jospin pour il valait mieux laisser passer ce train-là. Philou, il Anne-Marie Couderc, ministre délé- (affaires étrangères) ont été réélus, dans l’Aveyron (56,17 %). Frank Bo- le féliciter. Et à Jacques Chirac... Puis il a filé vers peut viser autre chose que premier ministre. » gué à l’emploi, n’a pas retrouvé le respectivement dans l’Ain (55,41 %) rotra (industrie) retrouve son siège les studios de télévision. Philippe Séguin est déjà siège gagné en 1993 (44,98 %) et Co- et dans le Maine-et-Loire (62,12 %), dans le même département ailleurs. Il rumine. Alain Madelin a déclaré qu’il se Véronique Maurus rinne Lepage (environnement) a été mais au second tour, contrairement (60,60 %), tandis qu’Anne-Marie battue (45,49 %). Dans la capitale, aux deux scrutins précédents. En Idrac (transports), dont c’était le seul Bernard Pons, ministre de Savoie, avec 53,87 % des voix, Her- baptême du feu, a été brillamment l’équipement et des transports, vé Gaymard, secrétaire d’Etat à la élue dans les Yvelines (69,88 %). Les propos divergents des dirigeants du RPR et de l’UDF échappe à l’hécatombe, puisqu’il a santé, a fait beaucoup moins bien été réélu dès le premier tour, non que Michel Barnier en 1988 et 1993. Jean-Michel Bezat LES DIRIGEANTS de la droite se de porter des idées auxquelles faite que se préparent les sont exprimés, dimanche 1er juin, croient des millions de nos compa- victoires. » après l’annonce de leur défaite. Voi- triotes. » b Valéry Giscard d’Estaing ci des extraits de leurs déclarations. b François Léotard, président (UDF) : « En décidant d’interroger A Marseille, les bonheurs de Jean-Claude Gaudin b Philippe Séguin (RPR) : de l’UDF : « Pendant toute cette les Français à un moment où cha- « C’est tout campagne, peut-être avons-nous cun savait qu’ils étaient mé- MARSEILLE La joie de la droite marseillaise est d’autant plus notre système commis des erreurs, nous les re- contents de la manière dont ils de notre correspondant régional grande qu’arithmétiquement la plupart de ses candi- politique qui connaîtrons le moment venu. (...). étaient gouvernés, on prenait le Il est 21 h 50 dans le magnifique bureau du maire dats étaient pris dans des ballottages défavorables est en crise. Il apparaîtra rapidement aux yeux grand risque d’un vote négatif. (...) de Marseille. Jean-Claude Gaudin, visage rayonnant au terme du premier tour. L’addition des voix du PS, Cette réalité ce des Français que les réformes qui Nous devrons demander à ceux et verbe haut, évoque « la situation nationale de dé- du PC et des divers gauche plaçait le maire de sec- soir s’impose à ont été faites, il fallait les faire. » qui gouverneront la France de faite », mais dit son « importante satisfaction », car teur Jean Roatta dans une posture quasi désespérée tous, vain- b François Bayrou, président faire très attention à ne pas causer ses amis ont gagné : Jean Roatta (UDF), Roland dans la 3e circonscription. Une campagne acharnée queurs et vain- de Force démocrate (UDF) : «La de très graves dommages, notam- Blum (UDF), Guy Tessier (UDF) et Renaud Muselier entre les deux tours, un travail intense de mobilisa- cus. (...) Je suis République française a un pro- ment à la situation européenne de (RPR), rescapés de triangulaires délicates, sans ou- tion vers des abstentionnistes les a sauvés. De plus, résolu à mettre toutes mes forces blème d’institutions. On ne peut la France. (...) Je souhaite que les blier Jean-François Mattéi (UDF), très net vainqueur certains électeurs égarés qui avaient manifesté au au service de mon pays, dans l’op- pas se permettre de rouler d’un nouveaux dirigeants épargnent à la d’un duel droite-extrême droite avec 79,24 % des premier tour un agacement contre la politique gou- position parlementaire, (...) avec bord sur l’autre à chaque élection France des dommages inutiles. (...) voix. Les raisons de cette exception marseillaise vernementale sont rentrés au bercail. Exemple par- tous ceux qui partagent la même (...). Il y a une réflexion à conduire Nous, nous serons naturellement tiennent, selon l’ancien ministre de la ville, à quel- mi d’autres, les professionnels de la santé, singuliè- conception de la France, de la sur ce point. On a un problème toujours là pour espérer qu’un ques raisons simples : « Depuis huit jours, j’entends rement des médecins que Renaud Muselier, France dans l’Europe, pour prépa- d’organisation de ce qui était jus- jour, l’espoir nous revienne. » qu’il faut faire de la politique autrement. Eh bien (...) lui-même médecin, a systématiquement fait appeler rer d’autres lendemains. Je suis dé- qu’à ce soir la majorité (...). On ne b Alain Madelin (UDF), pré- les Marseillais ont reconnu le travail accompli par des entre les deux tours à l’aide des annuaires de la pro- finitivement déterminé à en créer peut pas continuer comme ça (...). sident d’Idées-Action : « Au- élus de terrain qui sont des hommes de conviction, des fession. les conditions politiques. » Il y a un courant républicain gaul- jourd’hui, une page est tournée, et hommes d’honneur, à qui on ne peut rien reprocher Claude Bertrand, directeur de cabinet du maire et b Alain Juppé, président du liste, un courant libéral et un cou- en ce qui me concerne, si j’ai tou- (...), et des élus de proximité. » connaisseur exceptionnel de la carte électorale mar- RPR : « Je souhaite maintenant rant démocrate, c’est-à-dire du jours soutenu la majorité et « Et maintenant, on va boire un coup », lance-t-il seillaise, estime que l’implantation de la droite est bonne chance à ceux qui vont à centre. On a besoin de l’expression l’union de la majorité, je retrouve en se levant. Débarque Renaud Muselier, qui dé- stable et à peu près définitive dans la ville ; selon lui, présent gouverner la France, et je de ces trois courants-là (...). Je ne ma liberté et j’entends en faire un passe le candidat socialiste de 355 voix sur 32 165 la droite classique est capable d’endiguer le FN, qui souhaite bonne chance à la France parle pas d’implosion mais de bon usage pour redonner des rai- suffrages exprimés. Il arrive de sa permanence qui est apte à capter le vote protestataire mais incapable (...). Il nous faut maintenant analy- construction. On a besoin de sons d’espérer à ceux qui ont voté vient de vivre trois heures d’attente insoutenable. Le de franchir le saut qui lui permettrait de venir aux ser les raisons de cet échec, et en construire des forces politiques pour la majorité aujourd’hui, à jeune député sortant et reconduit jubile et ne trouve affaires. tirer toutes les conséquences. Il nouvelles. Ayons le courage de po- ceux qui l’ont quittée. L’avenir est rien d’autre à dire que « On a gagné ! ». Dans cette nous faut entamer la reconstruc- ser le problème de notre organisa- plus que jamais aux solutions de li- étrange euphorie, ces faibles mots suffisent. Michel Samson tion d’une force politique capable tion. (...) Ce sont les soirs de dé- berté. » LeMonde Job: WMQ0306--0007-0 WAS LMQ0306-7 Op.: XX Rev.: 02-06-97 T.: 07:29 S.: 111,06-Cmp.:02,15, Base : LMQPAG 46Fap:99 No:0873 Lcp: 196 CMYK

LE SECOND TOUR DES ÉLECTIONS LÉGISLATIVES LE MONDE / MARDI 3 JUIN 1997 / 7 A Paris, Jean Tiberi est réélu Des socialistes émettent des doutes mais Jacques Toubon est battu sur la régularité du succès du maire La gauche prend sept sièges à la droite Jean Tiberi affirme que son intégrité a été « reconnue » e La droite parisienne fait bloc derrière le maire de la capi- laissé au Parti socialiste que sept nouveaux sièges. Ces par les électeurs de la 2 circonscription, qui l’ont réélu tale, Jean Tiberi, qui conserve son siège. Au regard de la derniers s’ajoutent aux deux déjà détenus par la gauche poussée nationale de la gauche, elle se félicite de n’avoir dans une ville qui compte vingt et un députés. avec 2 710 voix d’avance sur sa concurrente, Lyne Cohen-Solal

JEAN TIBERI a sauvé son siège, cohésion de la droite parisienne, se de l’UDF au plan national, estime UN COUPLE d’électeurs de Rueil- de la Mosquée de Paris, un Compa- ici ». Un jeune socialiste ouvre une dimanche 1er juin, et ceux qui, au tenaient, lors de cette déclaration, que le rapport de douze députés Malmaison s’est déplacé place du gnon de la chanson. bouteille de champagne. Un militant sein de la majorité municipale, four- Jacques Dominati, président de pour la droite contre neuf à la Panthéon « pour savourer le sym- Des assesseurs socialistes entrent, lui suggère de faire chanter L’Inter- bissaient déjà leurs armes contre lui l’UDF Paris et du groupe UDF au gauche est « un revers politique à Pa- bole ». Des jeunes socialistes le visage grave. A l’intérieur de la nationale. « Non, pas L’Internatio- sont rentrés dans le rang. Du moins Conseil de Paris, et Roger Romani, ris ». « Ce n’est pas plus alarmant commencent à se chauffer la voix en mairie, ces derniers refusent de si- nale !», s’offusque-t-il. Lyne Cohen- le temps d’une soirée électorale in- président du groupe RPR. Il n’em- qu’ailleurs », se reprend-il aussitôt, gner les procès-verbaux entérinant Solal boit maladroitement une gor- tense et tendue. Avec 53,52 % des pêche que, dans les rangs de l’UDF exprimant au passage sa satisfaction REPORTAGE les résultats. Les premières estima- gée « à la gauche ». voix au second tour, le maire de Pa- parisienne, certains se sont montrés que « M. Tiberi ait été réélu dans sa tions donnent une légère avance à Dans la salle des fêtes, les parti- ris frôle son score de 1993 (53,66 %), en désaccord avec cette interpréta- circonscription ». « Son poste de « Ici, c’est chez nous, Jean Tiberi. Ce n’est qu’une demi- sans du maire de Paris commencent obtenu, cette année-là, dès le pre- tion, parlant même d’un risque maire n’est pas remis en cause », a-t- c’est notre village. surprise. « Depuis trente ans, ça ne à être soulagés : « La rumeur est mier tour. L’avertissement a été sé- d’« autosuicide » pour les pro- il précisé. Jacques Dominati s’est Prenez Matignon, change pas », se lamentent des habi- bonne. » Certains reprennent assez e vère pour le député de la 2 cir- chaines municipales si les élus RPR gardé de toute déclaration, même nous, on garde le 5e » tants du Quartier latin. Les socia- d’assurance pour lancer aux rares conscription, toujours élu au et UDF ne se livraient pas à une re- une fois confirmée la réélection de listes confirment publiquement des sympathisants socialistes qui ont pu premier tour depuis son entrée à distribution en profondeur de la son fils Laurent, par 234 voix soupçons d’irrégularité dans les bu- entrer : « Qu’est-ce que vous faites l’Assemblée nationale en 1968, ex- donne politique parisienne. d’avance, dans la 1re circonscription. imitant les trémolos de Charles de reaux de vote nos 21, 23, 34, avec des là ? Vous voyez, ici, c’est chez nous, cepté en 1973. Le soulagement a été Si redistribution il y a, ce ne sera M. Tiberi réélu, chacun retrouve Gaulle : « Paris outragé, Paris bafoué écarts, qu’ils estiment « surpre- c’est notre village. Prenez Matignon, à la mesure de l’inquiétude d’une pas au profit de l’ancien ministre de ses marques habituelles. L’UDF, mais Paris libéré ! » Une rose rouge a nants », de 500 voix. « Ce sont des nous, on garde le 5e.» Des militants campagne d’entre-deux-tours parti- la justice, Jacques Toubon. Le princi- forte de trois députés au lieu de été accrochée à une barrière de sé- quartiers où l’on trouve beaucoup de tentent de donner un parfum de vic- culièrement difficile pour le premier pal rival de M. Tiberi à la mairie, quatre sortants, souligne sobre- curité. Les bons résultats du premier résidences de personnes âgées. Leur a- toire en scandant « Tiberi ! Tiberi ! ». magistrat de la capitale. lorsque fut ouverte la succession de ment, par la voix de M. Goasguen, tour de Lyne Cohen-Solal, la candi- t-on fait peur en invoquant une ferme- Quelques Parisiens ajoutent « cor- Dimanche soir, la perte de sept Jacques Chirac, a été battu sèche- que « cette bataille politique a mon- date du PS, conjugués aux estima- ture de leur établissement si Tiberi ruption ! » ou « en prison ». sièges – s’ajoutant aux deux que la ment par le socialiste Serge Blisko tré que certains changements sont né- tions nationales, laissent espérer. A n’était pas élu, comme cela nous a été A 23 heures, le maire du 5e, Jean- gauche détenait depuis 1993 – par la (51,46 %). Une de ses proches, Anne- cessaires dans la gestion de Paris ». 20 heures, les partisans du maire de rapporté ? », s’interroge Alain Mo- Charles Bardon, annonce des « ré- droite parlementaire à Paris était Marie Couderc, a subi le même sort Désormais, même le plus solide des Paris ont la mine des jours sombres. rell, candidat suppléant de Lyne Co- sultats provisoires mais qui seront commentée par le proche entourage face à Jean-Marie Le Guen (55,01 %), fiefs de l’ancienne chiraquie appa- Seule Odette, retraitée, semble affir- hen-Solal. « Plusieurs assesseurs ont confirmés demain » : 17 950 voix du maire comme un résultat moins premier secrétaire de la fédération raît à portée de main de la gauche. mative ; elle le dit à ses copines : «Je vu des personnes âgées, accompa- pour Lyne Cohen-Solal, 20 660 pour mauvais que ceux de cette même socialiste de Paris, dans une cir- « Il faut repartir, retravailler pour le sais, je l’ai vu cet après-midi, Jean- gnées, entrant dans l’isoloir avec un Jean Tiberi. Le maire de Paris monte droite au plan national. De fait, Paris conscription, il est vrai, favorable à convaincre les Parisiens que nos posi- jean est à 52 %. » « Oui, c’est vrai. Toi, seul bulletin à la main », précise-t-il. sur l’estrade, acclamé ou insulté. et l’Ile-de-France ont mieux résisté la gauche. tions sont les bonnes », poursuit tu le sais », se rassure l’une d’elles, Se pose également le problème, sou- « Les habitants du Quartier latin que le reste de la France à la vague Mme Couderc, qui attribue sa défaite qui explique qu’Odette lit dans une levé par Le Canard enchaîné, des m’ont donné le témoignage de leur fi- de gauche. Edouard Balladur lui- « REVERS POLITIQUE » au mouvement national de rejet de boule de cristal. « Les gens sont vrai- fausses domiciliations de plusieurs délité. Ils ont aussi exprimé la re- même, lors d’une courte apparition La défaite de M. Toubon a encore la droite parlementaire, et en aucun ment trop méchants, s’indignent les milliers d’électeurs dans le 5e arron- connaissance de mon intégrité [...], à l’Hôtel de Ville, a déclaré que les plus alimenté les commentaires que cas à un « effet Tiberi ». « Il ne faut vieilles dames. Quelle est cette dissement. déclare-t-il. J’en suis, chers amis, résultats parisiens étaient « bien la réélection de M. Tiberi. « Il y a des pas confondre législatives et munici- époque ? C’est l’Inquisition. Les magis- d’autant plus heureux que j’ai été vic- meilleurs que ce qu’on avait dit ». défaites qui font très mal au cœur. pales », reprend M. Toubon, qui, in- trats se prennent pour l’archange du « RÉSULTATS PROVISOIRES » time depuis des mois d’attaques et de M. Tiberi, lui, avait choisi la ligne la M. Toubon va beaucoup manquer à terrogé sur ce même « effet Tiberi », Jugement dernier. » L’arrivée de Lyne Cohen-Solal est calomnies inqualifiables, et notam- plus neutre en déclarant : « A Paris, Paris et à l’Assemblée nationale », a se refuse à « exprimer une position Les premiers résultats arrivent, les acclamée par des jeunes à qui l’on a ment par ceux qui, dans les domaines les résultats que nous constatons sont déclaré Pierre Lellouche, nouveau particulière envers telle ou telle per- écarts sont serrés. Des voitures de refusé l’entrée dans la mairie. « Tibe- qu’ils ont évoqués, devraient faire acte le reflet des résultats nationaux. » député RPR de Paris. « La catastro- sonne ». police, gyrophares allumés, tra- ri, sans Toubon, c’est tout droit la pri- de pudeur. » La salle des fêtes en- Quant à son propre résultat, il l’at- phe, sur Paris, c’est que Jacques Tou- La victoire de la gauche est d’une versent à toute vitesse la place du son », crient-ils. Devant le Panthéon, tonne La Marseillaise. Une vieille tribue à « la reconnaissance de [son] bon ait perdu. J’ai de la peine, c’est telle ampleur au niveau national Panthéon. Des jeunes leur crient : la candidate socialiste déclare seule- dame apprend que la gauche est de- intégrité » que « les électeurs des 5e et une profonde injustice », a repris en que la droite parisienne, à chaud, « Emmenez Tiberi, emmenez Tibe- ment : « J’ai fait campagne pour dé- venue majoritaire à l’Assemblée : 6e arrondissements qui [le] écho (UDF-FD), préfère compter ses sièges et se sa- ri!» Sur les affiches électorales du noncer certaines pratiques dans cette « Mais on m’a dit toute la soirée qu’on connaissent bien [lui] ont à nouveau ancien suppléant de M. Toubon tisfaire d’une même voix d’en maire, on a collé, entre les deux circonscription. Je constate que ces avait gagné », s’étonne-t-elle, exprimée » (lire ci-contre). dans la 9e circonscription, désormais conserver douze sur vingt et un. tours, la liste d’un comité de soutien pratiques n’ont pas changé. Nous al- contrariée. Autour de lui, pour une prestation élu dans la 14e. présidé par Jean Dutourd, avec entre lons continuer », espérant que «la destinée à montrer aux télévisions la M. Goasguen, secrétaire général Pascale Sauvage autres Claudia Cardinale, le recteur démocratie légale va un jour s’installer Dominique Le Guilledoux

Publicité LeMonde Job: WMQ0306--0008-0 WAS LMQ0306-8 Op.: XX Rev.: 02-06-97 T.: 08:34 S.: 111,06-Cmp.:02,15, Base : LMQPAG 46Fap:99 No:0874 Lcp: 196 CMYK

8 / LE MONDE / MARDI 3 JUIN 1997 LE SECOND TOUR DES ÉLECTIONS LÉGISLATIVES

Jean-Marie Le Pen réclame à nouveau Le maire de Toulon la démission de Jacques Chirac entend parler au nom Le FN veut rassembler « tous ceux qui ne se sentent pas bien, notamment dans les rangs du RPR et de l’UDF » de 4 millions de Français Avec finalement un seul élu à l’Assemblée natio- tour. Mais, en maintenant au second tour quasi marqué des points dans sa stratégie de briser la nale, le Front national a accusé, dimanche systématiquement ses candidats face à la droite majorité sortante, avec l’espoir de récupérer les 1er juin, une perte de voix par rapport au premier parlementaire, le parti de Jean-Marie Le Pen a mécontents. M. Le Chevallier sera le seul député lepéniste

EN TRINQUANT, dimanche soir vendredi 30 juin, entre son père et la contribuer, en se maintenant systé- ment [avec le Front national] des TOULON national, ou François Léotard, qui 1er juin, « à la santé de Jean-Marie Le candidate socialiste, heureuse ga- matiquement, partout où il pouvait forces saines de la population pour de notre correspondant a récusé et le Front national et le Chevallier » – le maire de Toulon gnante du deuxième tour. Autre le faire, à la défaite de la droite. Re- définir une politique nouvelle : popu- Dans le grand hall du quatrième Front populaire tout en brillant (Var) qui venait d’emporter le seul et vaincu, le maire d’Orange (Vau- jeté par les partis traditionnels, qui laire, sociale et nationale ». Appel étage de la préfecture du Var, par son silence entre les deux unique siège de député que le Front cluse), Jacques Bompard. accusent ses responsables de ra- que Bruno Mégret lançait de son cô- transformé en salle de presse, le tours. national occupera dans la nouvelle Un grand nombre de candidats du cisme et de xénophobie, le FN a ap- té « à tous ceux qui ne se sentent pas préfet, Jean-Charles Marchiani, af- Même s’il savoure sa victoire, Assemblée –, Jean-Marie Le Pen ac- Front national accusent une perte de pliqué la stratégie du « sortons les bien [...] notamment dans les rangs du firme : « Il y aura deux députés du M. Gaïa « souhaite élever le dé- cusait le coup. A force de voir son voix entre les deux tours. Et les sou- sortants » dans l’espoir de casser la RPR et de l’UDF [...], électeurs, cadres Front national. » « Dont un dans le bat ». « Il est réconfortant, dit-il, de entourage en rêver, il avait fini par tiens accordés à des représentants droite et de récupérer les mé- ou élus, à se retrouver autour d’un Var », risque un journaliste. Le pré- constater qu’on peut gagner des croire à une poignée d’élus lepé- de la droite n’ont pas toujours mar- contents. « Nous assistons à l’implo- rassemblement nouveau qui peut se fet ne s’arrête pas à cette re- élections à Toulon en parlant nistes qui auraient fait la pluie et le ché. Le « baiser » lepéniste a ainsi sion du bloc RPR-UDF », com- faire sur la base de ce que le Front na- marque. M. Marchiani est en joie à d’éthique et de morale. » Dans le beau temps au Palais-Bourbon. tué au moins deux députés, Lucien mentait, au soir du second tour, tional a déjà construit », car, selon lui, l’idée de « passer enfin dans l’oppo- même temps, cloîtré dans son bu- Les hommes et les femmes en qui Brenot (LDI-CNIP) en Côte-d’Or, en Jean-Yves Le Gallou, et la faute en « la pitoyable défaite du RPR-UDF » sition ». « On va pouvoir casta- reau du deuxième étage de la mai- le parti d’extrême droite avait placé faveur duquel Charles Calvin (FN) revient, selon M. Le Pen, à la majori- augure « une recomposition politique gner », promet-il. rie, M. Le Chevallier patiente en ses espoirs ont échoué, parfois s’était désisté, et Yves Bonnet (UDF- té, qui « recueille les fruits de sa dia- de grande envergure ». En réalité, la victoire du maire, préparant quelques notes, un œil même sans atteindre leurs scores de PPDF) dans la Manche. De même, si bolisation du Front national et de sa « Il y aura un troisième tour avec les Jean-Marie le Chevallier, dans la sur un écran de télévision, l’autre 1993. Le premier d’entre eux, le délé- le FN peut penser avoir contribué à stratégie de “front républicain” ». régionales et les cantonales », faisait première circonscription de Tou- sur les résultats de plus en plus en- gué général du parti, Bruno Mégret, la perte de Michel Hannoun (RPR) Ne perdant pas de temps, le pré- remarquer le secrétaire général, Bru- lon, donnera au Front national son courageants qui lui sont transmis. a obtenu 45,89 % des suffrages, alors ou de Gérard Longuet (UDF-PR), il sident du parti d’extrême droite a no Gollnisch. Et le FN entend peser seul député dans la nouvelle As- A 20 h 30, il quitte l’hôtel de ville qu’il atteignait les 49,52 % il y a n’a pas pu empêcher l’élection de demandé la démission du président de tout son poids dans ces scrutins. semblée. A la mairie, où l’on n’est pour la proche mairie annexe, qui quatre ans. De même, Marie France- , maire socia- de la République, qui a été « battu Il espère d’ailleurs emporter au pas encore sûr, alors, de ce résul- se trouve sur le port, là où l’at- Stirbois, qui, une fois encore, affron- liste de Strasbourg. deux fois, à la majorité des suffrages moins la présidence de la région tat, l’ambiance est moins détendue tendent une centaine de ses parti- tait en duel Gérard Hamel (RPR), re- Il y a deux façons d’apprécier le exprimés au premier tour et à la ma- Provence-Alpes-Côte d’Azur. En at- qu’à la préfecture. On vit dans l’ex- sans trempés et transis de froid. cueille 43,81 % des voix contre 49,86 poids du Front national. En s’arrê- jorité de députés du second tour ». tendant, Jean-Marie Le Pen se repaît pectative jusqu’aux alentours de Au balcon du premier étage, il en 1993. Quant à Marie-Caroline Le tant sur son seul et unique élu ou en Dans ce scrutin, les Français ont du retour de la gauche, qui, il en est 20 h 30, heure à laquelle les pour- apparaît en compagnie de son Pen, arrivée en tête dimanche retenant les 15 % de voix obtenues montré, selon lui, qu’ils désapprou- persuadé, représente, en cas centages indiqués par les bulletins épouse et adjointe, Cendrine, pour 25 mai, elle accuse une perte de au premier tour. Force est de consta- vaient la politique de M. Chirac et d’échec, le scénario le plus favorable dépouillés deviennent fiables. On fustiger l’électorat qui lui a échap- 840 voix. Elle se demandera sans ter qu’avec ce score le parti de Jean- n’acceptaient pas de lui donner un pour son parti. évoque le score très honorable de pé : « Je suis stupéfait de voir que les doute longtemps si elle ne doit pas Marie Le Pen a pu provoquer « blanc-seing pour l’Europe ». Il a en- François Léotard, qui s’est sérieu- Français se sont donnés à nouveau à sa défaite à l’affrontement physique, soixante-seize « triangulaires » et suite lancé un « appel au regroupe- Christiane Chombeau sement redressé avec près de 63 % ceux qui les ont terrassés sur le plan des suffrages, mais « le Var, c’est de l’économie, de la sécurité et de Toulon », se lamente à l’extérieur l’immigration. » Et de se livrer à un responsable du PR pour lequel une attaque contre « le mode de « la messe est dite ». scrutin injuste qui prive 15 % des Français d’une juste représentation « ÉTHIQUE ET MORALE » à l’Assemblée nationale ». « Je de- Le ton est à peine différent au vrai de ce fait, annonce-t-il, repré- siège du Parti socialiste, bien que senter 4 millions de Français à moi l’élection de Robert Gaïa, dans la seul, mais notre absence de députés deuxième circonscription, ne fasse à l’Assemblée ne nous empêchera pas de doute. L’ambiance est pas de progresser de façon impor- étrange : les uns se réjouissent de tante. Le résultat de Toulon est sym- sa victoire mais n’osent exprimer bolique. » leur liesse devant les autres, qui La pluie redouble, le couple Le digèrent mal le score d’Odette Ca- Chevallier s’efface. M. Falco s’est sanova face à M. Le Chevallier. montré discret. Dans un bref Ceux-là sont amers d’une défaite communiqué, il estime que «la dans laquelle, disent-ils, la droite majorité départementale a bien ré- départementale a une lourde res- sisté » malgré « l’indiscipline des ponsabilité. candidats “sauvages” à l’origine de Ils mettent en cause Hubert Fal- deux échecs sur Toulon ». Le vent co, sénateur et président (UDF) du souffle. Les rues sont vides. conseil général, pour avoir mis en balance front républicain et Front José Lenzini La « triangulaire » de Mulhouse a tourné à l’avantage du maire MULHOUSE fait subir à cause de son « stress », de notre correspondant régional téléphone à Jean-Pierre Baeumler « C’est la campagne la plus dure pour le féliciter de sa victoire dans que j’ai connue en vingt ans d’élec- la septième circonscription du tions. » Les premières réactions du Haut-Rhin et à Joseph Spiegel maire socialiste de Mulhouse, pour le réconforter de sa courte Jean-Marie Bockel, candidat dans défaite dans la sixième, s’inquiète la cinquième circonscription du des résultats à Strasbourg, où Haut-Rhin, ont de quoi surprendre l’élection de Catherine Trautmann après sa nette victoire contre Jo- s’annonce difficile. seph Klifa (UDF), le député sor- tant, et Gérard Freulet, le repré- « RUDE BATAILLE » sentant du Front national. Celui Entouré de sa femme et de ses qui perdit son siège à l’Assemblée cinq enfants, le nouveau député se nationale en 1993 pour 102 voix rend à la permanence du PS. Il garde les traces des « tensions prend soin de n’oublier personne fortes qui existent chez les gens ». dans ses remerciements, embras- « Même les Mulhousiens qui votent sant au passage toutes celles qui pour moi m’engueulent, c’est pour- l’ont aidé dans cette « rude ba- quoi la nouvelle majorité ne doit pas taille ». Le temps de la détente, des décevoir, autrement, je ne réponds rires et des plaisanteries est de plus de rien », explique M. Bockel. courte durée. Il doit affronter en- Aux législatives, depuis 1988, il a core ses deux adversaires devant toujours trouvé en face de lui les les caméras. Dans le débat organi- deux mêmes adversaires au se- sé par la station régionale de cond tour, mais cette fois M. Freu- France 3 et le quotidien de Mul- let était arrivé le 25 mai juste der- house, L’Alsace, M. Freulet a sa rière M. Bockel, avec 826 voix de tête des mauvais jours, M. Klifa est retard. Autant dire qu’il avait des détendu, M. Bockel est moins ner- chances de l’emporter. Une plus veux que de coutume. forte participation et un bon re- Le candidat du Front national port des voix de gauche ont fourni accuse M. Klifa d’avoir joué la au vainqueur « un succès au-delà carte d’un « front républicain dé- de tout ce qu’on pouvait imaginer », guisé », faisant ainsi allusion à l’al- commentait Michel Samuel-Weis, liance qu’avaient conclue la adjoint au maire. M. Klifa a aussi gauche et la droite après le pre- bénéficié de la mobilisation des mier tour des municipales de 1995. abstentionnistes du premier tour « Vous avez beaucoup d’humour », et d’un regroupement des voix de réplique l’ancien maire. Plus sé- droite, qui lui ont permis de de- rieusement, il se réjouit que la vie vancer M. Freulet. Résultat que le politique à Mulhouse ne se limite nouveau député n’a pas manqué pas à « une confrontation entre le de saluer : « Je suis satisfait que les PS et le Front national ». Pugnace, deux candidats républicains soient M. Freulet lui « donne rendez-vous devant le Front national », a lancé aux régionales de l’année pro- M. Bockel. chaine ». M. Bockel ne relève pas Au fil de la soirée, l’enthou- ce nouveau défi et va dans le sens siasme de ses partisans aidant, le de M. Klifa en appelant de ses maire a pris la mesure de sa vic- vœux un débat entre une « gauche toire. L’écart de 5 342 suffrages en- forte » et « une droite qui se re- registré aux dépens de M. Freulet compose ». M. Freulet veut croire finit par lui faire oublier ses an- qu’il n’a pas dit son dernier mot. goisses. Il s’excuse auprès de son entourage pour tout ce qui lui a Marcel Scotto LeMonde Job: WMQ0306--0009-0 WAS LMQ0306-9 Op.: XX Rev.: 02-06-97 T.: 09:24 S.: 111,06-Cmp.:02,15, Base : LMQPAG 46Fap:99 No:0875 Lcp: 196 CMYK

LE SECOND TOUR DES ÉLECTIONS LÉGISLATIVES LE MONDE / MARDI 3 JUIN 1997 / 9 Emploi et rénovation de la vie politique au cœur des attentes des Français Selon un sondage de la Sofres pour « Le Monde » et TF 1, les Français se montrent sans illusions sur les conséquences du scrutin quant à leur vie quotidienne. Mais ils attendent de la gauche, en priorité, des mesures de lutte contre le chômage et le cumul des mandats Au soir du second tour des élections légis- grande majorité d’entre eux, la période de reste président de la République jusqu’à la Jospin : trois sur cinq sont persuadées que clairement les mesures prioritaires qu’ils latives, les Français portent un jugement cohabitation qui s’ouvre place le futur pre- fin de son mandat. De même, les per- cet attelage ne pourra pas tenir pendant attendent, au premier rang desquelles la réaliste sur le retour de la gauche au pou- mier ministre de gauche en position de sonnes interrogées se montrent sans illu- cinq ans. Sceptiques sur la capacité de la lutte contre le chômage, le relèvement des voir, selon un sondage réalisé par la Sofres chef de l’exécutif. Près des deux tiers, ce- sions sur la solidité du couple que vont de- gauche de changer leur vie de tous les bas salaires et la rénovation de la vie poli- pour Le Monde et TF 1. Ainsi, pour la pendant, souhaitent que Jacques Chirac voir former Jacques Chirac et Lionel jours, les Français n’en fixent pas moins tique.

ESPOIR MESURÉ, réalisme, lu- vote négatif, contre la majorité ans – n’est pas davantage de na- tation est un sérieux atout pour ment est évidemment partagé par remonter à 1981 pour trouver une cidité : ainsi peut se résumer l’atti- sortante, n’est dominant (42 %) ture à plonger les Français dans Lionel Jospin et la gauche. Si 37 % 70 % des sympathisants de la majorité de Français convaincus tude des Français au soir du se- que parmi les électeurs qui ont vo- l’incertitude. Ils font preuve, sur des Français estiment que Jacques droite, mais également par 55 % qu’un changement de majorité cond tour des élections législatives té pour le Front national, le ce point, d’une grande placidité. Chirac reste le vrai chef de l’exé- de ceux de la gauche. 1986 et 1993 peut changer la vie. qui ont ramené une majorité de 25 mai. Inversement, la gauche a Jacques Chirac a beau être le pre- cutif, il ne fait pas de doute, pour avaient déjà accoutumé les Fran- Cela n’empêche pas les per- gauche à l’Assemblée nationale. bénéficié, dans son électorat, d’un mier responsable de la dissolution 58 % des personnes interrogées, çais à ces alternances à répétition. sonnes interrogées de fixer claire- Qu’il s’agisse, en effet, du bilan de fort vote d’adhésion, particulière- de l’Assemblée nationale, et par que ce rôle revient au premier mi- La situation créée aujourd’hui leur ment les priorités qu’elles at- l’élection et des motivations du ment chez les électeurs commu- conséquent de la mésaventure de nistre socialiste. Ils n’étaient que laisse encore moins d’illusions sur tendent du futur gouvernement vote, de la cohabitation qui s’en- nistes, dont 71 % déclarent avoir sa majorité, les personnes interro- 55 % en 1993 à faire d’Edouard la possibilité que l’attelage Chirac- de gauche. Pour 70 % d’entre elles gage entre un président de la Ré- voulu exprimer leur « soutien aux gées ne semblent pas lui en tenir Balladur le patron de l’exécutif, Jospin puisse tenir très longtemps. (et jusqu’à 80 % chez les moins de publique de droite et un premier partis de gauche ». Au total, pour rigueur : 61 % d’entre elles sou- face, pourtant, à un chef de l’Etat Et ils sont tout aussi sceptiques 25 ans), la mesure à prendre d’ur- ministre de gauche – cas de figure l’ensemble des personnes interro- haitent qu’il reste président de la affaibli à la fois par la maladie et la sur la nouvelle majorité socialiste gence est la création de 350 000 encore inédit sous la Ve Répu- gées, le vote de soutien à la République jusqu’à la fin de son déroute de son camp. Il se trouve et communiste : pour les deux emplois pour les jeunes, et, pour blique –, ou encore de ce que les gauche (30 %) est sensiblement mandat, contre 31 % seulement (et même, aujourd’hui, 49 % des sym- tiers d’entre eux (64 %), PS et PC 55 %, l’augmentation du SMIC, électeurs attendent de l’alter- plus fort que le vote-sanction. 50 % parmi les électeurs commu- pathisants de l’UDF (contre 45 % « ne sont pas d’accord sur la poli- des bas salaires et des petites re- nance, le jugement des personnes De la même manière, pour les nistes ou socialistes) qui sou- d’avis contraire) à accorder la tique à mener pour le pays », même traites. 35 % jugent prioritaire la interrogées par la Sofres est re- deux tiers des Français (63 %), le haitent qu’il se démette. prééminence au futur premier mi- si une courte majorité (49 % réforme de la vie politique, à tra- marquablement équilibré. résultat final de ces élections légis- nistre de gauche ; seuls les sympa- contre 46 %) est plutôt favorable à vers l’interdiction du cumul des Le constat s’impose, tout latives correspond « à ce que ALTERNANCES À RÉPÉTITION thisants du RPR (à 75 %) conti- l’entrée de ministres communistes mandats. La réduction du temps d’abord, quand on analyse les rai- veulent vraiment les Français ». En 1993, près de la moitié des nuent à accorder le premier rôle à au gouvernement. de travail apparaît beaucoup sons invoquées par les Français C’est un score encore plus fort Français (47 %) souhaitaient le dé- Jacques Chirac. Enfin, le résultat des élections moins urgente (28 %), tout comme pour expliquer leur choix. Le vote- qu’au soir des élections législa- part de François Mitterrand. De Pour autant, les Français sont législatives ne fait pas rêver les l’abrogation des lois Pasqua-De- sanction contre la majorité sor- tives de 1993, qui avaient pourtant même, une majorité de personnes lucides. Un tiers d’entre eux seule- Français. 30 % seulement pensent bré (13 %). Voilà donc Lionel Jos- tante et l’action menée par le gou- provoqué un raz de marée de la interrogées (48 % contre 45 % ment (35 %), surtout parmi les que la victoire de la gauche aura pin prévenu : les électeurs n’at- vernement d’Alain Juppé n’a été droite. Ce sentiment d’adéquation d’avis contraire) estiment que personnes âgées de plus de cin- des conséquences plutôt favo- tendent pas monts et merveilles déterminant que pour 25 % des entre le résultat du scrutin et le cette cohabitation sera une quante ans, pensent que la coha- rables sur leur « vie de tous les de la gauche. Mais ils la jugeront personnes interrogées. Il ne l’a pas souhait des Français est même période plutôt positive pour la bitation pourra durer le temps jours ». 21 % craignent, au sur sa capacité à s’attaquer sérieu- été davantage pour les électeurs partagé par 40 % des électeurs de France ; elles n’étaient que 35 % au normal de la législature qui contraire, des effets plutôt défavo- sement au chômage et à rénover du Parti communiste du premier l’UDF et du RPR du premier tour. seuil de la première cohabitation, commence. Trois sur cinq, au rables. Mais 46 % estiment que ce la vie politique. tour (22 %) et guère plus pour La période de cohabitation qui en 1986. contraire, sont persuadés qu’elle scrutin n’aura pratiquement pas ceux du Parti socialiste (29 %) ; le s’ouvre – la troisième en onze Cette banalisation de la cohabi- ne pourra durer cinq ans. Ce senti- de conséquences pour eux. Il faut Gérard Courtois

Lionel Jospin, chef de l'exécutif Avec la victoire de la gauche, souhaitez-vous que ... Jacques Chirac reste président de la République 61% Jacques Chirac démissionne 31% sans opinion 8%

En cas de cohabitation, qui doit être le vrai chef de l'exécutif ?

M. JACQUES CHIRAC 37% LE PREMIER 58% MINISTRE SOCIALISTE

Sans opinion 5%

Pensez-vous qu'une cohabitation entre Jacques Chirac et un gouvernement de gauche ... pourra durer cinq ans 35% ne pourra pas durer cinq ans 60% sans opinion 5% Dans votre vote aux élections législatives, qu'avez-vous voulu d'abord exprimer? Votre soutien à Jacques Chirac et à la majorité RPR-UDF 25% Votre volonté de sanctionner l'action menée au pouvoir par le RPR et l'UDF 25% Votre soutien aux partis de gauche 30%

Votre opposition à la gauche 10%

Sans opinion 10%

Parmi les mesures suivantes, quelles sont celles que le nouveau gouvernement de gauche devrait prendre en priorité? L'augmentation du SMIC, des bas salaires et des petites retraites 55% La création de 350 000 emplois pour les jeunes dans les collectivités locales et les services publics 70% La réduction du temps de travail hebdomadaire à 35 heures sans réduction des salaires 28% L'arrêt des privatisations 10% L'abrogation des lois Pasqua-Debré 13% Le contrôle des licenciements économiques 23% L'interdiction du cumul des mandats 35% La renégociation de certains critères pour le passage à la monnaie unique 19% Sans opinion 2% Pensez-vous que le résultat des élections législatives aura sur votre vie de tous les jours, sur votre niveau de vie, des conséquences...

Plutôt Plutôt Pratiquement pas Sans favorables défavorables de conséquences opinion 30% 21% 46% 3%

Réalisé par la Sofres pour Le Monde et TF1, ce sondage a été réalisé le 1er juin à partir de 20 heures, par téléphone, auprès d' un échantillon national de 1 000 personnes. LeMonde Job: WMQ0306--0010-0 WAS LMQ0306-10 Op.: XX Rev.: 31-05-97 T.: 16:33 S.: 111,06-Cmp.:02,15, Base : LMQPAG 46Fap:99 No:0876 Lcp: 196 CMYK

10 / LE MONDE / MARDI 3 JUIN 1997 HORIZONS DOSSIER PATRICK ARTINIANPATRICK / CONTACT Le premier secrétaire peut jeter un regard d’autant plus satisfait sur son parcours que la victoire de dimanche est plus la sienne que celle d’un PS encore à mi-chemin Lionel Jospin, de sa mutation. ou le refus du cynisme en politique A scène se déroule se posait-il déjà en recours ? Celui card. Dépositaire de l’héritage de tion de l’ancien premier ministre, reau national ébahi, après le re- au soir du 13 mai. que Jacques Chirac va devoir nom- L’homme de François Mitterrand, symbolisé il reste neutre au moment de son trait de Jacques Delors, sa candi- Lionel Jospin, qui mer premier ministre remettra à davantage à ses yeux par les éviction. Plus étrange apparaît son dature à la candidature à l’Elysée. vient de tenir un plus tard le livre qu’il avait 110 propositions de 1981 que par la attitude dans l’élection du nou- Le premier secrétaire se met sur meeting à Clermont- commencé et qui devait sortir en la synthèse Lettre aux Français de 1988, il ne le veau premier secrétaire. Le choix les rangs pour lui faire barrage, Ferrand, ramène septembre. Dans un ouvrage pré- soutient pas, mais ne s’y oppose se limite à un duel entre deux an- mais Lionel Jospin s’en sort un dans son avion Mi- cédent, L’Invention du possible pas. Déjà convaincu que le PS ne ciennes figures jospiniennes, in- mois plus tard avec plus de 60 % chel Charasse, séna- (Flammarion, 1992), il revenait dé- socialiste, se ressourcera qu’en se rénovant, carnant déjà deux lignes bien dis- des voix des militants. « Les trois teur du Puy-de- jà sur son refus du « cynisme » en il laisse faire l’inventeur du « big tinctes : d’un côté, Dominique ou quatre pestiférés » de Liévin, se- Dôme. Le premier secrétaire du politique, thème martelé dans la bang » jusqu’au congrès du Bour- Strauss-Kahn, l’ancien ministre de lon la formule de son ami Daniel LParti socialiste a forcé un peu sa bonne quinzaine de meetings qu’il qui a engagé get, en octobre 1993. l’industrie, qui défend un certain Vaillant, sont loin. politesse naturelle. Sans doute a tenus pendant cette campagne. Lionel Jospin a alors déjà amor- modernisme ; de l’autre, Henri Lionel Jospin s’impose en seul n’a-t-il pas oublié qu’au moment « J’ai appris (...) des événements de cé son retour au sein du PS après Emmanuelli, l’ancien président de recours, comme si son vol au-des- de l’élection présidentielle de 1995, ce siècle et de l’action politique les la rénovation avoir, en avril 1993, décidé de se l’Assemblée nationale, défenseur sus des petites guerres internes ce proche de l’ancien chef de l’Etat vertus du réalisme et, même, du re- tenir « éloigné pour un temps de de la tradition socialiste. Le avait montré sa détermination à redisait à qui voulait l’entendre : lativisme. » l’action publique » et s’être démis conseiller général de Cintegabelle faire de la politique autrement et à « Jospin président, ce n’est pas sé- Loin de priser les coteries et les de son parti, de tous ses mandats au sein du choisit de ne pas choisir entre ses combattre le « cynisme ». Tout na- rieux. » petits complots concoctés à l’aube parti. Le « cynisme » en politique ex-lieutenants. turellement, le succès de sa cam- Autour de plateaux-repas, la des fins de congrès, Lionel Jospin a aurait-il alors eu raison de sa vo- pagne présidentielle le rend in- conversation roule péniblement. cultivé son originalité au sein du recueille lonté de rénovation ? Il s’adresse à UL ne peut encore imagi- contournable pour reprendre la L’avion tangue sous l’orage. Non PS, après avoir quitté le poste de Alain Juppé, ministre des affaires ner que Lionel Jospin se tête du PS le 14 octobre 1995. Lio- sans malice, Lionel Jospin inter- premier secrétaire en janvier 1988, étrangères du gouvernement N prépare à être un éventuel nel Jospin choisit de le gouverner roge André Sainjon, radical-socia- troqué pour une fonction de mi- les fruits de d’Edouard Balladur, pour lui de- recours. Au congrès de Liévin, il au-dessus des courants, refuse de liste, sur sa cohabitation avec Ber- nistre d’Etat, ministre de l’éduca- mander très officiellement de re- présente sa propre contribution reconstituer le sien, entreprend un nard Tapie au Parlement européen tion nationale. Il s’est autonomisé, prendre le fil de sa carrière au Quai – alors que ses amis jospiniens se laborieux travail de rénovation de Strasbourg. L’ancien syndica- certains diraient marginalisé, par sa ténacité d’Orsay, où il s’était occupé, de dispersent – et lorsqu’il la défend à programmatique, à travers trois liste articule quelques mots. Le la singularité de son parcours au 1965 à 1969, des relations avec les la tribune, le 19 novembre 1994, en conventions (sur l’Europe, la dé- premier secrétaire se tourne alors sein du parti d’Epinay. « On m’a organisations économiques mon- fin de journée, il capte à peine l’at- mocratie et l’économie). Le re- vers Michel Charasse : « Je ne par- toujours secondarisé », se plai- diales des Nations unies, et d’ob- tention. La critique du pouvoir cours est redevenu homme de donnerai jamais qu’on en ait fait un gnait-il alors. l’autre héritier, devienne premier tenir un poste d’ambassadeur. mitterrandien y est pourtant cin- synthèse, ce qui, pour un PS en- ministre de la République. » secrétaire du PS, Lionel Jospin Le futur premier ministre de glante. « Le constat est clair : on a core convalescent, reste singulier. Lionel Jospin, c’est d’abord une REMIER des socialistes de soutient ostensiblement son ami Jacques Chirac ne donne pas suite trop peu débattu, pendant le Libéré de l’ombre tutélaire de certaine conception de l’action pu- 1981 à 1988, il tenait son , qui reste, pour lui, à cette requête, sans pouvoir ima- deuxième septennat de François François Mitterrand, Lionel Jospin, blique, d’une certaine éthique de P parti ; mais les vrais maîtres en tant que premier ministre d’un giner que cet ancien dirigeant so- Mitterrand, des grandes orienta- qui fêtera ses soixante ans le la République. Sa rigueur est lé- étaient ailleurs avec, à l’Elysée, gouvernement d’union de la cialiste, sur l’avenir duquel nul ne tions de notre politique. » 12 juillet, peut jeter un regard gendaire. Du coup, l’ancien candi- François Mitterrand, à Matignon, gauche, le symbole de la volonté mise alors, deviendra, quatre ans Dans ce texte, où il parle du d’autant plus satisfait sur son par- dat à la présidence de la Répu- Pierre Mauroy puis Laurent Fa- de rassemblement. plus tard, son successeur à Mati- « président sortant », il note au cours que la victoire du 1er juin est blique est souvent apparu solitaire bius, auquel il lui faudra disputer En avril 1992, quand Lionel Jos- gnon. Lionel Jospin retrouve donc passage que « les responsables de davantage la sienne que celle d’un ou, même, isolé. Après un septen- la conduite de la campagne légis- pin se trouve mis à l’écart du gou- le chemin de Solférino et des dé- parti peuvent être également PS encore à mi-parcours de la ré- nat à la tête du PS, de 1981 à 1988, lative de 1986. Dès qu’il retrouve vernement de Pierre Bérégovoy, jeuners de courant du mercredi membres du gouvernement » et novation. « Je suis désormais où il a toujours privilégié la re- sa liberté, début 1988, en aban- lui qui n’avait jamais fait de « l’ou- – ses détracteurs parlent ironique- veut déjà « faire revivre la démo- comptable de ce que nous [les so- cherche de l’unité et de la syn- donnant la direction de la maison verture » sa tasse de thé, il fait ment de traversée, non du désert, cratie, changer le style du pouvoir ». cialistes] ferons dans les années qui thèse, recueillant plus de 70 % des socialiste, il manifeste son goût contre mauvaise fortune bon mais du « bac à sable ». « J’ai voulu être positif, écrit-il. Car, viennent de notre société et de notre mandats aux motions qu’il présen- pour l’indépendance. cœur. N’évite-t-il pas ainsi de cô- Pourtant, Lionel Jospin renoue s’il est nécessaire de critiquer le pas- monde, expliquait-il le 1ersep- tait ou obtenant même, comme au Au même moment, il amorce ce toyer... Bernard Tapie ? Après sa avec la singularité de son par- sé, il est plus utile encore d’en tirer tembre 1996. Je ne veux pas qu’on congrès de Lille en 1987, l’unani- qui apparaîtra comme une prise de défaite – mal vécue – aux élections cours. Il se tient aux marges, à dis- des leçons et d’avancer des proposi- puisse porter sur ma génération po- mité des courants, il a fini par in- distance avec François Mitterrand, législatives de 1993, dans la 7e cir- tance des jeux internes. Deux épi- tons. » L’essentiel du message du litique le même jugement que celui triguer, ses amis comme ses adver- avant d’inventer, en 1995, un conscription de la Haute-Ga- sodes illustrent sa particularité. Le futur candidat à l’élection prési- qui avait été porté sur la génération saires. Répugnait-il, au nom de sa « droit d’inventaire » qui se trans- ronne, il prend de la distance. 19 juin 1994, dans une sorte de dentielle et du futur premier mi- politique des années 30. » Le voilà à conception de l’action publique, à formera ensuite en « bilan contras- Il joue la carte du non-interven- putsch interne, Michel Rocard est nistre est déjà là, en condensé. pied d’œuvre. entrer dans une guerre de cou- té ». Alors que l’Elysée fait le maxi- tionnisme dans le processus de limogé de ses fonctions de premier Nul ne l’attend encore quand, le rants qui ne l’a jamais inspiré ? Ou mum pour que Laurent Fabius, prise de pouvoir de Michel Ro- secrétaire. Neutre lors de l’élec- 4 janvier 1995, il annonce à un bu- Michel Noblecourt LeMonde Job: WMQ0306--0012-0 WAS LMQ0306-12 Op.: XX Rev.: 31-05-97 T.: 16:55 S.: 111,06-Cmp.:02,15, Base : LMQPAG 46Fap:99 No:0878 Lcp: 196 CMYK

12 / LE MONDE / MARDI 3 JUIN 1997 HORIZONS-DOSSIER TOM CRAIG/REA JAMES LEYNES/REA BERTI HANNA/REA MOSCHETTI/REA B. BISSON/SYGMA VALÉRIE MACON/REA VALÉRIE Un symbole Un spécialiste Une Un socialiste Un actif partisan Une ex-figure de la génération de l’expertise « grosse tête » épris de l’union du Syndicat « mutante » bien faite de sécurité des Verts de la inspecteur général des finances du PC qui connaît déjà BRUNO LE ROUX avec le PS magistrature a Depuis bientôt vingt ans, Chris- maire (PS) d’Epinay-sur-Seine de Robert Hue tian Sautter promène sa haute et Matignon GUY HASCOËT ADELINE HAZAN mince silhouette dans les couloirs a Ni chauffeur ni escorte. Il est ar- vice-président du conseil régional secrétaire nationale du PS MARIE-GEORGE BUFFET du PS et les coulisses des pouvoirs MARISOL TOURAINE rivé à pied, comme en balade. Il Nord-Pas-de-Calais aux questions de société membre du secrétariat socialistes. S’il en connaît sans au- maître des requêtes s’est présenté : Bruno Le Roux, national du PC cun doute tous les arcanes, au Conseil d’Etat maire d’Epinay-sur-Seine (Seine- a Il avait l’appui du PS, qui lui a a Pour sa première campagne l’homme a opté une fois pour Saint-Denis). Il a souri. Ça suffisait. cédé la difficile circonscription de électorale, Adeline Hazan, qui dé- a Grande, élégante, le regard toutes pour la discrétion, opposant a Marisol Touraine est ce qu’on La simplicité fait des miracles. Bru- Roubaix, autrefois celle de Jules fendait les couleurs du PS dans la bleu, Marie-George Buffet tient un sourire ironique à toute ques- appelle communément une no Le Roux a beau n’avoir que Guesde. Arrivé en tête, contre 3e circonscription de la Marne, davantage d’une Marie-Claude tion susceptible de déranger. Chris- « grosse tête ». Il se trouve que trente-deux ans et un visage encore toute attente, il s’est acquis entre n’était pas en terrain inconnu : au Vaillant-Couturier qu’elle vénérait tian Sautter, cinquante-sept ans, cette tête bien pleine est aussi bien marqué des rondeurs de l’adoles- les deux tours la sympathie et le début de sa carrière de magistrate, que de Madeleine Vincent. In- n’aime guère se confier, prend soin faite. Jolie brune mince et élancée, cence, il s’impose dans l’instant. soutien du maire UDF de la ville, elle était restée pendant trois ans connue du grand public, voire des de haïr les jeux de pouvoir et les à l’air parfois effarouché quand Solide, tranquille, sûr de ses René Vandierendonck, qui l’a jugé juge de l’application des peines à « vieux » militants, Marie-George combats d’appareil qui ont trauma- elle n’arbore pas un grand et lumi- convictions et de son métier. La po- plus apte à résister au Front natio- Châlons-sur-Marne. Aujourd’hui, Buffet, quarante-huit ans, membre tisé le PS des années du congrès de neux sourire – on ne s’appelle pas litique, il en a toujours fait. En 1983, nal que le député RPR sortant, Mi- elle parcourt le département dans du secrétariat national du PC de- Rennes. Un congrès auquel il a jus- impunément Marisol, c’est-à-dire il a dix-huit ans lorsqu’au hasard chel Ghysel. Malgré son « para- un tout autre rôle. « En fait, je ne puis janvier, réalise depuis un an tement assisté en mars 1990 comme Marie-Soleil en espagnol –, la nou- d’une campagne municipale il fra- chutage » tardif dans ce bastion me sens pas du tout déphasée, sur- une ascension remarquée place du observateur pour François Mitter- velle élue est la fille d’Alain Tou- ternise avec des militants socia- historique du socialisme en déshé- tout dans les quartiers urbains, ra- Colonel-Fabien. Signes qui ne rand et dont il a gardé un goût de raine et, comme lui, universitaire : listes et rencontre Gilbert Bonne- rence, Guy Hascoët n’a pas tardé à conte-t-elle. Je retrouve dans cette trompent pas, c’est elle qui avait cendre. ancienne élève de l’Ecole normale maison, maire d’Epinay-sur-Seine, imposer sa personnalité. Le verbe campagne électorale les gens que je été chargée du discours final de la Mitterrandiste tempéré, Christian supérieure, elle est agrégée de une « figure » du parti, spécialiste fort ponctué d’un humour caus- vois habituellement dans mon cabi- fête de L’Humanité, en septembre Sautter ne s’est jamais véritable- sciences sociales et diplômée de de la prévention de la délinquance, tique, un embonpoint de bon vi- net de juge des enfants, à Paris. 1996. C’est aussi l’heureuse candi- ment éloigné de Lionel Jospin, qui l’Institut d’études politiques de Pa- qui deviendra, des années plus vant, un sens aigu du contact, et Leurs problèmes me sont fami- date de la 4e circonscription de la lui avait confié de 1985 à 1988 l’ani- ris, où elle enseigne. tard, son mentor. surtout un flair politique reconnu liers. » Seine-Saint-Denis, elle qu’on a mation du groupe d’experts du Par- A trente-huit ans, mariée et En attendant, Bruno s’inscrit au par ses adversaires : ce militant Avant de devenir secrétaire na- vue dans la campagne télévisée of- ti socialiste. En 1995, il est du staff mère de trois enfants, Marisol Mouvement des jeunes socialistes des Verts de la première heure – il tionale du PS, Adeline Hazan était ficielle et sur les plateaux de télé- de la campagne présidentielle et Touraine est une « vieille » mili- (MJS), dont il rejoint bientôt la di- fut l’un des fondateurs du mouve- l’une des figures du Syndicat de la vision, au soir du premier et du se- s’occupe du chiffrage budgétaire tante. En 1988, elle entre au cabi- rection nationale, et poursuit sage- ment en 1984 – n’est pas une dé- magistrature (SM). En 1986, six cond tour de ces élections des propositions du candidat socia- net de Michel Rocard à l’Hôtel ment des études de gestion à HEC. couverte pour ceux qui le fré- mois après la victoire de Jacques législatives. liste. Deux ans plus tard, le voici de Matignon, grâce à son apparte- Fils d’ouvrier, il est surveillant de quentent depuis 1989 au conseil Chirac aux élections législatives, Marie-George Buffet compte nouveau dans le premier cercle des nance au « groupe d’experts » : au- collège pour payer sa scolarité. Il municipal de Lille et, depuis 1992, elle avait accédé à la présidence de parmi les plus fidèles soutiens du fidèles de Lionel Jospin. Son nom tour de M. Rocard, principal pré- est nommé en 1988 chargé de cours au conseil régional Nord-Pas-de- ce syndicat, qui incarne depuis nouveau secrétaire national. Elle est avancé comme possible direc- sidentiable du PS, gravite alors à l’Université Paris-XIII (et vice- Calais, dont il est l’un des vice-pré- 1968 la gauche judiciaire. Elle l’a connu en 1993, dans la teur de cabinet si le premier secré- une nouvelle génération de rocar- président de la MNEF), mais sa car- sidents. s’était alors opposée aux projets- « commission du Manifeste », alors taire du PS s’installe à Matignon. diens, qui mettent leurs réflexions rière universitaire est brève. Un an A trente-sept ans, cet « écolo- symboles d’Albin Chalandon : des qu’ils préparaient ce 28e congrès, Ayant rejoint l’inspection des fi- à son profit et s’emploient à allier plus tard, à vingt-quatre ans, il est social » a déjà une longue pratique « centres fermés » pour les mi- où Robert Hue allait être élu. nances en 1985, M. Sautter affiche sens politique et compétence tech- élu conseiller municipal et maire de la « cohabitation » avec les so- neurs et des nouvelles places de « Une intégriste de l’ouverture », di- un parcours typique de haut fonc- nique. Dans son cas, il s’agit des adjoint aux côtés de Gilbert Bon- cialistes. Elle est devenue, pour lui, prison en gestion semi-privée. En saient perfidement les plus conser- tionnaire. Economiste, ancien ad- questions stratégiques et de dé- nemaison, qui l’introduit auprès de une expérience du renouvellement 1988, François Mitterrand avait été vateurs du parti. Un an plus tard, ministrateur de l’Insee, polytechni- fense, dont elle s’occupera à Ma- Pierre Mauroy. Ce dernier, premier de la culture politique de gauche. réélu à l’Elysée, mais le Syndicat elle entrait au « secrétariat » res- cien, directeur d’études à l’Ecole des tignon. Elle ne s’en laisse pas secrétaire du PS, le choisit comme « Non pas la culture hégémonique n’avait pas pour autant perdu tout serré de sept membres. Une hautes études en sciences sociales, conter par les soldats de haut rang directeur adjoint de cabinet. En d’un parti qui est bien morte, as- sens critique : dans un texte paru consécration. qui composent l’entourage mili- sure-t-il, mais celle de la différence Responsable de la « vie du par- taire du premier ministre. fondée sur un pacte de respect des ti », Marie-George Buffet est à la Six nouveaux Son passage au cabinet de Ma- « Ce sera identités. » Aujourd’hui, il mesure « C’est en réaffirmant fois le symbole de cette nouvelle tignon lui permet, en 1991, d’être le « formidable chemin de progres- génération « mutante » qui tente « recasée » au Conseil d’Etat, où un gouvernement sion » accompli. Ce parcours, par- nos valeurs, de s’imposer place du Colonel-Fa- visages elle est maître des requêtes. Elle semé d’embûches et de conflits, lui bien, et, avec son beau score du tire les conséquences des boule- de travail, pas a fourni autant de raisons d’œu- et non 1er tour dans la circonscription lais- versements que connaît le monde vrer en faveur d’un rapproche- sée par Louis Pierna, où la mili- d’hommes en général et le Parti socialiste de remerciements » ment national avec le PS, dont, au en les abandonnant, tante des Hauts-de-Seine était in- français en particulier : au- sein des Verts, il a été l’un des plus connue, de cette nouvelle vague jourd’hui, au sein du PS, elle se dé- actifs partisans. que nous de candidates féminines qu’elle a et de femmes finit comme « rocardo-jospiniste ». 1992, il se présente aux cantonales Originaire de la Sarthe, Guy largement participé à imposer. Depuis 1994, elle avait envie de – « ma première vraie élection tout Hascoët découvre le Nord en 1981. récupérerons Marie-George Buffet repousse sauter le pas, – « quitte à faire de la seul », dit-il – et devient secrétaire Avec en poche un DUT d’hygiène avec vigueur le profil de la diri- de la « gauche politique, autant en faire directe- de la fédération socialiste de Seine- de l’environnement, il effectue un nos électeurs » geante biberonnée. « Si je suis ment, sur le terrain » – de n’être Saint-Denis. stage de jeune volontaire à la Mai- montée, c’est aussi parce que les plus seulement experte, mais aussi En 1995, à trente ans, il est mûr son de la nature et de l’environne- femmes m’ont poussée. » Perma- plurielle » élue. Le choix, par le PS, du sys- pour l’action en première ligne : ment, lieu de rassemblement de en 1989, Adeline Hazan dénonçait nente du parti depuis son entrée tème de quotas de femmes candi- Gilbert Bonnemaison, malade, re- toutes les associations « alterna- une gauche « décevante ». au comité national, elle s’applique il est aussi un spécialiste incontesté dates aux législatives lui en fournit nonce à se présenter à la mairie tives ». Le premier, Pierre Mauroy Pour beaucoup de syndiqués, aussi à se dégager de l’image d’ap- du Japon, sur lequel il a écrit une di- l’occasion : elle est parachutée d’Epinay et l’intronise comme suc- vérifie l’apport de ces nouveaux al- ces positions étaient cependant paratchik qu’on pourrait lui coller. zaine d’ouvrages. En 1982, il devient dans la 3e circonscription d’Indre- cesseur. Elu maire sans difficulté liés qui bousculent les habitudes et trop timides. Sous la pression Etudiante en licence d’histoire et secrétaire général adjoint à l’Elysée, et-Loire, où elle n’a d’autre at- dans un contexte périlleux, il se les traditions. Au conseil munici- d’une jeune garde qui critiquait vi- de géographie à la faculté de Cen- poste qu’il quitte en 1985 pour le re- tache que... son nom. Apparem- coule aussitôt dans les habits de pal de Lille, Guy Hascoët fait déjà vement la direction du SM, plus sier, elle adhère au PC en 1969, «à trouver de 1988 à 1990. ment, le parachutage se passe plu- son prédécesseur, dont il reprend la figure de « stratège », débordant proche, à ses yeux, des cabinets cause de la guerre du Vietnam ». Sa Cet homme courtois, dont le car- tôt bien : choisie à 82 % par les spécialité – la sécurité – au sein du d’idées pour transformer « l’utopie ministériels que de la base, le syn- famille – sept frères et sœurs, un burant est la distance et l’humour, militants, au terme d’une cam- PS. écologique » sur le terrain. dicat frôlait l’éclatement. Les ran- grand-père compagnon ébéniste apparaît alors en première ligne. pagne interne contre une autre Quelques mois après son élec- Cette influence tactique lui est cœurs s’accumulaient, et Adeline émigré de Pologne – était plutôt En juillet 1989, Michel Rocard lance candidate, elle passe à l’étape sui- tion, c’est le drame. Le 23 août définitivement reconnue, en mars Hazan, qui faisait partie des « an- attirée par... le royalisme. Ex-pré- le grand chantier du réaménage- vante, la rencontre avec les élec- 1995, une femme de vingt-cinq ans 1992, lors de la signature d’un ac- ciens », s’éloignait peu à peu. En sidente de la fédération des rési- ment de la région parisienne. L’Ely- teurs, pour découvrir que « les est tuée dans le quartier d’Orge- cord surprise avec le PS. Avec 1990, elle rejoignait le secrétariat dences universitaires de France, sée le propulse quelques mois plus gens veulent qu’on les écoute et mont : « Des années de travail ré- l’élection de Marie-Christine Blan- général à l’intégration, puis, l’an- Marie-George Buffet a ensuite tra- tard préfet de la région Ile-de- veulent parler de choses impor- duites à néant. » Il multiplie les in- din à la présidence de la région née suivante, la délégation inter- vaillé comme employée à la mairie France. A charge pour lui, dans tantes ». « J’aime bien », dit-elle novations locales, se mêle aux Nord-Pas-de-Calais, les Verts, ministérielle à la ville (DIV), où du Plessis-Robinson. Elle a été ad- cette région largement dominée par simplement de l’expérience. débats sur les emplois de ville et pour la première fois en France, elle suivait les problèmes de pré- jointe au maire de Châtenay-Ma- le RPR et où le PC malmène le PS, Quant à sa « compétence », Ma- suggère au PS de présenter un pro- ont trouvé un « laboratoire » d’en- vention de la délinquance. labry, chargée des affaires sociales de mener à bien la révision du sché- risol Touraine a « toujours eu la vo- jet de loi sur la prohibition des vergure. Nommé vice-président En plus de son cabinet de juge de 1977 à 1983. « Elle a une vie ma directeur d’Ile-de-France. Avec lonté de réfléchir à l’ensemble des armes à feu. En 1997, c’est la consé- chargé des transports, Guy Has- des enfants, au palais de justice de avant le parti, et en dehors », as- un stoïcisme certain, Christian relations internationales ». Ce fut, cration : désigné « élu local de l’an- coët ne se prive pas d’agir. Les dis- Paris, Adeline Hazan, qui a adhéré surent ses proches. Sautter s’attellera à cette tâche, su- avant l’effondrement du bloc de née », il est chargé par Lionel Jos- cussions sont souvent âpres avec au PS en 1992, est aujourd’hui se- Ancienne collaboratrice de Gi- bissant les assauts de la droite et la l’Est, à travers le prisme des ques- pin d’un rapport sur « la sécurité les élus des autres collectivités lo- crétaire nationale aux questions sèle Moreau, au secteur colère des communistes. tions stratégiques. Aujourd’hui, pour garantir la cohésion sociale ». cales, les représentants de divers de société. « C’est en réaffirmant « femmes » du parti, Marie-George Christian Sautter saura néan- elle pense que l’une des « clés » Deux idées-force : un, développer, groupes de pression, notamment nos valeurs, et non en les abandon- Buffet est une vraie féministe. Elle moins faire preuve d’une solide des relations internationales est de à côté de la police, une présence les « intégristes de la route », à qui nant, que nous récupérerons nos évoque avec bonheur la « belle » obstination, et de réelles capacités « constituer des régions dotées sécuritaire dans les transports, les il tente d’imposer ses visions et ses électeurs, y compris ceux qui fuient manifestation pour le droit des diplomatiques, pour finalement d’identités culturelles relativement centres commerciaux, à proximité propositions alternatives en fa- vers l’extrême droite », répète vo- femmes, le 25 novembre 1995, ou mener à bien la révision du schéma fortes », de penser en termes de des écoles ; deux, accroître les veur du rail et des voies navi- lontiers cette femme qui fait partie encore le succès de leurs assises directeur, dont la droite – Jacques « va-et-vient entre la régionalisa- moyens judiciaires afin que tous les gables. de la liste des candidats « pros- nationales, à la mi-mars 1996. Tout Chirac et Charles Pasqua en tête – tion et la mondialisation ». petits délits soient sanctionnés dès Depuis 1995 qu’il assume la res- crits » par le Front national. Au dé- son matériel électoral et ses dis- ne voulait à aucun prix. Négociant Pendant la campagne, il se mur- le premier faux pas et casser ainsi ponsabilité de l’emploi et de la so- but de l’année, dans un rapport cours témoignent de son souci de avec Pierre-Charles Krieg, puis avec murait qu’en cas de succès, dans l’engrenage de la délinquance. lidarité, Guy Hascoët laboure le sur l’immigration, elle affirmait parler d’abord à ses « électrices » Michel Giraud, les deux présidents une circonscription loin d’être ga- Ses idées séduisent l’état-major « champ de l’utilité sociale », la ré- ainsi clairement vouloir rompre ou ses « concitoyennes ». Avec ses successifs du conseil régional d’Ile- gnée d’avance, elle pourrait ne pas du PS. Bruno Le Roux se présente duction du temps de travail, la avec le mythe de « l’immigration amis, elle s’amuse de la « misogy- de-France, un avant-projet pourra rester un simple député de base. pour la première fois aux législa- création d’emplois de proximité, la zéro », un objectif qui n’est, à ses nie » de , qui n’a être finalisé. Son adoption défini- La réponse de l’intéressée est d’un tives. Symbole de ces socialistes reconnaissance des associations yeux, « ni réalisable ni souhai- pas voulu laisser sa circonscription tive n’interviendra qu’après son dé- classicisme éprouvé : si elle fait de nouveaux, cuvée 1997, il entend de chômeurs... Plus qu’ailleurs, table ». « Nous voulons rompre avec du Val-de-Marne à une femme au part de la préfecture de région, en la politique, c’est pour servir un bien « ne pas se laisser voler la vic- Roubaix, où 50 % des jeunes (dont la politique actuelle, qui fait de tout prétexte que la circonscription 1993, lorsque Charles Pasqua re- « engagement collectif ». Au poste toire ». Thème connu. Mais il a 60 % issus de l’immigration) ont étranger un suspect en puissance », était « trop difficile ». Avec Made- trouve le ministère de l’intérieur. qu’on voudra lui donner. confiance. « Lionel » ne laissera pas moins de vingt-cinq ans, renforce concluait-elle alors. leine Vincent, elle travaillait, avant Christian Sautter renoue alors l’histoire bégayer. « Il nous a rendu ses convictions sur l’urgence de la dissolution, à la création d’une avec sa passion – le Japon –, Jean-Louis Andreani la capacité de faire de la politique, solutions nouvelles. Anne Chemin association loi de 1901 sur l’his- l’économie internationale et l’« ex- dit-il. Ce sera un gouvernement de toire des femmes et du parti... pertise » au sein de l’équipe Jospin. travail, pas de remerciements. » Michel Delberghe

Ariane Chemin François Bonnet Véronique Maurus LeMonde Job: WMQ0306--0013-0 WAS LMQ0306-13 Op.: XX Rev.: 01-06-97 T.: 22:35 S.: 111,06-Cmp.:02,15, Base : LMQPAG 46Fap:99 No:0879 Lcp: 196 CMYK

HORIZONS-DOSSIER LE MONDE / MARDI 3 JUIN 1997 / 13 Une pensée économique keynésienne pimentée de marxisme

’EST une devinette donc à Jean-Pierre Chevènement, semble se plier à la nouvelle doctrine quelle part voulons-nous faire aux antérieures. « Le moment est venu de que Lionel Jospin Sur les pour lequel la nouvelle politique à laquelle le PS s’est ralliée, et son idées, aux instruments socialistes ? » rompre avec l’orthodoxie écono- ne répugne pas à économique n’est pas « socialiste », propos ne se distingue guère de Par petites touches successives, mique », proclame-t-il dans Libéra- raconter : qu’a-t-il et lâche, dans L’Unité (28 octobre ceux, d’une tonalité très libérale, M. Jospin, à qui les proches de Pierre tion le 13 septembre 1993. fait, le mardi 12 mai questions 1983), sa fameuse formule : « Est-ce qu’affectionnent tous les dirigeants Bérégovoy reprochent de conduire Admettant que sa démarche est 1981, au surlende- une “parenthèse” ? Je dirais plutôt socialistes, défendant la politique du une politique budgétaire beaucoup un peu identique à celle de Philippe main de la victoire que c’est un passage obligé, qui nous a franc fort. Au milieu des années 80, trop coûteuse pour l’éducation na- Séguin, il appelle à « la définition historique des so- économiques, amenés à infléchir notre politique, et il le premier secrétaire semble même tionale, va ainsi prendre de plus en d’une nouvelle pensée économique » : cialistes ? Profes- est trop tôt pour dire quand cette pa- en venir à des convictions mi-réa- plus ses distances avec cette poli- « Je précise bien qu’il ne s’agit pas de seur d’économie à l’IUT de Sceaux, il renthèse sera refermée. » listes, mi-résignées. « Il faut éviter tique libérale qu’il dénonce et poser substituer la dévaluation compétitive à Ca, tout bonnement, été assurer ses M. Jospin Pourtant, si M. Jospin se convertit deux écueils : le premier est de re- les fondements d’une politique qui, la désinflation compétitive, ou encore cours. Aux étudiants de première à la rigueur, il ne se rallie pas à la po- prendre le discours trop optimiste de si elle n’est pas hétérodoxe sur le de revenir à 1981. Mais il faut inverser année, il a parlé du rôle de l’Etat litique de l’offre, chère aux libéraux. 1981 ; le second est de se résigner au plan monétaire, l’est fortement sur nos priorités de politique économique. dans l’économie, puis, devant ceux entend rompre Dès cette époque, il y a dans son chômage. Il faut dire, avec plus de d’autres. Autrement dit, il Aujourd’hui, on fixe des objectifs de deuxième année, il a évoqué la propos, aussi contradictoire soit-il, modestie qu’auparavant, que l’on va commence progressivement – et il quantifiables pour les prix, le déficit réforme du système monétaire in- comme une résistance à la « culture prendre le harnais et tirer », confie-t- est l’un des premiers au PS à le faire budgétaire, et le chômage va comme ternational. avec le de gouvernement » qui submerge il au Point le 30 mars 1987. – à dire qu’il faut revenir à une poli- on peut. Inversons. Fixons des objectifs L’anecdote est révélatrice. Si Fran- alors le PS. La notion même de « pa- Mais lorsque commence le second tique favorisant la demande, sans quantifiables pour l’emploi et voyons çois Mitterrand a longtemps affiché renthèse » est en elle-même expli- septennat de M. Mitterrand, les par- pour autant tomber dans les erre- comment les atteindre ! (...) Le modèle son désintérêt – pour ne pas dire son « bérégovisme » cite. Alors que Pierre Bérégovoy va tisans de M. Jospin sont aux avant- ments de 1981. dominant, avec lequel je propose une mépris – pour les questions stricte- construire sa politique économique postes pour reprocher à M. Bérégo- Cette « autre » politique, il en des- rupture, ce ne sont pas les socialistes ment économiques, si Jacques autour du credo de la « désinfla- voy de ne se préoccuper que des sine les contours alors qu’il n’a pas qui l’ont inventé. Ils s’y sont ralliés. Ce Chirac a fortement fluctué au cours et favoriser tion », M. Jospin est dans un autre grands équilibres économiques, pas même quitté le gouvernement. De- modèle n’est pas le nôtre, et nous per- des ans – travailliste en 1975, libéral état d’esprit. « Si nous arrivons à ré- des équilibres sociaux, et de creuser puis le virage de la rigueur, proteste- drions notre identité à vouloir nous y en 1986, quasi keynésien en 1995 –, tablir nos grands équilibres – ainsi les inégalités. Dans ce débat t-il ainsi dans L’Evénement du jeudi accrocher. » M. Jospin, lui, a sur ces sujets une une politique commerce extérieur, monnaie, infla- autour du règne de « l’argent fou » (12-18 septembre 1991), « l’orthodoxie Déclaration prémonitoire ! Le bas- véritable expertise et, de surcroît, tion –, je crois que nous pourrons envi- et des « années-fric », M. Jospin, qui dominante a étouffé le débat ». Dans culement de la conjoncture explique une pensée qui lui est propre. Plus sager à nouveau une phase de crois- est alors ministre de l’éducation na- Vendredi, le 27 septembre suivant, il en partie ces propos hétérodoxes. que cela ! Malgré toutes les sinuosi- de relance sance relative. Pourquoi ne pas tionale, ne peut tenir les premiers se démarque du gouvernement en Alors que l’inflation a été vaincue, tés de la politique économique so- imaginer un modèle économique em- rôles. Mais par de petites phrases sa- soulevant cette question icono- que le commerce extérieur est deve- cialiste au cours des deux derniers pruntant à la fois à Keynes – distribuer vamment distillées, il suggère épiso- claste : « Le temps n’est-il pas venu de nu fortement excédentaire, et que septennats, il n’a guère varié dans mieux – et à Marx – réformer les struc- diquement que la politique écono- desserrer l’étau ? » l’économie s’enfonce dans la réces- ses convictions économiques, et la rement celui d’une génération de tures ? », écrit-il ainsi le 22 juillet mique suivie n’est pas la bonne. Ne participant pas au gouverne- sion, M. Jospin a de bonnes raisons plate-forme du PS, concoctée pour militants de gauche qui, ne pouvant 1983, dans l’hebdomadaire socialiste Dans un « apport à la discussion » ment de M. Bérégovoy, M. Jospin, d’enterrer le « bérégovisme » pour ces législatives, porte aussi sa plus se réclamer du marxisme, du Vendredi. publié, le 26 juillet 1989, en vue du qui a émis des réserves sur le traité préconiser une politique de relance. marque, autant que celle des fait de l’effondrement du commu- Cette référence épisodique à congrès de Rennes, il préconise que de Maastricht et qui, dans une for- Mais ce propos n’est pas seulement « économistes » du PS, Dominique nisme, se réfugie, en partie par dé- Marx, dont François Mitterrand l’on aille « vers une économie de par- mule lourde de sens, a appelé à dire de circonstance. Rompant avec la Strauss-Kahn, Pierre Moscovici ou faut, dans les thèses keynésiennes, cesse de jouer au lendemain de 1981, tage ». Il souhaite, en particulier, que « non au non », plutôt qu’à dire un politique de l’offre, d’inspiration for- François Hollande. comme pour résister à la vague libé- est d’ailleurs symptomatique de ce l’on donne « aux salaires une dyna- « oui » enthousiaste à l’Europe libé- tement libérale, défendue pendant Le fil de la pensée jospinienne est, rale qui gagne du terrain, au cours refus du premier secrétaire du PS de mique plus forte que celle des revenus rale qui se dessine, prend alors de près de dix ans par Pierre Bérégo- certes, parfois difficile à suivre. Pre- des années 80, jusque dans les rangs se plier au conformisme écono- non salariaux » et que l’on conduise plus en plus de libertés. Dans La Tri- voy, M. Jospin affiche alors ouverte- mier secrétaire du PS lors du pre- socialistes. mique du moment. « Redécouvrir « une grande réforme de notre fiscali- bune-Desfossés, le 15 février 1993, il ment une doctrine économique mier septennat de François Mitter- Ainsi, quand le gouvernement de l’économie classique, c’est être aussi té ». Quelques semaines plus tard, n’exclut pas « une politique moné- d’inspiration franchement keyné- rand, ministre de l’éducation Pierre Mauroy négocie le doulou- plus près de Marx. Voilà le para- réunissant ses partisans le 30 sep- taire moins stricte ». sienne, qu’il n’a en fait jamais reniée. nationale au début du second, il est reux virage de la rigueur, en 1982- doxe... », confie-t-il à Libération le tembre 1989, il brocarde de nouveau Après l’effondrement de la gauche La plate-forme que le PS a présentée tenu à une sorte d’obligation de ré- 1983, M. Jospin n’a pas d’états 5 octobre 1985. Le marxisme, pour- implicitement son collègue du gou- aux élections de 1993, M. Jospin va aux élections législatives trouve ici sa serve et ne dit les choses qu’à demi- d’âme. Il estime que son rôle est de suit-il, « c’est un instrument d’analyse, vernement, Pierre Bérégovoy, en donc jusqu’au bout de sa pensée et source. mot. Pourtant, il les dit, et l’on peut le faire accepter par le PS, et il ne pas la bible du PS ». soulevant cette question : « Dans tourne complètement le dos aux suivre son cheminement. C’est clai- ménage pas sa peine. Il s’oppose Un moment, certes, M. Jospin une politique d’inspiration libérale, dogmes économiques des années Laurent Mauduit Un agenda surchargé

LIONEL JOSPIN n’a cessé de le ré- donner des signes forts. M. Jospin péter durant sa campagne : il en- Le nouveau a indiqué que sa priorité sera de tend appliquer son programme réunir une conférence (Etat, patro- « sur la durée ». Dans les premières nat, syndicats) sur les salaires, semaines, il ne sera pourtant pas premier l’emploi et la réduction du temps maître de son agenda : il devra ou- de travail. Son gouvernement vrir les dossiers que lui imposent les pourrait décider très rapidement calendriers français et européen. Il ministre de remplacer une partie de la coti- devra aussi donner des signes forts sation maladie des salariés par la au peuple de gauche. CSG élargie à tous les revenus. En- devra fin, il a l’intention de mettre très 1 vite en chantier la loi-cadre sur les L’EUROPE trente-cinq heures (payées trente- LES DOSSIERS EUROPÉENS SONT neuf), les partenaires sociaux PARMI LES PLUS URGENTS s’atteler ayant trois ans pour en négocier Le calendrier est sur ce point, très les modalités. serré : visite de Tony Blair le 11 juin, sommet franco-allemand en priorité le 13, Conseil européen d’Amster- 4 SÉCURITÉ dam les 16-17 pour boucler les tra- vaux de la conférence intergouver- à quelques SOCIALE LA LOI LUI FAIT OBLIGATION DE nementale en vue de la révision du RÉUNIR LA COMMISSION DES traité de Maastricht. Avant d’en- COMPTES DE LA SÉCURITÉ SOCIALE trer en campagne, M. Jospin avait dossiers COURANT JUIN précisé les conditions que le PS

Cette dernière devrait, logique- ARTINIANPATRICK / CONTACT mettait au passage à la monnaie ment, annoncer un déficit cumulé LA CAMPAGNE ÉLECTORALE. Les socialistes ont voulu placer leur campagne sous le unique. Depuis, son programme a importants d’environ 72 milliards sur la période signe « du sympathique et du chaleureux », selon l’expression de Jean-Christophe prévu quatre conditions : la parti- nances rectificative marquerait un 1996-1997. M. Jospin, qui a exclu Cambadélis. Ci-dessus, vendredi 30 mai à Conflans-Sainte-Honorine (Yvelines), Lionel cipation de l’Italie, de l’Espagne et, acte politique fort et permettrait de toute diminution des rembourse- Jospin et Dominique Voynet célèbrent l’alliance vert et rose sous l’œil des caméras. « s’il le souhaite », du Royaume- marquer la priorité que la gauche ments et toute hausse des cotisa- Ci-dessous, les jeunes militants du PS, jeudi 29 mai à Lille, accueillent leur chef de file Uni ; un pacte pour la croissance et donne à l’emploi. Selon Pierre Mos- tions, est resté elliptique sur les dans la liesse, lors de l’ultime meeting unitaire de la gauche. l’emploi entre les Quinze ; un covici, responsable des études au moyens de réduire le déficit actuel. « gouvernement économique euro- bureau national du PS, ce collectif péen » faisant contrepoids à la budgétaire pourrait comporter des Banque centrale européenne ; un mesures pour le logement, l’éduca- 5 FRANCE euro qui ne soit pas surévalué par tion, la recherche et la police. Le rapport au dollar et au yen. Avec la TÉLÉCOM gouvernement pourrait aussi an- bénédiction de Jacques Delors, noncer rapidement une baisse de la Lionel Jospin a assuré, à la veille ET THOMSON TVA sur les produits de première LE PS A FAIT SAVOIR QU’IL CONSUL- de la dissolution, qu’il ne faut pas nécessité. TERA LES SALARIÉS DE L’OPÉRA- lire les critères de Maastricht de Parallèlement, le projet de budget TEUR PUBLIC manière stricte, mais « en ten- 1998, déjà commencé par M. Juppé, La période de réservation des actions dance ». devra être remis sur le métier. Le de France Télécom devait s’ouvrir le patron du PS, qui s’est engagé à ne 6 juin et l’introduction en Bourse in- 2 COLLECTIF pas augmenter les prélèvements tervenir le 7 juillet. M. Jospin a an- obligatoires (45,7 % du PIB), dit noncé son intention de consulter les BUDGÉTAIRE vouloir mener une politique « sou- 165 000 salariés du quatrième opéra- ET PROJET DE LOI cieuse des dépenses publiques ». teur téléphonique mondial et confir- DE FINANCES mé, ces derniers jours, sa décision de 3 SALAIRES ne pas privatiser. Mais l’Etat atten- 1998 dait 30 à 50 milliards de cette opéra- M. JOSPIN FERA D’ABORD RÉALI- ET EMPLOI tion pour financer les dotations en SER UN « AUDIT DES FINANCES PU- LE CALENDRIER N’IMPOSE À LA capital d’autres entreprises pu- BLIQUES » NOUVELLE ÉQUIPE GOUVERNEMEN- bliques. Le problème de cette manne Il lui faut évaluer le plus précisé- TALE QU’UN AJUSTEMENT DU SMIC perdue devra donc trouver une ré- ment possible les marges de ma- AU 1ER JUILLET ponse très rapide. Quant à Thomson, nœuvre budgétaires dont le nou- Il lui sera difficile de refuser un le PS n’envisage pas sa privatisation. veau gouvernement dispose pour « coup de pouce ». Mais l’attente

financer ses priorités. Une loi de fi- suscitée par sa victoire l’oblige à Jean-Michel Bezat ARTINIANPATRICK / CONTACT LeMonde Job: WMQ0306--0014-0 WAS LMQ0306-14 Op.: XX Rev.: 02-06-97 T.: 09:44 S.: 111,06-Cmp.:02,15, Base : LMQPAG 46Fap:99 No:0880 Lcp: 196 CMYK

14 / LE MONDE / MARDI 3 JUIN 1997 HORIZONS-ANALYSES 0 123 21 bis, RUE CLAUDE-BERNARD - 75242 PARIS CEDEX 05 Tél. : 01-42-17-20-00. Télécopieur : 01-42-17-21-21. Télex : 206 806 F Tél. relations clientèle abonnés : 01-42-17-32-90 Internet : http : //www.lemonde.fr

ÉDITORIAL A l’étranger, un président affaibli A spectaculaire dé- culaire, le 25 octobre 1995, en fa- faite de la droite ne veur de l’euro et de la rigueur conduit pas seulement propulsa enfin le président fran- L à un changement de çais au centre de la construction majorité en France ; elle se tra- européenne. Après le couple duit aussi et peut-être surtout Kohl-Mitterrand, le tandem par un affaiblissement considé- Kohl-Chirac allait redevenir le rable de Jacques Chirac sur la moteur de l’Europe. scène internationale. Déjà, à la Par son dynamisme et son dis- veille du scrutin, la tonalité de la cours, Jacques Chirac était par- presse étrangère révélait une venu à impressionner ses pairs. méfiance croissante des obser- Il avait, sur beaucoup d’entre vateurs à l’égard d’un chef d’Etat eux, l’avantage de disposer dans qui ne semble pas capable d’ap- son pays de toutes les manettes précier l’évolution de l’opinion du pouvoir. Il avait aussi pour lui dans son propre pays. Dans les la durée. Ses grands partenaires grandes capitales, en Europe avaient fini par croire qu’il avait comme ailleurs, l’échec de ce aussi une vision, une détermina-

« pari fou » qu’était cette disso- tion et une grande intelligence DESSIN : KERLEROUX lution anticipée risque d’amener politique. Aujourd’hui, le scrutin les principaux partenaires de la révèle à la face du monde qu’il France à regarder d’un autre œil n’en était peut-être rien. un homme qui va désormais de- Jacques Chirac avait justifié la La droite est passée, d’un tour à de M. Le Pen en espérant leur re- droite pour refuser la « fatalité de voir partager sa politique étran- dissolution en expliquant qu’il Le « champ l’autre, de 36,16 % des voix à plus de connaissance. l’échec » – comme disait aussi Mi- gère avec celui qui fut, lors de voulait une nouvelle majorité 46,04 %, la gauche de 42,10 % à En annonçant la dissolution de chel Rocard, il y a vingt ans, parlant l’élection présidentielle, son pour que « la France parle d’une 48,36 %. La progression de la droite l’Assemblée nationale moins d’un de la gauche – ne peuvent en effet principal adversaire. seule voix ». Il se faisait fort d’ob- de ruines » s’explique par l’arrivée d’absten- mois après la grande manifestation laisser de doute à M. Chirac sur ce Dès son arrivée à l’Elysée, à tenir des électeurs un mandat tionnistes du premier tour et par les qui avait rassemblé des dizaines de qui ressemble à l’ouverture préma- l’été 1995, Jacques Chirac avait européen plus clair. Il souhaitait reports de voix d’électeurs du Front milliers de personnes contre le turée d’une compétition pour la di- clairement fait savoir au monde une majorité resserrée, plus de la droite national ; celle de la gauche par la Front national à Strasbourg, où ce- rection du bloc conservateur. La co- qu’il allait devoir, désormais, unie, pour aborder la dernière plus forte participation et par les re- lui-ci réunissait son congrès, habitation qui commence sera compter sur lui et, avec lui, sur la ligne de l’union économique et Suite de la première page ports de voix de l’extrême gauche Jacques Chirac pouvait imaginer marquée d’abord par la tension que France. Quelques coups d’éclat y monétaire. Il entendait ainsi (2,18 % au premier tour). Si les ren- que la mobilisation sociale contre feront régner à droite la mise en suffirent pour faire comprendre participer aux prochains grands Si le Front national, qui ne forts dont elle a bénéficié ont per- l’extrême droite était propice à une cause du chef de l’Etat et l’obliga- aux autres Grands de la planète rendez-vous internationaux de comptera qu’un élu dans la nouvelle mis à la droite de sauver des sièges offensive politique qui lui infligerait tion pour celui-ci d’y rétablir sa po- que la France était de retour. Ce la France en position de force. Assemblée en la personne du maire en Ile-de-France, dans le Centre, un recul sévère. C’est le contraire sition. Elu à contre-courant en 1995, furent notamment la reprise des L’échec est patent. de Toulon, Jean-Marie Le Chevallier, dans le Rhône et en Provence, par qui s’est produit : la barrière morale ayant permis à la gauche de revenir essais nucléaires dans le Paci- Le président français se rassu- a donc réussi mieux qu’il n’avait ja- exemple, ceux qu’a reçus la gauche contre le lepénisme lui a interdit de au pouvoir à contre-temps, voilà fique, une diplomatie plus active rera peut-être en observant les mais pu le faire jusqu’alors à déta- lui ont assuré de nets succès dans le faire élire plus d’un député, mais sa M. Chirac condamné au contre-em- dans le bourbier bosniaque ou difficultés que rencontre chez lui cher son électorat de la droite, la Nord, l’Ouest, le Sud-Ouest et en capacité de nuisance est demeurée ploi d’un président-arbitre, alors un numéro très volontariste au le chancelier Helmut Kohl. Leur cloison qui les sépare n’est pas her- Franche-Comté, où est élue Domi- forte dans les urnes. Sénateur qu’il demandait aux Français les G 7, lors du sommet des sept temps serait-il passé ? La suite métique. Là où le Front national nique Voynet, porte-parole des (RPR), l’académicien Alain Peyre- moyens de redevenir un président grands pays industrialisés de dira si un couple Blair-Jospin est n’était pas présent au second tour, le Verts. fitte propose, dans l’éditorial du Fi- de plein exercice s’appuyant, à la Halifax au Canada, en juillet en train de prendre, en Europe, report de ses voix s’est fait très ma- La droite n’est donc pas parvenue garo du 2 juin, une solution : l’union mode gaullienne, sur une majorité à 1995. Le revirement specta- la relève du couple Kohl-Chirac... joritairement en faveur de la droite. à résorber la dissidence d’une partie pure et simple entre la droite et l’ex- sa main. Un tiers des électeurs de l’extrême de son électorat, fixée depuis de trême droite, sur le modèle de celle Non seulement cette majorité droite a préféré s’abstenir. Un cin- longues années maintenant sur un que François Mitterrand avait n’existe plus, mais l’heure est reve- 0123 est édité par la SA LE MONDE Président du directoire, directeur de la publication : Jean-Marie Colombani quième a choisi de voter pour la vote d’extrême droite. Le fossé s’est nouée avec les communistes il y a nue, à droite, à la recherche d’une Directoire : Jean-Marie Colombani ; Dominique Alduy, directeur général ; gauche : le « gaucho-lepénisme » même creusé entre elle et ces élec- vingt-cinq ans. « reconstruction » maintes fois évo- Noël-Jean Bergeroux, directeur général adjoint reste un phénomène controversé, teurs qui, il y a neuf ans ou, même, il quée, depuis dix ans, de refondation Directeur de la rédaction : Edwy Plenel mais le mouvement d’une frange de y a quatre ans encore, préféraient M. CHIRAC À CONTRE-EMPLOI libérale en « rénovation », de « pri- Directeurs adjoints de la rédaction : Jean-Yves Lhomeau, Robert Solé l’électorat vers le Front national au malgré tout soutenir au second tour Défaite une nouvelle fois, comme maires à la française » en rêve d’un Rédacteurs en chef : Jean-Paul Besset, Bruno de Camas, Pierre Georges, Laurent Greilsamer, Erik Izraelewicz, Michel Kajman, Bertrand Le Gendre premier tour, puis vers la gauche au le RPR ou l’UDF plutôt que de voir en 1981 et comme en 1988, la droite « grand parti conservateur » à l’an- Directeur artistique : Dominique Roynette second, n’est pas contestable. élus un socialiste ou un commu- présente aujourd’hui le spectacle du glo-saxonne. Jusqu’à maintenant, la Rédacteur en chef technique : Eric Azan La deuxième explication de la vic- niste. En même temps, les mouve- « champ de ruines » que Michel Ro- maladie chronique de la droite était Secrétaire général de la rédaction : Alain Fourment toire de la gauche réside dans l’abs- ments qui continuent à se produire card avait constaté à gauche en attribuée par sa jeune génération Médiateur : Thomas Ferenczi tention, qui a régressé au second d’un bord à l’autre démontrent que 1994. Pour le président de la Répu- aux effets délétères d’une vieille l’attitude adoptée par les dirigeants blique, affaibli par un revers électo- querelle entre ses chefs « histo- Directeur exécutif : Eric Pialloux ; directeur délégué : Anne Chaussebourg tour – passant de 32,04 % le 25 mai à Conseiller de la direction : Alain Rollat ; directeur des relations internationales : Daniel Vernet 28,87 % le 1er juin –, mais dans une de l’ex-majorité, qui n’avaient ja- ral qu’il a lui-même provoqué en riques », Jacques Chirac et Valéry proportion insuffisante pour réta- mais été aussi fermes que ces der- convoquant les électeurs un an Giscard d’Estaing. Cette explication Conseil de surveillance : Alain Minc, président ; Gérard Courtois, vice-président blir la situation de l’ex-majorité. nières années – du moins jusqu’à la avant l’échéance normale, l’effon- n’est plus de saison, et la jeune gé- Anciens directeurs : Hubert Beuve-Méry (1944-1969), Jacques Fauvet (1969-1982), Plus exactement, le surcroît de par- veille du premier tour – dans la drement de son camp comporte un nération, d’Alain Juppé à François André Laurens (1982-1985), André Fontaine (1985-1991), Jacques Lesourne (1991-1994) ticipation enregistré d’un tour à condamnation des positions du risque grave : celui de le laisser sans Léotard en passant par Philippe Sé- Le Monde est édité par la SA Le Monde l’autre semble avoir servi la droite, Front national, n’est pas partagée soutien parlementaire face au gou- guin, Nicolas Sarkozy ou François Durée de la société : cent ans à compter du 10 décembre 1994. mais aussi la gauche, la crainte de la par la totalité de leurs électeurs, ni vernement qu’il devait demander à Bayrou, doit désormais porter le Capital social : 935 000 F. Actionnaires : Société civile « Les rédacteurs du Monde ». défaite mobilisant les électeurs de même par certains de leurs respon- Lionel Jospin, dès lundi matin, de poids de ses responsabilités. Association Hubert Beuve-Méry, Société anonyme des lecteurs du Monde, Le Monde Entreprises, Le Monde Investisseurs, l’une, et le parfum de la victoire, les sables ou élus locaux, prompts à former. Le Monde Presse, Iéna Presse, Le Monde Prévoyance autres. flatter les sentiments des partisans Les voix qui se sont fait entendre à Patrick Jarreau

engagements. Il n’est pas exclu raissent pas avoir, à ce stade, des déficits va se poser de fa- çais ne doivent pas renoncer à Pourtant un doute subsiste : il Ne pas décevoir que cet homme soit au rendez- suffisamment appréhendée : çon urgente. Au chapitre de la cette partie de leur héritage, concerne les institutions. « S’il vous ; il n’est pas interdit de le comment inventer une nouvelle vertu, donc de la réforme des même sous la pression de l’aile faut imaginer quelque chose qui Suite de la première page souhaiter : en soi, une telle per- social-démocratie, préférable à institutions, la voie est tracée. la plus nationaliste de la nou- ferait repartir la France en quête formance constituerait dans l’ultra-libéralisme, dans une Le programme énoncé par le velle coalition, Au contraire, d’un nouveau régime, on peut Pour ouvrir la voie, fût-ce notre vie publique une véritable économie mondialisée ? Com- groupe des cinq constitutionna- face à une Amérique redevenue forger un conte plausible : un dans la défaite, à une adapta- et salutaire révolution. ment adapter les instruments listes dans nos colonnes est de impériale, à une Asie en marche président de rencontre, gérant tion libérale, à une vision de la Sans doute devra-t-il considé- de l’Etat-Providence lorsque nature à répondre aux attentes et à des marchés qui tous trois mal sa légitimité, perdant le droite inspirée du conserva- rer que le temps d’une ap- l’Etat manque si cruellement de des Français : « réviser la espèrent enrayer la marche vers contrôle de la majorité présiden- tisme éclairé qui règne par proche modeste de la politique ressources ? Comment susciter Constitution » afin de ramener la monnaie unique, c’est-à-dire tielle, abandonnant à des maires exemple en Allemagne, et que est venu : la société qui a refusé plus de croissance, clé de tout le mandat présidentiel à cinq un progrès décisif dans l’affir- du Palais changeants ses bras prône désormais ouvertement un chèque en blanc à la droite progrès à venir, ce qui signifie ans, de « vivifier » le référen- mation d’une identité euro- vaincus, jetés comme de vaines Edouard Balladur. Au reste, le n’en a pas délivré un à la allier haut niveau de confiance dum, d’interdire tout cumul des péenne, Lionel Jospin, avec ses armes : il serait temps alors de se test de la forclusion du gaul- gauche. Ayant pris la parole à et bas taux d’intérêts, et don- mandats, d’achever la décentra- amis socialistes des autres pays demander si la Ve République a lisme réside bel et bien dans l’occasion de cette dissolution, ner plus de sécurité alors même lisation et de « rendre l’Etat im- européens – neuf sur quinze vécu » : ce scénario date de l’incapacité à faire reculer l’ex- il est probable qu’elle voudra la que les pays qui font au- partial ». Le débat est ouvert : pays de l’Union sont dirigés par 1992, il émane de l’éminent trême droite. Des origines du garder à travers mille et une jourd’hui plus de croissance on peut encore faire mieux... des sociaux-démocrates – doit Georges Vedel et résume à lui gaullisme à sa refondation, son manifestations qui imposeront l’obtiennent par davantage de Dans tous les cas, au moment confirmer la détermination des seul le doute qui, après avoir histoire est jalonnée – entre au nouveau pouvoir de réhabili- « flexibilité », donc d’insécuri- où M. Jospin s’apprête à former Quinze à réaliser l’euro, en longtemps entouré le candidat autres – par une lutte victo- ter, d’abord et avant tout, un té ? Plus généralement, le prin- son gouvernement, il faut y temps et en heure. Chirac, atteint désormais le rieuse contre les formes fran- véritable dialogue social. A cipal défi pour le PS de Lionel ajouter le nécessaire renouvel- Un nouveau chantier s’ouvre président, et à travers lui, sa çaises du fascisme, Vichy puis condition que la société cesse Jospin est le suivant : il a gagné lement des acteurs et des ac- donc pour le pays. Un choix a fonction. l’OAS. Les gaullistes d’au- de tout attendre de l’Etat, et en réhabilitant l’idée d’un parti trices de la vie publique. été fait, clairement. La nouvelle L’histoire de nos cinq pro- jourd’hui se seraient perpétués que ce dernier, en retour, s’at- « réformiste », dans une majorité est forte, mais son chaines années dira s’il revenait s’ils avaient réussi à écarter la tache à ses missions essen- période qui ne l’est pas. Pour- L’IDÉAL EUROPÉEN socle électoral est limité. Cela ou non à un gaulliste de dyna- menace du néo-fascisme. tielles : sa propre réforme, la ra-t-il, appuyé sur une géogra- Ranimer l’idéal européen est impose à M. Jospin de souder la miter par erreur les institutions Les Français ont aussi accor- réduction de la « fracture so- phie politique de l’Europe plus enfin une nécessité absolue. coalition victorieuse et de faire de la Ve République. dé leurs suffrages à qui parais- ciale » et, avec la remise en favorable depuis l’élection des Après la victoire du travailliste preuve d’un sens aigu du dia- sait le plus enclin à favoriser marche du pays, une action si- travaillistes, être vraiment ré- Tony Blair en Grande-Bretagne, logue avec le pays. J.-M. C. une nouvelle manière de faire gnificative contre le chômage formiste et s’opposer à la ty- celle de la gauche en France de la politique. Là se trouve dont il faut rappeler que la ma- rannie des marchés ? peut ouvrir une nouvelle ère une bonne part de la promesse jorité sortante l’a laissé à un ni- Dans l’immédiat, concédons- pour la construction euro- faite au pays par Lionel Jospin. veau sans précédent dans notre lui un temps d’observation : la péenne. Conscients des enjeux 0123 SUR TOUS LES SUPPORTS L’homme a une image – rigou- histoire économique et sociale. gauche revient au pouvoir alors de la mondialisation, les Télématique : 3615 code LEMONDE reuse – et a forgé une alliance que le pays est dans une situa- peuples européens souhaitent – arc-en-ciel – qui l’une et TROIS EXIGENCES tion difficile. La croissance est l’Europe, mais comme en té- Documentation sur Minitel : 3617 code LMDOC l’autre, l’une au service de Dans ce contexte, trois exi- encore hésitante, les rentrées moignent tous les scrutins ré- ou 08-36-29-04-56 l’autre, peuvent aider à une gences apparaissent : ne pas fiscales très inférieures aux pré- cents, ils veulent une Europe Le Monde sur CD-ROM : renseignements par téléphone, 01-44-08-78-30 perception plus positive, ou décevoir ; restaurer ce que visions et le niveau des cotisa- qui soit aussi celle de la démo- moins négative, de l’action pu- M. Jospin a appelé la « vertu ré- tions fait craindre une aggrava- cratie, de la croissance et de Index et microfilms du Monde : renseignements par téléphone, 01-42-17-29-33 blique. Au seuil de cette coha- publicaine » ; revivifier l’idéal tion des déficits sociaux. l’emploi. Le risque nécessaire Le Monde sur Compuserve : GO LEMONDE bitation, et naturellement sous européen. Au-delà de l’organisation d’un de bousculer l’orthodoxie doit Adresse Internet : http : //www.lemonde.fr réserve d’inventaire, il n’est pas Ne pas décevoir signifie af- « audit » des finances pu- être sur ce sujet très précisé- interdit de penser que le leader fronter une difficulté que les bliques, qui est de tradition et ment mesuré : européens Films à Paris et en province : 08-36-68-03-78 socialiste s’attachera à tenir ses socialistes français ne pa- de bonne guerre, le problème convaincus, les socialistes fran- LeMonde Job: WMQ0306--0015-0 WAS LMQ0306-15 Op.: XX Rev.: 02-06-97 T.: 03:17 S.: 111,06-Cmp.:02,15, Base : LMQPAG 46Fap:99 No:0881 Lcp: 196 CMYK

15 INTERNATIONAL LE MONDE / MARDI 3 JUIN 1997

TERRORISME La violence a en- morts et soixante-cinq blessés. b JEU- rienne. b PRÈS D’UNE QUARANTAINE mieux placé est le Rassemblement na- algériennes. « Le retour aux deuillé la fin de la campagne électo- DI 5 JUIN, près de 17 millions d’élec- de partis politiques ont fait cam- tional démocratique (RND), le parti du commandes du PS n’augure rien de rale en Algérie. Dimanche 1er juin, un teurs sont appelés à élire, pour la pre- pagne, mais ceux qui peuvent espérer président Zeroual. b LA PERSPECTIVE positif sur les relations futures » entre double attentat à la bombe dans le mière fois au scrutin proportionnel, entrer en force dans la future Assem- d’un changement de majorité en l’Algérie et la France, a averti le quoti- centre d’Alger a fait au moins six l’Assemblée populaire nationale algé- blée ne sont qu’une poignée. Le France n’enchante pas les autorités dien El Watan. Plusieurs attentats endeuillent la fin de la campagne électorale en Algérie Alors que les Algériens désignent, jeudi 5 juin, leurs députés, deux bombes ont fait, dimanche, au moins six morts et soixante-cinq blessés dans la capitale. Le nouveau parti du président Zeroual est donné largement favori, avec les islamistes « modérés » du cheikh Mahfoud Nahnah

ALGER Son principal adversaire sera le qu’anime Louisa Hanoune, des is- à El Oued, dans le sud, où 12 listes cailloux, de bois, de sable, interdite de notre envoyé spécial MSP (ex-Hamas), le parti des isla- lamistes d’Ennahda, les petites for- s’y disputent 6 sièges, avec le sou- tout comme celle de « tous véhi- Un Parlement Un brusque embouteillage dans mistes « modérés » de cheikh mations ne peuvent espérer faire tien des islamistes du MSP, le mil- cules de transport de marchandises un quartier de la banlieue est d’Al- Mahfoud Nahnah. Candidat à autre chose que de la figuration à liardaire, un temps propriétaire en et de citernes à carburant », a dé- élu pour cinq ans ger, une rue barrée où attendent l’élection présidentielle en 1995, ce- l’échelle nationale. France de l’entreprise Chaffoteaux crété le ministère de l’intérieur. De des ambulances, gyrophares allu- lui-ci avait recueilli, selon les résul- De l’aveu même de responsables et Maury, a annoncé à ses électeurs son côté, la Commission indépen- b Le système électoral. Les més. « Ça ne finira jamais », lâche tats officiels, le quart des suffrages. politiques, la campagne électorale, la prochaine implantation d’une dante de surveillance des élections élections législatives du 5 juin se un automobiliste. Attentat ou ac- Habile et disposant d’un réseau qui s’achève lundi à minuit, a été usine de traitement des dattes, législatives (Cnisel) a interdit, éga- dérouleront pour la première cident banal ? Qu’importe ce qui d’associations sans équivalent en morne, comparée à la présiden- promis, même en cas de défaite, de lement à compter du 2 juin et jus- fois au scrutin proportionnel, s’est passé, il y a trois jours, en fin Algérie, cheikh Nahnah a fait de la tielle de 1995. Aucun débat contra- construire un club sportif, distribué qu’à la fin du scrutin, la publication pour permettre à tous les partis d’après-midi aux Anassers, un récupération de l’électorat de l’ex- de sondages. Or personne ne se ayant une assise nationale quartier populaire de la capitale. La Front islamique du salut (FIS) son souvient à quand remonte dans le minimale de se voir représentés violence fait partie du décor depuis objectif principal. Il peut compter Une centaine d’observateurs des Nations unies pays la publication du dernier son- au sein de la future Assemblée des années, comme les sirènes des sur les voix des commerçants, mais dage... populaire nationale (APN), élue ambulances et des voitures de po- les couches les plus démunies n’ac- Sous l’égide des Nations unies, cent quatre personnes sont chargées En cette fin de campagne irréelle, pour cinq ans. lice. Samedi, un colis piégé a explo- cordent, semble-t-il, qu’un crédit li- d’observer le scrutin. De l’Italie aux Etats-Unis en passant par la Rouma- qui oscille entre drame et comédie, b L’Assemblée. Le Parlement sé dans un cinéma du centre d’Al- mité à cet ancien acteur de théâtre nie et la Corée, trente-trois pays (mais pas la France) ont finalement ac- le résultat des législatives fait l’ob- algérien est bicaméral et ger. Tandis que les policiers qui pratique à l’égard du pouvoir cepté d’envoyer des représentants dont le nombre varie de deux (c’est le jet de spéculations infinies. Lors comptera 524 sièges. La recherchaient des indices, le film un jeu ambigu (deux des représen- cas de la Grande-Bretagne) à plus d’une dizaine (comme la Grèce). La des dernières élections législatives Chambre basse (380 sièges) sera continuait à se dérouler sur l’écran. tants du MSP siègent au gouverne- Ligue arabe et l’Organisation de l’unité africaine (OUA) ont envoyé une véritablement libres, le 26 dé- composée de députés élus dans Le lendemain, toujours au cœur de ment). Pourtant, l’audience de autre centaine d’observateurs. Les trois organismes travailleront indé- cembre 1991, à l’issue du premier les 48 wilayas (préfectures), la capitale, deux explosions succes- cheikh Nahnah inquiète le régime pendamment les uns des autres. Les observateurs de l’ONU ambitionnent tour de scrutin (le second allait être mais, comme le prévoit la sives ont tué au moins six per- qui n’a pas hésité, relayé par la d’être présents, au moins une fois dans la journée, dans près de 10 % des annulé par l’armée), le FIS avait ra- Constitution adoptée en sonnes (lire ci-dessous). presse, à ressortir contre lui de bureaux de vote. Ils devront vérifier que les urnes arrivent vides, puis sur- flé la mise en s’adjugant 44 % des novembre 1996, elle pourra être Pourtant, à écouter certains res- vieilles affaires politiques et à le veiller le vote et le dépouillement. Si la fiabilité des listes électorales sièges tandis que le FLN s’effon- censurée par la Chambre haute ponsables politiques, à lire les édi- diaboliser. (16 773 087 électeurs inscrits dont 743 237 à l’étranger) est mise en doute drait et que les partis « démocra- (144 sièges) dont le tiers des torialistes, le pays a un « rendez- par certains partis de l’opposition, d’autres possibilités de fraude existent. tiques », à l’exception du FFS, ne membres seront directement vous historique », jeudi 5 juin. Le FIGURATION Outre le fait que les observateurs ne surveilleront qu’une partie des bu- réussissaient pas à percer, désignés par le président fait est qu’à l’issue du scrutin, de Si le FLN peut compter sur ses reaux (ceux où votent l’armée, les gardes communaux, les policiers leur Un peu plus de cinq ans après, la Liamine Zeroual. type proportionnel, le pays va être bastions traditionnels dans le sud échapperont en grande partie), les résultats globaux seront collectés en victoire du RND, en dépit du peu b Les partis. Deux grands partis doté d’une Chambre des députés du pays, le Front des forces socia- dehors de la présence de représentants de l’ONU malgré leur demande. d’engouement qu’il suscite parmi se dégagent parmi les 39 en lice pluraliste. Près d’une quarantaine listes (FFS) et le Rassemblement Le 8 juin, la mission de l’ONU publiera un rapport où elle rapportera les les Algériens, ne fait de doute pour et quelques dizaines de partis politiques ont fait cam- pour la culture et la démocratie infractions éventuelles constatées. personne. Avec le renfort du FLN d’indépendants (7 486 candidats pagne, mais ceux qui peuvent es- (RCD) vont se disputer les voix de et de l’ANR de Redha Malek, le au total) : le Rassemblement pérer entrer en force dans la future la Kabylie. Mais il ne s’agit pas que pouvoir disposera probablement, national démocratique (RND, Chambre ne sont qu’une poignée. de cela. Entre eux, le clivage est dictoire n’a eu lieu à la télévion des maillots de foot et des bal- au sein de la future Chambre, parti pro-Zeroual) et le Le mieux placé est paradoxale- également politique. Le FFS d’Ho- d’Etat où sont venus défiler les lons... Pour expliquer pourquoi il d’une confortable majorité. La vic- Mouvement de la société pour ment le plus jeune d’entre eux, le cine Aït Ahmed (qui réside à candidats avec, en toile de fond, un voterait en faveur de Djilali Mehri, toire, avec 61 % des suffrages expri- la paix (MSP, ex-MSI Rassemblement national démocra- l’étranger) a fait sa campagne sur le décor unique, une carte de l’Algérie un jeune d’El Oued a répondu tout més, du président Zeroual à l’élec- [Mouvement pour la société tique (RND), parti du président Ze- thème : « Une chance pour la stylisée. Ceux dont les messages à trac : « Il est riche, il n’aura pas tion présidentielle, le plébiscite en islamique]-Hamas du Cheikh roual. Créé dans l’urgence il y a un paix ». Il milite pour une solution étaient trop critiques à l’encontre besoin de voler. » faveur de la nouvelle Constitution, Mahfoud Nahnah, islamiste). peu plus de trois mois (après l’as- politique à la crise, un dialogue du régime, comme ce fut le cas du Pour des raisons de sécurité, du 2 approuvée par 85 % des votants, b Les électeurs. Près de sassinat de celui qui devait en avec le FIS, ce dont ne veut pas le FFS et du PT, ont été censurés. au 6 juin, les marchés hebdoma- laissent peu de place à l’opposition. 16,8 millions d’électeurs sont prendre la tête, le syndicaliste Ab- RCD de Saïd Sadi. Dans sa dénon- Souvent difficiles à organiser pour daires seront fermés en Algérie, la appelés aux urnes pour la delhak Benhamouda), pour ré- ciation du « péril islamiste » incarné les adversaires du pouvoir, les réu- circulation des camions chargés de Jean-Pierre Tuquoi troisième fois en un an et demi. cupérer la clientèle du Front de li- par cheik Nahnah, le RCD est très nions publiques ont attiré leur lot bération nationale (FLN) – l’ancien proche de l’ANR de l’ancien pre- de militants et de curieux que ne parti unique – démonétisé aux mier ministre Redha Malek, chef rebutaient ni la présence des forces yeux de l’opinion publique, le RND de file des « éradicateurs » (avec de sécurité ni les fouilles à l’entrée. est « un nouveau-né avec des mous- son mot d’ordre : « La peur doit Et comme jadis le FLN, son héri- taches », ironisent ses détracteurs. changer de camp »). tier, le RND a bénéficié de l’appui Les Algériens l’ont aimablement Qu’il s’agisse du PRA de Nour- efficace de l’administration. baptisé « parti Taïwan » pour dire reddine Boukrouh, du Parti des tra- Peu de candidats avaient les qu’il ne semble pas très solide. vailleurs (PT, extrême gauche) moyens de Djilali Mehri. Candidat Nouvelles scènes d’horreur à Alger VICTIMES aux jambes arrachées, enfants en sang, mille ou d’un proche. Des témoins du second attentat blessés évacués dans des voitures particulières : le centre ont raconté à un journaliste de l’AFP qu’ils avaient vu d’Alger a vécu, de nouveau, des scènes d’horreur et de une femme, le corps à demi sorti d’une fenêtre de l’auto- panique, dimanche 1erjuin, lors de deux sanglants atten- bus, les jambes arrachées. « Lorsque des gens l’ont tirée tats à la bombe dans des bus. Ces attaques, en plein vers l’extérieur, il n’y avait plus qu’un tronc sans jambes. » centre, ont fait au moins 6 morts et 65 blessés, selon les Ils ont également indiqué avoir vu un homme transfor- autorités, mais les témoignages recueillis laissent présa- mé en torche vivante, tandis qu’un autre, complètement ger un bilan beaucoup plus lourd. En début de soirée, affolé, courait dans la rue en hurlant. une nette tension était perceptible en ville, et les rues du La bombe avait apparemment été déposée au milieu centre étaient largement désertées, les habitants préfé- de l’autobus. Le premier attentat, place des Martyrs, a rant rentrer plus tôt. créé un grand mouvement de panique. Un autre autobus Pendant plus de deux heures, le centre et ses rues ani- a entièrement brûlé et a été éventré par l’explosion. Dans mées proches du port avaient retenti sans interruption une clinique du centre, une journaliste de l’AFP a vu arri- du vacarme des sirènes de police et des ambulances. ver deux femmes les jambes arrachées. Une vieille En début de soirée, à l’hôpital central Mustapha, de femme, le visage en sang, choquée, attendait des soins. vieilles femmes se lamentaient et suppliaient le person- « C’est une catastrophe », se lamentait un jeune homme. nel de leur donner des nouvelles d’un membre de leur fa- – (AFP.) Le retour au pouvoir de la gauche en France inquiète les autorités LA PERSPECTIVE d’un change- Or les dirigeants actuels du PS, la question et soucieux de ne pas s’ingé- ment de majorité en France n’en- ajoute le quotidien, campent sur les rer dans une situation interne », les di- chante pas les autorités algériennes, mêmes positions : « Lionel Jospin, en rigeants algériens « ont toujours évité si l’on en juge par les premières réac- pleine campagne électorale, n’a pas de parler du sujet », ajoutait le quoti- tions de la presse écrite, laquelle ne hésité à reproduire les clichés des an- dien avant de noter que « sur le plan brille pas par son indépendance. «Le nées 90 puis à s’ingérer dans le scrutin économique comme sur la question de retour aux commandes du PS n’augure législatif algérien du 5 juin, déclarant l’émigration, l’Algérie a peu à craindre rien de positif sur les relations futures » qu’il allait être antidémocratique ». d’un gouvernement de gauche. » Et de entre l’Algérie et la France, a averti El « Bien sûr, tout cela peut évoluer sous le rappeler : « C’est sous Mitterrand que Watan. coup de la diplomatie », faisait obser- les plus importants contrats commer- Dans son édition du dimanche ver quelques jours auparavant Le ciaux ont été signés [et que] la législa- 1er juin, le principal quotidien franco- Matin, un quotidien où se retrouvent tion de la gauche en matière d’émigra- phone privé regrette que les socia- d’anciens communistes. tion a toujours été empreinte de plus listes ne se soient pas démarqués de d’humanité. » ce que fut, selon le journal, la ligne ORAISON FUNÈBRE Inquiète de voir revenir au pouvoir politique suivie par François Mitter- Il n’empêche : ce qui n’était alors les socialistes, la presse algérienne ne rand pendant ses deux septennats. que la « probable » victoire de la s’apitoie pas pour autant sur la dé- « En prenant fait et cause pour l’ex-FIS, gauche française n’est pas « une faite d’une droite qui a déçu Alger. après l’annulation du second tour élec- bonne nouvelle », et les « craintes al- Elle a surtout « géré le détestable statu toral des législatives de 1992, en coura- gériennes » sont justifiées pour le quo légué par ses adversaires, se gar- geant l’implantation sur le sol français pouvoir. « Très récemment, en relation dant de prendre toute initiative hardie d’une multitude d’associations reli- avec les thèses de l’Internationale so- à l’égard de l’Algérie, optant pour la gieuses algériennes dites caritatives, en cialiste, Lionel Jospin a eu à tenir des confortable position de l’attente post- réalité des relais de réseaux intégristes, propos très ambigus sur la question du législatives », écrit El Watan en guise l’ancien chef d’Etat français s’est impli- terrorisme, prêchant la réhabilitation d’oraison funèbre. qué dans le vaste plan de déstabilisa- du FIS en des termes à peine voilés », tion de l’Algérie », juge El Watan. rappelait Le Matin. « Très discrets sur J.-P. T. LeMonde Job: WMQ0306--0016-0 WAS LMQ0306-16 Op.: XX Rev.: 02-06-97 T.: 06:09 S.: 111,06-Cmp.:02,15, Base : LMQPAG 46Fap:99 No:0882 Lcp: 196 CMYK

16 / LE MONDE / MARDI 3 JUIN 1997 INTERNATIONAL

Ehoud Barak a toutes les chances d’être élu Des milliers de démocrates président du Parti travailliste israélien ont défilé à Hongkong L’ancien général devrait succéder, mardi 3 juin, à Shimon Pérès Les manifestants ont réclamé la libération Ehoud Barak, ancien généralissime de Tsahal israélien, lors des élections auxquelles participe- autres candidats sont en lice : les députés des prisonniers politiques chinois d’avril 1991 à fin 1994, est quasiment assuré de ront les 167 000 militants du parti. Pour succéder Ephraïm Sneh, Shlomo Ben-Ami et l’ancien vice- prendre, mardi 3 juin, la tête du Parti travailliste à l’ancien premier ministre, Shimon Pérès, trois ministre des affaires étrangères, Yossi Beilin. et commémoré le massacre de Tiananmen

JÉRUSALEM Même si beaucoup de commenta- parti qu’il juge « sans âme », et palestinien, M. Barak, qui affirme HONGKONG ont ensuite déposé une gerbe à la de notre correspondant teurs, comme Daniel Ben Simon d’une société qu’il perçoit encore toujours « préférer une solution de de notre envoyé spécial mémoire des victimes de la répres- « Bi-bi ! Bi-bi ! » Convention na- (Haaretz), estiment qu’à un mo- comme « fruste »... confédération avec la Jordanie qui Les démocrates de Hongkong ont sion à Pékin. tionale travailliste, le 17 mai à Tel ment ou un autre « le nouveau pa- Le moins mal placé pour un modérerait l’entité palestinienne », rassemblé, dimanche 1er juin, un Ils avaient auparavant traversé le Aviv. Au fond de la salle, un petit tron des travaillistes, quel qu’il soit, éventuel face-à-face définitif avec s’y opposa. Puis il s’y résolut pour mois exactement avant le départ quartier des affaires depuis son groupe d’hommes entonne le slo- entamera de discrètes négociations M. Barak, le 18 juin, est Yossi Bei- maintenir l’unité du parti et à des Britan- centre en criant des slogans et en gan favori de la droite : « Bi-bi ! Bi- pour l’union avec Nétanyahou », il lin, quarante-huit ans, ancien vice- condition qu’il soit mentionné niques, la plus brandissant des pancartes à la bi!». Des traîtres infiltrés par le s’agit d’abord d’élire celui qui les ministre des affaires étrangères de dans la plate-forme que l’éventuel grosse mani- gloire de la « démocratie » et de la Likoud pour hurler le sobriquet du conduira. M. Pérès et artisan, avec son men- Etat n’aurait ni armée, ni souverai- festation enre- « liberté ». premier ministre Nétanyahou et tor, des accords israélo-palesti- neté sur la vallée du Jourdain (un gistrée depuis Par moments, la foule, qui est al- saboter la réunion du plus grand « FAUCONS » ET « COLOMBES » niens dits d’Oslo. M. Beilin appar- quart de la Cisjordanie occupée), plusieurs an- lée en grossissant au fur et à me- parti de l’opposition ? Non. L’an- En juin 1995, cinq mois avant tient à l’aile gauche de ce qu’on ni sur son espace aérien, que l’ar- nées contre les sure que le cortège progressait cien général Ehoud Barak vient l’assassinat d’Itzhak Rabin, le Parti appelle ici « l’aristocratie travail- mée d’Israël pourrait survoler à sa conceptions dans une parfaite coordination simplement d’entrer dans la salle. travailliste comptait quelque liste ». La presse israélienne a fait convenance. autoritaires entre les organisateurs et la police, Et les caciques de l’aile gauche tra- 250 000 militants encartés. Il en ses gorges chaudes de l’éventuel Etranger à toute idéologie, sauf des futurs maîtres des lieux. Quel- chantait des airs continentaux glo- vailliste manifestent leur opposi- reste 167 000 et l’on s’étonne affrontement final entre le « yup- celle du sionisme, M. Barak tient à que sept mille personnes se sont rifiant la « patrie » chinoise. Ce tion à celui qui a toutes les chances moins, avec David Newman, pro- pie de Tel Aviv et le macho des kib- se maintenir « au centre de retrouvées en fin d’après-midi de- pied de nez se voulait un lointain de succéder à Shimon Pérès, mardi fesseur de sciences politiques à boutzim ». Mais chacun admet l’échiquier national ». Le centre vant le siège local de l’agence écho à la manière dont les étu- 3 juin. « Bibi » ou Barak, pour eux, l’université Ben-Gourion, de que, si le duel doit avoir lieu, ayant largement glissé à droite, Chine nouvelle, qui abrite la repré- diants de Tiananmen avait récupé- c’est la même chose. Ils le font sa- « l’aphonie quasi totale des travail- M. Barak l’emportera haut la main. M. Barak suit. Partisan déclaré sentation de Pékin, pour réclamer ré à leur profit l’Internationale pour voir et chacun prend la mesure des listes depuis un an. Trop occupé à Ancien patron des commandos d’une « séparation avec les Palesti- la libération des prisonniers poli- en clamer les accents à la figure des divisions au sein de la direction ses petites intrigues internes, estime d’élite de l’état-major, ancien chef niens », son présupposé est que, tiques chinois et une révision de la dirigeants de Pékin. d’un parti en déshérence, depuis M. Newman, le parti ne s’est pas des renseignements militaires, an- sur la question des territoires oc- condamnation officielle par le gou- son échec électoral il y a un an. trop inquiété, depuis sa chute, de ce cien généralissime de Tsahal, qu’il cupés, la majorité de ses conci- vernement chinois du soulèvement DRAPEAUX TAïWANAIS Tous les sondages le dé- qui arrivait au processus de paix is- dirigea d’avril 1991 à fin 1994, toyens reste attachée à l’idée du de la place Tiananmen, à Pékin, en L’aspect le plus révélateur de montrent : l’impétrant le mieux raélo-arabe... » Tous les candidats l’homme qui se présente comme plus « grand Israël » possible. 1989. cette manifestation était probable- placé pour battre Benyamin Néta- le proclament : cela changera « le dauphin d’Itzhak Rabin » est En septembre 1995, alors mi- Le chiffre représente une goutte ment sa composition : une popula- nyahou en l’an 2000, c’est lui, après le 3 juin. d’autant plus énigmatique que, nistre de l’économie, il fut le seul d’eau par rapport au million de tion de toutes conditions et de tous Ehoud Barak, cinquante-cinq ans, En attendant, les derniers mili- comme dit Susan Hattis-Roelef, membre du gouvernement Rabin à Hongkongais qui avaient défilé, âges, représentative de la popula- le plus décoré des soldats d’Israël. tants encartés du parti doivent dé- politologue locale, il s’est employé ne pas ratifier l’accord dit d’Oslo 2, pour protester, au lendemain de la tion du territoire. Les plus âgés Les trois autres candidats à la pré- signer le prochain challenger de à « ne pas articuler le moindre parce qu’il trouvait que tout cela répression. Il traduit pourtant n’étaient pas les moins ardents à sidence du parti n’espèrent plus « Bibi ». Se présentent à leurs suf- commencement de programme po- allait trop vite, qu’il n’était point l’existence d’un noyau dur de récal- reprendre les slogans lancés par qu’une chose : obtenir à eux trois frages deux « faucons » – Ehoud litique ». besoin de céder aussi rapidement citrants avec lesquels Pékin va de- M. Tsang. Ce dernier évita soi- plus de 60 % des voix le 3 juin, ce Barak et Ephraïm Sneh, cinquante- autant de territoires (6 %...) aux voir traiter, d’une manière ou d’une gneusement de tomber dans le qui empêcherait le général en re- deux ans, ancien général lui aussi, PERPLEXITÉ Palestiniens. Très offensif sur la autre. Dans un geste de défi peu piège de provocations qui justifie- traite d’être élu dès le premier tour connu pour son opposition à la Il est pour « la paix avec les manière « ridicule et dangereuse » apprécié des fonctionnaires conti- raient une condamnation immé- et renforcerait les chances de l’un restitution du Golan à la Syrie –, et Arabes », pour « le rétablissement de gouverner de M. Nétanyahou, nentaux, qui filmaient la scène de diate de telles manifestations par le d’eux lors de l’éventuel second deux « colombes », Yossi Beilin et de la confiance avec les Palestiniens M. Barak, qui n’a jamais attaqué derrière leurs fenêtres, les manifes- nouvel administrateur sous souve- tour, quinze jours après. Shlomo Ben-Ami. C’est probable- et la poursuite du processus d’Os- les objectifs de cette politique, tants ont suspendu sur la façade du raineté chinoise, Tung Chee-hwa. Perspective peu probable tant il ment ce dernier, professeur d’his- lo », pour « la reprise des négocia- avouait récemment sa perplexité : bâtiment une représentation sur Ainsi, les drapeaux de Taïwan est vrai, comme le confie M. Pérès, toire européenne à l’université de tions avec la Syrie » sur le Golan « Cherche-t-il [Nétanyahou] à toile noire de l’emblème du soulè- étaient tolérés, mais de façon mar- que les travaillistes, fondateurs et Tel Aviv, qui présente le pro- occupé. Mais à quelles condi- amener les Américains à intervenir vement, la « déesse de la démocra- ginale. Un manifestant lança un bâtisseurs de l’Etat, « n’ont pas de gramme le plus novateur. Mais tions ? Dans quelle perspective ? directement dans nos affaires ? Ne tie ». Celle-ci, du coup, masquait le puissant « A bas le Parti commu- culture d’opposition » et ne visent l’unique candidat sépharade du Mystère. Lorsque Shlomo Ben- comprend-il pas que le dessein amé- blason de la République populaire niste chinois ! ». Tout le monde qu’un objectif : revenir au pouvoir, quadrille travailliste, né au Maroc Ami, soutenu par M. Beilin, propo- ricain dans la région est plus proche de Chine. Les manifestants, emme- pouffa, mais personne ne reprit le quitte, selon M. Pérès, à participer il y a cinquante-trois ans, est un in- sa d’inscrire dans la plate-forme de celui d’Arafat que du nôtre ? » nés par Tsang Kin-shing, député au slogan. à un « gouvernement d’union » tellectuel trop brillant pour avoir travailliste l’assentiment du parti à Parlement hongkongais, instance avec la droite nationale religieuse. une chance de prendre la tête d’un l’éventuelle naissance d’un Etat Patrice Claude que Pékin va dissoudre le 1er juillet, Francis Deron LeMonde Job: WMQ0306--0017-0 WAS LMQ0306-17 Op.: XX Rev.: 02-06-97 T.: 07:29 S.: 111,06-Cmp.:02,15, Base : LMQPAG 46Fap:99 No:0883 Lcp: 196 CMYK

INTERNATIONAL LE MONDE / MARDI 3 JUIN 1997 / 17 Mise en garde américaine à M. Tudjman et M. Milosevic Le gouvernement turc annonce LE SECRÉTAIRE D’ÉTAT américain, Madeleine Albright, a dénoncé, sa- medi 31 mai, les retards des présidents de Croatie et de Serbie, Franjo la tenue prochaine d’élections anticipées Tudjman et Slobodan Milosevic dans la mise en œuvre de leurs engage- ments de Dayton. Le chef de la diplomatie américaine a évoqué avec les deux dirigeants les questions des criminels de guerre, du retour des réfu- Tansu Ciller doit bientôt succéder à Necmettin Erbakan giés et des libertés politiques, toujours en suspens dans les Balkans plus de dix-sept mois après la signature des accords de paix. Paralysée par l’antagonisme grandissant de l’ar- Necmettin Erbakan a décidé de jouer ses der- feront office de « référendum ». M. Erbakan a A Belgrade, Madeleine Albright a sèchement déclaré que la normalisa- mée et des institutions laïques du pays, la coali- nières cartes en demandant la tenue d’élections aussi annoncé qu’il céderait sa place « avant le tion des relations n’était pas encore à l’ordre du jour. « J’ai assuré tion dirigée par le premier ministre islamiste anticipées qui, selon le chef du gouvernement, mois de juin » à Mme Tansu Ciller. [M. Milosevic] que si la Serbie ne respectait pas ses engagements, les Etats- Unis s’arrangeraient pour qu’elle ne participe pas à la tendance dynamique ISTANBUL juin et jusqu’aux élections, qui au- mal à obtenir le soutien de tous un risque considérable. Tradition- observée en Europe et qu’elle en reste au contraire très éloignée », a dit le de notre correspondante ront lieu dans un « délai raison- ses collègues du Parti de la juste nellement, le chef de l’Etat choisit secrétaire d’Etat. Avec le président croate, Franjo Tudjman, à Zagreb, « Nous voulons des valeurs natio- nable », il serait remplacé à la tête voie (DYP), les dissidents crai- un premier ministre en tenant Madeleine Albright a estimé « qu’il est du devoir des dirigeants de n’im- nales, morales. Certains sont contre du gouvernement par Mme Ciller. gnant de ne pas être inclus sur les compte de la hiérarchie numé- porte quel pays de fournir une direction morale et j’ai demandé au pré- le peuple. Ces gens veulent retour- Les deux partis ne se sont pas en- listes électorales en cas de législa- rique à l’Assemblée. Le parti ac- sident Tudjman de fournir ce genre de comportement », devant le chef ner au système du parti unique d’il y core mis d’accord sur une date tives anticipées. tuellement en seconde place, d’Etat croate, qui présentait un visage lugubre.– (AFP.) a cinquante ans », a affirmé le pre- précise. Le Parti de la prospérité après le RP de M. Erbakan, est mier ministre turc dans une réfé- (RP) de M. Erbakan, qui pense DÉFECTIONS l’ANAP, qui dirige l’opposition. rence mal déguisée à l’armée au pouvoir compter sur le soutien re- Cinq défections en l’espace de De plus en plus, la Turquie est L’ambassadeur de France à Kinshasa cours d’une conférence de presse nouvelé de ses électeurs, souhaite dix jours au sein du DYP ont ce- divisée en deux camps, tous deux qui s’est tenue, dimanche 1er juin, à aller aux urnes dès l’automne. pendant affaibli le gouvernement, s’exprimant au nom de la démo- Ankara. Accusant « l’opposition Mme Ciller, dont la popularité a été qui a perdu, cette semaine, sa ma- cratie. Les défenseurs de la laïcité a été reçu par M. Kabila gauchiste » – qualificatif que le érodée par son alliance avec les is- jorité absolue à l’Assemblée. Pour se mobilisent avec le soutien de premier ministre accole à tous ses lamistes et par des allégations de renflouer ses rangs dans l’immé- l’armée – et notamment du KINSHASA. Michel Rougagnou, l’ambassadeur de France à Kinshasa, a opposants, y compris le Parti, corruption, espère demeurer au diat, la coalition a donc entamé Conseil national de sécurité, la été recu dimanche 1er juin par le président de la République démocra- conservateur, de la Mère patrie pouvoir jusqu’au printemps 1998. des négociations avec le Parti de la puissante institution dominée par tique du Congo, Laurent-Désiré Kabila. M. Rougagnou avait demandé (ANAP) – de bloquer le succès Avant de pouvoir affronter grande unité (BBP), une formation les militaires, qui depuis le 28 fé- audience la semaine dernière. Un premier contact officiel avec les nou- économique du pays, M. Erbakan l’électorat, les deux partenaires religieuse ultra-nationaliste, qui vrier est en guerre ouverte contre velles autorités avait eu lieu le 27 mai à l’occasion de la visite à Kinshasa a exprimé sa conviction que la devront d’abord convaincre l’As- pourrait ajouter ses six sièges en le premier ministre, accusé de vou- de Jean-Pierre Lafon, envoyé spécial du Quai d’Orsay, venu s’enquérir de coalition « sortirait renforcée » du semblée nationale d’approuver la devenant le troisième partenaire loir « islamiser » les institutions. Le la sécurité des ressortissants français après l’assassinat de deux d’entre scrutin anticipé. tenue d’élections. La réticence no- au sein du gouvernement. Bien général Ilkan Kiliç a réaffirmé que eux. Utilisant des graphiques et des toire des députés, confortable- que le transfert des pouvoirs à « tout le monde doit savoir que les Par ailleurs, des soldats de la nouvelle armée congolaise ont ouvert le chiffres, le premier ministre et son ment installés au Parlement, à se Mme Ciller ait été prévu par le pro- principes de la République de Tur- feu, lundi 26 mai, sur des manifestants qui défilaient à Uvira, dans l’est ministre des affaires étrangères, départir des privilèges qui leur ont tocole d’accord signé il y a onze quie, moderne et laïque, ne seront du pays, protestant contre l’assassinat de cinq personnes enlevées quel- Tansu Ciller, ont tenté de démon- été octroyés et qu’ils espéraient mois entre le RP et le DYP, le pre- pas changés et ne peuvent pas être ques jours plus tôt par des militaires, selon des sources humanitaires qui trer le succès – très contesté – de garder jusqu’en l’an 2000, pourrait mier ministre Erbakan devra sou- changés ». ont fait état d’une vingtaine de victimes. – (AFP, Reuter.) leur alliance. Le premier ministre a rendre cette tâche difficile. mettre sa démission au président expliqué qu’avant la fin du mois de Mme Ciller, en particulier, aura du de la République, ce qui présente Nicole Pope En Afghanistan, les talibans menacent de contre-attaquer Le pape appelle la Pologne à dépasser ses divisions WROCLAW logne. Le pape avait tenu à inviter pour l’Europe et toute l’humanité. à son arrivée. Ceux du cardinal KABOUL. Les talibans, selon l’agence islamique afghane AIP, ont propo- de notre envoyé spécial les représentants de toutes les reli- La rencontre prévue à Vienne, le Glemp, primat de Pologne, décla- sé, dimanche 1er juin, à leurs opposants qui résistent toujours dans le La pluie glaciale, l’âge, les décep- gions du pays, chrétiens (ortho- 20 juin, entre les deux principaux rant le 29 mai que « si le marxisme nord du pays de négocier, tout en dépêchant des milliers de combattants tions de la période postcommu- doxes, méthodistes, luthériens, patriarches de l’orthodoxie, Alexis est tombé, il reste bien des mar- vers les zones de combat dans cette région. Ils ont affirmé, dans un niste n’y ont rien fait : avec émo- baptistes, etc.), juifs et musulmans. de Moscou et Bartholomée de xistes ». Ceux d’Adam Michnik, di- communiqué, qu’ils voulaient un accord de paix, ajoutant que, si leur tion, le pape a retrouvé à Wroclaw, L’accolade donnée à trois représen- Constantinople, n’aura cependant recteur de Gazeta Wiborcza, écri- offre était refusée, une opération de grande envergure serait lancée dans le sud-ouest de la Pologne, les tants de la communauté juive pas lieu et le « sommet » sans pré- vant à propos de cette septième contre leurs adversaires. Des milliers de talibans ont déjà été envoyés assemblées ferventes et recueillies. (moins de 10 000 membres) a été cédent, prévu aussi fin juin à visite du pape : « La démocratie en par avion en renfort vers les zones de combat du nord de l’Afghanistan, Mais l’on n’a pourtant pas retrou- chaleureusement applaudie. Dans Vienne, entre le pape et Alexis II, Pologne a besoin de l’Eglise, parce où l’aviation de ces « étudiants en religion » a bombardé, dimanche vé, samedi 31 mai et dimanche un pays où la majorité catholique patriarche de Russie, se heurte tou- qu’elle a besoin de conscience, mais pour le deuxième jour consécutif, la capitale du Nord, Mazar-i-Charif. 1er juin à Wroclaw, première étape est écrasante, le pape a répété que jours à des réticences. Jean Paul II d’une Eglise qui prêche l’Evangile et Dans le même temps, les talibans ont affirmé avoir repoussé une offen- d’un voyage de onze jours en Po- la division des confessions chré- aura fort à faire pour éteindre aussi non la croisade, qui soit un signe de sive dans la province septentrionale de Samangan, infligeant de lourdes logne, le ton de révolte qui était ce- tiennes était un scandale et que la les incendies dans sa propre Eglise contradiction et non d’obligation. » pertes aux forces de l’opposition. – (AFP.) lui de Jean Paul II quand, en mai rencontre des religions devait être et dans son propre pays, si l’on en 1995, à Skoczow, près de la fron- un signe d’unité pour la Pologne, juge par le ton des propos échangés Henri Tincq EUROPE tière tchèque, il dénonçait la « mise a ESPAGNE : le procès de l’ex-directeur général de la garde civile, à l’écart » des croyants de son pays. Luis Roldan, accusé de détournements de fonds, s’ouvre, lundi 2 juin, Aujourd’hui, dans une Pologne devant le Tribunal supérieur de justice de Madrid, et marque le début entre deux échéances électorales, d’une série de grands procès contre plusieurs hauts responsables de l’an- référendaire et législative, et divisée cien gouvernement socialiste.– (AFP.) au sujet de l’Eglise – à propos de l’avortement et du concordat ré- PROCHE-ORIENT glant ses relations avec l’Etat –, le a GAZA : un enseignant de l’université de Gaza, Ayoub Osman, au- pape a cherché à se placer dans un teur d’un article critiquant des cas de corruption au sein de l’Autorité pa- rôle de rassembleur, non plus de lestinienne, a été arrêté samedi 31 mai. L’article a été publié par l’heb- procureur. domadaire indépendant El Bilad. – (AFP.) Dans cette ville de Wroclaw, his- a IRAN : l’hodjatoleslam Ali Akbar Nategh-Nouri, candidat conserva- toriquement écartelée entre l’Alle- teur battu à l’élection présidentielle, a été reconduit dimanche 1er juin magne (ex-Breslau) et la Pologne, par 211 voix – sur les 243 députés – à la présidence du Parlement. Deux symbole de toutes les divisions du vice-présidents, Hassan Rouhani et Mohamad Ali Movakédi-Kermani, continent, Jean-Paul II a clôturé di- proches de M. Nategh-Nouri, ont eux aussi été reconduits dans leurs manche, devant 200 000 fidèles, un fonctions. – (AFP.) congrès eucharistique internatio- a ISRAËL : un musicien de l’Opéra de Berlin, Garret Reinke, joueur de nal. Il a décrit les menaces qui cor de cinquante-quatre ans, qui a provoqué un scandale, dans la nuit du pèsent sur une liberté si chèrement vendredi 30 au samedi 31 mai, en signant une note de consommations acquise et qui, dit-il, ne doit pas du nom d’Adolf Hitler, a été renvoyé en Allemagne dimanche. – (AFP.) être galvaudée. Quel usage la socié- té postcommuniste fait-elle de la li- AFRIQUE berté retrouvée ? C’est la question a SIERRA LEONE : les putschistes ont spectaculairement illustré, di- « dramatique » que Karol Wojtyla a manche 1er juin, la fraternisation avec les ex-rebelles, en nommant leur de nouveau posée à « la démocratie chef historique, le caporal Foday Sankoh, vice-président de la junte. Fo- polonaise, inspirée par l’idéologie li- day Sankoh est actuellement « retenu » au Nigeria par les autorités bérale ». Le pape a affirmé que d’Abuja. – (AFP.) c’était faire un mauvais procès à l’Eglise polonaise de dire qu’elle est « ennemie de la liberté ». Une ma- nière de faire taire l’anticléricalisme dont la hiérarchie déplore qu’il re- naisse dans les partis libéraux et dans les médias.

« TENSIONS DOULOUREUSES » Dès son arrivée samedi matin à l’aéroport, devant le président Alexandre Kwasniewski (ex- communiste), présent à toutes les cérémonies religieuses, le pape a souligné les progrès démocratiques et économiques de la Pologne. Mais il s’est inquiété des « tensions dou- loureuses » qui traversent le pays. En ajoutant : « Les Polonais sont do- tés d’un énorme potentiel d’intelli- gence et de volonté. La Pologne est un pays capable de jouer, dans le concert des nations européennes, un rôle capital. » Lors d’un tête-à-tête entre le pape et le président de la République, les sujets de friction n’ont pas été abordés. La prépara- tion du concordat a seulement fait l’objet d’un entretien entre le cardi- nal Angelo Sodano, secrétaire d’Etat du Vatican, et le premier mi- nistre Cimoszewicz. Alexandre Kwasniewski a déclaré qu’il avait bon espoir que l’accord Eglise-Etat soit prochainement ratifié. La même volonté de réconcilia- tion s’est manifestée samedi soir dans la Halle Bulowa de Wroclaw, où a eu lieu un rassemblement œcuménique sans précédent en Po- LeMonde Job: WMQ0306--0018-0 WAS LMQ0306-18 Op.: XX Rev.: 31-05-97 T.: 17:46 S.: 111,06-Cmp.:02,15, Base : LMQPAG 46Fap:99 No:0884 Lcp: 196 CMYK

18 SOCIÉTÉ LE MONDE / MARDI 3 JUIN 1997

DÉTENTION Face à l’augmenta- programme de prévention du sui- confidentiel qui préconise notam- naires. b AUTEUR d’une thèse sur le la fois lié aux conditions de déten- tion constante du nombre de sui- cide, qui est actuellement expéri- ment le perfectionnement du dispo- suicide en prison, Nicolas Bourgoin, tion et à la situation pénale et fami- cides en prison (138 en 1996), l’ad- menté dans onze établissements pé- sitif d’arrivée des détenus et l’amé- chercheur à l’INED (Institut national liale du prisonnier. Dans des lettres, ministration pénitentiaire a lancé, nitentiaires. b LE DISPOSITIF lioration des conditions de des études démographiques), les détenus tentent d’expliquer leur pour la première fois, en avril, un reprend les conclusions d’un rapport détention dans les quartiers discipli- constate que le geste suicidaire est à geste. Le ministère de la justice tente d’endiguer les suicides en prison Face à l’augmentation constante, depuis 1990, des conduites suicidaires, l’administration pénitentiaire expérimente dans onze établissements un dispositif visant à améliorer les conditions de détention

EN MARS, c’est un détenu qui par un groupe de travail composé garantir du mythe de la prévention d’améliorer les conditions de vie en teur de l’administration péniten- des conditions de réalisation du décède en se jetant du troisième de responsables de l’administration totale » du suicide, idée « dange- quartier disciplinaire, où le taux de tiaire avait déjà, en février 1996, li- programme. « Ici, la vague de sui- étage de la maison d’arrêt de Tou- pénitentiaire, de magistrats, de mé- reuse » car « techniquement impos- suicide est sept fois supérieur à celui mité le recours aux mises à nu des cides de 1994 a été vécue comme une lon. En avril, ce sont deux prison- decins et de psychologues. Partant sible » et « philosophiquement inac- du reste de la détention. Le groupe détenus au quartier disciplinaire, et expérience très traumatisante, avec niers qui se suicident à quelques de l’existence d’une forte « sursuici- ceptable », les rapporteurs de travail estime en effet que le pla- précisé que, le cas échéant, des un fort sentiment d’impuissance et de jours d’intervalle à la prison de dité carcérale » – un taux de suicide préconisent, outre une sensibilisa- cement en quartier disciplinaire, qui sous-vêtements non tissés devaient culpabilité, explique Christine Pey- Nantes. Une semaine plus tard, c’est en moyenne six fois plus important tion accrue des surveillants aux peut durer jusqu’à quarante-cinq leur être fournis. rache, juge d’application des peines la découverte d’un détenu pendu en prison que dans le monde libre –, souffrances psychologiques des dé- jours, est « extrêmement anxiogène Enfin, les auteurs du rapport sug- au tribunal d’Evry. Le lancement du avec ses lacets de chaussures dans les auteurs du rapport s’interrogent tenus, une série de mesures simples, en ce qu’il induit une perte des re- gèrent une meilleure prise en programme a donc été particulière- le quartier disciplinaire de la maison sur « les lacunes des politiques de ciblées sur les moments où le risque pères supplémentaires qui amplifie la compte des signaux d’alerte que ment apprécié. » d’arrêt de Grasse (Alpes-Mari- prévention en France et sur les éven- suicidaire est maximal. Une partie déstabilisation inhérente au place- constituent les tentatives de suicide A Fleury, on approuve largement times)... Chaque année, plus d’une tuels dysfonctionnements de l’institu- notable des suicides étant perpétrée ment en détention ». Plaidant pour et actes de mutilation, au nombre l’expérience, tout en soulignant que centaine de détenus se donnent la tion carcérale ». dans les quarante-huit heures qui un recours accru à des sanctions al- de 680 en 1995. Ils demandent que certaines mesures concrètes ne mort dans les prisons françaises. suivent l’arrivée en prison, ils pré- ternatives, comme le placement en l’« après-suicide » soit l’occasion pourront être mise en place sans Depuis six ans, leur nombre est en PERSONNALITÉS PATHOLOGIQUES conisent de limiter les écrous tardifs cellule d’attente ou le confinement d’un accompagnement des familles crédits supplémentaires. C’est ainsi augmentation constante : il est pas- Pour les rapporteurs, la « sursui- et de mieux faire circuler l’informa- en cellule ordinaire à titre préventif, et d’une prise en charge des codéte- que la maison d’arrêt des femmes sé de 67 en 1991 à 138 en 1996. Cette cidité carcérale » s’explique notam- tion sur les personnes incarcérées ils proposent de « diminuer le nus, voire du personnel de surveil- proposait des douches aux nou- situation, dénoncée par l’Observa- ment par le fait que « la prison ac- entre les magistrats qui placent en choc » du placement au « mitard » lance, sous la forme d’un « debrie- velles détenues, jusqu’à ce que les toire international des prisons (OIP) cueille de plus en plus de détention, et le personnel des éta- par une rencontre avec un gradé fing », confidentiel et non critique, installations tombent en panne sans ne peut être expliquée par le seul personnalités pathologiques, inadap- blissements qui accueille les déte- responsable du quartier ainsi que permettant d’aider « à comprendre qu’on pût les réparer, faute de accroissement de la population pé- tées au monde du travail, souffrant nus. par la distribution d’un imprimé l’événement, atténuer le stress et per- moyens. nale. d’un véritable handicap relationnel Ils suggèrent également d’amélio- type expliquant les droits et restric- mettre [aux agents] de récupérer plus De même, des interphones Confrontée à l’aggravation d’un [amplifié] par le fonctionnement ha- rer l’arrivée des détenus en leur dis- tions que la punition implique. facilement ». existent dans les cellules d’attente, phénomène qui pose, en filigrane, le bituel « totalitaire », non négocié, de tribuant une plaquette d’informa- Véritable aggiornamento des mais, hors service, ils n’ont jamais problème des conditions de déten- la prison ». Ce constat est aggravé tion sur les formalités en cours, en AMÉLIORATION DE LA SALUBRITÉ conditions de détention, ce rapport pu être remplacés. Malgré l’urgence tion, l’administration pénitentiaire a par « la surpopulation pénale ac- leur proposant douche et vêtements Le groupe insiste surtout sur a débouché, début 1997, sur la mise de la mise en place des mesures réagi en lançant il y a quelques se- tuelle [qui] accroît les difficultés de propres, et en instituant l’accueil du l’amélioration des conditions d’hy- en place d’un programme de pré- préconisées par le rapport, aucune maines un programme de préven- gestion et les rapports de force, dimi- détenu par un « agent référent », giène et de salubrité des cellules dis- vention du suicide, reprenant les ligne budgétaire précise n’a été dé- tion du suicide en prison. L’essentiel nue l’espace vital nécessaire à cha- chargé de faire appel au médecin et ciplinaires : l’instauration d’une arri- grandes lignes des mesures préconi- bloquée pour l’application du pro- du dispositif reprend les conclu- cun, augmente le stress et limite les à la direction s’il repère une fragilité vée d’air frais, d’une arrivée d’eau sées. Très précis, le dispositif est ac- gramme de prévention du suicide. sions d’un rapport confidentiel sur possibilités de mise en œuvre de pro- chez l’arrivant. Ils insistent en outre correcte indépendante de celle des tuellement expérimenté dans onze L’administration pénitentiaire n’a « la prévention du suicide en milieu jets d’individualisation ». sur la nécessité d’éviter le place- toilettes et l’arrêt de la privation de établissements pénitentiaires. Il de- prévu, pour l’heure, que de procé- pénitentiaire » rédigé en mai 1996, Tout en estimant qu’il faut «se ment du détenu dans une cellule douches devraient être obligatoires. vrait ensuite faire l’objet d’une éva- der à une nouvelle répartition des déjà occupée, qui leur paraît d’une Les rapporteurs suggèrent d’ailleurs luation, puis, d’une généralisation à budgets annuels qui lui sont alloués, « efficacité douteuse » pour prévenir que soit proscrits la pratique, « non l’ensemble des prisons françaises en sans que l’on sache si ce redéploie- le suicide. Les auteurs lui préfèrent compatible avec le respect de la di- 1998. Parmi les sites pilotes retenus ment permettra de tout mettre en l’affectation dans une cellule d’ac- gnité humaine », qui consiste à dé- figure la maison d’arrêt des femmes œuvre pour endiguer l’inquiétante cueil équipée d’interphones ou de nuder entièrement les détenus pré- de Fleury-Mérogis (Essonne), qui a augmentation des suicides en pri- signaux d’alerte, ce qui facilite le sentant un risque suicidaire afin connu quatre suicides successifs en son. contact avec les surveillants. qu’ils évitent de se pendre avec 1994 et où un comité de pilotage se Les rapporteurs proposent aussi leurs vêtements. Une note du direc- réunit régulièrement pour discuter Cécile Prieur « Regardez ! cette existence n’a pu me retenir ! » Nous publions des lettres écrites par les détenus confiance ? Non. Elle m’a reconditionné et for- En regrettant de vous avoir déçu, veuillez ac- avant de se donner la mort. Elles sont extraites de mé pour que, à ma sortie je retombe encore cepter, docteur, toutes mes excuses ainsi que la thèse de Nicolas Bourgoin sur le suicide en pri- plus bas. mon respect le plus profond. » son. Ce monde indifférent, cette justice impi- b « Monsieur le directeur, b « Madame la juge, toyable et ces juges sans sentiments et dénués Je m’excuse d’en arriver là, mais je pense Etant donné les actes que j’ai commis avec ce des principes les plus élémentaires de savoir- avoir bien bien réfléchi, je ne tiens pas à être ju- vol de voiture, et sachant que la justice sera sé- vivre, qui condamnent aveuglément sans es- gé encore une fois pour des faits que je n’ai pas vère, ce que je trouve normal, je préfère arrêter sayer de comprendre les pourquoi, les comment commis. Comme vous le savez, j’ai pris trois ans ou plutôt couper court à ma vie, car la prison un être humain peut en arriver à voler pour se pour un coup de pied et j’ai été jugé sur des n’est pas une bonne solution pour moi (person- droguer et effacer momentanément cette vie mensonges. Cette fois encore, une machination nellement). Alors, il ne me reste qu’à vous saluer puérile. Eh bien, ce monde, je vais le quitter est en train de se mettre en place. C’est la et sachez que je vous tiens aucune rancœur. Ni sans regrets et je laisserai cette soi-disante jus- goutte d’eau qui fait déborder le vase, là je aux services de gendarmerie, qui ont fait formi- tice humaine et ces chefs comme vous, ma- baisse les bras (...). Sur cette affaire qui est en dablement leur travail et ont été très polis avec dame, avec leur bonne conscience. Voilà, ma- cours, je me trouve dans l’incapacité de prouver moi, ainsi que le service pénitentiaire où je me dame, la justice aura fait une victime de plus ! » mon innocence. (...) Je suis bel et bien impuis- trouve. Bien à vous et à la justice. » b « Docteur, sant, et la parole d’un garçon qui a un casier ju- b « Madame le juge d’instruction, Il ne m’a pas été possible de tenir l’engage- diciaire n’a aucune valeur. J’ai décidé de quitter Me voici encore une fois entre les mains de la ment que j’avais pris devant vous il y a quelque ce monde de cons, et injuste. Je souhaite pour justice, à qui la faute ? Depuis mon incarcéra- temps, celui de ne pas récidiver une atteinte tout le monde que la société changera un jour. tion, je me suis posé beaucoup de questions et quelconque sur ma personne. En effet, bien que Recevez, monsieur le directeur, tous mes res- je vais vous donner mes conclusions qui seront l’infrastructure et l’ambiance du CMPR [centre pects. » d’ailleurs les dernières. Dès mon premier âge, médico-psychologique régional, ndlr] soient les b « Je voulais seulement me retourner et votre justice des potes m’a enlevé à mes pa- plus à même de faire s’atténuer un état dépres- dire : Regardez ! cette existence n’a pu me rete- rents, qui sont à mes yeux les meilleurs, pour sif, je ne puis plus, depuis longtemps, faire face nir ! Vous voyez ? je disparais ! Jamais plus je ne des peccadilles. à cette image de ma mère, tuée par moi ; sa tomberai dans les pièges humains. Je renonce à Votre justice m’a conditionné, formé, pour mort, sans la mienne, est devenue par trop ob- ma religion ! Je renonce à mes passions ! Cet devenir ce que je suis. Grâce à elle, je suis rejeté sédante. Rester en vie, dans ces conditions, ne instant de gloire est à moi et à moi seul ! Je suis de cette société (...) Je suis entré dans le monde représente plus rien ; depuis mon geste fatal, libre ! » de la drogue et qui dit drogue dit beaucoup toutes mes valeurs sont modifiées fondamen- d’argent, alors j’ai commis des méfaits. Je fus talement ; j’ai fait ce qui, pour moi, est la seule ̈ Le suicide en prison, de Nicolas Bourgoin, emprisonné, que croyez-vous que la justice a justice possible et également la seule solution à L’Harmattan, collection « Logiques sociales », fait, au lieu de me guérir ? De me faire nombre de problèmes soulevés par mon crime. 1994, 272 pages, 150 francs. Une carte de la souffrance en milieu pénitentiaire AUTEUR d’une thèse sur le sui- 14,5 % des détenus et 21 % des pré- facteurs de risque. Les personnes paraissent davantage liés à la lon- cide en prison, Nicolas Bourgoin, venus passent à l’acte au cours de issues d’un milieu social favorisé, gueur de la peine à purger. Enfin, chercheur à l’Institut national des la première semaine de détention, qui ne connaissent pas le milieu le chercheur note que 18 % des sui- études démographiques, a recensé une part notable de ces suicides délinquant, sont plus sujettes aux cides analysés sont le fait de déte- les facteurs de risque du suicide ayant lieu lors des quarante-huit suicides. Pour elles, la perte de sta- nus toxicomanes, certains étant heures suivant l’écrou. La propen- tut social et de considération de consécutifs à des sevrages. ANALYSE sion à se suicider est plus forte soi qu’implique l’incarcération Plus généralement, Nicolas chez les prévenus que chez les peut être plus forte que l’instinct Bourgoin a repéré une série de Un geste lié aux condamnés, du fait de l’incertitude de vie. Le fait d’avoir de la famille « moments déclencheurs » du sui- conditions de détention qui caractérise la période d’avant- et des enfants peut, paradoxale- cide en prison. L’échéance redou- et à la situation jugement. ment, apparaître comme un fac- tée d’un procès ou d’une condam- pénale et familiale La surveillance du personnel et teur de risque, car la prison en- nation, le rejet d’un appel ou la la promiscuité des cellules obligent traîne souvent des séparations et révocation d’une semi-liberté les détenus à employer des des divorces. De même, être incar- peuvent conduire au geste fatal. ainsi que les conditions du passage moyens radicaux pour se suicider. céré loin de son domicile constitue De même, certains des épisodes à l’acte. Analysant plus de 600 dos- Dans neuf cas sur dix, ils choi- un facteur supplémentaire de dé- qui jalonnent la vie en détention siers individuels dressés de 1982 à sissent la pendaison, réalisée avec tresse, car les visites des proches – le transfèrement dans un autre 1991 par l’administration péniten- les moyens du bord. Souvent, le sont limitées. établissement, le départ d’un codé- tiaire, il constate que le geste suici- détenu attend que la vigilance du tenu ou le placement en cellule daire est à la fois lié aux conditions personnel ou de ses codétenus se « MOMENTS DÉCLENCHEURS » d’isolement – correspondent de détention et à la situation pé- relâche et se donne la mort la nuit Analysant des lettres laissées par souvent à un passage à l’acte. Un nale et familiale du prisonnier. ou le samedi, jour des parloirs. les détenus avant leur suicide, le placement en quartier disciplinaire Les trois quarts des suicides sont Parfois, le passage à l’acte est chercheur a remarqué que les au- peut ainsi accentuer l’angoisse du perpétrés au cours de la première pourtant « annoncé » par le déte- teurs de crimes passionnels ou de prisonnier. « L’analyse des suicides année de détention et la quasi-to- nu lui-même à travers des tenta- crimes par ascendant se donnent révèle une sorte de carte de la souf- talité dans un délai de deux ans. Le tives ratées ou des automutila- parfois la mort sous le poids du re- france en milieu pénitentiaire », moment de l’incarcération, où l’in- tions. mords. A l’inverse, ce motif entre conclut le démographe. dividu perd progressivement ses Procédant à des recoupements, peu en compte pour le suicide des repères, paraît très anxiogène : le démographe a isolé plusieurs auteurs d’agression sexuelle, qui C. P. LeMonde Job: WMQ0306--0019-0 WAS LMQ0306-19 Op.: XX Rev.: 02-06-97 T.: 03:06 S.: 111,06-Cmp.:02,15, Base : LMQPAG 46Fap:99 No:0885 Lcp: 196 CMYK

SOCIÉTÉ LE MONDE / MARDI 3 JUIN 1997 / 19 Une association d’insertion La défense de Bernard Tapie dénonce l’attitude de l’Etat L’ÉTAT n’a toujours pas fait suite à sa condamnation par le tribunal demande une confusion des peines administratif de Paris, en février 1996, à verser 1,9 million de francs de dédommagement à l’association Espace-Sport-Insertion-Jeunes (ESIJ), viennent de faire savoir les responsables de cette dernière. Le Trois semaines d’audience sur les comptes de l’OM n’ont pas permis d’établir le chef de corruption tennisman Christophe Roger-Vasselin, engagé dans ce projet, a dé- noncé, le 31 mai, cette attitude « à peine croyable » de « L’Etat qui ne Le tribunal correctionnel de Marseille rendra son 31 mai : « Depuis trois ans, on m’a ruiné, désho- demandé que cette peine ne soit pas confondue respecte même pas une décision de justice ». jugement le 4 juillet dans l’affaire des comptes noré, humilié. » Le procureur a requis à son en- avec la condamnation à huit mois de prison En 1991, le ministre de la ville, Michel Delebarre (PS), avait passé un de l’OM. Bernard Tapie est intervenu, samedi contre quatre ans de prison, dont deux ferme, et ferme dans l’affaire OM/VA. contrat avec l’ESIJ. L’association devait utiliser les terrains inexploités du stade Camille-Besse de Saint-Ouen (Seine-Saint-Denis) pour des MARSEILLE sives, de plusieurs avocats. 6 millions » le montant des fonds tion », à en croire les prévenus. activités de formation et d’insertion par le sport destinées à des de notre envoyé spécial Me Raymond Larnaudie, l’un des dont la destination finale demeure Dans ce domaine, et dans celui des jeunes des quartiers défavorisés. Mais ses successeurs n’ont pas don- Le rituel est immuable. A l’issue défenseurs de l’intermédiaire aujourd’hui mystérieuse. Enfin, il a transferts, la défense n’a cessé de né suite. L’association, qui avait investi dans l’aménagement de deux de chacun de ses procès, Bernard croate Ljubomir Barin, a qualifié demandé la confusion des peines rappeler, à juste titre, que l’OM cours de tennis couverts, s’est retrouvée lourdement endettée. L’Etat Tapie prend la parole, comme s’il l’ancien ministre de « menteur ». entre cette affaire et celle de Va- n’avait « rien inventé ». devait notamment prendre en charge le loyer du terrain. L’ESIJ chiffre ne voulait lais- Me Gilbert Collard, l’avocat du lenciennes. Le parquet avait requis Le tribunal a tout de même es- aujourd’hui son préjudice à 7 millions de francs. ser à personne « repenti » Jean-Pierre Bernès (ex- la non-confusion. Il est vrai que les sayé de décortiquer les ma- le soin de directeur général de l’OM), a fusti- délits reprochés ne sont pas les nœuvres des dirigeants, le rôle des DÉPÊCHES conclure à sa gé ses « méthodes fascistes ». Dans mêmes. agents de joueurs et autres négo- a JUSTICE : le procès de Jean-Michel Boucheron, ancien député et place. Ainsi, un style plus sobre, la défense ciateurs discrets... C’est ainsi que maire socialiste d’Angoulême, extradé d’Argentine le 25 mars après samedi 31 mai, d’Alain Laroche (ex-directeur fi- PLONGÉE EN COULISSES l’organigramme du club est appa- cinq années de fuite, devait s’ouvrir, lundi 2 juin, devant le tribunal au moment où nancier) a rappelé que ce dernier, En trois semaines d’audience, ru, avec ses hommes de confiance correctionnel de Paris. M. Boucheron devra répondre de « complicité le procès des souvent mis en cause, avait obéi à les magistrats marseillais auront – MM. Bernès, Laroche et Jean- de faux en écriture, recel d’abus de biens sociaux, trafic d’influence et in- comptes de sa « direction ». donc effectué une longue plongée Louis Levreau, ancien rédacteur en gérence ». Le 8 juillet 1994, il avait été condamné par défaut à quatre l’Olympique de Marseille allait Les avocats de l’homme d’af- dans les coulisses du football. Au chef du Provençal – et divers « in- ans de prison ferme. Selon l’accusation, les sommes détournées s’achever, l’ancien président du faires ont riposté à ces attaques. gré des circuits financiers, il fut termédiaires ». D’étonnants per- « n’étaient pas inférieures à 746 000 francs ». club de football s’est avancé à la Le bâtonnier Henri Bollet a suggé- ainsi question de comptes ban- sonnages ont défilé à la barre : a L’ancien maire (PR) de Cannes Michel Mouillot, qui observe une barre. Après quatre jours d’ab- ré aux instances du football d’« ar- caires en Suisse, au Panama, à Du- Manuel Barbosa, l’« impresario grève de la faim depuis le 17 mai, sera soumis, le 3 juin, à une sence pour raisons de santé, il rêter l’hypocrisie consistant à dire blin, Zagreb, Barcelone et Monte- des favelas », spécialiste des stars confrontation à l’hôpital Pasteur de , a annoncé, le 1er juin son avait tenu à assister au baisser de que Tapie est responsable de tout ». video, mais aussi de retraits en brésiliennes ; M. Barin, dit « sa- épouse, sans autres précisions. Impliqué dans plusieurs affaires de rideau. Son épouse et sa mère Me Jean-Yves Lienard s’est indigné espèces, effectués par des porteurs coche noire », réputé pour son en- corruption et détenu depuis le 19 juillet 1996, Michel Mouillot a été étaient présentes dans la salle. de la manière dont les autres pré- de valise peu regardants. Au pas- tregent auprès des arbitres ; hospitalisé le 23 mai. S’adressant au tribunal, il a alors venus s’étaient retranchés derrière sage, on apprit que certains ar- l’homme d’affaires Jean-Louis Ha- a ACCIDENT : trois personnes ont été tuées et seize autres bles- déclaré : « Depuis trois ans, on m’a son client pour nier leurs respon- bitres appréciaient les « cadeaux » guenauer, qui, en raison de ses ac- sées dans un accident de la circulation, survenu samedi 31 mai en fin ruiné, déshonoré, humilié. Et on sabilités. Après avoir ironisé sur avant les matchs européens. tivités moscovites, semble de journée sur une terrasse de café en plein centre-ville, à Saint- vous demande d’insister encore sur les « extravagantes révélations » de L’OM, comme d’autres clubs, leur craindre avant tout la mafia russe. Rémy-de-Provence (Bouches-du-Rhône). Une voiture, dont le la seule chose qui me reste : la possi- M. Bernès sur la corruption d’ar- offrait des montres de marque, Si instructive fût-elle, cette ex- conducteur a probablement été pris d’un malaise, selon la gendarme- bilité d’être au contact de ma fa- bitres et de joueurs adverses, voire des « hôtesses ». Corrup- ploration n’a pas apporté d’élé- rie, a raté un virage et a fauché la terrasse du café, très fréquenté à mille. » Me Lienard a évalué à « 4, 5 ou tion ? « Plutôt de la mise en condi- ments décisifs sur le volet finan- cette heure-là. Les magistrats rendront leur ju- cier. Le tribunal n’a pu déterminer a POLLUTION : la rupture d’une canalisation de fioul domes- gement le 4 juillet. D’ici là, ils de- la destination d’une partie des tique, dans l’enceinte de l’entrepôt pétrolier Total du Mans, a été à vront faire le tri du vrai et du faux, Cumul ou non, ce que dit le code pénal fonds. Les débats n’ont pas davan- l’origine, vendredi 30 mai, d’une pollution de la Sarthe qui a entraîné des invraisemblances et des évi- tage permis d’étayer les accusa- l’arrêt de la navigation. Trois barrages flottants ont été placés sur la dences, dans ce dossier complexe Les condamnations prononcées à l’encontre de Bernard Tapie – tions de corruption, largement rivière, à la sortie du Mans, afin de contenir les 2 000 à 3 000 litres où se mêlent factures douteuses, huit mois ferme dans l’affaire du match truqué OM-VA et deux ans évoquées à l’instruction par d’hydrocarbures flottant à la surface de l’eau. honoraires injustifiés et détourne- de prison avec sursis dans l’affaire Testut – et celles éventuelle- M. Bernès et trois autres prévenus a SECTES : le guide belge de la secte tibétaine Ogyen Kunzang ments de fonds, pour un montant ment à venir – le Phocéa et les comptes de l’OM – posent la ques- (Le Monde du 28 mai). Alors qu’il Choling (OKC), Robert Spatz, a été placé sous mandat d’arrêt, samedi total – 101 millions de francs – vi- tion du cumul ou de la confusion des peines. Il y a confusion de n’était pas poursuivi pour ce délit, 31 mai, à Bruxelles, dans le cadre de deux enquêtes de la justice belge vement contesté par la défense. En droit des peines si la première condamnation n’est pas définitive M. Tapie a cherché à prouver, de sur les activités de l’OKC. Agé de cinquante-trois ans, il a été inculpé requérant à l’encontre de M. Tapie au moment où les faits de la deuxième infraction sont commis et manière définitive, que l’OM d’« abus de confiance, association de malfaiteurs, blanchiment d’argent, quatre ans d’emprisonnement, si les faits sont les mêmes, se sont déroulés dans la même période n’avait « corrompu personne » recel et séquestration arbitraire ». Il avait été interpellé la veille, lors dont deux ferme, le parquet a fait et dans les mêmes circonstances. Dans le cas contraire, la règle de (sauf dans l’affaire VA–OM). Sur d’une opération des policiers belges et français contre la secte en Bel- de lui l’organisateur en chef d’une la séparation des peines s’applique. L’article 132-4 du nouveau ce point, crucial aux yeux de l’opi- gique et dans le sud-est de la France, à Castellane. « délinquance financière particuliè- code pénal précise que, « lorsque, à l’occasion de procédures sépa- nion publique locale, il est reparti a ATTENTAT : le FLNC-canal historique a revendiqué, samedi rement structurée » (Le Monde du rées, la personne poursuivie a été reconnue coupable de plusieurs in- plutôt satisfait du palais de justice. 31 mai, dans un communiqué authentifié, l’attentat qui avait visé, la 30 mai). fractions en concours, les peines prononcées s’exécutent cumulative- Sur ce point seulement. nuit précédente, un bureau de poste à Marseille, et celui qui a détruit, A ces réquisitions sont venues ment dans la limite du maximum légal le plus élevé ». Une éventuelle dans la nuit de jeudi à vendredi, les locaux de la chambre de s’ajouter les plaidoiries, très inci- confusion est néanmoins laissée à l’appréciation du tribunal. Philippe Broussard commerce et d’industrie à Propriano (Corse-du-Sud).

CARNET

AU CARNET DU « MONDE » Anniversaires de décès Séminaires COLLÈGE INTERNATIONAL Décès Pour LIORA, DE PHILOSOPHIE qui traversait la rue sur un passage proté- Denise BRETON gé il y a dix-sept ans. – Hélène CIXOUS : « Poétique de la différence sexuelle : Essais de zèles II – nous a quittés, le 26 mai 1997, à l’âge de Sa famille et ses amis se retrouveront, zèles de famille » 7, 14 et 21 juin 9 h 30- soixante-six ans. Après trente années de le 5 juin 1997 à 14 h 30, entrée principale 15 h 30, salle Pupey-Girard, USIC, 18, rue tétraplégie. du cimetière de Pantin. de Varenne, Paris.

La cérémonie religieuse a été célébrée, Familles Cicurel et Wiener. Paolo FABBRI et Stefano MONTES : dans l’intimité familiale, en l’église Saint- « Aspects théoriques de la traduction Pierre de Montrouge, sa paroisse. textuelle » 6, 13, 20 et 27 juin, 18 h-20 h, Que ses amis et admirateurs se sou- salle RCI, université Paris-7, 2, place Jus- viennent du grand photographe sieu, Paris. Elle a été inhumée au cimetière de Montrouge, dans le caveau familial, au- Eric SCHWAB, Jean-Michel REY : « L’écriture de près de son père, l’histoire : Michelet », 9 juin, 18 h- 20 h, salle Jean-XXIII, USIC, 18, rue de Va- parti, il y a vingt ans, le 2 juin 1977. Clément BRETON, renne, Paris. ingénieur des Arts et Métiers. Stéphane ARGUILLÈRE : « Atelier Conférences de traduction : introduction à la lecture Vous qui les avez aimés, pensez à eux. e des textes philosophiques en langue ti- Priez pour eux. – M Robert Badinter présentera son bétaine » 4 juin, 17 h-19 h, annexe de la dernier ouvrage, Ve section EPHE, Bât. CROUS, 29, rue Daviel, Paris. De la part de : « Un antisémitisme ordinaire, Mm Germaine Breton, Vichy et les avocats juifs, 1940-1944 », sa mère, Thierry MARCHAISSE : « Le langage est-il une tasse de thé ? Wittgenstein et Annie Breton, le jeudi 5 juin 1997 à 19 heures, sa sœur, la question de l’essence du langage », Des familles Brugial, Ratier et tous ses 9 et 23 juin, 18 h 30-20 h 30, salle RC3, Au centre de documentation juive amis. université Paris-7, 2, place Jussieu, Paris. contemporaine, 17 rue Geoffroy-l’Asnier, 75004 Paris. Tél. : 01-42-77-44-72 – Fax François BALMES : « Du Père à 01-48-87-12-50 (entrée libre). Cet avis tient lieu de faire-part. l’autre, Dieu dans la psychanalyse (II) » 7 juin, 10 h 30-12 h 30, amphi A, – « La morale laïque contre l’ordre carré des Sciences, 1, rue Descartes, Paris. 41-43, rue des Plantes, moral », conférence de J. Baubérot. Egl. 75014 Paris. protestante de Bon-Secours, 5 juin 20 h 30, 20, rue Titon, 75011 Paris. Guy SAMAMA : « Formation du concept d’hypnose », 5 et 12 juin,

me 18 h-20 h, amphi (RdC, Bât. B), EHESS, – M Paulette Buisan, 105, bld Raspail, Paris. son épouse, Communications diverses Claudine, Martine, Sylvie, ses filles, Mercredi 4 juin 1997 à 20 h 30, « Samedi autour d’un livre, Gide, Julie, Antoine, Mathieu, Laurent, Guil- Genet, Mishima. Intelligence de la per- version de Catherine Millot », sous, la laume, Bruno, – Rencontre « La médecine et l’action ses petits-enfants, responsabilité de Jean-Pierre MARCOS, humanitaire dans le monde : ambition avec M. David-Ménard, J.-P. Marcos, Denis Metaxas, Raymond Desormière, ou illusion », avec Xavier Emmanuelli, Gilles Melère, C. Millot, F. Noudelmann, E. Porge, secrétaire d’Etat chargé de l’action huma- 7 juin, 9 h 30-12 h 30, amphi Stourdzé, nitaire. Sous la présidence de Robert carré des Sciences, 1, rue Descartes, Paris. ont la douleur de faire part du décès du Sebbag, directeur de la Fondation Elf- Aquitaine. P.A.F. Centre communautaire docteur Roger BUISAN, de Paris, 5, rue de Rochechouart, 75009 L’accès à toutes les activités du Col- médecin de la clinique médicale Paris, métro Cadet. Tél. : 01-49-95-95-92. lège est libre et gratuit (dans la limite des d’Arguel de 1946 à 1991, places disponibles). Renseignements sur salles, répondeur : 44-41-46-85. – Autres à l’âge de soixante-quinze ans. renseignements : 44-41-46-80. – Le colloque prévu par la L’inhumation dans la sépulture de la famille a eu lieu dans l’intimité à Pierre- COFRAS, fitte-Nestalas (Haute-Pyrénées). à la Maison de la chimie, le 6 juin 1997, Le présent avis tient lieu de faire-part. est repoussé à une date ultérieure. CARNET DU MONDE Télécopieur : 01-42-17-21-36 Nos abonnés et nos actionnaires, bénéficiant d’une réduction sur les ATLAS Téléphone : insertions du « Carnet du Monde », Assises de la Traduction Littéraire en sont priés de bien vouloir nous com- Arles), table ronde, débats : « Traduire 01-42-17-29-94 muniquer leur numéro de référence. le polar », le 7 juin à 15 heures. Mairie du ou 38-42 3e arrondissement, Paris. LeMonde Job: WMQ0306--0020-0 WAS LMQ0306-20 Op.: XX Rev.: 02-06-97 T.: 07:42 S.: 111,06-Cmp.:02,15, Base : LMQPAG 46Fap:99 No:0887 Lcp: 196 CMYK

20 RÉGIONS LE MONDE / MARDI 3 JUIN 1997

TRANSPORTS Le premier train en Allemagne, le sud du pays de Bade govie. b IL AURA FALLU quinze ans ploi de Bâle. b L’OBJECTIF visé par les TORITÉS bâloises et alsaciennes ont régional transfrontalier a été mis en et, versant suisse, les deux cantons de pour réaliser une idée simple : attirer Suisses est de dissuader les salariés se voulu faire de l’ouverture de la nou- service, dimanche 1er juin, à l’initiative Bâle. Huit rames du « Regio-S-Bahn » vers le rail le flux des 30 000 fronta- rendant au centre industriel de Bâle velle ligne une fête populaire en or- de la Regio, un espace trinational qui relient chaque jour Mulhouse à Frick liers haut-rhinois mais aussi celui des d’utiliser leur voiture pour effectuer ganisant plusieurs manifestations et associe, côté français, le Haut-Rhin, et Laufenburg, dans le canton d’Ar- Suisses se dirigeant vers le pôle d’em- le trajet domicile-travail. b LES AU- concerts durant le week-end. Le premier train régional transfrontalier est né entre Bâle et Mulhouse L’idée européenne a progressé dimanche 1er juin avec l’inauguration d’une ligne de navettes ferroviaires qui, à terme, reliera trois régions, française, suisse et allemande, fortes de deux millions d’habitants et culturellement très proches

BÂLE des contrôles ponctuels. La ving- Jean), à deux pas du géant de la sagers par jour), il est d’ores et de notre envoyé spécial taine de gares desservies sur une chimie Novartis, né de la fusion Le « Regio-S-Bahn » déjà question, dans l’esprit de La Confédération helvétique distance de 70 kilomètres sont si- entre Ciba et Sandoz. Stephan Maurer, responsable du n’est toujours pas candidate à gnificatives de l’objectif visé par Jean-Luc Johaneck, président MÜLLHEIM trafic régional des Chemins de l’entrée dans l’Union euro- les Suisses : dissuader les salariés du comité de défense des fronta- fer fédéraux, de passer à la ca- n

i péeenne. Elle a même refusé se rendant au centre industriel liers alsaciens, ne tarit pas MULHOUSE h ALLEMAGNE dence d’un train par heure à R en décembre 1992, à l’issue d’un de Bâle d’utiliser leur voiture d’éloges sur l’initiative suisse. moyen terme au lieu de huit par référendum, de s’associer au pour effectuer le trajet quotidien « Nous disposons désormais de ZELL jour. Hubert Haenel, sénateur « Grand Marché» communau- entre leur domicile et leur lieu de trains rapides et confortables qui (RPR) du Haut-Rhin et membre taire malgré la volonté de la ville travail. Afin de parfaire le réseau nous déposent à deux pas de notre ELRINGEN-KIRCHEN du conseil d’administration de la de Bâle qui, elle, avait massive- des arrêts, proches des zones de travail et nous évitent de traverser SNCF, chargé de la régionalisa- ment voté pour un arrimage eu- résidence et d’activité, une sta- en voiture le centre de Bâle. » Il Lörrach tion des chemins de fer français, ropéen. Cet échec n’a pas pour tion a été aménagée à la gare de déplore, néanmoins, que le côté FRANCE partage son optimisme : « Parce autant découragé les Bâlois. marchandises de Bâle (Saint- alsacien ne soit pas aussi bien lo- WALDSHUT que c’est un transport public de Chaque fois qu’ils le peuvent, ils ti que la partie suisse. Les par- proximité, la réussite est au bout investissent dans des actions de kings autour de la gare de Mul- BÂLE de l’entreprise. » in coopération et de rapproche- La fête sur le rail house n’ont pas une capacité Rh La foi dans le succès des na- ment avec les régions voisines de d’accueil suffisante au regard des vettes franco-suisses est d’autant France et d’Allemagne. Afin de marquer l’importance besoins et les usagers ne se LAUFENBURG plus grande qu’il est prévu un Pour ce faire, ils jouent à fond qu’elles attachent à la réalisa- voient pas offrir un système raccordement en 2001 entre la ci- la carte de la « Regio », un es- tion du « Regio-S-Bahn », les d’abonnement couvrant à la fois FRICK té allemande de Fribourg et la pace trinational qui associe, côté autorités bâloises et alsaciennes le transport en train et en bus sur gare centrale de Bâle. Pour ce français, le Haut-Rhin en Alle- ont voulu faire de l’ouverture de le territoire français. Sissach tronçon, l’objectif n’est pas tant magne, le sud du pays de Bade la nouvelle ligne une fête popu- Mais ce qui compte, explique d’améliorer le transport des tra- et, versant suisse, les deux can- laire. Samedi 31 mai et di- Jean-Louis Hoffet (PS), conseil- vailleurs frontaliers que de tons de Bâle (ville et campagne). manche 1er juin, manifestations, ler régional alsacien, c’est que compléter un réseau ferroviaire En réalisant, avec la collabora- concerts, expositions, guin- « la culture suisse sur les trans- permettant à deux millions d’ha- tion de leurs voisins alsaciens, le guettes ont été organisés tout au ports publics est en train de se dif- SUISSE bitants vivant dans trois pays dif- premier train express régional long du parcours. Des itinéraires fuser au travers de la frontière ». DELÉMONT férents mais très proches par la transfrontalier – le « Regio-S- fléchés et des navettes de bus « Nos voisins sont tellement res- OLTEN géographie, la langue, la culture Bahn » – les Suisses apportent ont permis aux voyageurs des- trictifs en matière de stationne- et l’histoire de renforcer leurs re- un démenti à ceux qui disent un cendant dans les stations d’aller ment des voitures particulières, lations. C’est en tout cas la peu trop facilement que la « Re- à la découverte de musées, de précise-t-il, que nous sommes pe- house, les subventions qu’ac- suel (334 FF) pour le trajet Mul- conviction affichée par Adrien gio » est une « coquille vide ». châteaux ou d’autres centres tit à petit tenus d’aborder la ques- cordent les autorités suisses au house-Bâle en dit long sur la po- Zeller (UDF-FD), président de la Depuis dimanche 1er juin, huit d’attraction en Suisse, en France tion avec le même esprit qu’eux, à fonctionnement du « Regio-S- litique dissuasive des Bâlois à région Alsace, pour qui « le rail rames par jour relient Mulhouse et en Allemagne. La circulation savoir accepter une sévère limita- Bahn » ne sont en rien compa- l’encontre de la voiture. transfrontalier est un choix d’ave- à Frick et Laufenburg, dans le sur le réseau était illimitée pour tion de la circulation automo- rables à ce que coûte la pollu- Même si les prévisions sur le nir ». canton d’Argovie. Il aura fallu un prix forfaitaire de 20 francs bile. » Pour ce proche de Jean- tion. Le prix de l’abonnement nombre des utilisateurs sont mo- quinze ans pour réaliser une idée français. Marie Bockel (PS), maire de Mul- hebdomadaire (87 FF) ou men- destes pour l’instant (2 000 pas- Marcel Scotto simple : attirer vers le rail le flux des trente mille frontaliers haut- rhinois mais aussi celui des Suisses se dirigeant vers le pôle Robinsons cherchent bateau, désespérément... d’emploi de Bâle (chimie, métal- lurgie, charcuterie industrielle, TOULON tits désagréments, les « îliens » s’en primée... » Faute de bateau, point de confié à Me Gérard Germani, du barreau etc.). de notre correspondant plaindraient à peine s’ils pouvaient navi- courrier, de provisions ou de pain quoti- de Nice, qui, par le biais d’une « action A quelques encablures d’Hyères (Var), guer facilement et fréquemment entre dien. La rareté a son prix : ainsi le trans- sur l’accès aux infrastructures portuaires OBSTACLES TECHNIQUES les îles de Porquerolles, Port-Cros et du leurs îles et le continent. C’est le privilège port d’une bouteille d’eau (1,45 franc) du plan d’eau des îles d’Hyères », soulève Les obstacles techniques Levant constituent un paradis naturel. de la seule Porquerolles. Les deux autres double son prix d’achat (1,42 franc) et quelques vagues dans une organisation furent une première difficulté. Mais, dès que les touristes ont déserté îles ne bénéficient que de quatre navettes l’acheminement d’un médicament est de la navigation jusque-là très consen- Les réseaux ferroviaires suisse et ces trois « îles d’Or », le paradis se met à par semaine, à des horaires assez in- facturé 15 francs quel que soit son vo- suelle. Il demande au préfet du Var de français ne sont pas aux mêmes ressembler à une terre d’exil pour les six congrus. Ainsi les enfants qui sont scola- lume. trancher, alors même que « l’Etat a aban- normes de voltage. Pour éviter le cents personnes qui y vivent en perma- risés sur le continent doivent-ils être Devant cette situation, les insulaires se donné depuis plus de dix ans à la changement de locomotive à nence. Constituées en association, elles pensionnaires ; ils ne peuvent rentrer sont regroupés au sein d’Utiles (Union commune d’Hyères l’organisation, selon Bâle, les trains Colibri – le maté- ont déposé devant le tribunal administra- chez eux le samedi s’ils ont cours jusqu’à des trois îles), une association qui sou- son bon plaisir et avec le concours de la riel roulant suisse qui équipe la tif de Nice un recours pour excès de pou- midi et doivent en tout cas reprendre le haite obtenir un bateau par jour, des ta- chambre de commerce et d’industrie du ligne – ont été dotés d’un double voir contre le préfet du Var, qui passe bateau du dimanche après-midi. rifs plus raisonnables pour les marchan- Var, d’une véritable chasse gardée des ins- système électrique pouvant bas- outre à la modification d’un arrêté de dises comme pour les insulaires qui tallations portuaires et de l’ensemble du culer selon le tronçon. La région 1984, source de tous les malheurs insu- LA RARETÉ A SON PRIX paient 64 francs pour un aller-retour plan d’eau ». Alsace a financé à hauteur de laires. Quand on vit sur l’une de ces îles, (22 milles) alors que le voyage en Corse L’avocat demande que, « conformé- 40 % le coût de transformation Le voyage à Port-Cros ou au Levant re- mieux vaut être rentier, oisif et fortuné. (180 milles) ne coûte que 250 francs avec ment aux lois de janvier et juillet 1983, ces des matériels (56 millions de lève de l’odyssée dès lors qu’on a l’audace Comme l’explique un commerçant de un navire grande vedette. responsabilités soient transférées au dé- francs français au total). de vouloir s’y rendre en hiver. Calé entre Port-Cros : « Si j’ai rendez-vous le mardi à « C’est pourquoi nous voulons également partement ». Les insulaires auraient tout Les nouvelles navettes se de- deux cartons et un cageot de légumes, le Hyères, il faut quitter l’île le lundi à 14 h 45 bénéficier de la continuité territoriale et à gagner à une concurrence ouverte dans vaient d’ignorer, en outre, les voyageur a tout loisir de profiter des em- et rentrer avec le bateau du mercredi à éventuellement servir de modèle aux pe- la desserte, jusque-là très exclusive, des frontières douanières. Les admi- bruns dans le vrombissement d’un mo- 9 h 30. Il est impossible de faire un aller- tites îles de Méditerranée qui ont les îles hyéroises. nistrations nationales ont finale- teur qui rythme une heure de traversée retour dans la journée ! Et, si le temps est mêmes handicaps », explique Philippe ment consenti à ne procéder qu’à particulièrement inconfortable. Ces pe- mauvais, la navette peut même être sup- Anger, président d’Utiles. Le dossier a été José Lenzini Au bout du tunnel du Somport, la route inachevée PAU de francs restent à trouver pour gâchés par une circulation trop ligne comme alternative au trafic de notre correspondante boucler les travaux. dense. Mais un itinéraire peu et au transport routier. Eric Pete- Côté français, à la fin de l’an- Toutefois, avec les 230 millions adapté, interdisant le développe- tin était présent, mais aussi Jean née, tous les travaux de génie ci- consacrés au projet dans le ment du trafic, remettrait en Lassalle (UDF-FD), conseiller gé- vil du tunnel du Somport, qui XIe Plan (qui court jusqu’en 1999), question l’utilité même du tun- néral de la vallée d’Aspe et parti- doit relier le Béarn et l’Aragon, la direction départementale de nel. Celui-ci a pourtant entraîné san acharné du tunnel, à la seront achevés. En 1998, l’en- l’équipement (DDE) espère avoir un investissement considérable, grande surprise, un peu agacée, semble des équipements inté- amélioré plusieurs passages diffi- dont le montant – 370 millions – des Béarnais. D’autant que Jean rieurs seront mis en place. Cet ciles au moment de l’ouverture est en cours de réévaluation. Lassalle se trouvait en tête du ouvrage transpyrénéen à deux du tunnel. Mais on ignore tou- Du côté des opposants, l’achè- cortège et portait, avec quelques voies – d’une longueur totale de jours quand débuteront les tra- vement des travaux du tunnel a Espagnols, la banderole unitaire. 8 597 mètres (dont seulement un vaux dans les secteurs les plus calmé les ardeurs. Eric Petetin a La plupart des Aragonais se tiers en France), d’une largeur coûteux, comme la portion de la perdu de son panache, même s’il battent pour la réouverture de utile de 9 mètres, le tout à RN 134 située en contrebas du profite de toutes les occasions cette liaison ferroviaire interrom- 1 100 mètres d’altitude – ne de- fort du Portalet : cet aménage- pour manifester publiquement sa pue, côté français, depuis 1970, à vrait être mis en service que dans ment est estimé à quelque colère. Les membres du collectif la suite d’un accident. Cette ligne les premiers mois de 1999 : côté 150 millions de francs, pour un pour une alternative à l’axe euro- de chemin de fer, à l’époque, ne aragonais, les Espagnols ont pris peu moins de 2 kilomètres de péen E7, qui ont toujours estimé servait plus qu’au transport des du retard. Il reste même route. Peut-être faudra-t-il at- que la construction du tunnel marchandises. Mais elle reste 300 mètres à percer. tendre une dizaine d’années... conduirait inévitablement à pour eux le symbole de leur ap- Quoi qu’il en soit, ce tunnel est Les élus favorables au tunnel, l’aménagement autoroutier de la partenance à l’Europe. en phase d’achèvement. En re- ainsi que les dirigeants de la route de la vallée et à la trans- Côté français, la réouverture vanche, au grand dam de tous ses chambre de commerce et d’in- formation de celle-ci en couloir à est largement soutenue, notam- partisans, la modernisation de la dustrie de Pau, sont excédés par camions, continuent à exprimer ment par François Bayrou. Mais RN 134 (appelée à devenir l’E7) ce retard. Ils rappellent que, côté leur hostilité au saccage inévi- son collègue du gouvernement progresse beaucoup plus lente- espagnol, l’Europe a financé à table de cet espace encore sau- sortant, le ministre des trans- ment. Si la RN 330, en Espagne, hauteur de 80 % la route désor- vage des Pyrénées. Ils font cause ports et de l’équipement Bernard est maintenant aménagée, on ne mais si confortable et souhaitent commune avec les adhérents du Pons, a indiqué qu’un tel inves- peut pas en dire autant de son une aide de l’Etat et de Bruxelles. Creloc, un comité qui lutte pour tissement était exclu. Et le gou- pendant béarnais. Si des travaux la réouverture de la ligne de che- vernement espagnol ne mani- sont en cours, si des tronçons ont NON-SENS min de fer Oloron-Canfranc qui feste pas davantage déjà été élargis, globalement, le Que l’on soit favorable ou non empruntait la vallée. d’enthousiasme. D’autant que, si retard pris est considérable. Ce à ce tunnel, force est de constater Dans ce but, une délégation cette ligne est réouverte, en par- contretemps est lié aux que son existence, au bout d’une béarnaise a participé il y a quel- ticulier pour le transport des contraintes imposées par la pro- route dont la modernisation n’est ques semaines, à Saragosse, à marchandises, le tunnel s’avérera tection de l’environnement, mais pas garantie, relève du non-sens. une manifestation réunissant largement inutile... également à des problèmes fi- Certes, les charmes incontes- plusieurs milliers de personnes, nanciers : au moins 700 millions tables de la vallée d’Aspe seraient réclamant la réouverture de cette Marie-Claude Aristegui LeMonde Job: WMQ0306--0021-0 WAS LMQ0306-21 Op.: XX Rev.: 31-05-97 T.: 16:55 S.: 111,06-Cmp.:02,15, Base : LMQPAG 46Fap:99 No:0888 Lcp: 196 CMYK

21 ENTREPRISES LE MONDE / MARDI 3 JUIN 1997

BUDGET Engagé dans les an- l’année.b DEUTSCHE TELEKOM, dont sion, un partenaire tel que France Té- la Postbank est aussi envisagée. b LE de francs) initialement prévus. b LES nées 80, le programme de privatisa- l’introduction en Bourse a été un lécom pourrait être sollicité. BUDGET allemand pourrait ainsi bé- PARTICIPATIONS de l’Etat fédéral ont tions allemand s’accélère. Contrainte grand succès en novembre 1996, de- b D’AUTRES OPÉRATIONS sont en néficier en 1997 de recettes de priva- diminué de moitié depuis 1982. Les budgétaire oblige, Bonn lancera de vrait voir une nouvelle partie de son cours, comme la poursuite de la pri- tisations bien supérieures aux 3,9 mil- Länder vendent également des pans nouvelles opérations avant la fin de capital passer au privé. A cette occa- vatisation de Lufthansa. La vente de liards de deutschemarks (11 milliards entiers de leur immense patrimoine. L’Allemagne accélère son programme de privatisations Le gouvernement espère combler une partie de son déficit budgétaire et remplir les critères de Maastricht en continuant à vendre ses participations dans Deutsche Telekom ou Lufthansa. Bonn envisage également de faire basculer la Postbank dans le secteur privé

COLOGNE majorité jusqu’en 2000. La recette ner à bien la privatisation dans le genterie », selon l’expression de (contre 9 milliards attendus), et lisé, la Treuhandanstalt, a privati- correspondance éventuelle est tout de même éva- courant de cette année. la presse allemande, survient à en 1997, les prévisions portent sur sé des milliers d’entreprises is- La nouvelle a fait l’effet d’une luée à une vingtaine de milliards. Autre candidat à la privatisa- point pour boucler le projet de 3,9 milliards, qui seront probable- sues des combinats de l’ex-RDA. petite bombe : dans sa course au Dans la mesure du possible, la tion, le réseau autoroutier des budget 1998 et éviter, autant que ment dépassés en raison de l’ac- En outre, l’obligation de fusion- respect des critères de Maas- Fédération voudrait aussi céder, stations-service rapporterait au possible, des hausses d’impôt, célération du programme. ner les administrations de l’Est et tricht, le gouvernement de Bonn cette année, 75 % du capital de la maximum 1 milliard de deutsche- elle n’est pas nouvelle. Depuis le Les raisons financières n’ex- de l’Ouest a incité l’Allemagne veut accélérer la privatisation de Postbank (les services financiers marks. L’Etat se sépare aussi début des années 80, les privati- pliquent pas à elles seules cette unie à revoir plus rapidement que Deutsche Telekom. L’Etat alle- des PTT, aujourd’hui détachés) cette année de sociétés immobi- sations s’inscrivent au cœur de la volonté de privatiser : la libérali- ses voisins le fonctionnement de mand détient encore 74 % de son afin de récupérer entre 3 et 4 mil- lières alors que des fleurons du politique du gouvernement de sation en Europe de pans entiers ses services publics. La réforme capital et une cession partielle liards de deutschemarks. La Poste service public, comme la Poste, la Helmut Kohl. La coalition libérale de l’économie, comme les télé- des statuts qui a suivi, comme rapporterait quelques précieux allemande doit recevoir 17,5 % compagnie ferroviaire Deutsche et conservatrice en profite bien communications ou le transport l’éclatement des PTT et l’assainis- milliards de deutschemarks. Rien des titres et une proportion im- Bahn et les aéroports devraient sûr pour assainir les finances pu- aérien, doit s’accompagner en Al- sement de la Deutsche Bahn, n’est encore décidé, les spécula- portante sera attribuée à des par- suivre dans les prochaines an- bliques : en 1996, la vente des lemagne de la fin des monopoles s’est souvent faite dans la pers- tions vont bon train sur la mé- tenaires bancaires. Afin de profi- nées. participations de l’Etat a rapporté d’Etat, estime-t-on à Bonn. «La pective d’un passage au privé. thode et le volume de la transac- ter plus rapidement de cette Si la vente accélérée de « l’ar- 2,3 milliards de deutschemark privatisation est un investissement Enfin, certains Länder cèdent tion, mais cette initiative met en manne, l’Etat pourrait dès les dans la concurrence, l’efficacité et une partie de leur énorme patri- lumière l’importance des privati- prochains mois vendre cet éta- l’innovation pour renforcer le site moine avec la bénédiction de sations en cours en Allemagne. blissement financier à la banque Trois méthodes pour une cession industriel allemand », rappelait Bonn. Les régions et les Outre Deutsche Telekom, la Post- publique Kreditanstalt für Wiede- Theo Waigel, le ministre des fi- communes allemandes de- bank et Lufthansa sont sur les raufbau, qui n’interviendrait qu’à De quelle manière l’Etat allemand cédera-t-il, comme il vient de le nances, en mars. meurent très engagées dans une rangs cette année, alors que les titre provisoire. Cette dernière se décider, une nouvelle tranche du capital de Deutsche Telekom ? Ainsi, le nombre des participa- multitude de secteurs. A l’image différents ministères ont jusqu’au chargerait, dans un second Trois méthodes sont à l’étude. La première consisterait à placer ces tions détenues par la Fédération a de la Basse-Saxe, qui détient près 30 juin pour recenser leurs activi- temps, de céder la Postbank à des actions en Bourse, à l’instar des 26 % déjà introduits en novembre, diminué de plus de moitié de- de 20 % de Volkswagen, elles sont tés privatisables. actionnaires privés ou de l’intro- opération qui avait rencontré un grand succès auprès du public. puis 1982, passant de 958 entre- présentes dans les banques régio- Dans le cas de Deutsche Tele- duire en Bourse. Mais, selon la loi qui définit le statut de l’opérateur, cette hypothèse prises à 424 fin 1995. Le mouve- nales, des industries de pointe, kom, introduite en Bourse en no- n’est pas possible avant l’an 2000 : pour revenir sur cet engagement, ment a concerné de grands les caisses d’épargne, des bras- vembre 1996, les modalités de la RENFORCEMENT DU PROCESSUS le gouvernement devrait faire voter un amendement à la loi. Deut- groupes, des producteurs d’éner- series, les ports et les aéroports, cession sont à l’étude. La vente Ce procédé de « portage » a dé- sche Telekom n’y est guère favorable. gie comme Veba et Viag, au mi- et jusqu’à l’armement. On estime des quelque deux milliards de jà été utilisé en décembre 1996 La deuxième solution viserait à vendre en bloc à un investisseur lieu des années 80, au construc- que le montant de leurs participa- titres dans les mains du pouvoir pour Lufthansa. L’Etat avait alors institutionnel. La formule pourrait intéresser quelques grandes teur automobile Volkswagen, tions, et donc le potentiel privati- fédéral pourraient rapporter en- cédé 36 % de la compagnie aé- banques, privées ou publiques. La troisième solution prendrait la en 1988, après une première sable, est très supérieur aux viron 80 milliards de deutsche- rienne à la même Kreditanstalt forme d’une participation croisée avec un partenaire. Les noms de tranche dans les années 60. « réserves » dont dispose le gou- marks (270 milliards de francs), für Wiederaufdau (avec un profit France Télécom et de l’américain Sprint, alliés traditionnels de L’unification allemande a vernement de Bonn. mais Bonn n’en cédera qu’une de 2,1 milliards de deutsche- l’opérateur allemand, sont évoqués par le gouvernement, qui cite conforté cette tendance. En partie de manière à conserver la marks), qui doit maintenant me- également celui de la compagnie japonaise NTT. moins de cinq ans, l’office spécia- Philippe Ricard Les petits laboratoires Des compagnies aériennes mettent sur écoute leurs agents de réservation MARDI 20 MAI, deux cadres supérieurs savent que nous disposons d’un système d’inter- Les écoutes sont courantes dans les compa- pharmaceutiques croient en leur survie d’Air Liberté, le directeur des services infor- ception d’appel qui permet au superviseur de se gnies aériennes. Air France, par exemple, y a matiques et le chef des réservations, ont été brancher sur la conversation d’un agent. » recours. « C’est une dimension importante de « NOUS VOULONS remettre en note l’ALFI. Or, pour cette associa- interrogés par la police sur leur lieu de travail. La direction d’Air Liberté justifie ce sys- la qualité de service », explique la compagnie cause l’idée selon laquelle nous tion, « les stratégies de développe- Objet de la perquisition : enquêter sur le sys- tème par le besoin de contrôler et d’améliorer nationale. British Airways aussi ; « en Angle- sommes condamnés à terme. » Pour ment planétaire ne sont pas néces- tème d’écoutes des agents du service de ré- le service de réservation. « Lorsqu’on s’aper- terre, pas encore en France », précise sa direc- François Rougaignon, président sairement adaptées à tous les servation mis en place par la direction il y a çoit que le temps d’attente d’un client au télé- tion. Mais, chez British Airways, les agents de des laboratoires Théramex, les pe- produits, ni à l’ambition de toutes les plusieurs années. En janvier, un salarié, délé- phone ou que le temps de traitement de sa de- réservation sont informés de la date et de tites firmes pharmaceutiques ne entreprises ». gué syndical CGT qui a depuis perdu son em- mande sont anormalement longs, on écoute l’heure de l’écoute. « Les conversations sont sont pas condamnées par le mou- La découverte de nouvelles mo- ploi, avait déposé une plainte à ce sujet. pour savoir ce qui se passe. Il n’y a pas d’enre- enregistrées. Le salarié et le superviseur vement de concentration mon- lécules ne requérant pas de « La procédure est en cours. La réglementa- gistrement », explique le directeur juridique écoutent ensuite l’appel ensemble et en com- diale. Le rachat, voici une semaine, moyens considérables, la tactique tion sur les écoutes dans les entreprises est d’Air Liberté. mentent le contenu et la forme. Les bandes sont des laboratoires allemands Boeh- des PME consiste à adopter une floue », considère Marc Rochet, président Toujours est-il que, depuis le passage de la toutes détruites », explique-t-on chez British ringer Mannheim par le suisse stratégie de « niches ». Ainsi, le la- d’Air Liberté. « Le droit n’incrimine que les police, les salariés concernés sont prévenus Airways. AOM dit avoir adopté ce type de Roche pour 11 milliards de dollars boratoire Lafon s’intéresse aux écoutes des conversations privées : l’écoute des par un bip qu’ils sont écoutés. « On a fait cela pratique il y a à peine un mois et demi. (62 milliards de francs) est l’illustra- traitements de maladies rares conversations professionnelles n’est en aucun dans un souci d’apaisement social », précise « Nous avons mis en place un système qui per- tion la plus récente de cette course comme celles concernant les cycles cas prohibée, précise M. Rohard, directeur ju- M. Rohard. Air Liberté sort d’une grève de met au superviseur d’être certain de ne pas se au gigantisme qui semble devoir sommeil-veille. Son médicament, ridique de la compagnie aérienne. Les gens plus de six semaines de ses personnels mé- brancher sur une conversation privée », ex- écraser les petites entreprises indé- le Modafinil, est en cours d’enre- qui travaillent à la réservation ne sont pas cen- contents des conditions de la fusion avec TAT. plique Christian Appadouray, chef du service pendantes. gistrement aux Etats-Unis. « Notre sés avoir ou donner de coups de fil personnels. Les syndicats, qui étaient il y a encore un an, de réservation d’AOM. C’est sur le terrain de la re- innovation est à la taille de ce que Ils ont des postes à leur disposition pour cela quasiment inexistants, ont pris un nouveau cherche qu’ont décidé de réagir ces nous représentons, cela permet de qui sont différents de leurs postes de travail. Ils poids dans la compagnie aérienne. Virginie Malingre pharmaciens, réunis au sein de concilier nos objectifs et les moyens l’ALFI (Association des laboratoires mis en jeu et d’avoir de la constance français indépendants). Créée en dans nos travaux », souligne Ar- 1995, cette organisation entend ré- mand Frydman, directeur de la re- Le passage à l’euro se fera de façon simultanée sur toutes les Bourses européennes sister à l’érosion de cette profes- cherche chez Lafon. D’autres en- sion, qui a perdu la moitié des siens treprises privilégient la coopération AMSTERDAM du passage à la monnaie unique. nières années de moyens de lutte pour les marchés boursiers. Jean- en une quinzaine d’années, passant avec les établissements publics de notre correspondant « Nous n’avons pas envisagé ce scé- contre les corrections trop bru- François Théodore pronostique : de 61 à 31 laboratoires. Représen- (laboratoires de recherche, CEA, Les Bourses ont adopté l’har- nario », affirme même Georges tales : « Nous disposons tous de « L’histoire nous prouve que tant 10 % des entreprises du sec- universités). « Nous allons ainsi monisation et le « big-bang » Möller, de la Bourse d’Amster- coupe-circuits », note Jean-Fran- chaque suppression de barrières teur, ces PME pèsent malgré tout chercher des compétences, car lare- comme mots d’ordre en matière dam. çois Théodore. « L’harmonisation entravant les échanges a accru le 25 milliards de francs de chiffre cherche publique est innovante », de monnaie unique. La Fédération Pourtant, certains spécialistes de ces instruments est inscrite sur volume des transactions. La créa- d’affaires, soit le quart de l’activité explique Michel Seman, respon- des Bourses européennes a for- s’inquiètent des risques de réac- l’agenda de toutes les fédérations tion d’une zone euro viendra de cette industrie, les trois quarts sable de ce secteur chez Mayoly mellement décidé, vendredi tion brutale des marchés au cas boursières, sans que cela soit lié à s’ajouter à l’autre grande zone exis- restants étant assurés par les Spindler. 30 mai à Amsterdam, d’introduire où l’euro prendrait du retard. l’introduction de l’euro », rappelle- tant, le dollar. Ce grand marché grands laboratoires français, euro- En cas de découverte d’un nou- en une fois, pour tous ses « Nous organisons les marchés, t-on à Amsterdam. unique attirera plus de capitaux péens, suisses et américains. veau médicament, sa commerciali- membres, l’usage de l’euro dès nous ne dictons pas leur attitude », Une chose est certaine : les pré- que la somme actuelle des marchés sation qui, elle, nécessite d’impor- l’ouverture des marchés, le 4 jan- dit-on à la FBE. sidents des Bourses européennes nationaux. » tants moyens, n’apparaît pas vier 1999, à charge « pour les inter- Par ailleurs, les Bourses euro- sont convaincus que la monnaie La tactique des PME comme un problème pour ces pe- médiaires de faire les conversions péennes se sont dotées ces der- unique aura des effets positifs Alain Franco tites entreprises. « A partir du mo- pour leurs clients, lorsque cela sera consiste à adopter ment où vous avez un bon produit, il nécessaire », a précisé le président n’existe aucun problème de diffu- de la FBE, Antonio Zoido. une stratégie sion. Les grands laboratoires vous La FBE ne s’occupe cependant sollicitent pour le diffuser », ex- pas directement des implications de « niches » plique le président de Théramex. techniques d’une telle décision, Les exemples de ces partenariats déjà prise par plusieurs places fi- sont fréquents. nancières, dont Paris. « Nous har- S’ils ne contestent pas l’intérêt Reste le problème de la succes- monisons les grands principes, des fusions géantes pour obtenir sion au sein de ces sociétés, chaque marché dispose de son un effet de taille et une internatio- souvent familiales. Ce passage fra- propre cahier des charges, en fonc- nalisation des activités, les adhé- gilise l’entreprise et la contraint à tion de ses particularités », précise rents de l’ALFI leur dénient le mo- se vendre pour payer les droits de Jean-François Théodore, pré- nopole de l’innovation. Il ne faut succession, comme dans le cas sident de la Bourse de Paris. pas assimiler la recherche (décou- d’UPSA, vendue à l’américain Bris- verte de molécules) et le dévelop- tol Myers Squibb en 1994. « On ne ALLÈGEMENT DES FORMALITÉS pement (commercialisation), dont peut pas s’engager sur la pérennité Parallèlement, la FBE, qui re- les besoins de financement sont de l’entreprise, reconnaît François groupe les Bourses des Quinze, différents. En l’espace de vingt ans, Rougaignon, mais on peut garantir ainsi que les places suisse et, de- les coûts pour la découverte et la aux équipes une stabilité dans leurs puis vendredi, islandaise, re- mise sur le marché d’un médica- travaux de recherche. » Une critique commande la suppression des ment ont « explosé », passant de implicite aux grands groupes ré- règles légales obligeant les socié- 300 millions à 2,5 milliards de dol- cemment constitués, dont l’un des tés cotées à préciser la valeur no- lars (14,2 milliards de francs), mais, impératifs est de verser des divi- minale de leurs titres, ce qui al- sur ce montant, la part la plus im- dendes aux actionnaires quitte à légerait les formalités de passage portante relève du développement. sacrifier s’il le faut, au nom de la ra- à l’euro. « On évoque aujourd’hui 20 % du to- tionalisation, certains programmes Si l’introduction de l’euro se fe- tal pour la recherche et 80 % pour le de recherches. ra sous le signe de l’harmonisa- développement, quand ce n’est pas tion, la FBE n’a pris aucune me- 10 % et 90 %, voire 5 % et 95 % », Dominique Gallois sure spécifique en cas de report LeMonde Job: WMQ0306--0022-0 WAS LMQ0306-22 Op.: XX Rev.: 02-06-97 T.: 06:48 S.: 111,06-Cmp.:02,15, Base : LMQPAG 46Fap:99 No:0890 Lcp: 196 CMYK

22 AUJOURD’HUI LE MONDE / MARDI 3 JUIN 1997

RUGBY Le Stade toulousain a sur le Club sportif de Bourgoin-Jal- Super 12 gagnée 23-7 par les Auc- ter samedi la victoire des Rouge et prévus. b JACQUES CHIRAC ET LIO- remporté, samedi 31 mai, pour la lieu. b AUCUN ESSAI n’a été marqué kland face à l’Australian Capi- Noir, tandis qu’à Bourgoin-Jallieu NEL JOSPIN ont assisté ensemble à quatrième fois consécutive, le titre au cours de cette rencontre, qui n’a tal Territory (ACT). b A TOULOUSE, (Isère) la défaite n’a pas altéré la foi la finale au Parc des Princes, vingt- de champion de France de rugby pas tenu ses promesses et a souffert malgré la pluie, des milliers de sup- des supporteurs, qui ont maintenu quatre heures avant de connaître le grâce à sa victoire (12-6), en finale, de la comparaison avec la finale du porteurs se sont rassemblés pour fê- le bal populaire et le feu d’artifice résultat des élections législatives. Le Stade toulousain confisque le bouclier de Brennus En battant Bourgoin (12-6) en finale, sans marquer un seul essai, les Rouge et Noir sont devenus champions de France pour la quatrième année consécutive et la quatorzième fois de leur histoire

LE FACE-À-FACE n’a pas eu lieu. Toulouse pour Castres. Il part, le époque où le rugby était réservé à Sagement assis dans le recoin de la devoir accompli. une mince élite de gentlemen, au- loge présidentielle, celui qui n’était Dans le bonheur de Nicolas cune équipe n’avait réussi à ga- encore qu’aspirant-député Lionel Martin, le miraculé des lignes ar- gner quatre fois consécutivement Jospin, mais déjà conseiller général rière, sorti sur le tard du chapeau le titre de champion de France. de Cintegabelle (Haute-Garonne), des entraîneurs, et l’un des rares Le paradoxe veut que Toulouse a gardé l’œil rivé sur le terrain. Toulousains à savourer son pre- atteint la gloire statistique en re- Pendant les quatre-vingts mi- mier titre. Hier encore, il épuisait niant à moitié ce qui avait fait sa nutes d’une éprouvante finale, sa patience sur le banc des rempla- réputation d’équipe joueuse, in- Jacques Chirac a semblé ne pas çants. A vingt-cinq ans, il s’était dit ventive, créatrice, prompte à pro- l’avoir reconnu. Et Lionel Jospin a que c’était cette saison ou jamais. voquer, à rebondir. Tout au long réservé ses rares confidences à son voisin, , le maire DÉFENSE ET PRUDENCE de Toulouse. Point de salut, de poi- Et voilà qu’à son tour il prenait Le XV de France gnée de main pour les caméras. On toute sa part dans l’épopée rouge s’est somptueusement ignoré. et noir, s’enivrait d’un morceau domine la Roumanie Au coup de sifflet final, les deux d’aventure stadiste. Il rejoignait la hommes ont, chacun de leur côté, longue liste de ceux que le Stade Le XV de France a battu, di- félicité les vainqueurs, dispensé toulousain a fait champions de manche 1er juin, la Roumanie 51- quelques mots de consolation aux France. 20 en inscrivant neuf essais vaincus. La routine... Jospin, le L’émotion ? Elle se lisait encore dans un match de préparation Toulousain, avait le sourire. Et sans dans la détresse de Stéphane Glas, pour sa prochaine tournée en doute a-t-il apprécié la tape ami- victime d’une fracture de la clavi- Australie. Les Brivistes David cale de Thomas Castaignède, une cule au milieu de la première mi- Venditti et Sébastien Viars ont nouvelle fois champion de France temps, privé de la tournée de chacun marqué deux essais, tout avec le Stade. Jacques Chirac est l’équipe de France en Australie. comme le Palois Philippe Ber- resté grave, fonction oblige. Puis Ou enfin dans la tristesse muette nat-Salles. L’Agenais Abdel Be- chacun s’en est allé de son côté, le du demi de mêlée Dominique Ma- nazzi, le Montferrandais Olivier

président de la République ouvrant CHRISTIAN LIEWIG / TEMPSPORT zille, une seconde fois défait à l’ul- Merle et l’ouvreur briviste Alain la marche, accompagné de Philippe time étape. Battu avec Penaud ont complété la marque Séguin, grand amateur de football. Bourgoin à la botte de Christophe Deylaud en 1993, il s’était jeté dans la ba- de trois essais. Les Roumains taille, avec toute l’ardeur de ses ont tout de même réussi à fran- DOUBLE MALAISE Il est l’instrument du néoréalisme toulousain : en ture Christophe Deylaud a été le héros de la finale du trente-cinq ans, comme si ce de- chir deux fois la ligne d’en-but. Crispation de fin de campagne, trois coups de pied de pénalité (aux 24e, 53e, et 83e mi- championnat de France. Il a marqué tous les points de vait être la dernière fois. Il a perdu. Jean-Claude Skrela et Pierre protocole glacé d’une finale que nutes) et son inévitable drop (70e), le demi d’ouver- son équipe face à Bourgoin, samedi 31 mai. Sans vraiment comprendre. Villepreux, les entraîneurs du l’événement électoral a transformé Bien sûr, jamais Bourgoin «ne XV de France, ont fait appel au en passage obligé pour qui veut s’était heurté à une défense aussi Palois Nicolas Brusque pour la gouverner la France, le terrain fut La finale a vainement attendu le moire de plus glorieuses parties. vant les maladresses de Berjalliens bien organisée ». N’empêche que tournée en Australie. Il rempla- un étrange reflet du malaise de la choc des styles, la confrontation du Elle s’effaçait, encore, derrière la étouffés par l’emprise défensive lui et ses coéquipiers ont eu peur cera Stéphane Glas, le Berjallien tribune. jeu complet de Bourgoin et de l’art rigueur toulousaine, et la botte des Stadistes, incapables de fran- du risque, ils se sont effarouchés victime d’une fracture de la cla- Là aussi, sur ce carré de pelouse du contre de Toulouse. Elle a long- impeccable de Christophe Dey- chir la ligne d’en-but. des plaquages tonitruants des gros vicule, samedi 31 mai, lors de la balayé par la douceur du soir, le temps espéré le coup d’éclat, la mi- laud, auteur des 12 points de son Rencontre sans essai, match bras toulousains, dispensés au dé- finale du championnat. face-à-face n’a pas eu lieu. Ce nute de folie d’un rugby qui en- équipe. sans envol, c’était ailleurs qu’il fal- tour de tous les regroupements. n’était pourtant pas affaire de poli- flamme, brise les antagonismes de Cet homme est un diable. Le dé- lait chercher l’écho d’un sourire ou La méthode, agrémentée d’une tique, simplement de rugby, ba- supporteurs pour mieux les fondre mon s’est incarné en un drôle de d’une grimace, des joies et des redoutable efficacité dans le jeu au de la saison, le Stade a présenté un taille à quinze contre quinze pour dans la passion du jeu. pantin à moitié désarticulé, qui, peines. Dans le plaisir douloureux pied, a suffi pour inscrire Toulouse nouveau visage, celui d’un réa- la conquête de ce risible et magni- L’émotion était en panne. L’ins- hélas pour l’adversaire, ne prête de Thomas Castaignède, qui sait ? dans la longue histoire du rugby lisme farouche, où l’erreur est fique objet de tous les désirs, le piration avait déserté le Parc des jamais à rire. Les espoirs de jeu A vingt-deux ans, le trois-quart français. Depuis le Stade bordelais bannie, et le risque mis en cage. La bouclier de Brennus. Princes, soudain reclus dans la mé- s’inclinaient, comme à regret, de- centre de l’équipe de France quitte (de 1904 à 1907), prince d’une situation semble toujours sous contrôle et tant pis si quatre- vingts minutes de rigueur toulou- saine, c’est long comme l’éternité. Pour conserver le Super 12, les Néo-Zélandais d’ ont laissé vivre le ballon A l’issue de la rencontre, malgré son quatrième titre en tant qu’en- POUR L’AMATEUR de rugby, samedi touflant. Trois essais seulement furent mar- ri » la finale française, comme elle l’a fait Craig Dowd, le pilier gauche, a pu aplatir, traîneur, Guy Novès n’était pas 31 mai, le choix entre Auckland, en Nou- qués (Craig Dowd et Michael Jones pour lors de la finale anglaise à Twickenham ré- c’est avant tout grâce au geste technique content. Il soulignait que le procès velle-Zélande, et le Parc des Princes, à Pa- Auckland, et Joe Roff pour ACT), mais on a cemment, elle est jouée et arbitrée avec de Brooke, libérant la balle au sol à la per- est facile, qu’on oublie un peu vite ris, est vite fait. Car quelques heures avant vu qu’Auckland sous la pluie valait large- une clarté remarquable dans le Super 12. fection. les blessures d’Emile Ntamack, les le triste spectacle de la finale du champion- ment mieux que Toulouse en bras de che- Autrement dit, dès qu’un joueur se trouve Après une heure de jeu, la domination absences répétées de Castaignède, nat de France, les deux équipes phares de mise. hors jeu au sol ou en position de gêner la d’Auckland était telle que les Australiens les mille et un tracas d’une saison l’hémisphère Sud – Auckland et Australian vie du ballon, il fait tout pour s’écarter, n’avaient mis les pieds dans les 22 mètres plus accidentée qu’à l’ordinaire. Capital Territory (ACT) – disputaient la fi- UN VÉRITABLE AFFRONTEMENT alors qu’en Europe, on fait tout pour tuer adverses qu’à trois occasions (contre seize Dans cette posture de mal-aimé, nale du Super 12. Les conditions hivernales Mieux, cette finale sudiste est un démen- le jeu. pour Auckland). Le pack de Sean Fitzpa- le club ne fait jamais que rejoindre à l’Eden Park ne se prêtaient guère au jeu ti formel pour tous ceux qui ont voulu dé- Obligé par les conditions et le ballon glis- trick, , et des frères Brooke avait une longue cohorte, emmenée par de ballon, mais, malgré la pluie persistante nigrer le Super 12 sous le prétexte qu’il sant de pratiquer un rugby plus classique, négocié deux fois plus de ballons (47 contre le Béziers des années 70, dont le et une pelouse détrempée, les deux forma- s’apparente à une sorte de jeu de « ba- Auckland cherchait des points de fixation 20) dans les mauls et mêlées ouvertes. « rugby à dix » excitait les cri- tions ont offert une démonstration qui balle », sans aucun véritable affrontement plus près de la mêlée que d’habitude, En fin de match, ACT a répondu par quel- tiques. Les Toulousains se sont souligne l’écart entre les deux hémi- physique. La lutte entre les deux packs fut jouant plus dans l’axe profond. Son numé- ques actions individualistes, notamment du taillés un palmarès unique, loin sphères. simplement titanesque, et l’engagement et ro huit et capitaine, , a une demi de mêlée George Gregan et de l’ex- devant Biterrois et Lourdais, avec Certes, on n’y a pas vu la débauche de la précision des plaquages à des années-lu- fois de plus allié puissance et technique, cellent ailier Joe Roff, qui marqua un essai quatorze titres de champion de points à laquelle le Super 12 avait habitué, mière de ce qu’on a vu au Parc des Princes. jouant les fers de lance : percussions explo- de 40 mètres. Malgré cette défaillance mo- France. La petite finale, gagnée en et les quatorze essais marqués en demi-fi- Avant tout, on remarqua la discipline des sives et petits coups de génie. mentanée, la défense d’Auckland est restée ce samedi 31 mai, prouve qu’il leur nale par Auckland et les Sud-Africains du joueurs sudistes par rapport à leurs C’est après une percée de Brooke, stoppé ensuite intraitable jusqu’à la fin. reste à se faire aimer. Natal sont restés un souvenir. Mais le ni- confères du Nord, dès qu’il s’agit du jeu au à vingt centimètres de la ligne, qu’Auc- veau de jeu dans ces conditions fut épous- sol. Tandis que cette phase de jeu a « pour- kland a marqué son premier essai. Mais si Ian Borthwick Pascal Ceaux

DÉPÊCHES Le dévoué Alberto Elli s’adjuge le Grand Prix cycliste du « Midi libre » a HANDBALL : l’équipe de France obtient la médaille de bronze au championnat du monde, disputé au Japon. La France a battu la MILLAU ces braves porteurs d’eau. Il termi- pa. Elle s’est scellée en deux dire une misère. Dans ces condi- Hongrie (28-27) à l’occasion du match pour la 3e place. Elle avait été de notre envoyé spécial na septième du Tour de France en échappées, reléguant le peloton à tions, sa 32e place au classement dominée (25-24, après prolongation) en demi-finale, samedi 31 mai, Le 49e Grand Prix du Midi libre 1994, mais ses victoires ont été peu 11 minutes le premier jour et à général est presque un exploit. «Il par la Russie, qui a été sacrée championne du monde, dimanche aura désigné un obscur. Alberto nombreuses jusque-là : à peine 21 supplémentaires le deuxième. n’est pas bon de dépenser trop 1er juin, après sa victoire (23-21) contre la Suède. – (AFP.) Elli n’appartient pas au panthéon une vingtaine en dix ans de car- Alberto Elli eut la riche idée de s’y d’énergie à vouloir gagner une a MOTOCYCLISME : Olivier Jacque a remporté le Grand Prix du bitume. A trente-trois ans, il ne rière. Celle-ci est la plus belle. associer, s’assurant, au cumul, une course avant le Tour de France », d’Autriche 250 cm3, dimanche 1er juin, sur le circuit de Zeltweg, en peut plus y prétendre. Sa sil- « J’ai passé des années à travailler confortable avance. expliquait le Danois. Encore a-t-il dominant dans le dernier tour l’Allemand Ralf Waldmann. Après le houette longiligne, sa musculature pour les autres », admet Alberto Des dix-huit équipes présentes, mis un point d’honneur à termi- Grand Prix du Brésil en 1996, c’est la deuxième victoire du Français. sèche, son visage anguleux et cui- Elli. Casino était, semble-t-il, la seule ner. Son compatriote Régis Laconi, percuté par une autre moto, a été sé- vré lui donnent plutôt des allures formation intéressée par la vic- rieusement blessé au départ de la course des 500 cm3, remportée par de laboureur du peloton. Un VINGT ET UNIÈME MONDIAL toire : elle lui est revenue d’office. ABANDON MASSIF le champion du monde, l’Australien Michael Doohan. – (AFP.) homme discret et dur au mal, de Cette victoire, qui en fait le suc- Tout au long de la semaine, les fa- Dimanche, sous une froide pluie a FOOTBALL : Nîmes et Wasquehal joueront en division 2 la sai- ceux qui font, depuis des généra- cesseur de Laurent Jalabert (1996) voris ont été passifs. et la menace d’une vilaine bron- son prochaine. Les deux équipes ont terminé en tête des deux tions, les gregari (les équipiers), et Miguel Indurain (1995), console On attendait Pascal Richard, ce chite, la moitié du peloton a préfé- groupes du championnat de National 1 qui s’est achevé samedi le coureur des environs de Côme, fut Elli. On espérait Richard Vi- ré abandonner. Roger Bène, le di- 31 mai. classé tout de même 21e coureur renque et on eut Laurent Dufaux, recteur général de l’épreuve, ne a ATHLÉTISME : Haïlé Gébrésélassié a amélioré la meilleure per- mondial, d’avoir raté le Giro. un peu, et Laurent Brochard, décolérait pas : « Il y a quelques formance mondiale des 2 miles (3 216 m) dans le temps de « C’est difficile de le regarder le beaucoup (trois victoires dont années, j’aurais refusé de les payer. 8 min 01 s 08, samedi 31 mai, à Hengelo (Pays-Bas). L’ancienne meil- soir à la télévision, mais ce n’est pas une, dimanche 1er juin, à Millau). Aujourd’hui, croyez bien que je le leure performance mondiale était détenue par le Kenyan Daniel Ko- la première fois », explique On guettait Bjarne Riis ou Jan Ull- fais à contrecœur. » men en 8 min 03 s 54, depuis 1996. Le coureur éthiopien a facilement l’absent. En émigrant en début de rich et on vit Georg Totschnig, Le mode de préparation est de- dominé l’Algérien Noureddine Morceli, hors de forme. Mais, faute saison dans une équipe française, deuxième du classement général. venu à ce point précis que les cou- d’être descendu sous les 8 minutes, il n’a pas gagné la prime d’un mil- Casino, l’Italien, savait que son Le Midi libre est redevenu un prix reurs ne prennent plus le risque de lion de dollars offerte par un des principaux commanditaires de la Fé- Tour serait cette fois de France. de camaraderie offert aux équi- multiplier les efforts. Laurent Jala- dération internationale d’athlétisme. – (AFP.) Sa préparation à l’épreuve reine piers. bert, Alex Zülle, Abraham Olano a VOILE : le départ de la Course de l’Europe à la voile, prévu di- passait donc par le Midi libre, Eux, les grands, n’étaient venus et Tony Rominger, par exemple, manche 1er juin, a été reporté au lundi 2 à 12 h 30. Cette décision du comme pour les cinq premiers de là que pour se préparer. Riis avait ont préféré effectuer des stages Comité d’organisation, après consultation des 16 skippers engagés, a la Grande Boucle 1996. La victoire reçu pour consigne d’essayer de sur mesure. Les cannibales ont été prise en raison d’un fort vent de nord-est (40 à 45 nœuds, environ s’est simplement dessinée trop tôt. ne pas dépasser 165 pulsations disparu. 80 km/h) et d’une mer formée. Les bateaux doivent gagner Rotter- La course fut sans rime ni rai- cardiaques par minute, même dam, première des cinq étapes les conduisant le 23 juin à Stockholm. son, avec des écarts à la grand-pa- dans les plus fortes pentes, autant Benoît Hopquin LeMonde Job: WMQ0306--0023-0 WAS LMQ0306-23 Op.: XX Rev.: 02-06-97 T.: 00:07 S.: 111,06-Cmp.:02,15, Base : LMQPAG 46Fap:99 No:0891 Lcp: 196 CMYK

AUJOURD’HUI LE MONDE / MARDI 3 JUIN 1997 / 23

Les problèmes Aimé Jacquet, sélectionneur de l’équipe de France de football de sureffectif « Si j’avais un Platini, tout serait plus facile » de l’entraîneur Les Tricolores inaugurent le Tournoi de France, mardi 3 juin à Lyon, en affrontant le Brésil

Le Tournoi de France de football, qui dé- Dans un entretien au Monde, le sélection- qué. Il adresse un avertissement aux nonce son retrait à l’issue de la Coupe du brésilien bute mardi 3 juin, à Lyon, est l’occasion neur Aimé Jacquet évoque la difficulté de joueurs qui pourraient être tentés par des monde. Le tournoi servira également à tes- d’un rodage grandeur nature en vue de la préparer l’équipe de France avec des mat- clubs étrangers qui ne leur offriraient pas ter la logistique en situation avec l’utilisa- Coupe du monde 1998. Le Onze tricolore af- ches amicaux, passe ses troupes en revue et la garantie de jouer : ils risquent d’être tion de quatre des stades concernés par le Mario Zagallo frontera le Brésil, l’Angleterre et l’Italie. défend son système de jeu, souvent criti- écartés de l’équipe de France. Enfin, il an- Mondial.

RIO DE JANEIRO « Que représente pour vous le possibilité d’être champion du – L’association avec Youri − Cette saison, j’ai été peu exi- le monde savait. Qu’il n’y en est pas de notre correspondant Tournoi de France qui débute le monde espoirs ? Figurez-vous que je Djorkaeff laisse encore à dési- geant. Place aux équipes, place aux un qui vienne me dire qu’il ne savait Absent de la liste des vingt-deux 3 juin et rassemble, outre le prenne avec moi et que je le laisse rer... championnats. L’année prochaine pas ou je deviens très méchant. Ber- joueurs brésiliens retenus pour le l’équipe de France, le Brésil, sur le banc de touche, que je lui − Peut-être qu’il faut faire un sera très différente. Je ne les lâcherai nard Lama était averti. Il sera sanc- Tournoi de France, Sonny Ander- l’Italie et l’Angleterre ? fasse jouer des bribes de match et choix. Ou ils sont complémentaires pas. Je le leur ai dit : « L’équipe de tionné. Il va payer. son, le flamboyant canonnier mo- − Le Tournoi de France sera un re- que ses copains deviennent cham- et ils sont associés. Ou ils ne sont France va jouer la Coupe du monde – Vous passez pour un père négasque, peut-il encore rêver au père avant d’aborder notre dernière pions du monde : il va m’en vouloir pas complémentaires et on les met sur son sol. L’objectif est tellement tranquille et obstiné. Cette Mondial ? « Je connais bien Ander- saison vers le Mondial 1998. Ce sera pendant toute sa vie. en opposition. Je suis là pour ça. Et important que le sélectionneur ne image vous gêne-t-elle ? son. Il avait dix-neuf ans lorsque je une base essentielle pour la suite. Je – Comment situez-vous la va- je pense toujours qu’il faut les asso- fera aucun cadeau à celui qui a choi- – Quand j’ai acquis certaines l’ai fait débuter chez les profession- crains simplement que les joueurs leur de votre équipe par rapport cier. si un objectif financier plutôt qu’un convictions, vous pouvez me dire nels, au Vasco de Gama de Rio, à la ne puissent pas donner la pleine me- à celle des années Platini ? – Cette saison, les joueurs ont objectif sportif. Celui qui ne jouera tout ce que vous voulez, je ne chan- fin des années 80. Je me souviens des sure de leur talent : ils ont vécu une − On n’est pas encore à la hauteur semblé plus motivés par leur pas dans son club sera automatique- gerai pas d’avis. Si je suis en phase sarcasmes que la presse m’avait ré- saison très chargée. Nous n’avons de cette équipe-là. On n’a pas carrière européenne que par ment éliminé de la sélection. Je vous avec moi-même, je suis redoutable. servés pour avoir dit qu’il avait pas pu préparer ce rendez-vous l’homme providentiel. Si j’avais un l’équipe de France... demande impérativement de faire Je peux aller très loin. Quand je l’étoffe d’un nouveau Jairzinho... », a comme nous l’aurions voulu. La syn- Platini aujourd’hui, tout serait plus attention. Vous changez de club, commence à bafouiller, je suis nul. Il confié au Monde Mario Zagallo, en- thèse du Tournoi de France va me facile. Je ne l’ai pas. Alors, je d’entraîneur, de pays, de mentalité, vaut mieux m’éliminer. Chez moi, on traîneur de la sélection brésilienne. servir à mettre des choses en place compense par le collectif. Le calendrier informez-vous que l’entraîneur vous dit en patois : « Tu peux chanter, moi Après la plaidoirie, la sentence : et, à partir de janvier, notre prépara- – Quel rôle assignez-vous à Zi- veut bien, que vous allez dans un je ne bouge pas. » Il faut écouter les « Je ne ferai appel à Anderson qu’en tion prendra une nouvelle tonalité : nedine Zidane ? b France-Brésil, mardi 3 juin à grand club, que vous êtes bien en- gens, mais il ne faut pas être pertur- cas d’extrême nécessité. Le football un rassemblement par mois, un − Je pense que c’est l’homme-or- Lyon (TF1, 20 h 45) traîné et dites à vos managers de ne bé par l’écoute. Il faut garder le cap. brésilien est aujourd’hui riche en match par mois. chestre de l’équipe de France. b Italie-Angleterre, mercredi pas faire n’importe quoi. » Moi, je le garde. qualité comme en quantité. » – Est-il difficile de préparer – Il semble pourtant plus à 4 juin à Nantes (Canal Plus, – Les problèmes du gardien – Quel sera votre avenir après Sacré par ses pairs de l’Union na- une Coupe du monde avec des l’aise à la Juventus de Turin... 20 h 30) Bernard Lama remettent-ils en le Mondial 1998 ? tionale des footballeurs profession- matches amicaux ? − Marcello Lippi, son entraîneur, b France-Angleterre, samedi cause sa place dans l’équipe de – Le jour où l’équipe de France se- nels (UNFP), le meilleur joueur du − Très. La pression, elle existe. l’utilise exactement comme je l’ai 7 juin à (TF1, France ? ra éliminée, le haut niveau, ça sera dernier championnat de France C’est moi qui la mets. Je veux qu’il y fait pendant le championnat d’Eu- 20 h 45) − Bernard Lama reste le « number ter-mi-né pour Jacquet. Il faut savoir n’est pas jugé apte à fréquenter le ait une motivation intérieure et je la rope des Nations. Simplement, à Tu- b Brésil-Angleterre, mardi one » total. Il m’a émerveillé. A l’Eu- s’arrêter dans la vie. » banc des remplaçants du Brésil. La crée. Mais il ne faut pas que j’aille rin, Zinedine bénéficie d’appuis sur 10 juin au Parc des Princes (Canal ro, c’était le meilleur. Mais il était chronique de Rio, pourtant contes- trop loin. les ailes que nous n’avons pas eus Plus, 20 h 30) averti. Après l’événement Barthez Propos recueillis par tataire, ne s’en offusque pas, tant le – Pourquoi quitter la France lors de l’Euro. C’est pourquoi nous b France-Italie, mercredi 11 juin [NDLR : suspendu lui aussi pour avoir Pascal Ceaux sacrifice de l’idole du stade Louis-II juste avant la Coupe du monde travaillons beaucoup ce secteur. au Parc des Princes (TF1, 20 h 45) été contrôlé positif au cannabis], tout et Benoît Hopquin lui semble découler des contraintes pour jouer justement une série de l’embarras du choix. C’est donc de matches amicaux ? sous les meilleurs augures, côté ef- − Il vaut mieux s’en aller que subir fectifs, que Zagallo s’apprête, en ce qu’on va subir ici. Il faudra qu’on vieux renard (il a soixante-cinq respire... On va aller s’oxygéner ail- ans), à briguer sa cinquième cou- leurs et éviter l’imbécillité de gens ronne mondiale. La défaite qu’il qui se découvriront subitement sup- appelait de ses vœux afin que son porteurs de l’équipe de France. équipe « ne cède pas à la facilité », – Il vous a été reproché d’avoir s’est concrétisée, vendredi 30 mai, à pratiqué un football trop défen- Oslo, face à la Norvège (2-4). Au sif lors du championnat d’Eu- Onze de France échoit désormais le rope des Nations 1996. Allez- privilège d’affronter, mardi 3 juin, vous changer votre dispositif ? des champions du monde piqués − Le football européen, ce n’est au vif. pas de la rigolade. C’est un football de combat. Si on ne se présente pas UN MONUMENT avec cet esprit-là, on fait l’aller-re- Bâti sur une carrière commencée tour direct, comme on l’a fait si il y a un demi-siècle à l’America, un souvent en France. Et puis on dira : club de Rio autrefois prestigieux, le « Oh, on joue bien ! Nous avons une palmarès de Zagallo est un monu- bonne équipe. Quel dommage ! » ment à la gloire du football brési- Moi, je ne réfléchis pas comme ça. lien. Aux deux titres mondiaux J’ai le devoir de mettre en place une remportés, en 1958 (Suède) et en équipe compétitive. Il n’y a que le 1962 (Chili), avec le maillot numéro résultat qui compte. 11 de la sélection nationale, – En défense, votre dispositif s’ajoutent ceux glanés en 1970 est en place. En revanche, en at- (Mexique) au poste d’entraîneur, et taque, vous semblez encore hé- en 1994 (Etats-Unis) dans le rôle – siter... créé à son intention par la Confé- − C’est plus facile en défense. La dération brésilienne de football – France manque d’attaquants de de coordonnateur technique aux pointe. Quand vous avez un bon pouvoirs occultes. joueur, les éducateurs le mettent au Au fil d’une trajectoire excep- milieu. C’est assassin. C’est un poste tionnelle, l’unique légitime tetra- exposé : on prend des coups. Alors campoao (quadruple champion du les candidats sont de plus en plus monde) a été le partenaire du duo rares. Christophe Dugarry, Nicolas Pelé-Garrincha, le stratège de la Ouédec et Florian Maurice rem- campagne mexicaine primée par la plissent cette fonction. Mais Ouédec conquête de la Coupe Jules-Rimet a été blessé. Dugarry, qui, n’en dé- (décernée à titre définitif au pre- plaise à certains, est un joueur de mier vainqueur de trois coupes du haut niveau, a éprouvé des diffi- monde), puis l’éminence de Carlos cultés dans son nouveau club. Et Alberto Parreira, l’entraîneur mal puis Maurice s’est abîmé le tendon aimé qui a mis fin à une traversée alors qu’il entrait dans le groupe. On du désert de vingt-quatre années. a perdu beaucoup de temps. Des années que Zagallo a passées – Pourquoi ne pas avoir retenu au Koweït, aux Emirats arabes unis le Monégasque Thierry Henry ? et en Arabie saoudite, dont il a diri- – Dans le domaine offensif, j’at- gé les sélections nationales. tends encore. Si des joueurs sont Ces états de service ne lui ont pas très bons, l’équipe de France leur est toujours offert la popularité que lui ouverte. J’ai été clair avec le petit valent les exhibitions de ses Henry. Pourquoi cette décision ? troupes. En octobre 1994, quand il a Vous voulez enlever à ce gamin la succédé à Parreira (dont il dit avoir été le « paratonnerre » durant le dernier Mondial), sa réputation de L’affaire « retranqueiro » (adepte de la dé- fense renforcée) était critiquée par des chaussures les gardiens du football à la brési- lienne. Ses détracteurs ne lui par- L’affaire dite des chaussures, donnaient pas d’avoir déclaré : qui oppose les joueurs de « Un match nul peut être un bon ré- l’équipe tricolore à la Fédération sultat. » Rallié au « football compé- française de football (FFF), ne titif », Zagallo aura attendu près semble toujours pas réglée. Les d’un demi-siècle avant de devenir footballeurs manifestent leur prophète en son pays. mécontentement face à un régle- « Les Brésiliens, dit-il, valorisent ment qui les oblige à ne pas pou- davantage aujourd’hui la solidarité voir évoluer en équipe nationale et l’effort collectif. » Dans ce re- avec les chaussures de leur choix. gistre, l’ancien ailier gauche de fa- Le président de la FFF, Claude çade aura fait œuvre de pionnier. Simonet, a indiqué vendredi Dès les années 50, Zagallo a incar- 30 mai à Zurich qu’il rencontre- né le faux attaquant incorporé au rait lundi 2 juin à Lyon les premier rideau défensif. Il n’a pas joueurs. « Je n’ai pas changé d’avis laissé le souvenir d’une terreur des sur la question, a-t-il affirmé. Il y a gardiens : les buts inscrits à son ac- un règlement précis pour les chaus- tif au cours des trente-trois matchs sures qui n’est pas une nouveauté qu’il a joués, de 1958 à 1964, en et stipule que les internationaux équipe du Brésil, se comptent sur doivent porter en équipe de France les doigts d’une main. Ex-soutier la marque de notre équipementier, méritant, Zagallo s’est imposé en en l’occurrence Adidas. Il s’agit meneur d’hommes respecté. donc de respecter ce contrat qui court jusqu’en 2002 et comprend Jean-Jacques Sévilla bien entendu le Mondial 98 ». LeMonde Job: WMQ0306--0024-0 WAS LMQ0306-24 Op.: XX Rev.: 02-06-97 T.: 07:05 S.: 111,06-Cmp.:02,15, Base : LMQPAG 46Fap:99 No:0892 Lcp: 196 CMYK

24 / LE MONDE / MARDI 3 JUIN 1997 AUJOURD’HUI Magnus Norman, l’ambition La course version suédoise au titre d’homme Admirateur de Stefan Edberg, ce joueur, classé 65e mondial, le plus rapide rêve de finale après avoir éliminé Pete Sampras et Marc Rosset du monde MARC ROSSET avachit sa décep- Timide hors des courts, Magnus vingt-six ans, n’a cessé de récrimi- tion sur la table de conférence de Norman acquiert, dès qu’il a une ra- ner. Casquette dûment piétinée de a tourné court presse. En ânonnant, il explique sa quette en main, ce flegme propre rage, sa raquette jetée par-dessus défaite avec plus de mauvaise grâce aux joueurs suédois. Rosset à peine son épaule a atterri malencontreu- TORONTO qu’à l’accoutumée. Il y a de quoi. Le défait, il évoque sans arrogance au- sement dans une tribune, ce qui lui de notre envoyé spécial géant suisse, demi-finaliste l’an pas- cune les trois matches qu’il lui reste a valu un avertissement. Pour se Un coup de tonnerre et un dé- sé, vient en ce dimanche 1er juin à disputer. Car il compte être tou- faire pardonner, Marc s’était pour- but de feu d’artifice ont salué la d’offrir son billet pour les quarts de jours en course dimanche 7 juin tant agenouillé, comme en prière. victoire. Mais peut-on vraiment finale à un blanc-bec, le Suédois pour la finale. « J’essaierai de ne pas Joueur sensible au mental friable, parler de victoire ? Le Canadien Magnus Norman (4-6, 6-3, 7-6 [7/3], me satisfaire de ce que j’ai réalisé jus- il suppliait en réalité le vent de ne Donovan Bailey, le champion 6-3). « Pendant deux sets et demi, qu’ici », dit-il. Rester concentré. Ne plus l’empêcher de s’exprimer dans olympique et recordman du râle-t-il, on a plus joué à la roulette pas se réjouir. Pas encore. Alors que son registre. Les faux rebonds et monde du 100 mètres, a remporté, russe qu’au tennis. » son honorable rang de 65e mondial « bois » en tout genre ont ôté toute dimanche 1er juin, en 14 s 99, un Les méchantes bourrasques qui est déjà un souvenir, alors que – il l’a confiance à Rosset sur les engage- 150 mètres censé attribuer le titre balaient Roland-Garros depuis plu- compté – il a amassé en une se- ments et les assauts du filet. d’homme le plus rapide de la sieurs jours font ingurgiter de sé- maine « environ 700 000 couronnes Plus malin, plus patient, Norman, terre. rieuses doses de terre battue aux suédoises » (483 500 francs), soit puissant attaquant de fond de court, Il a franchi le premier la ligne

joueurs comme aux spectateurs des sept fois plus d’argent qu’il n’en a su contenir son envie de cogner FRANCK SEGUIN/TEMPSPORT d’arrivée de ce bras de fer avec loges. Bien plus qu’il n’en faut à avait jamais gagné en un tournoi. ses balles de service et de monter à Michael Johnson, le champion Marc Rosset pour perdre son sang- tout va. « Je lui ai conseillé la pru- Monica Seles sans pitié pour Mary Pierce olympique et recordman du froid. Magnus Norman, Suédois « PAS DE RESPECT » dence à cause du vent. Non seule- monde américain du 200 mètres. poupin au nez en trompette, sourit Selon son entraîneur et compa- ment il a essayé d’appliquer ma Monica Seles, quatrième joueuse mondiale, battue (7-6, 7-6) lors du Seul ennui, mais de taille, la sous ses taches de rousseur. « Peut- triote, Thomas Hogstedt, ancien consigne, mais il a réussi », dit Hog- Tournoi de Rome par Mary Pierce, numéro dix du classement WTA, dé- course a tourné court à mi-che- être que ça soufflait plus de son cô- joueur qui a « raccroché » en 1994, stedt, abasourdi par la maturité de but mai, a pris sa revanche, et montré qu’il fallait plus que jamais min de son parcours. té », dit-il, en admettant tout de Magnus a le potentiel pour figurer son disciple. compter avec elle. Dimanche 1er juin, en huitième de finale, l’ex-« Petite Peu après la sortie du virage, même que le vent a gâché le spec- très vite parmi les vingt meilleurs Après avoir débuté au tennis à souris » américaine a éliminé l’ex-« Terreur » française (6-4, 7-5). Pour Michael Johnson a relevé un bras, tacle. mondiaux et y rester un moment. l’âge de huit ans grâce à son père, expliquer sa défaite, Pierce a invoqué la gastro-entérite dont elle a souf- rétréci une première foulée, puis Pognes de charcutier, physique de « Les grands joueurs ne lui inspirent Norman tournait encore il y a un an fert comme Pete Sampras (Le Monde daté 1er et 2 juin) : « Contre Monica, une seconde, semblant indiquer jeune bûcheron, Norman vit une ex- pas ce respect mêlé de crainte qui en- et demi avec l’équipe d’espoirs na- on a besoin d’être à un très haut niveau pour gagner. » une blessure à la cuisse pour fi- traordinaire semaine de grâce. Deux gendre la défaite. Je me suis efforcé tionaux subventionnée par sa fédé- nalement abandonner l’épreuve. jours plus tôt, il s’est offert, pour cé- de l’aider à ne pas se relâcher après ration. La saison passée, Magnus Donovan Bailey a poursuivi jus- lébrer son 21e anniversaire, la tête de sa victoire sur Sampras. Il a eu affaire s’est retrouvé seul et rempli d’incer- b Une « belle » Graf-Coetzer en quart de finale. Il y a trois se- qu’au bout son effort. Il l’a em- Pete Sampras. Début mai, il a élimi- à la presse pour la première fois et j’ai titudes, comme un oisillon chassé maines, à Berlin, Amanda a infligé à Steffi la plus sévère défaite de sa porté, bien sûr, et enfoui dans ses né Andre Agassi et Petr Korda pour fini par débrancher le téléphone de la du nid. Avec Thomas Hogstedt, qui carrière (6-0, 6-1) avant que l’Allemande ne prenne le meilleur sur la poches un chèque de près de se hisser en demi-finale sur la terre chambre d’hôtel à 23 h 30 pour qu’il « coache » des jeunes, il a trouvé, Sud-Africaine à Strasbourg en trois manches serrées. Le deux jeunes 9 millions de francs. Le public ca- battue rapide d’Atlanta. La semaine se repose. J’avais peur qu’il ne craque. depuis février, un compromis. En- femmes se retrouveront mardi sur le court Suzanne-Lenglen en quart nadien du SkyDome de Toronto passée, il était encore en demi-finale Pour mon premier déplacement avec semble, ils préparent les échéances, de finale des Internationaux de France de tennis. Dimanche 1er juin, l’en a bruyamment félicité. Mais il sur celle de Sankt Pölten (Autriche). lui, il m’impressionne terriblement puis Magnus les affronte seul, sou- Graf a éliminé la talentueuse jeune Roumaine Irina Spirlea (6-7 [4/7], attendait sûrement autre chose de par sa capacité d’écoute et d’adapta- tenu uniquement par ses compa- 6-2, 6-2) et Coetzer a battu une des favorites du tournoi, l’Espagnole ce match au sommet. tion. » triotes-joueurs. Conchita Martinez (6-7 [4/7], 6-4, 6-3). Au moment de son abandon, RÉSULTATS L’entraîneur de Marc Rosset ne Quoi qu’il lui arrive en quarts de b Galo Blanco, la surprise. De l’armada espagnole engagée dans ces Michael Johnson était en retard SIMPLE MESSIEURS peut en dire autant, malgré les neuf finale, Norman prend date pour Internationaux de France, il ne reste, au seuil de la seconde semaine, sur Donovan Bailey. Le Canadien, Troisième tour années de professionnalisme et la l’été. Son idole est Stefan Edberg. que l’ancien double vainqueur du tournoi, Sergi Bruguera, ce qui était placé à l’intérieur, avait déjà refait b Troisième quart du tableau place de 18e mondial de son élève. Et, comme lui, il raffole des courts attendu, et Galo Blanco, ce qui l’était moins. Vainqueur, samedi son handicap. Difficile, pourtant, P. Rafter (Aus.) b. R. Krajicek (PB, no 6) 6-3, 4-6, 6-4, Bien qu’il dise être entré sur le court en ciment... 31 mai, de l’Américain Chris Woodruff (7-6 [8/6], 6-3, 7-6 [7/2]), Blan- d’en tirer la moindre conclusion. o 6-2 ; M. Woodforde (Aus.) b. A. Costa (Esp., n 11) 6-4, e 7-6 (7/2) 6-3 ; P. Korda (Rép. tch.) b. W. Ferreira (RSA, résigné à limiter les dégâts du vent co, âgé de vingt ans et classé 111 joueur mondial, devait affronter le La victoire, Michael Johnson avait no 13) par forfait ; G. Blanco (Esp.) b. C. Woodruff (EU) sur son jeu, le grand Helvète, âgé de Patricia Jolly Tchèque Petr Korda en huitième de finale. toujours prédit qu’il irait la cher- 7-6 (8/6), 6-3, 7-6 (7/2). cher dans les dernières foulées. b Quatrième quart du tableau Une blessure l’en a empêché. M. Rios (Chil., no 7) b. A. Boetsch (Fr.) 7-6 (8/6), 6-3, 6-4 ; H. Arazi (Mar.) b. M. Larsson (Suè.) 6-2, 6-3, 7-5 ; Dommage pour lui, même s’il S. Bruguera (Esp., no 16) b. D. Norman (Bel.) 6-3, 6-1, Le Belge Filip Dewulf émerge de la tempête reçoit près de 3 millions de francs. 6-3 ; M. Chang (EU, no 2) b. S. Simian (Fr.) 6-1, 5-2, ab. Mais dommage aussi, et plus en- Huitièmes de finale LOIN DE L’EXTASE, Filip Dewulf a la vic- sion délicate de son coup droit fouetté. En face jeu n’a pas changé. La confiance est venue et les core peut-être, pour Donovan o M. Norman (Suè.) b. M. Rosset (Sui., n 15) 4-6, 6-3, Bailey. 7-6 (7/3), 6-3 ; F. Dewulf (Bel.) b. A. Corretja (Esp., no 8) toire calme. Il dit : « C’était un rêve de jouer sur d’Alex, Filip s’est adapté, son jeu plus rugueux, balles sont tombées plus souvent à l’intérieur du 5-7, 6-1, 6-4, 7-5. E. Kafelnikov (Rus., no 3) b. M. Philip- le central de Roland-Garros, et je gagne. » Issu ses accélérations de coup droit plus rapides court. » poussis (Aust.) 6-2, 6-3, 7-5 ; A. Medvedev (Ukr.) et des qualifications, vainqueur d’Alex Corretja que le vent : « Il a fait un grand match, c’est un Alain Mercier G. Kuerten (Bré.) 7-5, 1-6, 2-6, 6-1, 2-2 match inter- – tête de série no 8 et un des favoris espagnols grand joueur », a reconnu Corretja. JOUEURS SANS COMPLEXE rompu par la nuit. du tournoi –, ce Flamand est devenu, di- Filip Dewulf a vingt-cinq ans et des yeux Un début de saison magnifique, et voilà le SIMPLE DAMES manche 1er juin, le premier Belge à parvenir en limpides. Professionnel à dix-huit ans, il se tennis belge qui exulte. Sabine Appelmans et a LOTO : résultats des tirages Troisième tour quart de finale d’un tournoi du Grand Chelem promène tout d’abord seul sur le circuit. Son Dominique Van Roost ont été quart-de-fina- no 44 du samedi 31 mai. PREMIER b Premier quart du tableau depuis le début de l’ère open en 1968 (aupara- premier entraîneur ne voyage pas. De cette ex- listes aux Internationaux d’Australie en jan- TIRAGE : 7, 17, 20, 31, 39, 41 ; nu- o M. Hingis (Sui., n 1) b. A. Kournikova (Rus.) 6-1, 6-3 ; méro complémentaire : 34. Rap- B. Paulus (Aut., no 16) b. S. Farina (It.) 6-4, 6-1 ; N. Zve- vant Jacky Brichant y était parvenu quatre fois périence difficile de solitude, il apprend la pa- vier, et voici Dewulf brillant à Paris. En quinze reva (Bié.) b. B. Schultz-McCarthy (PB, no 14) 7-5, 6-4 ; à la fin des années 50). tience et le calme. En 1994, il rencontre Gabriel ans, le tennis national s’est métamorphosé. port pour 6 bons numéros : A. Sanchez-Vicario (Esp., no 6) b. D. Van Roost (Bel.) Il le sait, sa victoire a été bizarre. Il y avait ce Gonzales. L’homme vient d’être renvoyé de Leurs complexes oubliés, les Belges sont sortis 1 832 315 F ; pour 5 numéros, plus 6-0, 6-3. troisième adversaire, dimanche, le vent. Les l’équipe de Coupe Davis pour des raisons poli- de leurs frontières pour gagner leur vie. Pour y le complémentaire : 87 740 F ; b Deuxième quart du tableau M. Seles (EU, no 3) b. N. Tauziat (Fra.)6-0, 6-1 ; bourrasques capricieuses ont jeté la brique pi- tiques. Il sera son entraîneur. Et son mentor. arriver, il suffit de rentrer dans les cent meil- pour 5 numéros : 7 700 F ; pour M. Pierce (Fr., no 10) b. S. Testud (Fr.) 6-1, 6-3 ; M.- lée dans les yeux, baladé les balles. « Il a tué A l’époque, Dewulf doute. C’est un perfec- leurs mondiaux. 4 numéros : 168 F ; pour 3 numé- J. Fernandez (EU, no 12) b. F. Perfetti (It.) 6-3, 7-6 (7/4) ; mon jeu », souffle Corretja. tionniste qui ne supporte pas la défaite. A Grâce à sa performance, Dewulf revient ros : 17 F. L. Raymond (EU) b. K. Po (EU) 6-4, 2-6, 6-1. force de cauchemarder sur les échecs, il en vit dans ce gotha et espère mieux. Son avenir à SECOND TIRAGE : 1, 7, 12, 18, 30, Huitièmes de finale L’ORFÈVRE BALAYÉ et perd quelques matches serrés après avoir Paris ? Puisqu’il n’y a plus vraiment de favoris, 39 ; numéro complémentaire : 49 ; M. Hingis b. B. Paulus 6-3, 0-6, 6-0 ; A. Sanchez-Vicario b. N. Zvereva 6-4, 6-2. M. Seles b. M. Pierce 6-4, 7-5 ; L’Espagnol, qui avait gagné dans les chaleurs obtenu des balles de match. Sa réputation est dans ce tournoi qui part en tous sens, Dewulf rapport pour 6 numéros : M.-J. Fernandez b. L. Raymond 6-7 (4/7), 6-2, 6-2. paisibles d’Estoril ou de Rome, a découvert faite. Depuis le début de la saison, il s’est atta- s’amuse. « Il me suffit de jouer aussi bien pen- 20 967 860 F ; pour 5 numéros, I. Majoli (Cro., no 9) b. L. Davenport (EU, no 5) 5-7, 6-4, que son jeu d’orfèvre avait un défaut. A Paris, ché à l’effacer. Il y est parvenu en finissant en- dant les trois prochains matches. » Le vent rend plus le complémentaire : 62 740 F ; 6-2 ; R. Dragomir (Rou.) b. N. Arendt (EU) 6-1, 6-1. pour 5 numéros : 4 785 F ; pour A. Coetzer (RSA, no 11) b. C. Martinez (Esp., no 7) 6-7 ces revers liftés, posés hier le long de la ligne, fin vainqueur des matches de longue haleine. ivre. (4/7), 6-4, 6-3 ; S. Graf (All., no 2) b. I. Spirlea (Rou., se sont évanouis dans les couloirs et dans les A Paris, il est sorti des qualifications. Quart-de- 4 numéros : 109 F ; pour 3 numé- no 13) 6-7 (4/7), 6-2, 6-2. bâches, comme son service. Balayée, la préci- finaliste, il prouve son courage. Il dit : « Mon Bénédicte Mathieu ros : 12 F.

Ł SOS Jeux de mots : o o MOTS CROISÉS PROBLÈME N 97113 3615 LEMONDE, tapez SOS (2,23 F/min). AFFAIRE DE LOGIQUE PROBLÈME N 20

1234567891011 cirage. Lieu d’ombre. Bout de poisson. – 6. Se prirent pour des I lions. Dans les normes. – 7. Vient Tirer sur la cordelette de la cour. Mouvement perpétuel. II – 8. Au Cameroun. Jeta un pont sur la rivière Kwaï. – 9. Une jolie III couleur de peau. Met le texte sous les yeux. – 10. Inconnues hier, elles IV sont devenues extraordinaires aujourd’hui. Division. – 11. Epui- V sée comme une bête. VI Philippe Dupuis On tire sur les deux extrémités de la cordelette qui dessine le titre du journal. VII SOLUTION DU No 97112 Combien de nœuds se forment ? HORIZONTALEMENT VIII I. Actionnaire. – II. Leurre. Très. – III. Tr. Echecs. – IV. Entasse. STO. Exercice plus difficile. Un enfant IX – V. Raimu. Ph. Or. – VI. Nia. a réalisé une « échelle de Jacob » Créés. – VII. Atroce. Pool. – VIII. avec un anneau de ficelle passé X Ecula. Nul. – IX. Ers. Bêlante. – X. autour de ses doigts. Ui. Rentière. – XI. Rafistolées. Sauriez-vous, en un minimum XI VERTICALEMENT d’étapes, dénouer cette construction 1. Alternateur. – 2. Cernait. Ria. pour retrouver l’anneau initial ? HORIZONTALEMENT Annonce la fin. – IX. Croisés de – 3. Tu. Tiares. – 4. Ircam. Oc. Ri. – Solution dans Le Monde du partout. Protégeait les cultures. – 5. Or. Succubes. – 6. Nées. Relent. 10 juin. Solution du problème no 19 paru dans Le Monde du 27 mai. I. Le premier portrait de bébé. – X. Une capitale dans la CEI. Base – 7. Cèpe. Alto. – 8. Ath. Hep. Ail. – Lorsqu’on incline le récipient de ma- II. Donne de la tenue mais rend de construction. – XI. Remise à sa 9. Ires. Sonnée. – 10. Recto. Outre. Elisabeth Busser et Gilles Cohen nière à rendre horizontal le plan des cassant. Pèsent à la longue. – III. Il place après avoir été bien – 11. Essorillées. ஽ POLE 1997 trois trous, le volume d’eau qui peut sé- faut l’évacuer. Résonne quand il secouée. journer dans le bidon est celui d’un est agité. – IV. Assure des liaisons. prisme droit à base triangulaire dont Mauvais signe dans les senti- VERTICALEMENT 0123 est édité par la SA Le Monde. La reproduction de tout article est interdite sans l’accord les trois côtés perpendiculaires me- ments. – V. Tête d’Ibère. Point de de l’administration. Commission paritaire des journaux et publications n° 57 437. surent 30 centimètres. Il vaut le produit ISSN 0395-2037 départ de la grande distribution. 1. Comme des larves rampantes. Président-directeur général : de l’aire d’une base (triangle rectangle Voyelles. – VI. On peut compter – 2. Toujours en retard au spec- Imprimerie du Monde Dominique Alduy isocèle de 450 cm2 ) par le tiers de la 12, rue M. Gunsbourg Directeur général : Gérard Morax dessus. Une des grandes échelles. tacle. – 3. Un passé récent. Leurs 94852 Ivry cedex hauteur correspondante (30 cm), soit 3 – VII. Devait nous guérir de bien billes sont souvent fausses. – 4. 21bis, rue Claude-Bernard - BP 218 4 500 cm ou encore 4,5 litres. des maux. Le Nouveau Monde en Sortie pour les grandes occasions. 75226 PARIS CEDEX 05 On évitera l’inondation si le plombier VO. – VIII. Vallées noyées. Dépasse les bornes. – 5. Dans le PRINTED IN FRANCE Tél : 01-42-17-39-00 - Fax : 01-42-17-39-26 arrive dans les trois jours. LeMonde Job: WMQ0306--0025-0 WAS LMQ0306-25 Op.: XX Rev.: 01-06-97 T.: 22:43 S.: 111,06-Cmp.:02,15, Base : LMQPAG 46Fap:99 No:0893 Lcp: 196 CMYK

AUJOURD’HUI LE MONDE / MARDI 3 JUIN 1997 / 25

Le camping-car a gagné Belle et puissante, la nouvelle Passat de Volkswagen se lance à la conquête du marché ses lettres de noblesse européen. A partir du mois de juillet, la version break de la voiture allemande sera Depuis deux ans, les ventes disponible au prix de base de 119 500 F. Ses promoteurs des « voitures-maison » battent des records, souhaitent « donner à l’automobiliste mais les prix restent assez élevés d’aujourd’hui un avant-goût

GROUPE VOLKSWAGEN FRANCE SA GROUPE VOLKSWAGEN de la voiture de demain ». COMME L’ONDÉE qui fait sortir nées. Il en faudrait davantage pour l’escargot, les ponts de l’Ascension que se lève un vrai vent de démo- et de la Pentecôte auront été les cratisation. Pour près de la moitié premières grandes sorties de l’an- d’entre eux (40 %), les camping-ca- La Volkswagen Passat, star trop parfaite du marché née pour nombre de camping-ca- ristes sont des retraités. L’autre par- ristes. Cette espèce en voie d’ex- tie est composée de cadres, profes- pansion pour laquelle la langue sions libérales ou d’enseignants. Le succès de ce modèle devrait s’amplifier avec le lancement en juillet de sa version break française n’a pas inventé de terme « Les 175 000 familles françaises propre commence cependant à s’af- propriétaires d’un camping-car LA NOUVELLE Volkswagen Pas- avec un désespérant manque de grand soin et douce à conduire, elle retranchements le propriétaire franchir du rythme des saisons. Les cherchent à diversifier leur pratique sat est la vedette du marché auto- subtilité. Stars de la catégorie, les évoque un peu de cette fausse mo- d’une nouvelle Passat, on appren- ultimes améliorations apportées à touristique. Ce sont souvent des gens mobile français. Alors que les im- Renault Laguna, Peugeot 406, Ci- destie qui fait en France la gloire de dra tout de même qu’en usage ur- l’équipement intérieur (chauffage à qui ont une passion : ils peuvent matriculations sont en chute libre troën Xantia, Ford Mondéo et Opel la Golf, instrument inégalé de sno- bain les pare-chocs se couvrent air pulsé pour éviter la condensa- d’autant mieux la satisfaire qu’ils dis- depuis la suppression des primes Vectra font d’autant plus grise bisme à rebours. trop vite de petites éraflures et que tion sur les vitres, moquette iso- posent d’un moyen de transport et gouvernementales, cette voiture mine que la politique commerciale la visibilité latérale pourrait être lante, volets isothermes...) ont per- d’hébergement souple », insiste bat des records. Entre janvier et de Volkswagen est agressive. La améliorée. mis aux derniers modèles de se François Feuillet, président du Syn- avril, elle s’est vendue à 6 385 uni- Passat est disponible à partir de L’absence Impressionnante, cette absence transformer en vrais petits chalets dicat des véhicules de loisirs (Sic- tés contre 3 300 l’an dernier à la 111 900 francs et le lancement, mi- quasi scientifique d’aspérités en- mobiles pour sports d’hiver. verl) et président du groupe Triga- même période et certaines versions juillet, de la version break (à partir quasi scientifique gendre une espèce de frustration. Longtemps considéré comme un no. Bien adapté à la dimension imposent un délai d’attente de dix de 119 500 francs) devrait amplifier La Passat est belle mais elle simple dérivé de la caravane, en européenne (près de la moitié des semaines. ce succès. d’aspérités manque de charme. Cette voiture, plus luxueux, le camping-car s’en pratiquants français se lancent ré- Aux amateurs, il n’a pas échappé Volkswagen, jusqu’alors inca- qui se veut « une voiture de rêve est discrètement détourné. Large- gulièrement dans des escapades à que, pour sa cinquième génération, pable de sortir de la monoculture engendre une espèce dans un monde de réalité », n’a, en ment dominante (1,5 million l’étranger), le camping-car est le re- la Passat est devenue une belle voi- Polo-Golf, s’est enfin ouvert une fait, pas grand-chose d’onirique. d’exemplaires en circulation en flet de l’air du temps. Plus tenté par ture. Son toit arrondi, inspiré de brèche. Plus longue de 20 centi- de frustration Trop cartésienne pour faire tourner France) mais victime d’une image la façade ouest que par le Midi, il se l’ancienne et de la future Coccinelle mètres, la nouvelle Passat ne fait les têtes et trop distante pour inspi- un tantinet surannée, la première plie allègrement aux contraintes (la réincarnation sera effective dans pas trop d’ombre à l’Audi A4, la rer un sentiment de complicité, la voit ses ventes s’éroder. Le second liées au tourisme culturel mais aussi deux ans) accentue un design so- sœur jumelle un peu mondaine L’habitacle, aux dominantes noir Passat parle à l’hémisphère droit, (750 000 véhicules) avec ses allures à la pratique d’un sport ou d’un loi- brement aérodynamique signé Au- dont elle partage les motorisations, et gris flanelle, affiche un réel souci celui de la rationalité. Mais elle le de passe-partout plus attiré par les sir. di. Heureuse rupture avec les deux y compris le très apprécié moteur ergonomique et la hauteur du pa- fait avec élégance. sites historiques que par le cam- précédentes versions qui culti- 1,9 litre TDi. Spacieuse, silencieuse, villon renforce l’impression d’es- ping-pastis-pétanque, a gagné ses INVESTISSEMENT ONÉREUX vaient la robustesse germanique peu gourmande, fabriquée avec pace. En poussant dans ses ultimes J.-M. N. lettres de noblesse. Les immatri- Pourtant, cette forme de tou- culations (6 588 unités par an) ont risme ne fait pas toujours l’unani- progressé de 15 % en 1996 après une mité. Des communes ont pris des croissance à peu près comparable arrêtés allant jusqu’au bannisse- en 1995 et cette année devrait ment de ces gens du voyage au confirmer la tendance. pouvoir d’achat pourtant bien su- Loin d’être un fil à la patte, le périeur à celui du touriste moyen camping-car se vit souvent comme mais pas forcément mieux protégés le pendant, confortable et civilisé, contre les réflexes grégaires et le du camping sauvage. Il redonne de manque de savoir-vivre. Les actions la spontanéité aux vacances : départ en justice engagées par le Sicverl décidé au tout dernier moment ont opéré un effet dissuasif. Hier pour une destination à géométrie boudeuses, Narbonne, Hyères, Pa- variable. Avec leur énorme réser- lavas-les-Flots, La Baule, Carnac, voir, le petit fourgon pour trois ou Cancale ou Courseules-sur-Mer li- quatre personnes, la cellule aména- mitent désormais l’interdiction de gée et montée sur un châssis ou stationnement au seul front de mer. « l’intégral » spécialement carrossé Quelques stations balnéaires conti- peuvent jeter leur musette à peu nuent cependant de faire la fine près où bon leur semble. bouche. Plus facile à conduire que ses LE BONHEUR DES ENFANTS proportions ne le suggèrent, le Entre deux étapes dans l’une des camping-car avec sa bonne-fran- quelque 2 000 aires d’accueil que quette confortable et insouciante compte l’Hexagone et qui offrent inspire volontiers la sympathie. pour un prix minime de faire le Mais il s’agit d’un investissement plein d’eau et de vidanger WC onéreux qui ne se justifie qu’à chimiques et eaux usées, la couvée condition d’opter pour un certain camping-car se pose sur la première type de vacances. En clair, il exige branche qui lui convient. Cette ex- quelques moyens financiers mais trême facilité de mouvement qui aussi beaucoup de temps dispo- correspond parfaitement au frac- nible. Fait révélateur : plus de la tionnement des congés fait le bon- moitié des camping-caristes par- heur des enfants qui imaginent de courent plus de 10 000 kilomètres partir en expédition (prévoir d’arbi- par an. trer les conflits pour l’occupation Il faut, également, accepter quel- du lit situé dans la capucine, au- ques désagréments. Le plancher est dessus de la cabine du conduc- souvent trop haut, ce qui ne facilite teur...). pas l’accès à l’habitacle. Sur route, il Ce véhicule dont l’élégance n’est souffre d’une forte sensibilité au pas le point fort, s’est fondu dans vent latéral et, à l’arrêt, d’une ten- l’univers des vacances. En haute sai- dance au dandinement comparable son, les environs immédiats de Dis- à celle d’un bateau au mouillage. neyland-Paris ou du Futuroscope Toutefois, le principal obstacle à de Poitiers deviennent le territoire une pratique non exclusive est sans de concentrations impression- conteste le tarif de location de ces nantes de ces « voitures-maisons » véhicules, encore trop élevé même comme disent les tout-petits. Ce s’il recouvre à la fois une dépense succès tient aussi à une baisse des de transport et une dépense d’hé- tarifs. Un véhicule neuf animé par bergement. un gros moteur turbo diesel ca- Les prix sont trop souvent dissua- pable de soutenir un bon 110 km/h sifs (en haute saison, compter à sur autoroute et d’accueillir confor- partir de 6 000 francs la semaine, tablement une famille de deux en- carburant non compris) pour per- fants (toilettes, mini-cuisine avec mettre à une population beaucoup réfrigérateur silencieux, placards, plus large de découvrir le camping- canapés-lits) se négocie aux alen- car. tours de 180 000 francs contre plus de 200 000 francs il y a quelques an- Jean-Michel Normand

a VOLS : l’idée selon laquelle les BMW sont les voitures les plus souvent volées a vécu. Selon les statistiques de la marque, 150 BMW immatriculées depuis début 1995 ont été déclarées volées l’an passé, soit un taux de vol inférieur à 0,3%. La responsabilité de cette baisse est attribuée à la généralisation de dispositifs antidémarrage à trans- pondeur. a JEUNES : le Tour de France des jeunes conducteurs aura lieu du 24 octobre au 1er novembre. Cette épreuve, fondée sur la qualité de la conduite, est organisée par le mouvement de liaison des associations de sécurité routière (Laser, tél. : 01-42-25-01-05). a FIAT : la 2 000 000e Fiat Punto est sortie des lignes de montage de l’usine de Melfi le 7 avril. Présentée fin 1993, la Punto est actuelle- ment la voiture la plus vendue en Europe. Pour prolonger ce succès, Fiat vient de lancer deux séries limitées: la Punto 60 Opéra (52 200 francs) et la Punto Diva 60 SX (à partir de 60 500 francs). a SÉCURITÉ : Volvo annonce qu’il vient de s’équiper d’un «super- ordinateur simulateur de crash-tests». Des simulations permettant de réduire les essais réels pourront être réalisées jusqu’à six fois par jour. a RENAULT : la marque au losange a mis en place depuis la fin du mois de mai des forfaits (pièces et main-d’œuvre) sur les opérations d’entretien. Selon les modèles, les « forfaits révision » vont de 600 à 1 350 francs. LeMonde Job: WMQ0306--0026-0 WAS LMQ0306-26 Op.: XX Rev.: 31-05-97 T.: 17:38 S.: 111,06-Cmp.:02,15, Base : LMQPAG 46Fap:99 No:0894 Lcp: 196 CMYK

26 CULTURE LE MONDE / MARDI 3 JUIN 1997

MUSIQUE Les musiques du concert, églises et bacs des dis- roque quand les découvertes XVIe siècle et pour leurs avatars ARGENTIN, MI-ALLEMAND, Pedro Moyen Age et de la Renaissance, quaires. b PEUT-ÊTRE LASSÉ par le d’œuvres essentielles des XVIIe et contemporains : des compositeurs Memelsdorff a fondé l’Ensemble hier encore confinées au cercle res- conformisme interprétatif et la re- XVIIIe siècle se font rares, le public mettent au goût du jour ces styles Mala Punica, il y a dix ans. Il s’est treint des mélomanes esthètes, dite qui gagnent les ensembles se passionne dorénavant pour des en les formatant pour un marché spécialisé dans le répertoire de la prennent d’assaut salles de spécialisés dans le répertoire ba- musiques composées du XIe au friand de répertoire sacré. b MI- fin du XIVe siècle. L’énigmatique déferlante des musiques médiévales Réconciliant apparemment goût de la découverte, inclination du public et des compositeurs de cette fin de siècle pour le sacré, les musiques du Moyen Age et leurs avatars font vendre des disques et attirent un nombre croissant d’amateurs dans les salles de concert

ON N’OSERAIT AFFIRMER qui, musiques allant d’Eustache du mais terriblement insidieux, a en- Symphonie du Polonais Henryk Go- concédés aux grands chefs d’or- son potentiel d’acheteur, mettant du public, des programmateurs de Caurroy (1549-1609) au jeune Men- vahi le panorama « baroqueux », recki, les polyphonies hiératiques chestre symphoniques. Il en va de une fois encore en route la ma- concerts ou de la presse spéciali- delssohn. Malheureusement, plu- confinant dans une même approxi- et très ouvertement néomédiévales même pour Pedro Memelsdorff chine autodestructrice dont le sée, influence le goût ambiant pour tôt que de s’intéresser à du Caur- mation stylistique Gluck, Rameau de l’Estonien Arvo Pärt, les liturgies chez Erato (c’est-à-dire Warner), le disque classique souffre chroni- tel ou tel répertoire... Il y a bien, roy ou à Etienne Moulinié (la et... Mozart. néo-orthodoxes du Britannique Hilliard ensemble chez ECM (c’est- quement depuis des années ? Déjà, aujourd’hui, un air du temps « mu- musique sous Louis XIII demeure On a beaucoup dit que la rupture John Tavener (dont les premiers à-dire Polygram), Sequentia chez les compilations aux titres sugges- sique de chambre », brandissant une terre musicale en friche), les du public avec la création contem- disques étaient parus sous le label Deutsche Harmonia Mundi (c’est- tifs abondent, aussi peu signifiants les vertus chaleureuses du partage interprètes, sous l’influence des poraine avait beaucoup servi la Apple des Beatles...) et les austères à-dire BMG), Sœur Marie Keyrouz qu’il est possible (Agnus Dei, Stabat musical, mais cet air du temps ex- maisons de disques qui dictent la musique baroque, celle-ci tenant thrènes du Géorgien Giya Kancheli et Anonymous 4 – ce girls band Mater, Angels, etc.), mêlant le meil- hale aussi d’entêtantes effluves loi du marché, ont trop souvent lieu d’exutoire à l’auditeur en ont gagné le cœur de nombreux moyenâgeux a tenu les premières leur et le pire, annulant dans un médiévales. A Paris, chaque se- réenregistré les mêmes « stan- quête de fraîcheurs inédites. En re- mélomanes en froid avec la mu- places des hit-parades classiques même concept généraliste les dif- maine, c’est une vingtaine de dards », accumulant les versions vanche, les liens de réciprocité en- sique contemporaine, dite atonale. américains – chez Harmonia Mun- férences historiques, culturelles, concerts que l’on recense ; au des Concertos brandebourgeois,de tretenus par la musique médiévale Cette image sonore, « cister- di. Leurs disques se vendent infini- géographiques de cette période ex- disque, l’affolement n’est pas Bach, du Messie, de Haendel, des et une certaine frange de la mu- cienne », réverbérée, pure et ment mieux qu’une nouvelle inter- ceptionnellement riche et longue... moindre, comme en témoignait, en Leçons de ténèbres, de François sique contemporaine – qu’on qua- rayonnante, s’est imposée, a gagné prétation du répertoire Il ne faudrait pas non plus oublier avril, le sommaire des pages Couperin. Le contrepoison censé lifiera de « planante » et néoto- les espaces acoustiques artificiels symphonique traditionnel, dont le triomphe planétaire du chant disques du mensuel Diapason : sur soigner ce conformisme de réper- nale, pour faire simple et rapide – des musiques cross over, amenant certaines parutions n’atteignent grégorien affadi par les moines de huit « Diapasons d’or » décernés – toire semble ne rien arranger : en ont, d’une certaine façon, réconci- une religieuse américaine à faire pas toujours les deux cents ou trois l’abbaye espagnole de Silos. l’une des distinctions les plus re- multipliant les « redécouvertes » lié ces antagonismes apparents. danser le rock à Hildegard von Bin- cents exemplaires dans les deux Les interprètes de la musique cherchées –, quatre récompen- de petits maîtres, pas toujours aus- gen, les très sérieux membres du mois qui suivent leur publication médiévale, si ce courant d’intérêt saient des disques de musique an- si essentielles qu’on pouvait l’espé- Hilliard Ensemble à laisser « conta- en France, même si les symphonies se confirme, sauront-ils ne pas se cienne ; un allait à la musique de la rer, l’intérêt s’est émoussé, malgré Les catalogues miner » la polyphonie de Cristobal de Beethoven par Harnoncourt et laisser emporter par la spirale in- Renaissance, trois à des musiques d’étonnantes exceptions de temps de Morales (1500-1553) par les ef- Gardiner ont dépassé les trente fernale de la jet set musicale inter- médiévales. L’Ensemble Sequentia à autre, de vraies réévaluations de grossissent fluves du saxophone de Jan Garba- mille coffrets. Tant et si bien que nationale (un concert de « chant (les héraults de Hildegard von Bin- compositeurs délaissés. Si le public rek ou encore le Quatuor Kronos à les majors révisent tous leurs sur le livre » à New York le lundi, gen chez Deutsche Harmonia semble s’être lassé du répertoire et engrangent, inscrire des transcriptions de Guil- contrats, comme celui de Bernard un récital de ballades de neo-stilno- Mundi) est à la une du même ma- « baroque », désormais enseigné laume de Machaut (vers 1300-1377) Haïtink, qui enregistrait pour Phi- vo à Tokyo trois jours après, suivis gazine, dont les pages « Actualité » dans les conservatoires, c’est aussi les abbayes et de la même von Bingen (1098- lips sa... troisième intégrale des d’une séance d’enregistrement de s’ouvrent sur un portrait de Pedro que les interprètes, réfléchissant 1179) au programme de leurs der- symphonies de Mahler. « chansons subtiles ») ? L’ars subti- Memelsdorff, fondateur et direc- moins, devant produire vite, se se remplissent niers concerts. Les catalogues grossissent et en- lior, à la fin du XIVe siècle, était une teur musical de l’Ensemble Mala sont laissé gagner par une sorte de Ces croisements, greffages et grangent, les abbayes se rem- pratique « réservée », que les Punica. Impensable il y a dix ans... routine : sous l’apparence rassu- autres hybridations ont-ils servi ou plissent d’un public fasciné par ces cercles d’avant-garde préservaient Car, il y a dix ans, un mouvement rante d’une vérité stylistique s’abri- Il est vrai que nombre de musi- désservi la cause stylistique et mu- polyphonies aux atours apparem- de toute contamination populaire. similaire d’affection envers le ré- tant sous la protection de sainte ciens de la sphère médiévale et ba- sicologique de ce répertoire ? De ment simples, par ce retour in- On ne souhaite pas à cette mu- pertoire baroque joué philologi- Musicologie, un académisme roque ont porté leur curiosité sur toute évidence, Hildegard von Bin- conscient au sacré qu’elles in- sique de se confiner, mais de rester quement atteignait enfin le public moins décelable que celui de la la musique de leur temps, amenant gen peut se passer d’une bonne duisent. Mais on s’interroge : cette élitiste et pure pour le plus grand non spécialiste – vaste nébuleuse à grande tendance néoclassique des les compositeurs à découvrir leurs sœur new age, et la musique de abondance de biens va-t-elle géné- nombre. Noble mais vaste tâche à laquelle, le dénominateur commun années 60 (Karl Münchinger dans instruments et leurs techniques de Pierre de Manchicourt (vers 1510- rer son indispensable dose d’auto- accomplir... des instruments anciens aidant, on Bach, Jean-François Paillard dans jeu. Quoi qu’il en soit, à la suite du 1564) bénéficier, chez Sony, des in- critique, ou ce phénomène va-t-il a pris l’habitude d’incorporer des Rameau, I Musici dans Vivaldi), succès planétaire de la Troisième vestissements promotionnels s’alourdir d’académisme et lasser Renaud Machart A écouter Les constellations sonores et virtuelles de Pedro Memelsdorff b Musique à la cour du Roi Janus citation dans l’Italie des Visconti, à Nicosie (1374-1432). Ensemble 1380-1410. Mala Punica, Pedro EN JUILLET 1996, il traversait la dix ans, s’attachant aux dernières tique vocale de Mala Punica, ex- leurs délicates implications symbo- Huelgas, Paul Van Nevel Memelsdorff (direction) : 1 CD cour blanche de lumière de l’ab- années du XIVe siècle, une époque plique Pedro Memelsdorff, se liques et poétiques – chargent de (direction) : 1 CD Sony Classical Arcana A 23. La subtilitas française baye aux Dames de Saintes avec de sophistication musicale à côté fonde sur l’usage de techniques par- nostalgie et d’amertume, parfois « Vivarte » SK 53 976. importée à Milan par un érudit, des airs d’elfe égaré. Egaré dans le de laquelle les intimidations arith- mi les plus sophistiquées – nuances d’ironie et de curiosité, les credo et Raffinement hypnotique, Magister Philipoctus, à la fin du siècle et dans le monde, Pedro Me- métiques du compositeur Brian jouant des micro-intervalles, glis- les gloria qu’elles peuplent secrète- superpositions textuelles : la cour XIVe siècle. Huit pièces pour passer Ferneyhough paraissent une sandos imperceptibles, jeux de dic- ment. Elles s’insèrent dans la litur- de Chypre s’isolait dans une du statut d’« homme rude » à celui PORTRAIT blague de potaches inscrits à tion usant de la micro-dynamique gie comme les portraits courtois superbe avant-garde sonore. d’« homme subtil »... maths spé... Mala Punica est leur et de l’allitération – qui visent toutes dans les images saintes. » b Campus Stellae XIIe siècle. b Chant milanais. Ensemble L’ensemble nom. au renforcement de l’effet rhéto- Ensemble Discantus, Brigitte Organum, Marcel Péres Mala Punica offre rique et émotif des textes. » Si nos SOIN MALADIF Lesne, direction : 1 CD Opus 111 (direction) : 1 CD Harmonia Mundi la « Missa cantilena » SYMBOLE DE LA FERTILITÉ compositeurs rêvent de l’adhésion Cela ne pourrait être qu’une OPS 30-102. HMC 901295. à Saint-Merri « Pommes de discorde », fruit d’un grand public à leur propos proposition intellectuelle. Mais le Manuscrit composé en Bourgogne La tradition ambrosienne (chanter défendu, ces grenades sont aussi artistique, les cercles de la fin du travail de Memelsdorff a ceci d’ex- pour Saint-Jacques de « les hymnes et les psaumes selon le symbole de la fertilité. Emblème XIVe siècle n’avaient pas la traordinaire qu’il réserve autant Compostelle. Qu’elle soit la coutume des régions d’Orient ») melsdorff, né en 1959, l’est proba- idéal de ces musiques cultivant le moindre envie de communiquer de soin à l’accompagnement éru- monodique ou polyphonique, fut quelque peu occultée par le blement : mi-allemand, mi-argen- plus affolant raffinement et pro- au-delà d’un cénacle circonscrit, dit de ses projets qu’à la mise en cette musique pour voix de chant romain et sa notation. tin, il use de divers dialectes avec voquant dans le même temps informé, initié où le faire et l’en- œuvre sonore : chacun des chan- femmes rafraîchit l’âme. b Le Banquet du vœu. Ensemble aise et vit en Italie, après avoir l’adhésion fascinée, voire une tendre se confondent – l’entendre teurs et instrumentistes (dont b Hildegard von Bingen : Chants Gilles Binchois, Dominique Vellard étudié en Suisse et en Hollande. étonnante dérive érotique chez superposant l’écoute et l’entende- l’étonnant organetto, petit orgue de l’extase. Ensemble Sequentia : 1 (direction) : 1 CD Virgin Veritas VC Flûtiste à bec, ancien membre l’auditeur, perclus de sonorités ment intellectuel. portatif médiéval, joué par un CD Deutsche Harmonia Mundi 791441-2. d’Hesperion XX, l’ensemble de pures, de déferlements ornemen- Au-delà de l’extrême raffine- maître en la matière, Christophe 05472 77555 2. Il nous manque les mets et les Jordi Savall, partenaire en « dé- taux, de saisissantes dissonances ment sonore des polyphonies, Deslignes, ou l’instrument éton- Femme « polyphonique », saveurs, mais la précision lyrique lices désordonnés » du claveciniste formant une palette sensitive exa- l’élément verbal, ludique, référen- nant qu’est la voix de la soprano fascinante, versée dans la de Domique Vellard et de son Andreas Staier, égaré, il l’est plus cerbée. Cette avant-garde pour- tiel est au centre du propos, les Jill Feldman) apporte un soin diététique, les médecines, la ensemble, nous fait entendre encore par les régions musicales rait-elle être comparée aux avant- mises en musique des textes appe- qu’on osera qualifier de maladif à poésie, la musique... Un disque l’atmosphère gourmande et qu’il arpente principalement à la gardes qu’aura connues cette fin lant toujours le souvenir, l’allu- ce qu’il fait. essentiel. raffinée qui régnait au mitan du tête d’un groupe exemplaire de de XXe siècle ? Le lexique semble sion, la citation, « penchant géné- Les concerts de Mala Punica b En attendant : l’art de la XVe à la cour de Bourgogne. musiciens européens, fondé il y a peu ou prou le même : « L’esthé- ral et médiévalissime à la sont une sorte de cérémonie ri- récupération, à la réutilisation et à tuelle étrangement belle, ma- l’économie des matériaux ». Dans gique. A Saint-Merri, les portes se- la Missa cantilena, qu’ils viennent ront grandes ouvertes sur ce d’enregistrer pour Erato (après microcosme vertigineux, sur ce trois disques chez Arcana, ils ont monde sonore constellé d’images signé un contrat d’exclusivité pour sonores virtuelles à haute teneur CONCERTS la filiale de Warner Classics), Zac- toxique. Pour une fois, ne pas cara da Teramo et Matteo da Peru- s’abstenir : l’entrée est libre. gia renvoient face à face, dos à dos, leurs propres compositions R. Ma. profanes, des cantilènes, recondi- tionnées en pièces sacrées desti- ૽ Missa cantilena (fin XIVe - début nées à l’usage liturgique. XVe siècle, par l’Ensemble Mala Pu- « Par ce procédé, explique Me- nica, le 3 juin, 20 h 30, Accueil melsdorff, ils ont eu en vue, en fait, Saint-Merri, 76, rue de la Verrerie, de véritables allégories. Les textes de Paris 4e , Mo Hôtel-de-Ville. Entrée leurs compositions originelles sont libre. Et intégrale des motets de alors devenus les métatextes de Ciconia (début XVe siècle), abbaye leurs messes : la passion sublimée et de Royaumont (Val-d’Oise), le les destinatrices de leurs ballate – 8 juin, à 17 h 30. Tél. : 01-34-68-05- Cialamella, Rosa, Lucia, avec toutes 50. 120 F. LeMonde Job: WMQ0306--0027-0 WAS LMQ0306-27 Op.: XX Rev.: 31-05-97 T.: 14:22 S.: 111,06-Cmp.:02,15, Base : LMQPAG 46Fap:99 No:0895 Lcp: 196 CMYK

RADIO-TÉLÉVISION LE MONDE / MARDI 3 JUIN 1997 / 27 LUNDI 2 JUIN TF 1 France 2 France 3 Arte M6 Canal + Radio 21.15 21.15 20.55 20.45 20.45 20.15 France-Culture 20.30 L’Histoire en direct. L’AMI UN HOMME LE VIEUX JE HAIS LES ACTEURS aa DRAGON, ATHLÉTISME 1961 - 1963 : le rock débarque ̈ en France. Téléfilm de Robert Mazoyer, avec aa Film de Gérard Krawczyk, avec Jean Poiret, Michel Blanc Meeting de Saint-Denis. DE MON FILS Etienne Chicot, FUSIL L’HISTOIRE En direct du stade 21.30 Fiction : Téléfilm de Marion Sarraut, avec Film 4 de Robert Enrico, (1986, 90 min). 470482 Catherine Frot, Auguste-Delaune Premier roman, Mireille Darc, Nathalie Nerval avec Romy Schneider, DE BRUCE LEE Anaïs Jeanneret. Filmée comme une série B américaine des années Film 4 de Rob Cohen, avec Jason (135 min). 2164550 (110 min). 4866734 Philippe Noiret première dramatique. [1/2] Gisèle (115 min). 4865005 40, une comédie d’humour noir ravageur, fidèle Scott Lee, Lauren Holly (1992, L’amour passionné entre une (1975, 105 min). 6708579 22.40 Toit ouvrant. [2/2] Isabelle (105 min). 4850591 au roman de Ben Hecht. 130 min). 153192 22.30 Flash d’information. veuve, professeur de lettres, et Un grand cri de douleur pour les 0.05 Du jour au lendemain. La saga d’un homme, ouvrier victimes de la barbarie nazie. Des interprètes délirants. Version hollywoodienne des un étudiant, le meilleur ami de Dominique Poulet (Musée, nation, devenu grand entrepreneur, des 22.40 Journal, Météo. 22.15 Kinorama. Magazine. films que tourna Bruce Lee. patrimoine). 0.48 Les Cinglés du son fils... années 70 à nos jours. music hall. 1.00 Les Nuits de Contremaître dans une usine de France-Culture (rediff). la banlieue de Vichy, Germain 23.05 est confronté au problème de la 23.35 22.25 22.55 22.35 France-Musique future délocalisation de son LE DROIT DE SAVOIR entreprise dans le Nord. Alors ROMY SCHNEIDER, MACHO a RELATIONS JUSQU’AU BOUT 20.30 Concert. Donné en direct du Nouveau Magazine présenté que lui-même se sent prêt à Film de Bigas Luna, avec Javier Bardem, Maria de a par Charles Villeneuve. LES CHOSES INTERDITES DU MONDE Siècle, à Lille, par l’Orchestre déménager, sa femme, Gisèle, Medeiros (1993, v.o., 90 min). 9864550 Téléfilm 4 de Warren Clarck, avec Film de Wim Wenders. national de Lille, dir. Gilbert L’enfance outragée : n’entend pas quitter cette terre DE L’AMOUR Une caricature très épaisse d’un arriviste aux Varga : Œuvres de Glinka ; contre la loi du silence Michael Madsen (100 min). 935444 (1991, v.o., 173 min). 61500314 qui l’a vue naître. Deux Documentaire de Jean-Claude Mozart et Scriabine. (85 min). 6369258 Missiaen (50 min). 483685 moyens intellectuels plus que limités et qui semble 0.35 Jazz 6. En 1999, une jeune femme, épisodes, comme un feuilleton. 22.30 Deux affaires de pédophilie 0.25 1, 2, 3... théâtre. ne raisonner qu’avec son sexe. Le machisme et les Magazine présenté elle-même suivie par un homme Musique pluriel. Ascension, succès, fêlures... symboles phalliques sont décidément une par Philippe Adler. 23.07 Entre les lignes. décortiquées par l’équipe de Une saison qui l’aime et un détective privé, obsession chez Bigas Luna. [2/2] Al Jarreau « Droit de savoir ». 0.55 Journal, Météo. au Moyen Age. court à travers le monde sur les 0.00 La Rose des vents. 23.55 Court circuit. (60 min). 1077999 0.30 et 1.10, 1.50, 2.55, 3.55, 1.10 Côté court 2. Magazine. 1.20 Le Pièce de Michel Pascal, avec traces du fils d’un savant El Secdleto de la tlompeta, court métrage de Le chanteur américain au 4.40 TF 1 nuit. Cercle de minuit. Magazine. Karl Jean-François Balmer enregistrant des images Marx. Invités : Robert Hue, Gil Ben Javier Fesser ; Le Rythme dans la peau, court festival Jazz à Vienne 0.45 Cas de divorce. Série. (60 min). 1977067 destinées à être vues Radio-Classique Aych, Marc Guillaume, Jean-Pierre métrage de Javier Fesser (35 min). 9117918 1996. mentalement par sa mère Renaud contre Renaud Vincent, Christine Fersen, le Père 1.25 Musique graffiti. Magazine. De 0.30 Sicario aa 1.35 Best of Céline Dion. 2.35 Fré- aveugle. 20.40 Les Soirées (rediff.). Jean-Yves Calvez. 2.35 Tennis. Roland- Bach à Bartok, confidences pour pia- quenstar. Florent Pagny (rediff.). 3.30 Garros. Résumé du jour. 3.00 Nous Film de José Ramon Novoa, avec Gledys Ibarra de Radio-Classique. 1.25 Les Grandes Espérances. Feuille- no. 1.35 La Grande Aventure de James Coulisses : Dee Dee Bridgewater. Do- 1.25 L’Educatrice a Paul Klee et la musique. partîmes 2000. Documentaire. 4.25 24 Feuilleton. Le passager (1994, v.o., rediff., 110 min). 4781661 ton [1/12]. 2.00 et 3.05, 4.10, 5.10 His- Onedin. cumentaire. 3.55 Fan de (rediff.). 4.20 Film de Pascal Kané heures d’info. 4.40 Météo. 4.42 D’un (60 min). 2.20 You Bet Your Life. Documentaire. Turbo (rediff.). 5.05 Mister Biz (rediff., 22.40 Les Soirées... (suite). Œuvres toires naturelles. Documentaire. 4.50 soleil à l’autre. (rediff., 48 min). (1995, 95 min). 6230574 0.00 Les Nuits de Radio-Classique. Musique. Concert (20 min). [1/2] (rediff., 25 min). 9892715 25 min).

TV 5 Paris Première Ciné Cinémas Canal Jimmy Téva Voyage Chaînes 20.00 Thalassa. Magazine 20.00 et 0.35 20.30 Hold-up a 20.00 Mister Gun. 20.30 et 23.30 Téva interview. 19.55 et 23.25 (France 3 du 30/5/97). 20 h Paris Première. Film d’Alexandre Arcady Touche pas à ma femme ! 20.55 Passion interdite. Chronique Polac. d’information Téléfilm de Warris Hussein 21.00 Enjeux - Le Point. 21.00 Identification (1984, 110 min). 5160685 20.30 Souvenir. 20.00 et 23.30 Suivez le guide. CNN aa A bout portant : Michel Fugain (95 min). 501279918 22.00 Journal (France 2). d’une femme aaa 22.20 Les Affameurs 22.00 Blue Ocean. LES CODES Film d’Anthony Mann et le Big Bazar. 22.30 Murphy Brown. Information en continu, avec, en 23.00 Le Crabe-tambour aa Film de Michelangelo Nouvelle-Calédonie. soirée : 20.00 et 23.00 World Busi- DU CSA (1952, v.o., 95 min). 21355598 Film Antonioni 21.25 New York Police Blues. 23.00 Téva débat. Magazine. ness Today. 20.30 et 22.00, 2.00 de Pierre Schoendoerffer Feux rouges. 22.30 L’Heure de partir 4 Accord (1981, v.o., 130 min). (55 min). World News. 21.00 IMPACT/Larry (1977, 120 min). 70027956 44548444 22.10 Chronique Eurosport King Live. 22.30 Insight. 23.30 World parental Festival de la route. Sport. 0.00 World View. France 11.00 et 23.00 Tennis. Muzzik souhaitable. Planète 20.05 La Baby-sitter. 22.15 La Poursuite En direct. Internationaux 5 Accord L’immaculée confection. 19.05 L’Invité. David Grimal. Euronews 20.35 ̈ White Jazz. Supervision impitoyable aa de France. Huitièmes parental 20.30 Raphaël le tatoué a Film d’Arthur Penn de finale, à Roland-Garros 20.00 L’Album souvenir Journaux toutes les demi-heures, 21.25 Sur l’autre rive. a Film de Christian-Jaque avec, en soirée : 19.15, 19.45, 20.15, indispensable Des chantiers navals 20.30 Frou-Frou (1965, 135 min). 42635192 (480 min). 56138937 d’Elisabeth Film d’Augusto Genina (1938, N., 90 min). 43962937 20.45, 21.45, 22.45 Economia. 19.20, ou interdit à Othello. 19.00 Football Schwarzkopf. (1955, 110 min). 27172531 20.20, 21.20, 22.20 Analysis. 19.39, aux moins 22.20 Amour, femmes 22.00 Gérard Jugnot. (horaire sous réserves). 20.09, 20.39, 21.09, 21.39, 22.09, 23.20 Stabat Mater, Disney Channel 21.00 Un bal masqué. et fleurs. 23.05 Il était une fois En direct. Festival Opéraen trois actes 22.39, 23.09 Europa. 19.50, 20.50, de 12 ans. d’Anton Dvorák. le Splendid. 19.00 Petite fleur. Spécial. espoirs de Toulon. de Giuseppe Verdi 21.50, 22.50 Sport. 23.15, 1.15 No 6 Public 23.10 La Pêche aux éponges. Comment. 23.45Odéon. Concert (90 min). 12326463 D’André Halimi (55 min). 19.30 L’Incorrigible Cory. Portugal - Etats-Unis (150 min). 502840598 adulte 23.50 L’Effet magique. (120 min). 825937 20.10 Les Trois Princes. 23.30 Le Concerto d’Aranjuez. LCI ou interdit Téléfilm de Martin Topak 21.00 Football Concert. Concerto pour Ciné Cinéfil Série Club Journaux toutes les demi-heures, aux moins Animaux (90 min). 7552111 (horaire sous réserves). guitare et orchestre, de 20.30 Rome Express a Joaquin Rodrigo (30 min). avec, en soirée : 19.16 et 23.16 Guil- de 16 ans. 20.45 Thérèse Humbert. 21.40 Santo Bugito. En différé. Festival 20.00 Le Monde de la nature. Film de Christian Stengel espoirs de Toulon. 500003550 laume Durand. 20.13 et 20.45 Le On ne prête qu’aux riches. 22.05 La Rédac. 18-21. 20.30 et 22.30 Le Grand Jour- 21.00 Le Monde sauvage. (1949, N., 85 min). 75768869 21.45 et 1.30 Rancune tenace. Groupe A : Colombie - 0.00 Le Journal de Muzzik. a 22.35 Sinbad. République tchèque. nal. 21.10 et 22.12 Le Journal du 21.30 Flipper le dauphin. 21.55 La Belle que voilà 22.30 Alfred Hitchcock 0.30 Ashkenazy Monde. 21.17 et 22.19, 22.44 Journal Film de 23.00 Planète Disney (50 min). 22.00 et 22.30Athlétisme. de l’Economie. 21.26 Cinéma. 21.42 22.00 Le Monde de la nature. présente. Hypnose. joue Schumann. Concert Jean-Paul Le Chanois 0.00 Snooker (90 min). Talk culturel. 0.15 Le Débat. 23.00 Alive et Well. (1949, N., 115 min). 71400666 23.00 Two. (55 min). 508477796

MARDI 3 JUIN TF 1 France 2 France 3 La Cinquième M6 Canal + Radio 16.30 Dingue de toi. Série. 18.15 Seconde B. 18.20 Questions 17.50 Planète blanche. Passion glacée. 18.25 Le 18.00 Highlander. Série. 17.25 Cyclisme. France-Culture Camarade de chambrée. Série. Le beau ténébreux. pour un champion. Jeu. Monde des animaux. Sichuan, le pays des Jeux dangereux. Tour d’Italie : 17.05 Melrose Place. 18.40 Qui est qui ? Jeu. 18.47 et 0.53 Un livre, un jour. merveilles. 19.00 Le Magicien. (17e étape) Dalmine - 20.30 Archipel médecine. L’informatique médicale. A [2/2] Désespoir. 19.25 et 2.30 Studio Gabriel. Appel aux Allemands, Série. Association Vérone (190 km). l’occasion du SITM. 18.00 Sous le soleil. Série. Invités : Bernard Azimut, de Thomas Mann. de malfaiteurs. ̈ En clair jusqu’à 20.35. 21.32 Grand Angle. Oui ou non. Jean-Pierre Darras. 18.55 Le 19-20 Arte 19.54 Six minutes 18.35 Nulle part ailleurs. (rediff.). Mal y voir, d’autres 19.00 L’Or à l’appel. Jeu. 19.55 Au nom du sport. de l’information. d’information. Invités : Richard Branson, façons de voir. 19.50 Météo. 20.00 Journal, Image du jour : 20.00 Météo. 19.00 Collection Hollywood 1950. Série. 20.00 Notre belle famille. Barbara Schultz, Manuel 22.40 Nuits magnétiques. 20.00 Journal, L’image Roland-Garros ; 20.05 Fa si la chanter. Jeu. Nulle part ailleurs, de Roy Kellino (1955). Série. Voyance. Blanc ; OP 8. Entrée de secours. du jour ; Tiercé. A cheval ! ; Météo. 20.35 Tout le sport. En direct. 19.30 7 1/2. Magazine. La contrefaçon. 20.35 E = M 6 junior. Magazine. 20.30 Le Journal du cinéma. 0.05 Du jour au lendemain. Michel 20.00 Archimède. Magazine. (30 min). 7086 Houellebecq (Rester vivant), (La 20.38 Côté court. En direct. Les rapaces. Poursuite du bonheur). 0.48 Les Cin- 20.30 8 1/2 Journal. glés du music hall. 1.00 Les Nuits de France-Culture (rediff.). Musica 20.30 20.55 20.55 20.45 20.50 20.35 Venezia ; 3.04, Hannah Arendt, entre politique et philosophie ; 5.29, Agora : Dominique Champault (La Route de FOOTBALL L’ANNÉE JULIETTE a LES SAIGNEURS LA VIE EN FACE : LOÏS ET CLARK MORTAL l’encens) ; 5.58, Biron : le monument France - Brésil Film de Philippe Le Guay, Téléfilm d’Yvan Butler, LES NOUVELLES des vivants. Tournoi de France. En direct de Lyon avec Fabrice Luchini, Valérie Stroh avec Véronique Jannot HAMSA, LA RAGE AU VENTRE AVENTURES KOMBAT Film de Paul Anderson, Documentaire de Manu Bonmariage DE SUPERMAN. (130 min). 8147947 (1995, 90 min). 674319 (90 min). 661845 avec Christophe Lambert, (1995, 50 min). 7297067 Série, avec Teri Hatcher, France-Musique En affrontant le Brésil L’histoire d’un mensonge. Une Française partie rejoindre Robin Shou Dean Cain. de Ronaldo et Juninho, son mari dans une plantation Manu Bonmariage brosse le portrait iconoclaste (1995, 95 min). 885067 19.05 Jazz musique. 22.25 Les films qui sortent d’un jeune beur de Colombes, un ancien Fantômes. Tendances hexagonales. les tricolores, peu glorieux face au Cambodge apprend sa mort Adaptation d’un jeu vidéo e le lendemain dans toxicomane atteint du sida Les "press" attaquent 50 palmarès de l’Académie à la Suède, rentrent dans le vif les salles de cinéma. à son arrivée. Mélo. (60 min). 342932 d’une brutalité qui écœure. Charles-Cros. du sujet en ce qui concerne (Le Monde du 15 mars 1996). 22.25 Journal, Météo. 22.10 Flash d’information. 22.30 Musique pluriel. la préparation du mondial. Concerto pour violoncelle et orchestre Tout un monde lointain..., de Dutilleux, par 22.40 22.40 22.55 21.35 22.45 22.20 l’Orchestre de Paris, dir. Serge Baudo, Mstislav LE MONDE DE LÉA LA PASSERELLE a ̈ LES NOUVEAUX SOIRÉE THÉMATIQUE : LA REVANCHE LES GRIFFES Rostropovitch, violoncelle. Magazine présenté par Paul Amar Film 4 de Jean-Claude Sussfeld 23.07 Atout Chœur. a Œuvres de Cavalli, Les Double avec Mathilda May, Pierre Arditi AVENTURIERS MARIVAUDAGES D’UNE FEMME FLIC DE LA NUIT (110 min). 2899777 Documentaire Téléfilm 4 d’Armand Mastroianni, Film de Wes Craven, Six, Byrd, Xenakis. 0.30 et 1.10, 1.45, 3.25 (1987, 89 min). 698999 Quand on badine avec l’amour... de Laurence Graffin. 21.40 Mensonges d’hommes aa avec Lori Loughlin avec Robert Englund, 0.00 Des notes sur la guitare. TF 1 nuit. 0.10 Journal, Bourse, Météo. L’archipel aux savants (90 min). 947777 Heather Langenkamp Œuvres de Domeniconi, Cervantes, 0.40 Reportages. 0.25 Côté court 2. Magazine. (55 min). 3264512 Film de John Andrew Gallagher, avec Doug DeLuca (1984, 89 min). 4773628 De Falla, Duarte, Zenamon. 1.00 Les (1994, v.o., 85 min). 2509999 0.15 Le Baroudeur. Magazine. Vies de chien 0.35 Le Cercle de minuit. Les îles australes françaises Film de terreur très Nuits de France-Musique. Téléfilm 4 (rediff., 30 min). 2931704 Magazine présenté par abritent aujourd’hui 23.05 The Dirdy Birdy. Court métrage de John R. impressionnant où la réalité Laure Adler. d’importants laboratoires Dilworth (1994, v.o., 10 min). 1002680 de Bruce McFarlane quotidienne est investie par le Monique Bourdin, et William Brayne, Radio-Classique vétérinaire, spécialiste Cinéma. Invité : John Berry de recherche. 23.15 Comment font les gens ? Moyen métrage de subconscient. Pascale Bailly (1992, 50 min). 5013086 avec Klaus Lowitsch 20.40 Les Soirées des troubles du (85 min). 1816013 23.50 Cinéma étoiles. 23.50 La Dolce Vita aaa 0.05 Jalousie. Court métrage de Christian Ganzer (1992). (90 min). 5475758 de Radio-Classique. comportement 2.00 Tennis. Roland-Garros. Résumé Magazine Film de Federico Fellini Le Philharmonique de Berlin, du jour. 3.00 Chercheurs de disparus. 0.10 Cartes postales. Court métrage de Mark Téléfilm pilote d’une du chien... (30 min). 8933715 (1959, N., v.o., 165 min). avec le témoignage de Claudio Documentaire. 4.00 24 heures d’infos. Rappaport (1990, 25 min). 99094 nouvelle série diffusée dès Abbado. 1.20 Les Grandes Espérances. Feuille- Magazine. 4.10 Météo. 4.15 Prénom 0.20 Musique graffiti. 57614574 0.35 Samedi soir. Court métrage d’Ingo Knopf (1995, jeudi sur M 6. ton [2/12]. 1.55 Concert Haydn Flo- . Documentaire. 4.40 Nuit De Bach à Bartok, 2.35 Surprises (25 min). 22.45 Les Soirées...(suite). Œuvres rentz Beethoven. Concert. 3.35 et blanche. Documentaire. 4.55 Chip et N., v.o., 15 min). 9695100 1.45 Hot forme (rediff.). 2.10 Jazz 6 de Prokofiev, Moussorgski, Nono, De- 4.30, 5.10 Histoires naturelles. Docu- Charly. Dessin animé. Le jour de Faf- confidences pour piano. bussy. 0.00 Les Nuits de Radio-Clas- 0.50 Orfeu Negro aa Film de Marcel Camus, avec Breno Mello (rediff.). 3.35 Fan de (rediff.). 4.05 Fré- mentaire. 5.00 Musique. Concert nir (30 min). 1.00 La Grande Aventure de James quenstar. Olivier de Kersauson (re- sique. (10 min). (1959, rediff., 105 min). 50004346 2.35 You Bet Your Life. Docu- Onedin. Le Helen May (55 min). mentaire. [2/2] (25 min). diff.). 4.50 Turbo (25 min).

TV 5 Animaux France Ciné Cinémas Série Club Disney Channel Eurosport 20.00 Envoyé spécial. 21.00 Le Monde sauvage. Supervision 20.30 Riaba, ma poule a 20.45 ̈ L’Age de cristal. 20.10 Une femme disparaît. 20.45 Football. 21.30 Perfecto. Magazine. 21.30 et 0.30 Le Magazine Film d’Andreï Konchalovsky Episode pilote. Téléfilm d’Anthony Page En différé. Festival espoirs de 20.45 Simentera en concert. (1994, 115 min). 5138086 (90 min). 7529883 Toulon : Croatie - Maroc. 22.00 Journal (France 2). de Jack Hannah. 22.00 Rancune tenace. Concert (50 min). 30754609 22.00 Voitures de tourisme. 22.35 Bouillon de culture. 22.00 En liberté. Rush, le daim. 22.25 Medicine Man 22.50 Alfred Hitchcock 21.40 Animalement vôtre. 21.35 Un violon Film de John McTiernan présente. La bête. 22.10 Thunder Alley. 23.45 Viva. Magazine. 23.00 Fauna. aa (1991, v.o., 105 min). sur le toit 23.15 Thérèse Humbert. Muzzik 23.30 Nature des choses. Film de Norman Jewison 71487715 On ne prête qu’aux riches. o (1971, 130 min). 79488628 Festival 21.00 Symphonie n 7, Planète de Gustav Mahler. Paris Première 20.55 Mon fils est innocent. Concert enregistré en 1994 20.35 Vol au-dessus Festival Canal Jimmy Téléfilm de Susan Rohrer (85 min). 502559357 20.00 et 0.20 Ciné Cinéfil (95 min). 501239390 des mers. [9/11]. Hornet, 20.30 Retour au château. 21.00 Spin City. 22.25 Casadesus l’avion multi-missions. 20 h Paris Première. 20.30 Au hasard Téléfilm de Charles Sturridge Le temps des cadeaux. 22.30 Murphy Brown. et Francescatti 21.25 Pianos en fête. 21.00 Le Gai Savoir. Magazine. Balthazar aa et Michael Lindsay-Hogg 21.25 Des agents jouent Beethoven. Quatre pianos français 21.55 Le J.T.S. Magazine. Film de Robert Bresson [5/6], (100 min). 49689690 très spéciaux. au Brésil. Voyage Concert enregistré en 1970 22.30 Europe 51 aaa (1966, N., 90 min). 5874319 22.10 Le Cœur du voyage. 22.20 Cambouis. Magazine. 22.20 Un million d’oiseaux a Téléfilm de François Leterrier, 20.00 et 23.30 Suivez le guide. (60 min). 507643319 Film de Roberto Rossellini 22.00 Le Dernier des six 23.15 Star Trek : la nouvelle 23.45 Jazz 625 : Coleman aux portes du désert. (1951, N., v.o., 110 min). Film de Georges Lacombe (90 min). 64193785 22.00 Blue Ocean. génération. L’enfant (v.o.). Hawkins Quintet. 23.15 White Jazz. 24210777 (1941, N., 95 min). 5548883 22.30 L’Heure de partir. ̈ Concert (50 min). 500946777 LeMonde Job: WMQ0306--0028-0 WAS LMQ0306-28 Op.: XX Rev.: 02-06-97 T.: 09:23 S.: 111,06-Cmp.:02,15, Base : LMQPAG 46Fap:99 No:0896 Lcp: 196 CMYK

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MARDI 3 JUIN 1997 Une France pour deux L’ancienne majorité laisse le chômage à un niveau par Pierre Georges AUX GRANDS DÉSARROIS, quette était blanche, ornée d’un sans précédent malgré une légère baisse en avril les grandes consolations. Au joli petit pommier vert aux fruits moins la droite a-t-elle sauvé l’es- rouges. Et l’auteur en était sentiel ! Jean Tiberi a été réélu. Au Jacques Chirac. Le nombre de demandeurs d’emploi a diminué de 0,2 % par rapport à mars Quartier latin, épicentre de la A tous ceux que le doute ronge, pensée française et de la forma- que la fureur étouffe, que le dé- DANS l’effervescence qui a ac- sonnes inscrites à l’ANPE ayant France, a un peu reculé en avril premier semestre, selon l’Insee), tion des élites, son maire re- sespoir emporte, on en conseille compagné le changement de majo- travaillé plus de soixante dix- (-0,2 %), mais il a fortement pro- c’est d’une situation encore diffi- connaissant ! Filochard sauvé vivement la (re)lecture. L’explica- rité dimanche 1er juin, les statis- huit heures dans le mois (au- gressé en un an (+ 7,9 %) et cile qu’hérite Lionel Jospin après la sous la Sorbonne, c’est tout de tion est là. Nue et crue. Toute l’ex- tiques mensuelles des demandeurs jourd’hui exclues du « baromètre concerne plus d’un demandeur victoire de la gauche. Dès l’an- même grand. plication. Aucun auteur, aucun d’emploi publiées lundi 2 juin par officiel »), leur nombre progresse d’emploi sur trois (36,2 %). Le mi- nonce de ce succès, plusieurs syn- Car, pour le reste, quelle analyste ne saurait mieux expli- le ministère du travail, auraient pu de 0,9 % (+ 4,7 % en un an) pour at- nistère du travail indique, toute- dicats (CGT, FO, SUD) ont fait sa- claque ! Dans le défilé des cheva- quer à la droite comment se passer inaperçues alors, qu’en réa- teindre 3 494 200. fois, que ceux qui sont inscrits de- voir qu’ils exerceraient une forte liers à la longue figure, des péni- pendre, haut et court, au pom- lité, elles expliquent en partie le re- Le gouvernement sortant, qui puis plus de deux ans à l’ANPE, pression sur le nouveau gouverne- tents et flagellants, commençant à mier d’abondance dans son ver- vers qu’a essuyé la majorité sor- avait depuis plusieurs mois donné auxquels s’adresse en priorité le ment pour faire aboutir leurs re- se frapper, les uns les autres, à ger d’Eden. Comment dire les tante. Celle-ci a été sanctionnée la priorité à l’emploi des jeunes, contrat initiative-emploi (CIE), ont vendications, notamment en ma- coups de croix et de crosse, dans choses et ne pas les faire. Com- pour des promesses en matière de après avoir privilégié les chômeurs vu leur nombre reculer de 0,6 % sur tière d’emploi. A l’unisson de le concert des « pourquoi ? », des ment énoncer le mal et ne point lutte contre le chômage qui ne se de longue durée, enregistre quel- le mois. l’opinion, ils attendent à la fois des « hélas ! » et des « comment ? », administrer la médecine. Com- sont jamais réalisées et, pour légè- ques succès. Le chômage des moins décisions et des résultats rapides plusieurs égarés trouvèrent expli- ment tenir d’une même main le rement positifs qu’ils soient, les ré- de vingt-cinq ans recule de 1 %, et « SIGNES FORTS » dans ce domaine. Entre les deux cation et baume à leurs plaies. Si stylo et la gomme. sultats du mois d’avril ne sont tou- même de 1,5 % pour les hommes Beaucoup de salariés se sont ins- tours, le premier secrétaire du PS la France les avait battus, c’est Il est même absolument fasci- jours pas à la hauteur du problème. en avril. Sur un an, il a baissé de crits dans les agences pour l’emploi avait fait savoir que l’une de ses que la France était devenue « in- nant, ce retour sur texte, deux ans Un lecteur optimiste retiendra 2,5 % pour les hommes et de 3,7 % en avril (+ 7,6 %), notamment priorités serait d’instituer et de gouvernable ». La belle explica- après. Le plus bel acte manqué ja- que, pour le troisième mois consé- pour les femmes. En revanche, le après la fin d’une mission d’intérim réunir la conférence sur les sa- tion ! Une France-girouette. Fri- mais réalisé par un politique ! cutif, le nombre de chômeurs a chômage des plus de cinquante ans (+ 24,4 % en un mois) ou d’un laires, l’emploi et la réduction du vole maîtresse et mégère C’est écrit noir sur blanc. Sous baissé de 0,2 % au mois d’avril, est en augmentation constante : + contrat à durée déterminée temps de travail, où doivent se re- inapprivoisée. Collectionnant les Chirac, déjà, perçait Jospin. Et le pour s’établir à 3 081 100 en don- 0,4 % pour les hommes (+ 8 % sur (+ 6,9 %). Dans ces données, aucun trouver l’Etat, le patronat et les aventures politiques et les pas- reste, d’une certaine manière, ne nées corrigées des variations sai- un an) et + 0,9 % pour les femmes indicateur ne traduit une véritable syndicats. Mais, tout en prenant sades cohabitationnistes. Une fut que péripéties et fausses ma- sonnières, soit 6 400 de moins (+ 9,6 % sur un an). Sur un an, la ca- reprise du marché de l’emploi, l’engagement de donner quelques France couche-toi là, écervelée et nœuvres. A commencer par cette qu’en mars. Mais ni le nombre de tégorie des 25-49 ans n’a pas vu sa même si le nombre d’offres dépo- « signes forts » dès sa désignation à infidèle, changeant de majorité dissolution qui commença en chômeurs au sens du Bureau inter- situation s’améliorer puisque chez sées à l’ANPE est en progression de Matignon, M. Jospin n’a jamais ca- comme de chemise et d’humeur. coup de bluff – on n’ose dire de national du travail (BIT), ni le taux les hommes et les femmes, le chô- 3,7 % en avril et de 11,5 % sur les ché qu’il lui faudrait travailler dans Pauvres ! Quand la majorité Jarnac –, tant la popularité du de chômage (12,8 % de la popula- mage y a respectivement progressé douze derniers mois. la durée pour inverser le cours des sortante aura fait l’addition de gouvernement était immense. Et tion active) n’ont reculé. De plus, si de 3,1 % et de 1,8 %. L’économie française a beau choses, s’il y parvient. toutes ses divisions – ce qui de- qui s’achève à la manière des l’on retient l’ancien mode de cal- Le chômage de longue durée, commencer à recréer un peu d’em- vrait l’occuper un moment –, charges de cavalerie du brave gé- cul, qui tenait compte des per- l’une des caractéristiques de la plois (environ 30 000 attendus au Jean-Michel Bezat peut-être seront-ils en situation néral Custer : en liquette et scalpé. de comprendre un fait simple : la La déroute est sévère, la droite France a plus de suite dans les en pièces et en morceaux. Seul idées qu’ils n’en eurent dans leur son patron reste, solitaire, au programme ou leurs promesses. Château, à contempler l’ampleur Dans la nuit qui fut finalement des dégâts et à méditer son chef- sage comme un Jospin, sans Bas- d’œuvre. Il n’en est pas encore au tille II, ni feu d’artifice rose-rouge- beau désespoir exprimé, un jour, vert, on s’ennuyait un peu. L’al- par M. Thiers : « Président de ternance comme l’abonnement quoi ? Je suis comme une étiquette au gaz ! Mu par une sorte de sur une bouteille vide ! ». Mais il conscience professionnelle, on fila doit désormais se faire à une idée, à la documentation consulter un somme toute, très répandue : ouvrage de référence. Cela s’ap- quand il y a une « France pour pelait La France pour tous. La ja- tous », il y en a pour deux !

L’incertitude sur l’euro au centre des commentaires étrangers LES PREMIERS commentaires calendrier prévu, et dans sa forme suscités à l’étranger par la victoire originelle. Lionel Jospin a fait cam- de la gauche aux élections fran- pagne sur une interprétation de çaises soulignent pour la plupart Maastricht plus laxiste. Il n’est pas l’incertitude qui en résulte pour le prêt à imposer des coupes budgé- projet de monnaie unique euro- taires claires ou des hausses d’impôts péenne. draconiennes sur une économie fran- En Allemagne, la première chaine çaise en piètre état », écrit pour sa de télévision ARD estimait, di- part The Independent (centriste). À manche 1er juin, que les adversaires droite, même les commentateurs de la monnaie unique se sentent les plus modérés, comme l’ex-mi- encouragés à relever la tête, s’ap- nistre conservateur Georges Wal- puyant sur la supposée « tiédeur » den, ne cachent pas leur satisfac- maastrichtienne de Lionel Jospin. tion : « L’impopularité de la L’Allemagne des chrétiens-démo- monnaie unique a remis les socia- crates commence ensuite à se sentir listes en selle. Ni leur programme de isolée en Europe, après les élections gouvernement, ni les qualités de leur britanniques. La gauche de la CDU, chef de file, un universitaire vieux proche des milieux syndicaux, sou- jeu, Lionel Jospin, ne justifient cette ligne elle, qu’à trop négliger les in- victoire. La révolte des petites gens en térêts des salariés, la CDU risque de France ne sera pas vaine si elle par- perdre les élections de l’automne vient à ébranler l’avenir de l’euro. » 1998. Les sociaux-démocrates En Espagne, où le gouvernement (SPD) devraient sortir renforcés de a misé son avenir sur sa participa- ces deux élections européennes, es- tion au groupe de tête de l’euro, time en général la presse alle- tous interprètent le vote français mande. « L’Allemagne aura plus de comme un coup de frein, sinon à mal qu’auparavant à obtenir l’appli- l’union monétaire, du moins à la fa- cation « pure » du traité de Maas- çon dont elle a été mise en œuvre tricht », selon Hans-Hagen Bremer jusqu’ici. Le journal conservateur de la Frankfurter Rundschau, quoti- ABC explique avec inquiétude que dien libéral de gauche. La perspec- la France vient « d’élire le Parlement tive de la cohabitation pourrait en- le plus hostile qui soit à la conver- fin rendre les contacts entre Bonn gence européenne ». et Paris plus délicats à gérer au quo- Dans le Herald Tribune, quotidien tidien. américain publié à Paris, deux édi- Pour les commentateurs britan- torialistes voient dans la victoire de niques, les résultats des élections la gauche le reflet du conservatisme françaises rappellent le succès de de la société française. Sous le titre Tony Blair, le 1er mai. « La victoire « en avant vers le passé », John Vi- des socialistes français ouvre la voie nocur estime ainsi que « les Fran- à une alliance unique sur le plan eu- çais ont voté contre toutes les mé- ropéen avec le nouveau Labour de thodes nouvelles qui leur étaient Tony Blair », estime The Guardian, proposées pour sortir leur pays du bien que les deux dirigeants se déclin économique et le pousser vers connaissent mal et que le Labour la compétitivité. ». Alan Friedman, passe pour être plus proche des dé- lui, prévoit que la victoire des socia- mocrates américains que des socia- listes en France « contribuera à ac- listes français. croitre la confusion et le conflit poli- « Il semble maintenant impossible tique à propos du projet d’union que l’avènement de l’euro respecte le monétaire ».

À NOS LECTEURS : en raison de l’horaire matinal du bouclage de a cette édition, nous sommes dans l’impossibilité de publier les pré- visions météorologiques. Par ailleurs, ce numéro ne contient pas cer- taines de nos rubriques : Débats, Bourse, Guide culturel et Kiosque.

Tirage du Monde daté lundi 2 juin 1997 : 575 451 exemplaires. 1 2