ACCOUPLÉE AUX CYBORGS LES ÉPOUSES : LA COLONIE, LIVRE 2

GRACE GOODWIN À P R O P O S D E G R A C E G O O D W I N :

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Tous les livres de Grace peuvent se lire en tant que romans à part entière. Ne vous attendez pas à des « Ils-vécurent-heureux-et-eurent-beaucoup- d’enfants ». Il s’agit de mâles Alpha, et PAS de gros bêta. (Vous vous en apercevrez vite.) Mais attention... les héros sont canon et les scènes d’amour torrides. Vous êtes prévenus... TABLE DES MATIÈRES

Accouplée aux Cyborgs Chapitre Un Chapitre Deux Chapitre Trois Chapitre Quatre Chapitre Cinq Chapitre Six Chapitre Sept Chapitre Huit Chapitre Neuf Chapitre Dix Chapitre Onze Chapitre Douze Chapitre Treize Chapitre Quatorze Chapitre Quinze Chapitre Seize Chapitre Dix-Sept Épilogue Ouvrages de Grace Goodwin (français) Books in English by Grace Goodwin Contacter Grace Goodwin À propos de Grace A C C O U P L É E A U X C Y B O R G S

L’agente du FBI Kristin Webster a passé les huit dernières années à traquer et à faire tomber les pires ordures. Elle a vu trop de choses pour se croire capable de faire confiance à un homme humain un jour, mais la perspective de trouver le partenaire parfait grâce au Programme des Épouses Interstellaires de la Coalition la convainc de passer le test pour être appairée à un compagnon extraterrestre. Elle n’est pas accouplée à un mâle venu d’une planète lointaine, mais à deux guerriers prillons de la Colonie. Et lorsque des guerriers se mettront à disparaître, Kristin prendra les choses en main.

Les Capitaines Hunt et Tyran ont attendu une compagne pendant trop longtemps pour la laisser mettre sa vie en péril en combattant le mal. Mais leur petite humaine n’en fait qu’à sa tête. Ils sont déterminés à l’apprivoiser, la revendiquer, la garder en sécurité... à tout prix. Mated To The Cyborgs: Copyright © 2017 by Grace Goodwin

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Publié par Grace Goodwin as KSA Publishing Consultants, Inc.

Dessin de couverture 2019 par KSA Publishing Consultants, Inc. Images/Crédit Photo : Hot Damn Stock; BigStock: forplayday

Note de l’éditeur : Ce livre s’adresse à un public adulte. Les fessées et toutes autres activités sexuelles citées dans cet ouvrage relèvent de la fiction et sont destinées à un public adulte. Elles ne sont ni cautionnées ni encouragées par l’auteur ou l’éditeur. C H A P I T R E U N

ristin Webster, Centre de Préparation des Épouses K Interstellaires, Terre

Lorsque je sentis le contact d’un sexe... là, je me figeai, le souffle coupé. Mon premier réflexe fut de paniquer. Comment savait-il ? Je n’avais jamais révélé mon secret à personne. Jamais. Le vouloir à cet endroit, qu’il m’étire, qu’il m’emplisse... C’était mal. Tellement mal. Oh, je savais que les mecs aimaient la sodomie, à en croire les films pornos. Et j’en savais beaucoup trop sur le porno après avoir travaillé pendant trois ans pour le département du FBI qui luttait contre le trafic d’êtres humains —mais l’on ne m’avait jamais demandé d’essayer. On ne m’avait même jamais pénétré là par accident. Pas même un oups, j’ai raté ton vagin et je me suis retrouvé entre tes fesses. Au lit, j’étais très conventionnelle, et je n’avais jamais avoué ce que je voulais vraiment à personne. J’avais toujours eu peur de le faire. Jusqu’à aujourd’hui. Aujourd’hui, je sentais un sexe qui se pressait contre mon entrée de derrière, et j’avais envie qu’il m’ouvre et qu’il se glisse en moi. Qu’il s’y glisse profondément et qu’il me baise. Qu’il m’étire. Qu’il me fasse un peu mal. Son membre était plus gros que tous ceux avec lesquels j’avais pu m’amuser jusqu’à présent, plus gros que je l’avais imaginé. Et il était en train de me pénétrer. Là. Contre toute logique, tout bon sens, j’avais envie qu’il se dépêche. Qu’il s’enfonce profondément et qu’il m’emplisse, qu’il m’ouvre jusqu’à ce que j’implore sa pitié. Qu’il me baise d’une façon que je n’avais jamais osé demander à aucun autre homme. Jamais. Pourquoi ? Parce qu’un sexe énorme m’étirait déjà le vagin. Mais un sexe n’était pas suffisant. Pas pour moi. Pas pour cette cochonne de Kristin. J’étais une vilaine fille. Et personne ne le savait. Personne ne s’en doutait. Mais bon sang, j’avais vraiment envie d’être une vilaine fille... Je voulais qu’il me tire les cheveux et qu’il me pousse à le supplier, qu’il me morde jusqu’à ce que j’aie mal et qu’il me pince les tétons jusqu’à ce que ça brûle. Et tous ces désirs étaient si profondément enfouis en moi que je ne les avais jamais admis. Pas une seule fois. Y compris à moi-même. Mais la moi du rêve s’en fichait. Elle désirait. Elle était parfaitement à l’aise entre ces deux corps masculins puissants. Elle n’avait pas peur de demander ce qu’elle voulait. D’admettre qu’elle voulait autre chose que le va- et-vient ordinaire en missionnaire dont la plupart des gens se contentaient. Quelque part, bien enfoui, elle savait qu’ils s’occuperaient bien d’elle. Qu’ils lui donneraient tout ce qu’elle voulait. Qu’ils la feraient crier. J’avais envie de les implorer. De leur faire confiance. De me lâcher. De me rendre. C’était un rêve. Forcément. Je n’avais jamais participé à un véritable plan à trois. Pas Kristin Webster, l’agente du FBI coincée. Les hommes avaient peur de moi, ou ils pensaient que j’étais trop dure, trop froide, trop désabusée par ce que j’avais vu sur le terrain pour vouloir être dominée au lit. Ils avaient tort. Tellement tort. Mais ce que je vivais en cet instant n’avait pas l’air d’un rêve. Non, ça semblait réel. La peau chaude de l’homme sous moi — je le chevauchais comme une cow-girl —, son sexe épais qui m’emplissait le vagin si pleinement, frottant des endroits en moi qui s’éveillaient pour la première fois. Était-ce mon point G qu’il atteignait ? Je gémis lorsque son gland l’effleura, encore et encore. Mon clitoris frottait contre lui à chacun de ses coups de reins. Profondément, si profondément qu’il tapait contre le fond. Je me cambrai et fis en sorte de le prendre au maximum. Mes mains se pressèrent contre les draps soyeux au-dessus de ses épaules, frais contre ma peau brûlante, et je m’offris à l’homme placé derrière moi. Mon corps le suppliait, lui disait ce que je ne pouvais exprimer alors que j’écartais davantage les genoux et que je contractais les muscles en espérant attirer son attention. Nous étions glissants, et je savais que nous étions enduits d’une huile quelconque à l’arôme puissant et exotique. Entêtant. Cette odeur se mêlait à celle du sexe, de la peau et de l’homme. Mes hommes. Leurs odeurs uniques m’étaient familières, à moi et à ce corps, et elles m’emplissaient la tête de désir, de souvenirs de rencontres passées, d’orgasmes. De plaisir. Ils me submergeaient de plaisir. Deux grandes mains étaient sur mes hanches pour me guider, me faire bouger selon les désirs de l’homme qui se trouvait sous moi. Une deuxième paire de mains vint jouer avec mes tétons. Ils étaient durcis, si sensibles que je me contractais à chaque pincement. Depuis quand mes tétons étaient-ils directement reliés à mon vagin ? Avec une caresse délicieuse, je gémis. — Je vais jouir, m’écriai-je. Je ne reconnaissais pas ma voix. Qui était cette femme déchaînée ? Je n’aurais pas pu me caresser le clitoris même si je l’avais voulu, car je n’en avais pas la permission, et cela ne faisait qu’attiser mon désir. Mon excitation. Je savais que mes compagnons ne me laisseraient pas faire. Je savais que mes orgasmes leur appartenaient. J’ignorais comment je savais cela. C’était un rêve. Un rêve étrange, torride et incroyable. Je ne bougeai pas, et je n’en avais pas envie. Je voulais qu’ils terminent ce qu’ils avaient commencé. Je voulais qu’ils m’ouvrent complètement et qu’ils prennent tout ce qu’ils voulaient, jusqu’à la dernière goutte de plaisir et de contrôle. Je voulais leur appartenir, totalement. Sans limites. Sans la moindre règle. Juste moi... et eux. À moi. Ils étaient à moi. La férocité de cette pensée me poussa à m’enfoncer sur le sexe de mon compagnon et à me tortiller, en frottant mon clitoris contre lui, à la recherche de ce que je voulais. Je n’avais plus toute ma tête. J’avais besoin de jouir. Il fallait qu’ils me laissent faire. Une main s’abattit sur ma fesse droite avec un claquement qui résonna dans la pièce. Cela me fit me contracter sur le membre qui me pénétrait et me propulsa davantage vers l’orgasme. — Ne jouis pas, compagne, dit-il en abattant à nouveau sa main sur ma fesse, le claquement comme une drogue pour mes sens en émoi. Pas avant que je sois entre tes fesses et qu’on te revendique ensemble. Tu n’en jouiras que plus fort. Ce sera encore mieux. Je secouai la tête, perdue. Je n’avais pas envie d’attendre. Je le voulais tout de suite. Il me fessa à nouveau. Une exclamation m’échappa. Ça faisait mal, mais cette douleur se transforma bien vite en chaleur. Je souris alors que je frissonnais, l’effet de son geste à l’opposé de ce qu’il avait voulu. — Si tu continues à faire ça, je vais jouir, lui dis-je en léchant mes lèvres sèches. J’entendis des rires rauques. — Quelle vilaine fille. Ces mots étaient des compliments. Le sexe se pressa plus fort contre mon entrée de derrière, l’huile qui nous enduisait rendant la pénétration aisée. Je m’étais attendue à ressentir de la douleur — un sexe de cette taille n’était-il pas censé faire mal ? — mais non. Je poussai simplement un petit grognement lorsque son gland dépassa l’anneau musclé qui avait tenté de le garder à l’extérieur. Pleine à craquer. Je n’avais jamais rien ressenti de tel. Je m’écroulai sur le torse de mon compagnon, me satisfaisant de le laisser me prendre, me baiser, m’aimer. Rien ne pourrait les empêcher de me revendiquer. Je n’avais pas l’intention d’essayer. C’était tellement bon. Ils bougèrent et je poussai un cri, la sensation de leurs deux sexes impossible à ignorer. J’étais incapable de me retenir. J’étais comblée. Mon orgasme monta et ma chatte esquissa un spasme, mais l’homme derrière moi gronda et ils arrêtèrent de bouger. — Non. Pas encore. Pas sans notre permission. Ils restèrent parfaitement immobiles alors que mon corps s’éloignait du précipice et que ma conscience de ces hommes et de la pièce me revenait. J’entendais leurs respirations saccadées, sentais leur emprise sur moi, leurs membres en moi. Je sentais tout, et tout se transformait en une boule de lumière chaude parfaite qui était prête à exploser. — Pitié, pitié, continuez. Pitié, les suppliai-je en tentant de bouger les hanches, de frotter mon clitoris contre l’homme que je chevauchais. — Pas encore, compagne. J’allais perdre la tête. Chacune de mes terminaisons nerveuses était éveillée, ma peau me picotait, mon corps si sensible que je devais lutter pour trouver mes mots, pour forcer mes lèvres à les prononcer afin de pouvoir les supplier : — Pitié, je ne peux pas attendre. — Alors nous allons dire les mots maintenant. — Faites quelque chose, geignis-je. Des larmes me roulèrent sur les joues, le seul soulagement qu’il m’était permis d’obtenir en cet instant suspendu entre eux, conquise. Possédée. — Acceptes-tu notre revendication, compagne ? demanda l’homme derrière moi, sa voix douce et grave. Il parlait très clairement, malgré le fait que nous étions en pleine partie de jambes en l’air et que son sexe était dur comme du bois à l’intérieur de moi. — Te donnes-tu librement à moi et à mon second, ou souhaites-tu choisir un autre compagnon ? — Oui ! Je me donne à vous !m’exclamai-je. J’avais la respiration saccadée alors que je m’habituais à avoir deux sexes en moi. Je savais que ce n’était pas le mot que j’étais censée dire, mais mon vagin se contracta une nouvelle fois, et je fus incapable d’en dire plus. Je n’arrivais pas à me concentrer. — Dis les mots, compagne, et ensuite, nous bougerons. Nous te baiserons comme tu le souhaites. J’humectai mes lèvres sèches. Si je voulais qu’ils me prennent, qu’ils me donnent ce que je voulais, il fallait que je me concentre, au moins pendant quelques secondes. C’était important. La revendication. La moi du rêve savait que c’était capital. Qu’il s’agissait de vœux sacrés, éternels. Heureusement, elle savait quoi dire. — J’accepte votre revendication, guerriers. Une fois mes vœux prononcés, mes compagnons grognèrent, arrivés au bout de leurs limites. Je réalisai soudain que je n’étais pas la seule à me contenir. — Alors nous te revendiquons selon le rite du nom. Tu nous appartiens, et nous tuerons tout guerrier qui osera te toucher. — Que les dieux en soient témoins et vous protègent, fit l’assistance en chœur. Nous n’étions pas seuls ? Oh, Seigneur. Et ces voix ? Elles étaient graves. Des hommes. Et il y en avait beaucoup. Mes parois internes se contractèrent alors que je découvrais que l’on m’observait. J’avais un sexe dans le vagin et un autre entre les fesses, j’étais nue et suppliante, et on nous regardait ? Une partie de moi, la fille sage et coincée, protestait. Mais la moi du rêve s’en fichait. C’était trop. Encore une première — je n’avais jamais pensé que l’exhibitionnisme était sexy— et le fait que d’autres personnes soient témoins de notre désir sans pouvoir me toucher me plaisait. Si j’avais su que j’étais une telle cochonne, j’aurais cherché à le faire avec deux hommes bien avant. Une main se posa sur mes fesses alors que les deux membres glissèrent hors de moi avant de me pénétrer à nouveau, m’emplissant complètement. Leurs coups de reins devinrent puissants et rapides pendant que je criais de plaisir et de douleur. — Personne d’autre ne te donnera jamais ça, gronda l’homme derrière moi en me tirant les cheveux en arrière. Il me força à le regarder par-dessus mon épaule et m’embrassa avec force tandis que l’homme que je chevauchais me caressait les tétons. Avais-je parlé à voix haute ? Sa langue s’enfonçait aussi profondément que son sexe, vite et fort et sans pitié. Un cri monta dans ma gorge alors que mon corps se crispait autour d’eux, et la douleur que j’avais ressentie en me retenant était sur le point d’exploser en moi. Il mit fin à notre baiser et me mordilla l’oreille. — Jouis, compagne. Maintenant. En entendant son ton dominateur, en sentant la brûlure de ses fessées et de leurs sexes enfouis en moi, je me laissai aller. Je criai et me cambrai alors qu’ils me maintenaient entre leurs corps. Mes muscles se contractèrent puis se relâchèrent, encore et encore, se rendant au plaisir qu’ils me donnaient. Mes paumes se pressèrent contre la peau chaude du torse de mon compagnon, et mes doigts s’enfoncèrent en lui alors que ma chatte se resserrait autour de lui comme un poing. Les hommes se mirent à bouger plus vite, sans relâche, alternant les mouvements, laissant mon plaisir durer jusqu’à ce que j’aie le souffle coupé et que j’explose à nouveau, la main de mon compagnon dans mes cheveux me maintenant comme un étau, un roc. Je ne pouvais pas me libérer, ne pouvais échapper à leur contrôle, ne pouvais rien faire à part accepter leurs coups de reins dominateurs pendant qu’ils me revendiquaient avec une avidité qui décuplait la mienne. Je me laissai de nouveau emporter, si près du but, mon corps pas encore satisfait, et je gémis alors que je les sentis durcir et gonfler, me remplir à ras bord, avant de jouir. Leur semence chaude m’emplit, m’enduisit et déborda. Nous ne faisions plus qu’un, unis, et c’était moi qui avais accompli ça, qui avais créé cette famille. Ils m’appartenaient. Le compagnon qui se trouvait derrière moi me lécha la nuque, goûtant la moiteur que leurs attentions avaient fait naître chez moi. — Bonne fille, tu as bien montré à tout le monde à quel point tes compagnons te donnaient du plaisir. Tu nous appartiens. Tu nous veux, tu as besoin de nous, tout comme nous avons besoin de toi. Je sentis l’homme qui se trouvait sous moi s’asseoir, ses muscles puissants se contractant sous mes paumes. Sa bouche s’écrasa sur mes lèvres dans un baiser ardent alors que je sentis l’homme derrière moi me mordiller l’oreille, le cou, l’épaule. La douleur me fit relever les hanches, et je me glissai à nouveau sur eux, prenant leurs sexes avec profondeur alors que je me rendais complètement, coincée entre eux. Adorée par eux. — Compagne, répétèrent-ils encore et encore. Aucun ne se retira. Aucun ne perdit son érection. Je savais que nous n’avions pas terminé. Nous baiserions à nouveau, et tout ce que je pouvais dire, c’était... — Pitié. Je voulais qu’ils se dépêchent. Qu’ils bougent. Qu’ils me mordent. Qu’ils me donnent la fessée. Qu’ils me baisent comme jamais. J’étais toujours à bout, mon appétit pour eux loin d’être rassasié. — Pitié, dépêchez-vous. — Mademoiselle Webster. Cette voix était agaçante, et elle n’appartenait pas à mes compagnons. Je n’y prêtai pas attention et me concentrai plutôt sur les corps chauds qui m’entouraient. J’avais besoin de plus. Pourquoi ne bougeaient-ils pas ? Ne parlaient-ils pas ? Ne me baisaient-ils pas ? Ne me revendiquaient-ils pas ? Ne me faisaient-ils pas ressentir ? — Pitié, suppliai-je encore. Allez-y. Tous les deux. — Mademoiselle Webster ! Ce n’était pas une voix d’homme qui me parlait à présent, mais celle d’une femme, sonore et pleine d’une intensité qui n’avait rien à voir avec le sexe. Ou les orgasmes. Ou les sexes qui m’avaient pénétrée. Non. Non. Non. Je luttai pour m’accrocher à eux, à ce plaisir, mais mes compagnons s’effaçaient, comme si je me réveillais d’un rêve. Un rêve super torride. J’ouvris les paupières et clignai des yeux. Deux fois. Des murs d’un blanc immaculé. Une blouse d’hôpital pas sexy pour un sou qui frottait contre mes tétons sensibles. Mes bras attachés aux accoudoirs alors que je m’asseyais sur un siège équipé de drôles d’instruments et de détecteurs fixés à mon corps et à ma tête. J’étais nue sous la blouse, et le siège dur sous mes fesses était trempé par mon désir. La gardienne Égara, avec ses cheveux bruns, ses yeux pleins de gentillesse et son air sévère me regardait comme si j’étais une bête de foire. Oh. Mon. Dieu. C’était gênant. Seigneur, parvenait-elle à le sentir ? Percevait-elle l’odeur du sexe sur moi ? Qu’allait-elle penser de moi ? Étais-je censée être excitée à ce point ? J’en doutais. Je devais être une sorte d’anomalie. La pauvre petite Kristin, qui n’arrivait pas à faire confiance aux hommes. Qui n’avait pas eu le moindre rencard en trois ans. Qui, quand elle voyait un homme sur son téléphone, pensait immédiatement qu’il regardait des photos pédopornographiques, qu’il engageait des prostituées, ou qu’il commettait l’un des innombrables délits qu’elle avait vu les hommes commettre. Si j’étais au Centre de Préparation des Épouses Interstellaires, c’était pour une bonne raison. J’en avais trop vu. J’avais besoin d’un nouveau départ. Et j’arriverais peut-être à mettre mon cerveau en sourdine et à m’amuser au lit avec un extraterrestre, un type qui je le savais, était honorable et qui m’aurait été attribué par un système de sélection perfectionné. Les protocoles d’accouplement du Centre faisaient passer les sites de rencontre pour des outils préhistoriques. Je poussai un soupir et regardai la gardienne d’un air hébété. Alors, je ne venais pas de faire un plan à trois avec des hommes bien montés face à une pièce pleine de témoins. Non, je me trouvais au centre de test des Épouses Interstellaires. J’étais attachée à un siège et je venais de supplier la gardienne Égara de me baiser. — Vous pouvez me transporter tout de suite, pour que je n’aie plus jamais à vous regarder dans les yeux ? demandai-je. Mes poignets étaient attachés à un siège semblable à une chaise de dentiste, alors je ne pouvais même pas me cacher le visage. En fait, même mes fesses n’étaient pas couvertes avec cette fichue blouse d’hôpital ouverte dans le dos. Je me tortillai les hanches. Mon sexe était toujours gonflé par l’excitation et l’orgasme, j’aurais juré que je sentais toujours les membres des hommes en moi. Mais mon esprit luttait contre ce que mon corps ressentait. Il n’y avait pas de membres. Pas d’hommes sexy qui me tiraient les cheveux, qui me pénétraient et qui me faisaient jouir sur commande. Au lieu de cela, la gardienne était menue, avec des cheveux bruns relevés sur la nuque dans un chignon strict. Son uniforme rouge portait l’insigne du Programme des Épouses Interstellaires sur la poitrine, et elle avait l’air gentille, mais aussi professionnelle. — Je vous assure que j’ai entendu pire, dit-elle. J’écarquillai les yeux. — Je n’ose même pas imaginer ce que les autres femmes ont pu dire. Elle se détourna et alla s’asseoir à la table qui me faisait face, avant de passer les doigts sur sa tablette. Durant une minute, elle resta silencieuse, puis elle leva les yeux vers moi et sourit. — D’après ce que vous avez dit, il me semble que vous aviez deux hommes dans votre rêve. Vu la façon dont vous rougissez, j’ai raison. Je ne dis pas un mot. J’avais envie de disparaître dans un trou de souris, ou de me téléporter sur une autre planète. — Vous avez été accouplée à un guerrier de Prillon Prime. Félicitations. — Ça semble beaucoup vous enthousiasmer, répondis-je. J’avais les mains moites, et rien pour les essuyer. — Je sais d’expérience que les mâles prillons sont très virils. Possessifs. Dominateurs. Oui, ça ressemblait bien aux hommes de mon rêve, et je ne me souvenais même pas de leurs visages. Seulement de leurs sexes. — D’expérience ? Vous avez été accouplée ? demandai-je. Son visage se fit moins enthousiaste. — Oui, mais c’était il y a très longtemps. Grâce aux brochures du Programme, je savais que les accouplements duraient toute la vie, au moins après la période d’essai de trente jours. Cela signifiait que quelque chose de terrible avait dû arriver aux deux compagnons de la gardienne, si elle était de retour sur Terre. — Vous acceptez votre accouplement ? demanda-t-elle ensuite. Avais-je envie de rester sur Terre et de trouver un homme ? Certainement pas. Mon travail, qui consistait à pourchasser des agresseurs sexuels, m’empêchait de sortir avec des hommes sur Terre. Ce qu’ils faisaient aux femmes, et pire, aux enfants, me poussait à tous les éviter. Était-ce injuste ? Oui. Il y avait des hommes bien, mais je ne voulais pas perdre mon temps à faire le tri. Travailler pour le FBI m’avait confrontée aux pires criminels de la société. Je savais que j’étais désabusée, froide et méfiante. J’avais dû me construire un mur de glace autour du cœur pour survivre. Les femmes et les enfants que j’avais aidés n’avaient pas besoin que je sois molle ou en manque d’affection. Ils avaient besoin que je sois dure, sans pitié et vicieuse, comme les criminels que j’avais passé ces dernières années à poursuivre. Et j’avais bien joué mon rôle, mais désormais, j’étais brisée. Non, il me fallait un nouveau départ sur une planète où je ne regarderais pas chaque homme en les imaginant capables du pire. Pourquoi perdre mon temps à tenter de trouver un homme qui ne soit pas un connard alors que je pouvais obtenir l’homme parfait — ou les hommes parfaits — grâce à un test d’accouplement à l’efficacité prouvée ? Et visiblement, j’avais deux compagnons. Seigneur, je n’avais jamais envisagé cette possibilité jusqu’à présent. Pourquoi l’aurais-je fait ? Je ne voulais même pas d’un homme terrien, et encore moins de deux. — Je suis accouplée à un guerrier prillon, mais j’obtiens deux compagnons ? Elle inclina légèrement la tête sur le côté. — Oui, vous êtes accouplée à un guerrier prillon, mais ils revendiquent toujours leur compagne avec leur second. Les guerriers de Prillon Prime sont connus pour leurs combats contre la Ruche au fin fond de l’espace. Le nombre de victimes est élevé, et ils se choisissent un second pour protéger leur compagne et s’occuper des enfants au cas où l’impensable se produirait. — Au cas où ils seraient tués au combat ? Les yeux gris de la gardienne étaient tristes. — Oui. Ils ne laisseraient jamais leur famille sans défense. Tous les guerriers prillons se choisissent un second, un mâle qu’ils respectent et à qui ils font confiance. Ce second guerrier est tout aussi dévoué à la compagne que le compagnon principal. Selon les lois de Prillon Prime, vous serez accouplée aux deux. — Comme dans mon rêve. Je me souvenais qu’il avait dit « notre revendication ». — Oui, comme dans le rêve, dit-elle. Quand vous aurez rencontré vos compagnons, vous aurez trente jours pour accepter leur revendication ou leur dire que vous souhaitez être accouplée à un autre. Accepter leur revendication ? Oui, je savais ce que ça impliquait, et je me tortillai déjà. — Acceptez-vous cet accouplement ? demanda-t-elle, sa voix soudain plus officielle. Lorsque vous aurez accepté cet accouplement, vous deviendrez une citoyenne officielle de Prillon Prime. Vous ne reviendrez pas sur Terre, Kristin. Allais-je accepter cet accouplement ? Si je disais oui, je serais transportée sur Prillon Prime, à plusieurs années-lumière de là. Ce n’était pas un simple voyage en Italie. Mais n’était-ce pas justement ce que je voulais ? Je m’étais portée volontaire. J’avais enfilé cette blouse ridicule et je m’étais soumise aux tests. J’avais aimé chaque minute de ce rêve. J’en voulais plus. Je voulais me sentir comme cette femme, sauvage, dévergondée et libérée. — Oui, répondis-je. Il n’y avait plus de retour en arrière possible, désormais. — Oui, répétai-je. J’accepte cet accouplement. Elle hocha la tête une fois, et ses doigts pianotèrent sur la tablette. — Pour respecter le protocole, veuillez énoncer votre nom. — Kristin Weber. — Êtes-vous, ou avez-vous déjà été mariée ? — Non. — Des enfants biologiques ? — Non. — Je suis tenue de vous informer, même si je l’ai déjà mentionné, que vous aurez trente jours pour accepter ou refuser le compagnon qui vous a été choisi par le protocole d’accouplement du Programme des Épouses Interstellaires. Je pris une grande inspiration, puis j’expirai. Fini les enquêtes sur les crimes sexuels. Fini les ordures. Fini le FBI. Fini la Terre, même. Exactement ce que j’avais voulu. — Alors je vais sur Prillon Prime, j’imagine. Quand est-ce que j’aurai mes hommes ? À cette idée, je ne pus m’empêcher de sourire. Ça semblait fou. C’était fou. La gardienne Égara regarda de nouveau sur sa tablette, pianota encore, et leva les yeux. Elle me lança un sourire éblouissant. — Et pourquoi pas tout de suite ? Vos compagnons résident sur une planète prillonne secondaire appelée la Colonie. Vous avez été accouplée à un guerrier avec une compatibilité de quatre-vingt-dix-huit pour cent. La Colonie ? Jamais entendu parler, mais peu importe. Ça ne changeait rien. — Et l’autre compagnon assure les deux pour cent restants ? demandai-je. Elle fit un pas en arrière, et mes sarcasmes la firent rire. — On peut dire ça comme ça. Avec un dernier tapotement sur sa tablette, le mur derrière moi s’ouvrit, et une lumière bleue s’en échappa. Je tournai la tête, mais je ne pouvais rien voir d’autre que la lueur colorée. — Ne paniquez pas. Lorsque vous vous réveillerez, Kristin Webster, votre corps aura été préparé pour les coutumes et les exigences de vos compagnons. Ils vous attendront. Elle semblait réciter un discours, ce qui signifiait que je n’étais pas la seule femme à avoir paniqué. Deux grands bras métalliques avec des aiguilles gigantesques semblaient se diriger vers ma tête. — Attendez une seconde, dis-je. Qu’est-ce que c’est que ces trucs ? Je tentai de me dégager, sans succès, car j’étais attachée à ce foutu siège. — Ils vous inséreront des neuroprocesseurs qui se fondront avec votre centre du langage pour vous permettre de parler et de comprendre n’importe quelle langue. Restez calme, et vous serez bientôt en présence de votre compagnon. Je retins mon souffle quand les aiguilles s’approchèrent, finalement ça ne me fit pas si mal que ça. Quand les bras robotiques se furent rétractés, mon siège glissa en arrière, et je fus plongée dans un bain bleu brillant. J’expirai et me détendis, car toutes mes peurs semblèrent se dissiper. — Kristin Webster, vous allez rejoindre votre guerrier prillon. Je ne prends pas parti, car tout le monde est envoyé sur la planète qui leur correspond parfaitement, mais j’ai un faible pour ces mâles prillons. Je sais que vous serez heureuse, comme je l’ai été un jour. Je soupirai et fermai les yeux. Heureuse ? C’était mon plus grand rêve. — Votre transport aura lieu dans trois... deux... un... Tout devint noir. C H A P I T R E D E U X

apitaine Hunt Treval, La Colonie, Base 3, Salle de Traitement des Nouveaux Arrivants C L’impatience me dévorait, me poussant à gigoter sur mon siège. À l’autre bout de la table, nos nouveaux arrivants me regardaient avec un mélange de rage et de désespoir. Ils tentaient de dissimuler leur douleur, mais leur colère ? Leur colère était claire dans leurs corps crispés, dans leurs lèvres pincées, dans leurs regards sans joie. C’étaient des guerriers de la Flotte de la Coalition, qui avaient survécu à la capture et à la torture aux mains de notre ennemie, la Ruche, et qui désormais, se retrouvaient ici. Personne n’avait souhaité se retrouver ici. La fureur était un sentiment qui était familier aux guerriers. Et ceux qui étaient envoyés sur la Colonie avaient encore plus de raison que les autres d’être en colère. Je le savais. Nous le savions tous. Nous étions des parias. Abandonnés. Rejetés par les gens que nous nous étions battus pour protéger après avoir subi des tortures terribles aux mains de nos ennemis. Nous avions survécu, à peine, pour certains d’entre nous, mais on ne voulait plus de nous. Et c’était dur à accepter. Arriver sur la Colonie était la preuve de ce rejet, tout comme les changements dans nos corps étaient la preuve que nous ne serions plus jamais complets. La colère masquait beaucoup d’autres émotions, mais surtout la douleur. En tant que guerriers, nous étions de vrais durs à cuire. Nous n’étions pas du genre à pleurnicher. La plupart de ceux qui étaient passés par cette pièce au cours des deux dernières années — depuis que j’avais été chargé d’accueillir les nouveaux arrivants— auraient préféré être torturés plutôt que de pleurer. Ces quatre-là, visiblement, ne faisaient pas exception. — Je veux retourner sur ma planète. Le grand chef de guerre Atlan, un soldat gigantesque du nom de Rezz, me jetait un regard noir depuis sa chaise. Ses mains aussi grandes que des assiettes agrippaient puis relâchaient les accoudoirs de son siège, et je jetai un coup d’œil dans un coin de la pièce, où mon second, le Capitaine Tyran, se tenait avec deux pistolets à ions et un fusil tranquillisant. Je croisai son regard sombre, rien qu’un instant, une question dans les yeux. Tyran hocha la tête, son mouvement à peine perceptible. Il était prêt à tirer. Non pas qu’il ait besoin d’armes, même contre un Atlan. La Ruche avait amélioré les os de Tyran, ainsi que les groupes musculaires principaux de son corps. Il était fort, plus fort que toutes les créatures que j’avais vues, y compris les Atlans en mode bestial. Lorsque Tyran et moi avions été capturés ensemble, nous étions amis. Après ce que la Ruche nous avait fait, je savais que je ne ferais confiance à personne d’autre avec une compagne, et je lui avais demandé de devenir mon second. Nous n’avions plus besoin de cette confiance réciproque pour les combats. Avec un peu de chance, partager une compagne serait notre avenir, la chose la plus importante que nous accomplirions. Lorsque la première compagne avait été affectée à un membre de la Colonie, une femme terrienne nommée Rachel, j’avais été sceptique. Mais la regarder prendre l’un des nôtres dans ses bras alors qu’il rendait son dernier souffle m’avait fait changer d’avis au sujet du Programme des Épouses Interstellaires. Et mes sentiments à l’idée d’avoir une compagne avait changé également. Je voulais que les douces mains d’une femme caressent ma chair, me regarde avec autre chose que de la peur dans les yeux. Par les dieux, j’en avais vraiment envie, mais j’avais cru que mon exil sur la Colonie signifiait que je n’aurais jamais ce plaisir, que je n’aurais jamais de compagne, que je ne pourrais jamais partager une femme sexy avec Tyran. Mais l’arrivée de Rachel avait tout changé. Impatient, je m’étais fait tester le lendemain, Tyran le surlendemain. Et à présent, nous attendions et tentions de ne pas trop espérer. L’espoir était douloureux, et m’emplissait la poitrine d’un vide que l’alcool ou le travail ne parvenaient pas à combler. Chaque fois que je voyais Rachel—Dame Rone— avec ses compagnons, le gouverneur Maxime et le capitaine Ryston, cet espoir s’amplifiait. J’avais appris que l’espoir était une chose dangereuse. Il en fallait un peu pour survivre, mais s’il y en avait trop, la déception était cruelle. C’était un équilibre précaire avec lequel je vivais depuis mon arrivée sur cette planète. Mais des semaines avaient passé depuis mon test et celui de Tyran. Des centaines de guerriers de la Colonie avaient été testés, et aucune nouvelle compagne n’était arrivée. Ceux d’entre nous qui étaient coincés ici commençaient une fois de plus à croire que nous ne serions jamais accouplés. L’espoir déclinait. La colère valait mieux. Et le travail. J’avais trois guerriers de la Coalition face à moi, et un Chasseur d’Everis à glacer le sang qui même maintenant restait assis à bonne distance des autres. À en croire leurs regards, ils n’avaient aucun espoir, et c’était pour cela que Tyran gardait la main sur son pistolet à ions pendant qu’il montait la garde près de la porte. Le Chasseur, Kiel, avait été secouru dans une section différente du bâtiment de la Ruche, une section réservée à la reproduction. Il semblait plutôt inoffensif, ses cheveux bruns et sa peau pâle plus semblables à ceux d’un guerrier terrien ou trion. Mais il était loin d’être humain, les compétences de Chasseur de son peuple étaient effrayantes et inexplicables. Ils étaient comme des fantômes capables de voir dans la noirceur de l’espace. Rien ni personne ne pouvait se cacher d’eux. Kiel était notre premier Chasseur, et je ne savais pas trop ce que nous allions faire de lui. Seuls moi et le gouverneur Rone connaissions les détails des dossiers de ces hommes, mais penser à ce que ce fier Chasseur avait enduré me faisait frémir. Les Everiens étaient les assassins, les espions et les traqueurs les plus redoutables de la Flotte, ils formaient une grande partie de la section de recherche de la Coalition, et la Ruche, lorsqu’elle capturait un Chasseur, était absolument sans pitié. J’étais surpris que le Chasseur ait survécu. Kiel d’Everis devait avoir une volonté de fer. Une volonté indéfectible. Ce qui était très utile au combat, mais pas ici. Il fallait que ces hommes travaillent en équipe, qu’ils s’intègrent à notre société. Qu’ils aient l’espoir de pouvoir avoir une nouvelle vie. C’était mon travail, mon devoir, de m’assurer qu’ils y arrivent. Ces hommes avaient besoin d’un travail, d’un but dans la vie, d’un endroit où vivre et d’un nouveau groupe de frères d’armes pour les aider à se faire à leur nouvelle existence. La Colonie n’était pas un foyer. Ce n’était un foyer pour aucun d’entre nous. Même avec la présence de la compagne du Gouverneur, ce n’était pas suffisant. Cet endroit était une prison, notre dernière demeure, et nous le savions tous. Un jour avec des compagnes et des enfants, ça pourrait devenir un foyer pour nous tous. Mais en attendant... — Aucun d’entre nous ne rentrera sur sa planète, Chef de Guerre, dis-je. Je lui montrai mon œil droit, puis retroussai ma manche pour révéler mon bras et ma main gauche, et la teinte métallique qui se trouvait juste sous la surface de ma peau. Je ne portais jamais d’armure à ces réunions, choisissant plutôt un pantalon et une tunique civile à manches longues pour rappeler à ces guerriers que je n’étais pas en guerre contre eux. Je n’étais pas l’ennemi. Moi aussi, j’avais combattu, j’avais été fait prisonnier. J’avais été torturé. Je m’étais échappé. Avais survécu. Vécu. Les yeux de Rezz se posèrent sur mon bras, puis s’attardèrent sur la décoration cousue à la main qui bordait les coutures, avant de remarquer le collier d’accouplement que j’avais autour du cou. Son visage se renfrogna davantage. Ce regard insistant et son rictus dédaigneux en voyant mon collier ne firent rien pour améliorer mon humeur. Je le portais depuis trois mois, depuis le jour où j’avais subi les tests du programme des épouses. Le porter encourageait les autres à se faire tester, à leur montrer que j’avais bon espoir qu’une compagne arriverait. Que je lui appartenais déjà, où qu’elle se trouve dans l’univers. Alors que mon espoir déclinait, la présence du collier devenait une source de moqueries lors des repas. Mon optimisme faisait ricaner les autres. Certains doutaient même que j’aie passé les tests. Je me fichais de ce que pensaient ces abrutis. Je m’accrochais à ce foutu espoir. J’étais déterminé à être plus fort qu’eux. Je refusais de croire que cette vie solitaire était mon destin. Je refusais de retirer mon collier. Elle viendrait. Un jour. — Je ne resterai pas prisonnier ici, insista Rezz. — Vous n’êtes pas prisonnier, Chef de Guerre, dis-je. Je poussai un soupir et m’enfonçai dans mon siège, prêt au pire. Deux fois durant ces dix dernières années, une bête était arrivée et avait perdu le contrôle. Cela ne nous avait pas échappé, à moi et aux autres officiers de la Colonie qui assistaient à notre échange. Tyran n’était pas la seule personne à assurer la sécurité dans la pièce. Je préférais qu’il y ait trois guerriers par nouvel arrivant. Aujourd’hui, nous en étions loin. En comptant Tyran, il n’y avait que sept gardes — et aucun d’entre eux n’était Atlan. Si le chef de guerre Rezzer perdait son sang-froid et se transformait en bête, même avec la force de Tyran, nous serions sans doute obligés de tuer l’Atlan. Un acte que je préférerais éviter. À une époque, la perspective d’exécuter la bête m’aurait plongé dans un tourbillon de doute et de haine envers moi-même. De regret. De frustration, et j’aurais ressenti de la trahison. Mais il n’était pas le seul à devoir faire face à son arrivée sur la Colonie. Sa bête intérieure aussi le devait. C’était une lutte intérieure, et avec le chef de guerre Rezzer, j’ignorais qui gagnerait. Je savais comment il se sentait : Piégé. Il avait le sentiment d’avoir échappé à une prison pour en rejoindre une autre. J’étais passé par là avec Tyran, trois ans plus tôt. Et juste avant, nous avions passé trois jours terribles aux mains des Unités d’Intégration de la Ruche avant que l’équipe de reconnaissance de la Coalition nous sorte de là. Nous avions eu de la chance. Nous étions récupérables. Même si sur le moment, je n’avais pas eu l’impression d’être chanceux. À présent, la seule émotion qui me traversait, alors que je regardais Rezz lutter pour se maîtriser, c’était la résignation. Soit il perdrait le contrôle, soit non. Il n’y avait pas de demi-mesures. Et il n’avait pas tort. Même si techniquement, ce n’était pas une prison, aucun d’entre nous ne rentrerait chez lui. Jamais. Et bien que l’opinion générale dans les mondes de la Coalition soit que les guerriers de la Colonie ne pouvaient pas réintégrer la société sur leurs planètes d’origine, la vérité était pire — mais plus facile à accepter. La Flotte de la Coalition ne pouvait pas bloquer les transmissions de la Ruche à grande échelle. Ici, tous les guerriers étaient contaminés par des technologies de la Ruche qui étaient impossibles à enlever, pas si l’on voulait rester en vie. Nous n’étions en sécurité que sur la Colonie, car nous étions si profondément enfouis dans l’espace de la Coalition que la Ruche ne pouvait pas nous atteindre pour jouer avec notre cerveau et nous contrôler comme des marionnettes. Quelques implants expérimentaux étaient en train d’être testés. Nous testions un nouveau générateur de fréquences. Et Dame Rone, une scientifique experte dans le cerveau et la biologie, nous aidait à trouver de nouvelles façons de renforcer nos corps en prévision d’une attaque de la Ruche. Mais je savais que cela ne suffirait peut-être pas. Nos plus hauts dirigeants n’avaient pas envie que les citoyens de nos planètes sachent que nous avions du mal à arrêter la Ruche. C’était effrayant, et cela risquait de semer la panique. Nous étions la preuve de cet échec, et nous ne pouvions pas révéler ce cauchemar politique en regagnant nos planètes d’origine. La Flotte de la Coalition tenait à peine le coup, luttant pour repousser l’expansion de la Ruche dans l’espace contrôlé par la Coalition. Nous étions sur le point de perdre cette foutue guerre. Lorsque le Prince Nial était devenu le Prime de notre planète, il était devenu le chef de la Flotte de la Coalition. Prillon Prime était le premier monde à s’être opposé à la Ruche et avait recruté d’autres planètes, ainsi la Coalition était devenue plus grande. Nous nous battions depuis très, très longtemps. Des siècles. Lorsque le Prime Nial était arrivé au pouvoir, il était revenu sur la loi qui interdisait aux guerriers contaminés par la Ruche de regagner leurs planètes d’origine, parce qu’il était l’un d’entre eux. L’un d’entre nous. Cela avait mené à d’autres révélations... avait obligé l’IC, l’Intelligence Centrale, à dévoiler des vérités difficiles à avaler. Nous ne pouvions pas rentrer chez nous. Jamais. Aucun d’entre nous. Le Prime Nial était lui-même infecté par les technologies de la Ruche. Mais après son accession au trône, il avait eu un entretien avec l’IC, et il leur avait expliqué des choses, des choses que les membres de la Colonie savaient déjà : qu’il n’y avait aucun moyen de garantir qu’il serait capable de se contrôler si la Ruche lui ordonnait quelque chose. La technologie qui s’était fondue avec son corps obéissait toujours à son maître, et répondrait à son appel. Le Prime avait reçu un implant spécial pour contrecarrer la ruche, un inhibiteur de signal permanent destiné à l’immuniser du contrôle de la Ruche. Mais c’était expérimental. Et même si les inhibiteurs devenaient disponibles, la plupart des planètes de la Coalition refuseraient de lever le bannissement des guerriers contaminés. Nous représentions un risque trop important. Je comprenais. J’avais affaire à ces guerriers tous les jours. J’étais l’un d’entre eux, après tout. Espérer que les habitants de Prillon Prime me voient comme quelqu’un de normal était trop demander, même pour moi. Le Prime Nial faisait de son mieux, mais au final, la plupart des guerriers prillons de la Colonie, Tyran et moi inclus, avaient décidé de rester. Nous nous étions battus pour protéger notre peuple. Rentrer chez nous comme ça, même équipés de l’implant expérimental de l’IC, mettrait nos familles en danger et rendrait nos sacrifices, et la mort de tant d’amis, vains. Aucun d’entre nous ne voulait mener la Ruche jusqu’à eux, risquer de nous retourner contre eux et de perdre le contrôle. Alors nous restions dans la prison que nous nous étions créée. Nous espérions un répit, un peu de vie dans nos existences. Une compagne. — On dirait une condamnation à mort, grogna le chef de guerre Rezzer, et je vis sur son visage qu’il commençait à se transformer en bête, avant de reprendre une apparence normale. — Ils auraient dû me laisser crever dans cette grotte. — Je suis désolé, dis-je avant de lui montrer les guerriers qui se tenaient au garde à vous dans la pièce. Nous avons tous ressenti cela à notre arrivée. La pièce était assez grande pour accueillir au moins cinquante guerriers en armure. À onze, on se serait cru dans une grotte dans laquelle résonnait notre solitude. — Mais ça devient plus facile avec le temps, repris-je. Et la Colonie a commencé à recevoir des Compagnes du Programme des Épouses Interstellaires. Dès que vous serez installés, vous pourrez vous faire tester. — Non. L’Atlan se leva, et ses épaules se firent plus larges alors qu’il me grognait dessus. — Calme ta bête, Rezz, dit le guerrier prillon assis à côté de lui d’un ton nonchalant. Le Capitaine Marz faisait à peu près ma taille, et comme moi, ses cheveux, sa peau et ses yeux étaient dorés, une teinte pâle associée aux régions les plus froides de notre planète d’origine, Prillon Prime. Enfin ça, c’était avant que la Ruche ne le capture. À présent, son œil gauche avait une drôle de couleur argentée. La technologie de la Ruche avait également rendu sa chair argentée. La couleur entourait son œil, faisait le tour de sa tempe, avant de disparaître sous ses cheveux. C’était comme regarder dans un miroir, et c’était assez perturbant. Son dossier était ouvert devant moi, et je savais que sous son uniforme se cachaient d’autres cicatrices laissées par la Ruche. Comme pour nous tous. Même des cicatrices invisibles. C’était la raison de notre présence ici. Rezz fit tourner sa nuque et produisit une série de craquements lorsqu’il se rassit. Du coin de l’œil, je regardai Tyran s’adosser de nouveau au mur, et nous poussâmes tous un soupir de soulagement. Ces foutus Atlans et leurs bêtes étaient vraiment imprévisibles. La guerre que nous menions serait perdue sans eux sur le champ de bataille, mais ils n’avaient pas vraiment leur place à l’intérieur, quand nous parlions politique. Pas quand leurs bêtes menaçaient de perdre le contrôle en cas de colère ou de chaleurs. Avec Rezz, je suspectais qu’il s’agissait des deux. — Capitaine Marz, dis-je. Je vous ai affecté tous les quatre au Secteur 9. Le Prime Nial nous a ordonné de renforcer les fortifications autour des bases de la Colonie et de nous préparer à une expansion. Je gardai mon attention tournée sur le capitaine prillon. J’avais déjà vu ça. Je savais exactement ce qui était arrivé à ces guerriers. Ils ne se connaissaient peut-être pas avant leur capture, mais au cours de leur torture, le capitaine Marz avait pris les rênes ; les avait gardés soudés. Et à présent, le chef de guerre et l’autre Prillon assis face à moi, le lieutenant Perro, comptaient sur lui. Il était devenu le chef de leur groupe. C’était une bonne chose. Ces types allaient avoir besoin d’amis. D’amis, et d’un sens à leur vie. — On a besoin d’hommes pour effectuer ces fortifications. Le capitaine Marz hocha la tête, et nous ne prêtâmes plus attention au chef de guerre Rezzer, qui retrouvait doucement sa maîtrise de lui-même. Le Chasseur, Kiel, observait et attendait, comme le prédateur qu’il était. Il n’avait pas prononcé le moindre mot, mais j’étais persuadé qu’il savait où était placé chacun des gardes de la pièce, et quelles armes ils portaient. Il ne faisait pas partie du groupe du capitaine Marz, mais il fallait que ça change. Même un chasseur solitaire avait besoin de trouver une appartenance, une raison de se lever le matin. Et c’était le seul Everien de la Base 3. À ma connaissance, c’était le seul Chasseur à avoir survécu à une capture de la Ruche. Silencieux jusqu’à présent, le deuxième guerrier prillon, le lieutenant Perro, croisa les bras sur la poitrine. Ses bras étaient dénués d’implants de la Ruche, sa peau brune indemne. J’avais également consulté son dossier. Ses implants se trouvaient principalement dans sa nuque et sa colonne vertébrale, certains dans son cerveau. Si la Ruche parvenait jusqu’ici, son cerveau lui coulerait sans doute par les oreilles. Mais pour l’instant, ses yeux étaient vifs et limpides, d’une teinte cuivrée assortie à ses cheveux. — Et qu’est-ce qu’on est censés faire pendant ces soixante ou soixante- dix prochaines années, au juste ? Construire des murs ? Je suis pilote, et doué dans mon métier. Effectivement. Il était également insolent, et un peu incontrôlable. Ce qui avait sans doute causé sa capture... et ses souffrances sur les tables d’opération de la Ruche. — Je suis au courant de vos compétences. Chaque nouvel arrivant se consacre un moment à la construction. Ça aide à chasser le stress, et ça vous permet d’apprendre à connaître les autres. Ce n’est pas un endroit où l’on peut rester dans son coin. Durant votre acclimatation, vous serez évalués, et d’autres métiers seront envisagés. Nous conduisons des vaisseaux jusqu’aux autres bases, et nous avons besoin de pilotes. Mais la plupart des transports de biens ou de passagers se font grâce à la téléportation. Si les médecins estiment que vous pouvez piloter, vous serez peut-être affecté à une patrouille aérienne qui contrôle l’atmosphère extérieure de la planète. Mais comme vous êtes nouveau ici, il vous faut un temps d’adaptation. Un moment pour guérir. Vous n’êtes peut-être pas d’accord avec ça, mais pour l’instant, vous n’avez pas le choix. Aucun d’entre vous ne sera affecté aux zones importantes avant plusieurs semaines. Ou plus longtemps. Surtout si les autres guerriers ne les aimaient pas ou ne leur faisaient pas confiance. Mais ça, je le gardais pour moi. Pour leur donner un peu de ce fichu espoir, j’ajoutai : — Ensuite, tout est envisageable. Le capitaine Marz hocha la tête. — Très bien. J’imagine qu’on nous a également assigné des appartements dans la même zone. Dieux merci. C’était presque fini, et Marz prendrait le relais. Je le voyais dans ses yeux, son besoin de s’assurer que ses hommes soient protégés et bien traités. Au moins l’un d’entre eux comprenait les changements qu’ils devaient accepter. Il pourrait montrer l’exemple. Je me mis immédiatement à apprécier le capitaine, et je me promis de faire en sorte que son intégration se fasse vite. Avec les récentes attaques de la Ruche et la défection de l’un des nôtres, un médecin nommé Krael, j’avais besoin d’hommes sur qui compter. Des hommes honorables. Non pas que les autres ne le soient pas. Les trois autres guerriers avaient des dossiers irréprochables et avaient survécu au pire avec la Ruche. S’ils s’acclimataient correctement à leurs nouvelles vies, ils obtiendraient des postes importants. Sur la Colonie, nous estimions tout le monde, s’ils donnaient le meilleur d’eux-mêmes. Mais parfois, il y avait des traîtres. Krael avait apporté un transmetteur de la Ruche sur la Base 3, et les fréquences empoisonnées avaient rendu beaucoup de guerriers malades, y compris notre propre gouverneur, et avaient causé la mort du capitaine Brooks. C’était un guerrier terrien plein d’humour, malgré ce que la Ruche lui avait fait. C’était mon ami, et je voulais plus que tout mettre la main sur l’enfoiré qui l’avait tué. Qui l’avait détruit de l’intérieur. Je me tournai vers le Chasseur, Kiel. Ses compétences pourraient peut- être m’être utiles, finalement. — Vous êtes affecté à la même zone et au même travail, dis-je. — Bien sûr. Sa voix était imperturbable. C’était comme parler à un cadavre. Je voulais qu’il me contredise, qu’il sorte de sa réserve. Il ne surmonterait jamais ses souffrances et n’accepterait jamais sa nouvelle réalité s’il gardait tout sous cloche. Je me levai et roulai des épaules. Elles étaient tendues, et cela me donnait mal à la tête. Encore. Je n’avais jamais souffert de maux de tête auparavant — avant que la Ruche n’insère ses aiguilles et ses implants microscopiques en moi. À présent, ces douleurs m’assaillaient continuellement, me rappelant que je ne serais plus jamais le même. — Très bien. Voici Phin, un membre de mon équipe de sécurité, dis-je en montrant le garde d’un signe de tête. Il vous mènera à vos quartiers et vous fera visiter la Base 3. Votre première journée de travail commence dans dix- huit heures. Le capitaine Marz se leva, suivi par Perro, l’Atlan et le Chasseur alors que quatre membres de mon équipe ouvraient la marche le long du couloir. Les hommes étaient arrivés les mains vides, alors il ne leur faudrait pas beaucoup de temps pour s’installer et explorer la base. Nous n’avions pas beaucoup d’Atlans, et Kiel était notre premier Chasseur. Ils attireraient sans doute les foules et les défis dans l’arène. Je regardai Tyran évaluer le chef de guerre Rezzer du regard alors qu’il passait devant lui, et je sus que mon second pensait à la même chose que moi. Actuellement, Tyran était le champion en titre de lutte sur la Base 3. Je ne doutais pas une seule seconde que l’Atlan aurait sans doute envie de lui prendre son titre. Si le petit nouveau parvenait à battre mon second. Tyran ne lui faciliterait certainement pas la tâche. Je suivis le groupe jusqu’à la porte, et m’arrêtai à côté de Tyran alors que les nouveaux venus et leur escorte lourdement armée avançaient toujours. — Il va te casser en deux, mon pote. Comme une brindille. C H A P I T R E T R O I S

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H Tyran sourit, et dans ses yeux marron foncé brillait la lueur du défi à relever. Il était mon contraire dans bien des domaines, sa peau et ses cheveux plus sombres contrastaient avec les miens. Son amour pour la violence organisée était compréhensible, mais parfois, il n’arrivait pas à s’arrêter et il allait trop loin. Depuis notre capture, il était différent. Mais après tout, nous l’étions tous. Tyran, plus que les autres guerriers que je connaissais, attendait ces combats avec impatience. — Tu crois qu’il me reste combien de temps ? Je réfléchis. L’Atlan aurait entendu parler des arènes avant le dîner du lendemain. D’ici là, il se serait résolu à prendre la place de champion de Tyran. — Un jour, peut-être deux. — Excellent. Tyran rengaina ses armes et me suivit alors que je remontais le couloir. Nos bottes auraient dû résonner sur le sol dur, mais nous avions appris à nous déplacer en silence. Même Tyran, vêtu d’une armure complète, se déplaçait sans faire de bruit. Comparé à mon second, on me considérait comme quelqu’un d’avenant. Il fallait que je le sois, avec le travail que j’exerçais. Je ne pouvais pas faire peur aux nouveaux venus dès leur arrivée. Tyran avait une aura plus sombre. Nous étions amis avant notre capture, mais après ? Après, le silence de Tyran avait grandi, et je n’avais pas su comment le combler. Tout ce que je pouvais faire, c’était espérer que notre compagne le guérirait, à l’extérieur comme à l’intérieur. Impitoyable, précis. Il y avait une netteté dans les mouvements de Tyran, dans sa façon de combattre, que les autres mettaient des décennies à perfectionner. Cela avait un prix. Un esprit introverti, une intensité qui faisait peur aux autres. Surtout de la part d’un guerrier prillon. Mais je n’aurais choisi personne d’autre comme second. Je ne ferais confiance à personne d’autre pour prendre soin de ma compagne. — Tu as vu le gouverneur ce matin ? me demanda Tyran. — Oui. — Des nouvelles de Krael ? Mon sang se figea dans les veines lorsque je pensai au guerrier prillon qui nous avait tous trahis. Je serrai les poings en pensant à son manque d’honneur. Il nous avait trahi pendant longtemps, sans qu’on le sache. Ça nous avait tous mis sur les nerfs. Bien que nous ayons des règles à suivre pour que la Colonie reste civilisée, la population tout entière était composée de vétérans, d’anciens combattants, et nous étions partis du principe que l’honneur était plus important que tout. Nous avions appris à nos dépens que ce n’était pas toujours le cas, et depuis, nous étions devenus plus suspicieux, à mon grand dam. C’était déjà assez difficile comme ça de faire en sorte que les hommes gardent toute leur tête sans avoir à s’inquiéter en plus de traîtres potentiels. — Personne n’arrive à le trouver. Et aucune téléportation n’a été enregistrée. Soit il est toujours sur la planète, soit il s’est servi d’un vaisseau pour s’échapper. — Le gouverneur a mis un prix sur sa tête. — Ça ne suffit pas. J’étais au courant. La prime était encore plus élevée en dehors de la Colonie, grâce au Prime Nial. Mais ce n’était pas suffisant. Si ça l’avait été, Krael serait en détention. Hormis sur la Colonie, personne ne savait pour quoi il était recherché, mais tout le monde dans l’univers savait que nous le voulions vivant. Tyran acquiesça alors que nous nous dirigions vers le centre de la Base 3. Notre monde avait beaucoup changé au cours des dernières semaines. Entre les visites de la compagne du Prime, Dame Deston, la présence de deux mères qui étaient venues s’installer sur la Colonie pour être à proximité de leurs fils, et l’arrivée de la première compagne de la Colonie, Dame Rone, notre planète avait commencé à prendre vie. La compagne du gouverneur aimait beaucoup les jardins et avait insisté pour qu’ils soient plus accueillants. Des arbres et des fleurs avaient été importés depuis toutes les planètes de la Coalition, avec de nombreux bancs. Du lierre poussait partout, donnant un côté sauvage aux lieux. Au début, je n’avais pas pris tout ça au sérieux, mais désormais, la quiétude des jardins, avec leurs nouvelles fontaines à eaux et leurs oiseaux apprivoisés, m’attirait et m’apportait un peu de paix. Voir des plantes venues de leurs planètes d’origine pousser ici faisait du bien aux guerriers. La Colonie n’était pas une planète morte. Nous étions vivants. Il nous suffisait de réapprendre à vivre. Comme si je l’avais fait apparaître de nulle part, je levai les yeux et vis Dame Rone et le gouverneur se diriger vers nous, l’air satisfait. — Capitaine Hunt ! Tyran ! Le moment est venu. Venez vite ! dit Dame Rone. Elle nous prit par les mains et nous força à faire demi-tour. C’était l’une des seules personnes de la Colonie qui pouvait se permettre de nous diriger ainsi, malgré le fait qu’elle était minuscule en comparaison à notre taille de Prillons. Si nous n’avions pas voulu bouger, rien n’aurait pu nous y pousser, à part peut-être un Atlan en mode bête. — Madame, qu’est-ce que vous faites ? demandai-je. Je regardai son compagnon principal, le gouverneur Maxime, et lui aussi sourit. Je l’avais rarement vu comme ça, mais ça lui arrivait de plus en plus souvent depuis que lui et son second, Ryston, avaient été accouplés grâce au Programme des Épouses Interstellaires. — Votre compagne est arrivée. — Ma compagne ? Je m’arrêtai net, sous le choc, alors que mon cœur se mettait à battre la chamade. Ma compagne ? Elle était là ? Dame Rone continua de me tirer par le bras, puis elle abandonna et se contenta de traîner Tyran derrière elle. — Quoi ? repris-je. Personne ne m’a prévenu que j’avais été accouplé ou qu’elle était censée arriver. Normalement, nous étions prévenus, au moins quelques heures à l’avance. Non pas que je me plaigne, mais la surprise rendait tous les mots qui sortaient de ma bouche complètement idiots. Tyran ne me prêta pas attention et continua d’avancer avec la main de Dame Rone autour de son coude. Elle l’escortait vers la station de transport, en me laissant à la traîne. Il me jeta un coup d’œil par-dessus son épaule, et dans son regard, je vis une chose que je n’avais pas vue depuis très, très longtemps. Ce n’était pas seulement de l’espoir. C’était de la hâte. Maxime me donna une tape dans le dos et m’arracha à mes pensées. — Ce n’est pas votre compagne, Hunt. C’est celle du capitaine Tyran. Il se tourna vers ce dernier et reprit : — Vous choisissez Hunt comme second, j’imagine ? Tyran semblait sous le choc, aussi étonné que moi, mais il répondit bien vite : — Bien sûr. La confirmation de Tyran me parvint, et mon monde, bien qu’un peu sens dessus dessous, se stabilisa. Les choses étaient peut-être différentes de ce que j’avais imaginé ; mais nous nous adapterions. Je m’adapterais. Je n’avais plus le choix, désormais. Nous avions une compagne. C’était la seule chose qui importait, à présent.

Capitaine Tyran Zakar, La Colonie, Base 3

Ma compagne. Bon sang. Ma compagne. Pas celle de Hunt, comme je l’avais d’abord cru. D’accord, j’avais été déçu, perdant espoir alors que les semaines, puis les mois passaient et qu’aucune compagne n’arrivait sur la Colonie. Nous nous étions rendus au centre de test, avions respecté le processus, mais aucun d’entre nous n’en était sorti avec une compagne. C’était il y a trois mois. Jusqu’à présent, nous n’avions pas eu de nouvelles. Je savais que Hunt avait gardé espoir tant bien que mal pendant ces longues semaines. Pas moi. Tout ce dont je me souvenais, c’était un rêve érotique fantastique, mais vague, et le fait que j’étais sorti de là avec une érection si puissante que j’avais craint qu’elle ne perce mon armure. Heureusement, j’avais réussi à regagner mes quartiers et à me prendre en main pour me soulager de l’inconfort qui, je le savais, ne pourrait être véritablement apaisé que par ma compagne. Et à présent, voilà que j’allais en avoir une. Je ne serais pas son compagnon secondaire, mais principal. Je tentai de réprimer mon sourire, mais c’était presque impossible. Je me sentais... Par les dieux, je me sentais bien. Sur un petit nuage. Ravi. Pas loin d’être heureux. Dans l’univers se trouvait une femme qui était parfaite pour moi. Avec mon côté sombre et mes penchants sexuels, j’avais cru que je ne trouverais personne. Quelle femme voudrait être attachée, les yeux bandés, être mise à genoux ? Crier de plaisir lorsque je lui infligerais une légère douleur ? Être dominée et vouloir, non, avoir besoin que son compagnon prenne les commandes ? Si Hunt avait été le compagnon principal, je sais qu’il aurait pris son temps pour séduire notre compagne. Je m’étais préparé à accepter cela, à donner à ma compagne le temps nécessaire sans m’inquiéter du reste. Faire les choses en douceur, pas sauvagement. Être sensuel, pas sexuel. Mais cette femme était pour moi. Elle allait être à moi. Ce qui signifiait qu’elle voulait exactement la même chose que moi. Elle avait besoin de ce que je pouvais lui donner. Sinon, nous n’aurions pas été accouplés. Mon cœur s’emballa lorsque je me dis qu’elle me rejetterait dès qu’elle croiserait mon regard, dès qu’elle verrait ce que m’avait fait la Ruche. Mais alors que Dame Rone me tirait par le bras en souriant, je me souvins que l’amour était aveugle. Ma compagne devait être pareille, car nous avions été appairés après ma destruction par la Ruche. Le test m’avait accouplé, avec mes parties cyborgs, à une femme. Cela voulait dire qu’elle m’aimerait comme j’étais. N’est-ce pas ? N’est-ce pas ? À côté de moi, Dame Rone sautillait, me rappelant un enfant joyeux. Je laissai son bonheur me contaminer. Je ne m’inquiéterais pas pour l’instant. Je profiterais de ce moment. C’était un instant rare. Insaisissable. Inconnu. — Vous devez être fou de joie, me dit Dame Rone alors que nous marchions vers la salle des transports. J’ai hâte de la rencontrer. Je me demande d’où elle vient. Personne n’aurait jamais utilisé l’expression fou de joie pour me décrire. J’étais discret, j’observais. C’était toujours moi qui tirais la tronche dans un coin. Et pourtant, c’était moi qui avais été accouplé. Je savais que Maxime et Hunt suivaient, ils se trouvaient à quelques mètres derrière moi. Que pensait Hunt ? Désormais, c’était lui mon second. Nous étions amis. Nous avions le même rang. Nous étions égaux. Pourtant, c’était lui le meneur, il était franc et téméraire, alors que je me satisfaisais de rester dans l’ombre. Je n’en étais pas moins féroce pour autant. En fait, j’étais sans doute plus impitoyable et rusé que Hunt. Je me fondais dans la masse, je restais discret, et mes attaques étaient toujours inattendues. Et avec les femmes ? Ça faisait longtemps que je n’avais pas eu de relations, mais je connaissais ma nature. Je l’observerais, j’analyserais la moindre de ses réactions. Les femmes étaient des énigmes que je m’empressais de résoudre. Découvrir les secrets d’une femme pour lui apporter tout ce qu’elle voulait, même quand elle l’ignorait ou qu’elle ne voulait pas se l’avouer était ce que je préférais. Mais j’avais été persuadé que c’était Hunt qui serait accouplé, qu’il serait le compagnon principal et que je ne serais que son second. J’avais espéré avoir une compagne à moi, m’étais dit que je pourrais réfréner mon côté sombre, mais je n’avais jamais envisagé qu’il y ait une femme parfaite pour moi dans l’univers. Pas quand Maxime avait annoncé que nous avions une compagne. Seulement lorsqu’il avait dit que c’était la mienne. — Fou de joie ? Non. J’espère être digne de cet honneur, confiai-je à Dame Rone. Je m’arrêtai, et elle me regarda avec surprise. Je ne lui parlai pas de mes doutes, de ma crainte que Hunt ne parvienne pas à s’adapter à son nouveau rôle. Durant des années, c’était lui qui avait eu le rôle de meneur, qui avait crié des ordres. J’avais obéi, suivi, pas parce que j’étais incapable de faire preuve d’autorité, mais parce qu’il était mon frère d’armes, et que je lui faisais confiance pour assurer notre sécurité. Et si un autre connard arrogant avait essayé de me donner des ordres, je l’aurais tué d’un claquement de doigts. — Il faut que j’aille chercher mes colliers. Je veux qu’elle en ait un. La compréhension emplit les yeux de Dame Rone, et Maxime et Hunt se joignirent à nous devant la salle des transports. — J’avais deviné que vous voudriez lui placer le collier autour du cou immédiatement, dit le gouverneur d’une voix grave. J’étais pareil. Pas besoin de déclencher une guerre pour une femme non revendiquée, comme ça a failli arriver avec Rachel. Dame Rone lui donna une tape sur le bras et leva les yeux au ciel. — Tu es injuste. Ce n’est pas ma faute si je suis la seule compagne de toute la planète. Elle me regarda et ajouta : — J’ai hâte d’avoir une autre femme avec moi pour vous mettre au pas, bande d’hommes des cavernes. Et une terrienne, c’est encore mieux. Ses mots étaient teintés d’une émotion proche de la joie pure. Son enthousiasme était contagieux, et le fait que même si Dame Rone était contente de se faire une amie, cette femme m’appartenait, me frappa comme un tir de pistolet à ions. À moi ! — Même si d’ordinaire, je n’aurais pas envoyé quelqu’un dans vos quartiers comme ça, j’ai pris la liberté de demander à quelqu’un d’aller chercher vos colliers, Capitaine, puisque Hunt est le second que vous vous êtes choisis, me dit Maxime. Je jetai un regard à mon ami. Son visage était impassible. Indéchiffrable. — Oui, c’est mon second, dis-je à voix haute. S’il accepte. Je ne voulais pas que qui que ce soit en doute. J’étais fier qu’il partage ma compagne, qu’il fasse partie de ma famille. Mais je ne le lui avais jamais demandé. Nous n’avions jamais eu cette conversation, partant du principe que ce serait lui qui serait accouplé. Mais Hunt portait toujours son collier d’accouplement autour du cou, l’avait enfilé à l’instant où son test avait pris fin. Sa couleur vert vif annonçait à tout le monde qu’il était prêt à être accouplé. J’étais son ami, et je savais qu’il voulait une femme avec un désespoir qu’il cachait bien. Trouver une compagne était plus que crucial pour lui. C’était nécessaire. Beaucoup de guerriers de la Colonie l’avaient taquiné à ce sujet, mais il ne laissait rien paraître, il restait déterminé. Il avait su qu’elle arriverait, et il avait eu raison. Mais les choses ne se passaient pas comme il l’avait prévu. Par conséquent, il pouvait choisir d’attendre d’avoir une compagne à lui. Il n’était pas obligé d’accepter d’être mon second. Il pouvait attendre et revendiquer sa propre compagne, si elle arrivait un jour. Je ne lui en voudrais pas, si c’était son choix. — C’est ta décision, Hunt. Je sais que tu voulais être accouplé. Si tu choisis d’attendre, je ne refuserai pas. Je choisirai un autre second. — Non, me répondit-il en fronçant les sourcils, son objection très claire. Pour devenir mon second, il devrait retirer les couleurs de sa famille et les remplacer par les miennes. Il devrait porter le collier bleu de ma lignée. Mais accepterait-il ce changement de rôles ? Serait-il prêt à ce que la compagne que nous partagerions soit marquée d’un collier bleu au lieu de vert ? Nous nous tournâmes tous vers Hunt, dans l’attente. Il se passa les mains derrière la nuque et retira son collier, avant de me le tendre avec un hochement de tête. Soulagé, je souris et le lui pris des mains. — Je suis son second, déclara Hunt d’un ton convaincu. — Très bien, dit Maxime. Maintenant que c’est réglé... Il se retourna et la porte s’ouvrit. Nous pénétrâmes dans la petite salle des transports, et mon cœur se serra comme si je partais au combat. L’adrénaline me submergea le cerveau. — Elle devrait arriver d’un instant à l’autre, Gouverneur, annonça l’officier de transports. Il leva les yeux, juste assez longtemps pour parler, puis il retourna à son tableau de bord. La porte s’ouvrit à nouveau, et un deuxième officier vint vers moi et me tendit trois colliers, deux bleus comme le ciel de Prillon Prime, et un troisième, celui de ma dame, noir comme l’espace jusqu’à ce qu’elle accepte officiellement ma revendication, qu’elle nous permette d’emplir son corps en même temps. Une fois qu’elle serait mienne, le collier deviendrait bleu et elle m’appartiendrait pour toujours. Ces bandes de tissu à la technologie neurale intégrée n’avaient pas tenu leurs promesses, jusqu’à présent. Même si je savais qu’ils n’avaient pas changé, ils me paraissaient différents. Bientôt, ils se trouveraient autour de nos cous — de celui de Hunt, de notre compagne et du mien — nous liant les uns aux autres, nous permettant de partager nos émotions et nos désirs, de ne former plus qu’un, à jamais. La grille vert et noir de la zone de transport était assez grande pour contenir une vingtaine de guerriers armés, mais elle était vide. Nous avions tous les yeux fixés dessus, habitués aux arrivées soudaines. Mais une femme, c’était différent. Tout était différent. Et lorsque je sentis mes poils se hérisser, le seul signe du déplacement d’énergie causé par la téléportation, je sus que ma vie ne serait plus jamais la même. Il n’y avait plus de retour en arrière possible. Et lorsqu’une petite forme apparut sur la grille, pâle et nue, je sentis sa présence jusque dans mes os, une lourdeur, une douleur que je ne pouvais pas expliquer. Ma compagne était là. C H A P I T R E Q U A T R E

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T C’est Hunt qui perçut la situation différemment et qui se dépêcha de se débarrasser de sa tunique, de parcourir les quelques marches vers la grille de transport à toute vitesse et de couvrir la silhouette endormie. Il tourna la tête et jeta un regard noir aux deux officiers qui s’occupaient des commandes du transporteur. Ils détournèrent bien vite les yeux. — Allez chercher une couverture immédiatement, ordonna Dame Rone. J’entendis des bruits de pas, mais je ne détachai pas les yeux de la frêle jeune femme. J’en étais incapable. Je ne réussis même pas à bouger, jusqu’à ce que Hunt m’appelle. À grands pas, je parcourus la distance qui me séparait de ma compagne et m’agenouillai à côté d’elle. Elle semblait endormie, mais était-elle... Mon doigt se posa sur son cou pâle et caressa sa peau douce à la recherche de son pouls. Il était puissant. Ses cheveux étaient pâles, d’une couleur or délavé, et je me demandai si ses yeux seraient d’un ambre clair, comme ceux de Hunt, ou d’une teinte exotique que je n’avais encore jamais vue. Son visage était délicat, en forme de cœur, très beau avec des lèvres pulpeuses et de longs cils qui reposaient sur des pommettes hautes. Elle était parfaite. La plus belle femme que j’aie jamais vue. Je croisai le regard pâle de Hunt et la commissure de ses lèvres se souleva. Se moquait-il de moi parce que j’avais pris le pouls de notre compagne ? Quelle importance ? Aucune. Une couverture apparut au-dessus de mon épaule, et je la dépliai, avant de la couvrir avec, et Hunt reprit sa tunique, avant de l’enfiler à nouveau. Je pris ma compagne dans mes bras avec douceur, la douce couverture protégeant sa pudeur tout en la tenant au chaud. Elle était ronde et potelée. Bien que je ne puisse pas bien voir sa silhouette sous la couverture, je sentais son moelleux. J’avais hâte d’explorer chaque partie d’elle. Mon sexe durcit en sentant son odeur féminine. Personne ne la verrait nue, sauf Hunt et moi. Personne. — On l’emmène à l’infirmerie ? demanda Hunt. Sur les vaisseaux de guerre, les compagnes passent un examen médical dès leur arrivée. Même si je savais que sa priorité était le bien-être de notre compagne, je fus pris par une bouffée de possessivité, et j’eus envie que personne, pas même un médecin, ne la touche. Je comprenais la raison de ces examens. La plupart s’assuraient que la compagne était fertile et qu’elle n’avait pas été blessée pendant le transport. Cette pratique était devenue courante des siècles plus tôt, lorsque les téléporteurs n’étaient pas encore perfectionnés, et que ces voyages à travers l’espace causaient des dégâts permanents aux femmes fragiles. Mais je me fichais que ma compagne nous donne des enfants, je voulais simplement la mettre dans mon lit. Lui faire du bien. Chasser la solitude et la douleur qui nous accablaient, Hunt et moi. Elle était à moi. À moi. Aucun médecin ne la toucherait. Personne d’autre ne la verrait inconsciente et vulnérable. J’avais envie d’arracher les yeux du gouverneur pour l’empêcher de la regarder. À présent, je comprenais ce que devaient ressentir les Atlans lorsque la bête s’emparait d’eux. Possessif. Protecteur. Déraisonnable. Je me montrais irrationnel, et je m’en fichais. — Dame Rone aussi était endormie en arrivant. Elle s’est réveillée au bout de quelques minutes, nous dit Maxime, et je me détendis légèrement, soulagé. — Je me suis réveillée dans l’une des salles d’examen de l’étage médical. C’était un réveil assez brutal, dit la dame en question, les bras croisés sur la poitrine, les sourcils froncés. Je doute que votre compagne ait envie de vivre la même expérience. — Seule ta santé nous importait, compagne, répondit Maxime. J’étais là, et Ryston aussi. — Et le médecin, rétorqua Dame Rone avec un grognement. Toi et Ryston, ça faisait déjà bien assez à gérer sans ajouter le médecin. Ma compagne était si petite et si légère dans mes bras que je n’eus aucun mal à me lever. — Merci, Dame Rone. Comme ma compagne est terrienne, je vais suivre vos conseils. Pas de médecin, alors. Merci, Gouverneur et Dame Rone, pour votre aide. Dame Rone s’inclina et tenta de jeter un coup d’œil sous la couverture. — Oh, ouah. Elle a de magnifiques cheveux blonds. Et regardez-moi ces pommettes. Je la déteste déjà. Hébété, je la regardai, prêt à tout pour trouver une solution au cas où la compagne de mon gouverneur détesterait la mienne. Heureusement, elle sourit. — Je plaisante, mais si elle a un bonnet D, je ne pourrai pas être son amie. J’ignorais complètement ce qu’était un bonnet D, mais je ferais en sorte que ma compagne évite d’en avoir pour qu’elle et Dame Rone puissent devenir amies. Lorsqu’elle se réveillerait, je lui demanderais de m’expliquer les étranges menaces de la compagne du gouverneur. — Même si je ne doute pas que l’annonce de l’arrivée de votre compagne sera le sujet de toutes les discussions sur la Base 3, et même sur la Colonie tout entière, pendant les heures qui suivent, j’avertirai tout le monde que vous êtes déchargés de vos obligations jusqu’à demain, dit Maxime. Déchargés de vos obligations était une façon diplomate de dire que nous était accordé pour faire plaisir à notre compagne. Maxime me donna une tape sur l’épaule. Lorsque je ne bougeai pas, il fronça les sourcils. — Vous ne la conduisez pas dans vos quartiers ? Je savais que ce qu’il disait était logique, mais avec elle dans mes bras, sa chaleur et son odeur m’emplissaient la tête de désirs que je n’avais encore jamais ressentis et contre lesquels je ne savais pas comment lutter. Hunt me regardait, avec dans les yeux une question à laquelle j’étais incapable de répondre. Tout ce que je savais, c’était que mon sexe était en érection, que mes idées étaient embrouillées par l’excitation, et que mes pieds refusaient de bouger. Elle était à moi, et la marche jusqu’aux quartiers des soldats ne m’avait jamais paru aussi longue. Sa silhouette nue me hantait, et ma bouche devint sèche à cause de ma hâte de la goûter... partout. Je jetai un regard à Hunt, certain qu’il serait d’accord avec le plan qui était en train de se former dans mon esprit. Maintenant. Je ne pouvais pas attendre que de nouveaux quartiers nous soient assignés. Je ne voulais pas attendre et essayer d’apaiser les peurs de notre compagne avec des belles paroles. Si elle était vraiment à moi, ce n’est pas de cela qu’elle aurait besoin. Je quittai Hunt des yeux et me tournai vers le gouverneur. — Merci, Maxime. Sauf votre respect... Je me tournai pour inclure Dame Rone et les deux officiers qui se tenaient au garde à vous près des commandes du transporteur. — … tirez-vous de là. Tous. Le contrôleur du transporteur prit une inspiration sifflante en entendant mon langage irrespectueux. Je plissai les yeux vers lui et son collègue, qui me sourit comme si j’étais le meilleur divertissement qu’il ait eu depuis des mois. C’était peut-être le cas. Je m’en fichais. — Tous les deux. Dehors. Je vais revendiquer ma compagne, et je vais le faire juste ici. Tout de suite. Hunt, toujours diplomate, prit la parole, et se plaça entre moi et Maxime, qui me regardait en plissant les yeux, hésitant visiblement sur la marche à suivre face à mon comportement. Mais il n’y avait rien à faire. Pas pour l’instant. — Tyran, on pourrait la ramener... — Non. Je sentais un sein lourd contre ma paume, ses fesses rebondies contre mon ventre. Son odeur était entêtante, noyant ma raison et faisant ressortir mon instinct, et nous ne portions même pas encore nos colliers. — Ils vont quitter la pièce, parce que je refuse d’attendre une minute de plus avant de la faire nôtre. Maxime rit, prit sa compagne par la main, et poussa les contrôleurs à quitter leurs postes. — Et si quelqu’un se téléporte ? demanda l’un d’entre eux. — Alors les capitaines seront là. L’homme était dévoué à son travail, mais en cet instant, je m’en fichais. Les téléportations arrivaient, mais elles étaient espacées dans le temps. Je n’avais quand même pas envie que ma compagne soit renversée sur le tableau de commande, mon sexe entre ses cuisses et celui de Hunt dans sa bouche lorsque quelqu’un arriverait. Hors de question. — Mets le transporteur sur pause, ordonnai-je à Hunt. Il me regarda d’un air surpris avant de jeter un coup d’œil à Maxime. Le Gouverneur s’arrêta à la porte en m’entendant, peut-être parce que je donnais rarement des ordres — pas depuis que je n’étais plus sur le champ de bataille, en tout cas. Le dernier ordre que j’avais donné avait failli nous tuer tous les deux. Ma colère avait pris le dessus, ce jour-là, et c’était à cause de ça que nous avions fini dans les grottes d’intégration de la Ruche à nous faire torturer. La raison de notre présence sur la Colonie. J’avais passé ces trois dernières années à en payer le prix, à faire tout ce que m’ordonnaient le gouverneur, Hunt, ou les autres commandants élus de la Base. Les instincts profonds qui me poussaient à commander, à mener les gens, je les avais réprimés jusqu’à ce qu’ils m’étouffent. Hunt était un bon leader, minutieux et réfléchi, et il choisissait la bonne marche à suivre pour les guerriers de la Base 3. C’était l’un des conseillers de confiance de Maxime. J’étais un chaos sur pattes. Je suivais les ordres parce que je choisissais de le faire, pas parce que j’avais besoin que quelqu’un me dise quoi faire. Je suivais les ordres des hommes que je respectais parce que je ne voulais pas endosser ce genre de responsabilités, risquer de me retrouver avec le sang d’autres guerriers sur les mains. Non, je ne donnais plus d’ordres, et je vis la surprise sur le visage de Hunt. Je ne savais pas s’il était choqué parce que je voulais faire ça là, ou parce que je venais d’aboyer un ordre au gouverneur de la Base 3. Maxime hocha la tête et nous laissa seuls. La porte se referma derrière les hommes dans un souffle presque inaudible. — Elle mérite d’avoir un lit, grommela Hunt en glissant les doigts sur le panneau de contrôle. Lorsque le transporteur fut mis sur pause, il jeta un regard à notre compagne endormie et ajouta : — Elle mérite d’avoir un peu de douceur, Tyran. Regarde-la. Elle est tellement belle, tellement parfaite. Il baissa les yeux sur son bras droit, là où la technologie de la Ruche l’avait rendu presque entièrement argenté, et il se renfrogna. Il promena le regard sur mon œil et ma tempe argentés. — Elle mérite mieux que nous, conclut-il. — C’est vrai, mais elle n’obtiendra pas toujours ça de moi. Ce n’est pas ce qu’elle veut, répondis-je. — Et comment tu sais ça, bon sang ? — Je le sais, parce que je veux lui passer mon collier autour du cou maintenant. Je veux la baiser tout de suite. Je ne suis pas doux, Hunt. Je vais me montrer exigeant avec elle, et on lui donnera tout ce dont elle a besoin. Ta lumière et ma noirceur. Il ouvrit la bouche pour parler, mais j’enchaînai : — Elle m’a été attribuée, Hunt. De tous les guerriers de la Colonie, c’est toi qui me connais le mieux. Tu connais mon côté sombre. Elle ne voudra pas toujours d’un lit, parce qu’elle est à moi. Elle aura envie de ce que je peux lui donner. Il vint se placer devant moi, baissa les yeux sur la silhouette endormie de la femme qui nous appartenait désormais. — Et si tu te trompes ? dit-il. Je plissai les yeux. — Je ne me trompe pas, pas si elle est à moi. Il fronça les sourcils et tendit une main timide pour lui passer un doigt sur la joue. Elle s’étira, et mon sexe se mit au garde-à-vous, l’odeur féminine de notre compagne flottant jusqu’à nous lorsqu’elle fit bouger la couverture. — D’accord, Tyran. On va bientôt le découvrir.

Kristin, Salle des Transports, la Colonie, Base 3

J’avais chaud, une couverture était enroulée autour de moi comme j’aimais le faire quand j’étais petite. Un battement de cœur régulier m’apaisait alors que je frottais ma joue contre les muscles chauds de l’homme qui me tenait... L’homme ? Je clignai des yeux. Une fois, puis encore, et ma vue devint moins floue. Ensuite, je clignai à nouveau des yeux pour m’assurer que je n’étais pas en pleine hallucination. Oui, il y avait bien deux mecs canon et gigantesques en train de me regarder. La gardienne Égara n’était plus là, et ces hommes n’étaient pas humains. Ils étaient beaux, sexy, leurs peaux dorée et brune, avec des traits légèrement plus affûtés que ceux d’un terrien. L’homme qui me soulevait avait la peau plus foncée, de la couleur du caramel, avec des cheveux courts et bruns et des yeux marron sensuels dans lesquels j’aurais pu me perdre pendant des heures. Il me tenait alors que son ami plus clair me touchait la joue d’un doigt plein de douceur, s’attardant sur ma peau comme si elle le fascinait. Il avait des cheveux or pâle et des yeux ambrés, sa peau était claire avec une petite touche dorée. Son œil droit était un peu argenté, et une zone de peau argentée entourait son œil et sa tempe droite, la drôle de couleur disparaissant derrière ses mèches claires. Mon cœur se mit à battre plus vite lorsque je perçus leur odeur. Sauvage. Tellement sexy que mon corps y répondit comme s’il avait simplement attendu que j’y fasse attention, soudain avide et plein de désir, en manque. J’arrachai mon regard à ces hommes et tournai la tête pour observer les environs. La pièce faisait environ la taille d’un garage pour deux voitures, elle était simple et pratique. Je reconnus le sol noir et la grille verte du transporteur que j’avais vu au centre de préparation des épouses. Une station de contrôle se trouvait à quelques mètres, elle était vide. J’étais seule dans cette pièce, uniquement recouverte d’une couverture, avec deux extraterrestres qui me dévisageaient comme s’ils avaient hâte de me prendre. Et bon sang, ça m’excitait. — Salutations, compagne. Je suis Tyran, dit l’homme qui me soulevait, il avait une voix grave et frotta son nez contre mon visage, inspirant mon odeur, ses cheveux noirs contrastait avec la peau pâle de mon épaule, qui sortait de la couverture. Compagne ? Oh, ouah. Tout mon corps se tendit en réalisant tout cela. Je savais que c’était ce qui allait arriver, mais parler à la sympathique gardienne Égara sur Terre du fait de prendre deux guerriers prillons dominateurs comme compagnons était une chose. Être ici, entre leurs deux corps puissants, c’en était une autre. Je frissonnais, de plus en plus mouillée, pendant qu’ils m’admiraient. Ah non, je n’étais vraiment plus dans le Kansas. Je n’étais même plus sur Terre. — Bonjour, dis-je d’une voix un peu éraillée. Je m’éclaircis la gorge et répétai. Ils me sourirent tous les deux, mais cette fois, c’est le deuxième homme qui me répondit, le doré, et son doigt passa de ma joue à ma lèvre inférieure. — Bonjour, compagne. Je suis Hunt. Ton second. À ces mots, l’homme qui me tenait me serra, et mes deux compagnons se regardèrent durant un long moment alors que quelque chose que je ne comprenais pas passait entre eux. Comme d’un commun accord, ils se tournèrent tous les deux et m’accordèrent de nouveau toute leur attention. Tyran me maintenait immobile, et même si j’étais dans ses bras depuis un bon moment, il ne semblait pas se fatiguer. Soit j’avais perdu du poids pendant la téléportation, soit il était beaucoup plus grand et fort que je ne l’avais d’abord cru. Je levai les yeux vers lui et me tortillai pour quitter ses bras, mais il ne me reposa pas, et secoua la tête. — Je suis le capitaine Tyran, compagne. Je suis ton compagnon principal. Est-ce que tu comprends ce que ça signifie ? Je repensai à ma conversation avec la gardienne Égara. Oh, oui. Je savais très exactement ce que ça voulait dire. C’était l’homme à qui l’on m’avait accouplée, celui qui me correspondait parfaitement. Et Hunt était le guerrier qu’il avait choisi pour l’aider à prendre soin de moi, avec qui nous formerions une famille. Cela signifiait que j’avais deux amants qui allaient me prendre en sandwich. Je frémis et me léchai les lèvres. — Oui. Il sourit et regarda ma bouche lorsque je me frottai les lèvres l’une contre l’autre, assaillie par le stress. — Je suis à toi, compagne, dit-il en me regardant avec ses yeux chocolat. Et je dois admettre que je suis très content de te voir. Hunt est mon second. Il est également à toi. Hunt me sourit, mais son regard était plus doux. Ils étaient tous les deux baraqués, mais Hunt semblait moins dur que Tyran, même avec son œil argenté. Je me demandais pourquoi Tyran était ici, sur la Colonie. Au premier coup d’œil, il ne semblait pas avoir de parties du corps façon Inspecteur Gadget. — Je suis sur la Colonie ? demandai-je. Je regardai alentour, et tout ce que je pouvais voir, à part les corps massifs des deux hommes, c’était la salle des transports. Mais Tyran semblait beaucoup trop normal —enfin, normal pour un extraterrestre. — Oui, répondit-il. M’imaginer ce qui pouvait bien se trouver sous ses vêtements noirs était un peu trop dangereux pour l’instant, alors je changeai de sujet : — Bon sang, je n’arrive pas à croire que j’ai voyagé jusqu’à une autre planète. C’est un peu surréaliste. Même s’il ne sourit pas, je vis ses yeux chaleureux. Il ne soutint pas mon regard, mais examina mon visage. Je le comprenais, parce que je faisais la même chose avec eux, mes yeux se baladant partout comme une balle de ping-pong, essayant de réaliser que ces deux hommes m’appartenaient. Pour toujours. Pas de rencards. Pas de période de doute. J’étais presque mariée, et je connaissais à peine leurs noms. — Le chemin était incroyablement long, et la téléportation peut être éprouvante quand on n’a pas l’habitude. Tu te sens bien ? demanda Hunt. Je compris tout de suite que ce serait lui le plus attentionné, celui qui remarquerait que j’avais faim, froid, ou que j’avais besoin de passer un moment seule. Avec lui, je me sentirais en sécurité. Il me chérirait. Me protégerait. Mais Tyran ? Il me regardait comme s’il se demandait quelle partie de moi il allait dévorer en premier, et je ne pus retenir ma réaction face à cette attitude d’homme des cavernes. Ses yeux étaient aussi perçants que des lasers, pleins de désirs. Sauvages. Bestiaux. C H A P I T R E C I N Q

ristin K Mon corps s’éveilla sous son examen minutieux, et une sauvagerie s’éleva en moi avant même que je ne le réalise. La présence rassurante n’arrangeait pas les choses. D’une façon ou d’une autre, je savais que Hunt éviterait que les choses aillent trop loin pour moi, et cela me donnait envie de me laisser aller. C’était de la folie. Je ne les connaissais que depuis trois minutes, mais mon cœur s’en fichait. Mon corps aussi. Ils disaient à mon cerveau de regarder ailleurs et de me laisser faire. Je n’avais pas l’impression d’avoir été transformée en minuscules particules avant d’être envoyée dans l’espace et reconstituée comme du lait en poudre. C’était pourtant ce qui s’était passé. J’aurais dû être préoccupée par cette idée effrayante. Qu’est-ce qui se passait si tout n’était pas remis en place comme il fallait ? Mais je m’en fichais, pour l’instant. J’étais là, et deux des hommes les plus sexy de l’univers étaient déterminés à me dévorer. Mes seins se firent plus lourds et mes tétons durcirent lorsque je m’imaginais allongée entre eux, à les prendre en même temps, quatre mains sur mon corps, deux bouches — une entre mes jambes et une qui me sucerait les tétons —deux amants qui me feraient me sentir féminine, belle, désirée... Non, mais franchement ? Je perdais les pédales, là. Il fallait que j’arrête avant de me ridiculiser devant mes nouveaux compagnons. — Tu peux, euh, me reposer, s’il te plaît ? demandai-je à Tyran, qui me serrait contre lui. Il fallait que je prenne mes distances, si je voulais me reprendre. Je me tortillai, et il me lâcha les jambes, mais garda son autre bras autour de moi jusqu’à ce que mes pieds touchent le sol. C’est à ce moment-là que je réalisai que j’étais déjà nue, et je m’agrippai à la couverture pour me couvrir. Nous étions seuls dans la pièce. Ces deux-là avaient beau être mes compagnons, je ne les connaissais pas, et je n’étais pas prête à leur montrer mon corps. Après avoir ramené la couverture sur mes épaules, je me retournai, leur tournant le dos, et j’écartai le tissu de façon à me regarder. Oui, j’étais bien entière. Dieu merci. Malheureusement, cela incluait mes hanches larges et mes courbes généreuses. Avec ce téléporteur ultramoderne, on aurait pu penser qu’ils auraient découvert comment faire des liposuccions éclair. J’aurais pu laisser quelques cellules adipeuses derrière moi. Elles ne m’auraient pas manqué. Ce qui me manquait, par contre, c’était la fine bande de poils que j’avais après m’être fait épiler. Entre la Terre et ici, j’avais reçu une épilation intégrale. Avec une exclamation, je me passai la main sur la tête, sentis les courtes mèches de ma coupe garçonne et poussai un soupir de soulagement. Durant une seconde, j’avais craint que le centre de préparation des épouses m’ait aussi rasé la tête. Être petite et un peu enveloppée était déjà assez désagréable comme ça, mais petite, enveloppée et chauve ? J’en aurais pleuré. À chaudes larmes. — Tout va bien ? demanda l’un des deux hommes dans mon dos. Je me retournai et serrai la couverture contre moi. À présent, je les voyais clairement. Ils faisaient à peu près la même taille, ils étaient incroyablement grands. Ils devaient faire plus de deux mètres, et étaient aussi baraqués que des joueurs de football américain. Comment était-ce physiquement possible ? Ces hommes étaient originaires de Prillon Prime. Tous les hommes de cette planète faisaient-ils cette taille-là ? Si c’était le cas, j’aurais l’air d’une lilliputienne, à côté. — Est-ce que... est-ce que je vous parais normale ? L’un d’entre eux fronça les sourcils, l’autre les haussa. — Normale ? demanda Tyran. Je hochai la tête. — Oui. Je suis beaucoup plus petite que vous, nos couleurs de peau sont différentes, et vous êtes super musclés. Tous ces muscles étaient bien visibles sous leurs vêtements. Hunt portait ce qui selon moi, devait être des vêtements normaux, un pantalon et une tunique, assez proches des tenues terriennes. Mais Tyran portait une espèce d’armure moulante noir et gris, intimidante comme tout, comme s’il était prêt à tuer des gens. — Vous êtes gigantesques et forts, et je suis grassouillette et... — Lorsque j’entends le mot gras, je pense à un animal prêt pour l’abattoir. C’est ce que tu veux dire ? demanda Hunt en penchant la tête sur le côté, l’air perplexe. — Quoi ? Qu’est-ce qu’il racontait ? — Comme des cochons ou des vaches, tu veux dire ? demandai-je. Tyran fronça également les sourcils, et ses yeux se promenèrent sur mon corps avec une intensité qui me fit rougir et me poussa à resserrer ma prise sur la couverture. — Je ne savais pas que le cannibalisme était pratiqué sur Terre. C’est pour ça que tu t’es portée volontaire ? Pour ne pas être dévorée par des cannibales ? Je regardai mes compagnons, complètement hébétée. Étaient-ils complètement fous ? Ils semblaient parler par énigmes. Ils croyaient que les terriens étaient des sauvages ? Bon, nous l’étions peut-être, mais nous ne nous mangions quand même pas les uns les autres. Enfin, pas encore. Ou en tout cas, ce n’était pas quelque chose de courant. — Non. Non, je n’étais pas sur le point de me faire manger. Ce n’était pas ce que je voulais dire par là. Je savais que j’étais toute rouge. Je sentais la chaleur me monter aux joues. Deux des hommes les plus sexy de l’univers me dévisageaient comme si j’étais une énigme insoluble. Rien à résoudre ici, les gars. Je me sens juste complètement idiote, là. — Personne ne te mangera ici. Nous ne sommes pas des cannibales, me rassura Hunt, sa sincérité me donnant envie de rire. Comment m’étais-je donc retrouvée à avoir une telle conversation ? — Parfait. Tyran fit un pas vers moi, et je restai immobile. Il m’appartenait. J’allais devoir m’en souvenir et ne pas reculer dès qu’il m’approchait. — Je ne te vois pas bien sous cette couverture, dit-il. Tu es petite, mais tu me sembles parfaite. — Tu me trouves petite ? Ils hochèrent tous les deux la tête, mais c’est Hunt qui prit la parole. C’était le diplomate du groupe, apparemment. — Tu es petite, mais nous avons l’habitude des femmes terriennes, car notre reine vient de ta planète, ainsi que Dame Rone, la compagne du gouverneur. — Il y a d’autres femmes ici ? Sur la Colonie ? Venues de la Terre ? Je faillis lâcher ma couverture, tant j’étais contente à l’idée d’avoir des amies terriennes. Hunt hocha la tête. — Oui, et Dame Rone a hâte de te rencontrer. Heureuse comme tout, et un peu plus sûre de moi, je pris mon temps pour les admirer, et les laisser m’observer en retour. — Alors, est-ce que tous les guerriers prillons sont aussi grands ? demandai-je en les montrant du doigt, mon bras nu sortant d’une fente de la couverture. Je promenais mes yeux le long des cuisses de Tyran, jusqu’à son entrejambe. D’après la grosse bosse qu’il y avait sous son armure, il était déjà dur pour moi, et il était énorme. Lorsque mon attention retourna enfin sur son visage, ses yeux étaient devenus si sombres qu’ils étaient presque noirs. — Oui. Mes compagnons étaient un parfait contraste, debout côte à côte. L’un clair, l’autre foncé. Si grands. Si intenses. — On a aussi ça, dit Hunt. Il me montra son œil droit dans lequel l’argent brillait à la lumière crue de la salle des transports. Je me demandais comment la Ruche avait fait pour lui infliger ça. Je me demandais si c’était douloureux. — Ça fait mal ? Ma question sembla le surprendre, mais il secoua lentement la tête. — Non. Je baissai les yeux sur le sol lisse, puis regardai Hunt droit dans l’œil. Non, dans les yeux. L’argent était étrange, mais lorsque je me concentrais, je remarquai qu’il bougeait et zoomait en m’examinant. — Il te permet de voir, n’est-ce pas ? — Très, très bien. D’ici, je peux voir les douze taches de rousseur de ton nez. C’est une cicatrice que tu as à l’oreille gauche ? Je touchai mon lobe, là où ma boucle d’oreille avait été arrachée lorsque j’avais treize ans. Elle avait été recousue, mais il restait une mince cicatrice blanche. — Ouah, tu es comme un homme bionique, murmurai-je. Il me montra ensuite son oreille droite. — Mon audition aussi a été altérée. J’entends le sang couler dans tes veines, les battements de ton cœur. Je peux compter tes respirations et entendre ton pied taper par terre sous la couverture. Ouah. J’arrêtai de taper du pied sur le sol dur et froid. Mais je ne pouvais pas arrêter le reste. — Ça te dérange ? me demanda-t-il. Je réfléchis, les sourcils froncés. Non. Ça me paraîtrait sans doute étrange au début, mais c’était également rassurant de me dire que Hunt m’entendrait toujours l’appeler dans une pièce bondée, ou de loin. — Non. Ça te dérange que je sois si petite ? Parce que si c’est le cas, on va avoir un problème, parce que j’ai arrêté de grandir au collège. Tyran s’inclina, rien qu’un peu, avant de se relever, comme s’il offrait ses respects à une reine. — N’aie pas peur que je ne te trouve pas attirante. Je t’assure que tu es à mon goût. Tout comme ton désir pour nous grandit à chaque instant. Notre accouplement s’en est assuré. Le programme des épouses est utilisé avec succès depuis des siècles. Tu es parfaite pour moi. C’était logique. Je n’y avais pas pensé. — C’est pareil pour toi ? demandai-je à Hunt. — Je suis ton second désigné. Même si je ne suis pas parfaitement adapté à toi, contrairement à Tyran, je peux t’assurer que je suis complètement d’accord avec lui concernant son désir de t’avoir ici avec nous. — Tu ne voudras pas de compagne à toi ? Il m’observa un moment comme si je l’avais giflé. — C’est toi, ma compagne. Que je sois ton compagnon principal ou secondaire n’y change rien. Tu es à moi. Ne doute pas de mon désir pour toi. Je me détournai, incapable de soutenir son regard qui voyait jusqu’à mon âme avec ces yeux. Je me mordillai la lèvre, et sentis la chaleur me monter aux joues sous son regard insistant. Je sautillai d’un pied sur l’autre. — Ça me fait bizarre de me tenir là comme ça, admis-je, un peu gênée. On ne peut pas aller parler ailleurs ? Et aller chercher des vêtements, peut- être ? Je tirai sur ma couverture. Oui, des vêtements seraient une bonne idée. — Non, dit Tyran en me regardant comme s’il avait envie de me manger tout cru. Nous ne quitterons pas cet endroit tant que tu n’auras pas enfilé notre collier et que nous ne t’aurons pas fait jouir. J’entendis le mot collier, mais mon cerveau eut un court-circuit, il était complètement focalisé sur le mot jouir. Mon vagin se serra, et je frissonnai pour cacher ma réaction. C’était quoi ce bordel ? J’avais l’impression qu’il venait de m’insérer un doigt entre les jambes. J’étais excitée, prête à tout, ou presque. C’était de la folie. — Euh, quoi ? Je ne crois pas, non. Je n’ai pas traversé tout l’univers rien que pour... Je ne parvins pas à terminer ma phrase. J’aurais menti. J’avais bel et bien traversé l’univers pour avoir des rapports sexuels renversants avec mes compagnons extraterrestres sexy. Et bon sang, ils étaient canon. À tomber par terre. — Rien que pour quoi ? demanda Tyran. Pour baiser ? Je n’ai jamais parlé de baise. — Tu as dit... — Que je voulais te passer mon collier autour du cou ? Je veux m’enduire la langue du goût de ta chatte. Je veux découvrir quels bruits tu fais quand tu es perdue dans ton plaisir. Je veux que tu saches que tes compagnons prendront soin de toi et de tes moindres besoins. C’était de la folie. Je m’étais réveillée sur une planète étrange cinq minutes plus tôt, et il voulait me faire jouir ? Franchement, je n’avais pas envie de dire non, mais ça semblait mal. — Mais... — Lâche cette couverture, ordonna Tyran en croisant les bras sur sa poitrine, mais sans jamais me quitter du regard. Son franc-parler et sa voix grave me laissèrent bouche bée, mais mes tétons durcirent, et la douleur entre mes jambes grandit. — Tyran, tu es... Tyran interrompit son second : — Notre compagne aime que l’on prenne les choses en mains. — C’est peut-être la vérité, mais on devrait prendre notre temps, apprendre à se connaître. Lui laisser le temps, Tyran. Elle n’est pas prête. Visiblement, Hunt était plus romantique que Tyran. Protecteur, également. Mais il se trompait. Je ne voulais pas être rassurée, là. J’étais sur le point de hurler de frustration. J’avais besoin d’être soulagée. D’être conquise, revendiquée par ces deux guerriers. J’avais besoin de savoir qu’ils étaient vraiment à moi. C’était la seule méthode pour que je me sente en sécurité. Par miracle, Tyran semblait le savoir. — Je parie que tu es toute mouillée, là, en entendant tes compagnons se disputer pour toi. Je l’étais, mais je n’avais pas l’intention de l’admettre. — Bon sang, Tyran, je ne savais pas que tu étais si... — Quoi ? dit-il en secouant lentement la tête et en se passant la langue sur la lèvre inférieure. Dominateur ? Dis-lui, compagne. Dis-lui que c’est ce que tu veux. Dis-lui que tu as besoin que je sois comme ça. — Comment tu peux en être aussi sûr ? demandai-je. J’ai travaillé pour le FBI. J’ai tout vu. Je n’aime pas qu’on force les femmes. Je n’aime pas qu’on les traite comme des moins que rien. Je n’accepterai pas ça. — Je ne veux pas d’une femme faible, répondit Tyran. On ne te forcera jamais. Tu as une voix. Si tu ne veux pas de quelque chose, tu me le diras. Son regard me parcourut lentement le corps, comme s’il était connecté à mon âme. — Et quand tu voudras quelque chose, tu me le diras aussi. Je n’avais jamais parlé à personne de mes préférences sexuelles. Depuis que j’étais jeune, je savais que j’étais un peu différente des autres. Alors que mes amies jouaient des scènes de mariage avec leurs Barbie et leurs Ken, j’attachais Barbie. Je la penchais sur les genoux de Ken pour qu’il lui donne la fessée. En vieillissant, quand j’en avais appris plus sur le sexe, je n’avais jamais voulu qu’on me ménage. Je voulais que mon partenaire me tienne par les poignets, qu’il me dise des mots cochons. Mais sur le vieux canapé du sous- sol de mes parents, ça n’avait pas marché comme prévu. Steve Taylor, qui m’avait pris ma virginité, était trop impatient pour accomplir autre chose que la rupture de mon hymen. Il avait joui en trente secondes. Peut-être moins. C’était la première fois qu’il trempait son biscuit, et il n’avait pas réussi à se retenir — malgré le préservatif qu’il portait. Lorsque j’avais demandé à mon petit-ami de la fac de m’attacher, il m’avait prise pour une malade. Alors bon, après ça, il n’était pas resté mon petit ami bien longtemps. J’avais concentré tous mes désirs pervers dans la lecture des romans d’amour les plus olé olé qui existaient. Le héros qui kidnappait la vierge et la gardait prisonnière sur son bateau. Les Vikings ravageurs. Les dominateurs autoritaires. Ces héros de fiction me faisaient mouiller. Ils nourrissaient mes fantasmes quand je maniais mon vibromasseur et que j’acceptais le fait qu’aucun n’était en mesure de me donner ce qu’il me fallait. J’étais perturbée. Voilà ce que je croyais. Anormale. Je ne pouvais le dire à personne, pas lorsque je travaillais au FBI. Surtout pas après avoir été transférée au département des crimes sexuels. Seigneur, si l’un de ces types apprenait que j’avais envie d’être dominée et maîtrisée, il se dirait que j’étais devenue dingue, contaminée par les malades que nous jetions en prison. Alors mes fantasmes n’étaient jamais devenus réalité, et je n’en avais jamais parlé à personne. — Comment tu sais ce que je veux ? demandai-je. À présent, il souriait de toutes ses dents, et son visage s’en trouvait transformé. Seigneur, il était tellement beau, et ce regard m’était destiné à moi seule. — L’accouplement. Nous sommes comme un puzzle à qui il a toujours manqué une pièce. À présent, nous l’avons trouvée. Rassure Hunt. — Comment ? demandai-je en regardant l’autre Prillon. — Lorsque je t’ai ordonné de lâcher la couverture, est-ce que ça t’a excitée ? Je me mordis la lèvre et je les observai. — Ne crains jamais de nous dire la vérité, dit Hunt. Nous sommes des parias depuis longtemps. Rien de ce que tu pourras dire ne sera jugé, ici. Je pris une grande inspiration, puis j’expirai. J’avais traversé la moitié de l’univers pour ça. L’heure n’était plus à la lâcheté. — Oui, ça m’a excitée. Tyran parcourut la distance qui nous séparait et plaça ses grandes mains sur mes épaules. Il avait beau être doux, leur poids était rassurant. — Tu es mouillée, compagne ? Prête pour ma queue ? Des mains si douces et des paroles si crues. Je frissonnai. — Oui. — Je suis dur. Je n’ai jamais été aussi dur. J’aime dominer, être aux commandes. Baiser sauvagement. Donner des fessées. J’ai envie de t’attacher et de te pousser à me supplier, de te garder grande ouverte, exactement comme j’en ai envie. J’ai envie de te faire des trucs très cochons. Oh. Mon. Dieu. J’allais prendre feu, et pour l’instant, il m’avait seulement touché les épaules. Derrière lui, Hunt s’approcha, et je les sentis m’entourer de leur énergie. J’étais complètement à leur merci, et il n’y avait personne d’autre pour me sauver. Personne n’entendrait mes cris. Je leur appartenais. Ils me possédaient, et je ne pouvais rien y faire. En réalisant cela, mes jambes se mirent à trembler et je luttais pour rester concentrée, pour ne pas me perdre dans cette conversation. — De quoi as-tu envie, compagne ? C H A P I T R E S I X

ristin K De quoi as-tu envie, compagne ? — De tout. Absolument tout. Ces mots m’échappèrent avant que je puisse m’en empêcher, mon cerveau apparemment complètement déconnecté de mon corps. Une lueur ardente dansa dans ses yeux, et la commissure de ses lèvres se souleva. — Nous sommes parfaitement assortis. Je fronçai les sourcils. — Le test a repéré ce... centre d’intérêt que nous partageons ? — Absolument. Te donneras-tu à moi, compagne ? Pour que je te donne un plaisir que tu ne peux même pas imaginer ? — On ne connaît même pas son nom, intervint Hunt. Est-ce qu’on ne devrait pas au moins savoir ça avant de coucher avec elle ? Je ne pus m’empêcher de rire, et le sourire de Tyran s’élargit. C’était vrai. Je leur donnais la permission de me baiser avant même de m’être présentée. Tyran recula pour se placer à côté de Hunt. — Je m’appelle Kristin. Kristin Webster. — Kristin, lâche cette couverture. La voix de Tyran était devenue extrêmement grave, et mon corps réagit immédiatement. J’étais couverte de chair de poule. Mon regard passa de l’un à l’autre, le premier résolu et désireux que je me soumette. Hunt n’était pas repoussé par cela, seulement... surpris. Ces hommes étaient mes compagnons. Deux, pas un, à moi pour toujours. Et en retour, je leur appartenais. Il n’y aurait pas de période de séduction, pas de rendez-vous. Pas même de premier rencard. Ce n’était même pas un coup d’un soir. C’était comme trouver un mec dans un bar, le traîner aux toilettes, fermer la porte à clé et le baiser sans même se présenter. Mais ces deux-là ne s’en iraient pas quand ce serait terminé. Ils étaient à moi. C’était enivrant. Libérateur. Non, je n’irais nulle part. Jamais. Alors je fis ce que j’avais envie de faire depuis des années et des années. Montrer la vraie moi à quelqu’un. Pas seulement mes seins généreux, mes formes, la moindre courbe et imperfection, mais aussi ma nature la plus sombre. J’obéis, et je lâchai la couverture. Les yeux de Tyran brûlèrent de désir, et Hunt prit une inspiration sifflante. Tyran leva la main et brandit trois morceaux de ruban, ou... d’autre chose. Ce n’était pas du métal. Ce n’était pas du plastique. Ce n’était pas du tissu. Hunt en prit un et se le passa autour du cou. Un collier. Tyran en avait parlé, mais j’avais oublié. Je regardai Tyran se passer le deuxième collier bleu autour du cou alors qu’il prenait la parole en me présentant le troisième ruban, celui-là était noir. — Les compagnes prillonnes portent des colliers pour montrer qu’elles ont été revendiquées et qu’elles sont sous la protection de leurs guerriers. Même si nous ne te revendiquerons pas officiellement avant que tu donnes ton accord et que nous ayons une cérémonie d’accouplement, les colliers diront à tous que tu nous appartiens, tout comme nous t’appartenons. — Comme une alliance. — J’ai entendu Dame Rone faire référence à cette coutume terrienne, alors oui. — Vous voulez que je porte ça ? — Il faut que tu le portes, sans quoi nous ne pourrons pas quitter cette pièce. — Pourquoi ? demandai-je. C’est Hunt qui répondit : — Il y a très peu de femmes sur la planète. Non seulement tu es belle, mais tu es parfaite. Les autres voudront t’avoir pour eux. Si tu ne portes pas de collier, les autres guerriers croiront que tu as repoussé nos avances. Ils se battront pour gagner tes faveurs. Tyran poussa un grognement, et je serrai les cuisses avec plus de force. Bon sang, il était tellement sexy quand il se comportait comme un homme des cavernes. — Ça n’arrivera pas. Tu nous appartiens. Personne d’autre ne te touchera. — Alors, si je sortais d’ici sans ce collier, ça provoquerait une bagarre ? demandai-je, stupéfaite. Ils secouèrent tous les deux la tête. — Non, compagne. Ta beauté pourrait déclencher une guerre, répondit Hunt. Je ris, en me disant qu’il exagérait. Lorsque ni l’un ni l’autre ne se joignit à mon hilarité, je réalisai qu’ils étaient on ne peut plus sérieux. Et qu’ils me trouvaient vraiment, vraiment belle. — C’est permanent ? Je me demandais si une fois enfilé, ce collier serait coincé autour de mon cou à jamais. Je regardais les rubans bleus autour du cou de mes compagnons. Et si ça ne marchait pas ? Et s’il fallait que j’obtienne un divorce extraterrestre, quel que soit le nom qu’ils donnaient à ce genre de choses ici ? — Non. Tu as trente jours pour décider si tu acceptes ma revendication en tant que compagnon principal. Quand tu auras officiellement accepté de rester avec nous, nous participerons à une cérémonie d’accouplement. Si tu décides de choisir un autre homme, le Programme des Épouses t’accouplera à un autre homme pendant trente jours. La colère et la frustration dans sa voix étaient évidentes, et je me souvins que la gardienne Égara m’en avait déjà parlé. J’avais oublié. — Si ça arrive, reprit Tyran en clignant des yeux comme un lapin face à un renard affamé, lui aussi te donnera un collier. Il serait bien bête de ne pas te marquer aux yeux de tous. Je ne suis pas bête. Je ravalai la boule que j’avais dans la gorge, à la fois intimidée et excitée par sa passion. — Qu’est-ce qu’implique la cérémonie d’accouplement ? Tyran s’approcha et se pencha jusqu’à ce que son souffle me chatouille l’oreille. — Je te baiserai par devant pendant que Hunt te prendra par-derrière. On jouira au même moment, tous les trois, avec notre semence profondément enfouie en toi, te marquant comme notre compagne. Oh. Mon. Dieu. C’était excitant. Et vraiment, vraiment cochon. Tyran leva une main et me tendit le collier noir. Il me laissait choisir. Il ne me forçait à rien. Je pouvais dire non, et au fond de moi, je savais qu’ils respecteraient mon choix. C’était peut-être lui le dominateur, mais c’était moi qui avais le pouvoir. Si je refusais le collier, ils ne pouvaient rien y faire. Ils ne pouvaient rien faire non plus si je les refusais eux. Tout ce que Tyran avait dit qu’il voulait faire, c’était me donner du plaisir. Et j’hésitais ? Je pris le collier dans ma main. Il n’était pas lourd, mais il était froid. Je levai les mains et le passai autour de mon cou. Les deux extrémités se touchèrent dans ma nuque, et je les sentis se souder. Puis le collier rétrécit comme s’il avait été mouillé. Il arrêta de changer de taille une fois qu’il me moula la base du cou. Je levai la main pour toucher le tissu, mais il semblait s’être fondu à ma chair, la transition entre le ruban et ma peau semblait presque imperceptible. Un étrange chatouillis partit du collier et me parcourut l’échine. Quelques secondes plus tard, des émotions m’envahirent. Excitation. Douleur. Impatience. Solitude. Désir. Manque. Luxure. Mes genoux cédèrent, et Hunt me rattrapa avant que je ne m’écroule par terre. — Oh mon Dieu ! m’écriai-je lorsque je ressentis. Qu’est-ce qui se passe ? Je me passai les bras autour du corps, soudain plus excitée que jamais. Mes tétons durcirent, ma peau devint plus sensible. Mon vagin se contracta et mon clitoris enfla. L’intensité des émotions qui m’assaillait me donnait les jambes en coton. Hunt me prit dans ses bras et je gémis. — Les colliers créent un lien spécial entre nous trois, dit-il. Tu ressens ce que nous ressentons. Je frissonnai. Leur désir. Le mien. Je ne savais plus, et je m’en fichais. — Je vais jouir, répondis-je en me tortillant dans ses bras. Je serrais les jambes, tentant de créer une friction contre mon clitoris. Mes tétons poussaient contre le tissu de sa tunique. Tyran se laissa tomber à genoux devant moi, m’attrapa la hanche d’une grande main, me passa l’autre sous le genou et le passa par-dessus son épaule. Je n’eus pas le temps de me demander ce qu’il faisait avant qu’il pose sa bouche sur moi et aspire mon clitoris entre ses lèvres, avant de lui donner des coups de langue. Je jouis presque instantanément, les doigts emmêlés dans ses cheveux bruns. Je renversai la tête en arrière sur l’épaule de Hunt et mes yeux se fermèrent, tant c’était intense. Je le sentais dans mon clitoris, dans mon vagin vide, mais je sentais également leur désir. Le besoin pressant qu’avait Tyran de me pénétrer. Le désir tranquille de Hunt me fit jouir encore et encore. Lorsque je pus ouvrir les yeux à nouveau, je vis que Hunt me regardait avec un mélange de désir et d’émerveillement. Je n’avais encore jamais joui aussi vite. Et j’en voulais plus. J’étais toujours impatiente, toujours en manque. J’avais besoin d’être baisée. Je ne savais pas trop si ce que je ressentais, c’était mon envie, ou la leur. Je m’en fichais. — Baisez-moi, par pitié. Je n’avais plus honte, désormais. Non, à présent, j’avais envie d’être emplie par le membre de mon compagnon. Tyran se leva et je vis que sa bouche et son menton étaient couverts de mon désir. Il se lécha les lèvres, mais ne s’essuya pas. — Ce n’est pas toi qui commandes, Kristin. — Tyran. C’était la première fois que je prononçais son nom, et il sortit de ma bouche d’une voix suppliante et essoufflée. Je gémis. La poigne de Hunt autour de ma taille se resserra en entendant ce son, puis Tyran répondit : — Je sais. On sait. On ressent ton désir à travers le collier, nous aussi. On sait exactement de quoi tu as besoin. — Je ne peux pas te prendre par devant, compagne, me murmura Hunt à l’oreille alors qu’il levait une main pour me soulever un sein. C’est la prérogative du compagnon principal de t’emplir de sa semence, de te donner ton premier enfant. Je te prendrai par-derrière, mais pas aujourd’hui. Il faut d’abord qu’on te prépare. — Non, Hunt, dit Tyran. J’étais perdue. Hunt aussi, visiblement. — Qu’est-ce que tu veux dire ? demanda-t-il. — Nous ne sommes pas sur Prillon Prime. Ils nous ont abandonnés sur la Colonie. Nous respecterons la coutume prillonne en portant les colliers et en prenant une compagne ensemble, mais nous la baiserons comme elle le désire. — Mais c’est ton droit d’être le père du premier enfant, répondit Hunt. — L’enfant sera à nous tous, quelle que soit la semence. N’est-ce pas, compagne ? J’ignorais complètement de quoi ils parlaient. Mais oui, je voulais des enfants. Ils m’appartenaient tous les deux, alors non, ça n’avait pas d’importance, n’est-ce pas ? — Oui. Je me fiche de savoir qui est le père biologique. L’inspiration rapide de Hunt me fit sourire. Ça lui faisait plaisir, et son bonheur pétillait dans mon collier comme des bulles de champagne, me donnant la tête qui tourne. Grâce à ce collier, je pouvais désormais lire dans les pensées. Non, lire dans les émotions. J’aimais bien ce collier. Je n’avais pas besoin d’expliquer les choses à mes compagnons. Ils ressentiraient ce que je ressentais. Des millions de divorces pourraient être évités sur Terre, avec ce dispositif. — Tu veux qu’on te baise, compagne ? me demanda Tyran en se débarrassant de ses vêtements. Je hochai la tête et regardai son corps avec un regard avide. — Alors, mets-toi à quatre pattes. Montre-nous ta belle chatte rebondie.

Hunt

Je regardai notre compagne faire ce que Tyran lui ordonnait et mon sexe se durcissait : la douleur était agréable. Elle se mit à quatre pattes, elle était complètement nue. Elle était toute petite, mais parfaite, avec des cheveux blonds courts qui lui caressaient la mâchoire alors que ses seins lourds se balançaient sous son corps. Ses fesses étaient rondes, ses petites lèvres humides et luisantes, le signe qu’elle était prête à nous accueillir. Elle était excitée, elle avait envie de ses compagnons. Et les ordres de Tyran la mettaient dans tous ses états. Tyran avait toujours été un guerrier puissant, un meneur discret, mais il s’était contenté de rester en retrait et d’observer, depuis que nous avions échappé à la Ruche. Je savais qu’il avait cela en lui, mais il ne le montrait jamais. Mais maintenant ? Je ne m’étais pas attendu à ce qu’il exprime ce trait de caractère dans ces circonstances, avec notre compagne. Je n’aurais pas dû être surpris, mais je l’étais. J’étais bel et bien surpris que Kristin ne lui ait pas donné un coup de poing dans le nez face à sa démonstration d’autorité. Au lieu de cela, j’avais ressenti son besoin d’être dominée, son excitation face à ses ordres, la paix qu’elle ressentait en obéissant. Elle voulait qu’il commande. Je perçus le moment où elle se laissa aller, où elle s’offrit à lui. À nous deux. Lorsque je vis la respiration de Kristin devenir saccadée et ses yeux s’assombrir de désir, je ne pus nier que cette domination fonctionnait. — Déshabille-toi, Hunt, et allonge-toi sur le dos à côté d’elle. — Quoi ? J’arrachai mon regard à la peau veloutée de notre compagne pour regarder Tyran. Même si le fait qu’il donne des ordres à notre compagne me donnait une érection, le fait qu’il m’en donne à moi était nouveau. C’était complètement inattendu, et ma question le prouvait. — Tu m’as entendu, second. Mets-toi sur le dos et libère ta queue. Donne à notre petite compagne impatiente ce dont elle a besoin. Par tous les dieux, le ton de sa voix était inédit. Mais je ne pouvais pas nier que j’avais envie de faire exactement ce qu’il me demandait. Je voulais qu’elle me chevauche, m’enfoncer profondément dans sa bouche, dans sa chatte ou entre ses fesses. Peu importe. J’avais envie de la goûter, comme il l’avait fait. L’odeur de son excitation me rendait presque fou de désir. La voir à quatre pattes devant moi ? J’allais jouir avant même de l’avoir pénétrée. Je me débarrassai rapidement de mon pantalon et de ma tunique, puis je pris mon temps pour inspecter notre nouvelle compagne. Mes doigts lui effleurèrent le dos et les épaules, la courbe de sa hanche alors que je lui tournais autour. Sa peau était si pâle, d’une couleur si différente de celle des Prillons. Douce et chaude. Je ne fis pas ce que Tyran m’ordonnait, et je dis plutôt : — Notre compagne est magnifique, Tyran. Elle gémit et se pressa contre ma main. J’avais l’impression d’être un conquérant. — Sur le dos, Hunt. La chatte de notre compagne est vide. J’ignorais ce que Tyran avait en tête, et je m’en fichais, satisfait de participer du moment que notre compagne semblait en être heureuse, et que j’obtenais ce que je voulais. Elle. Allongé sur le dos sur le sol dur de la salle des transports, je me fichais que nous nous trouvions dans un endroit public sans coussin ni lit sous nos corps. Je levai une main pour caresser l’un des seins de Kristin, moelleux sous ma paume. Il était généreux et lourd, parfaitement adapté à ma main. — Pince-lui le téton, dit Tyran. Il marchait autour de nous, à présent, son armure contrastant avec notre nudité. — Pince-le fort, Hunt. Assure-toi qu’elle sache à qui elle appartient. J’hésitai, jusqu’à ce que je voie la lueur ardente dans les yeux de Kristin à ces mots et ses tétons durcir contre ma paume. Je ressentis son consentement, le vis lorsqu’elle cambra le dos et qu’elle pressa davantage son sein contre ma main. Je la pinçai, et elle poussa une exclamation. — Encore. Je fis ce que l’on m’ordonnait, et Kristin gémit. Tyran se pencha en avant, passa les doigts dans les cheveux courts de notre compagne et lui renversa la tête en arrière avant de lui dévorer les lèvres dans un baiser brutal. Il ne lui caressait pas la bouche avec ses lèvres, il la dominait, la dévorait et quand je les regardais, mon sexe devenait de plus en plus douloureux. Je continuais de jouer avec les seins de Kristin. L’excitation de Tyran me submergea à travers mon collier, son désir de contrôle était écrasant. Les émotions de notre compagne m’atteignirent ensuite. — Maintenant, compagne, tourne le dos à Hunt et remplis ta chatte mouillée de sa queue. — La position de la cow-girl inversée ? demanda-t-elle, l’air perplexe. J’ignorais complètement ce qu’elle voulait dire. Ses mots n’avaient aucun sens. C’était quoi, une cow-girl ? Pour toute réponse, Tyran la souleva au-dessus de moi, déplaçant à sa guise le petit corps agile. Il la mit en place et attendit qu’elle écarte les jambes avant de la poser sur mes hanches, de façon à ce qu’elle me tourne le dos, ses fesses rondes et parfaites face à moi pour que je puisse les admirer. — Fais ce qu’on te dit, et tu obtiendras exactement ce que tu veux, dit Tyran. Ce qu’on sait que tu veux. La chatte mouillée de Kristin frotta contre mon membre et nous gémîmes tous les deux, son essence fluide m’enduisant. Me marquant. — Si tu désobéis, je te donnerai la fessée jusqu’à ce que tu aies le cul en feu. C’est bien compris, compagne ? L’avertissement de Tyran la fit mouiller de plus belle. — Oui. Ce simple mot était presque une plainte de désir, et je tentai d’ignorer la partie de mon cerveau qui essayait de comprendre ce qui se passait exactement. Je m’étais imaginé allongé avec notre compagne entre nous — sur un lit — et je lui aurais fait l’amour longuement et lentement, sans l’effrayer avec nos sexes imposants. Mais notre petite humaine ne semblait pas effrayée. Pas le moins du monde. Non, elle était folle de désir, son excitation et son intérêt pour nous comme une drogue qui me parvenait à travers mon collier. Accro. Elle me rendait accro, et je ne l’avais même pas encore embrassée. — Baise-le, compagne. Prends-le bien profond. C H A P I T R E S E P T

unt

H C’était de la folie. Elle n’était arrivée que sept minutes plus tôt. Nous ne nous connaissions pas du tout, mise à part la familiarité créée par le test et les émotions qui passaient par nos colliers. Je m’étais imaginé que j’allais devoir la séduire pour la convaincre de rejoindre notre couche. Nous n’avions même pas encore quitté la salle des transports, et elle était en train de faire glisser sa chatte mouillée sur mon sexe. Tyran faisait les cent pas, marchant autour de nous comme un perfectionniste examinant son travail. Je fermai les yeux lorsque la petite main de Kristin enveloppa mon gland et le plaça entre ses jambes. Je serrai les dents lorsqu’elle glissa sur mon membre, enveloppant mon corps de sa chaleur humide. Elle était serrée, parfaite. Je sus que mon plaisir avait dû être transmis à Tyran à travers nos colliers quand il grogna et retira le haut de son armure, avant de la laisser tomber au sol. Ses yeux brûlaient de désir alors qu’il nous regardait, agenouillé entre mes jambes, fasciné par la traînée humide que laissait la chatte de Kristin alors qu’elle glissait de haut en bas sur mon sexe. — C’est bien. Baise-le. Chevauche-le. Prends sa semence. Force-le à te la donner. Elle est tout à toi. Mes bourses se contractèrent, dures, lourdes et prêtes à exploser sous cette friction, mais je me retins, pas encore prêt à ce que cela cesse. Par les dieux, je voulais que ça ne s’arrête jamais. Kristin me chevauchait, ses formes voluptueuses une vision à laquelle je ne pouvais pas détacher les yeux. Lorsque Tristan se leva et se débarrassa du reste de son armure et de ses bottes, je sus que notre compagne l’admirait, que la vue de son corps nu lui donnait du plaisir, et sa chatte se resserra sur mon membre avec possessivité. Tyran s’avança, complètement concentré sur le visage de notre compagne et il plaça son membre devant sa bouche. Durant un quart de seconde, je craignis qu’elle n’aime pas pratiquer la fellation, mais je m’aperçus que j’avais tort lorsqu’elle ouvrit la bouche. — Mets-lui délicatement un pouce entre les fesses, Hunt. Étire-la pendant que je lui pénètre la gorge avec ma queue. Il examina Kristin, puis ajouta : — Tu veux qu’on te prenne par tous les trous, compagne ? Je clignai des yeux, choqué par son franc-parler et son manque de délicatesse. Mais une excitation pure me parvint à travers mon collier. Celle de Kristin, pas celle de Tyran. Elle hocha la tête. Elle en avait envie. Elle voulait qu’il lui parle ainsi. Voulait que je la touche, que je l’ouvre, que je joue avec ses fesses. Que je la baise. J’allais l’avoir tout entière alors que Tyran n’avait presque pas joué avec elle. C’était lui son compagnon principal. C’était sa semence qui devrait l’emplir, faire le premier enfant, comme l’exigeait la coutume prillonne. C’était son droit. Ce n’était pas la loi, mais cette tradition remontait à des siècles. — Tyran, tu es son compagnon principal. Je ne crois pas que... — Quand on est avec notre compagne, c’est moi qui commande, Hunt. Vas-y. Il s’approcha davantage, et la bouche de Kristin s’ouvrit avec avidité. Elle se pencha en avant et le prit dans sa bouche comme s’il s’agissait de sa friandise préférée et qu’elle n’avait rien mangé depuis des mois. Il la prit par les cheveux et s’avança jusqu’à être si profondément enfoncé dans sa gorge qu’elle ne pouvait plus respirer. Je ressentis le plaisir de Tyran à travers mon collier, sus que Kristin se sentait puissante en lui offrant ce plaisir. Son côté dominant semblait exciter notre compagne, car elle leva les hanches et s’abattit sur mon membre avec force, les jambes grandes écartées, me prenant si profondément que mon gland tapait contre son col de l’utérus à chaque va-et-vient. Les ondes de choc me parcouraient le corps et je me mis à trembler sous elle, incapable de réfléchir ou de lui refuser quoi que ce soit. C’était incroyable, inimaginable. Mes mains trouvèrent ses fesses, et je les écartai, satisfait lorsque Kristin grogna sans cacher son désir. Je la pénétrai lentement, l’élargissant lentement avec mon pouce avant de pouvoir la remplir sans lui faire de mal. Je la pénétrai délicatement, massant l’anneau de muscles alors qu’elle se contractait sur moi, son sexe et ses fesses se refermant comme un étau sur moi alors que Tyran lui écartait la bouche avec son membre. Grâce aux muscles intérieurs que seules les femmes savent contrôler, Kristin se contracta sur moi pour me faire perdre la tête. Je ne pouvais plus me retenir, ne pouvais que succomber. Mes bourses remontèrent et je jouis, l’emplissant de ma semence. La satisfaction de Tyran était palpable, et même si je ne comprenais pas le besoin qu’il avait de nous donner des ordres, je n’avais aucune envie de lui tenir tête, pas alors que le sexe de notre compagne se contractait autour de moi et qu’elle atteignait l’extase à son tour. Je la sentis jouir autour de mon pouce alors que tout son corps se crispait, puis se détendait. Son cri fut étouffé par le sexe de Tyran, et elle poussa un grognement. Il se libéra de sa bouche et ne la laissa même pas reprendre son souffle. Il la souleva et je la lâchai, curieux de voir ce qu’il ferait ensuite. — Assieds-toi, Hunt. Je n’avais plus aucune intention de me rebeller, ou d’essayer de comprendre. Je m’assis, et Tyran tourna Kristin vers moi, avant de la mettre à genoux devant moi. Les yeux de notre compagne étaient rendus flous par le plaisir, ses lèvres roses gonflées. Il se laissa tomber à genoux derrière elle, et d’un coup de reins, il s’enfonça en elle. Elle poussa une exclamation ; la tête rejetée en arrière pour se poser sur le torse de Tyran alors qu’elle s’accrochait à moi. — Oui. Seigneur. Vas-y. Baise-moi. Ses mots étaient rocailleux et soyeux, sa peau rose vif alors qu’il la prenait encore et encore, faisant s’agiter ses seins et lui coupant le souffle. Elle me regarda, ses yeux bleus troubles, mais intenses. Elle me voyait, me sentait. Nous sentait tous les deux. — Suce-lui les seins. Joue avec son clitoris. Mais si elle parle à nouveau, qu’elle demande quoi que ce soit, arrête-toi. Mes lèvres se trouvaient autour de son téton, l’aspirant profondément, avant qu’il ait fini de parler. Je le sentais durcir sous ma langue. Et bon sang, c’était encore meilleur que je ne l’avais espéré, doux, féminin, et à moi. Je ne pus retenir le grondement qui s’éleva dans ma gorge en pensant à ces mots. Elle était peut-être accouplée à Tyran, mais elle m’appartenait quand même. Ma semence enduisait son sexe, facilitant les va-et-vient de mon ami. Mes mains étaient sur son corps. Elle était coincée entre nous deux, et je réalisai que ces premier ou deuxième n’avaient pas d’importance. Elle était à nous. Je laissai tomber ma main entre ses replis humides et je trouvai le bouton sensible, avant de le caresser, de le pincer et de tirer dessus, en faisant attention de tout arrêter avant qu’elle ne puisse jouir, jusqu’à ce qu’elle se cambre dans les bras de Tyran, impatiente d’obtenir ce qu’il n’était pas encore prêt à lui donner. Oui, je voyais très bien ce qu’il faisait, la poussant dans les derniers retranchements du plaisir, le rendant plus fort, plus intense, incroyable. Elle poussa une plainte, ses mains agrippées à mon torse, y laissant des marques que je porterais avec fierté. Aucune baguette ReGen ne serait autorisée à les effacer. Si le médecin essayait, il se prendrait un coup de poing dans le nez. Ces cicatrices m’appartenaient, tout comme elle. — Tu veux jouir, compagne ? — Oui, pitié ! Elle tenta de se servir de ses jambes pour bouger, mais Tyran était trop fort, son bras passé autour de la taille de Kristin, la maintenait en place. Même une bête Atlante ne serait pas capable de le battre en termes de force pure. Notre petite humaine fragile n’avait aucune chance de briser sa poigne ni sa volonté. Il se pencha pendant que je jouais avec son clitoris, le faisant doucement rouler entre deux doigts, puis les lèvres de Tyran se posèrent contre son oreille : — Tu veux que je te remplisse ? Que je te baise ? Que je laisse Hunt te caresser jusqu’à ce que tu jouisses sur ma queue ? Elle frémit, et ses paupières se fermèrent. Ça ne me plaisait pas. J’avais envie de la voir perdre pied, comme Tyran l’avait vue quelques minutes plus tôt. Je voulais voir le feu dans son regard. — Ouvre les yeux, compagne, dis-je d’une voix aussi grave que celle de Tyran, et tout aussi autoritaire. Elle ouvrit les paupières et je soutins son regard lorsque Tyran changea de position sous son corps. Il la souleva et son sexe continua de faire des va- et-vient en elle. — Regarde-le, compagne, ordonna-t-il. N’essaye pas de te cacher en notre présence. On sait tout. On ressent tout ce que tu ressens. On sait de quoi tu as besoin, et on va te le donner. On te donnera tout. — Oui, dit-elle en se léchant les lèvres. Mon sexe se contracta en réponse. J’avais déjà de nouveau envie d’elle. — Alors, jouis, compagne. Jouis pour nous, dit Tyran. Il cessa de se retenir et la pénétra comme une bête sauvage alors que je lui caressais le clitoris. Elle perdit les pédales en quelques secondes, criant sa jouissance, mais ce n’était pas suffisant pour Tyran, qui lui ordonna de jouir à nouveau, ce que, à ma grande surprise, elle fit. Je sentis son orgasme la parcourir, impossible à arrêter. Tyran céda enfin, sa jouissance me frappant à travers mon collier comme une poigne de fer lorsqu’il emplit notre compagne de sa semence. Elle nous avait pris tous les deux, et si elle portait un enfant, nous n’aurions aucun moyen de savoir qui était le père biologique. Mais ça m’allait. Je m’en fichais. Kristin était à nous. Elle était magnifique. Sensuelle. Comme du feu grégeois dans nos bras. Tyran libéra son sexe et elle se laissa tomber en avant, dans mon étreinte. Je la rattrapai et la serrai contre moi quand mon ami rapporta la couverture que nous avions délaissée. Nous l’enveloppâmes, et quand il fut certain qu’elle était bien installée, protégée et à l’abri dans mes bras, il se tourna sans un mot pour enfiler son armure. Kristin était à nous, mais je m’inquiétais plus que jamais que Tyran ne soit jamais vraiment à elle, trop brisé et trop sombre pour que la douceur de notre compagne puisse opérer. C H A P I T R E H U I T

ristin K Je haletai et m’assis bien droite. La pièce était plongée dans l’obscurité, et j’ignorais complètement où je me trouvais. Je savais que j’avais fait un rêve, mais je ne m’en souvenais pas. Il devenait plus flou et m’échappait à mesure que je tentais de m’en rappeler. Ma chambre possédait une fenêtre à droite de mon lit. Je roulai et cherchai la lumière sur le porche du voisin, mais la fenêtre n’était pas là. Le lit aussi était différent. Plus moelleux. Et l’odeur fleurie de mon adoucissant était absente. Au lieu de cela, je sentais le musc, l’homme et le sexe. Même si je n’avais pas vraiment peur du noir, je gardais une veilleuse dans la salle de bain. Une fois, je m’étais cognée les doigts de pieds en plein milieu de la nuit lorsque je titubais jusqu’aux toilettes, et je n’avais pas envie de revivre ça. Mais aucune lueur n’emplissait l’espace. Je sentais les murs de la pièce, le plafond qui me surplombait, mais je ne les voyais pas. Je ne voyais rien du tout. Pas le moindre meuble. Pas la moindre décoration. Pas de porte. Et j’étais nue, un drap passé autour de la taille. D’habitude, je dormais en tee-shirt et en culotte. Mais rien de tout ça ne m’était familier. Je bougeai les jambes, et une gêne me parcourut. J’étais courbaturée. La douleur m’envoya une vague de souvenirs, et tout se remit en place d’un coup, comme si mon cerveau avait simplement eu besoin de quelques secondes supplémentaires pour se réveiller. Mes muscles tiraient et mon sexe était sensible. Mes fesses aussi. Lorsque je bougeai, mes cuisses frottèrent contre l’humidité de la semence de Hunt. Mes tétons durcirent, et soudain, je fus incapable de chasser les rapports sauvages que nous avions eus de mon esprit. Je me sentais que je leur appartenais. Mes compagnons ne m’avaient laissé aucun doute sur la façon dont ils me voulaient, et je ne m’étais jamais sentie aussi appréciée et désirée. Ce sentiment était enivrant, et je dus lutter pour contenir un gloussement en pensant au tournant incroyable qu’avait pris ma vie. Je me trouvais sur une autre planète, avec non pas un, mais deux compagnons. Et je les avais laissés me faire tout ce qu’ils voulaient. Bon sang, j’en voulais plus. Je portai la main à mon cou et poussai un soupir de soulagement en sentant le doux matériau sous mes doigts, la marque de mes compagnons prillons, une preuve supplémentaire de l’endroit où je me trouvais. Je fermai les yeux, soudain perdue. Je ne sentais plus Tyran. Son intensité avait été comme de la lave dans mes veines. Et mon second, Hunt. Il était calme, le baume qui apaisait le feu de Tyran. Sans lui, je n’étais pas sûre de pouvoir affronter le côté dominateur de mon compagnon principal. Je réalisais qu’il avait besoin de ma confiance, de ma soumission. Mais si j’étais tout à fait franche, je n’étais pas sûre de pouvoir le gérer sans le self-control de Hunt. Tyran m’avait donné l’impression d’être une amante passionnée et sauvage. Je n’avais jamais été aussi excitée de toute ma vie. Mais j’avais eu peur, aussi. Peur de lui. Et surtout, peur de moi. La réserve et le détachement de Hunt avaient été mon roc, et je songeai à la sagesse de l’ordinateur qui nous avait assortis. D’une façon ou d’une autre, les protocoles du Programme des Épouses avaient su m’accoupler à deux guerriers complémentaires. Lumière et noirceur. Feu et glace. Intrépidité et réserve. Par miracle, cet ordinateur avait su que j’aurais besoin d’eux deux.

EN PARLANT DE COMPAGNONS, où étaient les miens ? Je ne savais pas quelle heure il était, ni si c’était le jour ou la nuit. Tout ce que je savais, c’était que j’étais bien réveillée et que je mourais de faim. Je rabattis le drap sur ma poitrine, m’assis et me glissai vers ce qui devait être le bord du lit. Je réalisai que le matelas était le plus grand que j’avais jamais connu, largement suffisant pour accueillir une femme humaine et deux guerriers prillons de plus de deux mètres. Je trouvai le bord et passai les jambes par-dessus. Mes orteils ne touchaient pas le sol. Non, je n’étais vraiment pas dans ma chambre. Je n’étais même pas sur Terre. J’étais sur le point de sauter au sol en espérant que tout se passerait bien lorsqu’une partie du mur glissa en silence, comme dans Star Trek. Il n’y avait pas de porte, pas de poignée et pas de gonds grinçants. Une section de mur se contenta de glisser et de disparaître. Et là, avec la lumière qui brillait derrière lui comme s’il s’agissait d’une espèce de Dieu, se tenait la silhouette d’un guerrier prillon baraqué. Ses émotions me frappèrent immédiatement. Satisfaction. Curiosité. Inquiétude. — Hunt. En entendant ma voix, il fut pris d’une bouffée de possessivité. D’instinct protecteur. Primaire. Il n’était peut-être pas tant que ça dans la maîtrise, finalement. — Je t’ai sentie te réveiller, Kristin. Je sens ta faim. Cette déclaration aurait peut-être dû me faire flipper, mais notre partie de jambes en l’air incroyable m’avait débarrassée de la plupart de mes incertitudes. Le collier nous rendait extrêmement sensibles aux besoins des autres. Il démultipliait certainement le plaisir. Quand j’étais avec un nouveau mec, souvent, je n’arrivais pas à me détendre, j’étais inquiète qu’il me prenne pour une perverse ou une salope parce que j’aimais un peu trop le sexe. J’aimais que les hommes prennent les commandes. Qu’ils me donnent la fessée. Qu’ils se servent d’accessoires. Qu’ils jouent un peu avec la porte de derrière. J’aimais la sauvagerie. J’avais découvert que même si beaucoup d’hommes fantasmaient sur les femmes comme moi, une fois qu’on était nus ensemble, quand ça devenait bien réel, ils avaient souvent du mal à se montrer à la hauteur. Mais ce n’était pas le cas de Hunt et de Tyran. Pas du tout. Tyran m’avait poussée dans mes retranchements, des retranchements que j’ignorais avoir. Hunt avait été un peu surpris, je l’avais perçu, lorsque Tyran m’avait poussée ainsi. Visiblement, il n’était pas au courant que son ami aimait ce genre de choses au lit. Mais Hunt s’était joyeusement joint à nous, et je savais que ça leur avait plu à tous les deux. Que toutes ces choses nous avaient plu à tous. Un grondement sortit de la gorge de Hunt lorsque l’excitation s’empara de nouveau de moi, rien que parce que je pensais à le chevaucher. À me faire tirer par les cheveux par Tyran, à obéir à ses ordres. Quand Hunt pénétra dans la pièce, je commençai à frissonner. — Lumière, dix pour cent, dit-il. Une lueur éclaira la pièce juste assez pour que je puisse le voir, pour que je remarque qu’il portait des vêtements sombres et que son regard me passait en revue, mais c’est tout. — Tu sais à quel point tu es belle ? me demanda-t-il. Une bouffée de désir atteignit mon collier pour accompagner ses mots. Sa question n’aurait pas dû me mettre mal à l’aise, surtout que je sentais qu’il disait la vérité, mais c’était l’effet qu’elle me faisait, et je tirai le drap jusqu’à mon cou. — Arrête, dit-il en venant s’asseoir au bord du lit, en faisant s’enfoncer le matelas sous son poids. Je sais que je ne suis pas autoritaire comme Tyran, et je ne le serai jamais, mais j’espère que tu finiras par tenir à moi aussi. Malgré son physique impressionnant, j’entendais une pointe d’incertitude dans sa voix. — Je tiens déjà à toi. Je me penchai et lui posai la tête sur l’épaule. Je savais qu’il entendrait la vérité dans ma voix comme je l’avais entendue dans la sienne. — J’ai aussi besoin de toi, Hunt. Il tourna la tête pour me regarder et je rassemblai mon courage. Je levai les lèvres pour lui offrir un lent et doux baiser. Je laissai glisser le drap, le laissai tomber à ma taille. Il m’embrassa avec tendresse et affection. Lorsqu’il recula, il regarda mes seins, puis il me sourit. — Tu ne peux pas m’en vouloir de regarder. Tu es vraiment belle, et je suis toujours émerveillé que tu sois à moi. — C’est réciproque. Il fallait que je le dise à voix haute. J’avais l’impression d’être dans un rêve. J’avais à moitié peur de me réveiller dans cette chaise débile sur Terre, avec la gardienne Égara qui me regarderait avec ses yeux de hibou, prête à me gronder parce que je me serais débattue. — Je viens de percevoir de la contrariété, me dit Hunt en me caressant la joue. Raconte-moi ce qui t’embête. — Je me suis réveillée dans le noir, sans aucune idée de l’endroit où j’étais. J’étais perdue, mais te voir me fait du bien. Je me sens... en sécurité, admis-je. — Aucun mal ne te sera jamais fait, Kristin de la Terre. Nous te protégerons de nos vies. Je le savais. Je n’avais pas besoin d’entendre ses mots ou de sentir l’impact qu’ils avaient à travers le collier. Il leva la main la plus éloignée de moi, il avait une drôle de petite baguette entre les doigts, le bout de celle-ci faisait jaillir une drôle de lueur bleue dans la pièce sombre. — C’est une baguette ReGen. Elle te guérira. Un drôle de petit bourdonnement sembla sortir de l’instrument, et je m’allongeai en arrière pour tenter de m’en éloigner. — Je vais bien. — Non. On a été brusques avec toi, dit-il en fronçant les sourcils. Je sentis le doute s’emparer de son esprit. De l’inquiétude. Je ne savais pas vraiment à quel sujet, mais j’avais envie de le rassurer. Je hochai la tête et il approcha la baguette de moi. Il la tint à quelques centimètres de ma peau, il commença par ma tête et la balada jusqu’à mes pieds. Mes tétons sensibles cessèrent de me brûler et j’arrêtai de ressentir des élancements dans mon entrejambe. — Ouah. J’aurais adoré en avoir une comme ça sur Terre à une ou deux reprises. Comme quand j’étais tombée de la balançoire et que je m’étais cassée le bras à l’école primaire. Ou la première fois que je m’étais fait assommer pendant l’entraînement du FBI. — Merci, dis-je. — De rien, compagne. Quoi qu’il te faille, tu n’as qu’à demander. — Il faut que je prenne une douche. Et à manger. Dans cet ordre. Mes douleurs avaient disparu, mais l’odeur du sexe et du péché me collait à la peau comme le parfum de l’enfer. — Et pourquoi je ne sens plus Tyran ? ajoutai-je. Hunt avala sa salive. Avec difficulté. — Il est trop loin de nous pour l’instant. Il est parti voir de nouveaux guerriers. — Oh. J’étais déçue. Il me manquait, mais je ne voulais pas le dire. Apparemment, Hunt le ressentait. La douleur et la déception submergèrent mon collier. — Je vais t’emmener le voir, dit-il. Il se leva sans me regarder, et je fus incapable de le regarder s’en aller. Je me dépêchai de prendre sa grande main dans la mienne et de le tirer vers moi. — Hunt. Le test m’a appairée à Tyran, mais s’il t’a choisi comme second, il y a une raison. J’ai aussi besoin de toi. Son regard croisa le mien. La couleur de ses yeux était remarquable. Je n’avais encore jamais vu des iris caramel, mais ils me fascinaient. Hunt me fascinait. Il secoua la tête. — Non, compagne. Tyran aurait pu choisir des dizaines d’autres seconds. N’importe qui aurait été honoré de prendre soin de toi, de te chérir. Je lui pressai la main. Elle était si grande, preuve de notre différence. — Non, rétorquai-je. Après ce qu’on a fait hier soir, ce que Tyran... savait sur moi, sur ce que je voulais — non, ce dont j’avais besoin —, il est évident que le protocole marche. Il savait des choses sur moi que personne n’avait encore comprises. Il sait, et il a besoin de moi, lui aussi. Il a besoin que je sois celle que je suis. Je n’ai pas besoin de me cacher. Je n’en ai pas envie. Le test facilite vraiment la période de séduction. Il fronça les sourcils, mais il écouta quand je poursuivis : — Tyran a fait de toi son second à cause de qui tu es. Il a besoin de toi. Vous êtes complémentaires, et ça veut dire que j’ai besoin de ces mêmes traits de caractère. Je ne veux pas de deux compagnons autoritaires, sur le fil du rasoir en permanence. J’aime être dominée au lit, c’est vrai, mais j’aime aussi ça. Toi. Moi. J’aime me sentir en sécurité. J’ai besoin de stabilité tout autant que de la passion de Tyran. J’ai besoin que tu me fasses me sentir comme ça. Chérie et protégée. Mon sourire était timide et je battis des cils dans sa direction. Je n’avais encore jamais, ô grand jamais, eu ce genre de conversation avec un autre homme. Mais ce n’était pas un homme. C’était un extraterrestre, et mon compagnon. Il était à moi. — Tu es gentil, Hunt, et je ne renoncerai pas à toi. Si Tyran doit me briser, je veux que tu sois là pour me raccommoder. Il sourit. — Je serai toujours là, compagne. Il posa une main sur ma nuque et m’attira contre lui pour un baiser chaud et doux, avant de me relâcher. Je titubai, et il rit, me prenant de nouveau la main avec une familiarité qu’il aurait fallu des mois, voire des années, pour cultiver avec un homme sur Terre. Je savais que mon excitation et ma soumission totale étaient à sa disposition. Et je savais qu’il pouvait percevoir mon désir pour lui à travers nos colliers. — Si tu dis à qui que ce soit que je suis gentil, je te donnerai la fessée, et je n’aurai pas besoin que Tyran m’ordonne de le faire. Je rougis à cette idée. — Je garderai le secret, dis-je. Je restai silencieuse un moment, me contentant de regarder nos mains jointes, mais une image revint me hanter. Tyran. Tyran le silencieux. Son cœur alourdi par une noirceur que je ne comprenais pas. Tyran qui me laissait. Qui nous laissait. — Tyran... commençai-je. Hunt poussa un soupir. — Comme moi, Tyran s’est battu pour la Coalition et a été capturé par la Ruche. Tous les guerriers ont été retenus prisonniers à un moment ou à un autre. Nous nous sommes tous échappés, mais nous avons subi des horreurs. Les tortures que nous avons endurées sont différentes pour chacun. De ma main libre, je caressai la peau argentée de la tempe de Hunt, et je regardai son œil aux reflets métalliques. Il frémit et ferma les paupières, se pressant contre ma main comme si je lui avais offert l’ambroisie des dieux. Je caressai sa chair avec mon pouce, la trouvant légèrement froide au toucher, mais le changement de température était à peine perceptible. J’apaisai mon compagnon et je réalisai que j’ignorais tout de ce que la Ruche avait fait à Tyran. — Qu’est-ce qu’ils lui ont fait ? Hunt ouvrit lentement les yeux, comme s’il hésitait à répondre à une question aussi morbide. — Tyran est différent de tous les autres guerriers que je connais. Ils ne l’ont pas marqué à l’extérieur. Je crois qu’ils voulaient nous le renvoyer, pour duper nos commandants, qu’ils croient qu’il était indemne. — Mais il ne l’est pas ? — Non, dit Hunt en tournant la tête pour déposer un baiser au centre de ma paume. Les muscles et les os de Tyran ont été infiltrés. Je tentai d’imaginer ce que cela signifiait, sans succès. — Et alors ? Qu’est-ce que ça veut dire ? Hunt poussa un soupir et se dégagea, et je me sentis coupable de le pousser ainsi. Il se sentait coupable d’être là avec moi, à recevoir du plaisir alors que Tyran souffrait. Mais c’était la faute de mon compagnon obstiné. Si Tyran n’était pas parti, je serais en train de le caresser, lui aussi. Mais il ne m’en avait pas laissé l’occasion. — Son corps est puissant, anormalement fort et rapide. Il est plus fort qu’un Atlan en mode bestial. Je l’ai vu déchiqueter la carlingue d’un chasseur à mains nues, déchiqueter le métal comme si ce n’était que du papier. Hunt marqua une pause pour me laisser digérer ce qu’il m’avait dit, mais pas assez longtemps. — La plupart d’entre nous avons une ou deux parties du corps affectées par la Ruche, comme moi avec mon œil et mon bras. Nous avons de petites cicatrices. Mais le corps tout entier de Tyran est parasité par la Ruche. Il a des implants microscopiques dans chaque muscle et chaque os. Il doit faire attention en permanence. Et il doit faire particulièrement attention avec toi. — Pourquoi ça ? Hunt rit, son amusement sincère. — Parce que, compagne, tu es petite, fragile et parfaite. Tu es comme un pétale de fleur sous nos bottes, et même si on meurt d’envie de te toucher, nous sommes conscients que nous risquons de te faire du mal. Alors j’avais couché avec une espèce de Superman capable de déchirer du métal à mains nues ? Mon estomac gargouilla et me rappela que je n’avais pas mangé depuis plus d’une journée, je secouai la tête. Peu importe. Je le voulais. J’avais besoin de lui. J’avais faim, j’étais en colère, et je me fichais des tortures mentales que les guerriers s’infligeaient sur cette planète. Il m’appartenait, et tant pis pour ses implants microscopiques. — Il est à moi. Je me fiche de savoir ce qu’il est. J’ai été accouplée à lui tel qu’il est maintenant. Vous êtes tous les deux à moi, et je ne renoncerai pas à vous. — Même si je me souviens de ce qui m’est arrivé, je ne laisse pas ça me dicter ma vie. J’ai accepté d’avoir changé. Certains en sont incapables et se suicident. Certains deviennent agressifs. D’autres s’habituent avec le temps, et leur colère diminue au fil des mois. Tyran, et bien, son échec le hante plus que la plupart des gens. — Pourquoi ? Était-ce donc le seul mot que j’étais capable de prononcer aujourd’hui ? — C’est un Zakar. J’ouvris la bouche pour lui ressortir pour la énième fois la question préférée des enfants de deux ans, mais il m’interrompit : — La famille Zakar est très importante sur Prillon Prime. Ils sont aux commandes de la Flotte 17 depuis plus de six cents ans. Son cousin, Grigg, a été nommé commandant des forces armées il y a quelques années, c’est le plus jeune commandant depuis plus d’un siècle. La lumière se rallumait dans mon cerveau, lentement. — Qu’est-ce que ça a à voir avec Tyran ? Hunt poussa un soupir. — Ma famille ne fait pas partie de l’élite, alors je n’ai pas autant la pression que lui. Sa famille est difficile. Pleine de valeureux guerriers qui se sont battus pendant de nombreuses années. Même leurs femmes sont sans pitié. Sa famille a coupé les ponts avec lui lorsqu’il a été capturé par la Ruche. Ses terres et sa fortune ont été données à sa sœur. Il est mort à leurs yeux. Mort à leurs yeux ? Mon corps tout entier se crispa de douleur. — Quelle bande d’enfoirés. Hunt soutint mon regard. — Maintenant, tu commences à comprendre, dit-il. Les guerriers de la Coalition sont capturés et contaminés. Si nous survivons aux tortures de la Ruche, nous sommes envoyés vivre ici. On nous refusait des compagnes, une famille, notre fortune. Nos maisons, nous n’avons plus rien. — Mais je suis là. Il me caressa la joue. — Oui. Que les dieux soient loués, notre nouveau Prime est l’un d’entre nous. Il comprend, et il essaye de nous aider. Mais l’espoir est fragile, Kristin. Tu es seulement la deuxième compagne à arriver sur la Colonie, alors que nos guerriers ont commencé les tests il y a près de six mois. Ton arrivée est un miracle. Et le fait que tu sois l’épouse d’un Zakar... Il s’interrompit comme s’il ne savait pas comment finir sa phrase. — Alors, Tyran ne veut pas de compagne ? — Il te veut tellement que ça le détruit. Quand il souffre, il se... renferme. Il se renferme ? C’était comme ça qu’ils appelaient ça, par ici ? — Tu ne veux pas plutôt dire qu’il devient très sexualisé et extrêmement dominateur ? Hunt haussa les épaules. — C’est l’une de ses façons de gérer la situation. Il a perdu le contrôle quand il était à la merci de la Ruche, alors il est compréhensible que quelqu’un comme lui devienne encore plus taciturne. Avant sa capture, il préférait être aux commandes, mais à présent, il en a encore plus besoin. Tu l’aides avec ça, en lui donnant un environnement dans lequel il peut exercer ce pouvoir. — Le sexe, tu veux dire. — Exactement. En te soumettant, tu lui rends sa force. C’est très beau à voir. — Si c’est si beau et utile que ça, pourquoi il n’est pas là ? Pourquoi est- ce que je ne peux pas le sentir ? Pourquoi est-ce qu’il est parti ? demandai-je en touchant mon collier de ma main libre. Sa famille, je m’en fiche. Comme je l’ai dit, on dirait une belle bande d’enfoirés. — Quand quelque chose le préoccupe, il travaille. Il n’est pas repassé par nos quartiers. Il regrette peut-être ce qu’il a fait avec toi, son comportement. Il a peut-être simplement besoin d’un moment pour réfléchir. Je sais que tu lui fais du bien. Que tu nous fais du bien à tous les deux. Je l’enlaçai et me blottis contre lui, je ne pensais plus au drap. Je levai les yeux vers lui et posai le menton contre sa poitrine. — Je suis contente d’être là. Il m’embrassa, avec lenteur et douceur. Lorsqu’il recula, je souris. Je sentais notre amusement partagé à travers le collier. — Je ne suis ni gentil, ni doux, compagne. N’oublie pas ce détail de la plus haute importance. Je souris encore. — C’est notre petit secret. — J’ai envie de toi, admit-il en caressant mon dos nu avec sensualité. Aucune règle n’interdit à un second de donner du plaisir à sa compagne, mais tu dois te laver et manger. Et je veux que Tyran soit avec nous quand je te prendrai à nouveau. Je comprenais. C’était toujours trop nouveau, trop à vif. Nous avions besoin d’être tous les trois. — Oui. On va le chercher ? — Allons te trouver des habits dans le S-Gen, et je te ferai visiter. Je suis sûr que la rumeur apprendra bientôt à Tyran où tu te trouves. Il me regarda de la tête aux pieds, ses yeux s’attardant sur des endroits qui me donnèrent des frissons. — Va prendre une douche, et ensuite, on ira voir les autres. — Les autres ? Il se pencha en avant, jusqu’à ce que nos fronts se touchent. — Oui. Tu te souviens, quand je t’ai dit que tu étais seulement la deuxième compagne à arriver sur la Colonie ? Te rencontrer donnera de l’espoir aux autres guerriers. Ils verront comme tu es radieuse, grâce à nos merveilleux talents au lit. Je levai les yeux au ciel et lui donnai un petit coup joueur dans la poitrine, mais son torse était aussi dur que le mur derrière nous. J’ouvris la bouche pour le contredire, mais je découvris que j’en étais incapable. Oui. J’étais heureuse, et c’était grâce à eux. Pour la première fois depuis très, très longtemps, j’étais heureuse, insouciante. Je ne m’inquiétais pas pour une fille de treize ans portée disparue, je n’avais pas à m’occuper de parents terrifiés ou de dangereux criminels. Il n’y avait que moi et mes compagnons. Et je savais que Tyran était à moi. Que Hunt était à moi. Ils n’iraient nulle part, et moi non plus. Tout s’arrangerait. — Oui, dis-je. Je suis heureuse. Il recula et me regarda une fois de plus, son sourire plein de malice. — J’imagine qu’on ferait mieux de s’assurer que tu portes du bleu. Je clignai des yeux sans comprendre. — Pourquoi ? Hunt me tira derrière lui, et je le suivis alors qu’il me guidait vers la salle de bains. — Parce que le bleu est la couleur de la famille de Tyran. Il péterait les plombs s’il te voyait porter une autre couleur dans une pièce pleine de guerriers non accouplés. C H A P I T R E N E U F

ristin K — Une autre couleur ? Laquelle, par exemple ? Hunt rit. — Comme le cuivré du gouverneur Rone. Ou le rouge foncé du Prime Nial. Je lui souris en retour. — Je devrais peut-être bousculer un peu ses attentes. J’étais fâchée contre Tyran, fâchée qu’il m’ait prise avec autant de talent, tout ça pour s’en aller. Fâchée qu’il m’ait laissée sans une explication ou un au revoir. J’avais envie de l’asticoter. Il avait besoin qu’on lui résiste un peu, et je serais ravie de m’en charger. Je n’avais encore jamais refusé de relever un défi. Ça n’allait pas commencer maintenant. — Le rouge me va à merveille, dis-je. Mon second me donna une tape sur mes fesses nues alors que je filais sous la douche. — La seule chose rouge, ce sera la couleur de tes fesses quand on en aura fini avec toi. À l’idée qu’ils me prennent à nouveau, une vague de chaleur me parcourut, ce qui fit grogner Hunt. — Pas aujourd’hui, compagne. Ce n’est pas le bon jour pour pousser Tyran à bout. Il me tuerait. Une fois que ton collier sera bleu, tu pourras tourmenter ton pauvre compagnon à loisir. Son regard devint plus sombre alors que l’eau se mettait à couler, chaude, pleine de vapeur et avec une odeur paradisiaque qui selon lui, venait des agents nettoyants qui y étaient mélangés. — Mais tu ferais mieux d’être prête à affronter les conséquences, ajouta- t-il en me donnant une autre petite tape enjouée. J’allai me mettre sous l’eau, un sourire aux lèvres. Les conséquences ? Comme une bonne fessée ? Ou un mâle alpha qui me pencherait sur une table pour me prendre sauvagement ? Ou qui me plaquerait contre le mur, m’arracherait mes vêtements et me baiserait jusqu’à ce que je l’implore de me laisser jouir ? Ou peut-être qu’il ordonnerait à mon second de me maintenir dans ses bras pendant que Tyran me prendrait par-derrière ? Oh, oui. Je pouvais vivre avec ce genre de conséquences. Je me lavai et m’habillai rapidement, debout dans l’étrange S-Gen, une structure lisse et noire située dans un coin de nos appartements. Une lumière vert vif scanna mon corps, puis je sortis lorsque Hunt me l’indiqua. Pour mon plus grand plaisir, je vis une tunique, un pantalon et des bottes à semelles souples apparaître au centre de la machine, comme si ces vêtements s’étaient téléportés depuis une boutique. Ils m’allaient à la perfection, le tissu moulant sans être serré, comme si elle avait été faite sur mesures. La tunique avait des manches longues qui me tombaient juste au-dessus des coudes, et un col qui soulignait mes clavicules, juste sous le ruban noir. Elle m’arrivait à mi-cuisse, couvrant mes fesses, alors je n’avais pas l’impression de faire étalage de mes attributs. Comme l’avait voulu Hunt, les vêtements étaient du même bleu nuit que les colliers de mes compagnons, mais ça ne me dérangeait pas du tout. J’aimais savoir qu’ils voulaient montrer à tout le monde que je leur appartenais. J’étais en train d’enfiler ma deuxième botte lorsqu’une espèce de haut- parleur près de la porte émit un son assourdissant. — Capitaine Hunt ! On a besoin de vous tout de suite ! Il y a eu une attaque ! Je reposai brusquement le pied et me levai lorsque quelqu’un tambourina à la porte. Hunt passa la main sur le panneau de contrôle de la porte, et elle s’ouvrit pour révéler quatre guerriers hauts gradés, vêtus d’une armure identique à celle que Tyran avait portée la veille. — Capitaine, le gouverneur vous ordonne, à vous et à Dame Zakar, de le retrouver en salle des commandes. Immédiatement. — Dame Rone est là-bas ? demandai-je à brûle-pourpoint, avant que Hunt puisse m’en empêcher. Apparemment, je m’appelais Dame Zakar, désormais. Encore un changement auquel j’allais devoir m’habituer. Le guerrier me regarda, ses yeux me dévorant maintenant qu’il en avait la permission. Il me dévisageait, mais pas de façon bizarre. Plutôt avec de la fascination, de l’émerveillement. Comme si j’étais un fantôme ou un ange sur le point de disparaître. — Oui, Madame. Hunt se tourna vers moi, et je vis l’ordre se former sur son visage. Il passait de doux compagnon à meneur endurci sous mes yeux. Je secouai la tête, car je savais ce qu’il pensait. — Non. Hors de question, Hunt. Je viens. J’étais dans les forces de l’ordre, sur Terre. Je viens, et je veux l’un de ces fusils. Je lui montrai les quatre gardes, chacun équipé d’une espèce de fusil. Comme mes compagnons, les guerriers étaient tous des Prillons, leurs peaux allant de l’or foncé au brun, presque de la couleur du café noir. Ils étaient gigantesques et super intimidants. J’avais vraiment, vraiment envie d’avoir l’un de leur fusil. Il me tendit la main et céda. — Je n’ai pas le temps de batailler, et le gouverneur a demandé ta présence. Reste près de moi. Et pas de fusil. Satisfaite, pour l’instant, je le pris par la main. Mais je regardai les holsters de deux des guerriers alors que je marchais derrière eux, dans le couloir. Ils avaient des petits pistolets argentés accrochés aux jambes. Ils ne devaient pas être bien différents des Berretas du FBI. Avant la fin de la journée, l’un d’entre eux m’appartiendrait.

Tyran, Base 3, Salle des Commandes

Voir ma compagne si ravie de rencontrer Dame Rone était la seule chose qui m’empêchait d’arracher la tête de tous les mâles de la pièce comme si j’étais une bête Atlane. Je sentis le soulagement qu’éprouva Kristin en rencontrant une autre terrienne, à l’idée de ne pas être la seule femme ici. Avoir deux compagnons prillons aurait déjà été une transition difficile pour une Prillonne. Mais pour une terrienne, alors que les humains étaient si petits, comparés à nous ? Je m’étais battu aux côtés de guerriers terriens. Ils étaient courageux et féroces, et faisaient au moins une tête de moins que Hunt et moi. Mais elle s’en était très bien sortie avec nous, prenant nos sexes et nous revendiquant à sa manière. Heureusement que nous avions les colliers. Ils nous avaient permis de répondre à certaines questions. Je n’avais pas besoin de me demander si je rendais ma compagne heureuse. Ce que les autres étaient obligés de deviner, nous le percevions immédiatement. J’observai ses moindres mouvements, ses changements d’expression. Mon obsession, combinée aux informations que me donnait le collier, nourrissait ma confiance en elle, en notre accouplement. Ce qui m’inquiétait, c’était moi. J’étais une menace pour tous ceux qui l’approchaient. Je préférerais me tuer plutôt que de faire du mal à ma compagne, et j’avais utilisé chaque goutte de self-control que je possédais pour contrôler ma force lorsque nous étions ensemble. Je m’étais montré sauvage et autoritaire, mais j’avais été doux. Je ne connaissais pas ma force, et j’avais du mal à me contrôler. J’avais fait bien attention à garder mes émotions sous cloche, en restant en retrait, à observer, à suivre Hunt durant ces trois dernières années. Hunt dirigeait. Je me tenais à carreau. C’était un système bien rodé. Jusqu’à présent. Désormais, je devais faire attention au moindre regard et au moindre sourire des guerriers, qui risquaient de me faire péter les plombs. Kristin était tellement belle avec mes couleurs. J’étais fier de la voir habillée en bleu foncé, même si ma famille, celle que cette couleur honorait, se fichait de moi. Hunt, Kristin et moi formerions notre propre famille dès que nos colliers deviendraient assortis. Kristin Webster de la Terre faisait ressortir le meilleur chez moi. Et le pire. Elle n’était que lumière, et même ses cheveux et sa peau ressemblaient aux soleils. Elle portait une coupe plus courte que Rachel, mais je préférais ça, car ça me laissait un meilleur accès à la peau délicate de sa nuque. Même maintenant, je ne pouvais pas m’empêcher d’admirer sa gorge, sa mâchoire. J’avais envie de l’embrasser, encore et encore, pendant des heures. Son sourire me serrait le cœur. Savoir ce qui se trouvait sous cette tunique ? Et bien, c’était ça qui me donnait une érection permanente et qui me transformait en dingue jaloux et possessif. Ce qui n’annonçait rien de bon pour la durée de vie des autres hommes de la pièce s’ils lui faisaient du mal. Cela n’arriverait pas. Mais je n’aimais pas qu’ils la reluquent, qu’ils la désirent. Elle était à moi. Comme si elle avait perçu mon chaos intérieur — c’était sans doute le cas —, elle me jeta un coup d’œil, soutint mon regard et sourit avec ses lèvres mystérieuses. Désir. Promesses. Oui, elle était à moi. Alors je serrai les poings, m’adossai au mur et écoutai. Il fallait que je reste à plusieurs mètres d’elle, et des autres. Si je devais assassiner d’autres guerriers, je ne voulais pas le faire avec le gouverneur et sa compagne dans la pièce. Mais si le bras droit de Hunt n’arrêtait pas de mater Kristin... — Combien sont-ils à avoir disparu ? demanda Maxime. Cela me fit oublier la fascination des guerriers pour ma compagne. — Un de plus aujourd’hui. Ça en fait cinq en un mois. — Alors, seulement des hommes ? Tous des nouveaux guerriers de la Colonie ? demanda Hunt. Il était dans son élément. C’était là qu’il était aux commandes. Maxime avait beau être le gouverneur de la Base 3, Hunt gérait les nouveaux arrivants. Il s’occupait de leur transition, de leurs avenirs. La disparition de certains d’entre eux le préoccupait. C’étaient ses hommes. Hunt était peut-être mon second dans la chambre à coucher, mais ici, c’était lui le chef. Lorsqu’il donnait des ordres, tout le monde obéissait, même moi. Alors j’écoutai les dernières informations sur ces étranges disparitions, et gardai les yeux fixés sur Kristin. Même en présence des gardes du gouverneur, c’était mon rôle de la protéger. — Oui, et nous ne savons toujours pas pourquoi ou comment ça leur arrive, répondit Ryston, le second de Maxime. — Ça ne peut pas être une coïncidence, dit Hunt en croisant les bras sur sa poitrine. Même si nous nous trouvions dans la salle des commandes, personne n’était assis. Tout le monde était trop tendu après cette découverte. Quelque chose clochait sérieusement avec la Colonie, et il fallait que nous commencions à résoudre l’énigme. — Le capitaine Perro était là depuis moins d’une semaine. Dame Rone était restée silencieuse et s’était contentée d’écouter, jusqu’à présent. Elle prit la parole : — Si vous trouvez Krael, vous trouverez les disparus. Le gouverneur regarda sa compagne. — Ça, on ne le sait pas encore. — Moi si, marmonna-t-elle. Je perçus de l’amusement chez Kristin. Elle trouvait que les commentaires de Dame Rone étaient drôles, pour une raison inconnue. J’ignorais pourquoi. — Perro avait été affecté au Secteur 9 avec les autres nouvelles recrues. On a eu trois disparitions dans cette zone en trois semaines, dit Hunt. Il semblait garder son sang-froid, mais je connaissais la vérité, maintenant que nous étions liés grâce à nos colliers. Il était tout autant sur les nerfs que moi, son esprit embrumé par le désir. Je me demandais comment il parvenait à rester cohérent. — C’est par là qu’on devrait commencer les recherches, ajouta-t-il. — Je veux venir avec vous, intervint Kristin. Sa voix était dépourvue de méfiance, même si elle venait juste d’arriver sur notre planète. Elle était maîtresse de ses émotions, et je ressentais également sa confiance en elle à travers mon collier. — Non, répondis-je en même temps que Hunt. Là où sa voix était douce et mesurée, la mienne était autoritaire. Plusieurs têtes se tournèrent vers moi. C’était la première fois que je parlais depuis mon arrivée dans la pièce. — J’étais enquêtrice pour le FBI sur Terre. Je travaillais au département des crimes sexuels. Elle se tourna pour tenter de convaincre le gouverneur, mais ses efforts seraient vains. Je refusais de la laisser chasser la Ruche, et Hunt serait d’accord avec moi. — J’ai recherché des personnes enlevées et vendues comme esclaves. Même si je doute que ce soit ce qui est arrivé à vos guerriers, je sais comment les rechercher. À côté d’elle, Hunt secoua la tête, les bras croisés. — C’est hors de question. Tu ne connais pas cette planète ni la façon de penser des guerriers. Tu ne connais pas bien notre ennemi. Si des traîtres travaillent pour la Ruche sur cette planète, ils seront extrêmement dangereux. Et ils ne se comporteront pas comme des terriens. — Tu travaillais pour le FBI ? demanda Dame Rone à Kristin. Notre compagne hocha la tête. — J’ai été formée à Quantico, mais je travaillais partout, là où mes affaires m’emmenaient. J’ai eu affaire à des trafiquants de drogue colombiens, à des banquiers de Hong Kong, à des chefs de gang mexicains, et même à la mafia russe. Les gens en danger, enlevés. C’est ma spécialité. Je pourrais être utile. Dame Rone lui adressa un sourire, puis regarda Hunt. — Je peux me porter garante de son expérience sur Terre. Vous ne comprenez peut-être pas à quel point ses compétences sont impressionnantes, mais moi si. Elle a sauvé des innocents. Elle peut le faire ici aussi. Maxime posa une main sur l’épaule de sa compagne. Elle leva les yeux vers lui et ajouta : — Elle peut être utile. — Ce n’est pas à moi de décider, Rachel. Ce n’est pas ma compagne, dit le gouverneur avant de regarder Hunt. Vous prendrez quatre gardes et irez au Secteur 9. Passez tout le périmètre au peigne fin. Faites-moi un rapport toutes les heures. Hunt hocha la tête et montra du doigt quatre de ses guerriers. Ils le précédèrent hors de la pièce, et Kristin arrêta Hunt en lui posant une main sur le bras. — Je peux aider. Vraiment. — La réponse est non, compagne, dit-il en lui caressant la joue, avant de me regarder. Tyran ? Il se pencha, embrassa Kristin sur le sommet du crâne, puis quitta la pièce, et la porte se referma derrière son petit groupe. Je sentais la colère de ma compagne arriver par vagues vers moi. Elle était furieuse d’avoir été laissée sur le carreau, mais ni Hunt ni moi ne pouvions permettre qu’elle soit en danger. Nous venions de faire sa connaissance. Elle ignorait à quel point elle était rare et précieuse. Elle se dirigea d’un pas lourd vers l’un des guerriers et tendit une main. — Donnez-moi votre pistolet, dit-elle en posant les yeux sur le holster qu’il portait à la cuisse et sur le pistolet à ions qui s’y trouvait. L’Atlan la regarda en écarquillant les yeux. Il était encore plus grand que moi, et je m’approchai, prêt à protéger ma compagne de la bête qu’il avait en lui. — Vous savez comment vous en servir ? demanda-t-il avec un petit sourire. — Ne me prenez pas de haut. J’ai beau être petite, je sais tirer. Je sais tuer. Kristin avait déjà tué. Je le sentais, sentais le frisson glacial de cette vérité, et sa force me donna une érection. Tout ce feu, cette puissance, et elle se soumettait à moi. — Tu ne prendras pas l’arme de cet Atlan, lui dis-je en approchant. Je lui posai une main possessive sur l’épaule. Si l’Atlan doutait qu’elle m’appartienne, si le collier et la tunique bleus ne suffisaient pas, ce geste le lui confirmerait. J’espérais qu’elle avait toujours notre odeur sur la peau. S’était-elle débarrassée de la semence de Hunt ? J’espérais que non. Je voulais que la bête sente que nous la possédions, qu’elle sache la vérité. Elle nous appartenait. — Dame Zakar, je ne veux pas vous offenser, mais comme le gouverneur l’a dit, si vos compagnons veulent que vous ayez une arme, c’est leur décision, pas la mienne. Il inclina la tête et fit un pas en arrière. Heureusement. Je n’aurais pas à l’affronter. Kristin se tourna vers moi, les yeux plissés. — Ta décision ? Tu vas m’empêcher d’aider ? Qu’est-ce que je suis censée faire ? Rester à la maison toute la journée, pieds nus et enceinte jusqu’aux yeux, à te faire à dîner et à te masser les épaules après une longue journée de travail ? Elle fit la moue comme une petite fille. J’aurais pu me laisser avoir si je n’avais pas senti sa fureur à travers mon collier. — Alors, ça sera quoi mon boulot ici ? reprit-elle. Vous baiser, toi et Hunt, et c’est tout ? Parce que si ce n’est que ça, une poupée gonflable fera très bien l’affaire. J’entendis les guerriers chuchoter autour de nous, mais je ne la quittai pas des yeux. Je ne voulais pas la mettre en colère, mais je ne pouvais pas lui donner ce qu’elle voulait. Je ne pouvais pas lui permettre de risquer sa vie, pas pour ça. — Tu es nouvelle ici, Kristin. On a beau être parfaitement assortis, il nous reste beaucoup de choses à apprendre. J’ignorais le métier que tu exerçais sur Terre jusqu’à maintenant. Je suis impressionné par tes efforts, mais c’est mon travail — et celui de Hunt — de nous assurer que tu restes hors de danger. Nous sommes sur la Colonie à cause de la Ruche, de ce qu’elle nous a fait. Je ne laisserai pas ce genre de choses t’arriver. Je ne peux pas te donner une arme et t’encourager à prendre des risques, à mettre ta vie en danger. — Le danger est partout, rétorqua-t-elle. Le plafond pourrait s’écrouler. Et je suis une grande fille, tu ne peux pas me protéger de tout. — C’est mon plus grand honneur de tenter de le faire. Elle ne comprenait pas l’ampleur de la possessivité prillonne. Elle voyait ça comme de l’oppression plutôt que de la dévotion. Mais je parviendrais à la convaincre. Je lui ferais comprendre. Elle retroussa les lèvres et plissa les yeux. Elle était rapide, je devais bien l’admettre. En un clin d’œil, elle m’avait pris mon arme. Elle tourna les talons et se dirigea vers la porte. Elle s’ouvrit automatiquement, mais elle ne put pas faire un pas dehors avant que je l’attrape et la mette par-dessus mon épaule. C H A P I T R E D I X

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T — Tyran ! s’écria-t-elle en me donnant des coups de poing dans le dos. Je sentis le métal dur du pistolet à ions. Il fallait simplement que je le lui arrache des mains avant qu’elle ne blesse quelqu’un par accident. — Gouverneur, dis-je en jetant un coup d’œil par-dessus mon épaule. Heureusement, il savait ce que je voulais et nous rattrapa. — Dame Zakar, si vous permettez. Il joignit le geste à la parole. Je ne pouvais pas voir ce qu’il faisait, mais je savais qu’il lui prenait l’arme des mains. Je ne permettrais qu’à Maxime et à Ryston de toucher ma compagne, car ils en avaient une, eux aussi, et je savais que leurs liens étaient forts. Je n’avais aucune raison d’être jaloux du gouverneur. Pour les autres guerriers par contre... — Pose-moi ! Tu te comportes comme un abruti d’homme des cavernes. Je ne savais pas de quoi elle parlait, mais je me comportais de manière légèrement irrationnelle. Hunt devait faire son travail, alors c’était à moi de la protéger en son absence. Sa fougue et son envie de se joindre à la bataille, d’aider à retrouver les membres de notre communauté faisaient chaud au cœur. Elle voulait aider. Mais pas en risquant sa vie. Le fait qu’elle soit prête à affronter un guerrier Atlan, qu’elle ait les couilles de me prendre mon arme et de la pointer sur moi aurait dû me mettre en colère. Au lieu de cela, ça me faisait bander. Tellement fort qu’il n’y avait qu’une chose à faire. Je remontai le couloir, prêt à la ramener dans nos appartements, mais ils étaient trop loin. Sur la gauche se trouvait une porte, et je passai la main dessus pour qu’elle s’ouvre. C’était une sorte de placard rempli d’électronique et de câbles qui géraient l’atmosphère du bâtiment. Il n’y avait pas beaucoup de place, mais il y avait un mur nu, gris et lisse qui ne ferait pas de mal à la peau tendre de ma compagne lorsque je lui rappellerais à qui elle appartenait. Parfait. J’entrai et pressai le mécanisme pour fermer la porte à clé derrière nous, puis je reposai Kristin. — Qu’est-ce que tu fabriques ? demanda-t-elle, essoufflée. Je ne l’avais pas emmenée très loin, alors elle ne pouvait pas être fatiguée, surtout que je l’avais portée. — Je te baise, dis-je. Je la plaquai contre le mur, mais elle était si petite qu’elle ne m’arrivait même pas à l’épaule. Avec aisance, je la soulevai, puis me collai à elle, la coinçant contre le mur. Je savais que l’étincelle dans ses yeux était due au fait qu’elle sentait mon sexe épais contre son ventre, qu’elle sentait mon désir à travers le collier et le brouillard de sa frustration. Vu la façon dont sa poitrine se soulevait sous sa tunique bleue, elle était excitée par notre dispute, par mon contact, par mon désir qui se déversait dans son esprit grâce à son collier. J’étais tellement excité que j’avais envie de jouir sur ses vêtements et de recommencer, de l’emplir de ma semence jusqu’à ce qu’elle n’ait plus envie de se disputer. Le courant qui circulait entre nous était magnétique et puissant, nous attirant tous les deux vers un puits sans fond dont nous ne pourrions pas nous échapper. Je le sentais, et je savais qu’elle aussi. Bon sang, je n’avais jamais été aussi dur. C’était peut-être parce que je sentais sa colère, sa frustration et son désir à travers mon collier, tout comme elle sentait le mien. Nous allions devoir remâcher les tensions qu’il y avait entre nous, et je connaissais le moyen parfait. — Tyran... Je l’interrompis avec un baiser. La raison pour laquelle je l’avais éloigné des autres n’était-elle pas évidente ? Hunt avait été là à son réveil. Lorsque je les avais rejoints, j’avais perçu un calme entre eux, ce qui était une bonne chose, car cela contrastait avec le désir sombre que j’avais pour elle. Si sombre que j’avais dû m’éloigner après que nous l’ayons prise dans la salle des transports. Mais là, je ne pouvais pas m’éloigner. Je m’étais contrôlé, j’avais dissimulé ma vraie nature. Mais ça ne pouvait pas durer. Il n’y avait pas de secret entre compagnons, surtout lorsque nous partagions des colliers. Le sien était toujours noir, mais je la ressentais quand même, tout comme elle me ressentait. Je m’emparai de sa bouche encore et encore jusqu’à ce que ses mains se posent sur ma tête, que ses doigts s’enfoncent dans mes cheveux, me serrent contre elle, me griffent. Elle arracha sa bouche à la mienne, alors je lui embrassai la mâchoire, la joue, tout ce qui était à ma portée. — Tyran. On ne peut pas faire ça. On a des hommes à retrouver, souffla- t-elle. Je secouai lentement la tête et me collai à elle, frottant mon sexe contre son corps voluptueux tout en lui mordillant l’oreille. — On n’a rien à faire du tout. C’est le travail de Hunt. Il fait son boulot. — Et c’est quoi, ton boulot ? — Assurer ta sécurité, à tout prix. Mes mots lui arrachèrent un grognement, et je savais que ma possessivité et mon instinct de protection un peu excessifs lui plaisaient. Je trouvai la base de son cou et la mordillai. Elle me récompensa en ondulant des hanches et en gémissant. — Il me faut un travail, dit-elle. Il faut que je fasse quelque chose, ou je deviendrai dingue. — Pas aujourd’hui. Pas pour chasser la Ruche. — Aujourd’hui, je pourrais sauver tes hommes ! — Aujourd’hui, tu pourrais être blessée ou mourir. C’est hors de question, compagne. — Alors tu comptes me baiser jusqu’à ce que je me soumette, c’est ça ? Je haussai légèrement les épaules et pris l’un de ses seins dans ma main. Je sentis son téton durcir, et je regrettai que sa tunique me barre la route. — Si c’est nécessaire. — Pourquoi ? Pourquoi est-ce que tu aurais envie de me baiser ? Tu ne me parles pas. C’est comme si on se détestait, dit-elle. Ses yeux brûlaient de colère, mais à présent, du désir y était mêlé. Ses mains se glissèrent sous mon haut et je fus reconnaissant d’avoir écouté la suggestion de Hunt. D’habitude, je portais l’armure de la Coalition tous les jours, que je sois de service ou pas. Mais Hunt pensait que notre compagne préférerait avoir un accès plus facile à nos corps, et dieux merci, il avait eu raison. Il n’y avait rien de mieux que les petites mains empressées de Kristin qui me soulevaient ma tunique pour me l’enlever. Si elle me détestait, cela n’affectait pas sa libido. Elle tentait de me déshabiller tout en continuant de me faire des reproches. — Non, on a tous les deux le sang chaud, répondis-je enfin en attrapant le col de sa tunique pour exposer l’une de ses épaules. J’embrassai sa peau chaude, puis la mordillai. Elle poussa un halètement, et sa tête cogna contre le mur. Oui, j’adorais son goût, son odeur. — Visiblement, tu avais un rôle important sur Terre, et tu veux le garder sur la Colonie. — Oui, mais je ne tolérerai pas un compagnon jaloux qui refuse que je m’approche d’autres hommes. Elle se pencha, trouva mon téton et le prit dans sa bouche. Puis elle le mordit. Je poussai un grognement, excité par son geste. C’était super douloureux, mais ça me rendait également aussi dur que du minerai prillon. Je fis un pas en arrière et la laissai glisser contre le mur pour que ses pieds touchent le sol. Je me laissai tomber à genoux devant elle, et lui ouvris son pantalon sans ménagement. — Tu m’appartiens, dis-je d’une voix rauque. Tu appartiens à Hunt aussi. Aucun autre homme ne te touchera. Ce n’étaient pas que des mots. C’était une promesse, et je savais qu’elle percevait ma détermination. Son pantalon lui tomba aux chevilles et je lui soulevai un pied pour l’en dégager, mais c’est tout. Je lui écartai les jambes pour que son sexe soit ouvert devant moi. Je pris la chair chaude dans ma paume. Elle poussa une exclamation à ce contact. — Ça m’appartient, dis-je. — Oui, siffla-t-elle en avançant les hanches pour se frotter à moi. — Tu n’as pas été officiellement revendiquée, pas encore. En attendant, je me montrerai possessif. Elle était mouillée pour moi, mes doigts soudain enduits de son désir. Je la caressai pour qu’elle ait envie de plus. De moi. De personne d’autre. De moi. — Protecteur et irrationnel. Seule la force de tes compagnons empêche les autres mâles de la planète d’essayer de te revendiquer eux-mêmes. La plupart d’entre eux ont un code d’honneur strict et ne t’arracheraient pas ton collier. Ce collier indique que tu nous appartiens, à Hunt et moi, mais ce n’est qu’un signe extérieur, et il est toujours noir, pas du bleu de ma famille. Si l’un des guerriers le touche, je serais obligé de le tuer pour te garder en sécurité. Elle se figea, alors même que je continuais de jouer avec son sexe, l’odeur de son excitation était comme une drogue qui calmait mes peurs concernant sa sécurité, mais ravivait un autre feu en moi, un feu encore plus brûlant. — Je croyais que tu avais dit que le collier me garderait en sécurité. Je levai les yeux vers elle, cette position était celle que je ne prendrais que pour l’idolâtrer ainsi, pour lui donner du plaisir. — Ils servent à avertir les autres que tu m’appartiens, que tu es accouplée, protégée. Mais sa couleur noire indique que tu n’as pas encore été revendiquée. En tout cas, je ne laisserai personne d’autre t’arracher à nous et te revendiquer pour lui. Le test nous a appairés. Tu es à moi, Kristin, que tu veuilles l’admettre ou non. Elle sourit. — Mais c’est que tu es vraiment jaloux. Je glissai deux doigts profondément en elle. Sa chatte chaude s’étira autour d’eux avant de se contracter. Elle gémit. — Évidemment que je le suis. Tous les guerriers de la planète ont envie de ça, dis-je en la pénétrant avec mes doigts. — Dis-moi ce que tu vas me faire. Comment... comment tu veux me revendiquer, dit-elle d’une petite voix. Elle se tortillait sur ma main, proche de l’orgasme. Ses joues étaient rouges, ses cuisses tremblaient, et elle voulait que je lui parle, que je lui remplisse la tête d’images sensuelles, que je lui dise ce que Hunt et moi allions lui faire. Cette idée m’envoya une vague de désir le long de l’échine avant de venir s’installer dans mes bourses comme une poigne de fer. Par les dieux, ma compagne était le sexe personnifié, si féminine et puissante, si sexy. Je craignais de devenir complètement impuissant face à elle si elle se rendait compte un jour du pouvoir qu’elle avait. — Ma queue sera là, dis-je en glissant mes doigts en elle, avant de les plier pour atteindre le petit bout de chair qui lui ferait perdre la tête. Elle gémit lorsque je les retirai. Je les plaçai ensuite sur son trou plissé. Ils étaient si mouillés que je parvins à en insérer un en elle. Ses muscles combattirent mes avances, mais seulement durant un bref instant, son corps s’ouvrant comme une fleur, me permettant de l’enfoncer jusqu’à la première phalange. Elle poussa une exclamation et se cambra. — Et Hunt sera là, dis-je. Je me retirai et insérai un deuxième doigt, puis, avec lenteur et précaution, je fis des va-et-vient entre ses fesses. Elle n’était pas novice, elle savait comment se détendre, comment me laisser entrer. Les émotions fortes ne lui faisaient pas peur, ni l’intimité de cet acte. Je la dévisageai, la regardai se mordre la lèvre, rougir, haleter. Je la sentis même se répandre sur ma paume. Je n’avais pas besoin de ces indices pour savoir qu’elle aimait ce que je lui faisais. Je le percevais grâce au collier. Alors je la poussai plus loin. Je voulais voir jusqu’où elle irait, car je savais déjà jusqu’où je voulais la pousser. Comme nous étions bien assortis, elle voudrait la même chose. Non, elle adorerait ça. — On va te baiser en même temps, te remplir de notre semence. Tu vois ? On ne fera plus qu’un, comme nous sommes destinés à l’être. Elle se tortilla. Je n’avais pas assez de lubrifiant pour la prendre avec plus de brusquerie, mais j’allais lui donner ce dont nous avions tous les deux besoin. Je ne renoncerais pas. Pas alors qu’elle était sur le point de jouir. Incapable de résister plus longtemps, je me penchai en avant et la goûtai, passai la langue sur son clitoris sensible encore et encore jusqu’à ce que ses jambes se mettent à trembler. Je la poussai jusqu’au bord de l’orgasme, puis m’arrêtai, encore et encore jusqu’à ce qu’elle pousse un sanglot. Elle s’abandonnait. Elle était prête à me supplier. — Ça t’excite, hein ? L’idée de te faire baiser par tes deux hommes en même temps ? Tes trous étirés, replis, revendiqués, marqués ? Elle haletait à présent, ses mains sur mes épaules, ses doigts enfoncés dans ma peau nue. — Oui. — Tu veux jouir, hein ? — Oui, répéta-t-elle. J’immobilisai mes doigts, puis les libérai assez longtemps pour me lever et la faire tourner afin que ses mains soient plaquées au mur. Je soulevai sa tunique sur ses hanches et la penchai en avant, son sexe et ses fesses bien en vue. — Ne bouge pas, dis-je en ouvrant mon pantalon. Une fois libéré, je poussai un grognement, la douleur dans mon membre se dissipant légèrement. Mais en la voyant rose et mouillée, gonflée et ouverte pour moi, je sus que je n’allais pas tenir longtemps. Je glissai un pouce entre ses jambes, l’enduisis de son liquide, et le plaçai entre ses fesses, face au trou que j’avais préparé, avant de le glisser en elle. Cette intrusion lui arracha un halètement, mais elle se tortilla. Je ne pus repousser le moment plus longtemps. J’en étais incapable. — Tu veux enquêter sur les guerriers disparus ? Tu veux échapper à ma vigilance ? demandai-je. Je me mis en position et lui pénétrai la chatte. Elle poussa un cri, ses coudes se pliant de manière à ce que ses avant-bras soient plaqués contre le mur. Je dus plier les genoux pour la pénétrer, mais une fois complètement enfoncé en elle, je lui passai mon bras libre autour de la taille et plaquai ma paume contre son clitoris, avant de la soulever et de jouer avec son bouton sensible. — Écarte les jambes, compagne. Je veux que tu sois bien écartée pendant que je te baise. — Oh, bon sang. Son vagin se contracta sur mon membre et je me figeai, attendis que le moment passe. Elle serra les poings contre le mur et gémit mon nom. J’aurais pu écouter ce son délicieux pendant des heures. En bougeant lentement, je lui dis ce que je ressentais tout en la baisant : — Tu es à moi. C’est bien compris ? Ta chatte est à moi. Ton cœur est à moi. Tu ne voudras pas d’autre compagnon. Tu ne regarderas pas les autres guerriers. Tu m’aimeras, c’est compris ? J’avais l’impression d’être un idiot primitif à bavasser comme ça alors que je la pénétrais, mais sa chaleur me faisait perdre la tête. Mes mots étaient sans filtre, sortis de mes recoins les plus sombres, et je ne pouvais pas les retenir. Pas avec elle. Elle me faisait perdre la tête. Elle faisait ressortir ma noirceur. Je ne pouvais qu’espérer qu’elle pourrait l’accepter, car le monstre qu’était mon côté sombre, mes désirs et mes besoins enfouis, s’était échappé de sa prison dans mon âme, et j’aurais beau essayer de redevenir comme avant, je n’y parviendrais pas. Elle m’avait ouvert et avait fait sortir mon âme au grand jour. Je ne pouvais pas tout remballer. Je lui donnai des coups de reins, tout en la pénétrant de mon pouce à chaque va-et-vient. Comme ça, elle aurait une petite idée de ce qui l’attendait durant la cérémonie de revendication. — Je ne suis pas gentil. Je suis jaloux, possessif. Elle jouit avec une plainte et je ne m’arrêtai pas, me contentant de la baiser plus fort, le front couvert de sueur, mon orgasme montant à la base de ma colonne vertébrale. — Je suis obsédé, ajoutai-je. — Tyran, gémit-elle alors que ses parois se contractaient sur mon sexe. Je ne ralentis pas le rythme, lui donnant exactement ce dont elle avait besoin alors qu’elle jouissait à nouveau, son vagin pris de spasmes. Je serrai les dents. La sensation de sa chaleur serrée autour de mon membre était paradisiaque. Et infernale. Je ne pourrais pas lui échapper. Ne pourrais rien lui refuser. Je lui appartiendrais. Bon sang. C’était déjà le cas. Son plaisir déclencha mon orgasme. Ses cris pouvaient sans doute être entendus dans toute cette section de la base, mais je m’en fichais. Je voulais que tout le monde sache que j’étais son compagnon, que je lui donnais ce dont elle avait besoin, et que je prenais soin d’elle. Je ne voulais pas que l’un de ces enfoirés pense qu’il pouvait faire mieux que moi. Elle vivrait ici, travaillerait ici, se ferait des amis et parlerait aux gens, mais c’est moi qu’elle retrouverait le soir. Hunt l’attendrait avec moi. C’est nous qui la prendrions, qui la baiserions. Qui l’emplirions. Qui l’aimerions. Qui la ferions crier. La puissance de mon orgasme me fit tituber en avant et je me sentis vulnérable durant un court instant. Lorsque le plaisir s’emparait de moi, j’étais incapable de la protéger. Je ne pouvais rien faire, à part me laisser aller à cette sensation, perdu dans cette béatitude que seule ma compagne pouvait m’apporter. Mon sexe s’épaissit en elle, se contracta du besoin d’expulser ma semence, de l’emplir. Je le fis, enduisant ses parois. Je poussai un grognement et plaquai la main contre le mur. Le son du métal résonna dans la petite pièce. Quand j’eus repris mon souffle, je la posai finalement par terre et je m’agenouillai derrière elle. Ce mouvement libéra mon sexe. Je retirai doucement le pouce que j’avais glissé en elle, et la regardai reprendre son souffle. Elle n’avait pas bougé, mais elle avait les yeux fermés et semblait léthargique, pleine d’euphorie et de satisfaction. Je grognai en voyant ma semence couler entre ses jambes, sur ses cuisses, une goutte tomba même sur le sol entre mes genoux. J’eus une érection, conscient que je l’avais emplie. — Tu es à moi, Kristin, n’oublie jamais à qui tu appartiens. Elle se tourna vers moi, se laissa tomber sur mes genoux et prit mon visage dans ses mains. — Je n’oublierai pas. — À Hunt et moi. Personne d’autre ne te touche. — Tu es un vrai homme des cavernes. Sa réponse pleine d’audace me fit sourire. — Tu es à moi. Dis-le. Elle secoua la tête et se mordit la lèvre inférieure, juste assez fort pour me donner envie de la goûter, et je grognai. Ses yeux s’assombrirent et elle me dévisagea. Je me demandai ce qu’elle voyait. Mes traits n’étaient pas humains, mon nez et mes joues étaient trop anguleux, ma couleur de peau était différente, mes dents étaient aussi plus longues et plus affûtées que celles des hommes de son monde. Elle m’examinait comme si j’étais une énigme complexe, puis elle se pencha en avant pour déposer un doux baiser sur mes lèvres. Je n’avais jamais été embrassé comme ça, et sa tendresse me fit frissonner, une douleur inconnue s’installant profondément dans ma poitrine. — Je commence à croire, Capitaine, que vous comprenez les choses à l’envers, dit-elle. — Comment ça ? — Je crois que c’est toi qui m’appartiens. Elle avait raison. Tellement raison. Cette femme me possédait, mais je n’avais pas l’intention de l’admettre. Pas maintenant. Peut-être même jamais. C H A P I T R E O N Z E

ristin K Je faisais les cent pas dans les confins de nos appartements, furieuse. J’ignorais si mon irritation pouvait atteindre mes compagnons à travers mon collier, mais je n’arrivais pas à m’en inquiéter. Je n’étais pas une petite princesse de huit ans qui courait partout avec ses chaussures à paillettes et qui avait besoin de papas grands et forts pour la protéger. Durant trois jours, mes compagnons m’avaient gardée ici, enfermée pour ma propre sécurité pendant qu’ils traquaient les hommes disparus, et ils revenaient toujours les mains vides. Trois jours ! J’avais réussi à mettre la main sur l’un des pistolets à ions, mais ils l’avaient trouvé — maudit soit le collier pour le sentiment de satisfaction que j’avais ressenti en le trouvant et qu’il leur avait transmis — et ils me l’avaient bien vite retiré comme si j’étais une enfant incapable, pas une agente du FBI surentraînée. Je leur avais parlé de mon métier, de mes compétences, de mon expérience, mais ils s’en fichaient. Pour eux, la Terre était une planète peu évoluée, ce qui rendait mes capacités moins impressionnantes. Je savais qu’ils me voyaient comme leur égale. Ma vie était plus importante que tout pour eux. Mais ce n’était pas ma valeur qui était en jeu, là. C’étaient mes compétences. Ils me donneraient tout ce que je voulais... sauf quand ma vie était en jeu. Même si j’avais des bracelets pare-balles comme Wonder Woman, ils s’en ficheraient. Ils refusaient que je me mette en danger. Je ne voulais pas prendre de risques, mais je me sentais complètement impuissante ici, coincée dans nos appartements sans pouvoir rien faire. Ce n’était pas quelque chose que je pouvais supporter. Je ne cessais de me dire qu’ils ne me connaissaient pas, qu’ils ne savaient pas vraiment de quoi j’étais capable, mais ça ne suffisait pas à apaiser le mécontentement qui grandissait en moi comme un cancer. Les guerriers étaient toujours portés disparus, et même mes puissants compagnons prillons et les vingt guerriers qui partaient à leur recherche tous les jours faisaient chou blanc. Tous les soirs, mes compagnons revenaient les mains vides et me baisaient jusqu’à ce que je ne puisse plus respirer, puis je m’endormais, épuisée. Ils m’avaient donné accès aux bases de données de la Base 2, à cause de ma colère et à l’insistance du Gouverneur et de Rachel. Mes compagnons ne voyaient pas d’inconvénient à ce que je lise et analyse les données pour les aider dans leurs recherches. De loin. Mais ils refusaient de me laisser sortir et d’interroger qui que ce soit, de les regarder dans les yeux à la recherche de mensonges, de tics ou de signes de nervosité. Les rapports, c’était très bien, mais rien ne valait le fait de regarder quelqu’un en face et de le voir gigoter. De voir la vérité transparaître sous les mensonges. Je jouais le rôle de la princesse enfermée dans sa tour depuis assez longtemps. Et j’en avais assez d’attendre. Je me dirigeai jusqu’au panneau de communication situé à côté de la porte de nos appartements et passai la main au-dessus, le regardai, tentai de le faire marcher. Quelque chose devait l’avoir déclenché, car j’obtins une réponse de l’un des officiers de communication de la Base 3. Son visage apparut sur le petit écran et je plissai les yeux pour mieux voir. Il n’était pas Prillon, il ressemblait trop à un humain pour ça. Des yeux d’un vert profond, une peau caramel, et des cheveux ondulés de la couleur du sucre brun fondu. Il était sublime. Époustouflant. Et pour mon plus grand dégoût, je ne le trouvais absolument pas séduisant. Il aurait pu gagner des concours de mannequinat sur Terre, mais j’aurais tout aussi bien pu parler à une tranche de gruyère. Un homme profondément ennuyeux. Pas d’étincelle, pas de feu. Il lui manquait ce côté extraterrestre dur à cuire que je mettais mise à aimer. À côté de Tyran et Hunt, plus rien ne me plaisait. Je ne voulais que mes compagnons. Et ils m’appartenaient. Ces crétins surprotecteurs. Alors, si ma chatte me disait que j’étais coincée avec eux, ils allaient devoir apprendre à mieux me traiter. — Dame Zakar, comment puis-je vous aider ? — Vous êtes de quelle planète ? lâchai-je sans réfléchir. Mais après tout, qu’est-ce que ça pouvait faire ? C’était mon truc de poser des questions. — De Trion, Madame. Vous avez besoin de quelque chose ? — Oui. Débarrassez-moi des deux colosses qui gardent ma porte. Même si je ne pouvais pas les voir, je savais qu’ils étaient là. Les deux guerriers prillons qui montaient la garde étaient censés me protéger. Ce qui était ridicule. Si on me donnait un pistolet, je m’occuperais très bien de moi toute seule. En voyant son expression perplexe, j’abandonnai mes références terriennes et lui parlai dans une langue qu’un mâle alpha extraterrestre comprendrait : — J’ai besoin de parler à Dame Rone immédiatement. Veuillez lui demander de venir dans mes appartements tout de suite. — Très bien, Madame. Il hocha la tête et disparut de l’écran. Je savais qu’il ferait ce que je lui demandais. J’étais certaine que Rachel arriverait avec une pelletée de ses propres gardes, ce qui pourrait représenter un problème. Mais je m’occuperais d’un défi à la fois. La fureur qui gonflait au fond de moi me surprenait, mais elle n’aurait pas dû m’étonner. Sur Terre, j’avais voué ma vie à protéger les gens, à pourchasser les criminels et à m’assurer que justice soit faite. Le fait que ces guerriers de la Colonie refusent que je les aide me donnait l’impression que des cafards me rampaient dans la poitrine. Cette sensation me rendait dingue, me donnait envie de siffler, de crier et de jeter des choses, de piquer la crise du siècle. Mais ce n’était pas mon style. J’avais appris à mettre ma colère et mon impuissance en bouteille pour pouvoir fonctionner normalement, malgré les émotions qui me restaient coincées dans la gorge. Les horreurs que j’avais vues, les choses que j’avais découvertes pendant toutes mes années au FBI m’auraient envoyée à l’asile, sinon. Mais pour la première fois depuis des années, j’avais du mal à me maîtriser. Et pourquoi ? Je savais pourquoi. Parce que mes compagnons, les hommes dont j’étais en train de tomber amoureuse, les hommes à qui je m’étais offerte, soumise, étaient ceux qui m’empêchaient d’agir. J’avais beau avoir besoin du caractère dominateur de Tyran au lit, je n’étais pas prête à lui donner les rênes pour les autres aspects de ma vie. Hunt, j’en étais persuadée, finirait par se laisser convaincre. Il faudrait que je lui fasse comprendre, et ensuite je pourrais lui demander d’intercéder en ma faveur auprès de Tyran. S’il était possible de faire rentrer quoi que ce soit dans le crâne de cet homme des cavernes. Dans leurs bras, dans leur lit, je pouvais me lâcher, arrêter de me contrôler et me libérer comme jamais. J’avais besoin de ces moments. Mais ça, c’était complètement différent. Quelque chose de maléfique s’en prenait aux citoyens de ma nouvelle maison, et la Colonie — et tous les guerriers qu’elle comptait —faisait partie de moi désormais. C’était ma nouvelle famille, ce qui voulait dire que ce peuple était le mien. Tout comme les filles que j’avais aidées à sauver sur Terre étaient à moi. Ce n’était pas logique, mais servir sa communauté n’était pas quelque chose de rationnel. Le fait d’être avec deux guerriers têtus comme des mules ne l’était pas non plus. Une fois, j’avais regardé un film dans lequel un père expliquait des choses à son petit garçon en mettant les gens dans trois cases : les brebis, les loups, et les chiens de berger. Protéger les gens — les brebis — des loups était ce que je faisais. Et même si le fait de me retrouver sur une planète extraterrestre était surprenant, cette vérité fondamentale n’avait pas changé. Pas. Du. Tout. Je n’étais pas une proie. Pourtant, mes compagnons semblaient me voir comme une brebis. Tant qu’ils ne me verraient pas pour ce que j’étais, un chien de berger déterminé et sans pitié, nous aurions des problèmes et je resterais fâchée. Une espèce de carillon retentit et je sursautai, arrachée à mes pensées. Ça devait être la sonnette. Qui l’eut cru ? Je me dirigeai vers la porte et passai la main par-dessus le panneau de contrôle. Presque en silence, la porte s’ouvrit, révélant Rachel. Elle portait la tenue verte qui, je l’avais appris, voulait dire qu’elle faisait partie de l’équipe médicale, qu’elle était docteure. Ses cheveux brun foncé étaient tirés en natte et son visage était dépourvu de maquillage. Mais sa peau rayonnait, et je ravalai un soupçon de jalousie. Avec sa peau mate, elle ressemblait à une déesse grecque. J’aurais dû la détester, car elle mesurait presque dix centimètres de plus que moi. J’avais toujours eu l’impression d’être une orchidée blanche, qui brûlait au soleil. Avec mes cheveux blonds coupés à la garçonne, ma peau pâle presque translucide, ainsi que mes formes généreuses, j’avais l’impression d’être un vilain petit canard face à un beau cygne. J’avais envie de la détester pour ça, mais elle était trop gentille. Je n’avais pas d’autre choix que de l’admirer, ce qui n’était pas juste. Mais après tout, j’avais l’habitude des femmes plus jolies que moi. Alors même que je commençais à me rabaisser comme d’habitude, une partie primitive de moi s’élevait, pleine d’assurance et de féminité. Rachel était belle et brillante. Une scientifique qui avait découvert ce que mijotait la Ruche des mois plus tôt, lorsque son compagnon, Maxime, était tombé malade et qu’un humain nommé Brooks était mort. Elle avait résolu l’énigme et avait sauvé la vie de tous les habitants de cette planète. Pas les puissants Prillons, pas les bêtes Atlanes. Elle. Mais Tyran et Hunt ne voulaient pas d’elle, ils me voulaient moi. Je n’étais pas scientifique, je n’étais pas grande et brune, mais je leur appartenais. J’étais forte et déterminée. Je savais sans l’ombre d’un doute à quel point leurs sentiments pour moi étaient forts, parce que je pouvais tout ressentir à travers mon collier. Je le sentais chaque fois qu’ils me touchaient. M’en délectais à chaque orgasme. Ils ne faisaient pas semblant d’être obsédés par moi, de me désirer. Leur obsession, cette attirance intense, était réelle. Et cela me donnait plus que jamais confiance en moi. Je ne m’étais jamais sentie aussi forte, aussi douée. Malheureusement pour eux, cela me rendait également moins susceptible de rester dans cette pièce comme une gentille petite compagne bien sage pendant qu’ils sortaient chasser les méchants sans moi. Pas. Moyen. Rachel haussa un sourcil lorsque je jetai un coup d’œil par-dessus son épaule pour voir dans le couloir couleur crème. Derrière elle se tenaient non pas deux, mais quatre gardes supplémentaires. Deux Prillons que je ne connaissais pas, un Atlan nommé Rezz, et un Chasseur Everien ténébreux que j’avais rencontré la veille, pendant le dîner. Ils venaient d’arriver sur la Colonie, et Hunt m’avait dit qu’il était persuadé que jouer les gardes pour la compagne du gouverneur serait un bon moyen de les intégrer à la communauté sans qu’ils risquent de faire trop de bêtises. L’un des disparus, le capitaine Perro, était leur ami. Hunt voulait les tenir à l’œil. Il avait réussi. Surtout qu’ils travaillaient avec des résidents de longue date de la Colonie. Selon moi, devoir me garder moi ou Rachel devait être comme affecter un policier à la circulation. Chiant à mourir. Si j’étais en sécurité dans nos appartements, le pas de la porte ne devait pas être bien dangereux. J’avais pitié des deux Prillons qui montaient la garde. Le Capitaine Marz était nouveau sur la Colonie, et il ne me quittait pas d’une semelle lorsque Hunt et Tyran étaient au travail. Quand j’avais l’autorisation de quitter nos quartiers. Si mes compagnons étaient protecteurs, le gouverneur Rone et le capitaine Ryston étaient, bien évidemment, deux fois pires. Quatre gardes ? Ridicule. Franchement. — Bonjour Kristin. Ça va ? Kristin me parlait en anglais, et je souris. Les implants faisaient des merveilles et traduisaient les nombreuses langues parlées sur la Colonie presque instantanément, mais il était tout de même agréable d’entendre quelqu’un de la même origine que moi. — Bonjour. Oui, ça va. Je suis énervée, c’est tout. On peut parler ? Elle fit un signe de tête par-dessus son épaule avant d’entrer dans mes appartements et la porte se referma derrière elle pour nous donner un peu d’intimité. Je poussai un soupir. — Et maintenant, il y a six guerriers gigantesques qui perdent leur temps à faire le pied de grue derrière ma porte. Rachel rit, ses yeux bruns étaient pétillants, ce qui aida à calmer une partie de ma mauvaise humeur. Si quelqu’un pouvait comprendre l’enfer que je vivais, c’était bien elle. — C’est vrai qu’ils ont tendance à en faire un peu trop, dit-elle. Je n’étais pas du genre à mâcher mes mots, pas quand il s’agissait de mon travail. — Il me faut une armure et un flingue. La note d’humour dans le regard de Rachel s’évanouit rapidement et elle m’examina avec une expression grave. — Tu es sûre que c’est une bonne idée ? — Est-ce qu’il s’est déjà passé quelque chose comme ça sur la Colonie ? Des guerriers disparus ? Combien de ces types sont des inspecteurs compétents ? Je sais qu’ils ont tous fait la guerre, mais tuer les méchants et les interroger ne nécessite pas du tout les mêmes compétences. Elle marcha jusqu’à la petite table de la salle à manger improvisée. Les lieux étaient organisés comme un petit appartement sur Terre, avec une kitchenette minuscule — car la plupart du temps, les guerriers mangeaient ensemble à la cafétéria — deux canapés et une unité S-Gen dans un coin. Il y avait un fauteuil dans lequel j’aurais pu me pelotonner pour lire, et un très grand lit que je ne pouvais même pas supporter de regarder en cet instant. Penser à ce que mes compagnons m’y avaient fait m’aurait empêchée de me concentrer sur mon plan. — Je sais que tu as raison, mais il ne s’agit pas de trafiquants de drogue ou de maquereaux, Kristin. Et on n’est pas sur Terre. Ils font partie de la Ruche. Je secouai la tête. J’en savais assez. — J’ai lu des choses à leur sujet. J’ai lu les rapports. J’ai passé en revue des centaines, peut-être même des milliers de documents dans la base de données, ces derniers jours. Je sais dans quoi je mets les pieds. Ils tentent de réassimiler tout le monde sur la Colonie, pour prendre le pouvoir, et je ne les laisserai pas avoir mes compagnons, ni qui que ce soit. — Quoi ? demanda Rachel en haussant les sourcils, ahurie. Qu’est-ce que tu viens de dire ? Je croisai les bras sur ma poitrine, ma tunique et mon pantalon bleu foncé m’énervant maintenant que tout ce que j’avais envie de porter, c’était une armure comme mes compagnons. Je poussai un soupir. — Franchement, Rachel. Tu veux me faire croire que ce n’est pas exactement ce qui est en train de se produire, selon toi ? Elle secoua la tête et fit deux pas vers moi, sa voix lente, tous ses mots allongés comme si elle y réfléchissait alors même qu’ils quittaient sa bouche. — Non... mais comment tu peux savoir ça ? On n’a rien dit aux autres citoyens de la Colonie pour ne pas créer la panique. Comment as-tu découvert tout ça ? La tête penchée sur le côté, je haussai un sourcil et sus que le scepticisme se lisait sur mon visage. — Sérieusement ? Tout est là, dans les dossiers. Il suffit de lire entre les lignes. — Bon sang, dit Rachel en riant. Tu es douée. Je souris, et savoir que mes doutes étaient justifiés était extrêmement agréable. — C’est mon boulot, dis-je. — Bon, d’accord, tu as raison, dit-elle avant de pousser un soupir. Je risque d’avoir des ennuis, mais c’est d’accord. J’en suis. Si on doit devenir meilleures amies, autant mettre le bazar ensemble. Je devais tout faire toute seule, jusqu’à présent. Ce sera mieux avec une complice. Qu’est-ce que tu veux faire ? Je la pris dans mes bras et la serrai fort. Je ne pouvais pas m’en empêcher. — Meilleures amies, répétai-je. Elle sourit et me rendit mon étreinte, son visage plein de malice. — D’accord, Miss FBI. Dans quels genres d’ennuis est-ce qu’on va se fourrer, aujourd’hui ? Je la lâchai et fis les cent pas devant elle en réfléchissant. — J’ai lu les rapports médicaux. J’ai lu ce qu’il y avait sur la mort du capitaine Brooks et sur l’homme qui semble responsable, l’officier médical prillon qui a disparu. Krael ? L’expression de Rachel en disait long. La haine était une drôle d’émotion à voir sur son visage habituellement plein de gentillesse. — Oui. C’est comme ça qu’il s’appelle. Il a assassiné Brooks et a failli tuer Maxime avant de disparaître et de ramper dans un trou comme le rat qu’il est. D’autres seraient morts si on n’avait pas découvert ce qu’il faisait. — Je ne pense pas que le fait que Krael n’ait jamais été capturé et la disparition de ces guerriers trois mois plus tard soient une coïncidence. Est-ce qu’il avait des amis ? De la famille ? Avec qui s’entraînait-il ? Mangeait-il ? Dormait-il ? Travaillait-il ? — Il travaillait à l’infirmerie avec le Dr Surnen. Je peux me porter garante pour le médecin. Il est arrogant, mais ce n’est pas un traître. Il s’est donné à fond pour découvrir ce qui n’allait pas chez Maxime. Au début, il se comportait comme un sale con misogyne, mais il est remonté dans mon estime, et je pense qu’il a changé d’avis sur plein de choses grâce à moi. Pour le reste de tes questions, je ne sais pas, mais on peut le découvrir. — Oui. Nos regards se croisèrent, et je sus qu’elle était partante. — Mais d’abord, il me faut une armure, et un pistolet, ajoutai-je. Rachel me dit de me déshabiller et me guida jusqu’à la machine S-Gen, où elle commanda une armure, qu’elle m’aida à enfiler. Elle m’allait bien, et elle était étonnamment légère et souple. Rachel me regarda de la tête aux pieds et hocha la tête. — C’est bien. L’armure bloquera les tirs d’ions basiques, mais c’est tout ce que je sais. Je sortis le petit pistolet à ions argenté du holster attaché à ma cuisse et sentis mon visage se fendre en deux tant je souriais. Avoir une arme était tellement agréable, comme le fait de savoir qu’elle me servirait à traquer un homme mauvais. — Tu sais tirer ? demandai-je à Rachel. Elle secoua la tête. — Je suis une scientifique. Désolée. En haussant les épaules, je me retournai, visai le fauteuil de lecture et tirai. Une explosion retentit et le fauteuil prit feu, le rembourrage sur lequel je m’étais un jour assise flottait dans les airs comme les cendres ardentes d’un feu de bois. — Excellent. C H A P I T R E D O U Z E

ristin K Ce pistolet était encore mieux que mon Glock 23. Plus léger, avec une détente plus facile, moins de recul. Bien plus puissant. Je pourrais m’y habituer. — Ma fille, tu es complètement dingue, dit Rachel en gloussant alors que les six gardes se ruaient dans la pièce en pointant leurs propres armes sur le fauteuil désormais fumant. Je les ignorai et regardai les yeux rieurs de Rachel. — Ça veut dire qu’on ne peut pas être meilleures amies ? — Mais non. Je t’adore encore plus maintenant que tu as fait exploser ce fauteuil. Je ris, follement heureuse pour la première fois depuis des jours. La liberté chantait dans mes veines comme un poison délectable. Je savais que j’allais devoir affronter mes compagnons, mais j’en avais marre de rester les bras croisés. Je leur en avais parlé maintes et maintes fois, mais ils ne m’avaient pas écoutée. Si je devais m’accoupler avec eux, il fallait que je puisse être moi-même. Si je les autorisais à m’enfermer pour me garder en sécurité, alors je passerais toute ma vie dans cette foutue pièce. Et si Tyran voulait me fesser plus tard... Et bien, ça aurait valu le coup. Et je n’étais pas totalement contre, car jusqu’à présent, j’avais aimé tout ce qu’il m’avait fait. — Très bien. Allons-y. Nous nous dirigeâmes vers la porte, mais le capitaine Marz se plaça devant moi. Je savais qu’il était nouveau sur la Colonie. Lui et le Chasseur Everien aux yeux sombres qui se tenait à côté de lui. Ils étaient côte à côte, leurs traits on ne peut plus différents : Marz était Prillon et l’autre ressemblait à un humain, mais en plus grand... beaucoup plus grand. Ils me regardaient tous les deux en fronçant les sourcils, mais c’est le capitaine qui prit la parole : — Que croyez-vous faire, Dame Zakar ? Je haussai un sourcil. — Je vais aller secouer deux-trois personnes pour découvrir ce qui se passe par ici. Retrouver nos guerriers disparus. Je rangeai mon pistolet dans son holster avant de lever la tête pour les regarder dans les yeux. Bien haut. Le Chasseur, Kiel, tentait de dissimuler un sourire, mais sans succès. Le capitaine, cependant, ne riait pas du tout. Je ne regardai pas les autres gardes qui se tenaient derrière eux. L’Atlan était gigantesque, mais je savais que c’était Marz le chef d’après la façon dont les autres le laissaient parler. C’était lui qu’il fallait que je convainque, alors je le regardai. — Je ne pense pas que vos compagnons approuveraient, dit-il. — Je n’ai pas besoin de leur permission. Je croisai les bras lorsque Rachel vint se placer à côté de moi. — Mais j’ai besoin de votre aide, par contre, ajoutai-je. C’était la vérité. J’avais besoin de toutes les paires de bras à disposition. — Soit vous restez là à vous ennuyer sur le pas de la porte, soit vous nous accompagnez, et vous nous protégez, moi et Dame Rone, tout en enquêtant de votre côté. L’un de vos hommes a aussi disparu. Le capitaine Perro ? Je le tenais. Je le sus lorsque ses yeux se plissèrent et qu’il prit une inspiration profonde, du genre que l’on prend lorsqu’on est sur le point de dire quelque chose qu’on ne devrait pas dire. — Ouvrez la marche, dit-il. Rachel me regarda. — Tu veux commencer par où ? — Les appartements de Krael. Elle hocha la tête. — Je sais où il vivait. Rachel fit un signe de tête au capitaine Marz en passant, et tous les gardes la suivirent. Les trois hommes qui ne faisaient pas partie du groupe du capitaine Marz semblaient sur le point de protester, mais le chef de guerre Rezzer croisa les bras et dit un seul mot : — Dégagez. Le Prillon inconnu le plus proche de l’Atlan ouvrit la bouche, la referma, et regarda le capitaine Marz, qui les chassait déjà d’un geste de la main. — Deux d’entre vous doivent rester ici pour s’assurer que personne n’entre dans les quartiers de Dame Zakar. Vous, dit-il au troisième, retournez à la salle de commandes et dites au gouverneur où nous nous rendons. — Oui, Monsieur. Ensuite, tout le monde se mit en rang d’oignon et je suivis Rachel sur environ cinq cents mètres de couloirs et d’allées couvertes. La base tout entière était fermée à cause de gros orages qui frappaient parfois sans prévenir. Je n’en avais pas vu grand-chose, à part l’intérieur de mon appartement, et j’avais hâte de l’explorer. Au-delà des couloirs, à l’extérieur de la base, je voyais un paysage rocheux à n’en plus finir et des ravins parsemés de bâtiments circulaires. D’après mes lectures, je savais qu’il s’agissait de maisons, de centres d’entraînement, mais surtout de mines. Sur cette planète se trouvait un minerai dont je n’avais jamais entendu parler. Apparemment, il était rare, si instable qu’ils ne pouvaient pas se servir de leur technologie S-Gen pour le créer, et il était absolument nécessaire pour les manœuvres sur leurs stations de transports. Et cela me mettait en colère. Ils se servaient de leurs vétérans blessés, ceux qui portaient les implants de la Ruche, pour travailler dans les mines ? Sérieusement ? C’était comme ça qu’ils les remerciaient ? Hunt m’avait expliqué qu’il y avait sept bases sur la planète, et que trois d’entre elles se trouvaient complètement sous terre. Comme si des femmes terriennes accepteraient de vivre sous terre. Mais je n’avais rien dit à voix haute. Pas besoin. Mes compagnons avaient perçu mon dégoût par l’intermédiaire de nos colliers. Mais après tout, je me trompais peut-être, des spéléologues accepteraient probablement de vivre dans des grottes. Mais moi, je n’aurais pas pu. Rachel connaissait bien la base, et nous arrivâmes devant une porte close quelques minutes plus tard. Les appartements de Krael. Le Chasseur, Kiel, se plaça à l’avant. Il prit plusieurs inspirations et examina le tableau de contrôle comme un limier. Le processus était à la fois fascinant et étrange et me prouvait une fois de plus que je n’étais vraiment plus sur Terre, et que ces types étaient tous des extraterrestres. — Vos compagnons sont entrés ici, dit Kiel en ouvrant les yeux avant de me regarder comme si je lui devais une explication. Je haussai les épaules. — Ce n’est pas étonnant, vu qu’ils cherchent les disparus. Kiel secoua la tête et regarda par-dessus mon épaule, en direction du capitaine Marz, qui se tenait derrière moi comme un chêne. — Qu’est-ce qu’il y a ? demanda-t-il. — Ils n’étaient pas seuls, répondit Kiel. Des doigts glacés me serrèrent le cœur de l’intérieur et je luttai pour rester immobile. — Dites-moi, ordonnai-je. Je vois dans vos yeux que quelque chose ne va pas. Kiel arrêta de regarder Marz, ce qui le fit remonter dans mon estime alors que Rezzer grognait et s’approchait de Rachel. Distraite, je me tournai vers l’Atlan et vis que les os de son visage semblaient se déplacer sous sa peau. Ses épaules se soulevèrent, mais alors que je pensais que j’allais voir une bête Atlane pour la première fois, il arrêta de se transformer, coincé dans une sorte d’entre-deux. Cependant, le mot qu’il prononça suscita grandement ma curiosité : — Ruche. Kiel hocha la tête lorsque je me tournai vers lui. — La Ruche ? Ici ? La demi-bête grogna encore, le son presque assez fort pour étouffer le bruit de mon pouls qui me battait aux tempes. Kiel se pencha sur le pas de la porte et prit une bouffée d’air mesurée. — Oui. C’est vraiment la Ruche. Une unité d’intégration et au moins deux soldats. Ses yeux s’assombrirent, résignés, et il ajouta : — Et Perro. Lui aussi était avec eux. Je n’avais aucune idée de la manière dont il savait cela simplement en se tenant près du panneau de contrôle de la porte, mais j’étais impressionnée. Pas ravie de ses découvertes, mais impressionnée. — Par les dieux, dit Marz en sortant son pistolet, et je l’imitai, l’adrénaline coulant dans mes veines. Ils étaient avec Hunt et Tyran ? Avec un hochement de tête, Kiel activa son instrument de communication et parla à quelqu’un du centre de commandement de la Base 3 : — Quelle est la position actuelle des capitaines Treval et Zakar ? Il y eut une longue pause à l’autre bout du fil, puis le guerrier prillon que Marz avait envoyé là-bas répondit : — Ils auraient dû arriver il y a des heures. Deux équipes de recherches ont été envoyées après eux. Quoi ? Un cri me monta dans la gorge, mais je ne le laissai pas sortir. Je ne voulais pas faire peur à ces grands aliens avec un hurlement qui leur ferait sûrement saigner les oreilles. — Mes compagnons ont disparu, et personne n’a pris la peine de m’avertir ? Rachel vint se placer à côté de moi et me posa une main sur le bras. Je ne voulais pas qu’on me touche, mais je restai immobile, bien sage. — On les retrouvera, dit-elle. Kiel remercia l’officier et tourna le dos à la porte, avant de marcher dans une direction qui ne semblait aller... nulle part. — Où allez-vous ? demandai-je. — Vos compagnons ont été emmenés par là. Vous voulez venir avec moi maintenant, ou rester ici et attendre de l’aide ? Pas question d’attendre. Mes compagnons avaient disparu, et Kiel savait par où ils étaient partis. Pas besoin de réfléchir. — Allons-y, dis-je en me dépêchant de le rattraper. Rachel, elle, resta en arrière. Je jetai un regard par-dessus mon épaule et dis : — Qu’est-ce qui se passe ? Elle pencha la tête de côté et posa les mains sur ses hanches. — Je vais faire demi-tour pour aller chercher des renforts. J’arrive tout de suite. Je hochai la tête, ensuite je baissai les yeux et je fis mes premiers pas sur la roche rouge, quittant le sol manufacturé de la base. Quelques touffes de végétation tentaient de survivre sur le sol rocheux, et soudain, je ne me sentis plus du tout chez moi. J’avais l’impression d’être sur Mars, et les deux personnes les plus importantes de la planète à mes yeux étaient là dehors, perdues dans le labyrinthe de rochers et de grottes. Non, pas perdues. Enlevées. Ils avaient besoin de moi. J’avais seulement été aimée, vraiment aimée, par mes compagnons pendant quelques jours, mais c’était suffisant pour que je sache que je n’étais pas prête à me passer de cette vie. J’étais accro, et j’allais les récupérer.

Tyran, Cellule de la Ruche, La Colonie

Je me réveillai au son de bottes qui approchaient, le bruit voyageant derrière moi à travers la roche pour me bourdonner aux oreilles. La personne qui approchait était grande, lourde, et il s’agissait d’un ennemi. Allongé à côté de moi sur le sol froid de notre cellule, Hunt cligna lentement des yeux, la réalité de notre situation le réveillant en sursaut. Nous entendîmes des cris, une dispute, des pieds qui glissaient sur le sol dur. Un tir de pistolet à ions. Ils emmenaient la personne qui se trouvait dans la cellule voisine, qui qu’elle soit. Ils allaient le torturer, l’intégrer. Le transformer en un soldat de la Ruche. La colère me parcourut, mais je n’avais aucun moyen de l’exprimer. Nous ne pouvions pas sauver la personne qu’ils emmenaient. Nous ne pouvions rien faire d’autre qu’espérer qu’ils ne prolongeraient pas ses souffrances. — Ils viendront nous chercher. Pas tout de suite, mais bientôt. Oui, ils seraient occupés pendant un petit moment. — Putain, soufflai-je. Je sais. Je tordis mes doigts et remis mes os cassés en place pour pouvoir me servir de mes mains. La douleur ne m’arrêterait pas. J’étais sûr que le Dr Surnen n’aurait pas approuvé, mais si nous nous en sortions vivants, j’étais prêt à me faire gronder. — Il faut qu’on sorte de là avant que d’autres personnes ne soient enlevées. Pour avertir les autres, dit Hunt. Il étira sa nuque pour se réveiller, se préparer à se battre. — Au moins l’un des prisonniers, ajouta-t-il, les dents serrées. Ça aussi, je le savais. Une promesse avait été faite aux guerriers de la Colonie, la promesse qu’ils n’auraient plus jamais à subir les tortures de la Ruche. Que la guerre était finie pour eux. Qu’ils étaient en sécurité. C’était un mensonge. Les soldats de la Ruche qui nous avaient enlevés se trouvaient sur la Base 3, s’étaient promenés dans la Section 9 comme s’ils étaient chez eux. Aucune alarme n’avait retenti, aucun garde ne nous avait avertis en criant. Nous nous étions même approchés d’eux comme s’il s’agissait de connaissance, comme s’ils avaient fait partie de notre communauté, pas comme s’il s’était agi d’ennemis. Nous n’avions pas été prêts à affronter leur attaque, nos armes étaient toujours rengainées. Pas étonnant que tant d’hommes soient portés disparus. Il n’y avait eu aucun signe avant-coureur. Aucun tir. Pas de lutte. Nous avions été surpris. Et nous nous étions laissés avoir, nous aussi. Eh merde ! La ruche n’aurait pas dû être en mesure de nous détruire. Nous avions cru que c’était fini. La colonie était une planète lointaine avec peu de choses à offrir à des colons. Nous ne craignions pas d’être attaqués. Nous nous trouvions en plein milieu de la zone spatiale de la Coalition. Nous aurions dû être en sécurité. Nous nous étions trompés. Là, dans cette espèce de prison, nous avions découvert la vérité sur nos guerriers disparus. Ils n’étaient plus là, soit morts, soit intégrés à la Ruche. A cet instant même, le capitaine Perro faisait les cent pas devant notre cellule, ses yeux dénués d’expression. L’homme qu’il avait été avait disparu. On pouvait choisir de voir ce qui était arrivé aux autres, aux morts qui bordaient les murs, comme une bénédiction. Au moins, ils étaient libres. Leurs souffrances étaient finies. Ils n’avaient pas été transformés en leur ennemi, en la chose que nous avions tous combattue. L’honneur était important pour nous, et être transformés en soldats de la Ruche était le plus cruel des destins. La mort était préférable. Nous n’avions pas encore été intégrés comme les autres disparus, mais notre heure viendrait. L’entaille sur la tête de Hunt suintait, et il vacilla en essayant de se lever. Il avait sans doute un traumatisme crânien. Vu la façon dont il agitait son bras, il devait être déboîté. Ça lui était déjà arrivé, lors d’une bataille dans le Secteur 17. On l’avait mis dans une capsule de régénération, mais il se frottait toujours le bras de temps en temps, comme pris par une douleur fantôme. Je m’en étais mieux sorti. J’avais seulement les doigts cassés et quelques côtes brisées. J’avais connu pire. Bien pire. Je pouvais toujours me battre. Bientôt, ce serait la seule chose qui importerait. Nos blessures seraient facilement guéries par une baguette ReGen, ce que nous n’avions plus à notre disposition. Ils nous avaient tout pris. Nos pistolets à ions, nos unités de communication, nos baguettes guérisseuses. Nous portions toujours nos armures, mais c’est tout. Je n’étais pas pudique. Si la Ruche voyait mes fesses, je m’en foutais. Mais j’étais tout de même content d’avoir mon armure. L’expérience m’avait appris que lorsque la Ruche vous enlevait votre armure, les véritables souffrances commençaient. — C’est pas normal, dit Hunt en penchant la tête, les yeux fermés. Je refuse de croire que le destin puisse être aussi cruel. Sans avoir besoin de poser la question, je savais qu’il parlait de notre compagne. Nous venions de la trouver, de la goûter et de la faire nôtre. Nous commencions tout juste à guérir et à être de nouveau entiers. Je poussai un soupir et m’allongeai à côté de lui, épaule contre épaule, comme nous avions tout affronté ces dernières années. — C’était peut-être notre dernier cadeau, dis-je. J’étais content de l’avoir eue comme compagne, même si ça n’avait pas duré longtemps. La seule chose qui m’importait, c’était que Kristin soit en sécurité, qu’elle aille bien. Si nous mourions, un autre s’occuperait d’elle. Elle était parfaite, d’autres l’aimeraient forcément. Et dieux merci, elle n’était pas là. Elle était en sécurité sur la Base 3 avec le gouverneur, tous ses gardes, et avec les autres guerriers. La vérité finirait par éclater au grand jour. Je faisais confiance aux autres guerriers. Ils découvriraient cet endroit et le détruiraient, même si je ne savais pas si cela arriverait avant ou après notre intégration à la Ruche. Je regardais notre garde faire les cent pas. Le capitaine Perro avait été complètement transformé en soldat de la Ruche. Il avait beau ressembler à l’homme qu’il avait été : physique, couleur de cheveux, c’était tout ce qu’il restait de lui. Ce n’était plus qu’une machine, un guerrier, mais avec les fréquences de la Ruche dans le cerveau, c’est tout. Son esprit n’était plus là. Il n’était plus Perro. Il avait survécu à la cruauté de la Ruche une fois, mais devoir subir ça une nouvelle fois en sachant qu’il ne s’en sortirait pas ? Ce n’était pas seulement de la torture, c’était de la folie. — Je ne les laisserai pas me transformer en notre ennemi. Je préfère encore mourir. C H A P I T R E T R E I Z E

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T Mes mots firent grogner Hunt. — Tais-toi. Il faut qu’on la joue fine. Ils ne connaissent pas ta force. On arrivera à sortir d’ici, et ensuite, on tuera le traître. — Comment est-ce qu’on a pu être aussi aveugle au sujet de Krael ? C’était ce que je voulais savoir. Il avait vécu parmi nous, travaillé parmi nous. Il avait des amis. Pourquoi avait-il retourné sa veste ? Et il avait bel et bien trahi. Il agissait de son propre chef, il n’était pas contrôlé de l’intérieur par la Ruche. J’avais vu cet enfoiré se promener sur les lieux en donnant des ordres. J’avais envie de le tuer. Mais d’abord, il fallait que nous sortions de cette cellule. Et pour ce faire, nous devions découvrir comment traverser le mur rocheux, ou trouver un moyen de contourner le champ de force qui nous piégeait ici. J’avais arrêté d’essayer de trouver un moyen de traverser le mur d’énergie scintillant qui fermait notre cellule il y a déjà des heures. Est-ce que ça durait depuis des heures ? Des jours ? Combien de temps avions-nous dormi ? Dans cette grotte, il était impossible d’avoir la notion du temps. Rien ne nous permettait de savoir depuis combien de temps nous étions retenus ni combien de temps il nous restait avant qu’ils ne viennent nous chercher. Avant que notre transformation soit complète. Ils n’avaient pas pu finir la première fois, car nous nous étions enfuis. Mais s’ils revenaient, ils ne nous rateraient pas. J’avais essayé de sortir. Il n’y avait aucune échappatoire. Trois murs rocheux, et un quatrième transparent. C’était comme les cellules Atlanes, avec un champ de force que même une bête Atlane ne pouvait traverser. Ce n’était pas une question de force, mais de science. Je savais ce qui arriverait si je touchais cette barrière invisible. J’avais de la chance que seuls mes doigts se soient cassés. Si j’avais réessayé, j’aurais pu perdre ma main. — On aurait dû savoir, c’était notre boulot, répondit Hunt. Je tournai la tête vers mon ami, mon second. — On n’aurait pas pu le deviner. On se faisait tous confiance. Sans Dame Rone, on n’aurait peut-être jamais découvert ses mensonges. Maxime ne savait pas non plus. C’est le gouverneur, et il s’est fait avoir comme nous tous. À moins que tu insinues qu’il était au courant ? Pourquoi étais-je la voix de la raison ? Nous n’avions pas su à quel point Krael nous trahissait, pas avant aujourd’hui. Non, ce n’était pas tout à fait exact. Nous savions que quelqu’un détruisait la Colonie, un guerrier à la fois. Que quelqu’un les enlevait, les convertissait et les transformait en taupes, en guerriers de la Ruche. — Ah non. Je mettrais ma vie entre les mains de Maxime. — Ce qui est fait est fait. Brooks est mort. Et la Colonie sera détruite si on n’arrête pas Krael. D’accord, il a réussi à s’enfuir une fois, mais on savait qui on recherchait. Et maintenant, il est là. Avec nous. Il faut qu’on le tue. Je ne baissai pas la voix. Je voulais que Perro nous entende, qu’il soit assez bête pour baisser l’intensité du champ de force qui nous retenait prisonniers. Il sursauta comme s’il nous écoutait, puis il reprit ses allées et venues, nous ignorant complètement. — Krael, c’est une chose. Mais personne ne s’était attendu à ça. Il me montra la base secrète de la main et poursuivit : — Je ne sais pas si tuer Krael suffira. Cette base et le nombre de soldats de la Ruche qui l’occupaient étaient bien pires que ce à quoi nous nous attendions, et bien plus dangereux. — Je sais, répondis-je. Nous restâmes assis en silence et je profitai du calme pour me préparer à ce qui allait venir. Je ne succomberais pas aux tortures de la Ruche. Je me battrais jusqu’à la mort, en tuant le plus de soldats possible. Il fallait que Hunt s’échappe, qu’il prenne soin de Kristin. — Je vais les tailler en pièces, Hunt. Quand ça commencera, tire-toi d’ici. Occupe-toi de Kristin. Avertis les autres. Il faut les arrêter. — Vous ne pouvez pas nous arrêter. Krael était apparu en face de notre cellule, debout de l’autre côté du champ de force. Nous nous trouvions sur le sol, adossés à la pierre froide et dure. À notre arrivée, nous avions longtemps fait les cent pas, mais nous savions qu’il fallait garder notre énergie pour le combat. Si la personne qui nous parlait était digne de respect, nous nous serions levés, mais Krael ne méritait pas les honneurs. Nous espérions qu’en nous montrant coopératifs, ils baisseraient la puissance du champ de force. Mais Krael n’en fit rien et nous regarda d’un air pompeux. — La Colonie sera lentement infiltrée par la Ruche. Nous conquerrons ce monde et il abritera un bataillon de la Ruche. Nous pourrons attaquer les planètes membres les plus proches sans difficulté. Ensuite, vous tous, les vétérans, vous serez considérés comme des tueurs sans foi ni loi et vous serez annihilés. Il avait craché le titre honorifique que nous avait accordé Dame Deston comme s’il s’agissait d’un gros mot. Mais il avait raison sur le reste. Si la Colonie était infiltrée par la Ruche, les citoyens des planètes de la Coalition penseraient que tous les guerriers qui échappaient à la Ruche étaient contaminés pour de bon, qu’ils se soient échappés ou pas. Il ne serait plus possible de survivre après avoir reçu des implants de la Ruche. La haine et la méfiance des autres se retourneraient contre nous, alors que nous étions déjà les membres les plus craints de la communauté interplanétaire. Nous nous détruirions les uns les autres, serions exterminés par notre propre peuple, et la Ruche s’assurerait de terminer le travail. — Ça n’arrivera pas, gronda Hunt en refusant de regarder le traître. Krael eut le culot de rire. — Oh, mais si. Et c’est vous qui le ferez. Vous obéirez aux ordres de la Ruche en détruisant cette planète et la communauté que vous avez lutté pour créer. Il n’eut pas besoin de parler des horreurs qui suivraient. Nous savions tous ce qui se passerait si la Colonie tombait aux mains de la Ruche. La Terre était la planète la plus proche, et aussi la moins protégée. Les humains périraient en premier. Le peuple de Kristin. Krael était lamentable, pour un Prillon. Il avait beau être aussi grand que Hunt et moi, il n’avait pas d’honneur. J’ignorais à quel moment il avait retourné sa veste, mais il avait déjà fait beaucoup de dégâts. Il ne semblait pas avoir été intégré par la Ruche. Pas d’œil comme Hunt. Pas de robots dans les muscles, comme moi. Que lui avait fait la Ruche ? Avait-il des implants dans les bras ? Le torse ? Ou avaient-ils modifié son cerveau ? Il s’exprimait librement, semblait savoir ce qu’il disait, être sûr de ses choix, et cela me mettait en rage. Il n’était pas manipulé par qui que ce soit, il nous avait tous trahis par égoïsme. Je ne savais pas quelles étaient ses motivations, et je m’en fichais. Ça n’avait pas d’importance. Krael était l’ennemi. À la première occasion, je le déchirerais en deux. Les hommes disparus étaient devenus des robots sans libre arbitre. Ils avaient beau avoir la même apparence qu’avant, ils n’étaient plus qu’une coquille vide contrôlée par la Ruche. La partie de leur cerveau qui faisait d’eux des individus n’existait plus. Mais Krael ? Il n’était pas une coquille vide. Non, il était trop calculateur, trop impitoyable pour cela. Il travaillait pour la Ruche, mais j’ignorais comment il avait été convaincu de le faire. Il travaillait seul, d’après ce que je voyais. C’était inhabituel pour un Prillon. La plupart d’entre nous avaient un second, même en l’absence de compagne, un frère d’armes à qui faire confiance et avec qui lutter contre la solitude. Mais Krael était une énigme que nous résoudrions si nous parvenions à quitter cette maudite cellule. Il n’avait pas de collier, pas de connexion avec qui que ce soit, à part avec la Ruche. Il sourit, mais son expression était glaciale. — Votre heure viendra bientôt, dit-il. Mais je vais vous laisser vous demander quand. Il tourna la tête vers le capitaine Perro et ajouta : — Il a été si bien converti. Avant, il était de votre côté, il vous protégeait. Désormais, il pourrait vous tuer sur place. Sur mes ordres ou ceux de la Ruche. Il tapota l’épaule du guerrier, mais le capitaine Perro ne réagit pas. — Lui, reprit Krael, on l’a endormi avant de lui mettre un implant dans le cortex préfrontal. Il ne peut même pas aller pisser sans qu’on lui en donne la permission. Mais vous ? On verra. Ce qui est marrant, c’est qu’ici, ils cherchent différents moyens d’intégrer les soldats. Comparé à ça, ce qui vous a été fait avant n’était qu’une simple expérience. Il examina Hunt, les yeux plissés. — Ils termineront ce qu’ils avaient commencé avec vous, Hunt. Vos yeux seront complètement intégrés. Vous pourrez espionner pour la Ruche. Hunt cligna lentement des yeux, mais refusa de répondre à cette provocation. Je serrai le poing de ma main indemne. J’avais envie de tuer Krael avec une force que je n’avais encore jamais connue. Mais je la maîtrisai, comme je l’avais toujours fait avec toutes mes émotions. Je devais attendre mon heure. J’aurais l’occasion de passer à l’action, il me suffisait d’être patient. Krael tourna les talons et s’en alla, son pas lourd sur le sol rocheux, laissant le capitaine Perro nous servir de garde, le fier guerrier d’autrefois nous rappelant à quel point la Ruche était puissante et à quel point nous étions faibles. Hunt se mit debout et plaça une main sur le mur pour se stabiliser. — Il faut qu’on fasse quelque chose. On ne peut pas rester là à attendre de mourir. Je levai les yeux vers lui. Il avait l’habitude d’être aux commandes, tout comme moi. La volonté de mener, de diriger était dans notre ADN. Être retenus prisonniers était deux fois plus dur pour nous. J’étais tout aussi énervé que Hunt, mais je gardais la tête froide. Dans ce genre de situation, j’y parvenais. Sur le champ de bataille, j’étais glacial. Précis. Hunt était en mesure de nous diriger, était diplomate et stratège. Mais en cet instant ? Il voyait rouge. Cette noirceur qu’il ne montrait jamais remontait à la surface à chaque regard vers le capitaine Perro. — Krael mourra pour ce qu’il a fait. Lentement. Je ne dis rien. Ce n’était pas nécessaire. Hunt continua d’exprimer sa rage, moi, je savais que je devais analyser la situation. Réfléchir clairement, avec logique, sans me laisser porter par la colère. — On ne peut rien faire maintenant. On doit attendre que l’occasion se présente. Elle viendra, mais on doit être prêts. On doit être forts. Repose-toi. Ta tête doit te faire un mal de chien. Hunt se tourna en soupirant. Il laissa retomber ses épaules, laissa la tension disparaître, au moins pour l’instant. Il savait que j’avais raison, savait que nous devions nous calmer pour le moment. — C’est vrai, dit-il. Bon sang. Il se laissa retomber au sol à côté de moi. Il fallait garder nos forces. Attendre.

Tyran, Cellule, Grottes de la Ruche

J’avais dû m’endormir. Je ne savais pas combien de temps je m’étais assoupi, mais un bruit de bottes me réveilla à nouveau. Je donnai un petit coup de coude à Hunt, qui s’étira. — C’est l’heure, dis-je. Il ouvrit les yeux, puis, lorsqu’il entendit les bruits de pas, il serra la mâchoire. Il se leva lentement, une main sur le mur. Heureusement que nous avions nos colliers, car je sentais que même si sa tête lui faisait mal, la douleur n’était pas insupportable. Il avait besoin d’avoir l’esprit clair, pas troublé par une commotion cérébrale. Je me mis également debout. Nous attendîmes. Côte à côte, comme d’habitude. Perro et une Unité d’Intégration de la Ruche se tenaient de l’autre côté du champ de force. La Ruche s’avança pour presser un bouton, et le bourdonnement incessant s’arrêta. Je sus que le champ de force était éteint. Mes oreilles sonnaient. — Venez avec nous, dit l’Unité d’Intégration d’une voix monotone et robotique. Je lui jetai un regard, avant de tourner les yeux vers Perro. Je ne pouvais pas m’empêcher de voir le capitaine comme le guerrier qu’il avait été. Seulement quelques jours plus tôt, il s’était tenu face à Hunt, malheureux, comme tous les nouveaux arrivants. Il ne méritait pas ça. Il avait combattu, avait survécu à sa capture, avait réussi à atteindre la sécurité de la Colonie, et la Ruche l’avait retrouvé quelques jours plus tard. C’était un guerrier loyal, et j’étais en colère pour lui, en colère que cela lui soit arrivé alors qu’il était censé être en sécurité sur la Colonie, juste sous notre nez. Hunt me jeta un regard, puis il alla se placer à côté de l’Unité d’Intégration. Il n’avait pas besoin de dire quoi que ce soit. Je le ressentais. Sa rage, sa frustration, sa détermination. Soit nous nous en sortirions indemnes — ou en tout cas, en assez bon état, — soit nous mourrions. Je préférerais encore tuer Hunt plutôt que le laisser attaché à une table de torture. Il ferait la même chose pour moi. Il marcha le long du couloir, passa devant des cellules vides et je me plaçais à côté de Perro. Nous ne pouvions pas agir si nous restions dans la cellule. C’était l’occasion de nous échapper d’ici. Il fallait que nous nous libérions pour avertir la Base 3, pour leur dire de trouver cet enfer souterrain et de le détruire. Je sentis un pistolet à ions contre mon flanc, pressé à un endroit qui n’était pas recouvert par mon armure. Je n’avais pas besoin qu’on m’enfonce une arme dans la chair pour avancer. Je marchais déjà en direction de leur salle des tortures. Perro pressa de nouveau son pistolet contre moi. Je plissai les yeux et les posai sur l’arme, prêt à lui dire d’aller se faire foutre. Il avait peut-être été mon allié, mais c’était fini. Mais l’arme n’était pas pointée sur moi. Non, ce que Perro pressait contre mon flanc, c’était la crosse du pistolet. Je levai la tête, surpris, et le regardai dans les yeux, ou plutôt, dans l’œil qu’il lui restait, et je faillis trébucher. — Prends-le, souffla-t-il d’une voix presque inaudible. J’écarquillai les yeux. Ni lui ni moi ne ratâmes un pas, conscients que nous étions observés. — Mais tu dois me tuer, ajouta Perro. Tu dois me tuer. Oui, il connaissait son destin, savait que l’étincelle de guerrier qui restait dans son corps ne ferait pas le poids contre ce qu’ils avaient fait à son cerveau. Comment cette partie de lui avait-elle pu survivre ? Mais s’il était là-dedans, il pouvait être sauvé. Je pris l’arme, son poids familier dans ma main, le bras derrière le dos pour le cacher à l’Unité de la Ruche qui se trouvait devant nous. — On t’emmènera avec nous, dis-je. C’était un bon guerrier, l’un des nôtres. Je ne l’abandonnerais pas s’il avait une chance. Il secoua brièvement la tête. — Là, je suis lucide, mais c’est fini pour moi. La Ruche s’empare de moi, minute après minute. Je m’efface, j’oublie. Il ne reste presque plus rien de moi. Tue-moi. Je vis sa tête tressaillir, son œil valide devenir comme mort. Sa main me serra douloureusement le bras. Son pas devint robotique, comme l’Unité d’Intégration qui se trouvait devant lui. En un instant, le capitaine Perro avait disparu. Il ne restait plus rien du guerrier prillon. Je ne savais pas s’il s’agissait d’une erreur ou si sa transition n’était pas terminée, mais il avait été là, même si ça n’avait duré que quelques secondes. Reviendrait-il à lui ? Pouvais-je le sauver pendant un moment de lucidité ? Il fallait que je fasse un test, pour voir s’il pouvait être sauvé. — Perro, ne les laisse pas me faire ça, dis-je à voix haute. Hunt tourna la tête et me regarda, mais je l’ignorai. Il avait perçu le changement dans mes émotions à travers le collier. Même s’il ne savait pas ce qui s’était passé, il avait ressenti un espoir qui n’était pas là quelques minutes plus tôt. Et de la détermination. — T’es un Prillon, putain. Pas un soldat de la Ruche, poursuivis-je. Rien. Pas de réaction. Je tentai à nouveau : — Guerrier, en armure, dis-je de mon ton le plus autoritaire. C’étaient les mots que les commandants utilisaient toujours avant d’aller à la bataille. Perro tourna la tête, croisa mon regard, et je vis ses pupilles se dilater, sa poigne se relâcher, mais il ne me lâcha pas le bras. — Monsieur, répondit-il. Mais l’Unité de la Ruche s’arrêta et se retourna. Elle pressa un bouton de communication sur son poignet, et le corps du capitaine Perro fut pris de convulsions. Il ne tomba pas au sol, mais on aurait dit qu’il avait reçu des électrochocs et que son implant cérébral avait été remis à zéro. Lorsque l’Unité de la Ruche leva un doigt, Perro s’immobilisa. Sa main retomba, son œil redevint noir. Vide. Je savais qu’il n’était plus là. Pour de bon ? Je ne pouvais pas en avoir la certitude, mais il avait eu raison. Il était irrécupérable. Il ne méritait pas d’être laissé ainsi. Il méritait une mort honorable, au lieu d’être contrôlé par une unité de communication. Il m’avait donné son pistolet dans l’un de ses derniers instants de lucidité pour que nous nous sauvions, et que nous secourions les autres. Je lui accorderais sa dernière volonté. Je le libérerais. Visiblement satisfaite — je ne savais pas comment une unité de la Ruche pouvait avoir des sentiments —, l’Unité qui avait remis Perro à zéro se retourna et se remit à marcher. Mon esprit analysait la situation si vite que j’avais du mal à tout comprendre. Perro avait suffisamment retrouvé ses esprits pour nous aider. Il s’était peut-être accroché, avait lutté contre le processus de manière à nous parler, pour faire en sorte que nous lui offrions la seule libération possible. La mort. Mais à présent, nous étions libres, ou en tout cas, nous avions échappé au champ de force. Hors de la cellule, ma puissance ne pouvait pas être contenue. La première fois que j’avais été capturé par la Ruche, ils m’avaient rendu fort. Non, plus que fort. Mes os, mes muscles avaient été altérés, et je faisais désormais passer les bêtes Atlanes pour des enfants. L’Unité de la Ruche qui avançait devant moi ne serait pas à la hauteur. Je pourrais lui arracher la tête tout en gardant mes esprits, contrairement aux bêtes. J’en étais capable. Et j’allais le faire. Mais il fallait que j’attende. Ce n’était pas le moment d’attirer l’attention. Il fallait que nous sortions de la prison pour voir ce qui se trouvait au-delà. Voir si d’autres personnes avaient besoin d’être secourues. Découvrir si nous avions affaire à une dizaine d’Unités d’Intégration ou à une centaine. Tout ce que je savais, c’était que nous nous trouvions toujours sur la Colonie, qu’il s’agissait d’une base secrète, utilisée par la Ruche pour détruire la nouvelle vie que Hunt, moi et tous les guerriers de la Colonie étions en train de construire. Il fallait les anéantir. Les guerriers auraient besoin d’un plan, ou tout du moins, d’informations. Mais quand j’aurais vu ce que je voulais voir. À ce moment-là, tous les implants dont m’avait doté la Ruche se retourneraient contre elle. Les Unités seraient détruites par l’une de leurs propres créations. Ils avaient construit un monstre, et pour retrouver Kristin, j’étais prêt à le libérer. La Ruche était foutue. C H A P I T R E Q U A T O R Z E

ristin, à l’Extérieur de la Base Secrète de la Ruche K — Bon sang, comment est-ce que la Ruche a pu construire une base secrète sans que personne ne le sache ? murmurai-je. Kiel se trouvait à côté de moi, et nous regardions par-dessus la falaise pour voir l’entrée qui se trouvait en dessous. Elle était fortifiée par des parois de pierre, comme si elle avait été construite dans le cratère d’un volcan. Des sentinelles gardaient la grande et unique porte. — Je suis nouveau sur cette planète, répondit-il. D’après ce que j’ai compris, nous sommes arrivés le même jour, vous et moi. L’Everien était tout aussi grand que mes compagnons, ce qui était étonnant, car ils étaient gigantesques. Pour une personne avec de telles proportions, il était discret, ses pieds silencieux sur la roche alors que nous suivions le sentier que lui seul pouvait voir. C’était comme s’il avait une vision infrarouge ou comme s’il pouvait voir des miettes de pain ou quelque chose comme ça, parce qu’il avait toujours gardé le cap depuis que nous avions quitté les appartements de Krael. Avait-il du sang de limier ? Je n’en avais aucune idée, mais cet homme était un génie de la traque. Sur cette planète, personne ne connaissait cette base — dans le camp des gentils, en tout cas —, et il nous avait guidés jusqu’ici. Enfin, ça n’avait pas été si facile. Le chemin avait été long, sans véritable sentier. Non, j’avais l’impression d’avoir escaladé l’Everest. Il n’y avait pas de montagne, mais beaucoup de formations au relief dentelé. Mon armure avait été éraflée par des chutes de pierres, et mes mains me faisaient mal à force de m’être accrochée à la surface rugueuse pour garder l’équilibre. Mais ce n’était encore rien. Je savais que derrière la porte de la base secrète se trouvait un véritable enfer. Je regardai Kiel, le Chasseur. J’avais appris que Chasseur était un véritable titre. Marz m’avait dit qu’ils travaillaient parfois comme chasseurs de primes ou comme policiers sur toutes les planètes de la Coalition. Chasseur était le bon mot, car il était vraiment doué pour pourchasser sa cible. Les Everiens étaient recrutés par la Coalition et servaient d’assassins d’élite ou servaient dans les unités de reconnaissance. Je ne lui avais pas posé la question, mais je me demandais si c’était ainsi qu’il s’était fait capturer par la Ruche. Je ne le saurais sans doute jamais, mais apparemment la Ruche n’avait rien fait pour affaiblir ses capacités. Marcher avec lui était étrange, c’était comme être avec un voyant ou quelqu’un comme ça. Il savait où se trouvaient mes compagnons. Il semblait tout simplement le savoir, comme par magie. Nous devancions les autres, jouions les éclaireurs de cette mission, tandis que Rezzer et Marz fermaient la marche. Ça m’allait très bien. Je ne voyais aucun chemin, aucun signe des deux guerriers prillons baraqués, ou des membres de la Ruche. — Comme je n’étais pas là, reprit Kiel, je ne sais pas comment cet endroit a fait pour ne pas être repéré. Ils doivent utiliser une sorte de brouilleur. Il leva la tête et inspecta les parois rocheuses qui nous entouraient, puis il ajouta : — Ou les interférences magnétiques des rochers. Si je n’étais pas impliquée, j’aurais pris ce qu’il disait pour du jargon de fan de science-fiction. Mais il avait forcément raison. Comment la base secrète aurait-elle pu passer inaperçue, sinon ? Nous restâmes immobiles et regardâmes la relève de la garde. Des membres de la Ruche. Je n’en avais encore jamais vu. Jamais. Mais j’avais vu quelques Star Trek, et ils ressemblaient aux Borgs du capitaine Picard, mais en plus grands. En plus effrayants. Ce n’étaient pas de simples humains transformés en cyborgs, mais des monstres de plus de deux mètres de haut recouverts d’argent. Ils se déplaçaient par groupes de trois, toujours trois. J’en avais entendu parler, mais les médias terriens avaient fait en sorte de minimiser leur dangerosité. Pour eux, la ruche était le problème des autres planètes. La Terre était en sécurité. Nous étions trop forts, nos défenses étaient trop importantes pour que nous soyons victimes d’une invasion. Ouais, c’est ça. La Terre avait simplement eu de la chance que la Flotte de la Coalition l’ait prise sous son aile. Pour l’instant. D’après ce que je savais, les armées de la Terre n’auraient aucune chance contre la Ruche. Depuis que nous avions appris l’existence de la Ruche, les autres planètes de l’univers nous en avaient informés, j’avais cru qu’il ne s’agissait que d’extraterrestres à abattre, comme dans les films. Pas de... ça. Ils ne faisaient pas que tuer, ils consumaient, détruisaient des vies. Détruisaient des hommes. La Colonie en était la preuve. Kiel, silencieux à côté de moi, en était la preuve. Je le regardai à nouveau. Je ne voyais toujours pas où se trouvaient ses cicatrices, s’il en avait, mais ça n’avait pas d’importance. Tous les habitants de cette planète avaient vécu l’enfer. Je n’avais pas besoin de voir de reflets argentés sur sa peau pour savoir qu’il avait souffert. Et pourtant, il était là, à nous mener droit vers l’ennemi, ceux qui l’avaient torturé, qu’ils l’auraient transformé en l’une des Unités de la Ruche qui gardaient l’entrée de la base secrète. Ces hommes avaient un courage exceptionnel. — L’autre jour, je suis arrivée de la Terre, pour devenir Épouse, dis-je d’une petite voix en m’asseyant sur mes fesses, le dos collé au rocher. Vous, vous veniez d’être torturé par ces choses. Pourquoi risquer votre peau à nouveau ? Surtout quand ce qu’ils vous ont fait est si frais. Enfin, vous n’avez pas peur ? Il me dévisagea, et je sus qu’il parvenait à voir plus de choses que la plupart des gens. En tant que Chasseur, il parvenait sans doute à détecter des choses qui étaient invisibles aux yeux des autres. — Et vous ? me demanda-t-il en retour. Kiel était le seul qui n’avait pas opposé de résistance lorsque j’avais dit que j’allais chercher mes compagnons. Même le gouverneur avait refusé mon aide. Mais Kiel ? Je ne savais pas s’il se fichait que je meure, ou si son sixième sens de Chasseur détectait que je n’étais pas simplement une femme éplorée par la disparition de ses compagnons. Vu la façon dont il me regardait, je savais que c’était la deuxième option. J’avais reçu l’entraînement adéquat pour ce genre de mission, même si je n’avais que cinq sens. Mais je savais ce que je faisais. Toute ma formation et mon expérience avaient eu pour but de rechercher et de sauver des gens. J’avais de très bons instincts, et je gardais la tête froide dans les situations périlleuses. Cette mission était tout aussi importante que les autres que j’avais connues. Les personnes mauvaises aimaient faire du mal aux gens, les tuer, semer la destruction, quelle que soit la planète. Je n’avais jamais eu affaire à la Ruche sur Terre, mais peu importe. — Cet endroit me rappelle un film de James Bond, marmonnai-je, en me disant que le Dr No se trouverait dans son repaire souterrain avec ses larbins, à tenter de détruire le monde. Mais je n’étais pas James Bond. Kiel pouvait remplir ce rôle, avec son physique avantageux, mais il était trop grand, trop puissant. Quant à moi, j’avais des compagnons coincés derrière cette porte. Et même si j’admirais Kiel, j’adorais mes compagnons. Et rien ne m’empêcherait de les retrouver, pas même un monstre-cyborg géant. Kiel haussa un sourcil face à mon commentaire cinématographique, mais il ne dit rien. — Vous êtes à l’aise avec votre arme ? me demanda-t-il. Je la sortis de son holster et la pris en main. Le métal froid était rassurant. Familier. — Oui. — Très bien, dit-il en s’agenouillant à côté de moi. On n’a beau voir qu’une entrée, il y en a forcément une autre. — Ouais, et où sont les amis de cette sentinelle ? Vous m’avez dit qu’ils se déplaçaient toujours par trois. Kiel regarda par-dessus le rocher en plissant les yeux, examinant ce qui l’entourait. — Ils doivent être à l’intérieur, cachés. Mais on va les laisser tranquilles. La Ruche doit avoir une sortie de secours. On va la trouver, et entrer par là. Je hochai la tête, puis je le suivis alors qu’il faisait demi-tour, Marz et Rezzer étaient toujours derrière nous. Rachel était retournée sur la Base 3, et j’espérais qu’elle avait trouvé des renforts. Rezzer et Marz avaient laissé des traces de notre passage, des stries profondes dans le sol à des distances régulières pour qu’ils puissent nous retrouver. Avec un peu de chance, nous aurions bientôt de l’aide. Notre petit groupe se déplaçait rapidement. Nous étions si loin de la Base 3, profondément enfouis dans la série de ravins et de grottes de la planète, que les moyens de communication standards ne fonctionnaient pas. Alors nous n’étions que quatre. Pour l’instant, en tout cas. Je me demandais combien d’unités la Ruche avait à l’intérieur de sa base secrète. Kiel fit le tout d’un rocher, et nous le suivîmes en file indienne, Rezz derrière moi, ce qui était rassurant. Rien ne pourrait terrasser la bête. L’air était sec, comme le désert d’Arizona en juillet. Mais il ne faisait pas trop chaud. J’étais à l’aise dans mon armure, et il faisait même peut-être un peu frais à la lueur de l’étoile la plus proche, si loin de son zénith. L’aube, s’ils l’appelaient ainsi sur cette planète, devait bientôt approcher. Mes compagnons avaient disparu depuis cinq heures. Cinq heures durant lesquelles la base s’était agitée. La nouvelle de leur disparition n’était plus un secret. Le gouverneur Rone avait instauré l’état d’urgence et tout le monde était confiné à l’intérieur pendant que les vigiles passaient toutes les chambres au peigne fin. Mais il savait que la Ruche n’était pas sur la Base 3. Krael était ici, avec mes compagnons. Pas besoin d’être Evérienne pour le savoir. Si quelqu’un était capable de retrouver mes compagnons dans le labyrinthe de grottes qui devaient se trouver sous la surface de cette planète, c’était Kiel. Voilà pourquoi, mon pistolet à la main, je le suivis en enfer. Il fallait que nous les trouvions. Pas seulement mes compagnons, mais tous les guerriers disparus. Nous devions détruire cet endroit, pour que la Colonie soit en paix. Aucune autre alternative n’était envisageable.

Kristin, Base Secrète de la Ruche, la Colonie

La falaise de pierre sur laquelle nous étions allongés sur le ventre se trouvait à moins de trois mètres au-dessus des monstres. C’était ce qu’étaient les membres de la Ruche à mes yeux désormais, des monstres. Le simple fait de les regarder me terrorisait. Nous nous trouvions dans les profondeurs de la croûte planétaire. La caverne que nous surplombions bouillonnait d’activité. Deux stations chirurgicales se trouvaient au centre, à environ trente mètres de notre position, avec des lumières et un tas d’ordinateurs et de gadgets que je n’avais jamais vus auparavant. Je remarquais qu’aucune de ces machines ne semblait dispenser d’anesthésie, ce qui ne me surprenait pas, mais me mettait encore plus en colère. J’avais la nausée en pensant à ce qu’ils comptaient faire à mes guerriers. À ce qu’ils avaient fait. Était-ce ce qu’avaient vécu Tyran et Hunt avant de s’échapper, la première fois ? Et les autres ? Les guerriers qui m’accompagnaient ? Savoir qu’ils avaient subi ce genre de tortures et avaient survécu, tout ça pour retomber entre les mains de la Ruche détruirait même les plus valeureux des soldats. La zone semblait être une formation rocheuse naturelle, une vaste grotte, un endroit du genre de ceux que les trafiquants de drogues aimaient utiliser sur Terre. Sous nos pieds se trouvaient trois Unités de la Ruche et deux prisonniers. C’étaient mes compagnons, qui semblaient tous les deux indemnes, de là où nous nous trouvions, en tout cas. Mon cœur bondit en les reconnaissant, mais il ne s’agissait pas uniquement de joie. Ils avaient mal, je percevais leur douleur, mais ils n’avaient pas été torturés. Je sentais également de la haine et de la détermination. Je vis Tyran lever la tête, avant de balayer la zone des yeux. Il m’avait sentie, mais il ignorait où j’étais. Mon esprit se figea, envahi par ma propre détermination. Je ne pouvais pas leur permettre de sentir ma peur, mon inquiétude. Ce n’était pas le moment. Ils avaient besoin d’avoir l’esprit clair, et si je paniquais, ils paniqueraient également. Agrippée à mon arme, je regardai Kiel. Oui, je m’accrocherais à la force des autres, je me blinderais pour que mes compagnons ne ressentent que cela. Ma force suffirait peut-être à les aider. Ils n’étaient pas libres, et ils en auraient besoin pour affronter ce qui les attendait... Non. Je ne devais pas penser à ça. Concentration. Je plissai les yeux et examinai l’ennemi. Puisque mes compagnons devaient faire attention à ce qui se passait autour d’eux, je devais garder les idées claires. Les colliers nous porteraient préjudice si nous n’étions pas prudents, mais j’allais faire attention. Kiel m’avait fait un résumé sur les différentes Unités que nous risquerions de croiser pendant que nous cherchions une autre entrée. Les soldats, comme celui qui gardait la porte principale de la base secrète et celui qui surveillait Hunt et Tyran, étaient les unités les plus grandes, les plus fortes, et apparemment, les plus dures à tuer. Elles étaient intégrées avec assez de technologie pour être plus fortes que tous les guerriers de la Coalition, excepté les Atlans en mode bestial. Ce soldat se tenait entre mes compagnons et moi, et ça ne me plaisait pas du tout. Concentration. Je réalisais que la Ruche avait pour but de transformer Tyran en l’un de ses soldats. Lorsqu’il avait été capturé pour la première fois, ils avaient essayé de le faire, et c’était pour cette raison qu’ils lui avaient mis des implants dans les muscles et les os, lui donnant une force digne de Superman. Faisant de lui le tueur ultime. Tout ce pouvoir se trouvait dans son corps, prêt à exploser. Ils s’étaient créés un ennemi redoutable, et il était à moi. L’Unité qui marchait derrière eux avec une longue arme pointée dans le dos de Tyran était un éclaireur. Avec leurs implants optiques et les capteurs supplémentaires qu’ils avaient sur la peau, les éclaireurs n’étaient pas faits pour le combat rapproché. Kiel disait qu’ils étaient tout de même difficiles à tuer, mais qu’ils étaient faits pour s’enfuir. Les soldats étaient envoyés sur le front, les éclaireurs quant à eux servaient de tireurs d’élite, de pilotes, ou partaient en missions de reconnaissance. Ils étaient rapides et silencieux. Et c’était ce qu’ils avaient eu en tête pour Hunt. Mais ça, c’était avant, quand mes compagnons avaient été capturés et torturés. Je me demandais quelles choses terribles la Ruche avait en tête pour eux, désormais. La force de Tyran ne semblait pas avoir d’importance. Il marchait bien sagement derrière Hunt, qui suivait une troisième unité, celle-là une Unité d’Intégration, alors que les éclaireurs fermaient la marche. Je reconnus l’un des éclaireurs avec un frisson d’horreur. À côté de moi, Kiel se tendit alors que l’unité passait la caverne en revue, nous montrant clairement son visage. — Perro, murmura le Chasseur. Le guerrier disparu. Eh merde ! Je ne l’avais encore jamais rencontré, mais il ne s’agissait plus du guerrier prillon d’avant. Cependant je ne devais pas m’attarder là-dessus. Je me concentrai à nouveau sur la plus grosse menace de la pièce. Selon Kiel, les Unités d’Intégration étaient intelligentes. Elles avaient beau suivre des ordres, elles étaient capables de passer plusieurs options en revue et d’entreprendre des actions impitoyables. Et même si les soldats suivaient les ordres et tuaient sans remords, ils n’étaient pas cruels. Ils n’étaient que des machines à tuer, créées par milliers par les dirigeants de la Ruche. Mais les Unités d’Intégration étaient sadiques, programmées pour apprécier leur travail. Et vu la façon dont cette saloperie regardait mes compagnons, elle avait prévu de les faire souffrir. Et pas qu’un peu. Concentration. Je plissai les yeux et pressai mon pistolet à ions dans ma paume avec impatience. Celle-là, je la tuerais moi-même. C H A P I T R E Q U I N Z E

ristin K Kiel se pencha vers moi, le menton levé. — L’Unité de la Ruche qui se trouve avec votre compagnon, Tyran, c’est Perro, dit-il. Il a été intégré. — Il faut qu’on le tue ? murmurai-je en retour. Il hocha la tête une fois, les lèvres pincées. — On ne le laissera pas ici comme ça, dit-il. Il aura une mort de guerrier. J’avais envie de pousser des jurons, de taper du pied par terre, de hurler. N’importe quoi pour me calmer les nerfs. Mais non. Il fallait que je garde les idées claires. Mes compagnons et les autres guerriers avaient besoin de moi. Il ne fallait pas que Hunt et Tyran sentent la moindre émotion négative à travers nos colliers. En plus, ils étaient visiblement conscients du sort de Perro. Je hochai la tête, plus déterminée que jamais à en découdre. J’étais sur le point de dire à Kiel que j’étais prête, quand les poils de mes bras se hérissèrent et un frisson me parcourut l’échine. L’instinct était primordial, alors je clignai lentement des yeux pour y voir plus clair. J’avais raté quelque chose. Ma chair de poule me hurlait de mieux regarder. À côté de moi, le doigt que pointait Kiel se déplaça légèrement sur la gauche. Lui aussi, il le sentait. Je regardai dans la direction qu’il m’indiquait, et me mis à trembler lorsque je vis Krael, nonchalamment adossé au mur comme si tout allait bien. Je l’avais seulement vu en photo, mais je le reconnus immédiatement. Son identité ne faisait aucun doute. J’avais passé des heures et des heures à étudier son dossier militaire, à lire les interrogatoires des gens qu’il connaissait et avec qui il travaillait sur la Base 3. J’en savais plus sur cet enfoiré que sur ma propre mère. Il était vêtu d’une armure de la Coalition, comme s’il faisait toujours partie de la Flotte. Il ne ressemblait pas aux membres de la Ruche. Comme il était nouveau sur la Colonie, Kiel ne l’avait pas reconnu non plus, mais il avait vu les mêmes photos que moi, et sa tenue le trahissait, surtout que personne ne pointait d’arme sur lui. Alors qu’est-ce qui le mettait autant en joie, à part le fait qu’il croyait avoir gagné ? En fait, ce sadique souriait à mes compagnons, il était sans doute impatient de commencer à les torturer. Il faudrait me passer sur le corps. Concentration, Webster. Je reculai de quelques centimètres, et Kiel m’imita. Lorsque nous fûmes de nouveau face à face, je ne perdis pas de temps et ne lui laissai pas l’occasion d’argumenter. Mes murmures étaient à peine audibles, mais je savais que grâce à son ouïe de Chasseur, il en comprendrait chaque mot. — Tu t’occupes de l’Unité d’Intégration. Rezz et Marz peuvent s’occuper des deux autres. Moi, je me charge de Krael. Kiel ne protesta pas. Il sourit, et je décidai immédiatement que nous deviendrions amis. — Comment allez-vous descendre, Dame Zakar ? — Vous allez sauter, non ? Le rebord descendait suffisamment pour que nous puissions sauter au sol, mais cet endroit se situait à l’autre bout de la pièce. Nous serions vite repérés. Nous nous trouvions à au moins trois mètres du sol. C’était haut, mais j’avais fait pire. — Oui, répondit Kiel. Je jetai un coup d’œil par-dessus le rebord, et je vis que le regard de Tyran passait la pièce en revue, à la recherche de quelque chose. Moi. Pendant ce temps, Hunt laissait les unités de la Ruche le mener vers la première table d’opération comme un agneau sacrificiel. Et puis merde. Je me tournai vers Kiel. Le temps était compté. — Prêt ? lui demandai-je. Il hocha la tête, son mouvement presque imperceptible. Je lui fis signe en retour, et nos regards se croisèrent durant un instant. Je ne rentrerais pas sans mes compagnons, et j’avais besoin qu’il le comprenne. — C’est parti. À ces mots, je roulai par-dessus le rebord et sautai sur le sol aussi silencieusement que possible. L’impact fut violent, mais je m’y attendais, et je laissai mes genoux se plier pour absorber le choc, avant de faire deux roulades et de me mettre debout. Submergée par l’adrénaline, je n’avais même pas le tournis. Je tirai immédiatement sur Krael. Il poussa un grognement lorsque je l’atteignis en pleine poitrine, mais le Prillon ne tomba pas à terre. Je lui tirai de nouveau dessus, dans la cuisse, avant qu’il ne puisse réaliser ce qui se passait. Kiel se trouvait déjà de l’autre côté de la pièce et avait bondi sur l’Unité d’Intégration. Derrière moi, le rugissement de Rezz emplit la grotte comme le bruit des pales d’un hélicoptère, me faisant mal aux oreilles et aux os, et son cri surprit l’éclaireur qui escortait Hunt. Je tirai de nouveau sur Krael, avant d’entendre un bruit de lutte en direction de Tyran et du soldat de la Ruche contre lequel il était sans doute en train de se battre. Mon compagnon portait des espèces de menottes, mais je savais qu’elles ne suffiraient pas à l’arrêter. Pas pour longtemps. Il avait attendu son heure. C’était malin. Krael recula en titubant et s’adossa à la paroi rocheuse alors que je lui tirais dans l’épaule, mais il ne tombait toujours pas. Satanée armure de la Coalition ! Il croisa mon regard durant un instant avant de se fondre dans l’obscurité de la grotte derrière lui, un abysse minuscule qui m’empêchait de le voir. Ce chemin m’était inconnu, et il aurait l’avantage. J’avais beau vouloir sa mort, ce n’était pas l’objectif de cette mission. Nous étions là pour sauver les guerriers, et il y avait d’autres ennemis à abattre avant de poursuivre le traître. Avec un juron, je me tournai et vis que Hunt était en pleine bagarre avec son garde de la Ruche, un soldat gigantesque. Ensuite, Rezz s’approcha derrière l’unité, la ramassa et la déchira littéralement en deux, le son que cela produisit me donna envie de vomir et du sang éclaboussa tous les gens qui se trouvaient à proximité, Hunt et la table d’opération blanche et argentée en furent recouverts. J’étais figée sur place, incapable de bouger alors que je digérais le changement qui s’était emparé du corps de Rezz. L’Atlan était déjà grand en temps normal, incroyablement grand. Comme dans une BD. Mais à présent, on aurait dit une version de trois mètres de Hulk, sans la couleur verte. — Mort, dit-il. Ce mot était plein de satisfaction, et tout l’air quitta mon corps lorsque mon cerveau assimila ce qui venait de se passer et que j’imaginais cette même action se produisant sur le champ de bataille, des centaines et des centaines de fois alors que des centaines et des centaines de bêtes massacraient leurs ennemis. Je ne pouvais rien imaginer de plus terrifiant. Pas étonnant que mes compagnons se montrent aussi protecteurs. Un bruit de bottes retentit derrière moi, et j’entendis le capitaine Marz crier quand je me retournais. Je vis deux autres soldats de la Ruche émerger d’un tunnel. Cette issue nous était invisible depuis la falaise où nous nous trouvions plus tôt. Eh merde ! Ils étaient tout près, et ils s’étaient faufilés derrière nous. Je levai mon arme, reculai et tirai lorsque le premier soldat s’abattit sur Marz. Le deuxième se dirigeait droit vers moi. — Kristin ! Mon prénom fut prononcé comme un rugissement, et je savais qu’il venait de Tyran, sa rage et sa peur pour moi me firent plier les genoux et me parvenaient par mon collier. Nous avions tous mis nos émotions sous cloche, jusqu’à présent. Je tombai sur un genou, luttant pour garder mon pistolet pointé sur le soldat qui courait vers moi. — Contrôle-toi ! lui cria Hunt, et le barrage de douleur et d’impuissance qui me submergeait s’estompa suffisamment pour que je puisse bouger. Je me mis debout et tirai sur le soldat, qui ne se trouvait qu’à quelques mètres de moi. Il bondit dans les airs et je roulai sur le sol dur pour l’éviter. Il avait dû être Prillon de son vivant, avant qu’ils ne le transforment en machine. Mais le coup ne vint jamais. Hunt et le soldat se rentrèrent dedans au- dessus de mon corps, la force de l’impact avec mon compagnon l’entraînant avec l’unité de la Ruche. Je restai à terre — je savais quand il valait mieux me faire toute petite et laisser les autres se battre — Rezz sauta par-dessus mon corps pour arracher le soldat des bras de Hunt et pour le déchirer en deux juste sous mes yeux. Hunt se tourna vers moi, essoufflé, le visage plein de sang, mais il ne m’avait jamais semblé plus parfait. Je l’aimais. Je l’aimais, et je laissai cette émotion sortir de moi comme une explosion. Il était en train de se diriger vers moi lorsque j’entendis d’autres tirs de pistolets à ions à l’autre bout de la grotte. Tyran. Kiel. Comment avais-je pu les oublier ? Je me retournai, et, horrifiée, je regardai Tyran tirer sur l’éclaireur qui avait marché derrière lui lors de son entrée dans la caverne. Tyran enchaînait les tirs, mais l’unité de la Ruche ne cessait d’avancer. Perro ne cessait d’avancer. Je secouai la tête et levai mon arme, en espérant le toucher au flanc. Mon tir fit mouche, mais Perro sembla à peine le remarquer, comme s’il ne s’agissait de rien de plus qu’une piqûre d’abeille. — Nulle à chier, marmonnai-je en direction de la seule arme que j’avais sous la main. Le capitaine Marz acheva l’unité avec laquelle il combattait et alla faire le guet à l’entrée du tunnel par laquelle nos invités surprise avaient pénétré. Je regardai alentour et vis que la bête, Rezz, s’avançait vers Kiel. Et Hunt ? Hunt se tenait devant moi comme un ange vengeur. Il me protégeait. Et j’avais beau l’aimer pour cela, je ne pouvais pas rester à terre. Ce n’était pas mon genre. Je rengainai mon arme inutile et me levai, avant de me diriger vers Tyran et l’unité de la Ruche qui essayait désormais de l’étrangler. Ah non. Pas question. J’étais prête à m’élancer, mais Hunt m’attrapa par les bras et me tira en arrière, contre son torse. — Il se débrouille, compagne. Fais-moi confiance. Regarde. Comme si Tyran avait attendu les mots de Hunt, il souleva l’unité par- dessus sa tête et le jeta à trois mètres du sol. Le corps de l’éclaireur heurta la paroi de pierre avec un bruit assourdissant. Mon compagnon marcha vers lui à grands pas, l’attrapa par la tête, et réduisit son crâne en bouillie entre ses mains. Je me détournai lorsque la tête de l’unité explosa et que le sommet de son crâne disparut, les os de son visage froissés comme du papier d’alu. Et ça, c’était vraiment dégueu. La nausée montait, mais j’avais réussi à me retenir des dizaines de fois par le passé, et cette fois ne fit pas exception. Un frisson s’empara de moi. Hunt me serra contre son torse et je le laissai faire, les bras passés autour de sa taille alors que je regardais Kiel coincer l’Unité d’Intégration dans un coin de la grotte. Ils s’affrontaient, tournant l’un autour de l’autre comme des boxers. Que faisait le Chasseur ? — Tuez-le, Kiel ! lançai-je. — Non. Il faut qu’on l’attrape vivant. Ah oui. Krael s’était échappé. Il fallait en capturer au moins un pour l’interroger. Dans un coin de mon champ de vision, Tyran apparut, se dirigea droit sur l’Unité d’Intégration et la souleva de ses pieds, avant de la plaquer contre le mur comme un insecte. — Ne le tuez pas ! ordonna Kiel. J’ai besoin de lui vivant. Tyran grogna, mais son regard se tourna vers Hunt et moi. Comme nous, il était secoué, couvert de sang. En colère. Je soutins son regard et le laissai sentir mes émotions à travers nos colliers. Je n’avais pas peur. Enfin, j’étais un peu perturbée, mais c’est tout. Et la prochaine fois que je devrais tirer, je m’assurerais de prendre une arme plus puissante. L’Unité d’Intégration se tordait dans tous les sens, mais Tyran l’ignora complètement. — Tu pourras le contenir combien de temps ? demanda Kiel. Tyran haussa les épaules. — Aussi longtemps qu’il le faudra. Le capitaine Marz nous appela, et Hunt et moi nous tournâmes vers lui. Il fit un signe de tête en direction de la grotte. — Le gouverneur arrive. Le grondement profond de Rezz emplit la caverne. — Trop tard. Tous morts. — Pas tous, dis-je. Je me retournai et vis que Kiel m’observait. Nos regards se croisèrent, et je sus que nous pensions tous les deux à la même chose. Cette créature, le monstre que Tyran avait plaqué au mur, allait parler. Il le fallait. Quelques secondes plus tard, les compagnons de Rachel, Maxime et Ryston, se ruèrent dans la grotte avec ma nouvelle meilleure amie derrière eux. Entourée par une vingtaine de gardes, évidemment. Je me demandais bien comment elle avait fait pour les convaincre de l’emmener. Le gouverneur saisit la situation en un regard. — Combien d’entre eux se sont échappés ? — Un seul, dis-je. Une sensation d’échec s’empara de moi durant quelques instants, mais Hunt m’enlaça, et je pris une profonde inspiration avant de poursuivre : — Un seul. Et c’était Krael. Le regard de Maxime se posa ensuite sur Rezz, qui se tenait à l’entrée du tunnel que le traître avait utilisé pour s’enfuir. — Votre bête est sous contrôle, Chef de Guerre ? — Oui. J’observai la scène, fascinée lorsque l’Atlan rétrécit sous mes yeux, son armure reprenant sa taille initiale. Il secoua les épaules comme s’il se débarrassait d’un manteau trop lourd. — Ça va. Mais l’enfoiré est parti par-là, dit-il en montrant les ténèbres. On devrait le poursuivre. — D’accord, dit Maxime en faisant signe à plusieurs de ses hommes, qui coururent après l’Atlan. Ils disparurent tous rapidement dans le tunnel noir, et seul le bruit de leurs bottes subsista. — Et Perro ? demanda le gouverneur. — Il est mort, dit Tyran d’une voix monocorde. Il fit un signe de tête vers un coin de la caverne, et le gouverneur regarda le corps en charpie de l’ancien guerrier. Il ne bougeait plus. — Je lui ai donné ce qu’il voulait, dit mon compagnon. D’accord, il était mort, mais il était en paix. La Ruche n’avait plus d’emprise sur lui. — Il y en a d’autres ? Vous avez trouvé les disparus ? demanda Ryston. Hunt répondit : — Il y a au moins une dizaine de membres de la Ruche dans les grottes. On a trouvé les autres, mais il est trop tard pour eux. — Compris, dit le grand gouverneur prillon avant de faire signe à ses hommes. Tirez pour tuer. Ramenez-moi Krael vivant. — Oui, Monsieur. Quatre hommes supplémentaires se détachèrent du groupe principal et suivirent Rezzer et les autres dans le tunnel sombre. Ryston, accompagné de trois autres gardes, alla aider Kiel et Tyran avec le guerrier de la Ruche que mon compagnon avait capturé. Cerné par tant de guerriers, l’ennemi cessa de lutter. — Non, reculez ! lança Kiel. Mais il était trop tard. Les yeux de l’unité de la Ruche devinrent complètement noirs, et il devint tout mou sous l’emprise de Tyran. Mon compagnon, visiblement perplexe, secoua la créature alors que Kiel poussait un juron et lançait son arme à terre. — Par tous les dieux, non ! — Qu’est-ce qui s’est passé ? demanda Tyran. Kiel agita la main en l’air comme si la réponse n’avait aucune importance en cet instant. — Les Unités d’Intégration de la Ruche sont différentes. Si elles ont une chance de s’échapper, elles attendent d’en avoir l’occasion. Sinon, si la Ruche pense qu’une capture est imminente, elles sont éliminées. En gros, leur cerveau fond à l’intérieur de leur tête. — Elles s’autodétruisent, murmura Rachel avec une expression qui ressemblait étrangement à de l’émerveillement. Même avec sa voix basse, le Chasseur l’entendit très bien à l’autre bout de la grotte. Ce guerrier avait vraiment de super oreilles. — Oui. Exactement. Quand seuls Tyran et moi nous trouvions à côté d’elle, elle estimait qu’elle avait encore une chance de s’enfuir. Mais quand Ryston et les autres sont arrivés... La voix de Kiel se tut, et il avait une expression dégoûtée au visage. Quand les autres étaient arrivés, les chances de la Ruche avaient touché le fond. — Je suis désolé, dit Ryston en s’inclinant légèrement en direction du Chasseur. Je ne savais pas. Tyran laissa retomber l’unité morte sans cérémonie et regarda Maxime. — On doit ramener Perro avec nous, lui donner une fin honorable. Pour le reste, il n’y a plus qu’à faire le ménage. Il se tourna ensuite vers moi et poursuivit : — Mais j’ai une compagne désobéissante à corriger. Rachel tourna les talons et croisa mon regard. Elle avait son expression qui voulait dire oh là là, tu vas t’amuser, mais il y avait de l’inquiétude dans son regard lorsqu’elle me demanda : — Est-ce que ça va ? Tu es blessée ? Je baissai les yeux sur mon armure. Elle était couverte de sang et d’entrailles, comme celles des autres membres de l’équipe. Et oui, je nous voyais comme une équipe, désormais. Kiel, Rezz, Marz et moi. On était soudés. Pas de la même façon que Hunt et Tyran, mais on était soudés quand même. Je haussai les épaules, désinvolte. — Ce n’est pas mon sang. — D’accord. Tant mieux, dit-elle en s’approchant, le menton levé. Mais je ne te prendrai pas dans mes bras. Je ris. — Je comprends. À ta place, je n’aurais pas envie de me faire de câlins non plus. Tyran contourna Rachel et enfouit sa main dans mes cheveux, puis fit bouger ma tête pour que je lève les yeux vers lui. — Moi, ça ne me dérange pas, dit-il. Avec le bras de Hunt autour de ma taille et tout le monde qui nous regardait, Tyran m’embrassa avec force. C H A P I T R E S E I Z E

ristin K Le gouverneur m’évita l’embarras, son ordre sonore, intransigeant : — Hunt. Tyran. Personne ne touche qui que ce soit tant que vous n’avez pas reçu une autorisation de regagner la Base provenant du Dr Surnen. Vous avez passé les dernières heures aux mains de la Ruche. Vous n’irez nulle part sans une escorte armée tant que le médecin ne vous y aura pas autorisés. Tyran mit fin à notre baiser et se tourna vers Maxime, l’air renfrogné. Je ne parvenais toujours pas à sentir toutes ses émotions, car il se contrôlait toujours. Il avait déjà failli me mettre à genoux. Hunt aussi se contenait. Je carburais à l’adrénaline, m’en servais pour tenir debout. Je savais que le choc, les tremblements et les cauchemars me tomberaient dessus après, lorsque mon cerveau aurait assimilé ce que je venais de voir. Mais cette fois, j’aurais mes compagnons pour m’étreindre. Cette fois, je n’aurais pas à affronter ces nuits toute seule. C’est Hunt qui répondit au gouverneur : — On va bien. Ils ne nous ont pas touchés. À ma grande surprise, Tyran le contredit : — Tu vas pas bien. Ton crâne est dans un sale état. Tu vas sans doute devoir faire un séjour dans la capsule. Hunt grogna et je sentis une partie de sa douleur à travers mon collier. Oui, ils me protégeaient bien. — Et toi ? répliqua Hunt. Tu n’es pas indemne. Tu as au moins trois doigts cassés et des côtes brisées. — Vous irez tous les deux, insista Maxime. Ryston, Rachel, prenez quatre hommes et escortez tout le monde à l’infirmerie. Il regarda sa compagne et son second, et je reconnus la façade calme et pleine de maîtrise que je voyais souvent chez Hunt. Même s’il était intimidant, Maxime ne me faisait pas peur, ce qui n’était jamais une bonne chose lorsque j’avais envie d’ouvrir ma grande gueule. Comme en cet instant. — Vous avez une équipe médico-légale ? demandai-je à Rachel. Elle se tourna vers son compagnon, qui la regardait avec un air interrogateur. Rachel rayonnait, et le fait qu’elle était elle- même scientifique me frappa. C’était sans doute son rayon. Son compagnon le savait et la consultait. Il la voyait comme une égale, comme quelqu’un d’utile pour la Colonie. Il l’avait laissée se joindre à cette mission, à présent qu’il n’y avait plus de danger. Et pour la première fois depuis que je l’avais rencontrée, je me sentais jalouse. — Je ne crois pas, dit-elle, mais je vais demander au Dr Surnen. Ryston alla se placer derrière elle et lui plaça les mains sur les épaules avec tendresse. — C’est quoi, une équipe médico-légale ? demanda-t-il. — Un groupe d’enquêteurs, une équipe qui se sert de méthodes scientifiques pour résoudre des crimes, comme les empreintes digitales, les tests ADN... J’ajoutai : — Des analyses de sang, la recherche de résidus chimiques, des reconstructions de scènes de crime... — On n’en a jamais eu besoin sur la Colonie, dit Maxime. On a ce genre d’équipes sur Prillon Prime, ainsi que sur les vaisseaux de guerre, mais on n’a jamais eu de problèmes de criminalité ici. Jusqu’à présent. — Vous n’aviez encore jamais eu de compagnes non plus, dit Rachel. — Ni d’incursions de la Ruche, renchéris-je. Cette remarque ne plut pas à tout le monde. Les yeux du gouverneur passèrent de sa compagne à moi et ses traits se firent plus durs. — Vous connaissez bien le travail de ces équipes médico-légales ? — Oui. Mais je ne suis pas scientifique. Rachel devra se charger des analyses. Mais je pourrais monter une équipe et trouver ce dont nous aurons besoin. J’avais vu assez de scènes de crime au fil des ans pour savoir par où commencer. Je pourrais prélever des échantillons et les donner à Rachel pour qu’elle les analyse. — Je l’aiderai, dit Rachel. Et le Dr Surnen aussi. Le gouverneur hocha la tête. — Alors, c’est entendu. Il se tourna vers un coin de la grotte, là où Kiel était agenouillé près de l’Unité d’Intégration de la Ruche, à la recherche de quelque chose. J’ignorais ce qu’il était en train de faire. — Chasseur, dit Maxime. Kiel leva la tête et croisa son regard. — Oui ? — Vous viendrez en aide à Dame Zakar. Je vous mets officiellement à la tête de cette enquête, tous les deux. Le bras de Hunt se resserra sur ma taille, mais Tyran poussa un véritable grognement. — Non. Je serrai les dents et me tournai vers lui. — Si. — C’est trop dangereux. Son expression était devenue froide, distante, mais je n’étais pas prête à renoncer. C’était trop important. — Je suis enquêtrice. C’est mon travail. C’est ma spécialité. — Non. Je haussai un sourcil et croisai les bras, avant de me libérer de l’étreinte de Hunt et de fusiller l’homme que j’aimais du regard. — Je suis comme je suis Tyran. Si ça ne te plaît pas, alors tu n’as qu’à te trouver une autre compagne. Après avoir lâché cette bombe, je tournai les talons pour suivre Ryston et les autres jusqu’à la Base 3, où je pourrais me débarrasser de tout ce sang et dormir dans un bon lit chaud. Toute seule. Je n’avais pas l’énergie pour me disputer pour l’instant. Chaque particule de courage et de détermination que je possédais avait été mise à contribution pour retrouver mes compagnons. Et ça avait marché. Nous les avions sauvés. Je les avais sauvés. Avec l’aide de Kiel. De Kiel, de Marz et de Rezz, la bête géante. Je les avais traînés jusqu’ici, et ils étaient venus chercher leur ami. J’avais de la peine pour eux, car nous avions trouvé le capitaine Perro, mais il était perdu. Transformé. Impossible à sauver, et Tyran lui avait donné la mort qu’il avait souhaitée. Mais au moins, ses amis savaient ce qui lui était arrivé. Ils pouvaient tourner la page. Certains n’avaient pas cette chance. Je pourrais travailler avec Kiel sur cette enquête. J’aimais bien ce petit groupe, Kiel, Marz et Rezzer. C’étaient mes amis. Mieux encore, ils me respectaient, moi et mes choix. Ils avaient assuré mes arrières en situation de combat. Avaient fait leur travail et m’avaient laissé faire le mien. Je refusais de retourner bien sagement à la maison comme une petite fleur fragile. Ce n’était pas moi. Ma gorge me brûlait, pleine de larmes non versées. Je refusais de pleurer. Je ne me laisserais pas aller au chagrin en pensant au fait que mes compagnons se foutaient de mes capacités. J’avais besoin de contribuer à la société, je ne voulais pas être une compagne que l’on mettait sur un foutu piédestal. Je refusais de servir de simple sex-toy, même si le sexe était époustouflant. Hunt et Tyran m’emboîtèrent le pas, mais je les ignorai. L’un d’entre eux, sans doute Hunt, me plaça une main sur l’épaule. Je me dégageai et pressai le pas. Je ne voulais pas qu’ils me touchent. Pas maintenant. Pas en sachant ce qu’ils pensaient de moi. Peut-être plus jamais. Ils avaient peut-être envie de me baiser, mais apparemment, c’était la seule chose dont ils avaient envie. En marchant, des larmes me coulèrent des yeux. Je n’arrivais pas à les retenir. Ce n’était rien. Je devais avoir une poussière dans l’œil.

Tyran, Deux Heures Plus Tard, Infirmerie

Le Dr Surnen me passa la baguette ReGen sur la main, et je me fis violence pour la garder immobile le temps qu’il fasse son travail. Mon armure avait été remplacée par une tunique et un pantalon bleus. Je n’étais pas sur le champ de bataille, mais j’étais plus nerveux que je ne l’avais été dans la grotte de la Ruche. Kristin me repoussait. Elle nous repoussait. Nos colliers ne me transmettaient rien d’autre que du vide. Quelque chose clochait. Kristin était pleine de chaleur, de passion et de joie. Pas de ce néant noir. Une heure plus tôt, Hunt avait émergé de la capsule ReGen, le crâne guéri. C’était le seul à toujours porter son armure. Il avait failli s’écrouler lorsque nous étions arrivés, et nous l’avions placé immédiatement dans la capsule. Le gouverneur Maxime avait insisté pour que nous nous rendions directement à l’infirmerie, et je n’avais pas protesté, même si je voulais savoir si Kristin allait bien. Je me fichais de mes doigts ou de mes côtes. C’était elle qui m’importait. À présent que la bataille était finie et que Hunt était guéri, je n’arrivais pas à quitter notre compagne des yeux. J’avais envie de la prendre, de m’enfoncer en elle, de trouver le plaisir que seul son corps pouvait m’apporter. Oublier cette épreuve, oublier qu’elle avait été en danger. Qu’on avait failli la perdre. J’avais envie de la revendiquer enfin. Je voulais que le stress de la vie s’en aille. En fait, je voulais que tout et tout le monde disparaisse pour que Hunt et moi puissions être seuls avec elle. Une fois guéris, je pensais que nous l’aurions entre nous. Oui, j’avais envie de la baiser, mais j’avais aussi envie de la punir. Par les dieux, elle s’était mise en danger et elle avait besoin de savoir que je ne le permettrais pas. J’aurais préféré mourir dans cette grotte plutôt que de permettre que ma sublime compagne soit blessée. Ou pire. Seuls les dieux savaient ce que la Ruche faisait subir aux femmes. Kristin était assise sur une chaise de l’autre côté de l’infirmerie, en plein désaccord avec l’officier médical qui tentait de lui passer une baguette ReGen sur le corps. — Je vais bien. — Dame Zakar, je me dois d’insister. Elle leva les yeux au ciel et resta immobile pour laisser l’homme faire son travail, sa baguette scannant Kristin à travers la tunique et le pantalon couleur crème qui lui avaient été fournis. Nous avions tous été déshabillés, lavés, examinés — tous sauf Hunt. Je voulais la voir en bleu, et cette tunique valait mieux que l’armure qu’elle avait portée, une armure couverte de sang. Du sang des unités de la Ruche. Mais ça aurait pu être le sien. À l’instant où la baguette décréta qu’elle allait bien, elle repoussa l’officier médical et bondit de sa chaise comme si elle était pressée d’aller quelque part. Et c’était le cas. Elle voulait me fuir. Nous fuir. Elle se rua vers le couloir, mais elle ne pouvait pas nous échapper. Hunt et moi avions reçu l’autorisation de quitter l’infirmerie, et nous l’attendions. Nous n’étions qu’à quelques pas d’elle. Lorsque nous eûmes franchi la porte de nos appartements, je ne pus tenir ma langue une seconde de plus : — J’ai envie de te fesser jusqu’à ce que tes fesses soient rouge sang. Ma voix était grave et dominatrice, mais elle manquait de conviction. Je savais que Kristin m’avait entendu, car elle se tourna vers moi, mais ses yeux ne se baissèrent pas en signe de soumission. Au lieu de cela, ils croisèrent mon regard, pleins d’inquiétude, de colère et de confusion. — Parce que je suis allée te sauver ? demanda-t-elle. — Parce que tu as risqué ta vie pour moi. — Pour nous, renchérit Hunt. Il retira son armure et la laissa tomber par terre. Je sentais son épuisement, et cela me fatiguait. — On est censés se protéger les uns les autres, dit-elle, les mains sur les hanches. Je secouai lentement la tête et serrai les doigts sur sa tunique. — Non. Nous sommes censés te protéger toi. Lorsque je l’eus débarrassée de sa tunique, je jetai le vêtement au sol. Voilà la peau et les seins parfaits que j’adorais. Je lui caressai l’épaule avec révérence. — Vous avez failli mourir aujourd’hui, et vous voulez qu’on se dispute à ce propos ? dit-elle en frissonnant d’excitation à mon contact. Je suis plus qu’un sex-toy, vous savez. Je ne supporte pas de rester enfermée dans cette chambre. Je vais devenir folle. J’ai besoin de travailler avec Kiel et de diriger cette équipe médico-légale. — Je refuse que tu sois blessée ! m’écriai-je. — Ce sont des choses qui arrivent, dit-elle en haussant les épaules. Je reconnus sa volonté de fer, que je finissais par admirer. Hunt se tenait derrière moi et attendait en silence que je maîtrise ma colère. Il était calme et je me servis de lui comme d’un roc. — Hunt ? dis-je. — Si tu l’étouffes, elle en choisira un autre, quelqu’un d’assez fort pour la laisser faire ce qui la rend heureuse. Eh merde ! Dit comme ça, je me sentais bête. C’était ce qu’elle avait dit dans la grotte, mais j’avais cru qu’elle bluffait. Peut-être pas. Je savais qu’elle avait raison, que Hunt avait raison, mais je ne pouvais pas contenir l’instinct protecteur qui s’élevait en moi. — Tu veux faire partie de cette équipe médico-légale ? dis-je avec difficulté. Je perçus son désir de trouver sa place, d’être utile. — Oui. Et si tu réfléchissais un peu, tu te rendrais compte que ces équipes interviennent après que le crime a eu lieu, pas avant, ni pendant. Je serais entourée de guerriers en permanence. Je serais en sécurité. Ce qu’elle disait semblait plein de bon sens. — Tu ne partiras plus au combat ? demandai-je. Elle se passa les mains sur les bras comme si elle avait froid. — Je n’aime pas me battre. Je n’ai pas envie d’avoir à recommencer. J’espère que le fait d’avoir trouvé cette forteresse souterraine nous débarrassera de la Ruche pour de bon sur cette planète. — Krael s’est échappé, dit Hunt. Le danger continuera de rôder. — Alors nous y ferons face ensemble, dit-elle en me posant une main sur la joue. Mais je n’ai pas besoin d’affronter la Ruche pour être heureuse. Moi, ça me va très bien d’analyser les scènes de crime. Hunt haussa les sourcils. — Alors tu ne combattras plus la Ruche ? Kristin pinça les lèvres. — Je n’en ai pas envie, mais si elle vous menace, je ferai ce que j’ai à faire. C’est mon choix. Je poussai un soupir. Elle voulait avoir le choix. Nous lui avions clairement dit ce que nous pensions du fait qu’elle se mette en danger. Elle voulait pouvoir décider elle-même de ce qu’elle faisait. Elle voulait que nous lui fassions confiance. Je me frottai à sa main et poussai un soupir. — J’ai quand même envie de te donner la fessée. Mais je suis trop fatigué pour ça. Je m’agenouillai devant elle et lui descendis son pantalon jusqu’aux chevilles, avant de lever les yeux pour croiser son regard. — On va dormir, et ensuite, on continuera de parler, dis-je avec un soupir, épuisé. Je me levai et la pris par la main pour la conduire au lit. Du coin de l’œil, je vis Hunt entrer dans la salle de bain et allumer l’eau. Je tirai sur les draps et Kristin se mit au lit. Je me déshabillai et jetai mes vêtements par terre. — Allonge-toi, dis-je. Elle se plaça au centre du lit et lorsque Hunt revint dans la pièce, il se glissa à côté d’elle. Mon sexe durcit en la voyant. Nue, ses seins hauts, ses tétons pointus. Elle n’était pas timide avec nous, ne l’avait jamais été, et elle écarta légèrement les jambes. Je vis son désir perler. Elle avait beau être fâchée contre nous, elle avait envie de nous. Comme quand je l’avais prise dans le placard quelques jours plus tôt. J’avais envie de la baiser tout de suite, mais ce n’était pas le moment. Je me rendis dans la salle de bain et me lavai rapidement. Plus qu’un bain, ce dont j’avais besoin, c’était d’un moment pour réfléchir, pour me calmer, chasser mes souvenirs du capitaine Perro et de son triste sort, ainsi que celui des autres. Lorsque je revins dans la chambre quelques minutes plus tard, je vis que Kristin était toujours fâchée, mais que Hunt l’apaisait avec des caresses sur le flanc, les hanches, le ventre. Il ne la touchait pas de façon sexuelle. Pas pour le moment, mais il était dur comme du bois, et elle se tortillait. J’eus immédiatement une érection. Elle avait besoin d’une bonne baise. Nous avions tous besoin de cette intimité, de savoir que nous étions vivants, entiers. Je me glissai à côté d’elle dans le lit, et me collai à elle pour qu’elle sente ses deux compagnons. Je m’appuyai sur un coude une main sur son ventre. — Tu ne t’enfuiras pas pour aller chercher un autre compagnon pendant notre sommeil ? demandai-je. — Je me suis seulement enfuie pour aller vous chercher, dit-elle en se tortillant pour se dégager, mais nos mains la maintinrent entre nous. Vous savez ce que ça m’a fait, de ne pas savoir si vous alliez bien ? Sa panique me prit à la gorge, et je sus qu’il n’y avait qu’un seul moyen de la calmer. De lui faire savoir que nous allions bien et que nous étions là, avec elle. Pas seulement en tant que guerriers, mais aussi en tant que compagnons. Nous lui donnerions ce dont elle avait besoin. J’ignorai ses mots et ordonnai : — Soumets-toi, Kristin. Elle écarquilla légèrement les yeux, mais passa sa langue sur ses lèvres. En fin de compte, il me restait assez d’énergie pour lui donner ce qu’il lui fallait. — On est là. En sécurité. Tu nous as trouvés, et maintenant, c’est à notre tour de prendre soin de toi, de te protéger. Elle bougea sous nos mains, et je ne ressentais plus de colère à travers nos colliers, seulement... de l’acceptation. Oui, notre présence rassurante était exactement ce qu’elle voulait. Elle avait envie d’être prise entre nous. Étreinte. Rassurée en sachant que nous étions aux commandes. Que nous étions tous en sécurité. — Quand on a été enlevés, tout ton monde s’est écroulé, n’est-ce pas ? demandai-je. Elle hocha la tête. — Ta confiance était ébranlée, tu n’avais plus de protecteurs. Tes compagnons avaient disparu. Des larmes lui montèrent aux yeux. — Tu t’es montrée tellement courageuse, compagne, dit Hunt. Elle tourna la tête vers lui, et des larmes lui roulèrent sur les joues avant de tomber sur le lit. — Tu n’as plus besoin d’être courageuse. On est là, dit-il. Oui, Hunt avait raison. Elle n’avait plus besoin de porter toutes ces responsabilités sur ses frêles épaules. — Touche-nous, compagne, dis-je en lui tournant la tête vers moi. Sens notre puissance. Elle te garde entre nous. Pile là où tu veux être. Arrête de lutter. Abandonne-toi. Elle se mit à pleurer à chaudes larmes. Je lui posai la tête sur mon épaule et la laissai sangloter tout son saoul. Je jetai un regard à Hunt, qui hocha la tête et lui caressa le dos alors qu’elle se laissait aller. Épuisée, ses sanglots se transformèrent en hoquet, puis elle s’endormit. C’est seulement à ce moment-là que nous pûmes nous détendre, nous laisser aller à notre propre fatigue, satisfaits de savoir que Kristin se trouvait là où était sa place. Entre nous. C H A P I T R E D I X - S E P T

unt

H Je me réveillai en sursaut. J’avais oublié où j’étais. Il n’y avait aucune comparaison possible entre les confins rugueux et froids de la prison souterraine et notre lit chaud, mais mon esprit n’était pas encore rationnel. Je respirai aussi calmement que possible pour apaiser mon cœur tambourinant. Kristin et Tyran dormaient tous les deux à côté de moi. J’aurais pu regarder l’heure, vérifier depuis combien de temps nous nous reposions, mais ça n’avait pas d’importance. Nous étions tous épuisés, trop las pour faire ce dont nous avions envie. Tyran avait eu raison. Nous avions d’abord besoin de nous reposer, et ensuite, nous pourrions nous occuper de la revendication. J’avais perçu ses intentions avec clarté. Kristin avait menacé de nous quitter, d’en choisir un autre. Nous ne pouvions pas l’accepter. Nous nous étions comportés comme des lâches, en essayant d’enfermer notre compagne comme si elle était en sucre. Même si je n’aurais jamais imaginé l’admettre un jour, elle avait raison. Nous ne pouvions pas l’étouffer en la forçant à rester à la maison. Nous pouvions lui demander de ne pas partir au combat et de ne pas risquer sa vie, mais nous devions la laisser vivre, la laisser faire ses choix. Je pouvais l’accepter. Ce qui m’était insupportable, c’était l’idée de la perdre à cause de nos craintes. J’avais également envie de lui donner une bonne fessée. Tyran avait beau être son compagnon principal, le compagnon dominant, j’étais tout aussi fâché qu’elle se soit mise en danger. Je voulais qu’elle soit en sécurité tout autant que Tyran. J’avais perçu l’attitude de défi de Kristin, mais j’avais sous-estimé la puissance de la réaction de Tyran. Elle aussi. Je me passai une main sur le visage, sentis la chair argentée qui m’entourait l’œil, et je contractai le bras. J’étais content que la Ruche se soit arrêtée là avec moi, qu’elle ne m’ait pas détruit comme Perro et les autres. J’étais entier. J’avais une compagne. Je pouvais vivre. Avoir une famille. Et tout ça grâce au miracle qui dormait à côté de moi. Kristin était en sécurité, endormie entre nous. Tyran avait survécu. Nous étions toujours une famille. Mon sexe durcit et s’allongea à la vue de son corps nu. Le drap dont Tyran nous avait recouverts lui était retombé à la taille, dévoilant ses seins. Ses tétons pointaient, prêts à être pris en bouche. J’avais désespérément envie d’elle, et elle gémit, sentant mes émotions à travers son collier, mais pas assez pour se réveiller. Une petite discussion et une bonne baise étaient à l’ordre du jour, mais j’avais d’abord besoin de la goûter. Je mourais d’envie de sentir son désir contre ma langue. J’y avais pensé lors de notre détention. Je fis descendre le drap davantage et dévoilai son sexe. Elle avait un genou plié, s’ouvrant sous mes yeux. À la vue de son petit clitoris, je salivai. Je me plaçai entre ses jambes. Une main sur son aine, je lui écartai les jambes, mon visage juste au-dessus de sa chair. Elle remua encore, désormais éveillée. Je ne pouvais plus attendre. Je plaçai le pouce sur ses grandes lèvres et l’ouvris, dévoilant son trésor rose. Je baissai la tête et la léchai, de cette rosette serrée jusqu’à ses fesses, puis de nouveau jusqu’à son clitoris, que je pris en bouche. J’agitai les hanches, mon membre coincé sous mon corps, dur et douloureux. Lorsque je lui avais écarté les cuisses, elle était déjà mouillée, mais là elle dégoulinait, et mon menton en était plein. Elle se tortillait, désormais, et elle heurta Tyran, qui se réveilla. Il cligna des yeux à plusieurs reprises, comprit ce qui se passait, puis sourit. Je ne levai pas la tête, n’arrêtai pas de prendre ses plis gonflés dans ma bouche. — Elle ne doit pas jouir, dit Tyran. Sa voix était intransigeante, mais il murmurait. Il se pencha et prit quelque chose sur le sol. Son pantalon. Il lui attrapa les poignets et les lia à la tête de lit. Elle avait les bras au-dessus de la tête, le dos cambré. Nous la détacherions si elle paniquait, mais à présent, elle était à nous. Tyran avait raison, j’avais envie de passer des heures entre ses jambes, mais elle n’avait pas encore mérité de jouir. C’était notre travail de lui donner du plaisir. Mais c’était aussi à nous de retenir son plaisir jusqu’à ce que son corps n’en puisse plus, pour prolonger son délice, rendre sa jouissance plus puissante. J’admirai son corps, son ventre potelé, ses seins généreux, sa peau pâle qui devenait rose. Je regardai sa tête se tourner d’un côté puis de l’autre, ses lèvres s’entrouvrir. Elle tira sur ses liens et poussa un cri de plaisir. Je savais que ça lui plaisait grâce à nos colliers, alors je continuai. — Oh mon Dieu, gémit-elle en tirant sur ses liens alors que ses émotions me submergeaient d’excitation. Pitié, j’ai besoin de jouir. Ni Tyran ni moi ne dîmes quoi que ce soit. Je continuai de la lécher, de la sucer, de la laper alors qu’elle se tortillait et me suppliait. Chaque fois qu’elle approchait de l’orgasme, j’arrêtais. Je sentis sa peau se couvrir de sueur, sus que je la poussais dans ses retranchements. Nous avions toujours fini par lui donner ce qu’elle voulait, par céder. Pas cette fois. Et mon sexe en mourait d’envie. J’étais plein de la semence avec laquelle je la marquerais. La revendiquerais. Bientôt. Tyran avait son sexe en main et se caressait lentement en la regardant, mais sans la toucher. Je savais que cela ne calmait absolument pas le désir de mon ami, mais il le faisait quand même. — Qu’est-ce qui ne va pas, Kristin ? Elle cambra le dos et des larmes de frustration se formèrent au coin de ses yeux. Elle n’était pas triste, elle n’avait pas mal. Non, elle était en manque et cela me rendait fou. Nous en souffrions tout autant qu’elle. — Vous ne me laissez pas jouir, geignit-elle. — Non, tu as raison. — Pourquoi ? s’écria-t-elle en tirant sur ses liens. — Tu vois cette sensation que tu as, là ? C’est ce qu’on a ressenti en te voyant sauter de ce rebord rocheux dans la grotte. On s’est sentis impuissants. — Il fallait que je vous sauve ! — D’autres auraient pu le faire, contra Tyran. — Il fallait que ce soit moi. Vous êtes à moi, dit-elle d’une voix féroce. — Oui, on t’appartient. Mais tu ressentiras notre impuissance. — Allez-vous faire foutre, dit-elle, et je sentis de la colère passer dans son collier, mais aussi du désir. Elle ne voulait pas que Tyran la détache. Elle ne voulait pas que j’arrête de goûter à sa chatte. Elle en voulait plus. Tyran secoua la tête en se caressant, puis il passa le pouce sur son gland couvert de liquide pré-séminal. Il le lui pressa contre la lèvre inférieure. — Ouvre, dit-il en lui mettant le pouce dans la bouche. Elle se mit immédiatement à le lécher comme s’il s’agissait d’un sexe. Je ne pus m’empêcher de grogner contre ses plis mouillés. Il libéra son pouce et elle en voulait plus, voulait son sexe. Mais elle n’avait pas le droit de l’avoir, et tant pis si ça nous pénalisait aussi. — On est tes compagnons. À qui tu appartiens ? Je lui suçai le clitoris, la poussai dans ses retranchements, puis cessai complètement de la toucher. — À vous ! dit-elle. — Et à qui est-ce que j’appartiens ? Sa tête se tourna vers Tyran, mais elle ne dit rien. — Ressens la vérité, compagne. Que te dit le collier ? — Tu es à moi, dit-elle en levant la tête vers moi. Et toi aussi, tu es à moi. Oh que oui, j’étais à elle. Dévoué. Je ferais n’importe quoi pour elle, même la laisser se mettre en danger si c’était ce qui la rendait heureuse. Je savais que Tyran ressentait la même chose. — C’est ça, poursuivit-il. On ne veut pas que tu te mettes en danger, mais ce travail, l’équipe médico-légale, sera sûr. On sait que tu as besoin d’avoir quelque chose à toi. C’est notre travail de faire en sorte que chaque membre de la Colonie se sente intégré, qu’il ait sa place. Toi incluse. Elle était tellement excitée qu’il était difficile de percevoir son excitation concernant son futur travail. — Nous t’avons été attribués, Kristin Webster de la Terre. Nous ne t’enfermerons plus à clé dans cet appartement. Je t’aime. J’aime tout chez toi. Tu es une guerrière féroce, quand tu protèges tes compagnons. J’espère que tu seras une mère tout aussi protectrice, dit Tyran en lui glissant une main sur le sein, puis sur le ventre. Alors qu’il parlait, je quittai doucement le sexe de Kristin, j’avais beau vouloir qu’elle jouisse, il fallait qu’elle entende clairement les mots de Tyran, qu’elle comprenne ce qu’il lui disait. — Acceptes-tu notre revendication ? lui demandai-je. — Maintenant ? demanda-t-elle en levant les hanches vers ma bouche avide. — Oui, maintenant, confirma Tyran. Je m’efforcerai de te laisser travailler avec le Chasseur, mais je n’en serai pas capable, sauf si tu m’appartiens. Si tu m’appartiens vraiment. Je sentis ce qu’il voulait lui faire, et je levai la tête avant de reculer et de me placer entre les chevilles de Kristin, puis il donna l’ordre suivant : — À quatre pattes. Il aida Kristin à se retourner, le haut du corps plaqué sur le lit, les poignets toujours attachés au-dessus de sa tête. Je me glissai à nouveau entre ses jambes, sur le dos cette fois, afin que sa chatte se trouve juste au-dessus de mon visage. Je la pris par les hanches et la fis descendre pour qu’elle se frotte à mon visage. Alors que je la maintenais, la main de Tyran s’abattit sur ses fesses levées. Elle poussa un cri, un mélange de plaisir à cause de ma bouche et de ma langue durcie qui la pénétrait, combiné à la douleur de la fessée de Tyran. Il lui frappa les fesses encore et encore. Elle adorait ça. Je le sentais dans la façon dont son corps se tendait, avant de se rendre immédiatement après. À la façon dont son corps mouillait pour nous. — Pitié ! s’exclama-t-elle. Tyran la fessa à nouveau, plus fort, cette fois. — À qui appartiens-tu, Kristin de la Terre ? Le côté très dominateur de Tyran était de retour. Il avait récupéré de ses blessures, avait repris des forces et était prêt à s’occuper de notre compagne. À la faire nôtre. Complètement. Il la fessa encore. Je continuais de la lécher. J’entendis le tube de lubrifiant qu’on ouvrait, entendis le son mouillé alors que Tyran l’étalait sur son sexe. Je savais ce qu’il était sur le point de faire, sentais son impatience alors qu’il se préparait. Je me glissai enfin sur le lit et essuyai son désir de ma bouche. Tyran posa son pouce contre son entrée de derrière, l’enduisit de lubrifiant et la prépara pour son sexe. Elle cambra le dos et le pouce de Tyran la pénétra avec aisance. Elle poussa un grognement, et moi aussi. Je sentais son plaisir aussi clairement que s’il s’était agi du mien. Incapable de me contenir plus longtemps, je pris mon sexe en main et le serrai pour tenter de retarder mon orgasme. J’avais envie d’être enfoncé en elle quand je jouirais, mais il faudrait que j’attende que nous la revendiquions. — À qui appartiens-tu ? répéta Tyran. Je le regardai pénétrer Kristin avec son pouce, glisser son doigt couvert de lubrifiant entre ses fesses toujours roses après sa fessée. Je ressentais le désir de notre compagne, son besoin nous parcourir. Mais à cet instant, comme si elle ne tenait plus au bord du précipice, comme si elle était à un doigt de tomber, elle lâcha prise. Tous ses traits se détendirent, et elle poussa un gémissement soulagé. — À vous, souffla-t-elle. Bon sang, qu’est-ce qu’elle était belle ! — Pourquoi ? demandai-je. Parce que vous me protégerez, vous saurez de quoi j’ai besoin et vous me le donnerez. — Quoi d’autre ? — Laissez-moi être moi-même, au lit et en dehors. — C’est bien, compagne. Tu passeras ta journée à savoir que tes compagnons sont là pour toi. À t’attendre. Prêts à tuer pour toi, à mourir pour toi. Tout ça parce qu’on t’aime. — On ne fesse que toi. On ne baise que toi. On ne prend que toi, dit Tyran en continuant à l’ouvrir. Il soutint mon regard, et il fit un signe de tête vers ma main. Je savais ce qu’il voulait. Il voulait que j’emplisse sa chatte pendant qu’il l’étirait par- derrière. Le moment était venu de la faire hurler de plaisir. — Parce que tu nous appartiens et qu’on sait que ça te plaît, conclut-il. Je m’avançai et passai la main sous le corps de Kristin pour glisser doucement deux doigts en elle alors qu’elle s’effondrait avec un sanglot. — Je t’aime, Kristin, répéta-t-il. Tu m’appartiens. Elle jouit avec un orgasme ronronnant, et elle poussa un long gémissement plaintif. Pas comme quand nous la baisions. Non. Ça, ça viendrait ensuite. C’était une autre forme de jouissance, son corps et son esprit se soumettant à nous. Elle aimait notre côté dominateur. Le fait qu’on la voie comme une femme forte et indépendante. Tyran arrêta de bouger le pouce, lui laissa savourer l’instant, car nous le sentions aussi. Elle se donnait à nous, et nous nous donnions à elle. Lorsqu’elle eût repris son souffle, elle ouvrit les yeux. Tyran se pencha en avant pour pouvoir regarder ses yeux pleins de passion. Je vis que ses iris pâles étaient pleins d’amour. Je le sentais. Si j’avais été une bête Atlane, je me serais frappé la poitrine en poussant un rugissement. — Revendiquez-moi, dit-elle d’une voix essoufflée, mais autoritaire, rien de moins. Je me figeai et libérai mes doigts. C’étaient les mots que nous rêvions d’entendre depuis qu’elle était arrivée. Tyran sourit lorsqu’il libéra son pouce. — Tu es consciente que la coutume prillonne exige que nous le fassions en public ? Que des témoins assistent au moment où nous t’emplirons de notre semence par devant et par-derrière ? Elle écarquilla les yeux, la joue pressée contre le matelas. — Non, je ne le savais pas. — Tu ne veux pas qu’on te revendique ? demanda Tyran. — Revendiquez-moi, baisez-moi, mais faites-le ici. Pas de public. Je n’ai pas besoin de témoins. Je sais que tu m’appartiens. Elle tourna la tête pour poser le front contre le matelas, et elle attendit. — Que vous m’appartenez, ajouta-t-elle. Tyran hocha la tête et me jeta un regard. C’était encore une entorse au protocole, mais après tout le reste, les coutumes et les règles n’avaient plus beaucoup d’importance. Tout ce qui nous importait, c’était elle. — Bon sang, vous me rendez dingue, tous les deux. Allez-y. Revendiquez-moi. Tant que vous le faites maintenant. Je défis les nœuds qui lui attachaient les poignets à la tête de lit et je la libérai. Je l’aidai à s’agenouiller, puis lui frottai les bras et les épaules pour lui délasser les muscles. Tyran s’installa sur le dos et attendit. J’aidai Kristin à lui grimper dessus, mais il la fit se retourner pour qu’elle lui tourne le dos. — J’adore voir la trace de mes mains sur ton cul. Il la prit par les hanches pour la placer comme il le souhaitait. — On n’a pas de témoins, poursuivit-il, mais on dira les mots qu’il faut. Acceptes-tu notre revendication, compagne ? Te donnes-tu librement à moi et à mon second, ou souhaites-tu choisir un autre compagnon principal ? Kristin regarda par-dessus son épaule et lui sourit. Je sentis une bouffée d’amour les parcourir. — J’accepte ta revendication, guerrier, lui dit-elle avant de se tourner vers moi. J’accepte aussi ta revendication. — Alors nous te revendiquons selon le rite du nom, dis-je, finissant le serment fait par les mâles prillons depuis des siècles. Tu m’appartiens et je tuerai tout autre guerrier qui osera te toucher. — Moi aussi, conclut Tyran. — C’est l’heure, dis-je à Kristin. Prends sa queue entre tes fesses, compagne. Tyran va t’aider. Quand il sera profondément enfoncé en toi, je te prendrai par devant. Elle hocha la tête et souleva les fesses, avant de redescendre, guidée par les mains de Tyran, pour que son sexe se place entre ses fesses. Comme il l’avait bien préparée et lubrifiée, lorsque Kristin prit une inspiration et se détendit, elle s’enfonça sur son sexe, et le gland de Tyran glissa en elle. Elle poussa un grognement, puis se mit à haleter alors que Tyran la maintenait en place, empêchant la gravité de la pousser à aller trop vite. Je lui passai un pouce sur le téton, sentis sa douceur, puis le regardai durcir. — Tu le prends bien comme il faut, compagne. J’ai mal aux couilles en regardant sa queue disparaître en toi. Elle se lécha les lèvres et hocha la tête, et Tyran sut qu’il pouvait la baisser davantage. Lentement, il la fit bouger de bas en haut, la prenant jusqu’à ce qu’elle soit assise sur son entrejambe. Je me caressai en pensant au fait qu’il était complètement enfoncé en elle. — Tu es prête pour moi, compagne ? demandai-je. Kristin souffla et m’adressa un sourire hésitant. Je voyais son clitoris gonflé et je me léchai les lèvres, ma langue toujours envahie par sa saveur. — Oui. Je te veux en moi, toi aussi. — Penche-toi en arrière, lui dis-je alors qu’elle plaçait les mains sur le torse de Tyran. Sous cet angle, sa chatte m’était offerte. Tyran écarta les jambes et je me mis en position, le sexe entre les mains pour le guider jusqu’à l’entrée de Kristin. Elle était trempée, et son désir enduisit mon gland. Je croisai son regard pâle, et y lus son excitation, sentis à quel point elle était prête. Je me glissai en elle. Elle était tellement serrée. Je n’avais presque pas la place de la pénétrer, à cause du sexe de Tyran qui se pressait contre le mien à travers la fine membrane qui nous séparait. Je retins mon souffle lorsque je me faufilai en elle. Je posai une main sur le lit et me penchai en avant, nos bustes collés l’un à l’autre alors que je soutenais son regard et la prenais profondément. — Oui ! s’écria-t-elle. Je poussai un grognement, et les hanches de Tyran se soulevèrent toutes seules. — On ne fait plus qu’un, compagne. Le moment est venu de te revendiquer. — Oui, répéta-t-elle encore et encore, comme un mantra. Nous y allâmes d’abord doucement, puis, lorsque nous ne pûmes plus résister à nos bas instincts, nous nous mîmes à l’emplir avec un abandon délibéré. Elle me serrait comme un poing. Un poing chaud, mouillé et parfait. Je n’avais pas la force de durer. Je l’avais voulu, j’en avais rêvé pendant ma détention. Je sentais à quel point cela plaisait à Kristin à travers nos colliers, je savais qu’elle était au bord du précipice. Tyran aussi le percevait, car il lança : — Jouis, compagne. Jouis, et nous te suivrons, nous te marquerons de notre semence. Elle cambra le dos et se figea, les yeux fermés, la bouche ouverte, et elle poussa un gémissement rauque. Je le ressentis dans mes os, dans mon cœur, dans mes bourses. Je ne pouvais plus me retenir, surtout maintenant que sa chatte me serrait avec encore plus de force. Mes testicules se contractèrent, se vidèrent de leur semence. Le plaisir de Kristin démultipliait le mien. Mon plaisir poussa Tyran vers l’orgasme, et il jouit entre les fesses de notre compagne. — À nous, lança Tyran alors qu’il lui agrippait les hanches et l’emplissait. — À nous, répétai-je alors que je réalisais que nous avions trouvé la compagne la plus parfaite de l’univers. Je vis le collier qu’elle avait autour du cou passer du noir au bleu Zakar. La revendication était complète. Oui, elle nous appartenait. Pour toujours. — À vous, haleta Kristin, parfaitement placée entre nous. À sa place. É P I L O G U E

ristin K — C’est bon ? demanda Rachel en entrant dans la pièce qui allait servir de laboratoire médico-légal. Il se trouvait dans le même couloir que celui de Rachel dans l’infirmerie de la Base 3. Kiel et d’autres hommes travaillaient quotidiennement avec moi pour examiner les preuves trouvées dans la forteresse souterraine. Presque tous les jours, nous y retournions et établissions un plan du labyrinthe de tunnels. Nous trouvions plus de preuves du passage de la Ruche à chaque fois. Pire encore, nous savions qu’elle n’avait pas quitté la planète. Nous n’avions pas gagné. Elle s’était simplement déplacée. Toutes les bases de la Colonie avaient été prévenues du problème, et le Prime Nial avait demandé à des vaisseaux guerriers de faire des patrouilles dans la zone spatiale qui séparait la Colonie et le territoire de l’ennemi. Tout le monde avait pour objectif de trouver Krael, de le livrer à la justice avant qu’il ne concocte un nouveau plan maléfique. Un mois s’était écoulé depuis mon arrivée, depuis que les guerriers avaient commencé à disparaître. Trois semaines depuis ma revendication. Ma main se posa sur mon collier, désormais bleu, assorti à mes vêtements et aux colliers de mes compagnons. Il y avait bien longtemps, j’avais voulu taquiner Tyran en portant de l’orange, du rouge ou du noir. Mais la satisfaction que je percevais chez lui chaque fois que lui ou Hunt me voyaient porter la couleur des Zakar me faisait passer cette envie. Leur bonheur était ma drogue favorite. Mes compagnons avaient beau ne pas être ravis que je m’éloigne d’eux pendant la journée, ils savaient qu’après leur sauvetage, me confiner chez nous me rendrait malheureuse. Tyran avait eu raison, notre accouplement voulait dire que je devais être moi-même, c’est à dire une femme indépendante. S’ils avaient voulu un paillasson, le Programme des Épouses Interstellaires leur en aurait donné un. Je hochai la tête et éteignis la lumière de ma paillasse. Rachel me prit par le bras et me guida dans le couloir. — C’est bien, nos compagnons nous attendent. Nous allions les retrouver dans la salle à manger commune. J’avais hâte de les voir, de leur raconter la nouvelle. J’avais fait jurer au Dr Surnen de garder le secret, mais il rayonnait, alors je savais qu’il ne tiendrait pas longtemps. Il n’y avait encore jamais eu de bébé sur la Colonie. — Ils sont au courant ? demanda Rachel. J’adressai un signe de tête à un Atlan qui passait par là, puis je regardai Rachel. — Je ne sais pas comment ils ont fait pour ne rien remarquer. Ces fichus colliers ne facilitent pas les secrets. — Une femme devrait pouvoir annoncer à ses compagnons qu’elle est enceinte au moment qu’elle a choisi, pas parce qu’ils lisent dans les pensées. La veille, j’avais vomi au laboratoire, et c’était Rachel qui m’avait fait remarquer que je n’étais peut-être pas malade, mais enceinte. Dès que cette idée atteint mon esprit, je sus que c’était la vérité. J’étais plus excitée que jamais — même si je ne voulais pas l’admettre à Rachel — et mes seins me faisaient mal. Ils étaient sensibles. Mes compagnons aimaient toujours m’attacher pour me dominer. J’adorais ça — ils le savaient, bien sûr —, mais ils étaient fiers que je me serve de mes compétences pour aider la Colonie. Tout comme Rachel. Et cette acceptation était la dernière chose qui m’avait manqué. Tout en moi s’était mis en place et je n’avais jamais été plus heureuse, plus satisfaite. J’étais tellement contente que je m’étais mise à craindre le retour de bâton. Personne ne pouvait être aussi heureux. Ça semblait impossible. Je craignais toujours à moitié que tout cela ne soit qu’un rêve, duquel j’allais me réveiller. Les choses étaient trop parfaites. Je pouvais m’affirmer au travail et me soumettre au lit. Je me demandais quand même si avec l’annonce de ma grossesse, ils se mettraient à me traiter différemment. Je ne voulais pas qu’ils arrêtent de me dominer sexuellement. Leur attitude de mâles alpha me faisait perdre la tête. Je craignais qu’ils cessent de me donner des fessées ou de me baiser par peur de faire du mal à notre enfant à naître. J’avais entendu parler de ce genre d’hommes sur Terre. Quand leur femme était enceinte, ils paniquaient. Perdaient tout désir pour elle. Plutôt mourir. Je m’étais habituée au désir brûlant que je lisais dans les yeux de mes compagnons. Nous pénétrâmes dans la salle à manger. Les guerriers étaient assis en groupes, occupés à manger et à discuter. Mais mes yeux étaient aimantés par mes compagnons. Ils se levèrent, accompagnés de Maxime et Ryston, lorsque nous pénétrâmes dans la pièce. Mes compagnons adressèrent un signe de tête à Rachel, mais ils n’avaient d’yeux que pour moi. — Tu as quelque chose à nous annoncer ? me demanda Hunt. Je regardai Rachel, dans les bras de Ryston alors que Maxime lui embrassait le sommet du crâne. — Ils lisent dans tes pensées, dit-elle en riant et en levant les yeux au ciel, avant de tourner son attention vers ses compagnons. Hunt me prit par le bras et me mena jusqu’au couloir. — On va où ? demandai-je. Je croyais qu’on dînait avec les autres. Tyran me souleva dans ses bras et me serra contre lui. — Je crois que tu as quelque chose à nous dire. Quelque chose de petit, mais qui grandit de seconde en seconde. Je vis l’ardeur dans ses yeux, leur amour à tous les deux me submergea à travers nos colliers. J’étais contente qu’il me tienne, car l’assaut émotionnel de Hunt était puissant. — Oh, haletai-je en touchant mon collier. Vous êtes déjà au courant ? Une pointe de déception s’empara de moi. J’avais voulu leur faire la surprise. J’y tenais. — Dis-le, m’ordonna Tyran. Je le regardai, puis je jetai un coup d’œil à Hunt, qui se tenait face à nous. Son regard brûlait lui aussi d’amour et de désir. Entre eux, j’étais protégée. — On va avoir un bébé. Hunt bondit de joie, surprenant les guerriers qui passaient par là. Je ne pus m’empêcher de sourire. — Ça ne veut pas dire que j’arrêterai de travailler, ou que vous devrez me porter partout comme ça pendant les neuf prochains mois, grommelai-je. Tyran continua de me porter en direction de nos appartements, Hunt à nos côtés. — On ne t’empêchera pas de faire quoi que ce soit, compagne. Mais tu ne dois pas prendre de risques. Hunt se renfrogna. — Je vais parler à Kiel. Il faut doubler sa garde. Tyran hocha la tête. — Bonne idée. Je parlerai au gouverneur pour qu’elle travaille moins. — C’est hors de question ! m’exclamai-je en donnant une tape sur l’épaule de Tyran et une autre sur le torse de Hunt. Les femmes ont sans arrêt des bébés tout en continuant à travailler. Lorsqu’ils sourirent tous les deux, je sus qu’ils m’avaient fait marcher. — Vous êtes insupportables. Je m’étais longtemps battue pour mon indépendance. Je me reposerais sans doute un peu plus en fin de grossesse. Je ne savais pas quelle taille faisaient les bébés prillons, mais vu mes compagnons, je devais sans doute me préparer à accueillir un petit ange de cinq kilos. Hunt me passa un doigt sur la joue. — Tu sais bien qu’on veut simplement que tu sois en sécurité. — Je sais. Je suis prudente. — J’espère bien, grogna presque Tyran, mais je sentis un courant de satisfaction passer entre nous trois. C’était ce que j’avais voulu en participant au Programme des Épouses Interstellaires. Des hommes qui m’aimeraient, me protégeraient, me respecteraient. Qui me compléteraient, comme je les complétais. Et un bébé ? C’était un bonus inattendu. — Mais je ne veux pas que vous soyez trop prudents, insistai-je, en laissant mon désir pour eux submerger nos colliers. Tyran faillit trébucher, mais il se reprit bien vite. — Ne t’en fais pas. Ça ne nous empêchera pas de t’attacher au lit pour te prendre. Mes tétons sensibles durcirent. Ils savaient à quel point j’aimais me soumettre à eux, et qu’ils me donnent tout en retour. — Parfait, répondis-je. O U V R A G E S D E G R A C E G O O D W I N ( F R A N Ç A I S )

Tomes d’Interstellar Brides®

Domptée par Ses Partenaires Son Partenaire Particulier Possédée par ses partenaires Accouplée aux guerriers Prise par ses partenaires Accouplée à la bête Accouplée aux Vikens Apprivoisée par la bête B O O K S I N E N G L I S H B Y G R A C E G O O D W I N

Tomes d’Interstellar Brides®: Ascension Saga Ascension Saga, book 1 Ascension Saga, book 2 Ascension Saga, book 3 Trinity: Ascension Saga - Volume 1 Ascension Saga, book 4 Ascension Saga, book 5 Ascension Saga, book 6 Faith: Ascension Saga - Volume 2 Ascension Saga, book 7 Ascension Saga, book 8 Ascension Saga, book 9 Destiny: Ascension Saga - Volume 3

Tomes d’Interstellar Brides®

Mastered by Her Mates Assigned a Mate Mated to the Warriors Claimed by Her Mates Taken by Her Mates Mated to the Beast Tamed by the Beast Mated to the Vikens Her Mate’s Secret Baby Mating Fever Her Viken Mates Her Rogue Mates Fighting for Their Mate Claimed by the Vikens

Interstellar Brides® : La Colonie Surrender to the Cyborgs Mated to the Cyborgs Cyborg Seduction Her Cyborg Beast Cyborg Fever Rogue Cyborg

Interstellar Brides® : Les Vierges The Alien’s Mate Claiming His Virgin His Virgin Mate His Virgin Bride His Virgin Princess

Autres Ouvrages Their Conquered Bride (Historical Western Ménage) Wild Wolf Claiming: A Howl’s Romance C O N T A C T E R G R A C E G O O D W I N

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Grace Goodwin est auteure de best-sellers traduits dans plusieurs langues, spécialisée en romans d’amour de science-fiction & de romance paranormale. Grace est persuadée que toutes les femmes doivent être traitées comme des princesses, au lit et en dehors, et elle écrit des romans d’amour dans lesquels les hommes savent s’occuper d’une femme et la protéger. Grace déteste la neige, adore la montagne (oui, c’est un vrai problème) et aimerait pouvoir télécharger directement les histoires qu’elle a en tête, plutôt qu’être contrainte de les taper. Grace vit dans l’Ouest des États-Unis, c’est une écrivaine à plein temps, lectrice insatiable et accro invétérée à la caféine.