B R U Xel L E S P a Tr Im O In
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Quels bâtiments bruxellois méritent notre atten- tion en raison de leur génie technique ou leurs matériaux innovants ? Quelle est l’importance de l’ingénieur pour l’architecture et qui étaient ses DOSSIER DE CONSTRUIRE L'ART Une publication de la Région DOSSIER prédécesseurs ? de Bruxelles-Capitale L’ART DE CONSTRUIRE Saviez-vous que les cathédrales et les hôtels de ville gothiques étaient déjà renforcés avec du fer N SEPTEMBRE 2012 forgé afi n d’en augmenter la stabilité ? Que les habitations bruxelloises typiques ont été constru- ites pendant des siècles sans l’intervention d’un architecte ? Que la Belgique en sa qualité de na- tion industrielle jeune et moderne était un pré- curseur de l’architecture métallique et verrière au XIXe siècle ? Ou que l’aménagement d’un parc nécessite d’importants travaux de construction ? Ce numéro spécial de Bruxelles Patrimoines est consacré à la thématique des Journées du Pat- rimoine. Au travers de diff érents articles, « l’art BRUXELLESPATRIMOINES de construire » vous sera présenté sous diverses facettes. 20 € NUMÉRO SPÉCIAL JOURNÉES DU PATRIMOINE ISBN : 978-2-930457-84-0 -PB 003-FR-couv def.indd 1 12/08/12 16:54 -PB 003-FR-def.indd 128 12/08/12 23:33 DOSSIER L'ART DE CONSTRUIRE 129 Construire vertical UNE OPTIMISATION ENTRE PLAN ET STRUCTURE GÉRY LELOUTRE Architecte urbaniste, Université libre de Bruxelles MICHEL PROVOST Ingénieur civil des constructions, Université libre de Bruxelles L’immeuble tour a vu son histoire caractérisée l y a peu de types de construction par la recherche d’une relation optimale, presque où mode constructif, conception des espaces et expression archi - mécanique, entre structure, plan et façade, tecturale sont aussi liés que pour Iles immeubles tours. Et si ce lien est si autrement dit entre les disciplines d’ingénierie et fort, c’est avant tout par l’importance d’architecture. Loin des débats passionnés sur que prend la structure dans la concep- l’opportunité de leur construction ou leur impact tion et comment les architectes s’en emparent dans leurs recherches for - sur la ville, cette relation est au centre de l’intérêt melles. Aussi, un rapide aperçu des no- patrimonial qui peut être porté à certaines tours tions structurelles s’impose en guise à Bruxelles. d’introduction. La structure de tous les bâtiments est composée de deux types d’éléments: des plateaux horizontaux et des éléments verticaux qui ramè - nent les charges au sol. Mais pour assu- rer la stabilité des bâtiments, il faut les contreventer, afin de pouvoir reprendre les charges horizontales notamment celles liées à l’action du vent. La spé - cificité structurale des bâtiments éle- vés réside dans les éléments porteurs qui supportent un grand nombre de plateaux et bien entendu dans les élé- ments de contreventement, l’action du Tour de la Prévoyance Sociale, vent sur ces immeubles étant beaucoup rue Royale, Saint-Josse-ten- plus importante. Noode (M. Vanhulst © MRBC). -PB 003-FR-def.indd 12 12/08/12 23:33 130 BRUXELLES PATRIMOINES N°003 – 004 SEPT. 2 012 Les éléments porteurs sont soit des élé- uns aux autres pour former un noyau ments isolés, des colonnes, soit des élé- est ne ement plus efficace, plus raide et ments linéaires, des murs quand ils plus résistant qu’un ensemble de voiles sont en maçonnerie, des voiles quand indépendants. Dans ce noyau, ce tube ils sont en béton armé. Les colonnes vertical, sont logées les circulations qui sont privilégiées dans les immeubles desservent le bâtiment (ascenseurs, es- tours de bureaux afin de libérer au calier, gaines techniques,…). Pour les immeubles de bureaux, ce C’est principalement dans la conception du noyau est la ou l’une des co- contreventement que les structures des tours lonnes vertébrales du bâti- se différencient de celles des immeubles de ment. Il est placé au centre de la tour, là où il est le plus plus faible hauteur. Dans le cas des bâtiments efficace. Les dimensions du à ossature en béton, le contreventement est noyau central nécessaires obtenu par des voiles en béton armé qui se pour résister aux sollicita- développent sur toute la hauteur du bâtiment. tions augmentent propor- tionnellement avec la hau- teur du bâtiment. Dans les maximum les plateaux. Vu le grand tours de grande hauteur le noyau est nombre d’étages, il faut recourir à des donc plus important et les surfaces pé- matériaux performants pour que les riphériques dites nobles se réduisent. À dimensions de ces colonnes soient ac- partir d’une certaine hauteur de tour, ceptables. La possibilité de réaliser des la solution du noyau central n’a plus tours est donc liée à la capacité por - beaucoup de sens et il est préférable tante de ces matériaux. Si les colonnes de considérer que la totalité de la tour de l’Empire State Building avaient été en constitue le noyau. Les façades sont maçonnerie, elles occuperaient au rez- alors des voiles de béton armé ou mé- de-chaussée une surface supérieure à talliques, percés de baies. Ce e solution, celle de l’emprise du bâtiment! À la fin qui était celle utilisée pour les tours du du XIXe siècle, pour les premiers gra e- WTC de New-York, ne concerne pas ciel de Chicago, la seule réponse pos - les tours dans la région bruxelloise qui sible était l’acier. Cette tradition s’est sont de relative petite taille, et contre- maintenue aux États-Unis, tandis qu’en ventées par un noyau central le plus Europe on s’est plutôt tourné vers le bé- souvent en voiles de béton armé. ton armé. Du point de vue de la résis - tance à la compression, l’acier est plus performant que le béton mais il est plus DES MAISONS ÉNORMES vulnérable en cas d’incendie. La résis- tance du béton a fortement augmenté, L’émergence des premières tours dans le ce qui rend aujourd’hui son usage gé - ciel bruxellois de l’entre-deux-guerres néralement possible, même pour les est précisément le fruit de la rencontre immeubles élevés. Pour les colonnes entre une technologie arrivée à maturi- Fig. 1a les plus chargées, celles des étages in - té –l’ossature en béton armé– et un be- Pavillons Français en férieurs, les colonnes sont dites mixtes, soin spécifique du marché immobilier. construction. L’ossature en un profil d’acier enrobé de béton. S’al- Celui-ci se caractérise en effet par le dé- béton est visible. Le premier lient ainsi les performances méca - veloppement de l’immeuble à appar- étage a déjà reçu son remplissage par des murs en niques du premier et la qualité ignifuge tements, lequel remplace progressive- maçonnerie (Bâtir, 28, 15 mars du second. ment, pour la clientèle huppée, l’hôtel 1935, p. 103). C’est principalement dans la concep- particulier, devenu trop onéreux. L’im- tion du contreventement que les struc- meuble à appartements permet en ef- Fig. 1b tures des tours se différencient de celles fet de collectiviser un certain nombre Le chantier des Pavillons des immeubles de plus faible hauteur. de services, comme une conciergerie, Français, aile attenante à Dans le cas des bâtiments à ossature des chambres de bonnes, le chauffage la rue du Noyer. L’ossature en béton, le contreventement est obte- central, etc. L’ossature en béton armé, la est achevée et rendue nu par des voiles en béton armé qui se hauteur et les volumes que celle-ci ren- complètement invisible développent sur toute la hauteur du bâ- dent possibles vont amplifier ce prin- en façade par le travail de timent. Ces voiles sont soit isolés, soit cipe de collectivisation. Un promoteur, remplissage (Bâtir, 28, 15 mars 1935, p. 104). groupés. Un ensemble de voiles liés les Lucien Kaisin, va pousser ce potentiel -PB 003-FR-def.indd 130 12/08/12 23:33 DOSSIER CONSTRUIRE VERTICAL 131 au maximum en mettant sur le mar - ché deux immeubles emblématiques qui restent exceptionnels dans le pay- sage bruxellois: le Résidence Palace, rue de la Loi, signé par Michel Polak et les Pavillons Français, rue du Noyer, par Marcel Peeters. Au confort moderne que peut offrir un immeuble à apparte- ments, il ajoute pour le premier des fa- cilités sportives, une cuisine générale pouvant livrer des repas aux locataires, un restaurant. Le second est équipé d'un parloir au rez-de-chaussée et d’un sub- til système de gaines postales pour la distribution du courrier. Si les ingénieurs peaufinent la tech - nologie structurelle, les architectes s’emploient à empiler au mieux des logements destinés à une clientèle bourgeoise. Le décalage est frappant entre d’une part la modernité et la ra- tionalité de la structure et d’autre part l’expression architecturale très conven- tionnelle pour l’époque. En effet, la fa- çade nie complètement la forme de la structure en ossature de béton. Celle-ci est recouverte d’un mur en maçonnerie, souvent ouvragé, référant à une archi- tecture de murs porteurs, comme c’est le cas pour les Pavillons Français (fig. 1a et 1b), la Résidence de la Cambre, boule- vard Général Jacques, construite par le fils de Lucien Kaisin1 et également des- sinée par Marcel Peeters (fig. 2), ou en- core l’immeuble Insula au square Ver- gote de l’architecte Georges France en 19372. Ce e volonté de continuité avec la tradition contructive de la ville exis- tante se prolonge à l’échelle urbanis - tique. Les ailes du Résidence Palace, qui s’articulent autour d’une place inté- rieure, jouent habilement avec la confi- Fig. 2 guration du quartier, tantôt en inté - rieur d’îlot, tantôt à front de rue. Les La résidence du Bois de La Cambre: les façades Pavillons Français, qui optent pour une 3 latérales et arrière laissent implantation en site propre , au milieu voir l’ossature en béton et son d’un jardin, ne dérogent pourtant pas à remplissage en briques la tradition conventionnelle de l’urba- (A.