Peinture Métaphysique Et De Structuralisryte Cubiste
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La Ville de Montrouge présente son XXII• Salon, du 4 mai au 5 juin. A cette occasion une rétrospective de Salvador DALI est présentée au public. Il serait inexact de prétendre exposer toute L'œuvre de Salvador DALI. D'une part, les tableaux les plus célèbres se trouvent à l'étranger et difficiles d'accès, d'autre part, la production artistique de cet artiste est si féconde et si variée que les choix ont dû être limités. L'ensemble réunit des œuvres de 1920 à 1975: une vingtaine de tableaux figu ratifs, abstraits, surréalistes, soixante dessins, certains préparatoires à ses plus grandes œuvres, cinquante gouaches, quatre aquarelles, vingt-deux sculptures, des gravures et des objets ont été sélectionnés pour donner l'image la plus complète du travail de DALI. L'intérêt se trouve dans la diversité et l'évolution permanente de son esprit créateur. Simultanément le Salon organise une exposition d'Art contemporain. Cent cinquante peintres et cinquante sculpteurs y participent. Ces deux cents artistes sont représentatifs d'une réalité artistique actuelle et !o diversité de leur travail est le miroir d'une époque où tout est mouvement. La complexité, l'ambivalence, les contradictions apparentes de ces différentes expressions reflètent ce même désir de dire les mots qui n'ont pas été prononcés ou perçus. L'Art n'a plus à se justifier par la beauté. Il devient le cri de ceux qui cherchent à préserver leur vérité. L eurs créations sont la libération protectrice d'une civilisation parfois destructive. Le Salon est le lieu de rencontre entre ceux qui expriment et ceux qui reçoivent. Il se veut lien de connaissance et d'union. Nicole BESSEC. Dalex, M ontrouge Comité Président : Henri GINOUX Vice-Président : Louis FOUINAUD Responsable du Salon Nicole BESSEC Secrétaire : Yvette BONNEAU Décorateur : Frédéric BLIN Jury Mesdames Dany BLOCH, Geneviève BRERETTE, Marie-Laure PAPILLARD, Marie-Claude WOLFIN. Messieurs : André BRASILlER, CESAR, Henri CUECO, Claude DRAEGER, Maurice ECHAPASSE, Edouard PIGNON, Pierre REST ANY. Nous remercions de leur aimable participation le Captain J.P. Moore - le musée Perrot-Moore de Cadaquès - M. Edward James et la fondation James Esquisse d'auto-portrait pour « Impressions d'Afrique » (1938) 52 X 33 - Coll. Edward James Dali entre l'action et la réaction Tout a été dit sur Dali, et au terme des plus superbes paradoxes, par lui même. Champion de l'autopropagande, grand-maitre de la provocation, virtuose de l'excentricité, cet homme universellement connu, admiré, détesté, est un homme d'ordre. Et avant tout d'ordre mental. Depuis 192 8, son premier voyage à Paris et sa rencontre avec les surréalistes, on peut dire que l'homme et l'œuvre sont demeurés indissociablement unis dans la perspective logique d'un destin radicalement personna lisé. Cinquante ans d'absolue continuité dans la poursuite de sa propre mythologie lui ont donné une place à part non seulement dans le surréalisme, mais dans l'art de son époque. DALI domine son époque par le scandale permanent de son insertion dans le paradoxe, constante de sa logique visionnaire. La logique dalinienne se présentr> comme une logique des contradictions surmontées, qui trouve sa justification en soi et n'a de compte à rendre à aucune autre référence logique. D'où cette auréole trouble qui l'entoure, cette double étiquette d'exhibitionnisme et de mystification qui traduit tout autant la fascination que la réticence irritée d'un public désemparé par la perma nence de ce scandale logique. Seule la mort lui rendra justice, en faisant basculer le personnage dans la dimension positive de son mythe, la polémique dans la poétique, l'anti-légende dans la légende. Ironie bien dalinienne du sort! La mort qui lui rendra justice, le jeune Dali a dû la combattre pied à pied durant toute la période de sa formation. Lorsqu'il naÎt à Figue ras en Catalogne en 1904 ses parents le prénomment Salvador, « Sauveur ». Salvador comme son père, mais surtout Salvador, comme son frère aÎné, mort trois ans plus tôt et qui lui ressemblait « comme un image dans la glace ». La hantise de « l'autre » Salvador avait fixé l'entière vie affective familiale. L'être originel de Dali s'identifie au non-être du frère mort. Dès sa naissance Dali est voué à un anti-destin mimétique, au mirage existentiel de l'autre, ce mort qui Lui a volé son destin. Face à l'omniprésence de cette illusion jumelée, de ce double obsessionnel, dans la plus irréelle fluidité affective, le Salvador vivant tente désespérément de se détacher du Salvador mort dont on lui impose la figure comme le moule paralysant de son destin. Né dans le paradoxe existentiel, Dali persévérera dans son être, le vide immatériel de l'espace visionnaire, la solitude de l'imaginaire fantastique. A l'âge de 15 ans il découvre Chirico et la Scuola M etafisica, et un peu plus tard le Cubisme. Aux Beaux-Arts de Madrid où il entre en 1921, il fait scandale en s'abonnant à la revue d'Ozenfant et le Corbusier, «l'Esprit Nouveau», dont il sera un fidèle lecteur jusqu'à sa disparition en janvier 1925. Disparition qui coïncide, signi ficativement, avec la naissance (décembre 1924) de la «Révolution Surréaliste». La vision pré-dalinienne prend ses sources dans une recherche combinatoire entre des éléments de peinture métaphysique et de structuralisryte cubiste. Si l'on en croit James Thiall Soby il semble que Dali n'ait découvert le Surréalisme à travers ses publications, qu'à partir de 1927, date à laquelle il peint «Appareil et Main », « Le sang est plus doux que le miel », les deux toiles considérées comme la marque de la tentation, l'annonce de ce qui sera par la suite et une fois pour toutes, le style dalinien (1). Dès lors, tout s'accélère. En 1928 Dali vient à Paris pour rejoindre Bunuel, avec qui il prépare «un chien andalou», qui sortira l'an d'après. La collaboration Dali-Bunuel nous vaudra un autre grand film, «l'Age d'or» (1930). Son compatriote catalan Joan Miro signale aux surréalistes les étranges toiles de cet adepte inconnu du «Manifeste». L'été 1929 est la date-charnière capitale. Le marchand Camille Goemans se rend à Cadaquès pour y rencontrer Dali et fixer avec lui le contrat de sa première exposition parisienne. René et Georgette Magritte viendront le rejoindre, suivis de Paul Eluard et de sa femme Gala .. Pour Dali, Gala, c'est le coup de foudre, et aussi, comme le dit le docteur Roumeguère, « le miracle thérapeutique». Il trouve en Gala sa jumelle vivante, l'anti dote actif de son jumeau mort. Dali renaÎ en Gala-Dali: Gala devient son épouse, son inspiratrice, son impresario. L James Thrall Soby : Salvador Da!i. Editions du Moma, New-York, 1946. 1929 est une période féconde dans la peinture de Dali : c'est l'année de « leu lugubre » (la fameuse statue au socle recouvert des inscriptions - dans l'ordre - gramme, centigramme, milligramme), « Plaisirs illuminés », «Accommodation des Désirs », toiles désormais classiques et qui figureront dans son exposition parisienne de septembre 1929, préfacée par André Breton. En 1930, aux Editions Surréalistes, paraît « La Femme visible », somme poé tique et théorique dans laquelle Dali développe sa « méthode paranoïaque critique », l'exploration systématique de l'insconscient, du rêve et du délire, dont il donne la plus contradictoirement logique des définitions: « Méthode spontanée de connaissance irrationnelle basée sur l'association interprétative-critique de phénomènes délirants. » En 1931 paraît un autre livre: « L'amour et la mémoire », qui est en quelque sorte le commentaire parallèle des œuvres capitales de cette époque du début des années 1930, « La Source », « Le Rêve », «Persistance de la Mémoire ». Désormais Dali est pleinement Dali, et la paranoïa-critique s'identifie parfaite ment à son entreprise de désorganisation poétique du monde extérieur, à la recherche du dépaysement et du délire volontaire, tous les moyens étant bons pour « forcer l'imagination ». L'orientation de son œuvre s'établit clairement, entre les pôles extrêmes du réalisme emphatique de la Renaissance, et l'écriture automatique, entre le rappel du terroir catalan, le souvenir de son enfance et l'exploitation délibérée du délire asso ciatif, la recherche de ces régions dépaysantes à la limite de l'humain, une sublima tion épique et mystique de l'érotisme. La pensée suit les variations du style. En 1933 il démonte le système de l'Angélus de Millet, exploite le mythe de Guillaume Tell, entreprend la réhabilitation de Meissonnier et des pompiers, exalte le modern style (par fidélité catalane à Gaudi). René Crevel, fasciné, lui consacre dès 1930, une étude enthousiaste: « Dali ou l'anti obscurantisme ». Jusqu'où peut aller la liberté d'interprétation et de création? La liberté absolue du délire ne conduit-elle pas à la néantisation même du rêve? Dali n'aura jamais sans doute été aussi gratuit qu'il l'aurait voulu, et cette constatation extrêmement lucide l'amène à se poser dans « La Conquête de l'Irrationnel », le problème de la réalité des symboles. Face à la montée du nazisme, celui qui n'avait pas hésité à mettre « les images idéales du Surréalisme » au service de la Révolution, et à se déclarer contre la famille, la patrie et la religion, pour l'amour, ce Dali locomotive du mouvement afficha un inquiétant intérêt pour la personnalité d'Hitler. A Breton qui lui en faisait le reproche, Dali invoqua la liberté absolue de transcription de ses rêves: est-ce ma faute si je rêve d'Hitler ou de l'Angélus de Millet! S'il ne mit pas en exécution son projet de peindre son rêve nazi, il ne résista pas à la tentation de déculotter Lénine dans l'Enigme de Guillaume Tell.