Linné À Travers La Philatélie(*)
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145 Bull. Soc. Pharm. Bordeaux, 2008, 147, 145-180 LINNÉ À TRAVERS LA PHILATÉLIE (*) Étienne JOUZIER (1), Jean-Pierre LABOUYRIE (1), Alain BADOC (2) INTRODUCTION L’année 2007 a marqué le tricentenaire de la naissance de Linné. Partout dans le monde, cet événement a été fêté par de nombreux ouvrages, conférences, articles sur le Web [16-17,etc.]. Nous allons à travers la philatélie, abordée de manière rapide par quelques auteurs [4,10-11], envisager la vie, l’œuvre de Linné et de ses disciples. VIE DE LINNÉ Carl Linnaeus est né le 23 mai 1707 à Räshult, un petit village du Smäland au sud de la Suède. Son père est alors vicaire et deviendra pasteur luthérien. Il avait trois sœurs et un frère qui succéda à son père à la tête de la paroisse de Stenbrohult. À cinq ans, Linné dispose d’un petit jardin et des conseils avisés de son père. Dès huit ans, il était surnommé le petit botaniste par ses camarades. À 18 ans, il rédige son premier manuscrit, le Livre des herbes et s’intéresse plus à la nature qu’à la théologie et aux études. Son professeur de physique, Johan Stensson Rothman (1684-1763) l’encouragea (*) Conférences du 24 janvier et 27 mars 2008. (1) Laboratoire de Biochimie fondamentale et clinique, Faculté des Sciences pharmaceutiques, Université Victor Segalen Bordeaux 2, 146, rue Léo-Saignat, 33076 Bordeaux Cedex. [email protected] (2) Laboratoire de Sciences végétales, Mycologie et Biotechnologie, GESVAB – EA 3675, UFR Pharmacie, Université Victor Segalen Bordeaux 2, ISVV, 210, Chemin de Leysotte, CS 50008, 33882 Villenave-d’Ornon. [email protected] 146 à la botanique au lycée de Växjö et favorisa son entrée à l’Université de Lund en 1727. Pensionnaire chez le docteur Kilian Stobæus (1690-1742), ce dernier l’aide à réaliser son premier herbier et lui donne accès à sa bibliothèque et ses collections de coquillages et minéraux. Bloc Suède à l’occasion du tricentenaire de sa naissance Sur les conseils de Johan Stensson Rothman, Linné intègre en 1728 la grande université d’Uppsala où il reste sept années. Linné vit alors dans une grande pauvreté et récupère les vieux souliers de ses camarades, qu'il raccommode avec du carton. Sa chambre d’étudiant est envahie de pierres, d’oiseaux, de coquillages, d’insectes, de poteries avec des plantes rares. Il se lit d’amitié avec Peter Artedi (1705-1735), passionné d’ichtyologie, à qui il attribuera le genre Artedia, de la famille des Apiacées. Il est aidé par le Professeur Olaus (= Olof) Celsius (1670-1756), à qui il attribuera en reconnaissance le genre Celsia de la famille des Scrofulariacées. Ce dernier le présente au médecin naturaliste Olof Rudbeck le Jeune (1660-1740) un des premiers explorateurs de la Laponie qui lui fait faire des démonstrations au Jardin botanique et le prend comme précepteur. Linné lui dédiera le genre Rudbeckia de la famille des Astéracées. 147 Rudbeckia gloriosa Rudbeckia purpurea Linné entreprend à 25 ans, subventionné par la Société de Sciences d’Uppsala, un voyage d’études de 5 mois en Laponie, qui était sous la couronne suédoise. À cette époque, la Laponie est une contrée difficile d’accès et le voyage n’est pas dénué de dangers, même pendant les mois les plus chauds de l’année. Linné ne parcourt pas moins de 5000 km, à pied, en barque, dans des conditions parfois difficiles et manque de peu de périr dans une rivière. Il ne se départ pas de son carnet de route sur lequel il note ses herborisations et réalise quelques croquis de piètre qualité, prémisses de sa Flora lapponica publiée cinq années plus tard. Linné s’intéresse non seulement aux plantes, aux animaux, mais aussi à leurs usages par les Lapons et au mode de vie de ce peuple. En ce sens, on peut considérer que Linné a fondé les bases de l’ethnobotanique et de l’ethnobiologie [6]. Linné en costume lapon avec un chapeau de docteur hollandais et un tambour lappon Jalousé par le Professeur Nils Rosen von Rosenstein (1706-1773), fondateur de la pédiatrie avec lequel il se réconciliera et qui le sauvera en 1764 d’une pleurésie, Linné repart étudier la minéralogie en Suède puis accepte un autre voyage en 1734 en Dalécarlie, au centre de la Suède, à la demande du baron Nils Esbjörnsson Reuterholm (1676-1756), gouverneur de la région. Avec sept autres étudiants d’Uppsala, il parcourt en 45 jours 850 km [3]. À son retour il se fixe à Fahlun chez le baron Reuterholm où il enseigne la minéralogie. 148 Toujours en 1734, Linné obtient du père de Sara Lisa Moraea de pouvoir l’épouser, mais il doit obtenir son doctorat en médecine. Or, l’Université d’Upsala ne permet pas de soutenir une thèse de doctorat, car les étudiants en médecine n’y sont pas assez nombreux. Pour se faire bien voir de son futur beau-père, Linné crée le genre Moraea, de la famille des Iridacées. À l’origine, ces magnifiques Iridacées avaient été nommées Morea par Phillip Miller pour faire honneur à Robert More (1703-1780), voyageur ami de Linné. Moraea thomsonii Linné part alors en Suède, au Danemark puis en Allemagne, où, après avoir découvert la supercherie d’un serpent à sept têtes, l’auteur démasqué de ce monstre artificiel oblige Linné à partir précipitamment en Hollande. Le 13 juin 1735, il y soutient une thèse sur une nouvelle hypothèse sur les fièvres intermittentes à l’Université de Harderwick et est reçu docteur en médecine. Loin de son pays natal, Linné met en place plusieurs ouvrages fondamentaux et est aidé financièrement par Johannes Burman (1707-1780) dont le nom se retrouve dans la famille tropicale des Burmanniacées. La première édition de Systema naturae à Leyde en 1735 fait l’effet d’une bombe. Du jour au lendemain, Linné devient célèbre et est salué par les naturalistes du monde entier. A Leyde, Linné bénéficie de l'aide de Herman Boerhaave (1668-1738), botaniste médecin et humaniste alors en retraite, qu’on retrouve dans le genre Boerhaavia, de la famille des Nyctaginacées. Il retrouve son ami Artedi mais celui-ci se noie accidentellement et Linné terminera son ouvrage Philosophica ichtyologica. Dans Genera plantarum, Linné décrit 935 genres de plantes en 1737. L’aide financière du banquier hollandais George Clifford (1685-1760), qui lui demanda de s’occuper de son impressionnante collection de fleurs, une des plus belles de l’époque, et qui a été honoré par le genre Cliffortia, de la famille des Rosacées, permet à Linné d’effectuer vers 1738 un voyage en Angleterre puis un autre en France à Paris où Bernard de Jussieu lui présenta quelques herbiers comme celui de Tournefort. De retour en Suède en 1738, il se fiance à Sara Lisa Moraea et exerce comme médecin à Stockholm, sans pouvoir obtenir de poste de 149 professeur. Il dispense cependant des cours de minéralogie en hiver et de botanique en été au Collège des Mines. Il finit par se marier à 32 ans à Sara Lisa. Il en eut un fils Carl en 1741, trois filles Elizabeth-Christina en 1743, Sara Lenna en 1744 qui ne vivra que quelques jours, Louisa en 1749, Sara- Christina en 1751, un deuxième fils Johannes en 1754 qui mourut à 3 ans et une dernière fille Sophia en 1757. Suite à la guerre avec la Russie, Linné fera une courte exploration aux îles d’Öland et de Gotland en mer baltique en janvier 1741 avec six compagnons à la recherche d’une argile pour la fabrication de porcelaine [3]. Il est nommé professeur en octobre 1741 à la chaire de médecine à Uppsala et s’investit dans l’enseignement et le jardin botanique où sont cultivées plus de 1300 espèces. Linné entreprend en 1746 une expédition de 2500 km dans le Massif forestier de Kinnekulle dans le Vastergötland et un dernier voyage en 1749 dans la province de Scanie. Linné n’a plus l’âme d’un explorateur et est trop pris par le catalogage de nombreuses collections et le suivi de ses élèves pour quitter la Suède. Ce qui l’intéresse avant tout, c’est l’observation du monde vivant, surtout végétal. Sa notoriété et son aura pédagogique lui permettent d’avoir de nombreux disciples qu’il appelle ses apôtres et qu’il envoie aux quatre coins du monde pour collecter de nouvelles espèces à sa place. Premier jour des timbres du bloc de Suède 150 Collines de Brösarp en Scanie (1749) Avocettes Recuvirosta avocetta dans le Öland (1741) Fabrication de meules à aiguiser à Orsa dans Linnaea le comté de Dalécarlie borealis (1734) Linné en Roc de Rostenkleven costume à Kinnekulle dans le lapon Vastergötland (1746) Recto du bloc de Suède 151 Verso du bloc de Suède Sa production scientifique reste soutenue, aussi bien en botanique qu’en zoologie, en géologie, en médecine ou en philosophie. Il dirigera 186 thèses, écrira plus de 6000 lettres, et était en rapport avec tous les grands scientifiques de son temps. S’il était en désaccord avec certains d’entre-eux (Adanson, Buffon), il s’arrangeait néanmoins pour connaître leur production scientifique. En 1753, son Species plantarum fait 1200 pages et traite de 5900 espèces réparties en 1098 genres. Timbres émis pour le 250e anniversaire de la naissance de Linné 152 Timbres émis pour le 200e anniversaire de l’Académie royale suédoise des Sciences de Suède Membre de la plupart des académies et sociétés savantes d’Europe, Linné connut de son vivant tous les honneurs. Des médailles sont frappées à son effigie dès 1746. En 1753, il est fait Chevalier de l’Ordre Royal de l’Étoile polaire.