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Ciné-Bulles

Bienvenue la mort de Jozef Siroka

Volume 24, Number 3, Summer 2006

URI: https://id.erudit.org/iderudit/60788ac

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Publisher(s) Association des cinémas parallèles du Québec

ISSN 0820-8921 (print) 1923-3221 (digital)

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Cite this review Siroka, J. (2006). Review of [Bienvenue la mort / A Prairie Home Companion de Robert Altman]. Ciné-Bulles, 24(3), 55–56.

Tous droits réservés © Association des cinémas parallèles du Québec, 2006 This document is protected by copyright law. Use of the services of Érudit (including reproduction) is subject to its terms and conditions, which can be viewed online. https://apropos.erudit.org/en/users/policy-on-use/

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dresse à un public connaisseur et déjà ama­ Leonard Cohen - I'm Your Man teur des compositions du chanteur de même JOZEF SIROKA que de son univers littéraire. Plutôt que de 35 mm / coul. et n. et b. / 98 min / 2005 / doc. / Canada-États-Unis présenter les œuvres qu'il a écrites, Lian e titre du tout récent film de Robert Lunson montre l'image de la couverture Réal. : Lian Lunson Altman, A Prairie Home Compa­ Image : Geoff Hall, Johan Pirozzi, Lian Lunson de ses livres. Pour le spectateur qui ne sait nion, fait référence à une (vraie) et Brit Marling L pas que Cohen a plusieurs recueils de poésie Mont. : Mike Cahill émission de radio hebdomadaire animée à son actif, il est parfois difficile de com­ Prod. : Lian Lunson, Mel Gibson et Bruce Davey par un certain Garrison Keillor et diffusée Dist. : Christal Films prendre les nombreuses références insérées Int. : Nick Cave, Rufus & Martha Wainwright, Kate dans des millions de foyers américains dans le film. Il en est de même pour ses & Anne McGarrigle, Berth Orton, Jarvis Cocker, depuis 30 ans. Il s'agit aussi d'un scénario Linda & Teddy Thompson, The Handsome Family, croquis et ses photos qui sont souvent pré­ Anthony, Julie Christensen, Perla Battala, Bono, écrit par le même Keillor qui raconte sentés sans commentaires. Cela dit, Leo­ Edge, Larry Mullen Jr, Adam Clayton, Leonard Cohen l'histoire fictive du dernier spectacle de

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son émission tel que présenté au Fitzge­ tacle. Ils semblent emprisonnés dans leur jouer des comédiens de foire à la fois atten­ rald Theater à St-Paul, Minnesota. Réalité imagination et vivent en permanence leur drissants et divertissants. et fantaisie se mêlent sur les planches et propre création. C'est le cas de Dusty et dans les coulisses de ce théâtre peuplé par Lefty, deux cow-boys bouffons qui se spé­ Si l'esprit de fête persiste tout au long, il n'en demeure pas moins qu'il émane de A les véritables techniciens de A Prairie Home cialisent dans la comédie vulgaire et dont Prairie Home Companion une certaine Companion ainsi que par les personnages l'attitude de machos des savanes les suit atmosphère funèbre. Sur le plan visuel, on imaginés par Keillor. partout. Il en va de même pour le narra­ teur anachronique du film; un détective a droit au plus sombre des films d'Altman : à l'exception des loges et de la scène, le Reconnu pour avoir visité pratiquement tous privé sorti tout droit d'un film noir et qui pourrait facilement être le cousin du Philip Fitzgerald Theater est enveloppé d'un noir les genres cinématographiques, Altman Marlowe de The Long Goodbye. profond. Mais le film n'est pas morbide livre ici un film synthèse qui rend hom­ pour autant. Le sujet de la mort (qu'elle mage au pouvoir et aux bienfaits de la Et au milieu de cette distribution colorée, soit physique ou artistique) est une source créativité. Les divers protagonistes de A il y a l'inclassable GK (Keillor encore, in­ de réconciliation et non d'appréhension. Prairie Home Companion conjuguent, carnant son propre rôle). Son attitude désin­ Une scène particulièrement chaleureuse chacun à leur manière, l'art de vivre et volte et sa propension à raconter des his­ montre un vétéran du country qui s'éteint l'art de la scène. Entre deux prestations toires improvisées, sans queue ni tête, font doucement dans sa loge, le sourire aux lè­ musicales, les deux dernières survivantes écho à ce film au rythme alangui et prati­ vres, tout juste après avoir livré sa der­ du Johnson Sisters Sextet ( et quement dénué d'un récit au sens propre nière prestation. Serait-ce là la dernière Tomlin, d'une authenticité stupéfiante) du terme. réalisation de ce cinéaste âgé de 81 ans? discutent du passé avec mélancolie et sont Quoiqu'il en soit, Altman livre ici un chant angoissées face à l'avenir. Mais dès qu'elles du cygne doux-amer qui ne peut qu'inci­ A Prairie Home Companion permet donc se mettent à interpréter leurs chansons, ter à (re)découvrir son œuvre. • à Altman de se concentrer sur ce qu'il fait elles entrent dans un univers meilleur où de mieux : illustrer le comportement hu­ les tracas causés par le passage du temps main. Alors que, par le passé, ses observa­ A Prairie Home Companion n'existent plus. L'immense joie de vivre tions s'effectuaient avec un regard pour le 35 mm / coul. /105 min / 2006 / fict. / États-Unis qu'elles y manifestent suggère que non moins cynique (Nashville, ), seulement la scène tient lieu d'échappa­ ici ce sont les sentiments d'affection pure Réal. : Robert Altman toire à la morosité quotidienne mais qu'elle Scén. : Garrison Keillor et Ken LaZebnik qui priment, en particulier envers l'art de Image : Edward Lachman constitue le fondement de leur vie. la comédie. C'est avec un soin bergma- Mont. : Jacob Craycroft Prod. : David Levy nesque qu'Altman filme les visages et les Dist. : Vivafilm D'autres personnages n'ont pas besoin d'un mouvements de ses acteurs qui se voient Int. : Garrison Keillor, Meryl Streep, , Woody Harrelson, John C. Reilly, Kevin Kline, Tommy cadre spécifique pour se donner en spec­ offrir toute la latitude nécessaire pour Lee Jones,

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