THESE

Présentée à

L’UNIVERSITE DE POITIERS ECOLE SUPERIEURE D’INGENIEURS DE POITIERS ECOLE DOCTORALE SCIENCES POUR L’ENVIRONNEMENT GAY LUSSAC

Pour l’obtention du grade de

DOCTEUR DE L’UNIVERSITE DE POITIERS (Diplôme National – Arrêté du 7 août 2006)

SPECIALITE : CHIMIE ET MICROBIOLOGIE DE L’EAU

Par

Nicolas Cimetière Maître ès sciences

Etude de la décomposition de la monochloramine en milieu aqueux et réactivité avec des composés phénoliques

Soutenue le 3 novembre 2009, devant la commission d’examen :

Rapporteurs : M. U. VON GUNTEN (Professeur, EAWAG – Dubendorf) M A. LAPLANCHE (Professeur, ENSCR – Université de Rennes) Examinateurs : M. B. LEGUBE (Professeur, ESIP – Université de Poitiers) Mme S. SOREAU (Ingénieur Chercheur, LNHE – EDF R&D Chatou) Directeurs de thèse : M. J. DE LAAT (Professeur, ESIP – Université de Poitiers) Mme F. BERNE (Maître de conférences, ESIP, Université de Poitiers)

À ma famille et à mes amis

REMERCIEMENTS

Cette étude a été réalisée au Laboratoire de Chimie et de Microbiologie de l’Eau (LCME, CNRS UMR 6008) de l’Ecole Supérieure d’Ingénieurs de Poitiers (Université de Poitiers).

Je souhaite exprimer ma sincère reconnaissance à Monsieur le Professeur Bernard Legube, Directeur du LCME, pour la confiance qu’il m’a accordée en m’accueillant au sein du laboratoire.

Ce travail a été mené sous la direction de Monsieur le Professeur Joseph De Laat que je remercie pour m’avoir fait partager ses compétences, son aide et ses conseils pendant ces trois ans, ainsi que pour sa disponibilité à toutes heures du jour et de la nuit. Je remercie aussi Madame Florence Dossier-Berne, Maître de conférences, co-directrice de cette étude. Qu’elle veuille trouver ici l’expression de ma sincère gratitude pour sa gentillesse, ses précieux conseils et son dévouement. Je vous remercie tous les deux pour l’aide que vous m’avez apportée pour la rédaction de ce rapport, ainsi que pour les réunions et discussions que nous avons pu avoir et qui font que ce travail est ce qu’il est aujourd’hui. J’espère pouvoir continuer à travailler avec vous dans un avenir proche et plus lointain.

Je suis très honoré de la présence de Monsieur Urs von Gunten, Professeur au Department for Water Resources and Drinking Water (EAWAG) de Dübendorf. Je le remercie d’avoir accepté de juger ce travail et d’en être rapporteur.

Je tiens aussi à remercier le Professeur émérite Alain Laplanche du Laboratoire de Chimie des Nuisances et Génie de l’Environnement de Rennes pour avoir accepté d’être rapporteur de cette étude.

Je suis très reconnaissant envers Madame Sylvie Soreau, Ingénieur Chercheur au département LNHE (Laboratoire National d'Hydraulique et Environnement) de Chatou, d’avoir accepté de prendre part à la commission d’examen.

Je souhaite remercier l’ensemble des permanents et personnels du LCME pour l’aide et l’écoute qu’ils ont pu m’accorder. Je remercie en particulier Jean-Philippe Croué et Bernard Parinet avec qui j’ai fait mes premiers pas dans le domaine de la recherche scientifique. Je remercie aussi Hervé Gallard pour l’intérêt qu’il a porté à mon travail, ses remarques et ses conseils avisés.

Je ne saurais terminer sans dire un grand merci à mes collègues que j’ai côtoyés au cours des quatre années passées au laboratoire, pour les bons moments partagés ainsi que pour leur soutien dans les moments difficiles. Merci à toi Paulo, Audrey, Seb, Justine, Babak, Julien, Emilie, Manu, Melissa, Quynh, Leslie, Nasma, Sophie, Thomas, Nicolas, Diab, Clémence, Sahidou, Fabien, Cyril, Bertrand, Cristina… Excusez moi de n’avoir pu tous vous citer ici.

SOMMAIRE

INTRODUCTION GENERALE ...... 1

CHAPITRE I : SYNTHESE BIBLIOGRAPHIQUE

I.1. Formation des chloramines ...... 3 I.1.1. Chimie du chlore dans l’eau ...... 3 I.1.2. Formation et spéciation...... 4 I.1.3. Propriétés oxydantes des chloramines...... 7 I.1.4. Modélisation du break-point...... 7 I.1.5. Dismutation et autodécomposition ...... 10

I.2. Réactivité avec les composés minéraux ...... 12 I.2.1. Influence des ions phosphate...... 12 I.2.2. Influence des ions carbonate...... 13 I.2.3. Influence des ions nitrite...... 13 I.2.4. Influence des ions bromure...... 14 I.2.5. Influence du fer...... 15

I.3. Modélisation cinétique de la décomposition des chloramines ...... 15 I.3.1. Modèle de Valentine...... 15 I.3.2. Modèle de Diyamandoglu...... 17

I.4. Réactivité des chloramines avec les composés organiques modèles...... 18 I.4.1. Réactivité des composés aliphatiques avec le chlore et la monochloramine...... 19 I.4.1.1. Réactivité avec les alcènes...... 19 I.4.1.2. Réactivité avec les composés oxygénés (alcools, aldéhydes, cétones, acides) ...... 19

I.4.2. Réactivité du chlore et de la monochloramine avec les organoazotés...... 22 I.4.2.1. Réactivité avec les amines...... 22 I.4.2.2. Formation de NDMA...... 25 I.4.2.3. Réactivité avec les acides aminés...... 26

I.4.3. Réactivité de la monochloramine avec les hydroxybenzènes, comparaison avec le chlore.28 I.4.3.1. Réaction avec le phénol, le crésol et leurs dérivés chlorés...... 28 I.4.3.2. Réaction avec le résorcinol, mécanisme et sous-produits ...... 29 I.4.3.3. Cinétique de chloration des hydroxybenzènes et de leurs dérivés chlorés...... 32 I.4.3.4. Formation de chloroforme, rendement et cinétique...... 34 I.4.3.5. Formation des acides haloacétiques (HAA) ...... 37 I.4.3.6. Formation d’AOX...... 38

CHAPITRE II : DECOMPOSITION DES CHLORAMINES EN ABSENCE DE COMPOSES ORGANIQUES

II.1. Introduction...... 41

II.2. Matériel et méthodes...... 42 II.2.1. Préparation des solutions...... 42 II.2.2. Dispositif expérimental ...... 42 II.2.3. Analyse et mode de calcul des concentrations ...... 43 II.2.3.1. Concentration en chlore total et en chloramines ...... 43 II.2.3.2. Concentration en ions nitrite et nitrate ...... 45 II.2.3. Détermination des constantes cinétiques et modélisation ...... 45 II.2.3.1. pH acide...... 45 II.2.3.2. pH basique et neutre...... 47 II.2.3.3. Simulation des courbes de décomposition ...... 47

II.3. Etude cinétique de la décomposition des chloramines...... 48 II.3.1. Décomposition en eau ultra-pure ...... 48 II.3.1.1. Influence du pH sur la cinétique de décomposition ...... 48 II.3.1.2. Rôle du pH sur le mécanisme de catalyse d’interconversion...... 52 II.3.1.3. Dégradation de la monochloramine à pH basique...... 55 II.3.2. Décomposition en tampon phosphate...... 59 II.3.2.1. Influence de la concentration ions en phosphate...... 60 II.3.2.2. Influence du pH...... 60 II.3.3. Formation d’ions nitrate ...... 63 II.3.4. Formation d’un composé inconnu...... 65

II.4. Modélisation cinétique de la décomposition des chloramines ...... 68 II.4.1. Modélisation en eau ultra-pure...... 68 II.4.2. Modélisation en tampon phosphate...... 72 II.4.3. Modélisation de la formation d’ions nitrate ...... 72 II.4.4. Modélisation à pH libre...... 73

II.5. Conclusion ...... 74

CHAPITRE III : CHLORAMINATION DE COMPOSES ORGANIQUES MODELES : DEMANDE ET SOUS-PRODUITS

III.1. Introduction ...... 75

III.2. Matériel et méthodes...... 75 III.2.1. Préparation des solutions ...... 75 III.2.2. Dispositif expérimental...... 77 III.2.3. Méthodes analytiques...... 77 III.2.3.1. Dosage du chlore total...... 77 III.2.3.2. Dosage du chloroforme...... 78 III.2.3.3. Dosage des acides haloacétiques...... 78 III.2.3.4. Dosage des composés organohalogénés (AOX) ...... 79

III.3. Réactivité et sous-produits des hydroxybenzènes...... 79 III.3.1. Dégradation de la monochloramine par des composés organiques ...... 79 III.3.2. Calcul de la demande en monochloramine ...... 81 III.3.3. Influence du rapport N/Cl ...... 85 III.3.4. Cas particulier du résorcinol ...... 87 III.3.5. Comparaison de la réactivité des différents hydroxybenzènes ...... 88

III.4. Formation de sous-produits organohalogénés...... 89 III.4.1. Formation de chloroforme ...... 91 III.4.1.1. Formation de chloroforme lors de la chloramination de composés hydroxybenzéniques...... 91 III.4.1.2. Cas particulier du résorcinol ...... 93 III.4.2. Formation d’acides haloacétiques...... 99 III.4.3. Formation d’AOX...... 102

III.5. Chloramination de matières organiques naturelles ...... 104 III.5.1. Demande en monochloramine ...... 104 III.5.2. Formation de chloroforme ...... 106

III.6. Conclusion...... 109

CHAPITRE IV : CHLORAMINATION DU RESORCINOL : MECANISME ET MODELISATION CINETIQUE

IV.1. Introduction ...... 111

IV.2. Matériel et Méthodes...... 112 IV.2.1. Préparation des solutions ...... 112 IV.2.2. Dispositif expérimental...... 112

IV.3. Sous produits de chloration/chloramination du résorcinol ...... 114 IV.3.1. Identification des premiers sous produits ...... 114 IV.3.2. Autres sous-produits ...... 117

IV.4. Influence du rapport N/Cl ...... 120 IV.4.1. Calcul de la concentration en chlore libre à l’état stationnaire...... 121 IV.4.2. Influence du chlore libre sur la vitesse de décomposition du résorcinol...... 123

IV.5. Détermination des constantes cinétiques de réaction...... 125 IV.5.1. Détermination des ordres de réaction ...... 125 IV.5.2. Influence du pH sur la cinétique de chloramination du résorcinol et de ses dérivés...... 128 IV.5.3. Effet de la température sur la cinétique de chloramination du résorcinol ...... 136

IV.6. Modélisation cinétique...... 137 IV.6.1. Stœchiométrie de formation des sous-produits...... 138 IV.6.2. Contribution du chlore libre dans le mécanisme de chloramination du résorcinol ...... 140 IV.6.3. Modélisation cinétique des vitesses de décomposition de R, MCR et DCR ...... 142 IV.6.4. Sites d’attaque de NH 2Cl sur le noyau aromatique : Relation structure-réactivité...... 144

IV.7. Conclusion ...... 146

CONCLUSION GENERALE ...... 149

REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES...... 153

LISTE DES PRINCIPALES ABREVIATIONS ...... 165

INTRODUCTION GENERALE

Introduction

INTRODUCTION

La chloration des eaux est la technique de désinfection la plus employée au monde afin de lutter contre les maladies d’origine hydrique causées par des micro-organismes pathogènes. Cependant, les réactions entre le chlore et les matières organiques naturelles (MON) présentes dans les eaux conduisent à la formation de nombreux sous-produits de désinfection (SPD). Depuis la mise en évidence de trihalométhanes (THM) dans les eaux de distribution chlorées au début des années 1970, plus de 600 SPD ont été identifiés dans les eaux de distribution. Compte tenu des risques pour la santé humaine, les autorités sanitaires ont fixé des concentrations maximales à ne pas dépasser pour certains SPD comme les trihalométhanes. L’évolution de cette réglementation a entraîné des modifications au niveau des filières de traitements comme l’optimisation de l’élimination des MON par coagulation-floculation, le couplage ozonation et filtration sur charbon actif en grains, l’utilisation de procédés membranaires ou le remplacement du chlore par d’autres agents désinfectants et oxydants comme le dioxyde de chlore ou l’ozone. Dans les pays anglo-saxons (Etats-Unis, Canada, Australie…) de nombreuses unités de production d’eau potable ont ainsi adopté une désinfection finale à la monochloramine (NH 2Cl) afin de réduire la formation de SPD dans les réseaux de distribution. En France, la monochloramine n’est pas autorisée pour la désinfection des eaux de distribution mais elle est néanmoins utilisée pour ses propriétés biocides pour d’autres applications comme le traitement des eaux des circuits de refroidissement afin de lutter contre le développement des biofilms. EDF a choisi un traitement à la monochloramine afin de désinfecter les circuits de refroidissement de nombreuses centrales nucléaires.

La monochloramine est formée par réaction du chlore libre et l’azote ammoniacal. La chloration de l’azote ammoniacal conduit aussi à la formation de dichloramine (NHCl 2) et de trichloramine ou trichlorure d’azote (NCl 3). La spéciation de ces espèces dépend principalement du pH et du rapport des concentrations entre l’azote ammoniacal et le chlore (N/Cl). Les réactions entre la monochloramine et la dichloramine conduisent notamment à la formation de diazote et d’ions nitrate. La cinétique de formation de la monochloramine est maximale à pH légèrement basique et la conversion du chlore libre en monochloramine est totale lorsque le rapport N/Cl est supérieur à 1 mole/mole. Dans les unités de traitement des eaux, la monochloramine est formée en utilisant un léger excès d’azote ammoniacal (rapports N/Cl de 1,1 à 1,2 mole/mole) afin d’éviter la formation de dichloramine. Dans l’eau pure, la monochloramine est relativement stable à pH voisin de la neutralité. Elle se décompose néanmoins lentement par un mécanisme faisant intervenir l’acide hypochloreux, présent à l’état de traces par hydrolyse de la monochloramine. En milieu acide, la dismutation de la monochloramine en dichloramine et en ammoniac augmente les vitesses d’autodécomposition de monochloramine. Cette décomposition peut aussi être catalysée par des anions minéraux comme les ions carbonate et phosphate.

La réactivité de la monochloramine avec les matières organiques naturelles a fait l’objet d’un nombre conséquent de travaux. Il est maintenant bien connu que la monochloramine est beaucoup plus stable que le chlore dans les réseaux de distribution et qu’elle conduit à des productions beaucoup moins importantes de SPD. Ces données montrent une faible réactivité de la monochloramine sur les MON. Les données bibliographiques concernant la réactivité de la monochloramine sur des composés organiques simples sont cependant quasi inexistantes alors que les cinétiques et les mécanismes de chloration de composés organiques ont fait l’objet d’un nombre considérable de publications. Dans le cas de la monochloramination, le chlore libre présent dans les solutions de monochloramine pourrait conduire à la formation de SPD et à une diminution de la stabilité de la monochloramine. Cette hypothèse a été évoquée par certains auteurs mais n’a jamais été clairement démontrée.

1 Cette thèse a donc eu pour objectif principal d’étudier la cinétique de réaction de la monochloramine sur des composés phénoliques simples et de préciser le rôle joué par l’équilibre chlore libre / monochloramine sur la réactivité et la stabilité de la monochloramine. Les composés phénoliques ont été choisis comme molécules modèles car les constantes cinétiques de réaction avec le chlore libre sont maintenant assez bien connues et parce que certains composés phénoliques, comme le résorcinol, représentent de très bons précurseurs de chloroforme lors de la chloration.

Ce mémoire comporte 4 chapitres. Le premier chapitre présente une synthèse bibliographique assez succincte et essentiellement axée sur la chimie du chlore en milieu aqueux, les réactions de formation et de décomposition des chloramines lors des réactions d’oxydation de l’azote ammoniacal par le chlore. Les réactions entre le chlore et/ou la monochloramine avec les grandes classes de composés organiques sont ensuite abordées.

L’étude cinétique de la consommation de NH 2Cl par des composés organiques modèles nécessite de bien maîtriser la vitesse d’autodécomposition de NH2Cl dans l’eau car celle-ci peut ne pas être négligeable par rapport aux vitesses de consommation par les composés organiques. Dans le deuxième chapitre, nous présenterons donc les résultats obtenus pour l’étude de l’influence de certains paramètres (pH, concentration en ions phosphate, …) sur la vitesse de décomposition de la monochloramine ainsi que sur la formation de quelques sous-produits de réaction. Les modèles cinétiques proposés dans la littérature seront testés au cours de cette étude afin de vérifier leur validité ou éventuellement de proposer un jeu de constantes cinétiques décrivant mieux les courbes expérimentales. Ces résultats permettront aussi de définir les conditions expérimentales à mettre en œuvre afin de limiter (ou de connaître avec précision) l’autodécomposition de la monochloramine lors de l’étude de sa réactivité avec les composés organiques.

Dans le troisièmes chapitre, nous avons étudié la réactivité de la monochloramine vis-à-vis de six composés hydroxybenzéniques (phénol, catéchol, résorcinol, hydroquinone, pyrogallol et phloroglucinol) afin de déterminer à différents temps de réaction les demandes en monochloramine et la formation de certains sous-produits organochlorés (chloroforme, acides chloroacétiques, composés organohalogénés adsorbables sur charbon actif (AOX)). Nous nous intéresserons plus particulièrement à l’influence du rapport N/Cl sur la monochloramination des composés phénoliques afin de mettre en évidence la contribution du chlore libre dans les réactions d’oxydation des composés organiques. Quelques expériences ont aussi été réalisées avec des extraits de MON disponibles au Laboratoire de Chimie et Microbiologie de l’Eau et avec une eau naturelle.

Enfin, le dernier chapitre de ce mémoire présentera une étude cinétique détaillée de la monochloramination du résorcinol en vue de déterminer des constantes cinétiques apparentes et absolues de réaction de la monochloramine sur le résorcinol et sur ses premiers sous-produits (le 4- chlororésorcinol et le 4,6-dichlororésorcinol). Une modélisation des vitesses de monochloramination a ensuite été entreprise à l’aide d’un modèle cinétique prenant en compte les réactions d’autodécomposition de la monochloramine ainsi que les réactions de la monochloramine et du chlore libre sur le résorcinol. Cette approche permet de mieux préciser l’influence de certains paramètres sur les vitesses globales de réaction et de déterminer les contributions de la monochloramine et du chlore libre à la décomposition du résorcinol. L’influence de ces paramètres et en particulier du rapport N/Cl sur la production de chloroforme sera aussi examinée.

2

CHAPITRE I : SYNTHESE BIBLIOGRAPHIQUE

CHAPITRE I : SYNTHESE BIBLIOGRAPHIQUE

I.1. Formation des chloramines ...... 3 I.1.1. Chimie du chlore dans l’eau ...... 3 I.1.2. Formation et spéciation...... 4 I.1.3. Propriétés oxydantes des chloramines...... 7 I.1.4. Modélisation du break-point...... 7 I.1.5. Dismutation et autodécomposition ...... 10

I.2. Réactivité avec les composés minéraux ...... 12 I.2.1. Influence des ions phosphate...... 12 I.2.2. Influence des ions carbonate...... 13 I.2.3. Influence des ions nitrite...... 13 I.2.4. Influence des ions bromure...... 14 I.2.5. Influence du fer...... 15

I.3. Modélisation cinétique de la décomposition des chloramines ...... 15 I.3.1. Modèle de Valentine...... 15 I.3.2. Modèle de Diyamandoglu...... 17

I.4. Réactivité des chloramines avec les composés organiques modèles...... 18 I.4.1. Réactivité des composés aliphatiques avec le chlore et la monochloramine...... 19 I.4.1.1. Réactivité avec les alcènes...... 19 I.4.1.2. Réactivité avec les composés oxygénés (alcools, aldéhydes, cétones, acides) ...... 19

I.4.2. Réactivité du chlore et de la monochloramine avec les organoazotés...... 22 I.4.2.1. Réactivité avec les amines...... 22 I.4.2.2. Formation de NDMA...... 25 I.4.2.3. Réactivité avec les acides aminés...... 26

I.4.3. Réactivité de la monochloramine avec les hydroxybenzènes, comparaison avec le chlore.28 I.4.3.1. Réaction avec le phénol, le crésol et leurs dérivés chlorés...... 28 I.4.3.2. Réaction avec le résorcinol, mécanisme et sous-produits ...... 29 I.4.3.3. Cinétique de chloration des hydroxybenzènes et de leurs dérivés chlorés...... 32 I.4.3.4. Formation de chloroforme, rendement et cinétique...... 34 I.4.3.5. Formation des acides haloacétiques (HAA) ...... 37 I.4.3.6. Formation d’AOX...... 38

Chapitre I : Synthèse bibliographique

CHAPITRE I : SYNTHESE BIBLIOGRAPHIQUE

I.1. Formation des chloramines

I.1.1. Chimie du chlore dans l’eau Le chlore est oxydant fort, largement employé pour la désinfection des eaux potables. Le chlore gazeux (Cl 2) est un gaz jaune-vert soluble dans l’eau qui s’hydrolyse presque instantanément dans l’eau pour former l’acide hypochloreux (HOCl) selon l’équilibre 1.1.

Dismutation du chlore : + - -4 -4 2 Cl 2 + H 2O  HOCl + H + Cl K1.1 = 1,46.10 à 6,05.10 M de 0 à 45°C (1.1)

La constante d’hydrolyse varie de manière significative avec la température. Le tableau I.1 présente quelques constantes K 1 à différentes températures obtenues par Connick et Chia (1959). Le chlore - peut former l’ion trichlorure (Cl 3 ) par réaction avec les ions chlorure selon l’équilibre 1.2 (Sherrill et Izard, 1931 ; Zimmerman et Strong, 1957).

Formation de l’ion trichlorure : - - -1 Cl 2 + Cl  Cl 3 K1.2 = 1,91.10 M à 25°C (Zimmerman and Strong, 1957) (1.2)

L’acide hypochloreux est un acide faible en équilibre avec l’ion hypochlorite ClO - selon l’équilibre 1.3. Le tableau I.1 présente les constantes obtenues par Morris (1966) à différentes températures :

Dissociation de l’acide hypochloreux : - + -8 -8 HOCl  ClO + H K1.3 = 1,5.10 à 3,4.10 M (0 à 40°C) (1.3)

- - L’ensemble de ces espèces (Cl 2, Cl 3 , HOCl, ClO ) est communément appelé chlore libre par opposition au chlore combiné, le chlore total est la somme du chlore libre et du chlore combiné.

On peut néanmoins citer les formes minoritaires du libre tel que l’hémioxyde de chlore (Cl 2O) + + formé à partir de l’acide hypochloreux, ainsi que les entités électrophiles Cl et H 2ClO , intermédiaires réactionnels dans les réactions d’halogénations (Doré, 1989). La figure I.1 présente le diagramme de spéciation simplifié du chlore en milieu aqueux et résume les différentes réactions possibles dans l’eau pure.

3 100

- Cl 2 HOCl ClO 80 - + Cl3 H2ClO Cl2O + H2O

60 Cl- H+ HOCl

Cl + H O + - % % HOCl 40 2 2 HOCl + H + Cl

25°C 0°C OH- 20 + - - Cl ,Cl ClO + H2O

0 1 2 3 4 56 7 8 910 pH Figure I.1. Les différentes formes du chlore dans l’eau pure figure I.1.

I.1.2. Formation et spéciation L’ammoniaque est une base faible pouvant être retrouvée dans les eaux de surface, les eaux souterraines (Fenelon et Moore, 1998) ainsi que dans les eaux usées (Doré, 1989). L’ammoniaque + est en équilibre entre sa forme moléculaire (NH 3) et ionique (ion ammonium NH 4 ) selon l’équilibre 1.4. Les constantes de dissociation à différentes températures, déterminées par Bates et Pinching (1950), sont présentées dans le tableau I.1. Des valeurs similaires sont observées par Thurston et al. (1981). Figure I.1 Dissociation de l’ammoniaque : + + NH 4  NH 3 + H K1.4 : voir tableau I.1 (Bates et Pinching, 1950) (1.4)

Tableau I.1. Constantes d’hydrolyse et de dissociation du chlore et de l’ammoniaque à différentes températures tableau I.1. 2 Température K1.1 (M ) ; [pKa 1.1 ] K1.3 (M) ; [pKa 1.3 ] K1.4 (M); [pKa 1.4 ] (°C) Connick et Chia, 1959 Morris, 1966 Bates et Pinching, 1950 0 1,46.10 -4 ; [3,84] 1,50.10 -8 ; [7,82] 8,32.10 -11 ; [10,08] 15 2,81.10 -4 ; [3,55] 2,33.10 -8 ; [7,63] 2,73.10 -10 ; [9,56] 20 3,37.10 -4 ; [3,47] 2,62.10 -8 ; [7,58] 3,92.10 -10 ; [9,40] 25 3,94.10 -4 ; [3,40] 2,90.10 -8 ; [7,54] 5,75.10 -10 ; [9,24] 35 5,10.10 -4 ; [3,29] 3,18.10 -8 ; [7,50] 1,12.10 -9 ; [8,95]

L’addition de chlore à ce composé conduit à la formation de monochloramine (NH 2Cl) selon la réaction (1.5).

Formation de la monochloramine : NH 3 + HOCl  NH 2Cl + H 2O k1.5 (voir tableau I.2) (1.5)

L’oxydation de l’ammoniaque par le chlore est une réaction très rapide dans laquelle les espèces actives sont les formes moléculaires NH 3 et HOCl (Weil et Morris, 1949b ; Qiang et Adams, 2004). En présence d’un excès de chlore, la monochloramine est attaquée par l’acide hypochloreux pour 4 Chapitre I : Synthèse bibliographique

former la dichloramine (NH 2Cl) puis la trichloramine (NCl 3). L’ensemble des chloramines (NH 2Cl, NHCl 2, NCl 3) est communément appelé chlore combiné.

Formation de la dichloramine et de la trichloramine : NH 2Cl + HOCl  NHCl 2 + H2O k1.6 (voir tableau I.2) (1.6) NHCl 2 + HOCl  NCl 3 + H2O k1.7 (voir tableau I.2) (1.7)

L’hydrolyse des chloramines conduit à la reformation de chlore libre dans le cas de la monochloramine (réaction 1.8), à la production de monochloramine et dichloramine par hydrolyse respective de la dichloramine et de la trichloramine (réactions 1.9-1.10). Les constantes cinétiques d’hydrolyse des chloramines sont extrêmement faibles par rapport aux constantes cinétiques de formation (réactions 1.5-1.7).

Hydrolyse des chloramines : NH 2Cl + H 2O  NH 3 + HOCl k1.8 (voir tableau I.2) (1.8) NHCl 2 + H 2O  NH 2Cl + HOCl k1.9 (voir tableau I.2) (1.9) NCl 3 + H 2O  NHCl 2 + HOCl k1.10 (voir tableau I.2) (1.10)

Les concentrations en azote total et en chlore total sont des données importantes à prendre en compte dans le calcul de spéciation des chloramines. Le paramètre N/Cl (équation 1.11) est défini comme le rapport molaire entre les concentrations en espèces azotées et le chlore total :

[N] [NH Cl] + [NHCl ] + [NCl ] + [NH ] + [NH + ] N/Cl = tot = 2 2 3 3 4 (1.11) [Cl ] [NH Cl] + 2 [NHCl ] + 3 [NCl ] + [HOCl] + [ClO − ] 2 tot 2 2 3

Le tableau I.2 résume les constantes de formation et d’hydrolyse des chloramines à 25°C.

Tableau I.2. Constantes de formation et d’hydrolyse des chloramines à 25°C tableau I.2. Réaction Constante cinétique Référence 10 -1 -1 (1.5) NH 3 + HOCl  NH 2Cl + H 2O k1.5 = 2,22.10 M .h Weil et Morris, 1949b 1,5 x 10 10 M -1.h -1 Morris et Isaac, 1981 6 -1 -1 (1.6) NH 2Cl + HOCl  NHCl 2 + H 2O k1.6 = 1,0 x 10 M .h Margerum et al., 1978 3 -1 -1 (1.7) NHCl 2 + HOCl  NCl 3 + H 2O k1.7 = 7,56 x 10 M .h Morris et Isaac, 1981 -2 -1 (1.8) NH 2Cl + H 2O  NH 3 + HOCl k1.8 = 7,6 x 10 h Morris et Isaac, 1981 -3 -1 (1.9) NHCl 2 + H 2O  NH 2Cl + HOCl k1.9 = 2,74 x 10 h Margerum et al., 1978 -1 (1.10) NCl 3 + H 2O  NHCl 2 + HOCl k1.10 = 0, 16 h Morris et Isaac, 1981

Le rapport N/Cl n’est pas le seul paramètre qui influe sur la répartition des différentes formes des chloramines. En effet, les réactions de dismutation de la monochloramine et de la dichloramine sont fonction du pH. La dichloramine peut être formée par chloration d’un excès d’ammoniaque à pH = 4,4-8,5 avec un maximum de formation vers pH = 4,5-5,0 (Chapin, 1929). Il en est de même pour la trichloramine à des pH plus faibles. Les réactions 1.12 et 1.13 présentent les équilibres de dismutation. Le travail de Soulard et al. (1984) s’est intéressé uniquement aux constantes thermodynamiques de ces équilibres.

Dismutation des chloramines : + + 6 -1 2 NH 2Cl + H  NH 4 + NHCl 2 K1.12 = 5,2.10 M à 25°C (Soulard et al., 1984) (1.12) + + 4 -1 3 NH 2Cl + H  2 NCl 3 + NH 4 K1.13 = 1,7.10 M (Soulard et al., 1984) (1.13)

5 Il s’avère que la dismutation de la monochloramine est une réaction complexe catalysée en milieu acide et que de nombreuses espèces inorganiques peuvent influencer la cinétique de cette réaction. Cet aspect sera abordé en détail dans la partie consacrée à la stabilité des chloramines. Figure I.2 Les différentes réactions et équilibres (1.12-1.13) permettent de représenter la distribution des différentes espèces du chlore total en fonction du rapport molaire N/Cl (figure I.2). Il apparaît nettement que, pour N/Cl > 1, la quasi totalité du chlore total est représentée par les chloramines (chlore combiné). De plus la figure I.3, illustrant la spéciation des chloramines en fonction du pH, montre que pour des pH > 7,2 la majorité des chloramines est sous la forme de monochloramine.

100 NH 2Cl

75

ClO - 50 HOCl Teneur Teneur (%) 25 NHClNHCl2 NCl 3

0 2 1 0 -1 -2 log (N/Cl)

Figure I.2. Distribution des espèces du chlore total en fonction du Rapport molaire N/Cl. (Soulard et al., 1984). -4 - -3 [Cl 2]0 = 1.10 M ; [Cl ] = 1.10 M ; pH = 7,5 ; 25°C figure I.2. 100 NH 2Cl

75

NHCl 2 50

NCl 3 Teneur Teneur (%) 25

0 2 3 4 5 6 7 8 pH

Figure I.3. Distribution des chloramines en fonction du pH. D’après -3 les équilibres 1.12-1.13. [Cl 2]tot = 1.10 M ; N/Cl = 1 ; 25°C figure I.3.

6 Chapitre I : Synthèse bibliographique

I.1.3. Propriétés oxydantes des chloramines Les chloramines sont des oxydants puissants dont les potentiels élevés leur permettent d’oxyder les ions iodure, ce qui présente un intérêt analytique notable sur lequel nous reviendrons dans le chapitre 2.

Le tableau I.3 présente les potentiels standard d’oxydo-réduction impliquant le chlore, les chloramines ainsi que certaines espèces ayant un intérêt analytique.

Tableau I.3. Potentiels standard d’oxydo-réduction tableau I.3. Réactions E° /V (ESH) Référence - + - + NH 2Cl + 2 e + 2 H  Cl + NH 4 1,527 Soulard et al., 1984 - + - + NHCl 2 + 4 e + 3 H  2 Cl + NH 4 1,428 Soulard et al., 1984 - + - + NCl 3 + 6 e + 4 H  3 Cl + NH 4 1,407 Soulard et al., 1984 - - Cl 2 + 2 e  2 Cl 1,395 Soulard et al., 1984 - + - HOCl + 2 e + H  Cl + H 2O 1,494 Soulard et al., 1984 - + HOCl + e + H  ½ Cl 2 + H 2O 1,620 Soulard et al., 1984 - - - - ClO + 2 e + H 2O  Cl + 2 OH 0,888 Soulard et al., 1984 - - I2 + 2 e  2 I 0,536 Bichsel, 2000 HOI + 2 e-  I - + OH - 0,987 Bichsel, 2000 2- - 2- S4O6 + 2 e  2 S 2O3 0,09 Handbook of Chemistry and 2- - + 2- - SO 4 + 2 e + H  SO 3 + OH -0,92 Physics, 1980-1981

I.1.4. Modélisation du break-point Lors de la chloration d’eau contenant de l’azote ammoniacal, on assiste tout d’abord à une augmentation du chlore total, sous forme de chlore combiné uniquement. Cette étape correspond à la formation de monochloramine (réaction 1.5) pour des rapports molaires N/Cl > 1. Pour des rapports molaires compris entre 1 et 0,7 on observe une diminution du chlore total jusqu’au break- point (N/Cl = 0,66) où le chlore total est nul. Pour des rapports plus élevés, on assiste à une ré- augmentation du chlore total sous forme de chlore libre. La figure I.4 présente de manière schématique l’évolution du chlore total et du chlore combiné lors de la chloration à différents taux, d’une eau contenant de l’azote ammoniacal. Cette figure est plus connue sous le nom de courbe du break-point (ou courbe du point de rupture).

6 chlore total = chlore total =

) chlore combiné chlore libre -1 .L 2 4 NH 2Cl HOCl / ClO -

2

NHCl 2 NCl 3 Chlore Chlore total (mg Cl 0 0 2 4 6 8 10 12 14 16 -1 Dose de chlore ajoutée (mg Cl 2.L )

+ -1 Figure I.4. Courbe du point de rupture pour [NH 4 ]0 = 1 mg N.L figure I.4.

7 Chapin (1929) est le premier chercheur à étudier ces réactions ; il observe que le break-point est obtenu à pH = 5 pour un rapport molaire N/Cl = 0,66 et propose la réaction globale suivante :

3 Cl 2 + 2 NH 3  N 2 + 6 HCl (1.14)

Plus tard, Palin (1950) propose plusieurs réactions conduisant à la diminution de la concentration en chlore total. Trois réactions globales mettant en jeu la monochloramine et la dichloramine (réactions 1.15-1.17) sont ainsi suggérées. Ce même auteur observe aussi la formation de traces de trichloramine.

2 NH 2Cl + HOCl  N 2 + 3 HCl + H 2O (1.15) 2 NHCl 2 + H 2O  N 2 + HOCl + 3 HCl (1.16) NHCl 2 + NH 2Cl  N 2 + 3 HCl (1.17)

Cependant ces réactions (1.15-1.17) ne permettent pas d’expliquer la formation d’ion nitrate. Ainsi, Palin (1950) résume les réactions du breakpoint selon deux réactions globales, la réaction 1.18, majoritaire, expliquant la diminution de la concentration en chlore total et la réaction 1.19, la formation d’ions nitrate. La contribution de ces deux voies de dégradation du chlore dépend entre autre du rapport N/Cl.

3 HOCl + 2 NH 3  N 2 + 3 H 2O + 3 HCl (1.18) - + - NH 3 + 4 HOCl  NO 3 + H 2O + 5 H + 4 Cl (1.19)

Une description plus détaillée apparaît avec les travaux de Wei (1972) qui propose un modèle cinétique du break-point conduisant à la formation d’azote gazeux et de nitrate comme sous- produits finaux. Ce modèle fait intervenir NOH (réaction 1.20) comme intermédiaire réactionnel - lors de la formation de N 2 (réactions 1.21-1.22) et de NO 3 (réaction 1.23). Le tableau I.4 présente les différentes réactions intervenant dans ce modèle.

+ - NHCl 2 + H 2O  NOH + 2 H + 2 Cl (1.20) + - NOH + NH 2Cl  N 2 + H 2O + H + Cl (1.21) + - NOH + NHCl 2  N 2 + HOCl + H + Cl (1.22) - + - NOH + 2 HOCl  NO 3 + 3 H + 2 Cl (1.23)

Ces travaux sont revus par Saunier (1976) et Saunier et Selleck (1979) à l’échelle pilote. Le modèle ainsi proposé présente des constantes confirmées par de nouvelles expériences, quelques réactions intermédiaires sont aussi rajoutées au modèle existant. Ces auteurs décomposent ainsi la réaction 1.23 proposée par Wei et Morris (1974) en deux étapes :

- + - NOH + HOCl  NO 2 + 2 H + Cl (1.23a) - - + - 5 (-26987/RT) -1 -1 NO 2 + HOCl  NO 3 + H + Cl k1.23b =3,82.10 e M .s (Lister et Rosenblum, 1961) (1.23b)

La réaction de formation de l’intermédiaire NOH est elle aussi revue par Saunier et Selleck (1979). Ils proposent l’intervention de l’hydroxylamine comme premier intermédiaire. Cependant les constantes introduites (1.20a-1.20c) ne peuvent être déterminées expérimentalement. La figure I.5 présente le schéma réactionnel proposé par ces auteurs.

8 Chapitre I : Synthèse bibliographique

Tableau I.4. Modélisation du Break-point tableau I.4. Réaction Wei et Morris (1974) Saunier et Selleck (1979) (Temps en secondes) (Temps en secondes) = 8 (-12552/RT ) = 8 (-12552/RT ) 1.5 HOCl + NH 3  NH 2Cl + H 2O k 5.1 10.7,9 e k 5.1 10.7,9 e = 4 (-10042/RT ) = 4 (-10042/RT ) 1.6 HOCl + NH 2Cl  NHCl 2 + H 2O k 6.1 43,2 10. e k 6.1 99,1 10. e = 10 (-15900/RT ) = 5 (-29288/RT ) 1.7 HOCl + NHCl 2  NCl 3 + H 2O k 7.1 75,8 10. e k 7.1 43,3 10. e = 10 (-54392/RT ) = 8 (-75312/RT ) 1.10 NCl 3 + H 2O  NHCl 2 + HOCl k 10.1 32,6 10. e k 10.1 56,8 10. e + - = 10 (-30125/RT ) = 14 (-30125/RT ) 1.20 NHCl 2 + H 2O  NOH + 2 H + 2 Cl k 20.1 11,2 10. e k 20.1 03,2 10. e + - = 7 (-25104/RT ) = 8 (-25104/RT ) 1.21 NOH + NH 2Cl  N 2 + H 2O + H + Cl k 21.1 53,5 10. e k 21.1 00,1 10. e + - = 7 (-25104/RT ) = 9 (-25104/RT ) 1.22 NOH + NHCl 2  N 2 + HOCl + H + Cl k 22.1 02,6 10. e k 22.1 30,1 10. e - + - = 7 (-25104/RT ) = 7 (-25104/RT ) 1.23 NOH + 2 HOCl  NO 3 + 3 H + 2 Cl k 23.1 18,7 10. e k 23.1 00,1 10. e Avec R = 8,314 J.mol -1.K -1 et T (K)

k20c ClO- OH-

K3

HOCl k6 k 20a + NH3 NH2Cl NHCl2 NH2OH NH3 OH k5 HOCl K H2O HOCl 4 HOCl k10 k7 + k20b NH4 NCl3

- HOCl NO2 NOH k23a HOCl NHCl2 NH2Cl k 23b k22 k21

- N N NO3 2 2 Figure I.5. Mécanisme de chloration de l’ammoniaque proposé par Saunier et Selleck (1979) figure I.5.

9 I.1.5. Dismutation et autodécomposition La monochloramine est un oxydant relativement instable dans les eaux. En effet, même en absence de tout réactif, la monochloramine se décompose. Cette dégradation implique de nombreuses réactions, et de nombreux paramètres influent sur cette décomposition (pH, force ionique, température…). Cette décomposition peut en outre aboutir à la formation d'acide hypochloreux par hydrolyse de la monochloramine (Morris et Isaac, 1981).

Les premiers modèles cinétiques proposés pour simuler la vitesse de décomposition de la monochloramine font intervenir des réactions mettant en jeu la dichloramine. On distingue ainsi les réactions d'hydrolyse de la dichloramine pouvant conduire à la reformation de monochloramine. Ces réactions montrent l'importance des concentrations initiales en azote ammoniacal et en chlore sur la décomposition de la monochloramine puisque le chlore libre, libéré par hydrolyse de la monochloramine, ainsi que la dichloramine peuvent réagir avec l'azote ammoniacal pour reformer la monochloramine.

6 -1 -1 HOCl + NH 3  NH 2Cl + H 2O k1.5 = 4,2.10 M .s (25°C) Morris et Isaac, 1981 (1.5) -5 -1 NH 2Cl + H 2O  HOCl + NH 3 k1.8 = 2,1.10 s (25°C) Morris et Isaac, 1981 (1.8) 2 -1 -1 NH 2Cl + HOCl  NHCl 2 + H 2O k1.6 = 3,5.10 M .s (25°C) Morris et Isaac, 1981 (1.6) -7 -1 NHCl 2 + H 2O  NH 2Cl + HOCl k1.9 = 7,6.10 s (25°C) Weil et Morris, 1949a (1.9)

La formation de l’ion nitrate et de diazote, observée lors de la décomposition de la monochloramine, serait liée à la production d'intermédiaires NOH ou NH 2OH (réaction 1.24) (Saunier, 1976 ; cité par Strenstorm et Tran, 1984). Plus récemment, Diyamandoglu (1994) propose un modèle cinétique prenant en compte ces intermédiaires dans la dégradation de la monochloramine. Il montre que la monochloramine peut s'hydrolyser lentement selon la réaction globale suivante :

NH 2Cl + NH 2Cl + H 2O  NOH + NH 3 + 2 HCl (1.24)

Ce même auteur propose que la formation de diazote, d'acides nitreux et nitrique provienne des réactions suivantes :

1 -1 -1 NHCl 2 + H 2O  NH(OH)Cl + HCl k1.25 = 7,0.10 M .h Diyamandoglu, 1994 (1.25) -4 -1 NH(OH)Cl  NOH + HCl k1.26 = 5,0.10 h Diyamandoglu, 1994 (1.26) 3 -1 -1 NOH + NHCl 2  N 2 + HOCl + HCl k1.22 = 6,0.10 M .h Diyamandoglu, 1994 (1.22) 11 -1 -1 NOH + HOCl  HNO 2 + HCl k1.23a = 1,0.10 M .h Diyamandoglu, 1994 (1.23a) 12 -1 -1 HNO 2 + HOCl  HNO 3 + HCl k1.23b = 9,8.10 M .h Diyamandoglu, 1994 (1.23b)

Une autre voie de dégradation de la monochloramine est liée à son interconversion en dichloramine (réaction 1.27). Les premières observations faites par Granstorm (1954) montrent que cette réaction est catalysée à pH acide et par la présence de certains ions inorganiques. Par ailleurs cette réaction globale résulterait de deux voies différentes, une voie directe et une voie faisant intervenir l’hydrolyse de la monochloramine.

-1 -1 2 NH 2Cl  NHCl 2 + NH 3 k1.27 = 0,056 M .s (25°C) (1.27)

Plus tard, Gray et al. (1978) expliquent l’effet du pH sur la formation de la dichloramine en proposant la formation de l’ion chloroammonium (réaction 1.28) et la réaction entre l’ion chloroammonium et la monochloramine (réaction 1.29).

+ + -2 NH 3Cl  NH 2Cl + H K1.28 = 3,57.10 M (1.28)

10 Chapitre I : Synthèse bibliographique

+ + 6 -1 -1 NH 2Cl + NH 3Cl  NHCl 2 + NH 4 k1.29 = 3,5.10 M .h (1.29)

Gray et al. (1978) suggèrent que l’ion chloroammonium pourrait également être formé par la réaction entre l’ion ammonium et la dichloramine (réaction 1.30) :

+ + -1 -1 NH 4 + NHCl 2  NH 3Cl + NH 2Cl k1.30 = 23,0 M .h (1.30)

La dégradation de la monochloramine peut aussi résulter de réactions entre les différentes formes de chloramines (réactions 1.31-1.33) ainsi qu’entre la dichloramine et l’acide hypochloreux (réaction 1.34) :

-1 -1 NH 2Cl + NHCl 2  P k1.31 = 55,0 M .h 2 v1.31 = k 1.31 [NH 2Cl] (Hand et Margerum, 1983) (1.31) 14 -2 -1 NHCl 2 + NCl 3 + 2 H2O  2 HOCl + P k1.32 = 2,0.10 M .h - v1.32 = k 1.32 [NHCl 2][NCl 3][OH ] (Jafvert et Valentine, 1992) (1.32) 12 -2 -1 NH 2Cl + NCl 3 + H 2O  HOCl + P k1.33 = 5,0.10 M .h - v1.33 = k 1.33 [NH 2Cl][NCl 3][OH ] (Jafvert et Valentine, 1992) (1.33) - + - 5 -1 -1 NHCl 2 + 2 HOCl + H 2O  NO 3 + 5 H + 4 Cl k1.34 = 8,3.10 M .h - v1.34 = k 1.34 [NHCl 2][ClO ] (Jafvert et Valentine, 1992) (1.34) P = produits divers

La réaction 1.34, proposée par Jafvert et Valentine, correspond à la combinaison des réactions 1.20 et 1.23 proposées par Wei et Morris (1974). La stœchiométrie globale de la dégradation des chloramines peut être décrite par les réactions 1.35 et 1.36 :

- + 3 NH 2Cl  N 2 + NH 3 + 3 Cl + 3 H (1.35) - - + 4 NH 2Cl + 3 H2O  4 Cl + 3 NH 3 + NO 3 + 5 H (1.36)

Sur la base de ces réactions, Jafvert et Valentine (1992) proposent un schéma réactionnel global rendant compte de la décomposition de la monochloramine (figure I.6).

+ + + NHCl2 + H2O produits NH4 NH3Cl + NH2Cl produits

+ + H H + OH- I + + + NH2Cl produits NH3 + HOCl NH2Cl + H2O

acide + NH Cl NHCl + NH H+ 2 2 3 + + HOCl NHCl2 + H2O ClO-

base - + - + 2 HOCl + 2 H2O NO3 + 5 H + 4 Cl + HOCl H2O + NCl3 base

+ NH2Cl + H2O HOCl + produits + NHCl2 + 2 H2O 2 HOCl + produits Figure I.6. Schéma réactionnel de la dégradation de la monochloramine (Jafvert et Valentine, 1992) figure I.6.

11 I.2. Réactivité avec les composés minéraux La présence de composés minéraux peut augmenter significativement la réaction de décomposition de la monochloramine au pH des eaux de distribution. Il est donc particulièrement important de connaître l'influence de ces composés lorsque les expériences sont effectuées en milieu tamponné. Dans un cadre plus général, cette partie montre l’importance des espèces inorganiques ayant un effet « proton donneur » sur la catalyse acide de la décomposition de la monochloramine.

I.2.1. Influence des ions phosphate Valentine et Jafvert (1988) démontrent l’intérêt de prendre en compte le tampon phosphate dans le modèle de décomposition de la monochloramine. Sans cette prise en compte de la catalyse par les ions phosphate, la modélisation sous-estime la décomposition de la monochloramine. En généralisant, ces auteurs montrent que l’équilibre 1.28 peut être déplacé vers la formation de l’ion chloroammonium en présence de composés capables de céder un proton (1.37).

La modélisation est basée sur les réactions suivantes : NH 2Cl + NH 2Cl  NHCl 2 + NH 3 (1.27) + - NH 2Cl + AH  NH 3Cl + A (1.37) + + NH 3Cl + NH 2Cl  NHCl 2 + NH 3 + H (1.29)

Pour des pH acides (3-4), la monochloramine réagit rapidement pour former la dichloramine, stable dans ce domaine. De plus la réaction de la dichloramine avec l'ammoniaque est beaucoup plus lente que la réaction d'interconversion catalysée à pH acide (Gray et al., 1978). Enfin, à pH acide la + concentration de NH 3Cl est inférieure à 1% de la concentration en NH 2Cl (Leao et Selleck, 1981). Dans ces conditions, la décomposition de la monochloramine peut s'écrire sous la forme :

2 d[NH 2Cl]/dt = -2k obs [NH 2Cl] avec k obs = ∑ki[HA i] et HA i les espèces ayant un effet proton donneur.

Pour des pH plus élevés (pH = 8), Valentine et Jafvert (1988) suggèrent que la réaction 1.31 est la voie principale conduisant à la dégradation des chloramines. La réaction 1.31 est par ailleurs beaucoup plus rapide que la réaction 1.27 qui constituerait l’étape cinétiquement limitante de la décomposition de la monochloramine en milieu basique :

NH 2Cl + NHCl 2  P (1.31)

En tenant compte des réactions suivantes, Valentine et al. (1988) proposent une expression de la décomposition de la monochloramine incluant l'interconversion et l'hydrolyse de la monochloramine :

NH 2Cl + HOCl  NHCl 2 + H 2O (1.5) NH 2Cl + H 2O  HOCl + NH 3 (1.8) NH 2Cl + NH 2Cl  NHCl 2 + NH 3 (1.27) NH 2Cl + NHCl 2  P (rapide) (1.31)

2 d[NH 2Cl]/dt = -3k obs [NH 2Cl] avec k obs = ∑ki[HA i] + k 1.27Ke/[NH 3]

Ainsi pour des conditions limitant l'influence de l'hydrolyse, il est possible, d'après la constante apparente d'interconversion (k obs ), de déterminer les constantes spécifiques des espèces pouvant catalyser la réaction d'interconversion.

12 Chapitre I : Synthèse bibliographique

1/C – 1/C 0 = 3k obs t kobs = ∑ki[HA i] avec HA i les espèces ayant un effet proton donneur.

La constante de dégradation apparente proposée par Valentine et al. (1988) inclut les espèces H +, - 2- H2PO 4 , HPO 4 , H 3PO 4 et est donnée sous la forme : + − 2− k = k + [H ]+ k [H PO ]+ k − [H PO ]+ k − [HPO ] (1.38) obs H H3PO 4 3 4 H PO 2 4 HPO 2 4 2 4 4

Les valeurs des constantes sont reportées dans le tableau I.5.

Ces travaux permettent de décrire avec une bonne précision la décomposition de la monochloramine en tampon phosphate. De plus, pour des pH compris entre 6,6 et 8,3, la - décomposition de la monochloramine peut être décrite uniquement en considérant la forme H 2PO 4 et H + (Vikesland et al., 2001).

I.2.2. Influence des ions carbonate Les ions carbonate présentent un rôle similaire aux ions phosphate. Cependant peu d'études traitent de l'influence des ions carbonate sur la décomposition de la monochloramine. Vikesland et al. (2001) ont montré qu'en plus de son effet tampon, les ions carbonate catalysent la dégradation de la monochloramine. De plus, pour un même pH, ces auteurs notent une accélération de la vitesse de décomposition de la monochloramine lorsque la concentration en carbonate augmente. Par exemple, le temps de demi-vie d'une solution à 0,05 mM en monochloramine à pH 6,6 passe de 40 heures pour une concentration en bicarbonate de 4 mM à 25 heures pour une concentration de 10 mM.

L'expression de la constante cinétique apparente proposée par Vikesland et al. (2001) en présence d’ions carbonate (équation 1.39) est similaire à celle obtenue en présence d’ions phosphate (équation 1.38) (Valentine et Jafvert, 1988) : = + + + − kobs k + [H ] k H CO [H2CO 3] k − [HCO 3 ] (1.39) H 2 3 HCO 3

Les constantes de chacune de ces espèces sont reportées dans le tableau I.5.

Tableau I.5. Constantes cinétiques de quelques espèces proton donneur tableau I.5. Constantes cinétique Valeur Référence 2,6. 10 7 M -2.h -1 Granstorm, 1954 7 -2 -1 k+ 9,9.10 M .h Gray et al., 1978 H 2,3.10 7 M-2.h -1 Valentine et Jafvert, 1988 2,5.10 7 M-2.h -1 Vikesland et al., 2001 k 6 -2 -1 H3PO 4 3,2.10 M .h Valentine et Jafvert, 1988 k− 1,4.10 3 M -2.h -1 Valentine et Jafvert, 1988 H2PO 4 k 4 -2 -1 H2CO 3 4.10 M .h Vikesland et al., 2001 k − 800 M -2.h -1 Vikesland et al., 2001 HCO 3

I.2.3. Influence des ions nitrite Les réactions mises en jeu au voisinage du break-point conduisent à la formation de nitrite et de nitrate (voir I.1.4).

13 La décomposition de la dichloramine forme de l'ammoniaque, des ions chlorure, du diazote et sous certaines conditions des ions nitrate (Vikesland et al., 2001). Les espèces capables de céder un proton (HA) peuvent accélérer la décomposition de la monochloramine. Outre cet effet, les ions nitrite exercent une réelle demande en chloramines (Valentine et Selleck, 1983 ; Hao et al., 1994 ; Margerum et al., 1994). La première étape de l'oxydation des ions nitrite par la monochloramine, catalysée en milieu acide est cinétiquement limitante et conduit à la formation de chlorure de (NO 2Cl) selon la réaction 1.40.

- - HA + NH 2Cl + NO 2  A + NH 3 +NO 2Cl (1.40)

Cette première étape présente des analogies avec l’oxydation des ions nitrite par le chlore (Johnson et Margerum, 1991). Sur la base des travaux de Margerum, Vikesland et al., (2001) proposent un modèle cinétique expliquant la décomposition de la monochloramine en présence de nitrites (réactions 1.40 – 1.45)

+ - 10 -1 -1 H + NH 2Cl + NO 2  NH 3 + NO 2Cl k1.40a = 4,90.10 M .h (1.40a) + - 5 -1 NO 2Cl + NH 3  H + NH 2Cl + NO 2 k1.40b / k 44a = 5,5.10 M (1.40b)

- - HOCl + NO 2  NO 2Cl + OH k1.41 (inconnu) (1.41)

- - -1 NO 2Cl + NO 2  N 2O4 + Cl k1.42a / k 1.44a = 217 M (1.42a) - - N2O4 + Cl  NO 2Cl + NO 2 (1.42b)

- - - + N2O4 + OH  NO 3 + NO 2 + H k43 rapide (1.43)

+ - NO 2Cl  NO 2 + Cl k44a (inconnu) (1.44a) + - NO 2 + Cl  NO 2Cl k44b (inconnu) (1.44b)

+ - - + NO 2 + OH  NO 3 + H k45 (rapide) (1.45)

La vitesse de dégradation de la monochloramine peut alors s’écrire sous la forme :

+ − + − [d NH 2Cl ] k 40.1 a[H [] NH 2Cl ][ NO 2 ]( 1 k( 1.40b / k1.44a [) NO 2 )] − = (1.46) dt + + − k( 1.40b / k1.44a [) NH 3] 1( k( 1.42a / k1.44a )[ NO 2 ])

Pour des faibles concentrations en monochloramine et en ions nitrite, Vikesland et al. (2001) montrent que ces réactions sont lentes et que les réactions d’auto-décomposition ne doivent pas être négligées.

I.2.4. Influence des ions bromure La monochloramine sous sa forme protonée peut réagir avec les ions bromure pour former des bromamines (Trofe et al., 1980 ; Valentine et Selleck, 1983 ; Bousher et al., 1989) selon le mécanisme suivant :

+ + -2 NH 3Cl  NH 2Cl + H K1.28 = 3,57.10 M Gray et al., 1978 (1.28) + - + - 4 -1 -1 NH 3Cl + Br  NH 3Br + Cl k1.47 = 5.10 M .h Trofe et al., 1980 (1.47) + + NH 2Cl + NH 3Br  NHBrCl + NH 4 k1.48 = rapide Trofe et al., 1980 (1.48)

La bromochloramine peut également être formée par oxydation des ions bromure par l’acide hypochloreux (1.49), pour former l’acide hypobromeux puis la monobromamine (réaction 1.50). La

14 Chapitre I : Synthèse bibliographique chimie des bromamines présente de fortes analogies avec celle des chloramines. Comme dans le cas des chloramines (réactions 1.5-1.10), les réactions de formation et d’hydrolyse de la mono, di et tribromamine peuvent être écrites.

- - 7 -1 -1 HOCl + Br  HOBr + Cl k1.49 = 1,06.10 M .h Farkas et al., 1949 (1.49) 7 -1 -1 k1.49 = 2,46.10 M .h Bousher et al., 1986

HOBr + NH 3  NH 2Br + H 2O (1.50)

Vikesland et al. (2001), sur la base des travaux de Galal-Gorchev et Morris (1965) et de Bousher et al. (1989), proposent que la monochloramine et la bromochloramine réagissent pour former des ions bromure et du diazote (réaction 1.51).

- - + NHBrCl + NH 2Cl  N2 + Br + 2 Cl + 3 H k1.51 = rapide (1.51)

Cette réaction met en évidence le rôle catalytique des ions bromure dans la décomposition de la monochloramine. En dessous de 0,1 mg.L-1, les ions bromure ne présentent pas d'effet significatif pour des pH inférieurs à 8,3. Cependant à des concentrations plus élevées (0,5 - 3 mg.L-1), les ions bromure accélèrent fortement la décomposition de NH2Cl (Vikesland et al., 2001).

I.2.5. Influence du fer Vikesland et Valentine (2000) montrent que la monochloramine réagit avec le fer(II) en solution ou sous forme d’oxydes par un mécanisme direct pour former le radical amidogène (°NH 2) comme intermédiaire réactionnel :

- Fe(II) + NH 2Cl  Fe(III) + °NH 2 + Cl (1.52) + Fe(II) + °NH 2 + H  Fe(III) + NH 3 (1.53)

De plus, ce mécanisme est autocatalytique car l'oxyde de fer accélère la réduction de la monochloramine.

La recombinaison du radical amidogène conduit à la formation d’hydrazine qui réagit également avec la monochloramine pour former du diazote : °NH 2 + °NH 2  N 2H4 (Neta et al., 1988 cités par Vikesland et Valentine, 2000) (1.54) + - N2H4 + 2 NH 2Cl  N 2 + 2 NH 4 + 2 Cl (Sisler et al., 1954) (1.55)

I.3. Modélisation cinétique de la décomposition des chloramines La décomposition de la monochloramine a fait l’objet de nombreuses études aux Etats-Unis, où l’équipe de recherche menée par Valentine a construit un modèle cinétique visant à expliquer la perte de chlore total dans les eaux riches en azote ammoniacal. Un modèle alternatif est proposé par Diyamandoglu. Cette partie s’intéresse à la description de ces deux modèles et à leurs limites de validité. Les modèles seront ainsi confrontés à nos observations expérimentales.

I.3.1. Modèle de Valentine. Ce modèle, élaboré au fil des ans, prend en compte les réactions de formation et d’hydrolyse des chloramines (réactions 1.5-1.9). L’interconversion de la monochloramine en dichloramine (réaction 1.27) est une réaction clé dans ce modèle, puisque de nombreuses espèces inorganiques interviennent dans le calcul de la constante apparente k 1.27. En excès d’azote ammoniacal, la réaction de la dichloramine sur NH 3 conduit à la formation de monochloramine (réaction 1.30). Les

15 réactions 1.20 à 1.22 conduisent à la perte de chlore total par formation d’un composé I. Cet intermédiaire est interprété comme étant NOH dans la publication de Valentine et al. (1988). La seconde voie de décomposition du chlore total passe par la réaction entre la monochloramine et la dichloramine (réaction 1.31). Le modèle le plus complet (Jafvert et Valentine, 1992) propose une troisième voie de décomposition (réactions 1.32-1.34). Ces dernières concernent les réactions entre les différentes formes de chloramines et ne sont significatives que pour des conditions expérimentales en dessous du break-point.

Le tableau I.6 présente les réactions du modèle de Jafvert et Valentine (1992), établi pour rendre compte de l’évolution et de la spéciation des différentes espèces du chlore total pour des taux de chloration au voisinage du break-point. Pour des conditions expérimentales en dessous du break- point, un modèle simplifié est proposé par Vikesland et al. (2001). Celui-ci fait intervenir les mêmes réactions que celles présentées dans le tableau I.6, à l’exception des réactions 1.32 à 1.34 qui deviennent négligeables en excès d’ammoniaque.

Tableau I.6. Formulation du modèle de Valentine tableau I.6. N° Réaction Constante (25°C) Réf. 10 -1 -1 1.5 HOCl + NH 3  NH 2Cl + H 2O k1.5 = 1,5.10 M .h Morris et Isaac, 1981 6 -1 -1 1.6 NH 2Cl + HOCl  NHCl 2 + H 2O k1.6 = 1.10 M .h Margerum et al., 1978 6 -1 -1 1.7 HOCl + NHCl 2  NCl 3 + H 2O k1.7 = 1,59.10 M .h Hand et Margerum, 1983 -2 -1 1.8 NH 2Cl + H 2O  HOCl + NH 3 k1.8 = 7,6.10 h Morris et Isaac, 1981 -3 -1 1.9 NHCl 2 + H 2O  NH 2Cl + HOCl k1.9 = 2,3.10 h Margerum et al., 1978 -1 -1 1.27 2 NH 2Cl  NHCl 2 + NH 3 k1.27 = 18,8 M .h Valentine et Jafvert, 1988 + + 8 -2 -1 1.30 NHCl 2 + NH 3 + H  2 NH 2Cl + H k1.30 = 2,16.10 M .h Hand et Margerum, 1983 - 5 -1 -1 1.20 NHCl 2 + OH  I k1.20 = 4.10 M .h Jafvert et Valentine, 1987 8 -1 -1 1.21 I + NHCl 2  HOCl + P k1.21 = 1.10 M .h Leao et Selleck, 1981 7 -1 -1 1.22 I + NH 2Cl  P k1.22 = 3.10 M .h Leao et Selleck, 1981 -1 -1 1.31 NH 2Cl + NHCl 2  P k1.31 = 55 M .h Valentine et al., 1988 - 14 -2 -1 1.32 NHCl 2 + NCl 3 + OH  2 HOCl + P k1.32 = 2,10 M .h Jafvert et Valentine, 1992 - 12 -2 -1 1.33 NH 2Cl + NCl 3 + OH  HOCl + P k1.3 = 5,10 M .h Jafvert et Valentine, 1992 - - + - 5 -1 -1 1.34 NHCl 2 + ClO  NO 3 + 5 H + 4 Cl k1.34 = 8,3.10 M .h Jafvert et Valentine, 1992 + - -8 1.3 HOCl  H + ClO K1.3 = 3,2.10 M + + -10 1.4 NH 4  NH 3 + H K1.4 = 5,62.10 M

La constante apparente d’interconversion (k 1.27 ) est calculée comme étant la somme des constantes spécifiques de chaque ion multipliées par la concentration de l’ion considéré. De manière analogue, la constante de réaction entre le chlore libre et la dichloramine s’exprime sous la forme k1.7 =∑k1.7i [M i]. Le tableau I.7 présente les constantes spécifiques des ions carbonate et phosphate.

Tableau I.7. Constantes spécifiques k 1.7i et k 1.27i tableau I.7. + - - k1.27 = kH+ [H ] + k H3PO4 [H 3PO 4] +k H2PO4- k1.7 = k OH- [OH ] + k ClO- [ClO ] + k HPO42- - - 2- 2- [H 2PO 4 ] + k H2CO3 [H 2CO 3] + k HCO3- [HCO 3 ] [HPO4 ] + k CO32- [CO 3 ] -2 -1 -2 -1 Ion k1.27i (M .h ) Réf. Ion k1.7i (M .h ) Réf. H+ 2,50.10 7 Valentine et Jafvert, OH - 1,1810 13 6 - 8 H3PO 4 3,20.10 1988 ClO 3,24.10 Jafvert et Valentine, - 3 2- 7 H2PO 4 1,30.10 Valentine et al., 1988 HPO 4 5,72.10 1992 2- 10 H2CO 3 7,20 CO 3 2,16.10 - 3 Vikesland et al., 2001 HCO 3 2,70.10

16 Chapitre I : Synthèse bibliographique

La constante k H+ est déterminée en tenant compte uniquement de la réaction d’interconversion, sans perte de chlore total. Les cinétiques, effectuées à pH = 3 - 4 sur des durées inférieures à 1 minute, en présence de concentrations variables en ions phosphate, permettent de déterminer k H+ par interpolation de k obs à l’origine et k H3PO4 , la pente de k obs = kH3PO4 [H 3PO 4] + constante.

- La constante spécifique de l’ion H 2PO 4 (Valentine et al., 1988) est déterminée en suivant l’évolution de la concentration en monochloramine et en dichloramine en fonction du temps, pour différentes concentrations en tampon phosphate : 3- [PO 4 ]tot : 10 et 25 mM pH = 8,2 et 6,8. [NH 2Cl] 0 = 1,5 mM ; N/Cl > 2 2- La constante spécifique à HPO 4 est considérée comme négligeable.

Cette même démarche a été utilisée par Vikesland et al. (2001) pour déterminer les constantes - spécifiques des espèces carbonates (H 2CO 3 et HCO 3 ) : 2- [CO 3 ]tot : 4 et 10 mM pH = 6,55 – 8,34 [NH 2Cl] 0 = 0,05 mM ; N/Cl = 1,4

I.3.2. Modèle de Diyamandoglu Le modèle formulé par Diyamandoglu (1994) propose de modéliser, conjointement la décomposition de la monochloramine, les formes oxydées de l’azote (ions nitrite et nitrate). Cette approche est réalisée par l’examen des réactions proposées dans la littérature pour la formation des ions nitrate à partir de la monochloramine. Ces réactions font intervenir la chlorohydroxylamine et les ions nitrite comme intermédiaires réactionnels.

Ce modèle prend en compte les réactions de formation et d’hydrolyse des chloramines (réactions 1.5-1.9). L’interconversion de la monochloramine (réaction 1.29) est réalisée par réaction entre l’espèce neutre et l’espèce protonée, d’où l’importance de la constante de dissociation de la monochloramine (réaction 1.28). Les réactions 1.22 à 1.26 présentent la formation et la décomposition des intermédiaires réactionnels HNO et NH(OH)Cl proposées par Wei et Morris (1974) et Saunier (1976).

La formation de nitroxyle (HNO) est réalisée par réaction entre la monochloramine et la dichloramine (réaction 1.24). Une autre voie de formation de NOH passe par la formation de chlorohydroxylamine obtenue par hydrolyse de la dichloramine (réaction 1.25) ; ce composé se dégrade lentement pour former HNO et HCl (réaction 1.26). La formation d’ions nitrate par réaction entre HNO et HOCl est obtenue en deux étapes par intervention des ions nitrite (réaction 1.23a et b). Enfin la réaction entre HNO et la monochloramine conduit à la production d’azote gazeux (réaction 1.26).

Les équilibres acido-basiques de la monochloramine (réaction 1.28), l’ammoniaque (réaction 1.4), l’acide nitreux (réaction 1.56) et le chlore libre (réaction 1.3) sont considérés comme instantanés. Seules les constantes thermodynamiques sont données, les constantes cinétiques entrées dans la modélisation seront donc calculées de manière à respecter les constantes thermodynamiques, tout en étant largement supérieures à la limite de diffusion dans l’eau.

17 Tableau I.8. Formulation du modèle de Diymandoglu tableau I.8. N° Réaction Constante (25°C) Réf 10 -1 -1 1.5 NH 3 + HOCl  NH 2Cl + H 2O k1.5 = 1,0.10 M .h Leao et Selleck, 1981 5 -1 -1 1.6 NH 2Cl + HOCl  NHCl 2 + H 2O k1.6 = 5,5.10 M .h Leao et Selleck, 1981 -1 1.8 NH 2Cl + H 2O  NH 3 + HOCl k1.8 = 0,2 h Leao et Selleck, 1981 -3 -1 1.9 NHCl 2 + H 2O  NH 2Cl + HOCl k1.9 = 2,0.10 h Leao et Selleck, 1981 + + -2 1.28 NH 3Cl  H + NH 2Cl K1.28 = 3,57.10 M Leao et Selleck, 1981 + + 6 -1 -1 1.29 NH 3Cl + NH 2Cl  NHCl 2 + NH 4 k1.29 = 3,5.10 M .h Gray et al., 1978 -1 -1 -1 1.24 NH 2Cl + NH 2Cl + H 2O HNO + NH 3 + 2 HCl k1.24 = 6,0.10 M .h Diyamandoglu, 1994 1 -1 1.25 NHCl 2 + H 2O  NH(OH)Cl + HCl k1.25 = 7,0.10 h Diyamandoglu, 1994 -4 -1 1.26 NH(OH)Cl  HNO + HCl k1.26 = 5,0.10 h Diyamandoglu, 1994 11 -1 -1 1.23a HNO + HOCl  HNO 2 + HCl k1.23a = 1,0.10 M .h Diyamandoglu, 1994 12 -1 -1 1.23b HNO 2 + HOCl  HNO 3 + HCl k1.23b = 9,8.10 M .h Diyamandoglu, 1994 3 -1 -1 1.22 NOH + NH 2Cl  N 2 + H 2O + HCl k1.22 = 6,0.10 M .h Diyamandoglu, 1994 + - -7 1.3 HOCl  H + ClO K1.3 = 3,44.10 M + + -10 1.4 NH 4  H + NH 3 K1.4 = 4,07.10 M + - 1.56 HNO 2  H + NO 2 K1.56 = 3,15 M

I.4. Réactivité des chloramines avec les composés organiques modèles L’étude de la réactivité du chlore sur des composés organiques modèles a fait l’objet de nombreuses études, si bien qu’il est aujourd’hui possible, pour certaines molécules, d’écrire un mécanisme quasi complet. Cependant, dans le cas de la monochloramine, les études sont loin d’être aussi abouties. A ce jour, peu de travaux sont consacrés à l’étude des vitesses de réaction entre la monochloramine et des composés organiques. Dans ce contexte de manque flagrant de connaissances fondamentales, nous présenterons les études traitant de la réactivité des chloramines avec les grandes classes de composés organiques.

L’acide hypochloreux ainsi que la monochloramine présentent respectivement une polarisation de la δ+ δ- δ+ δ- liaison Cl-O ( Cl OH ) et de la liaison Cl-N ( Cl NH 2 ). Néanmoins la polarisation de la liaison Cl-O du chlore est beaucoup plus forte que celle de la liaison Cl-N de la monochloramine. Un calcul, par le modèle de Hückel étendu, des charges partielles sur ces deux molécules donne les valeurs suivantes 0,1 Cl-O-0,296 et 0,007 Cl-N-0,208 (calcul sous Chemoffice 2001). Ces résultats corroborent d’un point de vue purement théorique la différence de réactivité observée entre le chlore et la monochloramine. Trois types de réaction sont donc envisageables entre ces oxydants et les composés organiques :

- réactions d’oxydation, - réactions d’addition, - réactions de substitution électrophile.

Ces oxydants sont donc potentiellement réactifs avec les composés possédants des liaisons insaturées comme les alcènes, les aldéhydes, les cétones et les composés aromatiques. A l’exception de quelques hydroxybenzènes et organoazotés, aucune étude n’a été menée sur la réactivité de la monochloramine avec des composés organiques modèles. Par conséquent, nous consacrerons une partie de la bibliographie à l’étude de la chloration de composés organiques modèles dont certains mécanismes peuvent présenter des analogies avec les réactions de chloramination.

18 Chapitre I : Synthèse bibliographique

I.4.1. Réactivité des composés aliphatiques avec le chlore et la monochloramine

I.4.1.1. Réactivité avec les alcènes Les réactions entre les alcènes et le chlore sont en général lentes voir négligeables si aucun groupement fonctionnel n’active des positions spécifiques. Winterbourn et al. (1992) montrent que les doubles liaisons C=C d’acides gras insaturés (acides oléique, linoléique et arachidonique) sont attaquées par l’acide hypochloreux et conduisent à la formation des dérivés type chlorohydrine. Prutz (1998) montre que le chlore réagit avec les doubles liaisons C=C de l’acide sorbique avec une cinétique apparente d’ordre 2 (2,3 M -1.s -1 à pH = 7,2). Un mécanisme de chloration des liaisons insaturées est proposé par Morris (1978). Ce mécanisme repose sur l’attaque de la double liaison C=C par Cl + pour former un ion chloronium, suivie de l’addition d’un ion OH -. Dans le cas où les groupements R 1 et R 2 présentent des effets electro-donneurs similaires, les deux isomères peuvent être observés (Spickett et al., 2000). Les dérivés de type chorohydrine ainsi obtenus peuvent conduire à la formation des formes epoxydes correspondantes. Cette transformation passe par l’élimination d’HCl en milieu alcalin (Kopperman et al., 1976 ; Carlson et Caple, 1978 ; Winterbourn et al., 1992 ). La figure I.7 présente le mécanisme de chloration des liaisons insaturées dans les travaux de ces différents auteurs.

H H H H H H

R CC R R1 C C R2 R1 CC R2 1 2

+ Cl OH Cl Cl+ - OH effet électrodonneur : R 1 < R 2 Figure I.7. Mécanisme de chloration de liaisons insaturées figure I.7.

I.4.1.2. Réactivité avec les composés oxygénés (alcools, aldéhydes, cétones, acides) La chloration de différentes familles de molécules (De Laat, 1981 ; De Laat et al., 1982 ; Doré, 1989) a permis d’établir, sur le critère de la demande en chlore, une grille de réactivité des molécules vis-à-vis du chlore (tableau I.9).

19 Tableau I.9. Demande en chlore d’après De Laat et al., 1982 tableau I.9. Demande Rendement de formation de CHCl Composé 3 (mol/mol) (% du rendement molaire) Acides carboxyliques Acétique <0,1 <0,1 Oxalique 0,3 <0,1 Malonique 1,8 <0,1 Succinique <0,1 <0,1 Malonique 0,75 <0,1 Maléique <0,1 <0,1 Fumarique <0,1 <0,1 Citrique 0,8 14,5 Glyoxalique 1,1 <0,1 Pyruvique 1 1,7 Alcools – cétones - esters Ethanol <0,1 <0,1 Acétone <0,1 1,3 Acétylacétone 4 8,5 Propionaldéhyde 0,2 <0,1 n-butyraldéhyde 0,2 <0,1 Ethyl acétylacétate 2 0,2 -5 -5 3- -3 [Cl 2]tot = 5.10 ou 4.10 M ; pH = 7 ; [PO 4 ]tot = 5.10 M ; [Cl 2]0 / [Organique] = 20 ; t = 15 h.

Le chlore n’est pas réactif vis-à-vis des acides organiques à l’exception des composés réducteurs comme l’acide ascorbique. Folkes et al. (1995) montrent que l’acide ascorbique réagit avec le chlore avec une constante cinétique apparente supérieure à 10 7 M -1.s -1 à pH = 5. Ces mêmes auteurs notent une variation importante de la vitesse de décomposition de l’acide ascorbique en fonction du pH (décomposition 10 fois plus lente à pH = 9 qu’à pH = 5). Ces résultats impliquent une différence de réactivité élevée entre les formes protonées et déprotonées. Les alcools primaires et secondaires peuvent être oxydés par le chlore pour donner respectivement des acides et des cétones. L’oxydation d’alcools tertiaires est plus difficile et conduit à une rupture de la chaîne carbonée (Roberts et Caserio, 1968).

La réaction entre les halogènes sous leurs formes XO - avec les méthyl-cétones pour former des haloformes est une réaction classique de chimie organique connue depuis 1822 (Fuson et Bull, 1934). Cette réaction est à la base du test iodoforme utilisé pour l’identification des alcools et des cétones en chimie organique. La réaction haloforme est responsable de la formation des trihalométhanes (CHCl 3 dans le cas du chlore) observés lors de la désinfection au chlore des eaux destinées à la consommation humaine. Cette réaction peut être catalysée en milieu acide (formation d’un sel d’oxonium) ou basique, cependant la catalyse basique est prédominante en milieu aqueux pour des pH > 5. Le chemin réactionnel de la réaction haloforme conduit au remplacement successif des atomes d’hydrogène, situés sur le carbone en α du groupement carbonyle par des atomes de chlore ; ces substitutions, suivies d’une hydrolyse, conduisent à la formation de CHCl 3 (Morris, 1978). L’étape cinétiquement limitante de la réaction haloforme est la déprotonation du carbone en α afin de former un carbanion en équilibre avec sa forme énolate avant l’attaque de HOCl (figure I.8).

20 Chapitre I : Synthèse bibliographique

OH- O H O- O Cl OH O Cl Etape cinétiquement Rapide R1 C C R2 R1 C C R2 R1 C C R2 R1 C C R2 limitante H H H H OH- Lent

OH- - O Cl O Cl O Cl O Cl

HOCl R C C + HOR R C C R R1 C C R2 R1 C C R2 1 2 1 2 rapide

Cl acide carboxylique si R2 = cétone Cl alcool si R2 = alcane

OH- O Cl O- Cl Cl O Cl O HOCl CHCl3 - R C C R1 C C Cl R1 C C Cl C Cl + 1 rapide C H - R1COO R1 O Cl Cl OH Cl Cl

Figure I.8. Mécanisme général de la réaction haloforme. D’après Bartlett, 1934 ; Morris, 1978 ; De Laat et al., 1982 ; Doré, 1989 figure I.8. Lors de la réaction haloforme, il se forme successivement les dérivés mono et dichlorés avant d’observer la rupture éventuelle de la chaîne carbonée (cas ou R 2 ≠ H). Une fois la cétone α monochlorée formée, les hydrogènes portés par le même carbone deviennent plus acides compte tenu du caractère électronégatif du chlore et favorisent donc la formation de l’énolate correspondant. Ce phénomène explique que la limitation cinétique ne peut avoir lieu que lors de la première étape de la réaction. Outre la formation de chloroforme, cette réaction conduit à la formation d’acides carboxyliques (acide acétique dans le cas de l’acétone et de l’acétylacétone).

La présence d’un groupement méthyl non substitué entre deux groupements carbonyle ( β-dicétone) conduit à une réactivité élevée vis-à-vis du chlore (De Laat et al., 1982). Tachikawa et al. (2002) comparent la réactivité d’une dicétone cyclique (1,1-diméthyl-4-chloro-cyclohexane-3,5-dione) avec le chlore et la monochloramine et obtiennent les résultats suivants : 6 -1 -1 HOCl : k app > 7,60 ± 0,67 x10 M .s -1 -1 -1 -1 NH 2Cl : k app = 12,9 M .s à température ambiante et k app = 5,63 M .s à T = 12°C. -1 -1 NHCl 2 : k app = 0,52 M .s à T = 12°C.

En présence de chloramines minérales, les aldéhydes peuvent conduire par une réaction réversible à la formation du nitrile correspondant. La réaction est catalysée par une légère acidité du milieu réactionnel (pH = 3,5 – 5) (Alouini et Seux, 1987). Pedersen III et al. (1999) montrent que la monochloramine réagit rapidement avec le formaldéhyde (k = 2,8.10 4 M -1.s -1) pour former le N- chloroaminométhanol puis la N-chlorométhanimine par une déshydratation cinétiquement limitante. Ces molécules peuvent potentiellement conduire à la formation de chlorure de cyanogène (figure I.9).

21 H H O OH O H+ Cl NH2Cl R RC NHCl RC N

H H H H

H+

R H O H CN Cl

RC N Cl H

H RC N H Figure I.9. Mécanisme de chloramination des aldéhydes. D’après Alouini et Seux (1987) et Pedersen III et al. (1999) figure I.9.

I.4.2. Réactivité du chlore et de la monochloramine avec les organoazotés L’azote organique, bien que ne constituant qu’une faible fraction des matières organiques, présente une réactivité très élevée vis-à-vis du chlore. L’azote organique peut soit être incorporé au sein de la matrice des MON, soit provenir de biomolécules telles que les acides aminés, les protéines, l’urée ou les acides nucléiques. Lors de la chloration, ces composés peuvent former des chloramines organiques. De plus, les organoazotés sont les précurseurs principaux de la N-nitrosodiméthylamine (NDMA), molécule cancérigène formée lors des traitements de chloramination.

I.4.2.1. Réactivité avec les amines Le chlore peut réagir avec les amines pour former des chloramines organiques selon des mécanismes semblables à ceux conduisant à la formation des chloramines minérales (NH 2Cl et NHCl 2). Comme dans le cas des chloramines minérales, les chloramines organiques sont formées par réaction entre la forme HOCl du chlore et la forme neutre des amines. Dans le cas des amines + tertiaires, il y a génération d’espèces chargées (R3NCl )( Abia et al., 1998).

D’un point de vue cinétique, les vitesses de dégradation peuvent s’écrire sous la forme : -d[R2NH]/dt = k [R 2NH] [Oxydant] (Margerum et al., 1978 ; Morris et Isaac, 1981) dont la constante apparente dépend du pH. Dans le cas de la monochloramine, certains auteurs + suggèrent que c’est la forme NH 3Cl qui attaque les amines sous leurs formes non protonées (Snyder et Margerum, 1981) pour conduire à la formation des chloramines organiques correspondantes :

HOCl + RNH 2  RNHCl + H 2O (1.57) + + NH 3Cl + RNH 2  RNHCl + NH 4 (1.58)

Cependant, les réactions de transfert de chlore entre chloramines inorganiques et amines organiques n’ont fait l’objet que de très peu d’études. Le tableau I.10 rapporte les quelques constantes de vitesse entre les amines et le chlore ou la monochloramine. La cinétique de chloration des amines simples a quant à elle fait l’objet de nombreuses études, et la figure I.10 en présente les principaux résultats.

22 Chapitre I : Synthèse bibliographique

Tableau I.10. Constantes de vitesse de la chloration et de la chloramination d’amines tableau I.10. v = k[HOCl][ RNH ] v = k[NH Cl +][ RNH ] Composé 2 3 2 k (M -1.s -1) Réf. k (M -1.s -1) Réf. 2,4.10 8 Snyder et Margerum (1981) (CH )NH 1,9.10 8 Abia et al. (1998) 3 2 7,62.10 8 Isaac et Morris (1985) 7 8 (CH 3)2NH 6,05.10 Abia et al. (1998) 7,98.10 Isaac et Morris (1985)

La figure I.10 présente la relation entre la constante de Taft ( σ*) et la constante de vitesse des réactions amines-chlore. D’une manière générale les amines tertiaires présentent une réactivité vis- à-vis du chlore environ 100 fois moindre que les amines primaires et secondaires. Abia et al. (1998) montrent que les amines primaires et secondaires suivent la même relation σ*-log(k) et présentent une pente positive ce qui indique que les réactions sont accélérées lorsque les substituants présentent des effets électro-attracteur (constante σ positive). L’effet inverse est observé pour les amines tertiaires où la présence de groupements électro-donneurs augmente la vitesse des réactions. La faible valeur de la pente enregistrée pour les amines primaires et secondaires indique que les vitesses de chloration sont peu sensibles à la nature des substituants.

Figure I.10. Corrélation de Taft pour la chloration des amines (Deborde et von Gunten, 2008) figure I.10. Compte tenu des différences observées pour les amines primaires et secondaires d’une part et les amines tertiaires d’autre part, Abia et al. (1998) proposent deux voies réactionnelles différentes (figure I.11). La chloration des amines primaires et secondaires passerait par la formation d’un complexe mettant en jeu plusieurs molécules d’eau favorisant ainsi l’attaque par HOCl. Dans le cas des amines tertiaires, il y aurait formation d’un dérivé chloroamonium.

23 H R1 Cl O H R R1 H R2 N 1 Cl N HOCl O H N H R O H R 2 H O 2 H H

- R +Base (H2O ou OH ) R1 3 R3 R1 N HOCl - N + HO Cl R 2 R2 Figure I.11. Mécanisme de chloration des amines. D’après Abia et al., 1998 figure I.11. Le chlore et les chloramines transforment les amines primaires en nitrile puis en aldéhydes avec des rendements significatifs. Les chloramines conduisent cependant à une formation moindre de mais favorisent la formation d’aldéhydes et halonitroalcanes (Joo et Mitch, 2007).

Lors de la chloramination, Joo et Mitch (2007) montrent que la formation de chlorure de cyanogène et de trichloronitrométhane (TCNM) à partir de monométhylamine (MMA) est négligeable pour des rapports N/Cl > 1 alors que des rendements de 10 % pour CNCl, et de 0,1 % pour le TCNM sont observés pour N/Cl = 0,1. La figure I.12 présente le schéma réactionnel proposé par Joo et Mitch (2007) lors de la chloration (ou de la chloramination) de la MMA et de la n-propylamine (n-PA).

24 Chapitre I : Synthèse bibliographique

Figure I.12. Schémas réactionnels d’oxydation de la MMA et de la n-PA par le chlore et les chloramines (Joo et Mitch, 2007) figure I.12.

I.4.2.2. Formation de NDMA La N-nitrosodiméthylamine (NDMA) est un sous-produit de désinfection formé lors de la chloramination ou de la chloration d’eau contenant des composés azotés. Bien que de nombreux composés azotés peuvent conduire à la formation de NDMA (Lee et al., 2007), la diméthylamine (DMA) est le précurseur de formation de NDMA le plus étudié.

La chloration de la DMA conduit, dans des conditions expérimentales identiques, à des productions de NDMA beaucoup plus faibles que celles observées lors de la chloramination (Mitch et Sedlack, 2002). Cependant, lors de la chloration d’eau usée contenant de l’azote ammoniacal, la formation de NDMA semble favorisée en présence de chlore libre (Mitch et Sedlack, 2003 ; Schreiber et Mitch ; 2005). Ces auteurs montrent que la production de NDMA est favorisée pour un rapport N/Cl = 0,5 par rapport à un rapport N/Cl = 1, les réactions dites du break-point semblent ainsi jouer un rôle important dans le mécanisme de formation de la NDMA.

La monochloramine réagit avec la DMA pour former la chlorodiméthylamine. La réaction inverse est possible et conduit à la formation de monochloramine et de DMA (Choi et al., 2002). La chlorodiméthylamine peut aussi être formée par attaque de HOCl sur la DMA (Yoon et Jensen 1993). Les premiers modèles décrivant la formation de NDMA considèrent un mécanisme en deux étapes (Choi et Valentine, 2002 ; Mitch et Sedlack, 2002). La première étape consiste en la formation de la 1,1-diméthylhydrazine (UDMH) par réaction entre la monochloramine et la DMA. Dans un second temps, l’UDMH réagit avec la monochloramine pour former la NDMA. Cependant le mécanisme d’incorporation de l’atome d’oxygène dans la NDMA demeure incertain. D’autres sous-produits de dégradation de l’UDMH tels que le diméthylcyanamide (DMC), le diméthylformamide (DMF), le formaldéhyde diméthylhydrazone (FDMH) et le formaldéhyde monométhylhydrazone (FMMH) sont aussi observés.

25 Plus récemment, Schreiber et Mitch (2006) montrent que la concentration en oxygène dissous et la concentration en dichloramine sont des paramètres importants à prendre en compte dans le mécanisme de formation de la NDMA. En effet, la dichloramine réagit avec la DMA pour former la 1,2,2-chlorodimethylhydrazine (UDMH-Cl). L’oxydation de l’UDMH-Cl par l’oxygène entre ensuite en compétition avec la réaction entre l’UDMH-Cl et les chloramines.

Une autre voie de formation de la NDMA passe par la nitrosation des amines. Les ions nitrite formés lors de la décomposition de la monochloramine (réactions du break-point, voir I.1.4) peuvent favoriser, par l’intermédiaire de l’ion N 2O3, la production de NDMA. Néanmoins, en absence de chlore libre, les ions nitrite réagissent très lentement avec la DMA (Choi et Valentine, 2003). Ces auteurs montrent que le chlore, malgré son effet d’oxydation des ions nitrite en ions nitrate favorise la formation de N2O4 qui est un excellent agent de nitrosation.

La figure I.13 présente le mécanisme réactionnel de formation de la NDMA lors de la chloramination de la DMA.

H C DMC / DMF 3 DMA-Cl DMA + HOCl N Cl FMMH / FDMH TMT

H3C H2O NH3 H3C H3C H H3C NH2Cl DMA NH + NH2Cl N N N N

H C UDMH 3 H C H H3C NH 3 réactions H+ 3 multiples H C Cl (Voir Fig I.5) 3 NH2Cl H2O DMA + NHCl2 N N H3C H3C H UDMH-Cl N N O - HOCl - NO2 NO3 H C NDMA + 3 H HOCl O2

H3C O O N2O3 NO2Cl N N Cl Produits H3C H N2O4 DMA Figure I.13. Mécanisme de formation de la N-nitrosodiméthylamine (NDMA) lors de la chloramination de la diméthylamine (DMA). D’après Choi et Valentine, 2002 ; Mitch et Sedlack, 2002 ; Choi et Valentine, 2003 ; Schreiber et Mitch, 2006 figure I.13.

I.4.2.3. Réactivité avec les acides aminés Compte tenu de leur structure, les acides aminés, sont potentiellement très réactifs vis-à-vis des oxydants. Les premières étapes de la chloration consistent en la formation successive des intermédiaires N-monochlorés (réaction 1.59) (Langheld, 1909 cité par Stanbro et Smith, 1979,

26 Chapitre I : Synthèse bibliographique

Freuze et al., 2004) et N,N-dichlorés (réaction 1.60) (Conyers et Scully, 1997). Comme dans le cas des chloramines minérales, la spéciation les acides N-chloro aminés dépend du pH et du rapport N/Cl.

- - NH 2-R-COO + HOCl  ClHN-R-COO + H 2O (1.59) - - ClNH-R-COO + HOCl  Cl 2N-R-COO + H 2O (1.60)

Les chloroaminoacides sont des composés relativement instables qui conduisent à la formation d’imines par décarboxylation puis d’aldéhydes ou de nitriles par hydrolyse. Mehrsheihk et al. (2006) montrent par substitution isotopique que le carbone en C1 de la glycine est quantitativement convertit en CO 2 alors que le carbone en C2 conduit à un mélange de CO 2 et de méthanediol dont la proportion relative dépend du pH. Stanbro et Smith (1979) observent par exemple la formation d’acétaldéhyde et d’acide pyruvique lors de la chloration de la lysine en milieu basique. Conyers et Scully (1997) notent la formation de nombreux sous produits de chloration pour la lysine et montrent une attaque des groupements amines par le chlore. La figure I.14 présente le mécanisme général de chloration des acides α-aminés

R R R

- CH O CH O Cl CH - H - CO2 - Cl C H H2N ClHN N R N

O- O- H HOCl

HOCl

R R R R C O CH O CH O H H O - CO2 C H 2 N C - HCl ClN C HN C CH H R N - + -HCl HN O Cl O- Cl O- Cl O H H

- CO2 - CO2 -Cl- -Cl-

- HCl H R C N C Cl R N R

CH H2O H2N O

H + OH H OH NH2Cl O

CH Cl CH Cl C R N R N R H + H H2 NH2Cl Figure I.14. Mécanisme réactionnel de la chloration des acides α-aminés. D’après Stanbro et Smith, 1979 ; Alouini et Seux, 1987 ; McCormick et al., 1993 ; Conyers et Scully, 1997 figure I.14. Si les acides aminés possèdent dans leur chaîne latérale des groupements potentiellement réactifs avec les oxydants (chlore ou chloramines), de nombreuses autres réactions sont envisageables. Pour des chaînes alkyles, aucune attaque n’est observée dans le cas de la valine (McCormick et al., 1993) ni de l’isoleucine (Nweke et Scully, 1989). Conyers et Scully (1997) n’observent pas non plus d’attaque du noyau aromatique lors de la chloration de la phénylalanine. Cependant, Conyers et Scully (1997) observent l’attaque du groupement amine porté par la chaîne latérale de la lysine. Trehy et al. (1986) notent la formation d’hydrate de chloral, de dichloroacétonitrile et de chloroforme lors de la chloration de la tyrosine et du tryptophane. Le chloroforme est formé par attaque du noyau aromatique et ouverture de cycle suivie d’une hydrolyse, tandis que l’hydrate de chloral et le dichloroacétonitrile se forment par attaque directe du groupement aminé.

27

Les vitesses de décomposition des acides aminés par le chlore et la monochloramine sont élevées (tableau I.11). Cependant les constantes cinétiques mesurées par les différents auteurs sont difficilement comparables. En effet certains auteurs considèrent la réaction entre la monochloramine sous sa forme neutre alors que d’autres considèrent la forme protonée de la monochloramine (figure I.15).

+ NH3Cl RNHCl RNH2 H+

RNH2 NH2Cl RNHCl Figure I.15. Voies réactionnelles de la monochloramine avec les amines et les acides aminés figure I.15. Tableau I.11. Constantes cinétiques de chloration et de chloramination de quelques composés azotés tableau I.11. k k Composé HOCl Ref. NH3Cl+ Ref. (M -1.s -1) (M -1.s -1) ammoniaque 2,9.10 6 Margerum et al., 1978 méthylamine 1,9.10 8 Margerum et al., 1978 1,8.10 7 Snyder et Margerum, 1981 glycine 5,0.10 7 Margerum et al., 1978 9,36.10 8 Isaac et Morris, 1985 1,7.10 7 Snyder et Margerum, 1981 glycylglycine 5,3.10 6 Margerum et al., 1978 1,10.10 8 Isaac et Morris, 1985 α-alanine 5,4.10 7 Margerum et al., 1978 6,94.10 8 Snyder et Margerum, 1981 β-alanine 8,9.10 7 Margerum et al., 1978 1,3.10 8 Snyder et Margerum, 1981 glycine 6,71.10 6 Isaac et Morris, 1985 2,97.10 7 Isaac et Morris, 1985 éthylester thréonine 1,8.10 6 Snyder et Margerum, 1981 sérine 4,18.10 8 Isaac et Morris, 1985 sarcosine 1,08.10 8 Armesto et al., 1993 7,40.10 8 Isaac et Morris, 1985 morpholine 2,30.10 8 Isaac et Morris, 1985

I.4.3. Réactivité de la monochloramine avec les hydroxybenzènes, comparaison avec le chlore

I.4.3.1. Réaction avec le phénol, le crésol et leurs dérivés chlorés Le m-crésol est plus réactif que le phénol avec la mono et la dichloramine (Heasley et al., 2004). Les chloramines sont assez réactives pour attaquer les positions ortho et para. La mono et la dichloramine montrent la même orientation avec le phénol mais des orientations différentes avec les phénols substitués. Pour le crésol, la forme des chloramines présente une influence sur la répartition des sous-produits. La dichloramine favorise la substitution en para du groupement -OH par rapport à la monochloramine. Ceci peut être lié à l’encombrement stérique, plus important dans le cas du crésol que dans celui du phénol, limitant ainsi la formation d’un complexe entre NHCl 2 et la fonction hydroxyl car les deux atomes de chlore de NHCl 2 peuvent interagir avec le groupement méthyl.

Ces auteurs notent aussi une forte différence entre la mono et la dichloramine sur la réaction avec l’intermédiaire monochloré (2-chlorophénol). La monochloramine forme majoritairement le 2,4- dichlorophénol (77%) alors que la dichloramine conduit à des productions de 2,4-dichlorophénol et 28 Chapitre I : Synthèse bibliographique de 2,6-dichlorophénol dans des proportions similaires. Cet effet peut être attribuable au mécanisme d’action des chloramines. La monochloramine étant un réactif électrophile, elle aura tendance à attaquer le site présentant la densité en électron la plus élevée (position en para du groupement – OH). Dans le cas de la dichloramine, l’existence d’un complexe entre le groupement hydroxyl et NHCl 2 augmenterait la proportion de 2,6-dichorophénol formé. Cet effet peut être attribuable au groupement méthyl augmentant la densité électronique sur le cycle aromatique. De plus, la formation de composés organo-azotés tels que l’indophenol et des benzoquinone-imine ont aussi été observées.

En large excès de phénol ou de crésol (30:1), la substitution en ortho du groupement hydroxyl est majoritaire (75%) par rapport à la substitution en para (25%). La forme des chloramines (mono ou di) ne présente pas d’influence sur la répartition des sous-produits mais la réaction est plus lente avec la dichloramine qu’avec la monochloramine.

Pour des proportions équimolaires entre chloramines et phénol, il y a substitution d’atomes de chlore sur les positions ortho et para et production des mono, di et trichlorophénol. En présence d’un excès de chloramines, les réactions conduisent à la transformation totale des intermédiaires mono et di en trichlorophénols. Les chloramines attaquent l’atome de chlore en para du 2,4,6- trichlorophénol pour former un mélange de dichloro-benzoquinone-imine et de dichloro- benzoquinone. Des réactions similaires sont identifiées pour le trichloro-m-cresol et le trichlorométhoxyphénol. Ces mécanismes seraient de nature radicalaire (Heasley et al., 2004).

Pour des pH élevés, il y a formation d’indophénol lors de la chloramination du phénol (pH = 13) cette réaction n’est cependant pas observée pour des pH plus faibles (pH = 9).

I.4.3.2. Réaction avec le résorcinol, mécanisme et sous-produits Heasley et al. (1999) montrent que le résorcinol (1) ainsi que le 4-chlororésorcinol (2), le 4,6- dichlororésorcinol (3) et le 2,4,6-trichlororésorcinol (4) réagissent avec la monochloramine en milieu aqueux à pH = 7 pour donner un intermédiaire pentachloré, le 2,2,4,4,6-pentachloro-5- cyclohexen-1,3-dione (5) (figure I.16). Cet intermédiaire s’hydrolyse en présence de NH 2Cl en perdant CO 2 pour former le 1,1,3,5,5-pentachloro-3-penten-2-one (6) qui donne à son tour le 1,1,1,3,5,5-hexachloro-3-penten-2-one (7) et le 1,1,3,5,5,5-hexachloro-3-penten-2-one (8). Le composé 7 se réarrange rapidement en 8 en présence de NH 2Cl. Le mécanisme de ce réarrangement n’est pas clairement établi et les auteurs suggèrent deux mécanismes possibles. Cependant les + auteurs pensent que ce mécanisme ne fait pas appel à une catalyse par NH 3/NH 4 parce que le composé 7 et NH 3 dans l’éther anhydre ne donnent pas le composé 8.

Le produit 6 forme majoritairement le composé 8 (85%) en excès de monochloramine. Le composé 3 en mélange équimolaire avec la monochloramine forme 51% de composé 6, 25% de composé 7 et 24% de composé 8. La conversion du résorcinol et de l’intermédiaire pentachloré en chloroforme est de 4% (NH 2Cl : Resorcinol = 7 mol : 1 mol). Cette faible formation de chloroforme s’explique car le composé 7 s’hydrolyse très lentement alors qu’il réagit rapidement pour former 8. A titre de comparaison, la conversion du résorcinol en chloroforme est de 50% pour le chlore dans ces mêmes conditions (Heasley et al., 1999).

29 OH OH O OH OH Cl Cl Cl Cl Cl Cl Cl NH2Cl NH2Cl NH2Cl NH2Cl OH OH O OH OH Cl Cl Cl Cl 1 2 3 4 5 H2O

O OH 6 6 (forme énol) Cl Cl Cl Cl Cl Cl Cl Cl O Cl Cl -CO2 Cl Cl Cl O Cl Cl NH2Cl OH B - NH - NH Cl 3 - NH 2 NH2Cl 3 8 7 Cl Cl Cl Cl Cl ClCl Cl Cl Cl Cl + NH Cl + Cl Cl Cl Cl Cl Cl 2 2 O O O + - NH + NH2Cl NH4 - NH3 NH3 4 Cl Cl Cl Cl ClCl Cl Cl Cl Cl H2O OH + CHCl Cl 3 Cl Cl Cl Cl O O O A Figure I.16. Mécanisme de chloration-chloramination du résorcinol. D’après Heasley et al. (1999). A: non observée en milieu anhydre ; B : chloramination uniquement figure I.16. La chloration du résorcinol suit un mécanisme similaire avec la formation successive des dérivés monochloré (2), dichloré (3), trichloré (4) (Heasley et al., 1989). L’intermédiaire conduisant à l’ouverture du cycle serait, soit le dérivé tétrachloré soit le dérivé pentachloré (Boyce et Horning, 1983), cependant divers auteurs suggèrent que l’ouverture du cycle a lieu à partir de l’intermédiaire pentachloré et non du tétrachloré (Heasley et al., 1989 ; De Leer et al., 1985). Boyce et Horning (1983) mettent en évidence que les sous-produits de chloration du résorcinol dépendent d’une part du ratio chlore : résorcinol mais aussi du pH du milieu. Dès les faibles taux de chloration, le chloroforme est observé. Pour des taux de chloration compris entre 3 et 5 mol de chlore par mol de résorcinol (pH = 7 - 10), les principaux sous-produits sont le chloroforme et la 3,5,5-tricyclopent-3- ene-1,2-dione.

Le tableau I.12 présente les sous-produits de chloration du résorcinol pour différents ratios chlore : résorcinol en fonction du pH.

30 Chapitre I : Synthèse bibliographique

Tableau I.12. Sous-produits de chloration du résorcinol d’après Boyce et Horning, 1983. -4 -4 -3 [Résorcinol] = 5.10 M ; [Cl 2] = 5.10 – 5.10 M ; T = 10°C tableau I.12. pH Cl 2 tot / R 4 7 10 OH OH

OH OH OH OH Cl Cl OH Cl Cl OH OH Cl Cl OH Cl OH OH OH OH OH OH OH Cl Cl Cl Cl OH Cl Cl Cl OH 1 O Cl Cl OH OH OH OH O Cl Cl Cl Cl Cl OH OH O Cl Cl Cl Cl Cl O

Cl OH

Cl CHCl 3 Cl CHCl 3 OH OH OH

OH Cl OH Cl Cl

OH Cl Cl O Cl Cl OH OH OH Cl O OH Cl Cl OH Cl 3 OH O Cl OH Cl Cl Cl Cl O Cl O Cl Cl Cl CHCl 3

OH Cl Cl CHCl 3 Cl Cl OH OH

Cl Cl Cl OH O O Cl Cl Cl O Cl O OH OH O Cl Cl 5 Cl Cl O Cl Cl O Cl Cl O Cl OH Cl Cl Cl Cl Cl

Cl Cl CHCl 3 CHCl 3 Cl Cl CHCl 3 Cl O Cl Cl O Cl

Cl Cl Cl Cl Cl Cl Cl Cl O

Cl OH Cl Cl O Cl Cl Cl Cl O Cl Cl OH Cl 10 Cl OH 6 acides chlorocarboxyliques Cl Cl Cl Cl OH dont : CHCl 3 Cl O Cl O HOOC COOH Cl CHCl 3 Cl OH Cl OH Cl O Cl O

C

Cl OH Cl

31 I.4.3.3. Cinétique de chloration des hydroxybenzènes et de leurs dérivés chlorés Compte tenu de l’absence de références bibliographiques traitant de la vitesse de chloramination de composés hydroxybenzéniques, cette partie est essentiellement consacrée à l’aspect cinétique de la chloration de ces composés.

Dans un cas général, les hydroxybenzènes (Ar(OH) n) réagissent avec le chlore selon une cinétique d’ordre 1 par rapport à chacun des réactifs. La constante cinétique apparente d’ordre 2 est néanmoins dépendante du pH et présente un maximum pour des pH entre 8 et 11 et un minimum pour des pH compris entre 3 et 6 (Lee et Morris, 1962 ; Rebenne et al., 1996 ; Gallard et von Gunten, 2002b). La variation de la constante cinétique apparente d’ordre 2 s’explique par la différence de réactivité des formes protonées et déprotonées. De plus, un effet catalytique à pH acide est observé (Rebenne et al., 1996 ; Gallard et von Gunten, 2002b). Les réactions entre les formes anioniques des hydroxybenzènes et l’ion hypochlorite sont rarement évoquées, en effet la forme ClO - est beaucoup moins réactive que la forme HOCl (Acero et al., 2005). La dégradation apparente des hydroxybenzènes s’exprime par la loi cinétique d’ordre 2 (équation 1.61) :

-d[ArX(OH) n]tot / dt = kapp [ArX(OH) n]tot [HOCl] tot (1.61) où X représente un ou plusieurs atomes de chlore.

En étudiant la réactivité de quelques composés dihydroxybenzéniques vis-à-vis du chlore, Rebenne et al. (1996) montrent que l’effet du pH sur la valeur de la constante apparente d’ordre 2 de la réaction globale s’explique en considérant les réactions élémentaires ainsi que les équilibres suivants :

ArX(OH) 2 + HOCl  P k1.62 (1.62) - ArX(OH)O + HOCl  P k1.63 (1.63) - ArX(O )2 + HOCl  P k1.64 (1.64) + ArX(OH) 2 + HOCl + H  P k1.65 (1.65) - - + ArX(O )2 + ClO + H  P k1.66 (1.66) - + HOCl  ClO + H K1.3 (1.3) - + ArX(OH) 2  ArX(OH)O + H K1.67 (1.67) - - + ArX(OH)O  ArX(O )2 + H K1.68 (1.68)

Il est ainsi possible d’exprimer la constante cinétique comme une fonction des constantes élémentaires et de l’activité des ions H +.

+ + [H ] (k [H ]2 + k K [H + ]+ k K K + k [H + ]3 )( ) 1.62 1.63 1.67 1.64 1.67 1.68 65.1 + + = [H ] K1.3 k app + + 2 (1.69) K1.67 [H ]+[H ] + K1.67 K1.68

Le tableau I.13 présente les constantes cinétiques de ces réactions pour différents hydroxybenzènes et leurs dérivés chlorés. Soper et Smith (1926) et Rebenne et al. (1996) montrent que la réactivité de l’ion hypochlorite est négligeable. Pour des pH compris entre 6 et 9, la réactivité des hydroxybenzènes est principalement gouvernée par la réaction entre l’acide hypochloreux et les formes ionisées des hydroxybenzènes.

32 Chapitre I : Synthèse bibliographique

Tableau I.13. Constantes cinétiques mises en jeu lors de la chloration des hydroxybenzènes

Composé k1.62 (± σσσ) k1.63 (± σσσ) k1.64 (± σσσ) k1.65 (± σσσ) Référence (M -1.s -1) (M -1.s -1) (M -1.s -1) (M -1.s -1) - - + (-OH) n (-OH) n-1(–O ) (-OH) n-2(O )2 catalyse H Résorcinol <330 1,36 (0,26).10 6 1,15 (0,10).10 8 8,5 (1,8).10 6 Rebenne et al., 1996 4-MCR* <65 1,43 (0,16).10 5 6,73 (0,53).10 7 1,19 (0,15).10 6 Rebenne et al., 1996 4,6-DCR* 47 (17) 3,21 (0,76).10 4 5,91 (0,81).10 7 2,6 (1,2).10 4 Rebenne et al., 1996 Orcinol 1250 (160) 5,18 (0,34).10 6 4,20 (0,04).10 8 9,8 (1,1).10 6 Rebenne et al., 1996 Phénol 0,36 (0,28) 2,19 (0,08).10 4 / 2,49 (0,98).10 2 Gallard et Von Gunten, 2002b nd 3,52 (0,19).10 4 / nd Lee et Morris, 1962 p-crésol 0,09 (0,05) 2,71 (0,49).10 4 / 1,69 (0,49).10 4 Gallard et Von Gunten, 2002b 2-MCP* nd 2,42 (0,08).10 3 / nd Lee et Morris, 1962 4-MCP* 0,02 (0,005) 2,17 (0,49).10 3 / 1,6 (0,4).x10 1 Gallard et Von Gunten, 2002b nd 3,16 (0,22).10 3 nd Lee et Morris, 1962 2,4-DCP* nd 3,03 (0,09).10 2 / nd Lee et Morris, 1962 2,6-DCP* nd 1,94 (0,11).10 2 / nd Lee et Morris, 1962 2,4,6-TCP* nd 12,84 (0,69) / nd Lee et Morris, 1962 tableau I.13. * MCR : monochlororésorcinol ; DCR : dichlororésorcinol ; MCP : monochlorophénol ; DCP : dichlorophénol ; TCP : trichlorophénol.

La figure I.17 montre l’évolution des constantes apparentes d’ordre 2 (modélisée d’après les résultats de Rebenne et al., 1996) pour le résorcinol et ses premiers dérivés chlorés. Pour des pH compris entre 8 et 10, il est intéressant de noter que, malgré une diminution de la vitesse des réactions élémentaires en fonction du nombre d’atomes de chlore sur le cycle aromatique, on observe une augmentation de la vitesse apparente de décomposition des hydroxybenzènes. Ce décalage s’explique par un déplacement des pKa. De plus, le décalage des minima de la constante cinétique apparente vers les plus fortes valeurs de pH lorsque le degré de substitution augmente est cohérent avec l’augmentation des valeurs des pKa de ces mêmes composés.

5

4 ) -1 .s

-1 3 (M app 2 Résorcinol 4-MCR log k 1 4,6-DCR

0 0 5 10 15 pH

Figure I.17. Evolution de la constante apparente de chloration en fonction du pH figure I.17. Pour les pH rencontrés dans les eaux naturelles, la réaction entre les formes protonées des hydroxybenzènes et l’acide hypochloreux est la plus importante. En prenant comme référence la forme mono-ionisée des hydroxybenzènes, il est possible de comparer leur réactivité vis-à-vis du chlore (constantes k 1.63 ). Ainsi, le résorcinol et l’orcinol sont les composés les plus réactifs. La réactivité des hydroxybenzènes diminue avec l’augmentation de la substitution d’atome de chlore

33 sur le cycle aromatique. La présence d’un groupement méthyl en méta des groupements –OH n’affecte pas de manière significative la réactivité des hydroxybenzènes.

Les vitesses de bromation des composés phénoliques sont environ 1000 fois plus rapides que celles observées lors de la chloration. Néanmoins, l’acide hypochloreux et l’acide hypobromeux semblent attaquer le cycle aromatique sur les mêmes positions (Acero et al., 2005).

Dans de nombreux cas, les relations entre structure et réactivité sont interprétées en comparant, pour une même famille de composés et un oxydant donné, les constantes cinétiques de second ordre et les constantes de Hammett. Ces dernières reflètent l’effet activant/désactivant global d’un substituant sur le cycle aromatique. Deborde et von Gunten (2008) sur la base de nombreux travaux (Lee et Morris, 1962 ; Rebenne et al., 1996 ; Gallard et von Gunten, 2002 ; Pinkston et Sedlack, 2004 ; Acero et al., 2005), montrent que les constantes cinétiques d’ordre 2 des réactions entre le chlore, les ions phénoxide et les formes anioniques des dihydroxybenzènes sont proportionnelles aux constantes de Hammett. Ces composés présentent des pentes négatives, caractéristiques d’une réaction de type substitution électrophile. Cependant les mono et dihydroxybenzènes présentent deux corrélations différentes : pour une même valeur de Σσo,m,p , les dihydroxybenzènes sont environ 100 fois plus réactifs que les monohydroxybenzènes (figure I.18). Néanmoins, en recalculant les constantes de Hammett afin de tenir compte uniquement des sites d’attaque probable (ortho et/ou para des fonctions phénoliques), Deborde et von Gunten (2008) montrent que ces deux familles de composés présentent une corrélation commune, ce qui implique un mécanisme de dégradation similaire.

12 1,3-dihydroxybenzene (anions) phénolate 10 phénolate + 1,3 dihydroxybenzènes (anions)

8 Corrélation classique 6 log k 4

2 Corrélation corrigée Deborde et von Gunten (2008) 0 -2 -1,5 -1 -0,5 0 0,5 1

ΣσΣσΣσ o,m,p

Figure I.18. Corrélation de Hammett pour la chloration de composés hydroxybenzèniques. D’après Deborde et von Gunten, 2008 figure I.18.

I.4.3.4. Formation de chloroforme, rendement et cinétique Historiquement, les trihalométhanes (THM), et notamment le chloroforme, sont les premiers sous- produits de chloration mis en évidence dans les eaux potables (Bellar et al., 1974 ; Rook, 1974 et 1977). Dans les eaux destinées à la consommation humaine, les trihalométhanes les plus souvent observés sont le chloroforme, le bromodichlorométhane, le dibromochlorométhane et le bromoforme. Plus récemment, la présence de THM iodés a été mise en évidence lors de la

34 Chapitre I : Synthèse bibliographique désinfection au chlore, à l’ozone et à la monochloramine d’eaux contenant des ions iodure (Bichsel, 2000).

Des études ont montré que l’utilisation de la monochloramine, en remplacement du chlore, permet de réduire de manière significative la formation de THM (Reckhow et Singer, 1985 ; Carlson et Hardy, 1998 ; EPA, 1999 ; Hua et Reckhow, 2007 ; Lu et al., 2009). L’élimination des précurseurs est une autre voie couramment envisagée pour réduire la formation de chloroforme. Une pré- ozonation permet notamment la destruction efficace des structures responsables de la formation des THM (Reckhow et Singer, 1985 ; Croué et al., 1989).

D’un point de vue plus fondamental, les composés possédant des structures de type β-dicétone et β- diol conjugués sont particulièrement réactives (c.f. paragraphe I.4.1.2). Ces structures, aliphatiques ou aromatiques représenteraient un type de précurseurs importants pour la formation de THM lors de la chloration de MON (Reckhow et Singer, 1985). Les alcools aromatiques sont aussi de fort précurseurs de chloroforme (Norwood et al., 1980). Le résorcinol et les composés possédant des structures similaires (phloroglucinol, orcinol…) conduisent à des productions de chloroforme proches de 0,9 mole de CHCl 3 formé par mole de résorcinol (Norwood et al., 1980 ; De Laat et al., 1982 ; Boyce et Hornig, 1983 ; Gallard et von Gunten, 2002b). Cette réactivité est liée à la double activation du carbone situé entre les deux groupements –OH. L’atome de carbone du chloroforme provient du carbone en position 2 sur le cycle aromatique (Boyce et al., 1983). D’après Norwood et al. (1980 ), ce type de structure conduirait à une formation importante de chloroforme car le carbone libre entre les deux groupements -OH induirait à une résonance cétone-énol pouvant stabiliser l’intermédiaire carbanion.

Bien que les composés aromatiques de type β-dicétone et β-diol conduisent à des rendements de formation de chloroforme importants, le chloroforme ne représente qu’un des nombreux sous- produits formés lors de la chloration. De plus, la quantité de chlore incorporée dans le chloroforme est faible (< 50 %) par rapport à la quantité de chlore consommée (De Laat et al., 1982 ; Reckhow et Singer 1985 ; Dickenson et al., 2008)

La présence de fonctions alkyles sur les autres positions du cycle aromatique ne semble pas affecter le rendement de formation de chloroforme. Il en est de même pour les composés dicycliques comme le 1,3-dihydroxynaphtalène (Boyce et Horning 1980). La présence d’une fonction acide sur le cycle aromatique conduit à des rendements de formation de chloroforme différents suivant sa position. Un rendement de formation de 90 % est observé dans le cas de l’acide 2,4-dihydroxybenzoïque alors que l’acide 3,5 dihydroxybenzoïque, dans les mêmes conditions, ne conduit qu’à des rendements proches de 50 % (Boyce et Horning 1980 ; Norwood et al., 1980). A l’exception de l’acide citrique, les acides carboxyliques, aliphatiques ne présentent que de faibles rendements de formation de CHCl 3 (Larson et Rockwell, 1979).

La cinétique de formation de chloroforme a été étudiée pour divers composés modèles. La vitesse de formation du chloroforme à partir de nombreux précurseurs est régie par une loi cinétique d’ordre global 2 (ordre 1 par rapport à chacun des composés) (De Laat et al., 1982 ; Gallard et von Gunten, 2002b ; Arnold et al., 2008). La vitesse de formation de chloroforme dépend aussi du pH. Alors que le mécanisme de formation de CHCl 3 fait intervenir de nombreuses étapes, il est intéressant de noter que la loi cinétique s’exprime par un ordre entier. Ceci indiquerait qu’une unique réaction régirait la vitesse de formation de chloroforme. Il est ainsi possible de modéliser la formation de chloroforme par cette seule étape cinétiquement limitante.

Dans le cas de la chloration de cétones, l’étape cinétiquement limitante de la réaction haloforme est la déprotonation du carbone en α afin de former un carbanion en équilibre avec sa forme énolate avant l’attaque de HOCl (Bartlett, 1934 ; Bartlett et Vincent, 1935). Dans le cas de la chloration des

35 composés aromatiques, l’étape de chloration du dérivé trichloré pourrait constituer l’étape cinétiquement limitante (Heasley et al., 1989). La vitesse de formation de chloroforme lors de chloramination de composés modèles n’a fait l’objet d’aucune étude. Cependant, compte tenu du mécanisme de formation proposé par Heasley et al. (1999), il semble peu probable de pouvoir décrire la vitesse de formation de CHCl 3 par une cinétique d’ordre global 2. En effet, en présence d’ammoniaque, des réactions compétitives à la formation de CHCl 3 ont été observées (figure I.19).

OH Cl Cl

NH2Cl H2O OH - CO2 Cl Cl Cl Cl Cl

Cl Cl O

H2O NH2Cl

Cl Cl Cl Cl Cl OH Cl Cl Cl

+ CHCl O + + O 3 + NH +3 ClNH2Cl

Figure I.19. Mécanisme de formation de CHCl 3 à partir du 2,4,6-TCR. D’après Heasley et al., 1999 figure I.19. Outre l’aspect fondamental, il est intéressant d’étudier la cinétique de formation de chloroforme à partir de composés modèles. Reckhow et Singer (1985) proposent un mécanisme expliquant la formation de CHCl 3 lors de la chloration de MON, en associant la fraction réactive des acides fulviques à des structures de type β-dicétones. Plus récemment, Gallard et von Gunten (2002a) montrent qu’il est possible de modéliser la formation de chloroforme. Ces auteurs associent la fraction très réactive des matières organiques, et responsable de la formation initiale de chloroforme, à des structures de type résorcinol. La fraction moins réactive mais responsable de la formation lente de chloroforme est quand à elle assimilée à des structures de type phénol (figure I.20).

1.5

lent HOCl 1 (µM)

3 MON = OH OH

CHCl 0.5 rapide + HOCl OH 0 0 100 200 300 400 500 Temps (heures)

Figure I.20. Modélisation de la formation de chloroforme lors de la chloration de matières organiques naturelles (MON). D’après Gallard et von Gunten, 2002a figure I.20.

36 Chapitre I : Synthèse bibliographique

I.4.3.5. Formation des acides haloacétiques (HAA) Reckhow et Singer (1985) ont proposé que les hydroxybenzènes conduisent à des productions relativement importantes de HAA. Parmi les différents composés testés (tableau I.14), le phénol est le composé conduisant à la formation la plus importante de HAA. A titre de comparaison, le résorcinol qui conduit à une formation très importante de chloroforme (0,9 mol/mol) ne conduit qu’à une production de HAA limitée (0,055 mol/mol). Les HAA formés par chloration de composés hydroxybenzéniques sont principalement sous forme d’acide trichloroacétique (TCAA). Les concentrations mesurées en TCAA sont environ 10 à 20 fois plus élevées que celles de l’acide dichloroacétique (DCAA) (Norwood et al., 1980 ; Reckhow et Singer, 1985).

La chloration de différentes cétones aliphatiques peut conduire à des productions importantes de HAA. Dans le cas général, les β-dicétones conduisent à des productions de HAA plus importantes que les α et γ-dicétones et que les composés ne possédant qu’une fonction carbonyle. Des rendements de formation de HAA particulièrement importants sont observés pour l’acide 3- oxopentanedioïque (68 % à pH = 8 après 24 h), et l’acétoacétate d’éthyle (76 % à pH = 7 après 72 h). Contrairement aux composés aromatiques qui conduisent majoritairement à la formation de TCAA, les cétones et acides aliphatiques mènent principalement à la formation de DCAA. Le pH est un paramètre important qui joue à la fois sur le rendement de formation et sur la spéciation des HAA. Cependant son rôle est encore incertain notamment dans le cadre de la chloration/chloramination des MON (Diehl et al., 2000 ; Pope et al., 2002).

Zhang et al. (2009), en étudiant la formation de SPD de la chloration de différentes MON, montrent que la vitesse de formation des HAA est plus élevée que la vitesse de formation des THM. De plus, la formation de HAA est favorisée à pH acide alors que les THM sont formés plus facilement à pH basique. La fraction hydrophobe acide des MON (HPOA) et les MON d’origine algale sont particulièrement réactives vis-à-vis du chlore et conduisent à des rendements de formation de THM et de HAA importants (Chen et al., 2008). La figure I.21 propose un mécanisme de formation des acides haloacétiques.

Précurseur modèle OH Cl Cl Précurseur modèle O Cl HOCl R R R R OH

R Cl O O O O ouverture de cycle HOCl R' = Cl Cl

Cl O Cl O Cl O Cl Cl Cl HOCl Cl TCAA R Cl R Cl Cl R Cl Cl Si R = H Cl rapide OH - OH HOCl Cl CHCl HOCl 3 O Cl O rapide R = CH Cl Cl DCAA Cl Cl R Cl OH OH Cl + Cl Cl OH- O O R = Cl Cl Cl Cl Cl Cl Cl Cl OH OH Cl Cl Cl lent O O OH O Figure I.21. Mécanisme de formation des acides haloacétique. D’après Roberts et Caserio, 1968 ; Reckhow et Singer, 1985 ; Heasley et al., 1999 figure I.21.

37 Lors de la chloramination de MON, la production de HAA est 10 à 20 fois plus faible que celle observée lors de la chloration (Cowman et Singer, 1996). De plus, le traitement à la monochloramine favorise la formation du DCAA par rapport à celle du TCAA.

Qi et al. (2004) montrent que le mode de traitement (monochloramine préformée ou formée in situ) présente une influence sur la formation des SPD tels que les HAA. Plus tard, Lu et al. (2009) et Zhang et al. (2009) suggèrent que la formation de HAA lors de la chloramination des MON pourrait provenir de la réaction du chlore libre (libéré par hydrolyse de la monochloramine) sur les sites réactifs des MON. De plus la formation de HAA est moins sensible à une augmentation de la dose de désinfectant dans le cas d’un traitement à la monochloramine que dans le cas d’un traitement au chlore (Lu et al. , 2009).

D’après Simpson et Hayes (1998), l’utilisation de la monochloramine augmente la proportion de HAA. Ceux-ci peuvent en effet représenter 54 % des composés organohalogénés adsorbables (AOX) identifiés, ce qui signifie alors que les concentrations en HAA sont supérieures à celles en THM.

I.4.3.6. Formation d’AOX Compte tenu de la diversité des composés présents dans les eaux et potentiellement réactifs vis-à- vis chlore, il n’est a priori pas possible de caractériser tous les sous-produits formés lors de la chloration. La mesure des AOX (Adsorbable Organical Halides) est une méthode globale qui permet d’estimer la quantité de sous-produits halogénés. Seules quelques rares études (Reckhow et Singer, 1985 ; Hureiki et al., 1994 ; Dickenson et al., 2008) traitent de la production d’AOX lors de la chloration de composés organiques. L’étude de la production d’AOX lors de la chloramination de composés modèles n’a, à notre connaissance, jamais été étudiée.

Ces différents travaux mettent en évidence que la formation d’AOX à partir de la chloration de composés simples dépend de la structure de ces composés et des groupements fonctionnels présents. Dickenson et al. (2008) observent une corrélation entre la demande en chlore et formation d’AOX. Les composés phénoliques testés (résorcinol et phénol) se caractérisent par une forte demande en chlore (8-10 mol/mol), et une forte formation d’AOX (3-5 mol éq Cl - /mol) respectivement pour le résorcinol et le phénol. Les composés aliphatiques β-dicarbonylés présentent des demandes et des rendements de formation d’AOX plus modérés. A l’exception de quelques composés, 40 à 50 % du chlore consommé est incorporé dans les AOX. Lors de la chloration de MON, les AOX sont formés préférentiellement à partir de structures aromatiques. Cependant, bien que les acides humiques produisent plus d’AOX que les acides fulviques, aucune corrélation entre groupements phénoliques et formation d’AOX n’est observée dans le cas des acides humiques alors qu’une bonne corrélation est observée dans le cas des acides fulviques (Reckhow et al., 1990).

Contrairement au chlore, chloramination de MON conduit à une formation moindre (9 – 50 %) d’AOX que la chloration (Jensen et al., 1986). Williams et al. (1997) montrent que les eaux traitées à la monochloramine conduisent à une production d’AOX dans les réseaux 2 à 3 fois plus faible que les eaux traitées au chlore.

Il est intéressant de confronter les résultats obtenus pour les sous-produits simples (THM, HAA) à une analyse globale telle que les AOX (tableau I.14). Ainsi les AOX formés lors de la chloration du résorcinol sont principalement constitués de chloroforme. Il en est de même pour l’acétophénone, bien que ce composé présente des rendements de formation de CHCl 3 10 fois plus faibles que le résorcinol. Les HAA formés sont majoritairement sous forme de TCAA. Dans certain cas, le TCAA représente une part importante des AOX formés (phénol, benzaldéhyde, acide 4-hydroxy-3- méthoxy-benzoïque). A quelques exceptions près, où le chloroforme et les HAA représentent la majorité des AOX formés, une grande partie des composés organohalogénés n’est pas identifiée.

38 Chapitre I : Synthèse bibliographique

Tableau I.14. Formation de chloroforme et d’acides haloacétiques lors de la chloration à pH = 7. D’après Reckhow et Singer, 1985 tableau I.14. Rendement (mol / mol) Pourcentage des TOX TOX CHCl 3 TCAA DCAA CHCl 3 TCAA DCAA Phénol 1,49 0,03 0,355 0,018 5,2 71,4 2,4 Résorcinol 3,1 0,888 0,054 0,003 73,1 4,4 0,2 Catéchol 0,1 0,0024 0,0014 <0,0005 6,2 4,1 <0,5 Hydroquinone 0,21 0,0079 0,0098 0,0011 9,8 6,0 1,0 Acide benzoïque <0,005 <0,0005 <0,0005 <0,0005 nd. nd. nd. Benzaldéhyde 0,0044 <0,0001 0,0004 <0,0004 <1 29 <1 Acétophénone 0,191 0,0740 0,00085 0,0002 98,8 1,3 0,1 Anisole 0,3444 0,0009 0,0075 0,0006 0,7 6,6 0,3 Isopropylbenzène 0,0122 0,00086 0,0002 0,00010 18,0 4,9 1,6 Acide 4-hydroxy-3- 1,55 0,03 0,268 0,019 5,0 52,1 2,4 méthoxybenzoïque Acide 4-hydroxy-3,5- 1,80 0,003 0,532 0,030 0,4 88,5 3,3 diméthoxybenzoïque Acide fulvique 0,63 0,044 0,033 0,015 20,8 15,7 4,7 (Black lake) nd. Non détecté.

39

CHAPITRE II : DECOMPOSITION DES CHLORAMINES EN ABSENCE DE COMPOSES ORGANIQUES

CHAPITRE II : DECOMPOSITION DES CHLORAMINES EN ABSENCE DE COMPOSES ORGANIQUES

II.1. Introduction...... 41

II.2. Matériel et méthodes...... 42 II.2.1. Préparation des solutions...... 42 II.2.2. Dispositif expérimental ...... 42 II.2.3. Analyses et mode de calcul des concentrations...... 43 II.2.3.1. Concentration en chlore total et en chloramines ...... 43 II.2.3.2. Concentration en ions nitrite et nitrate ...... 45 II.2.4. Détermination des constantes cinétiques et modélisation ...... 45 II.2.4.1. pH acide...... 45 II.2.4.2. pH basique et neutre...... 47 II.2.4.3. Simulation des courbes de décomposition ...... 47

II.3. Etude cinétique de la décomposition des chloramines...... 48 II.3.1. Décomposition en eau ultra-pure ...... 48 II.3.1.1. Influence du pH sur la cinétique de décomposition ...... 48 II.3.1.2. Rôle du pH sur le mécanisme de catalyse d’interconversion...... 52 II.3.1.3. Dégradation de la monochloramine à pH basique...... 55 II.3.2. Décomposition en tampon phosphate...... 59 II.3.2.1. Influence de la concentration ions en phosphate...... 60 II.3.2.2. Influence du pH...... 60 II.3.3. Formation d’ions nitrate ...... 63 II.3.4. Formation d’un composé inconnu...... 65

II.4. Modélisation cinétique de la décomposition des chloramines ...... 68 II.4.1. Modélisation en eau ultra-pure...... 68 II.4.2. Modélisation en tampon phosphate...... 72 II.4.3. Modélisation de la formation d’ions nitrate ...... 72 II.4.4. Modélisation à pH libre...... 73

II.5. Conclusion ...... 74

Chapitre II : Décomposition des chloramines en absence de composés organiques

CHAPITRE II : DECOMPOSITION DES CHLORAMINES EN ABSENCE DE COMPOSES ORGANIQUES

II.1. Introduction La complexité du mécanisme de décomposition des chloramines, présenté dans le chapitre I, implique une étude préalable de leur stabilité en absence de composés organiques. En effet, dans le cadre d’une étude sur la cinétique de consommation de NH 2Cl par des composés organiques modèles, il est nécessaire de connaître la vitesse d’autodécomposition de NH 2Cl dans l’eau pure, car elle n’est pas nécessairement négligeable par rapport aux vitesses de réaction avec certains composés organiques.

En outre, une simple demande en monochloramine requiert aussi cette attention. Une soustraction de la demande en NH 2Cl d’un témoin sans composé organique n’est applicable que dans le cas où la consommation en NH 2Cl dans le témoin est faible devant la consommation en NH 2Cl en présence de composés organiques.

Cette étude a donc pour but d’examiner l’influence du pH, la nature du tampon (phosphate, ou carbonate) et sa concentration sur la décomposition de la monochloramine. De nombreux suivis cinétiques ont été effectués pour des teneurs initiales en chlore total comprises entre 1 et 2 mM en excès d’azote ammoniacal (N/Cl ≈ 2) pour une température régulée à 25°C. Le suivi du chlore total a été effectué par dosage iodométrique au thiosulfate de sodium et/ou par dosage - spectrophotométrique du I 3 en présence d’ions iodure. L’évolution du spectre UV-Visible apporte des informations notamment sur la spéciation des chloramines. Enfin la production d’ions nitrate a été étudiée sur quelques expériences. Le suivi de la concentration résiduelle en chloramines a été effectué sur des périodes variant de 100 à 1700 heures en fonction des conditions expérimentales.

Ce travail permet dans un premier temps de définir les conditions optimales de stabilité de la monochloramine en absence de composés organiques. Ces conditions seront alors adoptées pour l’étude des composés organiques. Le second objectif de ce travail est de vérifier les modèles proposés dans la littérature avec nos conditions expérimentales. Outre l’intérêt fondamental que cette étude présente, la modélisation cinétique de la décomposition des chloramines en absence de composés organiques contribue à la compréhension de la réactivité des chloramines sur les composés organiques. En effet, dans le cas de composés organiques faiblement réactifs, l’étude doit tenir compte de l’ensemble des réactions conduisant à la décomposition de la monochloramine. Pour cela nous avons envisagé d’appliquer certains modèles présentés dans le chapitre I. Les simulations sont effectuées à l’aide du logiciel Copasi 4.5.

Après la description des matériels et méthodes utilisées dans cette étude, la première partie de ce chapitre est consacrée à la présentation des résultats expérimentaux obtenus en eau ultra-pure puis en milieu tamponné. La seconde partie aura pour but de tester et de valider un modèle cinétique permettant de simuler la décomposition de la monochloramine. Les réactions et les équations présentées dans ce chapitre font l’objet d’une numérotation indépendante du chapitre I.

41 II.2. Matériel et méthodes II.2.1. Préparation des solutions Toutes les solutions ont été préparées à partir de réactifs de qualité analytique et d’eau purifiée, de résistivité 18,2 M Ω.cm, produite par un système Millipore (Milli RX75/Synergy 185). Les solutions mères de chlorure d’ammonium (Fisher Scientific, > 99%) et de chlore libre (NaOCl, 13 %, Acros Organics) sont stockées à 4°C à l’abri de la lumière.

Les solutions de monochloramine ( 1 − 2 mM) sont préparées au maximum quelques heures avant utilisation, en ajoutant lentement et sous agitation rapide, le chlore libre dans une solution de chlorure d’ammonium. Les solutions de monochloramine sont préparées en utilisant un rapport molaire azote sur chlore (N/Cl = [Azote ammoniacal]0/[Chlore total] 0) proche de 2. Un spectre UV de la solution de monochloramine fraîchement préparée est réalisé afin de vérifier que le chlore libre est intégralement converti en monochloramine.

Les concentrations en chlore et en monochloramine dans les solutions mères sont déterminées par titrage iodométrique au thiosulfate de sodium 0,01 M (Prolabo, > 99,9 %) (Standard Methods, 4500-Cl). Le pH est mesuré avec un pH-mètre PHM 250 (Radiometer) équipé d’une électrode de verre (Radiometer, CL114 JB).

Lors de l’étude de l’influence des ions phosphate (NaH 2PO 4 et Na 2HPO 4, Acros Organic) et carbonate (NaHCO 3, Acros Organic, 99,7 %) sur la décomposition de la monochloramine, les ajouts de chlorure d’ammonium et d’hypochlorite de sodium sont réalisés directement dans la solution tampon préalablement ajustée au pH souhaité par HCl ou NaOH. Toute la verrerie est nettoyée avec une solution de chlore ( ≈ 1 mM) et laissée sous chlore avant les expériences. II.2.2. Dispositif expérimental Toutes les expériences sont réalisées en réacteur fermé parfaitement agité (bouteilles en verre ambré de 125 à 3000 mL fermées avec un bouchon en PTFE) et à température constante (25°C). Lors des expériences réalisées en absence de tampon phosphate, un dispositif permettant de réguler le pH a été utilisé. Le dispositif présenté à la figure II.1 comprend entre autre un boîtier régulateur (Endress+Hauser ; CPM 253) équipé d’une électrode de verre (TMR ; OPS11-2AA04ESA) pour la mesure du pH ; lorsque que le pH mesuré dépasse la consigne (basse) programmée, le boîtier commande la mise en marche d’une pompe péristaltique (Gilson ; Minipuls 3) relié à deux burettes de précision de 5 mL, contenant respectivement une solution de soude et d’acide chlorhydrique. La pompe est arrêtée automatiquement dès que le pH mesuré dépasse la consigne (haute) programmée. Les solutions de soude et d’acide chlorhydrique sont préparées afin de pouvoir obtenir une régulation rapide, précise et ne modifiant pas sensiblement le volume dans le réacteur.

42 Chapitre II : Décomposition des chloramines en absence de composés organiques

pH mètre régulateur

Réservoir gradué Electrode (NaOH ou HCl) Pompe Bain thermostaté Péristaltique (25°C) Réacteur

Agitateur magnétique

Figure II.1. Schéma du réacteur utilisé pour les expériences en absence de tampon figure II.1.

II.2.3. Analyse et mode de calcul des concentrations

II.2.3.1. Concentration en chlore total et en chloramines - Les concentrations globales en espèces chlorées (HOCl, ClO , NH 2Cl, NHCl 2) ont été déterminées par titrage iodométrique au thiosulfate de sodium, en présence d’un indicateur d’iode (Labosi, Iodex). Pour des rapports molaires N/Cl supérieurs à 1,1 et des pH supérieurs à 7,5 la mesure du chlore total est considérée comme égale à la concentration en chloramines. Les spectres UV de la monochloramine et de la dichloramine étant relativement différents, il a été possible de quantifier ces deux espèces par une simple mesure spectrophotométrique entre 200 et 400 nm. La figure II.2 présente les spectres de la monochloramine et de la dichloramine. Ces deux composés présentent respectivement des absorbances maximales à 244 et 294 nm.

500

NH Cl 400 2

) NHCl 2

-1 300 .cm -1 200 (M ε ε ε ε 100

0 200 250 300 350 λλλ (nm)

Figure II.2. Spectres UV de la monochloramine et de la dichloramine figure II.2. 43 L’évolution des spectres UV (200 - 400 nm) a été suivie en cours de réaction afin de pouvoir calculer les concentration en NH 2Cl et en NHCl 2. En considérant que les concentrations en chlore total et que les valeurs d’absorbance des solutions mesurées à diverses longueurs d’onde correspondent uniquement à la présence de NH 2Cl et de NHCl 2, nous pouvons écrire les relations suivantes :

[Cl 2]tot = [NH 2Cl] + 2 x [NHCl 2] (2.1) A254 nm = ( ε NH2Cl, 254 [NH 2Cl] + ε NHCl2, 254 [NHCl 2]) l (2.2) A294 nm = ( ε NH2Cl, 294 [NH 2Cl] + ε NHCl2, 294 [NHCl 2]) l (2.3) où A 254 nm et A 294 nm représentent respectivement les absorbances mesurées aux longueurs d’onde de 254 nm et de 294 nm avec une cuve de trajet optique égal à l. Compte tenu de la possible formation d’ions nitrate lors de la dégradation de la monochloramine, il est préférable, afin de minimiser les interférences, de tenir compte de l’absorbance à 254 nm plutôt que de celle à 244 nm.

La résolution de ce système d’équations à deux inconnues permet de déterminer les concentrations molaires en monochloramine et en dichloramine :

équation 2.4 équation 2.5 A ε × A A ε × A 254 nm - NHCl2,254 294 nm 294 nm - NH2Cl,294 254 nm ε ε ×ε ε ε × ε [NH Cl] = NH2Cl,254 NH2Cl,254 NHCl2,294 [NHCl ] = NHCl2,294 NH2Cl,254 NHCl2,294 2 ε ×ε 2 ε ×ε -1 NHCl2,254 NH2Cl,294 -1 NHCl2,254 NH2Cl,294 ε ×ε ε ×ε NH2Cl,254 NHCl2,294 NH2Cl,254 NHCl2,294

-1 -1 -1 -1 avec ε NH2Cl, 254 = 369 M cm ε NH2Cl, 294 = 15 M cm -1 -1 -1 -1 ε NHCl2, 254 = 136 M cm ε NHCl2, 294 = 289 M cm

La détermination systématique de la concentration en chlore total, par dosage iodométrique permet de confirmer que la somme des concentrations en monochloramine et en dichloramine, respectivement calculées à l’aide des équations 2.4 et 2.5, correspond au chlore total mesuré par iodométrie. Pour des pH acides et proches de la neutralité (pH < 7,5), un bon recouvrement est obtenu entre les concentrations en chlore total déterminées par spectrophotométrie et par dosage iodométrique (figure II.3.a).

Pour des pH plus élevés (pH > 7,5), on note que les valeurs diffèrent significativement entre les deux méthodes. Cet aspect, illustré sur la figure II.3.b sera discuté ultérieurement (paragraphe II.3.4). Néanmoins, pour les pH supérieurs 7,5 le chlore total est essentiellement représenté par la monochloramine.

44 Chapitre II : Décomposition des chloramines en absence de composés organiques

(a) (b) 2 Dosage iodométrique 2 Dosage iodométrique Calcul par spectrophotométrie Calcul par spectrophotométrie 1,5

) ) 1,5

(mM 1 (mM 1 tot tot ] ] 2 2

[Cl 0,5 [Cl pH = 6,0 0,5 pH = 8,2

0 0 0 50 100 150 200 0 500 1000 1500 2000 Temps (h) Temps (h)

Figure II.3. Différence entre la mesure du chlore total par iodométrie et par spectrophotométrie (a) pH = 6,0 ; expérience n° EUPR6.0. (b) pH = 8,2 ; expérience n° EUPR8.2 figure II.3.

II.2.3.2. Concentration en ions nitrite et nitrate Afin de mesurer la concentration en ions nitrite et nitrate, les échantillons ont été neutralisés au sulfite de sodium avec un excès molaire de 10 %. Des expériences préliminaires ont montré que des solutions d’ions nitrite et d’ions nitrate à des concentration de 50 µM sont stables pendant au moins 50 heures en présence d’une concentration d’ions sulfite de 2 mM.

Les ions nitrite et nitrate ont été analysés par chromatographie d’appariement d’ion. Les analyses chromatographiques ont été réalisées sur une chaîne Waters (W600 controller ; W717plus Autosampler) équipé d’une colonne C18 (Agilent Zorbax 300A) et d’un détecteur UV (Waters W486) mesurant l’absorbance à λ = 215 nm. L’éluant est composé de dihydrogénophosphate de potassium (1,36 g.L-1) et d’hydrogénosulfate de tétrabutylammonium (0,85 g.L-1), dont le pH est ajusté à 6 par une solution d’acide chlorhydrique. Les ions nitrite et nitrate sont respectivement élués à 7,4 et 11,5 min pour un débit de 1 mL.min -1.

II.2.4. Détermination des constantes cinétiques et modélisation Les constantes de vitesse de dégradation de la monochloramine ont été calculées à partir du suivi de la concentration en monochloramine et/ou en chlore total. Ce paragraphe présente les méthodes de calcul utilisées afin de déterminer les constantes de vitesses conformément aux données présentées dans le chapitre I.

II.2.4.1. pH acide

Pour des pH < 6, il est possible de suivre les concentrations en NH 2Cl et NHCl 2 en fonction du temps pendant les premières heures en négligeant la perte de chlore total. [Cl 2]tot = [NH 2Cl] tot + 2 [NHCl 2] = constante (2.1)

La réaction globale de dismutation de la monochloramine peut s’écrire par la réaction 2.6. + NH 2Cl + NH 2Cl  NHCl 2 + NH 3 réaction catalysée par H (2.6)

La réaction 2.6 s’explique par l’existence d’un équilibre entre les formes neutres et protonées de la + monochloramine (réaction 2.7) puis par réaction de la forme protonée (NH 3Cl ) sur la forme neutre (NH 2Cl) (réaction 2.8).

45 + + NH 3Cl  NH 2Cl + H KNH3Cl+ = k + / k - (2.7) + + NH 3Cl + NH 2Cl  NHCl 2 + NH 3+ H kNH3Cl+ (2.8)

Le paramètre expérimentalement mesuré est la concentration totale en NH 2Cl notée [NH 2Cl] tot avec + [NH 2Cl] tot = [NH 2Cl] + [NH 3Cl ] (2.9)

Néanmoins, compte tenu du pKa de la monochloramine (pK NH3Cl+ = 1,45), il est possible de considérer que [NH 2Cl] tot ≈ [NH 2Cl]. A partir des réactions (2.7) et (2.8), on peut alors exprimer la vitesse de décomposition de la monochloramine sous ses différentes formes : − + d[NH 3Cl ] + + + = − + + k +[NH 3Cl ] k −[NH 2Cl][H ] k NH Cl [NH 3Cl ][NH 2Cl] (2.10a) dt 3 − d[NH 2Cl] + + + = − + + + k +[NH 3Cl ] k −[NH 2Cl][H ] k NH Cl [NH 3Cl ][NH 2Cl] (2.10b) dt 3

Le bilan matière (2.9) permet d’exprimer la vitesse de dégradation globale : − − + d[NH 2Cl] tot d[NH 2Cl] d[NH 3Cl ] + = − = + k 2 k NH Cl [NH 3Cl ][NH 2Cl] (2.11) dt dt dt 3

Or l’équilibre (2.7) est considéré comme respecté sur l’intervalle de temps dt, soit + + = [NH 2Cl][H ] + = [NH 2Cl][H ] K + + [NH3Cl ] (2.12) NH 3Cl [NH 3Cl ] K + NH 3Cl d’où + − d[NH Cl] 2k + [H ] 2 tot = NH 3Cl 2 [NH 2Cl] (2.13) dt K + NH 3Cl Ainsi pour un pH donné la décomposition de NH 2Cl peut être décrite par une cinétique d’ordre 2 apparent (équation 2.14). + − d[NH Cl] 2k + [H ] 2 tot = = NH 3Cl k obs [NH 2Cl]² avec k obs (2.14) dt K + NH 3Cl

k obs K + NH 3Cl soit k + = NH Cl + 3 [H2 ]

Cependant l’expression de la dismutation des chloramines varie selon les auteurs. Valentine et Jafvert (1988), entre autres, expriment la dismutation de la monochloramine sous sa forme condensée : + + 2 NH 2Cl + H  NHCl 2 + NH 3 + H (2.15) La cinétique de décomposition de la monochloramine est alors décrite par une cinétique d’ordre 3 (équation 2.16) − d[NH 2Cl] tot + = 2k +[H ][NH Cl]² (2.16) dt H 2 Il existe ainsi une relation simple reliant k H+ et k NH3Cl+ :

k + = NH 3Cl k H+ (2.17) K + NH 3Cl

46 Chapitre II : Décomposition des chloramines en absence de composés organiques

II.2.4.2. pH basique et neutre Pour des pH > 6 et des temps de contact plus élevés (plusieurs heures à plusieurs semaines), la décomposition du chlore total n’est plus négligeable. Dans ce cas de figure, le paramètre mesuré est la concentration en chlore total [Cl 2]tot = [NH 2Cl] tot + 2 [NHCl 2] (2.1)

En plus des réactions citées précédemment, il est nécessaire d’inclure la réaction conduisant à la perte de chlore total - + NHCl 2 + NH 2Cl  N 2 + 3 Cl + 3 H kdec (2.18)

Dans ces conditions, l’évolution de la concentration en chlore total peut s’écrire sous la forme − d[Cl ] − d[NH Cl] 2d[NHCl ] 2 tot = 2 tot − 2 (2.19) dt dt dt avec + − d[NH Cl] 2k + [H ] 2 tot = NH 3Cl 2 + [NH 2Cl] kdec [NH 2Cl][NH 2Cl] (2.20) dt K + NH 3Cl et + − d[NHCl ] k + [H ] 2 = − NH 3Cl + [NH 2Cl]² kdec [NHCl 2 ][NH 2Cl] (2.21) dt K + NH 3Cl En posant le principe de l’état stationnaire pour la concentration en NHCl 2, nous pouvons écrire : − d[NHCl ] 2 = 0 (2.22) dt alors + k + [H ] NH 3Cl 2 = [NH 2Cl] k dec [NHCl 2 ][NH 2Cl] (2.23) K + NH 3Cl et + − d[NH Cl] 3k + [H ] 2 tot = NH 3Cl 2 = 2 [NH 2Cl] k obs [NH 2Cl] (2.24) dt K + NH 3Cl Cette équation montre que la vitesse de disparition de la monochloramine suit une loi cinétique apparente de second ordre par rapport à la concentration en NH2Cl et que la constante cinétique apparente de disparition de la monochloramine est alors égale à 3 fois la constante de vitesse pour l’étape initiale de dismutation de NH 2Cl.

L’intégration de l’équation conduit à + 3k + [H ] k + 1 1 NH 3Cl + NH 3Cl = = = + = - kobs t t 3k H [H ] avec k H+ (2.25) [NH 2Cl] t [NH 2Cl] 0 K + K + NH 3Cl NH 3Cl

II.2.4.3. Simulation des courbes de décomposition Le logiciel Copasi 4.5 a été utilisé afin de simuler les courbes de formation/décomposition des chloramines au cours du temps. Copasi permet de décrire, par la résolution d’équations différentielles, l’évolution de l’ensemble des espèces incluses dans le modèle. Ce paragraphe décrit de façon synthétique la méthode de construction d’un modèle sous Copasi.

Exemple de l’écriture d’une réaction irréversible (sous Copasi) : NH3 + HOCl  NH2Cl + H2O k1 = 1.5E10 L/(mol/h)

47

Par défaut les lois cinétiques s’appliquant à ces réactions sont définies par l’écriture de la réaction. Ainsi la réaction précédente sera décrite par l’équation -d[NH 3]/dt = -d[HOCl]/dt = d[NH 2Cl]/dt = k1 [NH 3][NH 2Cl]. Il est possible de définir de nombreuses autres lois cinétiques ; cependant, lors de cette étude, aucune loi cinétique spécifique ne sera utilisée.

De nombreux composés intervenant dans les réactions présentent différentes formes acido-basiques. Ces équilibres seront par la suite considérés comme toujours respectés en appliquant des constantes cinétiques supérieures à la limite de diffusion dans l’eau.

Exemple de l’écriture d’un équilibre (sous Copasi) : H2O = HO + H k1 = 1E14 L/(mol/h) k2 = 1E28 L/(mol/h)

Le rapport des constantes k 1/k 2 est choisi de manière à respecter le produit ionique de l’eau (Ke = 10 -14 ). Ce type d’écriture a été utilisé pour décrire tous les équilibres acido-basiques du modèle.

Afin de simplifier les calculs, les concentrations de certaines espèces sont considérées comme constantes au cours du temps. Dans toutes les simulations, la concentration en eau est fixée à 1 de manière à respecter l’ordre 1 apparent des réactions d’hydrolyse. Lors de la simulation des courbes à pH régulé, la concentration en ion H + a été fixée à la valeur du pH de consigne.

II.3. Etude cinétique de la décomposition des chloramines II.3.1. Décomposition en eau ultra-pure Cette partie s’intéresse particulièrement à l’étude de l’influence du pH de la solution sur la décomposition des chloramines. Aucune espèce, autre que les réactifs destinés à la formation des chloramines et à l’ajustement du pH, n’est introduite en solution (NaOCl, NH 4Cl, NaOH et/ou HCl). Les expériences ont été effectuées à pH régulé (par ajout de NaOH ou HCl) ou à pH libre.

II.3.1.1. Influence du pH sur la cinétique de décomposition Le tableau II.1 résume l’ensemble des expériences réalisées en eau ultra-pure pour des pH < 9. Pour chaque expérience, le tableau donne : - la concentration initiale ([Cl 2]tot 0 ) et finale ([Cl 2]tot f ) en chlore total, - la durée de l’expérience correspondant au temps final, - le rapport molaire N/Cl utilisé pour la synthèse de la monochloramine (N/Cl = [NH 4Cl] 0 /[NaOCl] 0) - le pH initial (pH 0) et/ou final (pH f) ou sa variation extrême pour les expériences réalisées avec régulation, - les constantes cinétiques apparentes d’ordre 2 (k obs ) obtenues lors de décomposition de la monochloramine. La force ionique du milieu n’a pas été fixée et aucune correction de force ionique n’a été effectuée lors de calculs. La force ionique initiale est comprise entre 2 et 3 mM, et elle augmente lors de la dégradation de la monochloramine, néanmoins la variation maximale de la force ionique reste inférieure à 10 mM.

48 Chapitre II : Décomposition des chloramines en absence de composés organiques

Tableau II.1. Liste des expériences réalisées en eau ultra-pure pour des pH < 9 tableau II.1. Durée [Cl ] Libre (L) / [Cl ] k 2 tot 0 N/Cl pH 2 tot f [NH Cl] obs Code (h) (mM) 0 Régulé (R) (mM) 2 f (M -1.h -1) 7,5 2,1 1,75 5,5 ±0,1 R 1,73 0,57 154,11 EUPR5.5 56 1,93 2,07 5,7 ±0,1 R 0,70 0,7 91,92 EUPR5.7 159 1,67 1,80 6,0 ±0,1 R 0,37 0,16 39,97 EUPR6.0 166 1,61 1,86 6,2 ±0,1 R 0,59 0,15 37,36 EUPR6.2 5 2,11 1,89 6,2 ±0,1 R 1,98 1,43 39,47 EUPR6.4 142 1,66 1,81 6,5 ±0,1 R 0,52 0,48 10,51 EUPR6.5 110 1,69 1,78 7,1 ±0,1 R 0,81 0,81 5,30 EUPR7.1 210 1,61 1,86 7,5 ±0,2 R 0,27 0,27 3,50 EUPR7.5 233 1,59 1,89 8,0 ±0,1 R 0,90 0,90 2,28 EUPR8.0 1753 2,04 1,96 8,2 ±0,1 R 0,42 0,42 1,14 EUPR8.2 230 1,55 1,93 8,5 ±0,1 R 1,30 1,30 0,55 EUPR8.5 162 1,53 1,96 8,12 L (pH f = 5,2) 0,83 0,07 / EUPL8.1 456 1,50 8,93 L (pH f = 3,8) 0,30 0,18 / EUPL8.9

Pour les expériences réalisées sans régulation de pH, la dégradation de la monochloramine peut conduire à une diminution rapide et importante du pH. La figure II.4 montre un exemple de suivi des concentrations en monochloramine, dichloramine et du pH. Ces résultats mettent en évidence différentes phases lors de la dégradation de la monochloramine. La première phase (I) consiste en une zone de relative stabilité de la monochloramine accompagnée d’une diminution très lente du pH, la dichloramine n’est pas détectée dans ce domaine. Lors de la seconde phase (II) la dégradation de la monochloramine s’accélère et s’accompagne d’une augmentation de la concentration en dichloramine et d’une nette diminution du pH et de la concentration en chlore total. La troisième phase (III) est caractérisée par une faible valeur de pH et une concentration stable en chlore total ; la dichloramine est l’espèce majoritaire dans cette zone. Il est intéressant de noter que la durée de la phase de latence avant la phase de décomposition maximale est fortement dépendante du pH initial. Plus celui-ci est élevé, plus la phase d’accélération de la décomposition de la monochloramine est retardée.

(a) (b) 1,8 10 1,8 10 I II III Cl 2 tot I II III 1,6 1,6

1,4 8 1,4 pH 8 Cl 1,2 2 tot 1,2 1,0 1,0 6 6 0,8 pH 0,8 pH NH 2Cl pH NH Cl 0,6 0,6 2 4 4 Concentration (mM) Concentration 0,4 (mM) Concentration 0,4 0,2 0,2 NHCl 2 NHCl 2 0,0 2 0,0 2 0,0 72,0 144,0 0 72 144 216 288 360 Temps (h) Temps (h)

Figure II.4. Evolution de la concentration en monochloramine, dichloramine, chlore total (déterminé par iodométrie) et du pH en fonction du temps. Expérience à pH libre (a) pH 0 = 8,1 expérience n° EUPL8.1. (b) pH 0 = 8,9 expérience n° EUPL8.9 figure II.4.

49 Ces résultats montrent qu’il n’est pas possible de décrire l’évolution des concentrations en monochloramine et en dichloramine par un modèle simple lorsque le pH varie. Aussi, afin de simplifier l’interprétation des résultats, la plupart des expériences ont donc été réalisées à pH régulé.

La figure II.5 présente des exemples de courbes de disparition du chlore total obtenues à différents pH (régulés). Les résultats montrent que la vitesse de disparition du chlore total augmente lorsque le pH diminue.

1,0

0,8 tot 0 tot ]

2 0,6

/ / [Cl 0,4 tot

] pH = 8,5 2 pH = 7,1 [Cl 0,2 pH = 6,5 pH = 6,0 0,0 0 24 48 72 96 120 144 168 Temps (h)

Figure II.5. Influence du pH sur la décomposition du chlore total, déterminé par iodométrie. Evolution relative de la concentration en chlore total (sous forme de chloramines) en fonction du temps. [Cl 2]tot 0 ≈ 1,6 mM ; N/Cl ≈ 2. Expériences n°: EUPR6.0 ; EUPR6.5 ; EUPR 7.1 ; EUPR8.5 figure II.5. La figure II.6 présente des exemples de courbes d’évolution des concentrations en monochloramine et en dichloramine obtenues à pH 6,0, 6,5 et 7,1. Les résultats montrent clairement l’effet du pH sur la décomposition de la monochloramine ainsi que sur la spéciation entre la mono et la dichloramine. Il convient de noter qu’à pH > 7,5, plus de 99 % du chlore total est constitué de NH 2Cl.

(a) (b) (c)

pH = 6,0 pH = 6,5 pH = 7,1 1,5 1,5 1,5 NH 2Cl

NH 2Cl NH Cl 1,0 2 1,0 1,0

0,5 0,5 0,5 NHCl Concentration (mM) Concentration (mM) 2 Concentration (mM) NHCl 2 NHCl 2 0,0 0,0 0,0 0 48 96 144 0 48 96 144 0 48 96 144 Temps (h) Temps (h) Temps (h) Figure II.6. Spéciation et décomposition des chloramines. (a) pH = 6,0 (EUPR6.0). (b) pH = 6,5 (EUPR6.5). (c) pH = 7,1 (EUPR7.1) figure II.6. En accord avec les données bibliographiques, une diminution du pH favorise la formation de NHCl 2 par dismutation de la monochloramine et augmente ainsi la vitesse de décomposition de NH 2Cl.

kobs NH 2Cl + NH 2Cl  → NHCl 2 + NH 3 (2.6) kdec - + NH 2Cl + NHCl 2  → N 2 + 3 Cl + 3 H (2.18)

50 Chapitre II : Décomposition des chloramines en absence de composés organiques

En considérant ces deux réactions, l’évolution de la concentration en NH 2Cl peut être décrite par l’équation 2.24. Le calcul détaillé est présenté dans le paragraphe II.2.4.

+ − d[NH Cl] k3 + [H ] 2 tot = NH 3Cl = [NH 2Cl]² k obs [NH 2Cl]² (2.24) dt K + NH 3Cl Cette équation montre que la vitesse de disparition de la monochloramine suit une loi cinétique apparente de second ordre par rapport à la concentration en NH 2Cl et que la constante cinétique apparente de disparition de la monochloramine est alors égale à 3 fois la constante de vitesse pour l’étape initiale de dismutation de NH 2Cl.

L’intégration de l’équation conduit à + 3k + [H ] k + 1 1 NH 3Cl + NH 3Cl = = = + = - kobs t t 3k H [H ] avec k H+ (2.25) [NH 2Cl] t [NH 2Cl] 0 K + K + NH 3Cl NH 3Cl

La figure II.7 montre que pour toutes les expériences effectuées à pH ≤ 8,5 (pH régulé), la vitesse de disparition de la monochloramine peut effectivement être parfaitement décrite par une loi cinétique apparente d’ordre 2 par rapport à la concentration en monochloramine. Les constantes cinétiques apparentes obtenues sont comprises entre 154 M -1.h -1 (à pH = 5,5) et 0,55 M -1.h -1 (à pH = 8,5). L’ensemble des résultats est présenté dans le tableau II.1.

3000 60 pH = 5,7 pH = 6,0 y = 1,60E+07x -1 2500 50 0 ) R2 = 9,89E-01 -1 Cl] .h 2 2000 40 -1

-[NH 1500 30 -1 pH = 6,5 /3 (M obs Cl] pH = 8,5

2 1000 20 k

[NH 500 pH = 7,1 10

0 0 0 20 40 60 80 0E+00 1E-06 2E-06 3E-06 4E-06 Temps (h) [H +] (M)

Figure II.7. Détermination des constantes Figure II.8. Evolution de la constante cinétiques apparentes d’ordre 2. pH = 5,7 apparente d’ordre 2 (k obs /3) en fonction de la (EUPR5.7) ; pH = 6,0 (EUPR6.0); pH = 6,5 concentration en ions H + (EUPR6.5) ; pH = 7,1 (EUPR7.1) ; pH = 8,5 (EUPR8.5) figure II.7. figure II.8. La figure II.8 montre que les valeurs des constantes cinétiques apparentes de dégradation de la + monochloramine (k obs ) sont proportionnelles à la concentration en ions H . Il est ainsi possible de calculer la constante cinétique k H+ . + 7 -2 -1 kobs =3 k H+ [H ] avec k H+ = 1,6.10 M .h (2.26)

7 -2 -1 La valeur de k H+ obtenue au cours de cette étude (kH+ = 1,6.10 M .h ) est du même ordre de grandeur que les valeurs rencontrées dans la littérature (tableau II.2).

51 Tableau II.2. Constante k H+ tableau II.2. k H+ Conditions expérimentales Références (M -2.h -1) Granstorm, 1954 2,6.10 7 I = 0,45 M ; 25°C cité par Valentine et Jafvert,1988 9,9.10 6 I = 0,5 M ; 25°C Gray et al. , 1978 pH = 3 - 4 acide phosphorique (50-200 mM) ; 2,3.10 7 Valentine et Jafvert,1988 [NH 2Cl] 0 =1,4 mM ; I = 0,2 M ; 25°C 1,6.10 7 Voir tableau II.1 Cette étude

Parmi les valeurs publiées, Valentine et al. (1988) ont obtenu une constante cinétique égale à 7 -2 -1 2,3.10 M .h en étudiant la cinétique de dismutation de NH 2Cl à pH acide (3 < pH < 4). Ces expériences ont été effectuées en présence de concentrations variables en acide phosphorique et avec des temps de réaction inférieurs à 1 min. Dans ces conditions, et en négligeant la perte de chlore total, les auteurs ont montré que la vitesse de dismutation peut être catalysée par les ions H + mais aussi par les différentes formes acido-basiques des ions phosphate. En considérant comme négligeable la perte de chlore total lors des expériences, ces auteurs montrent que la constante cinétique apparente d’ordre 2 peut s’exprimer selon l’équation 2.27 (selon un calcul similaire à celui présenté dans le paragraphe II.2.4.1).

+ - 2 kobs =k H+ [H ] + k H3PO4 [H 3PO 4] + k H2PO4-[H 2PO 4 ] (2.27)

7 -2 -1 La valeur pour k H+ = 2,3.10 M .h a alors été obtenue par interpolation à l’origine de la droite - 2 kobs = f [H2PO 4 ] à pH = 3. Il n’est donc pas étonnant d’obtenir une valeur légèrement différente de ces auteurs car le protocole expérimental ainsi que la méthode de calcul sont différents.

II.3.1.2. Rôle du pH sur le mécanisme de catalyse d’interconversion Selon les réactions considérées dans la synthèse bibliographique, les voies de décomposition de la monochloramine passent par la formation de la dichloramine, soit par une réaction d’oxydation par HOCl, soit par une dismutation de la monochloramine. Malgré la grande réactivité du chlore libre sur la monochloramine, la très faible teneur en chlore libre fait que la voie de formation de NHCl 2 par attaque de HOCl sur NH 2Cl est supposée négligeable. En excès d’azote ammoniacal, la voie principale de formation de la dichloramine passe donc par la dismutation de la monochloramine. Cette réaction, catalysée à pH acide conduit à la formation de NH 3 contribuant à augmenter le pH dans les premières heures de réaction. Cependant, pour des temps de contact plus élevés le pH diminue lors de la dégradation de la monochloramine. Il est donc nécessaire de procéder à deux types de régulation de pH lors de la dégradation de la monochloramine (figure II.9).

52 Chapitre II : Décomposition des chloramines en absence de composés organiques

2,0 régulation du pH par NaOH

1,5 (mM)

tot 1,0 ] 2 [Cl 0,5 régulation du pH par HCl

0,0 0 24 48 72 Temps (h)

Figure II.9. Mode de régulation du pH utilisé en fonction de l’avancement de la réaction à pH = 5,7 (EUPR5.7) figure II.9. + + 2 NH 2Cl + H  NHCl 2 + NH 3 + H (2.28) + + NH 4  NH 3 + H (2.29)

L’étape de catalyse peut par ailleurs s’écrire de la manière suivante : + + NH 2Cl + H  NH 3Cl (2.30) + + NH 3Cl + NH 2Cl  NHCl 2 + NH 3 + H (2.8)

La stœchiométrie de cette réaction implique donc la consommation d’une mole de H + pour deux moles de NH 2Cl. Afin de vérifier la stoechiométrie de cette première étape, des expériences ont été conduites de pH = 5,5 à 6,2 en suivant la quantité de H + nécessaire à ajouter pour maintenir le pH constant. La figure II.10 présente la l’évolution des concentrations en monochloramine et dichloramine par spectrophotométrie UV. On soulignera que dans ces conditions, ce type de mesure ne présente pas d’interférences. La figure II.10.b qui fait apparaître la présence de dichloramine à t = 0 h, s’explique par un défaut de la régulation du pH. Lors de cette expérience, l’ajout initial de HCl a provoqué une chute rapide du pH (pH<5 pendant quelques secondes) avant la stabilisation à pH = 5,7.

(a) (b) (c)

Cl Cl 2,0 2 tot 2,0 Cl 2 tot 2,0 2 tot

NH Cl 1,5 2 1,5 1,5 NH 2Cl NH 2Cl

1,0 1,0 1,0 Ajouté (mmol) Ajouté

+ (mmol) Ajouté Ajouté (mmol) Ajouté + + + H +

H H H H Concentration (mM) Concentration Concentration (mM) Concentration Concentration (mM) Concentration 0,5 0,5 0,5 H+ NHCl 2 NHCl 2 NHCl 2 0,0 0,0 0,0 0 1 2 3 4 0 1 2 3 4 0 1 2 3 4 Temps (h) Temps (h) Temps (h) Figure II.10. Evolution des concentrations en monochloramine, dichloramine, chlore total et quantité d’ions H + ajoutée en fonction du temps. (a) pH=5,5 (EUPR5.5) ; (b): pH=5,7 (EUPR5.7) ; (c) pH=6,2 (EUPR6.2) figure II.10. La faible décroissance du chlore total nous permet de considérer dans un premier temps que seule la dismutation de la monochloramine intervient sur le pH. Compte tenu des conditions de pH utilisées

53 lors de ces expériences, l’azote ammoniacal est considéré comme étant essentiellement sous forme + NH 4 . L’augmentation du pH lors des premières heures de réaction, et par conséquent la nécessité + d’ajouter des ions H pour maintenir le pH constant s’explique donc par la libération de NH 3 dans le milieu (réaction 2.8). Il est ainsi possible de calculer la stoechiométrie de cette étape. La figure II.11 représente quantité d’ions H + ajoutée pour maintenir le pH constant lors de la dismutation de la monochloramine.

1,5 y = 0,3801x R2 = 0,9891 1,0 ajoutée (mmol) ajoutée +

pH = 5,5 0,5 pH = 5,7 pH = 6,2

Quantité d'ions H d'ions Quantité 0,0 0 1 2 3 4

Quantité de NH 2Cl décomposée (mmol)

+ Figure II.11. Détermination du ratio molaire H ajouté / NH 2Cl consommée à partir des expériences effectuées à pH=5,5 (EUPR5.5), pH=5,7 (EUPR5.7) et pH=6,2 (EUPR6.2) dans les premières heures de réaction figure II.11. Bien que la proportionnalité entre la consommation d’ions H + du milieu et la dismutation de la monochloramine existe, les résultats montrent une stœchiométrie apparente de 0,38 mol H + / mol NH 2Cl consommée alors que le ratio attendu par l’examen de la seule réaction 2.28 est de 0,5 mol + H / mol NH 2Cl ( ∆H+ /∆NH2Cl ).

L’étape de décomposition des chloramines, conduisant à la perte de pouvoir oxydant de la solution peut être décrite par la réaction globale 2.18.

+ - NH 2Cl + NHCl 2  N 2 + 3 H + 3 Cl (2.18)

Cette étape présente un effet antagoniste à celle d’interconversion sur la variation du pH. En effet lorsque cette étape devient notable, on remarque une inversion sur la tendance de variation du pH. Bien que la diminution du chlore total reste limité dans nos conditions, il semble nécessaire d’introduire cette correction.

En considérant uniquement la réaction de dismutation (2.28) on a : + + 2 NH 2Cl + H  NHCl 2 + NH 4 d’où ∆H+ /∆NH2Cl interconversion = 1/2

En considérant globalement la réaction conduisant à la destruction des chloramines (2.30) on a : + + - 3 NH 2Cl  N 2 + NH 4 + 2 H + 3 Cl (2.30)

54 Chapitre II : Décomposition des chloramines en absence de composés organiques

d’où ∆H+ /∆NH2Cl destruction = -2/3

Compte tenu que la contribution de la perte de chlore total (100 x ∆[Cl 2]tot /2 ∆[NHCl 2]) lors des premières heures de réaction représente environ 10 % de l’interconversion de la monochloramine dans nos conditions (tableau II.1), il est possible de calculer la stœchiométrie apparente :

∆H+ /∆NH2Cl apparent théorique = α ∆H+ /∆NH2Cl interconversion + (1-α) ∆H+ /∆NH2Cl destruction avec α : contribution de l’interconversion (0,9 dans notre cas). Soit ∆H+ /∆NH2Cl apparent théorique = 0,383

La stoechiométrie observée de 0,381 confirme la stœchiométrie décrite par l’examen des réactions de dismutation et de destruction des chloramines.

Pour des temps de contact plus élevés, la réaction de destruction des chloramines contrôle l’évolution du pH et conduit à augmentation de la concentration en ions H +. La figure II.12 représente la quantité d’OH - introduite nécessaire pour maintenir le pH constant en fonction de la quantité de chloramines décomposée. La stœchiométrie apparente diffère significativement de la stœchiométrie théorique calculée à partir de la seule réaction de destruction des chloramines (2.30). Cependant, de nombreuses réactions font intervenir H + et OH - notamment celles conduisant à la formation des ions nitrates. Il n’est donc pas possible de déterminer une stœchiométrie exacte par le seul examen des réactions.

4,5 4,0 y = 1,2338x + 0,2851 2 3,5 R = 0,9821 3,0 ajoutée (mmol) ajoutée

- 2,5 2,0 pH = 5,5 1,5 pH = 5,7 1,0 pH = 6,5 0,5

Quantité d'ions OH d'ions Quantité 0,0 0 1 2 3 4 Quantité de chlore total décomposé (mmol)

Figure II.12. Détermination du ratio molaire H + formé / chlore total décomposé pH=5,5 (EUPR5.5), pH=5,7 (EUPR5.7) et pH=6,2 (EUPR6.2) figure II.12.

II.3.1.3. Dégradation de la monochloramine à pH basique Le tableau II.3 présente l’ensemble des expériences effectuées en eau ultra-pure pour des pH > 8,5. Les expériences réalisées pour des pH supérieurs à 12 ont été réalisées en absence d’oxygène dissous sous courant continu de diazote. Quelques expériences supplémentaires ont été réalisées sans courant d’azote et sous bullage d’oxygène.

55 Tableau II.3. Liste des expériences réalisées en eau ultra-pure pour des pH > 8,5 tableau II.3. Durée [Cl 2]tot 0 N/Cl pH 0 ou [Cl 2]tot f kobs Remarque Code (h) (mM) [OH -] (M) (mM) (h -1) 233 1,55 1,93 pH = 8,5 ±0,1 1,30 7,40.10 -4 Air EUPR8.5 628 1,99 pH = 10,2 1,07 1,01.10 -3 Air EUPR10.2 121 1,98 pH = 11,0 0,95 1,22.10 -3 Air EUPR11.0 335 1,61 pH = 12,2 1,00 1,48.10 -3 Air EUPR12.2 - -3 119 2,22 [OH ] = 0,05 M 1,09 5,50.10 N2 NaOH0.05 - -3 47 2,12 [OH ] = 0,1 M 1,44 9,30.10 N2 NaOH0.1 - -2 47 2,12 [OH ] = 0,25 M 0,81 2,14.10 N2 NaOH0.25 - -2 32 2,12 [OH ] = 0,5 M 0,44 4,88.10 N2 NaOH0.5N - -2 8 2,1 [OH ] = 1 M 1,00 9,82.10 N2 NaOH1N 29 2,14 [OH -] = 0,5 M 0,37 5,98.10 -2 Air NaOH0.5A 9 1,96 [OH -] = 1 M 0,42 1,70.10 -1 Air NaOH1A - -2 27 2,3 [OH ] = 0,5 M 0,35 6,73.10 O2 NaOH0.5O - -1 3 2,09 [OH ] = 1 M 0,85 2,90.10 O2 NaOH1O

Pour des pH basiques, on note que décomposition de la monochloramine peut être décrite soit par une loi cinétique apparente d’ordre 1 soit par une cinétique apparente d’ordre 2. Cependant, pour les expériences conduisant à une décomposition rapide de la monochloramine, on observe que l’application de l’ordre 2 conduit à une déviation significative de la linéarité (figure II.13). Sur la base de ces résultats, la décomposition en milieu basique sera envisagée comme présentant un ordre 1 apparent par rapport à la monochloramine. De plus, il est observé que, pour des concentrations en ions OH - supérieures à 0,5 M, la présence d’oxygène dissous favorise la dégradation de la monochloramine.

(a) (b) 2000 NaOH = 1 M (N2) R2 = 0,994 NaOH = 1 M (N2) NaOH = 1 M (Air)

1,5 -1 NaOH = 1 M (Air) 2

0 R = 0,881 Cl]) NaOH = 1 M (O2) 2 1500 NaOH = 1 M (O2) Cl] 2 R2 = 0,998 /[NH

0 1

-[NH 1000 2 Cl] -1 R = 0,959 2 Cl] 2 0,5 500 2 [NH

ln ([NH R = 0,996 R2 = 0,956 0 0 0 2 4 6 8 10 0 2 4 6 8 10 Temps (h) Temps (h)

Figure II.13. Détermination de l’ordre apparent à pH basique pour les expériences réalisées avec - une concentration en ions OH = 1M. Expériences réalisées sous bullage d’azote (N 2)(NaOH1N) ; sans bullage d’azote (Air)(NaOH1A) et sous bullage d’oxygène (O 2)(NaOH1O). (a) Linéarisation des résultats selon une cinétique d’ordre 1. (b) Linéarisation des résultats selon une cinétique d’ordre 2 figure II.13. La figure II.14 présente la détermination des constantes cinétiques apparentes d’ordre 1 pour des pH compris entre 8,5 à 12,2. A ces pH, la présence d’oxygène dissous ne conduit à une modification sensible de la vitesse de dégradation de la monochloramine. Ces résultats montrent que la vitesse de dégradation augmente avec le pH de la solution. Une relation linéaire est observée entre la constante

56 Chapitre II : Décomposition des chloramines en absence de composés organiques

cinétique apparente de dégradation de la monochloramine et la concentration en ions OH - en solution (figure II.15).

0,8 0,3 pH = 8,5 pH = 10,2 Sous O2 Cl] Cl] ) 2 0,6 pH = 11,0 Sous Air

pH = 12,2 ) 0,2

-1 Sous N2 / [NH 0 0,4 (h obs Cl] k 2 0,1 0,2 y = 0,0973x

ln [NH ( R2 = 0,9985 0 0 0 200 400 600 800 0 0,5 1 Temps (h) [OH - ] (M)

Figure II.14. Détermination des constantes de Figure II.15. Détermination de k OH- cinétique apparente d’ordre 1. Expériences n° EUPR8.5, EUPR10.2, EUPR11.0 et EUPR12.2 figure II.14. figure II.15. Le fait que la constante cinétique apparente soit proportionnelle à la concentration en ions OH -, peut s’expliquer par la réaction 2.31, conduisant à la formation d’hydroxylamine, proposée par McCoy (1954). - - NH 2Cl + OH  NH 2OH + Cl (2.31)

La vitesse de décomposition de la monochloramine en milieu fortement basique peut s’exprimer par l’expression 2.32. - -d[NH 2Cl]/dt = k OH [OH ][NH 2Cl] (2.32)

L’examen des spectres UV en cours de réaction pour les expériences à pH ≥ 13 montre la présence d’un composé présentant un maximum d’absorption à 302 nm (figure II.16). Lors d’expériences similaires, Anbar et Yagil (1962) interprètent ce composé comme étant l’ion peroxonitrite (OONO -) formé en présence d’oxygène. L’ion peroxonitrite conduit à une interférence sur la mesure de la monochloramine par spectrophotométrie, il est donc nécessaire de procéder à une correction de l’absorbance mesurée afin de quantifier la monochloramine à 250 nm (équation 2.33) :

A250 nm corrigée = A 250 nm – 0,33 x A 302 nn . (Anbar et Yagil, 1962) (2.33)

Cette relation a été vérifiée et utilisée afin de déterminer la concentration en monochloramine lors des expériences réalisées à pH ≥ 13 et en présence d’oxygène dissous. A partir de cette méthode, Anbar et Yagil (1962) déterminent la constante d’hydrolyse en milieu basique de la -1 -1 monochloramine (k OH- = 0,22 M .h ). Néanmoins, cette constante cinétique est déterminée en présence d’une quantité non contrôlée d’oxygène et ne peut pas par conséquent décrire la vitesse de la seule réaction 2.31.

Compte tenu de l’influence de l’oxygène dissous sur la vitesse de décomposition de la monochloramine à pH très basique, la valeur de k OH - déterminée lors de nos expériences sous N 2 est largement inférieure à celle proposée par Anbar et Yagil (1962). La constante d’hydrolyse de la -2 -1 -1 monochloramine en milieu basique déterminée dans notre étude sous N 2 (k OH- = 9,73.10 M .h ) correspond donc à la seule réaction 2.31 (figure II.15).

57 1 2 0,0 h avec O 1 h 2 0,8 0,3 h 0,8 h (0 - 4 h) 1,7 h 1,5

) 3,0 h 14

-1 0,6 18,6 h ) min -1 1

A (cm 0,4 A (cm 0,5 0,2 sans O 2 (0 - 1h) 0 0 220 270 320 370 220 270 320 370 420 λλλ (nm) λλλ (nm)

Figure II.16. Evolution du spectre UV lors de Figure II.17. Influence de l’oxygène dissous sur la dégradation de la monochloramine pour une la formation de l’ion peroxynitrite par concentration en ions OH - = 1 M sous bullage oxydation de l’hydroxylamine en milieu - d’oxygène ; Expérience n° NaOH1O basique. [NH 2OH] 0 = 1,6 mM ; [OH ] = 1 M figure II.16. figure II.17. Les expériences menées sous bullage d’oxygène, sous air et sous bullage d’azote (figure II.15) montrent un effet notable de la concentration en oxygène dissous sur la cinétique de décomposition de la monochloramine pour pH ≥ 13. Cependant il n’est pas possible d’identifier laquelle des deux réactions (2.34 et/ou 2.35) est responsable de l’accélération de la vitesse de décomposition :

_ _ - NH 2Cl + O=N O O  produits (2.34) - NH 2Cl + O 2  produits + OONO (catalysée à pH basique) (2.35)

La formation des ions peroxynitrite pourrait provenir de l’oxydation de l’hydroxylamine en milieu basique et en présence d’oxygène. Quelques expériences complémentaires ont été effectuées afin d’évaluer l’effet de l’oxygène dissous sur des solutions d’hydroxylamine de concentration initiale 1,6 mM en présence de 0,5 et 1 M en ions OH -. La figure II.17 montre que l’hydroxylamine conduit rapidement à la formation d’ions peroxynitrite en présence d’oxygène alors qu’aucune formation significative de ONOO- n’est observée pour les expériences réalisée sous atmosphère protectrices.

Les vitesses de formation de l’ion peroxynitrite peuvent être décrite par une loi cinétique apparente d’ordre 1. De plus, la vitesse de formation des ions peroxynitrite à partir d’une solution -1 d’hydroxylamine de concentration 1,6 mM, saturée en oxygène (20 – 22 mg O 2.L ), passe de 1,19 h-1 à 2,15 h -1 lorsque la concentration en ions OH - passe de 0,5 à 1 M. Ces résultats sont cohérents avec la réaction 2.36.

- - NH 2OH + OH (+ O2)  ONOO (2.36)

L’hydroxylamine formée lors de la dégradation de la monochloramine à pH basique peut à son tour réagir avec la monochloramine. Robinson et al. (2006) proposent un mécanisme réactionnel entre la monochloramine et l’hydroxylamine en présence de tampon phosphate (2.37).

- + - 2- NH 2Cl + 3 NH 2OH + H 2PO 4  2 NH 4 + Cl + 2 H 2O + HPO 4 + N 2O (2.37)

Robinson et al. (2006) montrent que, pour des pH inférieurs à 8, la cinétique de cette réaction s’exprime selon la relation 2.38.

58 Chapitre II : Décomposition des chloramines en absence de composés organiques

+ -d[NH 2Cl]/dt = k 2.38a [NH 3OH ][NH 2Cl] + k 2.38b [NH 2OH][NH 2Cl] (2.38) 3 -1 -1 -1 -1 + Avec k2.38a = 1,00.10 M .s , k2.38b =91 M .s et pKa (NH 3OH /NH 2OH) = 5,96

La réaction entre l’hydroxylamine et la monochloramine n’est pas, selon cette étude, cinétiquement limitante lors de la décomposition en milieu basique. Néanmoins, l’étude menée par Robinson et al. (2006) pour des pH inférieurs à 8 peut ne pas s’appliquer aux fortes valeurs de pH. Ainsi, quelques expériences complémentaires ont été effectuées à des pH plus élevés afin de vérifier si la réaction entre la monochloramine et l’hydroxylamine peut être considérée comme instantanée.

La figure II.18 présente les tests de réduction de la monochloramine par l’hydroxylamine pour des pH allant de 10 à 14. Si ces résultats confirment que la réaction entre la monochloramine et l’hydroxylamine peut être considérée comme instantanée et totale pour des pH ≤ 11, il en est autrement pour les plus fortes valeurs de pH. Des expériences complémentaires devront être menées afin de mieux comprendre les mécanismes mis en jeu pour des pH > 11.

(a) (b) (c)

1 pH = 11 1 pH = 12 1 pH = 14

t = 0 h t = 0 h t = 0 h t = 1 min t = 1 min t = 1 min 0,5 t = 20 min 0,5 t = 20 min 0,5 t = 20 min

A (cm-1) t = 20 h A (cm-1) t = 20 h A (cm-1) t = 20 h

0 0 0 220 270 320 220 270 320 220 270 320 λλλ (nm) λλλ (nm) λλλ (nm)

Figure II.18. Influence du pH sur la réaction NH 2Cl / NH 2OH. [NH 2Cl] = 2 mM ; [NH 2OH] = 1 mM. (a) pH = 11 ; (b) pH = 12 ; (c) pH = 14. Des résultats similaires sont observés à pH = 10 et pH =11, ainsi qu’à pH = 13 et pH = 14 figure II.18.

II.3.2. Décomposition en tampon phosphate L’influence du tampon phosphate a été étudiée majoritairement dans le domaine des pH basiques pour des concentrations initiales en chlore total comprises entre 1,5 et 2 mM. Compte tenu des pKa - 2- des ions phosphate, rappelé ci-dessous, cette partie se limite à l’étude des ions H 2PO 4 et HPO 4 .

- + H3PO 4  H 2PO 4 + H pK 1 = 2,1 (2.39) - 2- + H2PO 4  HPO 4 + H pK 2 = 7,1 (2.40) 2- 3- + HPO 4  PO 4 + H pK 3 = 12,3 (2.41)

Le tableau II.4 présente les conditions expérimentales mises en œuvre lors de l’étude de la dégradation de la monochloramine en présence d’ions phosphate. Compte tenu des valeurs de pH, les concentrations en chlore total sont égales aux concentrations en monochloramine. La concentration totale en ions phosphate, notée [PO 4]tot correspond à la somme des différentes espèces acido-basiques des ions phosphate.

59 Tableau II.4. Liste des expériences en tampon phosphate tableau II.4. Durée [Cl 2]tot 0 [Cl 2]tot f RCl/N pH 0 pH f kobs Libre (L) / [PO4]tot Code (h) (mM) (mM) (M -1.h -1) Régulé (R) (mM) 152 1,60 0,22 1,88 7,58 7,48 26,79 L 49,9 PO4.50L7.6 152 1,59 0,41 1,89 8,08 7,88 12,24 L 49,9 PO4.50L8.1 166 1,59 0,50 1,89 8,27 8,07 8,27 L 50,0 PO4.50L8.3 166 1,60 0,83 1,88 8,15 7,87 3,35 L 9,9 PO4.10L8.1 166 1,63 0,67 1,84 8,14 7,95 5,24 L 19,9 PO4.20L8.1 166 1,49 0,57 2,01 8,15 7,99 6,55 L 29,9 PO4.30L8.1 671 1,67 0,75 1,80 9,52 1,09 R 50,0 PO4.50R9.5 671 1,63 0,63 1,84 9,5 1,42 R 75,0 PO4.75R9.5 671 1,69 0,63 1,78 9,53 1,57 R 100,0 PO4.100R9.5 335 1,58 0,85 1,90 12,17 11,87 1,75 L 50,0 PO4.50L12.2 1753 1,32 0,16 3,03 8,2 7,87 L 25,0 PO4.25L8.2 1753 1,32 0,18 3,03 8,2 2,78 R 25,0 PO4.25R8.2a 1416 2,01 0,02 1,99 6,5 81,34 R 25,0 PO4.25R6.5 1416 2,01 0,05 1,99 7 39,69 R 25,0 PO4.25R7.0 1416 2,01 0,06 1,99 7,2 25,09 R 25,0 PO4.25R7.2 1416 2,01 0,15 1,99 7,8 8,93 R 25,0 PO4.25R7.8 1416 2,01 0,24 1,99 8,2 4,36 R 25,0 PO4.25R8.2b

II.3.2.1. Influence de la concentration ions en phosphate La figure II.19 présente l’influence de la concentration en ions phosphate sur la décomposition de la - 2- monochloramine à pH = 8,0 et pH = 9,5. A pH = 8,0 (H 2PO 4 = 14,0 % ; HPO 4 = 86,0 %), on note une influence notable de l’augmentation de la concentration en phosphate sur la décomposition de 2- la monochloramine. A pH = 9,5 (99,4 % HPO 4 ), l’effet de la concentration sur l’augmentation de la vitesse de décomposition est beaucoup plus contrasté.

(a) (b) 1,0 1,0

0,8 0,8 (mM) (mM)

tot 0 tot 0,6 0,6 tot 0 tot ] ] 2 2 EUPEUP pH = 9,5

/[Cl 0,4 /[Cl 0,4 EUP pH = 8,0

tot tot [POPhosphate4]tot = 30 30mM mM ] ] 2 [POPhosphate4]tot = 10 10mM mM 2 [POPhosphate] = 75 50mM mM 0,2 0,2 4 tot [Cl [PO 4]tot = 20 mM [Cl Phosphate 20mM [POPhosphate4]tot = 100 75mM mM [POPhosphate4]tot = 30 30mM mM 0,0 0,0 0 48 96 144 192 0 48 96 144 192 240 288 Temps (h) Temps (h)

Figure II.19. Influence de la concentration en ions phosphate sur la décomposition du chlore total. (a) pH = 8,0 expériences n° EUPR8.0 ; PO4.10L8.1 ; PO4.20L8.1 ; PO4.30L8.1. (b) pH = 9,5 expériences n° EUPR9.5 ; PO4.30L9.5 ; PO4.75L9.5 ; PO4.100L9.5 figure II.19.

II.3.2.2. Influence du pH Le pH est un paramètre très important dans la décomposition des chloramines. En présence de tampon phosphate, son rôle est double puisqu’il gouverne d’une part la vitesse d’interconversion et intervient d’autre part sur la répartition des différentes formes acido-basiques des ions phosphate,

60 Chapitre II : Décomposition des chloramines en absence de composés organiques dont la réactivité est très différente. La figure II.20 présente l’influence du pH la décomposition du chlore total en présence de phosphates (25 et 50 mM).

(a) (b) 1,0 1,0

pH = 8,2 0,8 0,8 pH = 7,8 (mM)

pH = 7,2 (mM)

tot 0 tot 0,6 0,6 ] tot 0 tot 2 pH = 7,0 ] 2 pH = 6,5 /[Cl 0,4 0,4 pH = 12,2 /[Cl tot ] tot pH = 9,5 2 ] 2 pH = 8,3

[Cl 0,2 0,2 [Cl pH = 8,1 pH = 7,6 0,0 0,0 0 100 200 300 400 500 0 100 200 300 400 Temps (h) Temps (h)

Figure II.20. Influence du pH sur la décomposition du chlore total en présence de tampon phosphate à 25 mM (a) et 50 mM (b). (a) Expériences n° PO4.25R8.2 ; PO4.25R7.8 ; PO4.25R7.2 ; PO4.25R7.0 ; PO4.25R6.5 (b) Expériences n° PO4.50L12.2 ; PO4.50R9.5 ; PO4.50L8.3 ; PO4.50L8.1 ; PO4.50L7.6 figure II.20. Comme dans le cas des expériences effectuées en eau ultra-pure, la diminution du pH accélère la vitesse de décomposition des chloramines. On notera cependant que, pour les fortes valeurs de pH (pH > 12), une légère augmentation de la vitesse de décomposition est observée. Cet effet peut s’expliquer par l’hydrolyse basique de NH 2Cl (réaction 2.31).

Afin de souligner l’effet de la présence des ions phosphate aux différents pH, les expériences menées à pH = 6,5 ; 7,0 et 8,2 en présence de tampon phosphate (25 mM) sont comparées aux expériences réalisées dans les mêmes conditions en absence de tampon phosphate (figure II.21)

(a) (b) (c) 1,0 1,0 1,0 PO4[PO 4 =]tot 25 = mM 25 mM ; pH ; =pH 6,5 = 6,5 PO4[PO 4 =]tot 25 = mM25 mM ; pH ; pH= 7,0 = 7,0 EUPEUP pHpH == 6,56,5 EUP pH = 7,17,0 0,8 0,8 0,8 (mM) (mM) (mM) tot 0 tot

tot 0 tot 0,6 0,6 0,6 tot 0 tot ] ] ] 2 2 2 /[Cl /[Cl

0,4 /[Cl 0,4 0,4 tot tot tot ] ] ] 2 2 2 [Cl

[Cl 0,2 0,2 0,2 [Cl [PO 4]tot = 25 mM ; pH = 8,2 EUP pH = 8,2 0,0 0,0 0,0 0 250 500 0 250 500 0 250 500 Temps (h) Temps (h) Temps (h) Figure II.21. Evolution de la concentration en chlore total en présence de tampon phosphate (25 mM) ; comparaison avec les expériences réalisées en eau ultra-pure. (a) pH = 6,5 ; expériences n° EUPR6.5 et PO4.25R6.5. (b) pH = 7,0 ; expériences n° EUPR7.0 et PO4.25R7.0. (c) pH = 8,2 ; expériences n° EUPR8.2 et PO4.25R8.2 figure II.21. Comme lors des expériences réalisées en eau ultra-pure, la décomposition de la monochloramine suit une cinétique apparente de second ordre. Les constantes cinétiques apparentes peuvent donc être calculées selon les équations 2.25 et 2.27. La figure II.22 présente quelques exemples de détermination des constantes cinétiques apparentes d’ordre 2 en présence d’ions phosphate. Pour

61 toutes les expériences réalisées en tampon phosphate, le chlore total a été déterminé par dosage iodométrique, les spectres UV réalisés à chaque mesure ne mettent en évidence aucune trace de dichloramine pour des pH supérieurs 7,5.

(a) (b) 4000 2 2 1000 pH = 8,1 R = 0,9993 [PO 4]tot = 50 mM R = 0,9936 3500 PO4.10L8.1[PO 4]tot = 10 mM pHPO4.50L7.6 = 7,6 -1 -1 PO4.20L8.1[PO 4]tot = 20 mM 3000 pHPO4.50L8.1 = 8,1 tot 0 tot 0 tot pHPO4.50L8.3 = 8,3 ] ] PO4.30L8.1[PO 4]tot = 30 mM 2

2 2500 2 R = 0,9985 R2 = 0,9994 -[Cl 2000 -[Cl 500 -1 -1 tot ] tot 2 1500 ]

2 2 R = 0,9939 [Cl 1000 [Cl 500 R2 = 0,9987 0 0 0 20 40 60 80 100 120 140 160 0 20 40 60 80 100 120 140 160 Temps (h) Temps (h)

Figure II.22. Détermination des constantes apparentes de décomposition du chlore total en présence d’ions phosphate. (a) Expériences n° PO4.10L8.1 ; PO4.20L8.1 ; PO4.20L8.1. (b) Expériences n° PO4.50L7.6 ; PO4.50L8.1 ; PO4.50L8.3 figure II.22. 2- - Cependant afin de déterminer les constantes spécifiques aux ions HPO 4 et H 2PO 4 , il est nécessaire d’une part, de prendre en compte la constante k H+ déterminée précédemment et d’autre part, de calculer la spéciation des ions phosphate. La généralisation de l’expression 2.6 aux espèces capables de céder un ou plusieurs protons, conduit à l’équation 2.42 (Valentine et Jafvert, 1988)

+ - 2- kobs = 3 (k H [H ] + k H2PO4 [H 2PO 4 ] + k HPO4 [HPO 4 ]) (2.42)

Ainsi, il est possible d’exprimer les constantes cinétiques absolues pour les ions phosphate (équation 2.43a).

+ - 2- kobs /3 – k H [H ] = k H2PO4 [H 2PO 4 ] (+ k HPO4 [HPO 4 ] ) (2.43a)

La figure II.23 représente l’évolution de cette constante réduite en fonction de la concentration en - 2- H2PO 4 . Dans un premier temps, la contribution des ions HPO 4 est négligée afin de déterminer la constante k H2PO4 . La Figure II.24 montre que cette hypothèse est vérifiée.

62 Chapitre II : Décomposition des chloramines en absence de composés organiques

0.8 ] ] - 4 ) 8 -1 y = 0.5814x + 0.2272 PO 2 .h 2

-1 0.6

R = 0.9859 [H 6 ] (M ] ) + H2PO4 -1 .h

[H 0.4 -1 ] - k - ] H

4 + (M [H H

/3) - k - /3) 2 0.2 obs k - /3) (k obs

0 (k 0 0 5 10 15 0 50 100 - 2- [H 2PO 4 ] (mM) [HPO 4 ] (mM)

Figure II.23. Détermination de la constante Figure II.24. Détermination de la constante cinétique spécifique aux ions cinétique spécifique aux ions dihydrogénophosphate monohydrogénophosphate figure II.23. figure II.24. -2 -1 Il est ainsi possible d’estimer k H2PO4 = 581 M .h . Cette valeur est plus faible que celle proposée par Valentine et Jafvert (1988). En effet ces auteurs donnent une valeur de k H2PO4 égale à 1300 M-1.h -1. Cet écart s’explique aisément par les différences au niveau du protocole expérimental et des méthodes de calculs mis en œuvre entre ces deux études. Il est néanmoins intéressant de constater que ces deux constantes cinétiques, déterminées dans des conditions très différentes, présentent un ordre de grandeur comparable.

Concernant la contribution des ions monohydrogénophosphate, la même méthode de réduction de constante est utilisée : + - 2- kobs/3 - k H [H ] - k H2PO4 [H 2PO 4 ] = k HPO4 [HPO 4 ] (2.43b)

La figure II.24 montre la représentation graphique de la constante cinétique absolue en fonction de 2- la concentration en ions HPO 4 . Les résultats montrent que l’ordre de grandeur de la constante 2- - spécifique aux ions HPO 4 est négligeable devant celle spécifique aux ions H2PO 4 , ce qui justifie - le calcul de la constante cinétique spécifique aux ions H 2PO 4 . Compte tenu de la très faible 2- 2- corrélation entre la constante cinétique spécifique aux ions HPO 4 et la concentration en HPO 4 , il n’est pas possible de déterminer k HPO4 . Néanmoins le fait que la constante réduite soit 2- systématiquement positive indique que l’effet des ions HPO 4 sur la vitesse de décomposition n’est pas nul.

II.3.3. Formation d’ions nitrate Les ions nitrate sont connus comme étant un sous-produit de la décomposition des chloramines. Saunier (1976), d’après les travaux de Morris et Wei (1969), propose un mécanisme de formation des ions nitrate passant par les intermédiaires NH 2OH et NOH.

La concentration en ions nitrate et nitrite a été mesurée par HPLC à différents temps de contact en eau ultra-pure à pH = 8,2 ainsi qu’en présence de tampon phosphate (25 mM) pour différents pH (6,5 - 8,2). La figure II.25 présente un exemple d’évolution des concentrations en ions nitrate et en chlore total (essentiellement sous forme NH 2Cl) en fonction du temps à pH = 8,2. Ces résultats montrent que la formation d’ions nitrate augmente conjointement à la décomposition de la monochloramine.

63 70 2 NO - ([PO ] = 25 mM) 3 4 tot 60

1,5 50 - NO 3 (EUP) 40 (mM) (µM) ] 1 - 3 tot

] 30 2 [NO [Cl NH 2Cl (EUP) 20 0,5

NH 2Cl ([PO 4]tot = 25 mM) 10 0 0 0 200 400 600 800 Temps (h)

Figure II.25. Evolution de la concentration en chlore total (égale à la concentration en monochloramine) et en ions nitrate. Expériences n° EUPR8.2 et PO4.25R8.2b figure II.25. Afin de faire apparaître une stoechiométrie empirique de formation des ions nitrate, la figure II.26 représente la quantité d’ions nitrate formée en fonction de la quantité de chlore total (sous forme NH 2Cl) décomposée. Ces résultats confirment d’une part la proportionnalité entre la formation d’ions nitrate et la décomposition de la monochloramine. Ils mettent d’autre part en évidence que la présence d’ions phosphate ne favorise pas (ou peu) la formation d’ions nitrate dans le sens où, pour un avancement de la réaction identique entre les expériences réalisées en eau ultra-pure et en présence de tampon phosphate, la formation d’ions nitrate est comparable. D’autre part, ces résultats montrent une dérive importante par rapport à la linéarité lorsque l’avancement de la réaction de dégradation de la monochloramine augmente. Ce point sera abordé plus en détail dans le paragraphe II.4.3.

60

40 ] (µM) ] - 3

20 [NO

0 0 0,5 1 1,5 2 [Cl 2]tot - [Cl 2]tot initial (mM)

Figure II.26. Détermination de la stoechiométrie apparente de formation des ions nitrate. Expériences n° EUPR8.2 et PO425R8.2b figure II.26.

64 Chapitre II : Décomposition des chloramines en absence de composés organiques

La figure II.27 présente le pourcentage de conversion moyen du chlore total (sous forme NH 2Cl) en ions nitrate pour différentes conditions expérimentales. Ces résultats montrent que la formation d’ions nitrate est favorisée par une augmentation du pH. Elle est néanmoins faible puisqu’elle n’excède pas 3,5 % du chlore total décomposé.

- 3 [PO ] = 25 mM EUP 4% 4 tot

3%

2%

1%

0% pH = pH = pH = pH = pH = pH = Conversion du total en chlore NO 6,5 7,0 7,2 7,8 8,2 8,2

Figure II.27. Pourcentage de conversion du chlore total (NH 2Cl) en ions nitrate. [PO 4]tot = - 25mM. Moyenne des valeurs (100 x ∆[NO 3 ] / ∆[Cl 2]tot ), expériences n° PO4.25R6.5 ; PO4.25R7.0 ; PO4.25R7.2 ; PO4.25R7.8 ; PO4.25R8.2b et EUPR8.2 figure II.27.

II.3.4. Formation d’un composé inconnu Un sous-produit de dégradation des chloramines a été mis en évidence depuis plusieurs années (Valentine et Wilber, 1987 ; Leung et Valentine, 1994). Bien que certaines informations sur la nature physico-chimique de ce sous-produit soient connues, aucune structure n’a encore été établie. Cette partie traite de la formation de ce composé, noté par la suite composé U (en référence à la littérature), en eau ultra-pure et en présence de tampon phosphate. Les résultats se basent essentiellement sur l’analyse des spectres UV des solutions et des chromatogrammes obtenus lors de l’analyse des ions nitrate.

Lors des expériences à pH basique, on note un fort écart entre la concentration de NH 2Cl (dans ces conditions égale au chlore total) déterminée par dosage iodométrique et par spectrophotométrie directe (figure II.3). Cet effet est lié à la présence d’un composé absorbant aux mêmes longueurs d’onde que la monochloramine et n’oxydant pas les ions I -. Quelques injections HPLC ont permis de montrer la présence d’un composé absorbant fortement jusqu’à 300 nm et élué entre 75 et 80 minutes dans les conditions d’analyse des ions nitrate.

Etant donné que la concentration de ce composé est inconnue, il n’est pas possible lui attribuer un coefficient d’extinction molaire. Cependant, l’acquisition des spectres UV de solutions de monochloramine (à différents stades de décomposition) permet, en connaissant la concentration de NH 2Cl déterminée par iodométrie et celle des ions nitrate par analyse HPLC, de proposer un spectre UV moyen relatif du composé U (figure II.28). Ce spectre est confirmé par ceux obtenus lors des analyses HPLC avec détection à barrette de diodes.

65 La spectre moyen présenté figure II.28 est calculé pour chaque longueur d’onde à partir de 34 spectres selon la relation 2.44.

- AU=A mesuré – ([NH 2Cl] εNH2Cl + [NO 3 ]εNO3 ) (2.44)

1,0 0,6 744 h Composé U 1760 h 0,8 336 h

) 0,4

-1 Temps 0,6 168 h 244nm (cm U

0,4 A 77 h A/A 0,2

0,2 NH 2Cl

0,0 0 200 250 300 200 250 300 350 λλλ (nm) λλλ (nm)

Figure II.28. Spectres UV normalisés de la Figure II.29. Evolution de l’absorbance du monochloramine et du composé U obtenus par composé U. Expérience n° PO4.25R8.2a la relation 2.44. Moyenne de 34 spectres mesurés lors de la dégradation de solutions de monochloramine figure II.28. figure II.29. Le spectre du composé U présente une grande similitude avec celui de la monochloramine. La longueur d’onde d’absorption maximale est de 244 nm pour ces deux composés. Cependant le composé U présente une absorbance relative plus forte que la monochloramine entre 244 et 300 nm.

La figure II.29 présente l’évolution du spectre du composé U calculé selon la relation 2.44 en fonction temps lors de la dégradation d’une solution de monochloramine. Ces résultats montrent une augmentation continue de l’absorbance du composé U, il y a donc accumulation de ce produit dans le milieu. Cette observation tend à montrer que ce composé est relativement inerte vis-à-vis des autres espèces présentes dans le milieu. Par ailleurs, pour des temps de contact élevés, l’absorbance de la solution à 244 nm est essentiellement liée à la présence de ce composé.

Etant donné que les ions nitrate présentent un coefficient d’absorption molaire nul à 254 nm, seule la concentration en chlore total (assimilé à la concentration en monochloramine), déterminée par iodométrie, est nécessaire pour calculer A U, 254 . La relation 2.45 est alors utilisée pour calculer l’absorbance du composé U à 254 nm pour les expériences durant lesquelles la concentration en ions nitrate n’a pas été mesurée.

AU 254 = A 254 – ([NH 2Cl] εNH2Cl 254 ) (2.45)

66 Chapitre II : Décomposition des chloramines en absence de composés organiques

La figure II.30 représente un suivi de la concentration en NH 2Cl et de l’absorbance de U en eau ultra-pure et en tampon phosphate à pH = 8,2. Malgré une apparition plus rapide en tampon phosphate, il n’est pas possible d’après ces observations de savoir si les ions phosphate interviennent directement dans sa formation. En effet, il a été démontré précédemment que les ions phosphate accélèrent la décomposition de la monochloramine et peuvent, à se titre, favoriser indirectement la formation du composé U. La figure II.31 représente l’évolution de l’absorbance due au composé U en fonction du chlore total décomposé. Ces résultats mettent en évidence que la formation du composé U ne dépend pas de la concentration en ions phosphate. Il est néanmoins observé un décalage entre les courbes obtenues dans l’eau ultra-pure et en présence d’ions phosphate. Ce décalage pourrait s’expliquer par l’existence d’une phase de latence, pour les faibles temps de contact, au cours de laquelle le chlore total est décomposé sans conduire à la formation du composé U.

0,7 2 NH 2Cl ([PO 4]tot = 25 mM) pH = 8,15 0,6 0,3 [PO 4]tot = 10 mM AU (EUP) 1,5 0,5 [PO 4]tot = 30 mM ) ) ) -1 0,4 -1 0,2 (mM) (cm 1 (cm U U tot AU 0,3 ] A A 2 ([PO 4]tot = 25 mM) [Cl 0,2 0,1 EUP pH = 8,2 0,5 0,1 NH 2Cl (EUP) 0 0 0 0 200 400 600 800 0 0,5 1 1,5 2 Temps (h) Chlore total décomposé (mM)

Figure II.30. Evolution de la concentration en Figure II.31. Evolution de l’absorbance du NH 2Cl et absorbance du composé U en eau composé U en eau ultra-pure et en tampon ultra-pure et en tampon phosphate (25mM) à phosphate (25mM) en fonction de la pH = 8,2 (EUPR8.2 et PO4.25R8.2) concentration de chlore total décomposé figure II.30. figure II.31. Les travaux menés par Leung et Valentine (1994a) ont montré que l’ajout d’ions nitrite dans des solutions de monochloramine favorise la formation du composé U. De plus, ces auteurs observent une relation linéaire entre la formation de l’ion nitrate et du composé U. La figure II.32 présente l’absorbance du composé U, calculée par la relation 2.45 en fonction de la quantité de nitrate formés. Les résultats obtenus en présence d’ions phosphate sont cohérents avec les observations obtenues par Leung et Valentine (1994a). Néanmoins, les résultats obtenus en eau ultra-pure montrent une baisse significative de la formation du composé U pour une même quantité de nitrate formée. Le mécanisme de formation du composé U en une seule étape à partir d’un intermédiaire I comme le suggère Leung et Valentine (1994b) ne permet pas d’expliquer ce phénomène.

67 0,6 2 [PO 4]tot = 25 mM R = 0,9281 0,5 pH = 8,2 pH = 7,8 0,4 ) pH = 7,2 -1 0,3 pH = 7,0 (cm U pH = 6,5 A 0,2

0,1 EUP pH = 8,2 R2 = 0,9303 0 0 20 40 60 - NO 3 formé (µM)

Figure II.32. Evolution de l’absorbance du composé U en eau ultra-pure et en tampon phosphate (25 mM) en fonction de la concentration mesurée en nitrate figure II.32.

II.4. Modélisation cinétique de la décomposition des chloramines La décomposition de la monochloramine a fait l’objet de nombreuses études aux Etats-Unis, où l’équipe de recherche menée par Valentine a construit un modèle cinétique visant à expliquer la perte de chlore total dans les eaux riches en azote ammoniacal (Jafvert et Valentine, 1992). Ce modèle sera par la suite désigné sous terme de modèle de Valentine. Un modèle alternatif est proposé par Diyamandoglu (1994). La description des modèles est présentée dans le chapitre I.3. Cette partie s’intéressera donc à l’application de ces deux modèles, et à leurs limites de validité. Les formulations des modèles de Valentine et de Diyamandoglu sont respectivement détaillées dans les tableaux I.6 et I.8.

II.4.1. Modélisation en eau ultra-pure Les résultats des expériences menées en eau ultra-pure à différents pH sont comparées aux modèles de Valentine tel qu’il est publié, ainsi qu’à ce même modèle en modifiant la réaction 1.27 afin de tenir compte de la constante cinétique spécifiques aux ions H + déterminée dans notre étude 7 -2 -1 (k H=1,60.10 M .h ), ce modèle sera par la suite désigné sous le terme de « modèle de Valentine modifié ». Le modèle de Diyamandoglu est également comparé aux valeurs expérimentales. Les figures II.33 et II.34 présentent quelques exemples de simulation de la décomposition de NH 2Cl dans l’eau ultra-pure pour pH = 6,2 à 8,5.

68 Chapitre II : Décomposition des chloramines en absence de composés organiques

(a) (b)

pH = 6,2 Modèle de Valentine pH = 6,2 1,5 , 1,5 Modèle de Valentine modifié , NH 2Cl (points expérimentaux)

Modèle de Valentine modifié NH 2Cl 1 Modèle de Valentine 1 Cl] (mM) (mM) Cl]

2 Modèle de Diyamandoglu

[NH 0,5 0,5 NH 2Cl Concentration (mM)

0 0 0 24 48 72 96 120 144 168 0 24 48 72 96 120 144 168 Temps (h) Temps (h)

Figure II.33. Modélisation de la décomposition de la monochloramine en eau ultra-pure à pH = 6,2 (expérience n° EUPR6.2) (a) Application des modèles de Valentine, Valentine modifié et Diyamondoglu. (b) Simulation de l’évolution de la spéciation des chloramines par les modèles de Valentine et Valentine modifié figure II.33.

Points pH = 7,1 pH = 8,5 1,5 expérimentaux 1,50 , Modèle de Valentine , modifié 1 1,00 Cl] (mM) (mM) Cl] Cl] (mM) (mM) Cl] 2 2 Modèle de Valentine [NH [NH 0,5 0,50

Modèle de Diyamandoglu 0 0,00 0 24 48 72 96 120 0 48 96 144 192 240 Temps (h) Temps (h)

Figure II.34. Modélisation de la décomposition de la monochloramine en eau-ultra-pure. (a) pH = 7,1 expérience n° EUPR7.1.(b) pH = 8,5 expérience n° EUPR8.5 figure II.34. Ces résultats montrent que la décomposition de la monochloramine est légèrement surestimée par le modèle de Valentine. Cependant, en modifiant la constante kH+ proposée dans le modèle par celle déterminée précédemment, ce modèle présente une bonne concordance avec les résultats expérimentaux à pH neutre et acide. Pour des pH plus basiques, on note une légère sous-estimation de la décomposition par le modèle de Valentine modifié ou non. Notons par ailleurs que la réévaluation de k H+ ne modifie que peu les résultats de la modélisation pour des pH > 8,5. La spéciation monochloramine/dichloramine simulée par le modèle de Valentine est comparable aux valeurs mesurées expérimentalement. Néanmoins la simulation de l’évolution de la concentration en dichloramine présente un décalage dans le temps par rapport aux valeurs expérimentales.

Le modèle de Diyamandoglu quant à lui, ne permet pas d’expliquer la décomposition de la monochloramine en eau ultra-pure. Compte tenu que ce modèle a été développé en tampon - 2- phosphate et qu’il ne prend pas en compte les concentrations des espèces H 2PO 4 et HPO 4 , il n’est guère étonnant qu’il ne soit pas applicable dans nos conditions.

69 2,0 pH = 10,2 1,5 pH = 12,2 Modèle de Valentine Modèle de Valentine , 1,5 , 1,0 Points expérimentaux Points expérimentaux 1,0 Cl] (mM) (mM) Cl] (mM) Cl] 2 2

0,5 Modèle de Diyamandoglu [NH 0,5 Modèle de Diyamandoglu [NH

0,0 0,0 0 96 192 288 384 480 576 0 48 96 144 192 240 288 336 Temps (h) Temps (h)

Figure II.35. Modélisations de la décomposition de la monochloramine en eau ultra-pure. (a) pH = 10,2 expérience n° EUPR10.2. (b) pH = 12,2 expérience n° EUPR12.2 figure II.35. La figure II.35 compare les courbes de décompositions observées et simulées en eau ultra-pure pour des pH compris entre 10,2 et 12,2. Ces résultats mettent clairement en évidence l’incapacité des modèles actuels à expliquer la décomposition de la monochloramine pour des fortes valeurs de pH. A pH = 12,2, le modèle de Diyamandoglu semble conduire à une simulation cohérente, néanmoins cela ne signifie pas que le modèle décrit de manière correcte les réactions ayant lieu. Cet exemple illustre l’aspect critique de la modélisation cinétique. Dans ce domaine, il convient d’examiner la formulation du modèle autant que les résultats qui en découle afin de juger la fiabilité de celui-ci.

Ce constat nous pousse donc à proposer une extension des modèles existants afin de décrire plus justement les réactions mises en jeu et l’évolution de la concentration en monochloramine. Sur la base des observations faites précédemment (paragraphe II.3.1) nous proposons un modèle unifié, largement basé sur celui de Jafvert et Valentine et dont les modifications portent sur :

+ 7 -2 -1 - La réévaluation de la constante cinétique spécifique à l’ion H (k H+ = 1,60.10 M .h ). - -2 -1 - La réévaluation de la constante cinétique spécifique à l’ion H 2PO 4 (k H2PO4 = 581 M .h ). - La prise en compte de la réaction d’hydrolyse en milieu basique conformément aux observations faites par Anbar et Yagil (1962) : - - -2 -1 -1 NH 2Cl + OH  NH 2OH + Cl kOH- = 9,73.10 M .h (2.31)

- L’ajout des réactions entre la monochloramine et l’hydroxylamine proposée par Robinson et al. (2006) : + 6 -1 -1 NH 2Cl + NH 3OH  produits k2.38a = 3,71.10 M .h (2.38a) 5 -1 -1 NH 2Cl + NH 2OH  produits k2.38b = 3,28.10 M .h (2.38b) Néanmoins, compte tenu des observations faites précédemment, ces réactions ne sont pas prises en compte pour pH ≥ 12 (paragraphe II.3.1.3)

Ce modèle sera par la suite désigné sous le terme de modèle unifié. La figure II.36 présente les résultats des simulations ainsi que les valeurs expérimentales. Ce nouveau modèle ne modifie pas significativement les résultats obtenus pour les pH acides et neutres par rapport au modèle original. Il permet néanmoins une meilleure simulation des courbes de décomposition en milieu fortement basique (pH = 12 – 14). Pour les expériences à pH = 10,2 et 11,0 (non présentée ici), les courbes simulées s’écartent significativement des valeurs observées. Cet effet peut provenir de l’existence d’une réaction supplémentaire devenant négligeable pour des valeurs de pH > 12.

70 Chapitre II : Décomposition des chloramines en absence de composés organiques

(a) (b) 2 2 pH = 6,2 Modèle unifié pH = 8,5

1,5 1,5

1 Modèle unifié 1 Points expérimentaux Cl] (mM) Cl] 2 Points expérimentaux

0,5 [NH 0,5 NH 2Cl Concentration (mM) NHCl 2 0 0 0 24 48 72 96 120 144 168 0 48 96 144 192 240 Temps (h) Temps (h)

(c) (d) 2 2 pH = 12,2 Modèle unifié Modèle unifié pH = 10,2 1,5 1,5

1 1

Cl] (mM) Cl] Points expérimentaux (mM) Cl] 2 2 Points expérimentaux

[NH 0,5 [NH 0,5

0 0 0 96 192 288 384 480 576 0 48 96 144 192 240 288 336 Temps (h) Temps (h)

(e) (f)

pH = 13,0 pH = 14,0 2 2

Modèle unifié 1,5 1,5 Modèle unifié

Cl] (mM) Cl] 1 (mM) Cl] 1 2 2 Points expérimentaux

[NH 0,5 Points expérimentaux [NH 0,5

0 0 0 24 48 72 96 120 144 168 0 12 24 36 Temps (h) Temps (h)

Figure II.36. Modélisations de la décomposition de la monochloramine en eau ultra-pure. (a) pH = 6,2 expérience n° EUPR6.2. (b) pH = 8,5 expérience n° EUPR8.5. (c) pH = 10,2 expérience n° EUPR10.2. (d) pH = 12,2 expérience n° EUPR12.2. (e) pH =13 expérience n° NaOH0.1. (f) pH = 14,0 expérience n°NaOH1N figure II.36.

71 II.4.2. Modélisation en tampon phosphate

La figure II.37 présente la modélisation de la décomposition de NH 2Cl en présence de tampon phosphate selon les modèles de Valentine, de Diyamandoglu et le modèle unifié.

1,5 1,5 1,5 pH = 7,2 ; [PO 4]tot = 25 mM pH = 8,2 ; [PO 4]tot = 25 mM pH = 8,2 ; [PO 4]tot = 50 mM

1,0 1,0 1,0 Modèle de Diyamandoglu Cl] (mM) Cl] (mM) Cl] (mM) Cl]

2 Modèle unifié 2 2 0,5 0,5 0,5

[NH Modèle de Valentine [NH [NH

0,0 0,0 0,0 0 96 192 288 384 480 0 96 192 288 384 480 576 0 24 48 72 96 120 144 168 Temps (h) Temps (h) Temps (h) Figure II.37. Modélisation de la décomposition de la monochloramine en tampon phosphate.  : données expérimentales ; ---- Modèle de Valentine ; _____ Modèle unifié ; ---- Modèle de Diyamandoglu. Expériences n° PO4.25R7.2, PO4.25R8.2a et PO4.50R8.3 figure II.37. Ces résultats montrent que le modèle de Valentine surestime la vitesse de décomposition de la monochloramine en particulier pour les conditions pH = 8,2 et [PO 4]tot = 50 mM. La réévaluation + - des constantes spécifiques aux ions H et H 2PO 4 dans le modèle unifié permet une meilleure modélisation notamment pour les fortes concentrations en ions phosphate. Le modèle de Diyamandoglu présente une bonne corrélation avec les valeurs observées pour des concentrations de 25 mM mais s’écarte significativement des données expérimentales pour des concentrations en ions phosphate plus élevées.

II.4.3. Modélisation de la formation d’ions nitrate Compte tenu des résultats précédents, les trois modèles sont applicables et donnent des résultats comparables et cohérents avec les expériences, pour une concentration en phosphate de 25 mM. C’est dans ces conditions que les différents modèles seront confrontés aux données expérimentales concernant la formation d’ions nitrate.

Seuls les deux modèles publiés seront testé car les modifications apportées au modèle de Valentine ne portent pas sur les réactions conduisant à la formation de l’ion nitrate. Afin de mieux comparer ces deux modèles aux observations, la formation de nitrate est représentée en fonction de la quantité de monochloramine décomposée. Ce type de comparaison est effectué pour deux raisons majeures :

- limiter les différences entre les modèles liées à la vitesse de décomposition en NH 2Cl ; aspect déjà discuté ultérieurement. - s’affranchir du manque de données expérimentales sur la cinétique de formation des ions nitrate aux faibles temps de contact.

La figure II.38 présente les résultats de cette étude pour trois pH différents (6,5 – 7,2 et 8,2) en tampon phosphate 25 mM. De grandes différences sont observées entre l’expérience et la simulation. Le modèle de Valentine sous-estime largement la conversion de NH 2Cl en ions nitrate puisqu’il prédit la formation de 0,08 µM de nitrate pour 1 mM de NH 2Cl décomposée à pH = 8,2 alors que l’on observe expérimentalement 30 µM de nitrate formé pour 1mM de NH 2Cl décomposée. De plus, l’évolution du pourcentage de conversion en fonction du pH est contraire à celle observée expérimentalement. En effet, le modèle de Valentine prévoit une diminution du rendement de formation des ions nitrates lorsque le pH augmente. De plus, ce modèle prédit une diminution du

72 Chapitre II : Décomposition des chloramines en absence de composés organiques rendement de conversion lorsque l’avancement de la réaction augmente, ce qui est en contradiction avec les données expérimentales obtenues.

0,8 100 350 Modèle de Valentine Points expérimentaux Modèle de Diyamandoglu pH = 6,5 pH = 8,2 300 0,6 75 250 (µM) (µM) pH = 7,2 (µM) 200 pH = 8,2 formé formé

0,4 50 formé ] ] ] - - -

3 3 150 3 pH = 7,2 pH = 7,2

[NO [NO 100 0,2 25 [NO pH = 8,2 50 pH = 6,5 pH = 6,5 0 0 0 0 0,5 1 1,5 2 0 0,5 1 1,5 2 0 0,5 1 1,5 2 [NH 2Cl] consommé (mM) [NH 2Cl] consommé (mM) [NH 2Cl] consommé (mM) Figure II.38. Modélisation de la formation d’ions nitrate en fonction de la décomposition de la monochloramine figure II.38. Le modèle de Diyamandoglu prédit quant à lui la formation de 150 µM d’ions nitrate pour 1 mM de NH 2Cl décomposée à pH = 8,2 ; il surestime ainsi largement la formation de nitrate. Le profil d’évolution de la formation des ions nitrate en fonction de la décomposition de la monochloramine prédit par ce modèle semble néanmoins similaire aux données expérimentales. De plus, les variations de la conversion de la monochloramine en ions nitrate en fonction pH et de l’avancement de la réaction sont cohérentes avec les données expérimentales.

II.4.4. Modélisation à pH libre La variation du pH durant la décomposition de la monochloramine a été discutée ultérieurement (II.3.1.2).Compte tenu du grand nombre de réactions intervenant sur la concentration en ions H + lors de la décomposition, seule une simulation à l’aide de l’outil informatique permet de comparer les résultats du schéma réactionnel considéré avec les valeurs observées.

1,6 9 Données expérimentales 8 1,2 NH 2Cl Modèle unifié 7 0,8 pH 6

0,4 5 Concentration (mM) NHCl 2 0 4 0 24 48 72 96 120 144 168 0 24 48 72 96 120 144 168 Temps (h) Temps (h)

Figure II.39. Evolution d’une solution de monochloramine à pH non régulé (expérience n° EUPL8.1). (a) Evolution des concentrations en monochloramine et dichloramine déterminée par spectrophotométrie. (b) Evolution du pH. figure II.39. La figure II.39 présente la courbe de décomposition de la monochloramine en eau ultra-pure pour un pH initial de 8,1. Le modèle permet de décrire avec une grande justesse les 3 phases du processus de décomposition de la monochloramine observées sans régulation de pH. Cette dernière étape permet de valider le modèle cinétique dans les conditions les plus délicates. En effet il a été démontré précédemment qu’une faible variation du pH initial conduit à une variation importante de

73 la phase de latence. L’évolution des concentrations en monochloramine et en dichloramine observées est cohérente avec les valeurs simulées, de plus la spéciation est respectée. Malgré une légère sous-estimation du pH de la solution pour les temps de contact élevés, le modèle permet une prédiction relativement fiable du pH.

II.5. Conclusion Cette étude a eu pour objectif d’examiner l’influence du pH et de la concentration en ions phosphate sur la vitesse de décomposition de la monochloramine (NH 2Cl) et de tester la validité de modèles cinétiques publiés dans la littérature pour la simulation des résultats expérimentaux.

Les résultats obtenus ont montré que les vitesses de décomposition de NH 2Cl à un pH donné peuvent être décrites par une loi cinétique apparente d’ordre 2 par rapport à la concentration en + 7 -2 -1 NH 2Cl et que les réactions de décomposition sont catalysées par les ions H (k H+ = 1,60.10 M .h ), - -2 -1 2- par les ions H 2PO 4 (k H2PO4- = 581 M .h ) et dans une moindre mesure par les ions HPO 4 . Ce travail a montré que la voie de dégradation de la monochloramine à pH basique, rarement évoquée dans la littérature est décrite par une loi cinétique d’ordre 1 par rapport à chacun des constituants -1 -1 (k OH- = 0,22 M .h ).

La décomposition de NH 2Cl est accompagnée de la formation d’ions nitrate (0,007 à 0,033 mole de - NO 3 / mole de NH 2Cl décomposée). Le rendement de formation de l’ion nitrate augmente avec le pH et ne semble pas modifié par la présence d’ions phosphate. La dégradation à pH basique de la monochloramine conduit à la formation d’hydroxylamine qui, en présence d’oxygène peut former l’ion peroxynitrite (ONOO-) et conduire à une augmentation significative de la vitesse de dégradation de la monochloramine. Pour des pH proches de la neutralité, la formation d’un composé stable présentant un spectre d’absorption UV assez similaire à celui de NH2Cl a été observée.

L’application et l’ajustement des modèles cinétiques existant permettent de simuler la dégradation de la monochloramine dans une large gamme de pH. Le modèle proposé permet aussi de modéliser la spéciation des chloramines et la variation du pH dans les solutions. Cependant des travaux complémentaires sont nécessaires en vue d’obtenir une meilleure simulation des courbes expérimentales de formation des ions nitrate.

74 CHAPITRE III : CHLORAMINATION DE COMPOSÉS ORGANIQUES MODÈLES : DEMANDE ET SOUS-PRODUITS

CHAPITRE III : CHLORAMINATION DE COMPOSES ORGANIQUES MODELES : DEMANDE ET SOUS-PRODUITS

III.1. Introduction ...... 75

III.2. Matériel et méthodes...... 75 III.2.1. Préparation des solutions ...... 75 III.2.2. Dispositif expérimental...... 77 III.2.3. Méthodes analytiques...... 77 III.2.3.1. Dosage du chlore total...... 77 III.2.3.2. Dosage du chloroforme...... 78 III.2.3.3. Dosage des acides haloacétiques...... 78 III.2.3.4. Dosage des composés organohalogénés (AOX) ...... 79

III.3. Réactivité et sous-produits des hydroxybenzènes...... 79 III.3.1. Dégradation de la monochloramine par des composés organiques ...... 79 III.3.2. Calcul de la demande en monochloramine ...... 81 III.3.3. Influence du rapport N/Cl ...... 85 III.3.4. Cas particulier du résorcinol ...... 87 III.3.5. Comparaison de la réactivité des différents hydroxybenzènes ...... 88

III.4. Formation de sous-produits organohalogénés...... 89 III.4.1. Formation de chloroforme ...... 91 III.4.1.1. Formation de chloroforme lors de la chloramination de composés hydroxybenzéniques...... 91 III.4.1.2. Cas particulier du résorcinol ...... 93 III.4.2. Formation d’acides haloacétiques...... 99 III.4.3. Formation d’AOX...... 102

III.5. Chloramination de matières organiques naturelles ...... 104 III.5.1. Demande en monochloramine ...... 104 III.5.2. Formation de chloroforme ...... 106

III.6. Conclusion...... 109

Chapitre III : Chloramination de composés organiques modèles : Demande et sous-produits

CHAPITRE III CHLORAMINATION DE COMPOSÉS ORGANIQUES MODÈLES : DEMANDE ET SOUS-PRODUITS

III.1. Introduction

La monochloramine (NH 2Cl) est un oxydant couramment utilisé pour la désinfection des eaux potables dans les pays anglo-saxons, ainsi que pour le maintien des qualités microbiologiques des eaux de circuits de refroidissement. La désinfection des eaux destinées à la consommation humaine par la monochloramine est généralement utilisée lorsqu’un traitement au chlore conduit à une formation trop importante de sous-produits halogénés. Malgré quelques études portant sur la réactivité de NH 2Cl sur les matières organiques naturelles (MON), les vitesses de réaction, les mécanismes d'action et la formation de sous-produits avec des composés organiques simples sont encore très mal connus.

Les composés hydroxybenzéniques sont de très bons précurseurs de la formation de sous-produits halogénés, et notamment de chloroforme, lors des procédés de désinfection au chlore (Norwood et al., 1980 ; Reckhow et Singer, 1985). Ces composés représentent une fraction très réactive des MON vis-à-vis du chlore. Depuis les années 1980, de nombreuses études ont permis de proposer un mécanisme très complet de la réactivité de ces composés simples avec le chlore ainsi que certaines constantes cinétiques des étapes les plus importantes.

La monochloramine peut conduire, par hydrolyse, à la formation de chlore libre. En présence d'un excès d'azote ammoniacal, l'équilibre est très largement déplacé vers la formation de la monochloramine (Soulard et al., 1984). Cependant, compte tenu de la forte réactivité de l’acide hypochloreux vis-à-vis des composés hydroxybenzéniques (Rebenne et al., 1996 ; Gallard et von Gunten, 2002b), la contribution du chlore libre, libéré par hydrolyse de la monochloramine, peut conduire à une dégradation importante des précurseurs, notamment pour les rapports N/Cl proches de 1.

Cette étude a donc pour but d’examiner la réactivité de la monochloramine vis-à-vis de 6 composés phénoliques simples (phénol, catéchol, résorcinol, hydroquinone, pyrogallol et phloroglucinol). La première partie de ce chapitre est consacrée à l’évolution des concentrations en monochloramine et aux demandes en monochloramine. Dans un second temps, l’influence du rapport N/Cl sur les productions de chloroforme, d’acides haloacétiques (HAA) et de composés organohalogénés totaux (AOX) sera abordée. L’étude de la chloramination de quelques matières organiques naturelles sera présentée à la fin de ce chapitre.

III.2. Matériel et méthodes III.2.1. Préparation des solutions Toutes les solutions ont été préparées à partir de réactifs de qualité analytique et d’eau purifiée, de résistivité 18,2 M Ω.cm, produite par un système Millipore (Milli RX75/Synergy 185). Les solutions mères de composés organiques (tableau III.1), de chlorure d’ammonium (Fisher Scientific, > 99%) et d’hypochlorite de sodium (NaOCl, 13 %, Acros Organics) sont stockées à 4°C à l’abri de la lumière. Les solutions de monochloramine (0,1 à 2 mM) sont préparées au maximum quelques heures avant utilisation, en additionnant lentement et sous agitation rapide, l’hypochlorite de sodium à une solution de chlorure d’ammonium à pH = 8,5 ± 0,5. Les solutions de monochloramine sont préparées en utilisant un rapport molaire [Azote ammoniacal] 0/[Chlore total] 0 = N/Cl variant de 1,1

75 à 30. Un spectre UV de la solution de monochloramine fraîchement préparée est réalisé afin de vérifier que le chlore libre est intégralement converti en monochloramine.

Les concentrations en chlore libre et en monochloramine dans les solutions mères sont déterminées par titrage iodométrique au thiosulfate de sodium 0,01 M (Prolabo, > 99,9%). Le pH est mesuré avec un pH-mètre PHM 250 (Radiometer) équipé d’une électrode de verre (Radiometer, CL114 JB).

Compte tenu du faible effet catalytique des ions carbonate sur la dismutation de la monochloramine, (Jafvert et Valentine, 1992), un tampon carbonate a parfois été utilisé pour maintenir le pH constant 2- ([CO 3 ]tot = 20 mM). Le pH initial des solutions a été ajusté par ajout de soude ou d’acide chlorhydrique. Toute la verrerie est nettoyée avec une solution de chlore ( ≈ 1 mM) et laissée sous chlore avant les expériences.

Tableau III.1. Composés organiques modèles étudiés tableau III.1. Concentration Masse molaire Composé Formule Fournisseur Solution mère (g.mol -1) OH SigmaUltra, Phénol ≥ 99,5 % (GC) 100 mM 94,1 (P) (Sigma-Aldrich) OH

Catéchol OH ≥ 99 % 100 mM 110,1 (C) (Sigma-Aldrich)

OH ACS reagent, Résorcinol ≥ 99 % 100 mM 110,1 (R) (Sigma-Aldrich) OH OH

4-chlororésorcinol 98 % 100 mM 145,6 (4-MCR) (Aldrich) OH

Cl OH

Cl 4,6-dichlororésorcinol 97 % 100 mM 181,1 (4,6-DCR) (Aldrich) OH

Cl OH ReagentPlus Hydroquinone ≥ 99% 100 mM 110,1 (H) (Sigma-Aldrich)

OH OH ACS reagent Pyrogallol OH 99% 100 mM 126,1 (Py) (Sigma-Aldrich) OH OH

Phloroglucinol ≥ 99 % 10 mM 126,1 (Ph) (Aldrich) HO OH

76 Chapitre III : Chloramination de composés organiques modèles : Demande et sous-produits

III.2.2. Dispositif expérimental Toutes les expériences de chloramination ont été réalisées à 23 ± 2°C. Les vitesses et rendements de formation de sous-produits ont été déterminés en présence d’un large excès de monochloramine ([NH 2Cl] 0 / [Composé organique] 0 = 20 – 40 mol/mol). Afin de comparer l’effet de la chloration et de la chloramination sur la demande et la production de sous-produits, quelques expériences ont été réalisées en présence d’un large excès de chlore libre ([Chlore libre]0 / [Composé organique] 0 = 100 mol/mol).

Les concentrations initiales en composés organiques varient entre 1 et 100 µM. La réaction est initiée par l’ajout, sous agitation rapide, du composé organique dans une solution de monochloramine ou de chlore libre. Après ajout du précurseur dans la solution de chlore ou de monochloramine, un volume de 10 mL de solution est immédiatement réparti dans une série de flacon head-space de 20 mL (Chrompack). Les flacons sont hermétiquement fermés par une capsule métallique contenant un septum en silicone recouvert de PTFE. 250 mL de solution sont conservés dans une bouteille en verre ambré afin de mesurer la concentration résiduelle en monochloramine et le pH de la solution à différents temps de réaction. Dans certains cas, les concentrations en carbone organique total (COT) sont mesurées en début et fin d’expérience par un COT-mètre à combustion catalytique SHIMADZU (TOC-VCSH ).

Quelques expériences de chloramination ont été effectuées sur des matières organiques naturelles (MON). Les trois types de MON étudiées proviennent des fractions hydrophobe (HPO) et transphilique (TPH) extraites du lac du Cébron (France) et de l’eau de la Loire prélevée à Dampierre en Burly (France). Les fractions HPO et TPH ont été solubilisées dans de l’eau ultra- pure afin d’obtenir une concentration en carbone organique dissous (COD) proche de 2 mg.L-1.

Quelques expériences supplémentaires ont été conduites en défaut d’oxydant ([NH 2Cl] 0 / [Composé organique] 0 = 0,1 – 4 mol/mol) par rapport à la demande en monochloramine (mole de Cl 2 tot consommé par mole de précurseur initial). Norwood et al. (1980) donnent une demande en chlore pour de fortes concentrations en résorcinol de 6,6 mol/mol. Cette valeur a été confirmée par De Laat et al. (1982) en milieu plus dilué. Pour ce type d’expérience, les réactions sont initiées par l’ajout d’un volume variable (10 – 400 µL) de chlore ou de monochloramine (2 mM) dans un flacon de 4,5 mL contenant 4 mL d’une solution de résorcinol à pH = 8,6. Après 1 et 5 heures de réaction respectivement pour le chlore et la monochloramine, tout l’oxydant a été consommé par le résorcinol. Afin de déterminer la concentration en chloroforme, 100 µL de cette solution sont ensuite transférés dans un flacon head-space de 20 mL contenant 10 mL d’eau ultra-pure.

III.2.3. Méthodes analytiques

III.2.3.1. Dosage du chlore total A différents temps de contact, 4 mL d’échantillon sont prélevés et rapidement transférés dans des flacons de 10 mL contenant 1 mL de KI 1M (Acros Organics, 99+%) et 100 µL d’acide acétique 1,7 M (Riedel-de Haën, 99-100%). Après 2 à 3 min de réaction, le mélange est transféré dans une cuve en quartz de 1 cm et la concentration en triiodure est déterminée par mesure de l’absorbance à 351 nm (Spectrophotomètre Varian Cary 50) :

- + - + NH 2Cl +3 I + 3 H  I 3 + NH 4 + HCl

La concentration en monochloramine est calculée en utilisant un coefficient d’extinction molaire de -1 -1 - 26 900 M .cm pour I 3 à 351 nm par la relation suivante :

77 V (A − A ) [NH Cl] (mol.L −1) = T 351nm, ech 351nm, blanc 2 ε VE 351nm où A 351,ech et A 351,blanc représentent respectivement les absorbances mesurées à 351 nm pour l’échantillon (VE = 4 mL) et le blanc (V EUP = 4 mL). La valeur du coefficient d’extinction molaire - -1 -1 de l’ion I 3 ( ε351 nm = 26 900 M .cm ), déterminée à partir de différentes solutions de chlore et de monochloramine de concentration connues, est cohérente avec les valeurs rapportées dans la littérature (Bichsel et von Gunten, 1999 ; Awtrey et Connick, 1951).

III.2.3.2. Dosage du chloroforme L’analyse du chloroforme a été réalisée sur les échantillons neutralisés par 10 µL de sulfite de sodium à 2 M et acidifiés par 100 µL d’acide chlorhydrique à 1 M (Fisher Scientific ; > 95%) afin de bloquer la réaction et de limiter les phénomènes d’hydrolyse. Les vials head-space ont été introduits puis chauffés à 50°C pendant au moins deux heures dans un passeur head-space (DANI HSS 3950) relié à un chromatographe en phase gaz (VARIAN 3300) équipé d’un détecteur à capture d’électron ECD (63 Ni). La séparation a été réalisée sur une colonne capillaire (J&W DB624) en mode isotherme à 40°C en utilisant de l’azote (Alphagaz N2, Air liquide) comme gaz vecteur. Le logiciel AZUR (4.6.) a été utilisé pour l’acquisition et le traitement des données. Le temps de rétention du pic de chloroforme varie de 2,44 - 2,54 min. La durée totale entre deux injections est de 30 minutes. Les réglages détaillés du chromatographe sont donnés dans le tableau III.2. Les limites de détection et de quantification de cette méthode sont respectivement de 0,02 et de 0,05 µM (2,4 et 6,0 µg.L -1).

III.2.3.3. Dosage des acides haloacétiques Le dosage des acides haloacétiques (HAA) a été réalisé d’après le protocole EPA 552.2. (Munch et al., 1995). Compte tenu du protocole expérimental, seuls les acides mono, di et trichloroacétique sont susceptibles d’être présents dans les échantillons.

L’analyse comporte une étape d’extraction des HAA par 4 mL de MTBE (Fluka Analytical for GC ; > 99%) sur 10 mL d’échantillon dans lequel a préalablement été ajouté 20 µL d’étalon de substitution (acide 2-bromopropanoïque à 20 mg.L-1 dans du MTBE), 0,8 mL d’acide sulfurique concentré (Fisher Scientific ; > 99 %) et 3 g de Na2SO 4 (Fluka ; > 99,9 %). Après extraction, 2 mL de la phase organique sont prélevés, l’estérification des HAA est réalisée en ajoutant 1 mL d’un mélange (CH 3OH – H 2SO 4 ; 90:10 ; v:v) puis chauffé à 50°C pendant 2 heures. Après refroidissement, le mélange est neutralisé par 4 mL d’une solution saturée en NaHCO 3 (Acros Organics ; > 99,7 %). Après agitation, un volume de 0,5 mL de la phase organique est prélevé et ajouté dans 5 mL de MTBE, et 10 µL d’étalon interne (1,2 dibromopropane 25 mg.L-1 dans du MTBE) sont ajoutés avant analyse.

Le matériel utilisé est un chromatographe en phase gazeuse FISONS INSTRUMENTS GC type 8180, avec un injecteur à froid on-column (Volume injecté : 1 µL), muni d’une colonne capillaire DB1701 (30 m x 0,25 mm ID x 0,25µm) alimentée en azote et d’un détecteur à capture d’électrons ECD 800 ( 63 Ni). Le logiciel AZUR (version 4.6) a été utilisé pour l’acquisition et le traitement des données.

78 Chapitre III : Chloramination de composés organiques modèles : Demande et sous-produits

Tableau III.2. Conditions chromatographiques pour l’analyse des HAA et des THM tableau III.2. CHCl 3 HAA Colonne J&B DB-624 J&B DB-1701 220°C 40°C 5 min Programme de température 30 min 35°C 8 °C / min

8 min Température du détecteur 300°C 300°C Température de l’injecteur 250°C A froid Pression N 2 (gaz vecteur) 100 kPa

III.2.3.4. Dosage des composés organohalogénés (AOX) La technique d’analyse repose sur l’adsorption des composés organohalogénés par filtration de l’échantillon sur du charbon actif en poudre (CAP) puis sur la minéralisation des charbons dans un pyrolyseur selon la norme NF EN 1485.

Les analyses d’AOX ont été réalisées après 72 heures de réaction. 10 mL d’échantillon sont ajoutés dans une solution contenant 85 mL d’eau ultra-pure, 20 µL de sulfite de sodium (2 M), quelques gouttes de HNO 3 concentré et 5 mL de NaNO 3 (0,2 M acidifié à pH = 1,5 par HNO 3). Le mélange est ensuite filtré sur deux cartouches de CAP en série (type Euroglass, CPI International) à un débit de 1 mL.min -1 par un système DOHRMANN. Après filtration, les cartouches de CAP sont rincées par une solution de nitrate de sodium (NaNO 3 0,01 M ; pH = 3) afin d’éliminer les ions chlorure et autres halogénures de la porosité des charbons. Les charbons sont ensuite pyrolysés à 1000°C sous courant d’oxygène par un système DOHRMANN DX 20 afin de former les halogénures d’acide (HCl dans les conditions expérimentales utilisées). Les halogénures d’acide sont ensuite dosés dans une cellule microcoulométrique MC-3.

III.3. Réactivité et sous-produits des hydroxybenzènes III.3.1. Dégradation de la monochloramine par des composés organiques Afin de comparer la réactivité des différents hydroxybenzènes vis-à-vis de la monochloramine, des demandes en monochloramine ont été réalisées pour des concentrations initiales en monochloramine et en composé organique respectivement égales à 2 mM et 100 µM. La concentration en composé organique dans les différentes solutions est déterminée par la mesure du carbone organique total après ajout de tous les réactifs. La figure III.1 présente l’évolution de la concentration en monochloramine en absence de composé organique pour les 3 rapports N/Cl étudiés. La figure III.2 montre, pour un rapport N/Cl = 2, l’évolution des concentrations en monochloramine en présence de composés organiques. L’ensemble des résultats concernant la concentration résiduelle en monochloramine en présence de composés organiques modèles est présenté dans le tableau III.3.

79 2 2

1,5 1,5

1 1

Cl](mM) N/Cl = 1,1 Cl](mM) 2 2 N/Cl = 2

[NH [NH P H 0,5 N/Cl = 10 0,5 C Py R Ph 0 0 0 24 48 72 96 120 144 168 0 24 48 72 96 120 144 168 Temps (h) Temps (h)

Figure III.1. Evolution de la concentration en Figure III.2. Evolution de la concentration en monochloramine en absence de composé monochloramine en présence de composé 2- organique. [CO 3 ]tot = 20 mM ; pH = 8,5 organique (100 µM environ). 2- [CO 3 ]tot = 20 mM ; pH = 8,5

Tableau III.3. Evolution de la concentration en monochloramine en présence de composé organique tableau III.3. [NH 2Cl] (mM) pour N/Cl = 1,1 Temps (h) Témoin P = 119 µM C = 122 µM R = 119 µM H = 115 µM Ph = 129 µM Py = 108 µM 0 2,00 2,00 2,00 2,00 2,00 2,00 2,00 3 1,99 1,75 1,72 1,60 1,99 1,55 1,80 24 1,91 1,48 1,27 1,21 1,64 1,36 1,32 48 1,81 1,23 1,02 1,03 1,27 1,16 0,92 72 1,72 1,07 0,90 0,93 0,97 0,99 0,67 96 1,69 0,94 0,83 0,86 0,78 0,87 0,51 168 1,66 0,74 0,73 0,76 0,52 0,71 0,39

[NH 2Cl] (mM) pour N/Cl = 2 Temps (h) Témoin P = 114 µM C = 108 µM R = 106 µM H = 115 µM Ph = 108 µM Py = 106 µM 0 1,98 2,00 2,00 2,00 2,00 2,00 2,00 1 1,98 1,95 1,87 1,62 1,91 1,07 1,80 24 1,94 1,80 1,51 1,12 1,52 0,90 1,31 48 1,93 1,66 1,32 0,98 1,39 0,81 1,27 72 1,92 1,58 1,20 0,91 1,26 0,78 1,18 96 1,92 1,50 1,11 0,87 1,19 0,69 1,12 168 1,87 1,24 0,92 0,78 0,98 0,67 0,96

[NH 2Cl] (mM) pour N/Cl = 10 Temps (h) Témoin P = 114 µM C = 122 µM R = 119 µ M H = 115 µM Ph = 108 µM Py = 106 µM 0 1,90 1,90 1,90 1,90 1,90 1,90 1,90 1 1,89 1,51 1,69 1,57 1,78 1,08 1,71 24 1,84 1,41 1,33 1,17 1,31 0,85 1,40 48 1,76 1,38 1,16 1,06 1,21 0,75 1,34 72 1,70 1,27 1,10 0,93 1,07 0,71 1,24 96 1,64 1,27 0,96 0,89 1,00 0,68 1,19 168 1,48 1,09 0,82 0,82 0,87 0,58 1,08

Ces premiers résultats montrent que pour certains composés phénoliques peu réactifs vis-à-vis de la monochloramine, la quantité de monochloramine décomposée en absence de composé organique

80 Chapitre III : Chloramination de composés organiques modèles : Demande et sous-produits n’est pas négligeable devant la quantité de monochloramine dégradée en présence de composé organique. Il est donc nécessaire de tenir compte de l’autodécomposition de la monochloramine dans le calcul de la demande en monochloramine des composés organiques.

III.3.2. Calcul de la demande en monochloramine La demande en monochloramine peut être calculée soit en négligeant l’autodécomposition de la monochloramine (équation 3.1), soit en tenant compte de l’autodécomposition (équation 3.2).

([NH Cl] − [NH Cl] ) = 2 0, éch 2 t, éch Demande en NH 2Cl (mol/mol) (3.1) [Composé organique] 0 ([NH Cl] − [NH Cl] ) − ([NH Cl] −[NH Cl] ) = 2 0, éch 2 t, éch 2 0, témoin 2 t, témoin Demande corrigée en NH 2Cl (mol/mol) [Composé organique] 0 (3.2)

Aucune de ces deux méthodes de calcul ne permet d’obtenir la valeur réelle de la demande en monochloramine : - l’équation 3.1 conduit à une surestimation de la demande en monochloramine par le composé organique car elle ne prend pas en compte l’autodécomposition, - l’équation 3.2 conduit à une sous-estimation de la demande en monochloramine car l’autodécomposition est surestimée.

Cependant, il est possible d’encadrer la valeur réelle par ces deux méthodes de calcul simple. En outre, il est important de souligner que, dans des conditions conduisant à de faibles décompositions de la monochloramine dans le témoin, le calcul ne tenant pas compte de l’auto décomposition (équation 3.1) conduira à des résultats plus proches de la valeur réelle que celui tenant compte de l’autodécomposition (équation 3.2). Dans le cas inverse (forte autodécomposition dans le témoin), il est préférable de prendre en compte l’autodécomposition de la monochloramine dans le calcul de la demande.

Une méthode alternative consiste à modéliser l’autodécomposition du témoin sans composé organique pour chaque intervalle de temps. L’autodécomposition du témoin peut être modélisée par une cinétique d’ordre 2 apparent :

2 NH 2Cl  Sous-produits inorganiques vautodécomposition = k obs [NH 2Cl] (voir chapitre II.3)

La quantité de monochloramine perdue par autodécomposition de la monochloramine lors d’un intervalle de temps ∆t dépend de la concentration initiale en monochloramine :

∆ = 1 autodécomp osition, t [NH 2Cl] t - (3.3) ∆ + 1 kobs ( )t [NH 2Cl] t En sommant la quantité de monochloramine dégradée par autodécomposition, il devient possible de calculer la demande en monochloramine d’un composé organique :

t − − [NH 2Cl] 0, éch [NH 2Cl] t, éch ∑autodécomp osition, i = Demande = i 0 (3.4) [Composé organique] 0

81 Malgré une légère sous-estimation de la demande réelle, cette méthode s’avère la plus fiable pour estimer la demande en monochloramine ( figure III.3). Compte tenu de la forte diminution de la concentration en monochloramine dès les premières heures de réaction, il est important de réaliser des mesures pour des temps de contact entre 1 et 3 heures afin de limiter la surestimation de l’autodécomposition.

2,0 ∆∆∆1 ∆∆∆ 1,8 A

Points expérimentaux Temoin NH 2Cl ∆∆∆ 1,6 2 courbes simulées Cl] Cl] (mM) 2 1,4 [NH NH 2Cl + ∆∆∆3 1,2 Résorcinol

1,0 0 24 48 Temps (heures)

∆∆∆A >> ∆∆∆1 + ∆∆∆2 + ∆∆∆3

Figure III.3. Principe de la méthode utilisée pour estimer l’autodécomposition de la monochloramine en présence de composé organique. Exemple du résorcinol, [NH 2Cl] = 1,9 mM ; 2- [R]0 = 100 µM ; [CO 3 ]tot = 20 mM ; pH = 8,5 ± 0,1 ; N/Cl = 10

La figure III.4 présente, à titre d’exemple, l’évolution de la demande en monochloramine du résorcinol estimée par les trois méthodes de calcul. Ces résultats montrent que le choix de la méthode de calcul de la demande en monochloramine influence peu les résultats pour les temps de contact inférieurs à 48 heures (< 15 % d’écart). Plus le temps de réaction augmente, plus les résultats entre les différentes méthodes de calcul divergent (38 % d’écart après 168 heures de réaction). Il convient de signaler que la méthode de calcul proposée par l’équation 3.4 ne permet pas pas de s’affranchir d’un éventuel effet de catalyse de l’autodécomposition par les sous-produits d’oxydation des composés organiques (comme le font les ions phosphate et carbonate). Dans ce cas, la demande calculée correspondrait à la quantité de monochloramine dégradée par une réelle demande en monochloramine ainsi qu’à la quantité de monochloramine dégradée par des phénomènes d’autodécomposition catalysés par les sous-produits de réaction.

82 Chapitre III : Chloramination de composés organiques modèles : Demande et sous-produits

10 8 Demande théorique 8 6 Cl Cl (mol/mol)

6 Cl (mol/mol) 2 2

Sans prise en compte de , 4 Demande estimée par 4 l'autodécomposition (Eq. 3.1) modélisation de Avec modélisation de l'autodécomposition du l'autodécomposition (Eq. 3.4) 2 témoin 2 Avec soustraction de l'autotodécomposition (Eq. 3.2) Demande en NH 0 Demande en NH 0 0 24 48 72 96 120 144 168 0 24 48 72 96 120 144 168 Temps (heures) Temps (heures)

Figure III.4. Influence de la méthode de calcul Figure III.5. Comparaison entre demande sur la détermination de la demande en calculée et demande théorique lors de la monochloramine. Exemple du résorcinol, chloramination d’un composé fictif présentant [NH 2Cl] = 2 mM ; [R]0 = 100 µM ; une demande ultime en monochloramine de 7,0 2- [CO 3 ]tot = 20 mM ; pH = 8,5 ± 0,1 ; N/Cl = 10 mol/mol

Seule une modélisation complète des réactions permettrait d’avoir accès à la demande réelle en monochloramine. Cependant, compte tenu du nombre de réactions à prendre en compte, il n’est pas possible d’écrire un tel modèle. En considérant par exemple un composé organique présentant une demande en monochloramine de 7 mol/mol et dont la vitesse de réaction des différents sous- produits avec la monochloramine est régi par une loi cinétique d’ordre global 2, il est possible de simuler une courbe de demande semblable aux courbes expérimentales.

2 Autodécomposition : NH 2Cl  Produits terminaux v = k obs [NH 2Cl] (d’après chapitre II.4) Réaction 1 : NH 2Cl + Pr1  Pr2 v = k 1 [NH 2Cl][Pr1] Réaction 7 : NH 2Cl + Pr7  Pr8 v = k 7 [NH 2Cl][Pr7] Avec k 1 ≠ k 2 ≠ … ≠ k 7

La figure III.5 présente l’évolution théorique de la demande en monochloramine d’un composé modèle dont l’ensemble des réactions élémentaires est connu. Cette figure représente aussi l’estimation de la demande en monochloramine qui aurait été calculée par l’équation 3.4 en se basant sur les concentrations en monochloramine observées si cette expérience avait été réalisée. Ces résultats montrent qu’il est possible d’estimer de manière très fiable la demande en monochloramine même si l’ensemble du mécanisme réactionnel demeure inconnu. La demande calculée à 168 h est de 6,8 mol/mol pour une demande théorique de 7,0 mol/mol soit une erreur relative inférieure à 3 %. Dans la suite de cette étude, l’équation 3.4 sera utilisée afin de calculer toutes les demandes en monochloramine.

La figure III.6 et le tableau III.4 présentent l’évolution de la demande en monochloramine en fonction du temps pour les différents hydroxybenzènes. La réactivité discutée dans ce paragraphe correspond à la réactivité de l’ensemble des composés issus du composé initial et non à la seule réactivité du composé parent. Dans le cas particulier du résorcinol, l’étude cinétique des premières réactions sera discutée dans le chapitre suivant.

83 14

12

10 Cl (mol/mol) 2 8

6

4 Ph R 2 Py C

Demande en NH H P 0 0 24 48 72 96 120 144 168 Temps (heures)

Figure III.6. Evolution de la demande en monochloramine en fonction du temps (équation 3.4) [NH 2Cl] 0 = 2 mM ; [Composé organique] 0 = 100 µM ; 2- [CO 3 ]tot = 20 mM ; pH = 8,5 ± 0,1 ; N/Cl = 2

Ces résultats mettent en évidence que le phénol est très peu réactif vis-à-vis de la monochloramine. Le catéchol, l’hydroquinone et le pyrogallol ont des cinétiques de consommation de la monochloramine similaires. Les composés les plus réactifs sont le résorcinol et le phlorogulcinol. Le phénol présente une demande beaucoup plus faible que les autres composés. L’allure des courbes diffère significativement entre les différents composés étudiés. Les composés les plus réactifs (R, Ph) présentent deux phases différentes : une phase initiale de consommation très rapide de la monochloramine suivie d’une phase lente de consommation. Cette « cassure » peut s’expliquer par le fait que les premières réactions entre le composé organique et la monochloramine sont beaucoup plus rapides que les réactions entre la monochloramine et les sous-produits d’oxydation intermédiaires. Les courbes de demande en monochloramine en fonction du temps révèlent aussi que les réactions ne sont pas terminées après 7 jours. Ces résultats suggèrent que la demande en monochloramine ultime n’est pas atteinte et que les sous-produits de dégradation des composés organiques consommeraient lentement de la monochloramine.

Tableau III.4. Demande en monochloramine des composés organiques modèles étudiés tableau III.4. Demande en monochloramine (mol/mol) pour N/Cl = 1,1 Temps (h) P = 119 µM C = 122 µM R = 119 µM H = 115 µM Ph = 129 µM Py = 108 µM 0 0,0 0,0 0,0 0,0 0,0 0,0 3 2,0 2,2 3,3 0,0 3,4 1,7 24 3,8 5,3 6,0 2,2 4,4 5,5 48 5,5 7,0 7,2 4,8 5,8 8,8 72 6,6 7,7 7,9 7,1 7,0 10,8 96 7,5 8,2 8,2 8,5 7,9 12,2 168 8,6 8,6 8,6 10,4 8,8 13,1 Demande en monochloramine (mol/mol) pour N/Cl = 2 Temps (h) P = 119 µM C = 122 µM R = 119 µM H = 115 µM Ph = 129 µM Py = 108 µM 0 0,0 0,0 0,0 0,0 0,0 0,0 3 0,4 1,2 3,5 0,8 8,6 1,9 24 1,6 4,4 8,2 4,1 10,1 6,4 48 2,7 6,1 9,4 5,1 10,9 6,7 72 3,3 7,1 10,1 6,2 11,2 7,5 96 4,0 7,9 10,5 6,7 12,0 8,0 168 6,0 9,5 11,2 8,4 12,1 9,4

84 Chapitre III : Chloramination de composés organiques modèles : Demande et sous-produits

Demande en monochloramine (mol/mol) pour N/Cl = 10 Temps (h) P = 119 µM C = 122 µM R = 119 µM H = 115 µM Ph = 129 µM Py = 108 µM 0 0,0 0,0 0,0 0,0 0,0 0,0 3 3,4 1,7 2,7 1,0 7,6 1,7 24 3,9 4,2 5,7 4,6 9,4 4,2 48 3,8 5,2 6,4 5,1 10,2 4,3 72 4,4 5,6 7,2 6,1 10,5 5,0 96 4,1 6,4 7,4 6,5 10,7 5,1 168 4,8 7,2 7,7 7,1 11,3 5,3

III.3.3. Influence du rapport N/Cl Afin d’étudier l’effet du rapport N/Cl sur la demande en monochloramine, il a été choisi de comparer les demandes pour des temps de contact élevés (t = 168 h) afin de limiter les différences de consommation de la monochloramine dues à des cinétiques de dégradation plus ou moins rapides. La figure III.7 représente les demandes en monochloramine pour un temps de contact de 168 heures obtenues pour différents rapports N/Cl. La demande en monochloramine est calculée à partir de l’équation 3.4.

Comme l’a montré la figure III.5, l’équation 3.4 permet d’obtenir de très faibles écarts entre les demandes calculées et les demandes réelles (écarts inférieurs à 3 %). La répétabilité sur la mesure du chlore total montre que l’erreur expérimentale est inférieure à inférieure 2 %, soit une erreur globale inférieure à 5 %. Une marge de sécurité est prise en considérant que seul un écart de supérieur à 10 % entre les demandes est réellement significatif.

, 15 150 N/Cl = 1,1 N/Cl = 2 125 N/Cl = 10 100 10 Cl Cl (mol/mol)

2 75

50 5 25

0 rapport N/Cl = 10 et 1,1 et 10 = N/Cl rapport

Demande en NH 0 -25 P C R H Ph Py P C R H Ph Py Augmentation de la demande (%) entre les les entre (%) demande la de Augmentation

Figure III.7. Influence du rapport N/Cl sur la Figure III.8. Augmentation de la demande en demande en monochloramine à t = 168 h. monochloramine lors du passage d’un rapport [NH 2Cl] 0 = 2 mM ; pH = 8,5 ± 0,1 ; N/Cl = 10 à un rapport N/Cl = 1,1. [Composé organique] 0 = 100 µM ; [NH 2Cl] 0 = 2 mM ; pH = 8,5 ± 0,1 ; [Composé organique] 0 = 100 µM ;

La demande en monochloramine pour le résorcinol, le catéchol et le phloroglucinol n’est que très peu influencée par le rapport N/Cl utilisé. Un effet plus marqué est observé pour le phénol et l’hydroquinone : la demande en monochloramine de ces deux composés est environ 50 % plus importante pour N/Cl = 1,1 que pour N/Cl = 10. Le pyrogallol est quand à lui très sensible au rapport N/Cl et présente une demande deux fois plus importante pour N/Cl = 1,1 que pour N/Cl = 10.

85 Le rapport N/Cl étant le paramètre principal gouvernant la concentration en chlore libre pour un pH donné, une diminution de ce rapport conduit à une augmentation de la concentration en chlore libre dans le milieu. Il est donc particulièrement intéressant de comparer les valeurs obtenues lors de la chloramination de ces composés à celles obtenues lors de la chloration. Le tableau III.5 présente quelques demandes en chlore obtenues pour différentes conditions expérimentales. Malgré de nettes différences de conditions expérimentales, les valeurs obtenues par De Laat (1982) et par Reckhow et Singer (1985) sont très proches indiquant ainsi que les demandes publiées par ces auteurs correspondent à des demandes ultimes en chlore. Concernant les demandes en monochloramine, seules les valeurs à 72 et 168 heures sont présentées.

Tableau III.5. Demandes en chlore et en monochloramine de différents composés hydroxybenzèniques tableau III.5. Demande en Demande en chlore Demande en chlore monochloramine (15 heures) (72 heures) [NH 2Cl] 0 = 2 mM Composé [Cl 2]libre, 0 = 2 mM [Cl 2]libre, 0 = 0,3 mM [Organique] = 100 µM [Organique] = 100 µM [Organique] = 7-22 µM N/Cl = 2 ; pH = 8,5 De Laat (1982) Reckhow et Singer (1985) 72 heures 168 heures Phénol (P) 9,8 9,76 3,3 6,0 Catéchol (C) 4,1 3,98 7,1 9,5 Résorcinol (R) 7,2 7,35 10,0 11,2 Hydroquinone (H) 3,3 3,73 6,1 8,4 Phloroglucinol (Ph) 9,1 nd 11,2 12,1 Pyrogallol (Py) 6,9 nd 7,5 9,4

Alors que le phénol présente la plus forte demande en chlore (9,8 mol/mol), la demande en monochloramine est quant à elle relativement faible (3,3 mol/mol après 72 heures de réaction). Cette différence de réactivité permettrait d’expliquer la forte sensibilité au rapport N/Cl de la demande en monochloramine du phénol. En effet, pour les faibles rapports N/Cl, la contribution du chlore libre pourrait conduire à une augmentation notable de la demande en monochloramine. Concernant l’hydroquinone et le pyrogallol, la forte augmentation de la demande en monochloramine pour les faibles rapports N/Cl ne peut pas s’expliquer par la contribution du chlore libre dans le mécanisme de dégradation de ces composés. En effet, les demandes en monochloramine à 72 h sont plus importantes que les demandes en chlore. Dans un cas général, et à l’exception du phénol, les demandes sont 1,14 à 2,36 fois plus importantes dans le cas d’un traitement à la monochloramine que pour un traitement au chlore. Cette constatation est étonnante étant donné que la monochloramine est communément admise comme un oxydant beaucoup moins réactif que le chlore.

L’oxydation complète du résorcinol et du phloroglucinol jusqu’au stade CO 2 conduirait à des demandes en monochloramine respectives pour le résorcinol et le pholoroglucinol de 13 et 12 mol/mol. Les valeurs de demande en monochloramine observées sont de cet ordre de grandeur. Cependant, l’abattement de carbone n’excède pas 30 % dans le cas le plus élevé. Il n’est donc pas possible d’expliquer les demandes observées en tenant compte uniquement des réactions de substitution électrophile et d’oxydation.

Les travaux effectués par Valentine et Jafvert (1988) ont montré que les espèces inorganiques 2- - capables de céder un proton (HCO 3 , H 2PO 4 …) peuvent catalyser la vitesse de dismutation de la monochloramine (chapitre I.2). Les fortes demandes en monochloramine observées pour les différents composés phénoliques étudiés pourraient s’expliquer par un effet catalytique des sous- produits de chloramination. Heasley et al. (1999) ont montré que la formation de chloro-cétones et 86 Chapitre III : Chloramination de composés organiques modèles : Demande et sous-produits d’acides chloro-carboxyliques, capables de céder un ou plusieurs protons. La figure III.9 présente de manière schématique les différentes voies réactionnelles qui permettraient d’expliquer les différentes observations faites sur les demandes en monochloramine.

OH Pr' HOCl

NH2Cl NHCl2 H2O NH3 OH NH2Cl

NH2Cl - - Pr N2, NO3 , Cl ... Figure III.9. Mécanisme expliquant la demande en monochloramine

III.3.4. Cas particulier du résorcinol La demande en monochloramine du résorcinol a fait l’objet d’une étude plus approfondie dans laquelle les influences du rapport N/Cl (utilisé pour la synthèse de la monochloramine), du rapport oxydant/composé organique ([NH 2Cl] 0/[R] 0) ainsi que de la concentration en monochloramine ont été examinées.

La figure III.10 présente l’influence du rapport N/Cl à différentes concentrations sur la demande en monochloramine. Ces résultats montrent qu’en excès d’azote ammoniacal, le rapport N/Cl ne modifie pas significativement la demande en monochloramine à 24 h. La concentration initiale en monochloramine est en revanche un paramètre influence fortement la demande en monochloramine à 24 h ( figure III.11). Il n’est pas surprenant que la demande en monochloramine augmente conjointement avec la dose de monochloramine appliquée pour un temps donné. Cette augmentation témoigne d’un avancement réactionnel d’autant plus élevé que la dose d’oxydant est importante.

6 10 N/Cl = 2 [R] 0 = 100 µM [NH 2Cl] 0 = 2 mM ; [R] 0 = 100 µM 5 N/Cl = 10 8 [R] = 10 µM 4 0 Cl à 24 h [NH 2Cl] 0 = 0,1 mM ; 2 6 Cl Cl (mol/mol)

2 [R] = 5 µM 3 0 4

( mol/mol( ) 2 2 1 Demande en NH

0 demande en NH 0 0.1 0.5 1.25 2 0 100 200 300 400 500 [NH 2Cl] 0 (mM) Temps (h)

Figure III.10. Influence du rapport N/Cl et de Figure III.11. Influence de la concentration la concentration sur la demande en initiale en monochloramine sur la demande pour monochloramine à t = 24 h [NH 2Cl] 0 / [R] 0 = 20 ; pH = 8,5 ; N/Cl = 5

La demande en monochloramine à 24 et 48 heures des premiers sous-produits chlorés du résorcinol (4-MCR et 4,6-DCR) a été étudiée dans les mêmes conditions. La figure III.12 montre que la demande en monochloramine ne diminue pas significativement pour les dérivés chlorés du 87 résorcinol pour des temps de contact de 24 et 48 heures. Ces observations pourraient être dues aux raisons suivantes : - la stoechiométrie apparente de formation du 4-MCR à partir du résorcinol ou du 4,6-DCR à partir du 4-MCR est inférieure à 1 mole/mole, - l’avancement des réactions à 24 et 48 h est plus élevé pour les dérivés chlorés, - une partie de la monochloramine décomposée n’est pas incorporée dans la structure aromatique, - une catalyse des réactions de dismutation par les espèces organiques présentes, - des incertitudes de mesure.

8 24 h 7 30 48 h Cl Cl

2 6 5 20 4 3 (mol / mol) 10 2 Demande en NH 1 Perte de CODPerte à 48 h (%) 0 0 R 4-MCR 4,6-DCR R 4-MCR 4,6-DCR

Figure III.12. Demande en monochloramine Figure III.13. Perte de COD à 48 h du du résorcinol et de ces dérivés chlorés. résorcinol, de ces dérivés chlorés. [NH 2Cl] 0 = 2 mM ; pH = 8,5 ; N/Cl = 5; [NH 2Cl]0 = 2 mM ; pH = 8,5 ; N/Cl = 5 ; [Composé organique] 0 = 100 µM [Composé organique] 0 = 100 µM

La figure III.13 montre que l’abattement de la concentration en carbone organique dissous (COD) après 48 heures de réaction est assez élevé et compris entre 20 et 30 %. L’abattement du COD peut provenir d’une production de CO 2 (minéralisation du carbone organique) ou/et d’une perte de composés volatils (comme le chloroforme) lors de l’analyse. Dans le schéma réactionnel résorcinol- chloramine, Heasley et al. (1999) montrent que l’ouverture de cycle aromatique s’accompagne de la perte d’une molécule de CO 2 équivalent à une perte de COD de 17 %. Ces résultats tendent à monter que la totalité du résorcinol conduit à la formation de sous-produits acycliques.

Lors de l’étude de la chloramination des 6 composés phénoliques, les abattements de COD sont généralement compris entre 5 et 10 %. Les pertes en COD peuvent atteindre des valeurs importantes (jusqu’à 30 %) pour certains composés tels que le résorcinol et le phloroglucinol. Néanmoins, une étude complémentaire doit être menée afin de confirmer les résultats et d’expliquer plus précisément l’effet du rapport N/Cl et de la structure des composés phénoliques sur l’abattement de COD.

III.3.5. Comparaison de la réactivité des différents hydroxybenzènes Les résultats obtenus montrent que les structures et les demandes en monochloramine des différents composés phénoliques étudiés sont assez différentes. Le groupement –OH active le noyau aromatique vis-à-vis d’une substitution électrophile en ortho et en para du groupement –OH. La figure III.14 montre que, dans le cas du phénol, 3 positions sont favorisées pour une attaque électrophile. Dans le cas du catéchol et de l’hydroquinone, les deux groupements –OH orientent les réactions de substitution électrophile de manière homogène sur tous les atomes de carbone. Dans le

88 Chapitre III : Chloramination de composés organiques modèles : Demande et sous-produits cas du résorcinol et du phloroglucinol, 3 sites disponibles sont activés en ortho des groupements – OH. En ce qui concerne le pyrogallol, toutes les positions du noyau aromatique sont activées.

Phénol (P) Catéchol (C) Résorcinol (R)

OH OH OH

OH 3,3 (t = 72 h) 7,1 (t = 72 h) 10,0 (t = 72 h) 6,0 (t = 168 h) 9,5 (t = 168 h) 11,2 (t = 168 h) OH

Hydroquinone (H) Pyrogallol (Py) Phloroglucinol (Ph)

OH OH OH 6,1 (t = 72 h) OH 11,2 (t = 72 h) 7,5 (t = 72 h) 8,4 (t = 168 h) 12,1 (t = 168 h) 9,4 (t = 168 h) HO OH OH OH Figure III.14. Orientation des réactions de substitution électrophile pour les différents hydroxybenzènes et demandes en monochloramine (mol/mol) après 72 et 168 de réaction

La nature et l’orientation des groupements fonctionnels du noyau aromatique influent surtout sur les vitesses initiales de réaction plus que sur les demandes à long terme des oxydants. Il est néanmoins observé que l’activation spécifique des atomes de carbone en positions 2, 4, et 6, dans le cas du résorcinol et du phloroglucinol s’accompagne de fortes demandes en oxydant.

III.4. Formation de sous-produits organohalogénés De nombreuses études portant sur la chloration de composés organiques modèles ont montré que les composés hydroxybenzéniques sont de très bons précurseurs de dérivés organohalogénés (paramètre AOX). Le chloroforme et les acides halocétiques peuvent représenter une part importante de ces sous-produits.

La deuxième partie de ce chapitre est consacrée à l’étude de la formation de chloroforme et d’acides haloacétiques (HAA) lors de la chloramination des 6 composés hydroxybenzéniques étudiés. Ces résultats seront comparés aux données bibliographiques ayant trait à la production de ces sous- produits lors de la chloration. Le tableau III.6 rappelle pour chaque expérience, les conditions expérimentales utilisées et présente les productions de sous-produits de réaction mesurées lors de cette étude.

89 Tableau III.6. Formation de sous-produits organohalogénés lors de la chloramination de composés hydroxybenzéniques tableau III.6. Chloramination de composés hydroxybenzéniques avec un temps de contact de 48 h 2- [NH 2Cl] 0 = 2 mM ; [CO 3 ]tot = 20 mM ; pH = 8,5 Acide Demande en Rendement de formation Acide dichloroacétique Acide trichloroacétique Concentration initiale monochloroacétique monochloramine de chloroforme DCAA TCAA (µM) MCAA (mol/mol) (mmol/mol) (mmol/mol) (mmol/mol) Composé (mmol/mol) N/Cl N/Cl N/Cl N/Cl N/Cl N/Cl 1,1 2 10 1,1 2 10 1,1 2 10 1,1 2 10 1,1 2 10 1,1 2 10 Phénol 119 114 114 5,5 2,7 3,8 5,3 0,7 0,5 0,00 0,00 0,00 6,52 1,51 1,29 0,085 0,024 0,048 Catéchol 122 108 122 7,0 6,1 5,2 4,6 3,8 1,5 0,00 0,00 0,00 5,08 5,85 7,37 0,077 0,057 0,045 Résorcinol 119 106 119 7,2 9,4 6,4 20,7 12,9 6,5 1,56 1,35 0,94 31,42 19,60 23,86 0,571 0,240 0,077 Hydroquinone 115 115 115 4,8 5,1 5,1 9,7 5,0 1,4 0,00 0,23 0,00 3,59 5,43 5,11 0,191 0,047 0,035 Phloroglucinol 129 108 108 5,8 10,9 10,2 6,6 5,3 4,2 0,87 0,32 0,16 33,32 19,60 6,52 0,915 0,138 0,000 Pyrogallol 108 106 106 8,8 6,7 4,3 3,9 1,5 1,0 0,00 0,00 0,00 3,96 4,08 3,51 0,172 0,033 0,033

Chloramination de composés hydroxybenzéniques avec un temps de contact de 72 h 2- [NH 2Cl] 0 = 2 mM ; [CO 3 ]tot = 20 mM ; pH = 8,5 Demande en AOX Rendement formation de Rendement formation Pourcentage des AOX Monochloramine (mol/mol) chloroforme (mmol/mol) THAA (mmol eq Cl - /mol) Composé (mol/mol) CHCl 3 THAA N/Cl N/Cl N/Cl N/Cl N/Cl N/Cl 1,1 2 10 1,1 2 10 1,1 2 10 1,1 2 10 1,1 2 10 1,1 2 10 Phénol 0,407 0,703 0,196 6,6 3,3 4,4 6,1 5,4 2,2 16,5 4,7 3,4 5,3 2,7 3,9 4,1 0,7 1,7 Catéchol 0,118 0,411 0,303 7,7 7,1 5,6 4,7 2,2 3,3 11,9 13,6 14,8 14,2 1,9 3,9 10,1 3,3 4,9 Résorcinol 0,647 1,091 0,949 7,9 10,1 7,2 24,0 15,3 5,2 57,7 42,3 42,4 13,1 5,0 1,9 8,9 3,9 4,5 Hydroquinone 0,192 0,327 0,358 7,1 6,2 6,1 12,9 5,3 5,5 9,4 13,1 14,4 23,7 5,8 5,4 4,9 4,0 4,0 Phloroglucinol 0,963 0,839 0,888 7,0 11,2 10,5 10,8 5,6 9,4 79,6 40,0 47,1 3,9 2,4 3,7 8,3 4,8 5,3 Pyrogallol 0,239 0,287 0,296 10,8 7,5 5,0 4,7 1,2 2,2 10,2 9,3 8,4 6,9 1,4 2,6 4,3 3,2 2,8

90 Chapitre III : Chloramination de composés organiques modèles : Demande et sous-produits

III.4.1. Formation de chloroforme

III.4.1.1. Formation de chloroforme lors de la chloramination de composés hydroxybenzéniques La formation de chloroforme a été étudiée à différents temps de contact (0-168 heures) pour les 6 précurseurs. La figure III.15, qui présente les concentrations en CHCl 3 mesurées après 48 heures de réaction à pH = 8,5, montre ainsi que les plus fortes productions de chloroforme sont obtenues avec le résorcinol et dépendent fortement du rapport N/Cl.

(a) (b)

3 25 14 N/Cl = 1,1 12

20 10 = N/Cl N/Cl = 2,0 ] 3 N/Cl = 10 10 15 8 [CHCl / 10 6

(mmol/mol) 4 N/Cl = 1,1 = N/Cl 5 ] 3 2

0 0 [CHCl

rendement de rendement formation de CHCl P C R H Ph Py P C R H Ph Py

Figure III.15. Influence du rapport N/Cl sur la production de chloroforme. (a) Rendement de formation de chloroforme (mol CHCl 3 formé / mol de précurseur) à t = 48 h. (b) Augmentation de la concentration en chloroforme lorsque le rapport N/Cl passe de 10 à 1,1 à t = 48 h. 2- [NH 2Cl] 0 ≈ 2 mM ; pH = 8,5 ; [CO 3 ]tot = 20 mM

Pour tous les précurseurs, une diminution du rapport N/Cl conduit à une augmentation de la production de chloroforme. La formation de chloroforme lors de la chloramination du résorcinol s’avère particulièrement importante et conduit à des rendements de formation allant de 2,07 à 0,65 % après 48 h pour des rapports respectifs de 1,1 et 10. Le phénol est le composé étudié conduisant à la formation la plus faible de chloroforme avec des rendements respectifs de 0,53 et 0,05 % pour N/Cl = 1,1 et 10.

L’effet du rapport N/Cl sur la production de CHCl 3 à 48 h est évalué en calculant l’augmentation du rendement de formation de CHCl 3 lors du passage d’un rapport N/Cl = 10 à un rapport N/Cl = 1,1 (figure III.15.b). Cette approche permet d’évaluer la sensibilité, des différents précurseurs, à une augmentation de la concentration en chlore libre. Bien que le phénol ne conduise qu’à un très faible rendement de formation en chloroforme (en comparaison avec les autres composés étudiés), cette molécule présente une sensibilité très importante au rapport N/Cl. En effet, la production de CHCl 3 est plus de 10 fois plus importante pour N/Cl = 1,1 que pour N/Cl = 10. Avec des augmentations de production de chloroforme moyennes d’un facteur 3 environ, le catéchol, le résorcinol et le pyrogallol sont beaucoup moins sensibles à la diminution du rapport N/Cl.

Le suivi des concentrations en chloroforme lors de la chloramination de composés phénoliques révèle que le rapport N/Cl modifie le profil des courbes de formation de chloroforme. La figure III.16, montre que, dans le cas du catéchol, la production de CHCl 3 atteint un palier pour des temps de contact de 48 h pour les faibles rapports N/Cl, alors que la formation de CHCl 3 est plus lente

91 pour des rapports N/Cl plus élevés. Des profils similaires sont observés pour les autres composés hydroxybenzéniques.

Le tableau III.7 présente les rendements de formation de chloroforme, obtenus lors de la chloramination et de la chloration de quelques composés hydroxybenzéniques. Ces résultats montrent que le résorcinol, qui représente le composé formant le plus de chloroforme lors des expériences de chloramination, conduit à des productions de chloroforme 50 à 140 fois plus faibles que lors d’un traitement au chlore. Des résultats similaires sont obtenus avec le phénol et le phloroglucinol. Ces composés génèrent respectivement des concentrations 4 – 60 et 120 – 220 fois plus faibles lors d’une chloramination que lors d’une chloration.

Des résultats surprenants sont observés pour le catéchol, l’hydroquinone et le pyrogallol. En effet, les rendements de formation de chloroforme obtenus lors de la chloramination sont jusqu’à 4 fois plus importants que ceux observés lors d’une chloration. Il convient toutefois de souligner que ces composés sont de mauvais précurseurs de chloroforme lors de la chloration. Par ailleurs, les erreurs analytiques pourraient expliquer ces résultats.

Tableau III.7. Rendements de formation de chloroforme et taux d’incorporation de chlore dans le chloroforme lors de la chloration et de la chloramination de composés hydroxybenzéniques tableau III.7. Chloramination Chloration [Organique] ≈ 100µM 0 [NH 2Cl] 0 = 2 mM pH = 8,5 ; t = 48 h De Laat et al., 1982 Reckhow et Singer, 1985 [Organique] 0 = 50 – 100 µM [Organique] 0 = 7 - 22 µM N/Cl = [HOCl] = 1 - 2 mM [HOCl] = 0,28 mM Composé 0 0 1,1 2 10 pH = 7,0 ; t = 15 h pH = 7,0 ; t = 72 h Rendement formation de chloroforme (mmol/mol) Phénol (P) 5,3 0,7 0,5 25 14,9 Catéchol (C) 4,6 3,8 1,5 4 2,4 Résorcinol (R) 20,7 12,9 6,5 930 880 Hydroquinone (H) 9,7 5,0 1,4 4 9,8 Phloroglucinol (Ph) 6,6 5,3 4,2 93 nd Pyrogallol (Py) 3,9 1,5 1,0 <1 nd Taux d’incorporation de chlore dans le chloroforme (mmol/mol) Phénol (P) 2,87 0,79 0,39 8 9,2 Catéchol (C) 1,94 1,89 0,85 3 1,8 Résorcinol (R) 8,63 4,09 3,07 387 362,4 Hydroquinone (H) 6,02 2,96 0,81 4 6,4 Phloroglucinol (Ph) 3,43 1,45 1,23 306 nd Pyrogallol (Py) 1,34 0,68 0,70 <1 nd

Le taux d’incorporation du chlore dans le chloroforme permet de comparer la capacité d’un précurseur à former du chloroforme en normalisant le rendement de formation de chloroforme par la demande en chlore. D’un point de vue pratique, le taux d’incorporation correspond, en équivalent Cl - à la quantité de monochloramine consommée se retrouvant dans le chloroforme produit.

3 × Rendement de formation de CHCl (mol/mol) Taux d' incorporat ion (mol/mol) = 3 (3.5) Demande en monochlora mine (mol/mol)

92 Chapitre III : Chloramination de composés organiques modèles : Demande et sous-produits

Pour la majorité des composés étudiés, le taux d’incorporation augmente lorsque le rapport N/Cl diminue (figure III.17). Le rendement de formation de chloroforme augmente donc plus rapidement que la demande en monochloramine lorsque que la concentration en chlore libre, libérée par hydrolyse de la monochloramine, augmente. Les réactions impliquées dans le mécanisme de formation du chloroforme sont donc favorisées par rapport à celles conduisant à la formation d’autres sous-produits.

Les taux d’incorporation sont très faibles (< 0,01 mol/mol), les atomes de chlore provenant de la monochloramine se retrouvent à moins d’1 % dans le chloroforme. Le résorcinol est le composé qui présente le taux d’incorporation le plus élevé (0,003 à 0,009 mol/mol). Cependant ces valeurs sont très inférieures à celles observées lors de la chloration (0,387 à 0,476 mol/mol) (De Laat et al., 1982 ; Reckhow et Singer, 1985). Des observations similaires sont faites en comparant les taux d’incorporation obtenus par chloration et par chloramination (N/Cl = 2), le phénol et le phloroglucinol présentent des taux d’incorporation respectivement 8 et 400 fois plus élevés lors de la chloration. Néanmoins, pour d’autres composés, les taux d’incorporation observés lors de la chloration sont du même ordre de grandeur que ceux mesurés pour la chloramination. Pour des rapport N/Cl = 1,1 l’hydroquinone présente des taux d’incorporations similaires à ceux observés lors de la chloration. Ceci pourrait s’expliquer si une forte proportion de chlore libre, libéré lors de l’hydrolyse de la monochloramine, intervenait spécifiquement dans les réactions conduisant à la formation de CHCl 3.

3

3 0,7 10 N/ClN/Cl = = 10 10 N/Cl = 1,1 0,6 N/ClN/Cl = = 1,1 1,1 8 N/Cl = 2 0,5 N/Cl = 10 0,4 6

0,3 4

0,2 (mmol / mol) 2 0,1

Rendement de formation de CHClde de formation Rendement 0 0 0 24 48 72 Taux incorporation dans CHCl P C R H Ph Py Temps (heures)

Figure III.16. Cinétique de formation de Figure III.17. Influence du rapport N/Cl sur le chloroforme lors de la chloramination du taux d’incorporation de chlore dans le 2- catéchol. [NH 2Cl] 0 ≈ 2 mM ; pH = 8,5 ; [CO 3 ] chloroforme à 48 h = 20 mM ; [C]0 = 122 µM

III.4.1.2. Cas particulier du résorcinol La figure III.18 présente les productions de chloroforme obtenues pour de très faibles taux de chloration et de monochloramination du résorcinol (< 2 moles d’oxydant/mole de résorcinol). Ces expériences ont été effectuées avec un défaut d’oxydant.

Les résultats montrent que la formation de chloroforme est possible dès les très faibles taux de chloration du résorcinol. Par exemple, pour les conditions expérimentales utilisées au cours de cette étude, la production de CHCl 3 est de l’ordre de 0,005 à 0,001 mole CHCl 3/mole de résorcinol pour un taux de chloration appliqué de l’ordre de 0,5 à 1 mole de chlore par mole de résorcinol. Ces résultats indiquent que des voies réactionnelles très rapides conduisent à la formation de chloroforme dès qu’une molécule de résorcinol a été attaquée par une molécule de chlore.

93 (a) (b) 3 0,2

2,5 Chlore 0,15 2 ] ( µM( ] ) 3 ] ( µM( ] ) 1,5 3 0,1

[CHCl 1 [CHCl LQLD 0,05 0,5 LDLQ Monochloramine 0 0 0 0,5 1 1,5 2 0 0,5 1 1,5 2 [Oxydant] 0 / [R] 0 [NH 2Cl] 0 / [R] 0

Figure III.18. Formation de chloroforme à partir de résorcinol (100 µM) en fonction du rapport molaire [oxydant] 0/[R]0 pour le chlore et la monochloramine à pH = 8,6 ; N/Cl = 2

En ce qui concerne la monochloramine, la courbe de formation du chloroforme en fonction de la dose appliquée de monochloramine montre que le chloroforme n’apparaît dans le milieu réactionnel que pour des taux de monochloramination supérieurs à 1 mole/mole. Pour des taux de monochloramination inférieurs à 1 mole de NH 2Cl par mole de résorcinol, les concentrations en chloroforme mesurées sont comprises entre la limite de quantification (LQ = 50 nM) et la limite de détection (LD = 20 nM). Pour un taux de monochloramination donné et compris entre 1 et 2 moles/mole, les productions de CHCl 3 sont environ 20 fois plus faibles que celles obtenues par chloration.

Le mécanisme de formation de chloroforme à partir du résorcinol passe nécessairement par une ouverture du cycle aromatique (Boyce et Horning, 1983). Heasley et al. (1999) montrent que cette ouverture est possible en large défaut de monochloramine ([Résorcinol] 0/[Monochloramine] 0 = 10/1) mais ils ne relatent pas la formation de chloroforme dans ces conditions (rapport N/Cl non indiqué).

La chloramination du résorcinol réalisée avec un excès d’oxydant ([R] 0 = 50 µM ; [NH 2Cl] 0 = 1 mM) à pH = 8,6 et pour des rapport N/Cl compris entre 1,0 et 152 ( figure III.19), montre que les rendements de formation de CHCl 3 mesurés après 4 jours de réaction sont relativement faibles (inférieurs à 5 %) et dépendent du rapport N/Cl. Dans le cas du chlore, on observe que la totalité du chloroforme est formée dès 1 heure de réaction avec un rendement proche de 90 % (0,9 – 0,95 mole de CHCl 3/mole de résorcinol ( figure III.20).

De plus, le profil des courbes de rendement de chloroforme est modifié par le rapport N/Cl, les courbes obtenues pour les faibles valeurs de N/Cl (1,0 – 1,1) présentent un profil logarithmique indiquant que le chloroforme est produit dès les premiers temps de contact. Ces résultats sont cohérents avec ceux observés pour la chloration du résorcinol où aucune phase de latence n’est observée lors de la chloration du résorcinol. Pour des rapports N/Cl plus élevés (1,5 – 152) la phase de formation de CHCl 3 est d’autant plus retardée que le rapport N/Cl est élevé. Ces résultats sont comparables à ceux observés lors de la chloramination des 6 composés phénoliques ( figure III.16).

Aucune différence significative n’est observée sur la formation de chloroforme entre les rapports N/Cl = 100 et 500 (non représenté sur la figure III.19) avec des rendements de formation de chloroforme respectifs de 0,21 et de 0,28 %. Le chlore libre, libéré par hydrolyse de la monochloramine, semble donc être le principal agent responsable de la formation de chloroforme lors de la chloramination du résorcinol. Le fait qu’il soit nécessaire de travailler avec des rapports 94 Chapitre III : Chloramination de composés organiques modèles : Demande et sous-produits

N/Cl > 100 pour ne plus observer de différences significatives sur le rendement de formation de chloroforme appuie cette hypothèse. De plus, les expériences ont montré que la monochloramine (en tant que molécule) ne conduit qu’à de très faibles rendements de formation de chloroforme (0,2 - 0,3 % après 48 h de temps de contact).

5 125 N/Cl = 1,00 N/Cl = 1,05 4 N/Cl = 1,1 100 N/Cl = 10 N/Cl = 100 N/Cl = 152

(%) 3 (%) 75 3 3

2 50 CHCl CHCl

1 25

0 0 0 24 48 72 96 0 6 12 18 24 Temps de contact (h) Temps (h)

Figure III.19. Influence du rapport N/Cl sur le Figure III.20. Rendement de formation de rendement de formation de chloroforme. chloroforme lors de la chloration du résorcinol. CHCl 3 (%) = 100 [CHCl 3] / [R] 0 [Cl 2]tot = 100 µM ; [R] 0 = 1 µM ; pH = 8,5 [NH 2Cl] 0 = 1 mM ; pH = 8,5 ± 0,2 ; [R] 0 = 50 µM

L’influence du pH sur la formation de CHCl 3 a été étudiée pour des concentrations en NH 2Cl de 0,65 mM et un rapport molaire N/Cl = 10 en présence d’une concentration initiale en résorcinol de 10 µM. La figure III.21 montre le rendement de formation de chloroforme en fonction du pH pour un temps de contact de 48 heures. Il apparaît que la production de chloroforme augmente sensiblement pour les pH acides. Pour des pH < 7, le rendement est supérieur à 7 %. Il a aussi été établi que les premières réactions mises en jeu lors de la chloramination du résorcinol sont favorisées pour des pH légèrement alcalins (chapitre IV.5.2). Le fait que le rendement de formation augmente lorsque que le pH diminue montre que les réactions initiales (formation des dérivés chlorés du résorcinol) n’influent pas de manière significative sur la formation de chloroforme.

8

6 (%) 3 4 CHCl 2

0 6 8 10 12 pH

Figure III.21. Evolution du rendement de formation de chloroforme à 48 h en fonction du pH. [NH 2Cl] 0 = 0,65 mM ; [R] 0 = 10 µM ; N/Cl = 10

95 Lors de la chloration du résorcinol ([R] 0 = 0,01 µM ; [Cl 2]tot = 1 µM), le rendement de formation de CHCl 3 est maximum pour des pH proches de 8 et diminue rapidement pour des conditions plus acides ou basiques ( figure III.22.a). Il est communément admis que la forme HOCl est responsable de la réactivité du chlore avec les composés organiques. Pour des pH supérieurs à 7,5 la forme ClO - est majoritaire dans le milieu ce qui peut, pour un temps de contact donné, expliquer la différence de rendement de formation de CHCl 3 observée. von Gunten et al. (2001) montrent que la formation de chloroforme lors de la chloration d’eaux naturelles augmente avec le C.t. Il n’est donc pas étonnant d’observer une diminution du rendement de formation de chloroforme pour un temps de contact donné lorsque le pH augmente. Néanmoins, la seule spéciation du chlore ne permet pas d’expliquer totalement ce phénomène. En effet, des rendements de formation de CHCl 3 analogues devraient être alors observés avec des solutions traitées avec des valeurs de C.t identiques.

[Chlore total] C.t = [HOCl] × Temps = × Temps (3.6) K 1+ a 10 pH-

La figure III.22.b montre une légère augmentation du rendement de formation de chloroforme à pH = 10,3 en fonction du Ct. Cependant pour des Ct identiques et des pH différents, comme c’est le cas à pH = 10,3 (t = 4 h ; Ct = 1,39 x 10 -7 M.h) et à pH = 11,05 (t = 27 h ; Ct = 1,67 x 10 -7 M.h) le rendement de formation de chloroforme est de 14 % à pH = 10,3 alors aucune formation n’est observée à pH = 11. Ceci indique que la spéciation du chlore n’est pas l’unique paramètre pouvant influencer la formation de chloroforme. La formation de CHCl 3 à partir d’un précurseur comme le résorcinol met en jeu de nombreuses réactions dont chacun des intermédiaires peut présenter différentes formes acido-basiques et est susceptible de conduire ou non à la formation de chloroforme.

(a) (b) 100 100 2 h 4 h 75 27 h 75 49 h 50 (%) (%) 3 50 3 50 25 pH = 6,5 CHCl CHCl 25 25 pH = 7,80 0 pH = 10,3 0 0,5 1 1,5 2 pH = 11,05 0 0 6 8 10 12 0 200 400 600 800 pH Ct ( µM.h )

Figure III.22. Influence du pH sur le rendement de formation de chloroforme lors de la chloration du résorcinol. (a) en fonction du temps de contact. (b) en fonction du Ct. [R] 0 = 0,01 µM ; [Cl 2]tot = 1 µM

Ces résultats vont cependant à l’encontre de ceux observés entre le chlore et le résorcinol. En effet des travaux antérieurs (Rook, 1977 ; Boyce et Hornig, 1980) ont montré que la formation de chloroforme est plus importante à pH basique qu’à pH acide et neutre. Boyce et Horning (1980) observent un rendement de formation de CHCl 3 de 95 % à pH = 10. Cependant ces observations ont été effectuées à de plus fortes concentrations ([R]0 = 10 µM ; [Cl 2]tot = 100 µM) que celles utilisées dans notre étude. Il est possible que de telles concentrations permettent de dépasser le blocage cinétique observé dans nos conditions. De Laat et al. (1982) observent quant à eux un profil 96 Chapitre III : Chloramination de composés organiques modèles : Demande et sous-produits similaire à celui présenté sur la figure III.22.a lors de la chloration du résorcinol en milieu plus dilué ([R] 0 = 1 µM ; [Cl 2]tot = 20 µM).

Boyce et Horning (1983) suggèrent que les étapes cinétiquement limitantes sont la décarboxylation (sur la fonction acide) des produits d’ouverture de cycle. Cette étape est catalysée en milieu légèrement basique. En milieu très basique (pH = 12), les résultats sont cohérents avec les observations faites par Boyce et Horning (1980). Selon De Laat et al. (1982), la baisse de rendement de formation de chloroforme en milieu basique s’expliquerait par le fait que la cinétique de chloration des intermédiaires, et notamment le 2,4,6-trichlororésorcinol est fortement ralentie en milieu basique au point de constituer l’étape cinétiquement limitante.

Heasley et al. (1999) suggèrent que, lors de la chloramination du résorcinol, les faibles rendements de production de chloroforme proviennent de la compétition entre l’hydrolyse (lente) et de l’attaque par la monochloramine de la 1,1,1,3,5,5-hexachloro-3-penten-2-one ( figure III.23). Bien que cet auteur ne discute pas de l’effet du rapport N/Cl, et par conséquent des compétitions entre les mécanismes de chloration et chloramination, il semblerait que les conditions expérimentales utilisées par Heasley et al. (1999) permettent de négliger l’existence de chlore libre dans le milieu. Cependant, les observations conduisant à ces conclusions ne concernent pas toujours des expériences réalisées en phase aqueuse.

OH Cl Cl

NH2Cl H2O OH - CO2 Cl Cl Cl Cl Cl

Cl Cl O

H2O NH2Cl

Cl Cl Cl Cl Cl OH Cl Cl Cl

+ CHCl O + O 3 + NH2Cl2 Figure III.23. Mécanisme de formation de CHCl 3 à partir du 2,4,6-trichlororésorcinol (d’après Heasley et al., 1999)

Selon De Laat et al. (1982), la chloration du 2,4,6-trichlororésorcinol, ralentie en milieu basique, constituerait l’étape cinétiquement limitante du mécanisme de formation de chloroforme. Plus récemment, Heasley et al. (1999) proposent un mécanisme de formation du chloroforme lors de la chloramination du résorcinol.

Compte tenu des résultats observés, plusieurs hypothèses peuvent être émises : - la réaction conduisant à la formation de CHCl 3 à partir du 1,1,1,3,5,5-hexachloro-3-penten-2-one + est favorisée à pH acide et/ou la réaction conduisant à la formation du carbanion et de NH 2Cl 2 est défavorisée pour des pH acides. - les réactions conduisant à la formation de la 1,1,1,3,5,5-hexachloro-3-penten-2-one sont favorisées à pH acide.

Dans le cas du chlore, Bartlett (1934), Morris (1978), et Doré (1989) suggèrent que le mécanisme de la réaction haloforme est catalysé à pH basique. L’étape cinétiquement limitante de la réaction

97 haloforme est la formation de l’anion énolate par arrachement d’un proton en position α du groupement carbonyle. Cependant une catalyse acide peut aussi être envisagée (Doré, 1989).

Toutes les constantes cinétiques élémentaires impliquées dans le système réactionnel résorcinol/chlore/chloramines ne sont actuellement pas connues. Il n’est donc pas possible de modéliser la concentration en chlore libre dans un tel système. Cependant, compte tenu de la forte réactivité de NH 3 vis-à-vis du chlore et de la forte concentration en NH 3 dans nos conditions expérimentales, il est possible d’estimer la concentration en chlore libre par le simple examen des réactions suivantes :

10 -1 -1 HOCl + NH 3  NH 2Cl kformation = 1,5.10 M .h (Isaac et Morris, 1985) -2 -1 NH 2Cl + H 2O  HOCl + NH 3 khydrolyse = 7,6.10 h (Isaac et Morris, 1985) - + HOCl  ClO + H pKa1 = 7,54 (Morris, 1966) + + NH 4  NH 3 + H pK a2 = 9,25 (Thurston et al., 1981)

La concentration en chlore libre (HOCl et ClO -) dépend ainsi du rapport N/Cl, de la concentration en chlore total et du pH. Il est possible de calculer pour un couple (pH ; N/Cl) donné la concentration des espèces ClO - et HOCl en absence de composé organique (détail du calcul chapitre IV.4.1.). − β + β2 − 4α[Chlore total ] = [Chlore libre ]eq (3.7) 2α  K [H + ]  avec α =  a2  et β = 1 + α ( [Azote total] - [Chlore total])  K (K +[H + ])(K +[H + ])   1 a1 a2 

La comparaison des rendements de formation de CHCl 3 à 48 heures en fonction du pH avec les courbes de concentration théorique en chlore libre et en acide hypochloreux montre que le rendement de formation de CHCl 3 évolue conjointement avec la concentration en HOCl dans le milieu figure III.24). Les faibles rendements de chloroforme formés en milieu basique semblent montrer que seule l’espèce HOCl est impliquée dans le mécanisme de formation de chloroforme. En effet, malgré la réaugmentation notable de la concentration en chlore libre, sous la forme ClO -, pour des pH supérieurs à 10, le rendement de chloroforme présente une décroissance continue. Ces résultats sont cohérents avec la relation entre le rendement de formation de chloroforme et le pH observée lors de la chloration du résorcinol à différents pH ( figure III.22).

8 -8 8 HOCl + ClO - -9 pH variable

6 . 6 (N/Cl = 10 ; 48 h)

(%) -10 N/Cl variable 3

4 (%) (pH = 8,5 ; 48 h) 3 4 -11 CHCl log[chlore libre] log[chlore CHCl 2 HOCl 2 N/Cl variable CHCl 3 -12

(pH = 8,5 ; 24 h) 0 -13 0 6 8 10 12 -13 -11 -9 -7 pH log ([HOCl])

Figure III.24. Rendement de formation de Figure III.25. Rendement de formation de CHCl 3 à 48 h en fonction du pH pour N/Cl = chloroforme en fonction de la concentration en

98 Chapitre III : Chloramination de composés organiques modèles : Demande et sous-produits

10. Les courbes représentent la concentration HOCl. Expérience à pH variable : N/Cl = 10 ; t en chlore libre et en acide hypochloreux = 48 h ; [NH 2Cl] 0 = 0,65 mM ; [R] 0 = 10 µM. calculées pour [Cl 2]tot = 0,5 mM ; N/Cl = 10 Expérience à N/Cl variable : pH = 8,5 ; t = 24 et 48 h ;[NH 2Cl] 0 = 1 mM ; [R] 0 = 50 µM

La figure III.25 représente le rendement de formation de chloroforme en fonction de la concentration en HOCl calculée à partir de l’équation 3.7 pour différentes expériences à pH et N/Cl variables. Pour de larges excès en azote ammoniacal, aucune différence n’est observée entre N/Cl = 100 et N/Cl = 500. Il est donc possible de considérer que les rendements de formation de CHCl 3 observés à 48 heures correspondent à la seule molécule NH 2Cl. Le rendement de formation de CHCl 3 à partir de NH 2Cl est extrêmement faible (0,2 - 0,3 %). Compte tenu des conditions mises en œuvre lors de la chloramination des eaux destinées à la consommation humaine (N/Cl proche de 1), la majorité des THM formés pourrait provenir de l’attaque du chlore, libéré par la monochloramine, sur les précurseurs de chloroforme et non de la monochloramine elle-même.

III.4.2. Formation d’acides haloacétiques La figure III.26 présente l’évolution des concentrations en acides haloacétiques totaux (THAA) en fonction du temps pour le phénol et le résorcinol. Les valeurs numériques des rendements de formation de THAA après 48 et 72 heures de réaction sont présentées dans le tableau III.6. Compte tenu de l’absence d’ions bromure en solution, seuls les acides monochloroacétique (MCAA), dichloroacétique (DCAA) et trichloroactique (TCAA) sont formés.

[THAA] = [MCAA] + [DCAA] + [TCAA]

Contrairement aux observations faites sur la cinétique de formation de CHCl 3, le rapport N/Cl ne modifie pas sensiblement le profil des courbes de formation des THAA.

Pour la plupart des composés, les acides haloacétiques sont observés dès les premières heures de réaction et la concentration en THAA atteint un palier après 100 heures environ. Le résorcinol présente un profil atypique puisque la totalité des HAA est formée dès 24 heures. Il est particulièrement intéressant de comparer les profils des courbes obtenues pour la formation de THAA et du chloroforme. Dans le cas du résorcinol, il y a formation rapide des HAA et production lente de chloroforme. Compte tenu de ces résultats, il semble peu probable que l’attaque du trichlororésorcinol par la monochloramine constitue l’étape cinétiquement limitante du mécanisme de formation de chloroforme. En effet, si la dégradation du trichlororésorcinol constituait l’étape cinétiquement limitante, le profil des courbes de formation de CHCl 3 et de THAA devraient être comparable. De plus, il semble peu probable que les acides haloacétiques et le chloroforme soient formés au cours d’un même et unique mécanisme.

99

(a) (b) 2 5

N/Cl = 1,1 N/Cl = 1,1 4

3 N/Cl = 10 1 N/Cl = 2 2 [THAA] (µM) [THAA] (µM) 1 N/Cl = 2 N/Cl = 10 0 0 0 24 48 72 96 120 144 168 0 24 48 72 96 120 144 168 Temps (heures) Temps (heures)

Figure III.26. Evolution des concentrations en THAA lors de la chloramination du résorcinol (R) et du phénol (P). [NH 2Cl] 0 = 2,0 mM ; [Composé organique] 0 ≈ 100 µM ; pH = 8,5 ± 0,1. (a) phénol ; (b) résorcinol

La figure III.27 présente l’influence du rapport N/Cl sur la formation en acides haloacétiques totaux (THAA) observée lors de la chloramination des 6 précurseurs organiques après 48 heures de réaction.

Le résorcinol et le phloroglucinol sont les composés conduisant aux productions de THAA les plus importantes. Les rendements de formation apparents de ces composés sont proches de 0,02 mole de THAA formés par mole de composé de départ. Les rendements de formation de THAA sont du même ordre de grandeur que ceux observés pour le rendement de formation de chloroforme dans les mêmes conditions. Cependant, le phloroglucinol conduit à des productions de THAA beaucoup plus importantes que de CHCl 3.

A l’exception du phénol et du phloroglucinol, où une augmentation notable de la concentration est observée aux faibles valeurs du rapport N/Cl, ce rapport ne semble pas jouer un rôle important dans le mécanisme de formation des acides haloacétiques. Ainsi, pour la majorité des composés, l’augmentation de la concentration en chlore libre à l’état stationnaire ne conduit pas à une augmentation de significative de la production de HAA. Il semblerait donc que les HAA soit majoritairement formés par des réactions directes entre les différents intermédiaires et la monochloramine.

100 Chapitre III : Chloramination de composés organiques modèles : Demande et sous-produits

40 10 N/Cl = 1,1 MCAA 35 N/Cl = 2 8 TCAA 30 N/Cl = 10 6 25 20 4 15 2 (mmol/mol) 10 0

5 Speciation THAAdes (%) 2 2 2 2 2 2 10 10 10 10 10 10 1,1 1,1 1,1 1,1 1,1 0 1,1

Rendement de formation de THAAde , de formation Rendement N/Cl N/Cl N/Cl N/Cl N/Cl N/Cl P C R H Ph Py P C R H Ph Py

Figure III.27. Influence du rapport N/Cl sur le Figure III.28. Influence du rapport N/Cl sur la rendement de formation de THAA (mol/mol) à t spéciation des HAA (%) à t = 48h. [NH 2Cl] 0 = = 48 h. [NH 2Cl] 0 = 2,0 mM ; pH = 8,5 ± 0,1; 2,0 mM ; pH = 8,5 ± 0,1 ; [Composé organique] 0 = 100 µM . [Composé organique] 0 = 100 µM .

Quel que soit le composé organique étudié, l’acide dichloroacétique représente le HAA majoritaire (88 - 99 % des THAA) (figure III.28). Lors de la chloration de composés hydroxybenzéniques, Reckhow et Singer (1985) ont montré que l’acide trichloroacétique est le HAA majoritairement formé.

A l’exception du phénol, la proportion d’acide trichloroacétique augmente lorsque le rapport N/Cl diminue. Par analogie avec les observations faites sur le chloroforme, le chlore libre, libéré par hydrolyse de la monochloramine pourrait expliquer cette augmentation pour les faibles rapports N/Cl

La formation d’acide monochloroacétique n’est observée que pour certains composés (résorcinol, hydroquinone et phloroglucinol). Aucune tendance n’a pu être dégagée concernant l’effet du rapport N/Cl sur la formation du MCAA. 14 N/Cl = 1,1 12 N/Cl = 2 N/Cl = 10 10

8

6

4

2

Taux incorporation (mmol/mol), 0 P C R H Ph Py

Figure III.29. Influence du rapport N/Cl sur le taux d’incorporation de chlore dans les HAA à t = 48 h. [NH 2Cl] 0 = 2,0 mM ; [Composé organique] 0 = 100 µM ; pH = 8,5 ± 0,1.

Le taux d’incorporation du chlore dans les HAA varie entre 1 et 12 mmol/mol (0,1 à 1,2 %) suivant le précurseur étudié et les conditions utilisées ( figure III.29). De fortes variations du taux

101 d’incorporation sont observées entre les différents rapports N/Cl étudiés pour un composé donné. Cependant, des effets contraires sont observés entre les différents composés étudiés.

Le taux d’incorporation de chlore dans les HAA lors de la chloramination du phénol est beaucoup plus faible que le taux d’incorporation observé lors chloration (112 mmol/mol) (Reckhow et Singer, 1985). Lors de la chloration du catéchol, du résorcinol et de l’hydroquinone Reckhow et Singer (1985) mesurent des taux d’incorporation de chlore dans les HAA, respectifs de 1,3, 22,9 et 8,5 mmol/mol. Ces valeurs sont comparables à celles obtenues lors de la chloramination ( figure III.29).

III.4.3. Formation d’AOX L’adsorption sur charbon actif des composés organohalogénés a été réalisée après 72 heures de réaction. La figure III.30 présente les concentrations en AOX exprimées en µg Cl -.L -1 pour les différents composés étudiés. Chaque série a été complétée par l’analyse d’un témoin (solution de monochloramine sans composé organique) et d’un échantillon de référence (4-chlororésorcinol) d’une concentration théorique de 200 µg Cl -.L-1. Les rendements de formation d’AOX sont calculés à partir de la relation suivante :

− [AOX] (µg eq Cl .L -1 )/35,5 Rendement formation AOX = (3.8) [Composé organique] 0 (µM)

Les rendements de formation d’AOX varient entre 0,2 et 1,1 mmol/mol et dépendent des conditions expérimentales et du précurseur considéré. Pour un même rapport N/Cl, le résorcinol, le phloroglucinol et, dans une moindre mesure, le phénol, conduisent à des productions d’AOX plus importantes que les autres composés étudiés. Pour un même composé, de fortes variations sont observées entre les différents rapports N/Cl étudiés. Cependant, aucune tendance générale n’a été observée. Lors de la chloration, le phénol et le résorcinol conduisent à des productions d’AOX environ 3 fois plus importantes que celles observées lors de la chloramination. Néanmoins pour des composés moins réactifs vis-à-vis du chlore (catéchol et hydroquinone), les rendements de formation d’AOX mesurés lors de la chloramination sont supérieurs à ceux observés lors de la chloration.

5000 1,2 N/Cl = 1,1 N/Cl = 1,1 ) 4000 1 N/Cl =2 -1 N/Cl = 2

.L N/Cl = 10 - N/Cl = 10 0,8 3000 0,6 2000

(mol/mol) 0,4 1000 AOX (µg eq Cl 0,2

0 0 P C R H Ph Py Rendement de formation d'AOX P C R H Ph Py

Figure III.30. Influence du rapport N/Cl sur la formation d’AOX à t = 48 h. [NH 2Cl] 0 = 2,0 mM ; - [Composé organique] 0 ≈ 100 µM ; pH = 8,5+/- 0,1. (a) Concentration en AOX en µg eq Cl ; (b) Rendement de formation d’AOX en mole Cl -/mole composé organique

Malgré des rendements de formation d’AOX relativement élevés, les taux d’incorporation de chlore sont assez faibles. Ainsi pour le résorcinol et le phloroglucinol, qui présentent les taux 102 Chapitre III : Chloramination de composés organiques modèles : Demande et sous-produits d’incorporation les plus élevés, seul 10 % environ de la monochloramine consommée conduit à la formation de composés organohalogénés. Lors de la chloration de ces mêmes molécules, Reckhow et Singer (1985) observent que les atomes de chlore consommés se retrouvent à près de 50 % dans des composés organohalogénés. Pour les composés moins réactifs tels que le catéchol, l’hydroquinone et le pyrogallol, les taux d’incorporation s’échelonnent entre 1,5 et 6 %. Les faibles taux d’incorporation observés lors de la chloramination de l’ensemble des composés hydroxybenzéniques étudiés ( figure III.31) appuient l’hypothèse selon laquelle la majorité de la monochloramine décomposée est due à des phénomènes de catalyse de l’autodécomposition.

Lors de la chloramination de composés hydroxybenzéniques modèles, les composés organohalogénés simples tels que le chloroforme et les acides haloacétiques ne représentent qu’une faible proportion des AOX (figure III.32). Le chloroforme et l’acide dichloroacétique représentent en moyenne moins de 10 % des AOX. Des résultats similaires ont été observés lors de la chloramination de matières organiques naturelles, où le chloroforme représente jusqu’à 7 % des AOX (Kristiana et al. , 2009). Une augmentation notable de la proportion des AOX identifiés est observée pour les faibles rapports N/Cl. Cet effet est principalement dû à l’augmentation de la production de chloroforme, qui peut représenter entre 10 et 20 % des AOX suivant les composés étudiés.

0,3 30% N/Cl = 1,1 Autres 25% 0,25 N/Cl =2 DCAA N/Cl = 10 20% CHCl3 0,2 15% 0,15 10% 0,1 5%

0,05 Pourcentage desAOX 0% 2 2 2 2 2 2 10 10 10 10 10 10 1,1 1,1 1,1 1,1 1,1 0 1,1 Taux d'incorporation (mol/mol), N/Cl N/Cl N/Cl N/Cl N/Cl N/Cl P C R H Ph Py P C R H Ph Py

Figure III.31. Influence du rapport N/Cl sur le Figure III.32. Influence du rapport N/Cl sur la taux d’incorporation de chlore dans les AOX à spéciation des AOX à t = 72 h. t = 48 h. [NH 2Cl] 0 = 2,0 mM ; pH = 8,5 ± 0,1 ; [NH 2Cl] 0 = 2,0 mM ; pH = 8,5 ± 0,1 ; [Composé organique] 0 = 100 µM [Composé organique] 0 = 100 µM

Lors de la chloration du résorcinol, Reckhow et Singer (1985) montrent que le chloroforme et les THAA représentent respectivement 73,1 et 5,4 % des AOX. Conformément au mécanisme réactionnel de la chloramination du résorcinol (Heasley et al. , 1999), une part importante des AOX non identifiés pourrait provenir de composés de type halo-cétones ou halo-acides. La chloramination favoriserait ainsi la proportion d’AOX de structure complexe contenant plusieurs atomes de carbone. Une conclusion similaire est formulée par Kristiana et al. (2009) qui suggèrent que la chloramination de matières organiques naturelles conduit à proportion plus importante de composés halogénés de plus fortes masses moléculaires que dans le cas du chlore.

103 III.5. Chloramination de matières organiques naturelles III.5.1. Demande en monochloramine Le suivi de la concentration résiduelle en monochloramine a été effectué dans le cas de la chloramination de différentes Matières Organiques Naturelles (MON). Il existe de nombreuses manières de fractionner les MON. Une d’entre elle consiste à séparer sur des résines de type non ionique les différentes fractions des MON selon un critère de polarité (Croué et al., 1998). Les MON étudiées proviennent des fractions hydrophobe (HPO) et transphilique (TPH) de l’eau du barrage du Cébron. L’eau de la Loire, prélevée à Dampierre en Burly a aussi été étudiée. Le tableau III.8 présente quelques caractéristiques des solutions de MON et de l’eau naturelle étudiées.

Tableau III.8. Caractéristiques des solutions de MON étudiées tableau III.8. SUVA Fraction Origine COT (L. m -1.mg C -1) Hydrophobe (HPO) Barrage du Cébron (Deux- Sèvres ; France) 1,9 mg C.L-1 3,54 Transphilique (TPH) Barrage du Cébron (Deux- Sèvres ; France) 1,9 mg C.L-1 2,14 Eau naturelle Loire (Dampierre en Burly ; Loiret ; France) 2,6 mg C.L-1 2,90

Les expériences de chloramination ont été réalisées à des concentrations initiales en monochloramine de 1 mM et en présence de tampon carbonate (24 mM), et à différents rapports N/Cl. Les figures III.33-35 présentent les principaux résultats concernant l’évolution de la concentration en monochloramine. Pour les trois différentes MON étudiées, la demande en monochloramine est dépendante du rapport N/Cl étudié. Pour les rapports N/Cl = 1,01 à 1,10, la concentration résiduelle en monochloramine est significativement plus faible que celle du témoin sans MON. De plus, pour un temps de contact donné, une diminution du rapport N/Cl conduit à une augmentation de la demande en monochloramine. Le suivi de la concentration en NH 2Cl montre que près de 20 % de la monochloramine sont consommés lors des 7 premières heures de réaction. Cette forte demande initiale est typique des observations faites lors de la chloration (Jadas-Hécart et al., 1992) et de la chloramination (Duirk et al., 2002 ; Blangis, 2004) de MON.

(a) (b)

1,0 1,0

0,8 0,8

0,6 0,6 (mM) (mM) 0 0 N/Cl = 5 Cl] Cl]

2 N/Cl = 4,2 0,4 2 0,4 N/Cl = 1,5 (Témoin) N/Cl = 2,5 [NH N/Cl = 1,11 (Témoin) [NH 0,2 0,2 N/Cl = 1,5 N/Cl = 1,07 (Témoin) (Témoin N/Cl = 3) N/Cl = 1,01 (Témoin) 0,0 0,0 0 24 48 72 96 120 144 168 0 24 48 72 96 120 144 168

Temps (heures) Temps (heures)

Figure III.33. Evolution de la concentration en monochloramine lors de chloramination de fractions HPO (points) et comparaison avec les témoins sans MON (courbes simulées). -1 2- -1 [NH 2Cl] 0 = 1,02 mM = 71 mg Cl 2.L ; pH = 8,5 ; [CO 3 ]tot = 24 mM ; COT = 1,9 mg C.L (a) N/Cl = 1,01 - 1,5 (b) N/Cl = 1,5 - 5

104 Chapitre III : Chloramination de composés organiques modèles : Demande et sous-produits

1,0 1,0

0,8 0,8

0,6 0,6 (mM) (mM) 0 0 Cl] Cl] 2 0,4 2 0,4 N/Cl = 1,5 (Témoin) N/Cl = 1,5 (Témoin) [NH N/Cl = 1,11 (Témoin) [NH N/Cl = 1,11 (Témoin) 0,2 N/Cl = 1,07 (Témoin) 0,2 N/Cl = 1,07 (Témoin) N/Cl = 1,01 (Témoin) N/Cl = 1,01 (Témoin) 0,0 0,0 0 24 48 72 96 120 144 168 0 24 48 72 96 120 144 168

Temps (heures) Temps (heures)

Figure III.34. Evolution de la concentration en Figure III.35. Evolution de la concentration en monochloramine lors de chloramination de monochloramine lors de chloramination de fractions TPH (points) et comparaison avec les l’eau de Loire (points) et comparaison avec les témoins sans MON (courbes simulées). témoins sans MON (courbes simulées. [NH 2Cl] 0 2- 2- [NH 2Cl] 0 = 1,02 mM ; pH = 8,5 ; [CO 3 ]tot = = 1,02 mM ; pH = 8,5 ; [CO 3 ]tot = 24 mM ; 24 mM ; COT = 1,9 mg C.L-1 COT = 2,6 mg C.L-1

Pour des rapports supérieurs à 1,5, les concentrations en monochloramine mesurées en présence de MON ne sont pas significativement différentes des témoins. De plus, aucune différence n’est observée entre les rapports N/Cl = 1,5 et N/Cl = 5. Ces résultats montrent que lors de la chloramination de MON, la voie conduisant à la diminution de chlore total passe vraisemblablement par une hydrolyse de la monochloramine et par une attaque du chlore libre sur les MON.

La figure III.36 présente l’influence du rapport N/Cl sur la demande en monochloramine à 72 heures pour les trois différentes MON étudiées. Ces résultats montrent que la demande en monochloramine est d’autant plus élevée que le rapport N/Cl est proche de 1. De plus, les fractions HPO et TPH présentent, pour un même rapport N/Cl des demandes en monochloramine beaucoup plus fortes que pour l’eau de Loire. Cette différence ne peut pas s’expliquer par le seul caractère aromatique des MON étudiées. En effet l’eau de Loire présente un caractère plus aromatique que la fraction TPH alors que la demande en monochloramine de l’eau de Loire est inférieure à celle de la fraction TPH.

Aux faibles rapports N/Cl, les demandes en monochloramine des fractions HPO et TPH à 72 heures sont de l’ordre de 10 mg Cl 2 tot / mg C, et de 7 mg Cl 2 tot / mg C pour l’eau de la Loire ( figure III.36). Comme pour les composés organiques modèles, les demandes en monochloramine sont importantes par rapport aux valeurs classiquement observées lors de la chloration des MON qui sont généralement comprises entre 1 et 2 mg Cl 2 / mg C (Legube et al., 1990). Par ailleurs ces valeurs sont beaucoup plus fortes que celles observées par Blangis (2004) lors de la chloramination d’eaux -1 naturelles en milieu dilué (Demande ≈ 0,1 mg Cl 2 / mg C ; [NH 2Cl] 0 = 0,8 mg Cl 2.L ; t = 24 h).

Le seul déplacement de l’équilibre de l’hydrolyse de la monochloramine ne permet donc pas d’expliquer la demande observée. Les demandes en monochloramine des 3 MON étudiées sont proches de celles observées pour les 6 molécules modèles étudiées (7-15 mg Cl 2 tot / mg C). Cependant les demandes en monochloramine des 3 matières organiques naturelles étudiées sont beaucoup plus sensibles à l’effet du rapport N/Cl que les demandes en monochloramine des composés modèles.

105 Comme dans le cas des composés modèles, la demande en monochloramine pourrait en partie être due à une catalyse de l’autodécomposition de la monochloramine. Cette hypothèse est renforcée par les demandes nulles en monochloramine pour des rapports N/Cl supérieurs à 1,5. En effet, si les deux voies conduisant à la formation des sous-produits (Pr et Pr’ sur la figure III.9) sont bloquées (ou très faibles), de par i) une très faible réactivité directe de la monochloramine sur les MON ii) une inhibition de l’hydrolyse de la monochloramine, alors la demande en monochloramine est nulle.

Cette voie de dégradation de la monochloramine par effet catalytique de l’autodécomposition devrait par ailleurs conduire à des taux d’incorporation très faibles de chlore dans la matrice organique. De plus, une catalyse de la décomposition de la monochloramine par les sous-produits de réaction permettrait d’expliquer une demande en chlore plus faible que la demande en monochloramine obtenue pour des rapports N/Cl < 1,11.

15 HPO TPH Cl Cl 2 10 LR mg/ C) 2tot 5 (mg Cl

Demande en NH Non significaif 0 N/Cl = N/Cl = N/Cl = N/Cl = 1,01 1,07 1,11 1,5

Figure III.36. Influence du rapport N/Cl sur la demande en monochloramine à 72 h de différentes matières organiques naturelles. Valeurs moyennes et extrêmes. [NH 2Cl] 0 = 1,02 mM = 71 mg -1 2- -1 -1 Cl 2.L ; pH = 8,5 ; [CO 3 ]tot = 24 mM ; COT HPO et TPH = 1,9 mg C.L ; COT Loire = 2,6 mg C.L

III.5.2. Formation de chloroforme L’étude de la production de chloroforme lors de la chloramination de composés hydroxybenzéniques simples a montré que le chlore libre, issu de l’hydrolyse de la monochloramine, semble être l’agent responsable de la formation de chloroforme. Cependant, l’extrapolation de ces conclusions aux conditions mises en jeu lors de la désinfection des eaux potables peut être critiquable. Ce paragraphe est donc consacré à l’étude de l’effet du rapport N/Cl sur le rendement de formation de chloroforme lors de la chloramination de 3 types de MON (HPO Cébron, TPH Cébron et eau de Loire).

La formation de chloroforme lors de la chloramination de MON a été étudiée pour des teneurs en COT proche de 2 mg C.L -1 et pour des concentrations en monochloramine initiales de 1 mM. Compte tenu des faibles concentrations de chloroforme formées lors de la chloramination des MON, les conditions d’analyse ont été optimisées afin d’obtenir des limites de quantification et de détection respectives de 0,03 µM (3,6 µg.L -1) et de 0,01 µM (1,7 µg.L -1), par ailleurs les analyses sont réalisées en triplicata. Afin d’étudier l’effet du chlore libéré par hydrolyse de la monochloramine sur la formation de chloroforme, les expériences ont été effectuées avec des rapports N/Cl compris entre 1,01 et 42. Le tableau III.9 présente les rendements de formation de chloroforme obtenus après 48 heures de réaction ainsi que quelques valeurs issues de la littérature.

106 Chapitre III : Chloramination de composés organiques modèles : Demande et sous-produits

Tableau III.9. Rendement de formation de chloroforme lors de la chloramination de MON. tableau III.9. chloroforme Composé Conditions expérimentales (µg CHCl /mg C) Réf. organique 3 *(µg TTHM/mg C) Chloramination N/Cl = 1,1 ; pH = 8,5 ; 48 h HPO Cébron 1,7 [NH Cl] = 1 mM = 71 mg.L-1 TPH Cébron 2 2,0 Cette étude COT = 1,9 mg C.L-1 (HPO et TPH) ; Eau de Loire 1,9 COT = 2,6 mg C.L-1 (Loire)

COT = 2,6 mg.L-1 ; 48 h ; pH = 8 HPO Loire 1,96* Kristiana et al. , 2009 [NH Cl] = 140 µM = 10 mg.L-1 2 N/Cl = 1,26

COT = 5 mg.L-1 ; 168 h ; pH = 7,5 16 fractions [NH Cl] = 280 µM = 20 mg.L-1 0,4 - 4,3 Yang et al. , 2008 de MON 2 N/Cl = 1,26 Chloration Acides [Chlore total] = 140 µM = 10 mg.L -1 Fulviques COT = 2,5 – 2,9 mg C.L -1 ; 72 h 30 - 66 Legube et al., 1990 Cébron pH = 7,5

12 fractions [Chlore total] = 140 µM = 10 mg.L -1 10 – 51* ( 3 h) Gallard et von Gunten, de MON COT = 1,2 – 2,4 mg C.L -1 56 – 207 * 2002 pH = 7 – 9 (potentiel de formation)

6 fractions de [Chlore total] (t = 72 h) = 3 – 5 mg.L -1 10 – 65* Zhang et al. , 2009 MON pH = 7 – 8

Les rendements de formation de chloroforme obtenus lors de la chloramination de MON sont de l’ordre de 1,5 à 2 µg CHCl 3/mg C et sont du même ordre de grandeur que ceux décrits dans la littérature. Il est intéressant de noter que, malgré une forte différence de concentration initiale en monochloramine, Kristiana et al. (2009) observent un rendement de formation de chloroforme pour la fraction HPO de l’eau de Loire très proche de celui observé dans notre étude.

Les résultats obtenus pour la cinétique de formation de chloroforme montrent une forte augmentation de la concentration en chloroforme dans les premières 24 heures de réaction pour les rapports N/Cl proches de 1 (figure III.37). Pour la fraction HPO, la quantité de chloroforme formée après 24 heures de réaction n’est pas significativement différente de celle mesurée après 144 heures (non représentée sur la figure III.37) et ce pour tous les rapports N/Cl étudiés.

Cependant, pour l’eau de Loire ainsi que pour la fraction TPH, la concentration en chloroforme mesurée après 144 heures est 20 à 50 % plus importante que celle mesurée après 96 de temps de contact. Notons que les valeurs de concentrations en CHCl 3 inférieures à la limite de quantification sont données à titre indicatif.

Malgré un SUVA important, la fraction HPO extraite du Cébron ne conduit pas à des rendements de formation de chloroforme significativement plus importants que ceux obtenus pour la fraction TPH. Il convient de rappeler que ces résultats concernent trois MON particulières. Par ailleurs les rendements de formation de chloroforme sont relativement faibles, et dans de nombreux cas, inférieurs à la limite de quantification (LQ). 107

Ainsi, seule l’influence du rapport N/Cl sera discutée en détail. Il est néanmoins intéressant de noter que la diminution du rendement de formation de chloroforme observée entre la chloration et la chloramination est comparable entre le résorcinol (-400 %) et les différentes MON étudiées (-250 à -300 %).

14 10 N/Cl = 1,0 12 N/Cl = 1,0 8 10

8 6 N/Cl = 1,05 ](µg/L) ](µg/L) 3 3 N/Cl = 1,1 N/Cl = 1,1 6 4 LQ 4 LQ [CHCl [CHCl N/Cl = 4,2 N/Cl = 5 2 2 LD LD 0 0 0 24 48 72 96 0 24 48 72 96 Temps (h) Temps (h)

Figure III.37. Exemple de cinétique de formation de chloroforme lors de la chloramination de l’eau de Loire (a) et de la fraction HPO (b). [NH 2Cl] 0 = 1,02 mM ; pH = 8,5 ; 2- -1 -1 [CO 3 ]tot = 24 mM ; COT HPO = 1,85 mg C.L COT Loire = 2,6 mg C.L

Comme dans le cas de la chloramination de composés phénoliques modèles, on observe une forte augmentation de la production de chloroforme lorsque N/Cl diminue (figure III.38.a). De plus, la quantité de chloroforme formée est corrélée avec la concentration en chlore libre dans le milieu.

Le rendement de chloroforme formé pour un temps de contact donné peut être estimé par la relation suivante : Rendement = k log([HOCl] (mol.L -1 )) où la concentration en acide hypochloreux est estimée par l’équation 3.7 et k représente la pente de la droite (figure III.38.b). Il convient de rappeler que les concentrations théoriques en HOCl, calculées en absence de composé organique, sont extrêmement faibles et seraient en réalité plus faibles en présence de carbone organique. Néanmoins cette relation peut être utilisée pour estimer la variation de la concentration en HOCl en fonction du rapport N/Cl pour des conditions expérimentales comparables.

Pour des concentrations théoriques en HOCl supérieures à 1.10 -10 M, les trois types de matière organique présentent une augmentation comparable du rendement de formation de chloroforme en fonction de la concentration théorique en HOCl. Ces résultats pourraient s’expliquer par une même nature des sites précurseurs de la formation de chloroforme. Lors de la chloramination du résorcinol la pente est plus importante (k = 10,3) mais reste du même ordre de grandeur que celle observée pour les MON (k = 2,35 – 3,6). Ces résultats sont donc cohérents avec ceux obtenus lors de la chloramination de composés hydroxybenzéniques modèles.

Compte tenu des conditions mises en œuvre lors de la chloramination des eaux destinées à la consommation humaine (N/Cl proche de 1), cette étude montre que la majorité des THM formés provient de l’attaque du chlore libéré par l’hydrolyse de la monochloramine sur les précurseurs de chloroforme et non de la monochloramine elle-même.

108 Chapitre III : Chloramination de composés organiques modèles : Demande et sous-produits

(a) (b) 5 5 CEBRON HPO LOIRE CEBRON TPH 4 CEBRON TPH 4 CEBRON HPO LOIRE

3 C) mg / 3 / mg C) mg / 3 3 LQ 2 2 (µg CHCl CHCl (µg (µg CHCl CHCl (µg 1 1 Formation de chloroforme

Formation de chloroforme LD 0 0 0 10 20 30 40 -13 -12 -11 -10 -9 -8 N/Cl log ([HOCl] eq )

Figure III.38. Rendement de formation de chloroforme (µg CHCl 3 / mg C) lors de la chloramination de MON (a) Exprimé en fonction du rapport N/Cl (b) Exprimé en fonction de la concentration théorique en HOCl calculée par l’équation 3.7

III.6. Conclusion Les fortes demandes en monochloramine observées pour les différents précurseurs étudiés pourraient s’expliquer par un effet catalytique des sous produits de chloramination. La formation de chloro-cétones et d’acides chloro-carboxyliques, capable de céder un ou plusieurs protons pourrait catalyser l’autodécomposition de la monochloramine et conduire ainsi à de fortes demandes en monochloramine.

Les résultats montrent que la demande en monochloramine, le rendement de formation de chloroforme, et de THAA dépendent fortement du rapport N/Cl utilisé lors du traitement, alors que la formation d'AOX et l'évolution du Carbone Organique Total (COT) ne semblent que faiblement impactées. Cependant, tous les précurseurs étudiés ne présentent pas la même sensibilité face à l’évolution du rapport N/Cl appliqué. Par ailleurs, les HAA sont principalement composés de l'acide dichloroacétique (DCAA) qui représente plus de 90 % des THAA, et ce pour tous les rapports N/Cl étudiés. L'influence du rapport N/Cl sur le rendement de formation de THAA diffère selon les composés. Cependant, tous les précurseurs présentent une augmentation du rendement de formation de l'acide trichloroacétique (TCAA) lorsque le rapport N/Cl diminue. Pour les faibles rapports N/Cl, le chloroforme et le DCAA représentent jusqu’à 20 % des AOX, alors que pour des rapports plus élevés une forte proportion d'AOX (jusqu’à 95 %) n'est pas identifiée.

Le rendement de formation de CHCl 3 lors de la chloramination du résorcinol est extrêmement faible (0,5 %). Des conclusions similaires sont obtenues lors de la chloramination de matières organiques naturelles. Compte tenu des conditions mises en œuvre lors de la chloramination des eaux destinées à la consommation humaine (N/Cl proche de 1), la majorité des THM formés pourrait provenir de l’attaque du chlore, libéré par la monochloramine, sur les précurseurs de chloroforme et non de la monochloramine elle-même.

109

CHAPITRE IV : CHLORAMINATION DU RESORCINOL : MECANISME ET MODELISATION CINETIQUE

CHAPITRE IV : CHLORAMINATION DU RESORCINOL : MECANISME ET MODELISATION CINETIQUE

IV.1. Introduction...... 111

IV.2. Matériel et Méthodes...... 112 IV.2.1. Préparation des solutions ...... 112 IV.2.2. Dispositif expérimental...... 112

IV.3. Sous produits de chloration/chloramination du résorcinol...... 114 IV.3.1. Identification des premiers sous produits...... 114 IV.3.2. Autres sous-produits ...... 117

IV.4. Influence du rapport N/Cl...... 120 IV.4.1. Calcul de la concentration en chlore libre à l’état stationnaire ...... 121 IV.4.2. Influence du chlore libre sur la vitesse de décomposition du résorcinol ...... 123

IV.5. Détermination des constantes cinétiques de réaction ...... 125 IV.5.1. Détermination des ordres de réaction...... 125 IV.5.2. Influence du pH sur la cinétique de chloramination du résorcinol et de ses dérivés ...... 128 IV.5.3. Effet de la température sur la cinétique de chloramination du résorcinol ...... 136

IV.6. Modélisation cinétique...... 137 IV.6.1. Stœchiométrie de formation des sous-produits...... 138 IV.6.2. Contribution du chlore libre dans le mécanisme de chloramination du résorcinol...... 140 IV.6.3. Modélisation cinétique des vitesses de décomposition de R, MCR et DCR ...... 142 IV.6.4. Sites d’attaque de NH 2Cl sur le noyau aromatique : Relation structure-réactivité...... 144

IV.7. Conclusion ...... 146

Chapitre IV : Chloramination du résorcinol : Mécanisme et modélisation cinétique

CHAPITRE IV CHLORAMINATION DU RESORCINOL : MECANISME ET MODELISATION CINETIQUE

IV.1. Introduction La chloration est la technique de désinfection des eaux destinées à la consommation humaine la plus employée au monde. Cette technique a démontré son efficacité dans la lutte contre les maladies d’origine hydrique causées par des microorganismes pathogènes (virus, bactéries, protozoaires). Cependant les réactions entre le chlore et les matières organiques naturelles (MON) conduisent à la formation de sous-produits de désinfection (SPD) pouvant avoir des effets délétères sur la santé humaine. Depuis les premiers travaux de Bellar et al. (1974) et de Rook (1974), qui ont démontré la présence de trihalométhanes (THM), plus de 600 SPD ont été jusqu’à présent identifiés dans les eaux potables traitées par le chlore (Richardson, 2003). De nombreuses usines de production d’eau potable, principalement dans les pays anglo-saxons, ont adopté la chloramination comme procédé de désinfection finale afin de respecter les exigences actuelles et futures de la réglementation sur les SPD et d’assurer le maintien d’une concentration résiduelle d’oxydant nécessaire à la préservation de la qualité de l’eau dans le réseau d’eau potable (EPA, 1999 ; EPA, 2007).

La monochloramine est produite par la réaction entre l’acide hypochloreux et l’ammoniaque et est formée quantitativement pour des rapports molaires ammoniaque/chlore supérieurs à 1 à pH ≈ 8. Lors des procédés de chloramination, la monochloramine est préparée avec un léger excès d’ammoniaque (rapport molaire N/Cl = 1,1 – 1,2) afin de minimiser la formation de dichloramine et de trichloramine et de prévenir ainsi les réactions dites du « breakpoint » (Jafvert et Valentine, 1992). Comparativement au chlore, la monochloramine est un désinfectant moins puissant mais génère moins de SPD (Hua et Reckhow, 2007). La monochloramine est aussi utilisée comme désinfectant final afin d’obtenir une teneur résiduelle d’oxydant stable dans les réseaux de distribution car la monochloramine est moins réactive que le chlore vis-à-vis des MON (Duirk et al., 2002). La diminution de la concentration en monochloramine dans les eaux destinées à la consommation humaine peut être attribuée aux réactions d’autodécomposition (Valentine et al., 1988 ; Vikesland et al., 2001), aux réactions directes entre la monochloramine et les MON et aux réactions indirectes avec les MON impliquant le chlore libre formé par hydrolyse des chloramines (Duirk et al., 2005).

La réactivité de la monochloramine avec les composés organiques modèles a été peu étudiée. Seules quelques constantes de second ordre ont été publiées (Topudurti et Haas, 1991 ; Pedersen III et al., 1999 ; Greyshock et Vikesland, 2006). L’objectif de cette étude est de déterminer les vitesses de réaction entre la monochloramine et le résorcinol ainsi que ses premiers sous-produits. Il est avéré que la chloration du résorcinol conduit à la formation de chloroforme avec des rendements proches de 95 % (De Laat et al., 1982) et que les groupements polyhydroxybenzéniques des MON contribuent à la formation des THM (Rook, 1977 ; De Leer et al., 1985 ; Arnold et al., 2008). L’aspect cinétique et mécanistique de la chloration de composés hydroxybenzéniques a fait l’objet de nombreuses études (Rebenne et al., 1996 ; Gallard et von Gunten, 2002b). Dans une étude cinétique détaillée de la chloration de composés dihydroxybenzéniques (résorcinol, 4- chlororésorcinol et 4,6-dichlororésorcinol), Rebenne et al. (1996) montrent l’influence du pH sur la constante de vitesse apparente d’ordre 2. Cette dépendance au pH pourrait s’expliquer par des réactions catalysées en milieu acide ainsi que par les réactions impliquant les différentes formes acido-basiques du chlore et des composés dihydroxybenzéniques. Le mécanisme de chloramination du résorcinol et de ses dérivés chlorés en milieu aqueux a précédemment été décrit par Heasley et al. (1999). Cependant, l’aspect cinétique n’y est pas abordé. Par conséquent, ce travail s’attache à

111 déterminer les vitesses réactionnelles de la chloramination du résorcinol, du 4-chlororésorcinol et du 4,6-dichlororésorcinol.

IV.2. Matériel et Méthodes IV.2.1. Préparation des solutions Toutes les solutions ont été préparées à partir de réactifs de qualité analytique et d’eau purifiée, de résistivité égale à 18,2 M Ω.cm, produite par un système Millipore (Milli RX75/Synergy 185). Les solutions mères de résorcinol (R) (Sigma-Aldrich, ACS reagent, > 99 %), 4-chlororésorcinol (4- MCR) (Aldrich, 98 %), 4,6-dichlororésorcinol (4,6-DCR) (Aldrich, 97 %), chlorure d’ammonium (Fisher Scientific, > 99%) et de chlore libre (NaOCl, 13 %, Acros Organics) sont stockées à 4°C à l’abri de la lumière.

Les solutions de monochloramine (0,1 à 4 mM) sont préparées au maximum quelques heures avant utilisation, en ajoutant lentement et sous agitation rapide, le chlore libre dans une solution de chlorure d’ammonium. Les solutions de monochloramine sont préparées en utilisant un rapport molaire azote sur chlore (N/Cl = [Azote ammoniacal]0/[Chlore total] 0) variant de 1,1 à 30. Un spectre UV de la solution de monochloramine fraîchement préparée est réalisé afin de vérifier que le chlore libre est intégralement converti en monochloramine.

Les concentrations en chlore et en monochloramine dans les solutions mères sont déterminées par titrage iodométrique au thiosulfate de sodium 0,01 M (Prolabo, > 99,9%). Le pH est mesuré avec un pH-mètre PHM 250 (Radiometer) équipé d’une électrode de verre (Radiometer, CL114 JB).

Etant donné que les ions carbonate et phosphate sont des catalyseurs de la décomposition de la monochloramine dans l’eau (Jafvert et Valentine, 1992), toutes les expériences sont réalisées en absence de tampon pH. Le pH est éventuellement régulé pendant l’expérience par l’ajout d’acide chlorhydrique ou de soude. Toute la verrerie est nettoyée avec une solution de chlore ( ≈ 1 mM) et laissée sous chlore avant les expériences.

IV.2.2. Dispositif expérimental Toutes les expériences sont réalisées en réacteur discontinu parfaitement agité (bouteille en verre ambré de 125 à 1250 mL fermée avec un bouchon en PTFE). Excepté pour la détermination de l’énergie d’activation, toutes les expériences sont réalisées à température ambiante (23 ± 2°C). Les vitesses de réactions sont déterminées soit en présence d’un large excès de composé dihydroxybenzénique ([Ar(OH)2]0/[NH 2Cl] 0 = 50 mol/mol) soit en présence d’un large excès de monochloramine ([NH 2Cl] 0/[Ar(OH)2]0 > 20 mol/mol) pour se placer en dégénérescence d’ordre par rapport à la concentration en monochloramine ou en composé dihydroxybenzénique.

En présence d’un large excès de composé dihydroxybenzénique, ([Ar(OH)2]0/[NH 2Cl] 0 = 50 mol/mol), la concentration en monochloramine ([NH 2Cl] 0 = 100 µM) est mesurée à différents temps de réaction. La concentration en monochloramine est déterminée en ajoutant des ions iodure et en mesurant la quantité d’ions triiodure formée par spectrophotométrie à 351 nm. Les expériences de cinétique de consommation de la monochloramine sont initiées par l’ajout de 5 mL de la solution mère de monochloramine, sous agitation intense, à 95 mL d’une solution contenant le composé dihydroxybenzénique étudié. A différents temps de contact, 4 mL d’échantillon sont prélevés et rapidement transférés dans des flacons de 10 mL contenant 1 mL de KI 1M (Acros Organics, > 99%) et 100 µL d’acide acétique 1,7 M (Riedel-de Haën, 99 - 100%). Après 2 à 3 min de réaction, le mélange est transféré dans une cuve en quartz de 1 cm et la concentration en ions triiodure est déterminée par mesure de l’absorbance à 351 nm (spectrophotomètre Shimadzu UVmini 1240) :

112 Chapitre IV : Chloramination du résorcinol : Mécanisme et modélisation cinétique

- + - + NH 2Cl +3 I + 3 H  I 3 + NH 4 + HCl

La concentration en monochloramine est calculée en utilisant un coefficient d’extinction molaire de -1 -1 - 26 900 M .cm pour I 3 à 351 nm, déterminé dans cette étude, par la relation suivante :

V (A − A ) [NH Cl](mol.L −1) = T 351nm, éch 351nm, blanc 2 ε VE 351nm où A 351, éch et A 351, blanc représentent respectivement les absorbances mesurées à 351 nm pour l’échantillon (VE = 4 mL ; V T = volume total = 5,1 mL) et le blanc (V EUP = 4 mL). La valeur du - coefficient d’extinction molaire de l’ion I 3 ( ε351 nm ), déterminée à partir de différentes solutions de chlore et de monochloramine de concentrations connues ( figure IV.1), est cohérente avec les valeurs rapportées dans la littérature (Awtrey et Connick, 1951 ; Bichsel et von Gunten, 1999).

40 ) -1 30 .cm -1 M

-3 20 (x 10 ε ε ε ε 10

0 250 300 350 400 λλλ (nm)

Figure IV.1. Spectre UV de l’ion triiodure. Spectre moyen obtenu à partir de 16 solutions à - -5 différentes concentrations en I 3 (0 – 8 . 10 M)

Il est à noter que la réaction entre les ions iodure et la monochloramine peut être considérée comme totale en quelques secondes. De plus l’absorbance mesurée à 351 nm est stable pendant au moins 10 minutes en présence d’un large excès de résorcinol, ce qui indique que les composés organiques ne réagissent pas de manière significative avec les ions triiodure pendant la durée de l’analyse.

Quelques expériences ont été réalisées à pH = 8,6 en large excès de monochloramine ([NH 2Cl] 0/[Ar(OH)2]0 = 20 – 100 mol/mol). La réaction a été suivie en mesurant la diminution de la concentration du dihydroxybenzène étudié (R, 4-MCR et 4,6-DCR) par HPLC. La réaction a été initiée par l’ajout, sous agitation forcée, de 5 mL d’une solution de composé hydroxybenzénique (10 mM) à 1000 mL d’une solution de NH 2Cl (1 mM) à pH = 8,6. A différents temps de contact, 5 mL ont été prélevés et neutralisés par 10 µL d’une solution de sulfite de sodium (1 M) afin de réduire la monochloramine résiduelle. Les analyses chromatographiques ont été réalisées sur une chaîne Waters (W600 controller ; W717plus Autosampler) équipée d’une colonne C18 Uptisphere 5 HDO et d’un détecteur à barrette de diodes (Waters W996) pour l’acquisition des spectres UV- Visible. Les composés organiques ont été élués par une phase mobile constituée d’un mélange EUP / méthanol à un débit de 1 mL.min -1 et avec des conditions d’élutions diffèrentes selon les composés étudiés. Le volume d’injection est de 100 µL.

113 Afin de déterminer les constantes de vitesses élémentaires, les données ont été traitées avec un programme de régression non linéaire (Sigma plot 2000). La modélisation cinétique a été réalisée sous Copasi version 4.6.

IV.3. Sous produits de chloration/chloramination du résorcinol IV.3.1. Identification des premiers sous produits Dans un premier temps, les étapes initiales du mécanisme de chloramination du résorcinol ont été étudiées. Les analyses en HPLC ont montré que la réaction de la monochloramine (N/Cl = 2,0) sur le résorcinol conduit à la formation de 4-chlororésorcinol (4-MCR) et de 4,6-dichlororésorcinol (4,6-DCR). Ces composés ont été identifiés en comparant les temps de rétention et les spectres UV à ceux de solutions préparées avec des composés commerciaux. La figure IV.2 présente un exemple de profil chromatographique obtenu lors de la chloramination du résorcinol à différents temps de contact. On note aussi la présence de divers autres composés non identifiés et dont la nature sera discutée ultérieurement. Les profils chromatographiques obtenus lors de la chloration et la chloramination du résorcinol présentent des sous-produits similaires mais en proportions différentes.

4,6-DCR TCR 4-MCR composé A R non identifié 185 µM

142 µM

[NH 2Cl] 0 97 µM

50 µM

25 µM

10 µM

0 µM

3 8 13 15 20 25 30 tr (min) Figure IV.2. Profils chromatographiques obtenus lors de la chloramination du résorcinol. [R] 0 = 100 µM ; [NH 2Cl] 0 = 0 – 200 µM ; pH = 8,6 ; N/Cl = 2,0. Injection en HPLC lorsque [NH 2Cl] = 0. Pas de neutralisation par Na 2SO 3

La décomposition du résorcinol (R) s’accompagne de la formation immédiate de 4-MCR ( figure IV.3). Le 4-MCR ne s’accumule pas dans le milieu et le profil de concentration en fonction du temps fait apparaître un maximum dont les coordonnées dépendent des conditions expérimentales. Le premier sous-produit du résorcinol est donc réactif vis-à-vis de la monochloramine. Compte tenu des faibles concentrations en 4-MCR qui ont été mesurées, il est possible d’émettre deux hypothèses quant aux réactions mises en jeu :

114 Chapitre IV : Chloramination du résorcinol : Mécanisme et modélisation cinétique

- le coefficient stœchiométrique (S) de production de 4-MCR est faible car la monochloramine réagit sur différents sites de la molécule de résorcinol (R) : R + NH 2Cl  S x 4-MCR (4.1) - Le 4-MCR est plus réactif que R vis-à-vis de NH 2Cl. Ces aspects seront discutés ultérieurement lors de la modélisation cinétique.

50 6 50 3 R 4-MCR 40 40 4-MCR 4,6-DCR 4 2 30 30

20 20 [R] ( µM ) ( [R]

2 µM ) [4-MCR] ( 1 [4,6-DCR]µM ) ( [4-MCR] ( µM ) [4-MCR]( 10 10

0 0 0 0 0 1 2 0 1 2 3 Temps (h) Temps (h)

Figure IV.3. Evolution des concentrations en Figure IV.4. Evolution des concentrations en 4- résorcinol (R) et en 4-chlororésorcinol (4-MCR) MCR et en 4,6-dichlororésorcinol (4,6-DCR) lors de la chloramination du résorcinol. [R] 0 = lors de la chloramination du 4-MCR. 50 µM ; [NH 2Cl] 0 = 4,11 mM ; pH = 8,6 ; N/Cl [4-MCR] 0 = 50 µM ; [NH 2Cl] 0 = 1,04 mM ; pH = 2,0 ; [4,6-DCR] mesurée mais non = 8,6 ; N/Cl = 2,0. représentée

Des résultats similaires sont observés lors de la chloramination du 4-MCR ( figure IV.4). La dégradation du 4-MCR s’accompagne de la formation de 4,6-DCR. Comme dans le cas de la chloramination du résorcinol, la faible concentration de 4,6-DCR mesurée à partir du 4-MCR peut s’expliquer par un faible coefficient stœchiométrique S’ et/ou par une forte réactivité relative du 4,6-MCR vis-à-vis de NH 2Cl.

Des expériences en défaut d’oxydant (par rapport à la demande) ont été réalisées afin de comparer l’action du chlore et de la monochloramine sur le résorcinol. Les analyses en HPLC ont été réalisées après consommation totale de l’oxydant (après 1 heure de réaction pour le chlore, plusieurs heures pour la monochloramine). Des tests de coloration au KI ont été effectués sur quelques échantillons afin de vérifier l’absence d’oxydant.

La figure IV.5 montre la quantité de résorcinol décomposée en fonction de la quantité d’oxydant ajouté dans le milieu. Les résultats montrent que la stœchiométrie apparente de la réaction est de l’ordre de 0,3 à 0,4 mole de résorcinol décomposé par mole de chlore ou de monochloramine ajouté. Cette stœchiométrie indique que le résorcinol est moins réactif que ses premiers sous- produits de dégradation vis-à-vis de ces deux oxydants. D’autre part, pour une même quantité d’oxydant consommé, le chlore conduit à une plus grande dégradation du résorcinol ( ≈ 0,40 mole/mole) que la monochloramine ( ≈ 0,32 mole/mole). Cette observation suggère que, dans les systèmes monochloramine-résorcinol et chlore-résorcinol, les intermédiaires formés avec la monochloramine réagissent, relativement à la vitesse de réaction avec le résorcinol, plus vite que dans le cas du chlore : k Résorcinol + Oxydant R−I →Intermédiaires (4.2) k Intermédiaires + Oxydant I−P → Produits (4.3) 115

Avec kR-I(NH 2Cl) / Σ k I-P(NH 2Cl) < k R-I(HOCl) / Σ k I-P(HOCl)

La figure IV.6 présente la demande en oxydant (oxydant en défaut) du résorcinol pour différentes doses de chlore et de monochloramine. Cette figure montre clairement que la demande initiale en oxydant du résorcinol est d’environ 2 moles/mole et que la nature de l’oxydant (chlore ou monochloramine) ne semble pas avoir d’influence sur ce paramètre. Pour des taux de traitement plus élevés en oxydant, il est plus difficile d’interpréter cette valeur. En effet, la demande est calculée sur la simple décomposition du résorcinol et ne prend pas en compte les sous-produits, eux-mêmes réactifs vis-à-vis de ces deux oxydants.

[Oxydant consommé] ( µM ) 3,5 0 50 100 150 200 3 0 2,5

-20 2 y = -0,3172x - 3,0651 ( µM( ) 1,5 0

-40 1 chlore y = -0,4009x - 1,6265 [R]- [R] [R]- 0,5 monochloramine -60 , Demande (mol/mol) oxydant en 0 chlore 0 50 100 150 200 monochloramine -80 [Oxydant appliqué] ( µM )

Figure IV.5. Stœchiométrie apparente de la Figure IV.6. Demande en oxydant en fonction réaction entre le chlore, la monochloramine et de la concentration initiale en oxydant. le résorcinol. [R] 0 = 100 µM ; pH = 8,6 ; [R] 0 = 100 µM ; pH = 8,6 ; mesure en HPLC lorsque [Oxydant] = 0. Pas de Demande = [Oxydant appliqué] / [Résorcinol neutralisation par Na 2SO 3 consommé]

Les concentrations des dérivés monochloré (4-MCR) et dichloré (4,6-DCR), mesurées lors de l’oxydation du résorcinol par le chlore et par la monochloramine à différents taux de traitement, sont assez différentes ( figure IV.7 et figure IV.8). La production de 4-MCR est plus élevée dans le cas de la monochloramine que dans le cas du chlore. On observe un effet inverse pour le 4,6-DCR. Les concentrations du dérivé dichloré sont très faibles et les analyses HPLC ont mis en évidence la formation d’un composé qui est élué juste après le 4,6-DCR et dont le spectre UV/Visible est presque identique à celui du 4,6-DCR. Ce composé pourrait être le dérivé trichloré (2,4,6- trichlororésorcinol). En effet, lors de la détermination des cinétiques de décomposition du 4,6-DCR, ce composé apparaît comme étant le premier sous-produit d’oxydation du 4,6-DCR.

116 Chapitre IV : Chloramination du résorcinol : Mécanisme et modélisation cinétique

8 14 monochloramine 12 6 chlore 10

8 monochloramine 4 chlore 6

4 [4-MCR] µM( ) 2 [4,6-DCR] µM( ) 2

0 0 0 50 100 150 200 0 50 100 150 200 [Oxydant] ( µM ) [Oxydant] ( µM )

Figure IV.7. Formation du 4-MCR. Figure IV.8. Formation du 4,6-DCR. [R] 0 = 100 µM ; pH = 8,6 ; mesure en HPLC [R] 0 = 100 µM ; pH = 8,6 ; mesure en HPLC lorsque [Oxydant] = 0. Pas de neutralisation lorsque [Oxydant] = 0. Pas de neutralisation par Na 2SO 3 par Na 2SO 3

IV.3.2. Autres sous-produits Lors de la chloramination du 4,6-DCR, on observe la formation d’un composé absorbant à 290 nm et un temps de rétention légèrement plus élevé que le 4,6-DCR. La figure IV.10 présente un exemple d’évolution de l’aire chromatographique de ce composé lors de la chloramination du 4,6- DCR. Compte tenu de l’allure de cette courbe, ce composé doit être un sous-produit direct du 4,6- DCR, et le spectre UV de ce produit présente des caractéristiques similaires à celui du 4,6-DCR (figure IV.9). Nous pouvons raisonnablement assimiler ce composé au 2,4,6-trichlororésorcinol (2,4,6-TCR). Ce composé n’étant pas commercialisé, il n’a pas été possible d’identifier avec certitude ce composé.

L’évolution de l’aire du composé supposé être le trichlororésorcinol montre que ce composé pourrait être le principal sous-produit d’oxydation du 4,6-DCR. En effet, la comparaison des spectres des dérivés chlorés du phénol montre que l’incorporation d’atomes de chlore dans la structure ne modifie pas significativement les coefficients d’extinction molaire aux maxima d’absorption : -1 -1 ε2-MCP (277 nm) = 2280 M .cm (Talrose et al., 2005) (4.4) -1 -1 ε2,4-DCP (283 nm) = 2217 ± 15 M .cm (cette étude) (4.5) -1 -1 ε2,4,6-TCP (292 nm) = 2260 ± 22 M .cm (cette étude) (4.6)

Il est ainsi possible d’estimer que le 2,4-DCR et le 2,4,6-TCR présentent des réponses similaires en HLPC-UV.

117 1 R 0,8 4-MCR 4,6-DCR TCR 0,6

0,4

Abs (normalisée) 0,2

0 230 240 250 260 270 280 290 300 310 320 λ (nm)

Figure IV.9. Spectres UV des différents dérivés chlorés du résorcinol normalisés par rapport au maximum d’absorption entre 270 en 300 nm. Ces spectres sont mesurés lors des analyses en HPLC-PDA sur les étalons (R ; 4-MCR et 4,6-DCR) et sur le pic élué après le 4,6-DCR (TCR)

50

3 chlore 4 40 monochloramine ua) ua) 4 ua) ua) 2 4 30

2 20 TCR (x10 [4,6-DCR] µM ) ( 1 Aire TCR Aire (x10 10

4,6-DCR du , chromatographique Aire TCR 0 0 0 0,0 0,5 1,0 1,5 0 50 100 150 200 Temps (h) [Oxydant] ( µM )

Figure IV.10. Evolution de la concentration en Figure IV.11. Evolution de la concentration en 4,6-DCR et de l’aire chromatographique du TCR lors de la chloration et de la TCR en fonction du temps. chloramination du résorcinol (100 µM) en [4,6-DCR] 0 = 4,75 µM ; [NH 2Cl] 0 = 0,5 mM ; fonction de la dose d’oxydant appliquée. Mesure N/Cl = 2,0 ; pH = 7,9 effectuée pour un résiduel d’oxydant nul

La simple observation du 4-MCR et du 4,6-DCR ne suffit pas à expliquer la quantité de résorcinol dégradé. Pour les expériences effectuées en excès d’oxydant, le bilan matière, effectué sur le carbone, n’est pas complet et ce, dès les premiers instants de la réaction ( figure IV.12). Ceci implique que d’autres réactions peuvent avoir lieu entre le résorcinol et la monochloramine ou le chlore. Par analogie avec les études menées sur la chloration du résorcinol, le transfert d’un atome de chlore de la monochloramine pour former le 2-chlororésorcinol est envisageable.

Des conclusions similaires peuvent êtres tirées lors des expériences en défaut de monochloramine. En effet le bilan matière n’est pas complet même pour des faibles taux d’oxydant (figure IV.13). Les figure IV.12 et figure IV.13 montrent que le bilan matière n’est pas clos et la quantité de matière non analysée augmente proportionnellement avec le taux de traitement et le temps de contact. Le bilan matière présente une différence significative entre le chlore et la monochloramine. 118 Chapitre IV : Chloramination du résorcinol : Mécanisme et modélisation cinétique

Cette différence peut s’expliquer par le fait que le sous-produit interprété comme étant le TCR est formé en plus forte proportion (pour un même rapport oxydant/composé organique) dans le cas du chlore que dans le cas de la monochloramine. Dans le cas de la monochloramine, on note la présence d’un sous-produit, qui sera par la suite noté composé A ( figure IV.14) ayant une aire chromatographique importante, une partie du bilan matière manquant peut ainsi s’expliquer par la présence de ce composé. Dans le cas du chlore, sa concentration est beaucoup plus faible et le bilan matière ne pourra vraisemblablement pas être résolu par la simple prise en compte de ce composé.

100 100 [R] 0 = 100 et 250 µM

[NH 2Cl] 0 = 2 mM 75

50 50

chlore 25 Bilan matiere (%) Bilan(%) matiere Bilan matière (%) Bilan matière monochloramine

[R] 0 = 50 µM ; [NH 2Cl]0 = 5 mM 0 0 0 1 2 0 50 100 150 200 Temps (h) [Oxydant] ( µM )

Figure IV.12. Bilan matière (B.M.) en excès de Figure IV.13. Bilan matière. Comparaison monochloramine à pH = 8,6. chlore/monochloramine. [R] 0 = 100 µM ; pH = B.M. = [R] + [4-MCR] + [4,6-DCR] 8,6 ; mesure en HPLC lorsque [Oxydant] = 0. Pas de neutralisation par Na 2SO 3.

Le composé A, présente une bande d’absorption dans l’UV avec un maximum à 280 nm et absorbe notablement dans le visible entre 420 et 620 nm ( figure IV.15). Ce composé peut par conséquent être en parti responsable de la coloration observée (jaune orangé à rose violet) lors de la chloramination du résorcinol. Les expériences réalisées sous diverses doses d’oxydant appliquées montrent que ce produit s’accumule dans le milieu. Par ailleurs, pour un taux d’oxydant donné, ce composé est formé en plus grandes proportions avec la monochloramine qu’avec le chlore (figure IV.14). Nous avons aussi observé que la coloration de la solution disparaît après l’addition de sulfite de sodium.

Il convient aussi de rappeler que des études précédentes ont montré que la 3,5,5-trichlorocyclopent- 3-ène-1,2-dione est un intermédiaire abondant lors de la chloration du résorcinol (Norwood et al., 1980). Heasley et al. (1999) note que le résorcinol et ses dérivés mono, di et trichlorés forment le 2,2,4,4,6-pentachloro-5-hexen-1,3-dione.

119 80 1

70 chlore 0,8

ua) ua) 60 monochloramine 4

50 0,6 40 30 0,4 20 Abs (normalisée) du composé Aducomposé (x10

Aire chromatographique chromatographique Aire 0,2 10 0 0 0 50 100 150 200 220 320 420 520 620 [Oxydant] ( µM ) λλλ (nm)

Figure IV.14. Formation d’un sous-produit non Figure IV.15. Spectre UV-Vis du composé A identifié (composé A). [R] 0 = 100 µM ; pH = mesuré par HPLC-PDA et normalisé par rapport 8,6 ; mesure en HPLC lorsque [Oxydant] = 0. au maximum d’absorbance à 280 nm. Pas de neutralisation par Na 2SO 3.

IV.4. Influence du rapport N/Cl Il a été montré que la chloramination du résorcinol conduit à des composés aromatiques chlorés par halogénation du cycle aromatique. Compte tenu de la chimie de la monochloramine en solution aqueuse (équilibre monochloramine – chlore libre) et de la très forte réactivité du chlore sur le résorcinol, la formation de sous-produits organohalogénés lors de la chloramination du résorcinol pourrait résulter de l’action du chlore libéré dans le milieu réactionnel à partir de la monochloramine.

Deux voies d’attaque peuvent alors être envisagées afin d’expliquer l’oxydation des composés organiques comme le résorcinol lors d’une monochloramination. La première voie est l’attaque directe de la monochloramine sur le résorcinol, la seconde, indirecte consiste en une attaque du chlore libre libéré par la monochloramine (figure IV.16).

NH3

HOCl NH2Cl

in V dir o ie e OH e Voie OH ct e direct

OH OH OH Cl

OH Figure IV.16. Voies d’attaque du résorcinol

Afin que la réaction du chlore libre sur les composés organiques joue un rôle négligeable dans la cinétique de décomposition du résorcinol par la monochloramine, il convient de se placer dans des conditions expérimentales (pH et rapport N/Cl) qui minimisent la concentration en chlore libre dans le milieu réactionnel.

120 Chapitre IV : Chloramination du résorcinol : Mécanisme et modélisation cinétique

IV.4.1. Calcul de la concentration en chlore libre à l’état stationnaire En solution aqueuse, la monochloramine peut s’hydrolyser pour former du chlore libre : -12 NH 2Cl + H 2O  HOCl + NH 3 K4.7 = k 4.8/k 4.9 = 5,0.10 M (4.7) -2 -1 NH 2Cl + H 2O  HOCl + NH 3 k4.8 = 7,6. 10 h (4.8) 10 -1 -1 HOCl + NH 3  NH 2Cl + H 2O k4.9 = 1,5. 10 M .h (4.9)

De nombreuses valeurs de constantes d’équilibre sont données dans la littérature (tableau IV.1). La -12 constante d’équilibre donnée par Morris et Isaac (1983) (K 4.7 = 5,0.10 M à 25 °C et µ = 0,5 M) a été choisie dans ce présent travail car i) les modèles cinétiques proposés par Valentine et al. (1988) et Jafvert et Valentine (1992) se basent sur cette valeur, et ii) les constantes associées (k 4.9 et k 4.8 ) ont aussi été étudiées dans ce travail.

Tableau IV.1. Valeur des constantes d’équilibres présentées dans la littérature tableau IV.1. = [NH 3][HOCl] 1- = [NH 2Cl] K4.7 K4.7 [NH 2Cl] [NH 3][HOCl] Référence (M) (M -1) 2,8.10 -10 3,6.10 9 Corbett et al., 1953 cité par Gray et al., 1978 5,55.10 -10 1,8.10 8 Calculé d’après Audrieth et Rowe, 1955 <10 -15 >10 15 Calculé d’après Anbar et Yagil, 1962 4,2.10 -12 2,4.10 11 Granstorm, 1954 cité par Gray et al., 1978 6,7.10 -12 1,5.10 11 Gray et al., 1978 (1,1±0,4).10 -11 (9±6).10 10 Gray et al., 1978 corrigé par Margerum et al., 1994 (2,6±0,5).10 -11 (3,8±0,8).10 10 Margerum et al., 1994 5.10 -12 2.10 11 Morris et Isaac, 1983

En considérant les équilibres acido-basiques du chlore et de l’ammoniaque, il est possible de calculer la concentration en chlore libre à l’état stationnaire pour un pH et un rapport molaire N/Cl données : - + - + [ClO ][H ] HOCl  ClO + H K4.10 = pK 4.10 = 7,54 (Morris, 1966) (4.10) [HOCl]

+ + + [NH 3][H ] NH 4  NH 3 + H K4.11 = + pK 4.11 = 9,25 (Thurston et al., 1981) (4.11) [NH 4 ]

La concentration totale des espèces azotées ([Azote total]) est donnée par :  +  +  + [H ]  + [Azote total] = [NH 4 ] + [NH 3] + [NH 2Cl] = [NH 3]1  [NH 2Cl] (4.12) K  4.11 

A partir de l’équation 4.12, il est possible d’exprimer la concentration en NH 3 : − = [Azote total] [NH 2Cl] [NH 3] + (4.13) [H ] 1+ K4.11 En négligeant la concentration en dichlore ((Cl 2)aq ) à pH > 5, la concentration en chlore libre est égale à :

121 - [Chlore libre] = [HOCl] + [ClO ] = [Chlore total] - [NH 2Cl] (4.14)

La concentration en chlore total (libre et combiné) est donnée par :  K  -  + 4.10  + [Chlore Total] = [HOCl] + [ClO ] + [NH 2Cl] = [HOCl] 1 +  [NH 2Cl] (4.15)  [H ] 

La concentration en acide hypochloreux peut ainsi s’écrire :

− − + = [Chlore total] [NH 2Cl] = ([Chlore total] [NH 2Cl])[H ] [HOCl] + (4.16) K [H ]+ K + 4.10 4.10 1 + [H ]

Comme [NH 2Cl] = [Chlore total] – [Chlore libre], [NH 3] devient : − + = [Azote total] [NH 2Cl] = ([Azote total] -[Chlore total] [Chlore libre])K 4.11 [NH 3] + + (4.17) [H ] [H ]+ K 1+ 4.11 K4.11

De plus, K4.7 [NH 2Cl] = [HOCl][NH 3]

Alors, + 1 [Chlore libre][H ] [Chlore total] -[Chlore libre] =    + +  K4.7  K4.10 [H ]  (4.18)  ([Azote total] -[Chlore total] +[Chlore libre])K   4.11   + +   [H ] K4.11 

+  K [H ]  [Chlore total] -[Chlore libre] =  4.11   + + + +   K4.7 (K 4.10 [H ])(K 4.11 [H ])  2 ([Azote total][Ch lore libre] −[Chlore libre][Chl ore total] + [Chlore libre] ) (4.19)

En posant :  +  α =  K4.11 [H ]   + + + +  on a alors (4.20)  K4.7 (K 4.10 [H ])(K 4.11 [H ]) 

α[Chlore libre] 2 + α [Azote total][ Chlore libre] - α [Chlore libre] [Chlore total] – [Chlore total] + [Chlore libre] = 0 (4.21) soit,

122 Chapitre IV : Chloramination du résorcinol : Mécanisme et modélisation cinétique

α[Chlore libre]2 + [Chlore libre] ( α [Azote total] - α[ Chlore total] + 1) – [Chlore total] = 0 (4.22) Si on pose β = 1 + α ( [Azote total] - [Chlore total]), la résolution de l’équation du second degré donne :

− β + β2 − 4α[Chlore total ] [Chlore libre ] = (4.23) eq 2α

La figure IV.17.a représente la concentration théorique en chlore libre à l’équilibre et en absence de composé organique.

IV.4.2. Influence du chlore libre sur la vitesse de décomposition du résorcinol Il est possible de modéliser l’influence du chlore libre en équilibre avec la monochloramine sur la cinétique de décomposition du résorcinol à l’aide d’un modèle simple basé sur les études de Morris et Issac (1981) et Rebenne et al. (1996).

-2 -1 NH 2Cl + H 2O  NH 3 + HOCl v = k4.8 [NH 2Cl] k4.8 = 7,6.10 h (4.8) 10 -1 -1 NH 3 + HOCl  NH 2Cl + H 2O v = k4.9 [HOCl][NH 3] k4.9 = 1,5.10 M .h (4.9) 7 -1 -1 R + HOCl  P v = k 4.24 [R][HOCl] tot k4.24 = 6,11.10 M .h (4.24) k4.24 calculé pour pH = 8,6 d’après Rebenne et al. 1996 - + HOCl  ClO + H pK 4.10 = 7,54 (Morris, 1966) (4.10) + + NH 4  NH 3 + H pK 4.11 = 9,25 (4.11)

En considérant que seul HOCl réagit sur le résorcinol lors de la chloramination de solutions de résorcinol, la modélisation cinétique permet de tracer des courbes théoriques de disparition du résorcinol ( figure IV.17.b). Cette première approche cinétique permet de définir les conditions expérimentales applicables pour la détermination des constantes cinétiques de réaction de NH 2Cl sur le résorcinol. Pour des valeurs de N/Cl comprises entre 2 et 5, la contribution du chlore libre dans la cinétique de décomposition du résorcinol sera négligeable. Pour des rapports N/Cl inférieurs à 2, le chlore libéré lors de l’hydrolyse de la monochloramine peut augmenter d’une manière significative la vitesse de dégradation du résorcinol.

123

(a) (b) -5 N/Cl = N/Cl = 10 5 2 1,5 100 1,00 -6 80 1,25 -7 1,01 1,10 60 -8 1,10 1,05 -9 1,50 40 résorcinol (%) résorcinol

log([Chlore libre)] 5,0 2,0 -10 20 1,00 10,0 -11 0 5 7 9 11 0,0 0,5 1,0 1,5 2,0 pH Temps (heures)

Figure IV.17. Simulation (Copasi) de la dégradation du résorcinol par le chlore libéré lors de l’hydrolyse de la monochloramine (voie indirecte). (a) Influence du pH et du rapport N/Cl sur [Chlore libre] eq en absence de composé organique pour une concentration en chlore total de 2 mM. (b) Dégradation du résorcinol par le chlore [NH 2Cl] 0 = 2 mM ; [R] 0 = 100 µM ; pH = 8,6.

La figure IV.18 présente des courbes expérimentales de décomposition du résorcinol par la monochloramine à pH = 8,6 et avec des rapports N/Cl compris entre 1,12 et 31,25. Comme les expériences ont été effectuées avec un large excès de monochloramine, les vitesses de disparition du résorcinol suivent une loi cinétique apparente d’ordre 1 par rapport à la concentration en résorcinol

(a) (b) 6 N/Cl = 31,25 ; [NH2Cl] = 3,99 mM N/Cl : 31,25 5 N/Cl = 1,95 ; [NH2Cl] = 4,11 mM -0,5 14,63 N/Cl = 1,12 ; [NH2Cl] = 4,24 mM 1,95 650 ) 1,12 4 0 1,09 550 -1,5 ) -1

3 .h -1 450 (M [R] ( µM ) ( [R]

2 app k ln ([R]/ [R] ln ([R]/ -2,5 350

1 250 0 5 10 15 20 25 30 N/Cl 0 -3,5 0 0,5 1 1,5 2 0 0,5 1 1,5 2 Temps (h) Temps (h)

Figure IV.18. Influence du rapport N/Cl sur la décomposition du résorcinol. [R] 0 = 50 µM ; pH = 8,6. (a) Dégradation du résorcinol. (b) Application de la loi cinétique d’ordre 1.

Ces résultats démontrent clairement que la décomposition du résorcinol lors de la chloramination est presque exclusivement liée à l’attaque directe de NH 2Cl sur le résorcinol. L’effet du chlore libre est néanmoins observable pour les faibles valeurs du rapport N/Cl (1,08 – 1,95). On note une légère augmentation de la vitesse de décomposition du résorcinol lorsque le rapport N/Cl diminue. Afin d’estimer plus finement la contribution du chlore libre sur la décomposition du résorcinol, il est 124 Chapitre IV : Chloramination du résorcinol : Mécanisme et modélisation cinétique nécessaire de prendre en compte les espèces HOCl et ClO - dans un modèle incluant les réactions du chlore libre et du chlore combiné avec le résorcinol et ses sous-produits. Cette simulation sera effectuée après avoir déterminé les constantes cinétiques des réactions entre la monochloramine et le résorcinol et ses dérivés chlorés.

IV.5. Détermination des constantes cinétiques de réaction IV.5.1. Détermination des ordres de réactions

Dans le but de déterminer les constantes cinétiques de réaction de NH 2Cl sur le résorcinol et sur ses premiers sous-produits de réaction, l’étude cinétique a été effectuée en utilisant la méthode de dégénérescence d’ordre. Cette dégénérescence d’ordre a été réalisée en utilisant soit un large excès de monochloramine (analyses des composés organiques par HPLC), soit un large excès de composé organique (analyse de la concentration résiduelle de NH 2Cl par iodométrie-UV). Les expériences ont été réalisées en eau ultra-pure non tamponnée. Compte tenu des faibles temps de contact, le pH du milieu ne varie pas de façon significative et n’a donc pas régulé.

Pour chaque expérience réalisée, les tableau IV.2 et tableau IV.3 donnent les conditions utilisées pour la détermination des constantes cinétiques de réaction de NH 2Cl sur le résorcinol, le 4-MCR et le 4,6-DCR.

L’utilisation de la méthode de dégénérescence d’ordre facilite la détermination des constantes cinétiques : [d R] - = k app .[NH 2Cl].[R] tot (4.25) dt Pour [NH 2Cl]>>[R] il est possible de négliger la variation de la concentration en monochloramine au cours du temps.

d[R] [R]t - = k obs . [R] tot ou -ln = k obs .t avec k obs = k app .[NH 2Cl] 0 (4.26) dt [R]0 Pour [R]>>[NH 2Cl]

[d NH 2Cl ] [NH 2Cl ]t - = k’ obs . [NH 2Cl] ou -ln = k’ obs .t avec k’ obs = k app .[R] tot,0 (4.27) dt [NH 2Cl ]0

En présence d’un large excès de monochloramine, les suivis cinétiques ont été effectués en prélevant des prises d’essais de 4 mL à différents temps de réaction. Ces échantillons ont été introduits dans des flacons contenant du sulfite de sodium en quantité suffisante pour neutraliser la monochloramine (30 % d’excès).

Les figures IV.19a, IV.20a et IV.21a, montrent respectivement des exemples de courbes de décomposition du résorcinol, du 4-MCR et du 4,6-DCR en présence de monochloramine. Ces résultats montrent que l’évolution des concentrations en composé organique en fonction du temps peuvent être décrites par une loi cinétique d’ordre 1 apparent par rapport à la concentration en composé organique. Les différentes expériences réalisées avec le résorcinol avec [NH 2Cl] 0 = 2 mM montrent une bonne répétabilité. Les principaux résultats concernant ces expériences sont reportées dans le tableau IV.2.

Les figures IV.19b, IV.20b et IV.21b, mettent en évidence qu’à un pH donné, les valeurs des constantes cinétiques apparentes d’ordre 1 de disparition des composés organiques sont proportionnelles à la concentration en monochloramine. La pente des droites correspond alors aux 125 valeurs des constantes cinétiques apparentes d’ordre 2 de réaction de NH 2Cl sur les composés étudiés. Les valeurs obtenues sont égales à : -1 -1 - kNH2Cl-R = 320 M .h pour le résorcinol à pH 8,6 -1 -1 - kNH2Cl-MCR = 1480 M .h pour le 4-chlororésorcinol à pH 8,6 -1 -1 - kNH2Cl-DCR = 2520 M .h pour le 4,6-dichlororésorcinol à pH 7,6

(a) (b) 0 1.5

-1 kobs (h ) = 320 [NH 2Cl] 2

) NH Cl = 0,97 mM R = 0,986 0 2 1 -1 ) -1 (h NH 2Cl = obs

1,93 mM k 0.5 -2 ln [R] ( / [R]

NH Cl = 3,91 mM 2 0 -3 0 1 2 3 4 5 0 2 4 6 [NH 2Cl] (mM) Temps (h)

Figure IV.19. Chloramination du résorcinol à pH = 8,6 (a) ln(C/Co) = f(t) ; (b) kobs = f([NH 2Cl]) (a) (b) 0 7

) -1

0 k (h ) = 1480 [NH Cl] NH 2Cl = 0,96 mM 6 obs 2 R2 = 0,9998 -1 5 ) -1 4 (h

-2 obs 3 k 2 -3 1 NH 2Cl = NH 2Cl =

ln [4-MCR]( / [4-MCR] 4,78 mM 1,93 mM 0 -4 0 1 2 3 4 5 0 1 2 [NH 2Cl] (mM) Temps (h)

Figure IV.20. Chloramination du 4-chlororésorcinol à pH = 8,6 (a) ln(C/Co) = f(t) ; (b)k obs = f([NH 2Cl])

126 Chapitre IV : Chloramination du résorcinol : Mécanisme et modélisation cinétique

(a) (b) 0 2,5

-1 ) k (h ) = 2520[NH Cl] 0 2 obs 2 2 [NH 2Cl] = 232 µM R = 0,98 )

-1 1,5

-1 (h obs

k 1

[NH Cl] = 501 µM 2 0,5 ln( ln( [DCR] [DCR] /

[NH 2Cl] = 0,95 mM -2 0 0 2 4 6 0 0,2 0,4 0,6 0,8 1 Temps (h) [NH 2Cl] (mM)

Figure IV.21. Chloramination du 4,6-dichlororésorcinol à pH = 7,6 (a) ln(C/Co) = f(t) ; (b) kobs = f([NH 2Cl])

La réactivité du 4-MCR vis-à-vis de la monochloramine (1480 M -1.h -1) à pH = 8,6 est plus élevée que celle du résorcinol (320 M -1.h -1). Cette constatation va dans le sens des observations précédentes faites en défaut d’oxydant et explique la faible concentration de 4-MCR lors des expériences de chloramination du résorcinol. La vitesse de réaction du 4,6-DCR avec la monochloramine est très élevée (2520 M -1.h -1 à pH = 7,6), les expériences menées jusqu’à présent ne permettent que d’estimer l’ordre de grandeur de la constante de cinétique de cette réaction.

127 Tableau IV.2. Etude cinétique de la décomposition du résorcinol et de ses premiers sous-produits en présence d’un large excès de monochloramine. Conditions expérimentales et constante cinétique d’ordre 1 (kobs .) tableau IV.2. [NH Cl] [NH Cl] [NH Cl] [Ar(OH) ] k 2 0 2 final 2 moy N/Cl pH 2 tot, 0 obs (mM) (mM) (mM) (µM) (h -1)

Résorcinol (R) 1,97 1,87 1,93 2,0 8,6 ± 0,1 25 0,619 1,97 1,87 1,93 2,0 8,6 ± 0,1 25 0,592 2,03 1,68 1,84 2,0 8,6 ± 0,1 100 0,528 0,97 0,94 0,97 2,1 8,6 ± 0,1 10 0,359 4,06 3,97 3,99 1,08 8,6 ± 0,1 50 2,445 4,24 3,93 4,09 1,12 8,6 ± 0,1 50 1,680 4,11 3,72 3,91 1,95 8,6 ± 0,1 50 1,270 3,77 3,70 3,74 14,63 8,6 ± 0,1 50 1,070 3,99 3,76 3,88. 31,25 8,6 ± 0,1 50 1,130 1,21 1,19 1,21 5,0 7,0 ± 0,1 200 0,425 1,18 nd nd 5,0 10,55 ± 0,1 200 1,640

4-chlororésorcinol (4-MCR) 2,03 1,84 1,93 2,0 8,6 ± 0,1 50 2,65 1,04 0,87 0,96 1,9 8,6 ± 0,1 50 1,13 4,81 4,75 4,78 1,7 8,6 ± 0,1 50 6,80

4,6-dichlororésorcinol (4,6-DCR) 0,960 0,94 0,95 2,0 7,6 ± 0,1 5 2,210 0,501 nd nd 2,0 7,6 ± 0,1 5 1,166 0,417 nd nd 2,0 7,6 ± 0,1 5 0,890 0,420 nd nd 2,0 7,6 ± 0,1 5 0,780 0,463 nd nd 2,0 7,6 ± 0,1 5 0,630 0,232 nd nd 2,0 7,6 ± 0,1 5 0,344 0,095 nd nd 2,0 7,6 ± 0,1 4,75 0,095

IV.5.2. Influence du pH sur la cinétique de chloramination du résorcinol et de ses dérivés Compte tenu de l’existence des différentes formes acido-basiques du résorcinol et de ses dérivés chlorés, les constantes cinétiques de réaction de ces composés avec la monochloramine peuvent varier en fonction du pH. Rebenne et al. (1996) ont observé une grande différence de réactivité des différentes formes du résorcinol et de ses dérivés vis-à-vis du chlore. Pour les phénols, les différentes formes acido-basiques présentent aussi des réactivités différentes vis-à-vis du chlore (Gallard et von Gunten, 2002b). Lors de la chloration des dérivés du phénol et du résorcinol ces auteurs observent une catalyse en milieu acide. Afin de simplifier la lecture, la notation des constantes cinétiques de chloration et de chloramination du résorcinol et de ses premiers dérivés chlorés fait l’objet d’une numérotation indépendante.

128 Chapitre IV : Chloramination du résorcinol : Mécanisme et modélisation cinétique

Ar K a1 - + Ar(OH) 2 ← → Ar(OH)(O ) + H Ar - K a2 - + Ar(OH)(O ) ← → Ar(O )2 + H k1 Ar(OH) 2 + NH 2Cl → ArCl(OH) 2 - k 2 - Ar(OH)(O ) + NH 2Cl → ArCl(OH)(O ) - k 3 - Ar(O )2 + NH 2Cl → ArCl(O )2 où Ar représente le composé de départ (résorcinol : Ar = R ; 4-chlororésorcinol : Ar = MCR).

L’étude de l’influence du pH sur la cinétique de réaction de NH 2Cl avec les composés organiques a principalement été réalisée en présence d’un large excès de composé organique ([Ar(OH) 2]tot >> [NH 2Cl]). Dans ces conditions, l’évolution des concentrations en NH 2Cl a été mesurée par iodométrie-UV à différents temps de réaction. Les résultats ont permis de montrer que la vitesse de consommation de NH 2Cl obéit à une loi cinétique d’ordre 1 par rapport à la concentration en NH 2Cl (figure IV.22). Le tableau IV.2 récapitule pour chaque expérience réalisée, les conditions expérimentales et la valeur de la constante d’ordre 1 obtenue en excès de composé hydroxybenzénique.

0,0 )

0 R

Cl] 4-MCR 2 -0,5 4,6-DCR Cl] / / [NH Cl] 2 -1,0 ln ([NH

-1,5 0,0 0,5 1,0 Temps (h)

Figure IV.22. Cinétique de consommation de la monochloramine par le résorcinol, le 4- chlororésorcinol et le 4,6-dichlororésorcinol. [NH 2Cl] 0 = 100 µM, [Ar(OH) 2]0 = 5 mM ; pH = 8,6 ; T = 23 ± 2 °C

La figure IV.23 présente l’évolution des constantes apparentes d’ordre 2 en fonction du pH pour [Ar(OH) 2]tot >> [NH 2Cl]. Ces résultats montrent que la vitesse de réaction est constante pour des pH inférieurs à 8. Contrairement à ce qui est observé avec le chlore, aucune catalyse acide n’a été observée dans cette gamme de pH. De plus, l’application du modèle, proposé par Jafvert et Valentine (1992) et modifié pour inclure les réactions entre les chloramines et les composés hydroxybenzéniques, montre que, si la dichloramine présente une réactivité proche de celle de la monochloramine, alors la contribution de la dichloramine dans le mécanisme de dégradation des composés hydroxybenzéniques peut être négligée.

129 Une augmentation notable de la vitesse de réaction est observée pour des pH supérieurs à 8. Cette accélération de la vitesse de réaction est due à une réactivité accrue de la forme Ar(OH)(O -).

(a) (b) (c) 4000 1600 Ar + Ar 800 pK a1 pK a2 2

) 3000 ) 1200 ) -1

-1 600 -1 .h .h .h -1 -1 -1 800 2000 400 (M (M (M app app app k k pK Ar + pK Ar k 200 a1 a2 400 1000 2 Ar + Ar pK a1 pK a2 2 0 0 0 5 7 9 11 13 5 7 9 11 13 5 7 9 11 13 pH pH pH Figure IV.23. Influence du pH sur la constante apparente d’ordre 2. (a) résorcinol ; (b) 4-chlororésorcinol ; (c) 4,6-dichlororésorcinol

La diminution observée pour des pH alcalins peut s’expliquer soit par la réactivité moindre de la - - forme Ar(O )2, soit par l’existence d’une forme NHCl (Yagil et Anbar, 1962) Cependant, aucune preuve de l’existence de cet anion n’a été établie. Les spectres UV de la monochloramine restent inchangés jusqu’à pH = 14. Par ailleurs, le titrage par la soude d’une solution concentrée de monochloramine ne présente pas un profil permettant d’affirmer l’existence de NHCl -. La constante cinétique apparente peut donc être modélisée en ne considérant que les réactions entre les différentes formes acido-basiques du composé organique et la monochloramine.

Il est possible de calculer la distribution des différentes formes des composés dihydroxybenzéniques : - + − + Ar [Ar(OH)(O )][H ] Ar = [Ar(O )2][H ] K = et Ka2 − a1 [Ar(OH) 2 ] [Ar(OH)(O ])

La concentration totale en composé dihydroxybenzénique peut s’écrire selon la relation suivante :

- - [Ar(OH) 2]tot = [Ar(OH) 2] + [Ar(OH)(O )] + [Ar(O )2]

- - [Ar(OH) 2 ] [Ar(OH)(O )] [Ar(O )2 ] α1 = α2 = α3 = [Ar(OH) 2 ]tot [Ar(OH) 2 ]tot [Ar(OH) 2 ]tot

La concentration totale en composé dihydroxybenzénique peut être exprimée en fonction de la concentration en Ar(OH)(O -) :

- + - K Ar [Ar(OH)(O )] [H ][Ar(OH)(O )] - a2 [Ar(OH) 2]tot = + [Ar(OH)(O )] + K Ar [H + ] a1  + K Ar  -  + [H ] + a2  [Ar(OH) 2]tot = [Ar(OH)(O )] 1 Ar +   K a1 [H ]

130 Chapitre IV : Chloramination du résorcinol : Mécanisme et modélisation cinétique

 Ar + + 2 Ar Ar   K [H ] +[H ] + K K  - a1 a1 a2 [Ar(OH) 2]tot = [Ar(OH)(O )]    K Ar [H + ]   a1 

+ - K Ar .[H ] [Ar(OH)(O )] a1 α2 = = + + 2 [Ar(OH) 2 ]tot K Ar [H ] + [H ] + K Ar K Ar a1 a1 a2

Les fractions molaires α1, α2 et α3 peuvent ainsi s’écrire :  +   +  [H ][Ar(OH)(O - )]  [H ] [Ar(OH) 2] =   = α2   [Ar(OH) 2]tot  K Ar   K Ar   a1   a1 

   +  [Ar(OH) 2 ] [H ] α1 = = α2   [Ar(OH) 2 ]tot  K Ar   a1 

 -     K Ar .[Ar(OH)(O )]   K Ar . - a2 α a2 [Ar(O )2] =  +  = 2.  +  [Ar(OH)] tot  [H ]   [H ]        -  K Ar  α [Ar(O )2 ] α a2 3 = = 2.  +  [Ar(OH) 2 ]tot [H ]  

La figure IV.24 présente, pour le résorcinol, l’évolution des fractions molaires α1, α2 et α3 en fonction du pH. 1 ααα 2 ααα 1 R(OH)(O -) 0,8 R(OH) 2

ααα 3 0,6 - R(O )2

0,4

Fraction molaire 0,2

0 5 7 9 11 13 pH

Figure IV.24. Courbe de spéciation du résorcinol

131 En considérant que la monochloramine réagit avec les trois formes des composés dihydroxybenzéniques, la vitesse de dégradation apparente de la monochloramine peut être décrite par la relation suivante :

d[NH Cl] - 2 = k [NH Cl][Ar(OH) ] + k [NH Cl][Ar(OH) (O - )] + k [NH Cl][Ar(O - ) ] dt 1 2 2 2 2 3 2 2

d[NH 2Cl] - = ( α1k1+ α2k2+ α3k3) [Ar(OH) 2]tot [NH 2Cl] = k app [Ar(OH) 2]tot [NH 2Cl] dt

 + Ar   k3.K  d[NH 2Cl] = α k1.[H ] + α + α a2 -  2. 2.k 2 2. + [Ar(OH) 2]tot [NH 2Cl] = k app [Ar(OH) 2]tot [NH 2Cl] dt  K Ar [H ]   a1 

+  k [H ] k KAr  soit, k = α . 1 + α .k + α . 3 a2  app  2 Ar 2 2 2 +   Ka1 [H ]  K Ar .[H + ] a1 comme α2 = , k app devient : K Ar [H + ] +[H + ]2 + K Ar K Ar a1 a1 a2

+ + k [H ]2 + k KAr [H ]+ k KAr KAr k = 1 2 a1 3 a1 a2 (4.28) app Ar + + + 2 + Ar Ar Ka1 [H ] [H ] Ka1 Ka2

L’équation (4.28) est utilisée pour déterminer les constantes cinétiques des réactions élémentaires par régression non linéaire des données expérimentales (SigmaPlot 2000). Pour des pH > 5 (catalyse par H + négligeable), une équation similaire est obtenue pour la chloration des composés hydroxybenzéniques. La figure IV.25 présente les constantes expérimentales et la courbe théorique pour le résorcinol (a), le 4-MCR (b) et le 4,6-DCR (c). Pour le résorcinol et le 4-MCR, les valeurs des constantes de dissociation (Ka) précédemment publiées et présentées dans le tableau IV.4, permettent une bonne modélisation de la constante apparente en fonction du pH. Cependant les DCR valeurs de K a2 publiées pour le 4,6-DCR conduisent à un décalage important entre la courbe expérimentale et la courbe simulée. Un titrage acido-basique a été réalisé pour calculer le pK a2 du 4,6-DCR. Les données obtenues mettent en évidence que la valeur du pK a2 du 4,6-DCR est proche de 9,78 ± 0,05 alors que Rebenne et al. (1996) proposent une valeur de pK a2 égale à 10,35. Cette nouvelle valeur du pK a2 permet une meilleure modélisation de la constante cinétique apparente. Le tableau IV.4 présente les constantes cinétiques d’ordre 2 associées à chacune des réactions pour les composés étudiés.

132 Chapitre IV : Chloramination du résorcinol : Mécanisme et modélisation cinétique

Tableau IV.3. Etude cinétique de la décomposition du résorcinol et de ses premiers sous-produits en présence d’un large excès de composé hydroxybenzénique. Conditions expérimentales et constante cinétique d’ordre 1 (k’obs .) tableau IV.3. [NH 2Cl] o N/Cl pH [Ar(OH) 2]tot, 0 k’ obs kapp (µM) (mM) (h -1) (M -1.h -1) Résorcinol (R) 100 5,0 5,5 ± 0,05 5 0,937 187 100 5,0 6 ± 0,05 5 1,030 206 100 5,0 6,5 ± 0,05 5 1,004 201 100 5,0 7,7 ± 0,05 5 0,932 186 100 5,0 8 ± 0,05 5 1,217 243 100 5,0 8,2 ± 0,05 5 1,222 244 100 5,0 8,5 ± 0,05 5 1,613 323 100 5,0 8,7 ± 0,05 5 1,720 344 100 5,0 8,9 ± 0,05 5 2,087 417 100 5,0 9,5 ± 0,05 5 2,749 550 100 5,0 9,8 ± 0,05 5 3,403 681 100 5,0 10 ± 0,05 5 3,795 759 100 5,0 10,2 ± 0,05 5 3,956 791 100 5,0 10,4 ± 0,05 5 3,875 775 100 5,0 10,8 ± 0,05 5 4,191 838 100 5,0 11 ± 0,05 5 3,888 778 100 5,0 11,2 ± 0,05 5 4,041 808 100 5,0 11,4 ± 0,05 5 3,315 663 100 5,0 11,6 ± 0,05 5 3,150 630 100 5,0 12 ± 0,05 5 2,741 548

133 Tableau IV.3. Suite

[NH 2Cl] 0 N/Cl pH [Ar(OH) 2]tot, 0 k’ obs kapp (µM) (M) (h -1) (M -1.h -1)

4-chlororésorcinol (4-MCR) 100 5,0 5,00 ± 0,05 5 1,872 374 100 5,0 6,00 ± 0,05 5 2,109 422 100 5,0 7,50 ± 0,05 5 3,547 709 100 5,0 8,20 ± 0,05 5 4,860 972 100 5,0 8,55 ± 0,05 5 7,003 1401 100 5,0 9,10 ± 0,05 5 7,774 1555 100 5,0 9,44 ± 0,05 5 7,565 1513 100 5,0 10,00 ± 0,05 5 7,682 1536 100 5,0 10,50 ± 0,05 5 6,406 1281 100 5,0 10,80 ± 0,05 5 4,406 881 100 5,0 11,50 ± 0,05 5 2,165 433 100 5,0 12,00 ± 0,05 5 0,884 177

4,6-dichlororésorcinol (4,6-DCR) 100 5,0 5,50 ± 0,05 5 1,267 253 100 5,0 6,00 ± 0,05 5 1,927 385 100 5,0 6,50 ± 0,05 5 2,817 563 100 5,0 7,01 ± 0,05 5 6,115 1223 100 5,0 7,50 ± 0,05 5 12,465 2493 100 5,0 8,00 ± 0,05 5 16,312 3262 100 5,0 8,50 ± 0,05 5 19,074 3815 100 5,0 9,00 ± 0,05 5 18,045 3609 100 5,0 9,50 ± 0,05 5 14,943 2989 100 5,0 9,53 ± 0,05 5 14,308 2862 100 5,0 10,00 ± 0,05 5 8,704 1741 100 5,0 10,50 ± 0,05 5 4,310 862 100 5,0 11,00 ± 0,05 5 1,783 357 100 5,0 11,50 ± 0,05 5 0,887 177

(a) (b) (c)

1600 kapp calculé à partir des valeurs de k' obs 800 k calculé à partir des valeurs de k 4000 app obs ) ) 1200 ) -1

-1 600 -1 .h

.h .h 3000 -1 -1 -1 800

400 (M (M (M 2000 app app app k k k 400 200 1000 kapp calculé à partir de k' obs kFromapp calculé iodometric à partir determination des valeurs de k' obs kFrom calculé HPLC à determination partir des valeurs de k kapp calculé à partir de k obs 0 app obs 0 0 5 7 9 11 13 5 7 9 11 13 5 7 9 11 13 pH pH pH Figure IV.25. Modélisation de la constante apparente d’ordre 2. (a) résorcinol ; (b) 4-chlororésorcinol ; (c) 4,6-dichlororésorcinol

134 Chapitre IV : Chloramination du résorcinol : Mécanisme et modélisation cinétique

La variation de la constante cinétique apparente en fonction du pH est cohérente avec la spéciation de l’hydroxybenzène considéré. Cette accélération est due à une réactivité plus élevée de la forme - - Ar(OH)(O ) comparativement aux formes Ar(OH) 2 et Ar(O )2.

Tableau IV.4. Constantes cinétiques des réactions élémentaires d’ordre 2 pour les réactions entre la monochloramine (ce travail), ou le chlore (Rebenne et al., 1996) avec le résorcinol, le 4- chlororésorcinol et le 4,6-dichlororésorcinol. tableau IV.4. Ar Ar k (± σσσ) k (± σσσ) k (± σσσ) Composé organique Oxydant pK pK 1 2 3 1a a2 (M -1.h -1) (M -1.h -1) (M-1.h -1) b b a a a Résorcinol NH 2Cl 9,43 11,21 207 (13) 927 (20) 526 (27) HOCl 9,43 b 11,21 b < 1,19.10 6 b 4,90.10 9 b 4,14.10 11 b kchloration /k monochloramination > 5,7.10 3 5,3.10 6 7,9.10 8

b b a a a 4-chlororésorcinol NH 2Cl 8,09 10,75 383 (50) 1716 (45) 171 (60) HOCl 8,09 b 10,75 b < 2,34.10 5 b 5,15.10 8 b 2,42.10 11 b kchloration /k monochloramination > 6,0.10 2 3,0.10 5 1,4.10 9

b a a a a 4,6-dichlororésorcinol NH 2Cl 7,53 9,78 244 (56) 4305 (7) 88 (7) HOCl 7,53 b 10,35 b 1,69.10 5 b 1,16.10 8 b 2,13.10 11 kchloration /k monochloramination 6,9.10 2 2,7.10 4 2,4.10 9 a Valeur déterminée expérimentalement dans ce présent travail. b Valeur rapportée par Rebenne et al. 1996.

- -1 -1 La forme Ar(OH)(O ) est la plus réactive (k 2 = 930 M .h pour le résorcinol). Cependant, pour des -1 -1 pH typiques rencontrés en traitement des eaux, c’est la forme Ar(OH) 2 (k 3 = 210 M .h ) qui gouverne la réactivité du résorcinol vis-à-vis de la monochloramine. Malgré les réactions interférentes à pH basique, nous pouvons estimer la valeur de la constante cinétique d’ordre 2 entre - -1 -1 la forme R(O )2 et NH 2Cl (k 3 = 530 M .h ). Des résultats similaires sont observés pour les dérivés mono- et dichlorés.

En conclusion, cette étude cinétique a permis de déterminer les valeurs de constantes cinétiques de réaction de la monochloramine sur le résorcinol et ses dérivés chlorés et de mettre en évidence que la monochloramine présente une réactivité sur le résorcinol très différente de celle du chlore (Rebenne et al., 1996).

R-HOCl Le résorcinol est beaucoup moins réactif vis-à-vis de la monochloramine que du chlore (k 1 / R-NH2Cl 7 R-HOCl R-NH2Cl 6 k1 = 5,7.10 ; k 2 / k 2 = 5,3.10 ). Dans le cas du chlore, étant donné que seule la forme HOCl est prise en compte dans le calcul, la valeur des constantes cinétiques augmente avec le R-HOCl R-HOCl R-HOCl degré de dissociation du résorcinol (k 1 < k 2 < k 3 ). Dans le cas de la - monochloramine, nous trouvons que la forme Ar(OH)(O ) est plus réactive que les formes Ar(OH) 2 - et Ar(O )2, et ce pour les trois composés organiques étudiés. Par ailleurs, dans le cas du résorcinol, R-NH2Cl R-NH2Cl nous observons que k 1 < k 3 , alors que pour les dérivés mono- et dichloré nous MCR-NH2Cl MCR-NH2Cl DCR-NH2Cl DCR-NH2Cl trouvons que k 3 < k 1 et k 3 < k 1 . Une autre différence entre le chlore et la monochloramine est observée en considérant le ratio k 2/k 1. L’amplitude de réactivité est R-HOCl R-HOCl plus grande dans le cas du chlore (k 2 / k 1 > 4000) que dans le cas de la monochloramine R-NH2Cl R-NH2Cl (k 2 / k 1 = 4,5). Ceci explique que la réactivité du résorcinol pour des pH proches de la neutralité est gouvernée par la forme R(OH) 2 dans le cas de la monochloramine, et par la forme R(OH)(O -) dans le cas du chlore. Les constantes apparentes d’ordre 2 pour la chloration et la chloramination du résorcinol, du 4-chlorésorcinol et du 4,6-dichlororésorcinol calculées à partir de l’équation 4.28 sont présentées sur la figure IV.26. Les données montrent que la constante

135 apparente d’ordre 2 pour la chloration est 10 3 à 10 4 fois plus grande que celle mesurée pour la monochloramine et ce, quel que soit le pH et le composé considérés.

6 HOCl )

-1 4 .h

-1 R

(M 2 4-MCR

app 4,6-DCR

NH 2Cl

log k 0

-2 5 7 9 11 13 pH

Figure IV.26. Constante de vitesse apparente d’ordre 2 pour la chloration et la chloramination du résorcinol, du 4-chlororésorcinol et du 4,6-dichlororésorcinol. Les valeurs de k app ont été calculées à partir des données du tableau IV.3 et de l’équation 4.28

IV.5.3. Effet de la température sur la cinétique de chloramination du résorcinol L’effet de la température sur la cinétique de chloramination du résorcinol a été étudié à pH = 9,0 uniquement. Les expériences ont été conduites à 15, 20, 25, 45 et 55°C en présence d’un large excès de résorcinol [Résorcinol]0 = 5 mM ; [NH 2Cl] 0 = 100 µM ; N/Cl = 5). La figure IV.27 montre un effet notable de la température sur la vitesse de dégradation de la monochloramine. Le tableau IV.5 résume l’ensemble des conditions expérimentales ainsi que les principaux résultats. La constante apparente d’ordre 2 passe de 244 M -1.h -1 à 15°C à 1902 M -1.h -1 à 55°C, soit une augmentation d’un facteur 7,8 pour une augmentation de la température de 40°C. La figure IV.28 montre une corrélation linéaire entre ln(k app ) et 1/T. Conformément à la loi d’Arrhenius, il est possible de calculer l’énergie d’activation de la réaction de chloramination du résorcinol à pH = 9,0 (E a = 40 kJ.mol -1). Dans le cas du chlore, aucun effet significatif de la température sur la chloration du résorcinol à pH = 5 n’a été observé (Rebenne et al., 1996), seule une valeur haute a été établie (Ea ≤ 2,5 kJ.mol -1).

136 Chapitre IV : Chloramination du résorcinol : Mécanisme et modélisation cinétique

Temps (h) 8 0 0,2 0,4 0,6 0,8 1 ln(k) = -4815/T + 22,2 2 0 ) R = 0,9929 -1 ) .h

0 7 -1

Cl] -0,5 2 ) ) (M

app 6 -1 Cl]/[NH ln(k 2 T = 15°C T = 20°C -1,5 5 ln([NH T = 25°C T = 45°C 3 3,2 3,4 3,6 T = 55°C -2 1000/T

Figure IV.27. Influence de la température sur Figure IV.28. Détermination de l’énergie la cinétique de consommation de d’activation de la réaction de monochloramine par le résorcinol à pH = 9,0. monochloramination du résorcinol à pH = 9,0.

Tableau IV.5. Influence de la température sur la cinétique de chloramination du résorcinol tableau IV.5. -1 -1 -1 T (°C) pH N/Cl [R] 0 (mM) [NH 2Cl] 0 (µM) k’ obs (h ) kapp (M .h ) 15 9,0 5,0 5,0 84 1,221 244,2 20 9,0 5,0 5,0 91 1,638 327,6 25 9,0 5,0 5,0 97 2,087 417,4 35 9,0 5,0 1,9 72 11,744 618,1 45 9,0 5,0 5,0 77 5,967 1193,4 55 9,0 5,0 5,0 75 9,512 1902,4

IV.6. Modélisation cinétique Les résultats obtenus au cours de cette étude ont montré que la chloramination du résorcinol passe par la formation de 4-chlororésorcinol, de 4,6-dichlororésorcinol et d’autres composés qui n’ont pas été identifiés. Les résultats ont aussi permis de déterminer les constantes cinétiques de réaction de la monochloramine sur le résorcinol, le 4-chlororésorcinol et le 4,6-dichlororésorcinol et de montrer l’influence du pH et du rapport N/ Cl sur les vitesses de réaction. A partir de ces résultats, nous allons tenter de mieux comprendre l’influence de ces paramètres expérimentaux sur les stœchiométries et sur les vitesses de réaction grâce à la modélisation cinétique. Le tableau IV.6 présente les réactions chimiques prises en compte dans notre modèle cinétique.

137 Tableau IV.6. Formulation du modèle (comme écrit dans Copasi) tableau IV.6. Réaction Constante (25°C) Réf. Résorcinol (R) -1 -1 R(OH) 2 + NH 2Cl  0,66 4-MCR(OH)(OH) + NH 3 207 M .h a - - -1 -1 R(OH)(O ) + NH 2Cl  0,66 4-MCR(OH)(O ) + NH 3 927 M .h a - - -1 -1 R(O )2 + NH 2Cl  0,66 4-MCR(O )2 + NH 3 526 M .h a 6 -1 -1 R(OH) 2 + HOCl  0,66 4-MCR(OH)(OH) 1,19.10 M .h b R(OH)(O -) + HOCl  0,66 4-MCR(OH)(O -) 4,90.10 9 M -1.h -1 b - - 11 -1 -1 R(O )2 + HOCl  0,66 4-MCR(O )2 4,14.10 M .h b 4-chlororésorcinol (4-MCR) -1 -1 4-MCR(OH) 2 + NH 2Cl  0,25 4,6-DCR(OH)(OH) + NH 3 383 M .h a - - -1 -1 4-MCR(OH)(O ) + NH 2Cl  0,25 4,6-DCR(OH)(O ) + NH 3 1716 M .h a - - -1 -1 4-MCR(O )2 + NH 2Cl  0,25 4,6-DCR(O )2 + NH 3 170 M .h a 5 -1 -1 4-MCR(OH) 2 + HOCl  0,25 4,6-DCR(OH)(OH) 2,34.10 M .h b 4-MCR(OH)(O -) + HOCl  0,25 4,6-DCR(OH)(O -) 5,15.10 8 M -1.h -1 b - - 11 -1 -1 4-MCR(O )2 + HOCl  0,25 4,6-DCR(O )2 2,42.10 M .h b 4,6-dichlororésorcinol (4,6-DCR) -1 -1 4,6-DCR (OH) 2 + NH 2Cl  P 244 M .h a - -1 -1 4,6-DCR(OH)(O ) + NH 2Cl  P 4305 M .h a - -1 -1 4,6-DCR (O )2 + NH 2Cl  P 88 M .h a 5 -1 -1 4,6-DCR (OH) 2 + HOCl  P 1,69.10 M .h b 4,6-DCR (OH)(O -) + HOCl  P 1,16.10 8 M -1.h -1 b - 11 -1 -1 4,6-DCR (O )2 + HOCl  P 2,13.10 M .h b Equilibres HOCl  ClO - + H + 2,88.10 -8 M c + + -10 NH 4  NH 3 + H 5,62.10 M d 10 -1 -1 HOCl + NH 3  NH 2Cl + H 2O 1,5. 10 M .h e -2 -1 NH 2Cl + H 2O  HOCl + NH 3 7,6.10 h e - + -10 R(OH) 2  R(OH)(O ) + H 3,72.10 M b - - + -12 R(OH)(O )  R(O )2 + H 6,17.10 M b - + -09 4-MCR(OH) 2  4-MCR (OH)(O ) + H 8,13.10 M b - - + -11 4-MCR(OH)(O )  4-MCR(O )2 + H 1,78.10 M b - + -08 4,6-DCR(OH) 2  4,6-DCR(OH)(O ) + H 2,95.10 M b - - + -10 4,6-DCR(OH)(O )  4,6-DCR(O )2 + H 1,66.10 M a Réf. aCe travail ; bRebenne et al., 1996 ; cMorris, 1966 ; dThurston et al., 1981 ; eMorris et Isaac, 1983 IV.6.1. Stœchiométrie de formation des sous-produits

Pour les stœchiométries des réactions R + NH 2Cl  4-MCR et MCR + NH 2Cl  4,6-DCR, la figure IV.29 et la figure IV.30 représentent respectivement la quantité de 4-MCR ou de 4,6-DCR formée en fonction de la quantité de R ou de 4-MCR décomposé. Pour les conditions expérimentales utilisées (pH = 8,6), les stœchiométries apparentes sont de l’ordre de 0,4 mole de 4- MCR/mole de R dégradé et de 0,6 mole de 4,6-DCR/mole de 4-MCR dégradé.

La stœchiométrie apparente de la réaction entre la monochloramine et le résorcinol est confirmée lors des suivis cinétiques par l’examen des pentes à l’origine (tableau IV.7). Cependant, la stœchiométrie apparente de la réaction entre le 4-MCR et la monochloramine diffère selon la méthode utilisée.

138 Chapitre IV : Chloramination du résorcinol : Mécanisme et modélisation cinétique

30 30 y = 0,4295x + 0,6258 y = 0,5691x - 3,7671 25 2 R = 0,9313 R2 = 0,9714 20 20

15

10 10 [4-MCR] µM( ) [4,6-DCR] µM( ) 5

0 0 0 20 40 60 0 10 20 30 40 50 [R] 0-[R] ( µM ) [4-MCR] 0-[4-MCR] ( µM )

Figure IV.29. Stœchiométrie apparente de la Figure IV.30. Stœchiométrie apparente de la réaction R + NH 2Cl  4-MCR en défaut de réaction MCR + NH 2Cl  4,6-DCR monochloramine. (compilation de diverses (compilation de diverses données données expérimentales) expérimentales)

Compte tenu de la forte réactivité du 4-MCR par rapport à R et du 4,6-DCR par rapport au 4-MCR, les coefficients stœchiométriques ainsi calculés ne correspondent qu’à des coefficients apparents. Ceux si seront inférieurs aux coefficients stœchiométriques réels car ils ne tiennent pas compte de la disparition du 4-MCR et du 4,6-DCR.

Tableau IV.7. Conversion du R en 4-MCR et du 4-MCR en 4,6-DCR tableau IV.7. Conditions Conversion = N/Cl = 2 ; pH = 8,6 (d[4-MCR]/dt) 0 / (-d[R]/dt) 0 [R] 0 = 250 µM ; NH 2Cl = 2 mM 0,55 [R] 0 = 100 µM ; NH 2Cl = 2 mM 0,50 [R] 0 = 10 µM ; NH 2Cl = 1 mM 0,49 [R] 0 = 50 µM ; NH 2Cl = 5 mM 0,54 Conditions Conversion = N/Cl = 2 ; pH = 8,6 (d[4,6-DCR]/dt) 0 / (-d[4-MCR]/dt) 0 [4-MCR] 0 =50 µM ; [NH 2Cl] = 2 mM 0,21 [4-MCR] 0 =50 µM ; [NH 2Cl] = 1 mM 0,23 [4-MCR] 0 =50 µM ; [NH 2Cl] = 5 mM 0,15

Les coefficients stœchiométriques réels peuvent être estimés par modélisation cinétique. Cette méthode permet de ne pas limiter la détermination des coefficients stœchiométriques à l’examen des taux de conversion observés pour des faibles temps de contact. Les coefficients stœchiométriques ont été déterminés empiriquement en faisant varier les coefficients stœchiométriques dans le modèle cinétique jusqu’à obtenir une bonne superposition des courbes expérimentales et simulées des concentrations en sous-produits. Cette simulation a été effectuée en considérant que les stœchiométries de formation de sous-produits à partir des différentes formes du - - composé parent (Ar(OH) 2, Ar(OH)(O ), Ar(O )2) sont identiques. Comme l’illustrent les courbes présentées sur les figures IV.31 et IV.32, les meilleures simulations on été obtenues en prenant les stœchiométries suivantes :

R + NH 2Cl  S1 4-MCR S1 = 0,66 à pH = 8,6 139 4-MCR + NH 2Cl  S2 4,6-DCR S2 = 0,25 à pH = 8,6

Par ailleurs, la modélisation cinétique montre qu’il n’est pas possible de déterminer avec précision le coefficient stœchiométrique par examen des pentes à l’origine ( figure IV.31 et figure IV.32). En effet, celle-ci n’est pas significativement différente entre les différentes valeurs des coefficients stœchiométriques testés. La détermination du coefficient stœchiométrique par examen du pic de 4- MCR s’avère une méthode beaucoup plus précise puisqu’une faible variation du coefficient S1 conduit à une modification sensible de la concentration maximale en 4-MCR.

50 4-MCR 3 S1 = 0,66 ± 0,05 R S2 = 0,30 )

30 250 a = 0.66 ± 0.05 4-MCR 4,6-DCR 4,6-DCR 40 S = 0,70 25 200 1 ) S = 0,25 ± 0,02 2 20 30 2 150 15 20 [R] ( µM ( [R] 100 S1 = 0,50 1 10 (µM) [4-MCR] 10 µM ) [4,6-DCR]( 50 5 S2 = 0,20 [4-MCR] et [4,6-DCR] µM [4-MCR] et ( 0 0 0 0 0,0 0,5 1,0 1,5 2,0 0,0 0,2 0,4 0,6 Temps (h) Temps (h)

Figure IV.31. Détermination de la stœchiométrie Figure IV.32. Détermination de la stœchiométrie apparente de la réaction (S 1) : apparente de la réaction (S 2) : R + NH 2Cl  S 1 4-MCR 4-MCR + NH 2Cl  S 2 4,6-DCR [R] 0 = 100 µM ; pH = 8,6 ; [4-MCR] 0 = 100 µM ; pH = 8,6 ; [NH 2Cl] 0 = 2 mM ; N/Cl = 2,0 [NH 2Cl] 0 = 1 mM ; N/Cl = 2,0

Cette même étude est effectuée sur la réaction entre le 4-MCR et la monochloramine conduisant à la formation de 4,6-DCR. Il apparaît dans ce cas que la conversion du 4-MCR en 4,6-DCR, calculée à partir des pentes à l’origine est de 20 % environ (tableau IV.7). Les résultats issus de la modélisation cinétique estiment une conversion proche de 25%. Comme dans le cas précédent, la méthode de détermination par modélisation cinétique s’avère plus fiable pour la détermination du coefficient stœchiométrique S 2.

Afin d’étendre cette étude à la stœchiométrie apparente de la formation du dérivé trichloré, il serait nécessaire d’une part de confirmer son existence et d’autre part de disposer d’un échantillon de concentration connue afin de quantifier ce composé.

IV.6.2. Contribution du chlore libre dans le mécanisme de chloramination du résorcinol Les cinétiques des réactions entre le chlore et les différentes formes du résorcinol ont précédemment été déterminées par Rebenne et al. (1996). En tenant compte de ces réactions, il est ainsi possible de simuler la dégradation du résorcinol pour les faibles rapports N/Cl. La figure IV.33 montre que ce modèle, incorporant les réactions chlore-résorcinol, simule correctement les résultats observés pour une large gamme de valeurs pour le rapport N/Cl. La figure IV.34 montre que l’effet de N/Cl peut être négligé lorsque le rapport N/Cl est supérieur à 2 moles/mole. Pour des rapports N/Cl inférieurs à 1,5 la contribution du chlore dans la dégradation du résorcinol n’est plus

140 Chapitre IV : Chloramination du résorcinol : Mécanisme et modélisation cinétique

négligeable. Aux plus faibles rapports N/Cl (N/Cl < 1,08), le chlore est l’espèce majoritaire qui conduit à la dégradation du résorcinol. Ces résultats confirment donc que les constantes cinétiques obtenues avec un rapport N/Cl = 5 correspondent au seul effet de la monochloramine.

50 N/Cl = 31,3 50 N/Cl = 5 (degradé par HOCl = 0 % ) N/Cl = 1,4 N/Cl = 1,12 40 N/Cl = 1,2 40 (degradé par HOCl = 12 % ) N/Cl = 1,1 N/Cl = 1,05 N/Cl = 1,08 30 N/Cl = 1,02 30 (degradé par HOCl = 52 % ) N/Cl = 1,01 N/Cl = 1,00 20 20 µM( [R] ) [R] ( µM( [R] )

10 10

0 0 0 0,5 1 1,5 2 0 0,5 1 1,5 2 Temps (h) Temps (h)

Figure IV.33. Influence de N/Cl sur la Figure IV.34. Modélisation de l’influence du décomposition du résorcinol à pH = 8,6. (N/Cl rapport N/Cl sur la décomposition du = 31,3 : [NH 2Cl] 0 = 3,99 mM ; N/Cl = 1,12 et résorcinol. [NH 2Cl] 0 = 4 mM ; pH = 8,6 1,08 : [NH 2Cl] 0 = 4,24 mM). Données expérimentales (symboles) et courbes simulées (lignes)

Les résultats présentés dans ce travail démontrent que le chlore formé lors de l’hydrolyse de la monochloramine peut contribuer à l’oxydation du résorcinol. La concentration en chlore libre présente lors de la chloramination du résorcinol dépendent principalement du rapport N/Cl et du pH.

Le pourcentage de résorcinol décomposé par la voie du chlore peut être calculé à l’aide du modèle présenté dans le tableau tableau IV.6. Dans les conditions expérimentales présentées sur la figure IV.33 et pour un rapport N/Cl = 1,08, 52 % de l’avancement global de la réaction peut être attribué aux réactions faisant intervenir le chlore libre. Cette contribution chute à 12 % lorsque le rapport N/Cl passe de 1,08 à 1,12. Ces résultats montrent que les réactions de chloramination du résorcinol sont très sensibles au rapport N/Cl lorsque celui-ci est proche de 1.

Pour une condition expérimentale donnée ([R] 0 = 50 µM ; [NH 2Cl] 0 = 4 mM), la contribution du chlore libre dans les réactions d’oxydation du résorcinol peut être calculée à l’aide du même modèle cinétique pour des valeurs de pH comprises entre 6 et 12 et des rapport N/Cl allant de 1,0 à 12. Le diagramme tridimensionnel obtenu (figure IV.35) démontre clairement que les réactions impliquant le chlore libre sont favorisées pour des rapports N/Cl très proches de 1 et pour des pH proches de la neutralité.

141 100

) 90

% (

80

y

y

b a

70

d w

e 60 h

t

t a

a 50 d

p

a e

r 40

g

n

i e

r 30

D o Pourcentage R de

l 20 h dégradé par HOCl (%) c 10 0 6 1.0 7 1.2 8 9 pH 10 1.4 11 1.6 12 1.8 2.0 Cl N/ Figure IV.35. Effet du rapport N/Cl et du pH sur la contribution du chlore libre dans les réactions de dégradation du résorcinol. Simulation pour [R] 0 = 50 µM ; [NH 2Cl] 0 = 4 mM

Lors de la chloramination des eaux de distribution, des rapports N/Cl proches de 1,1 sont souvent utilisés (EPA, 1999). EDF utilise par exemple un traitement à la monochloramine préparée avec un rapport N/Cl = 1,05 pour désinfecter ses circuits de refroidissement. Certains sites réactifs des substances humiques peuvent êtres apparentées à des structures proches de celle du résorcinol (Rook, 1977). Une part non négligeable des sous-produits de chloramination des MON pourrait donc être due au chlore libéré par hydrolyse de la monochloramine.

IV.6.3. Modélisation cinétique des vitesses de décomposition de R, MCR et DCR La figure IV.36 compare les courbes expérimentales et simulées d’évolution des concentrations en composé organique (pH = 8,6 ; N/Cl = 2,0) pour 2 concentrations initiales différentes en composé organique et en excès de monochloramine. Le modèle ainsi développé décrit correctement les résultats expérimentaux. Bien que les constantes cinétiques soient déterminées séparément et en présence d’un large excès de composé organique, le modèle se montre capable de décrire l’évolution de la décomposition du résorcinol et la formation des 4-MCR et 4,6-DCR en présence d’un large excès d’oxydant. Cependant, ce modèle n’est pas complet et seules les premières étapes de la chloramination y sont abordées.

Les expériences ont montré que le bilan carbone n’est pas complet par le simple suivi des dérivés mono et dichlorés. Il n’est pas étonnant que le simple suivi des deux premiers intermédiaires chlorés n’explique pas à eux seuls les sous-produits issus du résorcinol car les coefficients stœchiométriques ne sont pas égaux à 1. De plus, les sous-produits réagissent aussi avec la monochloramine et ce avec des vitesses plus élevées que les composés de départ. Néanmoins le modèle permet de décrire l’évolution du bilan matière avec une justesse satisfaisante.

142 Chapitre IV : Chloramination du résorcinol : Mécanisme et modélisation cinétique

(a) (b) 25 10 250 100 R 20 4-MCR 8 200 80 4,6-DCR

150 15 60 6

10 4 [R] ( µM ) ( [R] [R] ( µM ) ( [R] 100 40 R 4-MCR 50 5 20 2 4,6-DCR [4-MCR] et [4,6-DCR] µM ) [4-MCR]et ( [4,6-DCR] µM ) [4-MCR]et ( 0 0 0 0 0,0 0,5 1,0 1,5 2,0 0 1 2 3 Temps (h) Temps (h)

(c) (d) 3 3 50 50 4-MCR 4-MCR 40 4,6-DCR 40 4,6-DCR 2 2 30 30

20 20

1 µM ) [4-MCR] ( 1 [4,6-DCR] µM ) ( [4-MCR] ( µM µM ) [4-MCR]( [4,6-DCR]µM ) ( 10 10

0 0 0 0 0 1 2 3 0,0 0,2 0,4 0,6 0,8 1,0 Temps (h) Temps (h)

Figure IV.36. Evolution de la concentration en résorcinol et ses dérivés chlorés en fonction du temps. L’échelle de gauche représente la concentration en composé mère et l’échelle de droite, les concentrations en composés fils. Les points et les lignes se réfèrent respectivement aux données expérimentales et courbes simulées. (a) [R] 0 = 250 µM ; [NH 2Cl] 0 = 2 mM ; pH = 8,6. (b) [R] 0 = 100 µM ; [NH 2Cl] 0 = 2 mM ; pH = 8,6. (c) [4-MCR] 0 = 50 µM ; [NH 2Cl] 0 = 1 mM ; pH = 8,6. (d) [R] 0 = 50 µM ; [NH 2Cl] 0 = 5 mM ; pH = 8.6.

Comme le montre la figure IV.37 qui représente l’évolution de la concentration en résorcinol après 20 heures en fonction de la concentration initiale en monochloramine, le modèle proposé est également capable de décrire la décomposition du résorcinol pour des taux de monochloramine inférieurs à la demande. Concernant les premiers sous-produits, le modèle conduit à une légère sous-estimation des concentrations en 4-MCR et 4,6-DCR (figure IV.38). Les bilans matière expérimentaux et simulés sont néanmoins comparables (figure IV.39).

143

100 15 100

80 80 10 60 60

40 MCR 40 [R] (µM) [R] 5 DCR 20 20 Bilan matière ( µM( Bilan ) matière

0 [4,6-DCR][4-MCR] et µM( ) 0 0 0 50 100 0 50 100 150 200 0 50 100 150 200 [NH 2Cl] 0 (µM) [NH 2Cl] 0 ( µM ) [NH 2Cl] 0 (µM) Figure IV.37. Evolution de la Figure IV.38. Evolution des Figure IV.39. Evolution du concentration expérimentale concentrations expérimentales bilan matière expérimental (points) et simulée (ligne) en (points) et simulées (ligne) en (points) et simulé (ligne) lors de résorcinol lors de la mono et dichlororésorcinol lors la chloramination du résorcinol chloramination du résorcinol de la chloramination du (100 µM) en fonction de la dose (100 µM) en fonction de la dose résorcinol (100 µM) en fonction d’oxydant appliquée. d’oxydant appliquée. de la dose d’oxydant appliquée. B.M. = [R] + [4-MCR] + [4,6- DCR]

IV.6.4. Sites d’attaque de NH 2Cl sur le noyau aromatique : Relation structure- réactivité Il est intéressant de noter que la distribution théorique des premiers sous-produits de réaction du résorcinol, en absence de gêne stérique et de site d’attaque spécifique, devrait être de 33 % de 2- MCR et 66 % de 4-MCR (on considérant que le 5-MCR n’est pas formé). Dans le cas du chlore, Heasley et al. (1989) observent un rapport 2-MCR / 4-MCR proche de 0,3. Cependant la présence de 2-MCR n’est pas évoquée dans le cas de la monochloramine (Heasley et al., 1999). Le rendement de formation observé dans cette étude pour le 4-MCR suggère que le 2-MCR pourrait être formé lors de la chloramination du résorcinol.

En ce qui concerne le 4-MCR, la monochloramination conduit à la formation de 4,6-DCR avec un coefficient stœchiométrique de 25 %. La même approche montre que la distribution théorique des premiers sous-produits du 4-MCR devrait être de 50 % pour le 4,6-DCR et de 50 % pour le 2,4- DCR. Dans le cas du chlore, Heasley et al. (1989) observent un rapport 4,6-DCR / 2,4-DCR d’environ 0,25. Ces auteurs suggèrent donc que la position 2 est plus réactive vis-à-vis du chlore que la position 6. Avec la monochloramine, un mécanisme similaire pourrait être suggéré.

Les corrélations de Hammett sont couramment utilisées pour prédire l’effet des substituants sur la vitesse de réaction entre un oxydant et un composé organique (Rebenne et al., 1996 ; Warner et al., 2000 ; Gallard et von Gunten 2002b ; Gallard et al., 2003 ; Deborde et von Gunten 2008). Les constantes de Hammett reflètent l’effet des substituants sur la densité électronique du cycle aromatique par les effets inductifs et de résonance. L’augmentation de la constante de Hammett correspond à une augmentation de l’effet désactivant de la part des substituants. A l’inverse, les propriétés électro-donneur des substituants augmentent la densité électronique globale sur le cycle aromatique. La corrélation entre constante de Hammett et constante cinétique permet, pour une famille de composés, d’obtenir des informations sur le ou les mécanismes mis en jeu. Les tables compilées par Hansch et al. (1991), présentant les constantes élémentaires en fonction de la nature et de la position du substituant considéré, ont été utilisées pour calculer la constante globale + (Σσo,m,p ). Dans le cas évoqué dans cette étude (transfert d’une entité Cl , sur le cycle aromatique), 144 Chapitre IV : Chloramination du résorcinol : Mécanisme et modélisation cinétique

seule l’attaque sur les atomes de carbone en position 2, 4 est envisagée. La constante de Hammett (Σσo,m,p ) est calculée d’après la méthode proposée par Deborde et von Gunten (2008) où les auteurs considèrent que σortho ≈ σpara . La figure IV.40 présente un exemple de calcul pour un dihydroxybenzène substitué et montre que lorsque σortho ≈ σpara alors les constantes de Hammett pour les sites d’attaque les plus probables (A et B) sont équivalentes.

Principaux - - - ΣΣΣΣσΣσΣσ (A)=σσσ (Oσσσ ) + σσσo(OH)σσσ + σσσ (Cl)σσσ O sites d'attaque o,m,po,m,p (A) o= o(O ) + o(OH)m + m(Cl) A Cl A σσσ ≈≈≈ σσσ p o ΣσΣσΣσ ΣσΣσΣσ ΣΣΣo,m,po,m,p(A)=(A)ΣΣΣ o,m,p= (B)o,m,p (B)

B OH - - B ΣΣΣΣσΣσΣσ o,m,p(B)=(B)σσσ =(O σσσp) (O+ σσσ)o(OH) + σσσo(OH) + σσσ +(Cl) σσσm(Cl) o,m,p p m - -OH : σo = -0,37 ; σm = 0,12 -O : σo = -0,81 ; σm = -0,47 -Cl : σo = 0,23 ; σm = 0,37 Figure IV.40. Exemple de calcul de Σσo,m,p pour un dihydroxybenzène. D’après Hansch et al., 1991; Deborde et von Gunten, 2008.

Tableau IV.8. Constantes cinétiques et constantes de Hammett à 25°C tableau IV.8. k k k 1 2 3 forme (OH)(OH) forme (OH)(O -) forme (O -)(O -) Résorcinol -1 -1 ki (M .h ) 207 925 526 Σσo, m,p -0,76 -1,19 -1,62 4-chlororésorcinol (4-MCR) -1 -1 ki (M .h ) 383 1716 171 Σσo,m,p -0,39 -0,82 -1,25 4,6-dichlororésorcinol (4,6-DCR) -1 -1 ki (M .h ) 244 4305 88 Σσo, m,p -0,02 -0,45 -0,88

Les relations entre la constante de Hammett et la constante cinétique de la réaction associée, ont été étudiées pour chacune des formes acido-basiques du résorcinol et de ces dérives chlorés. Le tableau IV.8 présente les valeurs des constantes cinétiques (k i) et des constantes de Hammett ( Σσo,m,p ), les relations entre ces deux paramètres sont explicitées par la figure IV.41. Il apparaît qu’il n’existe pas de relation linéaire globale entre log(k i) et Σσo,m,p . Cependant des relations linéaires sont observées si l’on considère séparément les différentes formes acido-basiques du résorcinol et de ses dérivés chlorés. Ainsi, à l’inverse du mécanisme de substitution électrophile classiquement évoqué lors de la chloration, d’autres mécanismes doivent être mis en jeu lors de la chloramination des 1,3- dihydroxybenzènes.

145 4 DCR(OH)(O -)

3,5 MCR(OH)(O -) )

-1 - .h R(OH)(O ) -1 3 R(O -) 2 MCR(OH) 2

2,5 R(OH) 2 - log (k) (M MCR(O )2 DCR(OH) 2 2 - DCR(O )2 1,5 -2 -1,5 -1 -0,5 0 ΣσΣσΣσ o,m,p

Figure IV.41. Corrélations de Hammett (log k i en fonction de Σσo,m,p ) pour les réactions entre NH 2Cl et le résorcinol et ses dérivés chlorés

Les constantes cinétiques des formes totalement protonées (Ar(OH) 2) apparaissent comme relativement indépendantes de la constante de Hammett, ce qui implique que la réactivité n’est que peu affectée par la charge globale présente sur le cycle aromatique. La pente ( ρ) positive obtenue pour les formes Ar(OH)(O -) met en évidence que la diminution de la charge globale du cycle aromatique favorise la réaction entre le composé organique et la monochloramine. Ce constat implique qu’une réaction de type substitution électrophile est peu probable entre la monochloramine et la forme Ar(OH)(O -). La pente négative observée dans le cas des formes - totalement déprotonées (R(O )2) est typique d’une réaction de type substitution électrophile. Dans le cas du chlore, Deborde et von Gunten (2008) observent une forte influence de la constante de Hammett sur log(k) pour différents anions 1,3-dihydroxybenzènes et anions phénoxides ( ρ = -3,87). Pour la monochloramine, cet effet est plus faible (ρ = -1,03). Ceci indique que l’attaque de la monochloramine sur les dianions 1,3-dihydroxybenzènes est moins sensible à la charge portée par le cycle aromatique que dans le cas du chlore. Ces tendances doivent cependant être confirmées par l’étude la réactivité d’autres composés.

IV.7. Conclusion

La cinétique de chloramination du résorcinol et de ses dérivés chlorés (4-chlororésorcinol et 4,6- dichlororésorcinol) a été étudiée pour des pH compris entre 5,5 et 12, à 23°C. Les solutions de monochloramine ont été préparées avec des rapports molaires ammoniaque-chlore (N/Cl) allant de 1,08 à 31. Les résultats montrent que la vitesse de dégradation du résorcinol diminue lorsque que le rapport N/Cl augmente de 1,08 à 2. Cet effet s’explique car le chlore libre, formé lors de hydrolyse de la monochloramine, participe à l’oxydation des composés organiques. Dans les conditions permettant de minimiser les réactions dues au chlore libre (N/Cl > 2), les constantes de vitesse apparentes de dégradation du résorcinol et de ses dérivés chlorés par la monochloramine présentent un maximum pour des pH compris entre 8,6 et 12. Les constantes de vitesses absolues d’ordre 2 pour les réactions entre la monochloramine et les différentes formes acido-basiques des composés - - dihydroxybenzéniques (Ar(OH) 2, Ar(OH)O et Ar(O )2) peuvent être calculées à partir des

146 Chapitre IV : Chloramination du résorcinol : Mécanisme et modélisation cinétique

constantes apparentes d’ordre 2. Les données montrent que la forme mono-anionique des composés dihydroxybenzéniques (Ar(OH)O -) est la plus réactive vis-à-vis de la monochloramine. Les coefficients stœchiométriques de la formation du 4-chlororésorcinol par chloramination du résorcinol et du 4,6-dichlororésorcinol ont été déterminés, et sont respectivement égaux à 0,66 ± 0,05 et 0,25 ± 0,02 mol/mol.

Un modèle cinétique tenant compte des réactions entre le chlore et la monochloramine avec les différentes formes acido-basiques des composés dihydroxybenzéniques a été développé. Ce modèle permet de simuler les premières étapes de la dégradation du résorcinol et a été utilisé afin d’évaluer la contribution du chlore libre lors de la dégradation du résorcinol aux faibles rapports N/Cl.

147

CONCLUSION GENERALE

Conclusion

CONCLUSION GENERALE

Ce travail a eu pour objectif d’étudier la réactivité de la monochloramine sur des composés phénoliques simples. Nous avons en particulier voulu montrer l’influence de certains paramètres (pH, rapport molaire ammoniaque-chlore (N/Cl) utilisé pour la préparation de NH 2Cl) sur les demandes en monochloramine et sur la formation de chloroforme, d’acides chloroacétiques et de composés organohalogénés totaux adsorbables sur charbon actif (paramètre AOX). Dans le cas du résorcinol, une étude cinétique détaillée a aussi été menée dans le but de déterminer des constantes cinétiques apparentes et absolues de réaction et de modéliser les vitesses de disparition du résorcinol. Afin de définir les conditions optimales de monochloramination des composés organiques, une étude préalable a eu pour objectif d’étudier la stabilité de solutions aqueuses de monochloramine.

Les résultats obtenus dans la première partie de notre étude expérimentale ont montré que les vitesses de décomposition de NH 2Cl à un pH donné (5 < pH <9) peuvent être décrites par une loi cinétique apparente d’ordre 2 par rapport à la concentration en NH 2Cl et que les réactions de + 7 -2 -1 - -2 -1 décomposition sont catalysées par les ions H (k H = 1,6 10 M .h ), H 2PO 4 (k H2PO4 = 581 M .h ) 2- et dans une moindre mesure par les ions HPO 4 . Ce travail a aussi montré que la vitesse de dégradation de la monochloramine à pH basique (pH > 9), rarement évoquée dans la littérature, - résulte de la réaction entre les ions OH et NH 2Cl et est décrite par une loi cinétique d’ordre 1 par -2 -1 -1 rapport à chacun des constituants (k OH = 9,73.10 M .h ).

La décomposition de NH 2Cl est accompagnée de la formation d’ions nitrate (0,007 à 0,033 mole de - NO 3 /mole de NH 2Cl décomposée). Le rendement de formation de l’ion nitrate augmente avec le pH et ne semble pas être modifié par la présence d’ions phosphate. D’autres sous-produits de dégradation tels que l’ion peroxynitrite et un composé stable présentant un spectre d’absorption UV assez similaire à celui de NH 2Cl ont été observés.

Les vitesses expérimentales de décomposition de la monochloramine obtenues dans une large gamme de pH (5 - 14) ont pu être décrites correctement en utilisant le modèle de Valentine. Ce modèle a néanmoins été modifié afin d’incorporer un nouveau jeu de constantes traduisant les réactions de dismutation ainsi que les réactions conduisant à la dégradation de la monochloramine en milieu basique. Le modèle a permis aussi de modéliser la spéciation des chloramines et la variation du pH lors de la décomposition dans les solutions.

L’étude de la réactivité de la monochloramine sur six composés phénoliques simples (phénol, catéchol, résorcinol, hydroquinone, pyrogallol, phloroglucinol) a montré que les demandes en monochloramine peuvent être plus élevées que celles observées lors de la chloration. Pour un rapport molaire N/Cl égal à 2,0 moles/mole et un temps de réaction de 48 h, les demandes en monochloramine (exprimées en mole de monochloramine consommée par mole de composé phénolique initial) s’échelonnent entre 2,7 moles/mole pour le phénol à 10,9 moles/mole pour le phloroglucinol. L’échelle de réactivité suivante a été établie sur le critère de la demande en monochloramine et pourrait être expliquée par le nombre et la position des groupement –OH sur le cycle aromatique : Phénol < Hydroquinone< Catéchol = Pyrogallol < Résorcinol < Phloroglucinol

Les fortes consommations de monochloramine observées avec certains composés phénoliques suggèrent que des sous-produits de chloramination pourraient catalyser l’autodécomposition de la monochloramine. Cette voie de dégradation, analogue à celle observée en absence de composé organique, permettrait aussi d’expliquer les faibles taux d’incorporation de chlore dans les AOX observés (0,05 - 0,15 mmol eq Cl -/mol).

149

La monochloramination des composés phénoliques conduit à des productions totales en acides mono, di et trichloraoacétiques (THAA) variant entre 4,7 et 42,3 mmol équivalent Cl -/mole de composé phénolique (N/Cl égal à 2,0 moles/mole et un temps de réaction de 48 h). L’acide dichloroacétique (DCAA) représente l’acide chloroacétique qui est formé d’une manière très majoritaire avec plus de 90 % de la production totale des acides chloracétiques. L'influence du rapport N/Cl sur le rendement de formation de THAA diffère selon les composés. Tous les précurseurs présentent une augmentation du rendement de formation de l'acide trichloroacétique lorsque le rapport N/Cl diminue.

Lors de la chloramination du résorcinol, les rendements de formation de l’acide trichloracétique après 48 heures de réaction sont de 0,077 à 0,571 mmol/mol pour des rapports N/Cl respectivement égaux à 10 et 1,1 mole/mole. Pour les faibles rapports N/Cl, le chloroforme et l’acide dichloracétique représentent jusqu’à 20 % des AOX, alors que pour des rapports plus élevés, une forte proportion d'AOX (jusqu’à 95 %) n'est pas identifiée.

Des conclusions similaires sont obtenues lors de la chloramination de matières organiques naturelles où les rendements de formation augmentent de 2 µg de CHCl 3 / mg C à 5 µg de CHCl 3 / mg C lorsque le rapport N/Cl passe de 1,1 à 1,0. Compte tenu des conditions mises en œuvre lors de la chloramination des eaux destinées à la consommation humaine (N/Cl proche de 1), la majorité des THM, et probablement du TCAA, formés pourrait provenir de l’attaque du chlore libéré par la monochloramine sur les précurseurs de chloroforme et non de la monochloramine elle-même.

La cinétique de chloramination du résorcinol et de ses dérivés chlorés (4-chlororésorcinol et 4,6- dichlororésorcinol) a été étudiée pour des pH compris entre 5,5 et 12, à 23°C. Les solutions de monochloramine ont été préparées avec des rapports molaires ammoniaque-chlore (N/Cl) allant de 1,08 à 31. Les résultats montrent que la vitesse de dégradation du résorcinol diminue lorsque que le rapport N/Cl augmente de 1,08 à 2. Cet effet s’explique par le fait que le chlore libre, formé lors de hydrolyse de la monochloramine, participe à l’oxydation des composés organiques. L’étude sur l’effet de la température a montré que la vitesse de dégradation du résorcinol est doublée pour une augmentation de 15 degrés environ alors qu’aucun effet significatif de la température n’est observé lors de la chloration. L’énergie d’activation globale de la réaction de chloramination du résorcinol été estimée à 40 kJ.mol -1.

Dans les conditions permettant de minimiser les réactions dues au chlore libre (N/Cl > 2 moles/mole), les constantes de vitesse apparentes de dégradation du résorcinol et de ses dérivés chlorés par la monochloramine présentent un maximum pour des pH compris entre 8,6 et 12. Les constantes de vitesses absolues d’ordre 2 pour les réactions entre la monochloramine et les - différentes formes acido-basiques des composés dihydroxybenzéniques (Ar(OH) 2, Ar(OH)O et - Ar(O )2) peuvent être calculées à partir des constantes apparentes d’ordre 2. Les données montrent que la forme mono-anionique des composés dihydroxybenzéniques (Ar(OH)O -) est la plus réactive vis-à-vis de la monochloramine. Les constantes cinétiques associées à la forme Ar(OH)(O -) pour le résorcinol, le 4-chlororésorcinol et le 4,6-dichlororésorcinol sont respectivement de 927, 1716, 4305 M-1.h -1. Les coefficients stœchiométriques de la formation du 4-chlororésorcinol (par chloramination du résorcinol) et du 4,6-dichlororésorcinol ont été déterminés, et sont respectivement égaux à 0,66 ± 0,05 et 0,25 ± 0,02 mol/mol. D’autres sous-produits ont été identifiés et doivent être pris en compte dans le bilan matière afin d’expliquer la quantité de résorcinol dégradé.

Un modèle cinétique tenant compte des réactions de la monochloramine et du chlore libre (en équilibre avec la monochloramine) avec les différentes formes acido-basiques des composés diphénoliques a été développé. Ce modèle a permis de simuler les premières étapes de la

150 Conclusion dégradation du résorcinol et a été utilisé afin d’évaluer la contribution du chlore libre lors de la dégradation du résorcinol aux faibles rapports N/Cl. Il a ainsi été calculé que près de 50 % du résorcinol est dégradé par l’acide hypochloreux lorsque la chloramination du résorcinol est pratiquée pour un rapport N/Cl = 1,08 mole/mole. Cette contribution chute à 12 % pour N/Cl = 1,12 et est négligeable pour N/Cl > 2 moles/mole. Comme le résorcinol est un très bon précurseur de chloroforme, cette contribution importante du chlore libre aux faibles rapports N/Cl explique ainsi en partie l’influence du rapport N/Cl sur les fortes productions de chloroforme.

L’étude cinétique réalisée avec le résorcinol mérite d’être étendue à d’autres composés organiques car les données bibliographiques concernant les constantes cinétiques de réaction de la monochloramine sur des composés phénoliques simples sont encore trop peu nombreuses. Des études similaires avec la dichloramine seraient aussi intéressantes afin de comparer les réactivités de la monochloramine et de la dichloramine sur des composés organiques simples. Enfin, l’identification de sous-produits d’oxydation de composés phénoliques par la monochloramine et la dichloramine permettrait de préciser les mécanismes réactionnels.

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163

LISTE DES ABREVIATIONS

Liste des Abréviations

LISTE DES PRINCIPALES ABREVIATIONS

AOX Adsorbable Organic Halides C Catéchol (1,2-dihydroxybenzène) CAP Charbon Actif en Poudre COD Carbone Organique Dissous COT Carbone Organique Total DBP (SPD) Disinfection By-Products (Sous-Produit de Désinfection) DCAA Dichloro Acetic Acid DCP Dichlorophénol DCR Dichlororésorcinol DMA Diméthylamine DMC Diméthylcyanamide DMF Diméthylformamide ECD Electron Capture Detector EUP Eau Ultra Pure FDMH Formaldéhyde diméthylhydrazone FMMH Formaldéhyde monométhylhydrazone GC Gas Chromatography H Hydroquinone (1,4-dihydroxybenzène) (T)HAA (Total) Haloacetic Acids HPLC High Pressure Liquid Chromatography HPO Hydrophobe HPOA Hydrophobe Acide LD Limite de Détection LQ Limite de Quantification MCAA Monochloro Acetic Acid MCP Monochlorophénol MCR Monochlororésorcinol MMA Monométhylamine MOD Matière Organique Dissoute MON Matière Organique Naturelle MTBE Méthyl ter-butyl ether NDMA N,N-nitrosodiméthylamine n-PA n-propylamine P Phénol Ph Phloroglucinol (1,3,5-trihydroxybenzène) Pr Produits PTFE Polytétrafluoroéthylène Py Pyrogallol (1,2,3-trihydroxybenzène) R Résorcinol (1,3-dihydroxybenzène) SUVA Specific UV Absorbance TCAA Trichloroacetic Acid TCNM Trichloronitrométhane TCP Trichlorophénol TCR Trichlororésorcinol (T)THM (Total) Trihalomethane TPH Transphilique U Unknown product UDMH Unsymmetrical Dimethyl Hydrazine (1,1-dimethylhydrazine) UDMH-Cl Unsymmetrical Chloro Dimethyl Hydrazine (1,2,2-chlorodimethylhydrazine)

165

NOTE DE L’AUTEUR

En date du 3 novembre 2009, ce travail a fait l’objet des publications et communication suivantes :

- Publications dans des revues spécialisées avec comité de lecture.

Cimetiere, N. and De Laat, J. (2009). Henry's law constant of N,N-dichloromethylamine: Application to the contamination of the atmosphere of indoor swimming pools. Chemosphere, 77 (4), 465.

Cimetiere, N., Dossier-Berne, F., and De Laat, J. Monochloramination of Resorcinol: Mechanism and Kinetic Modeling. Environmental Science & Technology, Article In Press, DOI: 10.1021/es901425n.

- Communications dans des colloques.

Cimetiere, N. , Dossier-Berne, F., et De Laat, J. Modélisation cinétique de la décomposition de la monochloramine en milieu aqueux. 7ème Congrès International GRUTTEE, Pau 2007.

Cimetiere, N. , Dossier-Berne, F., et De Laat, J. Chloramination du résorcinol : Mécanisme et cinétique en milieu aqueux. Journées de la Société Française de Chimie, Limoges 2008.

Cimetiere, N. , Dossier-Berne, F., and De Laat, J. Chloramination of polyphenol. Influence of chloramination pratice upon degradation rate and by-products formation. 11 tH Water Symposium, Cannes 2009.

Cimetiere, N. , Morin, N., Berne, F., et De Laat, J. Chloramination de composés organiques modèles. Influence du rapport N/Cl sur la formation de sous-produits halogénés. 8 ème Congrès International GRUTTEE, Nancy 2009.

Liste des publications en cours de réalisation :

Cimetiere, N., Dossier-Berne, F., and De Laat, J. Chloroform formation from resorcinol chloramination. En préparation (à soumettre pour fin 2009)

Cimetiere, N., Dossier-Berne, F., and De Laat, J. Chloramination of phenolic compounds. En préparation (à soumettre pour 2009- 2010)

Cimetiere, N., Dossier-Berne, F., and De Laat, J. A critical review of chloramine chemistry: Mechanism and Kinetic Modelling. A venir (pour 2010)

RESUME

Cette étude a eu pour but d’étudier la réactivité de la monochloramine sur des composés phénoliques simples en solution aqueuse. Les expériences ont été réalisées à température ambiante, à pH compris entre 5 et 14, et en utilisant des rapports de concentrations Chlorure d’ammonium/Chlore (N/Cl) compris entre 1,08 et 31,2 mol/mol pour la préparation des solutions de monochloramine.

Une étude préliminaire effectuée en absence de composés organiques a permis de proposer un modèle cinétique capable de décrire les cinétiques de décomposition de la monochloramine, dans l’eau ultrapure non tamponnée et tamponnée (tampon phosphates) et de modéliser les évolutions des concentrations en monochloramine, dichloramine et en chlore libre dans une large gamme de valeurs de pH et de rapport N/Cl.

L’étude de la réactivité de la monochloramine sur six composés phénoliques (phénol, catéchol, résorcinol, hydroquinone, pyrogallol et phloroglucinol) et de quelques matières organiques extraites d’eaux naturelles, a permis de déterminer des demandes en monochloramine et de montrer l’influence du rapport N/Cl sur les rendements de formation de chloroforme, d’acides chloroacétiques, de composés organochlorés totaux (AOX) ainsi que sur l'évolution du Carbone Organique Total (COT).

Une étude cinétique détaillée a permis de déterminer les constantes cinétiques absolues de réaction de la monochloramine sur les trois formes acido-basique du résorcinol et de ses premiers sous-produits de réaction. La modélisation cinétique a permis de démontrer que le chlore libre, issu de l’hydrolyse de la monochloramine, contribue d’une manière importante à l’oxydation du résorcinol aux faibles valeurs de rapport N/Cl.

Mots Clé : Monochloramine, demande en oxydant, chlore, résorcinol, modélisation cinétique, sous-produits de désinfection, acides haloacétiques, chloroforme, AOX

ABSTRACT

The reactivity of monochloramine with model phenolic coumpounds in aqueous solution has been investigated. Experiments were carried out at ambient temperature, at pH within 5 to 14, and by using ammonia-to-chlorine ratios (N/Cl) ranging from 1.08 to 31.2 mol/mol for the preparation of monochloramine solutions.

A preliminary study of the autodecomposition of monochloramine in organic-free solutions showed that the rate of decomposition of monochloramine in non-buffered and in phosphate-buffered ultra-pure water could be accurately simulated by a kinetic model. This model could also simulate the concentration-time profiles of monochloramine, dichloramine and free chlorine under a wide range of pH values and N/Cl molar ratios.

The monochloramine demands of six phenolic compounds (phenol, catechol, resorcinol, hydroquinone, pyrogallol and phloroglucinol) and of Natural Organic Matter have been determined at neutral pH. The effects of N/Cl on the yields of formation of chloroform, chloroacetic acids and Total Organochlorinated by- products and on the decay of Total Organic Carbon have been examined.

The absolute second-order rate constants for the reaction of monochloramine with the three protonated forms of resorcinol and chlororesorcinols were determined. Kinetic modeling of the resorcinol/chlorine/chloramines system evolution underlined the key role played by free chlorine (liberated from monochloramine hydrolysis) in the mechanisms of resorcinol degradation at low N/Cl molar ratios.

Key words : Monochloramine, oxidant demand, chlorine, resorcinol, kinetic modeling, disinfection by- products, haloacetic acids, chloroform, AOX.