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ISSN 0291-0233 tempérée ? quelle mortalitéaujourd’hui enFrance Compte rendu de la4 nsmtm ig ? un symptômepiège des familles La diarrhéedunourrisson. ergm niirhiu ? le régimeantidiarrhéique ouéd éyrtto rl :du conceptàlacommercialisation Soluté deréhydratation orale :prévention,éviction La diarrhéeaiguëencrèche irhed eor:ueett pcfqe? :uneentité spécifique Diarrhée duretour oto culsrnsrcmadtos? Doit-on actualiser nosrecommandations e Journée du groupe depédiatriegénérale delaSociétéfrançaise depédiatrie. irheagëd orisn:critèresdegravité Diarrhée aiguëdunourrisson ADOLESCENCE el oioeàl atonéieagë:unevieillehistoire De latoxicoseàgastroentériteaiguë Les médicamentsantidiarrhéiques esnrm éoyiu tuéiu :toujoursl’avoir àl’esprit Le syndromehémolytique eturémique acnto nioaiu :des développementsattendus Vaccination antirotavirus Une campagnerégionale d’informationetd’éducation VOLUME 26 Antibiotiques etdiarrhée aiguëenzone NUMERO 5 Les conseilsàl’officine irheagëd en nat: Diarrhée aiguëdujeuneenfant MAI 2006 adaré iu : La diarrhéeaiguë CAHIER 2 Faut-il bouder 92739 285-299 19/05/06 18:57 Page 286

Cahier 2, volume 26, numéro 5, de Médecine & enfance, revue mensuelle répertoriée dans la banque de données CNRS/PASCAL de l’INIST, éditée par Edition et communication médicales, membre du Syndicat national de la presse médicale et des professions de santé. SARL au capital de 7622,45 euros. 23, rue Saint-Ferdinand, 75017 Paris. Tél. : 01.45.74.44.65. Fax : 01.40.55.94.13. RC Paris B 321 539 447. Revue hors commerce, réservée exclusivement au corps médical. Copyright Edition et communication médicales 2006. Commission paritaire 0407T81720. Directeur de la publication : Claude Geselson. Illustrations : Jacek Przybyszewski. Abonnement annuel : 50 euros. Impression : Corlet, 14110 Condé-sur-Noireau. Dépôt légal : 2e trimestre 2006. 92739 285-299 19/05/06 18:57 Page 287

Médecine & enfance La diarrhée du nourrisson

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La diarrhée aiguë concerne chaque année 200 à 300000 nourrissons. Elle est responsable de plusieurs milliers d’hospitalisations et d’une cinquantaine de décès par an, conséquence d’une déshydratation aiguë qu’une mesure simple est capable de prévenir ou de traiter dès la phase initiale : l’administration à l’enfant d’un soluté de réhydratation orale (SRO). Ce produit doit faire partie de l’armoire à pharmacie familiale. Le recours hospitalier est parfois nécessaire lorsque sont présents des signes de gravité témoignant d’une déshydratation déjà prononcée, encore faut-il ne pas se faire piéger par l’absence de pli cutané (enfant hypertrophique) ou la présence d’un ballonnement abdominal (troisième secteur) masquant la perte de poids réelle. Les vaccins antirotavirus devraient permettre de réduire les diarrhées à et notamment les formes potientiellement les plus sévères. Informer les parents et les pharmaciens, parfois en première ligne pour les conseils, afin qu’ils puissent repérer les signes de gravité et donner rapidement le SRO et pour qu’ils connaîssent les éléments clés de la surveillance est l’objectif majeur du Groupe de pédiatrie générale. La morbidité et la mortalité actuelles de la diarrhée aiguë dans notre pays sont inacceptables car la morbidité pourrait être réduite et la mortalité évitée. B. Chevallier

ment évoluer, notamment en saison De la toxicose à la gastroentérite chaude, vers une diarrhée cholériforme. Le traitement doit alors être « prompt et aiguë : une vieille histoire énergique », fondé sur la diète hydrique ou lactée mitigée : lait stérilisé coupé d’eau de riz, décoction blanche de Sy- Communication de J.P. Dommergues, hôpital de Bicêtre, Le Kremlin-Bicêtre denham additionnée de quelques Rédaction : H. Collignon gouttes de cognac ou de rhum. Cepen- dant, certains auteurs préconisent de li- Comment appréhendait-on la diarrhée cuillères à soupe par jour d’eau de miter le plus possible les boissons ! Si de l’enfant il y a un siècle ? Quel en était chaux. Chez les enfants très jeunes, le l’enfant est très faible, on peut lui don- le traitement ? Le Traité des maladies des lait d’ânesse est considéré comme une ner de temps à autre une petite cuillère enfants (Comby, 1900), dont J.P. Dom- bonne alternative au lait de vache La de champagne ou de malaga, égale- mergues a rapporté quelques extraits, diarrhée verte ou diarrhée infectieuse ment du café, du thé au rhum. Et pour distinguait quatre types de diarrhée est liée au colibacille. L’enfant est prévenir ou combattre le collapsus, les chez l’enfant nourri au lait de vache. « épuisé et desséché » ; il faut lui donner médecins conseillent d’ajouter dans La diarrhée simple dite « lientérie » souvent à boire : du lait coupé d’eau de chaque cuillerée à café d’eau sucrée concerne des enfants nourris avec du riz, d’eau de chaux, d’eau albumineuse. deux gouttes d’éther sulfurique dans de lait pur bouilli donné dans des biberons En cas d’échec, divers autres remèdes la teinture de valériane. Lorsque toutes « passablement nettoyés ». L’enfant pa- sont proposés : acide lactique, acide les boissons sont rejetées par les vomis- raît en bonne santé mais il a souvent la chlorhydrique, élixir de ratanhia, extra- sements, on recourt aux lavements de diarrhée. Le traitement consiste à cou- it de bois de campêche, sous-nitrate de , d’ipéca ou de nitrate d’ar- per le lait de vache au tiers ou au quart bismuth, laudanum de Sydenham, voire gent, voire au lavage d’estomac. La et à donner à l’enfant deux à trois cognac. Cette diarrhée verte peut facile- déshydratation des tissus peut être mai 2006 page 287 92739 285-299 19/05/06 18:57 Page 288

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combattue par des injections sous-cuta- pour l’enfant sevré comme pour le délai diagnostique est augmenté et les nées de sérum artificiel. Les enfants at- nourrisson, et il est conseillé de re- complications sont plus fréquentes. teints de diarrhée infectieuse doivent mettre à plus tard l’usage du vin, du être soigneusement lavés et isolés. Qua- cidre et d’autres boissons fermentées. DIARRHÉE DU RETOUR ? trième type de diarrhée enfin : la diar- En 1928, dans la septième édition de ce rhée du sevrage, qui est favorisée par traité, les auteurs mettent en garde Karim, dix-sept mois, présente au re- un sevrage brutal ou prématuré avant « contre la tendance de faire, à tout pro- tour d’Algérie des selles glairo-san- l’âge de douze-quinze mois. Il est pos, une thérapeutique active et d’ajou- glantes dans un contexte fébrile. A conseillé de remplacer les tétées par du ter à l’intoxication une intoxication mé- l’examen son abdomen est ballonné, lait stérilisé, par des potages compor- dicale. Plus l’enfant est jeune, plus il douloureux mais souple. Le traitement tant du pain grillé, de la biscotte, du ta- faudra se montrer sobre de drogues et associe réhydratation IV et Rocéphine®. pioca…, par des œufs à la coque, des prodigue de conseils et de mesures hy- Dans la nuit, l’enfant vomit et pleure crèmes. Le lait est la meilleure boisson giéniques ». beaucoup. Le lendemain matin, il émet une selle sanglante. Son abdomen est mal dépressible. L’échographie met en évidence une invagination intestinale aiguë, qui sera confirmée par le lave- La diarrhée aiguë : un symptôme ment opaque… mais cet enfant avait également une à salmonelle piège ? authentifiée par la coproculture.

LA DIARRHÉE : Communications de B. Chevallier, hôpital Ambroise-Paré, Boulogne-Billancourt, et P. Foucaud, centre hospitalier de Versailles SYMPTÔME MASQUANT Rédaction : H. Collignon Anaïs, cinq mois, présente une diarrhée Si la diarrhée aiguë du nourrisson est le urinaire témoigne d’une leucocyturie ; il fébrile (38,4 °C) ; elle est grognon, son plus souvent en rapport avec une virose n’y a pas de germe au direct. A l’examen, abdomen est douloureux à la palpation, digestive, elle peut également être révé- il existe une importante défense abdo- ballonné mais souple ; elle a vomi à deux latrice de pathologie diverses, digestives minale. L’échographie montre un abcès reprises. L’échographie abdominale et extradigestives. B. Chevallier et P. appendiculaire mésocœliaque. montre de nombreux gaz. La NFS retrou- Foucaud ont rapporté quelques observa- Alicia, dix ans, présente des selles li- ve 14000 GB, la CRP est à 46, l’iono- tions illustrant ces pièges diagnostiques. quides, des vomissements, des douleurs gramme sanguin est normal. Une perfu- abdominales et une fièvre à 38,5 °C sion de B46 est mise en place. Le lende- dans un contexte familial de gastroenté- main, la fièvre s’est majorée (39,2 °C), DIARRHÉES EN PÉRIODE rite aiguë (GEA). A l’examen, l’abdo- l’enfant pleure beaucoup quand on la ÉPIDÉMIQUE men est ballonné mais souple. Elle est prend dans les bras, la diarrhée persiste. hospitalisée à J2 et perfusée. A J3, elle La ponction lombaire est normale. La Marion, sept mois, est hospitalisée pour présente des douleurs abdominales pa- nuit suivante, Anaïs fait un choc sep- une diarrhée avec vomissements appa- roxystiques. L’échographie montre une tique. Une antibiothérapie est associée rue la veille. Son frère âgé de trois ans a aérocolie diffuse. Le lendemain matin, au remplissage. A l’examen, on note une une gastroentérite depuis trois jours. les douleurs sont majorées, avec vomis- asymétrie de mobilité du membre infé- L’enfant est grognon, elle vomit tout ce sements et fièvre à 38,5 °C. L’examen rieur gauche. La scintigraphie met en qu’elle absorbe. Sa température est à retrouve une défense abdominale im- évidence une arthrite de ce membre. 38,6 °C. La perte de poids est de 6 %. A portante. Le scanner montre un abcès ➜ Cette observation illustre la nécessité l’examen, l’abdomen est ballonné et appendiculaire avec péritonite. d’un examen clinique complet devant douloureux. L’échec de la réhydratation ➜ Leçons et constats à tirer de ces ob- toute diarrhée aiguë, même non fébrile. par voie orale (SRO) conduit à une ré- servations : hydratation IV. A 5 heures du matin, une diarrhée en période épidémique après une nuit mauvaise nuit (fièvre à n’est pas toujours en rapport avec une LA DIARRHÉE : FACTEUR 39 °C, selles liquides), Marion fait un GEA ; DE COMORBIDITÉ choc septique, qui est traité par remplis- l’infection intestinale fait le lit de sage et double antibiothérapie. La ponc- l’appendicite aiguë ; Le médecin de garde reçoit un samedi à tion lombaire est normale. La bandelette lorsque la diarrhée est révélatrice, le 16 h 30 un appel téléphonique de la mai 2006 page 288 92739 285-299 23/05/06 16:27 Page 289

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liquides. On décide de la perfuser et de l’hospitaliser. La NFS est normale. L’io- nogramme sanguin témoigne d’une in- suffisance rénale : Na à 121 mmol/l, K à 7,4 mmol/l (l’ECG montre des ondes T amples), urée à 17 mmol/l, créatinine à 288 µmol/l, RA à 17 mmol/l. L’évolu- tion sous traitement (perfusion supplé- mentée en sodium, sans potassium, rési- ne échangeuse d’ions) est favorable. Il grand-mère de Yann, dix-neuf mois, qui à 3,8 mmol/l. Le diagnostic sera appor- s’agissait d’une insuffisance rénale aiguë présente une diarrhée. L’état de l’enfant té par la mise en évidence de globules (IRA) toxique médicamenteuse liée à six ne semblant pas alarmant, le médecin rouges et de protides sur la bandelette prises d’ibuprofène en quarante-huit de garde décide de passer le voir en fin urinaire et par la présence de schizo- heures, à posologie correcte. A noter d’après-midi. Il trouve alors un enfant cytes (2 %). On apprend que l’enfant a que l’association ibuprofène-IRA est ex- en collapsus, cyanosé, tellement inquié- consommé du steak haché deux jours ceptionnelle (14 cas entre le 1er janvier tant qu’il décide de le transporter dans avant l’apparition de la diarrhée. La co- et le 1er septembre 2004). sa propre voiture à l’hôpital. A l’arrivée proculture sur milieu spécifique mettra ➜ Deux leçons à tirer de cette observa- aux urgences, l’équipe de garde prend en évidence un E. coli 026 (STEC). tion : l’enfant en charge, mais elle n’est pas L’évolution sous traitement (restriction toujours s’enquérir du contenu d’un surprise car elle connaît Yann… qui est hydrique et furosémide) est marquée « traitement symptomatique » ; suivi pour une hyperplasie congénitale par une aggravation de l’insuffisance ré- s’abstenir de prescrire de l’ibuprofène des surrénales. nale, nécessitant un transfert en né- en cas de diarrhée et de vomissements. phrologie, puis par l’apparition de convulsions avec transfert en réanima- UNE DIARRHÉE FÉBRILE tion. L’évolution sera favorable tant sur DIARRHÉE CHEZ HAUTE EN COULEUR le plan rénal que neurologique. UNE ENFANT AU SEIN ➜ Moralité : une insuffisance rénale as- Jeanne, vingt-trois mois, présente le sociée à une diarrhée ne signe pas for- Aminata, cinq mois, est la première en- 18 septembre une fièvre (non mesu- cément une hémoconcentration par fant d’un couple d’origine malienne. El- rée), une selle liquide et une rhinor- déshydratation. le est nourrie exclusivement au sein et a rhée. Le pédiatre consulté le lendemain Le steak haché en boucherie devrait tou- une bonne croissance. Elle présente un diagnostique une gastroentérite aiguë jours être consommé bien cuit et être ré- vomissement et quatre selles liquides fébrile (selon la mère, les selles sont de servé aux enfants de plus de trois ans. dans la journée, sans fièvre ; le médecin couleur rouille, un peu vertes et parfois traitant prescrit un SRO. Le lendemain, noirâtres) et prescrit SRO, lait sans lac- la diarrhée s’aggrave et l’enfant est tose, racécadotril, paracétamol et ibu- FIÈVRE, RHINITE amenée aux urgences. L’histoire est dif- profène. Devant la persistance de la ET DIARRHÉE ficile à reconstituer du fait de pro- diarrhée associée à des vomissements blèmes linguistiques. Aminata est agi- post prandiaux, l’enfant est amenée aux Constance, sept mois, présente le tée, irritable. Elle présente une déshy- urgences le 21. Elle a une fièvre à 28 juillet une fièvre à 40 °C d’apparition dratation modérée. Son abdomen est 38 °C ; elle est grognon et asthénique, brutale et une rhinite, qui font l’objet souple, non ballonné. Les résultats de mais son état général est conservé. L’ab- d’un traitement symptomatique. Le len- l’ionogramme sanguin sont les domen est souple, sensible dans son en- demain apparaissent des vomissements suivants : Na à 154 mmol/l, K à semble. Le reste de l’examen est nor- et des selles liquides. Le médecin trai- 5,1 mmol/l, Cl à 112 mmol/l, RA à mal. Sur l’ionogramme sanguin, le Na tant prescrit un SRO et du dompérido- 19 mmol/l, urée à 5,9 mmol/l, créatini- est à 132 mmol/l, les protides à 57 g/l, ne. Devant la persistance de la diarrhée ne à 32 µmol/l, protidémie à 79 g/l. La la créatinine à 94 µmol/l, l’urée à et des vomissements, Constance est NFS et la CRP sont normales. Il s’agis- 6 mmol/l ; la CRP est à 23 mg/l. Le len- amenée aux urgences le 30 juillet. Sa sait d’une erreur de reconstitution du demain, la diarrhée est glairo-sanglan- température est à 38,3 °C ; elle présente SRO (2 à 3 sachets pour 200 ml). La te. L’hémoglobine est à 9,5 g/dl, les pla- une déshydratation modérée et a une diarrhée virale, banale au départ, s’est quettes à 75000/mm3. Sur l’ionogram- hémodynamique normale. Durant les transformée sous l’effet de ce « traite- me, l’urée est à 14 mmol/l, la créatinine quelques heures d’observation, elle refu- ment » en une diarrhée hyperosmolaire à 129 µmol/l, le Na à 126 mmol/l, le K se le SRO ou le vomit et fait deux selles avec surcharge sodée. mai 2006 page 289 92739 285-299 19/05/06 18:57 Page 290

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nourrisson. En France, la mortalité par Diarrhée aiguë du nourrisson : diarrhée aiguë chez le jeune enfant reste mal définie. On ne dispose dans ce do- critères de gravité maine que d’estimations qui se fondent sur deux sources de données : les certifi- cats de décès, dont un volet est transmis Communication d’A. Martinot, CHRU, Lille, et Université Lille 2 au service commun des causes médi- Rédaction : H. Collignon cales de décès de l’Inserm (CépiDC), et les données nationales du Programme La gravité d’une diarrhée aiguë est liée an, à 4/j après un an, l’absence de prise de médicalisation des systèmes d’infor- soit au symptôme lui-même, qui peut de SRO. mation (PMSI) hospitalier. Les premiers être à l’origine d’une déshydratation et Il est toutefois difficile d’établir un score chiffres publiés à partir des données du d’un choc hypovolémique, soit à sa cau- de gravité sur ces facteurs de risque CépiDC indiquaient 21 décès d’enfants se, susceptible de requérir un traite- dont la capacité discriminante est limi- de moins de cinq ans en 1994, 26 en ment d’urgence spécifique. tée. 1995, avec une sous-estimation très pro- Le diagnostic de déshydratation est cli- Une consultation rapide s’impose si l’en- bable du fait de l’absence de précision nique et repose sur l’association de plu- fant a moins de deux mois, s’il présente concernant la cause sur certaines décla- sieurs signes, la présence d’au moins des signes de déshydratation, s’il a des rations de décès. Toujours à partir de la trois signes étant prédictive d’une diar- selles et/ou des vomissements fré- même source, on recensait 43 décès en rhée avec déshydratation supérieure à quents, s’il présente des signes associés 1997 et 34 en 1999. Dans un article pa- 5 %. Les signes les plus pertinents sont : (fièvre élevée), s’il est porteur d’une ru en 2000 dans la Revue Prescrire [1], il un pli cutané persistant, l’état général de maladie chronique digestive, enfin s’il était fait état, à partir des chiffres du Cé- l’enfant, l’absence de larmes, la sécheres- existe des difficultés de prise en charge piDC, de 45 à 80 décès par an chez les se des muqueuses, les yeux cernés. par la famille. L’appréciation du niveau moins de cinq ans pour la période 1993- Les signes de choc hypovolémique par de compréhension des conseils de sur- 1997, dont 75 % concernaient des en- déshydratation sont : une tachycardie veillance et des indications de consulter fants de moins de un an, soit une fré- supérieure à 180/mn, une polypnée au- de nouveau, ainsi que la capacité de quence de 1/8000 à 1/16000 nais- dessus de 40/mn, des signes cutanés de réaction de la famille (téléphone, possi- sances. Ces chiffres sont ceux actuelle- vasoconstriction, une agitation ; la chu- bilité de se déplacer) sont des éléments ment repris sur le site du ministère de la te tensionnelle est un facteur trop tardif. qu’il est important de prendre en comp- Santé (www.sante.gouv.fr). Un certain nombre de facteurs prédis- te pour la décision d’orientation. Pour En confrontant les données du PMSI (36 posent à la survenue d’une déshydrata- se protéger du risque médico-légal, il décès avec un code GEA en 1997) et tion ultérieure : un âge inférieur à six doit être fait mention dans le dossier de celles du CépiDC pour la même année mois, une fréquence des selles supérieu- l’enfant des conseils de surveillance et (43 certificats de décès avec le code re à 8/j ou à 1/h, une fréquence des vo- des indications de consulter de nouveau GEA), Fourquet et al. [2] n’ont trouvé missements supérieure à 2/j avant un qui ont été donnés aux parents. que 14 cas communs à ces deux sources. L’analyse des données a conduit ces au- teurs à recenser 10 autres décès liés à une GEA compliquée dans les données PMSI et 15 autres dans celles du Cé- Diarrhée aiguë du jeune enfant: quelle piDC. Ils ont ainsi estimé entre 15 et 39 le nombre de décès liés à une GEA, alors mortalité aujourd’hui en France? qu’on aurait pu considérer 39 comme un chiffre minimum, le faible recoupement des deux sources traduisant une sous-es- Communication d’A. Martinot, CHRU, Lille, et Université Lille 2 timation importante de chacune. Rédaction : H. Collignon Si l’on applique à la France le modèle utilisé par le CDC américain, qui tient En France, le nombre de décès par diar- des programmes de réhydratation orale compte du niveau économique du pays, rhée aiguë reste incertain, estimé entre performants, de 4,6 millions de décès en la diarrhée serait impliquée dans 41 dé- 40 et 50 par an, essentiellement chez 1980 à 1,5 million en 2000. Dans les cès d’enfants de moins de cinq ans. Par des nourrissons de moins de un an. pays industrialisés, la diarrhée est consi- extrapolation du taux d’infection à rota- Au niveau mondial, la mortalité par dérée comme la deuxième cause, après virus, on peut estimer à 34 % la part de diarrhée est en nette régression grâce à la mort subite, de décès évitable du ces décès liés au rotavirus, soit 14 décès mai 2006 page 290 92739 285-299 19/05/06 18:57 Page 291

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d’enfants de moins de cinq ans. Les fac- niveau d’étude), l’absence de réhydrata- bactérie ou avec un environnement teurs de risque de mortalité sont : l’âge tion orale. contaminé. La transmission interhumai- inférieur à un an (78 à 85 % des décès), ne est exceptionnelle. Le bilan à prati- [1] « Diarrhée aiguë du nourrisson : la réhydratation orale est es- l’existence d’une comorbidité (prématu- sentielle », Rev. Prescr., 2000 ; 20 : 207 : 448-58. quer en cas de SHU typique comporte : rité, dénutrition, insuffisance rénale, [2] FOURQUET F., DESENCLOS J.C., MAURAGE C. et al. : « Le hémogramme, décompte des schizo- poids médico-économique des gastroentérites aiguës de l’en- grêle court), des facteurs socioculturels fant : l’éclairage du Programme de médicalisation des systèmes cytes et des réticulocytes, ionogramme défavorables (mère jeune, seule, faible d’information », Arch. Pédiatr., 2003 ; 10 : 861-8. sanguin avec créatininémie, haptoglobi- ne, LDH, coproculture (en spécifiant bien suspicion de SHU), complément (C3, C4, CH50), sérothèque, échogra- Le syndrome hémolytique et phie rénale (une diminution de la taille du rein est un marqueur de mauvais pronostic). Le traitement du SHU à la urémique : toujours l’avoir à l’esprit phase aiguë est symptomatique, fondé sur la dialyse péritonéale dans 80 % des cas, la transfusion sanguine, le traite- Communication de P. Cochat, CHU, Lyon ment antihypertenseur, le furosémide à Rédaction : H. Collignon forte dose ; l’alimentation est fonction de l’état digestif ; la plasmaphérèse est La diarrhée est un signe prodromique et du Canada. L’affection survient géné- indiquée en cas d’atteinte neurologique. fréquent du syndrome hémolytique et ralement de façon isolée, parfois par La mortalité est relativement faible, in- urémique (SHU) typique, qui constitue épidémie. Les régions à risque en France férieure à 1 %, essentiellement liée à 90 % des cas de SHU. sont la Franche-Comté et la Bretagne. La une atteinte du SNC. Des séquelles ré- Le syndrome hémolytique et urémique maladie est plus fréquente en été et nales à long terme (protéinurie, HTA, typique est une microangiopathie rénale touche préférentiellement les enfants de insuffisance rénale chronique) survien- liée à une infection par E. coli produc- moins de deux ans (60 % des cas). La nent dans 30 à 40 % des cas. Cette teur de toxines. Son pronostic est relati- majorité (90 %) des SHU typiques est éventualité impose un suivi annuel au vement bon, à la différence de celui du due à une infection STEC (shiga-like moins jusqu’à l’âge de dix-huit ans, avec SHU atypique, qui ne comporte pas de Toxin E. coli), dont le sérotype le plus mesure de la créatininémie et de la diarrhée et qui se caractérise par une fréquemment en cause est le 0157:H7. pression artérielle, et recherche d’une microangiopathie rénale et extrarénale. Parmi les diarrhées à STEC, 3 à 10 % microalbuminurie. La prévention repo- Le début de la maladie est brutal, mar- évoluent vers un SHU. La symptomato- se sur quelques mesures simples : cuis- qué par une asthénie, une pâleur et une logie est très polymorphe, depuis la son suffisante des viandes, abstention oligurie, parfois des convulsions. Sur le diarrhée banale jusqu’à la colite extensi- de lait cru ou de laitages à base de lait plan biologique, il existe une hémolyse ve. La durée moyenne d’incubation est cru avant l’âge de trois ans, lavage des mécanique non auto-immune avec une de trois jours. L’évolution est le plus sou- fruits et des légumes, réchauffement Hb inférieure à 10 g/dl et une présence vent favorable en une semaine. Le dia- systématique des restes alimentaires, des schizocytes à un taux supérieur à gnostic de l’infection repose sur l’isole- lavage des ustensiles de cuisine après 2 %, une thrombopénie (140 G/l) de ment et l’identification des STEC dans contact avec la viande crue, lavage des consommation et une insuffisance réna- les selles, la mise en évidence des shiga- mains avant les repas et après passage le aiguë (créatininémie inférieure à toxines libres et des gènes codant pour aux toilettes. Il faut par ailleurs éviter le 60 µmol/l avant deux ans, supérieure à ces toxines, enfin sur la sérologie. Le contact des enfants de moins de cinq 70 µmol/l après deux ans). L’atteinte ex- principal réservoir du STEC est l’intestin ans avec les bovins et ne pas donner trarénale est exceptionnelle. D’après les de bovin, mais il est également hébergé d’eau non traitée aux enfants (puits, données de l’Institut national de veille par d’autres animaux (daim, mouton, torrent, lac, étang). En cas de GEA, il est sanitaire (Invs) et de la Société de né- chèvre, cheval…). La contamination se prudent d’éviter les lieux de baignade phrologie pédiatrique, on dénombre 70 fait par ingestion d’aliments contaminés publics et de s’abstenir de préparer les à 100 cas de SHU typique par an en consommés crus ou peu cuits : viande repas. Les antibiotiques ne sont pas in- France, soit une incidence annuelle de de bœuf, en particulier hachée, lait ou diqués en cas d’infection intestinale à 0,7 cas pour 1000000 enfants de moins produits laitiers non pasteurisés, jus de STEC, ni les ralentisseurs du transit. Les de quinze ans et de 3,3 cas pour pomme, légumes crus, eau de boisson cas de SHU doivent être notifiés auprès 1000000 enfants âgés de un à deux ans, contaminée. Il peut également s’agir de l’Invs. La déclaration est obligatoire incidence comparable à celle des autres d’une contamination manuportée après en cas de toxi-infection alimentaire col- pays d’Europe de l’ouest, des Etats-Unis contact avec des animaux porteurs de la lective. mai 2006 page 291 92739 285-299 23/05/06 16:29 Page 292

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matique. Quand elle est décidée (46 La diarrhée aiguë en crèche : cas), elle est motivée par l’état de l’en- fant. Enfin, dans 40 crèches sur 42, le prévention, éviction lavage des mains est renforcé en cas de gastroentérite dans l’établissement. Le Conseil supérieur d’hygiène publique de France a réalisé en 2003 un guide Communication d’A. Chaumien, PMI, Paris des conduites à tenir en cas de maladies Rédaction : H. Collignon transmissibles dans une collectivité d’enfants qui répertorie pour chaque af- La gastroentérite aiguë est une patholo- censés entre le 1er septembre et le 15 fection les mesures à prendre et la né- gie fréquente en crèche ; d’après une décembre, dont 72 cas chez des nourris- cessité ou non d’une éviction. Aucune enquête réalisée à Paris, elle touche sons de moins de un an, 140 cas chez éviction systématique n’est préconisée près du quart des enfants, particulière- des enfants de un à deux ans et 58 cas en cas de gastroentérite, excepté pour ment les moins de un an. chez des enfants de deux à trois ans. 29 les gastroentérites à Escherichia coli en- L’enquête réalisée par le service de PMI crèches ont un protocole de prise en térohémorragique et à shigelles, pour de Paris et l’équipe de santé publique de charge de la diarrhée. Dans la plupart lesquelles la réadmission de l’enfant est la faculté Bichat a évalué l’incidence des des crèches (37 sur 42), l’enfant qui a subordonnée à la présentation d’un cer- en crèches collectives et fami- une diarrhée est mis au régime et reçoit tificat attestant deux coprocultures né- liales. L’étude a été menée sur dix mois un SRO. Un traitement médicamenteux gatives à plus de vingt-quatre heures (septembre 2000 à juillet 2001) et a est rarement institué (aucun traitement d’intervalle. La fréquentation de la porté sur un échantillon de 993 enfants dans 38 crèches, Smecta® dans crèche n’est cependant pas souhaitable (sur un total de 160000). Durant cette 4 crèches). L’éviction n’est jamais systé- à la phase aiguë de la maladie. période, 303 cas de gastroentérite ont été recensés (9 % des 3398 épisodes in- fectieux), soit un taux de 23,9 % d’en- fants atteints. La fréquence de la gas- Vaccination antirotavirus: troentérite était de 35,8 % chez les en- fants de moins de un an contre 16,4 % chez les enfants de plus de un an. des développements attendus Un sondage téléphonique a par ailleurs été réalisé en 2005 auprès de 42 crè- ches réparties sur l’ensemble de la Fran- Communication d’E. Grimprel, hôpital d’enfants Armand-Trousseau, Paris ce. Le questionnaire portait sur le Rédaction : H. Collignon nombre de gastroentérites survenues dans l’établissement, l’existence d’un Le rotavirus est le premier agent infec- diarrhée chez les enfants de moins de protocole de conduite à tenir et les me- tieux responsable de diarrhée aiguë cinq ans, de 125000 à 138000 consul- sures de prise en charge et d’éviction chez l’enfant dans le monde. En France, tations en ville, de 10000 à 18000 hos- mises en œuvre. Sur un total de 1947 on estime qu’il est à l’origine chaque an- pitalisations et de 9 à 14 décès [1, 2]. De enfants, 270 cas de diarrhée ont été re- née de 300000 à 500000 épisodes de plus, la coexistence dans notre pays de mai 2006 page 292 92739 285-299 23/05/06 16:29 Page 293

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sur plus de 60000 nourrissons dans dif- férents pays [3, 4]. Les études attestent l’immunogénicité de ces deux vaccins et l’absence d’interférence avec les autres vaccinations. Leur efficacité vis-à-vis des souches prédominantes G1 a été es- timée à plus de 70 % contre toutes les formes de gastroentérite à rotavirus et plusieurs épidémies d’infections hiver- antirotavirus (Rotashield®), vaccin vi- supérieure à 90 % contre les formes sé- nales (bronchiolite, gastroentérite ai- vant réassortant oral couvrant les vères. Une efficacité comparable est guë à rotavirus, grippe) génère durant quatre principaux sérotypes, a été mis suggérée vis-à-vis des autres sérotypes les mois de décembre et janvier un ac- sur le marché aux Etats-Unis en 1998, circulants, mais elle n’est pas formelle- croissement de la demande de soins et après que des études ont démontré son ment démontrée actuellement du fait des dysfonctionnements responsables immunogénicité, son pouvoir de protec- de la rareté des infections avec ces séro- d’un grand nombre d’infections nosoco- tion et sa tolérance. Toutefois, la surve- types au cours des études de phase III. miales. Le rotavirus est ainsi le premier nue durant l’hiver de sa commercialisa- Toutefois, sur le terrain, ces deux vac- agent responsable d’infection nosoco- tion, d’un nombre anormalement élevé cins ont démontré leur impact sur le miale en pédiatrie. Le risque est particu- de cas d’invagination intestinale aiguë, nombre d’hospitalisations et de consul- lièrement élevé pour les jeunes nourris- le plus souvent au décours de la premiè- tations aux urgences pour gastroentéri- sons ainsi que pour les enfants atteints re administration du vaccin, a conduit à te à rotavirus, quel que soit le sérotype de maladie chronique et pour ceux dont son retrait du marché. en cause. Sur le plan de la tolérance, le la durée d’hospitalisation est prolongée. nombre de cas d’invagination intestina- Les mesures de contrôle de ces infec- le aiguë a été équivalent dans le groupe tions nosocomiales ont un impact relati- DEUX VACCINS vaccin et dans le groupe placebo pour vement faible, car leur mise en œuvre EN FIN D’ÉVALUATION chacun des deux vaccins et, surtout, il est difficile en période épidémique dans n’y eut pas, comme cela s’était produit des services surchargés. Ces données Depuis, d’autres vaccins ont été déve- avec le vaccin Rotashield®, de cas sur- sont autant d’arguments en faveur du loppés, et deux vaccins vivants atténués venant dans les jours suivant la premiè- développement d’une prévention de la sont actuellement en fin d’évaluation, re dose. gastroentérite aiguë (GEA) à rotavirus, prêts à être mis sur le marché. Le vaccin Ces deux vaccins apparaissent donc do- notamment par le biais de la vaccina- Rotarix®, développé par les laboratoires tés d’une bonne immunogénicité, d’une tion. L’objectif de cette vaccination sera GlaxoSmithKline, est un vaccin mono- efficacité protectrice très satisfaisante tout d’abord d’obtenir une protection valent humain atténué préparé à partir vis-à-vis des diarrhées sévères à rotavi- proche de celle conférée par l’infection d’une souche de sérotype G1 qui confé- rus de sérotype G1, principal sérotype naturelle. Cette protection n’est que rerait une protection croisée avec les circulant en Europe, et d’une excellente partielle, mais elle s’accroît au gré des autres souches circulantes humaines ; il tolérance. Un certain nombre de points réinfections, limitant ainsi leur gravité. s’administre par voie orale en deux restent toutefois aujourd’hui en sus- La vaccination tendra donc à prévenir, doses. Le vaccin Rotateq®, élaboré par pens. L’efficacité contre les souches de non pas l’infection à rotavirus, mais les les laboratoires Merck (Sanofi Pasteur sérotypes non G1 reste à démontrer. infections sévères et à diminuer la mor- MSD), est un vaccin pentavalent d’origi- Qu’en est-il de l’efficacité pérenne de talité, les hospitalisations et les coûts ne bovine réassortant incorporant les ces vaccins vivants sur d’éventuels va- qui leur sont liés. Ce vaccin devra proté- sérotypes G1, G2, G3, G4 et P1a. Il s’ad- riants ? Le schéma vaccinal idéal est en- ger contre la majorité des sérotypes cir- ministre également par voie orale, en core à définir : nombre de doses, âge de culants de rotavirus (le G1 en tête suivi trois doses. Après les études de phase I la première dose pour optimiser la tolé- des sérotypes G3, G4 et G2), conférer et II permettant de déterminer leur im- rance, durée de la protection en cas de une immunité comparable à celle de munogénicité et leur réactogénicité, ces vaccination précoce, protection confé- l’immunité naturelle et avoir une tolé- deux vaccins ont fait l’objet d’études de rée par un schéma incomplet. La ques- rance acceptable. Le premier vaccin phase III à très grande échelle, portant tion de la protection collective liée au mai 2006 page 293 92739 285-299 19/05/06 18:57 Page 294

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vaccin reste aussi posée, ainsi que celle pseudoparticules virales, vaccins anti- Le remboursement des SRO a été insti- de son efficacité pour des groupes parti- NSP4 ; ils ne seront pas disponibles tué en 2003 pour la prise en charge des culiers : prématurés, sujets atteints de avant plusieurs années. nourrissons et des enfants de moins de maladie chronique digestive… Enfin, le cinq ans atteints de diarrhée aiguë, au [1] FOURQUET F., DESENCLOS J.C., MAURAGE C. et al. : « Le choix de la stratégie vaccinale, univer- poids médico-économique des gastroentérites aiguës de l’en- tarif de 6,20 € les dix sachets. Il est sou- selle, ciblée ou individuelle, sera à défi- fant : l’éclairage du Programme de médicalisation des systèmes mis à une condition de composition (Na d’information », Arch. Pédiatr., 2003 ; 10 : 861-8. nir dans chaque pays en fonction des [2] MELLIEZ H., BOELLE P.Y., BARON S. et al. : « Mortalité, morbi- 50-60 mmol/l, K 20-25 mmol/l, bicar- données épidémiologiques et des dité et coût des infections à rotavirus en France », BEH, 2005, 35. bonates ou citrates 10-20 mmol/l, os- [3] RUIZ-PALACIOS G., PEREZ-SCHAEL I., VELASQUEZ F.R. et études coût-bénéfice. al. : « Safety and efficacy of an attenuated vaccine against severe molarité 200-270 mOsm/l) et de condi- D’autres vaccins sont également en dé- rotavirus gastroenteritis », N. Engl. J. Med., 2006 ; 354 : 11-22. tionnement (au moins dix sachets). Les [4] VESIKARI T., MATSON D.O., DENNEHY P. et al. : « Safety and veloppement : vaccins sous-unités avec efficacy of a pentavalent human-bovine (WC3) reassortant rotavi- spécialités disponibles en France sont protéines recombinantes, vaccins DNA, rus vaccine », N. Engl. J. Med., 2006 ; 354 : 23-33. Adiaril®, Alhydrate®, Fanolyte®, GES 45®, Hydrigoz®, Picolite® et Viatol®. Pour essayer d’améliorer l’acceptation des SRO, des auteurs néerlandais ont testé le jus de pomme ou d’orange. Cet- Soluté de réhydratation orale : te adjonction entraîne une diminution de 20 à 30 mmol/l des apports en Na et du concept à la commercialisation une augmentation de l’osmolarité à plus de 311 mOsm/l [5], rendant le SRO non conforme aux recommandations. Il Communication de D. Turck, hôpital Jeanne-de-Flandre, Lille existe d’autres alternatives, déjà utili- Rédaction : C. Faber sées ou en cours de réflexion, comme l’utilisation de saccharose, pour son Si les solutés de réhydratation orale 250 mOsm/l). Le SRO recommandé par goût sucré, ou d’amidon de riz, qui ré- (SRO) sont utilisés depuis les années 40 l’OMS tient compte des pertes fécales duit le volume des selles mais unique- aux Etats-Unis, les raisons de leur effi- en Na plus élevées au cours des diar- ment dans le choléra [6]. Chez des ado- cacité clinique n’ont été élucidées qu’à rhées aiguës dans les pays en dévelop- lescents et des adultes atteints de cholé- la fin de la décennie suivante grâce à la pement. ra, l’ajout au SRO d’hydrates de carbone connaissance des mécanismes physio- Une méta-analyse de treize études me- résistant à l’hydrolyse de l’amylase pathologiques de la diarrhée. On a alors nées dans des pays industrialisés a mon- (dont l’objectif est d’ajouter les fonc- montré que, quelle que soit la cause de tré que les réhydratations orale et intra- tions d’absorption du côlon à celles du la diarrhée, les capacités d’absorption veineuse ont une efficacité similaire sur grêle) a permis une réhydratation effi- intestinale des électrolytes et de l’eau le volume, la fréquence et la durée de la cace et une réduction significative du sont quasiment toujours conservées, diarrhée, sur le taux et la durée d’hospi- poids des selles par rapport aux SRO grâce à l’absorption couplée du glucose talisation, la prise de poids des nourris- et du sodium qui est préservée en cas de sons et sur la fréquence de l’hypo- ou de lésions même sévères de la muqueuse. l’hypernatrémie [2]. Le taux d’échec était MAUVAISES IDÉES Le premier essai clinique significatif sur faible (3,6 %) et la teneur en Na des Outre l’eau avec de la mélasse et du sel (il y les SRO, réalisé à l’occasion d’une épi- SRO n’avait pas d’influence sur les résul- a 3000 ans), différents types de boissons démie de choléra en Inde en 1971, a tats. On a néanmoins observé, chez le ont été proposés pour la réhydratation ora- mis en évidence une diminution de la rat, un bénéfice à réduire l’osmolarité le dans la diarrhée aiguë : l’eau de riz, la mortalité de 30 à 3 %. En 1987, un édi- des SRO, avec un effet patent sur les ca- soupe de carottes, le jus de coco, les bois- torial du Lancet soulignait le décalage pacités d’absorption de l’eau [3]. Une mé- sons gazeuses à base de cola. Ces boissons entre la simplicité apparente de ce trai- ta-analyse de quinze études sur des en- sont inadaptées à la réhydratation du jeune tement, son coût relativement modeste fants hospitalisés pour déshydratation a nourrisson, en particulier celles à base de et son efficacité majeure. aussi montré que, par rapport aux SRO cola du fait de leur pauvreté en ions (Na : L’analyse des pertes fécales hydroso- de type OMS, l’utilisation d’un SRO hy- 3 mmol/l ; K : 1 mmol/l) et de leur osmola- dées au cours des diarrhées aiguës est à poosmolaire (< 270 mOsm/l) s’accom- rité élevée (environ 500 mOsm/l). L’eau la base des propositions de composition pagne d’une réduction de 39 % de la fré- pure ne contient pas de Na ni de sucre. Il des SRO. Le SRO « idéal » de l’OMS et quence des perfusions IV et d’une dimi- n’y a pas de glucose dans la soupe de ca- celui de l’ESPGHAN [1] diffèrent par le nution de l’incidence des vomissements rottes. Seuls les SRO disponibles en officine taux de Na (90 versus 60 mmol/l) et et du poids des selles, sans augmenta- doivent être utilisés. l’osmolarité (311 versus 200- tion des cas d’hyponatrémie [4]. mai 2006 page 294 92739 285-299 19/05/06 18:57 Page 295

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conventionnels [7]. Chez l’enfant, un Group », J. Pediatr. Gastroenterol. Nutr., 1992 ; 14:113-5. péramide et (conseillés cha- [2] GAVIN N., MERRICK N., DAVIDSON B. : « Efficacy of glucose- SRO contenant de la gomme guar par- based », Pediatrics, 1996 ; 98 : 45-51. cun dans un cas) ; Saccharomyces bou- tiellement hydrolysée s’est accompagné [3] FARTHING M.J. : « Oral rehydration : an evolving solution », J. lardii et Lactobacillus acidophilus LB, d’une réduction significative de la durée Pediatr. Gastroenterol. Nutr., 2002 ; 34 (suppl. 1) : S64-7. disponibles uniquement en capsules à [4] HAHN S., KIM Y., GARNER P. : « Reduced osmolarity oral re- de la diarrhée et d’une diminution du hydration solution for treating dehydration due to diarrhoea in l’époque de l’enquête, une galénique in- débit des selles significative seulement children : systematic review », BMJ, 2001 ; 323 : 81-5. adaptée à un bébé de huit mois. [5] TE LOO D.M., VAN DER GRAAF F., TEN W.T. : « The effect of à partir du septième jour [8]. flavoring oral rehydration solution on its composition and pala- Moins de la moitié des répondeurs Enfin, l’association de probiotiques a tability », J. Pediatr. Gastroenterol. Nutr., 2004 ; 39:545-8. (48,5 %) ont conseillé un SRO. Une [6] FONTAINE O., GORE S.M., PIERCE N.F. : « Rice-based oral fait l’objet, notamment, d’une étude rehydration solution for treating diarrhoea », Cochrane Database boisson inadaptée de type soda ou jus multicentrique de l’ESPGHAN, dans la- Syst. Rev., 2000 ; 2:CD001264. de pomme du commerce a été proposée [7] RAMAKRISHNA B.S., VENKATARAMAN S., SRINIVASAN P. et quelle l’adjonction de Lactobacillus GG al. : « Amylase-resistant starch plus oral rehydration solution for dans 71,3 % des cas. a entraîné une réduction moyenne si- cholera », N. Engl. J. Med., 2000 ; 342 : 308-13. 63,9 % des répondeurs ont conseillé un gnificative de la durée de la diarrhée et [8] ALAM N.H., MEIER R., SCHNEIDER H. et al. : « Partially hydro- lait de substitution et 40 % ont recom- lyzed guar gum-supplemented oral rehydration solution in the une prévalence plus faible de la diar- treatment of acute in children », J. Pediatr. Gastroente- mandé d’arrêter l’alimentation lactée. rhée persistant à sept jours [9]. rol. Nutr., 2000 ; 31 : 503-7. Cette enquête met en évidence le peu [9] GUANDALINI S., PENSABENE L., ZIKRI M.A. et al. : « Lactoba- cillus GG administered in oral rehydration solution to children de connaissances des pharmaciens d’of- [1] « Recommendations for composition of oral rehydration solu- with acute diarrhea : a multicenter European trial », J. Pediatr. ficine dans ce domaine. Le statut des tions for the children of Europe. Report of an ESPGAN Working Gastroenterol. Nutr., 2000 ; 30 : 54-60. SRO au moment de sa réalisation (alors non remboursés) a peut-être participé à leur médiocre place dans cette étude. On peut espérer que leur rembourse- ment a modifié les pratiques, comme le Les conseils à l’officine suggèrent les résultats d’une étude ré- cente dans la même région : l’analyse des données de ventes des SRO pour les en- Communication de M. Lapeyre-Mestre, unité de pharmacoépidémiologie EA3696, faculté de fants de moins de deux ans entre juillet médecine, université Paul-Sabatier, Toulouse 2004 et janvier 2006 en Midi-Pyrénées Rédaction : C. Faber révèle l’existence de pics durant les sai- sons épidémiques. Cette étude montre Une enquête menée en 2001 auprès de nol) et 2,9 % de l’homéopathie. en revanche la persistance d’un « fond » 176 pharmacies de Midi-Pyrénées a En résumé, 77 % des répondeurs ont de prescription du lopéramide, alors qu’il évalué les pratiques de conseils à l’offi- conseillé un produit adéquat dans l’indi- est contre-indiqué chez l’enfant de moins cine dans le cadre d’une diarrhée aiguë cation, avec mention d’une utilisation pé- de deux ans. du nourrisson. 41 % des pharmacies ont diatrique dans les RCP. Cependant, dans LAPEYRE-MESTRE M., PIN M. : « Prise en charge de la diarrhée répondu et 101 questionnaires étaient 19,2 % des cas, le médicament proposé aiguë du nourrisson : enquête sur le conseil pharmaceutique à exploitables. était inadéquat, voire contre-indiqué : lo- l’officine », Arch. Pédiatr., 2004 ; 11 : 898-902. 99 % des répondeurs ont prodigué des conseils hygiénodiététiques, mais peu d’entre eux ont recommandé aux pa- rents d’effectuer une surveillance du poids (15 %) et/ou de la température Faut-il bouder le régime (36 %). 16 % ont conseillé une consul- tation médicale en première intention antidiarrhéique ? et 39 % en seconde intention, en cas de persistance de la diarrhée. Parmi les médicaments, les pansements Communication de M. Bellaïche, hôpital Robert-Debré, Paris digestifs () sont les plus cou- Rédaction : C. Faber ramment conseillés (64,3 %), suivis par les antidiarrhéiques microorganismes La question des modalités de la réalimen- cement (de 4 à 6 h après le début de la (34,6 %). 2 % des répondeurs ont re- tation en cas de diarrhée aiguë a été tran- diarrhée) qu’en cas de réalimentation tar- commandé un autre antidiarrhéique chée pour la première fois en 1997. Une dive (après 20 h ou plus d’arrêt alimentai- (lactoprotéines, lopéramide), 0,9 % un étude multicentrique avait alors montré re), sans différence significative entre les anti-infectieux intestinal (nifuroxazide) que le gain de poids était nettement supé- deux groupes en termes de fréquence des ou un antispasmodique (phlorogluci- rieur chez les enfants réalimentés préco- vomissements et des selles liquides [1]. mai 2006 page 295 92739 285-299 23/05/06 16:28 Page 296

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UN CONSENSUS…

La prise en charge nutritionnelle en cas de diarrhée aiguë avec déshydratation minime à modérée repose sur l’adminis- tration exclusive de SRO à volonté pen- dant quatre heures et une réalimenta- le terme « régime antidiarrhéique » dans une utilisation bénéfique du lait sans tion après ce délai [2, 3]. Chez les nour- les conseils aux parents, en ville comme lactose, qui pourrait donc garder une rissons de plus de quatre mois, il s’agit à l’hôpital. place entre trois et six mois. Enfin, l’al- d’une alimentation diversifiée normale Le hiatus entre les recommandations et laitement maternel reste le « gold stan- et d’une alimentation lactée identique à la pratique pourrait s’expliquer par la dard » de la prévention. celle consommée avant l’épisode diar- conviction des médecins, mais aussi par [1] SANDHU B.K., ISOLAURI E., WALKER-SMITH J.A. et al. : « A rhéique. Chez les bébés plus jeunes sous l’observation sur le terrain de bons ré- multicentre study on behalf of the European Society of Paedia- tric Gastroenterology and Nutrition Working Group on Acute allaitement artificiel exclusif, le risque sultats. Une lecture attentive de la mé- Diarrhoea. Early feeding in childhood gastroenteritis », J. Pedia- d’allergie secondaire et de diarrhées ta-analyse qui a servi de base à la re- tr. Gastroenterol. Nutr., 1997 ; 24 : 522-7. [4] [2] WALKER-SMITH J.A., SANDHU B.K., ISOLAURI E. et al. : postentéritiques peut justifier l’utili- commandation concernant le lait sans « Guidelines prepared by the ESPGAN Working Group on Acute sation d’un hydrolysat poussé de pro- lactose apporte des bémols à ses conclu- Diarrhoea. Recommendations for feeding in childhood gas- téines pendant une à deux semaines. sions [8]. Elle permet de constater que, troenteritis. European Society of Pediatric Gastroenterology and Nutrition », J. Pediatr. Gastroenterol. Nutr., 1997 ; 24 : 619-20. Dans tous les cas, l’allaitement au sein chez les enfants non diversifiés, les [3] BOCQUET A., BRESSON J.L., BRIEND A. et al., Comité de doit être poursuivi, en alternant les échecs de la réalimentation sont deux nutrition de la Société française de pédiatrie : « Traitement nutri- tionnel des diarrhées aiguës du nourrisson et du jeune enfant », prises de SRO et les tétées. fois plus fréquents dans le groupe lait Arch. Pédiatr., 2002 ; 9:610-9. L’utilisation des formules sans lactose normal contenant du lactose, avec une [4] WALKER-SMITH J.A. : « Cow’s milk intolerance as a cause of postenteritis diarrhoea », J. Pediatr. Gastroenterol. Nutr., 1982 ; n’est habituellement pas justifiée. Elle durée de la diarrhée significativement 1:163-73. n’est indiquée que si la diarrhée persiste supérieure (95 versus 82 heures). Une [5] BELLAÏCHE M. : « Prise en charge des gastroentérites aiguës et si les selles ont un pH acide et différence qui disparaît quand les en- du nourrisson en pratique ambulatoire : enquête de prescription auprès de 600 praticiens », Méd. enf., 2000 ; 1:63-6. contiennent plus de 0,5 % de sub- fants sont alimentés avec une nourritu- [6] EVRARD D. et al., Groupe francophone de gastroentérologie stances réductrices. Quant aux prépara- re solide. Il n’y a pas d’études significa- hépatologie et nutrition pédiatriques (GFGHNP), Rouen 10-13 mai 2000. tions à base de soja, leur utilisation ne tives prouvant que le lait sans lactose [7] OLIVES J.P., GAYRAL A.M., ROCHE R. : « Traitement des diar- semble pas logique. Cela reviendrait, en n’a pas d’intérêt chez les nourrissons rhées aiguës de l’enfant en France par les pédiatres et les méde- cins généralistes : ce qui est recommandé… et ce qui est pres- effet, à introduire un allergène supplé- dont l’alimentation n’est pas diversifiée. crit », Nutrition Clinique et Métabolique, 2005 ; 19 (suppl.) : S39. mentaire en période de perméabilité ac- Les résultats observés dans la pratique [8] BROWN K.H., PEERSON J.M., FONTAINE O. : « Use of non- human milks in the dietary management of young children with crue. clinique laissent envisager dans certains acute diarrhea : a meta-analysis of clinical trials », Pediatrics, Les sociétés savantes estiment donc cas (diarrhée prolongée ou récidivante) 1994 ; 93 : 17-27. qu’il n’y a pas lieu d’instituer un régime particulier en cas de diarrhée aiguë. Pour le Comité de nutrition de la Socié- té française de pédiatrie [3], on peut néanmoins conseiller chez l’enfant sans Les médicaments antidiarrhéiques antécédent une alimentation à base de carotte, riz, pomme, coing, banane, pomme de terre, poulet, en évitant les Communication de M. Bellaïche, hôpital Robert-Debré, Paris aliments riches en fibres (légumes Rédaction : C. Faber verts). D’après une étude lilloise, médecins gé- autres critères que sont le nombre et … MAIS néralistes et pédiatres prescrivent vo- l’aspect des selles, et le délai écoulé lontiers un traitement médicamenteux entre le traitement et la première selle Sur le terrain, la prise en charge n’est aux nourrissons atteints de diarrhée ai- normale ne permettent pas de différen- pas si consensuelle, comme en témoi- guë : au moins un médicament chez cier les effets thérapeutiques et sympto- gnent plusieurs enquêtes de prescrip- 94 % des enfants et en moyenne 2,6 par matiques. tion : 36,6 % des médecins préconisent enfant [1]. L’importance des lésions anales déve- un arrêt de l’alimentation pendant six à Pour obtenir une AMM dans la diar- loppées chez certains enfants justifie la douze heures [5] ; de 59 à 63,8 % pres- rhée, un médicament doit entraîner une prescription d’un médicament antidiar- crivent un lait sans lactose [6, 7]. De mê- diminution d’au moins 30 % du débit rhéique, sous réserve de bien expliquer me, on continue à utiliser couramment des selles par rapport au placebo. Les aux parents qu’il ne doit en aucun cas se mai 2006 page 296 92739 285-299 23/05/06 16:28 Page 297

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[1] MARTINOT A., DUMONCEAUX A., GRANDBASTIEN B. et [5] SIMAKACHORN N., PICHAIPAT V., RITHIPORNPAISARN P. al. : « Evaluation du traitement ambulatoire des diarrhées aiguës et al. : « Clinical evaluation of the addition of lyophilized, heat- du nourrisson », Arch. Pédiatr., 1997 ; 4:832-8. killed Lactobacillus acidophilus LB to oral rehydration therapy in [2] SALAZAR-LINDO E., SANTISTEBAN-PONCE J., CHEA-WOO the treatment of acute diarrhea in children », J. Pediatr. Gas- E. et al. : « Racecadotril in the treatment of acute watery diarrhea troenterol. Nutr., 2000 ; 30 : 68-72. in children », N. Engl. J. Med., 2000 ; 343 : 463-7. [6] CUBEDDU L.X., TRUJILLO L.M., TALMACIU I. et al. : « Anti- [3] CEZARD J.P., DUHAMEL J.F., MEYER M. et al. : « Efficacy and emetic activity of ondansetron in acute gastroenteritis », Ali- tolerability of racecadotril in acute diarrhea in children », Gas- ment. Pharmacol. Ther., 1997 ; 11 : 185-91. troenterology, 2001 ; 120 : 799-805. 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Gastroen- acute diarrhea - a community-based, double-blind, controlled ® te (Smecta ), le Lactobacillus acidophi- terol. Nutr., 2001 ; 32 : 71-5. trial », Am. J. Clin. Nutr., 1997 ; 66 : 413-8. lus LB (Lactéol Fort®) et le racécadotril (Tiorfan®), ainsi que le lopéramide (Imodium®) à partir de deux ans. Trois médicaments sont avalisés par le GFGHNP chez le nourrisson de moins Antibiotiques et diarrhée aiguë de deux ans : le racécadotril, un antisé- crétoire qui a prouvé son efficacité au en zone tempérée Pérou [2] mais également en France [3], la diosmectite (agent intraluminal) et le Lactobacillus acidophilus LB (probio- Communication de V. Hentgen, hôpital André-Mignot, Versailles tique), tous trois dotés d’un effet uni- Rédaction : C. Faber quement symptomatique sur la durée de la diarrhée [4, 5]. N’ayant pas d’action Les limites des indications de l’antibio- Pour les autres germes, l’antibiothéra- prouvée sur le débit des selles, la pres- thérapie dans les diarrhées aiguës infec- pie est beaucoup plus controversée. Ses cription de ces deux derniers médica- tieuses de l’enfant s’expliquent par la indications dépendent de la gravité du ments ne peut être que complémentaire fréquence des guérisons spontanées, la tableau clinique. Dans les salmonelles de la réhydratation. A noter que, d’une diminution de la sensibilité des germes dites « mineures », aucune étude contrô- part, les selles peuvent prendre un as- en cause aux antibiotiques utilisables en lée n’a démontré qu’elle diminue la du- pect faussement rassurant sous dios- pédiatrie, le risque de multiplication rée de portage du germe. On ne devrait mectite alors que l’enfant continue à se des germes en cas d’antibiothérapie in- donc traiter que les cas sévères, qui res- déshydrater et que, d’autre part, le Lac- adaptée et celui de portage prolongé en tent toutefois à définir avec précision. téol Fort® est déremboursé. cas de guérison sous traitement sans Faut-il considérer comme tels seule- Par ailleurs, les antiémétiques sont lar- éradication. ment ceux nécessitant une hospitalisa- gement prescrits (65 % des cas [1]), alors En zone tempérée, une antibiothérapie tion ou aller plus loin ? Il est logique de qu’ils sont inefficaces dans les gastroen- systématique est recommandée seule- traiter les enfants de moins de trois térites. La seule étude positive concerne ment dans les diarrhées dues aux shi- mois, les drépanocytaires, les immuno- l’ondansétron IV [6] ! Les parents doivent gelles. Les formes cliniques modérées déprimés. Dans le contexte d’épidémie être informés que les vomissements qui sont traitées par azithromycine à la dose en long séjour ou en crèche, les mesures se prolongent sont la conséquence de la de 50 mg/kg/j sans dépasser 500 mg en d’hygiène sont au premier plan. Si un cétose de jeûne, qui nécessite de resu- une prise pendant trois jours. Dans les traitement antibiotique est nécessaire, il crer l’enfant petit à petit. Quant aux formes sévères, l’antibiothérapie repose faut prendre en considération le risque antiseptiques intestinaux, ils n’ont aucu- sur les céphalosporines de troisième gé- de résistance (ampicilline, chloramphé- ne place dans le traitement des diar- nération (C3G) : ceftriaxone 50 à nicol, cotrimoxazole, tétracycline, rhées bactériennes de l’enfant. 75 mg/kg/j pendant trois jours. L’émer- streptomycine), de résistance de plus en Enfin, des études suggèrent que l’ad- gence de résistances aux fluoroquino- plus fréquente aux C3G (pays nor- jonction de zinc pourrait permettre une lones en Inde, au Népal et au Bangladesh diques, Allemagne…) et de sensibilité réduction du débit des selles, même doit inciter à la prudence. Le Conseil su- diminuée aux fluoroquinolones (Asie, chez les enfants non dénutris, et qu’elle périeur d’hygiène recommande une évic- Asie du Sud-Est). L’antibiotique indiqué aurait, chez les enfants d’âge préscolai- tion de l’enfant malade avec retour dans est la ceftriaxone, 75 à 100 mg/kg/j re, un effet préventif des diarrhées ai- la collectivité après deux coprocultures (maximum 2 g/j) pendant cinq à sept guës virales quel que soit leur statut nu- négatives à au moins vingt-quatre heures jours, avec une adaptation à l’antibio- tritionnel [7, 8]. Ces effets méritent d’être d’intervalle, au moins quarante-huit gramme. Du fait de leur faible contagio- mieux explorés. heures après l’arrêt du traitement. sité, les salmonelloses « mineures » ne mai 2006 page 297 92739 285-299 19/05/06 18:57 Page 298

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nécessitent pas d’éviction dès lors que dans les diarrhées à STEC (Shiga-toxin- shigelle, Campylobacter, Yersinia, E. co- les selles sont normalisées. Producing Escherichia coli), avec un re- li. Dans une enquête parisienne sur les Dans les diarrhées à E. coli, les antibio- tour dans la collectivité après négativité gastroentérites, 29 % des enfants hospi- tiques ont peu d’effet sur la durée des de deux coprocultures à au moins vingt- talisés pour salmonellose revenaient de symptômes chez le non-voyageur. Les ré- quatre heures d’intervalle. voyage. Deux autres diagnostics ne doi- sultats des études concernant l’augmen- La diarrhée à Clostridium difficile, qui, vent pas être oubliés : le paludisme et tation du risque de syndrome hémoly- depuis les années 2000, est à l’origine l’hépatite A. tique et urémique (SHU) sont contradic- d’épidémies communautaires, est un Les diarrhées non fébriles font partie du toires. Une étude récente menée chez cas particulier. Seules les formes tableau du choléra, de la dysenterie des enfants porteurs de shigelle sécrétri- symptomatiques associées à la présen- amibienne et du botulisme. Une diar- ce de shiga-toxine vient contredire les ce de toxine A dans les selles nécessi- rhée persistante sans fièvre doit faire re- données actuelles. Elle montre que l’ad- tent une antibiothérapie par métroni- chercher une infection à Giardia lam- ministration précoce d’un antibiotique dazole, en cure de dix jours à répéter blia (20 % des enfants touchés en zone efficace diminue le risque de SHU. Si le en cas de rechute. C’est aussi le seul d’endémie). Les cas importés de SHU traitement est correct, il y a peu de cas de figure où, pour l’hygiène des existent : ils représentaient 10 % des risque à condition de faire une bonne ré- mains, la solution hydro-alcoolique SHU répertoriés en 1999 en France. Il hydratation. Une éviction est nécessaire n’est pas efficace. n’y a pas de recommandations spéci- fiques sur la prise en charge de la diar- rhée de l’enfant voyageur. La diarrhée du retour ne constitue pas une entité différente des gastroentérites Diarrhée du retour : une entité aiguës autochtones. Elle comporte les mêmes risques de complications vitales, spécifique ? en particulier chez l’enfant de moins de deux ans. C’est le risque d’exposition aux germes (variable selon le pays visité Communication de P. Babe, Fondation Lenval, Nice et la période du voyage), associé à l’ab- Rédaction : C. Faber sence de prise en charge adaptée ou à une prise en charge retardée, qui est dé- Un tiers des Français voyagent avec au Une diarrhée fébrile glairosanglante est terminant. La prévention par l’informa- moins un enfant, la moitié des séjours à l’indication d’une coproculture à la re- tion des parents sur les mesures diété- l’étranger étant effectués dans les pays cherche de germes invasifs : salmonelle, tiques appropriées est essentielle. tropicaux. Environ la moitié des voya- geurs présentent une pathologie au re- tour, une diarrhée dans 13 à 20 % des cas. La littérature comporte peu d’études pédiatriques sur ce sujet. En Une campagne régionale France, on dispose de données obte- nues dans des centres de PMI d’Ile-de- d’information et d’éducation France. Dans les Hauts-de-Seine, sur 322 enfants voyageurs, 54 % avaient des familles présenté une diarrhée, dont 15 % au re- tour, et 13 % ont été hospitalisés. A Pa- ris, sur une série de 181 enfants de Communication de J. Stagnara, pédiatre, Lyon moins de six ans, 29 étaient des voya- Rédaction : C. Faber geurs. Une diarrhée a été notée chez 35 % d’entre eux et 8 % ont été hospita- L’association Courlygones (1), créée en campagne d’information et d’éducation lisés. A la Fondation Lenval, sur 430 2002, a pour projet d’améliorer la prise des familles et des accompagnants d’en- diarrhées aiguës répertoriées aux ur- en charge des urgences pédiatriques fants sur le thème « conduite à tenir de- gences durant un mois, 6 % concer- dans la communauté urbaine de Lyon. vant une diarrhée aiguë de mon naient des enfants voyageurs. 26 Elle a constaté, via des enquêtes locales, enfant ». Cette action s’appuie sur un avaient une diarrhée de retour, due au une médicalisation fréquente et souvent message, diffusé sous forme de plaquet- rotavirus dans 7 % des cas et à une sal- précoce des épidémies de diarrhée ai- te, construit par le groupe thématique monelle dans 15 % des cas. guë. Courlygones a mis en place une en charge de ces pathologies, qui re- mai 2006 page 298 92739 285-299 19/05/06 18:57 Page 299

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groupe des pédiatres, des généralistes, pharmaceutique n’est cité. Le message EN PRATIQUE des médecins hospitaliers, des pharma- rappelle également que la diarrhée est ciens, des infirmières et des usagers. une maladie fréquente et que la déshy- En ce qui concerne l’appel télépho- La plaquette, diffusée nationalement et dratation est une complication grave. nique, on peut retenir comme « bonnes reprise dans le nouveau carnet de santé, Des mesures simples sont données pour questions », celles qui portent sur le contient des messages simples recom- éviter la contagion. rythme et l’abondance des selles, le gei- mandant une consultation sans délai L’évaluation de la campagne est en gnement, le comportement alimentaire pour les nourrissons de moins de douze cours. Selon les informations dispo- et la réactivité, la fièvre, la coloration, mois et, pour les autres, des recomman- nibles, les résultats en terme de notoriété le rythme respiratoire (< 40/mn…), les dations en trois mots : « observez », et d’appropriation sont satisfaisants. symptômes associés, le terrain (âge, « agissez », « surveillez ». Aucun produit (1) www.courlygones.fr ; [email protected]. maladies chroniques…) et, bien sûr, le contexte social et familial. Une hospitalisation s’avère nécessaire en cas de déshydratation sévère ou de Doit-on actualiser déshydratation menaçante. A l’hôpital, il est possible de réhydrater correcte- nos recommandations ? ment avec un SRO si les parents sont présents et si un personnel suffisant est disponible, en particulier la nuit. Les Communication de P. Foucaud, hôpital André-Mignot, Versailles perfusions IV sont trop fréquentes et Rédaction : C. Faber prolongées. Il faut sûrement réinvestir la sonde nasogastrique. Tout au long de cette journée, la diar- peut être grave. Il faut aussi savoir évo- Les SRO devraient figurer en bonne rhée s’est présentée sous deux visages. quer un SHU devant une diarrhée glai- place dans la pharmacie familiale. Pour D’une part, un symptôme banal d’évolu- rosanglante associée à une pâleur im- ce faire, ils doivent être prescrits dès la tion favorable (Dr Jekill) avec deux portante et à une asthénie inhabituelle. maternité ou lors de la première grands axes de traitement que sont la ré- consultation, avec un encouragement à hydratation orale et la réalimentation UN RAPPEL UTILE l’automédication. La diététique doit précoce, et un traitement médicamen- être économe, protocolisée et graduée, teux secondaire. D’autre part, la diarrhée Les signes cliniques de déshydratation, et les antidiarrhéiques peu, mais bien qui peut tuer (Mr Hyde) : c’est l’une des avant le pli cutané, sont la soif vive, prescrits, avec, en première ligne, le ra- principales causes de mort évitable chez l’agitation, la perte de poids brutale et cécadotril, en repérant rapidement les le nourrisson et elle occupe probable- la tachycardie (> 180/mn). La pesée mauvais répondeurs afin d’éviter de ment la deuxième place après la mort su- est importante, mais le poids doit être prolonger un traitement inutile, et pro- bite du nourrisson. Aux Etats-Unis, en interprété avec discernement, comme bablement en deuxième ligne les smec- 1995, 50 % des décès à domicile étaient l’un des éléments de la prise de déci- tites. La coproculture est rarement indi- dus à la diarrhée. En France, on estime sion. Cinq facteurs de risque sont quée (diarrhée glairosanglante, toxi-in- qu’elle est responsable de 40 à 50 décès connus, à savoir l’âge inférieur à six fection alimentaire collective, diarrhée annuels avant l’âge de cinq ans. Dans mois, le pic décembre-mars, la concomi- du retour) et les antibiotiques le sont plus de 80 % des cas, il n’y a pas de re- tance de vomissements, de selles li- parfois. cours aux SRO. A l’heure de la commer- quides fréquentes (une par heure impo- On attend beaucoup de la commercia- cialisation prochaine de vaccins antirota- se une hospitalisation) et d’anorexie, la lisation imminente des vaccins antiro- virus, il est nécessaire de mettre en place sous-estimation (ballonnement, enfant tavirus, en sachant que, dans l’attente un suivi épidémiologique renforcé. pléthorique) et, surtout, l’absence de re- d’un éventuel remboursement, les po- cours aux SRO. pulations à vacciner ainsi que les stra- « Le rêve » serait de disposer d’un score tégies vaccinales restent à définir. En- LES PIÈGES de gravité. Le score idéal reste à fin, l’éducation à la santé est primor- DIAGNOSTIQUES construire. Il ne devra pas inclure le ni- diale. veau d’agressivité thérapeutique, trop Finalement, il n’y a sans doute pas lieu de On ne doit pas étiqueter imprudemment variable d’un établissement à l’autre et, rédiger de nouvelles recommandations, gastroentérite aiguë des vomissements parfois, au sein d’un même service. Les mais il est nécessaire de les ajuster, d’en isolés, même en contexte épidémique. scores actuels ont une valeur indivi- préciser les modalités pratiques et sur- La diarrhée accompagnant un tableau duelle médiocre, même s’ils sont utiles tout de les faire connaître aux pharma- chirurgical est rare, mais la méconnaître pour les études de cohorte. ciens et aux professionnels de santé. mai 2006 page 299