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24 images

Je t’aime, je te tue Mon ennemi intime — , Gilles Marsolais

Quand la culture devient marchandise Numéro 98-99, automne 1999

URI : https://id.erudit.org/iderudit/25033ac

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Éditeur(s) 24/30 I/S

ISSN 0707-9389 (imprimé) 1923-5097 (numérique)

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Citer ce compte rendu Marsolais, G. (1999). Compte rendu de [Je t’aime, je te tue / Mon ennemi intime — Klaus Kinski, Werner Herzog]. 24 images, (98-99), 73–73.

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JE T'AIME, JE TE TUE

PAR GILLES MARSOLAIS

MON ENNEMI INTIME - KLAUS KINSKI m Werner Herzog

entré sur les rapports très particuliers de la collaboration de C établis au fil des années entre Werner ces deux artistes que Herzog et son acteur fétiche Klaus Kinski, l'expression du poinr Mon ennemi intime — Klaus Kinski, de vue partiel et par­ présenté en séance spéciale dans le cadre de tial de Werner Herzog la Compétition officielle, esr tout simple­ sur celui qu'il considé­ ment passionnant. Avec humour, il illustre rait comme un ami, la relation d'amour-haine tissée entre ces malgré le ritre ironi­ deux êtres hors du commun et qui y ont que du film, et un ami trouvé matière à leur inspiration. qui le stimulait à tra­ On y apprend donc que Herzog, enfant, vers sa provocation. a connu Kinski alors qu'il logeait chez eux, Comme il a réalisé ce à Munich, dans une pièce minuscule jonchée documentaire alors de feuilles mortes où il vivait nu, et que Werner Herzog et Klaus Kinski sur le tournage de . que l'acteur était dé­ déjà ses frasques n'étaient pas sans provoquet cédé depuis quelques la panique de tous les locataires de l'immeu­ années, on peut penser ble. Jamais le jeune Herzog n'aurait pu démesure nettement identifiable à l'intérieur que Herzog a disposé de toute la latitude imaginer qu'il tournerait des filmsu n jour de cette œuvre à nulle autre pareille, et les pour tirer la couverture de son côté, afin de avec ce fou! Sur les lieux mêmes, évidem­ critiques ont été nombreux à relever une se donner le beau rôle au sein de cette rela­ ment transformés aujourd'hui, Herzog panne d'inspiration majeure chez Herzog tion mouvementée. De fait, ce filmlu i per­ 1 explique avec force détails aux nouveaux depuis cette dernière collaboration qui fut met de faire contrepoids au livre assez cru propriétaires incrédules de l'appartement désastreuse. publié par Kinski, une autobiographie ce que c'était que de vivre aux côtés de ce Herzog avoue que lui et son acteur ont émaillée de propos disgracieux à l'endroit de monstre capable de piquer de rerribles carrément eu des envies de meurtre l'un tous ceux qui ont eu le bonheut ou le mal­ colères au point de dévaster la salle de bain envers l'autre, comme ce fut le cas notam­ heur de côtoyer l'acteur. Et s'il met l'accent commune. Les anecdotes s'accumulent pour ment pendanr le tournage de Aguirre. Mais, sur leur confronrarion maladive qui, à sa authentifiet son témoignage sur cette coha­ au delà de ces anecdotes savoureuses ou trou­ façon, témoignait d'une profonde admiration bitation et ainsi prendre la mesure du per­ blantes, ce documentaire vaut aussi pour mutuelle, en même temps il laisse soupçon­ sonnage. ses prises de vues rares relatives aux condi­ ner une bonne dose de manipulation de la Sur le plan professionnel, tant au tions difficiles de tournage de Aguirre, au part de Werner Herzog, dans leur relarion. théâtre que sur les plateaux de tournage, Pérou, et de , dans la jungle A cet égard, l'omniprésence de ce dernier Klaus Kinski avait déjà la réputation d'être amazonienne. Dans Burden of Dreams finit par être gênante, apparentant par mo­ un caractériel et de ne pas respecter ses con­ (1982), Less Blank donnait déjà une bonne ments ce documentaire à une forme d'auto- trats lorsque Werner Herzog décida d'avoir idée du projet démentiel de ce dernier film promotion, à moins qu'il ne s'agisse pour son recours à ses services pour incarner un con­ dans lequel on procède au halage d'un bateau réalisateur de se prouver une foisd e plus qu'il quistador fou et illuminé par Dieu dans par-dessus une montagne; aussi, revoit-on maîtrise la situation. • Aguirre, la colère de Dieu (1972), ainsi avec émotion des plans fabuleux, dont celui que pour les quatre films qui suivirent, ce de cette colonne humaine zigzaguant au 1. Crever pour vivre, Paris, Pierre Belfond, 1976. qui identifie l'acteur au réalisateur et vice bord d'un précipice dans la montagne escar­ versa. Il s'agit de Nosferatu, fantôme de la pée, à la gauche de l'écran, tandis que la MON ENNEMI INTIME nuit (1978), Woyzeck (1979), Fitzcarraldo droite, comme séparée à coups de sabre par — KLAUS KINSKI (1982) et de CobraVenk (1987) qui a scel­ quelque divinité, est envahie par un gigan- Allemagne/Grande-Bretagne 1999. Ré. et scé.: Werner Herzog. Ph.: Peter Zeirlinger. lé le divorce de ces deux erres d'exception, resque et «providentiel» nuage de brume. Mont.: Joe Bini. Mus.: Popol Vuh. Int.: Klaus avant la mort de Kinski survenue en 1991- Mon ennemi intime n'est pas tant un Kinski, Werner Herzog, , Ces films constituent un courant de la «making of» visant à embrasser l'ensemble Eva Mattes. 95 minutes. Couleur.

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