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Seghir 2500 ans d’échanges intercivilisationnels en Méditerranée

• Première Edition : Institut des Etudes Hispanos-Lusophones. 2012

• Coordination éditoriale : Fatiha BENLABBAH et Abdelatif BOUDJAY

• I.S.B.N : 978-9954-22-922-4

• Dépôt Légal: 2012 MO 1598

Tous droits réservés Sommaire SOMMAIRE

• Préfaces 5

• Présentation 9

• Abdelaziz EL KHAYARI , Aomar AKERRAZ 11 Nouvelles données archéologiques sur l’occupation de la basse vallée de Ksar de la période tardo-antique au haut Moyen-âge

• Tarik MOUJOUD 35 Ksar-Seghir d’après les sources médiévales d’histoire et de géographie

• Patrice CRESSIER 61 Al-Qasr al-Saghîr, ville ronde

• Jorge CORREIA 91 Ksar Seghir : Apports sur l’état de l’art et révisoin critique

• Abdelatif ELBOUDJAY 107 La mise en valeur du site archéologique de Ksar Seghir Bilan et perspectives

155 عبد الهادي التازي • مدينة الق�رص ال�صغري من خالل التاريخ الدويل للمغرب



Préfaces PREFACES

e patrimoine archéologique marocain, outre qu’il contribue à mieux Lconnaître l’histoire de notre pays, il est aussi une source inépuisable et porteuse de richesse et un outil de développement par excellence. A travers le territoire du Maroc s’éparpillent une multitude de sites archéologiques allant du mineur au majeur. Citons entre autres les célèbres grottes préhistoriques de , le singulier cromlech de Mzora, les villes antiques de , de , de Banasa, de et de Zilil, les sites archéologies médiévaux de Basra, Sijilmassa, Ghassasa, Mazemma, Aghmat, Tamdoult et Ksar Seghir objet de cet important colloque. Le site archéologique de Ksar Seghir est fameux par son évolution historique, par sa situation géographique et par son urbanisme particulier. En application de sa stratégie d’intervention reposant sur l’approche Patrimoine et Développement et afin de mettre en valeur les atouts inhérents de ce site, délaissé pendant plusieurs années à la merci du temps, le Ministère de la Culture en partenariat avec la Société Nationale des Autoroutes du Maroc, y a mené en 2007-2008 un programme intégré d’aménagement et de restauration. Actuellement, le site est doté d’une infrastructure de gestion administrative, d’accueil et de promotion (une Conservation du site, un Centre d’Interprétation du Patrimoine, la mise en place d’une clôture de protection et la restauration de quelques structures archéologiques de). L’objectif est de parvenir d’intégrer le site dans la dynamique de développement économique et social de son milieu environnant et y promouvoir la recherche scientifique et archéologique. C’est dans cette perspective que s’inscrit l’organisation de ce colloque « Ksar Seghir, 2500 ans d’échanges intercivilisationnels en Méditerranée » le 17

 et 18 juin 2011 en vue d’enrichir le débat et d’échanger les idées sur ce site et discuter, grâce aux compétences scientifiques des intervenants, de l’histoire, de l’architecture et des outils de valorisation du site archéologique de Ksar Seghir et des possibilités de mise en œuvre de ses plans d’action. Rappelons que le site de Ksar Seghir est considéré comme l’un des sites les plus importants aux niveaux provincial, régional et national et occupe une place de choix dans la carte archéologique du Maroc en raison de son substrat historique et symbolique. Il rappelle des pages lumineuses de la mémoire historique nationale et il constitue, en même temps, un patrimoine commun entre les deux rives de la méditerranée, laquelle a toujours constitué durant toutes les périodes de l’histoire une zone d’emprunts réciproques et un pont d’échanges culturel et humain. Le site archéologique de Ksar Seghir constitue, au sein de cette dynamique spatiale et économique croissante, le noyau historique par excellence. Il représente la dimension culturelle indispensable à tout processus de développement durable, et ce grâce à sa renommée mondiale, à l’infrastructure de base qui permet de le relier à son territoire et à sa proximité des principaux sites d’intérêt touristique et environnemental de la Région Nord-Ouest.

Abdellah Alaoui Directeur du Patrimoine Culturel

 e site de Ksar Seghir est évidemment l’un des exemples patents des influences culturelles mutuelles entre le Maroc et le . LIl fait partie de l’héritage matériel luso-marocain. Le travail archéologique et de restauration entrepris pour la préservation de ce patrimoine est à même de l’élever au rang de patrimoine culturel du Maroc et fait qu’il soit intégré à la dynamique culturelle actuelle, promue par le Ministère de la Culture et que l’institut des Etudes Hispano-Lusophones soutient. L’édition de cet ouvrage, Ksar Seghir. 2500 ans d’échanges intercivilisationnels en Méditerranée par notre Institut entre justement dans le cadre de note engagement à faire connaître ce patrimoine et à diffuser les études qui s’y rapportent. En 2009 l’IEHL a publié un ouvrage important intitulé Le patrimoine architectural d’origine portugaise au Maroc. Apports à sa conservation, qui, comme celui- ci, comprenait des études réalisées par des spécialistes marocains et portugais. Nous sommes heureux de contribuer ainsi au développement de la recherche et à la multiplication des publications sur un patrimoine d’actualité.

Fatiha BENLABBAH Directrice de l’Institut des Etudes Hispano-Lusophones



Présentation PRESENTATION

e part son potentiel archéologique, jusqu’ici exhumé, le site archéologique de Ksar DSghir recèle une valeur patrimoniale incontestable qui le place parmi les sites d’intérêt scientifique et touristique les plus remarquables du littoral méditerranéen marocain. Après avoir bénéficié entre 1975 et 1985 d’une grande campagne de fouilles archéologiques menée par une mission maroco-américaine dirigée par Charles L. Redman, le site de Ksar Seghir a été laissé pendant longtemps en état d’abandon. Durant presque 25 ans, le site a vécu un processus de dévalorisation de son potentiel archéologique et sous une attitude conflictuelle de la part de la population locale. Consciente de cette situation alarmante, le Ministère de la Culture a initié en 2007 un «Projet d’Aménagement et de Restauration du Site » dans le cadre d’un partenariat avec le Ministère de l’équipement et du Transport et la Société des Autoroutes du Maroc. Après l’achèvement du projet, la mise en place d’une stratégie de mise en valeur culturelle et touristique des potentialités du site et son intégration dans le processus de développement durable local et régional s’impose de plus en plus avec acuité. Elle nécessite la contribution de tous les acteurs, surtout avec la réalisation ces derniers temps, aux environs immédiats du site, de plusieurs projets structurants de dimension nationale dont le complexe portuaire de Tanger-Med, l’usine Renault de Melloussa, la nouvelle ville de Charafate et le Projet de mise à niveau urbaine des communes rurales de Ksar Majaz et Ksar al Majaz. C’est donc ce contexte, qui a incité la Conservation du site, à prendre l’initiative pour organiser le 17 et 18 juin 2011 un colloque international sur le site sous le thème « Ksar Seghir : 2500 ans d’échanges intercivilisationnel en Méditerrané ». Ce colloque, auquel a été invité le professeur Charles L. Redman, était pour la Conservation du site, l’occasion pour lui rendre hommage. C’est à lui, après la petite campagne en 1957-58 du premier archéologue marocain, Ahmed Meknassi, que revient le mérite d’avoir initié les premiers grands travaux de fouilles archéologiques dans le site et qui étaient couronnés par la publication de la monographie « Ksar Seghir : An Archeology View of Medieval Life » en 1986. Et depuis, aucune fouille sur le site n’a eu lieu et le très

 peu de publications qui se sont apparus, dès lors, se limitent à quelques études réalisées dans le cadre de la préparation de diplômes universitaires. La publication des ces actes, telle qu’elle se présente, reflète l’ores et déjà, l’état de la recherche sur le site, nous estimons qu’elle contribuera à la relance de la recherche archéologique, historique et environnementale sur ce site en suscitant de nouvelles interrogations, de nouvelles préoccupations scientifiques et techniques. C’est cette conviction partagée avec la Direction du Patrimoine Culturel, la Direction Régionale de la Culture Tanger-Tétouan et l’Institut des Etudes Hispano-Lusophones, que la diffusion des exposés de cette rencontre a pu avoir le jour. Nous les remercions tous pour leur soutien et accompagnement.

Abdelatif ELBOUDJAY Conservateur du Site Archéologique de Ksar Seghir

10 Al-Qasr Al-Awwal. Nouvelles données archéologiques sur l’occupation de la basse vallée de Ksar de la période tardo-antique au haut Moyen-âge

• Abdelaziz El Khayari Institut National des Sciences de l’Archéologie et du Patrimoine - • Aomar Akerraz Institut National des Sciences de l’Archéologie et du Patrimoine - Rabat

Introduction Après le passage des Vandales, le Maroc rentre dans une phase obscure de son histoire qui se prolonge jusqu’aux temps des Idrissides, phase obscure évidemment par manque de documents. L’on sait seulement, grâce à des inscriptions latines et aux fouilles récentes, que Volubilis continua d’exister jusqu’à la veille de l’avènement des Arabo-musulmans (1). Dans le Nord du Maroc, des informations textuelles, assez réduites du reste, suggèrent que la ville de Septem, et peut-être aussi , dépendaient d’une manière ou d’une autre de l’autorité byzantine et ensuite de celle des Wisigoths en Espagne. Les monnaies bilingues latino-arabes de T . andja sont très significatives à cet égard (2). A part Septem (Sabta) où des fouilles de sauvetage permettent de produire de temps à autre de nouvelles données sur cette période charnière entre Antiquité et Moyen-âge, on ne connaissait pratiquement rien sur le reste de cette zone du Détroit avant les fouilles de Dhar d’Aseqfane et quelques autres pratiquées plus récemment. Comme le prouvent ces fouilles, l’archéologie pourrait évidemment être une excellente source alternative face au mutisme des sources écrites. Le site de Dhar d’Aseqfane qui occupe une petite colline (Fig. 1 et 2) située à 850 m à vol d’oiseau de la côte, sur la rive droite de l’oued Ksar, avait été identifié dès les années quarante (3) et avait fait l’objet de quelques fouilles dans les années cinquante (4). Mais, son intérêt archéologique et historique ne s’est révélé qu’à la suite des fouilles de sauvetage pratiquées par l’Institut national des sciences de l’archéologie et du patrimoine en 2005 et 2006, avec une importante collaboration financière de la Société des Autoroutes du Maroc (Fig. 3). Les dites fouilles ont permis d’établir que le site de Dhar d’Aseqfane a été occupé pendant 18 siècles, depuis la fin du 6ème s. avant J.-C. jusqu’aux 11/12 siècles après J.-C. Les résultats de ces fouilles sont encore inédits et nous aimerions présenter ici en rapport avec le thème du colloque des données concernant plus particulièrement l’époque tardive et l’occupation islamique.

11 Fig. 1. Situation du site de Dhar d’Aseqfane (extrait de la carte topographique à l’échelle 1/50 000 feuille NI-30-XIX-3 d – Ksar-Es-Srhir).

Fig. 2. Vue sur le site de Dhar d’Aseqfane et la basse vallée de Ksar.

12 Fig. 3. Plan général du site de Dhar d’Aseqfane (Mission archéologique de Dhar d’Aseqfane). 1. Secteur nord ; 2. L’oratoire ; 3. Secteur sur ; 4. L’ ; 5. La porte est ; 6. La porte sur ; 7. La porte nord-ouest ; 8. Les thermes ; 9. Les citernes ; 10. L’habitation à péristyle ; 11. La porte nord.

1. L’occupation tardo-antique du site de Dhar d’Aseqfane L’occupation humaine de la colline de Dhar d’Aseqfane débute au moins à la fin du 6ème s. avant J.-C. et se continue jusqu’au 2ème s. avant J.-C. Après une rupture pendant le 1er s. avant J.-C., le site semble avoir été occupé de nouveau sous le règne de Juba II (5). Ce qui est sûr, d’après les données archéologiques obtenues par nos fouilles, c’est que le site fut réoccupé à partir de la fin du er1 s. après J.-C., avec l’annexion de la Maurétanie à l’empire romain. Il abrita alors un complexe architectural à caractère industriel. Avant le milieu du 3ème s., la colline subit une restructuration représentée par la création d’une habitation à péristyle et d’un établissement thermal, dotés de pavements de mosaïques.

13 1.2. De la construction de l’enceinte jusqu’aux débuts du 5ème s. après J.-C. A la fin du 3ème s. ou au tout début du 4ème s. après J.-C., moment marqué historiquement par l’évacuation de la partie méridionale de la Tingitane, la colline fut fortifiée pour des raisons peu claires, mais probablement liées à l’insécurité qui devait régner à cette époque. En tout cas, on a élevé une enceinte de bonne facture de presque un mètre d’épaisseur, qui formait un rectangle orienté nord-sud englobant presque la totalité de la colline (Fig. 3). L’enceinte était percée de quatre portes, l’une au milieu de la courtine sud, la seconde sur le côté est tout en étant décalée vers le nord, la troisième au milieu de la courtine nord, la quatrième et dernière sur le côté ouest, au pied de la colline, qui donnait ainsi directement sur la rive droite de l’oued Ksar où devait probablement exister un port. Les deux portes est et sud furent dotées de tours externes semi-circulaires. La courtine sud a été spécialement fortifiée aux angles par des tours semi-circulaires. L’intérêt accordé à cette courtine s’explique par le fait qu’elle faisait face à l’intérieur de la vallée, autrement dit au côté le plus inquiétant. Cette enceinte qui illustre le mieux les de type tardif donnera à la colline son aspect caractéristique et définitif. C’est en effet à l’intérieur du cadre défini par elle que vont se dérouler toutes les activités ultérieures saisies à travers la fouille. Peu après la réalisation de cet ouvrage, on assiste à l’apparition dans les deux secteurs nord et sud, non occupés jusqu’alors, d’une série d’habitations de forme rectangulaire et faites de moellons liés à la terre, toutes adossées du reste aux courtines. Dans le secteur sud, l’élément le plus remarquable est une cuve unique assez profonde et s’élevant au-dessus du sol de la pièce où elle se trouve. Sa fonction reste incertaine. Dans le secteur nord, certaines pièces avaient des sols en mortier de chaux et renfermaient des traces de foyers aménagés de forme circulaire ou ovale. A plusieurs endroits fut observée l’existence d’aires dallées avec des briques posées à plat et marquées par des traces de combustion. Ces vestiges, associés à de nombreuses scories de fer, laissent supposer l’existence d’ateliers de forgerons. Mais l’on ignore si ces derniers répondaient exclusivement à des besoins civils. D’autres ateliers, mais cette fois-ci liés à la production céramique et amphorique ont existé dans le site. Sur la base de l’étude des pâtes et des ratés de cuisson, il s’est avéré que le site avait produit des amphores de type Almagro 51a-b, ce qui constitue une donnée d’autant plus importante que ce type d’amphores était jusqu’ici considéré comme une production exclusive de la Péninsule ibérique. Ces amphores fabriquées

14 à Dhar d’Aseqfane étaient tout naturellement fournies, pour servir d’emballages, aux usines de salaison situées sur la côte, dont l’une se trouvait non loin du site à l’extrémité est de la baie de Ksar Seghir (6). Le registre archéologique lié à cette phase d’occupation se montre particulièrement riche et reflète une insertion complète du site dans les réseaux commerciaux méditerranéens. A côté des amphores de salaison (Almagro 51a-b, c) issues de la Péninsule ibérique, ont été identifiées des importations provenant de l’actuelle Tunisie, constituées, entre autres, de lampes, de céramique sigillée claire D et de diverses amphores africaines. Dans ce même secteur nord, où la stratigraphie est la mieux conservée, les habitations qui viennent d’être décrites ont subi, aux débuts du 5ème s. après J.-C., une destruction, contemporaine de celle qui a affecté la ville de Zilil (7) et qui a été liée hypothétiquement au passage des Vandales. Des amphores complètes (Fig. 4) retrouvées dans une pièce peuvent, entre autres, nous renseigner sur la date approximative du dernier moment de la vie du secteur. Celui-ci fut alors abandonné et des tombes chrétiennes y furent installées, directement sur le sol des habitations. Trois inhumations ont été en effet repérées : l’une d’un enfant de bas âge dans une amphore, la seconde également d’un enfant dans une sorte de caisson faite avec des pierres et la dernière, celle d’un adulte, avec couverture de tuiles en bâtière (Fig. 5). Ces défunts n’étaient accompagnés d’aucune offrande funéraire ni d’effets personnels.

Fig. 4. Amphore africaine de type Keay 35B (= Type Bonifay 41) (début 5ème s. après J.-C.).

15 Fig. 5. Sépulture paléochrétienne (débuts 5ème s. après J.-C.).

3. La phase tardo- antique (5ème s. -7ème s. après J.-C.) Dans le site de Dhar d’Aseqfane, les données de la fouille montrent que la vie ne s’est pas éteinte après la destruction survenue aux débuts du 5ème s. après J.-C. et qui a affecté toute la colline. Quoiqu’assez rares, des éléments d’importation attestent que le site n’a pas perdu tout lien avec l’extérieur. Parmi ces éléments, il est important de signaler des fragments de céramique grise estampée (dérivée de sigillée paléochrétienne), des amphores africaines de type spathéion (Fig. 7, c-e), des lèvres d’amphores de types Keay 27 B, 8B et 56 (Fig. 7), datés des 5ème -6ème s.(8), ainsi qu’une cruche (ou amphorette) à décors géométriques (Fig. 8), très proche de celles tenues pour être des produits d’ datés des 6ème -7ème s.(9). Particulièrement dans le secteur nord où l’on dispose de données stratigraphiques, sur les décombres des habitations antérieures, arasées et nivelées, furent construites de nouvelles habitations faites de la même façon, c’est-à-dire avec des moellons liés à la terre. Leur plan est cependant moins rigoureux que celui des premières. Les sols y sont systématiquement faits en terre battue. Les vestiges architecturaux sont toutefois moins bien conservés pour qu’on puisse en avoir une vision d’ensemble cohérente. Le sommet de la colline où s’élevaient auparavant les édifices bâtis au 3ème s. fut transformé en une zone artisanale. Des fours de potiers ont été en effet implantés partout à l’intérieur ou au-dessus des ruines. C’est le cas d’un four installé dans l’hypocauste des thermes ou d’un autre implanté dans le pressoir à contrepoids cylindrique ou encore d’un troisième situé au milieu d’un péristyle et aménagé grossièrement avec des éléments de remploi dont des briques thermales. Tous ces fours sont de petites dimensions et devaient servir à la cuisson d’objets de petite taille.

16 Fig. 7. Amphores africaines tardives (5ème – 6ème s. après J.-C.) : a : type Keay 27 B ou Keay 36 ; b : type Keay 27 B ; c-d : amphores de type « spatheion » ; f-h : type Keay 8B (Bonifay 38-39) ; i : type Keay 56.

Fig. 8. Cruche avec décors géométriques semblable à celles d’Ibiza (6ème-7ème s. après G.-C.).

A cette phase, on a l’impression que le site avait acquis une vocation exclusivement artisanale. L’étude des pâtes et de nombreux ratés de cuissons indiquent qu’on fabriquait des vases céramiques (cruches, mortiers, etc.) caractérisés par leur décor géométrique et semblables par ailleurs à ceux de la céramique dite tardo-antique. C’est peut-être à cette période qu’il faut attribuer quelques vases imitant la sigillée claire D. A côté des vases, on aurait également fabriqué des lampes à en juger d’après un moule reproduisant un modèle de type africain (lampe à canal portant l’image d’un lion assis). D’autres lampes avec l’image d’un cratère surmonté

17 d’un dauphin semblent avoir été également produites par les ateliers du site (Fig. 6).

Fig. 6. Lampe paléochrétienne produite à Dhar d’Aseqfane.

Les éléments fournis par la fouille indiquent donc que le site de Dhar d’Aseqfane fut habité par une communauté sans doute christianisée, et ce du 4ème s. jusqu’au 6ème ou 7ème s. après J.-C. L’on ignore complètement, faute de données, si le site était encore habité au moment de la conquête arabe.

2. L’Occupation médiévale Le site continua d’être occupé à l’époque médiévale islamique. Les vestiges de cette occupation, assez mal conservés, ont été repérés à divers endroits du site, plus particulièrement dans les secteurs nord et sud et au sommet de la colline. 2.1. Les secteurs nord et sud Les structures tenues pour islamiques dans le secteur sud correspondent à des soubassements de murs mutilés, conservés généralement sur une ou deux assises et formant des pièces de plan irrégulier (grossièrement rectangulaire ou circulaire). L’ensemble de ces structures ne reflète aucune organisation raisonnée de l’espace. On a affaire plus à des cabanes implantées à bon gré qu’à un urbanisme au sens propre du terme. Les murs repérés avaient probablement servi à soutenir des élévations

18 de briques crues ou simplement des parois faites de branches d’arbres revêtues de torchis.

Fig. 9. Four islamique attesté dans le secteur sud.

L’intérêt de ce secteur consiste en la présence de deux petits fours d’aspect assez curieux, jamais attesté jusqu’à présent. Conservés sur leur partie inférieure, ils présentent une forme plus proche de celle du violon (Fig. 9). Leur remplissage montre qu’ils avaient servi à cuire des vases en céramique commune (Fig. 10).

Fig. 10. Vases céramiques islamiques retrouvés dans le remplissage des fours islamiques.

19 Dans le secteur nord, les structures islamiques sont aussi très mal conservées. Il est difficile d’avoir une vision d’ensemble à partir des bouts de murs dispersés ici et là. On a toutefois repéré un édifice mieux soigné, de plan rectangulaire et orienté est-ouest (Fig. 11). Tous ses murs, à l’exception du mur est qui a complètement disparu, sont faits avec des moellons liés à la terre et conservés sur une même hauteur. Ils ont sans doute servi à soutenir des élévations en briques crues. Cet édifice était doté, à en juger d’après les éléments retrouvés à l’intérieur, d’un toit fait avec des tuiles. Sous la destruction du toit, ont été retrouvés des éléments céramiques dont des lampes de typologie ancienne remontant au plus tard au 9ème s. après J.-C. (Fig. 12)

Fig. 11. Bâtiment islamique dégagé dans le secteur nord.

Fig. 12. Lampe islamique.

20 2.2. Le sommet de la colline Au sommet de la colline, dans la partie ouest, a été repérée une fosse pratiquée au détriment des constructions antérieures. Son remplissage a livré, entre autres, des fragments de céramique correspondant à des plats (de type ataifor) portant des décors de manganèse sous un vernis plombifère (Fig. 13) et à des vases fermés avec un décor en cuerda seca partielle datant du 12ème s. après J.-C. (Fig. 14)

Fig. 13. Plat islamique type « ataifor ».

Fig. 14. Fragment de vase fermé portant un décor de type « cuerda seca ».

21 Dans la partie est, il a été possible d’identifier un oratoire (Fig. 15) qui était en partie installé sur les ruines de l’enceinte antique. C’est un édifice quadrangulaire orienté est-ouest. Ses murs n’étaient conservés qu’au niveau des fondations. Quelques pans seulement subsistaient des murs nord et ouest. Ces murs étaient construits avec des moellons liés à la terre. Le sol partiellement conservé était constitué d’un lit de petits galets de plage revêtus de mortier de chaux. Ce type de sol avec une préparation en petits galets n’a pas été observé ailleurs parmi les vestiges islamiques. Aucune trace de piliers n’a été constatée. La largeur de l’édifice suppose que celui-ci était doté d’un toit à double pente. Au milieu du mur est, se trouvait une petite abside en saillie de forme rectangulaire, qui faisait office de .

Fig. 15. Plan de l’oratoire (époque islamique).

Cet édifice n’a pu être daté archéologiquement. L’on sait seulement d’après quelques sondages pratiqués sous le sol qu’il reposait directement sur les décombres des constructions antiques. De par sa forme toutefois, il évoque de près les oratoires de la Rabita de Guardamar datés du 10ème s. après J.-C. (10). C’est l’un des derniers témoignages de l’occupation du site avant son abandon définitif.

22 3. Les données numismatiques Ce sont des monnaies retrouvées exclusivement dans les niveaux anciens des secteurs nord et sud qui font tout particulièrement l’intérêt du site de Dhar d’Aseqfane sur le plan chronologique et historique. Elles forment un ensemble de fulus datant de l’époque omeyyade puisque nous n’y avons identifié aucune pièce postérieure, liée au pouvoir émiral en Andalousie ou aux Idrissides. Ces fulus ne sont associés qu’à une seule monnaie datée. Il s’agit, d’après la légende circulaire de son revers, d’un dirham frappé à Wasit, en l’an 91/710. Il se présente ainsi (Fig. 16, a) :

Fig. 16. Monnaies islamiques (8ème s. après J.-C.).

D/ Dans le champ : اللـه �أحد اللـه ال�صمد مل يلد و مل يولد ومل يكن له كف�ؤا �أحد Dans la bordure circulaire : حممد ر�سول اللـه �أر�سله بالهدى ودين احلق ليظهره على الدين كله

23 R/ Dans le champ : ال �إلـه �إال اللـه وحده ال �شريك له Dans la bordure circulaire : [ب�سم اللـه �ضرب هذا الدرهم بوا�سط �سنة �إحدى وت�سـ]عني Ce dirham est identique, de par son module et ses légendes, aux dirhams frappés par la même ville de Wasit sous le règne d’Al-Walid Ibn Abd-Al- Malik (86-96/705-715). Mais sur le plan technique, il s’agit plutôt d’un bronze saucé d’argent. Cette pièce de monnaie était percée d’un trou, ce qui indique qu’elle a été utilisée comme pendentif, peut-être en raison de la sourate d’Al-Ikhlas . , à laquelle on reconnaît jusqu’à nos jours un pouvoir particulier. Quant aux fulus, ils sont, dans leur majorité, complètement anonymes et ne portent le plus souvent que des inscriptions religieuses exaltant la nouvelle foi. Certains avaient porté la mention du lieu et/ou de la date de frappe, mais à cause de leur caractère peu soigné les légendes comportant ces informations se trouvent généralement illisibles. Ces fulus d’une grande variété s’inscrivent, de par leur aspect, leurs légendes et leurs motifs, dans la catégorie des monnaies en bronze frappées par les gouverneurs aussi bien en Orient qu’en Occident musulman sous le Califat omeyyade de Damas. Des émissions de ce type ont été ainsi retrouvés au , en Andalousie (11) et jusqu’en France (12). En Péninsule ibérique, elles sont généralement qualifiées, peut-être improprement, de « monnaies ou fulus de la conquête » et placées chronologiquement à la période des gouverneurs, allant de 718 à 750. Ces émissions ont fait l’objet, particulièrement en Espagne et au Portugal, d’intéressantes études typologiques et chronologiques (13). La petite collection de Dhar d’Aseqfane présente des pièces de modules et de facture variés. Elles portent toujours une légende arabe en caractères coufiques gravée dans des styles différents et se répartissent en plusieurs groupes dont nous signalons ici les plus importants. Le premier groupe est représenté par des pièces portant à l’avers la répartie sur deux lignes, et sur le revers «ال �إلـه �إال اللـه » première chahada .Fig) « حممد ر�سول اللـه» la seconde chahada disposée de la même façon 24 16, c). Les deux lignes du revers sont parfois séparées par un élément circulaire (Fig. 16, b). La légende est parfois de taille assez importante. Ce groupe correspond au type Frochoso II-a qui est frappé au Maghreb, selon certains chercheurs, autour de 97-99 de l’hégire. Ce type est de loin le plus fréquent ; il est attesté en Péninsule ibérique, voire même en France. ,« ب�سم اللـه امللك للـه » Le second groupe (Fig. 16, d) porte à l’avers la légende disposée de ,« حممد ر�سول اللـه » répartie sur deux lignes, et au revers celle de figure un petit annelet. Ce ,« ر�سول اللـه» et « حممد » la même façon. Entre groupe correspond au type Frochoso X-a (= Walker 742) (14). Selon J.A. est caractéristique des émissions d’Afrique et « امللك للـه» Walker, la formule d’Espagne (15). Le troisième groupe comporte des exemplaires portant à l’avers la légende « Dans les deux cas, la légende .« حممد عبد اللـه ور�سوله » et sur le revers « ال �إله �إال اللـه est répartie sur trois lignes et souvent mal centrée et incomplète à cause de l’exigüité du flanc par rapport au coin. Sur certaines pièces, il existait une légende sur le pourtour, mais trop mal conservée pour être identifiée Le quatrième groupe (Fig. 16, e) englobe des pièces portant à l’avers répartie sur deux lignes et séparée par un « حممد ر�سول اللـه » la légende astre flanqué des deux côtés d’un élément incurvé, formé de trois Les deux mots sont .« امللـك للـه » globules. Au revers apparaît la légende séparés par un scorpion tourné à droite. Ce groupe ne semble pas attesté en Péninsule ibérique. H. Lavoix (16) fait état dans son catalogue de cinq fulus portant l’image du scorpion (n° 1535-1539) dont deux (n°1535-1536) sont très proches, de par leurs légendes et motifs, des exemplaires de Dhar d’Aseqfane. Bien que la représentation des animaux soit plus fréquente sur les émissions d’Orient, H. Lavoix attribue les deux exemplaires en question qui apparaît « امللك للـه » au « Maghreb el-Ak’sa » en raison de la formule sur une pièce au type de l’épi de blé (n° 1541), considérée par lui comme évidemment africaine (17). Il est probable que ces fulus aient été frappés à T . andja. Le cinquième groupe est constitué par des pièces portant à l’avers la légende répartie sur trois lignes mais toujours incomplète ,« ال �إلـه �إال اللـه وحده ال �شريك له » à cause de l’exigüité du flanc. Au revers apparaît un motif proche d’un épi de blé, associé à une légende peu soignée et incomplète qui renfermerait, nous .« أ�الندل�س» semble-t-il, le nom

25 Outre ces groupes, ont été identifiés des exemplaires de fulus, d’une importance toute particulière, puisqu’ils sont frappés, d’après leurs légendes, par la ville de Tandja (Tanger). Ils sont différents des premières émissions de la ville constituées par des séries à légendes bilingues latino-arabes comportant une effigie masculine de profil (18), des séries à légendes arabes avec une tête vue de profil (19) et d’autres également en arabe portant la figure de poisson. Aucun exemplaire de ces premières émissions n’aété retrouvé sur notre site. Parmi les séries identifiées à Dhar d’Aseqfane, la plus importante et la �أمر اللـه بالوفا » mieux lisible est celle (Fig. 16, f) qui porte à l’avers la légende �ضرب هذا الفل�س بطنجة » disposée sur trois lignes, et au revers la légende ,« والعدل et la (�ضرب هـذا) répartie également sur trois lignes ; entre la première ligne ,« figure un astre ou une petite étoile de huit rayons. Le motif (لفل�س) seconde de l’étoile, caractéristique de l’atelier de Tandja, apparaît également mais dans un style différent sur certains fulus d’al-Andalus émis entre 98 et 100 de l’hégire ; il a figuré à l’origine sur des monnaies en or bilingues dites de « transition ». L’astre de T . andja trouve cependant des parallèles identiques du point de vue taille et nombre de pointes sur les fulus d’Orient, notamment .(à titre d’exemple (20 ,( أ�الردن) ou à Al-Ourdoun (حم�ص) à Emèse Cette émission de la ville de Tanger n’est pas tout à fait inédite. J. Walker (21) avait déjà fait état d’un fals portant des légendes identiques avec la même disposition et le même motif. Il existe par ailleurs une monnaie anonyme (22) qui porte sur une face la même expression, disposée sur trois lignes mais sur l’autre face la mention du lieu de frappe est substituée par la associée à un petit motif sous forme d’une branche ,« ..اللـه/ال اله/�إال» légende ou d’un épi de blé. La présence d’un petit astre gravé sur le revers au-dessous et ayant un aspect identique à celui des exemplaires de Dhar « والعدل » du mot d’Aseqfane permet d’attribuer, à titre d’hypothèse, cette monnaie au même ,est absente, semble-t-il « �أمر اللـه بالوفا والعدل » atelier de T . andja. La légende sur les autres monnaies du Maghreb et d’Andalousie. Elle est d’autre part peu usitée sur les fulus omeyyades. D’après H. Lavoix, seulement quatre fulus omeyyades d’Orient portent cette formule : trois parmi eux frappés à Al-Koufa (23), deux en 101/719 et l’autre en 126/743 ; le quatrième est frappé à Al-Ray en 116/734 (24). L’autorité qui aurait ordonné ces émissions n’est pas connue et l’on s’explique mal pourquoi cette formule apparaît à des dates espacées, 719, 734 et 743. L’usage de cette formule qui insiste sur la fidélité/la loyauté et la justice est un peu surprenant de la part des gouverneurs omeyyades. L’on sait en effet que ce slogan figurait, d’après

26 les sources (25), sur des monnaies frappées par Abdullah Ibn Azzubaïr, le fameux opposant aux Omeyyades qui a fini par être assiégé et tué à la Mecque par Al-Hajjaj en 692 après J.-C. Dans le cas de T . andja, faudrait-il rattacher les émissions portant cette formule aux rebelles berbères kharijites qui se sont emparés de la ville, sous le commandement de Maysara, en740 après J.-C. ? On ne peut répondre. Quoi qu’il en soit, il paraît que ces fulus ont été frappés à un moment donné de la première moitié du 8ème s. après J.-C. En guise de conclusion à cette partie, il est à souligner que les fulus évoqués ci-dessus, indiquent que le site de Dhar d’Aseqfane a été occupé grosso modo à la première moitié du 8ème s. après J.-C., ce qui en fait le plus ancien habitat médiéval sur cette zone, attesté archéologiquement, en dehors de T . andja et de Sabta. 3. Dhar d’Aseqfane /Al-Qasr Al-Awwal Les informations textuelles sur la géographie antique de la côte marocaine du détroit sont assez réduites et de surcroît peu précises. On ignore par conséquent les noms qui devaient désigner le site de Dhar d’Aseqfane et l’oued Ksar. Le Périple du Pseudo-Scylax signale une ville et un fleuve au voisinage d’ (26) mais aucun autre indice ne permet d’identifier cette ville à Dhar d’Aseqfane plutôt qu’à un autre site du détroit. A son tour, Pline l’Ancien mentionne à l’est de Tingi, sans autre précision, deux petites villes, Lissa et Cottae (27), mais considérées comme éteintes à son époque. On ne sait si l’une d’elles correspondait à Dhar d’Aseqfane. Enfin, chez Ptolémée, on trouve la mention d’un fleuve du nom de Valon (28), dont la situation au milieu de la côte, si l’on fait foi aux coordonnées de l’auteur, permet de l’identifier à l’actuel Oued Ksar. Il n’est cependant pas possible de savoir si ce nom de consonance latine est une forme corrompue d’un nom plus ancien et s’il avait désigné d’autre part la colline de Dhar d’Aseqfane. Ce nom est plus proche phonétiquement du nom « Aliyane » mentionné par Al-Bakri et désignant à la fois l’actuel oued Liyan et un « qasr ». Le Géographe de Ravenne mentionne à son tour une foule de toponymes dont certains concernent la partie nord du Maroc mais l’énumération désordonnée de ces toponymes et l’absence d’informations complémentaires empêchent d’en tirer un enseignement clair. L’intérêt pour la géographie de cette côte n’apparaît qu’avec les auteurs arabo-musulmans. Les textes en relation avec Ksar Seghir, aussi brefs qu’ils soient, jettent quelque lumière sur l’histoire de la basse vallée de

27 Ksar. Ces textes ont été plusieurs fois étudiés et commentés (29). Si nous reprenons ici quelques uns parmi les plus anciens, c’est seulement dans le but de présenter une nouvelle identification pour la localité nommée « al-qasr al-Awwal ». La plus ancienne information est celle qui nous est rapportée par al-Warraq (10ème s.). En décrivant l’itinéraire maritime de T . andja à ,qui n’est pas sûr « مر�سى باب اليم » Sabta, il mentionne un port du nom de associé à une habitation, un et une rivière qui se jette dans la mer (30). Rien, dans cette indication, ne fait référence à une agglomération d’une quelconque importance. Ce n’est pas le cas au 11ème s. où le site semble abriter une ville d’après les indications d’Al-Bakri, ville appelée Au 12ème s., Kitab al-istibsar mentionne, à l’instar .« مدينة اليم « )31) associé non pas à une ville mais à un village ,« مر�سى باب اليم » d’Al-Warraq et une rivière se jetant dans la mer, tout en « ق�صر م�صمودة » portant le nom de soulignant que c’est le point le plus proche pour la traversée en Al-Andalus portant le (ح�صن) A la même époque, Al-Idrissi parle plutôt d’un fort .(32) en ajoutant qu’il se trouve au bord de la mer ,« ق�صر م�صمودة » même nom de Le .( احلراريق ) et des barques (املراكب) et qu’on y fabrique des embarcations mentionné chez ces deux auteurs n’a pu apparaître « ق�صر م�صمودة » nom de que tardivement, peut-être avec les Almohades qui ont fait de ksar Seghir un point d’appui pour la traversée en Al-Andalus. Au 14ème s., Ibn Abd-AlMunim reprend presque à la lettre le passage d’Al-Idrissi, ce qui ne donne à son indication aucun intérêt (33). Le nom de Qasr al-madjaz et celui de Ksar Seghir, par rapport à el Qsar el Kbir, ont probablement vu le jour aux temps des Almohades ou un peu ultérieurement. Ce qui, en tout cas, nous importe dans ces différents textes c’est qu’ils parlent tous d’une réalité topographique liée à la côte. D’autre part, aucun des auteurs ne fait .« الق�صر أ�الول » référence à un premier château Le seul qui mentionne une localité portant ce nom est Al-Bakri. Dans sa description de l’itinéraire côtier (par opposition à l’itinéraire maritime), donc terrestre, reliant Sabta et T . andja, on rencontre ce passage (34): » ثم تدخل يف حد بني �سمغرة وهم �أهل جبل مر�سى مو�سى ثم تخرج �إىل وادي مدينة اليم والق�رص أالول...ويف الق�رص أالول �سكنى بني طريف وحوله غرا�سات كثرية وتدخل املراكب يف هذا الوادي �ىل إحائط الق�رص، وبني خمرج هذا الوادي وموقعه يف البحر نحو �سكتني، ومن �سبتة �ىل إهذا الق�رص مرحلة ومن الق�رص �إىل طنجة مرحلة «.

28 Ce passage mentionne à égale distance entre T .andja et Sabta deux éléments liés l’un à l’autre, une rivière et un château. » وادي مدينة اليم « est bien l’actuel Oued Ksar qui n’est pas nommé dans les autres sources qui se contentent de signaler une rivière se jetant dans la mer. L’auteur lui donne une longueur de deux « sikkas », depuis sa source jusqu’à son embouchure. Son nom in-d dique la présence d’une ville appelée » مدينة اليم « qui n’est autre que l’actuel Ksar Seghir. Ultérieurement, on trouvera la mention de Qasr Masmouda, .qualifié une fois d’un fort et une autre d’un village il ne peut être confondu, comme on ,« الق�صر أ�الول » Quant au château premier l’a fait jusqu’ici, avec Ksar Seghir qui se trouve sur la côte. Il est mentionné en effet à l’intérieur sur un itinéraire terrestre et il n’a pas été associé par Al-Bakri à « Madinat al-Yam », nom qui désignait de son temps l’agglomération située à l’embouchure de l’actuel oued Ksar. L’auteur donne d’autre part une précision topographique beaucoup plus significative en rapportant que « des bateaux peuvent entrer dans cette rivière et remonter jusqu’à « أ�الول» la muraille d’El-Casr » (d’après la traduction de De Slane). L’épithète appliqué par Al-Bakri au château n’a pas simplement le sens littéral de « premier » mais également et surtout celui d’«ancien, antique ». Le terme sont systématiquement appliqués par l’auteur « أ َّويل، ُأ�ال َّول » et ses dérivés « �أول » .à des constructions ou des vestigesَ d’origine préislamique On peut éventuellement attirer l’attention sur le fait que le terme de « qasr » apparaît fréquemment dans l’ouvrage d’Al-Bakri. En dehors de sa signification architecturale qui reste à mieux saisir, il est souvent en rapport avec des constructions antiques ou d’origine antique. Pour ne nous en tenir qu’au nord du Maroc, quatre cas peuvent être cités : - Al-Qasr, lieu situé à l’est du village de Belyounach : » ثم مو�ضع يعرف بالق�رصعلى خندق يجري فيه ماء كثري يف ال�شتاء ويقل يف ال�صيف وبهذا الق�رص �آثار أللول من �أقباء وغري ذلك « )35(. - Al-Qasr, lieu situé sur l’oued Negro » ثم �ىل إوادي جنروا وخمرجه من جبل �أبي جميل وعليه م�ساكن بني عفان بن خلف وعلى هذا النهر املو�ضع املعروف بالق�رص وهو ق�رص أللول فيه حمام وعلى هذا النهر �آثار أللول كثرية « )36( . Le lieu mentionné correspond probablement au site archéologique de Sidi Hayel, situé sur la rive droite de l’oued Negro et où des fouilles récentes ont permis de mettre au jour un établissement thermal (37).

29 - Qasr Alyane : » واملنازل املعمورة مابني �سبتة وطنجة نهر �أليان وق�رص �أليان فيه �آثار أللول كثرية « .)38( - Qasr Denhaja : » ثم ت�سري �إىل ق�رص دنهاجة وهو على تل وحتته نهر عظيم وفيه �آثار أللول وبه كان ينزل ملوك املغرب يف قدمي الدهر « )39(. Ces exemples, et il y en a plusieurs en Afrique du Nord, montrent qu’à chaque fois le terme « qasr » est associé à des vestiges attribués aux Anciens En dehors de ce contexte, Al-Bakri utilise des termes différents .« أ�الول » .« مدينة «, » قاعدة «, » قرية «, »ح�صن «, » م�ساكن « , » قرارات » comme Pour revenir à « al-Qasr al-Awwal », qui nous paraît signifier « le château antique », Al-Bakri rapporte qu’il servait de résidence pour les Banu Tarif, sans toutefois préciser l’appartenance tribale de ces derniers. Leur nom, est- ce une simple coïncidence ?, n’est pas sans rappeler celui du chef musulman « Tarif » qui aurait traversé en Andalousie, justement à partir de Ksar Sehir, et dont le nom est également conservé par la ville de Tarifa située en face sur l’autre rive (et nommée anciennement « Jazirat Tarif »). Si maintenant notre interprétation du passage d’Al-Bakri est bonne, le seul point dans la basse vallée de Ksar qui puisse mériter le nom d’ « al- Qasr al-Awwal» est bien le site de Dhar d’Aseqfane. Situé à une distance de moins d’un kilomètre de la côte, il pouvait bien être accessible par voie fluviale. En effet, l’oued Ksar, actuellement ensablé à son embouchure, a dû probablement être navigable au moins jusqu’au site de Dhar d’Aseqfane. Il passe actuellement au pied de la colline sur le côté ouest. Si c’était aussi le cas à l’époque médiévale, il devait donc arriver jusqu’à l’enceinte antique dont la courtine ouest était peut-être encore en partie debout. Une porte percée dès le départ dans cette courtine en face de la rivière ne pouvait avoir d’autre fonction que de relier le site à celle-ci. Ajoutons enfin que les données archéologiques montrent qu’à l’époque d’Al-Bakri, le site était encore habité, peut-être par ces Banu Tarif mentionnés chez l’auteur d’«al-masalik wa al-mamalik ».

30 Notes bibliographiques

1. Akerraz A. 1998. 2. De Longpérier A. 1864 ; Lavoix H. 1887, p. 43-44. 3. Quintero Atauri P. et Gimenez Bernal G. 1944, p. 25. 4. Tarradell M. 1966, p. 432-435. 5. Ponsich M. 1988, p. 162-164 6. Ponsich M. et Tarradell 1965, p. 71-75 ; Ponsich M. 1988, p. 162-164. 7. Lenoir M. 1987, p. 442. 8. Pour ces différents types, voir Bonifay 2004, p. 132-137. 9. Ramon Torres J. 2008, p. 577, fig. 8 et p. 578, fig.9 . 10. Azuar Ruiz R. 1990, p. 109-122, fig. 2. Pour plus d’informations, voir la monographie « El ribat califal. Excavaciones y estudios (1984-1992)”, Collection de la Casa de Velazquez, vol. 85, 2004. 11. Rodrigues Marinho J. 1970 ; Martinez Enamorado V. et Torremocha Silva A. 2000 ; 12. Voir entre autres, Sénac Ph., Gasc S., Rebière G. et Savarese L. 2010. 13. Franchoso Sanchez R., Los feluses de al-Andalus, Madrid, 2001. 14. Voir Franchoso Sanchez R., Los feluses de al-Andalus, Madrid, 2001 et Walker J. A., Catalogue of the Arab-Byzantine and Post-Reform Umaiyad Coins, Londres, 1956. Nous n’avons malheureusement pas pu consulter directement ces deux importants ouvrages. 15. Voir Martinez Enamorado V. et Torremocha Silva A. 2000, p. 139. 16. Lavoix H. 1887. 17. Lavoix H. 1887, p. 412. 18. De Longpérier A. 1864, p. 53-58 ; Lavoix H. 1887, n° 1678. 19. Lavoix H. 1887, n° 1487. 20. Lavoix H. 1887, n° 1385, 1386, 1413, 1415. 21. Si l’on fait foi aux indications du site http://www.andalustonegawa.50g.com/ gov_ifriquiya_coinage.htm 22. http://www.andalustonegawa.50g.com/gov_ifriquiya_coinage.htm

31 23. Lavoix H. 1887, n° 1500, 1501 et 1503. 24. Lavoix H. 1887, n° 1473. .(ال�شابي م. 1966 �ص Information rapportée par Al-Maqrizi (cité par 191 .25 26. Périple du Pseudo-Scylax, 111 (d’après Roget R., 1924, p. 18) 27. Pline l’Ancien, V, 2. 28. Voir Roget R. 1924, p. 37. 29. Siraj A. 1995, p. 145 ; p. 602-606. 30. D’après Al-Bakri, p. 105 ; Siraj A. 1995, p. 93 et p. 145. 31. Al-Bakri p. 104. 32. Kitab al-istibsar, p. 138 ; Siraj A. 1995, p. 93 et p. 145. 33. Siraj A. 1995, p. 94 et p. 145. 34. Al-Bakri, p. 104-105. 35. Al-Bakri, p. 106. 36. Al-Bakri, p. 106. 37. Bernal D., El Khayari A., Raissouni B. et alii, 2011, p. 434-458. 38. Al-Bakri, p. 108. 39. Al-Bakri, p. 110.

32 Bibliographie http://www.andalustonegawa.50g.com/gov_copper_coinage.htm http://www.andalustonegawa.50g.com/gov_ifriquiya_coinage.htm Akerraz A. 1998 Recherches sur les niveaux islamiques de Volubilis, dans Cressier P. et Garcia-Arenal M. (éds), Genèse de la ville islamique en al-Andalus et au Maghreb occidental, Madrid, p. 295-304. Azuar Ruiz R. 1990 Una rabita hispano-musulmana del siglo X (Guardamar del Segura, , Espagne), dans Archéologie islamique, 1, p. 109-122/ Bernal D., El Khayari A., Raissouni B., Diaz J. J., Bustamente M., Saez A. M., Lara M., Vargas J. M., Escalon D., 2011 Del poblamiento litoral romano en la Tingitana mediterránea. Excavaciones preventivas en Metrouna y Sidi Bou Hayel, dans Arqueologia y Turismo en el Circulo del Estracho. Estrategias para la Puesta en valor de los recursos patrimoniales del Norte de Marruecos, Actas del III Seminario Hispano-Marroqui (Algeciras, abril 2011), p. 405-461. Bonifay M. 2004 Etudes de la céramique romaine tardive d’Afrique, BAR International Series 1301. Lavoix H. 1887 Catalogue des monnaies musulmanes de la Bibliothèque nationale. Khalifes orientaux, Paris. De Longpérier A. 1864 Monnaie bilingue de Tanger, dans Revue numismatique, n° 9, p. 53-58. Lenoir M. 1987 “Ab eo XXV in ora oceani Augusti Iulia Constantia Zilil”, dans L’ Romana, Atti del IV convegno di studio, Sassari, 12-14 dicembre 1986, Sassari, p. 433-444. Martínez Enamorado V. et Torremocha Silva A. 2000 Monedas de la Conquista : algunos feluses hallados en la ciudad de Algeciras, dans Caetaria, 3, p. 135-149.

33 Ponsich M. et Tarradell M. 1965 Garum et industries antiques de salaison dans la Méditerranée occidentale, Paris. Ponsich M. 1988 Aciete de oliva y salazones de pescado. Factores geo-econonmicos de Betica y Tingitania, Madrid, 1988. Quintero Atauri P. et Gimenez Bernal G. 1944 Excavaciones en Tamuda, Memoria resumen de las practicadas en 1943. Ramon Torres J. 2008 La cerámica ebusitana en la Antigüedad Tardia, dans D. Bernal Casasola et A. Ribera i Lacomba (éds), Ceramicas hispanoromanas. Un estado de la cuestion, Cadiz, p. 563-583. Rodrigues Marinho J. 1970 Monedas de cobre de epoca muçulmana encontradas em Beja, dans O Arqueologo Portugues, Serie III, 4, p. 277-293. Roget R. 1924 Le Maroc chez les auteurs anciens, Paris. Sénac Ph., Gasc S., Rebière G. et Savarese L. 2010 Note sur quelques fulus de Narbonnaise (première moitié du VIIIe siècle), dans Al-Qantara, XXXI, 1, p. 225-243. Siraj A. 1995 L’image de la Tingitane. L’historiographie arabe médiévale et l’Antiquité nord- africaine, Rome. Tarradelle M. 1966 Contribution à l’Atlas archéologique du Maroc : région de Tétouan, dans BAM, VI, p. 425-443. ال�شابي م. مقدمة لدرا�سة نقود �إفريقية العربية، يف جملة »�إفريقيا« 1966.

34 Ksar Seghir d’après les sources médiévales d’histoire et de géographie*

• Tarik Mojoud Conservateur du site archéologique de Tamuda

Introduction Ksar Seghir est l’un des sites clefs de la côte marocaine du détroit de . Les textes et les recherches archéologiques s’accordent sur l’intérêt particulier de son potentiel archéologique. Les ruines qui y subsistent toujours témoignent clairement de sa richesse et sa diversité patrimoniale. Les témoins d’un passé antique, islamique et portugais s’y juxtaposent pour fournir aux chercheurs un vaste champ d’étude.

fig. 1. Plan de la ville de Ksar Seghir -Epoque islamique, d’après Charles L. Redman

Les récits relatifs à l’histoire du site de Ksar Seghir à travers les sources médiévales d’histoire et géographies sont, dans leurs majorités, succinctes et incomplètes et c’est rare où elles se concordent. Dans cet essai de lecture, nous avons opté pour une méthodologie chronologique pour mieux organiser les informations historiques dont nous disposons et pour mieux en retirer profit. Une telle démarche permettra, à notre sens, d’appréhender l’histoire du site médiéval et de fournir une base de données pour approcher certaines problématiques historiques relatives à la fondation, à la présence des dynasties marocaines et aux multiples fonctions qu’aurait dû joué cet établissement

35 côtier (ribat, port militaire, centre industriel) pendant l’époque médiévale (fig. 1 et fig. 2).

fig. 2. le site dans son conetexte tribal régional- jbala ghmara (source O. Raji-Targha AIDE 2010)

Période pré-almohade De cette période, aucune information ou mention du site n’a pu être décelée dans les sources antérieures au Xème siècle. Par contre, si on se réfère aux sources postérieures (du Xème, XIème, et XIIIème ou tardives du XVème et XVIIIème siècle), on trouve des indications sur cette période du haut moyen âge correspondant au VIIIème, IXème, Xème, XIème siècles. La première mention du site dans une source qui date du haut moyen âge, est celle attestée chez al-Bekri (1) dans l’un de ses passages attribué à al- Warrak (2). Ce dernier cite dans sa description de la côte septentrionale entre Tanger et Sabta, un port nommée « Marsa Bab al-Yemm ». « …Voici ce qui dit Mohamed Ibn Youssouf : « le voyageur qui part de Tanger avec l’intention de se rendre à par mer, se dirige vers l’orient et rencontre d’abord Djbel El Manara «La montagne du phare», puis Marsa Bab al-Yemm, mouillage de la porte de la mer, rade sans abri, au près de laquelle on remarque quelques habitations, un ribat et un ruisseau qui se déchargent dans la Mer … » (3). Quant à al-Bekri, il le cite sous trois noms, Kasr al-Majaz (4), al-Kasr al-Awwel et Madinat al-Yemm. « …la route qui mène de Ceuta et Tanger et qui suit le rivage de la mer, traverse d’abord une plaine où l’on remarque de terres cultivées qui s’étendent jusqu’à la distance d’un mille…, et atteint la rivière de la ville d’al-Yemm, et d’El Casr el-Awwel «le premier château….» El Casr el-Awwel, habité par des Bani

36 tarif, entouré de vastes plantations d’arbres. Les navires peuvent entrer dans la rivière et remonter jusqu’à la muraille d’El- Casr … » (5). Cette appellation al-Kasr al-Awwel visait, peut-être, à éviter de le confondre avec Ksar el-Kebir ou Kasr Koutama, dont la fondation est postérieure de douze années (6). La deuxième mention du site qui date également de la même époque, est celle d’Ibn Hayyan (7). Nous ne la trouvons citée ou signalée chez aucun autre auteur (8). D’après Ibn Hayyan, une expédition militaire Ommeyade, commandée, par le chef de l’armée du calife al- Hakam al-Moustansir, Ghalib Ibn Abd Rahman, a arrachée aux gouverneurs locaux (9), le Marsa d’al-Yemm, connu également sous le nom de Bab al-Kasr «la porte du château», le jeudi des huit jours restant du mois de Ramadan 362h (10). A l’exception de ces deux textes du XIème siècle, tous les autres récits évoquant l’établissement au haut moyen âge sont postérieurs au moins de deux siècles, comme c’est le cas d’Ibn Abi Zar, sinon très tardifs tels Zayani et Naciri. Ibn Abi Zar, consacre trois passages dans son ouvrage (11) pour cette période du haut moyen âge. Dans le premier, il reprend le texte d’Ibn Hayyan (voir supra), lorsqu’il parlet de l’expédition d’al-Ghalib contre Hassan Ben Djanoun à Kasr Masmouda en 362h (12). Dans son deuxième passage, il mentionne une autre expédition antérieure à la première, qui a eu lieu sous le règne du calife Ommeyade Nacer. D’après lui, ce dernier a envoyé son armée pour combattre un dénommé Hamim, qui prétendait la prophétie dans les montagnes des Ghomara. Ce prétendant a été battu, incarcéré, tué, crucifié et décapité ensuite à Kasr Masmouda. Sa tête a été envoyée à Cordoue et ses disciples regagnaient, juste après, la foi de l’ (13). Dans le troisième passage, il mentionne la seconde traversée de l’Emir Almoravide, Youssouf Ibn Tachfin vers l’Andalousie, à partir de Kasr al-Majaz en 481h (14). Les récits de Zayani et Naciri (15), qui écrivait au XIXème siècle, nous ont conservés, deux brefs passages dans lesquels ils rapportent des informations sur le Ksar Seghir du haut moyen âge. Tout d’abord Zayani (16) qui attribue la fondation du Ksar Seghir à l’émir de la tribu des Masmouda (17) au temps de Tarik Ibn Ziyad. D’après ce chroniqueur, Tarik Ibn Ziyad a parti, probablement, de cet endroit pour conquérir l’Espagne (18). Pour sa part, Naciri rapporte qu’après la mort d’Idris Ben Idris « Idris II », le Maroc a été divisé en plusieurs principautés, l’une d’elles notamment celle de Kacem comprenait dans son territoire, Tanger, Sabta, Kasr Masmouda, Kalat Hajar Nasr et Tétouan (19). Pour compléter l’image du site de Ksar Seghir pré-almohade, il est indispensable de recourir aux d’études récentes, qui se sont basée sur les

37 sources déjà mentionnées ou sur d’autres. Parmi celles-ci, l’étude de Carlos Gozalbes Cravioto (20) dans laquelle il assigne au site de Ksar Seghir plusieurs appellations à savoir, al Khadra, et Marsa al Jaraz. Ces appellations, sont d’après lui citées respectivement chez Ibn Khurdadabih et Ibn Hawqal (21). Et à propos du toponyme al Khadra, Louis Massignon (22), pense qu’al- Khadra d’Ibn Khurdadabih, est probablement Ksar Seghir au lieu d’Algéciras. Il rapporte également que Ksar Seghir est cité par Ibn Hawqal et al-Bekri sous le nom de Kasr Masmouda. En effet, Ibn Khurdadab -ı h, mentionne al-Khadra « …wa Madinat sabta ila janib al- Khadra… » (23), mais cette mention est loin d’être admise, puisque s’il est question d’une localité à côté « Ila janib» de Sabta, il ne serait donc que Marsa Moussa, ou bien Ibn Khurdadab- ı h a voulu désigné par à côté « Ila janib», la localité d’al-Khadra, qui se situe sur la rive opposée en Andalousie. Or, les noms des localités mentionnées par Ibn Hawqal et al-Bekri et considérées par L. Massignon (24) et C. Gozalbes Cravioto (25), comme étant Ksar Seghir, ne pouvaient en aucun cas l’être, et ce, pour deux raisons : • al-Bekri ou d’Ibn Hawqal ne signalent pas Kasr Masmouda dans leurs ouvrages. al-Bekri n’a évoqué que trois noms du dit site : le premier attribué à al-Warrak qui est Marsa Bab al-Yemm, le second c’est al-Kasr al-Awwel, et le troisième est Madinat al-Yemm. • Aucun passage évoquant Marsa al Jaraz n’est signalé. Cependant, la seule indication qui est soulignée par Ibn Hawqal c’est celle d’al-Khadra. Mais cette dernière correspond, chez Ibn Hawqal à une autre localité que Ksar Seghir, et plus précisément, al-Khadra du Maroc central « al Mag. rib al awsat » non loin de Tahart « …wa asfal Tenes ala taraf al sura : al Khadra wa hiya ala nahr yati mina al asfal wa inda mubtad hada al nahr Tahart… » (26). Halima Ferhat, dans son étude consacrée à la ville de Sabta, a signalé Ksar Seghir, d’après une source relativement tardive, du haut moyen âge. Il s’agit d’al-Qadi Iyyad (27), qui selon elle, il a résolu un procès qui a opposé un commerçant de Kasr Masmouda à son associé Sabti. Certainement, ce récit est fiable parce qu’il se situe chronologiquement entre les deux récits d’al-Bekri, qui date du haut moyen âge et celui d’al-Idrissi qui lui est postérieur. Etant donné que le récit d’al-Qadi Iyyad est antérieur à celui d’al-Idrissi, d’au moins une quarantaine d’années, ceci explique pourquoi le toponyme Kasr Masmouda s’est perpétué jusqu’à l’époque d’al-Idrissi. Par ailleurs, le passage d’al-Qadi Iyyad demeure le seul texte antérieur à al-Idrissi qui signale Kasr Masmouda.

38 D’autres chercheurs, se sont basés sur des sources que nous avons, jusqu’ici, signalé (al- Bekri, Ibn Abi Zar, Zayani, Naciri) pour approcher certains événements de cette période de l’histoire de Ksar Seghir. Il s’agit, entre autre, d’Otman Otman Ismail (28), d’E.Michaux-Béllaire (29), d’Henri Terrasse (30), d’Ahmed Siraj (31) et de Mohamed Boujendar (32). Par conséquent, la chronologie qui ressort de cette analyse correspondant à cette époque se résume comme suit : le site semble être occupé avant le Xème siècle, par une population berbère, sous le contrôle des Idrissides du Nord. A ce propos, A. Siraj pense que la construction du ribat cité dans le passage d’al-Warrak et rapporté par al-Bekri date de cette époque (33). Néanmoins, il est loin de considérer que le site ait été important à cette époque même si les passages d’Ibn Abi Zar, Zayan et Naciri le remontent plus loin dans le temps (34), car ils n’ont pas signalé leurs références. A.Siraj considère que la construction d’un château sur le site par un chef des Masmouda, qui serait à l’origine du nom Kasr Masmoud, a eu lieu vers la fin du èmeX siècle et début du XIme siècle (35). Et enfin le texte d’al-Qadi Iyyad mentionnant pour la première fois Kasr Masmouda, remonte à cette époque, c’est-à-dire, la fin de l’époque almoravide et le début de la dynastie almohade. En effet, le site semble avoir, avec la conquête almoravide d’Andalousie, une importance particulière. Une partie de l’armée musulmane a probablement pris le site comme base et camp de concentration de l’armée et l’embarquement vers le Nord. Dynastie Almohade Il ressort que dès le début de la dynastie almohade, le cette ville avait un rôle de premier plan pour traverser vers l’autre rive vu les rapports étroits qui liaient les deux rives à cette période, le Maroc et l’Andalousie. Cette réalité se traduit par de nombreuses mentions dans les sources du XIIème siècle, et plus encore dans les sources postérieures. La première mention de l’établissement dans une source du XIIème siècle, est attestée chez le géographe al-Idrissi, qui terminera son ouvrage en 548h correspondant au début de la genèse de l’empire almohade. Il lui a consacré trois passages en le désignant par deux appellations : Marsa al-Ksar «le port du château qui est attribué aux Masmouda» et Kasr Masmouda «le palais des Masmouda. « Par ailleurs, il le décrit comme étant une grande forteresse «Hisn», au bord de la mer, où l’on construit des navires et des barques pour le passage en Andalousie, et il est le point le plus rapproché des côtes de l’Andalousie (36). La deuxième mention, est celle d’un géographe oriental : Yakout al-Hamawi, qui a rédigé son ouvrage en 624h, sous forme de dictionnaire alphabétique, repris sous une forme abrégée par Abd Al-Moumen Ibn Abd Al-Haq. Dans

39 ces deux dictionnaires géographiques on trouve sa situation géographique sur le détroit et en face de Tarifa (37). La troisième mention à l’époque almohade, est signalée par Kitab al-Istibsar, rédigé vers la fin du XIIème siècle. Ce texte situe Ksar Seghir juste après Marsa Moussa, sous le nom du Marsa Bab al-Yemm, sur lequel s’élève un village, connu par le nom de Kasr Masmouda, au bord d’un oued à eaux douces, qui débouche à la mer. De cet endroit, la traversée vers Tarifa est plus proche dont la distance est de 18 milles (38). Apparemment, l’auteur anonyme d’al-Istibsar s’est fondé sur les écrits al-Bekri ou al-Warrak d’où la conservation de toponyme Marsa Bab al-Yemm relativement disparu à cette époque en faveur d’un autre, celui de Ksar Masmouda. La quatrième mention, est celle d’Ibn Sahib Salat (39). Il nous a transmis de nombreux passages, qui datent les différentes traversées vers l’Andalousie, sous le règne d’Abd al- Moumen (40) et de son successeur Youssouf Ibn Abd al-Moumen (588-580h / 1163-1148), tout en usant un seul toponyme, celui de Kasr Masmouda (41). Parallèlement aux sources du XIIème siècle, les sources postérieures (42), présentent un nombre assez considérable de passages dans lesquels la ville de Ksar Seghir est omniprésente comme un point incontournable pour le passage vers l’Andalousie. Plusieurs califes almohades y ont effectués la traversée (43), depuis les premiers califes jusqu’aux derniers. Mais le nom du calife Yakoub al-Mansour (1184-1199), demeure le plus souvent rattaché à Ksar Seghir. En effet, si on croit Jean Léon l’Africain et Marmol Carbajal, la ville aurait été bâtie par ce calife, qui avait remarqué les avantages qu’offrait l’emplacement : « …cette petite ville fût bâtie par Mansur, roi et pontife de Marrakech, sur le bord de l’océan à environ 12 milles de Tangia et 18 milles de Sebta. Il la fonda parce qu’il avait besoin d’aller à Grenade tous les ans avec son armée et qu’il était difficile de traverser certaines montagnes des environs de Sebta par lesquelles passe la route qui mène à la mer. Cette ville est dans un beau site de plaine… » (44). En outre, c’est ce calife qui a attribué le nom de Ksar Seghir à cette ville. Selon M. Carbajal, il l’a nommé ainsi, parce qu’il n’y a élevé, d’abord, que des petites habitations par rapport à celles de Ksar el Kebir, mais peu de temps après, il y a construit plusieurs maisons et mosquées (45). Certainement, ces deux auteurs qui évoquent la question de la « construction » et celle de la « dénomination » sont peu plausibles. D’abord la date de la fondation de cette ville est bien antérieure au XIIème siècle. L’établissement est déjà citée par al- Warrak, Ibn Hayan et al- Bekri au Xème siècle et au milieu du XIème siècle même si la date exacte de l’acte de fondation demeure imprécise (46). Ensuite, sa dénomination actuelle, et qui est la dernière,

40 est postérieure à l’époque almohade, d’au moins deux siècles, puisque ni les sources de l’époque almohade (47), ni celles de l’époque mérinide n’ont font allusion. L’appellation « Ksar Seghir » remonte donc, apparemment de la moitié du XVème siècle. Elle est citée, en effet, pour la première fois, par J. L. l’Africain et M. Carbajal (48). Or, l’ensemble des notes et mentions, quoique succinctes, relatives au site à l’époque almohade, dans les études récentes (49), s’accordent sur l’intérêt singulier de Ksar Seghir pendant cette époque. Une grande partie de ces notes sont extraites des récits tardifs (50). Certaines de ces mentions paraissent intéressantes. J. E Myers rapporte que l’Emir almohade Yakoub Youssouf avait passé en 1184, une semaine à Ksar Seghir, où il avait entretenu des négociations avec les Cheikhs des Bani Hilal, maîtres locaux de la région (51). De son côté, Emilien Renou a dû, probablement, consulter deux des principales sources du moyen âge, al-Bekri et al-Idrissi, ce qui lui a permis de parvenir à des pertinentes déductions (52) : Le site existait déjà au temps de Yakoub al-Manssour, puisqu’il est déjà cité chez al- Bekri (qui écrivait en 1067) et chez al-Idrissi (qui termina son ouvrage en 1154). Yakoub al-Manssour n’est assurément pas le fondateur, mais il a vraisemblablement rebâtit et agrandit Ksar Seghir. Cependant, d’autres informations semblaient induire en erreur, parmi lesquelles celle rapportée par Abdelaziz Ben Abdellah dans son ouvrage « villes et tribus du Maroc » (53). Il attribue la fondation de Ksar Seghir au calife almohade Yakoub al- Manssour, ce qui n’est, certainement, pas vrai, comme on venait de le démontrer ci-dessus. L’autre mention est citée respectivement par deux historiens. Abdellah Laroui désigne Ksar Seghir par Kasr Koutama, lorsqu’il parle des ports les plus actifs de la rive septentrionale (54). Il en va de même pour M. A. Inan qui attribue le toponyme de Kasr Koutama à Ksar Seghir, en relatant les événements qui ont eu lieu au temps de Nacir (595-610h/ 1199-1213) et d’al-Mourtada (640-646h/ 1292- 1248) (55). Cette correspondance relève d’une confusion, car le toponyme Kasr Koutama a toujours désigné l’actuel Ksar El-Kebir. Enfin, les recherches archéologiques menées à Ksar Seghir durant la deuxième moitié des années soixante dix et au début des années quatre- vingts ont attesté l’existence d’un niveau d’occupation qui correspond à la fin de l’époque almohade et à la première période de la dynastie mérinide (1190-1350). Ce niveau traduit par plusieurs structures archéologiques, à savoir, la mosquée et certaines maisons. Mais ces résultats paraissaient insuffisants si on prend en considération le rôle important que les textes assignent à cet établissement pendant l’époque médiévale.

41 Dynastie Mérinide La chute de la dynastie almohade et la dislocation de leur empire, en trois forces régionales, les Hafssides en Ifriquia, les Bani Abd al-Wad au Maghreb central et les Mérinides au Maghreb extrême, a favorisé la pression étrangère sur les ports du Nord du Maroc dont celui de Ksar Seghir bien évidemment. En réalité, nous ne possédons pas des textes très explicites qui peuvent nous renseigner sur ce qui était la ville de Ksar Seghir et son statut pendant cette période de chute et transition. Etait-elle un port dépendant de Sabta sous le règne des Azafides? 56( ) ou était-elle, de bonne heure, sous la domination mérinide qui s’est accaparée du Nord du Maroc, dans leur marche contre les almohades? Mais sur la période mérinide, on dispose de plusieurs sources variant entre sources géographiques et historiques, qui évoquent le site à maintes reprises. Les sources géographiques mentionnent le site souvent lorsqu’elles entament une description du détroit de Gibraltar ou de la côte septentrionale du Maroc. C’est le cas chez Abou al-Fida (57) et Ibn Said al- Mahgribi (58). Ces deux auteurs utilisent le toponyme de Kasr al-Majaz pour désigner cetétablissement. Concernant les sources historiques, quoiqu’elles sont nombreuses par rapport aux époques précédentes, elles ne fournissent pas suffisamment d’informations au-delà de celles qui se rapportent aux traversées vers l’Andalousie, à l’exception d’Ibn Abi Zar et Ibn Khaldoun (59). La plus ancienne mention du site à l’époque mérinide est enregistrée chez Ibn Abi Zar. Qunad celui-ci parle de la décision de l’Emir mérinide Yakoub Ibn Abd al-Hak (656h-685h) pour traverser vers l’Andalousie pour stopper la marche chrétienne, qui venait de prendre Séville en 643h par Alfonse. Mais après avoir rencontré le Cheikh Yakoub Ibn Haroun à Kasr al- Majaz, il est revenu sur sa décision (60). Une trentaine d’années après, à partir de 673h, une série de traversées se perpétuaient au moment de l’intervention mérinide en Andalousie, sous le règne des premiers sultans mérinides : Yakoub Ibn Abd al-Hak (656h- 685h) et sous son successeur Youssouf Ibn Yakoub (685h-706h). Vers la fin du XIIIème siècle et le début XIVème siècle, Ksar Seghir a, peut-être changé de fonction. Il est devenu, probablement, un des refuges des pirates. On y construit toujours des navires, non plus pour transporter l’armée en Andalousie, mais pour faire la course sur les côtes de celle-ci, et intercepter les navires chrétiens qui sillonnaient le détroit de Gibraltar (61). Donc, à l’exception des passages sur les traversées des deux premiers sultans mérinides, les textes sombreront dans un silence jusqu’au XVème siècle. Par conséquent, d’Ibn Abi Zar (62) et Ibn Khaldoun (63), nous ont permis d’appréhender le rôle du cette ville notamment au début de la dynastie

42 mérinide. En fait, Ksar Seghir a conservé son importance qu’il avait déjà acquise au temps des almohades, comme un port indispensable pour la traversée et comme un chantier de la construction navale. En outre, le toponyme utilisé durant l’époque almohade Kasr Masmouda a été retenu à l’époque mérinide, chez Ibn Khaldoun et Ibn Idari (64). Le premier l’a utilisé peut- être parce que les tribus des Masmouda continuaient à occuper cette contrée, en plus ce dernier avait une grande connaissance des tribus du Maroc et de leur territoire. Alors que le second l’a indiqué en évoquant les traversées des califes almohades vers l’Andalousie. Cependant, on a deux autres toponymes qui datent probablement de l’époque mérinide : 1er : Kasr al- Jawaz : même si on le trouve déjà chez al-Bekri au XIème siècle, il ne paraît pas être très employé à cette époque vu la fréquence d’autres appellations. Ce surnom est utilisé respectivement par Abou al- Fida, Ibn Abi Zar, Ibn Said al- Mahgribi et tardivement par Naciri. 2ème : Kasr al-Majaz : On le rencontre également chez Ibn Abi Zar, al-Badissi (65), l’auteur anonyme d’al-Houlal Al-Mouchiyya (66), et tardivement al-Maqqari (67). Mais le texte le plus important pour l’histoire du site, est celui rapporté par Ibn Abi Zar dans lequel il traite de la construction de l’enceinte et des portes de la ville de Ksar al Majaz . D’après Ibn Abi Zar, elles ont été élevées sous le règne de Yusuf Ibn Abd Al- Haq.au moi de Ramadan de 686 de l’hégir « …wa Fi sanat sitin wa tamanin (69), gaza Amir al Muslimin Yusuf bi qiblat Bilad Dara, wa Fi sahr Ramadan Minha Buniya Sur qasr al- Magaz wa Rukibat Abwabuh » (68). Ce récit paraît être crédible, si on croit les résultats des fouilles de la mission maroco-américaine. L’enceinte, les portes et les différentes structures, mises au jour jusqu’ici, remontent vraisemblablement à cette période, vu la ressemblance de leur plan, leur style de décoration à ceux d’autres monuments datant de cette même période au Maroc (69). Le site a continué d’exister au-delà du XIVème siècle, comme un point important de piraterie (70) et un entrepôt indépendant qui approvisionnait le royaume assiégé de Grenade (71). Cette activité à laquelle se livrèrent les habitants de Ksar Seghir, favorisée, en même temps, par l’anarchie qui régnait au Maghreb à la fin de la dynastie mérinide, encouragea les Portugais à marcher sur le Nord du Maroc, en occupant tout d’abord Sabta en 1415 sous le règne de Jean 1er, puis après Ksar Seghir en 1458 sous le règne de Alphonse V. Il demeura sous leur contrôle jusqu’à 1550 lorsqu’ils décidèrent de l’abandonner au temps de Jean III (72).

43 Conclusion En guise de conclusion, les constations qui ressortent de cette lecture des textes historiques et géographiques relatifs à l’établissement médiéval de Ksar es-Seghir sont les suivantes : • Le site est omniprésent dans les sources historiques et géographiques, au moins depuis la moitié du Xème siècle, comme en témoigne le passage d’al-Warrak cité par al-Bekri. • Le site avait plusieurs toponymes qui sont liés probablement à certaines périodes historiques. Marsa bab al-yemm, Marsa al-yemm, Bab al-Kasr, Madina al- yemm, al-Kasr al-awwel Ces toponymes appartenaient au haut moyen âge, en considérant qu’ils sont cités dans ses sources. Cinq toponymes qui sont attribués au site dans une période qui ne dépasse pas deux siècles. Le site semble exister à l’époque Idrisside ou même avant lors de la conquête musulmane de l’Espagne, mais il ne paraît pas qu’il était de grande importance puisque ni les sources contemporaines de cette époque, ni les témoins archéologiques fournissent des informations. Vers la fin de la dynastie idrisside et l’intervention ommeyade et fatimide au Maroc, le site semble jouer un rôle important, vu sa mention dans les sources de l’époque notamment ’ibn-Hayan. Cette importance va se favoriser avec la formation de l’empire almoravide et surtout lors de leur intervention en Andalousie. Kasr Masmouda Ce toponyme paraît relatif à l’époque : fin almoravide (73) et durant l’époque almohade, période dans laquelle le site a pris un nouveau essor. Comme al-Idrissi le signale, le site était une grande forteresse et un chantier de construction navale. Cette information trouve sa justification dans l’intérêt accordé à la construction des navires à l’époque almohade. A cette époque la flotte marocaine était l’une des plus redoutée de toute la Méditerranée. En plus le site a profité probablement des relations qui liaient les deux rives. Kasr al-majaz, Kasr al-jawaz. Ces toponymes sont liés probablement à l’époque mérinide, si on excepte la seule mention d’al-Bekri (74). Il semble qu’ils n’étaient pas très usités à cette période car ils sont absents dans les sources du haut moyen âge et celles de l’époque almohade. D’ailleurs la fréquence de ces deux toponymes dans les

44 sources de la dynastie mérinide nous incite à les faire correspondre à cette période. Apparemment le site a conservé son importance dans les contacts Maroc-Andalousie, surtout au temps des premiers sultans mérinides .Mais avec l’arrêt définitif des interventions au temps des sultans ultérieurs, le site commençait à perdre de son importance. Ksar Seghir Ce toponyme est vraisemblablement postérieur à l’époque mérinide. On pense qu’il s’est associé au site à une époque où ce dernier s’est tenu indépendant vers la fin de la dynastie mérinide, sous le court règne des Wattassides et sous l’occupation portugaise. A cette époque le site semblait subir les contres- attaques de la reconquête chrétienne sur la rive méridionale du détroit. Ce mouvement va couronner ses efforts par la prise de Sebta en 1415 après J-C et juste après Ksar Seghir en 1458 après J-C. Enfin on peut déduire que le site a vraisemblablement changé de toponyme en fonction du rôle qui lui était attribué sous les différentes dynasties, de l’installation de certaines tribus (75), de changement de son importance (76) ou peut être de sa relation avec d’autres localités (77). En outre, les autres textes que nous avons consulté, mais sans avoir pu les dresser sur le tableau (voir annexe), sont tardifs (78) ne font que relater les toponymes et les évènements cités par les sources antérieures à l’exception de deux passages qui évoquent le haut moyen âge : Zayani remonte la fondation de Ksar Seghir à 90.H, par un émir des tribus des masmouda. Naciri considère que le site est une ville qui faisait partie du royaume idrisside du Nord. Mais ces deux récits très tardifs sont loin d’être faible puisqu’ils ne citent pas leur référence.

45 Annexes

Auteurs et Date Topo-n Contenu nyme Commentaire Sources Source - Nature du Site des passages Ibn Kurdada-b Il ne cite aucune bih « Al Mort vers localité qui pourrait Masalik wa Al 272h / 892. Aucun Aucun correspondre à Ksar Mamalik » (Geog. Ori) Seghir Muhamed Ibn Youssouf al 292-363h Description : rade sans Le passage nous est Warrak /904-973 Marsa Bab abri avec quelques parvenu par l’inter-m (D’après (Geog. Occi) el - Yemm habitations, un ribat, un médiaire d’al- Bekri.. Al –Bekri) ruisseau. Ibn Hawqal Il cite seulement « Surat Al Vers 988 Aucun Aucun Marsa Moussa entre Ard » (Geog. Orin) Sabta et Tanger. Ibn Hayan « Marsa el Al Muktabas 377-469h – yemm. Expédition Oummeyya-d Une concordance Fi Akhbar Al (Hist) Bab el de sur le Marsa Bab el avec le toponyme d’Al Andalus » Kasr – yemm (362h) Warrak. Kasr al Al Bekri « Al Mort. 487h / Majaz. Il s’est fondé sur la Masalik wa Al 1094 Al Kasr al description d’al- Mamalik » (Geog. Occi) Awwel. Description : (voir supra) Warrak, mais il a Mdinat el fourni plusieurs yemm. toponymes du site. Al Idrissi Marsa à al Description : une grande La survivance d’un « Nuzhat 493- Kasr forteresse au bord de la toponyme ancien, Al Mustaq 560h/1100- Kasr Mas-m mer, où on y construit avec l’émergence d’un Fi Ihtiraq Al 1166 (Geog. mouda. des navires et des bar-q autre Kasr Mas-m Afaq » Occi) ques. mouda. La survivance du Marsa Bab Description : un village toponyme ancien. « Al Istibsar » 587h/1191 el yemm. bati les bords d’un oued à Probablement, il a (His. Geog) Kasr Mas-m eaux douces. copié sur al-Warrak mouda. et al-Bekri. Ibn Sahib Traversée du gouverneur al-Salat « Al 594. H / de Sabta 557. H. L’absence du Manbial 1198 après Kasr Masm- Traversées de Youssouf toponyme ancien Imami » J.C. mouda Ibn Abd al-Moumen en en faveur de Kasr (His) 560,561 et 566h. Masmouda. Yakut Al 575- Hama « Mug-m 626h/1179- Kasr Masm- Description : situation mal » Buldan 1229 mouda. par rapport au détroit. Aucun. (Geog. Ori) Ibn Said Al 610- L’utilisation d’un Magribi « Al 685h/1214- Kasr al Description : situation nouveau toponyme Gugrafia » 1286 (Geog. Majaz géographique par rapport apparemment lié à Occi) au détroit et au l’époque mérinide.

46 Ibn Idari « Al Traversée de Youssouf Bayan Al Ma-g Fin du 7ème Ibn Abd al-Moumen en grib Fi Dikr siècle. H. 566h. Apparemment c’est Ahbar Al 13ème siècle Kasr Masm- Traversée de Yakoub al le toponyme le plus Andalus wa après J.C. mouda -Mansour en 586h. utilisé à l’époque Al Magrib » Hisn Traversée de Yakoub al almohade. -Mansour en 591h. Al Badisi « Al Manza Al 650. H / Latif wa Al 1252 après Kasr al Traversée des Mujahidi-n Un toponyme dé-r Maqsad Al J.C. Jawaz nes en Andalousie. rivé de celui Kasr al Sarif Fi Dikr Majaz Sulh Al Rif » « Al Hulal Al Musi yya Fi Kasr al Deux traversées du calife Un toponyme dé-r Al Ahbar Al Hisn Jawaz Yakoub Ibn Abd al-Haq. rivé de celui Kasr al Murakusiyya » 673-674h. Majaz Réunion Yakoub Ibn Abd al-Haq 643h. Vraisemblablement la dénomination de Traversée de Yakoub Ibn Kasr al-Majaz et Kasr Abd Al Haq 673h. al Jawaz remonte à Traversée de Yakou Ibn l’époque mérinide. A Abd Al Haq 674h, et le l’exception d’al-Bekri, retour en même année les sources antérieures 674h. n’ont jamais fait allu-s Expédition omeyyade en sion à ces appellations Ibn Abi Zar Al 362h. En plus, l’utilisation Fasi Kasr al Expédition omeyyade en du toponyme de Kasr Masmouda pour « Al Dahira 710 – 720 H Jawaz Kasr 325h. al Majaz l’époque pré-Almo-h Al Sania Fi 1310 – 1320 Traversée de Youssouf Ibn hade chez Ibn Abi Zar Ahbar Al après J.C Tachafin en 481h. Dawla Al relève certainement (Hist) Ksar Mas-m Traversée d’Abou Hafs de sa connaissance des Mariniya » mouda père de Youssouf en sources antérieures, « Anis Al Mu-t Kasr al- 565h. au lieu d’utiliser le taib Bi Rawd Majaz Traversée Yakoub al- toponyme exacte de Al qirtas Fi cette époque Marsa Ahbar Muluk Kasr al- Mansour en 585h-591h. Jawaz Bab al-Yemm, ou AL Al Magrib wa Traversée de Nacer en Kasr al-Awwel comme Tarih Madinat 609h. il se présentait dans les Fas ».• Traversée de Yakoub Ibn sources. Abd al-Haq 673-674- Ibn Abi Zar a préféré 674-676-683-684h. de jouer avec le to-p Traversée de Youssouf Ibn ponyme pour que les Yakoub Ibn Abd al-Haq lecteurs ne se rend pas 685-690h. compte qu’il a copié, Construction de la mu-r ceci paraît clairement raille de Ksar Seghir et de lorsqu’il n’a pas utilisé ses portes en 686h. Kasr Masmouda pour l’époque almohade.

47 Description : situation Abou 672- Kasr al- géographique par rapport « Taqwin Al 732h/1273- Majaz à Sabta, Tanger et par Aucun Buldan » 1283. rapport à la péninsule Ibérique.

Abd Al Moumen Ibnn Il cite seulement que ce Abd al-Haq Kasr Masm- Il a certainement Mort en Kasr est au Maroc. al- Baghdadi mouda confondu Kasr 739 h. Kasr Abd al-Karim, prés Abd Al Karim « Maqasid Al Kasr Abd (Géog. Ori) de Sabta et en face de (Ksar el Kebir) Itila ala Asma al-Karim l’Andalousie avec Ksar Seghir. Al Amkina wa al Bi qa »

Passage de Yakoub Ibn Ibn khaldoun a Ibn Khaldoun Kasr al Abd al-Haq en 676-683 désigné cet endroit 732- « Kitab Al Majaz h.684h. ville par Kasr 784h/1332- Masmouda, parce Ibar », Tarikh Kasr Mas-m Passage de Youssouf en 1382 qu’elle se trouve dans ibn Khaldoun mouda 690h. Histoire un territoire occupé Kasr al-Majaz attribué au par des tribus Masmouda. masmouda.

Ibn Abd al- Moumen al Une grande forteresse où H - ı myari. Mort en 900 Kasr Masm- on y construit des navires Il a sûrement copié « Al Rawd (Geo. Occi) mouda et des barques. al-Idirssi. Al miyar Fi Ahbar Al Aqtar »

Ksar Seghir est anté-r rieur à l’époque d’ al-Mansour almohade, ce dernier Description géographi-q a probablement J. Léon reconstruit ou embelli 901- que bâti par al-Mansour, L’Africain Ksar Seghir puisque ce 906/956h/ Casar Ez occupé par les Pportugais « Description dernier est déjà attesté 1496-1548 Zaghir en 1459. ème de l’Afrique » au 9 siècle. Voyage Le toponyme est nouveau. Date probablement de cette époque pour le distinguer de Ksar el Kebir.

48 Certainement ce n’est pas al-Mansour qu’il l’a nommée puisque Il copie que J.Léon aucune mention Séjourné au du site sous ce Maroc L’Africain mais il parle en détail de la nom n’a été attestée Marmol 942 – 947 prise de la ville par dans les sources Carbajal H. Casar Ez les Portugais. de l’époque « Ifriqiya » 1535 Zaghir almohades ou C’est al-Mansour – 1540 après même mérinides. qui a bâti Ksar Seghir J.C Pour cette raison, et il a décidé de la (Voy) nous pensons nommer ainsi. qu’il s’agit d’une désignation locale qui s’est propagé après la prise de la ville.

49 Notes bibliographiques

*Le présent article, élaboré à partir de notre mémoire de fin d’étude « Ksar Seghir islamique. Étude d’histoire et d’archéologie » soutenu à l’Institut National des Sciences de l’Archéologie et du Patrimoine, Rabat, 2000, porte essentiellement sur les différents toponymes de Ksar-Seghir dans les sources de l’histoire et de la géographie médiévale en vue de restituer l’histoire du site, évaluer son importance sous les dynasties marocaines. 1- Mort en 487h. / 1094. 2. 292-363h. / 904-973 3- al-Bekri, Description de l’Afrique septentrionale, traduite par de Slane, puis Adrian Maisonneuve, 1965, p. 265. 4- Ahmed Siraj, L’image de la tingitaine, Historiographie Arabe Médieval et l’antiquité Nord-Africaine, C.E.F.R, Rome, 1995. A. Siraj signale qu’al- Bekri utilise ce toponyme, mais pour notre part, on n’a pas pu déceler cette citation, op. cit, (1995), p. 334. 5- Ibid. 6- Ed. Micahux-Béllaire et A. Pérétié, « El-Qçar Eç-Ceghir », in Revue du Monde Musulman, 5ème Année, Décmbre, N° 12, 1911, p. 339-344, (voir p. 350). A. Siraj, op.cit (1995), p. 602. 7- Peut être qu’Ibn Hayan est antérieur de quelques années à al- Bekri, (377- 469 h). 8- Toutes les notes ou les études concernant le site de Ksar Seghir, n’ont pas signalé le passage d’Ibn Hayan y compris Charles. L. Redman dans sa monographie sur le site publiée en 1986. 9- Probablement Idrissides, puisque Naciri fait du site, une partie du territoire de Kacem l’idrisside, Comme le rapporte beaucoup d’historiens, cette expédition a arraché aux idrissides du Nord Kasr Masmouda, al-Basra et la forteresse de Hajer Nasr. Cependant Ibn Hawqal nous apprend qu’à cette époque les Ommeyades n’avaient qu’un seul poste au Maroc, celui de Sabta. Il rapporte également que Hasan Ben Djanun al- Hasani al-Fatimi, a construit Zalul. Alors que le récit d’Ibn Zar, rapporte que l’expédition d’al-Hakam contre Kasr Masmouda a été contré par Hasan Ben Djanu ce qui signifie, probablement, que cette expédition était contre les Fatimides installés au Maroc et non contre les Idrissides du Nord. 10- Abi Marwan Ibn Hayan al- qurtubi, AL Muqtabas Fi Ahbar al- Andalus, par Abd Rhahman Ali Haji, Beyrouth, 1965 tome 4, p. 116. 11- Ibn Abi Zar Al- Fasi (mort entre 710-720h - 1310-1320), al- Anis al -Mutr ı-b bi Rawd Al- qirtas Fi Ahbar- Muluk Al- Mag . rib wa Tarı-h Madinat Fas, Rabat 1936.. 12- C’est à dire l’époque du haut moyen âge. 13- Ibn Abi Zar, op. cit, (1972), p. 99. 14- Ce passage est cité également par Ibn Khaldoun.

50 15- Naciri reprend également ce passage. Kitab- al Istiqsa- Li ‘Ahba- r Duwal al Mag. rib al Aqsa- , annotée par Jaafar Al- Nasirı- et Mohamed Al- Nasirı- , Da- r al Kita- b, Casablanca, 9 vols, 1954. 16- E. Confourier, «Description géographique du Maroc d’Az- Zyany» (traduction) A.M, vol. VI Paris, 1906, p. 436-457. 17- Un voyageur qui a écrit sa Rihla au temps du Moulay Slimane. 18- Sans préciser le nom de cet émir, E.Michaux-Béllaire pense qu’il s’agit de Youlian, alors que A. Siraj rejette cette hypothèse. Cf. M. Bellaire et alli, op.cit, (1911), p. 329 et A. Siraj, op.cit, (1995)p. 603. 19- Naciri, Al istiqsa li Ahbar Al -Magrib al Aqsa, Tome I, p 172. 20- Carlos Gozalbes Cravioto, «la costa africana del Estrecho de Gibraltar en los siglos XV y XVI». Cuadernos de la Biblioteca Espanola de Tetuan,1977, p 154. 21- On s’est contenté de citer deux au corps du texte qui sont liées à la période étudiée, voilà les autres surnoms : al Kasr Awwal, Kasr Masmouda, Kasr al-Majaz, Kasr al-Medj qui selon lui sont cités respectivement par : al- Bekri, al- Idrissi, Ibn Said al-Maghribi et Abou Al- Fida. 22- Louis Massignon, « le Maroc dans les premières années du XVIème siècle, Tableau géographique d’après L. l’Africain », I.G, vol 139 reprint the édition Alger, 1906, 1993, p. 241. 23- Ibn khurdadab- ı h, Kitab al –Masalik wa Al- Mamalik, ed, M.J.de, 1889, p. 55. 24- C. Gozalbes Gravioto, op.cit, (1977) 25- L. Massignon, op.cit, (1993). 26- Ibn Hawqal, Surat Al- Ard, Tome II, p. 68. 27- Halima Ferhat, Sabta : Des origines au XIVème siècle. éd. al- Manahil 1993, p. 274. 28- Othman Othman Ismail a confondu dans son ouvrage, Al- Funun Al- Islamia wa Al- Al -Arabia Bi Al- Ma rib al- Aqsa, p 82, entre les sources, puisqu’il a rapporté que Ibn Hawqal a cité la ville de Ksar Seghir sous le nom de al Kasr al- Awwel, ce qui n’est pas vrai, car Ibn Hawqal n’a mentionné aucune localité qui pourra correspondre à l’actuel Ksar Segir (voir supra). En plus le toponyme al Kasr al-Awwel est cité par al-Bekri. Charles Tissot, a attribué Kasr Masmouda à al- Bekri (dans sa «géographie comparée…», op.cit, p. 171) ce qui n’est pas le cas, car al- Bekri n’a évoqué que deux toponyme al-Kasr al-Awwel, Marsa (ou ville) Bab al-Yemm. On pense que Ch.Tissot a dû commettre cette confusion en se basant sur une traduction d’al- Bekri, et surtout lorsque ce dernier fait allusion au territoire des Masmouda entre Sabta et Tanger, sur lequel s’élève le site de Ksar Seghir. 29- E. Michaux-Béllaire et alli , op.cit, (1911), p. 329. 30- HenriTerrasse, Histoire du Maroc : Des origines à l’établissement du protectorat Français, Tome I, p. 190-235. 31- A.Siraj, op.cit, (1995), p 602. 32- M.Boujandar, Muqadimat al fath min tarih Ribat al fath, Rabat 1927, p. 22.

51 33- A.Siraj, op.cit, (1995), p 603. 34- Notamment Zayani, qui rapporte que la date de sa fondation est de 90.H. 35- A.Siraj, op.cit, (1995), p. 603. 36- Al- Idrissi, (493-560h / 1100-1166) le Magrib au 12ème siècle après J.C (6ème siècle de l’Hégire), texte établi et traduit en Français d’après Nuzhat al Mustaq, par Mohamed Hadj Sadok, co- édition, published, Paris 1983. p 55. […face à Tarifa, sur l’autre rive, est Marsa Al – Qsar (= le port du château) qui est attribué au Masmuda… ] p 163, […de Sebta à Qsar Masmuda à l’Ouest, il y a douze milles. C’est une grande forteresse au bord de la mer, où l’on construit des navires et des barques pour le passage en Andalousie. Elle est sur le détroit à la pointe la plus avancée vers les rives andalouses…] p. 166 et […de Qsar Masmuda à Tanger, à l’Ouest, il y a vingt milles…] p. 166. Nous avons consulté le texte arabe avant d’opter pour la traduction, pour s’assurer de sa fidélité. 37- Abd Al- Haq al Baghdadi, a commis une erreur quand il parlait de Qsar Abd Al- Karim, il le situe en face d’Algésiras près de Sabta. 38- Kitab Al- Istibsar Fi Ajaib Al- , par un écrivain marocain du 6ème siècle de l’Hégire (XII. S J.C) par Dr. Saad Zaghlul Abd el Hamid, U. d’Alexandrie, 195, p 138. 39- Abd Al- Malik Ibn Sahib al-Salat, Tarih Al- Man Bi Al- Imama ala Al- Musta Dafı-na bi An galahum – Allah-Aimat wa galahoum Al- Waritin, par Abd Al- Hadi Al- Tazi, Beyrouth 1964. 40- Ce n’est pas Abd Al- Moumen lui même qui a traversé de Kasr Masmouda, mais c’est Abou Said, Ibn Sahib al-Salat, op.cit, (1964), p. 191. 41- Dans les passages qu’il a cité, il n’a utilisé que le toponyme de Kasr Masmouda 42- Les sources de l’époque mérinide, ou tardives, XVème, XIXème, siècle. Ibn Abi Zar, Naciri, Zayani, J. Léon l’Africain. 44- Ibn Abi Zar et Ibn Sahib Al- Salat parlent des traversées de Youssouf Ben Abd al- Moumen (558-580h). Ibn Abi Zar et Ibn Khaldoun parlent des traversées de Yakoub al- Manssour (580-595h/1184-1199). Ibn Abi Zar et Naciri parlent de la traversée de en-Nacer (595-610h/ 1199-1213). Naciri parle de la traversée d’al- Adel (620-624h/ 1224-1227). 44- J. Léon l’Africain, Description de l’Afrique, Tome I, p. 271, édition traduite de l’Italien par A. Epaulard et autres, Adrien Maisonneuve, Paris (6ème siècle), 1956. 45- Marmol Carbajal, Afriqiya, traduite en Arabe par M. Haji et autre, Dar Al- Marifa, Tome 2, 1989, Rabat p 213-216. 46- Dans les sources déjà citées. On sait que Zayani a donné la date de fondation 90 de l’Hégire, mais cette date demeure invraisemblable, parce Zayani ne cite pas sa source d’information. 47- al- Idrissi, al- Istibsar, Ibn Sahib al-Salat. 48- On n’a aucune mention antérieure à leur époque, utilisant le toponyme Ksar Seghir. En plus leurs passages ne sont pas explicite, pas de date de fondation, ni de l’élévation de quelques monuments. 49- Y ver Y, «Al- Ksar al Seghir», E.I. 2, IV, p. 759, E. Michuax Béllaire et Pérétié, op-cit, (1911), p. 323. A.Siraj op.cit, (1995) p. 603, H. Ferhat,

52 op.cit, (1993), A. E. de la Primaudaie, «villes maritimes du Maroc», R.A. 6ème année juillet, Alger 1872 50- Naciri, Zaya- nı- , J. Léon. l’Africain, M. Carbajal. 51- J. E. Myers, The political economy of ceramic production: A study of the islamic common ware pottery of Medieval Qsar es- Seghir, B.A University of Michigan, 1975, p. 133-134. Myers s’est basé sur une étude de Shulman, The history of Qsar es- Seghir, qui selon lui, les troupes des tribus arabes des se sont installées en Afrique du Nord au XIIème siècle. Leur présence dans la région du Qsar es- Seghir indique un changement dans la population rurale qui était des berbères. 52- Emilien Renou, Exploration scientifique de l’Algérie, Description géographique de l’empire du Maroc, Paris 1846. p. 299. Renou rapporte que Al- Bekri désigne Ksar Seghir, sous le nom de Kasr Masmouda, ce qui n’est pas le cas, car al-Bekri détermine seulement le territoire des Masmouda entre Tanger et Sabta sur lequel s’élève Ksar Seghir. 53- Abdelaziz. Benabdellah, villes et tribus, Annexe 2 imprimerie Fadala, Al Mohamedia 1977, P. 138. 54- Abdellah El-Aroui, Mugmal Tarih al Magrib, tome II, Beyrouth, 1994, 1ère édition, p. 164. . 55- M. A. Inan, ‘asr Al- Mur a- bitı-n wa Al- Muwahidı-n Fı- Al- Mag rib wa Al- Andalus, 1ère éd. le Caire, 2 vols, 1964.Tome 2, p. 285-286- 580. 56- Cette famille a pris le contrôle de la ville de Sabta après la chute de l’empire almohade, et on pense que peut être elle a pris le contrôle de Ksar Segfhir, mais les textes n’en fassent pas mention. 57- Abou al- Fida, Taqwin Al- Buldan, Beyrouth, 1830., (672-732h/ 1273- 1331), Géographie d’Abu Al- Fida, texte arabe publié d’après les manuscrits de Paris et de Leyde par M. Reinaud et autres, Paris imprimerie royale 1830. 58- Ibn Said Al- Magribi, Al- Gugrafia, (610-685H) annotée par Ismail Al- Arabi, Beyrouth, 1970. 59- Ibn Abi Zar, op. Cit (1972). Ibn Khaldoun, Histoire des berbères et des dynasties musulmanes de l’Afrique septentrionale, traduction du Baron de Slane, 1927. 60- Ibn Abi Zar, Al Dahira al Santyya fı- Tarih al Dawla al Marniya, Dar al Mansur, Rabat 1972, p 66. 61- E. Michaux-Béllaire, op.cit, (1911), p 354. 62- Ibn Abi Zar, op.cit, (1972), p 66-139-145-159-160 et - Ibn Abi Zar, op.cit, (1936). p. 99-211-218-222-234-313-321-323-338-340- 373-380-383-376-331-407. 63- Ibn khaldoun, Histoire des berbères, Tome 1, p 161-157, Tome 2,p 134- 133. 64- Ibn Idari, Al Bayan Mugrib Fi Dikr Ahbar AL Andalus wa Al Magrib. Tarih Al Muwahidin, publié par H.A. Miranda, Dar Crimas, Tétouan 1960, p 92-177-192.

53 65- Al- Badisi, Al- Maqsad Al- Sari f wa Al- Manza Al- Lati f Fi Dikr wa Al- Tari f bi Sulaha Al- ii f, annotée par Abd Al- Wahab ben Mansur, imprimerie royale Rabat 1982, p 118. 66- Auteur anonyme, Al- Hulal Al- Mus iyya Fi Al- Ahbar al- Murakus iyya, publié par S.Allonche, Rabat, imprimerie économique 1936, p. 147. 67- Al- Maqqari, Nafh Al- Ti b Min gsn A-l Andalus A-l Rati b, Tome 1, p. 133. 68- Ibn Abi Zar, op.cit, (1936), p 407. 69- Une comparaison des plans des maisons, des portes, des styles de décoration qui datent de l’époque mérinide (par exemple : Fès Jdid, ). 70- E.Michaux-Béllaire et alli, op.cit, (1911), p 355. 71- Charles L. Redman, Ksar Seghir. An archeological view of medieval life, Academic Press INC, 1986, p 30. 72- Cf. Vasco de Carvalho, Domination portugaise au Maroc (1415-1769), édition S.P.N de Lisbonne, Robert Ricard, «Le Maroc septentrional au XVème siècle d’après les chroniques portugaises», Hespéris, 1936, p. 89-144, Robert Ricard, «L’évacuation des places portugaises du Maroc sous Jean III, Ksar es- Seghir et Arzila. 1549-1550», Sources inédites de l’histoire du Maroc. Dyn. Saadienne, Portugal, T. V, 1951, p. 335-349, Auguste Cour, L’établissement des dynasties des chérifs au Maroc et leur rivalité avec les Turcs de la régence d’Alger (1509- 1830), publication de l’école des Lettres d’Alger, paris, 1904. p 32. 73- Ce toponyme est cité par al-qadi Iyyade, Cf H.Ferhat, op.cit, (1993), p.274. 74- Nous n’avons pas pu repérer ce toponyme dans l’ouvrage d’al-Bekri, mais A. Siraj le mentionne. op.cit, 1995, p.334 75- A.Siraj, op.ci, (1995), p. 603 76- E Michaux-Béllaire et alli, op.cit, (1911), p. 348 77- A.Siraj, op.cit, (1995), p.605. . 78- Al- Maqqarı- Tilimsa- nı- , Nafh al Tı-b min g sn Al- Andalus al- Ratı- b, annotée par Mohamed Mohı- Din Abd Al Hamid, Da- r al Kita- b al ‘Arabi, Beyrouth, t.1, 1949, p.133.134.

54 Bibliographie

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Al-Qasr al-Saghîr, ville ronde

• Patrice Cressier CIHAM-UMR 5648, CNRS, Lyon

Les questions Que Qasr al-Saghîr soit une ville ronde, ainsi que le proclame le titre de mon intervention, n’est évidemment pas une grande découverte. Tous les chercheurs s’y étant intéressés ont relevé cette particularité, sans s’attacher pour autant à en trouver une explication au-delà d’une possible influence orientale, dont Bagdad aurait pu être l’origine. Or le tracé de l’enceinte de Qasr al-Saghîr n’est pas seulement circulaire, c’est un cercle quasi parfait, s’appuyant – qui plus est - sur les sommets d’un triangle défini par ses portes, triangle parfait lui aussi puisque équilatéral. Le défi topographique que suppose un tel programme architectural et urbanistique impose alors d’aller un peu plus loin dans l’interprétation et de s’interroger sur les raisons du choix opéré par les fondateurs de la cité. « Re-fondateurs » vaudrait-il mieux dire, d’ailleurs, puisque l’établissement fouillé dans les années 1970 ne remonte évidemment pas aux premières mentions textuelles… Réfléchir sur la morphologie de Qasr gh al-Sa îr nécessite de poser à nouveau un certain nombre de questions, qui sont loin d’avoir été traitées en profondeur, certaines ne l’ayant même pas été du tout. Parmi celles-ci : le nom et la localisation précise de l’établissement au cours des siècles, la date de la fondation de la ville aujourd’hui appelée Qasr al-Saghîr, la place occupée par cette ville dans la longue chaîne des fondations urbaines mérinides, les caractères exacts de sa particulière morphologie, la comparaison justifiée ou non avec les villes rondes orientales islamiques et préislamiques, la recherche de parallèles contemporains, et surtout les liens entre forme et fonction. C’est de tout ceci que je souhaiterais traiter ici. Qasr al-Saghîr : les noms, le lieu La forme la plus ancienne sous laquelle apparaît mentionné Qasr al-Saghîr est marsa Bâb al-Yâmm (1) (fig. 1). C’est du moins à cet emplacement, ou à son proche voisinage, que la plupart des commentateurs localisent ce toponyme. Une hypothèse émise par certains linguistes est que celui- ci trouve son origine dans une strate sémitique ancienne, antérieure à l’invasion arabo-islamique (2) et qu’il pourrait être l’indice d’une présence

61 phénico-punique dans l’embouchure de l’oued. Al-Bakrî, reprenant un auteur antérieur, al-Warraq, y situe un ribât qui se serait intégré alors dans une longue chaîne d’établissements de ce type, propres au rivage atlantique du Maghreb occidental, continue jusqu’à Mâssa, au Sûs, voire au-delà (3). Au xie siècle, al-Bakrî nomme également le lieu Qasr al-Awwal (« le premier château ») (4), pour le différencier de Qasr al-Kutâma (« le château des Kutâma »), l’actuel Ksar el-Kebir sur le Loukkos. D’autres appellations ont été utilisées plus tardivement, par Abû ’l-Fidâ, Ibn Khaldûn ou Ibn Abî Zarc, ainsi Qasr al-Madjâz ou Qasr al-Djawâ, qui font respectivement référence au rôle joué par ce port dans le passage du détroit et la traversée vers al-Andalus. Mais son nom le plus fréquent semble avoir été Qasr al- Masmûda. C’est celui que, au xiie siècle, adopte par exemple al-Idrîsî (5). Il rend compte de la présence dans cette région d’éléments de cet important groupe tribal. Sous réserve d’inventaire, il semble bien que les sources textuelles et cartographiques chrétiennes, principalement portugaises, mais aussi castillanes, s’en soient tenues aux formes dérivées de Qasr al-Saghîr : Alcasarseguer/Alcazarseguer, etc. On peut même se demander s’il n’y aurait pas là l’origine du toponyme qui est resté attaché au site.

Fig. 1. La rive sud du détroit de Gibraltar au xe siècle : l’itinéraire maritime d’al-Warrâq (d’après A. Siraj, 1995).

Du fait de leur position dans les énumérations de toponymes offerts par les différents auteurs arabes, ou de leur localisation sur les cartes et portulans, qui font leur apparition au bas Moyen Âge, on peut affirmer que le ou les

62 établissements correspondants étaient bien implantés dans l’embouchure de l’oued, mais on ne peut assurer en toute rigueur qu’ils aient tous coïncidé en un seul point de celle-ci. La possibilité d’un déplacement au cours du temps n’est pas à exclure ; elle est même – comme nous allons le voir – hautement probable. Autrement dit, il n’y aurait pas eu un Qasr al-Saghîr, au cours du temps, mais plusieurs. Ces autres établissements seraient à rechercher en divers points de la baie, voire de l’intérieur de la vallée (fig. 2). Sur le promontoire dominant la plage à l’ouest (Jebel Gomari), tout d’abord, emplacement logique du point de vue défensif : des restes de constructions y ont été décrits à plusieurs reprises (6) mais les installations militaires qui l’occupent depuis le milieu du xxe siècle y rendent aujourd’hui problématique le repérage d’éventuels vestiges. Ailleurs sur le front de mer, ensuite, mais là n’ont encore été localisées, assez loin à l’est de l’oued, qu’une tour de vigie médiévale isolée (7) et une petite usine de garum, ayant fonctionné durant les ier-iiie siècles sans occupation postérieure (8).

Fig. 2. Les vestiges de la basse vallée de l’oued Ksar (d’après M. Tarradell, 1966).

63 Si l’on admet que la ligne de littoral a pu évoluer au cours des siècles et puisque certains auteurs arabes assurent que l’oued était navigable sur quelque distance, il n’est pas absurde de rechercher le premier Qasr al-Saghîr plus au sud dans la vallée. À ce jour, un site romain avait bien été découvert sur une petite colline de la rive droite de l’oued, à environ 1 km de l’embouchure de celui-ci. Son occupation était datée principalement des IIe-IVe siècles, mais pourrait s’être poursuivie jusqu’à la fin de l’époque romaine (9). C’est le site de Dhar d’Aseqfane, fouillé en urgence il y a quelques années et dont A. El Khayari et A. Akerraz nous confirment dans leur très convainquante communication à ce même colloque qu’il s’agit bien du Qasr al-Awwal d’al- Bakrî (10) (et – qui sait ? – du ribât de marsa Bâb al-Yamm d’al-Warraq). Un dernier mot serait pour s’interroger sur le terme même de Qasr, systématiquement appliqué au port à partir du xe siècle. A priori, celui-ci peut impliquer deux significations : celle de résidence d’un pouvoir politique dont la nature resterait à préciser ou celle de (ou l’un et l’autre). Au xie siècle, la lecture de l’œuvre d’al-Bakrî nous montre de plus que les termes de qasr et de ribât peuvent être interchangeables (dans le cas, pour le moins, de la côte d’Ifrîqiya) (11). Ce serait donc bien le ribât cité par les sources les plus anciennes qui aurait donné naissance plus tard à une agglomération au statut moins spécifique, mais ayant pu conserver une partie des fonctions de l’établissement initial. Remarquons, enfin, que l’itinéraire d’al-Warraq mentionne un autre Qasr (sans plus de précision) à l’est du détroit, entre Balyûnish et Sabta/Ceuta, indication que les chercheurs voient aujourd’hui plutôt comme l’indice de la présence d’un site antique (12). La date de construction de la ville ronde Si un établissement existe bien depuis le ixe siècle au moins à l’embouchure de l’oued, il règne un flou certain sur la date de construction de la ville de Qasr al-Saghîr et de son enceinte circulaire, telle qu’elle nous est parvenue. Certains chercheurs la situent à l’époque almohade sans avancer d’argument textuel ni archéologique explicite (13), tandis que d’autres y voient le résultat de la décision du sultan mérinide Abû Yacqûb, sans non plus citer toujours leurs sources de façon convaincante (14). Pour l’équipe d’archéologues qui a fouillé le site durant plusieurs années, Ibn Abî Zârc aurait précisé dans son Qirtâs, qu’Abû Yacqûb fonda la ville en 1287 (15). De fait, cet auteur mentionne Qasr al-Saghîr à plusieurs reprises, surtout à propos du passage de troupes vers al-Andalus en partance pour le djihâd (16). La date de cette fondation est cependant précisée en une

64 occasion : « Au mois de ramadan 686, l’enceinte de Qasr al-Madjâz a été bâtie et ses portes ont été installées » (17). On peut chercher des arguments corroborant cette attribution chronologique dans d’autres sources que textuelles. L’épigraphie tout d’abord, puisque sur la plus petite des trois portes de la ville (Bâb Fâs) a été découverte au tout début des années 1980 une belle inscription commémorative en caractères naskhî-s (18). Quoique celle-ci ne comporte pas de date, et qu’elle n’ait d’ailleurs pas encore été publiée, sa graphie même exclut une datation antérieure au xiiie siècle (19). Mais c’est surtout l’archéologie qui nous permet un calage chronologique. En effet, le mobilier découvert en fouille est aussi abondant que cohérent et paraît exclusivement datable de l’époque mérinide puis de la longue période d’occupation portugaise (1458-1551) (20). La lecture des formes architecturales est moins aisée. Le plan de la mosquée, aux trois nefs perpendiculaires à la , pourrait avoir été conçu aussi bien sous les Almohades que sous les Mérinides. Cependant, l’étude des portes monumentales ne fait pas de doute (21): l’appareil constructif composite adopté, où la brique est très présente, comme la morphologie des arcs renvoient à des constructions datant du bas Moyen Âge sur la rive nord du détroit (transformations de la muraille de Tarifa, par exemple). Resterait à savoir si les portes sont contemporaines de l’enceinte elle- même, car un remaniement de celle-ci lors de l’occupation de la ville par les Portugais ne peut être exclu a priori. À en croire les observations faites par les architectes-restaurateurs (22) et exposées par ceux-ci au cours de ce colloque, cette contemporanéité des éléments défensifs (non compris, bien sûr, la citadelle, la corracha et les périphériques) est pleinement assurée. Les Mérinides, bâtisseurs de villes Les historiens qui se sont penchés sur cette période n’ont pas assez souligné, me semble-t-il, le rôle de bâtisseurs de villes qui fut celui des sultans mérinides, cette qualité étant reconnue avant tout à leurs prédecesseurs almohades. Indépendamment des transformations imposées à l’urbanisme de grandes cités préexistantes (Fès, Salé, Meknes, Taza, Hunayn, etc.), six villes nouvelles furent planifiées et construites sous la dynastie. Il ne s’agit pas ici de dresser un bilan exhaustif de l’histoire urbaine à l’époque mérinide, mais bien d’insister sur un fait généralement sous-évalué : la profonde implication des sultans de la dynastie dans la transformation et la fondation de villes, intensifiant en cela la vocation de bâtisseurs de leurs

65 prédécesseurs almohades. Reprenons la question de ces créations ex nihilo, cas par cas et selon un ordre chronologique (23) : – Al-Madînat al-Baydâ’ (« la ville blanche ») (24), très vite dénommée Fâs al-Djadîd, cité de commandement et résidence palatine construite en 1276 par Abû Yûsuf Yacqûb (25) face à la vieille métropole bicéphale de Fès. – Al-Madînat al-Djadîda, la ville nouvelle édifiée face à Algesiras (al- Djazîrat al-Hadra’), sur la rive opposée du cours d’eau, sous l’impulsion d’Abû Yûsuf Yacqûb et dont la construction semble achevée en 1285. Jusqu’à il y a peu, on considérait que la fondation mérinide s’était faite sur la rive gauche du río de la Miel, là où s’implanta plus tard la ville chrétienne moderne (26). De nouvelles interprétations amènent à penser aujourd’hui qu’il s’agirait plutôt de l’enceinte de tâbiya de la rive droite, encore très mal connue du point de vue archéologique (27). – Al-mahalla al-Mansûra, première cité de siège, établie devant (28). Elle connut deux phases d’édification. La première (1299- 1303) fut le fait d’Abû Yacqûb Yûsuf (29), mais les travaux furent sans doute repris lors d’un deuxième épisode, sous Abû ’l-Hasan (30) quand l’établissement atteignit son plein développement urbain et se substitua pratiquement à Tlemcen. – Al-Âfrâg, dont le nom officiel fut aussi al-Mansûra 3( 1). Elle joua un rôle comparable à celui de la précédente dans le siège que mena Abû Sacîd (32) en 1328 contre Ceuta, alors aux mains des Nasrides. Les travaux furent achevés sous le règne d’Abû ’l-Hasan. Là encore, il ne s’agit pas d’un simple camp militaire, mais d’un ensemble conçu comme une ville à part entière, incluant résidence du pouvoir politique, grande mosquée, souks et habitat. – Enfin,Sh âlla, la ville funéraire installée aux portes de Rabat sur le site de l’antique Sala Colonia, nécropole des grands princes de la dynastie (33). C’est Abû ’l-Hasan qui, en 1339, donne sa dimension urbaine à la nécropole royale préexistante (puisqu’elle fonctionne comme telle dès 1284, quand y est inhumée Umm al-cIzz, épouse d’Abû Yûsuf Yacqûb et mère d’Abû Yacqûb Yûsuf (34). Là encore, le caractère particulier de l’établissement et sa faible extension ne doivent pas faire illusion : c’est bien comme ville (où comme image de ville) que celui-ci est fondé, face à Ribât al-Fath, qui fut le projet urbain des Almohades par excellence, emblématique mais inabouti. C’est à peu près au milieu de cette chaîne de fondations qu’il faudrait donc placer celle de la ville ronde de Qasr al-Saghîr. Si celle-ci partage plus

66 d’un trait avec les autres ensembles urbains dynastiques (morphologie des portes, voire hiérarchisation de celles-ci), elle n’en constitue pas moins un cas exceptionnel, non seulement par la forme circulaire de son rempart, mais aussi par la préférence donnée à la maçonnerie de pierre aux dépens de la tâbiya, ainsi que par le choix de tours de plan ultra semi-circulaire et non quadrangulaire, possible réminiscence archaïque qui n’est pas sans poser problème (35). À l’intérieur, aucun des édifices mis au jour n’est interprétable, non plus, comme siège d’un pouvoir politico-militaire. Le cercle et le triangle J’ai évoqué déjà à plusieurs reprises la caractéristique principale de la muraille enserrant Qasr al-Saghîr, son tracé circulaire. Il convient maintenant d’y regarder de plus près. Il ne s’agit pas, en effet, d’une vague rotondité, mais bien d’un cercle pratiquement parfait (36). Cela peut d’autant moins être le fait du hasard que les trois portes perçant cette enceinte sont situées très exactement aux sommets d’un triangle équilatéral inscrit dans ce cercle (fig. 3). À la perfection du dessin s’ajoute la hiérarchisation des éléments structurants puisque, prises dans le sens des aiguilles d’une montre à partir du nord, les trois portes (Bâb al-Bahr, Bâb Sabta, Bâb Fâs) sont d’ampleur architecturale décroissante, que l’on considère leurs dimensions ou leur ornementation (37). Le cercle se retouve multiplié, qui plus est, au travers des vingt-huit tours ultra semi-circulaires.

Fig. 3. Plan de l’enceinte de Qasr al-Saghîr (d’après Ch. L. Redman, 1980 ; complété, pour le cercle et le triangle par P. Cressier). Le tracé de la muraille suit un cercle parfait ; les portes sont disposées aux sommets d’un triangle équilatéral selon un ordre décroissant de complexité architecturale.

67 Il faut insister sur le fait qu’un tracé incluant cercle et triangle équilatéral ne peut être le fruit du hasard. Le choix d’associer ces deux figures géométrique simples, ajoute à la difficulté du travail préparatoire de topographie, même dans le cas d’un relief relativement plat comme c’est le cas dans cette plaine d’embouchure. Le diamètre de la ville est de 195 m, soit un rayon de 97,5 m (38). Quoiqu’une certaine prudence soit de mise, en admettant que cette mesure corresponde à un chiffre rond exprimé en coudées (dans ce cas 200), on obtiendrait pour valeur de celle-ci 0,487 m (39). Bien évidemment d’autres mesures devraient être effectuées (en particulier à partir des dimensions des portes, de l’épaisseur du mur d’enceinte, etc.) afin de corroborer cette hypothèse. À Qasr al-Saghîr, au contraire de tous les exemples de véritables villes rondes préislamiques ou islamiques du Proche-Orient, la forme circulaire de l’enceinte n’implique pas une organisation radiale et concentrique du parcellaire intra muros. Pour ce qui a pu être perçu de la localisation des édifices majeurs, la mosquée surtout, mais aussi le bain ou les souks, ceux-ci n’occupaient pas d’emplacement particulier au sein du tissu urbain ainsi délimité. Mais comment justifier la forme géométrique parfaite donnée à l’enceinte de Qasr al-Saghîr ? On sait que tant dans le décor architectural que dans les arts mineurs, ces formes « pures » ont une vertu prophylactique : on les retrouve en combinaisons variées au sein desquelles les triangles sont souvent multipliés pour engendrer des polygones étoilés, dans les décors de marqueterie de céramique (-s), dans les stucs, mais aussi sur les bijoux ou les amulettes, etc. Le lien avec l’ésotérisme et l’astrologie est loin d’être à exclure. On se souviendra que c’est par lui qu’ont été expliquées les multiples variations des décors d’arborescences végétales sculptées sur les parois de la salle d’audience (Salón Rico) de la ville califale omeyyade de Madînat al-Zahrâ’(40). L’astrologie, alors encore confondue avec l’astronomie, était considérée comme une science, au même titre que les mathématiques en général et la géométrie en particulier. On sait d’ailleurs par diverses sources que, lors de la cérémonie de fondation de Fès Djdîd, le sultan mérinide était entouré de plusieurs géomètres et cosmographes : Muhammad ibn al-Habbak, qui dressa un horoscope, selon Ibn al-Ahmar, ainsi qu’Abû cAbdallâh ibn al- Habbak y Abû ’l-Hasan ibn al-Qattân, selon Ibn Khaldûn (41). Les autres villes rondes : mythes et réalités Si la géométrie particulière de Qasr al-Saghîr est pratiquement parfaite, dans son tracé d’un triangle équilatéral inscrit dans un cercle, peut-on

68 admettre pour cela qu’il constitue un maillon supplémentaire d’une tradition islamique née avec Bagdad, ainsi que cela a été plus d’une fois suggéré (voire même l’aboutissement de cette tradition) ? Pour répondre à cette question, je propose que nous nous intéressions successivement aux antécédents préislamiques, à Bagdad elle-même, puis aux éventuels héritiers tardifs. Avant Bagdad La plupart des auteurs s’accordent à considérer que Bagdad, la plus célèbre des villes rondes islamiques, trouva ses modèles dans une longue chaîne de cités de plan circulaire, disséminées dans diverses régions du Proche et du Moyen-Orient, antérieures à l’Islam. Les noms revenant le plus fréquemment sont, en dehors de tout ordre géographique ou chronologique : Sinjerli, Abra, Hagmatana, Mantineia, Ctesiphon, Takht-i-Sulaymân, Hatra, Harrân, Dârâbjerd, Gûr/Firûzâbâd, dans une aire d’extension très vaste allant du sud de la Turquie au Turkmenistan et incluant l’Irak et l’ (42). Il me semble que certaines de ces villes doivent être écartées car le tracé de leur muraille n’est pas circulaire, mais simplement ovale, voire grossièrement arrondi. Il en est ainsi de Harrân (Turquie méridionale, existant déjà à l’époque assyrienne et abandonnée seulement sous les Ayyoubides), Mantineia (Grêce, fondée par Epaminondas en 371 av. J.-C. et dont les axes de l’ellipse mesurent 2 800 m x 3 300 m), Takhit-i-Sulaymân (cité parthe, en Azerbaidjan iranien, de la fin du iie ou du ier siècle av. J.-C. : 1 050 m x 1 250 m), ou Hatra (Irak, iie-iiie siècle, dont le tracé de la muraille peut être considéré tout aussi bien comme grossièrement quadrangulaire, même si le plan est rigoureusement centré sur le complexe palatial). Le cas de Ctésiphonte est complexe car il s’agit en fait de trois villes successives édifées au cours des siècles à faible distance le long du fleuve : Séleucie fondée en 300 av. J.C., Ctésiphonte création du roi parthe Mithridates I en 141 av. J.-C., enfin Ve-Ardashîr, grande ville approximativement circulaire connue aussi sous le nom de Koche et fondée par l’empereur sassanide Ardashîr en 22 J.-C. Quatre villes antiques au moins ont suivi un plan rigoureusement circulaire et à organisation radiale pour trois d’entre elles : Sinjerli/Zincirli (Sam‘al, Turquie actuelle) (43), Hagmatana/Ecbatane, Dârâbdjerd et Gûr/Firûzâbâd (Iran). La première constitue sans doute le cas le plus ancien, puisque cette cité hittite aurait été fondée au viie siècle av. J.-C. Sa muraille constitue un cercle parfait de 720 m de diamètre (fig. 4). Une citadelle occupait un

69 relief dominant, sensiblement excentré. D’autres villes hittites semblent d’ailleurs avoir suivi ce schéma (voir, par exemple Kultepe). Hagmatana/ Ecbatane, quant à elle, a survécu comme centre urbain jusqu’à nos jours sous le nom d’Hammadan. La relation entre les reliefs périphériques supportant des vestiges préislamiques avec le noyau urbain proprement dit n’est pas claire, mais le tracé viaire de celui-ci conserve encore nettement l’empreinte d’une enceinte circulaire et de six axes radiaux. Un habitat s’est aussi conservé à Dârâb (province du Fars, Iran), mais à l’écart de la ville ronde de Dârbâdjerd. Dans cette dernière, deux murs concentriques percés de quatre portes protégeaient une superficie urbanisée de grandes dimensions (diamètre de 1 850 m, soit un mille et un farlong), très clairement fossilisée aujourd’hui dans le parcellaire tel qu’on peut l’observer sur les clichés aériens et satellitaires. La chronologie de cette enceinte ronde semble controvertie, et il ne semble pas assuré qu’elle soit antérieure aux Sassanides ; il a parfois été dit aussi que la fondation primitive était triangulaire. Le plan de Gûr est du même type et de géométrie tout aussi parfaite. De fait, Ibn al-Faqîh affirme déjà qu’il est inspiré de celui de la précédente.

Fig. 4. Sinjerli (Anatolie). VIIe siècle av. J.-C.

70 Mais Gûr, fondée en 224 J.-C. par le premier souverain sassanide Ardashir, et nommée plus tard Firûzâbâdi (44), était encore plus vaste puisque son diamètre atteignait 2 240 m, soit près de 400 ha (fig. 5).

Fig. 5. Gûr/Firûzâbâd (Iran). 224 J.-C.

On insitera sur le fait que la plupart d’entre elles, où le tracé radial des circulations principales converge vers le palais et le temple, résultèrent de la volonté de l’empereur Sassanide, dynastie vaincue par les conquérants musulmans. À l’avènement de l’Islam, ces villes étaient encore prospères et constituaient un enjeu important pour les nouveaux arrivants, comme il ressort clairement, par exemple, du récit de la conquête de la Perse que nous a légué al-Tabarî (45). Bagdad La ville ronde de Bagdad, Madînat al-Salâm, fut conçue et construite en 762 par le second calife abbaside, al-Mansûr. Déjà détruite en 814, elle ne nous est connue que par les descriptions qu’en ont faites les auteurs arabes médiévaux, tous fortement impressionnés par sa particulière structure urbaine, circulaire et radiale. Cette connaissance indirecte qui est la nôtre explique d’ailleurs la diversité des interprétations qui ont été publiées (fig. 6) (46). Quatre portes s’ouvraient dans le double cercle de l’enceinte, donnant naissance à quatre axes radiaux convergeant vers le palais, isolé, au centre. Le diamètre du grand cercle aurait été de 2 350 m à 2 900 m (47). Dans le

71 détail, la symbolique est complexe, mais certaines composantes peuvent en être identifiées facilement : le cercle et sa division quadripartite évoquent la représentation commune du Paradis et de ses quatre rivières, mais le cercle, forme parfaite dont le centre est occupé par le palais, renvoie à la perfection du califat rayonnant depuis le pôle que constitue Bagdad. La matérialisation d’un tel schéma mental trouve bien sûr ses racines dans un substrat proche- oriental ancien et les exemples encore fonctionnels ne manquaient pas à ce moment pour inspirer les urbanistes et les architectes du calife dans la mise en œuvre pratique d’un projet destiné à exalter et magnifier son pouvoir.

Fig. 6. Les différentes propositions de reconstruction du plan circulaire et radio concentrique de la Bagdad d’al-Mansûr (d’après K. A. C. Creswell et J. W. Allan, 1989).

On aura garde d’oublier cependant, que la ville ronde de Bagdad est essentiellement un complexe palatin et administratif ; elle n’est « que » le centre d’une agglomération beaucoup plus vaste, résidentielle et populaire, où se déploieront les principales activités économiques. Après Bagdad Bagdad a-t-elle fait école, a-t-elle servi de relais et a-t-elle diffusé par son exemple les vieilles traditions du Croissant fertile et du monde persan vers les autres régions du Dâr al-Islam, voire l’Occident médiéval chrétien ? C’est ce que nous allons tenter de déterminer, en gardant en mémoire ses deux caractéristiques essentielles : rotondité parfaite et hiérarchistation des espaces intra muros selon une structuration radiale.

72 Le Dâr al-Islam Après Bagdad, les grands manuels d’architecture islamique ne citent guère, mais de façon réitérée, que Heraqlah (Irak) et Sabra al-Mansûriya, capitale fatimide édifiée deux siècles plus tard aux portes de Kairouan (Tunisie) (48). Qasr al-Saghîr au Maroc, plus récente de trois autres siècles, n’est que rarement évoquée (49). Nous y aurions ajouté Nakûr, deuxième capitale de l’émirat himyarite du même nom, fondée par Sacîd au milieu du ixe siècle, si ses deux murailles concentriques récemment découvertes n’avaient pas été plus ovales que circulaires (50). Ses émirs, dans la mouvance directe de l’État omeyyade d’al-Andalus, n’avaient d’ailleurs guère de raison de copier un modèle abbaside. Heraqlah. 806. Deux murailles circulaires concentriques (500 m pour le plus grand diamètre) enserrent un édifice de plan quadrangulaire. Ce n’est pas une ville à proprement parler, mais ses dimensions s’en approchent fort. Selon l’hypothèse la plus vraisemblable, il s’agirait d’un complexe commémoratif de la victoire obtenue lors de la bataille d’Heraklia contre les Byzantins (51). Son ampleur et ses caractéristiques géométriques imposent cependant de le prendre en compte ici, ne serait-ce que pour mémoire. Sabra al-Mansûriya. 947-948. Après Mahdiya, c’est la seconde des capitales fondées par les Fatimides en Ifrîqiya. Elle naît de la volonté du calife al- Mansûr et marque la réconciliation politique de la dynastie, en théorie du moins, avec les élites de Kairouan. La magnificence de ses palais a été amplement vantée par les sources arabes, tant chiites que sunnites. À partir d’une remarque d’al-Muqaddasî, selon laquelle elle était « ronde comme une coupe », le palais du calife en occupant le centre « comme à Madînat al-Salâm » (Bagdad) (52), on considère généralement qu’elle reprenait le schéma urbain de la vieille capitale abbaside (53). Outre que, du point de vue idéologique, le fait pouvait paraître suprenant, l’étude archéologique a montré que ce parallèle n’était pas fondé : la ville elle-même n’adopte qu’une forme vaguement ellipsoïdale (les axes mesurant respectivement 1 050 m x 1 350 m). Ce qui est approximativement circulaire en revanche, c’est la zone palatine dont la périphérie est tangente à la muraille de la ville au sud- ouest. Par ailleurs, cet espace, comme tout le tissu urbain intra muros, semble avoir répondu à une structuration orthogonale et non radiale (54). Il n’est plus possible, en somme, de faire de Sabra al-Mansûriya, une héritière des formules de Bagdad. Quant à Qasr al-Saghîr, à la chronologique de près de cinq siècles existant entre elle et Bagdad s’ajoute une différence conceptuelle redhibitoire

73 dans l’organisation de l’espace intra muros qui me fait penser qu’elle peut difficilement avoir été pensée en référence à la capitale abbaside. Le domaine chrétien Peut-être est-il temps de se demander si la ville ronde est une réalité propre au monde musulman ou si elle est documentée aussi dans le domaine chrétien médiéval. J’ai retenu tout d’abord deux exemples de l’espace méditerranéen, très différents, mais qui sont – je crois – significatifs, nous allons voir en quoi. Madrigal de las Altas Torres (Espagne, xiiie siècle). La date exacte de la construction des murailles de Madrigal de las Altas Torres, lieu de naissance d’Isabelle la Catholique, ne nous est pas connue, mais il semble qu’il faille la situer à la fin duxiii e siècle. Un plan de cette bourgade, dressé en 1837 par l’ingénieur topographe J. Lallave, présente celle-ci comme parfaitement circulaire (fig. 7a), et les manuels d’urbanisme comme ceux d’histoire médiévale n’ont pas manqué de commenter cette particularité. Pourtant, il s’agit d’une invention pure et simple de l’auteur du plan. Une visite sur place ou un coup d’œil à une photographie aérienne (et aujourd’hui à Google Earth) auraient suffi aux nombreux et prestigieux historiens qui se sont fait l’écho d’une morphologie si particulière, pour ne pas tomber dans le piège (fig. 7b) (55) … Madrigal de las Altas Torres n’a donc jamais été une ville ronde et il n’y a aucune raison d’y voir un ultime avatar de modèles d’urbanisme islamique conçus en Orient, Fig. 7. a. Madrigal de las Altas Torres (Valladolid, Espagne), plan de J. comme cela a été pourtant Lallave (1837) écrit en de multiples occasions (56).

74 Fig. 7. b. Madrigal de las Altas Torres, véritable tracé de l’enceinte (d’après L. Cervera Vera, 1993).

Nicosie (Chypre, 1570). L’attaque de la flotte turque à l’île de Malte, en 1565, marqua la recrudescence des velléités d’expansion de l’empire ottoman. Venise réagit en refortifiant ses possessions en Méditerranée orientale, parmi lesquelles Nicosie, capitale de Chypre, dont les vieilles murailles datant des croisés sont alors en mauvais état. C’est l’architecte Giulio Savorgnano qui est chargé du projet. La mise en œuvre de celui-ci suppose la destruction de certains quartiers, voire le déplacement de lieux de culte. Les travaux ne durent que trois ans et sont pratiquement terminés en 1570, quand la ville tombe définitivement. L’ouvrage ne doit donc rien à l’Orient et tout aux idéaux de la Renaissance; il s’agit non seulement de la création d’une cité parfaite, mais aussi d’appliquer les nouvelles conceptions rationalistes qui commencent à s’imposer en matière d’architecture défensive, en rupture avec les solutions architecturales du Moyen Âge (57). Resterait une hypothèse qu’il est impossible de ne pas prendre en compte, toute provocatrice qu’elle soit, ainsi que J. Correia en a judicieusement souligné l’éventualité au cours de ce même colloque (58), celle de la construction de l’enceinte par les occupants portugais, après 1458. Les similitudes que présente la morphologie de Qasr al-Saghîr avec celle de certaines forteresses chrétiennes du Portugal bas médiéval – ou du moins avec l’image qu’en a diffusée le chevalier, dessinateur et inspecteur des places fortes royales, Duarte de Armas, au début du xvie siècle – sont en effet frappantes (59). Melgaço, Monçao et Freixo de Espada a Cinta retiennent particulièrement l’attention par la rotondité apparemment parfaite de leur tracé (60) (fig. 8 et 9). Une série de considérations complémentaires tend cependant à tempérer

75 la première impression. D’une part, l’état dont Duarte de Armas rend compte est le résultat d’une évolution assez longue dans le temps d’un système défensif complexe ; d’autre part – et surtout –, lorsque l’observation directe sur le terrain est possible, elle montre que, si l’enceinte adopte bien une forme arrondie (le plus souvent pour répondre aux Fig. 8. Forteresse de Melgaço (Portugal). conditions de relief), Dessin de Duarte de Armas (c. 1509) celle-ci n’est jamais [d’après D. de Armas, 1997). que très approximative (61). Cette réalité est donc aux antipodes de la perfection atteinte à Qasr al-Saghîr.

Fig. 9. Forteresse de Freixo de Espada a Cinta (Portugal). Dessin de Duarte de Armas (c. 1509) [d’après D. de Armas, 1997).

76 Sous réserve d’inventaire, donc, les éventuels parallèles à Qasr al-Saghîr en terre chrétienne se sont révélés des mythes, de simples approximations, ou encore relever d’autres schémas de pensée. C’est donc bien dans la culture islamique du moment qu’il faut chercher les raisons occultes des choix architecturaux faits lors de la fondation de cette ville, dans les conditions politiques spécifiques de ce moment, aussi. Il résulte de ce qui vient d’être exposé qu’il n’existe aucun équivalent à Qasr al-Saghîr dans le monde occidental médiéval. Qasr al-Saghîr est seul de son type sur le détroit de Gibraltar, seul aussi à l’échelle de toute l’Afrique du Nord. Il convient de se demander alors si cette singularité répond à une fonction particulière. Or, parmi les fonctions reconnues à l’établissement par les sources médiévales, il en est une qui lui est propre, à l’époque mérinide et dans cette région particulière, celle de port axé sur le djihâd vers al-Andalus. L’image du djihad ? L’implication directe, personnelle, du sultan mérinide dans la construction des villes revient de façon récurrente dans les récits des auteurs médiévaux, quel que soit le degré de compromission de ceux-ci dans le système politique du moment. Même si ces mentions peuvent constituer un des nombreux lieux communs véhiculés par la littérature historique, à caractère volontiers hagiographique, elles ne peuvent pas ne pas être prises en compte. À propos de Fâs Djîd, Ibn al-Ahmar précise ainsi que ce fut le souverain lui-même qui, lors de la cérémonie de fondation, creusa la tranchée destinée à recevoir la muraille de tâbiya (62). Et pour Ibn Khaldûn, c’est le souverain qui, auparavant, avait conçu le plan de la ville nouvelle (63). Traitant de Gibraltar, somme toute fort proche de Qasr al-Saghîr, et faisant montre des mêmes préoccupations politiques, Ibn Battûta nous transmet une information très significative quant à l’implication du souverain dans les questions d’urbanisme, et en particulier d’urbanisme défensif : « Les soins que notre maître [Abû ’l-Hasan] prenait de Gibraltar et de tout ce qui le concernait étaient si grands qu’il ordonna de construire le plan, ou la figure exacte de cette place ; il y fit représenter ses murs, ses tours, son château, ses portes, son arsneal, sa mosquée, ses magasins de munition de guerre, ses greniers pour les céréales, la forme de la montagne et de la colline ou monticule rouge qui lui est adjacent. Ce plan a été exécuté dans le lieu fortuné des audiences ; il est admirable, et fort bien travaillé par les ouvriers. Quiconque a vu Gibraltar, et puis examiné cette copie, en a

77 reconnu le mérite. Notre maître a fait cela par suite de son extrême désir d’être informé et de méditer sur tout ce qui regarde Gibraltar, de s’occuper de ses fortifications et de ses provisions » (64). La description est trop détaillée pour qu’il s’agisse cette fois d’un simple discours hagiographique prononcé dans l’espoir de profiter de la bienveillante protection du souverain. Le sultan mérinide s’engage bel et bien personnellement dans la tâche de revivification des ports du détroit, ici de Gibraltar, et appuie sa réflexion sur des documents de grande précision, élaborés ex profeso. Tout porte donc à croire que, dans le cas de Qasr al-Saghîr, la décision relative aux formules architecturales mises en œuvre est prise en plus haut lieu. Je ne crois pas que, pour cela, des modèles orientaux aient été adoptés. Bien sûr les chroniqueurs de l’époque parlent encore de la Bagdad d’al-Mansûr, mais cette ville n’existe plus depuis presque quatre siècles, tandis que Nâkur ou Sabra al-Mansûriya – plus proches, mais toutes deux disparues depuis le xie siècle – n’ont pu transmettre un modèle qu’elles-mêmes ne suivaient pas. D’ailleurs, le schéma urbanistique de Qasr al-Saghîr, qui associe enceinte circulaire, disposition des portes en triangle et tours de flanquement ultra semi-circulaires, n’inclut pas l’organisation radiale intra muros et diffère donc sur un point essentiel des supposés modèles orientaux. Il ne s’agit pas ici d’exalter le pouvoir du souverain et c’est donc à un autre programme idéologique que nous avons à faire. Bien sûr, les sultans mérinides, comme leurs adversaires nasrides d’ailleurs, n’ont pas manqué d’importer ou de développer des modes architecturales venues d’Orient, mais il s’est toujours agi d’aspects relativement anecdotiques, si l’on excepte les systèmes d’iwân-s de certaines -s (ainsi la Bû cInaniya de Fès). Alors, si le plan de Qasr al-Saghîr n’est pas le résultat d’un caprice, comment expliquer – une fois encore – sa forme particulière ? Si le sultan mérinide Abû ’l-Hasan s’intéresse de si près à Gibraltar au point d’en faire faire une maquette, si auparavant Abû Sacîd fait le siège de Ceuta et construit une ville tout exprès pour cela (al-Âfrâg), c’est dans le cadre d’une politique bien concrête d’intervention en al-Andalus. Et c’est une politique de djihâd, principal recours idéologique de leur cause, puisque les Mérinides n’avaient pas établi leur pouvoir en réformateurs, come l’avaient été leurs prédécesseurs. De cette prétention au djihâd, les sources écrites fournissenent d’abondants témoignages.

78 Il convenait cependant de trouver des solutions architecturales qui puissent matérialiser ce choix politique et idéologique, tout en se démarquant clairement des fondations antérieures de même nature ainsi que des autres fondations urbaines de la propre dynastie. Ces solutions ont été trouvées à Qasr al-Saghîr, où le cercle – forme idéalement parfaite – se substitue au carré des ribât-s tels qu’on les connaissait en Ifrîqiya. Quant à la hiérarchisation des portes, ce n’est pas un hasard si la plus monumentale, la plus richement décorée aussi, soit justement la porte de la mer, Bâb al- Bahr, celle qui donne sur la plage d’où partent les navires. Contrairement à l’habitude, cette porte n’ouvre pas sur une voie terrestre, mais bien sur une voie maritime, et seules les marins et les combattants sont en mesure de la contempler. La symbolique me semble alors assez claire… La fortification de Qasr al-Saghîr n’apparaît donc plus comme seulement défensive, mais elle devient aussi offensive.

79 Notes bibliographiques

1. Sur les noms de Qasr al-Saghîr, on verra en particulier l’article, un peu vieilli mais très détaillé, d’E. Michaux-Bellaire (1911), et plus récemment l’ouvrage d’A. Siraj (1995, p. 602-606). 2. Lévy, 1998, p. 15. 3. Cressier, 2004, p. 206, 218 et fig. 65. 4. Al-Bakrî, 1965, p. 206. 5. Al-Idrîsî, 1983, p. 166. 6. Morán, Guastavino, 1948, p. 21 ; Tarradell, 1960, p. 124 ; Id., 1966, p. 431 ; Gozalbes Cravioto, 1977, p. 43. Les premières mentions de vestiges (bâtiment en pierre de taille, pourvu de tours, inscription latine) sont dues à E. Michaux- Bellaire (1911, p. 346-349). On sait, par ailleurs, que les Portugais, jugeant à juste titre que la ville de l’embouchure était vulnérable à des attaques venues du Jebel Gomari, y firent édifier un fort (dit du Seinal) : Gozalbes Busto, 1975 et Gozalbes Cravioto, sous presse. 7. Aujourd’hui englobée dans un bâtiment moderne ; voir Gozalbes Cravioto, 2008, photo 13, p. 28. 8. Tarradell, 1954, p. 109 ; Id., 1960, p. 124 ; Id., 1966, p. 431, citant Ponsich et Tarradell, 1965, p. 71 ; Gozalbes Cravioto, 1977, p. 43. 9. Tarradell, 1954, p. 109 ; Id., 1960, p. 125 ; Id., 1966, p. 432-435 et fig. 3 et 4, citant Quintero Atauri et Giménez Bernal, 1944, p. 25 ; Gozalbes Cravioto, 1977, p. 43. 10. A. El Khayari, A. Akerraz, « Al-Qasr al-Awwal. Nouvelles données sur l’occupation de la basse vallée de Ksar au haut Moyen Âge ». 11. Sur ce point, voir Cressier, 2004, p. 210. 12. Voir Siraj, 1995, p. 328. 13. P. Ricard (1930, p. 413) affirme que la fondation date de 1192 et qu’elle est due à Yacqûb al-Mansûr ; avant lui, E. Michaux-Bellaire (1911) pensait que ce calife almohade s’était borné à restaurer et transformer un établissement préexistant. M. Terrasse ne précise ni la date supposée ni les sources consultées lorsqu’il évoque « l’almohade Qasr al-Saghîr », mais en fait effectivement une ville terrestre distincte de son mouillage (Terrasse, 2001, p. 257). 14. Terrasse, 1950, t. II, p. 78. 15. Redman, Anzalone, Rubertone, 1978, p. 154 ; il est fait référence à l’édition de Rabat du Qirtâs (Ibn Abî Zarc, 1972), mais sans préciser le numéro de page. 16. En 313/925, le rebelle Hâ Mîm est fait prisonnier par des envoyés de cAbd-al Rahmân III ; il est crucifié à Qasr Masmûda. En673 /1275, l’émir Abû Zayyân embarque avec son armée à Qasr al-Madjâz. En 674/1276, l’émir Yacqûb fait une hâlte à Qasr al-Madjâz. En 683/1284, l’émir Yacqûb partit de Ribât al-Fath pour se rendre à Qasr al-Madjâz. En 699/1299, l’émir Yûsuf partit de hadrat al-Fâs pour se rendre à Qasr al-Madjâz (Ibn Abî Zarc, 1972, respectivement

80 p. 98-99, 313, 321, 340 et 380). Je remercie Mohamed Méouak qui a vérifié ces informations. 17. Ibn Abî Zarc, 1972, p. 407. Je remercie Tarik Moujoud, auteur d’un mémoire de fin d’étude de l’INSAP (Moujoud, 2000), qui a vérifié cette citation et l’a confrontée à la version d’une édition antérieure du Qirtâs (Ibn Abî Zarc, 1936). 18. Redman, 1983-1984, fig. 7, p. 318. H. Belarabi, alors membre de l’équipe de recherche, y aurait vu « un texte coranique et des informations chronologiques faisant remonter la construction à la dernière période d’occupation islamique du site ». 19. Notons quand même que ses inventeurs auraient tendance à l’associer à un possible remaniement de la porte. 20. Les fouilleurs reconnaissent deux étapes d’occupation islamique : 1285-1350 et 1350-1458 (Myers, 1989, p. 75). Sur la céramique de Qasr al-Saghîr en général, voir : Redman, 1986 ; Id., 1979 ; Id., 1979-1980 ; Redman, Myers, 1981 ; Myers, Blackman,1986 ; Myers, 1989. L’existence de niveaux plus anciens n’a jamais été explicitement affirmée. 21. Sur les portes monumentales urbaines du Maroc, voir Cressier (2006a) et Id. (2006b). 22. Principalement Mohamed Al Jattari. 23. Je réduis au minimum, dans les lignes qui suivent, les notices que j’avais présentées, déjà très résumées, dans une publication antérieure (Cressier, 2005). 24. Voir Terrasse, 1942-1947 ; Le Tourneau, 1949 ; Bressolette, Delarozière, 1982-1983 ; Ferhat, 2000. 25. Abû Yûsuf Yacqûb, al-Mansûr régna de 1258 à 1286. 26. Voir Torremocha Silva, 1994 ; Torremocha Silva, Navarro Luengo, Salado Escaño, 1999 ; Id., 2000. 27. Tomasetti, Jiménez-Camino, Salado Escaño, Suárez, Navarro, sous presse. 28. Il n’existe pas de monographie, digne de ce nom, d’al-Mansûra On verra cependant : Marçais et Marçais, 1903 ; Marçais, 1954, p. 320-321. Sur la mosquée, voir Bourouiba, 1973, p. 159 et ss. 29. Abû Yacqûb Yûsuf, al-Nâsir régna de 1286 à 1307. 30. Abû’l-Hassan régna de 1331 à 1348. 31. Voir Pavón Maldonado, 1970 ; Gozalbes Cravioto, 1978b ; Villada Paredes, sous presse. 32. cUthmân II b. Yacqûb, Abû Sacîd, régna de 1310 à 1331. 33. Sur Shâlla : Basset, Lévi-Provençal, 1923. 34. Lui succèderent, en particulier, les sultans Abû Yûsuf en 1286, mort devant Ceuta, son fils Abû Yacqub assassiné à al-Mansûra (1307) puis son petit-fils Abû Tâbit (1308). 35. Rappelons l’exemple de la forteresse d’Amergo, jusqu’il y a peu considérée comme almoravide et vraisemblablement plus ancienne : Acién Almansa, 2010. 36. Des trois arcs de cercle définis par les portes, le seul légèrement déformé est celui situé entre Bâb al-Bahr et Bâb Sabta, ce qui explique par ailleurs qu’il ne soit flanqué que par huit tours alors que les deux autres le sont par dix. 37. Notons que cette hiérarchisation progressive des accès existe égalementà Shâlla sans avoir été souligné (Basset, Lévi-Provençal, 1923, plan de l’enceinte p. 46).

81 38. Et une superficie totale de 2,99 ha. 39. Toutes ces valeurs, établies à partir du plan publié par l’équipe américaine, gagneraient à faire l’objet d’une vérification sur le terrain. 40. Acién Almansa, 1995. 41. Ibn al-Ahmar, 1917, p. 63-64 ; Ibn Khaldûn, 1978, t. IV, p. 84. 42. Je reprends la liste proposée par K. A. C. Cresswell et J. W. Allan (1989, p. 236) ; elle pourrait être complétée de quelques autres exemples qui ne modifieraient en rien le fond de la discussion. 43. Wartke, 2005. 44. Gaube, 1978, p. 25-26. 45. Journal of the American Oriental Society, 1851, p. 27. 46. Résumées par F. Michaux (2000) : voir fig. p. 97. 47. Selon la valeur que l’on donne à la coudée puisque ces dimensions ne sont connues que par les sources écrites. 48. Creswell, Allan, 1989, p. 236. 49. Elle l’est en revanche, mais avec des réserves justifiées, par V. Martínez Enamorado et E. García Alfonso (2002, p. 167 et fig. 20). 50. Voir Cressier et al., 2001 ; Cressier, Erbati, 2010 ; ou Cressier, 2010. 51. Creswell, Allan, 1989, p. 275-278. 52. Al-Muqaddasî, 1950, p. 17. 53. K. A. C. Creswell et J. W. Allan (1989, p. 236) et surtout J. M. Bloom (1985, p. 28 et fig. 7) qui en fournit même une reconstruction idéale. 54. Voir Cressier, Rammah, 2004. 55. Il a pourtant fallu attendre l’ouvrage de L. Cervera Vera (1993) pour que le canulard soit définitivement éventé. 56. Après M. Gómez-Moreno, L. Torres Balbás ou J. Gautier-Dalché, voir encore récemment M. Terrasse (2001, p. 286). 57. Cela n’ôte d’ailleurs rien du caractère hautement symbolique de la morphologie adoptée, comme ce fut le cas du palais de Charles Quint (de plan carré centré sur une cour circulaire) implanté au cœur de l’Alhambra de Grenade, et qui a déjà fait l’objet de commentaires dans ce sens (Brentjes, 1987). 58. J. Correia, « Ksar Seghir : apports sur l’état de l’art et révision critique ». 59. Duarte de Armas, 1997 (rééd.). 60. Je remercie Isabel Cristina Fernandes et Jorge Correia d’avoir guidé mes pas dans cet embryon de recherche sur les tracés directeurs des forteresses médiévales chrétiennes des frontières portugaises. 61. Comme l’avait déjà suggéré J. Gouveia Monteiro, 1999. 62. Ibn al-Ahmar, 1917, p. 63-64. 63. Ibn Khaldûn, 1978, t. IV, p. 84. 64. Ibn Battûta, 1979, t. IV, p. 359-360.

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89

Ksar Seghir Apports sur l’état de l’art et révision critique

• Jorge Correia EAUM Escola de Arquitectura da Universidade do Minho CHAM Centro de História de Além-Mar - Portugal

Introduction Cette communication traite le cas de la forteresse de Ksar Seghir (1), «petit espace» satellite et un soutien stratégique des villes de Sebta et de Tanger. La présence portugaise en Afrique du Nord, du point de vue de l’intervention dans le paysage urbain, se développe à partir 1415, avec la conquête de Sebta, et 1769, avec l’évacuation de Mazagan. Ksar Seghir est la seule des anciennes possessions portugaises d’une certaine durée qui arrive jusqu’à nos jours en tant que champ archéologique. Un abandon de plus de quatre siècles et demi, interrompu par de petites périodes d’occupation éphémère, a fini par camoufler un passé urbain et constructif résultant de la séquence des deux grandes périodes de cette localité: l’implantation arabe de culte musulman et l’occupation portugaise chrétienne qui dura environ un siècle, entre 1458 et 1550. Les ruines qui sont préservées aujourd’hui ont fait l’objet d’importantes campagnes archéologiques menées par une équipe nord-américaine, dirigée par Charles L. Redman, dans les années 70. Les compte-rendus et rapports des fouilles constituent un matériel incontournable et un corps analytique de base pour l’étude actuelle de Ksar Seghir. Ville islamique pre-existente À partir des faibles informations disponibles et d’ailleurs exposées par d’autres chercheurs dans ce colloque, il est possible d’inférer une première idée sur la morphologie urbaine de Ksar Seghir au milieu du XVe siècle, juste avant la conquête portugaise (Fig. 1). Il s’agissait d’une localité arabe et musulmane qui perdait de son importance et de son influence à une époque où l’autre marge du Détroit et la ville voisine de Ceuta étaient déjà aux mains chrétiennes, castillanes et portugaises, respectivement. Les principales structures excavées ont révélé une distinction entre trois aspects fondamentaux de la compréhension de la Ksar islamique: l’enceinte murée, les équipements publics et les habitations. L’emplacement des deux

91 principales perméabilités, la Porta do Mar [Bab al-Bahr] et la Porta de Ceuta [Bab Sabta], semblent concourir à la distribution des lieux de réunion et de rencontre - la mosquée, le et le marché - et à la détermination des plus importants mouvements de personnes dans les zones nord et nord-est de la ville, le long du principal canal de communication.

Fig. 1 Reconstitution schématique de la ville islamique 1. Bab al-Bahr (Porte de la Mer) 2. Bab Sabta (Porte de Ceuta) 3. Bab Fès (Porte de Fès) 4. Mosquée 5. Hammam 6. Périmètre da le la ville 7. Zone résidentiel 8. Fleuve 9. Plage

Il serait relativement pacifique d’admettre une surface de ville comprise entre le positionnement des trois portes qui ont été trouvées, entre lesquelles la plage impose d’elle-même une limite naturelle, et le cours du fleuve qui, avec son trajet sinueux, décrit le virage établissant la frontière à l’ouest et au sud. Malgré tout, le dessin presque parfait d’une circonférence ne semble correspondre ni aux canons du monde islamique ni à la tradition de construction de courtines fortifiées en Afrique du Nord ou en Al Andalus, représentée par les Almoravides, les Almohades ou les Mérinides. Néanmoins, peut-on lire à Ksar Seghir une réplique du model circulaires de la grande capital abbasside, Bagdad ? Si nous les comparons aux villes maghrébines ou péninsulaires d’une certaine importance, centres de décision, d’influence ou de diffusion d’idées ou de critères - Fès, Marrakech, Séville ou Cordoue - nous observons que

92 l’organicité des contours défensifs règne, par option ou par contrainte, sur la géométrie régulière. Quelques faits incontournables tendent vers la théorie en vigueur et l’exceptionnalité du site, c’est-à-dire, vers la définition pendant la période islamique de la circonférence de contour: le positionnement des portes, quelques pans de murailles trouvés aux niveaux stratigraphiques, la dimension réduite de la tache urbaine, et par conséquent, la possibilité exceptionnelle du choix du tracé circulaire à l’époque médiéval. Les équipements les plus importants confirment à nouveau la tendance unique, dans l’univers islamique, au rassemblement dans des espaces publics fermés - la mosquée et le hammam - à l’exception du marché ou des rues commerciales, compte-tenu de l’impossibilité de vérifier l’existence ou non d’une kissaria. Probablement situées à proximité des bâtiments qui assuraient, la prière et l’hygiène, les artères commerciales assuraient la vente de vivres et d’artefacts, que ce soit à travers des magasins fixes ou dans l’espace ouvert disponible. À partir des vestiges trouvés, nous comprenons comment la grande surface de la tache urbaine de Ksar Seghir était formée avant 1458. Il s’agissait d’un imbriqué de ruelles qui conduisaient le piéton jusqu’au seuil de sa maison, selon un processus de hiérarchisation viaire à partir des canaux de circulation les plus sollicités - du zanqat au derb. Plusieurs unités d’habitation ont été excavées par l’équipe de Charles L. Redman et ont révélé une typologie d’habitation intégrée dans la grande tradition méditerranéenne vernaculaire. Le plan était presque invariablement disposé à partir d’une entrée filtrée en forme de coude vers une cour centrale à partir de laquelle s’effectuait la distribution des différents compartiments: les salles, la cuisine, la latrine (2). Tel était l’état d’une localité musulmane en léthargie au milieu du XVe siècle. La formalisation du domaine portugais Le 23 octobre 1458, Ksar Seghir est conquise par D. Afonso V et D. Duarte de Meneses devient capitaine de la ville. L’impact de la prise portugaise s’est aussitôt fait ressentir symboliquement avec la consécration de la grande mosquée en église. Les premiers jours furent consacrés à la reconstruction, encore sous direction royale, de certains pans de murs et de fosses (3). Pendant cette opération,

93 il est possible que l’on ait corrigé et régularisé le tracé de la muraille dans les zones les plus touchées par les bombardements portugais, notamment entre Bab al-Bahr et Bab Sabta. Le mur du portail intérieur de la porte n’apparaît pas aligné avec la muraille dans son emboîtement nord, ce qui dénote un réajustement du périmètre de la ville à cet endroit. En raison de l’exigüité des dimensions de la ville islamique préexistante, nous ne croyons pas qu’il y ait eu un procédé d’atalho ou raccourci comme celui de la ville voisine de Ceuta. Cependant, la quasi-perfection de la circonférence murée, régulièrement marquée par des tours circulaires saillantes, suscite des doutes quant à sa datation. Ce dessin pourrait-il correspondre à un effort de régularisation, en ne prenant que la prémisse de la rationalisation géométrique inhérente à une opération d’atalho, au détriment de la réduction de la surface défendable, injustifiable à Ksar Seghir? En fait, cette ville constituera probablement une exception parmi les appropriations portugaises de fortifications et tissues musulmans au Maghreb, où le raccourci a constitué une technique toujours présente et où les nouveaux remparts assumaient le rôle réel de frontière de souveraineté et foi. Deux sièges imposés par le sultan de Fès essayèrent, en vain, de rendre Ksar Seghir aux Musulmans pendant cette même année 1458 et l’année suivante (4). Le harcèlement militaire fomenta la progression des travaux des fortifications de la ville, non seulement en raison des dommages causés par les attaques maures, mais surtout en vue de l’idéalisation d’une place défendable avec une aide extérieure en cas de contrainte physique par asphyxie militaire. La stratégie passait par la construction d’une couraça, commencée le 22 mars 1459 (5), un ouvrage réalisé sous la grande tension, mais qui comptait sur le soutien matériel - chaux et pierre de taille - envoyé par le royaume. Il s’agissait d’une couraça différente de celle qui pointe encore aujourd’hui vers la mer dans les ruines de Ksar Seghir. Elle aurait été, en somme, située entre Bab al-Bahr et Bab Fès, comme nous pouvons le conclure de la description du chroniqueur Zurara, sur le fleuve et en direction du mont voisin. En 1460, cette même Bab al-Bahr fut néanmoins transformée en capitainerie, faute de conditions d’habitabilité noble dans le reste de la ville (6), l’ancienne Bab al-Bahr devenant ainsi la charnière administrative et de communication maritime avec l’extérieur, c’est-à-dire, le château de la ville, profitant de l’espace intérieur de la grande porte aux arcs en fer de cheval

94 avec deux grandes chambres voutées (Fig. 2). A la même période, l’angle nord-ouest de ladite porte était renforcé par une tour circulaire plus élevée pour défendre et surveiller la plage et l’embouchure du fleuve.

Fig. 2 Tour circulaire de la Porte de la Mer et place d’armes à l’intérieur du château portugais

L’édification de cette nouvelle tour de guet repose la question de la datation de la ceinture murée de Ksar Seghir dans la mesure où la série de tours qui jalonnent la muraille circulaire à intervalles réguliers apparaît morphologiquement similaire à la tour de guet. D’autre part, comme cela a déjà été mentionné ci-dessus, la ville s’inscrit dans une circonférence de quatre-vingt-dix mètres de rayon, dont la régularité du tracé fait non seulement supposer un projet précédent, mais c’est frappant comme elle rappelle également une tradition d’ fortifiées ou murées tendanciellement circulaires de la frontière portugaise - Freixo-de-Espada- à-Cinta, Vinhais, Melgaço ou Monção - clairement exposées dans les gravures planimétriques de Duarte de Armas (7). Nous soulignons d’ailleurs également la proximité diamétrale entre une des villes mentionnées, notamment Monção, et la place maghrébine (Fig. 3). Pour cette spéculation, la consolidation du procédé ne peut pas advenir d’un geste survenu immédiatement après la prise de la ville car les Portugais étaient alors bien trop occupés à repousser les assauts ennemis. Toutefois, quand Rodrigo Anes fut nominé en tant que maître d’œuvre des terres d’Afrique en

95 1473 (8) pour qui Ksar Seghir réunissait les conditions pour élaborer un ambitieux plan de travaux à moyen terme.

Fig. 3 Momçaom in ARMAS, Duarte de - Livro das Fortalezas. Lisboa, 1997, fl. 331 .

Cependant, ce n’est qu’au début du XVIe siècle qu’un véritable plan de travaux commença définitivement et qu’il fut enregistré dans le livre des mesures d’Alcacere réalisé par Boytaca en 1514 (9). La première campagne apparaît documentée sous la forme d’un règlement donné à Pêro Vaz, administrateur des travaux, en 1502 (10). On y mentionne Fernão Gomes, maçon de Faro, en tant que maître d’œuvre, dans un ensemble d’instructions dédiées, presque dans leur intégralité, à la rénovation de la couraça qui avait lieu alors à Ksar Seghir. Apparemment, la première couraça tournée vers le fleuve était devenue obsolète et un nouveau brise-lames était désormais lancé sur la plage (Fig. 4).

Fig. 4 La couraça portugaise de Ksar Seghir

96 L’objectif principal était de prolonger la structure jusqu’à la mer. Il y aurait eu deux tours rondes à l’extrémité. La porte principale pour le service maritime de la couraça était ouverte parmi les tourelles dont l’intérieur consistait en un étage inférieur voûté, soutenant l’étage. Les bouches de bombarde ou meurtrière étaient distribuées par les étages des tourelles. Une indication non négligeable du document à propos de la construction des créneaux indique que la reconstruction des murailles de la ville se poursuivait, comme nous l’avons mentionné ci-dessus à propos de l’attribution chronologique des travaux de régularisation de la circonférence murée. Donc, le règlement de 1502 portait essentiellement sur la construction d’une grande couraça vers la mer et était assez laconique en ce qui concerne le reste du château ou de la ville, raison pour laquelle ce fut un nouveau règlement, daté du 20 décembre 1508, qui donna une impulsion aux réformes de Ksar Seghir, et en particulier à celle de son château (11). Voici les principaux ordres constructifs : - la définition du périmètre fortifié, couronné par un , une forme quadrangulaire qui précède l’ancienne Bab al-Bahr islamique. - construction de tours entre le nouveau château et le mur du bourg dont seule la tour du côté de la plage subsiste; - vers l’intérieur de la ville, le château communiquait à travers un nouveau semi-circulaire, muni de bombardes et d’un pont-levis sur la douve. Il est également possible de lire dans ces mêmes archives de la Torre do Tombo une évaluation de certaines maisons. À partir de l’information fournie, retenons l’idée, de surcroît pragmatique et rationnelle, de la priorité d’un grand campement pour l’implantation du château sur la démolition d’un ensemble de maisons privées, c’est-à-dire la primauté de l’intérêt public et collectif sur le privé. Afin de continuer et de fomenter ce grand volume de travaux, le maître biscayen Francisco Danzilho arriva du Portugal en 1511 (12). Ce que l’on connaît de ces travaux fut mesuré par maître Boytac et son notaire, Bastião Luiz, à partir du 13 juin 1514 et pendant les deux semaines suivantes (13).

97 Danzilho vint essentiellement pour équiper les portes de Ksar Seghir de systèmes bastionnés plus actuels (Fig. 5).

Fig. 5: Reconstitution de la ville au XVIe siècle, après les travaux de Danzilho 1. Bastion de la Plage 2. Bastion de Fès 3. Bastion de Sabta 4. Château 5. Porte de la Mer 6. Porte du Bourg 7. Église 8. Prison 9. Bâtiment désigné “assemblée de la ville” 10. Église de Saint Sébastien 11. Place du terreiro 12. Rua Direita 13. Couraça 14. Fleuve 15. Plage 16. Seinal

Le Baluarte da Praia [Bastion de la Plage], une structure à travers laquelle s’effectuait la liaison maritime par Bab al-Bahr et la couraça, a été ajouté au château et a introduit de nouvelles valences militaires à l’ensemble qui disposait désormais d’une confortable place d’armes. On avança sur la plage pour défendre la couraça et la ville car le secteur ouest du château se trouvait naturellement protégé par le fleuve. Le tir était assuré par un ensemble de six bombardes prévu par le règlement et distribué équitablement sur deux étages auquel s’ajoutait une autre bombarde à l’étage inférieur dans le prolongement de ce même mur de liaison est et encore trois autres sur le mur nord pour protéger la couraça (14). Ce dispositif fortifié - Baluarte da Praia - apparaît comme la clef du projet manuélin pour Ksar Seghir. À partir de l’information de l’époque sur les mesures du nouveau bastion de Bab Sabta qui coïncide également avec les restes de cette structure excavée par l’équipe américaine, nous constatons la juxtaposition de l’appareil portugais aux contreforts de l’ancienne porte islamique, Bab Sabta (15). Le chantier fut subdivisé en quatre nouvelles volées pour former une pince de protection de la porte.

98 Après avoir compris l’évolution et la distribution des architectures militaires qui conformaient la ville, ses portes et son château, examinons, maintenant, la disposition interne du tissu urbain pour une population, majoritairement masculine. Le nombre avancé par Valentim Fernandes dans sa Descripçãm de Cepta por sua costa de Mauritânia e Ethiopia pellos nomes modernos…, entre 1505 et 1507, est de 800 habitants, total qui finit par coïncider avec les calculs de la population portugaise effectués par les archéologues américains, après la quatrième campagne d’excavations, à partir d’une estimation basée sur les maisons excavées et sur les échantillons du cimetière (16). L’adaptation des principaux équipements de la médina musulmane était le procédé le plus commun pour implanter des pôles générateurs de centralités et de mouvements. La grande mosquée fut immédiatement réutilisée comme église matrice de la ville (17) et subit pour cela certaines transformations pendant les décennies suivantes. Outre la reconstruction évidente du en campanile, les nefs ont conservé les mêmes dispositions et orientation. Sur l’ancienne qibla on ajouta, au coin sud-ouest, une chapelle à cinq faces, à côté de l’ancien mihrab peut être interprétée comme un chœur décentré. L’ancien complexe de bains, peut-être transformé en prison par les Portugais, se trouvait dans les alentours méridionaux de cette église. La division interne des différentes salles chauffées fut convertie en cellules. Pour corroborer le fait que les abords de la Porta da Vila (Porte du Bourg) avec son bastion étaient l’un des noyaux agglutinants et diffuseurs de la dynamique interne de Ksar Seghir, un troisième édifice situé plus au nord-est que les précédents a été excavé et classé comme un équipement civil pour l’assemblée de la ville (18). Bien que ses dimensions généreuses présupposent un usage collectif, ses caractéristiques morphologiques ont immédiatement soulevé des doutes chez les archéologues. Or, connaissant l’inexistence de maisons communales dans les places nord-africaines, où le pouvoir administratif et judiciaire qui provenait directement du roi portugais passait par le capitaine ou par le gouverneur, l’attribution de cette fonction à l’édifice semble étrange. Aurait-il pu servir de magasin ou marché, compte tenu de la proximité du château? Seules de nouvelles campagnes archéologiques plus approfondies pourront apporter une réponse définitive. Une autre église, aux dimensions bien plus petites que celles de l’église matrice, se trouvait dans une autre zone du bourg, entre le Château et Bab Sabta. Il s’agissait de l’église de S. Sebastião dont le dessin sur le plan décrivait deux rectangles asymétriques juxtaposés par les sommets (nef et chœur).

99 Cette église et ses maisons, appartenant à la Misericórdia, s’ouvraient vers la Rua Direita, le principal axe routier de la Ksar Seghir portugaise. Le reste de la maille était jalonné par de petits équipements collectifs, des moulins, des fours et des puits, qui définissaient des unités résidentielles composées de plusieurs maisons et qui formaient une couverture assez équilibrée de la surface intra-muros. Malgré leur matrice méditerranéenne, les habitations portugaises se sont adaptées aux préexistantes, mais ont très souvent imposé de nouveaux plans, plus proches de la rue. De fait, une plus grande ouverture de l’architecture vernaculaire à l’extérieur traduit l’effet général de l’appropriation de la ville héritée de la pensée et de l’exercice européens qui ont progressivement dessiné une maille plus régulière, en cherchant des alignements et des orthogonalités. Outre les petites places qui sont apparues spontanément et naturellement, près de Bab Sabta, à des croisements ou devant lesdits équipements mineurs, l’espace public de référence était la place du Terreiro, entre l’église et le château. A partir des carrés excavés du récit archéologique, il est possible de tenter une reconstitution partielle des quartiers et des artères centrales de la ville portugaise (19). L’épilogue de la place Malgré le volume de travaux réalisés pendant le règne de D. Manuel I, la menace locale augmentait en proportions et en nombre de fronts, divisée entre le danger provenant de la mer représenté par les Turcs, et la force croissante provenant du sud, qui allait culminer avec le siège et la conquête de Fès par le chérif méridional en 1549 (20). Ça et la perte de Santa Cruz du Cap de Gué, qui a impliqué l’évacuation immédiate des villes de Safi et d’, ont induit un processus de réflexion sur le maintien des places portugaises proches du Détroit. En ce qui concerne Ksar Seghir, et comme il s’agissait d’une ville de petite dimension, la première réaction fut caractérisée par une réponse par la force. Malgré les améliorations introduites au début du XVIe siècle dans le système défensif, l’architecture militaire commençait à montrer des signes de vieillissement face à l’évolution vers la pyrobalistique. Le roi décida alors de transférer le fort de Ksar Seghir vers le haut du mont Seinal (21) dont la défense pouvait encore sauver la ville basse. D. Afonso de Noronha, capitaine de Ceuta, devait diriger les travaux selon un plan de l’architecte portugais Miguel de Arruda. Au début de l’Automne, plus de deux cents hommes travaillaient ardûment sur le Seinal (22). Cependant, l’entreprise semble avoir avorté quelques

100 mois après par décision royale et au cours de l’année 1550, les travaux du Seinal furent définitivement suspendus. L’avancée des travaux de cette époque semble difficile à évaluer car il ne reste actuellement aucun vestige visible sur le mont. Il est probable que le projet d’Arruda n’ait pas dépassé le tracé. La décision de D. João III négligea Ksar Seghir et le Seinal au profit de Tanger. Avec Asilah, cette place intermédiaire entre Ceuta et Tanger fut évacuée pendant la seconde semaine de juillet 1550 (23). C’est ainsi que la dernière strate portugaise s’est perpétuée à Ksar Seghir et qu’elle fut laissée en ruines jusqu’à l’heure actuelle et menacée par les avancées clandestines d’une renaissance tardive de la localité. Aujourd’hui, face à la proximité géographique du méga projet portuaire de Tanger-Med, les regards se détournent pour l’intérêt patrimonial de cette enclave surgelé d’une histoire partagé. Grace à l’action de La Conservation du Site, l’aménagement récent a contribué pour la mise en valeur des ruines, son accessibilité et parcours de découverte. Nous souhaitons que le projet maroco-lusitanien en cours (24) soit avec le travail de relèvement numérisé au site, soit avec le très dur travail archéologique sur les matériaux qui se tient à la de Tanger, puisse se poursuivre dans les années prochaines. Comme derniers mots, nous ne pouvons témoigner que l’exceptionnalité historique, artistique et culturelle de cet héritage et modestement souhaiter contribuer pour son avenir.

101 Notes Bibliographiques

1. Cette communication s’appui sur les recherches et le texte effectués pour notre thèse de doctorat, publié en 2008. 2. Charles L. REDMAN, Ronald D. ANZALONE, Patricia E. RUBERTONE, “Ksar Seghir: Three seasons of excavation”. Bulletin d’Archéologie Marocaine, Rabat, XI, 1978, p. 164-168. Ce modèle résidentiel peut être évalué à travers les plans d’excavation de quelques maisons contenues dans cet article. 3. Damião de GÓIS, Crónica do Príncipe D. João, Lisboa, 1977, p. 39. 4. Encyclopédie de l’Islam, 1960-2005, IV, p. 759. 5. Rui de PINA, Chronica d’El-Rei D. Affonso V, Lisboa, 1901, p. 784-785. 6. “(…) E por que naquella uilla nom auya casas em que se elle bem podesse aloiar. Todo o mês de Setembro entendeo em mandar fazer huuns paaços muy nobres com que afortellezou e afremosentou o castello da uilla. (…)”, in Gomes Eanes de ZURARA, Crónica do Conde D. Duarte de Meneses. Lisboa: 1978, p. 235. 7. Duarte de ARMAS, Livro das Fortalezas, Lisboa, 1997, fl. 129, 131, 132v et 133, respectivement. 8. IAN-TT, Chancelaria de D. Afonso V, liv. 33, fol. 211v. In Francisco SOUSA VITERBO, Dicionário Histórico e Documental dos Arquitectos, Engenheiros e Construtores Portugueses, Lisboa, 1988, I, p. 40. 9. Livro das medidas de Arzila, Alcácer, Ceuta e Tânger, feitas por mestre Boytac e Bastião Luiz em 1514, in IAN-TT, Núcleo Antigo, nº 769, fl. 6-36. 10. Instruções a respeito das obras da vila de Alcácer Seguer, Lisbonne - 16 juin 1502 et Regimento a Pêro Vaaz que vay a Alcácer fazer as obras d’Alcacer, Lisbonne - 22 juin 1502, in AS GAVETAS da Torre do Tombo, 1960-1977, V, p. 213- 217. 11. Regimento das obras de Alcácer Ceguer, Évora - 20 décembre 1508 (IAN-TT, Corpo Cronológico, parte II, maço 19, doc. 106), in Rafael MOREIRA, A arquitectura do Renascimento no Sul de Portugal, Lisboa, 1991, vol. II, p. 24- 32. 12. SOUSA VITERBO, op. cit., p. 272-274. 13. Voir note supra 9. 14. Idem, fl. 22. 15. Idem, fl. 12-13v. 16. Charles L. REDMAN, James L. BOONE, J. Emlen MYERS, “Fourth season of excavation at Ksar Seghir”. Bulletin d’Archéologie Marocaine, Rabat, XII (1979-80) 281-282. 17. Bien que l’évocation de cette église paraisse normale, elle est étrangement associée à Nossa Senhora da Misericórdia, étant donné que la consécration de la grande mosquée en église de Nossa Senhora da Conceição ou Assunção

102 [Notre-Dame de la Conception ou de l’Assomption] est devenue courante dans les places maghrébines, et que les Misericórdias ne seraient créées qu’en 1498, avec la fondation de cette institution lisboète d’assistance par la reine D. Leonor, veuve de D. João II, soit un demi-siècle après la conquête de Ksar Seghir. Redman et Boone (1979, p. 20), mais aussi Pedro Dias (2000, p.65) indiquent l’église matrice comme étant l’église de Santa Maria da Misericórdia [Sainte Marie de la Miséricorde]. Nonobstant, les anciennes chroniques se contredisent. Tandis que Rui de Pina, dans sa Chronica d’El-Rei D. Affonso V, présente cette désignation (1901, p. 778), Damião de Góis désigne la dédicace de l’ancienne mosquée à Notre-Dame de la Conception dans Crónica do Príncipe D. João (1977, p. 38). La clarification est possible, mais le doute se maintient. 18. Charles L. REDMAN, James L. BOONE, “Ksar Seghir (Alcácer Ceguer): a 15th and 16th Portuguese Colony in ”. Studia, Lisboa. Sep.: 41-42 (1979), p. 25. 19. Cette reconstitution adapte et complète la proposition de REDMAN, BOONE, MYERS, op. cit., p. 280, également consultable dans Pedro DIAS, A Arquitectura dos Portugueses em Marrocos, 1415-1769. Coimbra, 2000, p. 70. Voici les échantillons excavés utilisés pour une approche du scénario urbain de la phase portugaise: E2N10, E4N15, E5N11, E5N7, E10N14, E13N15, E16N12 et E16N14, de 1975-76. 20. RICARD, R obert - “Les portugais et l’Afrique du Nord sous Jean III (1521-1557) d’après la Chronique de Francisco de ”. Hespéris. Rochefort-sur-mer. XXIV (1937) 286-289. 21. Carta de D. João III a D. Afonso de Noronha, Almeirim - 27 février 1549 (BNL - cód. 1758, fl. 325-328), in LES SOURCES Inédites de l’Histoire do Maroc, Première Série - Dynastie Sa’dienne, Archives et Bibliothèques de Portugal, Tome IV, 1951, p. 310-315. 22. “(…) A gemte d’obra trabalha ern gasalhados de capitãis e soldados, os quais são de pedra e barro, porque ao capitão Amtonio Leile pareçeo ao presemte ser mais necesario que outra cousa que puderão fazer. Na calheta se trabalha; pareçe que, a se gastar tempo nela ou mandar mais gemte, que avera bom porto (…)” - Carta de Gaspar Dias de Lamdim a D. João III, Seinal - 21 septembre 1549 (IAN-TT, Corpo Cronológico, parte I, maço 83, doc. 25), in Idem, p. 370-371. 23. Otília Rodrigues FONTOURA, Portugal em Marrocos na Época de D. João III: Abandono ou Permanência, Funchal, 1998, p. 167-168. 24. Projet FCT/CNRST 2010/2011 « Villes et architectures d’origine portugaise au nord du Maroc : Asilah et Ksar Seghir », entre la Direction Régionale de la Culture - Région Tanger-Tétouan, l’École d’Architecture de l’Université de Minho et le Centre d’Histoire d’Outre Mer de l’Université Nouvelle de Lisbonne et l’Université de .

103 Bibliographie

Sources

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Etudes

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106 La mise en valeur du site archéologique de Ksar Seghir Bilan et perspectives

• Abdelatif ELBOUDJAY Conservateur du site archéologique de Ksar Seghir

Présenation du site De point de vue géo-historique, le site archéologique de Ksar Seghir fait partie du territoire des Anjera (1) qui était peuplé depuis les temps préhistoriques en raison de l’incontestable importance de sa situation géographique sur le Détroit de Gibraltar qui lui a permis d’entretenir, depuis toujours, des relations régulières et permanentes avec l’ensemble de la Méditerranée. Les sites archéologiques parsemant son territoire témoignent, en effet, de cette histoire ancrée du peuplement. Rappelons ici la grotte préhistorique de Ghar Khal (2), les inscriptions libyques des Anjera (3), les sites antiques de Dhar d’Asqfane (4), d’Oued Ramel (5), d’Oued al Marsa (6) (ph. 1 et 2) et de Zahara (7), d’Oued Aliane, le Seinal (8), Borj Oued Ghlala (9) (ph. 3), et le fameux site médiéval de Belyounech (10). Cependant, c’est le site archéologique de Ksar Seghir qui culmine cette panoplie de témoins d’occupation humaine en raison de son importance dans l’histoire du Maroc et du Monde musulman (11) et la valeur considérable de son potentiel archéologique.

Ph. 1. Gravure préhistoriques d’Oued Marsa

107 Ph. 2. Usine de salaison d’Oued al Marsa – Fouilles 2011

Nos informations sur le site pendant le Haut Moyen-Age sont très sobres (12). Il fut mentionné tout d’abord au Xème siècle sous le nom de Marsa Bab al Yem (mouillage de la porte de la mer). Cependant, le site semble avoir été occupé avant le Xème siècle par un Ribat. Il faisait partie, sous les Idrissides, de la principauté d’al-Kacem Ibn Idriss II. En 971, les Omeyyades d’al-Andalous tentèrent de s’en approprier suite à une expédition ordonnée par le calife al-Hakam al-Moustansir. Au XIème siècle, il fut cité sous le nom de Kasr al-Majaz (château de la traversée), de Madinat al-Yam (la ville de la mer) ou d’al Kasr al-Awwal (le premier château). Au XIème siècle, déjà connu également par Kasr Masmouda, il fut utilisé comme base de départ par l’Emir almoravide Youssef Ibn Tachfin lors de sa deuxième traversée vers al-Andalous en 481 de l’Hégire. Sous le règne des califes Almohades, notamment Abd al-Moumen et Yaakoub al Mansour, Ksar Seghir devint un grand chantier de construction navale et fut le port le plus en usage dans les passages vers al-Andalous. Les sultans Mérinides, Yaakoub Ibn Abd al-Hak, Youssef Ibn Yaakoub et autres s’en servirent également dans leurs traversées vers al-Andalous.

108 En 686H/1287, le sultan Youssef Ibn Abd al Hak fortifia la ville de Ksar Seghir d’une enceinte circulaire défendue par 29 tours semi-circulaires et percée par trois portes monumentales à savoir Bab al Bahr, Bab Fès et Bab Sabta. La ville islamique est inscrite dans une enceinte circulaire de 200 m de diamètre lui conférant son originalité planimétrique et urbaine aussi bien au Maroc qu’en Occident musulman. Elle était dotée d’une mosquée, d’un hammam et de zones d’habitat. Le site avant 2007 : état des lieux Laissé pendant longtemps en état d’oubli, depuis son abandon par les portugais en 1550, le site a souffert de différents aspects de dégradation causée aussi bien par le facteur humain que par les facteurs naturels. Depuis notre première connaissance du site en 1993, alors que nous exercions au sein de l’Inspection des Monuments Historiques et des Site de Tanger, nous étions frappés par l’état avancé de détérioration dont se trouvait le site. L’ensemble de ses composantes (l’enceinte et ses tours, les portes, la citadelle, le fossé et les zones fouillées), était en ruine ou saccagé. Et parmi les premières dégradations violentes dont a souffert l’établissement médiéval, figurent celles produites par les Portugais au lendemain de l’occupation en 1458 et au moment de leur abandon de la ville médiévale. Nous évoquons ici les grands remaniements architecturaux infligés par les Portugais aux plus importantes composantes monumentales de la ville marocaine d’époque médiévale à savoir les trois portes de la ville: Bab al Bahr, Bab Sabta et Bab Fès, et entre autre, l’addition d’éléments défensifs au niveau de l’enceinte par la construction de nouveaux bastions ou la démolition des parties supérieures des tours rondes pour les remplir de maçonnerie composée de moellons noyées dans un mortier riche en chaux. A ce sujet, les récits descriptifs anciens demeurent très intéressants dans la mesure où ils constituent une source d’information incontournable pour évaluer l’état d’abandon et le degré de dégradation des anciennes agglomérations.

109 Et parmi ces récits consacrés à notre site, nous citons celui de la « Description du Maroc sous le règne de Moulay Ahmed al Mansour de 1596 » qui nous informe que « la ville de El-Ksar Seghir (…) située sur la côte. (…) est un lieu dépeuplé entre Tanger et Ceuta, à trois lieues de Tanger et à quatre de Ceuta » (13). Les prémices d’un état de conservation critique s’annonçaient déjà, dans la ville, vers la fin de l’occupation portugaise. Ainsi, « Malgré les améliorations introduites au début du XVIème siècle dans le système défensif, l’architecture militaire commençait à montrer des signes de vieillissement face à l’évolution de la neuro vers la pyrobalistique. Le roi (portugais D. Joao III) décida alors de transférer le fort de Ksar Seghir vers le haut du mont Seinal, au détriment de la rénovation du château sur la plage » (14) . Emilien Renou, (moitié du XIXème siècle) rapporte que Ksar Seghir « est un petit village superposé aux ruines de l’ancienne forteresse » (15). Les chercheurs qui se sont intéressés au site, ne se sont jamais demandé, à notre connaissance, ni sur les causes de l’effondrement des composantes architecturales et urbaines de cette agglomération après son abandon par les Portugais en 1550 ni sur l’aspect de destruction hérité avant l’implantation de le la forêt qui le couvre actuellement. En effet, d’après nos observations continues sur le terrain depuis 2007, nous avons remarqué que les réalisations monumentales de la ville à savoir l’enceinte circulaire, les tours, les portes de Bab Sabta et Bab Fès et les bastions portugais ont subit un effondrement brutal, violent, en bloc et d’un seul jet ce qui contredit, à première vue, l’hypothèse d’une destruction progressive dans le temps dont pourraient témoigner des empreintes d’usure et de dégradation causées par l’homme ou la nature. Il est souhaitable de prendre en considération la plausibilité de ce postulat lors des éventuelles fouilles systématiques sur le site. Pour notre part, et afin d’appuyer notre énoncé et justifier notre hypothèse, nous exposons, ci-après, quelques observations. Tout d’abord, au niveau de l’enceinte, rappelons que celle-ci présentait un aspect très monumental à en juger par la dimension des tronçons toujours existants sur le site. C’est une enceinte sous forme d’un cercle presque parfait qui faisait environ 540 mètres linéaires , avec une épaisseur à la base de 2

110 mètres et une hauteur d’environ 8 mètres. Elle présentait certainement un chemin de ronde avec parapet et était défendue par 29 tours rondes (fig.1).

Fig.1. Plan du site archéologique de Ksar Seghir d’après Charles L. Redman, Ksar Seghir. An archeological view of medieval life, Academic Press INC, 1986.

Nous avons constaté que la muraille s’était effondrée en bloc. Des banchées de 5 mètres de longueur (ph. 4) se sont décollées au niveau des pellicules du mortier qui les cimentaient pour basculer toutes vers l’intérieur. Nous n’avons relevé aucun basculement des parties hautes de la muraille vers l’extérieur. Notons également que l’enceinte s’est effondrée dans sa totalité à part le bout qui existe à l’intérieur de la citadelle portugaise et qui nous permet d’ailleurs d’apprécier et de restituer sa hauteur originale. La présence de ce bout encore conservé s’explique par le fait qu’il est pris en sandwich par les remparts de la citadelle ce qui lui a procuré une certaine résistance (ph. 5 et 6). Et il parait en fin que la citadelle, dans son ensemble, a pu résister aux facteurs de dégradation même si on note la destruction de ses parties hautes et la présence de fissures « sismiques » verticales au niveau de ses remparts. Les portes de la ville constituent un autre type de construction où on peut observer un effondrement brusque et coalisé fédéré vraisemblablement par un seul facteur majeur.

111 Ph.4. Basculement en banchées suite à un séisme : A- Rempart en place, B– Partie haute basculée

Ph. 5 et 6. Parties de la muraille conservées en hauteur au niveau de la citadelle portugaise

112 Et, à cet égard, nous constatons que l’état de destruction des portes de Fès et de Sabta est identique avec une différence au niveau de Bab Sabta qui a subit une destruction, plus accentuée que celle de Bab al Bahr. Nous pensons que cela s’explique , une fois encore, par le fait que Bab al Bahr a été cantonnée à l’intérieur de la citadelle portugaise qui a joué le rôle d’une structure d’étayage permettant ainsi la conservation de la porte. Seuls les plafonds ont souffert de l’effondrement. Rappelons que cette porte a fait l’objet de remaniements profonds lors de l’occupation portugaise. Les accès ont été entièrement condamnés ou obstrués en maçonnerie de moellons. A propos de l’aspect général qu’offrait le site en 1911, Ed. Michaux-Béllaire et A. Péretié nous informent qu’on « ne retrouve plus au milieu des épais fourrés de lentisques que des morceaux de ruines et les fossés, qui seuls sont à peu près intacts … De la ville en elle-même nous n’avons rien à dire, car c’est un tel enchevêtrement de pierres et de taillis qu’il est impossible de voir quoi que ce soit » (16). En 1945, et d’après les photographies d’archives de Zubillga (ph. 7), l’établissement médiéval et la citadelle étaient envahis par un couvert de lentisques de grande taille, quant à la Coracha, elle était engloutie par le sable comme elle l’est encore aujourd’hui.

Ph.7. Ksar Seghir en 1945 (photographie de Zubillga)

113 En 1962, le site, en plus du maquis de lentisque et d’oliviers sauvages qui le couvraient, était victime d’une opération de boisement en pin pignon et en mimosa au Nord du site sur le sable à la limite du domaine maritime (ph. 8).

Ph.8. Site archéologique de Ksar Seghir pendant les années 60

Le Service des Eaux et Forêts escomptait, par cette action, arrêter l’avancement des sables vers l’intérieur (17) et faire face à ce qui était considéré comme phénomène de désertification.

Ph. 9. Vestige du couvert végétal de mimosa au site archéologique de Ksar Seghir 2102

114 Si, du couvert forestier en mimosa ne subsiste aujourd’hui qu’un seul arbre, (ph. 9) ce qui démontre d’ailleurs son inefficacité, l’implantation du pin-pignon qui existe toujours sur le site, n’était en aucun cas fondée car les dépôts du sable n’atteindraient jamais les ruines de la ville médiévale puisqu’elles étaient déjà couvertes par un maquis sauvage composé de lentisques et d’oliviers sauvages comme le notaient Ed. Michaux-Béllaire et A. Péretié en 1911. Nous pensons que ce maquis naturel suffirait à lui seul pour jouer le rôle de protecteur et de stabilisateur et par là, aucune raison ne justifiait l’implantation d’un nouveau couvert composé d’arbres. En fait, ce qu’il faut relever, c’est l’ensablement notable qui s’est produit au fil des siècles tout au long du mur Est et à l’intérieur de la Coracha depuis sa construction vers la moitié du XVème siècle (18). Ces dépôts éoliens, qui ont induit en erreur le service des Eaux et Forêts, se sont accumulés du côté Est de la Coracha sous l’effet des vents de l’Est et du Nord-est. La Coracha présentait ainsi un obstacle matériel empêchant le déplacement du sable vert la rive droite de l’embouchure de l’Oued. Toutefois, les parements des deux remparts parallèles de la Coracha ont beaucoup souffert de cette érosion éolienne, notamment ceux exposés au vent Nord-Est, et les parties qui devançaient l’arc de la porte du monument se sont également écroulées sous l’effet de la marée haute (fig.2) (ph. 10).

Fig.2. Projet de construction de la coracha Ph.10. Action de l’érosion éolienne sur les parements de la Coracha de la citadelle portugaise

115 Au fil des années, cette forêt, comme on peut le remarquer sur une photographie aérienne des années soixante-dix (ph. 8), a eu des retombées néfastes sur le site car d’une part, elle a été planté directement sur des structures archéologiques et d’autre part, elle a favorisé l’organisation des pique-niques et promenades sur le site en raison de l’ambiance fraiche qu’elle offrait. La fréquentation continue et intensifiée du site par les estivants depuis la fin des années soixante-dix, en raison de sa situation dans unezone balnéaire, a accentué la dégradation des structures archéologiques du site, notamment celles abandonnées par les fouilles de la mission maroco-américaine (1974-1984). Jusqu’à 1970, le site et son environnement immédiat étaient encore épargnés du phénomène de l’urbanisation. Sur un plan de la même année (fig. 3), on peut voir les limites du foncier du site telles qu’elles étaient perçues, à l’époque, par l’Inspection des Monuments Historiques et des Antiquités de Tanger et certainement en concertation avec le Service des Domaines de l’Etat. D’après ce plan, l’assiette foncière du site est estimée à 7 hectares. Seuls quelques édifices de l’époque coloniale parsemaient les environs du site du côté Nord-Ouest et qui subsistent toujours (ph. 11). Il s’agissait de trois édifices de forme rectangulaire disposés en parallèle qui ont servi comme locaux des Douanes, un logement dépendant du Service des Travaux Publics et une petite baraque à l’intérieur du site.

Fig.3. Assiette foncière du site et les parcelles mitoyennes - 1970

116 Ph.11. Action de l’érosion éolienne et de la marée haute sur l’accès de la Coracha de la citadelle portugaise - 1970.

Le même état d’occupation du sol nous est fourni par un document topographique de 1971 (fig. 4) et par une photographie aérienne dela fin des années soixante et sur lesquels on retrouve les trois hangars des douanes, la maison dépendant des Travaux Publics et l’habitation à l’intérieur du site (ph. 8). D’ailleurs, le propriétaire de cette habitation était le premier à réutiliser les pierres des structures archéologiques pour construire la maison ou pour dresser la clôture de l’espace domestique.

Fig. 4. Territoire immédiat du site statué « zone de servitude non aedificandi » par le décret de classement de 1974.

117 A partir de 1975, le département gouvernemental chargé des affaires culturelles, décida d’organiser sur le site une série de campagnes de fouilles archéologiques menées dans le cadre de la coopération maroco-américaine. En effet, c’est pendant les travaux de cette mission, dirigée par Charles L. Redman entre 1975 et 1985, qu’ont été exhumés d’importants espaces monumentaux (la mosquée, le hamman, les places, les maisons et l’intérieur de la citadelle). Outre l’inestimable apport scientifique de ces fouilles, mis en évidence dans plusieurs publications, et l’importance du mobilier archéologique mis au jour, elles avaient malheureusement des conséquences néfastes sur la conservation aussi bien du site que des structures exhumées. Ainsi, des amas de pierres et des déblais provenant de ces fouilles ont été entassés d’une façon anarchique et les vestiges découverts, presque 18% du potentiel archéologique du site, ont été abandonnés sans aucune mesure de surveillance, de protection ni de conservation et de restauration préventive. Ceci a amplement accéléré le processus de dégradation des monuments du site, a fait perdre aux archéologues et à la société une quantité importante de renseignements historiques et a généré une image négative chez la population locale. Cette situation d’abandon, depuis 1984, et l’absence d’initiative ou d’intervention de mise en valeur a engendré un effondrement dense et notable des murs et le réemploi intensif par les riverains de la pierre du site dans la construction de leurs maisons. Et parmi les premières manifestations de cette réutilisation de la pierre du site dans les constructions, nous citons les trois hangars construits par les militaires espagnols pendant le Protectorat et la maison non réglementaire sise à l’intérieur du site sur une partie de l’enceinte (18 bis). Le processus s’est accentué, depuis, par le recours des riverains à l’arrachement de la pierre des structures du site et son utilisation dans les fondations de certaines maisons élevées dans les environs du site depuis les années soixante jusqu’aux années quatre vingt- dix. Le cas des constructions récentes qui juxtaposent Bab Sabta en est un exemple éloquent (ph. 12).

118 Ph.12. Utilisation par les riverains de la pierre du site dans leurs constructions depuis le Protectorat espagnol

Rappelons également que le site fut pendant longtemps utilisé comme décharge aussi bien par les riverains que par la commune rurale de Ksar al Majaz elle-même qui s’occupait de la collecte des résidus ménagers des estivants. Effectivement, c’est à partir de la création de cette commune rurale à Ksar al Majaz au début des années quatre-vingt dix que le site a grandement souffert de la dégradation. Le phénomène d’urbanisation s’est accentué de façon anarchique et l’habitat traditionnel, qui parsemait jadis le territoire du site, continue de se perdre progressivement. La création de cette commune, au lieu d’être une institution au service du site et de sa protection, a été plutôt derrière le déclenchement d’une série d’autorisations de construction dans la zone non aedificandi stipulée par le décret de classement du site de 1974 (19) et sur des terrains limitrophes du côté Est. Cette commune a aussi ouvert le site aux activités de campement pendant l’été et ce jusqu’à 1994 et a livré des autorisations d’exploitation temporaires à certains commerces situés sur l’ensemble de la frange littorale qui s’étend sur environ 1km et qui est frappée par une servitude non aedifcandi au titre du décret de classement (fig. 4). En plus, l’urbanisation des environs immédiats du site a contribué négativement à la dégradation de son cadre naturel et de son paléo-

119 environnement. Il s’agit notamment de la construction de la route n°16 et d’un pont vers le milieu des années soixante. On le trouve reproduit sur la carte topographique de Ksar Seghir au 1/50.000 de 1965. Parmi d’autres expressions de cette perte paysagère, nous assistons, depuis 2010, à certains aménagements non intégrés appelés de « mise à niveau urbain » dans un espace rurale sensible. Il s’agit de l’aménagement très accablant de la rive ouest de oued Ksar Seghir contribuant ainsi à la défiguration de son un aspect naturel par le recours à l’enrochement de la berge, la création d’un espace vert en talus et gradins sillonné par des descentes en escaliers, la mise en place de passages piétons dallées, bétonnées et meublés de pergola en dur, et l’implantation de palmiers et de poteau d’éclairage (ph. 13) (20).

Ph.13. Mise à niveau urbaine de la rive gauche de Oued Ksar -2012

Les premières études Depuis son abandon définitif au XVIIIème siècle, la ville effondrée de Ksar Seghir a demeuré sous ses décombres jusqu’aux années de l’occupation espagnole où on commence à avoir quelques informations sur les premières tentatives de recherches et de documentation de l’état des lieux. Mais avant cette époque, et à notre connaissance, le premier à nous avoir fourni des

120 photographies du site est H. M. P. de La Martrinière et c’était au XIXème siècle (ph. 14, 15, 16) (21).

Ph. 14. 15. 16. Photographies publiées par H. M. P. de La Martrinière, Album de 34 photographies du Maroc en 1887

Ensuite, Ed. Michaux-Béllaire publia, en 1911, six photographies reproduisant quelques composantes architecturales du site à savoir Bab al Bahr et la citadelle portugaise avec sa Coracha et un plan du site (ph. 17) (22).

Ph. 17. Plan du site archéologique de Ksar Seghir publié par E. Michaux-Béllaire et A. Péretié en 1911

En 1945, le photographe Zubillga réalisa une couverture photographique du site en s’intéressant beaucoup plus à la citadelle portugaise et vers la même époque, un autre photographe, dénommé Calvacho, produira des photographies, dont la plupart étaient également focalisées sur la citadelle (23). Sur certaines photographies réalisées par ces deux photographes, on

121 remarque clairement la densité du couvert végétal formé de lentisque et d’olivier sauvage qui couvrait la ville médiévale de Ksar Seghir (ph. 18).

Ph. 18. Ksar Seghir pendant les années quarante (photographie de Calvacho)

En 1954, Miguel Tarradell, publia la pierre tombale portugaise découverte par un légionnaire espagnole en 1949 aujourd’hui exposé au Jardin du Musée d’Archéologie à Tétouan (24). La mise en valeur du site Après presque quatre siècles d’abandon, le site va connaitre les premières interventions sur son sol par le transfert de la pierre tombale en 1945 vers Tétouan par les militaires espagnols. Et depuis, il n’a cessé de faire l’objet d’utilisation et d’exploitation pour des fins différentes (visites, pâturages, défrichement, boisement, camping, fouilles, organisation des pique niques, carrière, décharge publique, construction de logement et empiètements sur son assiette foncière). Consciente de l’importance patrimoniale de ce site et de l’état lamentable de détérioration dont il se trouvait et des actions de pillage dont il était victime à partir de la fin des années soixante, le Ministère de la Culture n’a pas cessé de déployer des efforts pour sa sauvegarde. Ainsi, une protection juridique fut assignée au site en le classant comme patrimoine national en 1974 (25). Malheureusement, la zone non aedificandi

122 du site a été anarchiquement et copieusement occupée par l’habitat et ce, depuis la création de la commune rurale de Ksar al-Mjaz en 1992. Pour assurer le minimum de contrôle, un gardien a été affecté sur les lieux par le Ministère de la Culture et en 2000 une clôture partielle a été installée des côtés Nord et Ouest, mais elle a vite été victime des actes destructeurs par les riverains et les estivants. Mais une fois l’opportunité s’est présentée au Ministère de la Culture en 2005, à l’issue des fouilles de sauvetage réalisées sur le site de Dhar d’Aseqfane découvert sur le tracé de l’autoroute Tanger – Port Tanger- Med, des négociations entre le Ministère de la Culture et la Société des Autoroutes du Maroc ont abouti au projet de mise en valeur du site de Ksar Seghir en 2007. En effet, et afin de concrétiser cette volonté, un partenariat a été signé entre le Ministère de la Culture et le Ministère de l’Equipement et du Transport, pour la réalisation d’un projet d’Aménagement et de Restauration du Site Archéologique de Ksar Seghir. Le financement du projet était assuré par la Société Nationale des Autoroutes du Maroc (26). Le Ministère de la Culture a voulu, par le biais de ce projet, récupérer ce site et l’intégrer dans le processus de développement territorial de la Région de Tanger-Tétouan, qui connait la réalisation d’un certain nombre de projets structurants de dimension national à savoir le Port de Tanger Med I et II, depuis 2002, l’autoroute Tanger-Oued Rmel et le chemin de Fer Tanger – Port Tanger Med, la base navale de Zahara, la nouvelle ville de Chrafat et l’Usine Renault. Dans la même perspective de développement, des travaux de mise à niveau urbaine de Ksar Seghir-Ksar al-Majaz et un plan d’aménagement de Ksar Seghir-Ksar al-Majaz homologué au mois de novembre 2011. A ce propos, le site archéologique de Ksar Seghir avec son assiette foncière a été pris en considération par tous les documents d’urbanisme et projets en cours de réalisation en tant que composante urbaine incontournable et en tant que potentiel culturel et touristique. La mise en place d’une unité de gestion du site archéologique de Ksar Seghir traduit la volonté du Ministère de la Culture de faire intégrer et adjoindre ce site au réseau des plus importants sites archéologiques marocains déjà dotés d’une infrastructure de gestion tels Volubilis et Chella depuis le Protectorat et récemment le site archéologique d’époque antique de Banassa (27). Le projet s’articule sur les axes suivants :

123 1. L’assainissement de l’assiette foncière par la délimitation topographique de l’assiette foncière du site et la demande de son affectation au Ministère de la Culture. Cette procédure juridique est indispensable pour pouvoir assurer la bonne gestion du site, lui épargner d’éventuels conflits de voisinage et améliorer son cadre environnant. Ceci ne serait atteint sans l’éradication des constructions non réglementaires empiétant sur le site et son assiette foncière (28). 2. Le nettoyage archéologique général du site (débroussaillage, désherbage, extractions et évacuation des déblais et terres, récupération des pierres, évacuation des résidus et déchets, récupération des éléments architectoniques, récupération du mobilier archéologique). 3. La protection physique du site par la pose d’une clôture surveillée et le contrôle de l’accessibilité. 4. La consolidation et la restauration préventive de quelques monuments archéologiques présentant un état de détérioration avancée (la mosquée, le Hammam, le marché et une maison) et des interventions ponctuelles de reconstruction et de consolidation au niveau de la citadelle portugaise. 5. La présentation du site et l’aménagement d’un circuit de visite. Cette action comporte la réalisation d’un circuit aménagé et équipé s’étendant sur 700 m et offrant au visiteur une balade instructive, agréable et confortable. Elle est instructive et éducative de part l’information qu’elle procure sur l’histoire du site et ses plus importants monuments (Bab Sabta et son fossé, Bab Fas, le Hammam, la Mosquée, Bab al- Bahr, la citadelle portugaise avec sa coracha). Elle est agréable, car le visiteur profitera de la fraicheur de la forêt, de la belle vue sur l’embouchure de l’Oued el Ksar, sur la mer et le petit port de pêcheur. Elle est enfin confortable, en vue de l’aspect aplani du circuit en boucle balisé, aménagé et meublé de panneaux interprétatif, de signalisation et de quelques bancs de repos. 6. La construction d’une unité de gestion du site composée de deux espaces. Le premier espace comporte les bureaux administratifs et le deuxième espace est formé de salles d’exposition, d’interprétation et de communication pour présenter au grand public la portée scientifique, historique et significative du site archéologique et du patrimoine culturel de la région d’Anjera.

124 Et depuis la fin de ces travaux en Août 2008, plusieurs actions de mise en valeur et des projets d’étude ont été élaborés dont certains sont déjà réalisés à savoir la restauration et la récupération du rempart Ouest de la ville médiévale, le traitement partiel du couvert forestier, l’organisation d’un colloque sur le site (29), la réalisation d’un Centre d’Interprétation du Patrimoine (30) et la récupération et la restauration de certains objets archéologiques (31).

Conclusion Nous estimons qu’il est très ambitieux de parler actuellement d’un bilan après uniquement quatre années passées depuis le démarrage du projet en 2007. Cependant, il est important de souligner qu’avec ce projet, le Ministère de la Culture a réussi, au moins, le défi d’avoir récupéré un des sites archéologiques les plus remarquables du registre patrimonial marocain. Ce site a été toujours considéré comme une ressource patrimoniale qui pourrait constituer une offre culturelle et touristique de premier ordre, surtout que son contexte régional vit actuellement une dynamique de développement socio-économique notable. Plusieurs atouts contribueront certainement à sa promotion. D’une part sa position géographique sur le Détroit qui lui offre des chances énormes d’épanouissement et sa situation entre deux pôles urbains : Tanger et Tétouan. Cette région jouit actuellement d’une infrastructure structurante, le complexe portuaire de Tanger-Med I et II, le port de Zahara, les zones logistiques TMSA, l’usine Renault de Melloussa, la nouvelle ville de Chrafate en plus de la facilité d’y accéder par l’autoroute de Casablanca – Tanger Med, par la route nationale n° 16, par le chemin de fer depuis l’intérieur du Maroc ou par bateau depuis l’Espagne et l’Italie. Rappelons d’autres atouts culturels et naturels, à savoir les sites naturels (le mont Moussa, la plage, l’oued, la forêt) et un ensemble de sites archéologiques, appartenant aux différentes époques de l’histoire : le site préhistorique de Ghar Khal, le site antique de Dhar d’Aseqfane et le site médiévale de Belyounech. Le site de Ksar Seghir, comme l’ensemble des grands sites archéologiques du Maroc, nous présente, à tous les niveaux, de grandes perspectives de recherche.

125 Au niveau scientifique, seulement 18% de la superficie du site a été fouillé et plusieurs thèmes peuvent toujours faire l’objet de recherches tels le paléo-environnement du site, le matériel archéologique des anciennes fouilles notamment celui provenant des fouilles de Charles L. Redman dont l’étude reste toujours à faire et on pense ici au matériel céramique, mais aussi au matériel métallique composé d’objets en bronze et en fer sans pour autant oublier les éléments d’architecture. Et concernant la programmation des fouilles archéologiques, il est souhaitable voir même primordial de réserver un pourcentage de la totalité du budget de la fouille aux travaux de conservation préventive et à la restauration des vestiges déterrés afin de conjuguer les objectifs de la gestion administrative et scientifique du site. Du point de vue stratégie des fouilles et prise en compte des problématiques archéologiques que pose actuellement le site, nous pouvons énumérer, au moins, trois scénarios. Le premier s’articule autour de l’urbanisme de la ville médiévale et portugaise. Le deuxième, intéresse la citadelle portugaise et le troisième touche le système défensif de la forteresse (l’enceinte, les tours, les portes, les bastions, et le fossé). Et parmi les priorités, qui s’imposent avec acuité, c’est la restauration et la consolidation des structures archéologiques mis au jour par les anciennes fouilles, à savoir les structures d’habitats, notamment les maisons mérinides du XIVème siècle qui sont dans un état de conservation très vulnérable, la petite église portugaise dénommé « San Sébastien », la mise en valeur de l’enceinte, des tours rondes, des bastions et des trois portes. Outre le souci de préservation, l’objectif, est de générer des produits touristiques et didactiques attrayants pour les visiteurs. Du point de vue du développement local, le site, appartenant jusqu’à nos jours à un territoire rural, est destiné à l’horizon de 2020 à subir des influences qui changeront certainement son devenir, dans la mesure où l’ensemble de son territoire est vouée à accueillir une grande urbanisation, actuellement en gestation, depuis le lancement des travaux du Port de Tanger Med I en 2002. D’où, il est important d’élaborer un plan stratégique de gestion du site afin de lui assurer une intégration réussie dans son territoire. Cette gestion intégrée aboutira certainement à promouvoir le site et à en faire une source de richesse incontournable pour l’ensemble du territoire du Grand Tanger (32).

126 Notes bibliographiques

1. Sur les Anjera, voir,Ed. Micahux-Béllaire et A. Pérétié, « El-Qçar Eç-Ceghir », in Revue du Monde Musulman, 5ème Année, Décmbre, N° 12, 1911, p. 339-344). Mokhtar El Harras, «continuité et changement d’une communauté jbala : les Anjra », Jbala- Histoire et Société, Etudes sur le Maroc du Nord-Ouest, Ed. CNRS (Paris) – Wallada (Casablanca), 1991, p.231-243. Angeles Vicente, « Un dialecte de type montagnard au Maroc : le parler d’Anjra », Peuplement et arabisation au Maghreb Occidental, Dialectologie et histoire, Actes de colloque, Pub. Casa de Velazquez et Universidad de Zaragoza, Madrid – Zaragoza, 1998, p.121-130. 2. Sur la grotte préhistorique de Ghar Khal, Miguel Tarradell, « Noticia sobre la excavacion de Gar Cahal », Tamuda, II, 1954, p. 344-358, E. Vijande, J.Ramos, M. Zouak, J.J. Cantillo, A. El Idrissi, S. Dominguez- Bella Y A. Maate, « Revision de los productos arqueologicos des la Cueva de Gar Cahal depositados en el Museo Arqueologico de Tetuan », Actes du colloque Arqueología y Turismo en el Círculo del Estrecho, Colección de Monografías del Museo Arqueológico de Tetuán (III), Cadiz, 2011 p. 265-288 3. Sur les inscriptions libyques d’Anjera déposées au musée d’Archéologie de Tétouan, Abdelaziz El Khayari, « Considérations sur l’épigraphie libyque du Maroc », Débuts de l’écriture au Maghreb, Actes du colloque, Ed. Fondation du Roi Abdul-Aziz Al Saoud, Casablanca, 2004. 4. Le site de Dhar d’Aseqfane se trouve à moins d’un kilomètre au sud de la côte et du site médiéval de Ksar Sghir, sur une colline dominant l’oued Ksar qui devait auparavant être navigable. En 2005-2006, le site a fait l’objet d’importantes fouilles de sauvetage, dirigées par l’INSAP et financées par la Direction des autoroutes du Maroc. Les découvertes qui y ont été faites témoignent d’une longue histoire, marquée par un dynamisme économique certain et par une ouverture constante aux différents circuits commerciaux et courants culturels, propres au bassin méditerranéen. Le site a été en effet habité pendant 17 siècles à peu près, de la fin du VIème s. avant J.-C. au XII s. après J.-C. 5. La crique d’Oued Rmel, choisit comme site pour la construction du port de Tanger Med I, a du joué un rôle très important dans le trafic et le commerce à travers le Détroit, et ce, depuis l’antiquité, en tant que point d’ancrage sur la rive méditerranéenne Sud. Cf. Miguel Tarradell, Marruecos antiguo, Nuevas perspectivas, Zephyrus, V, 1954. 6. Sur Oued al Marsa, cf. Miguel Tarradell, Marruecos antiguo, Nuevas perspectivas, Zephyrus, V, 1954 et Marruecos punico, Tétouan, 1960, 123-124. Le territoire d’Oued al Marsa présente « deux sites majeurs : Un abri sous roche (petite grotte), localisé sur le fronton rocheux calcaire côté est de l’oued avec des gravures rupestres et industrie lithique dans ses environs surement d’époque paléolithique moyen et peut être supérieur. A signaler aussi une importante factorerie (usine-maison) de salaison du 1er a.j.c. au V ap. j.c. Une fouille a été réalisée en 2010 à la factorerie par le groupe de recherches maroco-espagnol dans le cadre du projet «SAWA» du Programme opératif de coopération Transfrontalier Frontière Extérieurs, fiancé à 75% par le Fond Européen du Développement de la Union Européen. Nous remercions le groupe qui nous a livré ces précieuses informations. 7. Sur Zahara, cf. Marruecos antiguo, Nuevas perspectivas, Zephyrus, V, 1954, Miguel Tarradell et Michel Ponsich, Garum et Industrie antiques de salaison dans la Méditerranée Occidentale, Paris, 1965, 68-71. 127 8. Le « Seinal » réfère à la montagne dominant à 77m d’altitude et la ville de Ksar et l’embouchure de Oued al-Kasr du côté Est. En février 1549, le roi portugais Joao III, ordonna la construction d’un fort à cet endroit pour défendre Ksar Seghir cependant le projet s’est vite abandonné, cf. Jorge Correia, l’implantation de la ville portugaise en Afrique du Nord, de la prise de Ceuta jusqu’au milieu du XVIème siècle, pub. Faculté d’Architecture de l’Université de Porto, 2008, p. 169-172. 9. Il s’agit de la tour historique sise à l’intérieur de la cour-parking de l’actuel café-restaurant « Oued Ghlala » à la limite ouest du Port Tanger Med II. Ce monument fait partie d’une chaine de tours carrées qui jalonnaient la côte méditerranéenne à partir de Tanger jusqu’à et dont le rôle était le contrôle de la navigation à travers la méditerranée pendant les siècles passées. Elle date probablement du XVIIème siècle et présente des éléments très identiques du point de vue morphologique, matériaux de construction et position topographique avec la tour de Ghandouri, sise dans la baie de Tanger. 10. Sur Belyounech, cf. J. Hassar , Belyounech, in Actes des 1ères journées nationales d’archéologie et du patrimoine, vol. 3 : Archéologie Islamiques, Ed. Société Marocaine d’Archéologique et du Patrimoine, 2001, p 88-98. 11. De part sa position géographique et sa proximité du continent européen, cette région possède une fonction naturelle de «pont» privilégié entre le Maroc et l’’ensemble de la Méditerranée. Le rivage péninsulaire offre des débouchés qui correspondent à des baies favorisant l’accès par la voie maritime: baie de Tanger, de Oued Alyane, Ksar Seghir, Oued al-Marsa et Belyounech. L’installation de l’Homme pendant les différentes époques de l’histoire (préhistoriques, antiques et médiévales) y a été attestée. Les toponymes « agawaz » (la traversée) « Jbel Moussa » et «Alyane», évoquent tous des événements historiques majeurs qui ont eu lieu dans cette contré pendant les premiers temps de l’Islam au Maroc. Cependant, son histoire n’est pas encore assez étudiée. 12. Bibliographie sur le site archéologique de Ksar Seghir classée par année de parution: Georges Yver, Al-Kasr al Saghir, E. I.2, T. IV, p. 759. Fernando de Carranza, “Ksar Masmuda o Alcazar Segher”, Mauritania, ano XIII, n° 156, 1 de noviembre, 1940, p. 358-360. Ibid, Mauritania, ano XIII, n°157, 1 de deciembre, 1940, p. 348-386. Fernando de Carranza, “Alcazasguer”, Mauritania, ano XV, n° 172, 1 de marzo, 1942, p. 86-87. Miguel Tarradel, «Una làpida sepulcral portuguesa de Alcazarsguer », Tamuda, ano 11, semestre 1, Tetuan, 1954, p. 131-139. Tomas Garcia-Figueras, « La unidad, principio fundamental. De como el gran monarca Felipe II rechazo desdenosamente la fortaleza africana de Alcazarsguer cuando le fue ofrecida a cambio de renuciar a los derechos sobre la Navarra española en 1559», Miselanea de Estudios Histpricos sobre Marruecos, , 1949, p. 127-132. Ahmed Meknassi, « Compana de excavaciones y exploracion arqueologica », 1957, Tamuda, ano V, p, 161. Ahmed Meknassi (en arabe), «al-Mudun al-Islamiya al-Mundarisa fi Samal al-Magrib, Tétouan, 1959. Guillermo Gozalbes Busto, “Datos para la historia de Alkazar Seguir. Contribcion al estudio de la historia de Marruecos”, Cuadernos de la Biblioteca Espanola de Tetuan, Tétuan, 12, 1975, p. 55-77.

128 Myers J. Emlen, the political economy of ceramic production: a study the islamic cammon ware pottery of medieval Ksar Seghir, Ph. D, dissertation, Department of Anthropology, State university of New York, Bringhamton, 1975. Robert W. Salthouse, The hammam at Ksar Seghir, Manuscript on file, Department of Anthropology, Arizona State University, Tempe, 1976. Carla M. Sinopoli, The imported of Portuguese Ksar Seghir: a comparative study, Manuscript on file, Department of Anthropology, Arizona State University, Tempe, 1976. Carlos Gozalbes Cravioto, « Las corachas portuguesas de Alcazaceguer », Cuadernos de la Biblioteca Espanola de Tetuan, n° 15, 1977, p. 49-61. Charles L. Redman et alli, « Ksar Seghir : Three seasons of excavations », Bulletin d’Archéologie Marocaine , XI, 1978, p. 151-195. James L. Boone, « Distribution of military artifacts at Ksar Seghir », Paper delivered at the Society for Historical Archeology Meeting, San Antonio, Texas, 1978. Jay C. Schulman, The history of Ksar Seghir, 5 chapters, Manuscript on file, Department of Anthropology, Arizona State University, Tempe, 1978. Charles L. Redman, Description and inference with the late Medieval pottery from Ksar Seghir, Morocco, Medievals Ceramics 3, p. 66-79, 1979. Charles L. Redman, R.D. Anzalone, P.E. Rubertone, « Medieval archeology at Qsar es-Sghir, Morocco», Journal of field archeology, 6, p. 1-16, 1979. Charles L. Redman, James L. Boone, Ksar Seghir (Alcacer Ceguer): a 15th and 16th century Portuguese colony in North Africa, Studia, 41-42, 1979, p. 2-50. Charles L. Redman, « la céramique du Moyen-Age tardif à Ksar Seghir », 1980a, Bulletin d’Archéologie Marocaine, p. 291-305. Charles L. Redman, « Late medieval ceramics from Ksar Seghir », la Céramique Médiévale en Méditerranée Occidentale, Pub. Centre National de la Recherche Scientifique, 1980b, p. 251-263. James L. Boone, Ksar es-Seghir: The Archeology of Territorial Expansion. New York: State University of New York at Binghamton, 1980. Charles L. Redman, James L. Boone, J. Emlen Myers, « Fourth season of excavations at Ksar Seghir », Bulletin d’Archéologie Marocaine, 1980, p. 263- 290. Jeffers V. Mary, Domestic architecture from islamic Qsar es-Sghir, Unpublished M.A., thesis, Department of Anthropology, State university of New York, Bringhamton, 1981. James L. Boone, “Majolica escudillas of the 15th and 16th centuries: a typological analysis of 55 examples from Ksar Seghir”, Historical archaeology,18, 1984, p. 76-85. Emlen J. Myers, The political economic of ceramic production: a study of the Islmaic commonware pottery of medieval Ksar Seghir, Unpublishid Ph. D. dissertation, Departement of Anthropology, State University Of New York, Binghampton, 1984. Charles L. Redman, « Survey and test excavation of six medieval islamic sities in northen Morocco », Bulletin d’Archéologie Marocaine, XI, 1983-1984, p. 311-349. Charles L. Redman, Ksar Seghir. An archeological view of medieval life, Academic Press INC, 1986. Tarik Moujoud, Ksar Seghir islamique, étude d’histoire et d’archéologie, mémoire du 2ème cycle, INSAP, Rabat, 1999-2000.

129 13. Comte Henry de Castries, Une Description du Maroc sous le règne de Moualy Ahmed El-Mansour (1596) d’après un manuscrit portugais de la Bibliothèque Nationale, Paris, 1909, p.125. 14. Jorge Correia, op.cit, 2008, p.169. 15. Emilien Renou, Description géographique de l’empire de Maroc, Imprimerie Royal, Paris, p. 300. 16. E. Michaux-Béllaire, A. Péretié, « El-Qçar Eç-Ceghir », Revue du Monde Musulman, 5ème Année, Décembre, N° 12, 1911, p. 365-366. 17. Les dits services ont procédée de la même façon sur le site archéologique d’al- Mazemma (Province d’al-Hoceima). 18. Projet de la Couraça de Ksar Seghir. In Regimento de Pêro Vaz que vay a Alcacer fazer as obras d’Alacacer. IAN-TT, gaveta XV, maço 18, n°. 26, fl.3 in J.Correia, op.cit, p.156. 18. bis. Au moment de la préparation de ces actes à la publication, ces hangars ont été demolis et la Conservation du site a pu récupérer un bon nombre de pierres taillées. 19. Bulletin Officiel du Royaume du Maroc, N° 3213- 7 Joumada 1 1394 (29 – mai – 1974) Décret n° 2-73-678 du 5 Joumada I 1394 (27 mai 1974) portant classement du site de Ksar Seghir (Province de Tétouan). 20. la Province de Fahs-Anjera en est le maître d’ouvrage. Elle a confié la réalisation de ces travaux à un groupement d’architecte. C’est une initiative louable du moment où elle vise l’amélioration de la qualité urbanistique du centre de Ksar Seghir, composé essentiellement des locaux commerce (épiciers, légumiers, restaurants, cafés, barbiers, drogueries, … mais malheureusement, le traitement paysager a été très osée en optant pour la transformation du paléo-environnement de la rive qui est, à notre sens, une composante essentielle de l’oued. D’ailleurs, faciliter l’accessibilité aux gens à celui-ci risquera d’aggraver le degré de sa pollution et dont il a beaucoup souffert depuis, au moins, une trentaine d’année. Il a fallu intervenir pour le draguer, le désenvaser et de le mettre à l’abri des déversements des eaux usées mieux que de le menacer et de le déséquilibrer. La Province prévoit également au cours de 2013 intervenir sur la rive droite de l’Oued mitoyenne au site du côté Ouest. Elle y projette une voie piétonnière en étalant un enrochement identique à celui réalisé sure la riche gauche et un pont parallèle à celui qui existant. Nous considérons, pour une fois encore, quelqu’elle soit la nature de cet aménagement, il est une atteinte considérable à l’intégrité paysagère naturelle du site du moment où il perturbera la lecture de la fondation de cette ville historique sur l’Oued et cassera cette relation de cause entre la ville et l’Oued. 21. H.M.P. de La Martinière, Album de 34 photographies du Maroc en 1887, Société de géographie de Paris. 22. A. Pérétié et E. Micheaux- Béllaire, op.cit (1922). Il s’agit d’une vue générale sur le site de photographies de tour carrée de Bab al Bahr, de porte principale et bastion, de la citadelle, escalier de chemin de ronde de la citadelle, et de l’espace entre les deux tours carrées de Bab al Bahr. 23. Nous avons consulté, en 2010, un fonds photographique réalisé sur Ksar Seghir par ces deux photographes à Bibliothèque Générale de Tétouan. 24. M. Tarradell, op.cit (1954) 25. Op.cit, note 19.

130 26. Le coût global de ce projet est de huit millions de dirhams. 27. Le Ministère a entrepris, depuis 2004, une stratégie de promotion des sites archéologiques majeurs du royaume, qui ne possédait une unité de gestion administrative in situ, à savoir, Banassa, Tamuda, Lixus et Mzora. Certaines unités abriteront, à l’image de Ksar Seghir, des Centres d’Interprétation du Patrimoine. 28. Notons à cet égard qu’au moment de la rédaction de cet article, la Province de Fahs-Anjera, initiateur de projet de mise à niveau urbain de la commune de Ksar al-Majaz, se chargera de la destruction des constructions non réglementaires qui occupent le Nord-Est du foncier du site. Pour sa part, le Ministère de la Culture est en cours de chercher une solution pour délocaliser l’habitat qui se trouve à l’intérieur du site. 29. Parmi les objectifs généraux de cette rencontre organisé en juin 2011 est d’offrir à l’ensemble des intervenants sur le territoire de la province Fahs-Anjera l’occasion de découvrir le potentiel patrimonial et touristique de cet important site archéologique, de promouvoir l’échange des idées autour du site pour favoriser sa mise à niveau et en faire un facteur de développement durable et de découvrir de nouveaux horizons de promotion du patrimoine culturel du territoire de la province. Cette rencontre vise également l’exposition de nouvelles réflexions d’ordre archéologique réalisées sur le site et l’évaluation de l’état actuel des lieux et la quête de sources de financement éventuelles pour réaliser des projets de restauration et de mise en valeur des monuments et vestiges archéologiques du site. 30. Le Centre d’Interprétation du Patrimoine de Ksar Seghir et de sa région a été inauguré en octobre 2011. L’idée fondamentale sur laquelle se base ce centre est la divulgation du site et de sa région notamment, la région des Anjera, à travers des moyens de l’interprétation d’usage conventionnel dans ce type d’installation de communication. Il nécessite encore des améliorations et appoints afin de répondre aux normes qui caractérisent les Centres d’Interprétation du Patrimoine au niveau des supports (agrandissement des panneaux thématiques, amélioration de la présentation infographique du contenu des huit panneaux, traduction des textes en version arabe, réfection des support et socles), au niveau de l’animation (réalisation d’un documentaire de 7 à 12 minutes sur le site et sa région dont le contenu sera l’histoire du site à travers des scènes animées, les traversées vers al andalous, l’activité commerciale, restitution en 3D de l’urbanisation de la ville, création d’un espaces ludiques et mise en place des interactifs..) au niveau de l’interprétation de certains thèmes l’interprétation (Le commerce dans le Détroit, scène de vie quotidienne,..). 31. C’est dans le cadre de la préparation de la collection du Centre d’Interprétation du Patrimoine qu’a été entamée, en 2010, une action de restauration d’objets céramiques par la Conservation du site. Environ vingt-quatre pièces céramiques (plats, bols, lampes, carafe) ont été restauré au musée Archéologique à Tétouan et au Musée de la Kasba à Tanger. Actuellement, elles figurent dans l’exposition du Centre d’Interprétation du Patrimoine. 32. Au moment où nous étions entrain de finaliser cet article, les environs immédiats du site du côté Est connaissaient des travaux de mise à niveau urbaine dont le maitre d’ouvrage est la Province de Fahs – Anjera. Il s’agit de réaliser une promenade maritime au long de la plage, l’amélioration de la voirie, l’assainissement, l’aménagement d’une grande place publique, l’installation de kiosques, la mise à niveau de l’éclairage public, l’enterrement des câbles téléphoniques et électrique et la création des espaces verts.

131 0 .3 اال�ستق�صا، ج 3، �ص 58. 31. د. التازي، التاريخ الدبلوما�سي للمغرب، ج 7، �ص 72-71. 2 . 3رحلة ابن بطوطة تقدمي وحتقيق، عبد الهادي التازي- مطبوعات �أكادميية اململكة املغربية �سل�سلة الرتاث، املجلد الثاين �ص 151 تعليق 296 33. احل�سن ابن الوزان )ليون ا إالفريقي(، و�صف �إفريقيا، ترجمة، حممد حجي وحممد ا أالخ�رض، طبعة ثانية دار الغرب ا إال�سالمي 1983، ج 1 �ص 316. 34.د. التازي، الثغور املغربية املحتلة بني املواجهة امل�سلحة والتدخل الدبلوما�سي، جملة البحث العلمي 1395=1975. G.yver : Alkasr Al Saghir. Encycopédie de l’Islam.2ème édition .35 36. د. التازي، التاريخ الدبلوما�سي للمغرب، ج 8، �ص 164 م�صدر �سابق �صفحة 164-165 - 168 �إىل 170. Hespréris, 1921. Sources Inédites de l’Histoire du Maroc, France, .37 Partie 1, p. 170 Charles Pez, les Rois de France et le Maroc, p. 25-26 .38 39. يالحظ �نأ االتفاقيات قد ت�صحب ب أ�داء اليمني من طرفني لتعزيز م�ضمونها، كما يالحظ مبد� أحتديد �أمد االتفاقية التي نراها هنا متتد طوال �أيام امللك و�أوالده، هذا �ىلإ مالحظة ا�ستعمال م�صطلح »�ضيف« ويق�صدون به )امللك( وهو م�صطلح جميل ظلت ت�ستعمله الر�سائل الدبلوما�سية. 40. هذا مبد�أ من مبادئ الفقه ا إال�سالمي ومن �صلب تعليمات ا إال�سالم، وقد كان من �أبرز املبادئ التي لفتت �أنظار املهتمني بالقانون الدويل حيث كان العمل جاريا على �أن ا أالجانب ذا�إ توفوا يف البالد ف إن� مرتوكهم يرجع ىل�إ �صاحب البالد! Hespéris, 1951,p. 365 .41 42. كتب تاريخ ر�سالة ا أالمان هذه بالقلم الرومي �أو الفا�سي )انظر املجلد 2 من التاريخ الدبلوما�سي للمغرب �ص 60-41(. 43. د. التازي: التاريخ الدبلوما�سي للمغرب ج 7 �ص Sources Inédites de . 70 l’Histoire du Maroc – France, S.I.T.3P.P.746 44. د. التازي، �أ�سباب �إخالء الربيطانيني لطنجة، حديث قدم أالكادميية اململكة املغربية، 12 يونيه 2003.

132 12. يراجع كتاب املعجب لعبد الواحد املراك�شي �ص 244، والبيان املغرب البن عذاري �ص 104. 13. املن با إالمامة، م�صدر �سابق، �ص 44. 14. �أبي احل�سن على اجلزنائي، كتاب زهرة ا آال�س يف بناء مدينة فا�س، طبع �ألفريد بيل، اجلزائر 1923، ال�صفحات بالعربية 7 2الرتجمة الفرن�سية 68. 5 . 1النا�رصي: اال�ستق�صا، م�صدر �سابق، ج 1، �ص 179-180 ج 4 ، �ص 114. 16. زهرة ا آال�س للجزنائي، م�صدر �سالف، د. التازي: ميناء فا�س يف امل�صادر املغربية وا أالجنبية، جملة �أكادميية اململكة املغربية العدد 17 �سنة 2000 �ص 25. 17. ينبغي التنبيه �إىل �أن نعت )ال�سيد( يف الربوتوكول املوحدي يعني اخلليفة �أو ا أالمري �أو �أحد �أفراد ا أال�رسة املتنفذة، بينما كان نعت ال�شيخ يعني �إطارا معينا من �أطر الدولة على ما هو معلوم، انظر مقدمة كتاب املن با إالمامة. 18. املن با إالمامة، �ص 220 19. املن با إالمامة، �ص 328، تعليق 1، م�صدر �سابق. 20. املن با إالمامة، �ص 340-334 21. م�صطلح »الظهري« ظهر منذ عهد املوحدين كما نرى ويجمع على ظهائر وهو يعني املر�سوم اخلاليف و �أامللكي، وما يزال امل�صطلح �إىل اليوم م�ستعمال يف ا أالدب ا إالداري باململكة املغربية. 22. هذا الت أ�ليف �صدر عن دار الغرب ا إال�سالمي بريوت – لبنان 1408–1985 23. املن با إالمامة، �ص 350. 24. د. التازي، التاريخ الدبلوما�سي للمغرب، ج 6، �ص 58، وما بعدها. 25. د. التازي، التاريخ الدبلوما�سي للمغرب، ج 6، �ص79. AL DE BREMAR .26املغرب وا أالندل� سيف القرن الرابع ع�رش من خالل مذكرات �سفري �أندل�سي يف املغرب عام 1345-1344 د. التازي، ق�صة حتتاج ىل�إ خمرج: مقال مرفوع معد للن�رش. 7 .2 اال�ستق�صا، ج 2، �ص 207 .28 اال�ستق�صا، ج 3، �ص 39-38. 29. د. التازي، التاريخ الدبلوما�سي للمغرب، ج 7، �ص 63-64، �ص 191-190. 133 �إحاالت بيبلوغرافية

1. ينبغي �أن نذكر �أن هناك �أي�ضا مدينة الق�رص الكبري، الذي كان يعرف بق�رص كتامة وق�رص �صنهاجة وق�رص عبد الكرمي، وقد نعت بالكبري أالنه �أ�صبح يف �صدر املائة العا�رشة للهجرة/القرن ال�ساد�س ع� رشامليالدي �سوقا م�شرتكة بني املغاربة والربتغال على ما يذكره كتاب مر�ةآ املحا�سن. 2. د. التازي، التاريخ الدبلوما�سي للمغرب، ج 3، �ص 47/63، 1986 مطابع ف�ضالة املحمدية. 3. النا�رصي، كتاب اال�ستق�صا أالخبار دولة املغرب ا أالق�صى، ج 1، �ص 68، طبعة دار الكتاب، الدار البي�ضاء 1954. 4. الزياين، الرتجمانة الكربى يف �أخبار املعمور برا وبحرا، حتقيق عبد الكرمي الفياليل، ن�رش وزارة ا أالنباء، الرباط 1967 ، �ص80. 5. بو عبيد �أ البكري، كتاب املغرب يف ذكر بالد �إفريقية واملغرب، �ص 104، ترجمة De Slanne, Paris, 1965, P. 205 6. الربيد اثنا ع�رش ميال تقريبا 7. كتاب اال�ستب�صار، ن�رش وتعليق الدكتور �سعد زغلول عبد احلميد، دار الن�رش املغربية، البي�ضاء 1985، �ص 138. 8. ا إالدري�سي، نزهة امل�شتاق يف اخرتاق ا آالفاق، طبعة املعهد اجلامعي للدرا�سات ال�رشقية، نابويل، روما ج 5، احلمريي الرو�ض املعطار يف �أخبار ا أالقطار ت أ�ليف حتقيق د. �إح�سان عبا�س مكتبة لبنان طبعة ثانية 1984، �ص 529-527. . 9احلراريق، جمع حراقة : نوع من املراكب امل�ستعملة يف ا أال�سطول املغربي على عهد املوحدين. د. التازي، ا أال�سطول املغربي عرب التاريخ، جملة البحث العلمي، العدد 33حمرم نونرب 1982. 10. د. التازي، التاريخ الدبلوما�سي للمغرب ج 5، �ص، 81-86 1986 م�صدر �سابق. .11 املن با إالمامة على امل�ست�ضعفني ب أ�ن جعلهم اهلل �أئمة وجعل الوارثني، وظهور ا إ مام الاملهدي باملوحدين على امللثمني وما يف م�ساق ذلك من خالفة ا إالمام اخلليفة �أمري امل ؤ�منني و�آخر اخللفاء الرا�شدين، تقدمي وحتقيق د. عبد الهادي التازي 1963 الطبعة الثالثة �ص 41-42، 157-169 �إلخ.

134 وال بد �أن ن�شري يف ختام هذا العر�ض ىل�إ الوقفة الكربى التي كانت لل�سلطان املوىل �إ�سماعيل وهو يجلي بريطانيا العظمى عن طنجة عام 1683/1094 )44(. لقد كان حلم �أجنلرتا – كلي متلك ممر بوغاز جبل طارق – �ن أميتد نفوذها يف ال�ضفة ا أالخرى مبا فيها طنجة ومدينة الق�رص ال�صغري لكن ال�سلطان املوىل �إ�سماعيل فوت عليها الفر�صة ب إ�جالئها نهائيا عن اململكة املغربية. ويت أ�كد �أنه منذ ذلك التاريخ بقي املكان على ما كان عليه من غري �أن تكون هنا حماولة إالعادة احلياة �إليه، ولقد تركه ال�سكان وهجروه. ومل يبق فيه مما يثري االنتباه �سوى ا أالطالل املتمثلة يف بع�ض ا أالقوا�س )رمبا قو�س باب البحر( والنواظر )جمع ناظور( وامل�ستودعات وا أال�سوار التي كانت حتمي امليناء. وك أ�ن تلك ا آالثار مل تي أ��س من انبعاث حا�سة وطنية جتدد لها حيويتها ون�شاطها. واملفرح اليوم – كما �أ�رشنا يف ديباجة العر�ض – �نأ املنطقة بكاملها تتطلع إالجناز م�شاريع عمالقة وازنة واعدة ت�شمل خمتلف ا أالقطاب الهامة التي يحت�ضنها �شمال املغرب من �أجل غد �أف�ضل لهذا الثغر الذي كان – ولفرتة مديدة – الباب املف�ضل للمغرب لربط عالقاته ب أ�وروبا وبالعامل اخلارجي، غد �أف�ضل جدير مبا�ضي املغرب وطموحاته التي ت�رضب يف جذور التاريخ.

135 يف ر�سالة جيوفروي دونواد )Jeoffrouy de Buade( الذي كان �ضمن البعثة الفرن�سية املذكورة ىل�إ املغرب. ر�سالة بعثها من قاد�س بتاريخ 3 �شتنرب 1560. لقد كانت البعثة على ما نعرف نزلت يف مر�سى �أكادير و�أخذت الطريق برا �إىل مدينة فا�س للتفاو�ض مع العاهل املغربي لكن )جيوفروي دوبواد( �أح�س بوعكة يف �صحته فبقي بالعا�صمة فا�س للعالج. وبعد �أن �شفي من مر�ضه �أخذ طريقه – وهذا مهم – على منت مركب ورد على ميناء فا�س حممال بال�سلع وم�ستعدا حلمل بع�ض الب�ضائع امل�شحونة �إىل مر�سيليا. لقد نبهتنا هذه املعلومة الثمينة �إىل �أنه كان هناك مر�سى نهري على �ضفاف وادي �سبو، على نقربة من فا�س،يف خوالن القريبة من احلمة املعروفة حتت ا�سم �سيدي احرازم. نه �إامليناء الذي ورد احلديث عنه يف )جنى زهرة ا آال�س( أالبي على احل�سن اجلزنائي. والذي كان منذ الع�رص الو�سيط نافذة فا�س على املحيط ا أالطل�سي والبحر املتو�سط على ما �أ�سلفناه عند احلديث عن اهتمام اخلليفة عبد املومن ب أ�مر املوانئ.

موقع الق�رص ال�صغري ا أالثري على ال�ضفة اليمنى مل�صب وادي الق�رص

136 و ن�أ ال يعر�ضوا لتجار الن�صارى من غريهم، الذين ب أ�يديهم كتب �أمري امل ؤمنني� ن�رصه اهلل تعاىل با أالمان، على دخول بالده وا إالذن بالوفود على ح�رضته. يف حالة �إقبالهم �إلينا ورجوعهم من عندنا ال يتعر�ض لهم ب إ�ذاية«. وقد كان هم�أ ما يف هذه االتفاقية على ما ر�أينا التنازل عن مركز ق�رص املجاز الذي كان الفرن�سيون ينوون �أن يبادلوا به فيليب قطعة من نافارة حمتلة من قبل ا إال�سبان، بيد �أن االتفاقية مل حتقق �أهدافها ف إ�ن الفرن�سيني مل يتو�صلوا بالق�رص ال�صغري)( )41(. ويظهر �أنه نتيجة لوجود بعثة فرن�سية بالعا�صمة املغربية عام 967-968 / 1560 بقيادة مونتفور Montfort كانت ر�سالة ا أالمان والت أ�مني التي حررت عن �إذن ا أالمري موالي عبد اهلل الغالب، نيابة عن والده، وقد كانت تخ�ص التاجر الفرن�سي روبري برودي )Robert Brodet( الذي كان يعمل حل�ساب فرن�سا، وهي بتاريخ �أواخر رجب 968/16 �أبريل .)42( 1561 وقد كان التاجر املذكور قام بن�شاط كبري ل�صالح العالقات التجارية بني البلدين كما يدل على ذلك اجلواب الذي بعث به فيما بعد ا أالمري �سيدي حممد بن ال�سلطان عبد اهلل الغالب �إىل �شارل التا�سع من ق�رصه بفا�س اجلديد، يخرب فيه ملك فرن�سا ب أ�ن والده املقيم مبراك�ش يثني على �إخال�ص وا�ستقامة روبري برودي، وكانت ر�سالة ا أالمري م ؤ�رخة ب أ�وائل رجب 968/27 مار�س 1561، وقد جاء فيها عالوة على تزكية التاجر الفرن�سي �أنه بعث ىل�إ والده يف مراك�ش بر�سالة العاهل الفرن�سي، و ن�أ ملك املغرب �أجاب مبا يلي: �إنه يعتزم �إعطاء �شارل امتياز �رشاء ال�سكر املغربي �رشيطة �أداء الثمن املوجود ا آالن باملغرب مع �إ�ضافة ن� بة سيف املائة يتفق الطرفان على حتديدها، وفيما يتعلق بالنحا�س املغربي ف إ�ن العاهل املغربي يقبل اقرتاحات ملك فرن�سا �رشيطة ن �أيكون الثمن من املعدات احلربية، و�أن مبد�أ �إعطاء االمتياز فرن�سا يق�ضي على هذه ا أالخرية �أن تقتني �سائر حاجياتها من اململكة املغربية )43(. وال بد لنا �أن ال نن�سى ونحن نذكر هذه البعثة الدبلوما�سية التي وردت من مملكة نفارة على بالد فا�س عام 966/959 ،1 ال نن�سى �أن نذكر حدثا هاما ارتبط بهذه ال�سفارة التي قام بدور الرتجمة فيها بني الطرفني ال�سيد بار دوالن�سي Barre de Lancy حدثا �أثار انتباهنا �إىل عمل ح�ضاري هام يف تاريخ املغرب ا إالقليمي، ويتعلق ا أالمر ب إ��شارة وردت

137 وما يحتاجه من ا أالجفان ي أ�تون بها من املر�سى الذي يريد، وعلى �أن ما ي أ�تون به من ا أالنفاط التي يحتاجها �أمري امل ؤ�منني ن�رصه اهلل يعطيهم قدرها وزنا من النحا�س. وعلى �أن يعطيهم �أمري امل ؤ�منني ن�رصه اهلل تعاىل مر�سى )الق�رص ال�صغري( ليبتنوا عليها ح�صنا يتح�صنون به لقتال عدوهم و�أعداء �أمري امل ؤمنني �ن�رصه اهلل تعاىل، ويعمرونه ب�سكناهم وينتفعون مبا يحدثونه فيه من الغر�س والبناء واحلرث ورعاية املوا�شي، وي�سقط عنهم فيه كل وظيف، وي أ�ذن لهم �أمري امل ؤ�منني ن�رصه اهلل تعاىل باتخاذ �سوق تعمر يوما يف ا أال�سبوع، وي�رسح لهم �أمري امل ؤ�منني �إذنه العايل مبا يحتاجون �إليه من معلمي البنيان ورجال ال�شغل وا أالجرة يف ذلك عليهم حتى يكملوا بناءهم ويهيئوا املر�سى املذكور، وي�سهل فيها ال�سبيل لدخول ا أالجفان كما �أن �أمري امل ؤمنني �ن�رصه اهلل تعاىل، ي أ�مر لهم برجال يحر�سونهم من العدو ليال ونهارا حتى يفرغوا من بنائهم. و�أن من �أراد الغزو من امل�سلمني مع الن�صارى الفرن�سيني يف �أجفانهم ي أ�خذون ح�صتهم مما يغنمونه، و�أن جميع �أجفان الن�صارى الفرن�سية كانوا جتارا �أو غزاة �إذا �أجل أ�هم عدو �وأ جاءوا جتارا، ف إ�نهم يدخلون حيث ميكنهم من مرا�سي امل�سلمني يف بالد �أمري امل ؤ�منني �يدهأ اهلل تعاىل ولي�س عليهم �إال ع�رش ما ي أ�تون به. و�ن أكل من ميوت من جتار الفرن�سيني ببالد �أمري امل ؤمنني �ن�رصه اهلل تعاىل يجمع مرتوكه حتى يدفع ملن يبلغه من �أمثالكم )40(. وما تك�رسه الرياح من �سفن الفرن�سيني يف جميع �أحكام �أمري امل ؤمنني،� ن�رصه اهلل تعاىل، ال ي ؤ�خذ لهم منه �شيء، ال �سلع وال رجال، ويعينهم يف ا�ستخراج ذلك امل�سلمون ب أ�جرتهم فيما ي�ستخرجونه، ويرجعون بذلك م ؤ�منني من غري معار�ض، وذلك عهد �أجرى جلميع الفرن�سيني من �أي حكم كانوا، يف حكم ملك �أنباره، �أو حكم ملك فران�سة لكونه عم الذي وقع معه ال�صلح بعد �أن التزم ك �رضر �أو �إذاية ت�صدر من جانب عمه �سلطان فران�سة. و�أنهم �إن جا ؤ�وا ب أ��ساري من ق�شتالة �أو برتغال ف إ�ن موالنا ن�رصه اهلل تعاىل يعو�ض لهم مكانهم �أ�سارى فرن�سيني. ومتى ا�ست�رصخهم �أمري امل ؤمنني �ميدونه مبا يحتاجه من القوي واجلند يف البحر والرب.

138 وقد �أبرم هذه املعاهدة عن )نافارة( ال�سفري الفرن�سي ميلت�شيور ال�سابق الذكر. وتوجد ن�صو�صها الكاملة يف جمموعة دوكا�سرتي ومنها ننقلها كنموذج لالتفاقيات الدولية للمغرب )39(. »احلمد هلل وحده، فمن �أمري امل ؤ�منني امل ؤيد �بالن�رص والتمكني والفتح املبني ال�رشيف احل�سني �أح�سن اهلل تعاىل �إليه، و�أيد بعزيز ن�رصه و�أمره، و�أعز بت أ�ييده ن�رصه، و�أ�سعد زمانه املبارك وع�رصه، و�أبقى فخره و�أعلى �أمره، و�أظهره و�أيده على ما �أواله وخلد ملكه، و�أطال يف ال�سعادة عمره، �إنه ويل ذلك. اقت�ضت رغبة ر�سول ملك الروم ببالده �أنباره، و�أ�سلم الر�سول املذكور بل�شيور باي�س دو�شبيدو �أن ي�ساعدهم موالنا �أمري امل ؤمنني �ن�رصه اهلل تعاىل على ما طلبوه منه من ال�صلح التام ال�شمال العام املت�صل على الدوام املنوط باملعاونة واملعا�ضدة بني الفرقني يف الرب والبحر وينربم ذلك با أالميان املغلظة م�ستمرا معهما، ومع �أوالدهما ح�سبما بلغ الر�سول املذكور عن �ضيفه املذكور وعن ابنه و�أكرب �أوالده �صاحب بندومة .Vendôme فما وقع عليه ال�صلح املذكور، وانربم به ن�أ يعطي القبطان املذكور نائبا عن �أ�ضيافه املذكورين ملوالنا �أمري امل ؤ�مني ن�رصه اهلل تعاىل خم�سمائة رجل من الن�صارى ي�سعون بني يديه باخلدمة، الن�صف من العدة املذكورة تكون �سالحها املدفع وال�سيف والقلمون )غطاء الر�أ�س( والبطا�ش )خنجر( مع كل �أحد، و�سالح كل رجل من الن�صف ا آالخر رمح بلنز )بلدة بلنز جتلب منها الرماح( وم�صفح وقلمون، و�سيف وبطا�ش، ويقدمهما رجالن من �أجواد القبطانات، و�أمري امل ؤ�منني �أيده اهلل ون�رصه يجري لهم ما يقوم بهم من الواجب املرتب جلميعهم. وي أ�تي القبطان املذكور ر�سوال و�سفريا بثالثني رجال �ألربديرو�ش Alabaderos ت�سري �أمام �أمري امل ؤ�منني ب أ�يديها الرماح �أ�سنتها �أمثال ال�شواقري. ومع ذلك ع�رشة من الفر�سان عليهم م�صفحات احلديد �سابغة من ا أالعلى �إىل ا أال�سفل وكل فار�س معه ح�صانان من خيل فرن�صية جمللة ب أ�رما�ش )دروع( احلديد كفر�سانها. وحتمل الر�سول املذكور أ مريال امل ؤ�منني ب إ�تيان كل ما يريده من العدة وال�سالح من ا أالنفاظ واملدافع والرماح البلنز مبا ت�ساويه يف بالد الن�صارى �أو مب�صانعها لي�صنع �أمري امل ؤ�منني ما يريد من ذلك. 139 �سبيل اخلريات وي�رسه وخلد ملكه، و�أطال يف ال�سعادة عمره، �إنه على ذلك قدير، وبا إالجابة جدير ال رب غريه وال معبود �سواه، �إىل ال�سلطان ا أالرفع يف ملته، ا أالجند املعظم يف قومه ومملكته املتوادد �إلينا مبرا�سلته ومودته، الزعيم يف ب�سطته، الكرمي يف � ؤس�دده و�أ�رسته، ال�سلطان �أنطون ملك �أنباره، وا�صل اهلل له �أ�سباب التوفيق والهداية، و�أو�ضح له م�سالك النور التي ت ؤ�دي �سالكها �إىل �سبيل النجاح الكامل العناية، �سالم اهلل على متبعي الهدى، ومتجنبي �سبيل الغي والردى، والذي وجب كتابنا هذا �إليكم و�سبب الباعث يف �إر�سال خطابنا هذا نحوكم و�إيراده عليكم �أنه قد ورد على �سمي مقامنا ر�سولكم القادم علينا بخطابكم الذي خطبتم فيه من جانبنا ب�سط جناح ال�صلح واملوا�صلة، و�رسرنا مبا فاحتتمونا به من خطابكم امل�ستدعي جميل امل�صاحلة واملعاملة، و�أنهى �إلينا ر�سولكم ما �أ�شخ�صتموه ب�سببه من �أغرا�ضكم و�ألقى �إلينا ما حملتموه �إلقاءه بني يدي فخامتنا من مئاربكم و�أوطاركم ف أ�لقينا �إىل خطابه �سماع القبول، و�أ�سعدناه من برنا ما حظي منه ب إ�بالغ امل أ�مول، وتلقينا مقا�صدكم بالرتحاب و�ساعدنا لبانتكم بق�ضاء ا آالراب فلتثقوا من جانبنا بكل خري وجميل، والو�صل الذي يقت�ضي ببلوغ كل ق�صد وت أ�ميل، و�أعلموا ن�أ مئاربكم لدينا ملحوظة بعني ا إال�سعاد، حممولة على عاتق الود الذي يبلغ ا أالمل واملراد، والوفاء املعروف أالف�ضال امللوك ا أالجماد، وهذا ما وجب الكتب به �إليكم. وكتب بذلك �أواخر �شهر اهلل املعظم رم�ضان املكرم عام �ستة و�ستني وت�سعمائة« )37(. وقد �أ�سفرت هذه االت�صاالت فعال عن معاهدة التعاون بني املوىل عبد اهلل الغالب باهلل وبني �أنطوان دوبوربون حتمل نف�س التاريخ ال�سابق 966 / 1559 )38(. وتتلخ�ص يف �أن يزود ملك )نافارة( ملك املغرب بجي�ش قوامه خم�سمائة جندي م�سلح وبحر�س يت أ�لف من ثالثني من الرماة الذين ي�سريون �أمام ركب �أمري امل ؤ�منني، وبع�رشة فر�سان عالوة على املعدات وا أالجهزة احلربية. على نيتعهد �أ العاهل املغربي مقابل ذلك بنفقات اجلي�ش من جهة، وي�سلم من

جهة �أخرى أالمري )نافارة( مر�سى ق�رص املجاز حيث ميكن لهذا ا أالخري �أن ي�شيد هناك ح�صنا ملناو�شة عدوته )ق�شتالة( �إ�ضافة �ىل إ االلتزام بت�سوية حقوق مرتوك الهالكني من الفرن�سيني باملغرب، وكذلك تقدمي امل�ساعدة للمراكب التي ت�ضطر لاللتجاء لل�ساحل املغربي،وت�سهيل مهمة تبادل ا أال�رسى بني الطرفني املغربي والفرن�سي.

140 وعن هذه ال�سفارة وتلك الر�سالة �أجاب العاهل املغربي ال�سلطان املوىل عبد اهلل الغالب �أنطوان دوبوربون ملك نفارة بتاريخ �شهر رم�ضان 966 / يونيه – يوليه .1559 لقد جاء يف هذا اجلواب التاريخي الذي ن�سوق ن�صه الكامل )36( ملا فيه من فوائد جلى تك�شف عن �أ�سلوب الر�سائل الدبلوما�سية، وعن ح�ضور الدين واملعتقدات يف تلك الر�سائل، كما نعرف من خاللها الو�ضع االجتماعي وال�سيا�سي واجلغرايف للمغرب، هذا طبعا �إىل ن �أاجلواب منوذج هذه �صورة الر�سالة مع اخلتم الذي يحمل العبارات التالية : حي ملا كان عليه ا أالدب ا إالداري الغالب باهلل، الغني به كما �سواه، عبد اهلل حممد �أمري امل ؤ�منني يف بالدنا مبا ي�صحبه من مقدمة ال�رشيف احل�سني �يدأ اهلل �أمره و عز�أ ن�رصه واخلطاب بتاريخ �أواخررم�ضان 966 - يونيه، 1595. وخامتة وذكر للتاريخ.

احلمدهلل » العلي احلميد، الواحد يف ملكه، املنزه عن ال�رشيك والند، املتعايل عن اتخاذ ال�صاحبة والولد، وتعاىل �أن يكون يف ملكه ما ال يريد، الذي ختم ر�سله بالنبي الها�شمي العربي �سيدنا ونبينا وموالنا حممد امل�صطفى من ن�سل �آدم، املف�ضل على كل من ت أ�خر وتقدم، الذي ختم به ر�سله، وبعثه �إىل كافة خلقه، ون�سخ به كل �رشع ودين تقدم قبله )�ص( وعلى جميع النبيئني وكافة املر�سلني، و�سالم عليكم �سالما يدوم �إىل يوم الدين. ما �أبعد، فهذا كتاب من عبد اهلل تعاىل �أمري امل ؤ�منني و�سلطان امل�سلمني املجاهد يف �سبيل رب العاملني امل ؤيد �بالن�رص والتمكني والفتح املبني، ال�رشيف احل�سني �أح�سن

أ أ أ أ أ اهلل تعاىل �إليه، و�يد بعزيز ن�رصه �مره، و�عز بت�ييده ن�رصه، و��سعد زمانه املبارك وع�رصه، و�أبقى يف مراقي املجد ا أال�سمى فخره، و�أعلى �أمره و�أظهره، و�سهل له

141 وقدقام القائد الربتغايل املذكور بتح�صني باب البحر وتزويده مبمر يربط القلعة بالبحر. و �صلح �أباقي التح�صينات، وجعل من املوقع منطلقا للعدوان على طنجة و�أ�صيال 876/1741)34( و�مام أتوايل هجومات املغاربة على »الق�رص ال�صغري« جند امللك جان الثالث ي�ضطر لرتك »الق�رص« بعد �أن قام جي�شه بتهدمي املعامل وتفكيك املن�ش�آت الع�سكرية. و�سيبقى على رجال ا آالثار �أن ي�ستنطقوا املباين الباقية ليعرفونا بحقبها التاريخية، وما كان منها يعود لعهد املوحدين، وما كان منها يعود لعهد الوجود الربتغايل مبا يف ذلك اخلندق الذي ي�صل عمقه �إىل �أربعة �أمتار. ومبا يف ذلك ا أالبواب الثالثة التي يتوفر عليها الق�رص. باب البحر يف املدخل ال�شمايل . وباب �سبتة الذي ينفتح على اجلهة ال�رشقية. وباب فا�س الذي يوجد يف اجلهة املقابلة للياب�سة والتي تبقى �أكرث عر�ضة للهجومات املحلية )35(. وبعد �سنوات من جالء�إ الربتغال عن الق�رص ال�صغري نرى �أن ا أالمري الفرن�سي �أنطوان دوبوربون A . De Borbonبالديار املغربية، وبالذات مبدينة فا�س يف بالط ال�سلطان حممد املهدي من دولة ا أال�رشاف ال�سعديني )964-951 / 1556-1544(. لقد كان للحروب التي �صدمت املماليك ا أالوروبية بع�ضها ببع�ض ب�سبب التنازع على وارثة العر�ش من جهة، وظهور املذهب الربوتي�ستاين من جهة �أخرى، كان لها �أثر على توجه بع�ض املماليك ا أالوروبية ىل �إاململكة املغربية طمعا يف ن �أحتمي مملكتنا ظهر تلك املماليك من املد ا إال�سباين. وقد كانت مملكة نفارة Navarre �ضمن اجلهات التي ا�ستهدفت يف هذا التاريخ �إىل االنق�ضا�ض على �أطرافها من جانب �إ�سبانيا. ومبا ن �أ املغرب جار قريب إال�سبانيا، وف ا�ستطاعته �أن يقوم بعمل ما ي�شغلها عن جبال )الربيني( التي متتد على جانبها مملكة نافار، فقد بعث ملك نافار �سنة 1559 / 966 ب�سفري يحمل كتابا �إىل ال�سلطان موالي عبد اهلل الغالب باهلل .)1574-1559 / 981-964( كان هذا ال�سفري هو مونتفور الذي كان مرفوقا ب�شخ�صية برتغالية حتمل ا�سم ميلت�شيور دازفيدوا Melchior D’zevedo الذي كان له �صهر يقيم ببالدنا يقوم مبهمة وكيل ملك نافار باملغرب، هو بارطولومي رابيلو Partolome Rabelo. 142 وبعد مقاومة �رش�سة للمغاربة و�إحباطهم لهجومني اثنني ا�ضطروا لرتك املقاومة مام �أ املدفعية امل�سيحية التي كانت تعتمد على �أ�ساليب حديثة مل يتدرب عليها املجاهدون املغاربة. وقد ال حظ احل�سن ابن الوزان �أن املدينة كانت على درجة كبرية من التح�رض وكان �أهلها من النباهة مبكان، يكاد جميع ال�سكان ان يكونوا بحارة ي ؤ�منون العبور بني القارتني، وفيهم خرباء يف الن�سيج وجتار �أغنياء، �إىل جانب �أنهم حماربون �أقوياء. ويذكر ابن الوزان �أن �سلطان مدينة فا�س وكان على ذلك العهد �آخر ملوك بني مرين عبد احلق بن �أبي �سعيد )823-869 / 1420-1464( ا�ضطر �أمام رداءة ا أالحوال اجلوية �إىل االن�سحاب ورفع احل�صار عن املدينة يوم 26 �صفر 863 / 2 يناير 1459.

وال يفوتنا هنا �إبراز دور املغرب وهو يتلقى ال�رضبات املوجعة يف �إ�شغال الغزاة عن التفكري يف االجتاه نحو امل�رشق دور املرغب يف �رصف ملك الربتغال عن احتال البقاع املقد�سة: مكة واملدينة!! فقد كانت نية �ألفون� ساخلام�س �أن يهيئ ا أال�سطول ل�رضب تلك ا أالمكنة وذلك بتحري�ض من الباب كاليك�سط الثالث )Calixte Ш( على ما يذكره املعلقون على ترجمة كتاب ابن الوزان �سالف الذكر وهكذا نذكر مرة �أخرى ان املغرب كان حاميا للم�رشق، و�أن جامع القرويني يف قلب فا�س كانت حامية للكعبة يف قلب مكة. لقد ا�ضطر املقاتلون املغاربة لالن�سحاب من املدينة ب�سالحهم و�أمتعهتم. ودخل الربتغاليون ال�ساحة العامة للق�رص ال�صغري املذكور يوم 10 ذو احلجة 862 / 19 �أكتوبر 1458 حيث حولوا امل�سجد ا أالعظم الذي كان اخللفاء ي ؤ�دون ال�صالة فيه �إىل كني�سة حملت ا�سم Sainte marie de la miséricorde كما حولوا احلمام �إىل �سجن! وقام الع�سكر الربتغايل بتعزيز املواقع وتن�صيب حامية هنا من ثالثة �آالف جندي برئا�سة الدون دو مين�سيز De . Menesees وويل أ مة الحتكم يف م�صريها حمتلوها!! بقي »الق�رص ال�صغري« حتت هيمنة الربتغال �إىل عام 946-947 /1540 طوال �أزيد من ثمانني �سنة كان خاللها معر�ضا لعدد من التغيريات، كان يف �صدرها ما �أ�رشنا �إليه من طم�س معامل امل�سجد واحلمام.

143 ويف جوازه الرابع وا أالخري قام ملك املغرب ال�سلطان �أبو يو�سف يعقوب ابن عبد احلق يف �إطار جندته إالخوته الذين طلبوا �إليه جندتهم بالرحلة �إىل ا أالندل�س عن طريق الق�رص ال�صغري يف غرة �صفر عام 684 / �أبريل 1285 )30(. وي أ�تي بعد �أبي يو�سف يعقوب ابنه ال�سلطان �أبو يعقوب يو�سف الذي بعد االجتماع مبلك غرناطة، ثم قام بنجدة ملوك ا أالندل�س حيث �سنجده ينزل بالق�رص ال�صغري. عام . 1286 / 685 هنا وبتاريخ 686 / 1287 �أمر بت�سوير املدينة وحت�صينها وبناء �أبوابها وت�شييد مرافق عديدة، وترميم جنباتها، وتو�سيع من�ش�آتها كامل�سجد ا أالعظم واحلمام، لقد كان يتوقع ا أاليام املقبلة التي تنتظر الوجود ا إال�سالمي با أالندل�س. ومن �أجل ذلك قام بهذه اال�ستعدادات الكبرية يف هذا »الق�رص ال�صغري« الذي ازدادت �أهميته يف هذه الظروف الع�صيبة. لكن ا أالحوال مل تلبث ن�أ تطورت من بني �سيئ �إىل �أ�سو �أبني املغرب وبني ق�شتالة حيث حل العاهل املغربي بق�رص املجاز يف جمادى ا أالوىل 690 / يناير 1291 ثم �شاهدت مياه البحر املتو�سط معركة بحرية با أال�ساطيل، �ضاع فيها خلق كثري، وعتاد وا�سع و�أموال طائلة، وا�ضطر اجلي�ش الغربي �ىلإ االن�سحاب )31(. ونحن نذكر الق�رص ال�صغري �أيام بني دولة بني مرين ال نن�سى احلياة العلمية والثقافية يف هذا الثغر الهام من ثغور املغرب، ال نن�سى جانب الق�ضاة والعلماء الذين كانوا بالق�رص ال�صغري، ال نن�سى تهافتهم على �أداء منا�سك احلج، حيث نرى الرحالة املغربي ال�شهري ابن بطوطة يذكر حد �أرجاالت هذا الق�رص من الذين التحقوا مبكة عام 728 / 1398 ويتعلق ا أالمر بقا�ضي اجلماعة الفقيه �أبو زيد عبد الرحمن بن القا�ضي �أبي العبا�س ابن خلوف )32(. وب�سقوط مدينة طريف �أم�سى الق�رص ال�صغري مهي�ض اجلناح ولكن رجاله مل يي أ��سوا وحتولوا ىل �إ دافعني عن ديارهم، لكن خ�صومهم على ال�ضفة ا أالخرى اعتربوا هذا الدفاع عن الديار ب أ�نه قر�صنة و�إرهاب. ومن هنا توالت املواجهات، و�سقطت �سبتة عام 818 / 1415 وهاجم �ألفون�س اخلام�س ملك الربتغال مدينة الق�رص ال�صغري عام 862/1498، هاجمها ب أ��سطول من مائة وثمانني قطعة بحرية كما تقول بع�ض الروايات )33( وبجي�ش قوامه �سبعة ع�رش �ألف ع�سكري، 144 ويف جوازه الثاين نرى ال�سلطان �أبا يو�سف يعقوب بن عبد احلق، �أواخر املحرم 676 / يوليه 1277 بالق�رص ال�صغري �أي�ضا عابرا �إىل طريف مزودا بالدروع ال�سوابغ والبي�ض اللوامع وال�سيوف البواتر. وال بد لنا �أال نن�سى ان هذا الق�رص ال�صغري �شهد ح�شودا من نوع خا�ص يف ظروف خا�صة، ولهدف خا�ص وكان ذلك �أوائل ربيع الثاين 681 / يوليه غ�شت 1282 عندما قام هذا العاهل نف�سه يو�سف يعقوب بن عبد احلق باال�ستجابة هذه املرة، لي�س لنجد �إخوته يف ا أالندل�س ولكن لنجدة �ألفون�س العا�رش ملك ق�شتالة الذي مترد عليه ابنه ا أالمري �ضون �صان�ش Don Sanche. كان هذا احلدث من �أعظم ا أالحداث التي �سجلها التاريخ امل�شرتك بني مراك�ش وق�شتالة، يف �سبيل العمل على منا�رصة ال�رشعية الدولية بالرغم من ان العالقات الثنائية بني املغرب و�إ�سباينا مل تكن على ما يرام ب�سبب حوادث احلدود، وبالرغم من ن �أاملغرب ال يعتنق نف�س االعتقاد الذي كان أاللفون�س. كانت مبادرة مغربية رائدة وال �سيما وقد قام العاهل املغربي �ىل إجانب منا�رصته للملك ا إال�سباين، قام بتحرير ر�سالة هامة جدا �إىل ملك فرن�سا فيليب لوهاردي بتاريخ 20 رجب 681 يطلب �إليه م�صاحلة �ألفون�س، ويبدي ملك املغرب ا�ستعداده لتقدمي �أية م�ساعدة من �أجل �إر�ضاء طلب �ألفون�س. ينبغي �أن نقر�هذا أاحلدث الكبري يف عيون امل�صادر املغربية وخا�صة يف تاريخ ابن �أبي زرع وابن خلدون وبال�شعر �أي�ضا. حيث يقول امللزوزي: ثم �أتى من�صورنا كتاب من عند �ألفون�صو له �إعتاب يقول فيه: �أيها املن�صور انظر مليكا قلبه مك�سور!! وقد وقفنا على ن�ص هذه الر�سالة التاريخية يف املتحف الوطني يف باريز وهي حتمل رقم .Ш AE -200 وكان مما جاء يف �آخرها خطابا مللك فرن�سا : »ف إ�ن كان ��صابكم أما غري خاطركم من قبل امللك املذكور �و أ غري خاطره من قبلكم فنحن ن�ضمن لكم زوال ذلك حتى تعود املودة على �أكمل ما به تقر العيون«. )29(.

145 )26( متتلك ثقافة عالية وطلبها اخلليفة النا�رص و�أنفق عليها �أمواال طائلة وذات يوم طغت عليه ن�شوة حبها والتعلق بها فقال لها: اطلبي ما �شئت ف� أس�كون عند رغبتك، ومل يكن طلبها �إال �نأ يرجعها النا�رص ىل�إ بني والدها! وما و�سع اخلليفة �إال �أن ي�رسحها و�أدركها �أجلها يف الق�رص ال�صغري. لقد �أخذت امل�شاريع املوحدية يف هذا املوقع ترجع القهقري �شيئا ف�شيئا. وهكذا نرى �أنه عند احلديث عن �أيام اخلليفة بي �أحممد عبد اهلل العادل الذي وجده احلال با أالندل�س حيث بويع يوم 15 �صفر 621 / 8 مار�س 1224 مبر�سية، وقرر �أن ي�ستكمل ترتيبات البيعة باملغرب. فق�صد املغرب ويف »الق�رص ال�صغري« دخل عليه ا أالمري عبد الواحد بن �أبي حف�ص املدعو بعبو حيث � أس�له اخلليفة العادل: كيف حالك؟ ف أ�جابه متمثال بقول املتنبي مبدح علي بن من�صور احلاجب: حال متى علم ابن من�صور بها جاء الزمان �إيل منها تائبا! متثل بن عبو ملوافقة ا�سم من�صور فيه ال�سم والد العادل، ويعني �نأ احلالة حرجة )27(. وقد اختفت دولة املوحدين وطهرت دولة بني مرين التي ابتد� أحكمها بوالية يعقوب بن عبد احلق عام 1259/657. �سنجد املغرب بالرغم من ان�شغاله بت�ضميد جراحه يف �أعقاب النك�سات املتوالية التي تعر�ض لها يف ا أالندل� سوهو يدافع عن حلفائه هناك، بالرغم من ذلك يبعث العاهل املغربي ال�سلطان العظيم �أبو يو�سف يعقوب م�ستجيبا لر�سالة ا�ست�رصاخ وردت عليه من ال�سلطان ابن ا أالحمر ملك غرناطة، حيث جند العاهل املغربي يبعث بابنه ا أالمري �أبي زيان الذي نه�ض من فا� سيف �شوال 673 / �أبريل 1975يف اجتاه »الق�رص ال�صغري« )ق�رص املجاز( حيث اجتمعت لديه قطعة من ا أال�سطول �أ�سهم بها �صاحب �سبتة. ومت النزول بطريف يوم 16 ذ القعدة 673 / 13 مايه 1275)28(. وقد قام ال�سلطان �أبو يو�سف يعقوب بن عبد احلق نف�سه بجوازه ا أالول �إىل طريف من »الق�رص ال�صغري« أالجندة �أهل ا أالندل�س يف �صفر 674 / غ�شت 1275 حيث �سجل طائفة من املواجهات بني الطرفني انتهت ىل�إ احل�صول على عدد من الغنائم و�أ�رس عدد من الفرجن.وقد كانت عودة العاهل من طريق طريف والق�رص ال�صغري.

146 1 59 / 1195 التي قال عنها ابن �أبي زرع: �إن �أمري امل ؤ�منني يعقوب خرج من ح�رضة مراك�ش يوم اخلمي�س 18 جمادى ا أالوىل 591/30 �أبريل 1195 فلما انتهى �ىل إق�رص املجاز �أخذ يف �إجازة اجليو�ش الواردة عليه: ف أ�جاز �أوال قبائل العرب، ثم زناتة، وامل�صامدة وغمارة، واملتطوعة من قبائل الغرب، وا أالغزار الذين وردوا من ال�رشق، ثم الرماة، واملوحدون والعبيد، ثم جاز �أمري امل ؤ�منني يف موكب عظيم. ونتذكر جيدا مدى الن�رص الذي �أحرز عليه املوحدون والذي يقول فيه �شاعرهم �أبو العبا�س الكراوي يف هذه املعركة الكربى: هو الفتح �أعيى و�صفه ال�شعر والنرثا وعمت جميع امل�سلمني بن الب�رشى هذا الن�رص الذي كان وراء بناء �أو ترميم �أو الزايدة يف عدد امل�ساجد العظمى تعبريا عن ال� كر شهلل كان يف هذه امل�ساجد: اثنان يف املغرب �أحدهما مبراك�ش )الكتبية( والثاين بالرباط )ح�سان( �أما الثالث ففي القارة ا أالوروبية ب إ��سبيلية اخلريالدا )24(. كل الزوار الذين يتقاطرون على الغرب ا إال�سالمي من خمتلف جهات العامل يرفعون ب أ�ب�صارهم لي�شهدوا �شموخ منارة جامع الكتبية يف مدينة مراك�ش، وبقايا اخلريالدا يف �إ�شبيلية،وجامع ح�سان يف مدينة الرباط، وهم ينتهون ىل �إوحدة الت�صميم يف املنارات الثالثة، و�ىلإ ما تعرب عنه تلك »الوحدة« �سواء �أكانت يف القارة ا إالفريقية �أو القارة ا أالوروبية من طموح وما تدل عليه من بعد نظر. هذه الغزوة التي عززت من طموح املوحدين ىل�إ حتقيق الوحدة ا إال�سالمية الكربى. وا�ستمر ت ألق �»الق�رص ال�صغري« طوال عهود اخللفاء املوحدين ا أالوائل. �إىل �أن كانت �أيام اخلليفة �أبي عبد اهلل حممد النا�رص )595-610/1198-1213( عندما تكاملت ح�شوده، وخرج من مراك�ش يوم 19 �شعبان 607 / 5 يرباير 1211 فانتهى �ىل إق�رص املجاز، و�أقام به و�رشع يف �إجازة اجليو�ش ابتداء من �أوائل �شوال. ىل�إ طريف التي قام فيها ثالثا قبل ان يق�صد �إ�شبيلية. بيد �أن هذه املعركة التي عرفت يف التاريخ مبعركة العقاب )بك�رس العني( �أ�سفرت نك�ست ق�صمت ظهر املغرب وكان لها �أثر كبري على احلركة الدائبة التي كان يعرفها »الق�رص ال�صغري« ا أالمر الذي كان طالع نح�س بالن�سبة لهذا املوقع اجلغرايف الذي ظل ذكره يرتدد على كل ل�سان )25(. وما دمنا على مقربة من الق�رص ال�صغري ال بد �أن نتذكر »ا أالمرية« مرمي ا أال�سدية دفينة هذه املدينة التي ن�سميها الق�رص ال�صغري، هذه ا أالمرية التي كانت �يةآ يف اجلمال والكمال 147 وهي ق�صيدة طويلة تت�ضمن �أفكارا �أ�صيلة ولو �أنها مل تعجب عبد امللك بن �صاحب ال�صالة الذي كان حا� ارض يف هذه التظاهرة، حيث ت�سلم ظهري الوالء )21( من يد اخلليفة �أبي يعقوب عندما قدمه الوزير �أبو العالء بن جامع، والفقيه بو �أحممد عبد اهلل املالقي. وكان اخلليفة متكئا على خماد كثرية وثرية فر�شت حتته وو�ضعت حوله يف جمل�سه العايل تعنيه على القعود، وتدمث له مو�ضعه املطلع له بال�سعود، وقد خ�ص�ص اخلليفة امل ؤ�رخ ابن �صاحب ال�صالة ب أ��سهام وو�ساه مبا و�سع عليه من عطاء. وهكذا نرى، من خالل هذه الن�صو�ص الواردة يف هذا امل�صدر الهام املعا�رص لفرتة �أوج الدولة املوحدية، �أن »الق�رص ال�صغري« كان حمطة هامة وازنة يف الع�رص الو�سيط لتاريخ املغرب. ومبا ن �أابن عذارى املراك�شي �صاحب كتاب )البيان املغرب يف �أخبار ا أالندل�س واملغرب( ) ( 22كان يعتمد يف معظم معلوماته على ابن �صاحب ال�صالة، فقد وجدنا فيه بع�ض املعلومات عن »الق�رص ال�صغري« كانت حتتاج منا �إىل �أن ن�سجلها، وكان منها ن �أامل�صحف التاريخي املن�سوب لعثمان ابن عفان كان من الكتب التي �شاهدتها �سماء الق�رص املذكور ثناء�أ تنقل الركب اخلاليف، وال بد �أن نقر �أعن امل�صحف العثماين ما ورد عند ابن �صاحب ال�صالة . )23(. ومن املهم �أن نعيد �إىل ا أالذهان �أن هذه املدينة بالنظر �ىلإ مركزها املذكور كانت منتدى ا أالدباء وال� عراء،ش وكانت مالذا للعنا�رص النرية يف التاريخ ممن ي�سري يف ركب الدولة وممن اختار املقام بها ممن جرى ذكرهم يف التاريخ. و�نإ جمرد �إلقاء نظرة على ا أالركاب اخلليفية مبن كانت ت�ضمه من عيون ا أالطباء وكبار العلماء من �أمثال ابن طفيل وابن زهر. مما عرفنا �أ�سماء هم يف كتاب املن با إالمامة، �إن جمرد ذلك يعطينا فكرة عن ليايل و�أيام »الق�رص ال�صغري«. و�نإ احلديث عن وجود م�صانع للن�سيج يف هذا الق�رص يعني �أنه كان على نحو مدينة فا�س عندما كانت تتوفر على ع�رشات امل�صانع يف الن�سيج على عهد املوحدين. وكل هذا كان ي�شري �إىل ا أالهمية الزائدة التي كانت تعطيها الدولة لهذا املوقع، لي�س كمعرب م ؤ�قت حتتاجه النا�س للعبور، ولكن كموقع حيوي يتوفر على كل ما تتوفر عليه املدن الكربى، بل وي�ستغني عنها، وقد �سمعنا عن الغزوة ال�شهرية با أالرك )ALARCOS( عام

148 ا�ستقدامهم : �أقيموا �صدور اخليل نحو املغارب لغزو ا أالعـادي واقتنـاء الرغائـب! وما خلق ا أالعراب �إخالف موعد ولكن �صدق الوعد خلق ا أالعارب! �سنعلم من �أوفى ومن خا�س عهد ومن كـان مـن �آت �إلينـا وذاهـب وتظهر �أحوال يـروق �سماعهــا فيـرغب فـي �أمثالهــا كـل راغـب وقد كان مما خوطب به �أولئك ا أالعراب ما قاله اخلليفة عبد املومن نف�سه، على ما قاله عبد الواحد املراك�شي يف كتابه العجب )19(: بنى العم من عليا هالل بن عامر وما جمعت من با�سل وابن با�سل تعالوا فقد �شـدت �إلـى الغزونيـة عواقبـهــــا مقـ�صـورة با أالوائـــل فطيـروا �إليهـا يا هـالل بن عامـر ثقـاال خفـاقـا بيـن حاف وناعل! وال تخدعوا عن حظكم من �إ جابـة تبوئكم يف املجـد �أ�سنــى املنـازل �أهبنا بكـم للخيـر، وهلل ح�سبنــا وح�ســبكـم، وهلل �أعـدل عــادل! وقد كان ممن قدمهم �أبو العلي �إدري�س ابن جامع للخليفة �أبي يعقوب ال�شاعر �أبو احلكم بن ر�ضى البلن�سي، الذي قال من جملة ما قال، وهو ي�صف البوغاز وكيف �أ�صبح �سطحه بني ق�رص املجاز وطريف، وك أ�نه ج�رس، يربط بني حمطتني، وك أ�ن البحر �أم�سى برا ياب�سا بني املائني! و�سق حديث �أبي يعقوب من طـرق فـفـي �سياقتـه امل أ�مـول وال�ســــول ملك تود ملوك ا أالر�ض لو غنـيت وحظها منه يف مينـاه تقبيـــــــل!! قاد اجليو�ش يغ�ص امل�رشقان بهــا واملغربان، كما غ�صت خالخيل؟ من كل معتقل �سمـراء لهذمهـا و اأوجهه يف ظالم اخلطب قنديتـل! �أو مرتـد حل�ســـــام مثلـه درب وغاية ال�سيف م�سنون وم�صقـول و�أ حمتب فوق مثل النهى �سابغـة وع�ضده حتت ثني الـدرع حملـول و �أراكب فوق منت املـاء مرتفـق ك أ�نــه قيـ�صـر ! والقلـع �إكليــــل! فالرب كالبحـر �إذا ت�سنـن �أذرعـها والبحر كالرب �إذ ي�صطف �أ�سطـول ومل يفدهـا ملـن نـاوى مظاهـرة �سيـان بالنـ�صـــر تكثيـر وتقلـيــل لكنها همـة �أوفـت علـى رجــل ومقت�ضى امللك ترهيب وتهويل )20(

149 باحلباالت، من �أر�ض بني عبودة التي يقرب ملتقى وادي فا�س، يف �أيام اخلليفة عبد املومن املوحدي، حني �أراد ن�أ يتوجه لفتح املهدية �سنة انثنني وخم�سني وخم�سمائة، كذا وجد بخط الفقيه �بي أعبد اهلل حممد بن القا�ضي �أحمد بن ميمون الق�شتايل )16(. وال�شيء بال�شيء يذكر، ف إن� اخلليفة العبا�سي املن�صور عندما بنى بغداد على �شاطئ دجلة قال كلمته امل�شهورة: هذه دجلة فقد �أ�صبح بحر ال�صني عندي!! �نإ البالد �أية بالد عندما يكون لها منفذ على البحر ف إ�ن �أ�صحابها ي�شعرون وك أ�نهم ميلكون الدنيا بحذافريها، وهكذا ف إ�ن ا أالنهار والبحار ما كانت �أبدا عن�رص انف�صال ولكنها كانت دوما و�سائل ات�صال. وعلى قيا�س هذا نقول: »هذا �سبو فنحن �إذن على �صلة ب�سائر �أطراف الدنيا«!! لقد كان »الق�رص ال�صغري« مركزا لتنفيذ ا أالوامر. وحترير الر�سائل �ىلإ ممثلي القيادة العليا يف �سائر جهات ا إالمرباطورية املغربية. وكان الق�رص عا�صمة يلتقي على جنباته الواردون من ا أالندل�س واملتجهون �إليها �سادة و�أ�شياخا وجتارا )17( على نحو ما ن�شهده اليوم ونحن نتحدث عن قاعدة بحرية تربط قارة بقارة! نحن نتحدث بالفعل اليوم عن �صلة قارة �إفريقيا بقارة �أوروبا!. يف هذا »الق�رص ال�صغري« ورد ا أالمر �إىل ال�سيد �أبي �سعيد ابن اخلليفة �أمري امل ؤ�منني باالرحتال من قرطبة وااللتحاق بالق�رص املذكور حيث نقر�أ عن خروج ال�سيد من قرطبة مبادرا. والتقائه ب أ�خيه ال�سيد �أبي �إبراهيم بق�رص م�صمودة يف اليوم العا�رش من ذي القعدة من عام 561/ 7 �شتنرب 1166 وخروج ال�شيخ احلافظ �أبي عبد اهلل ابن �أبي �إبراهيم من �إ�شبيلية للقاء ال�سيد �أبي �إبراهيم �إ�سماعيل �ىل إطريف، وان�رصف يف �صحبته �إىل �إ�شبيلية حيث عني واليا عليها )18(. ويف هذا الق�رص ال�صغري بلغنا اخلرب عن ات�صال �سري �أمري امل ؤ�منني حتى البحر �إىل �أن و�صل �ىلإ ق�رص م�صمودة، حيث ابتد�أت الع�ساكر با إالجازة من �أول رم�ضان 566 / 8 مايو 1171 وتلقاه �أ�شياخ ا أالندل�س بجزيرة طريف، ودخل �إ�شبيلية يوم 12 �شوال بعد �صالة اجلمعة من عام 566 / 8 يونيه 1171. لقد كانت �سنة 566 / 1170-1171 �سنة م�شهورة يف حياة اخلليفة �أبي يعقوب بن �أمري امل ؤ�منني بعد و�صول العرب �إىل الدياراملغربية يف �أعقاب النداء املوجه �إليهم من لدن الدولة املوحدية، وهنا ال بد �أن نتذكر ق�صيدة ابن طفيل يخاطب العرب عندما تقرر 150 هنا يف الق�رص ال�صغري كان على �أعيان الدولة �أن يكونوا حا�رضين موجودين عند وداع اخللفاء وعند ا�ستقبالهم مبا ي�صحب ذلك احل�ضور من مظاهر االحتفال وا أالبهة والعظمة،ومن حفالت اال�ستعرا�ض املعروفة عند املوحدين با�سم التمييز حيث متر كل الطبقات �أمام �أنظار اخلليفة )13(. قر�أنا عن هذا الق�رص �أنه كان »رباطا« أال�صحاب الغرية على البالد، ونحن نعلم عما تعنيه كلمة »الرباط« يف ا�صطالح املقاومني املنا�ضلني من عيون يقظة على بروج م�شيدة. لقد كان من خ�صو�صيات اخلليفة عن املومن البحث عن كل ما ميكن �أن يكون منفذا للمغرب على �أعايل البحار، اعتقادا منه – وهو اعتقاد ا�سرتاتيجي �صحيح – �نأ البالد دون بوابات مبا�رشة و�أ غري مبا�رشة على البحور واملحيطات تبقى �سجنا كبريا لدى �ساكنتها!! ومن هنا فكر �أول من فكر يف �أن يزود مدينة فا�س منذ �سنة 552/1152 بنافذة على البحر تربط مدينة فا�س العا�صمة ا أالوىل ل إال�سالم باملغرب، باملحيط ا أالطل�سي، وجتعل منه، �أي من فا�س، مدينة متفتحة على �أعايل البحار حيث وجدناه يربط العا�صمة فا�س مبر�سى معمورة �سال، عن طريق وادي �سبو انطالقا من ميناء خوالن القريبة من حمة �سيدي حرازم )ابن حرزم( على بعد �أميال فقط من �أ�سوار املدينة )14(. نه�إ املوقع الذي �أ�شار �إليه امل ؤ�رخون القدامى عندما ذكروا )جوطة( التي ينت�سب � إليها ا أالمري يحي ابن قا�سم اجلوطي قعدد ا أال�رشاف اجلوطيني )5 (، 1 وهو امليناء الذي يقرب من امليناء املذكور يف كتاب جنى )زهرة آال� سيف بناء مدينة فا�س( أالبي علي احل�سن اجلزنائي. والذي كان م�ستعمال منذ الع�رص الو�سيط، يف عهد �أمري امل ؤ�منني عبد املومن، كان نافذة املوحدين �ىل إعوا�صم دولتهم الكربى املمتدة �رشقا �إىل وادي النيل. كان اجلزنائي يتحدث عن حما�سن فا�س على نحو ما فعل ابن بي �أ زرع يف كتابه: القرطا�س، لكنه �يأ اجلزنائي تنبه �ىلإ الرتكيز على �إحدى اخل�صائ�ص التي غابت عن �صاحب القرطا�س، قال: ومنها قربها من وادي �سبو الذي ت�سري منه جميع القوارب وال�سفن ال�صغار �إىل البحر ا أالعظم، وتطلع منه، �أي البحر ا أالعظم، �إىل واديها، قال: وقد كانت دار �صنعة إالن�شاء القوارب وال�سفن ال�صغار وغريها باملو�ضع املعروف 151 وال بد �أننا قر�أنا عند ذكر �أخبار �أمري امل�سلمني ال�سلطان العظيم يو�سف بن تا�شفني، قر�أنا �أنه بعد غزوة الزالقة ال�شهرية، و نقال عن ابن �أبي زرع يف رو�ض القرطا�س، �أنه ملا كانت �سنة 481/1088 جاز �أمري امل�سلمني اجلواز الثاين بر� مس اجلهاد بعد م ؤ�متر قمة جمع بني املعتمد ابن عباد ويو�سف يف مدينة »املعمورة« : حلق وادي �سبو )املهدية اليوم( حيث ا�شتكى املعتمد �إىل يو�سف ما يلقاه امل�سلمون من عدوان يف ح�صن لييط Aledo. هنا وجدنا احلديث عن ركوب يو�سف البحر من ق�رص املجاز �ىلإ اخل�رضاء يف �شهر ربيع ا أالول 481/ 1088)10(. لكن امل�صدر ا أالكرث مادة يف احلديث عن ق�رص م�صمودة و �أالق�رص ال�صغري هو امل�صدر الذي فلت لكل امل ؤ�لفني والنا�رشين مغربا وم�رشقا والذي يعترب احلديث عن املوحدين، بدون االطالع عليه، حديثا ناق�صا هو الذي �ألفه م ؤ�رخ الدولة املوحدية عبد امللك ابن �صاحب ال�صالة الباجي الذي كان يعي�ش فرتة ازدهار )الق�رص ال�صغري( وكان يرافق ركب املوحدين وهم يتنقلون عرب �أنحاء املغرب وا أالندل�س. لقد �ألف ابن �صاحب ال�صالة كتابه الذي كان يحمل عنوانا طويال يبتدئ هكذا: كتاب املن با إالمامة على امل�ست�ضعفني ب أ�ن جعلهم اهلل �أئمة وجعلهم الوارثني )11(. لقد ت�ضمن كتاب املن با إالمامة �أو ما بقي من �أجزائه الثالثة، معلومات يف منتهى ا أالهمية والطرافة عن هذا املوقع الذي كان له – على ما �أ�رشنا – دور حموري بني �ضفتي امل�ضيق عالوة على ت�صميمه الدائري الفريد، هذا املوقع الذي عا�ش يف العهد املوحدي ا أالول فرتة ازدهار وت أ�لق مل يعرفها موقع من ذي قبل. وقد حظي الكتاب املذكور بتعليقات جد مفيدة من خمتلف الذين �أمكنهم االطالع واال�ستفادة منه، فمن تلك الهوام�ش وحدها قر�أنا عن �أمر م�سافة ق�رص م�صمودة يف العدوة الغربية �ىلإ طريف يف العدوة ا أالندل�سية، ومنها عرفنا عن تعود املوحدين على النزول بجبل طارق عندما يكون عبورهم من �سبتة، على نحو ما فعل اخلليفة عبد امل ؤ�من يف ال�سنة املعروفة ب�سنة ا أالخما�س 555/1160 وعلى ن �أمدينة الق�رص ال�صغري كانت جممعا لعدد كبري من رجال الفكر وال�سيا�سة من »ال�سادة« وهم �أع�ضاء ا أال�رسة احلاكمة وال�شيوخ، واحلفاظ و�أهل اخلم�سني، و�أبناء اجلماعة، و�أهل الدار، وطلبة احل�رض، وطلبة املوحدين عالوة على الذين كانوا ي�سريون يف الركب املوحدي من �أمثال �أ�رسة الوزير �أبي العلي �إدري�س ابن جامع وهي ا أال�رسة ال�شهرية التي قام �أفرادها بعد �أن �أدبرت من الدنيا �أيامهم، مغربني مبعدين مبدينة ماردة )Merida) (12(.

152 وقد �سماه البكري الق�رص ا أالول )5( وقال: �إنه م�سكون من لدن بني طريف، وحوله غرا�سات كثرية و�نأ املراكب تدخل �إىل واديه حتى ت�صل ىل�إ حائط الق�رص، و�نأ بني منبع الوادي املذكور وم�صبه يف البحر نحو �سكتني، يعني بريدين اثنني )6(. ولزيادة البيان �ساق البكري ن�ص حممد بن يو�سف قائال:« �إذا خرج اخلارج من طنجة �إىل �سبتة يف البحر، ف إ�نه ي أ�خذ جانب ال�رشق، ف أ�ول ما يلقى جبل املنارة، ثم مر�سى باب اليم، وهو غري مكن، �أي بدون حماية، وفيه �سكنى ورباط، وواد لطيف ي�صب يف البحر«. قال: ويقال باب اليم من جزيرة ا أالندل�س مر�سى طريف وبينهما ثلث جمرى، �أي ثلث يوم، كما ترجمه البارون دو�سالن: هكذا: )Tier de journée(. ثم يلقى اخلارج بعد باب اليم، وادي زلول: عليه ثمار وعمارة كثرية، ووادي باب اليم الذي ي�صب يف البحر، حوله ب�ساتني، وعليه �سكنى، وعمارة مل�صمودة، ثم حجر ثابت يف البحر، �إىل �أن يذكر جزيرة تورة )Toura(. ويتحدث كاتب جمهول من القرن ال�ساد� سالهجري يف ت أ�ليفه، اال�ستب�صار يف عجائب ا أالم�صار، عن قرية تعرف بق�رص م�صمودة، لها نهر عذب ي�صب يف البحر، قال: ومن هذا الق�رص يقرب اجلواز �إىل جزيرة طريف: ثمانية ع�رش ميال )7(. وقد ذكر ال�رشيف ا إالدري�سي يف مو�سوعته املعروفة )8( �أن جزيرة طريف التي توجد يف ال�ضفة الثانية من البحر يقابلها مر�سى الق�رص املن�سوب مل�صمودة. وعر�ض البحر بني جزيرة طريف وق�رص م�صمودة اثنا ع� رشميال. ومن غريب ما الحظه ا إالدري�سي �أن هذا البحر يجزر يف كل يوم وليلة مرتني، وميتلئ مرتني، فعال دائما، ذلك تقدير العزيز احلكيم يقول ا إالدري�سي، وقال عن الق�رص الذي نحن ب�صدد احلديث عنه: �أنه ح�صن كبري يقع على �ضفة البحر. م�ضيفا ىل�إ هذا هذه املعلومة الهامة: التي تقول ب أ�نه يف هذا احل�صن كانت تن� أش� املراكب واحلراريق )9( املعدة لل�سفر، قال ا إالدري�سي: وهو �أي الق�رص يقع على ر�أ�س املجاز ا أالقرب �إىل ديار ا أالندل�س. وال ميكن ن �أمنر على )دار ال�صناعة( امل�شار �إليها عند ا إالدري�سي دومنا �أن نفكر فيما كانت تعنيه دار ال�صناعة من مواد ا�سرتاتيجية تتبعها �صناعات �أخرى. لقد كان »الق�رص ال�صغري« يتوفر على جمهور من مهرة �صناع ال�سفن، ال �سيما وهو يجاور عددا من الغابات املتناثرة هناك، ي�ضاف �إىل هذا ن�أ تلك اجلهات كانت تهتم بزراعة القنب الذي ي�ساعد على �صناعة احلبال على خمتلف ا أال�شكال.

153 و ذا�إ كان الق�رص ال�صغري )1( يعي�ش هذه ا أ يامال حياة املدن القدمية، املندر�سة النائمة، فقد كان له من ما�صيه ال�شامخ ما ي�ستوقفنا اليوم ملراجعة �أيامه املا�ضية على خمتلف ا أال�صعدة، بف�ضل يقظة رجال املغرب الذين قرروا ن �أيجعلوا منه حمطة حمورية حية ب�صناعتها وخ�صو�صيتها. �إن �إلقاء نظرة خاطفة على اخلارطة التي حتت�ضن هذه املدينة بت�صميمها الدائري الفريد يجعل منا هواة لها، متطلعني لزيارتها، واال�ستمتاع بهوائها ومناخها. يقع هذا الق�رص ال�صغري على � احلس البحر املتو�سط الذي كان يعرف يف وقت من ا أالوقات با�سم بحر الروم. على بعد �ستة وثالثني ميال �رشق مدينة طنجة م�سقط ر�أ�س الرحالة العاملي ابن بطوطة، على امتداد م�ساحة �آهلة، �آن�سة م ؤ�ن�سة �ساحرة مبناظرها اخلالبة اجلذابة، يف خليج حتميه املرتفعات من حواليه، وعلى م�صب نهر كبري يحمل ا�سم الق�رص ال�صغري، يف ا�ستطاعته �أن ي�ستقبل املراكب وال�سفن التي كانت تزود املدينة وناحيتها مبا حتتاج �إليه، على نحو ما كان يزود الق�رص ال�صغري جريانه ا آالخرين مبا ميتلكه ا إالفليم من ثروات وعطاءات عرب هذا املجرى الذي تقابله على ال�ضفة ا أالخرى القارة ا أالوروبية على بعد ثمانية ع�رش ميال فقط. و�سنقوم يف هذه ا إالطاللة با�ستعرا�ض عابر ملا قيل عن هذا املوقع اال�سرتاتيجي وم ؤ�هالته املالحية التي كانت وراء ا�ستقطابه لن�شاط مالحي هام منذ الع�صور القدمية، ا أالمر الذي تدل عليه �آثار امل�صانع التي كانت هنا لتمليح ا أال�سماك والتي تتبعها بطبيعة احلال التجمعات الب�رشية. وهكذا �سنالحظ بادئ ذي بدء �أن املوقع مو�ضوع احلديث كان م�ستودعا نزل به الفنيقيون قبل ن�أ مي�سي مدينة رومانية، حملت على ما يبدو ا�سم )لي�سا( Lissa �أو �إك�سيلي�سا )Exilissa( عند بلني ا أالكرب وعند بطوليمو�س )2(. وال بد �أن ن�شري هنا �إىل ما ردده ابن �سعيد من نه �أكان بني الق�رص ال�صغري باملغرب و�أوروبا قنطرة عظيمة ت�صل بني الربين، يزعم النا�س �نأ اال�سكندر بناها ليعرب عليها من بر عدوة ا أالندل�س �ىلإ بر العدوة املغربية )3(. وتتحدث بع�ض امل�صادر املغربية عن ت�شييد ح�صن هنا من قبل �أمري م�صمودة منذ ا أالزمان ا أالوىل للفتح ا إال�سالمي، �سنة ت�سعني للهجرة املوافق 708م )4(، وقد كان يحمل ا�سم )ق�رص م�صمودة( قبل �أن يحمل �أ�سماء خرى كق�رص�أ املجاز، وق�رص اجلواز والق�رص ال�صغري.

154 مدينة الق�رص ال�صغري من خالل التاريخ الدويل للمغرب

• د. عبد الهادي التازي ع�ضو أ�كادميية اململكة املغربية

�شغلني هذا املوقع اجلغرايف منذ اهتمامي �أوائل ال�ستينات بدرا�سة تاريخ املوحدين، حيث كنت �أت�صور جيدا �أهميته من حيث الدور اال�سرتاتيجي املحوري الذي كان له يف مغرب ا أالم�س وهو الدور الذي ال يقل عن دور جبل طارق و�سبتة �ن إمل يفقهما يف بع�ض ا أالحيان، وقد زرت �أطالله و�شاطئه يف �أوائل ال�سبعينات. واليوم �أعود �إليه وقد �شعرت باالرتياح يغمرين عندما ر يت �أبعث احلياة يف هذا املوقع الذي يعترب �أقرب ثغر يربط املغرب ب أ�وروبا، وعندما ر يت�أ تهيئته من جديد وتقدميها يف حلة جذابة تتجلى يف م�رشوع طنجة املتو�سط. هذا الق�رص الذي ينعتونه بـــ«ال�صغري«. هو يف الواقع �صغري باملعنى املتعارف عليه عند اجلغرافيني: يعني م�ساحة �صغرية احلجم، لكنه كبري وكبري بامتداد احلديث عنه عرب التاريخ الطويل للمغرب، امتداد احلديث عنه يف التاريخ الع�سكري للمغرب، امتداد احلديث عنه ونحن نتحدث عن �شبكات االت�صاالت البحرية والنهرية يف بالدنا، عن احلياة ال�سيا�سية والدبلوما�سية يف بالدنا، عن احلياة االجتماعية وا أالدبية كذلك. الق�رص ال�صغري - اخلريطة الطبوغرافية مبقيا�س 1:50000

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