Romantique À Mourir
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* i ç /T\ niflGi e,4 u \ ( 3 \i f Vv VIVIANE ROMANCE 'q O IN f %W 0 9 t ,, i ' 1 e VERTIGES DU NORD/CARRERE Je dédie cette biographie à Madame Jane Rouch. Sans son amitié, sa ténacité et un don étonnant pour plonger au plus profond des êtres et des choses, je n'aurais pas osé l'écrire. @ Copyright novembre 1986 - Vertiges du Nord/Carrere Tous droits réservés, y compris l'U.R.S.S. Direction technique : 9 bis, rue Montenotte 75017 Paris Siège social : 27, rue de Surène, 75008 Paris La loi du 11 mars 1957 n'autorisant, aux termes des alinéas 2 et 3 de l'article 41, d'une part, que les « copies ou reproductions strictement réservées à l'usage privé du copiste et non destinées à une utilisation collective » et, d'autre part, que les analyses et les courtes citations dans un but d'exemple et d'illustration. «Toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle, faite sans le consentement de l'auteur ou de l'éditeur, ou de leurs ayants droit ou ayants cause est illicite » (alinéa premier de l'article 40). Cette représentation ou reproduction par quelque procédé que ce soit constituerait donc une contrefaçon sanctionnée par les articles 425 et suivants du Code pénal. ISBN 2-86804-348-8 AVANT-PROPOS Qui suis je ? Question difficile mais pourtant essentielle pour moi comme pour vous. Dans ce livre, je tente d'y répondre, avec des mots à moi, des mots simples et vrais, des mots de tous les jours. Car, bien sûr, je ne suis pas une « femme de lettres ». J'écris comme je parle. Puristes, soyez indulgents, s'il vous plaît. Accordez-moi seulement le bénéfice de la sincérité la plus totale : celle du cœur. Donc, qui suis je ? ou plutôt, qui ne suis-je pas ? Je suis le contraire de celle que des centaines d'articles parus dans- des centaines de journaux ont popularisée, car la facilité — celle qui s'appuie sur les apparences et les légendes — engendre forcément des monstres. Le processus est classique : au premier rôle important, on vous « marque » ; toute la Presse suit. Qui aurait l'idée de me présenter autrement, en effet, que comme la belle garce de « La Belle Equipe )> ? Les traîtres de cinéma, pour une certaine presse et un public non averti, ne peuvent, dans la vie, être de braves garçons. Conclusion : la vamp briseuse de ménage à l'écran poursuit allègrement ses ravages après le dap de fin. C'est au nom de cette déviation mortelle de la réalité, que je récuse violemment la quasi totalité de ce qui a été écrit jusqu'ici à mon propos. Mais ce pilonnage terrifiant de ma personna- lité pendant tant d'années m'a profondément bouleversée. Ecartelée entre de profondes contradictions, j'ai dû lutter contre certaines for- mes de névroses, car je suis androgyne, forte comme un homme pour beaucoup de choses, et d'une immense faiblesse, particulièrement dans le domaine sentimental : amour, amitié. Bonne, mais il ne faut pas me manquer. Alors, je deviens irréductible ! Et si l'on me contre gravement, je peux me montrer redoutable, capable d'employer tou- buts.tes les ruses ! Idéaliste, mais aussi très réaliste pour atteindre mes On a dit de moi : « C'est une femme d'affaires ». Non : j'attrape le rêve, j'en fais des réalités, mais toujours au service de buts élevés : beauté, amour, qui seront mes règles de vie. Tenace d'une façon incroyable, je peux, si je le juge nécessaire pour mon équilibre, rejeter d'un coup, en quelques instants, ce que j'aurai mis des années à édifier, sans une seconde de regret. Passionnée, explosive, il faut que mes buts soient atteints en un temps minimum. Sauvage aussi : un goût très fort pour la solitude, le contact avec la nature, qui m'assure la liberté. Je crois en la nécessité absolue d'une grande rigueur : les faux humanismes m'horripilent ! DIEU ET LE DIABLE AUTOUR DE MON BERCEAU Ma mère s'exila au nord de la France pour me mettre au monde. Je ne fus pas baptisée. Il y avait une raison majeure à ce fait particuliè- rement insolite : le mariage légal de ma mère ne se fit qu'après ma naissance. Aux yeux d'une famille qui était de pur cristal, il y avait là une énorme faute : j'étais l'enfant du péché, et je devais être traitée comme telle. MES ORIGINES Là encore : les sables mouvants. De partout et de nulle part : mes père et mère sont Français, certes, mais il paraîtrait que les Ortmans seraient originaires du Danemark, ayant transité par la Belgique vers la France. Mon grand-père paternel fut premier peintre paysagiste de Napoléon m. Il faisait partie de la bande de Barbizon. Elève de Rousseau, il n'a peint que la forêt de Fontainebleau. Son oeuvre maî- tresse : l'arbre fameux, ce tableau exposé, paraît-il à la National Gal- lery à Londres. D'autres tableaux se trouvent en Belgique et dans certains musées de Province. Il avait enfoui dans un tiroir ses titres de noblesse pour sacrifier sans doute aussi au progressisme de l'heure. Milieu oblige. Nous sommes alliés aux grandes familles de France, les De Sénéchal, De Rossilis, De Vitray. Du côté de ma mère, nous sommes Italiens et Polonais d'origine. L'Italie : un ancêtre vénitien, magistrat, aurait eu la malencontreuse idée de faire un procès à son gouvernement. En ce temps-là, ce genre de plaisanterie se réglait au coin d'une rue ou dans les eaux du canal. Il n'eut que le temps de fuir, transformant son nom Chervioz en Char- piot, à son arrivée en Franche-Comté. Mais où je me retrouve totalement, c'est à travers ma grand-mère, la Polonaise. Encore un mystère ! Comment être née à la fois Com- tesse de Royeck de Dombrowska — le Napoléon du au — et, cepen- dant, Jacowski ? Envoyée chez des parents à Berne à l'âge de la puberté, elle vint jusqu'à Lyon, rencontra mon grand-père ; un amour fou, huit enfants. Rupture complète avec la branche suisse pour cause de mésalliance car grand-père était protestant L'ancêtre vénitien avait dû, fort pro- bablement, abandonner le catholicisme. Avec Berta Jacowski, une similitude profonde dans le caractère — toute tendresse, mais fer et feu si l'on réveille les démons. A l'époque, on élevait les enfants, et s'il le fallait, à coups de fouets. Il semble bien que — elle et moi, ou elle et je — soyons issues de cette branche. Elle étant Viviane, moi Pauline. Aux heures d'angoisses face à cette dualité qui m'habite, je me demanderai : suis-je folle ? Un psychanaliste qui me soignera un temps conclura : « Non, mais vous êtes mystique, ne l'oubliez jamais ». Comment ne pas l'être ? Je « revois » chez mes grands-parents, au culte du soir, la lecture de la Bible. Ah ! que de fous rires impossibles à réprimer entre moi et la tante Yvonne — la vieille fille de la famille laissée pour compte — ses frères et sœurs s'étant tous égaillés à travers le monde. Elle trouvait là matière à se défouler, nous obser- vant, fascinée, derrière nos mains jointes, celles du grand-père ryth- mant ses prières d'un geste mécanique. Rien ne pouvait nous calmer, pas même les regards indignés de grand-mère, outrée par notre atti- tude non conforme ; grand-père, avec sa belle tête de vieux lion levée au ciel, poursuivait son homélie, totalement absorbé en une ferveur exemplaire. Cette bonne graine devait porter ses fruits, m'inculquant, malgré moi, la notion des deux routes proposées à l'homme : la bonne ou la mauvaise. Ma mère était une lunaire, mon père un jouisseur. Je fis les frais de ce naufrage. Placée en nourrice, c'est la misère noire. Je meurs de faim. Je vole le lait des biberons des bébés dans leur berceau... J'avais entre deux et trois ans. Cette femelle-nourrice reniflait que « la petite Pauline était d'une espèce humaine en marge ». Sortant de là, placée en pension d'emblée, je fus la tête forte, à mater coûte que coûte. Pensez donc ! Je refusais d'appeler la Direc- trice « maman », alors que l'on venait de m'arracher des bras de la mienne et que je hurlais de désespoir. J'allais voir de quel bois on se chauffait ! Dès ce moment, tout fut prétexte à me punir. Ce qui devait procurer à cette marâtre un indicible plaisir, était la punition majeure : attachant la rebelle dans la salle des toilettes, nue et, bien entendu devant tout le monde pour l'exemple, elle aspergeait la récalcitrante en plein visage, à l'aide d'un siphon, de façon à lui faire perdre le souffle. Elle ne s'arrêtait que lorsque j'étais au bord de l'évanouissement, puis, allez donc ! roulée dans une couverture, au grenier sur le plancher, sans manger. On attendait ma reddition que jamais cette horrible femme ne devait entendre. A une énième séance, j'attrapais une double pneumonie, une otite, et, pour faire bon poids, la rougeole. Ma mère comprit enfin que mes plaintes étaient justifiées ; elle m'arracha de justesse à cet enfer, et me ramena à Paris. Que faire ? Elle tenta un regroupement familial. J'avais deux demi- frères issus du premier mariage de mon père, dont la femme était morte de tuberculose. L'un des deux était faible d'esprit, mais doux, merveilleusement beau, possédé par une idée fixe : les gares, en par- ticulier les locomotives, qu'il dessinait admirablement. Mon père avait 25 ans de plus que ma mère ; militaire de carrière en retraite, il travaillait dans des compagnies d'assurances.