Avec le soutien du congrès de la Nouvelle-Calédonie.

Le présent article se consacre aux enjeux duction s’initie reste l’une des dernières Science et défis que porte la connaissance de cette énigmes de la tectonique des plaques. géo-diversité sous-marine inédite. Comment une subduction démarre-t-elle? Comment s’initie le plongement d’une Nous distinguerons ainsi des enjeux : plaque sous l’autre ? L’excellente préser- - scientifiques, dans le domaine des géos- vation des enregistrements sédimentaires ciences marines, sur une grande partie du continent Zealan- - économiques, vis-à-vis de ressources dia (dont nous avons évoqué l’existence et Géodiversité minérales potentielles, l’originalité dans l’article du numéro 8 de - environnementaux, vis-à-vis d’une biodi- Tai Kona), le long duquel la zone de sub- versité sous-marine semi-profonde et pro- duction des Tonga Kermadec s’est initiée sous-marine fonde très particulière, très peu connue et il y a environ 50 millions d’années, fait à préserver, qu’en cet endroit du monde il est possible - qui concernent les risques naturels. de déchiffrer les informations nécessaires de la Nouvelle-Calédonie pour quantifier et qualifier les mécanismes ème et processus d’initiation d’une subduction. 2 partie Quels sont donc les enjeux sous- jacents à cette connaissance ? 2 • La terminaison Sud de la zone de sub- duction des Vanuatu, à l’extrémité orien- Nous avons également traité des tech- tale de la ZEE de Nouvelle-Calédonie est Introduction nologies évoluées, mises en œuvre pour Des enjeux scientifiques dans le domaine marquée par la variation de 90° de l’orien- Nous avons présenté, dans un article pré- connaître, observer, mesurer, cartogra- des géosciences marines tation de la fosse et du mouvement de cédent, publié dans le numéro 8 de Tai phier, prélever, analyser ces formations convergence. Au-delà des îlots Matthew et Kona, intitulé : « Géo diversité sous-marine et avons précisé l’existence, en Nouvelle- Les enjeux scientifiques liés à l’étude Hunter la subduction n’existe plus, alors de la Nouvelle-Calédonie » et consacré à Calédonie, d’un groupe de scientifiques sous-marine géologique, géodynamique qu’à peine plus au Nord, ce sont 100 à l’histoire, l’origine et aux spécificités de compétents dans ces domaines et, qui et tectonique du Sud-Ouest Pacifique ne 150 km de la plaque australienne qui dis- cette géo-diversité, toute la variété et l’ori- plus est, très impliqués au niveau régional tiennent pas uniquement au retard de l’ex- paraissent dans le manteau par million ginalité des formations géologiques des et international sur les questions multiples ploration de la région ou à sa très grande d’années ! Comment fonctionne cette tran- fonds marins de la Nouvelle-Calédonie. qui sont posées. dimension, mais aussi et surtout à sa géo- sition ? Est-elle continue ou partitionnée ? diversité, et au fait qu’elle représente, pour Quel type de magmatisme est associé à cet de nombreux processus géologiques, un endroit particulier où une dorsale déchire laboratoire naturel exceptionnel. Plusieurs l’arc volcanique juste au-dessus du pan- thèmes de recherche développés dans le neau plongeant ? Quel est le rôle de la nais- Sud-Ouest Pacifique cherchent à répondre sante collision de la ride des Loyautés dans à des questions scientifiques majeures ; la subduction ? Le magmatisme généré est- nous pouvons en citer quatre principales : il à l’origine d’hydrothermalisme et d’éco- systèmes associés originaux, uniques ? 1 • Comprendre la façon dont une zone de subduction (plaque tectonique qui coule 3 • Le manteau océanique est constitué de sous une autre) fonctionne. Ceci est un roches ultra-denses qui se trouvent à l’état sujet sur lequel de nombreux efforts de d’équilibre à plusieurs kilomètres sous le Illustration simplifiée des grands ensembles recherche sont déployés à travers le monde. fond des océans. En Nouvelle-Calédonie ce de reliefs structurants les fonds marins de l’Espace Maritime de la Nouvelle-Calédonie. © L. Gardes et C. Geoffray / Agence des Aires Marines Protégées. La façon notamment dont une zone de sub- manteau affleure, couvre une importante

24 25 Science Avec le soutien du congrès de la Nouvelle-Calédonie. Des enjeux économiques vées en Nouvelle-Zélande à terre et en relatifs à des ressources mer et que certains bassins de la ZEE pré- minérales potentielles sentent des épaisseurs sédimentaires de plusieurs kilomètres compatibles avec une Les ressources minérales présentes dans génération d’huile et de gaz. le sous-sol des océans (placers, gaz et huile, dépôts sulfurés, nodules, encroû- Ceci étant, compte tenu de la faible tements...) sont généralement associées connaissance et du peu de données dis- à un contexte géologique particulier (bas- ponibles pour évaluer ce potentiel, la zone sin sédimentaire pour les hydrocarbures de recherche de ces hydrocarbures dans la ou plaine abyssale pour les nodules par ZEE s’étend aujourd’hui sur toute la partie exemple). Du fait de sa diversité géolo- appartenant au continent , soit gique, le domaine maritime de la Nou- environ les deux tiers de la superficie de velle-Calédonie présente un potentiel dans la ZEE, ce qui équivaut à la superficie de toutes ces ressources. la France métropolitaine et de l’Allemagne surface de la Grande Terre et forme des On ajoutera à ces enjeux strictement scien- réunies ! reliefs pouvant atteindre plus de 1600 m tifiques ceux qui concernent le développe- Les hydrocarbures (huiles et gaz) ont d’altitude (le Mt Humboldt par exemple). ment et la mise en œuvre d’outils nouveaux besoin de conditions très spécifiques et Le tiers restant de la ZEE, de nature océa- Quels processus géologiques et physiques sur un espace laboratoire de premier plan, difficiles à réunir pour être générés puis nique (au sens géologique du terme, c’est- ont permis à des roches ultra-denses de se et donc d’innovation technologique en piégés dans des couches réservoirs. Cela à-dire, pour schématiser, plutôt basaltique hisser depuis plus de 10 km sous le niveau matière de cartographie sous-marine fine, nécessite notamment la présence de que granitique), n’est pas pour autant de la mer jusqu’à 1,6 km au-dessus ? Com- d’observation profonde, de prélèvement in roches riches en matière organique (dites démuni de potentiel en ressources miné- ment ce matériel si dense se comporte- situ, de représentation 3D et multimédia, « roches mères ») suffisamment enfouies rales. Ce domaine océanique présente des t-il dans une telle situation et comment ou encore de modélisation numérique des sous plusieurs kilomètres de sédiments contextes où peuvent se développer (cf. cherche-t-il à revenir à l’équilibre ? processus en jeu. pour que la matière organique soit réchauf- figures suivantes sur les ressources miné- fée à une centaine de degrés et commence rales profondes) : 4 • Les roches carbonatées observables à expulser des huiles puis du gaz. - des nodules polymétalliques, à des pro- dans la région, que ce soit sous forme de fondeurs supérieures à 4000 m, au niveau constructions récifales ou de sédiments Ces hydrocarbures, du fait de leur contraste des plaines abyssales des bassins d’En- pélagiques, constituent, notamment du fait de densité avec les roches et des gra- trecasteaux, Nord-Loyauté et Sud-Fidjien, de leur présence en continu depuis des mil- dients de pression, ont tendance à migrer - des encroûtements ferro-magnésiens sur lions d’années, des indicateurs très fiables vers la surface. Au cours de leur remontée les substrats durs de profondeur supé- pour l’évolution du climat. L’étude de ces ils peuvent se retrouver piégés par des rieure à 400 m et où les taux de sédimen- formations peut compléter les nombreux structures géologiques « imperméables » tation sont faibles, telles que les pentes efforts qui sont déployés à l’échelle mon- et ainsi s’accumuler dans des roches des nombreux monts sous-marins, diale pour comprendre la « Green House poreuses (dites roches réservoirs) où ils - des dépôts sulfurés dans les zones de Period » durant laquelle le climat s’est peuvent éventuellement former des gise- volcanisme associées à de l’hydrother- drastiquement réchauffé pendant 150.000 ments. malisme telles que suspectées dans la ans à l’Eocène atteignant des températures Ces conditions ont des chances d’être réu- région de Matthew et Hunter. supérieures à celles que nous connaissons nies dans la ZEE de la Nouvelle-Calédonie aujourd’hui. Là encore, le laboratoire natu- puisque la présence de roches mères a Jusque très récemment, du fait notamment rel que représente le Sud-Ouest Pacifique a été reconnue à terre (ex : les charbons de du handicap représenté par son éloigne- tout son intérêt. Moindou), qu’elles sont également obser- ment des centres de consommation et

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Les trois grands types de dépôts métallifères : nodules polymétalliques à gauche, encroûtements en haut à droite et dépôts sulfurés en bas à droite et leur composition principale. © Ifremer.

Pierre Lesage© Des enjeux environnementaux : petite taille vivant dans les sédiments) des profondeurs caractérisant sa ZEE, la et une rare mégafaune : par exemple des Nouvelle-Calédonie est restée à l’écart de De même qu’à chaque contexte géologique oursins et des holothuries étranges ainsi tout projet de prospection à proprement correspond un type particulier de res- que nous en présentons une sur la figure parler de ses ressources profondes - que sources minérales, les différents substrats suivante issue de campagnes dans les ce soit hydrocarbures ou minéralisations du fond de l’océan fournissent une variété plaines abyssales du Pacifique est. profondes. Grâce aux progrès des techno- d’environnements et d’habitats originaux Schéma de synthèse présentant les grands types de faciès et logies offshore et du fait des tensions asso- les gisements associés en matière de ressources minérales pour le développement des écosystèmes ciées aux approvisionnements en matières profondes. © Ifremer. profonds. On pourra distinguer, dans cette premières, l’industrie se tourne à hétérogénéité des environnements aux dif- l’échelle mondiale vers le domaine dit férentes échelles, les grands milieux sui- « deep offshore ». Le Brésil est notam- vants : ment précurseur dans ce domaine avec des découvertes majeures telles - la fosse profonde de Vanuatu, fosse dont que la découverte du champ pétrolier on sait très peu de chose, « Libra » à 4000 m sous le fond de la - les « monotones » plaines abyssales mer qui lui-même se trouve à 2000 m sédimentées des Bassins d’Entrecas- de profondeur. teaux, Ouest Nouvelle-Calédonie, Nord et Champs de nodules des plaines abyssales et exemple de Sud Loyauté, susceptibles de présenter macrofaune associée : holothurie jaune (Psychropotes longi- Dans ce contexte, les ressources des nodules polymétalliques, qui repré- cauda). ©Ifremer-Nautile, Campagne Nodinaut 2004. minérales potentiellement pré- sentent environ 40% de l’espace mari- - les canyons sous-marins des pentes sentes en Nouvelle-Calédonie pour- Les trois grands types de dépôts métallifères : nodules time. Ces plaines profondes, dont on sait externes du récif, rares endroits semi polymétalliques en haut à gauche, encroûtements en haut, raient devenir exploitables et représenter au centre et dépôts sulfurés en haut à droite avec respecti- également très peu de chose, se caracté- profonds où l’on rencontre des substrats un enjeu de développement économique vement en bas à gauche au centre et à droite un champ de risent par une faible biomasse (composée meubles, nodules en plaine abyssale, un encroûtement sur fond dur, pour le territoire. des fumeurs de cheminées hydrothermales. © Ifremer. principalement d’animaux fouisseurs de - les substrats durs des pentes et des ter-

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rasses de la Grande Terre et des Iles, mais aussi des monts sous-marins, nombreux sur les rides (la ZEE abrite 150 reliefs de plus de 1000 m de hauteur, soit 13% de la superficie, dont un quart mesurent plus de 2500 m). Ces substrats sont notamment susceptibles d’héberger des « coraux froids1 » et des gorgones, qui constituent eux même des habitats pour de nombreuses autres espèces. Quelques précisions sur l’originalité de la faune néo-calédonienne de ces fonds durs sont Autres exemples de faune associée aux sources hydrothermales. © Ifremer. A gauche anémones, à droite essaim de crevettes Remi carius et de modioles. (Campagne Serpentine 2007, dorsale médio-Atlantique). apportées ci-après, - les sites d’hydrothermalisme actif, sorte de chantiers chaotiques hérissés de che- Au fur et à mesure de l’exploration des et l’IRD dans le cadre de près d’une qua- minées fumantes, qui seraient potentiel- fonds marins de la ZEE, on peut vérifier que rantaine de campagnes d’explorations lement présents dans les zones de vol- la géo diversité calédonienne s’accom- semi profondes au cours des trente der- canisme autour de Matthew et Hunter et Exemples de faune associée aux sources hydrothermales. pagne d’une diversité des habitats sous- nières années, a notamment permis de © Ifremer . En haut, poulpe (Campagne HERO, dorsale qui pourraient constituer des oasis de vie est Pacifique 1991), ci-contre, vers tubiformes, alvinellidae marins et des écosystèmes associés tout découvrir de très nombreuses espèces pour des organismes spécialisés. et siboglinidae Riftia pachyptila. (Campagne PHARE, aussi exceptionnelle. La diversité bathy- nouvelles pour la science (plus de la moi- dorsale est Pacifique, 2002). métrique et géomorphologique va de pair tié des espèces décrites), ainsi que des avec une grande originalité et une forte représentants actuels de plusieurs lignées diversité de la faune, notamment en rai- d’organismes connues auparavant uni- son du fait que les communautés vivant quement sous forme de fossiles. Une des dans les profondeurs de l’océan sont en originalités des fonds de la ZEE est d’être général très fortement inféodées à des particulièrement riches en substrats durs, gammes bathymétriques particulières. Des à des profondeurs relativement faibles communautés d’espèces peuvent ainsi se (inférieures à -2000 m) et sont caractéri- retrouver sur des monts sous-marins dis- sés par des reliefs variés sur lesquels vit tants de plusieurs centaines de kilomètres, une faune fixée, en particulier des coraux, alors qu’en quelques centaines de mètres des gorgones et des éponges, associée à de différence de profondeur, sur un mont un cortège d’espèces diversifiées. Sur les sous-marin donné, elles peuvent être très monts volcaniques de la Ride de Norfolk, la différentes. Ce phénomène de stratifica- faune est non seulement diversifiée, mais tion par la profondeur s’observe également aussi souvent particulièrement abondante. A gauche et à droite cheminées volcaniques d’un site hydrothermal actif. © Ifremer. (A gauche, Campagne EXOMAR 2005, site Rainbow, à droite campagne SERPENTINE 2007, site Ashadze). communément à l’échelle de la diversité La taille des organismes fixés est parfois génétique chez différentes espèces. spectaculaire et reflète leur longévité. 1 Les coraux d’eau froide sont des Cnidaria, comme les espèces constituant les récifs coralliens des eaux chaudes des tropiques. Ils se déve- loppent dans des eaux sombres et profondes, le plus fréquemment entre -100 et -1200 mètres, mais de nombreuses espèces vivent jusqu’à -2000 m et certaines ont été observées à près de -3000 m. Contrairement aux espèces récifales côtières, qui baignent dans la lumière du soleil, L’exploration biologique des fonds marins Une grande partie de la ZEE reste néan- ils ne sont pas associés à des algues symbiotiques. Les coraux d’eau froide se nourrissent de planctons et d’autres matières organiques en sus- de la ZEE, notamment conduite par le moins faiblement explorée et on peut pension dans l’eau et provenant des couches superficielles de l’océan. On connait très mal leur écologie mais on sait que leur croissance est très lente. Ce sont donc des espèces vulnérables, notamment à l’action des engins de pêches trainants. La ZEE de la Nouvelle-Calédonie est particu- Muséum National d’Histoire Naturelle s’attendre à d’autres découvertes, en par- lièrement riche à la fois en terme de diversité d’espèces (plus de 300 espèces recensées, à comparer aux 400 espèces connues dans les récifs coralliens des eaux chaudes de Nouvelle-Calédonie) et d’habitats favorables à leur développement (trois fois plus que la moyenne mondiale). 30 31 Science Avec le soutien du congrès de la Nouvelle-Calédonie. Des enjeux sur les risques naturels ticulier dans les zones à potentielle activité hydrothermale situées à l’est (Matthew et Un dernier aspect associé à la diversité géo- Hunter), mais aussi sur la ride des Loyautés logique concerne la sécurité des habitants et la ride de Lord Howe, notamment dans la exposés aux aléas naturels. Aux divers zone d’anciens points chauds volcaniques environnements géologiques sont asso- comprise entre le banc Capel et le plateau ciés des particularités pouvant présenter de Chesterfield… des dangers (volcanisme, séismes, glisse- ments de terrain sous-marins, tsunamis…) Bien qu’exceptionnelle à l’échelle de et la géologie calédonienne s’accompagne l’océan mondial (près de 2400 stations tout aussi logiquement que pour la biolo- d’échantillonnage dans la ZEE de Nou- gie ou les ressources, d’une diversité de velle-Calédonie), notre connaissance des situations dont certaines présentent effec- environnements profonds est malheureu- tivement des risques. sement bien moins complète que celle des environnements terrestres ou peu pro- On peut mentionner la sismicité locale fonds. La notion de rareté, voire d’endé- de la Grande Terre notamment dans sa misme, reste délicate à manier dès lors que partie sud, la sismicité proche liée à la l’on constate la structure souvent très frag- subduction du Vanuatu (à l’est de ride mentée des habitats profonds, la capacité Crinoides (Gymnocrinus richeri). © P. Lozouet/MNHN. des Loyauté), la sismicité régionale au de dispersion très variable des espèces niveau des îles Salomon, et aussi l’aléa selon les groupes (par exemple, très forte caractère incomplet et hautement parcel- tsunami associé. Les contraintes de chez de nombreux poissons, souvent très laire de l’échantillonnage du vivant actuel- friction induites par la subduction de faible chez les mollusques), mais aussi le lement disponible. la plaque Australie sous la plaque Paci- fique génèrent quotidiennement des Or l’amélioration de cette connaissance, séismes de magnitudes relativement au plan spécifique et systémique, mais faibles le long de la zone de subduction Crustaçé, glyphéides (Neoglyphea neaocaledonica). aussi de l’écologie, l’adaptation, la rési- © P. Lozouet/MNHN. du Vanuatu qui s’étend des îlots de Mat- lience des écosystèmes concernés sera thew et Hunter au sud jusqu’aux îles Salo- nécessaire pour évaluer correctement les tèmes profonds concernés et la mise en mon au Nord. Lorsque les contraintes accu- impacts d’une exploitation potentielle de place de conditions favorables à un déve- mulées sont trop importantes des séismes ressources sous-marines, les éviter ou les loppement durable des activités extrac- de forte magnitude se déclenchent. Le réduire. tives potentielles. Cela sera notamment réseau sismologique local mis en place par rendu possible grâce aux mises à jour suc- l’IRD permet de détecter les séismes plus L’amélioration de ces connaissances cessives du plan de gestion du parc natu- rapidement que le réseau mondial, et donc constitue ainsi une des huit orientations rel, qui pourra prévoir, lorsque cela s’avè- de prévenir plus rapidement la population stratégiques du Parc Naturel de la Mer de rera nécessaire des mesures de protection en cas de danger. Ce réseau permet éga- Corail, récemment mis en place par le gou- générales (par exemple, l’extension du lement de mettre en évidence des zones vernement à l’échelle de l’Espace Maritime code minier aux activités concernées) ou de sismicité sur la Grande Terre (notam- de la Nouvelle-Calédonie. Cette meilleure spécifiques à certaines zones (par la pro- ment dans sa partie sud) et sur la Ride des connaissance permettra de perfectionner tection des zones les plus riches et les plus Loyauté, liée à la déformation de la plaque Gastéropodes (Perotrochus neocaledonicus) et étoile de mer (non décrite). © P. Lozouet/MNHN. progressivement la protection des écosys- vulnérables). Australie plongeant sous l’arc du Vanuatu.

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Conclusion Bibliographie et pour en savoir plus Derrière l’ensemble des éléments présen- tés dans la première partie de ce dossier en Sites web ce qui concerne l’originalité et la richesse des formations géologiques sous-marines, • http://www.dimenc.gouv.nc/portal/ édité dans le numéro 8 de Tai Kona, puis page/portal/dimenc/geologie/geos- dans la présente partie relative aux enjeux, ciences_marines se profilent des défis pour la Nouvelle- Calédonie. • http://wwz.ifremer.fr/drogm/

Ceux-ci, on l’a vu se posent en termes de • http://wwz.ifremer.fr/drogm/Res- connaissance, de développement écono- sources-minerales mique, de préservation de l’environnement et de gestion de risques naturels. • http://www.ird.fr/toute-l-actualite/ science-en-direct/exbodi/exbodi-juras- Au vu de l’importance des enjeux expo- sic-park-sous-les-mers sés, la Nouvelle-Calédonie ambitionne de Outre les effets destructeurs que les très minutes après le déclenchement d’un conduire une politique équilibrée vis-à- • http://www.aires-marines.fr/Un-parc- forts séismes peuvent avoir en surface, ils séisme de forte magnitude, situé proba- vis de son domaine marin profond, entre naturel-de-la-mer-de-Corail-en-Nouvelle- peuvent aussi générer une onde dans la blement entre Lifou et Tanna, dans la partie préservation de richesses naturelles bio- Caledonie colonne d’eau qui se propage à très grande Sud de la zone de subduction du Vanuatu, logiques, minérales et une exploitation vitesse et déferle sur les zones émergées comme le suggère la modélisation numé- durable de ses ressources, construite • http://www.ird.fr/toute-l-actualite/ les plus exposées. Une étude récente rique pour reproduire cet événement. Une rationnellement dans le temps et l’espace, science-en-direct/exbodi/exbodi-la- basée sur des témoignages a permis de étude sur les paléo-tsunamis, à l’aide de au bénéfice des générations futures. faune-archaique-de-nouvelle-caledonie documenter 18 évènements historiques l’analyse et de la datation des enregistre- en Nouvelle-Calédonie de 1875 à 2009, ments sédimentaires de ces événements Le Parc Naturel de la Mer de Corail, créé dont 12 non répertoriés dans les travaux catastrophiques, appelés « tsunamites », en avril 2014 par le gouvernement, dans la antérieurs. Ces résultats confirment une reste à faire en Nouvelle-Calédonie, continuité du réseau d’espaces protégés exposition à un alea tsunami d’origine (1) Les instabilités gravitaires de la barrière mis en place fin 2012 du côté australien, locale (partie sud de l’arc du Vanuatu) avec récifale ou celles liées à la surcharge sédi- constituera à cet égard un outil structurant des délais post-séisme très courts (< 30 mentaire sur des pentes abruptes repré- et un lieux de débat pour réfléchir, échan- min) avant l’arrivée de trains de vagues, sentent également un aléa pour les popu- ger et construire des politiques à long (2) régionale (arc des îles Salomon, partie lations côtières car elles peuvent aussi terme permettant d’assurer la préserva- nord de l’arc du Vanuatu) avec des délais provoquer dans certains cas des tsuna- tion de ces environnements exceptionnels, de quelques heures, et enfin (3) indiquent mis « locaux » (voir l’article sur les vagues tout en accompagnant le développement une exposition aux télétsunamis (Kam- scélérates publié dans le numéro 7 de Tai raisonné d’activités potentiellement créa- chatka 1952, Sud Chili 1960, Kouriles 2006, Kona). La cartographie de l’IRD des pentes trices de richesses et de bien être pour les Nord Tonga 2009). externes de la Grande-Terre a montré néo-calédoniens. qu’entre deux levés effectués à quelques Le tsunami de 1875 fut le plus meurtrier dizaines d’années d’écart, la morphologie connu en Nouvelle-Calédonie: 25 per- de la barrière de corail pouvait être subs- sonnes ont péri sur la côte Est de Lifou tantiellement modifiée par ce type d’effon- après l’arrivée d’un train de vagues, 20 drements sous-marins.

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