Camille PISSARRO : L'hiver a MONTFOUCAULT
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Camille PISSARRO : L'HIVER A MONTFOUCAULT La neige a revêtu de son manteau de silence les champs de Montfoucault. Une aubaine pour Pissarro, qui peut travailler à en saisir chaque nuance, chaque reflet, dans la ligne de son maître Millet... Les années1875-1876 représentent pour Pissarro une époque de grande misère. Humilié par l'échec de la Première Exposition impressionniste, en 1874, il a eu la désagréable surprise de voir Durand-Ruel suspendre son aide à ses amis. Seuls quelques marchands, comme le père Tanguy, tentent de vendre un ou deux tableaux à de rares amateurs. L'HOMME «Humble et colossal». On connaît le mot de Cézanne, fondateur de l'art moderne, à l'égard de Pissarro, l'un des pionniers de l'impressionnisme, «humble et colossal». Le premier adjectif s'applique à l'artiste, le second à l'œuvre. Impressionniste, Pissarro l'est indéniablement plus que Manet, dont l'audace des sujets ne doit pas masquer le classicisme de la touche, que Degas, qui répugne au plein air, et même que Renoir... qui finit par ne plus représenter que Renoir. D'origine juive par son père, Camille Pissarro naît à Saint Thomas, dans les Antilles danoises, et monte à Paris à l'âge de 11 ans. A la pension Savary où il étudie, on donne des leçons de dessin «d'après nature», ce qui va peut-être décider de sa vocation. Après avoir brièvement embrassé la carrière commerciale de son père, il s'enfuit avec le peintre danois Fritz Melbye (1852), se rend au Venezuela, avant d'entrer, en 1855, dans l'atelier de Melbye. Il se lie avec Corot et Courbet. Mais c'est Claude Monet qui a sur lui l'influence décisive. Plus chanceux que certains futurs grands noms, il voit accepter plusieurs de ses œuvres au Salon officiel (1859-1870). Au Salon des refusés, d'autres tableaux sont bien accueillis par la critique. Il travaille successivement chez son ami Ludovic Piette, à Montfoucault (1864), puis à Pontoise (1866), enfin à Louveciennes (1868-1870). Durant la guerre franco-allemande, il habite Londres, comme Monet. Son style, jusqu'alors proche de Daubigny, évolue peu à peu vers ce qu'on va bientôt appeler l'impressionnisme. Entre 1871 et 1884, Pissarro passe volontiers de Louveciennes à Pontoise, à Montmartre ou à Auvers-sur-Oise. Il multiplie ses contacts avec Vignon, Cézanne, Seurat (1885). Sous l'influence de ce dernier, il évolue tout naturellement vers une forme de néo- impressionnisme, à touches pointillistes. Mais (vers 1888-1890), il revient à ses premières amours: «Je n'étais pas fait pour cet art qui me donne la sensation du nivellement de la mort.» Le paysage, urbain ou campagnard, tout comme la femme habillée jouent un grand rôle dans son œuvre, qu'il s'agisse de toiles, de dessins, d'aquarelles ou d'eaux-fortes. Pissarro est unanimement respecté et admiré pour son approche pleine de tact de la nature, mais aussi des boulevards ou des ponts parisiens. Il laisse le souvenir d'un artiste au lyrisme merveilleux et d'un homme humble, rempli d'humanité, avec une pointe d'anarchisme. Il a été le premier à encourager des artistes de premier plan, comme Cézanne et Gauguin. Toutes ces qualités transparaissent dans sa correspondance avec son fils Lucien, publiée en 1943. LE CONTEXTE Peu après son arrivée en France — il venait de son île natale des Antilles danoises —, Pissarro avait fait la connaissance du peintre Ludovic Piette, dont il devint l'ami. Piette, qui jouissait d'une grande fortune, possédait plusieurs propriétés, dont un ensemble de fermes à Montfoucault, près du village de Melleray, dans la Mayenne. Pissarro y emmena toute sa famille passer l'hiver 1 875 1876 et y fit plusieurs autres séjours jusqu'à la mort de Piette, en 1878. LE LIEU Outre la possibilité qu'offrait le domaine de Montfoucault de se nourrir gratuitement, il donnait aussi au peintre l'occasion d'étudier de près la vie rurale. De plus, la campagne mayennaise était très différente de celle de Pontoise ou de Louveciennes, que connaissait Pissarro. Un paysage morcelé, avec des fermes isolées, possédant chacune leurs champs, leurs haies, leurs étangs, permit à l'artiste de réaliser de remarquables toiles, caractérisées par une large facture et une très belle palette. Durant cet hiver 1875, il peignit quatorze tableaux. LA COTE Pour une huile sur toile de cette période, il faut compter entre 2 et 3 millions de francs français (de 360000 à 545000 dollars). Berger à Montfoucault, soleil couchant, datant de 1876, a trouvé preneur à Londres en 1993 pour 2,7 millions de francs français (490000 dollars). Mais on peut se procurer une eau-forte pour 5 000 FF (900 dollars). Camille PISSARRO 1830-1903 • L'Hiver à Montfoucault (Effet de neige) • Huile sur toile 114 cm x 110 cm • Signé et daté en bas, à gauche, «C. Pissarro 1875» • Peint en 1875 • Localisation : collection particulière • Expositions : Paris, 1904, 1912, 1914, 1930 ; Londres, 1934 L'OEUVRE Cette toile fut commandée par Alfred Nunès en même temps que L'Automne (Étang à Montfoucault). Il s'agit de tableaux de grandes dimensions — ils dépassent le mètre carré — témoignant de l'influence de Millet, à qui Pissarro vouait une immense admiration. Ici, la composition est audacieuse: un arbre blanchi par la neige, semblant surgir du talus au premier plan, barre de sa masse la toile en son milieu. Derrière, une succession de plans donnent l'effet de perspective, tandis que quelques silhouettes animales et une paysanne colorent de leur présence un paysage dont on croit percevoir le silence qui s'est abattu sur lui... Powered by TCPDF (www.tcpdf.org) 1 / 1.