Septentrion. Jaargang 15
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Septentrion. Jaargang 15 bron Septentrion. Jaargang 15. Stichting Ons Erfdeel, Rekkem 1986 Zie voor verantwoording: http://www.dbnl.org/tekst/_sep001198601_01/colofon.php © 2011 dbnl i.s.m. [Nummer 1] Septentrion. Jaargang 15 2 Rembrandt van Rijn, ‘Titus van Rijn à son pupitre’, 1655. Septentrion. Jaargang 15 3 A l'occasion de la quinzième année Une croissance continue Depuis ce juvénile été de 1972 qui vit paraître le premier numéro de Septentrion, revue de culture néerlandaise, pour la rédaction et tous les collaborateurs, quelle passionnante aventure intellectuelle que l'édition de cette revue! Au fil des années, Septentrion a su trouver sa voix et ses inflexions propres dans le concert des relations culturelles entre francophones et néerlandophones. Lecteurs et critiques reconnaissent à l'envi sa singularité et c'est avec reconnaissance que nous nous réjouissons de l'estime qu'un vaste auditoire nous accorde. Le présent numéro nous introduisant dans la quinzième année, il est peut-être bon de rappeler une fois encore les objectifs que se propose cette publication. Septentrion veut en premier lieu offrir au lecteur francophone - sous quelque ciel qu'il réside - un large éventail d'informations fiables sur la culture néerlandaise telle qu'elle vit aux Pays-Bas et en Belgique flamande. A sa lecture, le francophone devrait pouvoir se former une idée précise de la culture et de la vie culturelle, au sens large du terme, qui animent ‘les plats pays riverains de la Mer du Nord’. En second lieu, Septentrion entend appeler sans cesse l'attention sur l'interaction féconde, tant présente que passée, des cultures française et néerlandaise. Non contents de rendre compte de ces influences réciproques, nous voulons promouvoir activement échanges et relations de bon voisinage. Septentrion se propose résolument de transcender les frontières et d'apporter ainsi sa pierre à la construction de l'Europe. Dans le cadre plus large du devenir culturel de notre continent, les cultures française et néerlandaise ont toujours joué un rôle de premier plan. Cette commune conscience, nourrie d'intérêt et de respect mutuels, ne peut qu'enrichir le patrimoine intellectuel et culturel de l'Europe. Cette double mission, Septentrion s'efforce de la remplir dans une totale indépendance. A cette fin, nous faisons appel à nombre de spécialistes et nous nous efforçons de diversifier au maximum sujets et collaborateurs, soucieux de garantir ainsi la plus grande objectivité possible. En vue de permettre à Septentrion de s'acquitter de cette tâche avec plus de succès et d'efficacité encore, le conseil d'administration de la fondation flamando-néerlandaise ‘Stichting Ons Erfdeel - Fondation Notre Patrimoine’ qui assure l'édition de la revue, a décidé, à compter de cette quinzième année, de la faire paraître quatre fois par an au lieu de trois fois. Nous exprimons ici notre chaleureuse gratitude à la ‘Willem de Zwijger Stichting - Fondation Guillaume le Taciturne’ d'Amsterdam pour la subvention importante qui nous permet d'offrir au lecteur ce quatrième numéro grâce auquel, nous l'espérons, nos contacts gagneront tant en intensité qu'en fécondité. JOZEF DELEU Septentrion. Jaargang 15 Rédacteur en chef de ‘Septentrion’. Administrateur délégué de la fondation flamando-néerlandaise ‘Stichting Ons Erfdeel’. Septentrion. Jaargang 15 4 La littérature néerlandaise en France aujourd'hui LA diffusion à l'étranger, et singulièrement en France, de la littérature d'expression néerlandaise - qu'elle nous vienne de Flandre ou des Pays-Bas - suscite d'ordinaire des commentaires assez pessimistes. Il y a une dizaine d'années, dans une étude publiée ici même(1), le professeur Pierre Brachin observait avec mélancolie: ‘C'est un cercle vicieux: on ne lit pas d'ouvrages néerlandais parce qu'il n'existe pas de traductions, et on ne souhaite pas de traductions parce qu'on ne connaît pas les écrivains.’ Pareille méconnaissance a de quoi préoccuper non seulement les défenseurs de la littérature néerlandaise, mais aussi les auteurs: l'on ne s'étonnera pas de voir, par exemple, un W.F. Hermans multiplier à ce sujet dans son dernier recueil d'essais, Klaas kwam niet (Klaas n'est pas venu)(2), des remarques teintées d'humour noir. Scepticisme et amertume connaissent cependant des moments de trêve. Ainsi, en septembre 1985, la publication en traduction française du grand roman de Hugo Claus, Het verdriet van België, Le chagrin des Belges(3), a-t-elle été saluée de commentaires extrêmement élogieux: des interviews et des articles en pleine page, voire sur deux pages, dans deux quotidiens français des plus éminents, Le Monde et Libération, ce n'est pas précisément le traitement réservé au représentant d'une littérature mineure! Mais cette bonne surprise n'est-elle que la proverbiale ‘exception qui confirme la règle’, ou au contraire le signe d'une évolution? Claus n'est pas un inconnu en France: son théâtre, ses romans, ont été largement traduits, grâce notamment aux efforts de Mme Maddy Buysse; aucune de ses oeuvres, cependant, n'avait encore rencontré à Paris un tel écho. Si l'exceptionnelle qualité de Het verdriet van België justifie ce succès critique, elle ne suffit pas à Hugo Claus (o1929). (Photo A. Vandeghinste). l'expliquer. J'y vois, pour ma part, également la marque d'un changement d'attitude de la critique et du public francais à l'égard de la littérature néerlandaise. Cette évolution a sans doute commencé à s'esquisser vers 1980; elle ne se manifeste avec quelque clarté que depuis un an ou deux. Septentrion. Jaargang 15 Couverture du ‘Chagrin des Belges’, édition française de ‘Het verdriet van België’ de Hugo Claus. Septentrion. Jaargang 15 5 Depuis la fin de la guerre et jusqu'aux années soixante-dix, la publication en France de traductions d'oeuvres littéraires néerlandaises avait un caractère sporadique. Précisons bien: en France. En effet, les éditeurs francophones de Bruxelles ou de Wallonie se montrent de longue date beaucoup plus actifs. Mais, on le sait, une infranchissable ligne Maginot semble border la frontière francobelge: jamais ces malheureuses traductions n'atteignent Paris. Les conséquences de cet état de choses sont déplorables. La consommation de littérature, comme celle de toute drogue, repose sur l'accoutumance. Lorsque, d'un domaine linguistique donné, nous parviennent des oeuvres trop rares, chacune d'elles fait figure de ‘bon sauvage’ échappé d'une terre inconnue: elle en a l'exotisme, la curiosité mais aussi l'absurdité. Hors de leur contexte, les oeuvres dépérissent et perdent une part de leur sens. Privé de points de référence, le lecteur potentiel risque de s'en désintéresser. Aussi estil essentiel de maintenir une certaine fréquence dans la publication: chaque année devrait nous apporter son petit lot d'oeuvres traduites du néerlandais et l'amateur devrait retrouver périodiquement, si possible, les mêmes auteurs. Or c'est précisément ce qui se produit depuis deux ans environ. En 1984, trois romans néerlandais ont été publiés à Paris: De aanslag (L'attentat) de Harry Mulisch, Schorrebloem (titre français: ‘La danse de l'arlequin’!) de Diet Verschoor et De waterman (L'homme de l'eau) d'Arthur van Schendel. En 1985, le roman de Claus déjà cité vient clore - provisoirement - une série ouverte par Het verstoorde leven (Une vie bouleversée), le journal d'Etty Hillesum, puis continuée par Het stenen bruidsbed (Noces de pierre) du même Mulisch et par Rituelen (Rituels) de Cees Nooteboom. Trois ou quatre oeuvres littéraires par an: ces chiffres, pour dérisoires qu'ils paraissent, n'en représentent pas moins un progrès! En outre ces ouvrages ont paru chez des éditeurs parisiens d'inégale importance mais jouissant tous d'une indéniable notoriété: Calmann-Lévy, Belfond, Gallimard, le Seuil et Julliard. Le spectre de l'éditeur obscur et insolvable, préoccupé seulement de toucher une subvention et acceptant pour cette raison des titres néerlandais - épouvantail que W.F. Hermans se plaît à agiter - semble désormais s'éloigner. Ici aussi, il y a progrès: dans les années soixante-dix, une série de titres remarquablement choisis et souvent très bien traduits, entre autres par Mme S. Margueron, a disparu sans laisser de trace parce que leur éditeur ne s'était pas donné les moyens de s'imposer sur le marché. J'emploie à dessein ce langage commercial: un livre est aussi un produit, une marchandise. Libre à nous de nous en affliger; sachons au moins en tenir compte. La carrière d'un livre, aujourd'hui, dépend des grands médias et doit être soutenue par une campagne de promotion énergique. Malgré les difficultés (et quelques déconvenues), c'est sur ce terrain que les succès les plus notables ont été remportés. La présentation dans la presse française d'oeuvres néerlandaises a cessé de paraître exceptionnelle et l'on voit certains journalistes - comme Nicole Zand dans Le Monde, Laurent Lemire dans La Croix, Claude Prevost dans L'Humanité, Françoise de Martinoir dans la Quinzaine Littéraire - ‘suivre’ régulièrement les oeuvres venues de Flandre et des Pays-Bas. Reste à savoir comment ces oeuvres sont perçues: en passant d'une culture à l'autre, elles subissent nécessairement une sorte de ‘brouillage’ qui en modifie plus ou moins le sens et la portée, en affaiblit - ou parfois en amplifie - le retentissement. Je voudrais essayer de cerner ce phénomène à propos de six publications récentes. On pourrait les classer en quatre catégories, qui se recoupent Septentrion. Jaargang 15 d'ailleurs en partie: la ‘postérité d'Anne Frank’, les best-sellers, les prix littéraires et les classiques(4). En 1983, le Mercure de France publiait Années d'enfance, la traduction de Kinderjaren de Jona Oberski. Ce court récit - une centaine de pages de petit format - qui n'avait guère attiré l'attention lors de sa sortie aux Pays-Bas en 1978, a entamé depuis une carrière internationale brillante: il avait déjà été traduit en plusieurs langues lorsqu'il éveilla l'intérêt d'un éditeur français (qui le lut en allemand!).