La lumière au prisme d’Augustin Fresnel entre arts et sciences (1790-1900)

Auditorium du Louvre, 2 novembre 2015

Déroulé avec résumés et biographies

/ 10 h Introductions par Gérard Mourou, École polytechnique et Monica Preti, musée du Louvre

Gérard Mourou est professeur au Haut Collège de l’École polytechnique et professeur émérite à l’University du Michigan Anne-Arbor. Il est le directeur d’IZEST (centre International Zetta-Exawatt Science and Technology) à l’École polytechnique. G. Mourou est le co-inventeur de la technique d’amplification laser, appelée Chirped Pulse Amplification (CPA) utilisée sur tous les lasers de puissance dans le monde. À ce titre, Il est considéré comme le père du domaine des très hautes intensités. L’invention du CPA, lui permettra de devenir l’inventeur, de la chirurgie femtoseconde réfractive de l’œil utilisée sur plus d’un million de patients par an. De plus, il a été le créateur de l’infrastructure Européenne ELI (Extreme Infrastructure) située en République tchèque, Roumanie et Hongrie, ainsi que le Apollon sur le plateau de Saclay. L’impact de G. Mourou sur le plan économique est évalué à plus de 10 milliards euros avec la création de plusieurs milliers d’emplois. G. Mourou a reçu de nombreux prix internationaux dont le prix C. H. Townes 2009 de l’Optical Society of America le plus prestigieux de la société. Il est fait Chevalier de la Légion d'honneur en 2012. Il est membre de plusieurs académies dont celles des USA, Russe, Autrichienne et Lombarde. Il est docteur Honoris Causa de 4 universités. Il est l’auteur de plus de 400 articles scientifiques.

Monica Preti est historienne de l’art, docteur en histoire et civilisation de l’Institut universitaire européen. Ancienne pensionnaire scientifique à l’Institut national d’histoire de l’art, depuis 2006 elle est responsable de la programmation en histoire de l’art et archéologie à l’auditorium du musée du Louvre. Ses recherches portent principalement sur la culture visuelle dans l’Europe moderne : en particulier sur les rapports entre art et littérature au 16e siècle (Imaginaire de l’Arioste, l’Arioste imaginé, avec M. Jeanneret, Gourcuff Gradenigo 2009 ; L’Arioste les arts, dir., avec M. Paoli, Officina Libraria 2102) et sur l’histoire du goût, des collections et des musées aux 18e et 19e siècles (Ferdinando Marescalchi (1754-1816): un collezionista italiano nella Parigi napoleonica, Minerva 2005 ; Delicious Decadence. The Rediscovery of French Eighteenth-Century Painting in the Nineteenth Century, dir., avec G. Faroult et C. Vogtherr, Ashgate 2014). Elle a récemment dirigé deux ouvrages collectifs sur l’iconographie et l’imaginaire des villes détruites : Wounded Cities: The Representation of Urban Disasters in European Art (14th-20th Centuries), dir. avec M. Folin, Brill 2015 ; Villes en ruine: images, mémoires, métamorphoses, dir. avec S. Settis, Éditions du Louvre-Hazan, 2015.

/ 10 h 30 La naissance de la lumière dans le cosmos par George Smoot, Prix Nobel de Physique, APC Paris / U. Berkeley

George Smoot est spécialiste de la cosmologie et a obtenu, en 2006, avec John C. Mather, le prix Nobel de physique pour ses travaux sur le fond diffus cosmologique et la découverte des anisotropies (détection de faibles écarts de température dans le fond cosmologique). Il est professeur à l’University of California à Berkeley et, depuis 2010, à l’Université Paris Diderot - Paris 7. Après un doctorat en physique au MIT, le Professeur George F. Smoot a rejoint en 1970 l’Université de Californie à Berkeley et le Lawrence Berkeley National Laboratory. En février 2010, il a été recruté comme professeur à l’Université Paris Diderot. Il est actuellement titulaire d’une Chaire d’Excellence de l’Université Sorbonne Paris Cité. Il préside le Paris Centre for Cosmological (PCCP) et le Fonds de Dotation "Physique de l’Univers". Le Professeur Smoot est l’un des deux co-lauréats du Prix Nobel de Physique 2006 "pour la découverte des anisotropies du fond cosmologique micro-ondes”. Ce rayonnement est issu du milieu chaud et dense qui régnait dans l’Univers juste après le Big Bang. En avril 1992, George Smoot annonça à la communauté scientifique que l’équipe qu’il animait au sein de la mission COBE (COsmic Background Explorer) de la NASA avait détecté de très légères fluctuations dans ce fond cosmologique. Ces fluctuations étaient activement recherchées car elles sont les germes autour desquels la gravité va peu à peu agglomérer la matière des galaxies. Ces fluctuations sont en quelque sorte des fossiles de la création de l’Univers, restes d’une époque primordiale qui a donné naissance aux galaxies et aux étoiles que nous observons aujourd’hui. / 11 h Augustin Fresnel et la théorie ondulatoire de la lumière par Michèle Leduc, directrice de recherches émérite, CNRS

La « vraie » nature de la lumière s’est révélée progressivement de l’antiquité à nos jours. À la fin du 17e siècle, Newton travaille sur les phénomènes de la couleur, totalement inintelligibles à l’époque. Il fournit un modèle hétérogène de la lumière blanche où des particules constituant les rayons incidents possèdent des vitesses ou des masses différentes selon les couleurs ; il interprète ainsi la réflexion et de réfraction à travers un milieu matériel. Pourtant ce modèle mécanique trouve ses limites pour les phénomènes d’interférence et de diffraction et il faudra, pour les comprendre, attendre l’arrivée des conceptions ondulatoires de la lumière avec Huygens, suivi par Young puis Augustin Fresnel. Augustin Fresnel était un polytechnicien destiné au génie civil. Passionné de physique, il réussit à fonder l’essentiel de la science de l’optique au début du 19e siècle. Il lui revient d’avoir expliqué et formalisé le fait que la lumière est une sorte d’ébranlement qui se propage en cercles dans un milieu étendu, ou éther matériel, à partir de la source de l’éclairement, par analogie avec la propagation du son dans l’air. La compréhension des phénomènes d’interférences en découle. Il explique aussi de cette façon la propagation des rayons lumineux en ligne droite, utilisant le concept de front d’onde perpendiculaire à la direction de propagation ; il dégage alors le principe célèbre dit « Principe de Huygens- Fresnel » de l’enveloppe des ondes élémentaires. Ce principe permet la compréhension des phénomènes de la diffraction de la lumière par les objets. Fresnel en fera la démonstration devant les académiciens français sceptiques, alors tous adeptes de la théorie corpusculaire issue de l’autorité de Newton. L’expérience célèbre de Fresnel dite du « point blanc de Poisson », complétée d’une modélisation mathématique d’une grande rigueur, apporte une irréfutable preuve de la diffraction des ondes lumineuses par les bords d’un obstacle. On doit aussi à Augustin Fresnel l’hypothèse de la transversalité des vibrations lumineuses. Il explique ainsi le mystérieux phénomène de la polarisation lumineuse qui, appliqué à des lames cristallines, fournit de merveilleuses couleurs. À chaque couleur correspond une valeur différente de la longueur d’onde. Ces hypothèses géniales sont la base de la théorie de l’électromagnétisme de Mawell énoncée en 1870. Cette théorie classique parfaite sera à son tour bouleversée au 20e siècle par l’avènement de la mécanique quantique, avec l’introduction du concept de photon par Einstein et le retour de l’aspect corpusculaire de la lumière, complémentaire plutôt qu’en contradiction avec la vision ondulatoire de Fresnel. La compréhension de la lumière est encore une fois modifiée aujourd’hui par le développement de l’optique quantique, fondée sur l’intrication des fonctions d’onde. Si la vérité actuelle s’est bâtie sur un socle d’hypothèses successives et incomplètes, l’apport d’Augustin Fresnel demeure fondamental.

Michèle Leduc est physicienne, directrice de recherche émérite au CNRS. Elle dirige l’IFRAF (Institut Francilien de Recherche sur les Atomes Foids). Elle a été responsable de l’Année Mondiale la Physique en en 2005 puis présidente de la Société Française de Physique. Ses recherches ont porté d’abord sur les propriétés quantiques des gaz à basse température. Elle a développé de nouveaux lasers infra-rouges pour le pompage optique de l’hélium et utilisé le gaz ainsi polarisé pour l’imagerie des poumons par résonance magnétique. Enfin elle a étudié la condensation de Bose-Einstein de l’hélium métastable dans le domaine du nanoKelvin au Laboratoire Kastler-Brossel à l’École normale supérieure.

/ 11 h 30 Broglie, ville des Lumières par Philippe-Maurice de Broglie, duc de Broglie et Morgane Martin, École polytechnique

Le monde de la physique connaît un tournant en 1815 ; il voit naître, à travers le premier mémoire du polytechnicien français Augustin Fresnel, un changement absolu dans la conception de la lumière. Désormais elle n’est plus corps mais ondes ! Par cette découverte fondamentale, Augustin Fresnel donne suite aux travaux des physiciens Francesco Maria Grimaldi, Christian Huygens puis Thomas Young et met un terme provisoire à la théorie de l’émission professée par Isaac Newton en 1672 pour confirmer de manière définitive la nature ondulatoire et vibratoire de la lumière. Cette théorie est le fruit d’une curiosité artistique, celle transmise par François Léonor Mérimée, oncle et tuteur d’Augustin Fresnel et père du célèbre écrivain Prosper Mérimée. Professeur de dessin à l’École polytechnique et Secrétaire perpétuel à l’École des beaux-arts de Paris, Léonor Mérimée déjà convaincu de la nécessité de réunir les arts et les sciences pour favoriser les progrès de l’industrie, pousse son neveu dans certaines de ses expérimentations autour des matériaux de la peinture et l’initie aux grandes découvertes scientifiques, le guidant peu à peu vers les problématiques de la lumière. Ainsi, le génie de Fresnel s’inscrit dans un siècle de progrès et d’instruction et se fait le parfait témoin d’une époque où le peintre et le scientifique échangent et évoluent ensemble. Il prouve que les plus beaux travaux scientifiques peuvent naître d’une stimulation artistique.

Morgane Martin est actuellement responsable du bureau d’étude et directrice de projets de conservation-restauration de peintures de chevalet et peintures murales pour l’entreprise MORIMA. Diplômée d’une Licence en histoire de l’art et d’un Master professionnel en conservation et restauration des biens culturels en 2013, ses premières années d’expériences ont été acquises au sein de sa propre entreprise. À ce titre, elle a notamment participé à la restauration des costumes de scènes du spectacle Coucou Bazar de Jean Dubuffet. Convaincue de l’apport indispensable de la recherche en connaissance et préservation du patrimoine, elle a mené en parallèle un Master Recherche en Patrimoine et Conservation dont elle a été diplômée en juin 2014 et pour lequel elle a entrepris un travail sur l’histoire de la fabrication et de l’emploi des vernis aux 17e et 18e siècles. En étroite collaboration avec le physicien et professeur Gérard Mourou et sous l’égide de l’École polytechnique, elle mène actuellement un projet de recherche sur la peinture des 19e et 20e siècles, de William Turner aux Impressionnistes, réétudiée sous un nouveau jour, celui qui voit naître la théorie ondulatoire de la lumière professée par le physicien Augustin Fresnel.

Philippe-Maurice de Broglie, duc de Broglie

/ 12 h Peindre avec la lumière. Les prémices de la photographie couleur au 19e siècle par Bertrand Lavédrine, Muséum national d’Histoire naturelle

Dès sa divulgation, en 1839, la photographie cristallise autour d’elle une communauté très bigarrée de photographes, d’artistes, d’écrivains et de savants. À la fois objet d’émotion et de science dans sa nature et dans ses usages, elle est utilisée, comme l’avait prédit François Arago, « sous le quadruple rapport de la nouveauté, de l’utilité artistique, de la rapidité d’exécution, de ressources précieuses que la science lui empruntera ». De fait, au 19e siècle, les scientifiques investissent le champ de la photographie pour appréhender la lumière et chemin faisant, ils parviennent à concrétiser le rêve des photographes en fixant directement les couleurs du spectre solaire décomposé par le prisme. Si John Herschel, puis Edmond Becquerel réussissent à enregistrer certaines couleurs du spectre, ce sera qui proposera une solution élégante en 1891 avec le procédé interférentiel de photographie couleur. Cette invention illustre de façon incontestable la théorie posée par Augustin Fresnel et satisfait la communauté scientifique, toutefois elle ne connaîtra quasiment pas d’application en photographie. La mise au point d’un procédé de photographie couleur populaire privilégiera une approche pragmatique s’appuyant aussi bien sur les lois de la physique que sur celles de la physiologie. Le physicien John Joly introduira ainsi une plaque photographique couleur constituée d’une micro mosaïque colorée trichrome qui préludera aux plaques autochromes Lumière et aux écrans modernes d’ordinateurs. Cette présentation retracera le cheminement des travaux – entre le laboratoire du scientifique et celui du photographe – qui ont abouti à la photographie couleur moderne.

Bertrand Lavédrine est professeur du Muséum national d’Histoire naturelle et directeur depuis 1998 du Centre de recherche sur la conservation, sous la triple tutelle du CNRS, du ministère de la Culture et de la Communication et du Muséum national d’Histoire naturelle. Il a été responsable de formation en conservation-restauration des biens-culturels à l’université Paris 1 de 2002 à 2007. Il a publié de nombreux travaux sur la conservation du patrimoine culturel et a coordonné le projet européen POPART sur la préservation de l’art contemporain.

/ 12 h 30 Voir la lumière dans les couleurs : La Théorie des couleurs de Goethe, un essai scientifique d’artiste par Danièle Cohn, université Paris 1 Panthéon-Sorbonne

Préoccupé de la beauté du monde, de l’éclat des phénomènes, Goethe cherche à comprendre ce que son œil voit. Il propose une théorie, et non une science, qui rende compte des « actions et passions » de la lumière : telles sont les couleurs, qui selon lui donnent la vie. On analysera le choix artistique que constitue la Théorie des couleurs de Goethe et l’écho que lui donneront les peintres.

Philosophe, Danièle Cohn est Professeur des Universités, et enseigne l'esthétique à Paris 1 Panthéon Sorbonne. Elle a publié récemment Anselm Kiefer, Ateliers, Éditions du Regard, 2012, L'artiste, le vrai et le juste, Éditions Rue d'Ulm, 2014. Elle a été commissaire de l'exposition De l'Allemagne, de Friedrich à Beckmann, 1800-1939, au Musée du Louvre, 2013 et dirigé avec Sébastien Allard le catalogue de cette exposition, Hazan, 2013.

/ 14h30 La science au service du réalisme : Jules Jamin et l’exemple du photomètre (1839-1857) par Pierre Pinchon, université Aix-Marseille

Professeur à l’École polytechnique, Jules Jamin publie en février 1857 un important article dans la Revue des Deux-Mondes intitulé « L’optique et la peinture ». Alors que la question du réalisme monopolise les débats artistiques, ce disciple d’Arago entre à son tour dans l’arène et propose aux peintres le concours de la science. S’adressant directement aux artistes et plus particulièrement aux paysagistes, Jamin entend faire la promotion du photomètre afin que la démarche réaliste ne soit plus seulement esthétique mais également scientifique. Déjà abordées en 1839 dans le Magasin Pittoresque, la mesure de l’intensité lumineuse et la question de sa mise en application dans le traitement pictural apparaissent ainsi comme des préoccupations scientifiques qui se développent parallèlement à la progression de la peinture en plein air et à l’émergence d’une tendance réaliste sur les cimaises du Salon. Maintenant que les trépieds côtoient les chevalets en forêt de Fontainebleau et que l’on s’embarque pour l’Orient aussi bien avec sa boîte à couleurs que son appareil photographique dans les années 1850, cette communication se propose de revenir sur les relations entre art et sciences entre 1839 et 1857, à l’aune de la tentative de Jamin de populariser l’usage de la photométrie dans les milieux réalistes et orientalistes de la peinture contemporaine.

Pierre Pinchon est maître de conférences en histoire de l’art contemporain à l’Université Aix-Marseille. En 2011, il a publié La lumière dans les arts européens 1800-1900 aux éditions Hazan, un ouvrage dans lequel l’évolution des arts au 19e siècle est étudiée à l’aune des découvertes scientifiques sur la lumière et des transferts culturels. Spécialiste de la période 1870-1914, il a organisé en tant que commissaire les expositions Gustave Moreau / Théophile Gautier (Musée Gustave Moreau, 2011) et Gustave Moreau / Hélène de Troie. La beauté en majesté (Musée Gustave Moreau, 2012) et a également collaboré à Odilon Redon. Prince du rêve (Grand Palais, 2011) et Berthe Morisot (Marmottan, 2012).

/ 15 h Lumière et couleur au 19e siècle en Angleterre : regards croisés par Shearer West et Ian Walmsley, University of Oxford

This joint presentation considers the complex relationship between the scientific revolution, in particular concerning the study of light, and artistic landscape practice in England the eighteenth and nineteenth century. The revolution in understanding light that took place in the 18th and 19th centuries contrasted two kinds of views: first, the physical dichotomy of wave and particle, and second the philosophical dichotomy of the observer and the thing observed. Newton’s Opticks of 1704, and Goethe’s Farbenlehre of 1810 embodied these two contrasts. The reception of these ideas was varied in England and France, as well as by different groups of scientists and artists. When Voltaire visited London in 1726-7, he commented acerbically that everyone was talking about Newton’s work but hardly anyone understood it. The worldview Newton’s mechanistic universe implied was reviled by artists like Blake who saw his approach as confining and restrictive. Nonetheless, the contrast of brightness and darkness and the nature of color influenced both a deeper understanding of light and its expression in painting. This was a period in which scientists – natural philosophers – and humanists, particularly artists and poets, were in frequent conversation. In England, artists such as Joseph Wright of Derby, John Constable and J. M. W. Turner both experimented with light and colour and used colour emotionally and subjectively. At the same time, the conception of light itself took a more abstract turn, even as optical instrumentation became more advanced, extending vision and making it possible to acquire images of objects and scenes in new ways and in color. This talk will help illuminate how networks of scientists and artists in England laid the ground for the more radical experiments of French artists such as Monet.

Shearer West is Deputy Vice-Chancellor of the University of Sheffield. She was previously Professor of Art History and Head (Dean) of the Humanities Division at the University of Oxford, and before that, Director of Research at the UK Arts and Humanities Research Council and the Head of the School of Historical Studies at the University of Birmingham. She is the author or editor of nine books on aspects of eighteenth, nineteenth and twentieth- century art, including Portraiture (OUP) and Italian Culture in Northern Europe in the Eighteenth Century (CUP). She has been a Visiting Fellow at Yale University twice, is a Fellow of the Royal Society of Arts, the Royal Historical Society and the Higher Education Academy.

Ian Walmsley is the Hooke Professor of Experimental Physics at the University of Oxford, where is also the Pro-Vice-Chancellor for Research and Innovation. From 2011 – 2015 he was also responsible for the University’s Libraries and Museums. He was educated at Imperial College, London, and The Institute of Optics, University of Rochester, USA, where he later became a Professor and Director. His research explores fundamental properties of light and light-matter interactions, which he has applied to developing new application, most recently in quantum technologies. He has published more than 250 papers in the areas of ultrafast, nonlinear and quantum optics. He is a Fellow of the Royal Society, the Optical Society of America, the American Physical Society and the Institute of Physics.

/ 15 h 30 Expérimentations scientifiques et esthétiques : la vision comme action cognitive selon Helmholtz et Cézanne par Michael Zimmermann, Katholische Universität Eichstätt-Ingolstadt

Cézanne parlait de la « réalisation » du motif quand il s’agissait de décrire le processus à travers lequel l’objet se forme dans la vision, dans « l’œil », mais également dans l’œuvre d’art, et dans le médium du dessin, de l’aquarelle ou de la peinture à l’huile. En 1907, Rainer Maria Rilke définit ce qui se passe devant une toile de Cézanne comme « Dingwerdung », ou « devenir de l’objet ». Cézanne se détournait de l’esthétique des impressionnistes pour lesquels on ne voyait d’abord sur la rétine – considérée comme une table rase – que des tâches colorées. Dans des situations d’expérimentation picturale soigneusement arrangées, Cézanne s’applique à découvrir une autre poétique du visuel, analogue aux découvertes d’Hermann von Helmholtz publiées, en 1867, dans le Handbuch der physiologischen Optik : la vision, pour Helmholtz comme pour Cézanne, ne précède pas la saisie des objets, mais elle y est inclue. Pour Helmholtz, la vision n’est ni un enregistrement passif des impressions lumineuses sur la rétine ni un processus se déroulant comme un automatisme, mais un acte d’interprétation. La confrontation de sa conception empiriste et cognitive avec celles privilégiant l’inné d’Ewald Hering et d’Ernst Mach permet de comprendre la vision de manière plus précise, inscrite dans un débat de l’époque. La poétique du visuel chez Cézanne sera mise en parallèle avec cette approche : dans un même tableau, l’artiste combine de multiples caractères du visuel : telles des ombres dans deux couleurs différentes ; des couleurs ne s’insérant pas dans des contours – pourtant multiples ; des rythmes « syncopés » d’ombres et d’objets, de pommes et d’oranges etc. Ainsi, il oblige le spectateur non seulement à « lire » le tableau, mais aussi à synthétiser de multiples lectures émanant d’un seul objet. La vision, chez Helmholtz comme chez Cézanne, n’est donc pas seulement une affaire de la « aisthesis », de la sensation, mais elle implique la « noesis », la raison. La conférence expose donc cette vision cognitive, et sur sa découverte aussi bien scientifique qu’esthétique, dans un discours qui unit l’histoire des sciences expérimentales, notamment l’optique physiologique et psychologique, et une poétique du visuel conçue comme une expérimentation avec son médium, le papier ou la toile.

Michael F. Zimmermann – Bibliographie sélective : Seurat and the art theory of his time, 1991 (aussi en français) ; Industrialisierung der Phantasie. Der Aufbau des modernen Italien und das Mediensystem der Künste, 1875-1900, 2006; Lovis Corinth, 2008; Die Kunst des 19. Jahrhunderts. Naturalismus – Impressionismus – Symbolismus, 2011. Étapes de sa carrière : Berlin, Freie Universität ; Florence, Kunsthistorisches Institut ; Munich, Zentralinstitut für Kunstgeschichte ; Université de Lausanne et actuellement Université Catholique de Eichstätt-Ingolstadt. Membre de l’Académie des Sciences de la Bavière et de l’Academia Europaea. Il est en outre auteur d’essais et éditeur d’ouvrages collectifs surtout sur l’art des 19e et 20e siècles, sur la théorie artistique et l’histoire de sa discipline.

/ 16 h L’élégance de l’art et l’éloquence des équations par Frank Wilczek, Prix Nobel de Physique, MIT, Cambridge (Mass)

Professor Frank Wilczek is one of the most eminent theoretical physicists at work today. When only 21 years old and a graduate student at Princeton University, in collaboration with David Gross he discovered the fundamental equations for one of the four basic forces of nature: the strong force. That work led to a Nobel Prize. He is also known, among other things, for the development of unified field theories, the invention of axions, and the discovery and exploitation of new forms of quantum statistics (anyons). Presently he is working on the expansion of perception, both for practical purposes and for exploration of the quantum world. Professor Wilczek has received many honors. Notably, he was among the earliest MacArthur Fellows (1982-87) and in 2004 he received the Nobel Prize in Physics. He contributes regularly to Nature and to other scientific forums, explaining topics at the frontiers of physics to wider scientific audiences, and is much in demand as a public lecturer. His new book, A Beautiful Question (Penguin), appeared in July 2015.

/ 16 h 30 Projection du film documentaire Ouessant, l’île des phares Fr., 2013, 8 min., VOST anglais Présenté par Vincent Guigueno, Musée national de la Marine

Ingénieur et historien français, Vincent Guigueno est spécialiste de l’histoire de la sécurité de la navigation et de la conservation du patrimoine des phares. Il a d’abord poursuivi une carrière administrative et scientifique à l'École des Ponts au sein du laboratoire Techniques, Territoires et Sociétés, avant de rejoindre en 2009 la Direction des affaires maritimes en tant que chargé de mission pour le patrimoine des phares. En 2012, il a assuré le commissariat de l'exposition « Phares » au Musée national de la Marine, musée dans lequel il est entré comme conservateur en 2015. Il est commissaire de l’exposition virtuelle « Le phare étoile d’Augustin Fresnel » qui vient d’être mise en ligne sur le site du musée national de la Marine : http://mnm.webmuseo.com/ws/musee-national-marine/app/collection/expo/13

/ 17 h 30 Table ronde Art et science de la lumière : un échange à double sens ? Modérateur : Sébastien Allard, musée du Louvre Avec : Gérard Mourou, École polytechnique ; Michel Menu, C2RMF ; Michel Blay, ENS, Paris ; Danièle Cohn, Paris1 Panthéon-Sorbonne ; Ségolène Le Men, Université Paris Ouest Nanterre

Ancien élève de l’École normale supérieure et de l’Institut d’études politiques de Paris, Sébastien Allard, conservateur en chef du patrimoine, est le directeur du département des Peintures du musée du Louvre. Spécialiste de la peinture française du XIXe siècle, il a été le commissaire de nombreuses expositions internationales dont Dante et Virgile aux enfers d’Eugène Delacroix (musée du Louvre, 2004), Portraits publics, portraits privés (1770- 1830) (Paris, Galeries nationales du Grand Palais et Londres, Royal Academy of Arts, 2006- 2007), Babylone (Paris, musée du Louvre ; Berlin, Pergamon Museum et Londres, British Museum, 2008), Eugène Delacroix. De l’idée à l’expression, (Madrid, Caixa Forum- Barcelone Caixa Forum, 2011-2012), De l’Allemagne (musée du Louvre, 2013). Il est aussi l’auteur de nombreux ouvrages sur l’art de la première moitié du 19e siècle, dont Paris 1820. L’Affirmation de la génération romantique (2005), Le Louvre à l’époque romantique. Les décors du palais (1815-1835) (2006), Ingres. La Réforme des principes (2006, avec M. Cl. Chaudonneret), L’Art français. Le XIXe siècle (avec H. Loyrette et L. Des Cars) (2006), Le suicide de Gros. Les peintres de l’Empire et la génération romantique (2010, avec M. Cl. Chaudonneret), Prix 2011 de l’Essai de l’Académie française.

Michel Blay Historien et philosophe des sciences, est directeur de recherche émérite au CNRS. Il a été précédemment directeur du Centre d'archives de philosophie, d'histoire et d'édition des sciences (CNRS/EHESS/Ecole Normale Supérieure) et auparavant directeur scientifique adjoint du département des Sciences de l’homme et de la société du CNRS et directeur de la recherche à l’ENS de Fontenay-Saint-Cloud. Après avoir enseigné la physique, il a soutenu une thèse de troisième cycle en Histoire et Philosophie des Sciences et une thèse d’Etat ès Sciences Humaines (philosophie). Ses travaux portent principalement sur l’histoire de la mathématisation, depuis le XVIIe siècle, des phénomènes du mouvement d’une part, et sur celle de la lumière et de la couleur d’autre part. Il s’agit de comprendre comment une science mathématisée s’est constituée et s’est développée jusqu’à nos jours dans les domaines considérés. Depuis quelques années il poursuit parallèlement à ces travaux une réflexion sur le statut de la technique au XXe siècle et sur les modalités du développement de la politique de la Recherche.

Docteur et HDR en physique optique, Michel Menu est Chef du département Recherche du Centre de Recherche et de Restauration des Musées de France (C2RMF). Ses recherches portent sur les multiples dimensions de la couleur des œuvres d'art. Parmi les ouvrages qu’il a écrits ou codirigés : Art et électricité, Les Ulis, 2002 (actes du colloque, Collège de France, Paris, 15 décembre 2000) ; Au cœur de La Joconde : Léonard de Vinci décodé, Paris, 2006 ; Lumière, couleur : dialogues entre art et science, [2005], Paris (catalogue de l’exposition, Cloître des Cordeliers, université Pierre et Marie Curie, Paris, 2005) ; OnLab, le laboratoire d’œuvres nouvelles de Michel Paysant, Paris, 2010 (catalogue de l’exposition, musée du Louvre, Paris, 2009-2010) ; Leonardo da Vinci’s technical practice : paintings, drawings and influence, Paris, 2014 (actes du colloque, National Gallery, Londres, 13-14 janvier 2012).

Membre de l’Institut universitaire de France, Ségolène Le Men est professeur d’histoire de l’art à l’université de Paris Ouest Nanterre après avoir été chercheur CNRS au musée d’Orsay puis Directrice des études littéraires à l’École normale supérieure. Elle a été commissaire de plusieurs expositions, dont Daumier (Paris, Ottawa, 1999-2000) et auteur de nombreuses publications sur l’art français du 19e siècle. Ses livres ont porté sur la pédagogie par l’image (Les Abécédaires français illustrés au 19e siècle, Paris, Promodis, 1984), l’illustration et le rapport entre art et littérature, entre beaux-arts et imagerie (Seurat et Chéret. Le Peintre, le cirque et l’affiche, Paris, CNRS Éd., 1994, rééd. 2003), l’histoire du regard et de la culture visuelle (La Cathédrale illustrée. De Hugo à Monet, regard romantique et modernité, Paris, CNRS Éd., 1998, rééd. 2014 chez Hazan ; « Les images sociales du corps », dans Histoire du corps sous la direction d’Alain Corbin, 2005 ; Courbet, Citadelles & Mazenod, 2007). Elle est spécialiste de la peinture du 19e siècle et plus particulièrement de l’impressionnisme (Monet, Paris, Citadelles & Mazenod, 2010 ; La Bibliothèque de Monet, Paris, Citadelles & Mazenod, 2013).