Des Mots… À L’ Œ U V R E
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couvColin2 22/08/09 12:15 Page 1 (2,1) « LA LEXICOTHÈQUE » 3Q4 Jean-Paul Colin DES MOTS… À L’ Œ U V R E Préface d’Alain Rey L a m b e r t - L u c a s L I M O G E S couvColin2 22/08/09 12:15 Page 1 (1,1) Jean-Paul Colin propose ici une approche érudite mais non pédante, à la fois sérieuse et enjouée, d’un corpus de textes où s’effacent les distinctions e n t r e « b o n n e » et « m a u v a i s e » littérature, entre « grands écrivains » et « littérature de gare ». Outillé d’une lexicologie concrète et appliquée, il est allé, en exégète patient et minutieux, des mots à l’œuvre (et inversement), explorant les thématiques et les réseaux lexicaux les plus divers, allant de Robert Desnos à Jean-Paul Sart r e en passant par Alphonse Daudet, Gaston Lero u x , D Boileau-Narcejac, Albert Simonin et quelques autres. Ce livre se destine à tous les liseurs épris de cheminements tantôt logiques et cartésiens, tantôt fantasmatiques et oniriques, voire facétieux, dans l’immense Luna Park des mots, où les attractions donnent le vert i g e ou font peur aux vieux enfants que nous sommes, face à l’éternité des manèges qui tournent sous nos yeux et dans nos têtes, ajoutant à nos expé- riences corporelles la folie inépuisable des mots qui nous habitent et enri- chissent sans cesse notre imaginaire… Agrégé de Lettres classiques et docteur d’État, Jean-Paul Colin a été pro- fesseur des Universités de Tours, Paris X-Nanterre et Besançon. Passionné de mots, de dialectes et de littératures populaires, il est l’auteur de nom- breux ouvrages, parmi lesquels des dictionnaires de langue. Aux Éditions Lambert-Lucas, il a précédemment publié Quand la raison n’a plus raison: Les mots de la bêtise à la folie. 290 pages 29 euros ISSN 1958-0738 ISBN 978-2-35935-000-5 « La Lexicothèque » Collection dirigée par Christine Jacquet-Pfau Jean-Paul Colin DES MOTS… À l’ŒUVRE Préface d’Alain Rey © Lambert-Lucas, Limoges, 2009 ISBN : 978-2-35935-000-5 Collection « La Lexicothèque » ISSN : 1958-0738 DU MÊME AUTEUR PRINCIPAUX OUVRAGES Dictionnaire des difficultés du français, Paris, Tchou, 1971 ; rééd. Paris, Usuels du Robert, 1993 ; édition de poche, 1994. Trésor des mots exotiques, Paris, Belin, 1986. Boileau-Narcejac – Parcours d’une œuvre, Amiens, Encrage, 1999. Expressions familières de Franche-Comté, Paris, Bonneton, 2001. Quand la raison n’a plus raison (Les mots de la bêtise à la folie), Limo- ges, Lambert-Lucas, 2006. Argot et poésie – Essais sur la déviance lexicale, Besançon, Presses de l’Université de Franche-Comté, 2007. TRADUCTIONS DE L’ALLEMAND Un Allemand malgré tout - Ma traversée du siècle, de Rudolf Schottlaen- der, Paris, Honoré Champion, 2003. Un étrange amour - Être Juif en RDA, de Vincent von Wroblewsky, Paris, Honoré Champion, 2005. Un inconnu, récit de Christoph Meckel, Cognac, Éditions Le Temps qu’il fait, 2007. COLLABORATIONS Dictionnaire de l’argot, Paris, Larousse, 1990 ; 2e éd. 1999 ; 3e éd. 2006. Trésors des parlers comtois, Besançon, Cêtre, 1992 ; 3e éd. 2003. e Dictionnaire des œuvres du XX siècle, Paris, Usuels du Robert, 1995. Encyclopédie de Franche-Comté, Paris, Bonneton, 2002. Le Grand Livre de la langue française, Paris, Le Seuil, 2003. Préface et notes pour La Peau du lion, de Charles de Bernard, Jaignes, La Chasse au Snark, 2005. L’auteur remercie vivement les éditeurs et rédacteur(e)s en chef de revues qui ont bien voulu lui accorder l’autorisation de reproduire dans ce recueil les articles, communications, essais divers qui ont été d’abord publiés par leurs soins. De légers remaniements ont été effectués pour harmoniser l’ensemble de l’ouvrage. Les précisions concernant ces originaux figurent en note, au bas de la première page de chaque chapitre. PRÉFACE Jean-Paul Colin nous emmène en balade. Il nous promène « des mots à l’œuvre », tirant des textes leurs pré-textes, faits de signes, les mots, et de la manière de s’en servir. Les mots, en vérité, sont toujours à l’œuvre : c’est le matériel, ce sont les « pierres vives » des architectures du récit. Pour bien lire, et plonger dans ces univers racontés qu’on appelle romans, dans ces évocations du rêve et du réel qu’on nomme poèmes, il faut reconnaî- tre, apprivoiser, aimer ou rejeter ces signes. Jean-Paul Colin a passé sa vie à faire un double parcours : des mots à l’œuvre, en écrivant des livres – souvent livres de mots, alias « dictionnaires » ; des œuvres aux mots, en apportant aux autres ses trésors de lecteur, qui valent mieux que les trésors de guerre. Premier acte, donc : les mots, leurs pouvoirs, leurs secrets, leurs histoires, leurs révélations et leurs pièges. Et nous voilà guidés dans de changeants paysages, dans ces « champs » lexicaux que des « tâcherons inoffensifs » (ainsi le grand Samuel Johnson définissait cette étrange créature, le lexicographe) s’acharnent à cultiver. Dans les champs du lexique, nous voilà conduits aux paysages mouvants de la « modernité », aux rêves nécessaires de la « citoyen- neté » et du « civisme », nous voilà transportés de la stratosphère du ciel académique aux profondeurs de l’argot, en compagnie de Michel Arrivé, linguiste conscient des inconscients, qui nous rappelle que le signifiant a ses lois secrètes. J’aime que des témoins inattendus, comme l’étonnant mathématicien des signes Yves Gentilhomme, soient convoqués pour ce sujet aussi galvaudé qu’essentiel : le discours philosophique et les « philosophèmes ». J’aime encore plus que les lieux communs, telle cette réputation de laxisme des études de lettres, face à la « rigueur » revendiquée des sciences dures et des armatures mathématiques, en prennent plein la gueule – si j’ose transgresser la ligne jaune des registres du discours. Car la langue et ses organisa- 10 DES MOTS… À L’ŒUVRE tions, la littérature et ses productions peuvent être rigoureuses, bien plus que les intuitions mathématiques ou que les apparences formu- laires et strictes de l’informatique. Armé du paradoxe des mots et des jeux textuels que nous goûtons chez Queneau ou Perec, Jean-Paul Colin bouscule les idées reçues, bien tranquillement, car il suffit de considérer la complexité du réel, dont le langage fait partie, pour que ces idées que Flaubert ridiculisait sans effort – il suffit de les exprimer pour qu’elles s’effondrent – manifestent leur absurdité. Un bel exemple de paradoxe créateur, suscité par les virtualités multiples du MOT, est celui que véhicule cet objet faussement strict et rigoureux, le dictionnaire. Or, comme le montre ici Jean-Paul Colin, la rencontre du poétique, voire du lyrique, avec la rigueur descriptive est le quotidien du dictionnaire de langue, par l’entremise de ce transfert textuel – quasiment trans-diction – qu’est la « citation ». En décrivant l’interaction entre ces phrases déplacées, découpées, recadrées et les « entrées » du dictionnaire qu’elles sont censées mettre « en œuvre », notre guide manifeste que ce livre qu’on croit sec et pédant peut créer à partir des fragments qu’il manipule une sorte d’épopée des mots au-dessus des textes, et un super-texte, une hyper-littérature à consommer comme une œuvre nouvelle. Dans une large mesure, Montaigne avait génialement montré la voie dans les Essais, par ce qu’Antoine Compagnon appelait « la seconde main ». La citation littéraire comme assomption du dictionnaire ménage dans ce recueil le passage du mot-à-l’œuvre vers l’œuvre-en-mots. Et nous voici au second acte, le plus généreux, de cette double dé- tente : les textes et leurs mystères, cachés, justement, au sein des phrases, par ce deus ex machina, le lexique (la machine, ce serait la grammaire). Décrypteur intrépide et gai, Jean-Paul Colin nous entraîne dans son propre parcours de promeneur littéraire. Et d’entrée de jeu, comme on dit, il nous rappelle que seul le pédantisme institutionnel crée ces frontières et ces ghettos qu’on appelle savamment « para-, péri-, infra-… littérature », comme s’il n’y avait pas deux très sim- ples catégories littéraires, la bonne et la mauvaise, pour orienter ce « vice impuni » (Larbaud), mais ce plaisir à partager qu’est la lec- ture. Tout lecteur passionné, enfant ou adulte, savant ou ignorant, est comme la petite Alice de Lewis Carroll : en arrêt devant le miroir qu’il faut traverser pour entrer au pays des merveilles – et des ef- frois. La meilleure « critique » est celle du plaisir et du bonheur d’accéder à ces univers inépuisables, les bons livres. Le professeur Colin sait s’en remettre aux émotions premières, lorsque nous, les PRÉFACE 11 vieux, étions enfants et nous plongions dans les aventures de Roule- tabille ou d’Arsène Lupin. Nul doute que les goûts de notre auteur furent depuis longtemps comme « polarisés » (on ne parlait pas encore de polars, d’ailleurs). Ce qui n’empêcha pas Jean-Paul de lire et d’aimer un écrivain qui avait le même prénom que lui et qui fut un phare de la pensée française : j’ai nommé Sartre, Jean-Paul, grand dénonciateur de ce personnage qui nous assiège : le salaud, dont il a fait un symbole. Les salauds, un grand poète, Desnos, Robert, savait les assaisonner, et Colin, avec délectation, nous introduit dans l’univers poétique et violent des « gros mots » de Desnos. Car aimer la prétendue « sous-littérature » n’empêche nullement de jouer le jeu savant, un peu usé, mais ici tout ragaillardi, du « thème littéraire ». Ici, l’objet est un écrivain trop oublié, mais qu’on finira bien par redécouvrir, au-delà de la chèvre de Monsieur Seguin et du savoureux Tartarin : Alphonse Daudet, bien sûr.