UNE SÉRIE DES ANNALES DES MINES

FONDÉES EN 1794

RÉALITÉS INDUSTRIELLES Série trimestrielle l Août 2017

Rédaction Christian Stoffaes Conseil général de l'Économie, de l'Industrie, Claude Trink de l'Énergie et des Technologies, Ministère de François Valérian l'Économie et des Finances 120, rue de Bercy - Télédoc 797 - 75572 Paris Cedex 12 Photo de couverture : Tél. : 01 53 18 52 68 Circulation des données, illustration. http://www.annales.org Photo © First signal/ISTOCK-GETTY IMAGES François Valérian Iconographie Rédacteur en chef Christine de Coninck Gérard Comby Abonnements et ventes Secrétaire général COM & COM Delphine Mantienne Bâtiment Copernic - 20 Avenue Edouard Herriot Secrétaire générale adjointe 92350 LE PLESSIS ROBINSON Alain Bruel Liliane Crapanzano Tél. : 01 40 94 22 22 - Fax : 01 40 94 22 32 Assistante de la rédaction [email protected] Marcel Charbonnier Mise en page : Nadine Namer Correcteur Impression : Printcorp Myriam Michaux Editeur Délégué : Webmestre FFE – 15 rue des Sablons - 75116 PARIS - www.ffe.fr

Membres du Comité de Rédaction Régie publicitaire : Belvédère Com Fabrication : Charlotte Crestani Grégoire Postel-Vinay [email protected] - Tél. : 01 53 36 20 46 Président du Comité de rédaction Directeur de la publicité : Bruno Slama Serge Catoire Tél. : 01 40 09 66 17 Pierre Couveinhes [email protected] Jean-Pierre Dardayrol La mention au regard de certaines illustrations du sigle Robert Picard « D. R. » correspond à des documents ou photographies Françoise Roure pour lesquels nos recherches d’ayants droit ou d’héritiers se Bruno Sauvalle sont avérées infructueuses. Rémi Steiner

RÉALITÉS INDUSTRIELLES - AOÛT 2017 1 SOMMAIRE Jean-Pierre DARDAYROL 2 BEDOIN Nathalie BEAUDEMOULIN,DidierWARZÉ l’Autorité deContrôleprudentieletRésolution(ACPR) Les enjeuxdelaBlockchainpourBanqueFranceet 29 Alexis COLLOMB,KlaraSOKetLucasLÉGER financières infrastructures Technologie desregistres distribués:quelimpactsurles 25 économiques des entreprises etdessecteurs Cas d’usage,transformations Ilarion PAVEL La 20 Patrick WAELBROECK Les enjeuxéconomiquesdelablockchain 10 C et usages La 06 Les blockchains Avant-propos 04

ôme BERBAIN blockchain –Lesdéfisdesonimplémentation blockchain :concept,technologies,acteurs RÉALITÉS INDUSTRIELLES - AOÛT 2017



des technologiesdelaconfiance? Blockchains etsmartcontracts:

? E et Thierry E etThierry Gautier MARIN-DAGANNAUD Le fonctionnementdelablockchain 42 Alain ROSETetFrançoisSTEPHAN SystemX ? aborde-t-elle lablockchain , avecl’appuidel’IRT Comment LaPoste,acteurdeconfianceséculaire, 38 Éric ROSSIGNOLetXavierLAURENT banques definancementetd’investissement(BFI) La 34 Stéphane BORTZMEYER Les infrastructures etlesservicesdel’Internet 62 Malo CARTON etPierre JÉRÉMIE La 58 ROBERTArnaud La chaînedulivre etleschaînesdeblocs 54 Jurgen DSAINBAYONNE Objets d’art:lesenjeuxdelablockchain 50 Christophe WAIGNIER d’expérience dansl’industriemusicale Blockchains etsmartcontracts:premiers retours 46 , un levier de digitalisation pour les blockchain, unlevierdedigitalisationpourles blockchain auservicedel’actionpublique Blockchains et smart contracts : des technologies de la confiance ? SOMMAIRE

65 Les opportunités, les enjeux MakerNet : la fabrication distribuée Pierre-Alexis CIAVALDINI 94 70 Pourquoi la normalisation s’intéresse-t-elle à la blockchain ? Blockchains et Smart Contracts : des perspectives pour Olivier PEYRAT et Jean-François LEGENDRE l’Internet des objets (IoT) et pour l’e-santé Philippe GENESTIER, Loïc LETONDEUR, Sajida ZOUARHI, Alain PROLA et Jean-Marc TEMERSON 98 Sécurité et insécurité de la blockchain et des smart contracts Les smart contracts Jean-Pierre FLORI et les oracles 102 La (ou les) blockchain(s), une réponse technologique 74 à la crise de confiance La régulation des smart contracts et les smart contracts Arnaud MANAS et Yoram BOSC-HADDAD des régulateurs Catherine BARREAU 106 Un nouvel outil numérique pour la fiabilisation des 77 supply chains : la blockchain Smart contracts… Aspects juridiques ! Matthieu HUG Éric BARBRY 109 81 Smart business networks: the evolution La mise en œuvre de la blockchain et des smart Louis-François PAU contracts par les industries culturelles Jérôme PONS 113  91 Traductions des résumés L’Oracle hardware : la couche de confiance entre les blockchains et le monde physique 122 Vanessa RABESANDRATANA et Nicolas BACCA Biographies des auteurs

Le dossier est coordonné par Jean-Pierre DARDAYROL

RÉALITÉS INDUSTRIELLES - AOÛT 2017 3 Avant-propos

Par Jean-Pierre DARDAYROL Ingénieur général des mines, président du comité de rédaction d'Enjeux numériques (nouvelle série des Annales des Mines) AVANT-PROPOS

a préparation de chaque numéro des Annales des Mines est pour son coordonnateur et la Rédaction une (petite) aventure, un cheminement qui tout en donnant corps au thème choisi un an auparavant apprend et montre beau- L coup. Partager les enseignements, les étonnements de notre travail est certainement une introduction qui prépare à la lecture structurée des articles de ce numéro consacré à la blockchain, ou chaîne de blocs, et à ses cas d’usage. Le voyage exploratoire que nous vous proposons est double : le premier parmi les acteurs du numérique, le second dans l’univers en construction de la blockchain. En ce qui concerne les acteurs, un constat s’impose avec force : les acteurs – entreprises, administrations, monde aca- démique, etc. – sont mobilisés par le sujet dans une posture, le plus souvent, pro-active et dynamique. Cette mobilisation nous est apparue plus précoce, plus large que celle constatée les années précédentes sur les innova- tions numériques venues sur le devant de la scène, comme l’infonuagique. Peut-être est-ce le signe de l’appropriation et de la maîtrise croissante du numérique par notre société ? Deuxième constat, les réflexions et réalisations en cours sont portées par des acteurs de tous types, deux groupes étant particulièrement actifs : les grands acteurs historiques et les start-ups ; on notera à ce propos que les entreprises et les institutions fondées avant 1900, d’une part, et les start-ups, d’autre part, ont donné chacune plus du tiers des articles de ce numéro. Les Universités et les Écoles se sont d’ailleurs impliquées avec une grande diversité de sujets, de personnes (enseignants-chercheurs et étudiants) et de types d’institution. Cependant, l’observation attentive des projets et des réalisations montre une forme de différenciation générationnelle au demeurant perçue par certains des auteurs : les personnes et les organisations les plus jeunes adoptent vis-à-vis de la blockchain et plus encore des smart contracts une politique que l’on pourrait qualifier d’appropriation directe et « décom- plexée », alors que les organisations porteuses d’actifs et de processus historicisés adoptent, en général, des démarches plus exploratoires – qui s’inscrivent néanmoins dans des politiques audacieuses et innovantes. On voit donc se dessiner dès à présent à l’occasion de l’arrivée de la blockchain, au-delà de l’aspect générationnel, le désir d’un renouvellement de l’innovation, de la compétition et de la concurrence des services et des acteurs dans de nombreux secteurs. Le second cheminement nous conduit « dans » la blockchain. Il apparaît immédiatement que le mot blockchain ne dé- signe ni une innovation ni un objet, mais la combinaison intelligente, inédite, variable selon les acteurs, des services et des plateformes de technologies existantes pour créer une « gestion collaborative d’un registre distribué », un système permettant de créer une certaine confiance entre acteurs sans recourir à une gouvernance et à une organisation centra- lisée investie de pouvoirs larges et exorbitants. Dans le monde de la confiance, dans celui des bases de données, tous deux marqués par plusieurs décennies de stabilité des modèles et des modes de pensée, la novation est radicale. Elle s’inscrit hors des savoir-faire, des cadres juridiques, des modèles d’affaires, des infrastructures installées largement disponibles. Les articles montrent qu’elle permet de s’interroger sur de nombreuses relations ou processus de natures variées – Bu- siness to Business (B2B), mais plus encore Business to Consumer (B2C), Administration to Consumer (A2C), Consumer to Consumer (C2C), à des fins de confiance évidemment mais aussi d’efficience et d’efficacité, de fiabilisation des données, de traçabilité, de contrôle interne ou externe, qu’il s’agisse de processus existants ou d’innovations. Aujourd’hui, au vu des travaux et des services expérimentaux en construction ou en test, il est bien téméraire d’anticiper qui seront les élus et qui ne le seront pas. Les smart contracts méritent une attention toute particulière. Greffés sur les infrastructures des chaînes de blocs, ce ne sont pas des contrats mais des logiciels d’assistance à la préparation, à l’exécution et à la supervision de contrats. Leur promesse est d’aider à la massification des relations contractuelles. Cependant, les analyses des auteurs indiquent qu’ils doivent encore être mieux compris et expérimentés avant d’être éventuellement mis en opération.

4 RÉALITÉS INDUSTRIELLES - AOÛT 2017 avec lemondephysiquesontcruciaux. deuxième. telligence artificielle,l’IA,seralesujetdupremier numéro nouvelle sérietrimestrielle,laquatrième,consacréeentièrement aunumérique Ce numéroversdesavenirsnouveauxestparticulièrement tourné riche.C’estheureux Il enestdemêmedes« de déserterlechampdunumérique,maisbienaucontraire del’investirplusintensémentenlançantmars2018une Réalités industriellesàêtre consacréexclusivementaunumérique.L’intention des Bonne lecture decenuméro, decettechaîned’articles. simultanément, en français et en anglais sur le Enjeux numériques/Digital issues

oracles

», sourcesaux d’informationsexternes sera publiésurpapierenfrançaisavecunenouvellemaquetteet,presque Web . N’hésitez pas à vous exprimer sur ce projet auprès de la Rédaction.

; l’économieetlarégulationdesdonnéesseralethèmedu blockchains, dontlasécurisationetl’interfaçage RÉALITÉS INDUSTRIELLES - AOÛT 2017

: Enjeux numériques/Digitalissues.L’in- Annales desMinesn’estnullement

: il est le dernier numéro: ilestledernier de

5

Jean-Pierre DARDAYROL LES BLOCKCHAINS 6 l l concept repose surdeuxcaractéristiques repose généralement sur un système centralisé La confianceentre desacteurs réalisantdestransactions plusieurs technologies Un seulconceptrecouvrant Sous-directeur adjointExpertiseàl'Agencenationaledelasécuritédessystèmes d’information(ANSSI) Par CômeBERBAIN technologies, acteursetusages La de lanécessitéd’uneautoritécentraleconfiance.Ce collaborative d’un registre distribuéet de s’abstraire ainsi sions decemodèlecentralisépermettantunegestion Le conceptdelablockchainestproposer desexten- des transactionsafind’écartertoutrisquedefraude. confiance détientlemonopoledelamiseàjourdu registre restreint àcertainsacteurs.Danstouslescas,letiersde sactions, l’accèsauregistre peutêtre libre pourtous,ou gularité deleurséchanges.Enfonctiondutypetran un registre deleurstransactions,garantissantainsilaré tous (État,banque,notaire…). Cetiersdeconfiancetient sissent defaire confiance àuneentitéqu’ils reconnaissent teurs, nepouvantsefaire confiancemutuellement,choi egistre estimplantéàl’aided’une « tout utilisateurpeutajouterdesélémentsaur le r également publicetréaliséde manière décentralisée. à empêcherlafalsificationdu registre etestengénéral ceux-ci sontajout définitive les nouveaux blocs au fur et à mesure que il existeunprocessus permettantdevalidermanière Ces élémentssontassemblés souslaformedeblocs,et est généralementdécentralisé); un procédé cryptographique(d’accèspublic,ceregistre de donnéesdécrivant les transactions, liés entre eux par Bien loind’être uniquementtechniques,lesenjeuxfondamentauxdela et surlesmotivationsréellesdesdifférents acteurs. à nousinterroger surlapertinencedel’utilisation La multitudedesexpérimentationsdansungrand nombre desecteurséconomiquesnousinvite et desespromesses. définir, d’identifiersesélémentsstructurantsetdes’interroger surlapertinencedeses propriétés acceptions variées!Afind’appréhendercenouveauphénomène,ilestnécessaire detenterle La particulier deceluidesmétiersdudroit. outil techniquequiinduitetparticipeàlatransformationnumériquedenombreux secteurs,en question delaconfiancedanslesinteractionshumaines.Encesens, et à la définition même des solutions permettant de répondreganisation, à la gouvernance à la

RÉALITÉS INDUSTRIELLES - AOÛT 2017 blockchain estàlamode:difficile,eneffet, d’ignorer ceterme utiliséenabondance,dansdes : concept, blockchain :concept, és àla«

chaîne

»

: ce

chaîne

: processus vise

» deblocs

: les egistre. ac - - - - (1) Un sont réunies. dont l’exécutionestautomatique, dèslorsquelesconditionsen des informatiquesstockésdansune technologiedeblockchainet technologies deblockchain Plus précisément,lesélémentsstructurantdifférentes dant dansleurassemblage. preuve detravail,machines virtuelles…),l’innovationrési bué, signature électronique, cryptographieasymétrique, sur des briques techniques préexistantes (registre distri sont construitesautourdeceparadigme.Elless’appuient Plusieurs technologies (Bitcoin, Ethereum, Ripple…) se l l quatre egistre etsoncontenu l’accès aur le r teurs etlesvalideurs chiers quedescommunications.Les Néanmoins, ilestpossibled’ystockeraussibiendesfi répertorier destransactionsdemeure lecasmajoritaire. ments dediversesnatures. L’utilisation duregistre pour de stockagedistribué,ilestpossibled’yinclure desélé celle de permettent d’étendre lanotiondestockagedistribué ramètres. Deuxtypesd’acteursedistinguent pseudonymique) desacteursensontlesprincipauxpa ou personnesphysiques)etl’identitéaffichée(réelle consortium), le type des acteurs (personnes morales blicité (chaînepublique,chaîneprivéeouen smart contract est un contrat formalisé sous la forme de co-

blockchain enfonctiondescasd’usage, : capacité decalculdistribué egistre pourlesdifférents acteurs

; blockchain onttraitàl’or blockchain estunnouvel existantes

: le registre étantuneforme

;

sont aunombre de smart contracts

: lesutilisa-

: lapu -

(1) à ------

des contentieux turelle porteenellesapropre limiteenmatière degestion dation desdifférents éléments.Cetteinfalsifiabilitéstruc modifié. Le système préserve également l’ordre de vali- registre estimmuable, il nepeutêtre nisupprimémême La principale promesse de la structurelles Les propriétés etleurslimites l l pour trois technologies. nologie donnée.LeTableau ci-dessousillustre ceschoix, de ceschoix,ellenepeutêtre évaluéequepourunetech L’effectivité des promesses de la solutions retenues pourcesdifférentes problématiques. Chaque technologiecorrespond àdeschoixenmatière de bilité, estdonclapierre angulaire desdifférentes techno- Le processus devalidation,quiviseàgarantirl’infalsifia être apportéeaumoyendenouvellestransactions. être supprimées, seule une correction de leurs effets peut draient àdesactionsillégales oucontestéesnepeuvent sur l’infalsifiabilitédu registre de confianceteneur du registre. Cette promesse repose lisation delaconfiance,quipermetdisparitiondutiers

la régulationdesacteurs de mettre enplaceunmécanismederégulation afin d’obtenirunéquilibre dusystème,ilestnécessaire disposition des moyens informatiques), mais également contribuer àlacommunauté(notammentenmettant ré… « la validationduregistre parconsensus preuve departicipation(proofofstake),consensusfédé- technologie retenue). souvent, celui-cirepose surunemonnaie(associéeàla aux propriétés distinctes coexistent registre. Plusieursméthodesdevalidationdistribuée des acteurspartagecependantunaccord surl’étatdu primer un désaccord) ne peut contribuer àl’émergence duconsensus (oucelled’ex choisis, lapossibilitépourl’ensembledesacteursde glo-saxonne) :enfonctiondesmécanismesdevalidation

consensus

;

»

doit être pris ici dans son acception an : mêmedestransactionsquicorrespon

:

: toutélémentinsérédansle blockchain est la décentra afin d’inciterlesacteursà être garantie. L’ensemble blockchain dépend

: preuves detravail,

(le termede

; leplus ant ------ractéristique supplémentaire derésiliencedessyst L’infalsifiabilité etlatransparence engendrent uneca impliqués bénéficientdecettepropriété. technologies oudedéploiementsprivés,seulslesacteurs utilisant cestechnologies nées àcaractère personnel les typesdedonnéesmanipulables,tellesquedesdon majeur quantàlaconfiancedesacteurs,maispeutlimiter cas detechnologiespubliques,celaconfère unavantage et uneauditabilitédesélémentspourlesacteurs.Dansle Le caractère distribué du registre induit une transparence rentes technologiesexistantes. problème théorique et les solutions utilisées par les diffé Néanmoins, iln’existepasdeliendémontrableentre ce gner ainsilabataillemêmes’ilyaparmieuxdestraîtres. par messagesconçussurlabased’unalgorithmeetga néraux byzantins,quidoiventcorrespondre entre eux à unproblème mathématiqueconnu,celuiditdesgé d’acteurs noncoopératifsoumalveillants) sur chaquenouveaubloc(malgrélaprésencepotentielle d’un consensusentre l’ensembledesvalideurs,etce, logies. Fonctionnellement,ilcorrespond àl’émergence sactions monétaires. Ilexisteaujourd’hui desmilliersde conçu audépartexclusivementpourréaliserdestran non financierss’appuientmêmesurleBitcoin,quiaété répondant àdescasd’usage.Certainsservicespourtant partir desquelsilestpossibledeconstruire desservices présentent commedesprotocoles oudesplateformesà Les technologiesconstruitesautourdela partir destechnologiesdisponibles Une multitudedeservicesconstruitsà à divulgationnulledeconnaissance). en révélerlecontenu,tellesque grâce àdestechniquespermettant demanipulerlesélémentssans (2) Ilestnéanmoinspossibledetrouver dessolutionsàcettelimite ment peuefficacesentermesénergétiques. très importantesdecalculsquilesrendent particulière les preuves detravailimpliquent d’effectuer desquantités to-monnaies. Parailleurs,lestechnologiesreposant sur quelques secondes seulement pour lesnouvelles cryp pour Bitcoin,dequelquesminutesEthereum, etde le tempsdevalidationd’unblocest10à20minutes notamment danslecasdestransactionsfinancières technologies, cesperformancessontenaugmentation, les systèmesclassiques.Très variables en fonctiondes système reposant surune technologiede performances estcentraledanslacomparaisonentre un Au-delà decespropriétés intrinsèques,laquestiondes nouvelle chaîne,enfonctiondeleursintérêtspropres). diviser, entre ceuxdelachaînehistoriqueet existants ontmontréquelesacteurstendanceàse de basculer dans le nouveau système (les quelques cas gnificative desacteurs(utilisateursetvalideurs)accepte suré. Ceprocessus nécessite néanmoinsqu’unepartsi système àpartird’unétatsurlequelleconsensusestas majeure, tout acteur est en mesure de créer un nouveau RÉALITÉS INDUSTRIELLES - AOÛT 2017

: encasd’incidentoud’atteinte (2) . Àl’inverse,danslecasde zero-knowledge protocol (preuve

blockchain se : celarenvoie blockchain et èmes

7 ------:

Côme BERBAIN services reposant sur des technologies construites autour l de grands groupes, notamment dans le domaine finan- du concept de blockchain, et de nouvelles variantes appa- cier (banques, assureurs…), l'expérimentent en partena- raissent régulièrement. riat avec des start-ups ou avec les acteurs du monde de la recherche et de l’innovation ; Les domaines d’application et les cas d’usage sont ex- l les pouvoirs publics, tant en France qu’à l’international trêmement variés : au-delà d’un secteur financier forte- (Caisse des Dépôts, France Stratégie, UK Government ment mobilisé par le phénomène Bitcoin (210 milliards de Office for Science) accompagnent ou observent le phé- dollars d’investissements estimés en 2016), des services nomène. existent dans l’énergie, le commerce (diamant ou œuvres

BLOCKCHAINS d’art), les transports et la logistique, la gestion des droits Les motivations des différents acteurs sont variées. La numériques (musique, films ou jeux vidéo), la santé, l’ad- première d’entre elles est l’apprentissage : nombre d’ini- ministration et l’État (cadastre)… Le suivi de transactions, tiatives visent principalement à tester des modèles tech- LES leur traçabilité ou la lutte antifraude sont les cas les plus niques et organisationnels et à obtenir des retours d’expé- répandus. rience afin de mieux comprendre le concept deblockchain et les technologies associées, et de tenter de les maîtriser. Le développement de ces services fait apparaître quatre enjeux principaux qui doivent être pris en compte afin Par ailleurs, étant structurellement décentralisée, la d’évaluer l’adéquation entre un cas d’usage, un service et blockchain entraîne l’apparition d’un effet de réseau : l’on une technologie : assiste, de ce fait, à une course entre de nombreux ac- teurs désireux de devenir le service ou la plateforme de l la gouvernance : les règles d’organisation des commu- référence dans leur secteur et de s’assurer ainsi une po- nautés d’acteurs (utilisateurs ou valideurs) ainsi que leur sition dominante (« Winner takes all »). Dans cette course mécanisme de régulation sont déterminants pour la pé- prennent place aussi bien les tiers de confiance tradition- rennité du service ; nels que des entreprises clientes souhaitant se passer de l l’efficacité technique : la comparaison avec les tech- ces intermédiaires ou de nouveaux entrants cherchant à niques classiques de bases de données réparties ac- modifier de fond en comble l’organisation d’un secteur. cessibles via des API est rarement en faveur des nou- Enfin, un certain nombre de start-ups visent autant leur veaux services. Les performances des technologies de rachat par un grand groupe que le développement d’une blockchains ne sauraient en être trop éloignées, sous activité propre. peine d’échec ; l la reprise de l’existant et la gestion des contentieux à Un élément de la transformation venir (nombre de services ignorent cet enjeu) ; numérique l la numérisation des sous-jacents : certains services né- cessitent que l’on associe de manière certaine des ob- L’apparition de la blockchain correspond à une nouvelle jets physiques (tels qu’un diamant, une toile ou l’énergie approche, décentralisée, de l’informatique, dont les im- produite par une éolienne) à leur contrepartie numérique pacts réels n’apparaîtront qu’à long terme. Il est difficile utilisée dans la chaîne correspondante. Cette question de déterminer dans quelle mesure les comparaisons avec dépasse les seuls usages dans le cadre de la blockchain, l’apparition des protocoles TCP/IP (Transmission Control mais cet écosystème a permis de développer plusieurs Protocol/Internet Protocol), dans les années 1980, sont solutions d’efficacité apportant des degrés de garantie pertinentes. Néanmoins, en permettant d’aller au-delà variables. Une réponse est l’utilisation d’« oracles » (éga- de la simple dématérialisation des transactions et des lement utilisables notamment pour les smart contracts), contrats, la blockchain nous offre la possibilité de mo- c’est-à-dire de tiers de confiance spécialisés choisis par difier la manière dont nous concevons la gestion de la les utilisateurs du service. confiance dans les relations humaines et au sein des orga- nisations associées. Initiant la transformation numérique Un écosystème aux motivations de secteurs complets, elle va bien au-delà d’une simple variées question technique. L’enthousiasme suscité par la blockchain et son poten- L’apparition des smart contracts (contrats intelligents), tiel d’applications ont entraîné la constitution rapide d’un en particulier, va modifier en profondeur les métiers du écosystème riche. La blockchain figure en très bonne droit : le bitcoin, la première application de la blockchain, place dans le pic des espérances exagérées du « Hype concerne les paiements, qui sont la forme la plus simple Cycle » de Gartner (3) : c’est un signe d’effet de mode et de de contrat. Les métiers du droit ont notamment pour fonc- démultiplication des initiatives, mais également d’immatu- tion de traduire en clauses juridiques et en contrats les rité du domaine et d’apprentissage par l’expérimentation. intentions des parties. Au-delà de la simple dématérialisa- tion des contrats, les smart contracts correspondent à la Plusieurs types d’acteur participent à l’écosystème de transformation numérique de cette activité : ils permettent la blockchain : de traduire en code informatique les intentions des par-

l de nombreuses start-ups se sont lancées, y compris dans un rôle de conseil ;

l des tiers de confiance historiques (tels que les notaires, qui anticipent la mutation de leur métier) montent des (3) www.gartner.com/technology/research/methodologies/hype-cy- expérimentations pour leurs propres usages ; cle.jsp

8 RÉALITÉS INDUSTRIELLES - AOÛT 2017 ties et d’obtenir l’exécution automatique du contrat ain- nologies de blockchain, ainsi que des échanges de biblio- si constitué, illustrant le principe « Code is law ». Cela thèques de smart contracts. Là encore, les conséquences justifie l’intérêt que les professions juridiques manifestent de la blockchain ne se cantonnent pas aux aspects tech- à l’égard des smart contracts. niques, elle a aussi des impacts juridiques et organisa- tionnels. L’expérimentation est plus que jamais nécessaire Même si la rédaction des smart contracts est un exercice pour comprendre ces nouveaux outils techniques et ima- complexe encore mal maîtrisé, et même si la gestion des giner les nouvelles applications et les nouvelles formes contentieux reste une question ouverte, on peut s’attendre d’organisation associées. à voir se développer de nouvelles professions autour de la rédaction de smart contracts en lien avec plusieurs tech- Côme BERBAIN

RÉALITÉS INDUSTRIELLES - AOÛT 2017 9 Les enjeux économiques de la blockchain

BLOCKCHAINS Par Patrick WAELBROECK Professeur à Télécom ParisTech – Institut Mines-Télécom LES

La blockchain est une technologie qui va bien au-delà de l’horodatage, du bitcoin et de la sé- curisation des transactions financières. Le développement d’un écosystème autour des objets connectés intelligents ne pourra sans doute pas se faire sans la blockchain (sous une forme ou sous une autre). La blockchain ouvre les portes de la liquéfaction du monde physique, de l’économie de la micro-transaction en temps réel et du partage intelligent de bases de données. Cependant, il est essentiel de distinguer les différents types de blockchain, en particulier les blockchains publiques des blockchains privées, car leurs propriétés économiques respectives sont très contrastées. Par ailleurs, les problèmes de gouvernance des blockchains publiques laissent à penser que la technologie blockchain ne pourra à elle seule assurer la confiance.

Introduction écrire dans celle-ci, et à y lire les données. À l’opposé, seul un petit nombre de nœuds sont autorisés à écrire La blockchain est une technologie. Elle correspond à un dans une blockchain privée. Ainsi, les règles de valida- cahier sécurisé numérique décentralisé. Lorsqu’un nœud tion pour ajouter un nouveau bloc diffèrent elles aussi. Par du réseau concerné veut enrichir ce registre d’un élément, exemple, dans le cas de la blockchain publique Bitcoin, tous les autres nœuds de la blockchain sont mis à contri- l’incitation à sécuriser les éléments de la blockchain est bution pour acter cet ajout de façon indélébile. Chaque liée à l'obtention de bitcoins à travers deux mécanismes : bloc contient l’empreinte du bloc précédent, formant ainsi un montant fixe par bloc miné et un montant variable lié une chaîne de blocs de données. Une nouvelle entrée ne aux frais de transaction du minage. Pour une blockchain peut donc être ni falsifiée ni antidatée, car lablockchain privée, les incitations sont plutôt liées à la gouvernance est copiée sur l’ensemble des nœuds du réseau. de la blockchain (nous proposons infra une analyse éco- Nous discuterons infra les éléments disruptifs de la nomique des différents types de blockchain). blockchain. En effet, il ne s’agit pas seulement d’un ou- Quelles sont les autres raisons pour lesquelles un éco- til permettant de générer de la confiance en permettant nomiste devrait s’intéresser à la blockchain ? Il en existe de stocker des données sécurisées. Si les banques s’in- au moins trois (que nous détaillerons dans la suite de cet téressent beaucoup à la blockchain, c’est aussi parce article). qu’il est possible d’y inscrire des transactions, ce qui ne coûtera alors que quelques centimes ‒ contre quelques Premièrement, les blockchains offrent une perspective euros actuellement. La blockchain permet ainsi d’attester intéressante pour l’économie de la sécurité en créant un de manière irréfutable et datée le moment où a été effec- système décentralisé d’incitations à sécuriser un système tuée une transaction : il s’agit d’une technologie d’horo- informatique (nous présenterons les éléments d’analyse datage généralisée. Un tel registre peut également servir économique infra). à référencer des titres de propriété intellectuelle ou des Deuxièmement, les blockchains et les smart contracts données cadastrales. Certaines blockchains, comme la permettent de mettre en relation des agents de manière blockchain Ethereum, permettent d’exécuter un code sur décentralisée, redéfinissant ainsi la notion d’entreprise et les éléments de la blockchain. Ces codes appelés smart la nature du travail. Ils ont également un impact sur l’or- contracts ouvrent de nouvelles perspectives à l’Internet ganisation des industries, puisque des agents peuvent des objets. partager des ressources informatiques, ce qui permet Il existe principalement deux types de blockchain : les de réduire les coûts fixes d’entrée dans des secteurs qui blockchains publiques et les blockchains privées. Elles nécessitent d’importants investissements dans des ser- diffèrent entre elles au travers des autorisations qui sont veurs et du matériel informatique. Les blockchains repré- accordées aux nœuds du réseau. Dans le cas d’une sentent aussi un contrepoids aux tendances centrifuges blockchain publique, tous les nœuds sont autorisés à des plateformes à plusieurs versants concentrant le pou-

10 RÉALITÉS INDUSTRIELLES - AOÛT 2017 la liquéfactiondumondephysique. nérale oulorsd’électionspolitiques. pour garantirdesdroits de votelorsd’uneassembléegé triple Gàquadrupleetbloque toutenouvelledemande vente decréditsaabaissésanote personnelledecrédit pendant, lerobot l’informeégalementquelasociété de souhaite faire appelàunmicrocrédit entempsréel.Ce cruter lesrobots nettoyeurs.Commeilestsanslesou, il l’informe qu’il a une dette à éponger avant de pouvoir re- y reviendrons possèdent des bitcoins et ceux qui les acceptent (nous de réseauxpositivesdirectes etindirectes entre ceuxqui automatisé des robots nettoyeurs.Tout leservicedeconciergerie est vice d’entretien del’immeublepourquecelui-ciluienvoie une visiteetsouhaitefaire leménage.Ilappelleser télépathes, habitedansunappartementloué.Il lip K.Dick(1969),JoeChip,spécialistedelatraquedes Un premier exemple,celuid’Ubik. les rémunérationsliées. tés surlablockchain,permettront devaliderdestâcheset Les Les smartcontracts La L’ ritent d’ numérique permettantunhorodatage. Trois aspectsmé- va bien au-delà de son utilisation comme simple registre riques oufacilementnumérisables.Maislablockchain La de lablockchain Quels sontlesélémentsdisruptifs rait nécessiterplusieursdécennies. dont la diffusion complète dans le tissu économique pour ou si,aucontraire, ils’agitd’uneinnovationtransformative ment disruptivepourconnaître unediffusion très rapide ticle. Ils’agitdesavoirsicettetechnologieestsuffisam d’un débatquenousprésenterons danslasuitedel’ar dans l’économie.Cettequestionfaitactuellementl’objet nologique quipeutsediffuser plusoumoinsrapidement Ensuite, lablockchainestégalementuneinnovationtech ser lavaleuréconomiquedubitcoin. autres problèmes soulevésparcelle-ciseposent dubitcoin,carles détour importantparlagouvernance la demandedecettecrypto-monnaie.Nousferons un dans unpremier temps,demieuxcomprendre l’offre et d’une Nous proposerons deretenir lebitcoincommeobjet reviendrons). voir demarché(nousy decertainsacteursl’Internet possibles des également être assimilés à des droits de vote. La valeur correspondre àdelacrypto-monnaie,maisilspeuvent moyen del’émissionjetons( économie destokens blockchain s’appliquebiensûrauxproduits numé blockchain rémunère le travail de sécurisation smart contractssontdesboutsdecode,qui,exécu- tokens augmenteaveclenombre deleursutilisations étude decasprésentée blockchains. Nousserons alorsenmesure d’analy être soulignés

: ainsi,p

: l e robot (oule infra). Lesjetonspeuvent également servir ar exemple, il existe des externalités ar exemple,ilexistedesexternalités

: les

? tokens, les chatbot, dirait-onaujourd’hui) infra. Ils’agirapournous, tokens). Ceux-cipeuvent Danslelivre dePhi smart contracts également aux attend et au ------

un numéro desérieoule et àdescapteurs.Ilpeuts’agir, parexemple,detracer techniques d’empreinte, dereconnaissance numérique fier despersonnesetproduits physiquesgrâceàdes La Une liquéfactiondumondephysique porte sousconditiondepaiement. qui réfléchitàunesolutionpermettantdedéverrouiller une d’Ubik estactuellement en développement chez Slock.it, par JasonLanier(2013).L’idée delaporteconnectée tive au univers économiqueaétéprésentécommeunealterna crotransaction entempsréel(ici,l’empruntbancaire). Cet Il s’agit d’une économie du micropaiement et de la mi- l’ouverture delaporteet5 également automatiséet10 la porte).Illeurpropose uncafé,maisleréfrigérateurest ses invités(quifinalementpaienteux-mêmespourouvrir voir ouvrir la porte de sonappartement pour faire entrer cafetière enmarche, maisilluimanque5 de crédit.Ilutiliseunepièce10 données etd’unepermission pourenlire certaines des l’on aitounonbesoind’unepermission pouryécrire des Il est important de distinguer les Les permissionsd’écriture etdelecture deréseau. d’excluabilité, ainsiqued’externalités des permissionsdelecture etd’ nomiques. Ilestintéressant delesanalyserenfonction Les des blockchains Les propriétés économiques L’exemple d’un mettent de détecter des événements réels. Il des tâches grâce tique conditionnelledistribuée.Ledaemonauto-exécute telligence artificielle, maisbiend’uneexécution automa véhicule autoguidétueur…Ilnes’agitpasvraimentd’in- pour rendre l’ en améliorantlatraçabilitédesproduits etdesservices converger lemondephysiqueavecnumérique sique dans la chaîne de production. Ces technologies font trées danslablockchain. son diamètre, son poids, etc.) sont également enregis- diamant. Lesmétadonnéesdechaquediamant(sataille, à unsystèmedepasseportnumériqueattribuéchaque du diamant qui permet de tracer les transactions grâce L’exemple d’Everledger. d’événements. pourvérifierlesséquences lement lesnewssurInternet des objetsconnectés orchestre aprèssamortdesexécutionsautomatiquessur programmeur dejeuxvidéo degénie,MatthewSobol,qui micropaiement. DanielSuarez (2006)relate l’histoire d’un du prototype d’un tâches lorsque certains événements se produisent. Il s’agit informatique quirésideenmémoire etquiexécutedes blockchain permetégalementdetraceretd’authenti blockchains ontdifférentes caractéristiqueséco copyright permettantderémunérer lescréateurs RÉALITÉS INDUSTRIELLES - AOÛT 2017 économie plus« daemon. smart contract, mais sans la dimension à des capteurs physiques qui lui per

: maisonpiégée,porteélectrifiée, Everledger estune Un cents pourobtenirdelacrème. «

passeport cents sontnécessaires pour

daemon estunprogramme liquide blockchains selonque écriture, derivalitéet cents pourmettre la

» .

» d’unobjetphy cents pourpou- «

blockchain suit

» éga

11 ------

Patrick WAELBROECK BLOCKCHAINS LES

Figure 1 : Les spécifications quantitatives et qualitatives d’un diamant taillé répertorié dans lablockchain Everledger. Source : https://www.altoros.com/blog/a-close-look-at-everledger-how-blockchain-secures-luxury-goods/ (consulté le 17 mai 2017).

données. Les quatre configurations des permissions pos- elles sont également en train d’être développées. Comme sibles sont représentées dans le Tableau 1 ci-dessous. exemple de blockchains sans permission d’écriture, mais avec permission de lecture, on peut penser à certaines blockchains gouvernementales, telles que des registres cadastraux. Ainsi, l’État américain du Delaware développe actuellement une initiative avec la start-up Sym- biont.io pour automatiser son processus d’Initial Public Tableau 1 : Blockchains avec ou sans permission de lecture et/ ou d’écriture. Offering (IPO) (introductions en bourse) grâce aux smart contracts. En ce qui concerne les blockchains sans per- mission d’écriture, mais avec permission de lecture, on Deux configurations sont généralement discutées par les peut penser également aux blockchains de compagnies experts du domaine. d’assurance qui monitorent les événements grâce à des Premièrement, les blockchains privées nécessitent à objets connectés et qui déclenchent des remboursements la fois une permission pour lire les données stockées automatiques grâce aux smart contracts, si les conditions et une permission pour y écrire. Elles se développent sont satisfaites. très rapidement, car leur gouvernance est aisée et la confidentialité des données y est relativement garantie, Rivalité et excluabilité puisqu’un nombre limité d’acteurs peuvent y accéder. On considère qu’en général, les biens économiques pré- Ce nombre limité d’acteurs permet également de déter- sentent deux caractéristiques : leur rivalité et leur exclua- miner facilement les responsabilités en cas de problème. bilité. Les données stockées dans une blockchain restent Ce sont typiquement les blockchains correspondant à un non rivales. En revanche, le mode de gouvernance de usage spécifique, comme la blockchain Everledger (que la blockchain permet, dans certains cas, de priver cer- nous avons citée supra). tains utilisateurs du droit de lecture et/ou d’écriture des données. On est donc soit dans le cas de biens non rivaux À l’opposé, les blockchains publiques sont ouvertes à et excluables, à savoir des biens de clubs, ou dans le cas tous, ce qui pose des problèmes de gouvernance et de de biens non rivaux et non excluables, c’est-à-dire des responsabilité. Ce sont les premières blockchains de biens collectifs. crypto-monnaies, telles que le bitcoin et l’éther. La confi- dentialité de leurs données est garantie par l’utilisation de Considérons maintenant les jetons générés par la pseudonymes. Néanmoins, toutes les transactions cor- blockchain. Ces jetons sont des biens rivaux, une seule respondant à un pseudonyme sont visibles par tous et personne pouvant utiliser un jeton donné. En revanche, peuvent être explorées grâce à des outils de recherche, on peut empêcher certaines personnes d’y accéder tels que blockchain.info. Les deux autres configurations (blockchain privée), auquel cas l’on a affaire à un bien pri- de permission sont beaucoup moins répandues, mais vé. Si tout le monde peut accéder à la ressource, comme

12 RÉALITÉS INDUSTRIELLES - AOÛT 2017 dans le cas des blockchains publiques, on est en pré- d’agents se rencontrent. Sur ce type de marché, il existe sence de biens communs. des externalités de réseau indirectes, souvent positives : la valeur du service proposé par la plateforme pour un Externalités négatives et externalités positives groupe d’agents augmente avec le nombre des agents de liées aux investissements en minage l’autre groupe. Ces marchés sont typiquement très forte- Dans le cas des blockchains nécessitant un minage ment concentrés dans l’économie numérique. On pense pour valider de nouveaux blocs, il existe deux types à des plateformes telles que YouTube, Google, Face- d’externalités de réseau directes. book, eBay, etc. Il est intéressant de souligner que les Premièrement, il existe des externalités de réseau posi- blockchains publiques ne sont pas centralisées, elles sont tives liées à la sécurisation de la blockchain. Ces externa- au contraire fortement décentralisées (nous reviendrons lités de réseau positives surviennent lorsque la valeur du sur ce point infra). produit ou du service augmente avec le nombre d’utilisa- teurs. Par exemple, la valeur d’un certain type de logiciel Les différences entre blockchains privées et Patrick WAELBROECK augmente avec le nombre de ses utilisateurs, car il est blockchains publiques Comparons maintenant les avantages et les inconvénients plus facile d’échanger des fichiers avec des amis,avec des blockchains privées à ceux des blockchains pu- des collègues et avec d’autres contacts. Dans le cas de la blockchain, chaque nœud supplémentaire en renforce bliques. Si la blockchain publique représente une solution la sécurité, car il est plus difficile de mener des attaques de confiance décentralisée pour beaucoup, lablockchain de type 51 % ou de deviner le gagnant du processus de privée peut être complètement centralisée entre un petit minage (attaques DOS – Denial Of Service) (nous dévelop- nombre d’acteurs, prenant le contrepied du rêve libertaire perons ce point infra). de la blockchain publique. Il est donc important de distin- guer ces deux types de blockchain, qui diffèrent énormé- Cependant, il existe aussi une externalité négative : ment sur le plan de la gouvernance. chaque mineur, lorsqu’il investit dans du nouveau ma- tériel, augmente son revenu marginal, mais il augmente L’une des différences majeures entre blockchain privée et aussi le coût global du minage, car la difficulté augmente blockchain publique est liée à la confidentialité des smart avec le nombre des mineurs et avec leurs capacités de contracts, des transactions et des données. calcul (hash-power). Par exemple, pour le réseau bitcoin, Comme nous l’avons souligné précédemment, il est rela- la difficulté du problème de cryptographie à résoudre est tivement facile de garantir la confidentialité des données validée par un consensus de proof-of-work qui augmente stockées dans des blockchains privées, puisque seul un avec le hash-power global du réseau. Il y a donc un risque nombre limité d’acteurs peut y avoir accès, ce qui ex- de surinvestissement dans la capacité de minage, car les plique leur développement rapide. mineurs individuels ne prennent pas en compte l’effet né- gatif sur l’ensemble du réseau. Les données stockées dans les blockchains publiques sont au contraire accessibles à tous, puisqu’il s’agit de Il est important de souligner qu’augmenter la difficulté du construire un registre public décentralisé. Cela dit, il est minage réduit les incitations à miner et augmente le temps possible d’obtenir certaines formes de confidentialité de vérification, et donc l’efficacité même de la blockchain. dans les blockchains publiques qui utilisent des pseudo- Ce mécanisme rappelle la tragédie des communs dont nymes (c’est le cas pour le réseau bitcoin). Par ailleurs, les ressources partagées (le hash-power) dépérissent certaines solutions techniques sont développées sur des et ne sont entretenues que par une poignée de fermes blockchains publiques pour protéger les données sen- et de pools, annulant de ce fait le principe même de la sibles. Ainsi, le projet Enigma du MIT (Massachusetts Ins- blockchain publique, qui se veut décentralisée. Il y a donc titute of Technology) propose une blockchain de données un risque que les capacités de minage soient fortement de santé dans laquelle un nœud du réseau ne peut accé- concentrées entre les mains d’un petit nombre d’acteurs, der à l’ensemble des données en utilisant une infrastruc- rendant caduc le principe même de la blockchain. ture Secure Multiplatform Computation : ces données Les blockchains privées résolvent les externalités né- sont réparties sur les différents nœuds du réseau et ne gatives de minage, au risque de créer une tragédie des peuvent pas être entièrement révélées dans leur intégrali- anti-communs, qui traduit l’idée qu’il n’y aurait plus de té lors d’une requête. D’autres initiatives sont basées sur ressources communes, mais uniquement des ressources une technique de zero knowledge proof qui permet de vé- privées protégées par le droit de la propriété privée. rifier la validité de transactions dont les métadonnées sont cryptées. Les externalités de réseau indirectes Les blockchains privées et les blockchains publiques dif- Les blockchains mettent souvent en relation plusieurs fèrent également sur deux autres dimensions : l’efficacité groupes d’agents. C’est le cas des crypto-monnaies, de la preuve et la gouvernance. qui apparient acheteurs et commerçants, ainsi que des plateformes mettant en relation emprunteurs et prêteurs, Premièrement, le passage à l’échelle est difficile sur une ou encore vendeurs et acheteurs de diamants (pour re- blockchain publique utilisant un consensus basé sur le prendre l’exemple d’Everledger). Ces différents types de proof-of-work (comme celui utilisé par le réseau bitcoin), marché partagent la caractéristique des marchés à plu- puisque celui-ci demande un hash-power qui croît avec sieurs versants dans lesquels deux ou plusieurs groupes la taille du réseau et nécessite plusieurs validations avant

RÉALITÉS INDUSTRIELLES - AOÛT 2017 13 l’ajout d’un nouveau bloc, ce qui peut prendre une heure. la société. Il y aura donc sous-investissement de la part D’autres types de consensus sont étudiés, comme le du secteur privé. De plus, dans un écosystème de socié- proof-of-stake, sur le réseau Ethereum. Les blockchains tés partageant des données, les membres individuels bé- privées utilisent des consensus qui permettent d’écrire néficient des efforts des autres membres qui sécurisent le un très grand nombre d’informations à la minute, comme système. Dans l’ensemble de l’écosystème, les données dans le cas d’un consensus basé sur la delegated proof- seront donc faiblement protégées. of-stake. Les externalités des réseaux Deuxièmement, la gouvernance d’une blockchain pu- Moore et Anderson (2012) étudient l’effet des externalités BLOCKCHAINS blique nécessite un accord de l’ensemble des nœuds du du réseau sur le niveau de sécurité mis en œuvre par les réseau pour valider un changement majeur du protocole fabricants de logiciels. Il est important pour une entreprise de validation des données (nous développerons ce point

LES qui veut dominer un marché grâce à de fortes externali- important dans la suite de cet article). Une décision peut tés de réseau positives d’atteindre rapidement la masse être prise par un très petit nombre de nœuds, dans le cas critique. Dans ce contexte, il existe très peu d’incitations d’une blockchain privée. à consacrer du temps et des efforts à la sécurisation des Enfin, se pose la question ouverte de la responsabilité. données personnelles. Au contraire, il est plus profitable Les spécialistes de la blockchain en France considèrent de laisser d’autres trouver des bugs et des trous de sécu- qu’il est beaucoup plus facile d’établir les responsabilités rité, puis de résoudre ces problèmes au moyen de mises dans le cas d’une blockchain privée (en particulier si les à jour et de correctifs logiciels. contrats ressortissent d’un même droit national). Dans le cas d’une blockchain publique internationale, cette ques- Les modèles d’affaires basés sur des échanges de tion fait l’objet d’analyses légales. données Lorsque les entreprises développent des stratégies com- merciales basées sur la publicité, elles génèrent des reve- nus en vendant les données de leurs clients à des tiers. Ces entreprises sont incitées à rédiger des conditions de service très générales pour pouvoir utiliser (et réutili- ser) de manière exhaustive les données de leurs clients. Lorsque les données personnelles sont transférées à des tiers, il est vraiment difficile pour le client de déterminer comment ses données sont utilisées, stockées et sécuri- Blockchains et économie sées. Les ventes aux enchères en temps réel de données de la sécurité sur les ad exchanges exacerbent ces problèmes, car les données personnelles disponibles dans les cookies sont Nous allons étudier maintenant les facteurs qui peuvent transmises et appariées par d’autres plateformes ou/et influencer les décisions des entreprises en matière de des sociétés tierces. sécurisation de leur infrastructure informatique. Nous montrerons dans un premier temps que les forces éco- Les solutions apportées par la blockchain nomiques poussent les entreprises à sous-investir en la La blockchain apporte des solutions aux problèmes de matière. Nous analyserons ensuite en quoi la blockchain l’économie de la sécurité en incitant explicitement à la permet d’apporter des solutions aux enjeux économiques sécurisation. Dans le cas de la proof-of-work du réseau de la sécurité informatique. bitcoin, les incitations sont directement monétaires sous la forme de gains en crypto-monnaie. Dans le cas du Prenons l’exemple des données de clients. Tout d’abord, proof-of-stake, la sécurisation permet de s’engager da- il existe des externalités négatives associées au manque vantage dans la gouvernance de la blockchain et d’obtenir de protection des données qui ne sont pas compensées des parts dans les droits de vote. La gouvernance des par les mécanismes du marché. Cela peut conduire à blockchains permet également aux nœuds du réseau de des situations dans lesquelles les données des clients se coordonner afin de contrer des attaques (voir ÖHMEB sont exposées à des fuites, à des fraudes ou à des vols. et al., 2015). Ensuite, les entreprises développent des stratégies leur permettant d’atteindre rapidement une masse critique, au Malgré ces objectifs atteints en termes d’incitations, l’al- détriment de leur infrastructure de données. Enfin, l’asy- gorithme de hash du bitcoin est basé sur une technologie métrie de l’information par rapport au niveau de sécurité SHA-256 (Secure Hash Algorithm) qui risque de devenir de l’infrastructure de données permet aux entreprises de obsolète. Par ailleurs, contrairement à la terminologie uti- partager les données personnelles de leurs clients avec lisée, les smart contracts ne sont que des bouts de code, des tiers qui ne sont pas forcément inciter à les protéger. qui peuvent contenir des bugs, comme tout programme informatique. On peut mentionner à cet égard le smart Les biens publics contract DAO, sur le réseau Ethereum, qui contenait un Les biens publics sont non rivaux et non excluables. Ces bug qui a permis à un groupe de hackers de subtiliser deux caractéristiques impliquent qu’un seul agent ne peut 50 millions de dollars. Enfin, les données sont protégées pas capturer le surplus total qu’il crée pour l’ensemble de par une clé privée qui, si elle est perdue, empêche l’ac-

14 RÉALITÉS INDUSTRIELLES - AOÛT 2017 cès aux données stockées, mais qui, si elle est extorquée, Décentralisation des marchés compromet la sécurité des données. Enfin, la blockchain, à travers la décentralisation des tâches et du travail, est à contre-courant de plateformes Blockchains, nature de la firme telles qu’Uber ou Airbnb. Reprenons l’exemple d’Ubik et et économie industrielle de la porte intelligente : de fait, tout objet doté d’un verrou intelligent permet, par exemple, d’automatiser une loca- La blockchain n’a pas seulement un impact sur l’économie tion, de sécuriser des armes ou de gérer des coffres-forts. de la sécurité. Elle peut remettre en question la définition Cependant, même si certains observateurs avancent même de l’entreprise, du travail et de l’organisation des l’idée que la blockchain pourrait finir par « ubériser Uber », industries numériques. Chaque industrie du numérique rien n’est moins sûr. En effet, Uber pourrait également est aujourd’hui dominée par une entreprise en situation développer sa propre blockchain pour automatiser ses de quasi-monopole. Cette situation résulte principalement contrats avec les chauffeurs. De la même manière, Airbnb de deux forces économiques : premièrement, les investis- pourrait développer sa blockchain pour automatiser le

sements réalisés par les entreprises en place dans le ma- Patrick WAELBROECK paiement des locations et de la conciergerie. tériel et l’infrastructure génèrent des coûts fixes de pro- duction et d’entrée sur le marché qui créent eux-mêmes des rendements d’échelle croissants ; deuxièmement, les Étude de cas : l’exemple externalités de réseau positives directes et indirectes pré- emblématique du bitcoin sentes sur les plateformes à plusieurs versants créent une Le réseau bitcoin est le premier réseau blockchain public force centrifuge générant un « effet boule de neige ». Ces à s’être développé de manière massive. On comptait, en deux forces sont remises en question par la blockchain. mai 2017, près de 7 000 nœuds sur ce réseau. Chacun de ces nœuds peut cacher des pools (des ressources par- Smart contracts et Dencentralized Autonomous tagées) et des fermes de plusieurs milliers d’unités ASIC Organizations (Application Specific Integrated Circuit) développées pour La blockchain permet un système de vote décentralisé. miner les blocs. Les principaux pools et fermes sont loca- Cela peut remettre en question le rôle même des struc- lisés en Chine. tures hiérarchiques, dans lesquelles les décisions des tra- vailleurs se situant au bas de l’échelle hiérarchique sont Le consensus basé sur le proof-of-work prévoit une aug- déléguées à un supérieur, en remontant successivement mentation de la difficulté du problème cryptologique à ré- jusqu’au PDG. Grâce au système de vote permis par la soudre en fonction du hash-power global du réseau. Ainsi blockchain, tous ces travailleurs pourraient, en principe, se pose, dans un premier temps, la question du coût de prendre eux-mêmes les décisions stratégiques. En pous- la blockchain publique. Le second point que nous abor- sant le raisonnement à l’extrême, on pourrait même se derons sera celui de la gouvernance. Enfin, nous termine- passer de PDG... rons sur la valeur économique du bitcoin. Il est souvent accepté, après les travaux de R. Coase (1937), que la taille de l’entreprise est déterminée par Le coût de la blockchain bitcoin les coûts de transaction pour effectuer une tâche en in- L’électricité représente la principale composante (entre terne ou en externe. La blockchain permet d’étendre les 90 % et 95 %) du coût total d’une ferme de minage. relations contractuelles à des fournisseurs et à des tra- En 2015, Böhme et al (2015) évaluaient la consommation vailleurs à plus faible coût. En poussant le raisonnement du réseau bitcoin à plus de 173 mégawatts d’électricité plus loin, la blockchain a deux conséquences sur l’entre- de manière continue. Cela représentait environ 20 % de prise et le travail salarié. Premièrement, la notion d’entre- la production d’une centrale nucléaire et un montant de prise est elle-même menacée : une industrie serait alors 178 millions de dollars annuellement (au prix de l’électrici- organisée autour d’une blockchain et de smart contracts té résidentielle aux États-Unis). Ce montant peut paraître conclus entre différentes unités de tailles relativement pe- important, mais Pierre Noizat estime que ce n’est pas tites. Deuxièmement, le travail salarié serait également plus que le coût annuel en électricité d’un réseau de DAB remplacé par du travail indépendant. Cette tendance est (distributeurs automatiques de billets) mondial, évalué à déjà visible sur des plateformes centralisées comme Uber, 400 mégawatts (http://e-ducat.fr/2015-11-28-cop21-et- mais elle n’est pas contredite par l’avènement de solu- blockchain/). tions décentralisées comme les blockchains. La gouvernance Entrée sur le marché et contestabilité La question de la gouvernance est cruciale pour com- Si les coûts fixes liés à l’infrastructure informatique et ma- prendre le futur des crypto-monnaies. En effet, en cas de térielle découragent l’entrée sur le marché, la blockchain désaccord sur l’évolution du protocole de communication, permet à des agents indépendants de mettre leurs res- le réseau risque de se diviser en plusieurs réseaux (hard sources en commun pour exécuter des tâches automati- fork) avec des monnaies incompatibles entre elles. La sées. Les marchés redeviennent contestables et l’entrée question la plus importante est liée au choix de la règle de nouveaux consortiums pourrait représenter un défi de consensus pour la validation de nouveaux blocs. Il faut pour les entreprises existantes (même pour celles dispo- parvenir à un consensus sur le consensus, ce que la tech- sant d’un quasi-monopole). nologie seule ne semble pas pouvoir fournir.

RÉALITÉS INDUSTRIELLES - AOÛT 2017 15 BLOCKCHAINS LES

Figure 2 : Les partenaires blockchain du bitcoin. Source : blockchain.info (consultée le 22 mai 2017).

Figure 3 : Les principaux codes régissant le bitcoin et leurs développeurs (en mai 2015). Source : WALPORT M. (2016).

16 RÉALITÉS INDUSTRIELLES - AOÛT 2017 Il faut noter que la répartition des pools indique clairement Les externalités de réseau liées à la sécurité que le hash-power est concentré entre les mains d’une Premièrement, le niveau de sécurité augmente avec le dizaine de pools, qui ont donc un pouvoir important lors nombre des nœuds du réseau, car il faut d’autant plus de de processus de décision en matière de changement des puissance de calcul pour compromettre la sécurité de la règles du protocole. Un protocole est l’équivalent de la blockchain (à travers une attaque 51 %, double spending grammaire pour une langue parlée. On peut ajouter ou re- ou DOS). Par ailleurs, une attaque DOS est d’autant plus tirer des règles, mais c’est au risque que les personnes ne difficile à mener qu’il est difficile de deviner qui en est le se comprennent plus. Dans le cas du réseau bitcoin, on bénéficiaire. Il existe donc des externalités de réseaux po- parle de soft fork et de hard fork lorsque l’on veut qualifier sitives : la valeur du bitcoin augmente avec le nombre des ces changements dans les règles. nœuds participant au réseau. Il existe plusieurs implémentations du protocole bitcoin : Externalités de réseau indirectes positives liées au bitcoin Core, Libbitcoin, bitcoin XT, bitcoin Classic. Toutes moyen de paiement ces implémentations sont globalement gouvernées par les Le bitcoin est un moyen de paiement, au même titre que Patrick WAELBROECK core-développeurs. Par exemple, Bitcoin Core est gou- les espèces, les cartes bancaires ou les cartes Visa/Mas- vernée par un processus méritocratique d’évaluation par tercard/American Express. Le bitcoin peut donc être ap- les pairs à travers un processus Bitcoin Improvement Pro- préhendé par la théorie des marchés à plusieurs versants posal modéré par Wladimir Van Der Laan, lequel contribue qui modélise des situations dans lesquelles deux groupes de manière significative au codage du protocole bitcoin. d’agents économiques bénéficient d’externalités croi- La gouvernance du protocole bitcoin est, quant à elle, sées. En effet, quand un consommateur choisit un moyen décidée par les nœuds qui décident d’adopter tel ou tel de paiement, il sera d’autant plus satisfait que ce dernier changement d’implémentation. Le changement de proto- est accepté par le commerçant avec lequel il effectue une cole peut toucher les quatre couches du réseau bitcoin : la transaction. À l’inverse, pour un marchand, il est d’autant règle de consensus, la couche P2P, l’API (Application Pro- plus intéressant de proposer un moyen de paiement qu’il gramming Interface) et les applications (par souci de briè- y a de clients qui le possèdent. Dès lors, la dynamique veté, nous ne discuterons que de la règle de consensus). des marchés à plusieurs versants se traduit par des cy- cles vertueux qui peuvent connaître une phase d’amorce Pour ajouter une règle soft fork, une majorité de 95 % du lente suivie d’une phase de déploiement très rapide. Si le hash-power est nécessaire ; les anciens blocs deviennent bitcoin devait connaître une telle phase, sa valeur entrerait invalides et les nœuds non upgradés perdent en sécuri- dans une phase d’accélération. té et en efficacité (hash-power). Pour forcer les mineurs à respecter les utilisateurs, une soft fork pourrait rendre Par ailleurs, la commission payée par le consommateur le matériel de minage obsolète à travers un nouvel algo- ou le commerçant n’est pas contrôlée par une plateforme rithme de minage. Pour retirer une règle hard fork, il est servant d’intermédiaire, mais par les mineurs (nous repre- nécessaire que tous les nœuds complets adoptent le nons ce point dans la section suivante). changement, sinon il y a un risque de voir le réseau bitcoin se diviser en deux réseaux non compatibles entre eux. L’émission de monnaie sur le marché primaire La création monétaire est divisée par 2 tous les 210 000 En conclusion, la technologie seule ne peut assurer la blocs pour arriver à un total de bitcoins en circulation gouvernance. Il s’agit d’une situation paradoxale, dans la (hormis ceux perdus) de 21 millions. Cette règle moné- mesure où la technologie permet la décentralisation des taire est contrôlée par le protocole bitcoin modifiable par vérifications et des exécutions automatiques, mais elle ne le consortium Bitcoin Foundation, comme nous l’avons peut en garantir la gouvernance. vu. La règle monétaire peut donc être modifiée pour ré- pondre à des conditions de marché fluctuantes, au risque La valeur du bitcoin d’un hard fork. Par ailleurs, à demande constante, cette Une crypto-monnaie n’a de valeur que si elle est considé- tendance à la baisse de l’offre de nouveaux bitcoins aug- rée comme une monnaie par l’ensemble des participants mente automatiquement le prix du bitcoin. À terme, l’offre au système monétaire. Elle nécessite donc d’être rare, au devenant inélastique, le prix du bitcoin (hors considéra- sens où elle ne peut pas être facilement copiée (problème tions spéculatives) est essentiellement déterminé par la équivalent à celui des faux billets, pour les monnaies tra- demande. ditionnelles). Cette propriété est satisfaite par le réseau blockchain, qui garantit l’absence de double dépense. En La demande de crypto-monnaie plus de cette valeur liée à l’acceptation, le bitcoin a de la La demande de crypto-monnaie est issue de plusieurs valeur au travers de différents mécanismes économiques préoccupations. Elle est également affectée par les incer- qui ne sont pas exclusivement monétaires. Nous les re- titudes pesant sur sa pérennité. grouperons à travers l’analyse de la demande et de l’offre Financial privacy de bitcoins. Nous commencerons par l’analyse des exter- nalités de réseau et nous conclurons par une remarque Les gouvernements limitent de plus en plus l’utilisation sur le rôle joué par les monnaies alternatives dans un sys- des espèces pour afficher leur lutte contre le blanchiment tème monétaire. d’argent et le développement des marchés au noir. Le

RÉALITÉS INDUSTRIELLES - AOÛT 2017 17 cash est le seul moyen de paiement 100 % anonyme. Le teurs pouvant entraîner une appréciation du bitcoin. bitcoin et les autres crypto-monnaies arrivent en deuxième position. En effet, le système de pseudonymat utilisé par Le bitcoin permet de discipliner les gouvernements le protocole bitcoin permet de masquer l’identité des Le bitcoin (il en va de même pour les autres crypto-mon- personnes effectuant des transactions. Ainsi, certaines naies) peut être considéré comme une monnaie alter- cryptomonnaies, comme le Zcash, masquent toutes les native non contrôlée par une banque centrale. Certains métadonnées d’une transaction. économistes, comme F. Hayek, considèrent que ces mon- naies alternatives qui concurrencent la monnaie officielle Pourquoi utiliser un moyen de paiement anonyme ? Il permettent de discipliner les gouvernements qui seraient BLOCKCHAINS existe de nombreuses raisons. Premièrement, l’utilisation tentés de financer leur dette par l’inflation. Dans ce cas de d’un moyen de paiement anonyme permet d’éviter de figure, les consommateurs et les investisseurs se détour- laisser des traces qui peuvent être utilisées à des fins de LES neraient de la monnaie officielle pour acheter la monnaie surveillance par l’État, les employeurs et certaines entre- alternative et créeraient ainsi une pression déflationniste prises (en particulier, les banques et les compagnies d’as- sur la monnaie officielle. surance). Ainsi, les entreprises et les banques pratiquent des stratégies de discrimination par les prix qui peuvent Perspectives économiques parfois se retourner contre les consommateurs. Laisser des traces par le paiement peut également pousser les en- La blockchain est inéluctable, car elle seule permettra le treprises à solliciter davantage les clients sur de nouvelles développement de l’Internet des objets. Cependant, la vi- offres commerciales et la diffusion de publicités ciblées tesse à laquelle cette transformation aura lieu est l’objet qui peuvent être considérées comme des nuisances par de débats entre spécialistes. Deux visions s’opposent : certains. Deuxièmement, payer avec un moyen de paie- la vision de ceux qui pensent que la technologie prendra ment anonyme limite également la sousveillance (ou sur- veillance inverse) par les proches. Ce sera le cas pour un paiement effectué à partir d’un compte commun. L’ano- nymat permet de limiter les externalités liées aux traces laissées lors d’un achat, il a donc une valeur économique. Le bitcoin, en permettant le pseudonymat, génère aussi de la valeur par ce biais. Le bitcoin fonctionne en périodes de crise et permet donc d’éviter le contrôle des capitaux Le bitcoin est apparu juste après la crise financière de 2008. Cette période a témoigné du pouvoir des gouver- nements et des banques centrales en matière de contrôle des retraits d’espèces et du capital en circulation. Il n’existe que très peu de moyens d’échapper à ces deux contraintes institutionnelles. Le bitcoin en est un. En effet, même si les retraits d’espèces sont interdits, les posses- seurs de bitcoins peuvent toujours payer en utilisant leur clé privée. Les risques Parmi les facteurs réduisant la demande de bitcoins, les risques liés à la réglementation et à la régulation res- sortent tout particulièrement. D’une part, un État pourrait demander à ce que soient déclarées les plus-values gé- nérées par l’achat et la vente de bitcoins. Par ailleurs, les bitcoins peuvent être utilisés dans des secteurs réglemen- tés (comme l’assurance ou la banque) et leur utilisation pourrait de ce fait également être réglementée. Enfin, il existe toujours le risque de perdre les données du disque dur sur lequel la clé privée est stockée, et donc de perdre les bitcoins associés, ou encore qu’un État impose son accès aux clés privées pour une question de sécurité.

La valeur du bitcoin sur le marché secondaire Figure 4 : Les quatre phases de l’adoption des technologies fon- Le bitcoin peut également être acheté et vendu sur une damentales : substitution, transformation, à des fins d’utilisation plateforme d’échanges. La valeur du bitcoin est alors plus individuelle, à des fins de localisation (exemples illustratifs d’ap- proche de celle d’un investissement financier dont les ac- plications et de serveurs). teurs anticipent les perspectives de gains et certains fac- Source : LANSITI et LAKHANI (2017).

18 RÉALITÉS INDUSTRIELLES - AOÛT 2017 des décennies pour se diffuser et se transformer dans le massivement, qu’une technologie à diffusion lente. Mais il tissu industriel, et la vision de ceux qui pensent qu’il s’agit reste des verrous, qu’il est nécessaire de faire sauter (que d’une technologie disruptive. nous présentons dans notre conclusion, ci-dessous).

La blockchain : est-elle transformative… Conclusion Lansiti et Lakhnani (2017) ont récemment suggéré que l’on pouvait établir un parallèle entre la diffusion d’une En conclusion, la blockchain est une technologie révolu- technologie transformative comme le protocole TCP/IP tionnaire qui n’est pas limitée exclusivement au bitcoin. et la diffusion de la blockchain. Dans les deux cas, cette Le développement d’un écosystème autour des objets diffusion s’effectue en quatre phases qui peuvent prendre connectés intelligents ne pourra sans doute pas se faire des décennies pour parvenir à la dernière, à savoir la sans la blockchain (sous une forme ou sous une autre). La phase transformative. blockchain ouvre les portes de la liquéfaction du monde physique, de l’économie de la micro-transaction en temps

… ou disruptive ? réel et du partage intelligent de bases de données. Ce- Patrick WAELBROECK Au contraire, les spécialistes d’IBM voient dans la pendant, un certain nombre de verrous doivent encore blockchain une technologie disruptive aux applications sauter. Premièrement, il s’agit d’établir clairement les multiples allant de la logistique aux transactions finan- responsabilités et le droit applicable aux blockchains pu- cières. bliques. Deuxièmement, il faudra garantir en Europe l’ap- plication de la protection des données personnelles (Ge- neral Data Protection Regulation – GDPR). Troisièmement, il faudra déterminer le statut fiscal et juridique des cryp- to-monnaies. Enfin, quatrièmement, il faudra réfléchir à la manière d’articuler les smart data issues des blockchains avec le principe de neutralité du Net en Europe. Bibliographie

BÖHME R., CHRISTIN N., EDELMAN B. & MOORE T. (2015), “Bitcoin: Economics, technology, and gover- nance”, The Journal of Economic Perspectives 29(2), pp. 213-238. BRODY P. & PURESWARAN V. (2014), Device democracy: Saving the future of the internet of things, IBM, Septem- ber. COASE R. H. (1937), The Nature of the Firm, Economica Figure 5 : Cinq facteurs de disruption (1 – contre la puissance 4(16), pp. 386-405. excessive des avoirs physiques ; 2 – en faveur de marchés plus liquides et transparents ; 3 – permettant une réévaluation dras- DICK P. K. (1969), Ubik, trad. Alain Domrémieux (1999), tique du crédit et du risque ; 4 – améliorant l’efficience opération- nelle ; et 5 – intégrant digitalement les chaînes de valeur) et leurs Éditions 10/18. effets en termes de liquéfaction du monde physique. LANIER J. (2013), Who Owns the Future?, Simon & Schus- Source : PURESWARAN et BRODY (2014). ter. Analyse LANSITI M. & LAKHANI K. R. (2017), The truth about En première analyse, le protocole TCP/IP est à la fois simi- blockchain, Harvard Business Review 95(1), pp. 119-127. laire à la blockchain d’un certain point de vue et différent MOORE T. & ANDERSON R. (2012), Internet security, The d’un autre. En effet, le protocole TCP/IP est un protocole Oxford Handbook of the Digital Economy, Oxford Univer- ouvert, tout comme l’est la blockchain publique. En re- sity Press. vanche, le protocole TCP/IP était au départ une affaire de spécialistes, alors que le bitcoin et la deuxième génération SUAREZ D. (2006), Daemon, Verdugo Press. de la blockchain ont été très rapidement adoptés par des WALPORT M. (2016), Distributed Ledger Technology: Be- millions d’utilisateurs. Au final, la blockchain représente yond Blockchain, UK Government Office for Science. plus une technologie disruptive vouée à être adoptée

RÉALITÉS INDUSTRIELLES - AOÛT 2017 19 La blockchain – Les défis de son implémentation

BLOCKCHAINS Par Ilarion PAVEL Ingénieur en chef des mines, Conseil général de l’économie, de l’industrie, de l’énergie et des technologies et Laboratoire de physique théorique de l’École normale supérieure LES

Nous passerons en revue dans cet article plusieurs des difficultés techniques et défis juridiques, sociétaux ou réglementaires rencontrés dans l’implémentation de la blockchain, et nous suggé- rerons quelques pistes de solutions.

Introduction paiement), blockchain 2.0 l’ensemble des applications financières et économiques autres que celles liées à la La blockchain est apparue en 2008 comme partie inté- monnaie (actions, obligations, contrats à terme, prêts, grante du bitcoin (1), crypto-monnaie et système de paie- hypothèques, propriété intellectuelle, contrats intelligents) ment (2) qui fonctionne sans autorité centrale sur un réseau et blockchain 3.0 d’autres applications en dehors des pair-à-pair, via des transactions cryptées. Toutes les tran- sphères financière et économique (administration, santé, sactions sont vérifiées par les nœuds du réseau et enre- science, culture, art). gistrées dans un registre public réputé infalsifiable appelé blockchain (3). Le bitcoin est actuellement la monnaie cryptographique la plus utilisée dans le monde, avec un volume de transactions Disposant de puissants moyens de calcul, certains nœuds en pleine croissance (5). Le bitcoin et ses alternatives (altcoin, du réseau qualifiés de « mineurs » vérifient, enregistrent altchain) vont probablement transformer le paysage finan- et sécurisent les transactions. Celles-ci sont groupées cier et économique, mais leur implémentation risque de se dans des blocs, qui seront ensuite « enchaînés » l’un à heurter à plusieurs difficultés techniques, ainsi qu’à des dé- la suite de l’autre pour former la blockchain. Le dernier fis de nature réglementaire, juridique et sociétale. bloc en date est ajouté au précédent (celui-ci étant dit « miné ») par le premier « mineur » qui réussit à résoudre Les difficultés techniques un problème cryptographique difficile appelé« preuve de travail ». Ce mineur reçoit alors une certaine somme de L’insuffisance de la capacité de transaction bitcoins en récompense de sa réussite, et le nouveau bloc La taille d’un bloc du bitcoin a été intentionnellement limi- se propage à l’ensemble des nœuds du réseau. tée à 1 Mo afin d’éviter des attaques du type « déni de ser- vice » : une personne mal intentionnée pourrait créer des Comme pour toute autre monnaie, on peut échanger des blocs de grande taille et les diffuser à travers le réseau afin bitcoins contre de la monnaie fiduciaire, des produits ou de provoquer des congestions, voire la paralysie du trafic. des services en effectuant des transactions électroniques au moyen d’un logiciel installé sur un ordinateur personnel Par ailleurs, le temps nécessaire pour miner un bloc a ou sur un terminal mobile, ou via une application Web (4). été fixé à environ 10 minutes. La diminution de ce laps Dès son lancement, le bitcoin a été imité par des systèmes de crypto-monnaies alternatives (altcoins) qui utilisent les mêmes techniques, mais avec diverses optimisations. De même, les techniques de la blockchain ont été utilisées, (1) NAKAMOTO (Satoshi), “Bitcoin: A Peer-to-Peer Electronic Cash System”, https ://bitcoin.org/bitcoin.pdf avec succès, pour mettre en œuvre des chaînes alterna- (2) Par abus de langage, on associe le terme « bitcoin » à la fois à tives (altchains) qui permettent des applications autres l'unité de valeur de monnaie électronique, à la technologie sous- que la monnaie électronique (gestion de ressources ou jacente et au réseau sur lequel cette dernière opère. contrats), élargissant ainsi la sphère de la blockchain, qui (3) De même, le terme « blockchain » est utilisé à la fois pour dési- gner le registre, la technologie ou le réseau. était à l’origine consacrée exclusivement aux transactions (4) Les aspects techniques de la technologie bitcoin sont bien plus financières. Il existe déjà quelques centaines d’altcoins et complexes. Il existe de nombreuses références : voir, par exemple, d’altchains, et ceux-ci sont en plein développement. ANTONOPOULOS (Andreas) (2015), Mastering Bitcoin, O’Reilly Me- dia. On appelle blockchain 1.0 tout ce qui concerne la mon- (5) Pour des statistiques concernant le bitcoin, voir https:// naie électronique et ses opérations (émission, transfert, blockchain.info/

20 RÉALITÉS INDUSTRIELLES - AOÛT 2017 de temps augmenterait la fréquence du phénomène dit l’évolution future des performances des ordinateurs et du de « fourche » (6). Or, plus un réseau présente des phéno- débit Internet permettra de faire face à l’augmentation de mènes de fourche, et plus il est vulnérable aux attaques, la taille des blockchains. notamment du type 51 % qui sera décrit plus bas. De plus, les utilisateurs peuvent choisir entre être un nœud Autre effet de l’augmentation de la taille du bloc et de la complet (contenant toute la blockchain, ceux-ci valident diminution du délai séparant deux blocs : l’augmentation les transactions et les blocs, et transmettent l’information du nombre des blocs « orphelins » (minés mais point atta- aux autres nœuds), ou être un client léger (ne téléchar- chés à la blockchain (7)). geant que les entêtes des blocs, ce qui lui permet d’avoir Ilarion PAVEL une taille 1 000 fois inférieure à celle du nœud complet La conséquence de ces limites (taille du bloc, temps entre – mais le client léger doit se reposer sur les nœuds com- deux blocs) est que le bitcoin peut supporter seulement plets pour effectuer une transaction). Par ailleurs, les utili- 7 transactions par seconde (tps), ce qui est bien plus sateurs peuvent choisir d’être clients Web : l’accès au ré- faible que d’autres réseaux comme celui de la carte Visa, seau bitcoin se fait alors à travers un navigateur connecté qui supporte 2 000 tps en moyenne, avec une capacité à un serveur-tiers de confiance. de surcharge ponctuelle pouvant aller jusqu’à 56 000 tps. À terme, avec l’accroissement du nombre des transac- Le manque de liquidité tions, le temps nécessaire à leur validation risque d’aug- Le bitcoin a été conçu pour être une monnaie dont la masse menter, ce qui augmentera les frais de transaction (8). monétaire maximale a été fixée à 21 millions d’unités. L’émission de monnaie se fait par la récompense attribuée Des solutions possibles sont l’augmentation de la taille au premier mineur ayant miné un nouveau bloc (15). Cette du bloc (la doubler, voire l’augmenter encore davantage), récompense, initialement de 50 bitcoins, est divisée par la réduction du temps entre deux blocs et la réduction un facteur deux tous les 210 000 blocs minés, soit environ du temps de latence (laquelle réduira le phénomène de tous les quatre ans. À l’horizon 2140, la récompense sera fourche (9)). Ainsi, l’altcoin Litecoin fonctionne avec un inférieure à la plus petite unité, le « satoshi », qui vaut temps entre deux blocs de 2,5 minutes, l’altchain Ethe- 10-8 bitcoins : il n’y aura alors plus aucune émission de reum avec 17 secondes. On peut envisager des solutions monnaie et les mineurs seront rémunérés exclusivement plus radicales, comme la reconception du protocole bit- par les frais des transactions. coin (10), mais cela demanderait un consensus entre les acteurs (notamment de la part des mineurs).

Enfin, une autre possibilité pourrait consister à construire (6) Cela se produit quand deux mineurs minent en même temps des piles protocolaires de niveau supérieur, au-dessus du deux blocs différents. En fonction des délais de propagation dans le protocole bitcoin, sous la forme de contrats intelligents. réseau (temps de latence), ces deux blocs peuvent arriver à certains Ces piles protocolaires permettraient des millions de tran- mineurs dans un ordre donné, et à d'autres mineurs dans l'ordre in- verse, ce qui a pour effet de scinder la blockchain en deux chaînes. sactions par seconde, grâce à des canaux de paiement En pratique, les deux communautés de mineurs continuent à miner dont seules l’ouverture et la fermeture seraient incluses des blocs pour allonger les deux chaînes jusqu'au moment où l’une dans la blockchain (comme c’est le cas dans les réseaux d'entre elles devient plus longue que l'autre : elle sera alors considé- Lightning (11) et TumbleBit (12)). rée comme la chaîne valide (et l’autre sera abandonnée). (7) Par exemple, deux blocs peuvent être minés l’un à la suite de l’autre dans la même chaîne, mais arriver dans l’ordre inverse dans Un temps de latence trop long un nœud de réseau (le deuxième bloc est alors appelé orphelin, il Le temps de latence est le temps nécessaire pour propa- est mis temporairement dans un pool dans l’attente de l’arrivée du ger un bloc à partir d'un nœud du réseau vers l’ensemble premier). (8) En général, l’utilisateur paie des frais pour chaque transaction, des utilisateurs : il est en moyenne de 12 secondes. Après ceux-ci vont au mineur ayant réussi à résoudre le bloc contenant 40 secondes, en moyenne 95 % des nœuds du réseau la transaction. Plus les frais sont élevés, plus la transaction a des reçoivent le bloc (13). C’est long par rapport au réseau Visa, chances d'être intégrée en priorité au bloc miné suivant. dont le temps de latence est de quelques secondes, et (9) CROMAN (Kyle) et al., “On Scaling Decentralized Blockchains”, http://fc16.ifca.ai/bitcoin/papers/CDE+16.pdf encore plus long si l’on envisage d’utiliser la blockchain (10) EYAL (Ittay) et al., “Bitcoin-NG: A Scalable Blockchain Protocol”, pour sécuriser les applications pour l’Internet des objets, https://arxiv.org/pdf/1510.02037.pdf qui sera composé d’objets communicants en interaction (11) POON (Joseph) & DRYJA (Thaddeus), “The Bitcoin Lightning permanente quasi instantanée. Network: Scalable Off-Chain Instant Payments”, https://lightning. network/lightning-network-paper.pdf La diminution du temps de latence nécessite également (12) HEILMAN (Ethan) et al., “TumbleBit: An Untrusted Bitcoin-Com- de modifier le protocole bitcoin ou d’ajouter des couches patible Anonymous Payment Hub”, https://eprint.iacr.org/2016/575. pdf protocolaires de niveau supérieur. (13) DECKER (Christian) & WATTENHOFER (Roger) (2013), “Infor- mation Propagation in the Bitcoin Network”, 13-th IEEE International La taille de la blockchain conference on Peer-to-Peer Computing, Trento, www.tik.ee.ethz.ch/ La taille de la blockchain du bitcoin est actuellement de file/49318d3f56c1d525aabf7fda78b23fc0/P2P2013_041.pdf 115 Go, elle est en croissance rapide : elle a augmenté de (14) Aujourd'hui, pour un nœud complet, on conseille 125 Go d’es- pace sur le disque dur, 2 Go de mémoire RAM et une connexion 50 Go sur les douze derniers mois. Charger la blockchain Internet d’au moins 400 kb/s, https://bitcoin.org/en/full-node sur un ordinateur demande actuellement plusieurs jours (15) La récompense attribuée au mineur ayant miné le bloc a été et suppose que l’on dispose de suffisamment de mémoire prévue dès la conception du bitcoin afin d’encourager les opéra- libre sur son disque dur (14). Il est cependant probable que tions de minage.

RÉALITÉS INDUSTRIELLES - AOÛT 2017 21 Selon certains économistes, une diminution de l’émis- Ce coût énergétique considérable doit être comparé aux sion monétaire pourrait créer un effet déflationniste. Les économies potentielles que les institutions financières porteurs de bitcoins seraient alors tentés d’utiliser cette pourraient réaliser en remplaçant leur système de monnaie comme valeur de trésorerie, plutôt que comme fonctionnement centralisé par le protocole blockchain. instrument d’échange. À cela s’ajoutent les problèmes Selon Santander InnoVentures, en 2022, la technologie des bitcoins stockés dans des portefeuilles perdus (clé blockchain pourrait réduire les coûts d’infrastructure des privée perdue) qui resteront dormants dans la blockchain. banques de 15 à 20 milliards de dollars par an (18). En conséquence, la valeur des bitcoins augmenterait, ce Une critique fondée formulée à l’encontre du protocole qui (à masse monétaire constante) diminuerait la liquidité BLOCKCHAINS bitcoin est le fait que l’algorithme de preuve de travail des transactions (surtout dans un environnement défla- ne sert qu’à assurer la sécurité du système et qu’il se- tionniste). rait donc plus intéressant de l’associer à la résolution LES On oppose à ces critiques le fait que la division du bit- d’un problème utile, comme cela a été fait dans le cas coin est très fine, la plus petite unité étant le« satoshi », des altcoins Primecoin (recherche de nombres premiers soit 10-8 bitcoin. En cas de déflation, la monnaie pourrait jumeaux et des chaînes de Cunningham), Curecoin (re- se décaler (d’une ou de deux décimales) vers des valeurs cherche de repliement de protéine) ou Gridcoin (grilles de plus faibles. De plus, il existe des altcoins d’une valeur calcul de recherche scientifique). inférieure (comme le Litecoin ou le Dogecoin) vers les- quels le bitcoin pourrait se rabattre pour compléter l’offre Les problèmes de sécurité d’échange et empêcher ainsi la déflation, ou encore des Le plus sérieux est l’attaque du type 51 % : un mineur ou altcoins comme Blackcoin, NXT, Peercoin ou VeriCoin, un groupe de mineurs mal intentionnés disposant d’une dont la masse monétaire est illimitée. grande capacité de calcul pourrait prendre le contrôle de la blockchain et utiliser celle-ci pour créer des « doubles La déflation a mauvaise réputation, car elle est associée dépenses ». Cela consiste à payer un produit, à entrer à l’effondrement brutal de la demande et peut conduire en sa possession, puis à créer intentionnellement une à une crise économique majeure. Actuellement, notre fourche, dont la nouvelle chaîne invalide la transaction et système financier dispose d’une monnaie fiduciaire utilise l’argent pour acheter un deuxième produit (double dont l’émission est pratiquement illimitée et, en cas de dépense). Si sa puissance de calcul dépasse 51 % de la déflation, une solution est ’augmenterd la masse moné- puissance totale des mineurs du réseau, un mineur mal taire en imprimant des billets afin de relancer la demande. intentionné aura la possibilité de miner des blocs dans la Dans le système du bitcoin, la déflation ne serait pas due nouvelle chaîne de manière à dépasser l’ancienne, qui, de à un effondrement brutal de la demande, mais à une ré- ce fait, sera invalidée. serve monétaire limitée et établie d’avance (toutefois, cette limite supérieure sera atteinte progressivement et ne Un mineur pourrait également effectuer une attaque de causera pas automatiquement de crise financière). déni de service contre d’autres participants du réseau bit- coin en invalidant leurs transactions. Il suffit d’identifier la La consommation d’électricité transaction correspondante, puis de re-miner le bloc qui Pour miner les blocs et ainsi valider les transactions, la contient, en prenant soin de l’en enlever préalablement. les mineurs doivent résoudre des problèmes cryptogra- La transaction restera en attente aussi longtemps que l’at- phiques difficiles, ce qui demande de grands volumes de taquant dominera le réseau des mineurs en puissance de calcul, et donc une consommation importante d’énergie calcul. (pour faire fonctionner les ordinateurs et les installations Selon certains modèles probabilistes, il ne serait même de refroidissement). pas nécessaire de disposer de 51 % de la puissance to- La difficulté du problème cryptographique à résoudre ne tale de calcul du réseau : 30 % suffiraient. Cependant, vu dépend pas du nombre et de la valeur des transactions, la puissance totale de calcul du réseau bitcoin, il serait mais de l’arrivée de nouveaux mineurs attirés par les pers- très difficile pour un mineur solitaire d’atteindre ce seuil pectives de gain financier et disposés à entrer sur ce mar- de 30 % – ce qui serait en revanche possible pour un pool ché concurrentiel. La rentabilité de leur activité dépend du de mineurs. Ce dernier serait géré par un chef de pool prix de l’électricité converti en bitcoins. qui construirait les blocs à miner, puis distribuerait ceux- ci entre les membres du pool pour effectuer l’opération Une étude a montré qu’en 2014, le réseau bitcoin de minage. Il aurait alors la possibilité d’exclure certaines consommait entre 0,1 et 10 GW (16). Actuellement, l’ASIC (Application-Specific Integrated Circuit) le plus performant du marché (AntMiner S9) consomme 1 300 W, pour une vi- tesse de hachage de 13 THash/s, soit 100 W par THash/s. L’ensemble des mineurs du réseau bitcoin effectuent en moyenne 4 millions de THash/s, ils consomment donc (16) J. O’DWYER (Karl) & MALONE (David), Bitcoin Mining and its 400 MW, ce qui représente la moitié de la puissance d’une Energy Footprint, ISSC 2014 / CIICT 2014, https://karlodwyer.gi- centrale nucléaire. En pratique, comme les mineurs uti- thub.io/publications/pdf/bitcoin_KJOD_2014.pdf lisent aussi des outils moins performants, cette consom- (17) http://digiconomist.net/bitcoin-energy-consumption mation serait 3 à 4 fois plus importante que la valeur pré- (18) The Fintech 2.0 Paper: rebooting financial services, www.finex- tra.com/finextra-downloads/newsdocs/the fintech 2 0 paper.pdf cédemment calculée (17).

22 RÉALITÉS INDUSTRIELLES - AOÛT 2017 transactions et d’inclure des doubles dépenses à l’insu blockchain. Il est aussi recommandé d’utiliser plusieurs des autres membres du pool. portefeuilles, d’effectuer les transactions de faibles mon- tants à partir d’un terminal mobile (client léger), moins sé- Un moyen de défense contre ces attaques pourrait curisé, d’effectuer celles de montants élevés à partir d’un consister à modifier le protocole de la preuve de travail. Si ordinateur fixe (client complet). Le fait d’utiliser des tran- le protocole nécessitait des capacités plus importantes en sactions multi-signatures à partir de plusieurs clés privées termes de puissance processeur ou de mémoire vive, cela réparties sur plusieurs supports différents (ordinateur de rendrait plus chers les outils de calcul, alors qu’actuelle-

bureau, smartphone) augmente également la sécurité. Ilarion PAVEL ment le prix des ASIC spécialisés est abordable. Il peut y avoir par ailleurs des attaques malveillantes dont La vie privée le but n’est pas de faire des profits financiers frauduleux, On entend souvent affirmer que le bitcoin est une mon- mais de perturber, voire de paralyser le réseau bitcoin en naie anonyme, car on peut effectuer des transactions compromettant massivement les opérations de minage sans donner d’informations personnelles. Effectivement, avec du déni de service. Une telle attaque nécessiterait de les transactions contiennent les adresses des parties im- grands moyens (lesquels ne seraient probablement qu’à pliquées, qui sont générées à partir des clés publiques, la portée d’un État). lesquelles sont elles-mêmes générées à partir d’une clé privée. À partir d’une adresse, on peut connaître, via la Néanmoins, au fur et à mesure que la puissance totale de blockchain, toutes les transactions dans lesquelles elle a calcul du réseau bitcoin augmentera, les attaques seront été utilisée, mais on ne connaîtra pas l’identité de la per- de plus en plus difficiles à mettre en œuvre. sonne. Cependant, si, par un malheureux concours de cir- Défis juridiques, sociétaux constances, l’identité de la personne liée à cette adresse et réglementaires était dévoilée, toutes les transactions qu’elle a effectuées en utilisant cette adresse seraient elles aussi dévoilées. Le Le changement de comportement des utilisateurs bitcoin est donc une monnaie pseudo-anonyme. Dans le système bancaire classique, en cas d’erreur, d’ou- C’est pourquoi il est conseillé d’utiliser plusieurs adresses, bli de mot de passe, de perte de chéquier ou de carte voire plusieurs portefeuilles, même si cela rend plus com- bleue, les porteurs ont un interlocuteur à qui s’adresser plexe la gestion personnelle des bitcoins. (l’établissement bancaire). L’utilisation des bitcoins de- mande à l’usager beaucoup plus de discipline : perdre La perception par le public une clé privée équivaut à perdre l’argent disponible sur Le bitcoin a été l’objet dans le passé de plusieurs scan- les adresses engendrées à partir de cette clé privée, et il dales, vols et escroqueries. Parmi les plus retentissants, n’existe aucun moyen de le récupérer. Plusieurs porteurs on comptait (en février 2014) la faillite de la plateforme ont connu de telles mésaventures à l’occasion d’un chan- d’échanges de bitcoins MtGox, à la suite de la « dispari- gement d’ordinateur ou de disque dur, car ils n’avaient tion » de 774 000 bitcoins (409 M$) (20), ou (en août 2016) le pas pris soin de sauvegarder préalablement leurs clés vol de 120 000 bitcoins (72 M$) de la plateforme Bitfinex (21). privées (19). Le bitcoin reste perçu par une partie du public comme L’utilisation des bitcoins demande donc un changement un réseau de blanchiment d’argent sale, ce qui affaiblit la de comportement de la part des porteurs : il faut impéra- confiance des utilisateurs. tivement conserver les clés privées et les mots de passe, faire des copies sur plusieurs clés USB ou sur du papier, Le changement sociétal voire les graver sur du métal et les conserver dans plu- En général, les établissements financiers ont l’habitude sieurs endroits sûrs. d’« oublier » et de pardonner certaines erreurs aux clients, après un certain délai : ils donnent une deuxième chance La cybersécurité aux clients ayant commis une faute dans un passé loin- Une clé privée peut également être volée, ce qui équi- tain. En revanche, un système fondé sur la blockchain vaut au vol de la somme totale d’argent disponible sur « n’oublie jamais rien ». les adresses du portefeuille électronique générées avec ladite clé. Dans un monde où les cyberattaques sont de L’absence de recours en justice plus en plus fréquentes, il faut renforcer les mesures de Dans le cadre des « contrats intelligents » (blockchain 2.0), cybersécurité habituelles : mettre à jour les logiciels et les les utilisateurs sont libres de décider des règles particu- antivirus, ne pas répondre aux messages électroniques lières à adopter, mais les transactions sont, quant à elles, douteux ou ne pas cliquer sur les fichiers attachés, éviter de naviguer sur des sites Web suspects, ne pas téléchar- ger des fichiers provenant de sources non vérifiées. (19) Le Britannique James Howells a jeté à la poubelle le disque dur de son ordinateur avec un portefeuille électronique contenant Il est conseillé d’éviter les bourses de change ou les por- 7 500 bitcoins : www.theguardian.com/technology/2013/nov/27/ tefeuilles en ligne fournissant des services client Web, hard-drive-bitcoin-landfill-site (20) www.theguardian.com/money/us-money-blog/2014/feb/25/ car ils n’offrent pas encore suffisamment de garanties de bitcoin-mt-gox-scandal-reputation-crime sécurité pour entreposer l’argent : il est préférable d’être (21) http://fortune.com/2016/08/03/bitcoin-stolen-bitfinex-hack- « client complet » afin de disposer de l’ensemble de la hong-kong/

RÉALITÉS INDUSTRIELLES - AOÛT 2017 23 irrévocables. Une fois choisies, ces règles doivent être Bibliographie respectées scrupuleusement, aucune déviation n’étant permise. Cela est renforcé par la technologie elle-même, ANTONOPOULOS Andreas, Mastering Bitcoin, O’Reilly indépendamment de la volonté des parties. Media, 2015. La réalisation d’un « contrat intelligent » est d’une grande CROMAN Kyle & al., On Scaling Decentralized Block- efficacité et sans risque puisque l'on ne peut pas le chains, http://fc16.ifca.ai/bitcoin/papers/CDE+16.pdf contourner. Mais son extrême rigidité est le revers de la DECKER Christian & WATTENHOFER Roger, “Information médaille : quelle place laisse-t-on à l’humain ? Comment Propagation in the Bitcoin Network”, 13th IEEE Internation- BLOCKCHAINS procéder pour rompre un contrat intelligent ? al Conference on Peer-to-Peer Computing, 2013, Trento University (Italy): www.tik.ee.ethz.ch/file/49318d3f56c- La taxation des transactions

LES 1d525aabf7fda78b23fc0/P2P2013_041.pdf Dans une économie décentralisée de partage pair-à-pair du type Uber ou Airbnb, ou faisant appel à des plate- EYAl Ittay & al., Bitcoin-NG: A Scalable Blockchain Proto- formes comme OpenBazaar pour effectuer des paiements col, https://arxiv.org/pdf/1510.02037.pdf en bitcoins, il est pratiquement impossible, pour l’État, de HEILMAN Ethan & al., TumbleBit: An Untrusted Bit- taxer les transactions. Par quels moyens l’État pourrait-il coin-Compatible Anonymous Payment Hub, https:// le faire ? eprint.iacr.org/2016/575.pdf Conclusion NAKAMOTO Satoshi, Bitcoin: A Peer-to-Peer Electronic Cash System”, https://bitcoin.org/bitcoin.pdf La blockchain pourrait devenir la couche économique et financière du Web. Elle permettra d’effectuer de façon dé- J. O’DWYER Karl & MALONE David, Bitcoin Mining and its centralisée des paiements, des échanges, des transferts Energy Footprint, ISSC 2014 / CIICT 2014, https://karlod- d’actifs, d’émettre et d’exécuter des contrats intelligents. wyer.github.io/publications/pdf/bitcoin_KJOD_2014.pdf Son domaine d’application peut aller au-delà des seuls POON Joseph & DRYJA Thaddeus, The Bitcoin Lightning aspects économiques et financiers. Network: Scalable Off-Chain Instant Payments, https:// Comme pour toute nouvelle technologie, l’implémentation lightning.network/lightning-network-paper.pdf de la blockchain peut connaître des obstacles et des li- The Fintech 2.0 Paper: rebooting financial services, www. mites. C’est à la communauté de ses acteurs qu’il revient finextra.com/finextra-downloads/newsdocs/the fintech 2 0 de trouver les moyens permettant de les dépasser. paper.pdf

24 RÉALITÉS INDUSTRIELLES - AOÛT 2017 caractère crucial. le problème delacoûteusegestiondesdonnéesrevêt un dans laquellelestransactions foisonnentetpourlaquelle son immutabilité)nepouvaient queséduire uneindustrie téristiques delatechnologie (notamment satraçabilitéet différentes lesinstitutionsfinancières, lesdiversescarac ral, etdesbanquesenparticulier, nepouvaitlaisserin heure desepasserd’intermédiaires financiersengéné côté, lavolontéaffichéedes un intérêttrèsfortdelacommunautéfinancière. Si,d’un dans lepapierséminaldeSatoshiNakamotoontsuscité le bitcoinetlesdifférentes dérivationsduprotocole décrit Le développementrécentdecrypto-monnaiestellesque reflétant leurordre chronologique. blocs d’information liés parunchaînage cryptographique distribuée parconstitutionprogressive d’unechaînede procède demisesàjourrégulières d’unebasededonnées sensu changeable pardifférents analystes,lasecondeest de blocs»( Même silesexpressions Introduction Chercheur etdoctorantauCNAM et LucasLÉGER Chercheuse etdoctoranteauCNAM Klara SOK Titulaire delachaire deFinanceduConservatoire nationaldesArtsetMétiers(CNAM) Par AlexisCOLLOMB financières quel impactsurlesinfrastructures Technologie desregistres distribués : tribués Enfin, enconclusion,nousévoquerons lesperspectivesd’avenir. saisir lespossibilitésdelatechnologieoumême,danscertainscas,mettre déjàenproduction. pourmieux les banques(enparticuliercentrales)etinstitutionsinternationales serons un état des lieux concis des dernières initiatives lancées par les institutions de paiement, tamment dusaunouveauparadigmedecoopétitionqu’elleprésuppose.Parlasuite,nousdres cette technologie.Sontégalementévoquéslesproblèmes etlesréticencesàsonadoption,no tout d’abord àexpliciterles raisonsdel’engouementencore prudentdesacteursfinancierspour calisant sur les systèmes de paiement et les infrastructures de marché, cet article s’attachera comme étantsusceptiblesdemodifierenprofondeur lesinfrastructures financières. Ensefo On abeaucoupparlédelatechnologiedesregistres distribués,etenparticulierdes

un casparticulierdelapremière. Cettedernière » (distributedledgertechnology blockchain) sontutiliséesdemanière inter «

technologie desregistres dis bitcoiners delapremière

? ou DLT) et«

chaîne stricto - - - - - (1) Disponibleàhttp://santanderinnoventures.com/fintech2/ binet OliverWymanévoqueuneréductiondescoûts ture. Ainsi,uneétudedelaBanqueSantanderetduCa ploiter notamment pour réduire leurscoûts d’infrastruc des acteursdelacommunautéfinancière pourraientex- Gox oudelafermeture du siteSilkRoad).Cependant,il la faillitedeplateformed’ des activitésfrauduleuses(enparticulierdanslesillagede bitions dedésintermédiationdestiersconfianceouà coin. Cettedernièreatrèssouventétéassociéeàdesam technologie. Uneétuderécente delaRéservefédérale cières lorsqu’onlesinterroge surleurintérêtpourcette Plusieurs raisons sont évoquées par les institutions finan- des institutionsfinancières Quelles sontlesattentes d’ici à2022 infrastructures financières de15à20 blocs est viteapparuquelatechnologieditede« institutions On apuobserverinitialementunegrandeméfiancedes

» avaitprobablement des atouts (1) à l’encontre d’ RÉALITÉS INDUSTRIELLES - AOÛT 2017 . une technologievenuedubit échange debitcoinsMount

milliards dedollars

, quel’ensemble ? blockchains,

chaîne de

25 - - -

- - - -

Alexis COLLOMB, Klara SOK et Lucas LÉGER américaine cite notamment les motivations suivantes (2) : pour ces institutions. Quant aux usagers (entreprises ou particuliers), ils sont en droit d’attendre d’un système sim- l réduire la complexité (en particulier dans les transactions plifié des commissions moindres. transfrontalières multilatérales) ;

l améliorer la vitesse de traitement des transactions et la Mais à ces raisons classiques de réduction des coûts disponibilité des fonds et des actifs concernés (afin de peuvent également venir se greffer des perspectives (so- réduire leur immobilisation et d’augmenter la liquidité) ; ciétales ou de croissance) plus stimulantes. Ainsi, le Plan

l diminuer les besoins (souvent considérables) de récon- d’Action pour l’Inclusion financière du G20 de 2014 insiste ciliation entre différentes infrastructures et différents re- sur la nécessité de réduire les coûts des paiements in- gistres ; ternationaux et d’utiliser les technologies innovantes pour

l augmenter la transparence et l’immutabilité des données permettre aux 2,5 milliards d’adultes exclus du système transactionnelles en rendant celles-ci infalsifiables ; financier d’y être intégrés. L’accent est mis,également ,

l rendre les réseaux financiers plus résilients en introdui- sur le financement des PME (l’on estime à 2 000 milliards sant une gestion distribuée des données ; de dollars le « déficit de crédit » qui pourrait être comblé (6) l réduire les risques opérationnels et financiers. au profit de ces dernières ). Si toutes ces aspirations à une organisation plus efficiente Enfin, l’intérêt pour la technologie des registres distribués de l’infrastructure financière figurent clairement dans les vient également de perspectives attrayantes pour les ré- recommandations publiées par la Banque des règlements gulateurs. En effet, il est tout à fait possible d’envisager internationaux (3), il faut avouer que cet attrait croissant le déploiement d’un tel système qui octroierait des droits de la technologie blockchain pour la sphère financière d’accès sélectifs (principalement read-only) aux auditeurs a été nourri par un contexte porteur avec, d’une part, la ou aux régulateurs (pour lesquels l’accès serait confiné à démonstration d’une certaine résilience et d’une certaine certaines parties seulement du registre distribué). efficacité du réseau bitcoin pour les paiements internatio- naux et, d’autre part, quelques problèmes de sécurité po- Quels sont les freins au développement sés par le réseau Swift. En effet, les utilisateurs du réseau de cette technologie ? bitcoin mettent en avant, parmi ses avantages, la rapidité Bien évidemment, les perspectives d’utilisation de la tech- des virements internationaux à moindre coût (si l’on fait nologie des registres distribués ne sont pas sans poser un abstraction des commissions de conversion de monnaie certain nombre de problèmes. Tout d’abord, certaines ins- régalienne en bitcoin pour l’émetteur, et de conversion titutions financières auront du mal à envisager le rempla- inverse pour le receveur). De plus, du fait de quelques cement de bases de données propriétaires par un registre fraudes d’envergure (comme celle d’environ 80 millions distribué : étrange situation, en effet, que celle où il faut de dollars impliquant la Banque centrale du Bangladesh, savoir coopérer avec ses compétiteurs (la coopétition) et début 2016), le réseau Swift n’a pas été épargné par une partager ses données (même si l’on vous dit que l’on pour- certaine publicité négative (4). ra définir précisément leur périmètre de confidentialité par De toutes les raisons évoquées plus haut, les espoirs de du chiffrement). Ainsi, par exemple, pour que la mutuali- désintermédiation et de réduction du travail de réconcilia- sation (via la mise en place d’un standard d’identité digi- tion entre les différentes contreparties sont probablement tale) des procédures KYC (Know Your Customers) puisse les plus importants – en particulier pour les transactions bénéficier à tous, il sera nécessaire que chaque institution internationales, qui font souvent intervenir plusieurs inter- ait confiance dans l’intégrité du système : il faudra pour médiaires (5). Et ces espoirs de simplification se portent, cela veiller à ce que les consultations de l’une ne puissent au-delà des simples paiements internationaux, sur dif- diffuser aux autres la liste de ses nouveaux clients. férents processus complexes souvent transfrontaliers, Ensuite, l’utilisation de blockchains publiques (telles que comme les activités de trade finance. celles du bitcoin ou d’Ethereum) n’est pas sans inquiéter Ces perspectives de simplification des circuits financiers des acteurs traditionnellement habitués à avoir le contrôle et de plus grande efficience sont encourageantes tant pour de leurs activités et de leurs infrastructures. Il n’est pas du les acteurs financiers eux-mêmes que pour leurs usagers (entreprises ou particuliers). Ainsi, les banques régionales, qui aujourd’hui n’ont pas la possibilité de faire directement (2) https://www.federalreserve.gov/econresdata/feds/2016/files/ des virements internationaux, devraient pouvoir bénéficier 2016095pap.pdf d’un meilleur accès à une infrastructure de registre dis- (3) http://www.bis.org/cpmi/publ/d101a.pdf tribué. Quant à leurs homologues de plus grande taille, (4) http://www.reuters.com/article/us-cyber-heist-swift- elles peuvent espérer des réductions de coûts significa- idUSKCN11600C (5) La question de la valeur de l’intermédiation financière est une tives de leurs activités de middle office et de back office,

CAS D’USAGE, TRANSFORMATIONS DES ENTREPRISES ET SECTEURS ÉCONOMIQUES CAS D’USAGE, TRANSFORMATIONS question déjà ancienne sur laquelle différents universitaires de re- comme nous l’avons déjà indiqué. Il ne faut pas oublier nom se sont penchés. On pourra par exemple consulter l’article de qu’aujourd’hui ces activités de réconciliation entre grands Robert Merton sur ce sujet : A Functional Perspective of Financial acteurs financiers sont encore en grande partie effectuées Intermediation in Financial Management, vol. 24, n°2, Silver Anni- versary Commemoration (1995), pp. 23-41, disponible à l’adresse : à la main, à l’aide de tableaux Excel. Bien sûr, les perspec- http://www.people.hbs.edu/rmerton/afunctionalperspective.pdf tives d’automatisation que le déploiement d’un registre (6) On pourra consulter ce plan d’action sur le site http://www.gpfi. distribué entre banques laisse entrevoir sont intéressantes org/

26 RÉALITÉS INDUSTRIELLES - AOÛT 2017 Figure 1 : Les possibilités d’implanter la blockchain pour réguler les circuits financiers « marché » et « post-marché ».

tout étonnant que les acteurs financiers s’orientent vers de paiement et de règlement des opérations sur titres Alexis COLLOMB, Klara SOK et Lucas LÉGER des systèmes permissionnés, et ce, dans une logique de dont le fonctionnement utilise la technologie dite de la consortium, tel R3 (7), qui regroupe aujourd’hui près de blockchain », qui visait justement à faire considérer ces soixante-dix institutions. opérations comme des actes électroniques authentiques « de la même manière que [le sont] les actes passés de- Il y a également des problématiques d’intégration régle- vant notaire » (11). mentaire. S’il est possible d’établir une correspondance assez étroite entre les réglementations en vigueur et l’ar- De nombreuses initiatives en cours chitecture actuelle des marchés financiers (voir la Figure 1 (8) ci-dessus), il est intéressant de noter que l’Autorité eu- Les initiatives liées à l’étude ou au déploiement de la tech- ropéenne des valeurs mobilières (AEVM/SMA) estime ce- nologie sont très nombreuses, mais elles en restent en- pendant qu’il n’y a pas dans le cadre réglementaire euro- core souvent au niveau de la preuve de concept. Pour les péen d’obstacle majeur qui puisse empêcher l’émergence paiements, les grandes compagnies de cartes de crédit de la Distributed Ledger Technology (DLT) à court terme telles que Visa (avec B2B Connect) ou MasterCard (avec (9). Cependant, il est certains cas où la réglementation en Mastercard Blockchain) ou des grands du Web tels que place pourrait être problématique pour la mise en place PayPal (avec sa filiale Paypal Braintree qui permet à des d’un registre distribué (10). commerçants d’accepter des bitcoins comme moyen de paiement) commencent à être actifs. De même, des entre- Mais il y a aussi d’autres problèmes, comme ceux de la prises spécialisées dans les transferts d’argent internatio- gouvernance et de la répartition des responsabilités, dans naux (telles que Western Union) ont investi dans la techno- le cas d’une infrastructure partagée. Si ce problème s’est logie. Même Swift (membre de la fondation Hyperledger) déjà manifesté pour des blockchains publiques (voir l’ex- a développé au début de cette année une preuve de périence malheureuse de The DAO), il peut également se poser dans le cas d’un consortium, en particulier dans l’élaboration de ses standards. De plus, la mise en place de registres distribués devra être accompagnée d’ajuste- (7) http://www.r3cev.com/ (8) On pourra également consulter par exemple le n°15 d’Opinions & ments des procédures d’évaluation et de consolidation Débats publié en mai 2016 par COLLOMB et SOK et disponible sur des risques (qu’ils soient de crédit, de liquidité ou opé- http://www.louisbachelier.org/ rationnels). (9) Voir le rapport ESMA50-1121423017-285 du 7 février 2017, dis- ponible sur https://www.esma.europa.eu Enfin, ces registres distribués devront être source d’auto- (10) Voir : http://www.coindesk.com/distributed-ledger-cftc-post- rité et de finalité juridique, ce qui est encore très loin d’être trade-dodd-frank/, où les auteurs envisagent une difficulté liée à la législation Dodd-Frank pour gérer des swaps sur un registre distri- évident. En France, on aura par exemple vu échouer, bué. l’année dernière, une proposition législative concernant (11) http://www.assemblee-nationale.fr/14/amendements/3785/ « le caractère définitif du règlement dans les systèmes AN/227.asp

RÉALITÉS INDUSTRIELLES - AOÛT 2017 27 concept blockchain dans le cadre de son initiative globale Conclusion sur les paiements. Enfin, il y a des passerelles, de plus en plus nombreuses, entre crypto-monnaies et monnaies Il paraît naïf de penser que le développement de la tech- régaliennes. Ainsi, la start-up Glidera, qui offrait à ses utili- nologie des registres distribués risque de faire disparaître sateurs la possiblité d’acheter des bitcoins à partir de leur les intermédiaires financiers. Si l’on regarde le cas de la compte bancaire, a été rachetée par la plateforme Kraken, première des blockchains, celle du bitcoin, on constate qui propose également d’utiliser Swift pour des dépôts en que l’écosystème a favorisé l’éclosion de nouveaux inter- dollars américains ou en livres anglaises ou d’effectuer médiaires (à commencer par de nouveaux échanges). (12) des virements SEPA en euros . Il faut également noter la Si l’on peut envisager différents scénarios d’intégration de mise en production de l’initiative de Ripple, qui permet dé- la technologie au sein de l’infrastructure postmarché (qu’il sormais d’effectuer des paiements interbancaires et inter- s’agisse de compensation, de règlements ou de conser- (13) nationaux dans les institutions bancaires de neuf pays . vation), il n’y a pas encore de consensus d’experts sur Pour les marchés financiers, il y a eu de très nombreuses la question et l’acceptabilité de la blockchain risque de initiatives, mais celles-ci restent en général limitées à des s’installer graduellement (16) en parallèle à l’automatisation sous-jacents non cotés (par exemple, l’initiative Linq du progressive des processus (l’on peut néanmoins s’at- Nasdaq) ou de niche. L’initiative la plus avancée semble tendre à ce que la technologie ait un impact plus rapide être celle de l’échange de securities australien ASX, qui sur les systèmes de paiement). travaille avec Digital Asset Holdings et qui envisage de L’interopérabilité des différents registres sera un pro- remplacer son système de compensation CHESS par un blème clé, et qu’il s’agisse de blockchains publiques ou registre distribué. Il existe de nombreuses autres initia- de blockchains privées, la capacité des différents écosys- tives, telles que celles de SETL, Clearmatics ou Euroclear, tèmes à interagir entre eux et à établir des normes et des mais celles-ci semblent être moins abouties. standards risque d’être un élément essentiel de leur déve- Quant aux banques centrales, elles ne sont pas en reste : loppement, et une condition nécessaire de leur succès (17). elles ont presque toutes lancé des initiatives liées à l’étude Mais si l’on doit encore rester prudent, surtout à court de la technologie : la Banque de France a ouvert en début terme, sur les chances de déploiement à grande échelle d’année un laboratoire dédié à la blockchain (14) ; la Banque des registres distribués, la technologie – qui semble au- d’Angleterre est en partenariat avec Ripple pour le déve- jourd’hui être sortie de sa phase de hype pour commencer loppement d’un système de paiement international mul- sa phase de maturation (18) – aura en tout cas remis les tidevises entendant montrer comment la synchronisation projecteurs sur l’impact croissant de la transformation nu- permise par la technologie devrait « permettre de réduire mérique. Et une chose est sûre : cette dernière n’est pas le risque de règlement et améliorer la vitesse et l’efficience près de s’arrêter ! des paiements transfrontaliers (15) » ; la Banque populaire de Chine s’est penchée sur le cas du bitcoin depuis 2014 et est en train d’expérimenter la mise en place de sa propre crypto-monnaie, en liant celle-ci à une plateforme d’échange de papier commercial basée à Shanghai (ce développement semble s’effectuer parallèlement à une (12) https://www.kraken.com/ (13) https://ripple.com/ supervision renforcée des échanges bitcoin depuis le dé- (14) Discours de François Villeroy de Galhau, Gouverneur de la but de l’année). Banque de France et président de l’Autorité de Contrôle prudentiel et de Résolution, au Paris FinTech Forum du 25 janvier 2017. Cette réflexion sur l’utilisation de la technologie pour (15) Dernière annonce faite sur le site de Ripple, le 17 mai 2017. la mise en place de « crypto-monnaies régaliennes » a (16) On pourra consulter https://www.ecb.europa.eu/pub/pdf/sc- également été l’un des thèmes centraux de la 16ème confé- pops/ecbop172.en.pdf (17) On pourra, par exemple, consulter le projet https://interledger. rence internationale sur les défis du secteur financier -or org/interledger.pdf ganisée par la Réserve fédérale américaine à Washington, (18) On se réfère ici à la typologie de Gartner (www.gartner.com) avec le FMI et la Banque mondiale. pour les technologies émergentes. CAS D’USAGE, TRANSFORMATIONS DES ENTREPRISES ET SECTEURS ÉCONOMIQUES CAS D’USAGE, TRANSFORMATIONS

28 RÉALITÉS INDUSTRIELLES - AOÛT 2017 pour fondersaposition. les caractéristiquesessentiellesdessolutionsprésentées nations, lerégulateurs’attacheratoutd’abord àexaminer des principesquilessous-tendent.Au-delàdénomi les unsdesautres tantdans leurconceptionqu’auregard tifs informatiquespouvantêtre parfois utiliséimproprement pourdésignerdesdisposi- Ainsi, historiquement,leterme« Le terme de Une blockchainoudesblockchains Chief DigitalOfficerdelaBanqueFrance et ThierryBEDOIN et deRésolution Ingénieur desmines,expertauPôleFinTech Innovationdel’AutoritéContrôleprudentiel Didier WARZÉE Coordinatrice duPôleFinTech Innovationdel’AutoritéContrôleprudentieletRésolution Par NathalieBEAUDEMOULIN (ACPR) Contrôle prudentieletdeRésolution Banque deFranceetl’Autorité Les enjeuxdelaBlockchainpour l’acronyme le bitcoindesdifférences significatives.Danscertainscas, mais aussi,souvent,pourdesmodèlesprésentantavec pour desmodèlesprésentantsimilaritésaveccelui-ci, le bitcoin,cetermeestmaintenantrégulièrement utilisé diverses solutionstechnologiquesayantpermisdecréer blockchain. Dufaitdurôlepionnierdelacombinaison avant quen’apparaisse(peudetempsaprès)leterme utilisé pourdésignerleprotocole sous-tendantlebitcoin, sèques fortstantpourlesconsommateurs –fortevolatili monnaie ayantcourslégal, présente desrisquesintrin En effet, lebitcoin,quin’estpasconsidérécommeune pour desraisonsd’image)de la crypto-monnaiebitcoin. aussi misenavantdemanière àse quatre grandsdilemmesavant depouvoirêtre utiliséepourréaliserdesopérationsfinancières. peuvent êtreToutefois, traitéesetfournies. cettetechnologiereste peumature etdevradépasser nologiques susceptiblesd’optimiser, voire demodifierlamanière dontlesactivitésfinancières technologique àl’œuvre dans lesservicesfinanciers.La ainsi que la Banque de France se sont structurées pour répondre aux défis de la révolution L’Autorité de Contrôle prudentiel et de Résolution (qui contrôlelesbanquesetassurances)

DLT

blockchain (ou d’autres termes proches) est (pourDistributedLedgerTechnology ) est

en réalitétrèsdifférents timestamp server démarquer (notamment

» aété

? - - -

rité bancaireeuropéenne(www.eba.europa.eu). dans le communiqué d’alerte émis le 12 décembre 2013 par l'Auto- 2013 publiésurlesiteInternetde laBanquedeFrance,ainsique glementaire sontaussidétaillésdans le ses risquespourlesutilisateurset lesenjeuxd'unencadrementré opérations surbitcoinsenFrance. Lefonctionnementdubitcoin, (1) Position2014-P-01du29janvier 2014del'ACPRrelativeaux des autorités,tantfrançaisesqu’européennes gitimement faitl’objetdeprisespositionsvigoureuses du clientdans le domainefinancier. Lebitcoina donc lé teurs quiseheurteauprincipefondamentald’identification du terrorisme, notamment dufaitdel’anonymatdesdéten lutte contre leblanchiment descapitauxetlefinancement té, risquedefraudeavéré–qu’auregard desexigencesde voire mêmedelaSociété. vecteur majeur de transformationdesservicesfinanciers, voire del’autoritécentraled’administration,commeun sentent, du fait de la disparition espérée d’intermédiaires, voir unesolutionentièrement décentralisée,qu’ilspré Pour autant,certainsd’entre euxvontenréalitépromou contre l’assimilationdecelles-ciaubitcoin. giques dutype possible. Dèslors,lespromoteurs desolutionstechnolo- révéler cesrisquesaupublicet blockchain faitpartiedessujetstech RÉALITÉS INDUSTRIELLES - AOÛT 2017 blockchain cherchent parfoisàseprémunir à les prévenir autant que lesprévenirautantque Focus n°10du5décembre

(1) , visant à , visantà

29 ------

Nathalie BEAUDEMOULIN, Didier WARZÉE et Thierry BEDOIN La technologie se met alors au service d’une philosophie associer quelques octets de caractères, dans le cas du que l’on peut qualifier de libertaire, qui promet le retour bitcoin). Ainsi, par exemple, certains modèles assurantiels (primitif, bien que numérique) à des relations financières sont fondés sur ce type de mécanisme, proposant une directes entre individus s’appuyant sur un mécanisme indemnisation automatique sur le fondement d’un smart transactionnel de confiance entièrement décentralisé. contract se référant au tableau des arrivées des avions d’un aéroport (assurance retard). Mais au-delà de ces cas assez utopiques, la technologie blockchain présente des caractéristiques suffisamment Toutefois, la nature même de la blockchain utilisée et de remarquables pour que les acteurs financiers (qu’ils soient ses caractéristiques fondatrices (le fait d’être à la fois pu- récents ou davantage établis) et les autorités financières blique et décentralisée) continue de poser des difficultés (dont la Banque de France et l’Autorité de Contrôle pru- importantes (voire rédhibitoires) pour une application à dentiel et de Résolution) s’y intéressent de très près. grande échelle au domaine financier. Quel est le potentiel de la Ces difficultés peuvent être appréhendées sous la forme blockchain publique décentralisée de quatre dilemmes : pour le domaine financier ? l Premier dilemme : décentralisation versus responsabi- lité. La décentralisation du système de confiance (qui Au-delà du bitcoin en tant que monnaie virtuelle, c’est présente des avantages notamment en termes de sécu- l’ensemble du mécanisme de confiance mis en œuvre par rité du dispositif partagé par un plus grand nombre) ne celui-ci qui a soulevé l’enthousiasme et aiguisé la créativi- permet pas d’identifier un acteur juridiquement respon- té d’acteurs financiers, notamment de nombreuses start- sable de sa sécurité, qui rendrait compte aux clients (par ups qui y voient une façon de concurrencer les établisse- exemple en cas de défaillance, pour assurer la continuité ments financiers. du dispositif, le remboursement, etc.) et aux autorités de En effet, le – ou les – créateurs du bitcoin ont pensé sa régulation. blockchain originelle comme un système décentralisé ne l Deuxième dilemme : liberté versus dépendance. La faisant appel à aucun tiers de confiance et se fondant sur blockchain publique s’affiche comme un bien collectif des techniques cryptographiques pour assurer simultané- autogéré auquel tout un chacun peut (en principe) contri- ment la transparence, la sécurité et l’anonymat de tran- buer. Or, dans la pratique, elle s’avère très dépendante sactions numériques directes de pair-à-pair. Ainsi, un re- de quelques codeurs. Elle est aussi très dépendante vis- gistre entièrement transparent de transactions directes de à-vis de fermes de minage extrêmement concentrées sur pair-à-pair distribué sur un nombre important de nœuds le plan géographique et économiquement incitées à se d’un réseau est, de ce fait, présenté comme indestruc- regrouper (jusqu’à un certain point (2)). L’emprise de ces tible. De plus, son intégrité est garantie par un mécanisme parties prenantes sur le fonctionnement des blockchains impliquant, à chaque validation d’un nouveau bloc de publiques défie le caractère « démocratique » affiché et transactions (sécurisée par le protocole de consensus par elle peut provoquer de vrais schismes dans les commu- « preuve de travail »), l’intégration de l’empreinte numé- nautés, qui se traduisent parfois par des scissions de rique de la chaîne de blocs précédente. la blockchain elle-même (hard fork). Elle pose in fine la question de leur gouvernance, car les tiers de confiance Une qualité que souhaitent fréquemment utiliser des por- auxquels ces blockchains sont censées se substituer ne teurs de projet est l’inaltérabilité de la base de données font, dans ces conditions, que se « déplacer » et reve- distribuée, avec la confiance qu’elle est censée générer nir sous d’autres formes (développeurs, mineurs), d’une afin de sous-tendredes projets de registres d’informa- manière beaucoup moins transparente, et en ayant des tions ou de transactions – via l'utilisation de tokens – dans objectifs souvent divergents. le monde réel. l Troisième dilemme : transparence versus confidentialité. Toutefois, au-delà de ces atouts, des limitations significa- La blockchain publique est transparente et efficace en tives sont rapidement apparues ne serait-ce qu’en matière termes de traçabilité des opérations. En effet, elle per- de volumes de transactions traitables ou de délais néces- met de connaître l’ensemble des transactions ou des en- saires à ce traitement, qui ont donné naissance à d’autres registrements réalisés, à la manière d’une piste d’audit dispositifs visant à compenser ces lacunes. C’est ainsi présentée comme unique et intangible. Néanmoins, cette que d’autres blockchains publiques ont vu le jour, telle la caractéristique se heurte assez rapidement au principe blockchain Ethereum, qui intègre des contrats s’exécu- du secret des affaires, chaque établissement participant tant de manière automatisée (les smart contracts) dès lors ne souhaitant pas exposer (notamment à la concurrence) qu’une information externe (appelée oracle) en déclenche les transactions qu’il réaliserait en l’utilisant.

la réalisation, le projet de blockchain Hyperledger dédiée l Quatrième dilemme : anonymat versus identification. Le

CAS D’USAGE, TRANSFORMATIONS DES ENTREPRISES ET SECTEURS ÉCONOMIQUES CAS D’USAGE, TRANSFORMATIONS au business, ou encore la blockchain Tangle/IOTA spécia- lisée dans les problématiques d’objets connectés. Les smart contracts permettraient, en interagissant « intel- (2) Il faut qu’elles restent en deçà de 50 % de la capacité de traite- ment en termes de puissance de calcul mise en œuvre, sinon elles ligemment » avec le monde réel, d’envisager des actions mettent en danger l’efficacité du protocole de « preuve de travail », plus sophistiquées qu’une simple transaction réalisée en et donc la confiance dans le bitcoin – confiance dont elles tirent leur crypto-monnaie (y compris améliorée par la possibilité d’y richesse (étant donné qu’elles sont rémunérées… en bitcoins).

30 RÉALITÉS INDUSTRIELLES - AOÛT 2017 principe libertaire qui sous-tend la blockchain implique blockchains de consortium quand ces acteurs sont des l’usage de pseudonymes, ce qui ne permet pas l’identi- sociétés –, à un système d’accès en théorie ouvert utilisant fication des acteurs. Cette opacité n’est pas acceptable un protocole de consensus calqué sur le mécanisme pu- au regard des objectifs de la lutte contre le blanchiment blic, mais intégrant un acteur centralisant les droits d’ac- des capitaux et le financement du terrorisme. cès et certaines informations concernant les utilisateurs. En raison de ces limitations, l’usage des blockchains pu- Au regard des cas d’usage, et notamment de la bliques pour des activités régulées n’apparaît pas appro- « confiance a priori » entre les pairs du réseau, le protocole prié à ce stade – sauf à concevoir une blockchain publique de consensus sera souvent différent de la « preuve de nativement construite pour répondre aux problématiques travail » du bitcoin, ce qui améliorera substantiellement la du secteur financier, incluant les enjeux de supervision. rentabilité du système (le coût énergétique du « minage » du bitcoin étant en effet très important).

Conséquence : on envisage de E et Thierry BEDOIN réintégrer une autorité centrale dans Il y a aussi des projets de systèmes permissionnés qui É des protocoles de registres distribués cherchent à retrouver des propriétés de résilience du registre (intégrité et disponibilité) proches de celles des Les acteurs financiers ont donc cherché à recréer des blockchains publiques. Or, ces propriétés sont générées systèmes inspirés des blockchains publiques, à ceci par la taille des réseaux (plus celle-ci est importante et près qu’ils en resteraient l’autorité centralisatrice tiers de plus il existe de copies du registre) et par l’énergie dé- confiance, permettant ainsi de résoudre certains des pro- pensée par les mineurs pour la validation des blocs, dans blèmes susmentionnés – tout en conservant dans le sys- le cas du consensus « preuve de travail » : plus celle-ci tème ainsi créé une position privilégiée s’inscrivant dans est importante, plus un éventuel attaquant devra lui- la continuité de leurs fonctions actuelles. même dépenser d’énergie pour corrompre le système. Une solution envisagée, dite sidechain, consiste à ce Le cas le plus orthogonal aux blockchains publiques est qu’une blockchain publique permissionnée se branche (en celui de registres distribués entièrement privés. Dans la quelque sorte) sur une blockchain publique non permis- pratique, ils correspondent plutôt à des bases de données sionnée afin de pouvoir être sécurisée. de transactions répliquées sur plusieurs sites physiques et bénéficiant des mécanismes cryptographiques assu- La plupart des cas d’usage envisagés aujourd’hui, que rant leur intégrité, sans toutefois se fonder sur des méca- ce soit dans le cadre des ouvertures réglementaires fran- nismes de minage. Ceux-ci sont en effet rendus superflus çaises (enregistrement et transactions sur les titres non par une confiancea priori forte entre des nœuds exhausti- cotés (3)) ou dans celui d’autres projets liés à la gestion vement contrôlés par le même acteur. d’actifs, aux paiements, aux transferts de fonds ou à l’as- surance, le sont au travers d’un modèle blockchain pu- Ces blockchains privées sont notamment utilisables pour blique permissionnée. optimiser des procédures internes, au sein de groupes. Elles peuvent ainsi permettre de disposer d’un outil d’en- Au vu des différences significatives dans ce que ces mo- registrement immédiat et partagé d’informations et de dèles recouvrent en réalité, il faudra examiner au cas par transactions entre différentes sociétés d’un même groupe, cas les projets proposés afin de déterminer de quelle fa- Nathalie BEAUDEMOULIN, Didier WARZ ou entre différentes unités d’une même entreprise. Le rôle çon ils répondent aux exigences réglementaires. du superviseur consistera alors à surveiller les risques De manière générale, les dispositifs proposés doivent opérationnels (dont les problèmes de cybersécurité, les d’ores et déjà se conformer aux exigences fondamen- risques liés à l’utilisation éventuelle du cloud, etc.) que ces tales que sont la sécurité des transactions, la protection solutions font éventuellement courir aux établissements du consommateur et la lutte contre le blanchiment des financiers, et ce de la même manière que pour toute autre capitaux et contre le financement du terrorisme. Ainsi, les utilisation de nouvelles technologies de gestion de l’infor- clients devront toujours être identifiés de manière fiable mation, sans que cela ne soit uniquement et spécifique- et documentée (au moyen de mesures d’identification ment lié au recours à la blockchain. renforcées si l’entrée en relation ne s’effectue pas en Les limitations en matière de cas d’usage de ces face-à-face). Les paiements qui transiteraient par un tel blockchains privées (notamment pour ce qui concerne- dispositif devront toujours être entourés des mesures de rait des activités BtoC) ont conduit au développement de sécurité requises (par exemple, l’authentification renfor- modèles impliquant une architecture proche de celle des cée). Les dispositifs doivent aussi respecter les exigences blockchains publiques, mais avec des mécanismes confé- rant à un tiers central la gestion de la gouvernance, du code et des accès au dispositif : elles sont fréquemment (3) L’article 120 de la loi n°2016-1691 du 9 décembre 2016 relative appelées « blockchains publiques permissionnées ». à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique habilite le gouvernement, d’ici le 9 décembre L’expression de « blockchain publique permissionnée » 2017, à réformer le droit applicable aux titres financiers afin de per- est toutefois susceptible de recouvrir des systèmes assez mettre la représentation et la transmission (au moyen d’un dispositif d’enregistrement électronique partagé) des titres financiers qui ne différents ; de celui qui n’autorisera que quelques acteurs sont ni admis aux opérations d’un dépositaire central ni livrés dans dans le réseau pair-à-pair en organisant une gouvernance un système de règlement et de livraison de certains instruments fi- spécifique du code utilisé – système en général dit des nanciers.

RÉALITÉS INDUSTRIELLES - AOÛT 2017 31 Photo © Romain Gaillard/REA La Fintech Revolution, événement organisé par France Fintech, le 28 mars 2017 (seconde édition), au théâtre de La Gaîté Lyrique. « L’Autorité de Contrôle prudentiel et de Résolution s’est dotée en juin 2016 d’un pôle dédié aux FinTechs et à l’innovation. »

réglementaires spécifiques applicables aux cas d’usage novation financière, et les pouvoirs publics. Les sujets (comme, les informations précontractuelles, dans le cadre abordés portent sur la régulation de l’innovation et sur de souscriptions de contrats). les problématiques réglementaires liées à la blockchain, telle que (par exemple) la valeur juridique des opérations Les établissements doivent en outre tenir compte des enregistrées sous une blockchain ou encore les smart réglementations trans-sectorielles susceptibles de s’ap- contracts. pliquer, telles les nouvelles règles européennes liées à la protection des données personnelles (4) (dont le recueil du En tant qu’autorité indépendante adossée à la Banque consentement du client avant tout traitement, le droit à de France, l’ACPR entretient un dialogue constant avec l’oubli – qui apparaîtrait difficile à respecter si la blockchain les experts de la Banque centrale sur les enjeux liés à la restait immuable – ou encore les dispositions européennes blockchain. En effet, ayant rapidement perçu les enjeux de liées à l’utilisation de la signature électronique (5)). cette nouvelle technologie pour certaines de ses missions (systèmes de paiement et infrastructure de marchés, poli- Une question attentivement suivie par tique monétaire, services bancaires), la Banque de France le Pôle FinTech Innovation de l’ACPR a décidé de tester la blockchain afin d’être en mesure de et par la Banque de France juger par elle-même des potentialités de cette technologie.

Afin d’être en phase avec la révolution numérique ac- Ainsi, la Banque de France conduit actuellement, sous tuellement à l’œuvre dans les services financiers (dont la l’égide de son Chief Digital Officer, plusieurs expérimen- blockchain est l’une des manifestations) et de préparer la supervision d’une finance toujours plus digitale, l’Autorité CAS D’USAGE, TRANSFORMATIONS DES ENTREPRISES ET SECTEURS ÉCONOMIQUES CAS D’USAGE, TRANSFORMATIONS de Contrôle prudentiel et de Résolution s’est dotée en juin (4) Règlement (UE) 2016/679 du 27 avril 2016 du Parlement euro- 2016 d’un pôle dédié aux FinTech et à l’innovation. péen et du Conseil relatif à la protection des personnes physiques à l’égard du traitement des données à caractère personnel et à la libre Ce pôle travaille étroitement avec l’Autorité des Marchés circulation de ces données. (5) Règlement (UE) 910/2014 du 23 juillet 2014 du Parlement eu- Financiers, avec laquelle l’ACPR anime un Forum FinTech, ropéen et du Conseil sur l’identification électronique et les services qui réunit des FinTech, des banques et des assurances, de confiance pour les transactions électroniques au sein du marché ainsi que d’autres partenaires de l’écosystème de l’in- intérieur, dit règlement « eIDAS ».

32 RÉALITÉS INDUSTRIELLES - AOÛT 2017 tations de la technologie blockchain, dont l’une, menée Cette expérimentation a confirmé une capacité de la tech- avec des banques de la place, vise à maintenir de manière nologie blockchain à relever des défis réels, notamment décentralisée un registre d’identifiants ICS (identifiant en matière de tenue de registre. Son extension à une créancier SEPA remplaçant le TIP depuis le 1er août 2014) blockchain interbancaire multiservices et son utilisation utilisés dans les prélèvements SEPA (projet MADRE). Si éventuelle dans des traitements critiques du monde de les banques françaises s’échangent actuellement l’iden- la finance dépendront néanmoins d’avancées restant à tité de leurs clients créanciers (ICS) grâce à l’intervention démontrer sur les aspects liés à la capacité de traitement opérationnelle de la Banque de France qui centralise les de masse (scalabilité), à la confidentialité des transac- demandes, génère et dissémine l’ensemble de ces iden- tions, à la sécurisation et, surtout, à la mise en place de tifiants, l’utilisation de la blockchain permet la tenue de dispositifs de gouvernance assurant son bon fonctionne- ce registre dans les smart contracts d’une blockchain à ment dans la durée. laquelle les banques participent directement. La Banque E et Thierry BEDOIN

de France réussit ainsi à exercer son rôle d’opérateur du Conclusion É service ICS au travers de traitements automatiques qui Si certaines caractéristiques de la technologie sous- s’exécutent selon des règles prédéfinies qu’elle a dé- jacente à la blockchain peuvent être prometteuses, son ployées dans la blockchain. Dans la gouvernance du dis- application à des activités impliquant le traitement de flux positif, elle conserve uniquement un rôle d’accréditation financiers importants exigera que l’on ait au préalable re- initiale des banques participantes, tout en renforçant sa levé des défis notables dans les domaines technique et qualité de tiers de confiance. réglementaire. Nathalie BEAUDEMOULIN, Didier WARZ

RÉALITÉS INDUSTRIELLES - AOÛT 2017 33 La blockchain, un levier de digitalisation pour les banques de financement et d’investissement (BFI)

Par Éric ROSSIGNOL Chargé de l’analyse quantitative et du laboratoire d’innovation pour le département Titrisation du Crédit Agricole CIB et Xavier LAURENT Membre de l'équipe Innovation et du département Strategy & Business Transformation et leader de la Communauté Blockchain du Crédit Agricole CIB

Si les banques de financement et d’investissement (BFI) (ou banques de gros) réalisent de nom- breux prototypes sur la base de la blockchain, c’est parce que leurs activités sont largement basées sur la confiance qu’elles apportent à leurs clients. La confiance est en effet également le moteur de la blockchain. À ce jour, les BFI pensent que la blockchain est plus une opportunité de limiter les coûts et de rendre un meilleur service à leurs clients qu’une menace. En effet, les entreprises continuent à avoir besoin d’un fournisseur de liquidités au meilleur prix.

Introduction leurs processus. En revanche, elles ne doivent pas oublier qu’elles seront les garantes de la sécurisation des solu- Le temps où l’innovation était l’apanage du cadre profes- tions qu’elles apporteront, la maîtrise des risques restant sionnel, où la majorité des collaborateurs avaient accès à pour leurs clients un élément différenciant vis-à-vis de la un matériel de pointe à leur travail et pouvaient parfois en concurrence nouvelle des FinTechs. faire bénéficier leur foyer, est aujourd’hui révolu. La blockchain et ses dérivées, les technologies de re- Le digital s’est d’abord développé auprès du grand pu- gistres distribués (DLT), sont des éléments de réponse blic, celui-ci étant plus ouvert que les entreprises à l’ex- importants, car ils pourraient apporter la confiance né- périmentation de nouveaux usages, avec les risques que cessaire aux institutions financières, à leurs clients, aux ceux-ci comportent. En revanche, le rythme de la digita- régulateurs ainsi qu’à de multiples acteurs des domaines lisation de l’environnement professionnel a ralenti. Cela de l’échange d’informations et de l’automatisation digitale s’est traduit par un sentiment de frustration parmi les sa- dans un environnement sécurisé. lariés des entreprises. Par ailleurs, les grands groupes (notamment industriels) La disparition inéluctable reposent sur des strates de systèmes d’information du tiers de confiance ? construites sur de longues périodes (parfois depuis les À l’origine du bitcoin, il y avait le souhait de s’affranchir années 1960) qui freinent leur démarche d’innovation et du système financier traditionnel (des banques et des qui donnent un avantage certain aux petites et moyennes banques centrales) et de proposer une alternative pure- entreprises, plus agiles qu’eux et dont les systèmes d’in- ment technologique à leur rôle de tiers de confiance vali- formation sont plus récents. Cet avantage est particuliè- dant le transfert de valeur. Après un peu moins de dix ans rement important pour les FinTechs (les start-ups de l’in- de recul sur ce phénomène, force est de constater que dustrie financière utilisant les nouvelles technologies) par les banques, bien qu’elles soient en pleine transformation CAS D’USAGE, TRANSFORMATIONS DES ENTREPRISES ET SECTEURS ÉCONOMIQUES CAS D’USAGE, TRANSFORMATIONS rapport aux banques traditionnelles. digitale, jouent toujours ce rôle. Pour l’utilisateur non infor- Face à ces évolutions, les banques de financement et maticien chevronné, l’usage de bitcoins lui permet certes d’investissement doivent répondre aux attentes nou- de se passer d’une banque, mais cela le contraint à accor- velles de leurs clients et accompagner leurs expériences der sa confiance à un service tiers de conservation de son digitales par une efficacité d’exécution accrue. Cela ne wallet (équivalent à un porte-monnaie électronique dans pourra être fait sans une adoption des nouvelles techno- lequel sont déposés ses bitcoins) ou à échanger sa cryp- logies allant de pair avec une révision en profondeur de to-monnaie contre une monnaie traditionnelle plus large-

34 RÉALITÉS INDUSTRIELLES - AOÛT 2017 Une chose,cependant,n’apaschangé risé lacroissance desmarchés d’ 2000. Ces différentes révolutionstechnologiques ont favo finalement, letradinghautefréquence,depuislesannées et, durant lesannées1980-1990,laconnectivitéd’Internet marchés de capitaux avec leur informatisationprogressive en particulierremarquable danslecasdesactivitésde la digitalisation et l’accélération des échanges. Cela a été facilitent,depuisdenombreuses l’essor d’Internet) années, Les technologies numériques (portées, par exemple, par La promesse d’unevérité partagée La’Zooz À titre d’exemple, les promesses d’Arcade City et charge decoderlesmartcontract. si, ilseranécessaire defaire confianceàlapersonne en et entière ducodedéfinissantles ment nécessaire pourpouvoirvalider la conformité pleine légal. Demain,lerecours àuninformaticienseraprobable- lui permet de certifier la conformité De manière analogue,lejuristedétientuneexpertisequi naie quifontlesgros titres delapresse. pirates etquisontresponsables desvolsdecrypto-mon tiers deconfiance quisefontprendre endéfaut parles ment acceptée.Cesontlaplupartdutempscesnouveaux la technologieetversceuxquimaîtrisent. bue surlachaînedevaleurentransférantcettevers disparaître lestiersdeconfiance, maisqu’elleles redistri BFI estimentgénéralementquelablockchainnefaitpas Contrairement àune idée reçue largement partagée, les disposition etgrâceàlaquelleellesopèrent. leur confiancedanslatechnologiequ’ellesmettentà et àlatechnologie,lesutilisateursacceptentdeplacer elles restent les opérateurs donnant accès à la plateforme à leursutilisateurs(notammentsurlesprix).Enrevanche, forme d’opérateuroffrant plusdeflexibilitéetliberté demeure nécessaire. Ces plateformes sont une nouvelle viennent confirmerunefoisdeplusqu’untiersconfiance autres acteursetaveclasiennepropre. vision partiellequ’ilsedoitde réconcilieraveccelledes de contrôle,ilreçoit delapartchaqueacteurcette tante et exhaustive afin de mener pleinement son action idéale. Ayant besoind’unevisibilitétoujoursplusimpor Pour lerégulateur, cettesituationestégalementloind’ cette période,lerisquedoitêtre provisionné. Euro) deux puisque lerèglements’effectue (en risques demeurent. Ilsnuisentàl’efficacitédeséchanges, sation), pour unepart importante de ces échanges, ces de tiersconfiance(commeleschambres decompen de lapartdesBFIafinlesexpliquer. Malgrélaprésence ils exigentuneénergie considérable(etlecoûtyafférant) sistent. Cesécartsreprésentent un risque,mais,surtout, ces visions sont partagées, fréquemment des écarts sub- mande uneffort important et,mêmesi,laplupartdutemps, réconcilier aveccelledesesdifférentes contreparties de pant inscritdesoncôtésapropre visiondeséchanges.La

(1) , entantqueconcurrents potentiels d’Uber, jours plustard, etilsontuncoût,puisque,sur échanges etleurliquidité. général,surlemarché smart contracts.Ain- juridique d’un contrat

: chaquepartici être ------(2) Le plateforme centraliséequifixenotamment leprixdelacourse. chauffeur etlepassagersontmisenrelationsanspasserparune blockchain pour«désintermédier»lesplateformesdetypeUber. Le (1) La’ZoozetArcadeCitysontdesprojetsquivisentàutiliserla portant. douane, dépôtdanslesentrepôts, connaissement…)yesttrèsim l’acheteur (parexemple,parbateau). Leformalisme(passagesen chandise pendantlaphaseoùcelle-ci esttransféréeduvendeurà Le digitales L’ (voiretué enfindejournée plusfréquemment). contrôleur. Lerèglement des échanges pourrait être effec alors jouerpleinementetdematière efficaceleur tive seraitofferte auxautoritésdetutelle,quipourraient être nulset,d’autre part,unevisionglobaleetexhaus d’une part,lesécartsentre lesdifférents acteursdevraient limitée auxéchangessurlesquelsilestintervenu,mais, d’un marché. Danscemodèle,chacunauraitunevision partagée entre l’ensemble des acteurs et des opérateurs vision uniqueet,parlàmême,unederéférence, changer ceparadigme.Ellespermettraientd’instaurer une Les technologiesderegistre distribuéontlafaculté de de propriété, parexemple). tion digitaledelatransaction partage d’informationsetàlatraductionréelledel’exécu- tie naîtlaconfiancenécessaire àcettecollaboration,ce vis-à-vis desautres acteursdelachaîne.Decettegaran certifiant cette information devient un élément engageant nir lacorrompre. Enrevanche, lasignature électronique ni mêmeunadministrateurdel’ensemble,nepourraitve information toutenayantlagarantiequ’aucunmembre, acteurs dedigitalisercettechaîne,chacunyapportantson Les technologiesderegistre distribuépermettentàces l’échange. terviennent inspecteurs, assureurs, transporteurs, douaniers… in- l’échange. Maisilsnesontqu de trésorerie et de couvrir une partie des risques liés à échanges enleurpermettantdefinancerleursbesoins pagner lesimportateursetexportateursdansleurs Aux yeuxdubanquier, sonrôleesttoujoursd’accom puisse avoirlieupar-delà lesfrontières etlesterritorialités. l’échange de valeurscontre desproduits ou services taurer entre euxlaconfianceminimale requise pourque teurs privésetpublicsd’horizonsdifférents puissentins C’est làleprixàpayerpourqu’ungrandnombre d’ac gestion desdocumentspapiersonttrèssignificatifs. sa reconnaissance. Lecoûtetletempsnécessaires àla de signature entampon,jusqu’ papier règneencore enmaître, passantdemainen main, complexifiés etsophistiquésavecletemps.Ledocument au MoyenÂgeperdurent aujourd’hui, mêmes’ilssesont de baseposésparlesbanquesgénoisesetvénitiennes ment résistéauxtentativesdedigitalisation.Lesprincipes émergence denouvellesplateformes Trade Finance Trade Finance consiste, pour une banque, à financer une mar également RÉALITÉS INDUSTRIELLES - AOÛT 2017 (2) estuneactivitéqui,jusqu'ici,aglobale sur cettechaîneafindesécuriser

(paiementcontre transfert ’un maillondelachaîne à l’expertisenécessaire à rôlede

35

------:

Éric ROSSIGNOL et Xavier LAURENT Les entreprises viendraient sur ces plateformes afin d’ob- blockchain ont déjà été mis en œuvre, dont l’un a montré tenir soit une réduction de coût par rapport à une formule que la blockchain pourrait supporter un smart contract re- sécurisée sous le format actuel avec recours à un tiers lativement sophistiqué afin de calculer le prix de cession de confiance, soit un surplus de sécurité, de traçabilité de manière fine, et ce, sans l’intermédiation d’un tiers de de leur transaction et de sécurisation de l’exécution des confiance explicite. Une prochaine étape devrait être de paiements, et ce, pour un coût comparable au coût actuel. convaincre des entreprises partenaires de mettre en place Elles pourraient à terme accéder, par ce biais, à une mar- l’ensemble du processus. De nombreuses questions juri- ket place de services de financement et de couverture de diques restent en revanche ouvertes à ce stade, et néces- divers risques. sitent d’être traitées en parallèle. Focus sur la titrisation : une synthèse Des questions demeurent… des bénéfices des technologies de registre distribué (DLT) Lorsqu’Elon Musk s’est entendu expliquer que l’accélé- ration de son premier concept d’Hyperloop tuerait proba- Le financement de l’économie (dite « réelle ») est effectué blement le passager, il a répondu : “It’s an issue (3)”, mais il massivement via les créances commerciales. Pour mé- n’a pas renoncé pour autant. Aujourd’hui, de nombreuses moire, une créance commerciale est la matérialisation questions restent pendantes autour de l’exploitation de la dans le bilan d’une entreprise d’une prestation effectuée technologie blockchain. par un fournisseur, mais non encore payée par le client. La « scalabilité » en est une : il faut faire en sorte que De nombreuses entreprises se financent majoritairement les crypto-monnaies puissent être échangées dans les grâce à leurs dettes commerciales. mêmes volumes de transaction que leurs grandes sœurs Aujourd’hui, la créance commerciale est peu standardisée les monnaies fiduciaires sans que soient détériorés les (gestion des conflits, gestion des paiements, identifica- mécanismes qui en assurent la sécurité. Certaines DLT tion des clients…), ce qui rend cet actif peu liquide. Il est proposent d’utiliser des méthodes de consensus plus ef- possible, pour une entreprise, de vendre cet actif (via la ficaces, mais celles-ci ne conservent leur avantage que titrisation, l’affacturage ou le forfaiting) afin d’obtenir ra- pour un nombre limité de participants. pidement des liquidités. Mais le coût de cette vente est Le seul mécanisme « clé publique/clé privé » ne peut ga- élevé en raison : rantir l’anonymat de l’utilisateur. En effet, on peut imaginer

l de la nécessité, pour la banque qui finance de connaître que dès lors que l’on disposerait d’un nombre de tran- l’acheteur et le vendeur ; sactions suffisant, des« patterns » apparaissent permet-

l de la nécessité, en général, de connaître les procédures de tant d’établir un lien entre les transactions digitales d’une recouvrement et de litige entre l’acheteur et le vendeur ; blockchain et les contreparties réelles intervenant sur

l du mode de calcul du prix d’achat et de la structure de celle-ci. La police danoise a ainsi été en mesure, à plu- ce prix (par exemple, paiement différé du prix en fonction sieurs reprises, de faire condamner des trafiquants se fai- de la performance du portefeuille acheté). sant payer en bitcoins pour échapper aux contrôles de la lutte anti-blanchiment (4). Il faut donc imaginer une couche Le calcul du prix d’achat est soit très simple, mais, dans supplémentaire renforçant cette anonymisation afin de un tel cas, il n’est pas très efficace (en raison notamment garantir la confidentialité des transactions. de l’anti-sélection), soit complexe (auquel cas il nécessite un tiers de confiance pour le valider). La gestion des données est un autre élément clé. Les blockchains publiques ne garantissent pas la confidentia- La créance commerciale apparaît donc comme étant un lité des données stockées. Il appartient donc, de prime très bon candidat pour l’utilisation de la blockchain, qui abord, de définir si des données peuvent apparaître en permettrait : clair dans les smart contracts (si, par exemple, il est im-

l de standardiser la créance pour la rendre aussi liquide possible de les interpréter…) et d’identifier celles qui ne que possible ; pourront pas être stockées sans se retrouver en infraction

l d’assurer un suivi simplifié des créances pour l’ensemble avec les réglementations en vigueur. Enfin, pour les don- des parties prenantes ; nées restantes, il convient de prévoir des mécanismes de

l de simplifier la procédure de transfert ; cryptage permettant aux seules contreparties concernées

l de limiter les coûts de structure via une réduction du de déchiffrer les données les concernant. Selon les cas, nombre des intermédiaires et des tiers de confiance ; certaines DLT ont embarqué ces préoccupations très tôt

l d’effectuer un calcul fin du prix d’achat au sein d’un dans leur développement et ont intégré les mécanismes smart contract, qui limiterait les risques d’anti-sélection tout en maximisant le prix d’achat pour le vendeur ; CAS D’USAGE, TRANSFORMATIONS DES ENTREPRISES ET SECTEURS ÉCONOMIQUES CAS D’USAGE, TRANSFORMATIONS l d’optimiser la fréquence des paiements : aujourd’hui, une opération de titrisation classique prévoit un transfert par mois, ce rythme pourrait passer, via une DLT, à un virement quotidien. (3) « C’est [effectivement] un problème. » (4) Source : https://thenextweb.com/eu/2017/02/21/danish-po- Des prototypes permettant de créer un environnement lice-hunt-down-criminals-using-bitcoin/?utm_source=social&utm_ propice au transfert simplifié des créances au sein de la medium=feed&utm_campaign=profeed#.tnw_r146Uuzn

36 RÉALITÉS INDUSTRIELLES - AOÛT 2017 répondant à ces problématiques. Il nous appartient donc tière de « scalabilité ») et ses successeurs (qu’il s’agisse d’être extrêmement vigilants dans le choix de la technolo- de la proof of stake, de l’insoluble problème des géné- gie à utiliser, en fonction du cas d’usage envisagé. raux byzantins ou du très prometteur Algorand) doivent encore faire leurs preuves. C’est dans la poursuite des ex- Conclusion périmentations et dans une collaboration des BFI élargie à leurs clients et aux autres acteurs de leurs chaînes de Les promesses de la blockchain semblent aujourd’hui se valeur que la solution émergera pour le bénéfice de l’en- confirmer, sans pour autant s’être pleinement concréti- semble des parties prenantes de ces réseaux d’un type sées à ce jour. La technologie doit encore mûrir de façon nouveau. à répondre aux inquiétudes qu’elle suscite. Le consensus par proof of work a montré ses limites (notamment en ma- Éric ROSSIGNOL et Xavier LAURENT

RÉALITÉS INDUSTRIELLES - AOÛT 2017 37 Comment La Poste, acteur de confiance séculaire, aborde-t-elle la blockchain, avec l’appui de l’IRT SystemX ?

Par Alain ROSET* La Poste et François STEPHAN* Directeur général adjoint en charge du développement et de l’international de l’Institut de recherche technologique (IRT) SystemX

D’aucuns prédisent que la blockchain, nouvelle technologie de rupture, permettra une profonde mutation des tiers de confiance rendue possible par la technologie numérique et la puissance de la multitude. Aux yeux de certains, la blockchain semble avoir le pouvoir non seulement de modifier radicalement des modèles économiques historiques établis depuis des décennies ou des siècles, mais aussi de bousculer des modèles économiques très récents (eux-mêmes déjà en rupture). Opérateur historique de confiance depuis des siècles, La Poste renforce depuis plusieurs années sa présence sur Internet et a lancé des services numériques de confiance, confirmant ainsi son rôle de tiers de confiance aussi bien dans l’univers physique que dans l’uni- vers numérique. Le groupe postal français investit depuis 2014 dans la blockchain et a décidé, en 2016, de s’associer à l’IRT SystemX, un institut de recherche associant compétences indus- trielles et académiques, afin d’accélérer son cycle d’innovation s’appuyant sur cette technologie.

Introduction La Poste : un grand groupe historique

L’informatique a marqué les dernières décennies de son C’est dans ce cadre particulièrement bouleversé qu’évolue empreinte, transformant la société et bouleversant cer- le groupe La Poste, qui est chargé depuis six siècles de por- tains secteurs économiques. Depuis les premiers calcu- ter des messages, dans un premier temps dans le seul inté- lateurs électroniques apparus au milieu du XXe siècle et rêt du roi, puis, à partir du règne d’Henri IV, pour des clients leur première formalisation par Alan Turing, plusieurs va- privés. La Révolution française impose, par une loi adoptée gues technologiques ont structuré les développements et en 1791, le secret et l’inviolabilité des correspondances. La Internet révolutionne les échanges entre les individus en neutralité de l’opérateur, la préservation de la vie privée et permettant la création et la publication d’informations por- du secret du contenu des correspondances, comme celle tées par des terminaux toujours plus variés et nombreux. des « métadonnées » associées, sont ainsi institutionnali- Avec sa première application de crypto-monnaie bitcoin sées et traduites en procédures internes, dont fait partie le lancée en 2009, la technologie de la blockchain apparaît « serment du facteur » que doit prononcer tout employé du en 2017 porteuse de nouveaux facteurs déterminants au service lors d’une cérémonie solennelle, et ce, depuis 1790. service de l’innovation numérique : la désintermédiation, C’est ainsi qu’une confiance envers les prestations de CAS D’USAGE, TRANSFORMATIONS DES ENTREPRISES ET SECTEURS ÉCONOMIQUES CAS D’USAGE, TRANSFORMATIONS la transparence, l’immuabilité, la disponibilité et la sécurité, l’opérateur postal s’est rapidement installée au sein de préfigurant ainsi une nouvelle génération de services de confiance. la population française, assurant le déploiement de nou- veaux produits : des produits d’échanges financiers (man- Face à ces mutations rapides, l’opérateur postal français dats) ont été ainsi lancés avec succès dès le début du XIXe doit être à même de comprendre ces évolutions pour adapter ses offres et ses process, tout en gardant ses va- * Les propos tenus dans cet article n'engagent que les auteurs et en leurs historiques capitalisées au fil du temps. aucun cas le groupe La Poste.

38 RÉALITÉS INDUSTRIELLES - AOÛT 2017 Photo © Jean Vigne/KHARBINE-TAPABOR Blockchain. » « LaPoste,chargée depuissixsièclesdeporterdesmessages,s’intéresse désormaisàla Timbre dutimbre commémoratiffrançaisàl'effigiedeLouisXI(créateurlaposted'État)créél’occasionjournée 1945. matique aaffecté l’économiedesmarchés postaux,mais entreprises, lapremière vaguededéploiement del’infor Essentiellement centréesur les processusdes internes sur LaPoste sociétales etleursimpacts l’information etdestechnologies L’évolution destechnologiesde de touslesfacteursensmartphones,2012). des guichetsenordinateurs individuelsen1984etcelui banque àdistance,dès1980,surMinitel,l’équipement que danslestechniquesdecommunication,avecla vaux jusqu’auxvolsdenuitetauxvéhiculesélectriques, dans lesmoyensdetransport,depuislaposteauxche intégrées dansl’offre postaleetdanslesprocédures (tant Les colis entre lesentreprises etlesparticuliers. échanges descommandes,paiementset,enfin, fusion fiabledecataloguesetplispublicitaires etles (particulièrement active en France) reposant sur une dif- dès lesannées siècle Cette confiancedupublicaaussiportéledéveloppement, de devenirunvéritableopérateurbancaire , en2006. laire (aveclelivret A)pourfinalementpermettre àLaPoste évolutions technologiquesontétésystématiquement

; ilsontété

1970, d’uneventeparcorrespondance suivispardesproduits d’épargne popu - - - et bienconnuessousl’acronyme des formes d’intermédiationbifacessouventmonopolistiques conforté lespositionsdestiersdeconfiance,plate IP (quiesttrèsouvert)a,contrairement auxaugures initiaux, développement technologiquebasésurleprotocole TCP/ écrite sontdésormais largement visibles.Mais ce modèlede les ruptures économiques affectant le secteur de la presse Reposant pour partie sur une distribution postale à domicile, merce beaucoupplusdématérialisé. mant lescommandesdeventeàdistance postaux enréduisantlapartdespublicitésettransfor évolution acommencéàaffecter lemarché deséchanges tions entre lespersonnes etlesentreprises. Cettedernière seulement les jourslafragilitédusystème techniquesous-jacent. les protocole desservices àvaleurajoutée.Mais pourfournir Apple, Facebook,Amazon),qui pallientlesdéfautsnatifsdu particuliers. Enrevanche, àlafindesannées sée par la croissance des flux publicitaires en direction des réduction des volumes postaux a été largement compen- par quelquesfluxstructurésdefactures (EDI)–maiscette intégralement migréverslecourriel,accompagnés modeler les liens sociaux et aréussiàreFrançais, accompagnédel’envold’Internet, veloppement del’informatiqueindividuelleaudomiciledes spams, les à lamarge RÉALITÉS INDUSTRIELLES - AOÛT 2017 fake news et autre

: lescourriersentre entreprises ont à transformer les communica- phishing démontrent tous «

GAFA via une-com

1990, ledé

» (Google, (Google, en cela en cela

39 - - - - -

Alain ROSET et François STEPHAN En parallèle, à l’instar du marché des télécommunica- l La maîtrise de la confiance par la multitude demandera tions, l’économie postale européenne s’est lancée dans une période de transition durant laquelle des initiateurs une démarche d’ouverture du secteur à la concurrence, de services (voire des garants ultimes) seront néces- obligeant chaque opérateur à engager une profonde ré- saires ;

flexion sur sa stratégie à long terme pour anticiper l’ar- l Les dimensions juridiques et les modèles d’affaires rivée de concurrents (qui in fine n’a jamais été avérée) et doivent donner lieu à des travaux théoriques et pratiques la dématérialisation progressive des échanges entre les permettant de guider les modalités de diffusion de la entreprises et les particuliers. blockchain hors du champ des seules crypto-monnaies ;

l L’intrication entre la gestion des transactions et celle Le groupe postal français a répondu à ces nouveaux dé- de la crypto-monnaie sous-jacente ouvre de nouvelles fis par une européanisation de son activité de distribution perspectives de modèles d’affaires, tant pour le lance- des colis préfigurant l’impressionnante montée en puis- ment de start-ups que pour le fonctionnement des ser- sance de l’e-commerce et, sur le marché du courrier, par vices eux-mêmes. une alternative différente et originale (parmi les opérateurs européens) d’investissement sur l’ensemble de la chaîne La technologie est encore immature (par exemple, les de valeur du courrier. Très tôt, la numérisation largement processus de consensus dans un univers distribué sont établie de cette chaîne de valeur a judicieusement apporté étudiés depuis les années 1985, l’immuabilité des smart des compétences nouvelles au groupe en matière de tech- nologies de l’information, et ce, à des fins tant publicitaires Dates marquantes de l’Histoire de la Poste que transactionnelles. Ces compétences associées au pa- trimoine historique et culturel du groupe ont débouché sur 1477 Louis XI crée La Poste d’État à l’usage exclusif du un positionnement de tiers de confiance à la fois dans l’uni- roi. Il met en place le système des relais de poste vers physique et dans l’univers numérique, en jouant sur 1603 Henri IV fait de La Poste royale la première poste les synergies indispensables dans une société pas encore aux lettres d’État, celle-ci est à la disposition du public entièrement acquise aux derniers outils technologiques. 1790 Les employés des Postes doivent faire le serment La proposition (en 2008) d’un protocole bitcoin, assem- de respecter le secret des correspondances blage subtil de briques technologiques issues des re- cherches en cryptographie et en informatique distribuée, 1817 La Poste crée le mandat postal, alternative au pourrait préparer une nouvelle rupture dans les technolo- transport matériel d’espèces gies de l’information induisant une évolution des relations 1829 Création du service des lettres recommandées interpersonnelles ou avec des systèmes automatisés complexes. 1849 Création du timbre-poste français à l’effigie de Cérès (ceux-ci sont gravés par Jacques-Jean Barre) La blockchain est globalement présentée comme une technologie apte à construire une confiance entre des 1881 Création du Livret d'épargne et de la Caisse na- acteurs ne se faisant pas confiancea priori (c’est la mé- tionale d’Épargne taphore des « généraux byzantins »), propre à supporter 1881 Création du service des colis des transactions, sans pour autant être portée par un tiers qui est lui-même remplacé par la multitude. Un écosys- 1912 Premier vol postal officiel en France effectué sur tème riche et bouillonnant est en cours d’installation à un biplan Farman, de Nancy à Lunéville l’échelle du globe, avec ses start-ups, ses financiers, ses 1918 La Poste crée les chèques postaux développeurs, ses « mineurs » et ses « gourous » décrivant finement la révolution sociétale à venir et débouchant sur 1972 Création du code postal à cinq chiffres permet- un très grand nombre d’expérimentations. tant d’automatiser le tri du courrier Très rapidement, cette innovation interpelle le positionne- 1984 Premier TGV postal ment de tiers de confiance du groupe postal français, qui 2000 (août) La Poste lance @laposte.net et offre une entreprend une veille active pour en cerner les risques et adresse gratuite et pérenne à tous les Français. Créa- les opportunités qui sont tapis derrière le « buzz » et le tion de GeoPost, le pôle colis et logistique du groupe « hype » du phénomène. La Poste Couplé à un réalisme pragmatique issu des contacts quo- 2003 Lancement du programme de modernisation in- tidiens des facteurs avec la population française, l’aspect dustrielle Cap Qualité Courrier polymorphe des concepts innovants (à la fois techniques, financiers, juridiques et organisationnels) induit pour le 2006 La Poste accueille La Banque Postale, qui en-

CAS D’USAGE, TRANSFORMATIONS DES ENTREPRISES ET SECTEURS ÉCONOMIQUES CAS D’USAGE, TRANSFORMATIONS groupe postal ces premières conclusions (encore provi- dosse le statut d’une banque soires) : 2010 Le groupe La Poste change de statut pour deve- nir une société anonyme à capitaux 100 % publics : La l La notion de tiers de confiance sera moins centrale, dans une blockchain, mais elle restera très présente, en Poste S.A. périphérie : gestion des identités et des clés d’accès, 2016 Premier service de courrier régulier effectué par validation des informations d’entrée aux transactions des drones (notion d’oracle), par exemple ;

40 RÉALITÉS INDUSTRIELLES - AOÛT 2017 contracts imposera une approche par preuve formelle du Le développement, au sein de l’IRT SystemX, d’une plate- code) et elle requiert un approfondissement scientifique forme expérimentale permettant de modéliser, de simuler important grâce auquel la recherche française en informa- et d’évaluer le couplage des technologies de la blockchain tique pourra conforter sa renommée mondiale en résol- au travers de cas d’usage innovants est lui aussi de nature vant des cas d’usage pertinents. à accélérer l’innovation dans le domaine. Un approfondissement des faiblesses identifiées dans les Les principaux défis traités par ce projet couvrent le pas- blockchains est à mener, soit afin de les pallier grâce à des sage à l’échelle d’une blockchain, la notion de confiance nouveautés algorithmiques devant être soigneusement numérique (Data Privacy, cybersécurité de la blockchain), testées, soit afin de les interfacer avec des prestations les mécanismes de consensus et de validation des tran- déjà existantes, et ce, dans des synergies constructives. sactions, la gouvernance de services s’appuyant sur une blockchain, les tests de maturité des briques technolo- Une nouvelle approche de R&D giques de la blockchain, l’interopérabilité et l’intégration ouverte pour accélérer l’innovation « cross-chain », les modèles économiques, l’acceptabilité dans le domaine sociétale, les aspects juridiques.

Pour mener à bien ces travaux, et en complément à notre Au printemps 2017, l’IRT SystemX a lancé son programme participation au projet initié par le groupe Caisse des Dé- « START@SystemX » en direction des start-ups œuvrant au pôts (initiative Labchain) qui s’est focalisé sur les domaines développement de la blockchain. Les start-ups sélection- de la banque et de l’assurance, il est apparu, pour l’appli- nées se voient offrir l’opportunité de valoriser pour elles le cation de blockchains dans les autres marchés sur lesquels potentiel de la blockchain en collaborant avec des acteurs

le groupe La Poste est présent, qu’une partie des tâches industriels et académiques du projet de R&D de SystemX, Alain ROSET et François STEPHAN pouvaient se dérouler dans un environnement collaboratif au travers de sa plateforme de recherche expérimentale. s’appuyant notamment sur des équipes universitaires fran- çaises. C’est ainsi que La Poste s’appuie depuis fin 2016 Conclusion sur l’IRT (Institut de Recherche technologique) SystemX (si- Il est vraisemblable qu’aux environs de 2020, plusieurs tué sur le plateau de Saclay) pour une partie de ses travaux services de confiance reposeront sur desblockchains , de recherche et développement dans ce domaine. principalement au sein de consortiums qui s’ouvriront pro- Nouvel acteur de la recherche partenariale et de l’inno- gressivement à des partenaires toujours plus nombreux vation ouverte en France créé en 2012 avec l’appui du constituant des grappes de services interconnectés de fa- Programme des Investissements d’avenir, l’IRT SystemX çon sécurisée. Plusieurs domaines des services postaux accélère la transformation numérique de l’industrie fran- pourront être modernisés en s’appuyant sur les avantages çaise et des collectivités en réunissant les compétences des blockchains qui apporteront l’unicité des enregistre- et les technologies de plus de 70 entreprises partenaires ments, la transparence, l’auditabilité de toutes les opé- (grands groupes, ETI, PME et start-ups) et de sa vingtaine rations et l’immuabilité des informations. Le groupe La de partenaires académiques actifs autour de projets de Poste aura alors à retravailler son positionnement de tiers recherche et développement en ingénierie numérique des de confiance pour s’adapter à cette nouvelle technologie systèmes complexes. en apportant des réponses aux fragilités du système, à savoir la gouvernance entre toutes les parties prenantes, L’IRT SystemX a lancé fin 2016, pour une durée de 4 ans, la capacité du passage à l’échelle, les faiblesses en péri- un projet de R&D sur la blockchain qui réunit plusieurs phérie de la chaîne centrale, la gestion des identités phy- entreprises porteuses de cas d’usage, de technolo- siques des utilisateurs, et ce, en s’appuyant sur l’ouver- gies et de compétences (dont La Poste) désireuses de ture de certaines réglementations qui conserveront leurs mutualiser leurs efforts et de partager leurs avancées sur finalités sans imposer des modalités de mise en œuvre cette innovation de rupture. Le projet associe des acteurs trop précises. industriels de tailles variées à des chercheurs acadé- miques de l’Université Paris-Saclay, en particulier l'Inria Cette vision globale repose sur la mobilisation des res- (avec un partenariat avec l’Université de Berkeley, en sources scientifiques françaises autour de ces thématiques Californie), Télécom ParisTech, l’Université de Versailles (que celles-ci se trouvent dans les entités de recherche ou Saint-Quentin-en-Yvelines et les ingénieurs de recherche qu’elles soient déjà engagées dans des start-ups), que le de l’IRT. projet « Blockchain for Smart Transactions » de l’IRT Sys- temX coordonnera. En participant activement (et financièrement) à ce projet, les industriels partagent les bonnes pratiques sur l’innova- Souhaitons que grâce à ces compétences le groupe La tion par la blockchain tout en bénéficiant d’un enrichisse- Poste sache construire de nouvelles offres et intégrer ment croisé des avancées technologiques entre les diffé- cette nouvelle technologie qu’est la blockchain, et ce, au rentes applications de la blockchain (comme la mobilité, la service de l’ensemble des citoyens français. logistique, l’énergie, les télécommunications, la sécurité, la finance, etc.).

RÉALITÉS INDUSTRIELLES - AOÛT 2017 41 Le fonctionnement de la blockchain

Par Gautier MARIN-DAGANNAUD Élève-ingénieur à Télécom ParisTech – Institut Mines-Télécom et étudiant en master à l’École polytechnique, actuellement chez Ledgys

La blockchain est une technologie profondément disruptive. Pour en saisir le potentiel, il est indispensable de comprendre les bases de son fonctionnement à travers son cas d’usage origi- nel, Bitcoin. Une blockchain est un registre distribué, c’est-à-dire partagé entre les acteurs d’un réseau. Comme dans tout registre, il y a des utilisateurs, qu’il faut pouvoir identifier, et des tran- sactions, qui modifient l’état du registre. Cependant, à la différence de l’immense majorité des registres actuels, la blockchain fonctionne sans autorité centrale de contrôle. Cela implique de nombreux enjeux et problématiques techniques.

es plateformes logicielles actuelles (Facebook, Ama- zon, Uber, banques en ligne) ont toutes un point Lcommun, celui d’être organisées autour d’un acteur central chargé de maintenir leur intégrité et d’assurer leur développement. Cette centralisation a des avantages, notamment en termes de rapidité dans la gestion des conflits et de capacité à monter en charge, mais elle pré- sente également de nombreux inconvénients, comme la censure, le monopole ou la vulnérabilité aux attaques. La blockchain est une technologie permettant de partager une base de données de manière décentralisée, c’est- à-dire entre acteurs ne se faisant pas nécessairement confiance et sans entité centrale de contrôle. Elle rend possible la création d’un nouveau type de plateforme lo- Figure 1 : Deux systèmes de maintien d’un registre : centralisé gicielle, les plateformes décentralisées. Pour bien saisir vs décentralisé. ce changement de paradigme, il est nécessaire de com- tégé par cette décentralisation. En effet, même si un ou prendre les bases du fonctionnement de cette technologie. plusieurs nœuds sont altérés ou détruits, le registre sera Comment fonctionne une blockchain ? conservé tant que subsisteront des nœuds « honnêtes ». L’exemple de Bitcoin Identifier les utilisateurs Les origines Les utilisateurs du réseau sont identifiés par leur adresse, qui permet aux autres utilisateurs de leur envoyer des bit- À l’origine, la technologie blockchain a été inventée pour coins. À chaque adresse est associée une clé privée. C’est permettre la création de la première monnaie numérique elle qui permet de « débloquer » les fonds. L’adresse est décentralisée, le Bitcoin. Bitcoin est un système de paie- générée en local par l’utilisateur à partir de sa clé privée, ment digital s’appuyant sur la crypto-monnaie du même et ce, grâce à de complexes fonctions mathématiques, nom. Comme dans tout système de paiement, il est né- dont il suffit de retenir qu’elles fonctionnent à sens unique. cessaire de tenir à jour un registre des comptes pour pou- S’il est quasiment impossible de trouver la clé privée as- voir connaître la balance financière de chaque utilisateur. sociée à une adresse donnée, il est en revanche très facile Dans le monde « réel », ce sont les banques qui tiennent ce de trouver l’adresse correspondant à une clé privée. registre. Si l’on souhaite envoyer de l’argent à quelqu’un,

CAS D’USAGE, TRANSFORMATIONS DES ENTREPRISES ET SECTEURS ÉCONOMIQUES CAS D’USAGE, TRANSFORMATIONS il faut en faire la requête à la banque, puisque c’est elle Pour débloquer les fonds, l’utilisateur n’a pas à communi- qui tient les comptes. On parle d’organisme centralisé. Le quer sa clé privée au réseau. S’il le faisait, n’importe quel principe fondamental de Bitcoin est relativement simple : nœud la recevant pourrait dépenser les fonds associés à au lieu que le registre soit maintenu par un seul organisme l’adresse correspondante. Au lieu de cela, il produit – tou- privé, il l’est de manière décentralisée. En clair, chaque jours en local – une signature électronique associée à la ordinateur (appelé nœud) du réseau contient une copie du transaction qu’il souhaite effectuer. Cette signature élec- registre et aide à le maintenir à jour. Le registre est pro- tronique prouve que la personne possédant la clé privée

42 RÉALITÉS INDUSTRIELLES - AOÛT 2017 registre. Lesblocscontiennentunelistede et permetàtouslesnœudsdes’accorder surl’ Figure 2:Fonctionnementsimplifiédela synchroniser chaîne deblocsaveclaquelle chacun desnœudsdoitse manière ordonnée ethorodatée lestransactionsdansune Pour pallierceproblème, Bitcoin propose d’enregistrer de un désaccord surl’étatduregistre. le processus inverse.Àl’ invaliderait la seconde, tandis que d’autres effectueraient recevraient l’une des deux transactions en premier, ce qui mais ayantdeuxdestinataires distincts.Certainsnœuds transactions prenant pourpointd'entréelemêmebitcoin, qu’un utilisateur signe et envoie au même moment deux prépondérant danstoutsystèmedécentralisé.Supposons lution au problème de la double dépense, un problème consensus. Plusprécisément,ils’agitd’apporteruneso L’innovation delatechnologie Les basesdelablockchain l’innovation apportéeparlatechnologieblockchain. sable aufonctionnementdeBitcoin,cen’esttoutefoispas réseau. Si la signature électronique est un outil indispen d’autoriser destransactionssansrévélerlacléprivéeau Le mécanismedelasignature électronique permet donc à cettesignature. réseau nepeuventdoncpasdevinerlacléprivéeassociée la signature estelleaussi transaction. Deplus,lafonctionpermettantcréationde gnifie qu’ellenepeutpasêtre réutiliséepouruneautre a bienapprouvé latransaction.Elleestunique,cequisi

: c’estla blockchain. Cettechaîneestunique échelle duréseau,ilyauraitdonc à sensunique blockchain portesurle blockchain. . Lesnœudsdu s transactions état du - - - peut devenirun jusqu précédent, cequiformeunechaînedeblocss quelques subtilités près). Chaque bloc référence le bloc possèdent unecopie tue auniveaudechaquenœud.Ainsi,touslesnœuds qui modifientl’étatduregistre. L ciaux quel’onappelle bloc. Lesnœudscréateurs de blocssontdesnœudsspé Reste àsavoirquelnœudaledroit decréerleprochain dépense. ce système,ilestdoncimpossibled’effectuer unedouble ne peuventpasêtre inclusesdanslemêmebloc.Dans c’est-à-dire quitententdedépenserlesmêmesbitcoins, dans unbloc.Deplus,deuxtransactionsconcurrentes, saction n’estpasfinalisée tantqu’ellen’apasétéincluse quis etquesasignature soitvalide.Cependant,unetran soit valide,ilfautquel’utilisateurdisposedesfondsre pair àtraversleréseau.Pourqu’unetransactionémise est transmiseauxnœudsvoisins,puisrelayée depairen Après avoirétégénéréeparunutilisateur, unetransaction Le fonctionnementsimplifiédelablockchain sactions nonconfirmées place danscequel’onappelle« jusqu’au dernier blocajoutéavantl’instantconsidéré. jusqu’au dernier il suffitde remonter lachaînede créé. Pourconnaître l’ mineur reçoit unenouvelle transactionnonvalidée,illa disposer dumatérieletlogicieladéquats.Lorsqu’un ’au «

genesis block RÉALITÉS INDUSTRIELLES - AOÛT 2017 «

mineur état duregistre àuninstantdonné, « à l’identiquedela

mineurs », letoutpremier

». Cetensembleestpropre à » , il suffit pour l’internaute de , ilsuffitpourl’internaute s blocsdepuissonorigine

» ’ajout deblocss’effec- . N’importequelnœud

l’ensemble destran bloc blockchain (à à avoirété ’étend

43 - - - -

Gautier MARIN-DAGANNAUD chaque mineur, il peut différer d’un mineur à l’autre du transactions du bloc, ainsi que la preuve de travail, puis fait du temps de propagation des transactions sur le ré- ajoutent le bloc à la chaîne. Si le nœud est un mineur en seau. C’est une sorte de liste d’attente pour transactions, train de chercher un bloc valide, il doit reprendre le pro- celles-ci en sortant une fois qu’elles ont été incluses dans cessus de création de bloc à partir de ce nouveau bloc un bloc. créé (rappelons que tout bloc pointe sur le précédent). Il est possible qu’un nœud du réseau reçoive des blocs Créer un bloc : la « preuve de travail » – ou des successions de blocs – valides concurrents. N’importe quel mineur peut collecter un certain nombre Dans ce cas, la règle est de toujours prendre la chaîne la de transactions dans sa liste, vérifier leur validité et former plus longue comme référence. un bloc. Cependant, ce bloc ne sera pas validé tant que le Cette règle implique que pour qu’un attaquant fasse ac- mineur n’aura pas produit la « preuve de travail » (Proof of cepter aux nœuds du réseau sa version de la chaîne, il Work) associée au bloc considéré. Cette preuve de travail doit être en mesure de produire une chaîne de blocs va- est une donnée difficile à produire, mais facile à vérifier. lides plus longue que celle sur laquelle travaillent tous les Sans cette donnée, le bloc ne peut pas être validé par les autres mineurs « honnêtes ». En d’autres termes, il doit nœuds du réseau, même si les transactions qui le com- posséder plus de 50 % de la capacité de calcul du réseau. posent sont valides. Le fait qu’il soit difficile de créer cette C’est ce que l’on appelle une « attaque 51 % ». Le réseau donnée permet de décider lequel des blocs créés par les est donc d’autant plus sécurisé que la puissance de calcul mineurs sera ajouté à la chaîne. combinée des mineurs est élevée. Notons tout de même Pour produire cette donnée, les mineurs doivent calcu- qu’une telle attaque ne permettrait pas aux attaquants de ler la valeur d’une fonction prenant pour entrées l’em- voler des bitcoins, puisque ces derniers sont protégés par preinte (1) (également appelée « hash ») du bloc précédent, le mécanisme de signature digitale. Ils ne pourraient ef- l’empreinte des éléments du bloc actuel et un nombre fectuer, tout au plus, que des doubles dépenses ou des variable, appelé « nonce ». Les mineurs font varier ce dénis de service. nonce jusqu’à ce que le résultat de la fonction réponde à des conditions prédéfinies par le protocole, notamment à un paramètre nommé « difficulté », qui permet de dé- finir l’étendue des résultats valides. Plus la difficulté est élevée, et plus l’étendue est restreinte, ce qui rend la découverte d’un nonce valide plus compliquée. Il est éga- lement important de noter que, là encore, la fonction est à sens unique. Il est donc impossible de prédire à l’avance un nonce qui satisfasse aux conditions du protocole. Ain- si, le seul moyen de trouver un nonce valide est de faire calculer à sa propre machine un très grand nombre de nonces, d’évaluer pour chacun d’entre eux la valeur de la fonction et d’en vérifier la validité. Pour un seul nœud, il faudrait en moyenne plusieurs années pour trouver un bloc valide. À l’échelle du réseau, la difficulté est établie de telle sorte qu’en moyenne 10 minutes sont nécessaires Figure 3 : Le basculement vers la chaîne de blocs la plus longue. pour qu’un nœud trouve un bloc valide. Si la preuve de travail est difficile à produire, elle est en revanche très fa- cile à vérifier. Pour vérifier si une preuve est valide, il suffit d’évaluer la valeur de la fonction pour le nonce donné. On Au-delà de la monnaie peut faire une analogie avec la combinaison d’un cade- nas : trouver la combinaison par itérations est un proces- sus très long, mais il est en revanche très facile de vérifier L’Internet de la valeur si une combinaison ouvre le cadenas – dans notre cas, si Au départ, l’innovation technologique de la chaîne de elle est valide. blocs avait été éclipsée par son application première, la monnaie bitcoin. Cependant, il n’a pas fallu longtemps La propagation des blocs pour que l’on prenne conscience de son potentiel. Les Une fois la preuve trouvée, le nœud « gagnant » ajoute son bitcoins ne sont qu’une suite de 0 et de 1, ils peuvent bloc à la chaîne. On dit qu’il a « miné » le bloc. Il reçoit en être dupliqués sans effort. Comment s’assurer de la va- compensation une somme fixe déterminée par le réseau

CAS D’USAGE, TRANSFORMATIONS DES ENTREPRISES ET SECTEURS ÉCONOMIQUES CAS D’USAGE, TRANSFORMATIONS (12,5 bitcoins, aujourd’hui), ainsi que les éventuels frais de transaction. Bitcoin encourage donc les mineurs à entre- tenir le réseau en les récompensant par une rémunération. (1) Une empreinte, ou hash, est le résultat d’une fonction de ha- chage appliquée à une donnée initiale. La fonction de hachage C’est par ailleurs de cette manière que des bitcoins sont est une fonction à sens unique. Son résultat est généralement un introduits dans l’écosystème. nombre hexadécimal (= de base 16) de taille fixe (256 bits, par exemple). Pour une même donnée initiale, on obtiendra toujours la Ensuite, le mineur transmet le bloc au reste du réseau. même empreinte. En revanche, il est quasiment impossible de dé- Tous les nœuds qui le reçoivent vérifient la validité des terminer la donnée initiale à partir de son empreinte.

44 RÉALITÉS INDUSTRIELLES - AOÛT 2017 leur d’un actif que l’on peut dupliquer indéfiniment ? Dans lancement. Elle est répartie selon les règles program- le cas de la monnaie fiduciaire, on a recours à des au- matiques qui régissent la plateforme, règles qui peuvent torités centrales qui maintiennent l’intégrité du registre. elles-mêmes évoluer conformément aux mécanismes de Dans le cas de Bitcoin, c’est la blockchain qui assure la gouvernance spécifiques à la plateforme, de sorte que non-multiplication de la monnaie. Le principal intérêt de la répartition de la monnaie tende vers un optimum. Dès la blockchain est sa capacité à donner de la valeur à des lors, chaque acteur de la plateforme est récompensé en actifs numériques, et ce, sans avoir recours à une autorité fonction de son apport à l’écosystème, dans une logique centrale. de libre marché. Cela contraste avec les plateformes exis- tantes, dans lesquelles l’autorité centrale est chargée de Colored Coins et Smart Contracts répartir la valeur et les responsabilités. Les actifs numériques s’étendent au-delà de la mon- naie. Par exemple, le protocole Colored Coins permet de Des points de centralisation existent encore à l’heure ac- représenter des actifs réels (actes de propriété, actions, tuelle. Notamment les plateformes d’échange de crypto- obligations) via la blockchain Bitcoin. D’autres blockchains monnaies sont, dans leur immense majorité, opérées par ont été créées pour faciliter la création de tokens (des des organisations centralisées. Cependant, des échanges jetons). Par exemple, Ethereum est une blockchain per- décentralisés sont en cours de développement. Il existe mettant le déploiement des contrats intelligents (smart même des projets visant à connecter les blockchains contracts). Ces contrats sont des programmes dont entre elles, et ce, de manière décentralisée. Ce serait là Gautier MARIN-DAGANNAUD l’exécution est assurée par les nœuds du réseau. Ils per- entrer dans un monde de plateformes interopérables sans mettent d’automatiser la logique contractuelle et de la friction. transposer aux actifs numériques. Avec Ethereum, il est Cependant, de nombreux défis d’ordres technique, légal possible de déployer une infinité d’actifs numériques va- et organisationnel restent à relever – avant de pouvoir y lorisés par la blockchain et d’en automatiser la gestion arriver. grâce à des contrats intelligents. Une fois un tel contrat déployé sur le réseau, il est impossible d’en censurer Références sur la Toile l’exécution lorsqu’il est appelé, ni de l’annuler. Seul un consensus mondial de l’ensemble des acteurs du réseau http://bitcoin.stackexchange.com/questions/22/is-it-pos- – mineurs, développeurs, échanges et utilisateurs – peut sible-to-brute-force-bitcoin-address-creation-in-order-to- permettre de revenir sur l’exécution d’un contrat. Cela fait steal-money de la blockchain le système le plus résistant à l’interven- https://www.reddit.com/r/BitcoinBeginners/com- tion d’un tiers parti que nous ayons jamais eu. ments/3eq3y7/full_node_question/ctk4lnd À nouvelles plateformes, nouveaux enjeux https://bitcoin.org/en/developer-guide#block-chain Aujourd’hui, il existe des centaines de blockchains pour http://www.imponderablethings.com/2013/07/how-bit- des centaines d’usages différents. De nombreuses plate- coin-works-under-hood.html formes décentralisées sont en train de voir le jour. Elles sont non propriétaires et open source, ce qui implique https://github.com/ethereum/wiki/wiki/White-Paper de nombreux changements en matière de répartition de https://en.bitcoin.it/wiki/Main_Page la valeur. Les crypto-monnaies jouent un rôle très impor- tant dans cette répartition. En général, une crypto-mon- http://bitcoin.stackexchange.com/questions/11054/un- naie spécifique à une plateforme est créée lors de son derstanding-spv-simple-payment-verification

RÉALITÉS INDUSTRIELLES - AOÛT 2017 45 Blockchains et smart contracts : premiers retours d’expérience dans l’industrie musicale

Par Christophe WAIGNIER Directeur des ressources et de la stratégie, Société des auteurs, compositeurs et éditeurs de musique (Sacem)

L’industrie musicale est depuis maintenant plus de quinze années au cœur de la transformation numérique. Dans ce contexte, les blockchains suscitent naturellement de nombreux débats au sein de la communauté artistique et des acteurs de l’industrie musicale, aux États-Unis comme en Europe. À l’initiative de start-ups, mais aussi d’acteurs plus traditionnels comme la Sacem, des expériences concrètes commencent à voir le jour. Les premiers résultats obtenus suscitent l’intérêt, ouvrant de nouvelles perspectives de collaboration entre les différents acteurs du sec- teur. Mais ces technologies émergentes restent cependant encore trop fragiles pour représenter, à court terme, un réel levier d’accélération de la transformation numérique du secteur.

epuis plus de quinze ans, la culture et ses indus- à près de 200 millions les produits numériques de mu- tries sont au cœur de la transformation numérique. sique enregistrée mis à la disposition de l’ensemble des DVéritable pionnier, le secteur de la musique a large- consommateurs de musique dans le monde, via des mil- ment contribué à cette transformation. Le numérique a in- lions de diffuseurs (stations de radio, chaînes de télévi- troduit de nouveaux usages et entraîné une dissémination sion, salles de spectacles, magasins, plateformes Inter- des contenus culturels ainsi que l’explosion de leur acces- net, etc.). Cet écosystème est par nature très décentralisé, sibilité, quelle que soit la localisation du consommateur il reflète la diversité des cultures, des genres musicaux et dans le monde. des pratiques de consommation de la musique. La tech- nologie doit être une solution qui facilite la préservation de Pour comprendre quels sont les enjeux technologiques cette diversité et non un outil imposant une quelconque que nous devons relever et réfléchir sur les potentialités standardisation. des blockchains, il est nécessaire d’avoir quelques no- tions sur notre activité. Notre objectif à la Société des auteurs compositeurs et éditeurs de musique (Sacem) est d’assurer la gestion Derrière une œuvre musicale, il y a toujours des créateurs économique de cet ensemble pour le compte des au- (auteurs et compositeurs), mais également des éditeurs teurs, des compositeurs et des éditeurs. Nous effectuons (un éditeur principal et des sous-éditeurs dans d’autres 700 000 contrats de diffusion de musique par an, pour pays) qui développent la carrière des auteurs dont ils lesquels nous encaissons plus de 900 millions d’euros. ont la charge et qui assurent l’exploitation commerciale Nous traitons 6 milliards de lignes d’information sur les de leurs œuvres. Par ailleurs, une œuvre se doit d’être diffusions de la musique afin de répartir cette somme sur interprétée et de donner lieu soit à des enregistrements environ 2 millions d’œuvres au profit de 300 000 auteurs, financés par un producteur phonographique, soit à des compositeurs et éditeurs de musique. Même si, bien en- exécutions publiques financées par un producteur de tendu, les volumes d’informations à traiter ont considéra- spectacles. Les enregistrements peuvent être reproduits blement augmenté, telle est pour l’essentiel la finalité de sur divers supports (CD ou vinyles) et vendus. Ils peuvent CAS D’USAGE, TRANSFORMATIONS DES ENTREPRISES ET SECTEURS ÉCONOMIQUES CAS D’USAGE, TRANSFORMATIONS notre action, et ce, depuis notre création en 1851… La aussi faire l’objet de diffusion (à la radio, à la télévision, numérisation de notre écosystème a d’ores et déjà beau- dans les magasins, etc.) ou encore être proposés sous coup changé nos processus et notre organisation, mais une forme dématérialisée (au format MP3, par exemple). nous ne sommes qu’au début de ce grand mouvement de Nous répertorions près de 20 millions d’œuvres musicales transformation. dans notre base de documentation et nous évaluons

46 RÉALITÉS INDUSTRIELLES - AOÛT 2017 solution de distribution digitale de musique « jectif, celui de proposer à un nombre limité d’artistes une tives quiregroupe desacteurspartageantlemêmeob On peutainsiidentifierunepremière catégoried’initia concrètes commencentàvoirlejour. teurs dumondedelamusique,certainesinitiativesplus vail de sensibilisation auprès de lacommunauté des ac Au-delà deforumsquiontpourbutfaire unutiletra à converger surunobjectifcommun. nombre d’interlocuteurs dont lespoints de vueontdumal de cesdiscussionsauxquellesparticipentuntrop grand le moment, rien de vraiment concret n’a encore des plateformescommeSpotifyouYouTube. Maispour de lagestioncollectivereprésentées parlaSacemet et d’éditeurs,ainsiquecertainesmajorsdelamusique groupe (là encore, aux États-Unis) un ensemble d’artistes Initiative, quepiloteégalementleBerkleeCollege.Ilre - des acteursdelachaînevaleurs’appellel’ sions etd’échangesàcesujet,quiregroupe l’ensemble blockchains. Actuellement,leprincipalespacedediscus- rums dediscussionsetdesconférences surlesujetdes l’industrie musicaleadumalàdépasserlestadedesfo Même silesartistessonthabituésauxexercices créatifs, ment coordonner nosactions Par quoicommencer sibles. tenter de dresser uninventaire d’unchamp infini de pos replacer pour danslecontextedudémarragedel’Internet aussi révolutionnaire quecelledesblockchains,c’estse Mais essayerd’envisagerl’introduction d’unetechnologie discussions onteupoursujetprincipallesblockchains. munération plussatisfaisantpourlesartistes.Très viteces sur l’industriemusicaleafind’imaginerunsystèmederé initiative quiavaitpourbutderéfléchir« « par lesétudiantsdu De cesrencontres informellesestnéeuneinitiative pilotée étudiants duMassachusettsInstituteofTechnology (MIT). tuels delamusiquefréquententlesmêmesbarsque de laplanète.Ilestquasicertainquecesjeunesintellec of Music,oùl’onformelesplusgrandsmusiciensdejazz outre-Atlantique, ducôtédeBostonau blockchains dans la musique a commencé à émerger Il estintéressant deconstaterqu’uneréflexionsurles blockchains dansnotre Pourquoi (etcomment)introduire les fans noter, également,l’initiativerécentedeBenji Rodgers,pa qui estaffiliéeauconsortium technologiqueEtherium.À blockchain ( la sociétéConsensys,quicommercialise dessolutions au moyendebitcoins.Derrière UjoMusic,onretrouve album, avec lapossibilité pour eux d’acheter sa musique mettant demettre àladispositiondesesfanssondernier solution dedistributionpourl’artisteImogenHeapper exemple). C’estlecasd’UjoMusic,quiadéveloppéune de servicesexistantes(tellesqueSpotifyouiTunes, par

Rethink Music

» , sans passer par l’intermédiaire des plateformes à buttrèslucratif

» et à laquellelaSacemaparticipé,une

Berklee College,quiaétébaptisée ? Quidoitêtre àl’initiative

!) ? partoutdanslemondeet écosystème

out ofthebox Berklee College Open Music

direct to direct

? Com émergé

?

» ------

acteurs lesconcentrent. Ilsseprétendent messe desupprimerlesintermédiaires, cesnouveaux uniques de lachaîne valeur. Mais loin de tenir leur pro blockchains, ense pr lement ladistributionnumériquedemusiqueparles de remplacer lestechnologiesquisous-tendentactuel En résumé,cesdémarches proposent essentiellement MusicouStems. Blokur Internet également, danslemêmeregistre, lesprojets lement ouvertededistributionnumérique.Onpeutciter tion deproposer àl’industriemusicaleunesolutiontota- vient dedémarrer tron fondateur du label digital américain Authors, andPublishers),notre homologueaméricaine, anglaise, etparl’ rejoints parlaPRSforMusicLimited,notre homologue duproblème.la dimensioninternationale C’estainsique sieurs acteurs,maiségalement deprendre encompte blockchains, quiestdepermettre lepartageentre plu- d’auteurs dumondeafinde rester fidèlesàl’espritdes de nousassocieravecdeuxdesplusgrandessociétés produit dans leur coin, nousavonschoisi, quant ànous, rement àcertainesinitiatives mesure decréerrapidementlavaleur. Ainsi,contrai réaliste enadoptantuneapproche pasàquisoiten forme d’une tique endécidantdedévelopperunpremier outilsousla De soncôté,laSacemachoisiuneapproche pragma maximum detransparence surleurdiffusion. permet unegrandetraçabilitédes juste. Ceprocessus totalement gérépardes tives pourpouvoiraboutiràunerépartitiondesdroits plus diffusions àdestinationdes sociétésdegestioncollec cation destitres diffusés etdeproduire un à installerdansdeslieuxsonoriséspermettantl’identifi- dans despaysafricains,propose unsystèmedeboîtier La sociétédegestiondroits Allmade,quiopère teurs surlamêmeplateforme). commercialiser parlasuite lesbilletsauprèsdesspecta nants surl’ compositeur, ainsiquecelledel’ensembledesinterve permettre la rémunération de l’éditeur, l’ensemble deschansonsqu’ilvajouersurscèneafinde contractualiser avecunesalledeconcertetdéclarer formes demédiationpermettantàunartiste-interprète SOCAN etlesFinlandaisdeTeosto proposent desplate fique del’industriemusicale.Ainsi,lesCanadiensla la capacitédesblockchainsàréglerunproblème spéci - tif detoutchanger, d’autres acteursproposent d’évaluer l’ensemble de la chaîne de valeur en ayant pour objec- des démarches biendifférentes Il existeunedeuxièmecatégoried’initiativesquiregroupe l’ensemble del’industrie. d’eux quedeproposer uneaméliorationpérenne pour entrants ayantplussouventpourobjectifdefaire parler tiatives sontd’ailleurssouventportéespardenouveaux dans unsecteuraussimature quelamusique.Cesini de remplacer des acteurs ultraspécialisés indispensables événement (enayantprobablement l’idéede RÉALITÉS INDUSTRIELLES - AOÛT 2017 proof ofconcept Ascap (AmericanSocietyofComposers, Dot BlockchainMusic ésentant comme des intermédiaires (POC).Ils’agissait de rester blockchain quimontentun

: a u lieudes’attaquerà œuvres etassure un Pledge Music, qui de l’auteur et du avec pourambi être des reporting blockchains Revelator, capables surtout

47 ------

Christophe WAIGNIER nous avons décidé d’unir nos forces pour nous concen- trer, dans un premier temps, sur l’un des principaux sujets de discussion de notre industrie, à savoir l’absence d’un registre partagé où se trouverait le lien entre une œuvre et l’ensemble des différentes interprétations enregistrées qui en sont issues. Documenter ces liens est un des savoir-faire très spéci- fiques des sociétés d’auteurs. Mais en dépit de la coo- pération qui existe entre elles, rien n’avait encore été mis en place pour partager ces informations. Par chance, les œuvres comme les enregistrements sont estampillés de codes internationaux normés reconnus par l’Organisation internationale de normalisation ISO : les ISWC (Internatio- nal Standard Musical Work Codes) et les ISRC (Internatio- nal Standard Recording Codes). Ainsi, étudier le lien entre une œuvre et ses interprétations enregistrées établi par une société spécialisée revient à étudier le lien existant entre deux codes, ce qui est beaucoup plus simple. Notre choix technologique s’est porté sur Hyperledger, une plateforme open source de développement initiée en décembre 2015 par la fondation Linux qui a fait le choix d’un développement essentiellement en langage Go. L’in- térêt de cette technologie est de permettre d’avoir un re- gistre partagé pouvant dérouler des smart contracts tout en garantissant l’authentification de ses utilisateurs. Cette technologie permet ainsi de s’affranchir de certaines contraintes des blockchains publiques, notamment en

matière de temps de calcul. Duran/SIPA Photo © Florence Le siège de la SACEM à Neuilly-sur-Seine (département des La première phase du projet s’est achevée à la mi- Hauts-de-Seine). mars 2017, faisant de la Sacem la première société d’au- « Dans un univers hypothétique où tout le teurs à coder concrètement une application basée sur les blockchains. Cette première phase a clairement dé- monde utiliserait la blockchain pour gérer ses montré l’intérêt fonctionnel d’un enrichissement mutuel œuvres, contractualisant directement avec des entre diverses sociétés d’auteurs, puisque près de 80 % diffuseurs (online, on air ou on stage), il y a fort des appariements auteur-interprète étaient détenus par à parier que des créateurs se regrouperaient une seule des 3 sociétés impliquées. Elle a aussi mis en pour mieux gérer ces sujets et défendre effica- avant les difficultés d’identification auxquelles chaque cement leurs droits face aux grands acteurs de société doit faire face (2 % de conflits répertoriés trou- l’Internet. » vant toujours une solution, mais nécessitant encore une fastidieuse analyse manuelle au vu du nombre des cas possibles). lution de conflits plus automatiques et de compléter la promesse des blockchains par celle de l’intelligence arti- D’un point de vue technique, l’immaturité de la technolo- ficielle, tout en assurant des interfaces adéquates répon- gie a clairement été identifiée comme un frein à son dé- dant plus facilement aux besoins de chacun des métiers ploiement rapide (un constat classique fait au démarrage impliqués. de toute nouvelle technologie), comme ce fut le cas pour le langage Java ou Lucene, une bibliothèque en open Ces derniers défis restent les plus importants. En effet, source. Mais son potentiel reste entier notamment grâce derrière cette technologie, il n’y a pas d’intelligence et il à sa capacité à faire travailler ensemble des acteurs aux convient, dans le secteur qui est le nôtre, de définir des intérêts divers, où chacun peut en tirer un bénéfice non règles afin d’assurer l’intégrité des données qui sont utili- négligeable tout en faisant progresser l‘ensemble. sées et leur présentation et ainsi d’éviter le « garbage in – garbage out » qui pourrait rapidement en découler, créant Afin de progresser dans cette expérimentation, il nous plus de problèmes qu’il n’en résoudrait. À ce stade, nous CAS D’USAGE, TRANSFORMATIONS DES ENTREPRISES ET SECTEURS ÉCONOMIQUES CAS D’USAGE, TRANSFORMATIONS revient maintenant d’entrer dans une seconde phase en ne pensons donc pas que la blockchain puisse suffire à démontrant que les blockchains sont à même de bien ré- elle seule à régler les problèmes de notre industrie. La pondre aux enjeux de volumétrie de l’industrie musicale, nécessité de trouver un nouveau mode de gouvernance mais également d’intégrer plus facilement que les autres de ce genre de projet doit être définie afin d’impliquer un technologies des acteurs ayant des problématiques com- maximum d’acteurs, sans pour autant retomber dans les plémentaires. Il conviendra également de s’assurer de la travers d’une base centralisée. Nous travaillons actuelle- flexibilité du système pour identifier des modes de réso- ment à ces questions afin de nous assurer d’avoir, au final,

48 RÉALITÉS INDUSTRIELLES - AOÛT 2017 un système pérenne et économiquement viable, qui soit de transparence et de traçabilité sont fort éloignés de la certes ouvert, mais aussi suffisamment organisé. réalité d’une l’industrie qui, certes, se démocratise énor- mément, mais qui est également, et surtout, constituée de En résumé, dans un monde où les données gagnent professionnels extrêmement pointus sur leurs métiers – chaque jour de la valeur et où le premier réflexe est de des professionnels que la blockchain ne saurait remplacer. se demander à qui ces données appartiennent, sur la blockchain, il s’agit de trouver le compromis indispen- Ainsi, dans un univers hypothétique où tout le monde uti- sable pour amener les industriels à contribuer à l'atteinte liserait la blockchain pour gérer ses œuvres, contractuali- de la masse critique nécessaire pour que cette solution sant directement avec des diffuseurs (online, on air ou on fasse autorité auprès du groupe des contributeurs et des stage), il y a fort à parier que des créateurs se regroupe- utilisateurs. raient pour mieux gérer ces sujets et défendre efficace- ment leurs droits face aux grands acteurs de l’Internet. Ainsi la blockchain reste une technologie émergente, qu’il convient d’étudier, mais sans se précipiter. Les fantasmes En bref : si la Sacem n’existait pas, il faudrait… l’inventer ! faisant de la blockchain LA réponse à tous les problèmes Christophe WAIGNIER

RÉALITÉS INDUSTRIELLES - AOÛT 2017 49 Objets d’art : les enjeux de la blockchain

Par Jurgen DSAINBAYONNE Fondateur de Seezart

Le marché de l’art a entrepris depuis quelques années sa mutation digitale. Plusieurs forces s’exercent, à savoir : l’impact des nouvelles technologies, un renouvellement générationnel du profil des collectionneurs et, enfin, la crise de 2008 qui, ayant mis à mal le marché des rende- ments obligataires, a eu pour effet de renforcer la vision de l’œuvre d'art en tant qu'actif financier. Cette digitalisation met également en lumière les failles d’un système considéré, à tort ou à rai- son, comme opaque et marqué par l’entre-soi. De nombreux scandales éclatent, remettant en cause les droits d’auteur, la légalité, l’authenticité, la provenance et jusqu’à la valeur même des œuvres d’art. C’est dans ce contexte que la technologie blockchain, de par ses propriétés intrinsèques, peut ren- forcer et garantir une confiance numérique et répondre aux enjeux d’un marché en pleine mutation.

e 30 novembre 2011, la Galerie Knoedler, la plus an- sement de l’authenticité d’une œuvre en attestant prove- cienne galerie d’art des États-Unis, à la réputation nance. L irréprochable, fermait brutalement ses portes. Cette institution presque bicentenaire s’était retrouvée au cœur Confiance et provenance d’un scandale du fait de la vente d’une série d’œuvres Établir la provenance d’une œuvre d’art consiste à fournir prétendument « rarissimes » de l’expressionnisme abs- son historique et ainsi à en authentifier l’originalité, et à trait, pendant une quinzaine d’années – des « œuvres » établir sa propriété et sa légalité. L’opération vise à confir- qui se sont révélées être des faux. mer qu’il ne s’agit pas d’une contrefaçon, ni d’une œuvre volée, pillée ou exportée illégalement. La qualité de la provenance d’une œuvre d’art peut faire une différence considérable sur sa valeur artistique et donc économique. Cette qualité se juge sur le degré de certitude de l’origine, le statut des anciens propriétaires et la force de la documentation (1). Cette force provient d’une information vérifiée, dont l’intégrité et la pertinence ne doivent pas pouvoir être remises en cause. Or, l’essentiel des transactions, des échanges d’œuvres d’art, se fait encore sur papier – un support fragile qui peut être facilement perdu, falsifié ou volé (cela d’autant D.R. Illustration 1 : La galerie d’art Knoedler, à New York. plus que la pratique n’impose pas de standards ou de normes de chiffrement, d’une part, et de conservation, d’autre part). Parmi ces documents, citons le certificat d’authenticité, pour lequel il n’existe aucune réglementa- Leur authenticité, mais plus encore leur provenance furent tion officielle, tout comme les services et supports de ré- CAS D’USAGE, TRANSFORMATIONS DES ENTREPRISES ET SECTEURS ÉCONOMIQUES CAS D’USAGE, TRANSFORMATIONS fortement contestées. Ce fut notamment le cas pour un férencement tels les catalogues raisonnés, dont la rigueur tableau de (ou plutôt attribué à) Jackson Pollock, que méthodologique et l’objectivité sont souvent remises en deux des plus grandes maisons d’enchères – Sotheby’s cause (2). et Christie’s – refusèrent de mettre en vente. (1) Wikipedia, https://fr.wikipedia.org/wiki/Provenance Cette affaire, parmi beaucoup d’autres, illustre l’une des (2) Voir le conflit entre la Mayor Gallery et la société LLC Agnès problématiques centrales du marché de l’art : l’établis- Martin.

50 RÉALITÉS INDUSTRIELLES - AOÛT 2017 Charney raconte les parcoursCharney étonnants des plus célèbres sur l’œ linquance. Lemalfaiteurdoittromper soninterlocuteur Cette situation crée de fait des opportunités pour la dé- elles-mêmes sontdisparatesethétérogènes. ruption et manipulation de données), les informations Hormis lesrisquesliésàlasécuriténumérique(vol,cor reposant surdesarchitectures centralisées. gérés selon une politique propre à chaque organisation et et opèrent désormais « faussaires del’Histoire Dans unouvrage digree niveau decomplexité numérique encoursajouteparadoxalementunnouveau sement d’uneprovenance fiabledesœuvres. Latransition système rendant laborieuxetparfoisdiscutablel’ lumière lesimperfections(pournepasdire lesfailles) d’un Du reste, lamutationdigitaledumarché del’artmet en il trouvait unelettre l’œuvre, ilserendait auxarchives et, les yimplanter. Lorsqu’unexpertvoulaitserenseigner sur faux documentsets’introduisait danslesarchives pour tistes célèbres. John Drewe, de son côté, produisait de John Myattnecopiaitpas,mais[il]adoptaitlestyled’ar ments censésattesterdesonauthenticité. John Drewe, quifabriquaient àlafoisl’œuvre etlesdocu- C’était lecasdedeuxcélèbres faussaires, JohnMyattet des «piègesdelaprovenance »suffisammentbons. peuvent tromper lemonde del’arts’ilsréussissentàcréer Des faussaires quinesont pasparticulièrement doués part desfauxnesontpassibons,endehorsducontexte. techniquement pourconvaincre lesexperts.Maislaplu de laprovenance ».Bien sûr, lefauxdoitêtre assezbon leur histoire. Lesfaussaires parviennentàcréerun«piège tion deleurprovenance etdesdocumentsquiretracent Crédit image:WikimediaCommons. Figure 2:Schémadufonctionnementd’une

La plupart des œuvres d’art sont authentifiées enfonc

» (onparled’ailleursde«piègelaprovenance uvre physiqueelle-même,maisaussisurson« (3) qu’ilaconsacréàcettequestion,Noah (outoutautre document) àlaquelle

: u via des systèmes d’information (SI)

: n grandnombre d’acteursmigrent là,miraculeusement, blockchain. établis-

pe

»). - - - - - algorithmes auservicedelaconfiance architecture distribuéeetdes gistres distribués(DLT C’est à la lumière de ce constat que la technologie des re- sans faille. trêmement compliquél’établissementd’uneprovenance des systèmesd’informationcentralisés. supervisant leséchangescommerciaux etfinanciers placée danslesinstitutionsetorganisations humaines fin de2008,àunmomentoùs’esteffondrée laconfiance Pour mémoire, la sitif, làoùlablockchainplacelesalgorithmes. centralisées, placentencore l’humainaucentre dudispo gestion etlamaintenancereposent surdesarchitectures coffres-forts numériques),maiscestechnologies,dontla Il existe quantité de services de certification (tels les fectuons lestransactionsetrendons traçables. potentiel demodifierradicalementlafaçondontnousef La Blockchain En résumé nées dans lessystèmesd’information,basesdedon Aujourd’hui, les«héritiers»deJohnDrewe s’introduisent personne n’avaitfaitréférence auparavant. (4) DistributedLedgerTechnology. (3) TheArtofForgery,NoahCharney, Phaidon. non-coordination… çon isolée) et dessystèmesd’informationcentralisés,leur ché del’art,lamultiplicationdesacteurs(opérantfa- d’homogénéité danslespratiques,l’ ti-agents etmulticanaloùlatraçabilitéestunvéritableenjeu. problématiques dumarché del’artdansuncontexte mul une solutionidéalepourrépondre demanière efficace aux blockchain estuneinnovationtechnologiqueayantle

!

»

: L RÉALITÉS INDUSTRIELLES - AOÛT 2017 a fragilitédeladocumentation,l’absence

blockchain s’estréellementdéployée : lapuissanced

: l’ensembledecesélémentsrend ex (4) ) ou apparaît comme Blockchain apparaîtcomme éclatement dumar ’une

à la 51 via ------

Jurgen DSAINBAYONNE L’approche de Satoshi Nakamoto, pseudonyme derrière Prenons le cas du Proof Of Work : il s’agit de la résolu- lequel se cache le « Père » de la blockchain bitcoin (il tion d’un problème mathématique destiné à trouver un existe plusieurs blockchains et de types différents), part identifiant pour chaque bloc de transactions à partir des du postulat suivant : on ne peut faire confiance à l’humain, identifiants des blocs précédents (les hash Prev_Hash- car il commet des erreurs et il a naturellement tendance à 1 + Prev_Hash-2 + Prev_Hash-n) auxquels s’ajoutent des poursuivre ses propres intérêts, avec pour corollaire des conditions particulières, telles la recherche d’un nombre, tentatives de manipulation, de façon coordonnée ou iso- le nonce, qui va impacter le résultat du hashage. lée, afin de tirer parti des transactions à son seul bénéfice. Le niveau de difficulté de ce problème est automatique- Une des définitions communément admises de la ment ajusté en fonction de la taille du réseau pair-à-pair et blockchain est la suivante : registre totalement distribué de la puissance de calcul, de manière à ce que la résolu- contenant toutes les transactions de façon sécurisée et tion ne puisse survenir que toutes les 10 minutes. Un bloc immuable, dont la gestion et le fonctionnement reposent ne peut donc être validé que toutes les 10 minutes. sur des technologies de chiffrement combinées à un mé- Une fois le bloc validé, tous les nœuds se synchronisent canisme de consensus algorithmique, le tout étant réparti dessus. Il est alors répliqué sur l’ensemble du réseau pair- sur un réseau pair-à-pair. à-pair, c’est pour cela que l’on parle de base de données Pour faire simple, il faut se représenter une base de don- distribuée. nées distribuée qui permet de rendre infalsifiable l’his- L’ensemble forme donc une chaîne de blocs et en modi- torique des transactions, l’ensemble des utilisateurs en fier un seul implique que l’on recalcule tous les identifiants possédant une copie et la sécurité étant garantie par l’en- de chacun des blocs précédents avant qu’un nouveau semble des nœuds du réseau (que l’on appelle des « mi- soit validé (toutes les 10 minutes). neurs »), lesquels effectuent les contrôles et vérifications nécessaires sous la forme de résolution d’un problème De fait, la fraude est directement conditionnée à une puis- mathématique que l’on appelle, dans le cas du bitcoin, le sance de calcul qui aujourd’hui n’est pas atteignable en Proof of Work (preuve de travail). l’état de l’art de la technologie. Cette base de données est ainsi protégée contre toute Et ce n’est là qu’un aperçu, car sont apparues des tentative de manipulation ou de corruption. blockchains dites programmables, comme Ethereum, qui augmentent significativement les possibilités déjà nom- Sachant que chaque acteur possède une identité numé- breuses de la blockchain classique (on parle à leur propos rique unique vérifiable grâce à la cryptographie asymé- de smart contracts : tout en conservant les bénéfices trique (c’est-à-dire la combinaison clé privée/clé publique d’une blockchain, il est possible de « coder » les termes permettant l’identification et l’authentification), unhash d’un contrat de manière à ce qu’il s’exécute de lui-même). sera généré qui représentera l’ensemble des éléments d’une opération quelle qu’elle soit. Exemple : lors d’une transaction, le certificat d’authenti- cité pourrait être automatiquement transféré au nouveau Cette fonction de hachage est une technique de chiffre- propriétaire de l’œuvre, et les droits afférents (droit de pro- ment dite « lettre à lettre », elle est irréversible. priété, droit de suite, etc.) pourraient être opposables et Il s’agit d’un chiffrage « lettre à lettre » en ce sens que, si produire leurs effets eux aussi de façon automatisée. l’on change ne serait-ce qu’un bit du message d’entrée La blockchain est un système d’une résilience et d’une sé- (input), l’empreinte en sortie (output) sera différente. curité inégalées, idéal pour protéger les échanges d’actifs Exemple : si vous changez une virgule, un espace à un matériels et les rendre traçables et auditables, cela d’au- message, la chaîne de caractères correspondant au hash tant plus que les transactions sont désormais non répu- sera radicalement différente. diables. On parle ainsi d’un « Internet de la valeur » ! Cette technique est utilisée dans les échanges peer-to- Appliqué au marché de l’art, il est désormais possible peer afin de vérifier que le fichier de destination corres- de construire et de garantir une certification et une pro- pond en tous points au fichier d’origine et qu’il n’y a eu venance infalsifiables des œuvres d’art et de réduire les aucune modification, altération ou manipulation. risques de fraude ! Cette fonction est irréversible, car on ne peut, à partir du Usages et bénéfices pour le marché hash, reconstituer ou retrouver les informations d’origine. de l’art Cette empreinte pouvant représenter tous les éléments Comme nous venons de le voir, la blockchain permettrait d’une transaction est insérée dans un fichier rassemblant d’enregistrer et de certifier tout le parcours d’une œuvre la liste des transactions dites « en attente », ce fichier for- CAS D’USAGE, TRANSFORMATIONS DES ENTREPRISES ET SECTEURS ÉCONOMIQUES CAS D’USAGE, TRANSFORMATIONS d’art (création, vente, exposition, prêt, legs, restaura- mant un bloc. Ce bloc sera ensuite validé par les nœuds tion...) pour en garantir la provenance fiable et non répu- du réseau – les mineurs – qui, ensemble, contrôleront et diable, tout en assurant la gestion des interactions entre conviendront de la validité des transactions via un proces- les parties concernées. sus de consensus algorithmique : le Proof Of Work pour bitcoin, le Proof Of Stake pour List ou le Proof Of Authority Dès lors, l’authenticité, l’historicité ou encore la valeur pour Hyperledger. d’une œuvre deviennent des informations vérifiées, im-

52 RÉALITÉS INDUSTRIELLES - AOÛT 2017 muables, circulant en toute sécurité entre les acteurs sur tion en justice contre le Comité d’authentification de la toute la chaîne de valeur. fondation LLC Agnès Martin, qui a refusé d’authentifier 13 œuvres de ses clients lors de la constitution du cata- Au-delà de la traçabilité du parcours d’une œuvre, la logue raisonné de l’artiste en 2014. En ne reconnaissant blockchain pourrait bien constituer un nouveau socle pas ces tableaux, la fondation les a privés de facto de technologique pour la propriété intellectuelle et les droits toute valeur – les clients n’ont d’ailleurs pas tardé à de- d’auteur. mander leur remboursement (préjudice : 7,2 millions de L’artiste serait assuré d’être la seule personne au monde à dollars). pouvoir prouver de façon incontestable la paternité d’une Avec la blockchain, ces situations auraient pu être évitées ! œuvre, les collectionneurs, leur droit de propriété, les ga- leristes, leur mandat de représentation et certains droits Plus globalement, il est possible d’implémenter la gestion d’exploitation. et le respect des différents droits résultant de la propriété littéraire et artistique. Outre le droit d’auteur et de proprié- Prenons, pour illustrer, deux affaires qui ont marqué le té, on peut parfaitement envisager le suivi et le déclenche- marché de l’art. ment automatisé du droit de suite, le respect du droit de DSAINBAYONNE Jurgen L’affaire Peter Doig divulgation, etc. L’un des artistes contemporains les plus cotés a dû ba- Il est également possible de développer une infrastruc- tailler devant les tribunaux afin de prouver qu’il n’était ture qui soit de nature à faciliter, simplifier et sécuriser les pas l’auteur d’une peinture, contrairement aux affirma- interactions entre les acteurs opérant sur ce marché. Par tions d’un collectionneur, Robert Fletcher, qui l’accusait exemple, un artiste ou une galerie qui mettrait en vente de renier une toile qu’il aurait peinte en 1976. Ce dernier des œuvres sur une plateforme en ligne et qui, dans le souhaitait la vendre aux enchères chez Sotheby’s pour même temps, mettrait à disposition certaines de ces plusieurs millions (préjudice : 3 ans de procédure et de œuvres pour une exposition. frais judiciaires, ainsi que l’anéantissement de la valeur de Avec la blockchain, la gestion de situations mobilisant la peinture). plusieurs acteurs sur une même œuvre devient moins complexe, surtout lorsqu’elle fait l’objet de plusieurs opérations autour desquelles s’articulent plusieurs droits et obligations, dont certaines obligations indues : assu- rances, transport, respect des formalités de douane, etc. En termes assurantiels, cela permettrait de réduire les risques et de définir plus finement le périmètre des res- ponsabilités. De la même manière, il serait possible de créer de nouvelles polices d’assurances spécifiques pour les besoins d’opérations ponctuelles (prêt, location d’œuvres, leasing, etc.) en utilisant pour ce faire des smart contracts. Et ce n’est qu’un début, avec le machine learning et le data mining, le marché de l’art pourrait bénéficier de nouveaux outils basés sur l’exploitation des données dans le cadre d’une stratégie Big data reposant sur une blockchain : les perspectives sont immenses. D.R. Figure 3 : Peter Doig (né le 12 avril 1959, à Edimbourg). Aux professionnels de saisir l’opportunité de réinventer les usages tout en capitalisant sur les bonnes pratiques (d’autant qu’un renouvellement générationnel est en cours). Conflit entre la Mayor Gallery (Londres) et la socié- té LLC Agnès Martin Le marché de l’art est une chrysalide de laquelle peut sor- Alors qu’une rétrospective de l’artiste Agnès Martin fut tir le meilleur comme le pire. Il ne tient qu’aux acteurs de présentée à l’automne 2016 au Musée Guggenheim, la ce marché d’en décider ! galerie d’art londonienne Mayor Gallery a intenté une ac-

RÉALITÉS INDUSTRIELLES - AOÛT 2017 53 La chaîne du livre et les chaînes de blocs

Par Arnaud ROBERT Directeur juridique du Groupe Hachette Livre

Hormis pour quelques experts et au sein de quelques expérimentations, la blockchain en est encore au stade des promesses. Celles d’usages nouveaux rendus possibles par les qualités majeures qu’on lui prête : celles d’être ouverte mais infalsifiable, d’être fiable même en l’absence de tiers de confiance. Le monde du livre pourrait y trouver de considérables gains d’efficacité dans ses activités di- gitales si elle tenait ses promesses de registre inviolable, de médium sécurisé de transfert de fichiers, voire de machine automatique à autoriser, contrôler et percevoir des redevances. Néanmoins, pour qu’elle constitue l’outil révolutionnaire que l’on annonce, il faudra qu’elle tienne sa promesse la plus ambitieuse, celle d’être un outil de relation d’égal à égal, de pair à pair, au service de tous, et non le jouet de nouveaux intermédiaires monopolistiques.

l’heure où nous écrivons, le monde du livre et celui de Le premier temps de l’exercice consistera à identifier les Àla blockchain se sont-ils déjà rencontrés ? usages que l’avènement de la blockchain permettrait ou induirait dans le domaine du livre pour tenter de discerner Assurément. À ce stade, cependant, leur rencontre relève ensuite en quoi et pour qui ces usages seraient promesse d’un paradigme bien connu, qui n’a rien de révolutionnaire d’opportunités ou, au contraire, de menaces. ni de disruptif. C’est simplement que le meilleur moyen d’aborder cette nouvelle technologie est sans conteste la lecture d’un bon ouvrage à son sujet. Citons, par exemple, La chaîne du livre et les usages La Blockchain décryptée, publié en mai 2016 par l’Obser- annoncés de la blockchain vatoire Netexplo, ou La Révolution Blockchain de Philippe La définition purement technique de la blockchain, celle Rodriguez, publié en mars 2017 chez Dunod. qui s’appuie sur ses modalités informatiques et crypto- Pour l’heure, on trouve donc bien la blockchain dans les graphiques et sur son protocole fondateur quasi mythique livres. En revanche, la « chaîne du livre », première indus- de 2008, ne s’offre qu’aux plus experts. trie culturelle de France, est loin d’avoir mêlé, ou même Très rapidement, on doit donc quitter la technique pour d’avoir songé à mêler ses maillons à ceux de la chaîne définir lablockchain en usant de mots qui ont un sens de blocs. dans le monde commun. Le concept est ainsi décomposé C’est que cette technologie, immature et très complexe par le professeur Delahaye, de l’Université Lille 1 : registre (pour reprendre les mots de Philippe Rodriguez), s’offre – partagé – infalsifiable – indestructible – ouvert – compo- pour l’instant, pour qui n’appartient pas au monde des sé de blocs successivement validés, datés et conservés mathématiciens, des informaticiens ou des cryptographes, par ordre chronologique. plus par les promesses variées à plus ou moins long terme C’est entendu, mais encore : à quoi cela peut-il bien ser- qu’elle contient ou revendique, que par une appréhension vir ? très précise de son fonctionnement, éminemment tech- nique, ou de ses mises en œuvre opérationnelles, pour C’est ainsi que fonctionne le bitcoin !, nous rétorque-t- l’heure encore confidentielles (le bitcoin mis à part). on. Oui, le meilleur (le seul ?) exemple un peu tangible de CAS D’USAGE, TRANSFORMATIONS DES ENTREPRISES ET SECTEURS ÉCONOMIQUES CAS D’USAGE, TRANSFORMATIONS blockchain appliquée, c’est le bitcoin, une monnaie cryp- C’est donc à un à exercice purement prospectif que tographique qui fonctionne toute seule, sans tiers étatique nous conduirons dans ce court article ; celui consistant émetteur. Une monnaie ? Voilà qui est concret ! Mais une à confronter les promesses de la blockchain (dont nous monnaie… virtuelle ? Ah !… sommes dans l’impossibilité de valider la robustesse) aux réalités de l’industrie du livre, qui, bien souvent, rejoignent Mais si : A veut donner un bitcoin à B. Par la magie de la celles des industries culturelles de manière générale. blockchain, un acteur calculateur va décrypter les compo-

54 RÉALITÉS INDUSTRIELLES - AOÛT 2017 supports eux-mêmes sont numériques riels (ilslesontmêmedoublement maintenantqueleurs de lacréation,dontlesactifssontparessenceimmaté comme registre est susceptible d’intéresser le monde Preuve d’origine,dedate,propriété, la blockchain. la pierre précieuse et est enregistré en parallèle dans la méro desérie.Cenuméro desérieestmicro-gravé sur l’enregistrement, chaquediamantsevoitattribuerunnu efficacement contre le vol et la fraude. Pour en permettre recenser lestransactionsdiamantaires demanière àlutter ger s’emploieàconstruire unregistre numériquedestinéà données dedroits d’auteurfondéesurlablockchain. L’industrie musicale réfléchiraitdéjààunegrandebasede ePub…) gistre Une autre applicationest avancéepourla propriété, d’unedatedetransfert, d’unechaînededroits. infalsifiable. Ici,le registre faitpreuve ouvert, facilementaccessibleetconsultable,pourtant blockchain attestedelapropriété foncière dansunregistre cé pourmunird’uncadastre leGhanaoulaGéorgie. La La fait desavalidationparconsensusdécentralisé. consultation etàsonenrichissement,maisinfalsifiabledu distribué Une autre appellation de la La blockchain,unregistre desdroits d’auteur teur. 3) unegestionautomatiséepersonnaliséedesdroits d’au riques, 2) lemédiumpermettantlacirculation deslivres numé 1) unregistre desdroits d’auteur, visagés autourdetrois grandsaxes sous l’égide de Fondapol (un juin distribuée sus décentralisé pole delacertification,maisparlebiaisd’un« été validéeauprèsd’untiersuniquedisposantdumono de nouveaupropriétaire deB.Etcetteconfiance n’apas transaction deAversBet,enfin,confiancedanslaqualité priété originelle de A, confiance dans l’existence de la C’est ungénérateurdeconfiance.Confiancedansla pro scellée auseind’unbloc,consultablepartoutunchacun. tion, unefoisvalidée,auraexistencedanslachaîne, d’autres calculateursvaattesterdecettevalidité.L’opéra sants delatransactionpourvalideretunecommunauté tributed ledger technology tentiellement, du livre, ces usages sont classiquement en- Dans ledomainedesindustriesculturelles, etdonc,po cette technologies’annonceporteuse. propos de la blockchains’orientent vers les usages dont talement dissipé.Assezrapidement,donc,lesdébatsà Malgré cetexemple,lebrouillard conceptueln’est pas to SOUDOPLATOF-2016-05-26-webDEF.pdf) www.fondapol.org/wp-content/uploads/2016/06/083- blockchain comme registre, c’est ce qui est annon-

2016

: latraçabilitéetcertification.La

». End’autres termes,un registre ouvertàla

», pourreprendre letitre del’ouvrageparuen

». La blockchain

», la « blockchain est celle de , ce serait la «

technologie

: : preuve d’undroit de

think tank) (http:// : fichiers MP3 ou start-up Everled- blockchain-re du registre blockchain

confiance

consen «

dis------d’un actedepiratage conserve lefichierinitial.Il s’agit, donc,àchaquefois, fichier, dont on envoie la copie à un tiers, tandis que l’on Un titre musicalcontientaumoinsdeux de falsification et quiresterait infalsifiable partage entre les différents contributeurs à un livre livres qu’ils ont publiés, à charge pour eux d’en assurer le çoivent généralementtouslesrevenus d’exploitationdes éclatée quedansceluidelamusique,etleséditeursper Dans lemondedulivre, lachaînedesdroits est moins titre etlescopyrights d’enregistrer defaçonincorruptiblelapropriété dechaque pourrait être stockéesurla d’existence et d’appartenance de ces deux Comme l’expliquelesitede l’un pourleson,l’autre pourletexteetlacomposition. de langage rique, l’expression peut être prêtéourevendu, car, danslemondenumé Mais l’analogie n’est pasparfaite gie àcelledumondephysique des libraires de quartier. Leur vente fonctionne par analo plateformes d’e-books, comme elles le sont sur les sites Leurs versionsnumériquessontvenduessurdegrandes mat numériqueenmêmetempsqu’ellessontimprimées. Les œuvres sontdepuisplusieursannéespubliéesaufor tion deslivres numériques La ceptions audroit d’auteur. les titulaires dedroits, ilfaudraitautoriserd’immensesex beau jeud’expliquerque,faceàl’incapacitéd’identifier tuit oudel’accèsuniverselàlaconnaissanceontparfois Devant ce manque de répertoire, les tenants du tout-gra combler leslacunesdeleursmétadonnéesoriginelles ou les auteursd’œuvres éditées depuisplusieursdécennies, ont tousrévélélesmêmeslimites Car lesrécentsprojets de numérisationdesfondsanciens d’adresse... décès del’auteur, l’auteurlui-même lors d’unchangement pôt légaldetoutenouvelleparution,lesnotaires lorsdu réédition, laBibliothèqueNationaledeFrancelorsdudé- tection empêchentdonclesactes dereproduction autres mais, luiappartient. ment enligne,leclienttélécharge unfichierqui,désor connaître delavie d’une œuvre oud’unauteur, sansrisque Ce registre pourraitêtre alimentépartousceuxquiontà des œuvres elles-mêmes. Lettres entreprend viasonfichierBalzac,ouun registre teurs français,àl’instardecequelaSociétédesGens rait unregistre qu’unemultitude d’acteurs pourrait nourrir Néanmoins, onpeutimaginerleréelintérêtqueprésente- dans celuidelamusique. donc moinsproblématique dansl’universdel’écritque La multitudededroits protégeant uneœuvre donnéeest teur, traducteur, illustrateur, photographe… a fortiori blockchain, cemediumpermettantlacircula

: ils’agit leurshéritiers RÉALITÉS INDUSTRIELLES - AOÛT 2017

: leséditeursàchaquenouvelleœuvre ou «

à transfert de fichier correspondants

chaque foisdelareproduction d’un ! Desmesures techniquesdepro

: unr ? Pourlesœuvres, comment Blockchain France, blockchain, […]permettant

: encontrepartie dupaie egistre centralisédesau

: lelivre numérique ne

: commentretrouver

».

» est un pur abus copyrights « copyrights

la preuve

: au 55

? ------:

Arnaud ROBERT que ceux qui permettent à l’acquéreur d’une œuvre de la La chaîne du livre et les ruptures lire sur des moniteurs de différentes natures. prédites par la blockchain

Avec la blockchain telle qu’elle est promise, l’analogie Il n’est pas une conférence ou un article qui ne justifient semble pouvoir être approfondie. Dans la blockchain-type leur existence par le caractère profondément disruptif de du bitcoin, il y a bien cette opération de dessaisissement la technologie blockchain. que l’on trouve dans le monde physique : le bitcoin que A transfère à B quitte bien le patrimoine de A pour inté- Nous l’avons dit, il nous semble qu’à ce stade, la grer celui de B. L’opération est irréversible et scellée dans blockchain se définit plus par les promesses qu’elle porte la chaîne de blocs. On peut dire que ce bitcoin donné a que par les réalisations concrètes qu’elle fonde. une identité propre. Si, au lieu du bitcoin, on transférait un Ces promesses, pour l’instant, se résument dans une livre numérique, on pourrait considérer que c’est bien le sorte de mantra : la blockchain serait en capacité de don- « même » livre qui circule, sans opération de reproduction ner à chaque agent (entreprise, client, usager, citoyen…) contrefaisante. intervenant sur le Web l’autonomie et le contrôle qui lui En extrapolant au-delà du monde du livre, on pourrait dire manquent depuis la naissance d’Internet, le paradis ja- que la blockchain ouvre la voie à la naissance de réels mais atteint de la relation pair-à-pair. « biens » numériques, revêtus d’une unicité. De ce mantra, s’il devait exprimer au bout du compte Le lieu n’est pas ici d’explorer les perspectives ouvertes une réalité, découleraient des opportunités et des risques par cette « naissance ». pour la chaîne du livre.

Pour l’éditeur, disons seulement qu’elle emporte des pro- Les opportunités de la blockchain pour le livre messes autant que des menaces : un livre numérique Technologie permettant l’identification et le transfert d’un voyageant dans la blockchain sur un support individuel- livre numérique comme s’il s’agissait d’un livre physique ; lement identifié permettrait à son propriétaire une « expé- registre infalsifiable, public, ne faisant pas appel à un tiers rience utilisateur » proche de celle du livre physique (accès centralisateur ; technologie portant en elle la capacité de plus pérenne et plus « interopérable », quel que soit l’en- gérer des contrats auto-exécutables… : par toutes ces vironnement de lecture ou de conservation) et faciliterait qualités, la blockchain serait en capacité de donner à l’au- la protection contre la contrefaçon, grâce à la traçabilité teur ou à l’éditeur de livres numériques un contrôle accru induite par la chaîne de blocs ; son rapprochement avec sur ses créations ou ses activités grâce à : le livre physique ouvrirait à l’inverse la porte à de dange- reux concepts du monde physique dans l’économie du l une gestion directe, sans intermédiaire, de la commer- monde numérique : épuisement des droits après la pre- cialisation (plateforme de distribution) ou une gestion mière vente du fichier, revente de livres d’occasion… des droits (société de gestion collective), avec des lec- teurs mieux connus dans leurs caractéristiques et leurs La gestion automatisée et personnalisée des pratiques ; droits d’auteur l une gestion granulaire des droits attachés à un livre nu- Au sommet du panthéon de la blockchain bruisse la méca- mérique donné, par type d’usage et par client ; nique quasi magique des smart contracts. Décrits comme l un raccourcissement des circuits de paiement ; des programmes autonomes qui exécutent automatique- l une traçabilité parfaite des biens numériques mis en cir- ment des conditions définies à l’avance, ils serviraient de culation sur les réseaux, facilitant ainsi la prévention des supports à des contrats auto-exécutables. copies illégales.

En d’autres termes, couplé à un dispositif de paiement Les risques de la blockchain pour le livre par crypto-monnaie, le fichier d’un livre numérique pour- Le discours sur la blockchain prend pour acquise la ro- rait porter en lui à la fois : bustesse du modèle technique sur lequel elle fonde sa

l ses conditions d’usage (lecture individuelle, prêt en bi- révolution. Si ce postulat devait se révéler exagérément bliothèque, reproduction dans le cadre d’un enseigne- optimiste, les risques seraient les suivants : ment, adaptation audio…) ; l infalsifiable, la mécanique de lablockchain repose pour- l le paiement immédiat, au moment de son usage, des re- tant sur un consensus, lui-même fondé sur une règle devances dues (en fonction du type d’usage qui en est de majorité en termes de puissance de calcul : s’il faut fait) ; 51 % d’une puissance de calcul donnée pour valider une l une redirection instantanée vers les différents ayants transaction, les mêmes 51 % permettent a priori de la droit (auteurs, illustrateurs, éditeurs, société de gestion défaire ; collective…) de la part des redevances leur revenant. l dupliquée, la blockchain reproduit et dissémine les don- CAS D’USAGE, TRANSFORMATIONS DES ENTREPRISES ET SECTEURS ÉCONOMIQUES CAS D’USAGE, TRANSFORMATIONS Ces smart contracts permettraient ainsi d’individualiser, nées les plus variées sur tous les serveurs du globe, de personnaliser, d’optimiser les conditions et les tarifs rendant difficile l’appréhension d’un responsable en cas d’usage de chaque livre numérique, et de raccourcir et d’acte illégal perpétré par son intermédiaire ; donc d’accélérer les délais de perception des droits d’au- l décentralisée, la promesse majeure de la blockchain est teur. celle de la désintermédiation ultime. On pourrait y voir

56 RÉALITÉS INDUSTRIELLES - AOÛT 2017 un danger pour un acteur comme l’éditeur, si l’on pense tous les opérateurs qui voudront emprunter les voies chaî- que celui-ci, intermédiaire entre l’auteur et les lecteurs, nées qu’ils contrôleront. pourrait se voir effacer de la chaîne avec les autres inter- Car si la blockchain fera (peut-être) disparaître certains médiaires, les distributeurs et les libraires, pour laisser intermédiaires, il s’en créera d’autres : les opérateurs la place à un auteur gestionnaire direct de l’exploitation des « nœuds », rouages essentiels et rémunérés de la de ses livres, distribuant et facturant directement ses chaîne ; les plateformes d’échanges de monnaies cryp- œuvres via la blockchain. Ce serait probablement oublier tographiques ; les détenteurs de l’information certifiée, que l’éditeur agit d’abord en tant que sélectionneur, puis qui seule permettra de déclencher les smart contracts ; comme collaborateur et, enfin, comme promoteur des et enfin, et surtout, celui qui, le premier, saura créer la

livres pour les faire vivre au sein de l’offre immense qui Arnaud ROBERT technologie intercalaire entre la machinerie cryptée de la se présente au lecteur. blockchain et l’usager commun (à la manière dont le Web En réalité, la désintermédiation nous paraît receler un est venu s’intercaler entre les utilisateurs et le réseau In- danger bien plus grand, celui d’être une fausse promesse ternet, permettant son usage le plus large, mais au prix du masquant l’émergence de nouvelles superpuissances passage par des opérateurs de navigation devenus quasi économiques en capacité d’imposer leurs exigences à monopolistiques à l’échelle mondiale).

RÉALITÉS INDUSTRIELLES - AOÛT 2017 57 La blockchain au service de l’action publique

Par Malo CARTON Ingénieur des mines, Agence des participations de l’État (APE) et Pierre JÉRÉMIE Ingénieur des mines, chef du service de prévention des risques et des nuisances, direction régionale et interdépartementale de l'environnement et de l'énergie (DRIEE) d’Île-de-France

La technologie blockchain offre la possibilité de construire des registres décentralisés et de parta- ger la confiance entre opérateurs dans la validité de ces registres. La décentralisation des bases de données sous-jacentes à une blockchain est consubstantielle à cette technologie. Dans le cas de l’action publique, une telle décentralisation constitue un changement de paradigme pour l’organisation habituelle de données publiques jusque-là stockées par un ou plusieurs opéra- teurs publics étroitement surveillés. Nous présenterons ici deux champs d’action publique pour lesquels la mise en œuvre de solutions utilisant cette technologie est actuellement à l’étude : la mise en place d’une nouvelle chaîne de titres pour assurer une circulation des titres financiers plus fluide, mais aussi plus aisément contrôlable, et les possibilités offertes par lablockchain pour l’enregistrement des droits et des servitudes sur les sols au service d’une meilleure infor- mation des acquéreurs.

Introduction sur une blockchain :

l d’une part, des utilisateurs qui souhaitent voir stockées Alors qu’à l’origine, par le biais de la communauté d’utilisa- des informations et/ou consulter des informations qui le teurs du protocole bitcoin, la technologie blockchain s’est sont déjà ; construite par opposition au modèle centralisé standard pré- l d’autre part, des « mineurs » : ce sont des utilisateurs valant dans l’action gouvernementale, selon une conception qui mettent à la disposition du réseau, souvent contre « libertarienne » des rapports économiques et sociaux, les une rémunération déterminée dans le protocole, leurs promesses de la technologie ont amené les gouvernements capacités de calcul dans le cadre d’une preuve de calcul de plusieurs pays de l’OCDE (dont la France), à considérer (proof of work) pour assurer la validation des informa- avec attention les applications potentielles d’une telle tech- tions et la gestion décentralisée du registre. nologie. Nous nous proposons, dans cet article, de présen- ter quelques caractéristiques de la blockchain qui peuvent Au-delà des différentes technologies envisageables pour justifier l’intérêt qu’a suscité cette technologie dans le cadre mettre en œuvre une blockchain, il convient tout d’abord de l’action publique. Deux exemples seront plus amplement d’examiner (dans le cadre de cet article) les propriétés détaillés, l’un étant tiré de l’actualité législative récente, et fondamentales des blockchains qui peuvent s’avérer inté- l’autre plus exploratoire afin de mettre en avant quelques ressantes pour l’action publique : applications types qui sont attendues de cette technologie l leur caractère distribué permet de répartir la charge de la dans le cadre de l’action publique. mise en œuvre de ces registres entre un grand nombre Les principales caractéristiques de la d’utilisateurs, y compris hors État (collectivités, opéra- blockchain présentant un intérêt pour teurs agréés, etc.) ; l’action publique l leur construction rend les blockchains résilientes à des CAS D’USAGE, TRANSFORMATIONS DES ENTREPRISES ET SECTEURS ÉCONOMIQUES CAS D’USAGE, TRANSFORMATIONS attaques : en pratique, les données stockées sont gra- Une blockchain est avant tout une méthode d’implémen- vées dans le marbre, définitivement, et ne peuvent être tation d’un registre distribué (c’est-à-dire réparti entre altérées (y compris par les opérateurs du registre), une les différents nœuds d’un réseau) et protégé contre des fois qu’elles ont été validées (1) ; modifications des données enregistrées, y compris de la part de ceux qui la mettent en œuvre. (1) Cela tant que des évolutions techniques ne permettent pas de casser en un temps relativement court les chiffrements employés ou Schématiquement, deux types d’opérateur sont présents la « preuve de travail » de la blockchain.

58 RÉALITÉS INDUSTRIELLES - AOÛT 2017 deux déclinaisonsconcrètes nées. Celaposenécessairement laquestionduchamp en représentant desnœudsstockantunepartiedon- en leurpermettantdeparticiperactivementausystème, possibilité d’accéderàunhautniveaudetransparence, tout imaginer, grâceàcettetechnologie,d’offrir auxcitoyensla vant lesdécisions de politique publique souhaitées,onpeut sateur) desdonnéesquifigurent dansla n’importe quelnœud(c’est-à-dire parn’importequelutili lés. Cettedécentralisationvadepairaveclavérificationpar par un ou plusieurs opérateurs publics étroitement surveil tuelle dedonnéespubliquesquijusqu’ici peut conduire àmodifierenprofondeur l’organisation habi Dans lecasdel’actionpublique,unetelledécentralisation à uneblockchainestconsubstantiellecettetechnologie. La décentralisationdesbasesdedonnéessous-jacentes gistre résistantàdesattaques,enregistrant desdonnées permet d’implémenter de manière décentralisée un re Comme évoquéplushaut,la technologie dela des transactions financement del’économie etd’unmeilleursuivi d’une nouvellechaînedetitres auservicedu De lamonnaieélectronique àlaconstruction Blockchain titres financiers,ci-après). des inefficiencestechnologiques(voirlesexemples tèmes aujourd’hui sujets à des rentes de situation ou à pourrait conduire àuneorganisation plusefficacedesys certains cas,lamiseenplaceparl’Étatd’untelsystème Plus prosaïquement, onpeut aussiconsidérer que,dans consensuelle ethorizontalepeuventêtre intéressantes. de contrôle,lespromesses d’unetelletechnologieplus un contexte de défiance vis-à-vis decertaines institutions vé oufortementinterfacéparlapuissancepublique.Dans sous-ensemble decitoyens)unpouvoiraujourd’hui réser des defonctionnementenconférantauxcitoyens(ouàun apparaît dèslorsêtre unmoyen derefonder certainsmo En raisondesesprincipalescaractéristiques,lablockchain les donnéesconcernées. tion renforçant d’autantla confiancequepeuventsusciter voir auxcitoyens,enleurconférantunpouvoirdevérifica blockchain commemoyenpermettantdedonnerdupou Là encore, onpeutimaginer mobiliserunetechnologie le cas d’une du consensus,laquestiondesmineursestcruciale,dans cole devalidationdesblocs,etnotammentlaforce (inaltérabilité des donnéesinscrites)procédant duproto Par ailleurs,pourconforterlarésiliencede sur l’étatdel’environnement rence (àl’instar, par les ouvrirà tous les citoyens, dans un souci de transpa d’ouverture decesdonnées l l permettent de construire structurellement un elles vérifier siunedonnéefigure ounondanslabase. n’importe quelnœudd’une sur leurchronologie consensus surlavaliditédesdonnéesenregistrées et blockchain destinée à l’action publique. etactionpublique exemple, ducadastre, oudesdonnées

; (2)

: souhaite-t-on par exemple : souhaite-t-onparexemple )

? blockchain peutaisément étaient blockchain. Sui-

: blockchain blockchain

stockées stockées ------(2) Conventiond’Arhus,directive INSPIRE. Parmi lesnombreuses applicationsattenduesdela s’érigeant ainsien l’État ou à une banque centrale disposant d’un monopole, temps, pourlesmonnaiesfiduciaires oumétalliques,à validité de la monnaie présentée (un rôle confié de tout liser laconfiancedansrégularitédestransactionset virtuelle grâceauquella implémenté est unregistre detransactionsd’unemonnaie grand publicestleprotocole bitcoin,pourlequelleregistre L’exemple d’utilisation de la public). grande taille (le plussouventsoumisàunfortcontrôle ral confiéssoitauxÉtats,àdesopérateursprivésde sa garantievalantconsensus.Ilsétaientdoncengéné rité centraliséecertifiantl’inaltérabilitéetvenantapporter avant l’irruption du numérique – en l’absence d’une auto- consensuels etpublics.Ilsétaient,decefait,irréalisables– nombre demétiersrequièrent desregistres inaltérables, des utilisateurssurlecontenudeceregistre. Un grand de manière définitiveetpartagée,avecunconsensus « teurs demarché, maisparunseulintermédiaire, centralisé pas validéesparconsensusdécentraliséentre touslesac logique duprotocole blockchain.Lestransactionsnesont Cette logiqueestfondamentalementantagoniqueavecla titres encirculation. taire centralresponsable del’intégritél’ensembledes de compte,quidoiventeux-mêmesenréférer audéposi l’opération doitêtre validéeparcha qui nesontpaslesclientsd’un saction donnantlieuàuntransfertentre deuxparticipants niveau représentant ledépositaire central.Pourunetran représentant unteneurde compte,etlenœuddeplushaut lisés, ouaumoinsorganisés en« pants delachaînedutitre ontétéhistoriquementcentra pour des raisons de supervision des acteurs, les partici dement même.Tant pourdesraisonsopérationnellesque marchés financiersquiest remis encausedanssonfon- peut être garanti. C’est dès lors le fonctionnement des règlement d’une transaction financière enespèces, ne transfert depropriété des titres, contrepartie juridiquedu Toutefois, enl’absenced’unechaînerobuste dutitre, le l’orchestration desopérations surlecapital. stratégique queceluidelanégociation(lacorbeille)ou des établissementsfinanciers,étaitperçucommemoins cantonné àundébatd’experts,entre juristeset« tention dusecteurfinancier sentation etdecirculation destitres financierssuscite l’at- temps resté discret, sinoninconnu,c’estquecedomaine taire centraldetitres, teneursdecompte,etc.)–estlong- nement desinfrastructures etacteursassociés(déposi Si ledroit applicableaux titres financiers–etlefonction dans lespaysanglo-saxons. sont d’ores etdéjàmobilisés, enFrance,maissurtout

chaîne deblocs RÉALITÉS INDUSTRIELLES - AOÛT 2017 «

»

, l’évolutiondesmodalitésderepré- tiers deconfiance blockchain permetdedécentra

: desfinancementsimportants blockchain le plus connudu mêmeteneurdecompte,

arbres cun desdeuxteneurs

» ultime

», chaquenœud ).

titrards

59

» ------

Malo CARTON et Pierre JÉRÉMIE et fortement régulé (compte tenu du pouvoir exorbitant des bons de caisse afin de créer les minibons. Durant les qui lui a été ainsi conféré). Incidemment, il convient de no- travaux préparatoires de l’ordonnance, il a été jugé oppor- ter que cette organisation peut rapidement s’avérer pro- tun de réserver au niveau législatif la possibilité de mettre blématique du point de vue économique, en raison de la en place, par décret pris en Conseil d’État, un mécanisme présence d’un acteur en situation de monopole de fait qui du type chaîne de blocs pour la représentation et la mise en peut être tenté de prélever une rente sur les utilisateurs. circulation de ces nouveaux instruments de financement. Historiquement, la solution qui avait été trouvée consistait Cela a ainsi permis d’inscrire au niveau législatif, dès le à faire participer les principaux acteurs financiers au ca- début de l’année 2016, la première définition d’une chaîne pital du dépositaire central (c’était le cas en France, avec de blocs en droit français au sein du Code monétaire et la Sicovam, détenue à l’origine principalement par des financier (et, à la connaissance des auteurs, en droit eu- banques françaises), ce qui permettait de limiter le risque ropéen) : d'un comportement de rentier de la part du dépositaire. « Art. L. 223-12 – Sans préjudice des dispositions de Dans ce contexte, que peut apporter la chaîne de blocs au l’article L. 223-4, l’émission et la cession de minibons fonctionnement de la chaîne du titre ? peuvent également être inscrites dans un dispositif d’en- Tout d’abord, elle permet d’éviter une structure arbores- registrement électronique partagé permettant l’authentifi- cente, qui ferait reposer l’intégrité de la chaîne sur un seul cation de ces opérations dans des conditions, notamment maillon, le nœud de plus haut niveau, qui devrait être très de sécurité, définies par décret en Conseil d’État. » fortement régulé, ce qui conduirait en retour à un possible La solution retenue présente l’avantage de l’optionali- comportement de rentier de la part de cet acteur, et ce, té, tout en réservant de la place à l’expérimentation de au détriment de l’ensemble du système (coûts excessifs, ce nouveau mode de fonctionnement des activités de inefficiences, etc.). post-marché, si les circonstances sont réunies. Par ailleurs, dans le cas des titres non cotés, la mise en Cette solution a été possible dans le cadre de cette or- place d’une solution chaîne de blocs représenterait un im- donnance, car, contrairement à l’univers des titres finan- portant saut technologique comparable à la dématériali- ciers (surtout ceux qui sont cotés), le régime juridique ap- sation des titres cotés intervenue en France en 1984. Cela plicable aux bons de caisse était quasiment inexistant et serait de nature à favoriser l’écosystème du financement ne procédait d’aucun texte européen. L’espace était donc désintermédié, en renforçant la robustesse et la vérifiabili- libre pour mettre en place les premiers jalons d’un cadre té des transactions portant sur des titres non cotés. nouveau, qu’il conviendra de préciser lors de l’adoption Enfin, en consignant dans un registre décentralisé l’en- du décret prévu à l’article L. 223-12. Toutes choses égales semble des transactions sur les titres, et non pas en don- par ailleurs, on peut rapprocher cette situation de celle nant une image statique des propriétaires des titres à un du développement des télécommunications mobiles dans instant donné, le niveau d’information auquel peuvent les pays en développement : il est parfois plus simple de avoir accès d’éventuels contrôleurs (administration fis- passer tout de suite au meilleur niveau de l’état de la tech- cale, Autorité des marchés financiers) serait substantielle- nique lorsque l’on part d’une « feuille blanche ». ment renforcé, leur permettant à tout instant de disposer S’agissant de la loi Sapin 2, une habilitation à procéder d’une vision du portefeuille des acteurs du marché et d’en par voie d’ordonnance a été prévue pour définir un cadre reconstruire l’historique. réglementaire en vue de la mise en place d’une solution Dans ce contexte, des avancées ont été annoncées par le de type blockchain pour des titres non cotés. Une consul- précédent gouvernement pour promouvoir le développe- tation publique est en cours pour déterminer les contours ment de cette nouvelle technologie. de la régulation qui pourrait ainsi être mise en place. La France sera alors l’un des premiers pays en Europe à se Deux annonces successives ont été faites : tout d’abord, doter d’un tel cadre réglementaire, qui pourra éventuelle- l’annonce d’une expérimentation pour l’utilisation d’une ment être étendu au cadre européen, notamment pour les chaîne de blocs pour les « minibons » (ordonnance du titres cotés (3). 28 avril 2016 relative aux bons de caisse), puis l’annonce d’un cadre réglementaire pour l’utilisation d’une chaîne de Dans les deux cas, en partant des avantages du cadre blocs pour les titres financiers non cotés dans le cadre de existant et des contraintes juridiques applicables, l’ap- la loi relative à la Transparence, à la lutte contre la corrup- proche suivie à ce jour en France pour l’application de la tion et à la modernisation de la vie économique, dite « loi technologie chaîne de blocs à la chaîne du titre est à la Sapin 2 ». fois graduelle et hybride. Les minibons sont des instruments de financement, qui, Graduelle, elle l’est pour initier les expérimentations dans

CAS D’USAGE, TRANSFORMATIONS DES ENTREPRISES ET SECTEURS ÉCONOMIQUES CAS D’USAGE, TRANSFORMATIONS sans être des titres de créance ou des contrats de prêt, des cas d’usages naissants (minibons) ou en complément matérialisent une reconnaissance de dette sur une entre- d’un cadre existant peu satisfaisant (titres non cotés). prise. Il s’agit d’une remise au goût du jour d’un vieil ins- trument de financement, le bon de caisse, dans le cadre du financement participatif. (3) http://www.tresor.economie.gouv.fr/16101_consultation-pu- L’ordonnance précitée, prise en application de la loi blique-ordonnance-blockchain-applicable-a-certains-titres-finan- « Macron », a permis de réformer le cadre réglementaire ciers

60 RÉALITÉS INDUSTRIELLES - AOÛT 2017 Hybride, elle l’est lorsqu’il s’agit de ne pas basculer local d’urbanisme et dans les plans de prévention des l’ensemble du cadre de représentation et de circulation risques ou les servitudes d’utilité publique applicables, des titres dans la chaîne de blocs, pour chercher, au qu’un service chargé du suivi des pollutions existantes contraire, à appuyer le développement de la chaîne de des sols puisse saisir les informations relatives aux sec- blocs, notamment au service de l’enregistrement des teurs d’information sur les sols issus de la loi ALUR (art. transactions, en misant sur la force juridique de la repré- 173) en en assurant une consultation facilitée et une mise sentation des comptes-titres. La chaîne de blocs peut à disposition « en une fois » pour d’éventuels acquéreurs. alors devenir un nouveau mode, davantage décentralisé, En automatisant la mise à disposition des données en- d’administration d’un compte-titre centralisé, qui conti- vironnementales et des règlements d’urbanisme attachés nuerait à avoir force juridique pour ce qui est de la pro- à une parcelle, un tel dispositif permettra non seulement priété des titres. de réaliser des gains importants d’efficience en abolissant les consultations systématiques des services en charge Blockchain et livre foncier : vers l’intégration dans de ces questions lors des mutations foncières, en fluidi- le système des titres de propriété à l’attention des fiant les transactions immobilières et en facilitant l’identifi- acquéreurs d’informations sur les risques et les cation tant de situations problématiques que les secteurs nuisances les mieux appropriés à des projets d’aménagements. La Une autre mission particulièrement régalienne des États construction du dossier préalable à une acquisition (la est l’implémentation du cadastre, d’une part (au sens de liasse, fort épaisse, qu’il convient de parapher devant no- registre public des parcelles existantes par entité adminis- taire) ne prendrait plus que le temps d’un clic pour retrou- trative), et d’un registre des propriétés foncières, d’autre ver les informations pertinentes sur le bien considéré. JÉRÉMIE et Pierre Malo CARTON part, certifiant la propriété de ces parcelles. Ce travail, dont on trouve des traces depuis la plus haute antiqui- Le rôle de l’État passerait de celui d’autorité de certifi- té, remplit plusieurs fonctions : d’une part, apporter la cation d’un registre centralisé des données à un rôle de connaissance des assiettes fiscales pour les impôts cal- garant de l’intégrité du protocole et des moyens de chif- culés sur une base foncière, dont la publicité et l’inaltéra- frement mis en œuvre, ce qui suppose un renversement bilité sont des garanties démocratiques acquises lors de d’optique de première importance pour ces missions très la Révolution française et, d’autre part, apporter la garan- régaliennes. La mise en œuvre de cadastres numériques tie publique aux titres de propriété foncière. décentralisés basés sur la chaîne de blocs pourrait ce- pendant trouver une application dans des pays en déve- Il est parfaitement envisageable, sur un plan technique, loppement ne disposant pas de registre centralisé et dans de numériser ces deux documents dans un registre de lesquels la garantie des droits de propriété représente un type blockchain, répondant, par construction, aux impé- enjeu fort pour le développement économique. Une expé- ratifs de publicité, d’inaltérabilité et de consensus requis. rimentation en la matière est le projet Bitland, qui vise à Plus concrètement, les autorités publiques ayant pouvoir déployer un tel dispositif au Ghana (4). Là encore, comme sur le cadastre ou assurant la validité légale et la certi- dans le cas des minibons, il est parfois plus simple d’aller fication des changements de propriété foncière (les no- directement à la pointe de la technologie, quand on part taires, notamment) pourraient être les « mineurs » d’une d’une feuille blanche. blockchain rendant accessibles à tous les données de tel ou tel propriétaire. La plasticité d’un tel registre per- Conclusion mettrait d’ailleurs d’intégrer dans un registre décentralisé unique d’autres types de données, notamment, pour les À l’heure où émerge la chaîne de blocs, celle-ci peut différentes parcelles, les informations relatives aux pres- apparaître comme une opportunité de restaurer une criptions d’urbanisme applicables et toute information re- horizontalité entre utilisateurs du réseau, en en faisant lative à ces parcelles. simultanément des prestataires et des utilisateurs de services tant numériques que réels, dans une approche Il devient ainsi imaginable de construire un système dé- pair-à-pair : l’action publique a tout à gagner à se saisir centralisé d’enregistrement des mutations foncières dans de cette possibilité pour assurer le maintien des registres lequel les transactions immobilières seraient saisies par d’opérations ou de propriété au service du contrôle, dans des officiers ministériels (les notaires, par exemple), ce des domaines aussi distincts que le suivi des droits et ser- qui permettrait à l’administration de disposer également, vitudes foncières ou la maîtrise de la chaîne de titres. Cette à des fins fiscales, de l’inventaire des propriétés parcel- évolution permettra non seulement une meilleure fluidité laires, soit l’ensemble des fonctions actuellement remplies des échanges, mais également un contrôle plus aisé des par le livre foncier. En pareil cas, outre ces transactions, opérations, conduisant à un fonctionnement efficient des le registre décentralisé de la chaîne de blocs permettrait marchés. Cette évolution supposera toutefois une évo- également de saisir des « transactions spéciales » qui lution substantielle de la relation contrôleur/contrôlé, en viendraient simplement « rattacher » aux parcelles les plaçant les contrôlés en capacité d’assurer une partie du prescriptions applicables ou les données environnemen- contrôle de la correction des saisies dans la chaîne. tales afférentes, dans une base de données décentralisée. Ainsi, on pourrait imaginer qu’un service chargé de l’urba- nisme puisse disposer des droits lui permettant de ratta- cher à une parcelle les prescriptions prévues dans le plan (4) http://bitlandglobal.com/

RÉALITÉS INDUSTRIELLES - AOÛT 2017 61 Les infrastructures et les services de l’Internet

Par Stéphane BORTZMEYER Ingénieur à la direction des systèmes d’information et des opérations de l’Association française pour le nommage Internet en coopération (AFNIC)

De nombreuses applications ont été proposées pour la chaîne de blocs (blockchain). Mais on doit constater que, dans beaucoup de cas, la description de « comment » la chaîne de blocs pourrait être utilisée pour cette application est tellement approximative qu’il est impossible d’évaluer si l’utilisation de la chaîne de blocs est, dans ce cas, raisonnable. Or, cette chaîne n’est pas utile pour toutes les applications. Nous explorerons ici deux applications liées à l’infrastructure de l’Internet : les journaux (au sens de journal de bord) et, surtout, les registres de noms, pour lesquels il y a déjà eu d’innombrables débats sur leur fonctionnement. Comment un registre de noms peut-il être réalisé sur une chaîne de blocs ? Qu’y gagnerait-on ? Quels seraient les problèmes et les obstacles ?

epuis que le concept de chaîne de blocs (blockchain) unique qui recevait les demandes, jugeait parfois de leur est à la mode, d’innombrables articles et présen- acceptabilité, mettait les enregistrements dans une base Dtations en ont exposé des applications possibles, de données et, enfin, en assurait la publication. souvent décrites en des termes très vagues (« il sera dé- C’est ainsi que l’AFNIC est le registre du domaine « .fr ». sormais impossible de mentir sur son diplôme, grâce C’est son intervention qui assure qu’il n’y aura qu’un seul à la blockchain « », les données de santé seront dans la paris.fr ou qu’un seul wikipedia.fr, que l’on pourra retrou- blockchain »…). Ce flou fait qu'il est difficile de discuter de ver le nom et l’adresse du titulaire de ces domaines, et ces applications, ou même de voir si la chaîne de blocs est que ces noms « marcheront », c’est-à-dire qu’ils seront vraiment une solution adaptée à ce problème. proprement publiés dans le DNS (Domain Name System, Notre but sera ici, au contraire, de détailler les applica- le protocole par lequel les noms de domaines sont utili- tions de la chaîne de blocs pour les services de base de sés). l’Internet, ainsi que pour son infrastructure. Cette intervention d’une organisation unique fait peser Deux types de services une lourde pression politique sur le registre. Sa légitimité « blockchainisables » doit être établie (par exemple, par la loi), ses décisions vont être contestées et il y aura même des interrogations Le bon fonctionnement de l’Internet dépend d’un certain sur son éventuel remplacement (que l’on songe aux nom- nombre de registres. Un registre est un service par lequel breux débats sur la gouvernance de la racine du DNS). on va assurer l’unicité et la bonne gestion de certaines Un second type de service potentiellement « blockchai- ressources, ainsi que la conservation de données so- nisable » est le « journal ». Un journal (« log », pensez au ciales. Par exemple, un nom de domaine doit être unique. journal de bord d’un navire) est une suite d’informations Les données rares (comme les adresses IPv4) doivent être dont l’ordre est important et qui ne doit pas être modifié, sévèrement rationnées. Le nom et l’adresse de l’organi- une fois écrit. Là encore, la sagesse conventionnelle était sation qui a enregistré un numéro de système autonome qu’il devait être tenu par une organisation unique en ga- – un nombre indispensable au fonctionnement du proto- CAS D’USAGE, TRANSFORMATIONS DES ENTREPRISES ET SECTEURS ÉCONOMIQUES CAS D’USAGE, TRANSFORMATIONS rantissant l’intégrité. cole de routage BGP (Border Gateway Protocol) – doivent être enregistrés. Il existe bien sûr beaucoup d’autres services qui sont tout aussi « blockchainisables » (comme Twister, concurrent Le terme de « registre » désigne non seulement le service, de Twitter, mais entièrement pair-à-pair), mais qui ne font mais aussi l’organisation qui assure ce service. Avant la pas partie de ce que l’on peut appeler l’infrastructure de chaîne de blocs, la sagesse conventionnelle était en ef- l’Internet. fet que ce service devait être assuré par une organisation

62 RÉALITÉS INDUSTRIELLES - AOÛT 2017 sont trompeuses cies dugenre « d’effectuer unnouveautypedetransaction plorateurs). Lesauteursontajoutéaucodelapossibilité de blocs(etdoncsespropres mineursetsespropres ex du codecélèbre Bitcoin,maisquiasapropre chaîne nelle nomméeNamecoin.Namecoinestunlogicieldérivé depuis denombreuses annéesunesolutionopération Pour lecasd’unregistre denomsdomaine,ilexiste objectif. et pratique,voyonslesmoyensconcrets deréalisercet sur salégitimité.Avant d’étudier ladifférence entre théorie mettre finauxpolémiques surlapolitiquedu registre, voire cer complètement un registre. Cela aurait l’avantage de Potentiellement, la chaînedeblocspermetrempla chaînes deblocsprivéesn’ontguère desens). de donnéesconviennentmieux(etc’estpourcelaquedes Si tousfontconfianceàuntiers,lestraditionnellesbases teurs quinesefontpasconfiance point important,danscettedéfinition,est sur unétat(parexemple,lecontenud’unregistre). Le des acteursquinesefontpasconfiance,unconsensus La chaînedeblocspermetd’obtenirunconsensusentre « coin est parfois présenté avec des formules raccour comme les adresses IP, àdesnomsdedomaine). (de mêmequeleDNSpermet d’associer desdonnées, ment denomsetl’associationdonnéesàces

Blockchainiser

un DNSpair-à-pair

: Namecoinn’arienàvoiravec leDNS,

» lesregistres

».

», maiscesformules

: «

: l’enregistre entre des ac- Name------d’enregistrement encours (àmoinsqu’iln'existeunmé blocs ne permet pas de changer facilement la politique voyons leslimites.D’abord, ilfautnoterquelachaîne de déjà (commeEtherIDouEthereum NameService).Mais est parfaitementréalisteet, d’ailleurs, plusieursexistent servi les demandespourréaliserle« Et c’estquasimenttout un logicielordinaire, commevotre navigateur « Si votre résolveurDNSa étéconfigurépourrésoudre le en donnéesvia clients DNStraditionnelsderésoudre lesnomsNamecoin Namecoin atoutefoisunepasserelle permettantàdes associées àunnom. s’agit de systèmes permettant de récupérer des données l’unique pointcommunétant sion simplifiée,écritedanslelangageSolidity scientifique del’AFNIC,enjuillet2016.Envoiciunever duconseil en détailparl’auteurdeceslignesàlaJournée reum commune.Untellogicielavaitd’ailleursétéprésenté un logicielderegistre etledéployersurlachaîneEthe quelconques parlachaînedeblocs.Onpeutainsiécrire différente, permet de faire exécuter des programmes modifier lelogicieldelachaînepourchaqueapplication coin. C’estlecasd’Ethereum qui,aulieud’imposerde qui sont sans doute meilleurs, techniquement, que Name- Il existed’autres logiciels degestionchaînesblocs sure lesfonctionsessentielles,commecelled’ordonner

.bit »,vouspouvezaccéderauxnomsNamecoindepuis

». Donc,unregistre denomssurlachaîneblocs RÉALITÉS INDUSTRIELLES - AOÛT 2017 le TLD(nonofficiellementenregistré) «

! C’estlachaînedeblocsquias que danslesdeuxcas,il

premier arrivé,premier Web

: .

.bit

63

». - - - -

Stéphane BORTZMEYER canisme permettant qu’un acteur de confiance le fasse, « Blockchainiser » les journaux mais, dans ce cas, on est presque revenu au registre tra- ditionnel, justement ce que beaucoup de promoteurs de la Et les journaux, est-il intéressant et possible de les faire chaîne de blocs voulaient éviter). Si cette politique d’enre- passer sur la chaîne de blocs ? Il existe déjà des journaux gistrement est « premier arrivé, premier servi », il ne sera publics, comme les journaux de certificats X.509 utilisés donc pas possible de mettre en œuvre une politique d’en- dans le cadre du projet Certificate Transparency. L’idée, registrement plus restrictive. La plupart des promoteurs normalisée dans le RFC 6962, est que les Autorités de de registres fondés sur la chaîne de blocs voient d’ailleurs Certification (AC) publient dans un journal les certificats cela comme un avantage : la chaîne est à l’abri de l’arbi- qu’elles signent. Ce journal ne permet que les ajouts, ja- traire et des passions (notons qu’elle a bien une politique, mais de modifications ou de retraits. Le navigateur Web mais c’est celle définie au lancement, et généralement on peut alors vérifier, lorsque le certificat lui est présenté par ne peut pas la modifier). Il faut juste être bien conscient de le serveur, que le certificat a bien été publié dans le journal. cette caractéristique. Et les titulaires de noms de domaine peuvent examiner en permanence le journal afin de s’assurer qu’il n’y a pas eu Ainsi, la chaîne de blocs ne conviendrait sans doute pas signature de faux certificats (le projet Certificate Transpa- pour l’allocation d’adresses IPv4, une activité dans la- rency est promu par Google, ce qui est logique puisque quelle, en raison de l’ancienne pénurie, on ne peut allouer cette entreprise a souvent été victime de l’émission de faux de nouvelles adresses qu’après un strict examen. Or, la certificats ; on a vu, par exemple, des gouvernements faire chaîne de blocs ne sait pas gérer des ressources rares. faire par une AC nationale de faux certificats gmail.com, De même, pour le cas de la racine du DNS (citée plus pour pouvoir intercepter le trafic avec ce serveur). haut), la chaîne ne pourrait pas facilement limiter le nombre Les journaux actuels sont gérés par des entreprises qui limitent de nouveaux TLD (domaines de premier niveau, comme l’écriture aux AC « reconnues ». Pourrait-on les « blockchai- «e .r », .com ou « .pizza »). Si l'on voulait résoudre les ac- niser » ? Certainement, et cela supprimerait la dépendance tuels problèmes de gouvernance de la racine en passant vis-à-vis d’un acteur privé. Mais, aujourd’hui, il semble qu’il celle-ci sur une chaîne de blocs, on aurait une dynamique n’existe pas de projet concret allant dans ce sens. de création de TLD très différente de l’actuelle. Conclusion Notez également l’absence de recours, la chaîne de blocs étant conçue pour fonctionner automatiquement, sans in- Alors, verra-t-on le remplacement des actuels registres, tervention humaine. Si vous perdez un nom de domaine qui jouent un rôle si important dans l’infrastructure de traditionnel (par exemple, parce que vous avez oublié de le l’Internet, par des chaînes de blocs ? D’abord, rappe- payer et que, redevenu libre, il a été pris par un tiers), vous lons-nous que le choix n’est pas binaire. Il n’y a pas forcé- avez des mécanismes de recours auprès du registre (ou de ment le seul registre traditionnel, d’un côté, et le système la justice). Ces mécanismes peuvent être lents, compliqués complètement pair-à-pair, de l’autre. et chers, mais ils existent. Si vous perdez un nom enre- On pourrait ainsi imaginer des solutions organisationnel- gistré via le programme qui tourne sur la chaîne de blocs, lement innovantes, comme une chaîne de blocs, mais il n’y a pas de recours : vous ne pouvez pas argumenter avec l’existence de « notaires » qui assureraient pour leurs avec… un algorithme ! (Une telle mésaventure était surve- clients des fonctions difficiles, comme la supervision de la nue à l’auteur de cet article en septembre 2015, et elle ex- chaîne de blocs ou la gestion des clés cryptographiques. plique pourquoi le nom bortzmeyer.bit ne marche plus…). Un tel système aurait pour avantage que le titulaire de La sécurité de vos noms, sur la chaîne de blocs, repose sur nom aurait une liberté complète quant au choix de son une bi-clé (dont une partie est privée et l’autre publique) notaire (il aurait aussi celle de s’en passer). cryptographique. Comme son nom l’indique, la partie pri- vée doit être gardée rigoureusement secrète. Si elle est co- Découpler les différentes fonctions d’un registre a en piée par un tiers, celui-ci pourra faire ce qu’il veut avec vos outre l’avantage intellectuel de faire réfléchir sur le travail noms (vu le nombre de logiciels malveillants qui tournent des registres. J’ai donné une version très simplifiée de ce sur n’importe quelle machine Microsoft Windows, le risque travail plus haut. Par exemple, je n’avais pas parlé de la n’est pas purement théorique). Si la partie privée de la clé sauvegarde des données, une fonction essentielle (dans est perdue (pas de sauvegarde, et le disque dur qui tombe la chaîne de blocs, les données sont automatiquement en panne…), vous ne pouvez plus modifier vos noms, voire dupliquées, mais si tous les nœuds de la chaîne dispa- vous ne pouvez plus les renouveler. raissent, les données sont perdues. Or, Namecoin est une petite chaîne que maintiennent quelques enthousiastes). Là encore, pas de recours auprès d’une institution (comme Mais évidemment, le plus gros défi pour la chaîne de blocs il peut y en avoir si vous oubliez le mot de passe d’accès sera celui de son adoption. Namecoin existe depuis des an- à votre Bureau d’Enregistrement). Or, l’expérience de la CAS D’USAGE, TRANSFORMATIONS DES ENTREPRISES ET SECTEURS ÉCONOMIQUES CAS D’USAGE, TRANSFORMATIONS nées. Or, il n’a jamais eu de succès. Plusieurs de ses services cryptographie acquise jusqu’à présent nous enseigne que associés (comme les résolveurs DNS publics pour « .bit ») les utilisateurs ne sont pas de bons gestionnaires de clés n’existent plus. Aujourd’hui, tout le monde peut, technique- cryptographiques. Dans le futur, des solutions technolo- ment parlant, créer sur Ethereum un registre de noms en très giques (comme des dispositifs matériels durcis stockant peu de temps et avec peu de compétences (c’est le côté, la clé privée) limiteront (peut-être) les risques, mais ne les très important, « sans permission » de l’Internet). supprimeront pas totalement. Mais ce registre sera-t-il reconnu par les utilisateurs ?

64 RÉALITÉS INDUSTRIELLES - AOÛT 2017 jusqu’à inspirer Richard Stallman,quicréeleprojet GNU de programmeurs contribuent aucodesource d’Unix, ses sources sontdistribuées gratuitement.Descentaines mercialisé àcaused’une clausedenon-concurrence, d’exploitation Unix (crééparAT&T) n’apaspuêtre com marque ledébutd’unenouvelle ère. Alors que lesystème production demassenepeuventespérer suivre. lement leursattentesàune cadence quelesusinesde à l’améliorationduproduit pourquecelui-cicombleréel à unecommunautéd’intérêts. Sesmembres participent mise àjourquepermetd’atteindre l’ masse, maisceseraitsanscomptersurlapuissancede le plangratuitduconcepteurpourpouvoirfabriqueren avancer l'idéequ’ilreste toujourspossiblede« models desindustriesdel’opensource il esttrèsdifficiledetirer uneloigénéraledes Le produit lui-mêmeétantrarement commercialisable, Windows etMacOS. des deuxcélèbres systèmes d’exploitationpropriétaires GNU/Linux pourdesusagesencore plusvariésqueceux droits. Ilexisteaujourd’hui descentainesdedistributions poser lepremier système d’exploitationcompletlibre de droits). En1991,leprojet s’allieaunoyauLinuxpourpro- en 1984 à minuit L’histoire de l’open sourcecommencele1 De l’opensourceàhardware www.makernet.org Étudiant-entrepreneur àl’École42etcofondateurduBlockFest Par Pierre-Alexis CIAVALDINI MakerNet :lafabricationdistribuée son versantmatériel,l’ facile laformalisationdesonmarché. Certes,onpourrait y atoujoursunobjetphysiqueàvendre, cequirend plus sontcerteslibrementopen hardware disponibles,maisil jourd’hui extrêmementprometteur. Lesplansdesproduits par lablockchain. et sonouverture auxautres cultures autraversd’unécosystèmedefabricationdistribuéepermis Cathedral andtheBazaar “Release early, often!".Cetadagebienconnudumondeinformatiqueestissude release ware ware des dizainesdenouveaux l’électronique estdésormaisuneformed’artisanat.EllepermetàlaChinedecréerchaquejour une grandepartiedesonsavoir-faire enmicro-électronique. sécurisable grâce à la matériel, cettephilosophiepermetl’élaborationd’unnouveaumodèledefabricationdistribuée qui révèlel’avantagecompétitifqu’offre cettenouvelle visiondel’informatique.Applicableau

standardisé (quin’existequelà-bas).MakerNet (la première suitedelogicielstotalementlibre de : c’estlaSeconde0duTemps Unix , semble open hardware blockchain. La France a délocalisé son industrie de pointe et a perdu

(1) smartphones quel’onappelledes« (1997),undesouvragesfondamentauxdumouvement open source,grâce

! Enrevanche, er

janvier ; cettedate business être

voler

1970 au-

» - - (2) https://makernet.org/ Media, Würzburg,1997-1999. Linux andOpenSource byanAccidental Revolutionary (1) RAYMOND E. S., si un moule d’injection, coûtant plusieurs dizaines de mil- imprimante 3Dprendrait lerelais. Ilenvatoutautrement un mettant enréseau,ilseraitrevanche possibledecréer leur rapiditéd’exécutionreste pourl’instantfaible.Enles une production demasse.Leurentretien estcomplexeet imprimantes De plus en plus utilisées pour le prototypage rapide, les industrielle Du prototypage rapideà laproduction centaines demodèles. le projet en 2004qu’ellestombentdansledomainepublicetque Inventées en1984partrois FrançaispourAlcatel,c’est libre-service desimprimantes est trèsbonmarché. Tout comme Unix, la mise en À l chaîne deproduction est extrêmement onéreuse. tiques, mais,dansuntelcas,toutemodificationdela sont capablesdeproduire enmassedesobjetsiden tralisés (commeFoxconnetses1,6 Considérés commel’usinedumonde,desfabricantscen tion remarquable production cela occasionnepeuderépercussions surlachaînede ’inverse, uneproduction reposant surl’impression cluster (2) propose lagénéralisationdecemodèle RepRap donne naissance à des open hardware d’imprimantes

;

comme unnœudd’une RÉALITÉS INDUSTRIELLES - AOÛT 2017 3D nepermettentpas,toutefois,deproposer A contrario,àShenzhen,enChine, Shanzai»,uneformed’openhard-

: si The Cathedral and the Bazaar: Musings on uneimprimantetombeenpanne,

3D ayant

3D afaitleursuccèsactuel. une force de produc blockchain, uneautre

million d’employés) open source , O’Reilly The

65 3D - - -

Pierre-Alexis CIAVALDINI liers d’euros faisait défaut dans une chaîne de production puissent intégrer son travail. De fait, plus son travail est traditionnelle. intégré dans celui d’autres designers, plus grande sera son assiette de droits à collecter lors de la fabrication des La fabrication additive est aujourd’hui principalement liée produits. à l’open hardware et s’est heurtée à des problématiques légales sans précédent : que se passe-t-il lorsqu’un ama- Fabriques et fabricants sont référencés sur MakerNet. Hub teur reproduit une pièce soumise à brevet et la diffuse d’accès aux capacités productives et créatives d’une lo- librement sur Internet ? De tels cas ont jusqu’ici été re- calité, cette plateforme promeut l’artisanat et les pro-ama- lativement isolés et sans grande ampleur. Il demeure ce- teurs (5). Ces derniers sont capables de proposer une fa- pendant évident que l’industrie du brevet doit se saisir de brication à la demande à moindre coût. Les fabricants cette question, comme c’est le cas actuellement dans le sont certifiés sur leurs compétences par destokens (6) qui domaine de l’industrie créative, du fait de l’apparition de leur sont décernés sur la blockchain. Ces tokens leur per- nouveaux modes de consommation. mettent de recevoir une requête de fabrication de tout ou partie d’un produit, à laquelle ils répondent par un prix de Les smart contracts apportent un élément de réponse à fabrication et un temps de livraison au prochain maillon de ces questionnements. Par leur nature immuable, intègre la chaîne de fabrication. Leur réputation est capitale s’ils et internationale, ils pourraient constituer un nouveau type veulent garder une bonne visibilité sur le marché. de brevet numérique. Utilisateur final (et acheteur du produit), son consomma- La fabrication distribuée teur, commande sur MakerNet la fabrication locale d’un produit. Il choisit un plan de fabrication qui génère un Internet offre tout un univers d’expérimentations aux sec- appel d’offres s'adressant aux fabricants certifiés autour teurs de la production. Pourquoi transporter des produits de chez lui. Le consommateur reçoit alors une liste des à des milliers de kilomètres en consommant inutilement routes de fabrication possibles pour la matérialisation de des centaines de litres de carburant, quand on peut faire son produit. Son choix dépend du prix total du produit, de transiter uniquement les informations concernant ces pro- la qualité attendue, des matières proposées et du trajet duits ? La constitution d’un réseau international de desi- parcouru par chacun des composants du produit. gners dont les produits sont manufacturés localement, à proximité de leurs acheteurs, est une utopie en passe de Ces trois profils d’utilisateurs sont totalement perméables. devenir réalité. Lors du prototypage d’un produit avant sa mise sur le marché, un utilisateur peut devenir tour à tour designer, FabCity, un programme de politique urbaine créé en 2014 fabricant partiel et consommateur de son propre produit, par Tomas Diez, marque un tournant dans les objectifs cette facilité de prototypage accélérant très fortement l’ar- politiques des métropoles mondiales (3). Ce projet a pour rivée sur le marché d’un produit fini. Lesstart-ups sont vocation de rendre ces grandes villes à 50 % autosuffi- ainsi à même de « palper » leur marché avant même de santes dans les domaines de l’énergie, de l’alimentaire et lever et de dépenser des fonds pour parfaire leur produit. des produits industriels à l’horizon des quarante ans. L’échange d’informations entre les métropoles sur leur La rétribution des communs créatifs production et leur consommation fait de ces villes les Sur MakerNet, il est possible de créer une version mo- nœuds d’un réseau mondial qui apprend de ses usages difiée d’un produit : comme sur Github, cela s’appelle et de ses différences. C’est à la problématique de l’auto- un « fork ». Cette fonctionnalité est régie par les règles suffisance de la production industrielle que MakerNet (qui définies par le créateur du produit initial,par la licence qu’il est partie prenante de FabCity) s’est attachée à répondre. lui a accordée et par le modèle de business qu’il a choisi MakerNet est une place de marché pour la fabrication lo- (gratuit, donation libre, donation contre contribution, prix cale et distribuée : elle met en relation designers, fabri- fixe, pourcentage du prix de production...). Cela a pour cants et consommateurs sur une plateforme proposant effet de créer un nouveau produit qui inclut la totalité de la un ensemble d’outils pour la protection et la rémunération propriété intellectuelle préexistante et leurs ayants droit. d’une propriété intellectuelle participative, en rassemblant Lorsque ce nouveau produit sera fabriqué, le prix de la ses différents acteurs en communautés d’intérêt autour d’un usage. L’objectif est de créer une base de données (4) de communs matériels (à l’instar de Github , pour les lo- (3) Les localités et les États ci-après ont déjà rejoint FabCity : Bar- giciels). celone, Boston, Somerville, Cambridge, Ekurhuleni (Afrique du Sud), le Kerala (Inde), la Géorgie, Shenzhen, Amsterdam, Toulouse, la Ré- gion Occitane, Paris, le Bhoutan, Sacramento, Santiago de Chile Trois profils d’utilisateurs et Detroit. (4) GitHub est un service Web d’hébergement et de gestion de dé- CAS D’USAGE, TRANSFORMATIONS DES ENTREPRISES ET SECTEURS ÉCONOMIQUES CAS D’USAGE, TRANSFORMATIONS Le terme de « designers » dans cet écosystème est à veloppement de logiciels utilisant le logiciel de gestion de versions comprendre en son sens le plus large, celui d’inventeur. libre et décentralisé Git. Le designer identifie un besoin d’usage et crée les plans (5) MILLER P. & LEADBEATER Ch., The Pro-Am Revolution: How de fabrication du produit qui y répond au sein d’une blue- Enthusiasts are Changing Our Society and Economy, Londres, De- print. Sa propriété intellectuelle est protégée et rémunérée mos, 2004. (6) Un token est un jeton virtuel (sur une blockchain), dont la repré- grâce à la blockchain. Ce système l’incite à rendre ses sentation dépend du système dans lequel il est utilisé (il peut, par plans de fabrication modulaires afin que d’autres projets exemple, signifier un droit d’accès ou encore un diplôme).

66 RÉALITÉS INDUSTRIELLES - AOÛT 2017 Pierre-Alexis CIAVALDINI Pierre-Alexis

Figure 1

propriété intellectuelle sera calculé pour chacun en fonc- Le fait de détenir ce token permet au certifié d’enseigner à tion de sa contribution à la création du nouveau produit. son tour la « compétence découpe laser » à d’autres per- sonnes et de certifier celles-ci. Ainsi, quand ces nouvelles Sur MakerNet, tout produit a donc nécessairement un personnes certifiées réaliseront des découpes laser sur Ma- marché associé, fût-il composé d’une seule personne. kerNet, un pourcentage de leur bénéfice sera reversé à leur Lorsqu’un produit est « forké », son usage est modifié et il professeur. Cependant, s’il s’avère qu’un fabricant fait mal peut alors toucher une audience plus large. Ainsi, le desi- son travail, deux réputations sont mises en cause : la sienne gner du produit originel touchera les droits sur un marché propre, et celle de son professeur sur cette compétence. plus large que son marché initial : les marchés de niche sont de ce fait dynamiques et ils s’agrandissent au fur et à En résumé : les designers peuvent trouver des profils triés mesure de l’amélioration d’un produit. Lorsque le designer par certification de compétences. Les fabricants sont ré- effectue une mise à jour de ses plans de fabrication, un férencés par les tokens qu’ils détiennent, tandis que les nouveau blueprint du produit est créé. Cette nouvelle ver- designers sont référencés par les logiciels qu’ils utilisent sion est sélectionnée par défaut pour la fabrication (mais pour former les blueprints qu’ils ont publiés sur MakerNet. les versions préexistantes demeurent accessibles). Ainsi, Pour proposer un produit sur la plateforme, le designer les mises à jour sont disponibles instantanément pour doit créer un blueprint. Un blueprint est la représentation la fabrication dans le monde entier. Les consommateurs virtuelle du produit et de son processus de fabrication, ayant déjà acheté le produit avant la mise à jour en sont ceux-ci étant sécurisés sur une blockchain. notifiés : ils peuvent faire fabriquer la pièce mise à jour afin de remplacer la pièce obsolète, ou bien faire remplacer Les fichiers contenus dans leblueprint sont dans le for- celle-ci par un fabricant. mat éditable des logiciels que le designer utilise. Ils sont standardisés, compressés et « hachés » pour former une La certification pair-à-pair archive complète du produit à fabriquer. Le fichier com- pressé est hébergé sur un stockage décentralisé (tel que Pour assurer plus de confiance au sein de la communau- BitTorrent) afin d’en assurer la disponibilité. Son hash est té, un système de certification des compétences pair-à- stocké dans un smart contract horodaté qui contient les pair est associé à des mécanismes de réputation. Pre- adresses de paiement de tous les participants de cette nons l’exemple du responsable d’une usine détenant une propriété intellectuelle. Une fois stockée, le blueprint as- machine de découpe laser. Son usine référençant cette sure l’intégrité de son contenu : il est impossible de l’alté- machine sur MakerNet, il peut certifier la compétence des rer. Il est néanmoins possible, en cas de litige, de révoquer personnes qui fréquentent sa fabrique en leur décernant le le blueprint. token de « compétence découpe laser ». Cela leur permet de recevoir des commandes locales de découpe laser.

RÉALITÉS INDUSTRIELLES - AOÛT 2017 67 Figure 2

Sur MakerNet, le consommateur choisit son produit dans Le consommateur est assuré qu’il recevra son produit, car la liste des designs proposés et lance un appel d’offres le reste de son paiement ne sera pas transmis aux fabri- aux fabricants locaux référencés par leur token certifiant. cants tant que sa commande n’aura pas été délivrée (elle Ces derniers disposent d’un délai pour répondre à l’ap- doit être conforme aux plans). Les fabricants sont, quant pel d’offres. MakerNet calcule alors les étapes de fabri- eux, assurés que le consommateur a déjà payé et que la cation en fonction des offres, puis il propose celles-ci au somme qu’il a versée est conservée sous séquestre. consommateur, dès qu’elles sont disponibles. Après la livraison, en cas de litige sur la qualité du produit, Chaque route de fabrication inclut les prix des matériaux, le consommateur et le fabricant responsable de la partie du transport, de la fabrication et de la chaîne des droits défectueuse doivent trouver un arrangement amiable, à de propriété intellectuelle. Optionnellement, elle peut in-

CAS D’USAGE, TRANSFORMATIONS DES ENTREPRISES ET SECTEURS ÉCONOMIQUES CAS D’USAGE, TRANSFORMATIONS tégrer les assurances et les normes de conformité. Lors- qu’une route de fabrication satisfaisante est constituée, le consommateur peut sélectionner celle-ci et en payer la (7) Un séquestre dans le domaine du droit est la procédure par la- (7) réalisation. Son argent est sécurisé par un séquestre sur quelle un tribunal décide de placer un bien ou une somme d’argent le smart contract de la route de fabrication (seule la partie sous la garde de la justice, rendant le bien séquestré momentané- correspondant aux matières premières est envoyée aux ment indisponible pour son propriétaire, et ce, jusqu’au jugement fabricants ayant transformé ces dernières). qui y mettra un terme.

68 RÉALITÉS INDUSTRIELLES - AOÛT 2017 défaut de quoi le capital du smart contract comprenant le décentralisation intrinsèque apportées par la technologie contrat de dépôt du client serait détruit (8). blockchain. La blockchain, levier de confiance En promouvant l’industrie pédagogique, les citoyens peuvent reprendre le pouvoir sur la technique et propo- Bien qu’elle crée de l’emploi dans les domaines de la re- ser des produits dont l’usage leur est adapté, au lieu de cherche et du développement, la robotisation générale a s’adapter à l’usage du produit. tendance à anéantir bon nombre de tâches et de métiers, Cet article a été mis au point avec la précieuse participa- notamment de métiers manuels. tion de Vivien Roussel et de Laura Bui. Pour renouveler le système de production et de consom- mation actuel, nous proposons de placer l’innovation par- ticipative et l’artisanat – électronique inclus – au centre du schéma productif, grâce à la fabrication distribuée. Cette manière d’envisager la production industrielle est (8) Le contrat de dépôt est une somme supplémentaire à la com- mande qui ne sera pas restituée au client si un litige ne trouve pas traversée de problématiques complexes. Notamment, CIAVALDINI Pierre-Alexis de résolution. Ce principe repose sur celui de l’ultimatum game, ex- un écosystème tel que celui-ci ne semble réalisable que périence économique développée en 1982 par Güth, Schmittberger grâce à la sécurité, à la dématérialisation monétaire et à la et Schwarze.

Les Matrices de l’École 42* Pas de cours, pas de profs : à l’École d’informatique 42, ce sont les étudiants eux-mêmes qui sont en charge de leur réussite et de la réussite de leurs camarades. Pour progresser sur les projets qui leur sont proposés, ils doivent compter sur la force du groupe, donner et recevoir des informations, être tour à tour formateur et apprenant. Ce mode d’apprentissage pair-à-pair supprime les liens de subordination dans l’apprentissage. Chacun est le garant d’une partie de la réussite de projets menés à bien ensemble. « Nous passons de l’ère industrielle à l’ère digitale » Créer, innover et construire sont les maîtres-mots de notre époque et les technologies rendent ces pratiques de plus en plus accessibles. L’École 42 enseigne à ses élèves à apprendre ces technologies par eux-mêmes (cependant, l’ap- prentissage autodidacte de l’informatique ne s’accompagne pas naturellement d’une maîtrise du monde institutionnel : entre ces deux univers, un dialogue productif reste à organiser). Matrice est née de la rencontre entre 42 et Creative Valley (espace d’innovation et incubateur de start-ups). Ce pro- gramme met des institutions ou des entreprises en relation avec des étudiants de différentes filières pendant dix mois pour mettre au point des solutions numériques qui soient économiquement viables. En conciliant l’agilité des start-ups et la puissance de réflexion du monde estudiantin, Matrice couvre l’ensemble de la chaîne d’innovation, depuis la recherche fondamentale jusqu’à la mise en production. Le programme permet d’aller plus loin que la pédagogie en intégrant des données réelles de marchés, d’entreprises et d’utilisateurs. Attirées par l’approche hors normes de 42, plusieurs entreprises sont en passe d’intégrer le programme Matrice afin d’y étudier notamment des problématiques afférentes à la blockchain. La structure de l’école autorise les élèves à étudier, par intérêt personnel, des domaines qui sortent parfois des conventions. Motrice de l’apprentissage, cette curiosité intellectuelle est le gage d’un travail de qualité taillé sur mesure. « Le numérique, veiller à ce qu'il ne dérive vers le seul ciblage publicitaire ou la prédation sur les données » La place prépondérante que prend le numérique dans notre société contemporaine lui confère une puissance qui devrait l’astreindre à une constante remise en question morale. C’est pourquoi il est primordial d’accompagner la construction éthique des étudiants en informatique en les confrontant à la réalité des mondes institutionnels et professionnels. À 42, rien n’est imposé : personne n’est là pour « forcer » les élèves à venir. L’école leur permet de combiner leurs besoins en formation et leur envie de faire. C’est le seul véritable moteur de l’apprentissage et de l’engagement. Les étudiants s’intéressent spontanément à des technologies, soumettent de nouveaux sujets pédagogiques et créent des groupes d’intérêt comme l’association Blockchain 42. Des conférences et des événements peuvent aussi être organi- sés, c’est ainsi qu’est né le BlockFest – festival pédagogique des blockchains, en juin 2016 au sein de l'École 42. Monté par une équipe passionnée par la transmission et le partage, le BlockFest a pour objectif d’être un espace-temps de construction collective, accueillant et fertile. Conférences, ateliers de prototypage de haute technologie avec de la pâte à modeler et des baguettes chinoises, cours de programmation et analyses business s’y côtoient pour former un objet à plusieurs entrées à destination des néophytes de l’Internet comme des experts en cryptographie. Depuis, deux autres BlockFest ont été organisés et une vingtaine d’entreprises ont pu étudier la faisabilité de projets blockchain et les prototyper.

* Par Pierre-Alexis Ciavaldini, étudiant-entrepreneur à l’École 42 et cofondateur du BlockFest, avec l’aide de François-Xavier Petit, directeur du programme Matrice à l’École 42.

RÉALITÉS INDUSTRIELLES - AOÛT 2017 69 Blockchains et Smart Contracts : des perspectives pour l’Internet des objets (IoT) et pour l’e-santé

Par Philippe GENESTIER Docteur en microélectronique chez Orange Labs Loïc LETONDEUR Ingénieur en Recherche et Développement, en fonction au sein d’Orange Labs Sajida ZOUARHI Ingénieure et doctorante en informatique et réseaux chez Orange Labs et au LIG (Laboratoire d’informatique de Grenoble INP) Alain PROLA Concepteur/développeur d’applications sur plateforme Androïd et Jean-Marc TEMERSON Ingénieur de recherche, responsable d’équipe et de projets au sein d’Orange Labs, aujourd’hui à la retraite

Du fait de l’utilisation croissante d’objets connectés (IoT) et de l’interconnexion de systèmes hé- térogènes générant des myriades de données personnelles, notre société numérique se trouve confrontée à des défis nouveaux, qu’elle se doit de relever : administration décentralisée et com- posite de ces objets, résilience, respect de la vie privée dans l’accès aux données, traçabilité des usages... La blockchain offre des réponses à ces défis : - un fonctionnement décentralisé, - des mécanismes de consensus permettant de concilier des intérêts divergents, - une confiance répartie par la suppression du tiers de confiance unique. De nouvelles opportunités émergeront au sein d’une nouvelle économie du partage basée sur des réseaux sociaux 2.0, dans lesquels humains et objets connectés interagiront de façon in- différenciée. La blockchain nous permet de créer des « ancres » entre le monde physique et le monde virtuel. C’est ainsi qu’une opération ou une transaction dans le monde réel pourra avoir son homologue dans le monde numérique. Même si la blockchain ne répond pas à toutes les problématiques, ce type de solution est tout à fait pertinent dans des domaines où confiance, transparence et traçabilité sont indispensables. Néanmoins, il ne faut pas passer sous silence ce que la blockchain ne permet pas, notamment la vérification de l’authenticité des données enregistrées ou la vérification de la légitimité d’une opération « non électronique ».

es possibilités offertes par la technologie blockchain, L’expansion rapide de l’Internet des objets dans notre CAS D’USAGE, TRANSFORMATIONS DES ENTREPRISES ET SECTEURS ÉCONOMIQUES CAS D’USAGE, TRANSFORMATIONS en particulier l’automatisation des transactions via monde numérique soulève des défis nouveaux. Tant pour L des smart contracts, ouvrent un champ immense leur gestion que pour la maîtrise des données qu’ils gé- d’applications et de bouleversements organisationnels nèrent, ces objets connectés nécessitent des approches par la remise en question du rôle de certains acteurs, dans innovantes. Des technologies comme la blockchain per- de nombreux domaines. Cela concerne en particulier des mettent de relever tout ou partie de ces défis, tout en en- domaines comme l’Internet des objets (IoT, Internet of gendrant des usages novateurs : en témoignent des ac- Things) ou la santé. teurs tels que Filament, IOTA ou IBM Watson IoT.

70 RÉALITÉS INDUSTRIELLES - AOÛT 2017 dans touslesorganismes desoinsouencore lamiseen le développementdutélé-suivi, celuidesdossierspatients L’informatisation croissante dudomainede lasanté(avec l’e-santé Les problématiques dudomainede Mirai la malveillance–illustrésparlerécentexempledu en passantparlesélémentsréseau jets eux-mêmesjusqu’auxinfrastructures de de défaillancequiseretrouvent àtouslesniveaux–desob vironnement défavorable, quecelui-cisoitdûàdesrisques aussi grandequepossibledesplateformesIoTmalgréunen- latence réseau.Cesexigencesrequièrent unedisponibilité dictibles, notammententermesdebandepassanteet la santé, exigentdesperformancesà la fois élevées et pré tribué. Pourtant,lesréseauxverticaux,àl’instardecelui L’IoT unenvironnement concerne àlafoismassifetgéo-dis desobjets Les défisdel’Internet blockchain pourraitapporterdesélémentsderéponse. inadaptées. Pourdépassercesapproches, latechnologie debout-en-boutserontsur lepostulatd’unegouvernance ditionnelles baséessurdesplateformescentraliséeset/ou patients à unaccèsleursdonnées). Les approches tra lapriseencompteduconsentementdes ce quiconcerne exigences réglementaires fortesexistent(notammenten risés dansdessystèmeshétérogènes, pourlesquelsdes sur desobjetsconnectés)etdedossiersmédicauxnumé- développement dessolutionsdetélé-suivi(baséesounon posent égalementdansledomainedelasanté,avec pour ledéveloppementdel’IoT. Cesmêmesquestionsse vice etderespect delavieprivéesontdesquestionsclés curité, de confiance, detransparence, de qualité deser administrer età rizon Les 26 plateformes de et d’administrationauplusprèsdesobjets,àl’instar ment desdonnées(accès, filtrage, agrégation, stockage) distribuant descapacitésdecommunication,traite- Face àdetelsenjeux,seulesrépondront desplateformes d’échange) etladécouvertedesobjetsconnectés. des environnements de programmation et des formats acteurs), l’hétérogénéité (des matériels,desprotocoles, teropérables), (éclatéeentre lagouvernance denombreux conduisant àdessous-ensembles isolés, parfoisnonin dépendance desconstructeursetabsencedenormes face augrandnombre d’objets connectés,lesilotage(in compte, commelanécessitédepouvoirpasseràl’échelle Par ailleurs,d’autres éléments doiventêtre prisen état fonctionnel). lience (miseenplacedestratégiesvisantàrecouvrer un fonctionnel lorsd’uneoccurrence depanne)etrési des propriétés derésistance (capacitéàmaintenirunétat En conséquence,lesplateformesIoTdoiventposséder seront dessystèmesintelligentsmulti-agents. des solutionsdechoixpourréalisercesplateformes,qui (1)

2020 constitueront unearmadadetailleinéditeà –ouencore auxaléasclimatiques.

milliards d’objetsconnectéspressentis àl’ho Fog Computing exploiter. Lesaspectsdegarantiesé (2) . La

–, àdesrisquesdus blockchain apporte datacenters, datacenters, malware ------

dées parleréseauenuneseconde. formance quisebasesurlenombre detransactionsquisontvali (4) TPS:transactionsparseconde. Ils’agitd’unindicateurdeper de cesdonnéesentraîneunemodification delasignature. fixe surunensemblededonnées, desortequetoutemodification (3) Lehashconsisteàcalculerunesignaturenumérique delongueur phone mobile…). teurs…) oudanslespasserellesqu’ilsutilisent(LiveBoxtélé traitements danslesobjetsconnectéseux-mêmes(montres,cap computing auplusprèsdesutilisateurs:déportd’unepartie (2) LeFogComputingestunprolongementdesconceptsdu a étémenéeen2016. (1) Uneattaquedetypedéniservice tion dehash Elle s’appuie sur destechniquescryptographiques (fonc contenu delabasedonnées). centralisé (iln’y authentifiée, irréversibleetrépliquée)avecuncontrôledé de façonsécuriséedesinformations(chaqueécriture est tière de stockage d’informations. Elle permet de stocker La La technologieblockchain assuré. lesdroitsune informationàjourencequiconcerne d’un des assurancesmédicales,ilestsouventdifficiled’avoir celle des moyens permettant de s’en assurer. Au niveau soulèvent laquestiondel’authenticitédesdonnéeset plusieurs tierces parties.Parailleurs,cesmêmesusages des détenteursdedonnéesaupartagecelles-ciavec lourds processus deprise en compte du consentement ou d’échangesdedonnéesentre ceux-cinécessitentde médicaux etlesbesoinscroissants d’interconnexions En outre, l’aspect très éclaté des systèmes d’information mentaires àprendre encompteparlesacteursdusecteur. la vieprivée,desécurité,enplusdescontrai des préoccupationscroissantes entermesderespect de place deprojets surlamédecinepersonnalisée) tiers de confiance lutions quiouvrent denouvelles perspectives coin contre plusde1000 priété...) etenmatière de performances(7 sans plateformeinformatiquecentralisée. lisent lablockchaincommeinfrastructure pours’exécuter automatisées s’exécutantsansinterventionhumaineni contracts qui réalisent des transactions conditionnelles La technologieblockchainvoitaussiapparaître des évo sans mécanismedepreuve detravail). tions stockées(transactionsfinancières, registre depro publiques ousemi-publiques),danslestypesd’informa missions delecture etd’écriture desinformations(privées, cipe dela Il existedesmisesenœuvreautourduprin alternatives tions financières. été utiliséesafindecréer unhistorique fiabledestransac ment delacrypto-monnaiebitcoin,pourlaquelleellesont Les technologiesdelablockchainproviennent initiale - sation d’unréseauinformatiquedenœudsindépendants. blockchain estuneinnovationtechnologiqueenma blockchain, avecdesvariantesdanslesper RÉALITÉS INDUSTRIELLES - AOÛT 2017 (3) etcryptographieasymétrique)surl’utili-

a pasd’autoritécentralequicontrôleraitle

; les applications décentralisées qui uti

tps avecd’autres via descamérasconnectées

tps blockchains

(4) ntes régle- : les pourbit- génère smart

cloud 71 ------

Philippe GENESTIER, Loïc LETONDEUR, Sajida ZOUARHI, Alain PROLA et Jean-Marc TEMERSON Photo © Bigot/ANDIA.fr Recours au Centre Jean Bernard au Mans – Clinique Victor Hugo à une application utilisable sur smartphone inventée par Fabrice Denis, oncologue de l’établissement, pour dépister par anticipation les risques de récidive du cancer du poumon. « L’informatisation croissante du domaine de la santé (avec le développement du télé-suivi, celui des dossiers patients dans tous les organismes de soins ou encore la mise en place de projets sur la mé- decine personnalisée) génère des préoccupations croissantes en termes de respect de la vie privée, de sécurité, en plus des contraintes réglementaires à prendre en compte par les acteurs du secteur. »

Les réponses apportées par la tiers. Dans le cas présent, il s’agira pour le détenteur ou blockchain à l’Internet des objets l’administrateur d’un objet de pouvoir en définir le statut (opérationnel, obsolète, en accès public…) d’une manière Si la blockchain ne fournit pas des réponses à tous les dé- qui soit traçable et non répudiable. fis de l’IoT, elle apporte néanmoins un ensemble de fonc- Ces plateformes seront composées d’importants en- tionnalités et de propriétés intéressantes qui pourraient sembles d’agents hiérarchisés capables d’exploiter et d’ad- constituer des éléments de choix pour les plateformes IoT. ministrer des sous-ensembles de l’IoT. Du fait de la nature L’IoT est par nature dynamique non seulement de par ultra-dynamique et hostile de l’IoT, ces agents entreront en la mobilité des éléments qui le composent et de par les conflit de décision et de responsabilité pour savoir qui est risques de défaillance, mais également en raison de son légitime pour décider d’actions sur les objets, l’infrastruc- lien étroit avec la société de consommation mondialisée, ture et les données, ou encore quelles sont les données et où achats sporadiques de masse et obsolescence sont les fonctionnalités utilisables tout en préservant le respect de règle. De ce lien découle une forte complexité liée à la du choix des utilisateurs et de leur vie privée. découverte des objets connectés et des éléments d’in- La blockchain apportera par construction une solution de frastructure. Si tel objet s’avère légitime à un moment don- recherche de consensus à même de résoudre ces conflits né, il peut rapidement ne plus l’être, suite à sa revente ou en créant une autorité répartie, sécurisée, cohérente et à son vol, ou de par sa mise au rebut par les utilisateurs. traçable apte à vérifier toutes propriétés que les plate- Par ailleurs, il est nécessaire de protéger l’utilisateur contre formes IoT devront posséder. des objets malveillants en interdisant la prise en compte. La CAS D’USAGE, TRANSFORMATIONS DES ENTREPRISES ET SECTEURS ÉCONOMIQUES CAS D’USAGE, TRANSFORMATIONS solution blockchain permettra de légitimer les objets, de les Plus généralement, la blockchain constitue une solution répudier et de les bloquer en offrant un registre résistant et innovante en matière de délégation de droits pour rendre à traçable d’autorisations liant le choix des utilisateurs finaux un détenteur de données le contrôle de leur usage par des aux plateformes IoT. Une telle fonctionnalité est une exten- tiers, comme cela est imposé par la réglementation dans sion de celle qui est connue sous l’expression de gestion le domaine médical (en attestent les travaux en cours à ce de consentement et qui consiste à enregistrer les modalités sujet dans le cadre du Healthcare Data Institute et au sein de l’accès à ses données octroyé par un propriétaire à un d’Orange).

72 RÉALITÉS INDUSTRIELLES - AOÛT 2017 De cette communauté de besoins ont été identifiés plu- décentralisées, offrant un service de qualité, fiable, tra- sieurs cas d’usage intéressant ces domaines et tirant parti çable et maîtrisable par l’utilisateur final. des caractéristiques intrinsèques de la blockchain :

(5) l la gestion du consentement , car celui-ci est au cœur Les limites de la blockchain des obligations réglementaires et des préoccupations Théoriquement apte à faciliter la transition en cours vers le pour le partage d’informations entre acteurs du monde monde IoT, la blockchain n’est cependant pas la solution de la santé : consentement du patient à la collecte et miracle. Elle présente de fait quelques limites. à la consultation de ses données par des soignants, ou encore à l’utilisation de ses données dans le cadre En premier lieu, elle n’assure ni la fiabilité des données d’études cliniques. Dans le monde de l’Internet des remontées ni l’authentification des acteurs (qui consiste à objets, consentement du propriétaire d’un objet pour s’assurer qu’une personne est bien celle qu’elle prétend que les données issues de cet objet soient utilisées par être, par exemple à l’aide d’une solution comme Mobile des tiers (et définition des conditions d’utilisation), par Connect d’Orange), qui sont du ressort d’autres méca- exemple pour les diffuser ou les agréger avec d’autres ; nismes. Une seconde limitation est relative au champ l la traçabilité des actions effectuées dans un système de d’application de la blockchain, celle-ci ne concernant que collecte et de stockage de données ; des éléments (objets, événements…) ayant une « ancre » l la mise en œuvre de plateformes d’échange de données fiable dans le monde numérique, comme EverLedger a su (par exemple, pour la mise en relation de donneurs et de le faire brillamment pour la traçabilité des diamants afin de receveurs d’organes(6)) ; lutter contre la contrefaçon. Un événement n’ayant pas de l le suivi de matériels tout au long de leur vie : production, trace numérique ne pourra pas être pris en compte. transport, stockage et utilisation. Ensuite, d’un point de vue technique, la blockchain fait un Rendre le pouvoir à l’utilisateur fort usage des technologies actuelles de hash et de chiffre- ment. Sachant que l’utilisation de certains registres créés Mise au service de l’IoT, et notamment dans des approches au travers de la blockchain peut durer plusieurs dizaines du type Fog Computing, la blockchain permet à l’utilisa- d’années et que la fiabilité de la blockchain est basée sur teur de gérer finement les droits d’accès à ses propres celle de ses mécanismes intrinsèques, se pose donc une objets et données et leur utilisation par des tiers, ainsi que véritable problématique de pérennité de la protection des de journaliser les utilisations du patrimoine connecté des informations stockées face à la vulnérabilité future des al- utilisateurs, tout en leur offrant une traçabilité ayant valeur gorithmes utilisés. En effet, un rapport du NIST (National de preuve en cas d’abus. Institute of Standards and Technology) pointe la vulnérabi- lité de ces algorithmes face à un ordinateur quantique (ce- De ces deux atouts résulte une confiance renforcée des lui-ci pourrait exister dès 2030). Un tel ordinateur aura une utilisateurs dans l’IoT face à l’aspect anxiogène de mythes puissance suffisante pour casser les protections mises en errant de Big Brother en Skynet : la blockchain réaffirme place aujourd’hui, et donc, en particulier, pour revenir sur leur gouvernance sur leur existence dans le monde des transactions passées. numérique. Enfin, sur le plan juridique, la blockchain constitue une Au-delà de ses apports techniques, la blockchain pourra preuve « de fait » qui, en l’absence actuelle de qualifica- être le terreau d’une économie nouvelle laissant entrevoir tion légale, n’est pas une preuve d’acte juridique. de nouvelles sources de revenus. Par exemple, en facilitant l’émergence de réseaux sociaux 2.0, dans lesquels humains Conclusion et objets connectés interagiront de façon indifférenciée au travers de transactions telles que l’achat de produits dont les Face aux nombreux défis posés par l’IoT et l’e-santé, deux types d’acteur auraient besoin (voir à ce sujet l’exemple et face aux besoins suscités en termes de décentrali- développé par IBM et Samsung de machine à laver capable sation, de traçabilité et de confiance, la blockchain offre de commander de la lessive lorsque son stock est épuisé). des réponses. Sans avoir la prétention de résoudre tous Ces réseaux pourront être le support d’une économie col- les problèmes, elle ouvre également la porte vers de laborative rétribuant les possesseurs d’objets connectés en nouveaux horizons. De ce fait, elle présente des champs fonction de leur utilisation par d’autres membres du réseau, d’investigation inédits aux acteurs du domaine, qui ne qu’ils soient humains ou objets. Cette économie s’inscrira pourront faire l’économie de s’y intéresser. pleinement dans le contexte actuel d’« ubérisation » et de déréglementation plaçant l’utilisateur comme fournisseur et « consommacteur » de biens et services. Par ailleurs, de tels (5) Blockchain for Consent Management in the eHealth Environment: réseaux sociaux seront une formidable source de création A Nugget for Privacy and Security Challenges, par GENESTIER Ph., de valeur dans des perspectives de Big data. ZOUARHI S., LIMEUX P., EXCOFFIER D., PROLA A., SANDON S. & TEMERSON J.-M. Publié dans Journal of the International Society La blockchain apparaît ainsi comme un facilitateur ex- for Telemedicine and eHealth (2017). traordinaire pour les plateformes IoT de demain (de type (6) Plus d’informations sur le site officiel du projet Kidner : www. Fog Computing, par exemple), qui seront complètement kidner-project.com TEMERSON Philippe GENESTIER, Loïc LETONDEUR, Sajida ZOUARHI, Alain PROLA et Jean-Marc

RÉALITÉS INDUSTRIELLES - AOÛT 2017 73 LES SMART CONTRACTS ET LES ORACLES L fixé lesmodalitésdeleurtransfert depropriété. tagé. Cettedisposition a étéabandonnée,lerapporteur moyen d’undispositifd’enregistrement électronique par d'en permettre lareprésentation etlatransmission,au cable auxtitres financiersetauxvaleursmobilières afin sures nécessairesl’adaptationdudroit concernant appli par le Parlement à prendre, par ordonnance, toutes me- pourrait luiaussidevenirunoutilderégulation. co-technologique. Objet de régulation, le pourrait elle aussi tirer profit decette innovationjuridi harmonieux danslasphère privée.Maislasphère publique dans unfuturproche, pour enassurer undéveloppement manière tellequeles seconds ne devraientpasyéchapper, mière aatteintlaphasede régulationinstitutionnelled’une de blocsetauxsmartcontracts,ons’aperçoitquelapre - instable etlacunaire. Lorsque l’ons’intéresse àlachaîne technologiques, estsouventcritiquéeetpresque toujours du 28 avril 2016 moyen de un cadre juridiqueauxopérationsdetitres noncotésau 74 ayant estimé« loi Macron régulation institutionnelle.Leprojet deloiàl’originela la finance d’entreprise a rendu pertinente l’adoption d’une Le développementdelatechnologiedansledomaine Le smartcontract,objetderégulation La régulationinstitutionnelle IODE UMRCNRS6262,UniversitéBretagne-Loire Professeur àlaFacultédedroit etdesciencepolitiquel’UniversitéRennes1, Par CatherineBARREAU les La régulationdessmartcontractset tobre 2016 modèle anciendesbonsde caisse. Undécret du28 oc une autoritéderégulationpeutnéanmoinsêtre envisagé. ner lanature pourétablirsesusages.Siceux-cisontessentiellementprivés,unusagepublicpar dique sécurisépourpermettre sondéveloppement.Régulercenouvelobjetexiged’endétermi restent limités,devraientlesrejoindre souspeu,lacomplexitédel’outilrequérant uncadre juri- gal, dansledomainedufinancementdesentreprises. Les être victimes.Ainsi,leschaînesdeblocsprennent discrètementplacedansl’environnement lé exprimé tantparlesutilisateursdel’innovationquientirent profit queparceuxquipourraienten Tôt outard, touteinnovationtechnologiqueestsaisieparledroit. Lebesoinderégulationest

tion estsuivied’uneseconde technologique dilemmeesttoujourslemêmefaceàuneinnovation e RÉALITÉS INDUSTRIELLES - AOÛT 2017 blockchains. Enconséquence,uneordonnance (2) (4) smart contractsdesrégulateurs prévoyait une habilitation du gouvernement prévoyaitunehabilitationdugouvernement aréglementéleursconditions d’

douteuses (3) a seulement créé des minibons, sur le

: f aut-il réguler

» (1) leshabilitationspourdonner , rapportée à des innovations , rapportéeàdesinnovations

? Cettepremière ques : commentlaréguler smart contract émission et Celui-ci

? ? - - - - -

L’inquiétude subsistantchezlesparlementaires, uneques demeure inefficaceenl’absence dedécret. cite àlatechnologiedeschaînesdeblocs,maiscelui-ci « les obligations du "fournisseur d’accès", le droit les obligations du "fournisseur àl’oubli ou les questions liées àlaresponsabilité despartiesprenantes, suffisamment développéeetqueducontentieuxapparaîtra, tion écriteaétéposée décret prisenConseild’ dans desconditions,notammentdesécurité,définiespar partagé permettantl’authentificationdecesopérations comme L. 223-4 aux dispositionsdel’article1323ce[même]Code ticles 1321et1322duCodecivil.Àdéfaut,pardérogation 12, quitientlieudecontratécritpourl’applicationdesar d’enregistrement électronique mentionnéàl’article 2017, p.26. à peineaustadedel’expérimentation, (6) Sil’onencroitlapresseéconomique, lesminibonsenseraient tant entrelespartiesquevis-à-vis des tiers.» transfert d’unecréancefuturen’a lieuqu’aujourdesanaissance, au cessionnaire, qui peut la rapporter par tout moyen. Toutefois, le En casdecontestation,lapreuvedatecessionincombe s’opère àladatedel’acte.Ilestopposableauxtiersdèscemoment. (5) Cetarticledispose:«Entrelesparties,letransfertdelacréance (4) JORFn°0254du30octobre2016. (3) JORFn°0101du29avril2016. l’égalité deschanceséconomiques,diteloiMacron. (2) Loin°2015-990du6août2015pourlacroissance,l’activitéet tion ouàlacorégulation. (1) Soit le recours à la loi ou au décret par opposition à l’autorégula- au nomdel transfert depropriété deminibons résultedeleurinscription

résulte de étant

». Leregistre del’article smart contracts,dontlescasd’usage ’acquéreur dansleregistre prévuàl’article l ’inscription de la cession dans le dispositif un dispositifd’enregistrement électronique

: « État

lorsque la technologie aura été lorsque latechnologieauraété (6) . Ils’agitd’unrenvoi impli Les Échos,mardi30mai

L. 223-12estdéfini

L. 223- (5) , le - - - - -

objet delarégulationfinancière envisagée elleavocationàêtre n’est passeuleconcernée, leprincipal et delivraisond’instrumentsfinanciers.Silachaîneblocs dépositaire centralnilivrésdansunsystèmederèglement titres financiersquinesontniadmisauxopérationsd’un décentralisées (C. des co logiciels obéissent aux conditions habituelles de validité d’échéance. Lescontratsconclusenfaisantusagedeces tion doitêtre exécutéeen luirappelantsonobjetetsadate de notificationsquiavertitchaquepartiequesonobliga tagés. Ceslogicielsnepermettentquel’envoid’unesuite dehors desdispositifsd’enregistrement électroniques par de lasimplicitéetsécuritédunumérique,ceen cours auxalgorithmespermetdéjàdeprofiter delarapidité, de blocss’impose,ilnedoitpasocculterlefaitquere Si lerapprochement entre le dupliquée envuedelarégulationdusmartcontract. être particulièrement réactives.Cetteméthodepeutêtre nique partagé( mission aumoyend’undispositifd’enregistrement électro- financiers afind'enpermettre la représentationet latrans au 9 d’ici sation delavieéconomiqueahabilitélegouvernement, transparence, àlaluttecontre lacorruptionetà moderni de laloin°2016-1691du9 un videjuridique encore laprotection duconsommateurseverront opposer nologies deschaînesdeblocset est un lieu de libreInternet et égale expression et les tech- le plantechnique,aucuneexpertisenepeutêtre négligée. en compte.Enoutre, sur dessujetsaussicomplexessur cité àmieuxacceptercelle-ci,sileursattentessontprises de larégulationparaîtêtre cier lesdestinataires de la r tibles avec la technologie développée. D’autre part, asso- doit yêtre dérogé lorsquesesdispositionssontincompa lations entre partiesprivées, est applicable par défautetil Code civil,siègeparexcellencedudroit commundesre Deux enseignements peuvent être déduits. D’une part, le semble desavispartiesprenantes intéressées. ment alancéuneconsultationpubliquepourrecueillir l’en thentiques sursupportélectronique, maisle térialisation descontratspermetlarédactiond’actesau- des conditionsspécialesdevaliditécelui-ci.Ladéma être dédiés à un modèle de contrat etfaciliterlerespect cessaire pourrecourir àceslogiciels,quipeuventenoutre permettant laconclusiond’uncontratparvoieélectronique sitif aétéadaptépourfaciliterlerecours aunumériqueen régime juridiquedela afind’ les intentionsdugouvernement ont été programmées à l’origine dans lecadre ducontrat. compte l’ensembledesconditions etdeslimitations qui cution decesengagements sont réunies,enprenant en gations enregistrées dès lors que les conditions d’exé- sophistiqué quipermetl’exécution automatiquedesobli L’expression requiert dessolutionsplustechnologiques.

civ. art.

décembre ntrats poséesparleCode(art.

1125 ets.)aucuneautre régulationn’estné smart contractrenvoie àundispositifplus

2017, àréformerledroit applicableauxtitres distributed ledgertechnology, : les

». Sonauteursouhaitait, personnes intéressées peuvent donc blockchain de nature àrenforcer leurcapa

églementation et les chaînes smart contractetleschaînes décembre

(7) . Enréponse,l’article smart contractssont

1128). Ledroit po

ériger un véritable ériger unvéritable dèslors,connaître 2016 relative àla (8) - . Legouverne à l’élaboration smart contract ouDLT) des

120 120 ------

éteindre desobligations. sieurs personnesquiestdestiné à créer, modifier, transmettreou (9) Lecontratestunaccorddevolontés concluentredeuxouplu (8) http://www.tresor.economie.gouv.fr/File/434688 (7) Questionécriten°96014du24 mai2016. autonomie juridique.Cettedémarche estsusceptiblede être totale.Lesmartcontract seraitalorsdotéd’unetotale pas seulementenlangagenaturel. Ladérogation pourrait ner quecetteloisoitexpriméeencode(informatique),et légales en vigueur par une loi dérogatoire, on peut imagi- En revanche, sicecontrat estexemptédesprescriptions contrats nepeuventêtre maintenus. Ilfautdoncydéroger. infondée endroit. Lesprincipes directeurs dudroit des correctement surleplan informatique,maisdemanière suspendre uneobligation enregistrée quiaétéexécutée compenser par équivalent l’impossibilité d’annuler ou de cution immédiated’uneobligationmonétaire destinéeà entreront enconflit.Ilestcertespossibledeprévoirl’exé- impossibles. Lachaînedeblocsetledroit descontrats de décisionsjusticeaccordant undélaidegrâcesont non écriteslesclausesabusivesoulapriseencompte du contrat,leretour austatuquoante , lefaitderéputer possible àmodifier. Parconséquent, encasd’annulation subsisteront. Lachaîne de blocsest,parexemple,im judiciaires protectrices habituelles.Desincompatibilités parties le bénéfice de toutes les dispositions juridiques et code informatiquepourquelesmartcontractoffre aux dérables pourconvertirtoutelalégislationfrançaiseen du Code civil, il faut alors déployer des moyens consi- sont envisageables.Sicecontratestsoumisauxrègles Si l’onconsidère quele sur sarégulationinstitutionnelle. un examen plus détaillé, dans le cadre de cette réflexion sens del’article informatique utilisé.Son d’intelligence artificielleestprésentedansleprogramme l’expression françaiseaétéd’embléerelevée de l’anonymatcaractéristiquelachaîneblocs)… entre despersonnesqui ne se connaissent pas(en raison action en justice, dès lors que le confiance), lapossibilitéde renoncer paravanceàtoute la chaînedeblocsrepose surl’absencedetiers signature électronique paruntiersdeconfiance(puisque ser des adaptations les parties outil pourrait-ilêtre ouvertàtouslescontratsettoutes cessaire audéveloppementdecetoutil soulever deuxdifficultés contract n’estpas trées. Laqualificationdecontratdu d’auto-exécution desobligationscontractuellesenregis- grand-livre comptable,affirméinfalsifiable. L’ambiguïtéde nière fiable latransaction dans un registre, unesorte de chacune exécutera son obligation et d’enregistrer de ma- des partiesquineseconnaissentpas,des’assurer que par elle-mêmedefaciliterlaconclusionducontratentre tiers deconfiancesontsupprimés.Latechnologiepermet coût etleralentissementimputablesàl’interventiondu Aucune des parties ne peut s’opposer à l’exécution. Le

? RÉALITÉS INDUSTRIELLES - AOÛT 2017 La dérogation pourrait consister à en propo

1101 duCodecivil «

: l’exigence de la certification de la intelligent

« : commentcréerlaconfiancené smart contractestuncontratau

intelligence

smart contract est conclu », mêmesiunecouche

smart contractmérite (9)

» , deuxpossibilités tientàsacapacité

? L’usage decet

: le smart

75 - - - -

Catherine BARREAU Une autre possibilité est de considérer que le smart droit qui lui est applicable selon sa nature, sa forme ou son contract n’est pas un contrat. « Un smart contract peut objet, et le smart contract, modalité conventionnelle d’exé- être comparé à une feuille de papier. Celle-ci peut avoir cution du contrat. L’attention des parties qui décideraient une valeur juridique lorsqu’elle répond à l’ensemble des de recourir au smart contract devrait ensuite être attirée sur critères nécessaires pour être un contrat, mais seul le cor- la rigueur d’exécution des obligations inhérentes au méca- pus juridique lui donne cette valeur. L’aspect intéressant nisme. Dès lors, il semblerait raisonnable que le législateur de la chaîne de blocs, et d’une façon plus large du code, imposât qu’une information précise fût donnée lors de la est qu’il est possible d’y implémenter des conditions qui conclusion du contrat contenant la clause de recours au s’appliquent automatiquement. Cependant, ces conditions smart contract. Compte tenu des caractères intrinsèques sont limitées par le cadre technique, qu’il ne faut absolu- de la chaîne de blocs et de l’impossibilité de neutraliser ment pas confondre avec le cadre juridique. Il est possible l’exécution des obligations enregistrées, et a fortiori de les de connecter l’un à l’autre, mais ce n’est pas le cas par modifier, le Code civil devrait sur ce point rendre obliga- défaut (10) ». La séparabilité du contrat, acte juridique, et toire le versement d’une indemnité compensatrice du pré- du smart contract, mode d’exécution technique, semble judice subi par l’exécution d’obligations nulles ou réputées compatible avec les pratiques actuellement constatées qui non écrites, que cette compensation ait été prévue dans sont de nature à faciliter le développement du recours à le smart contract ou non. Des dispositions sur la respon- la chaîne de blocs en matière contractuelle. Il suffit alors sabilité devraient également être retenues : responsabilité que les parties à un contrat valablement conclu en dehors des créateurs du logiciel si la chaîne de blocs se montre de la chaîne de blocs conviennent, dans ce contrat, de impuissante à réaliser les actions promises (responsabili- recourir à un smart contract pour l’exécution de leur ac- té, pour faute assurément – pour faute lourde, peut-être), cord. Les principes directeurs du droit des contrats (liberté responsabilité des utilisateurs, éventuellement, si l’un d’eux contractuelle, autonomie de la volonté, consensualisme et corrompt la chaîne de blocs, privant les parties au contrat licéité des conventions sur la preuve) s’allient pour créer un de l’exécution automatique de leurs obligations. Il faut tou- cadre juridique assez souple et sûr. Les quelques usages tefois envisager que ces mises en cause soient rendues constatés actuellement exploitent d’ailleurs ces principes. impossibles par le dispositif décentralisé et anonyme que

LES SMART CONTRACTS ET LES ORACLES LES SMART Quelle serait la régulation institutionnelle dans l’optique constitue une chaîne de blocs. d’un smart contract reposant sur une chaîne de blocs pu- blique ? Formellement, elle pourrait prendre place dans une Le smart contract, outil de régulation sous-section 3 ajoutée à la section consacrée aux effets du En matière de contrôle de la concentration économique, contrat entre les parties (11). Après celles consacrées à la l’Autorité de la Concurrence peut subordonner l’autori- force obligatoire et à l’effet translatif, le Code civil pourrait sation de l’opération à des remèdes qui peuvent prendre prévoir plusieurs dispositions confirmant la possibilité, pour la forme d’engagements structurels (cession d’actifs, les parties, de coder les obligations créées par le contrat par exemple) ou comportementaux (suppression d’une conclu entre elles en vue d’assurer sa bonne exécution et clause de non concurrence). Si le respect des engage- aménageant les conséquences, sur la chaîne de blocs, de ments structurels est assez facile à vérifier, le contrôle de la nullité éventuelle du contrat ou de la reconnaissance du la bonne exécution des engagements comportementaux caractère abusif de certaines des clauses dudit contrat, est plus délicat à réaliser (12). L’Autorité de la Concurrence en particulier de la clause prévoyant le recours au smart désigne actuellement un mandataire indépendant qui contract. Parmi les dispositions les plus importantes de établit des rapports de suivi. Informée des manquements, cette sous-section, figurerait tout d’abord celle qui délimi- ladite Autorité peut suspendre ou rétracter la décision terait le champ d’application du recours au smart contract. d’autorisation, enjoindre sous astreinte aux entreprises Il nous semble que seuls les contrats consensuels, créant d’exécuter ces rapports et infliger une sanction pécuniaire des obligations ayant pour objet des prestations simples aux entreprises contrevenantes. Le respect de chaque en- à exécuter et soumises à peu de conditions, conclus gagement est obligatoire et les sanctions pécuniaires sont entre des parties disposant d’une puissance économique établies à un niveau suffisamment élevé pour dissuader équivalente devraient ouvrir le recours au smart contract. les entreprises de les proposer à l’Autorité sans avoir réel- Cela reviendrait à faciliter l’usage de ce recours aux pro- lement l’intention de les respecter. La mise en place d’une fessionnels qui contractent ensemble et aux interrelations chaîne de blocs privée par l’autorité de régulation permet- des particuliers. Les ventes d’immeubles, les contrats de trait d’automatiser l’exécution des engagements, et peut- prêts bancaires notamment, ne devraient pas permettre le être la sanction de leur violation, de manière plus efficace. recours à la chaîne de blocs : la déception sera grande pour Mais il faut probablement pour cela que la technologie les start-upers qui souhaitent déjà « disrupter » ces activi- se perfectionne. La régulation peut l’accompagner ou la tés, mais le système actuel repose sur des bases sociétales suivre, mais en aucun cas la précéder. larges et solides, que le smart contract ne saurait remplacer en l’état actuel de son développement technologique. Une autre démarche pourrait consister à lister les contrats pour lesquels le recours au smart contract serait possible, mais (10) http://equationdelaconfiance.fr/rencontre/primavera-de-filip- pi-il-faut-davantage-enseigner-la-technologie-aux-juristes elle serait plus attentatoire à la liberté contractuelle. La deu- (11) Art. 1193 à 1198 actuels du Code civil. xième disposition pourrait être celle qui poserait le principe (12) CHEVRIER É., « Du suivi des engagements dans les concentra- de la séparation entre le contrat, acte juridique conforme au tions », Dalloz Actualité, 22 septembre 2011.

76 RÉALITÉS INDUSTRIELLES - AOÛT 2017 performante samiseenœuvre. Utilisant lablockchain ler uncran,quedis-je,dixcransplusloin. Les promoteurs des indicator,– ouleKPIKeyperformance parexemple). des indicateurs(telsqueleSLA– documents d’exécution,parexemple)ouencore àsuivre matiques surcertainsaspectsdéterminés(lafourniturede renouvellement, parexemple),àfaire desrelances auto ci se résument souvent à assurer le suivi des délais (de Il existebiendesoutilsdesuivicontractuel,maisceux- ne sontpas(bien)appliqués… tions d’uncontratsontimportants,maisquesont-ilss’ils le contratenlui-même.Eneffet, lestermesetdisposi ou moins Cette miseenœuvre, autrement appelée« telligent La questionn’estdoncpasderendre uncontratplus« n’est pasuncontrat Un Introduction Avocat, directeur dupôleDroit dunumériqueCabinetAlainBensoussanAvocats Lexing Par ÉricBARBRY Aspects juridiques! Smart contracts… férent. Avec lesmartcontract,riennechange,maistoutest dif conditions nécessaires etpréalablementdéterminées. cuter automatiquement lorsque sont remplies certaines « contratsintelligents»ontpourparticularitédes’exé risé –d’exécutiond’uncontrat. nagement erreurs deprogrammation ? posent aussidenombreuses questions,parmilesquelles: Si, commetouteslestechniques,smartcontractsprésententdenombreux avantages,ils questres… très nombreux secteursd’activité:lafinance,musique,lesintermédiaires ouencore lessé Les tique, doncplusfacile,rapideetsûre. Les À vraidire, lessmartcontractsnesontmêmepasdescontrats… contrat quis’opposeraitàdescontratsidiots… Les smart contract(littéralement smart contracts smart contracts(traduisez:«contratsintelligents»)nesontpasunenouvelleformede smart contractssontbaséssurlatechnologiede

»

», estaussiimportante

: c’estunmode–automatiséetsécu smart contractsnousproposent d’al mais «

et« idiot sont unemanière decoderuncontratetrendre sonapplicationautoma

», codant

?

agreement Service-level : « , sinondavantage,que

bien de rendre plus contrat intelligent » lescontrats,

contract ma-

in

» ------)

sans douteréflexion. rément biendumonde,maisleurmiseenœuvre nécessite présentent égalementdesfaiblesses.Ilsintéressent assu des avantages,commetouteslesgrandesinnovations,ils Pour autant,silessmartcontractsapportentassurément rado desjuristestechnologuesquenoussommes. risquer de donc desevoirreprocher ofcontract(voire unbreach de a plus de risque de ne pas respecter un engagement, et Les de contentieux. par conséquent,àunediminutiondesrisquesultérieurs risque d’erreur (humaine)dansl’exécutiondescontratset, qu’elle conduitmécaniquementàunamoindrissementdu L’automatisation estunedeleursprincipales forces, ence pour lesjuristes. Les Les avantagesdessmartcontracts Les parties (grâceàleurauto-exécution). termes ducontrat,quinenécessiteplusl’interventiondes Cependant, toutestdifférent enmatière d’exécutiondes de larencontre d’uneoffre etdesonacceptation. contrat lui-même,appréhendéentantqueformalisation quelque chose.Riennechangenonpluss’agissantdu parties doivent,danstouslescas,semettre d’accord sur En effet, riennechange ducôtédelanégociation smart contractsprésententdesavantagesindéniables smart contractsapparaissentcommelenouveleldo smart contractss’exécutantautomatiquement, iln’y « quid delasécurité?Qu’enest-ildes

passer àcôté blockchain ».Celle-ciintéresse de RÉALITÉS INDUSTRIELLES - AOÛT 2017

» d’undroit).

: les 77 - - - -

Éric BARBRY La blockchain n’oublie rien : cette fonction d’exécution de dollars. Mais la ficelle était un peu trop grosse et les automatique permet de mieux gérer les prescriptions contremesures adoptées (en matière de temps de latence, contractuelles ou légales. notamment) ont permis d’éviter le pire. Mais qu’en sera-t- il quand les smart contracts seront devenus la norme… ? Les smart contracts sont aussi un moyen de « faciliter » l’exécution des contrats. Ces derniers étant par essence Le codage lui-même est un autre point d’attention car, numériques, ils peuvent lancer des ordres ou formuler dans tous les cas, il faudra bien recourir à l’humain pour des requêtes tout seuls (comme vérifier la publication de coder le contrat et en paramétrer l’ensemble. Or, cette comptes, demander la production de documents, etc.). phase « humaine » est par nature faillible. Le contentieux La blockchain peut en effet agir en interaction avec l’en- risque donc de se déporter de l’exécution du contrat lui- semble de l’écosystème numérique. même vers la manière dont celui-ci aura été codé et para- métré. Aujourd’hui, en cas de contentieux, les juges lisent On n’arrête pas une blockchain ! De fait, les smart le contrat : demain, devront-ils lire des lignes de code ? contracts permettent de lutter contre les révocations in- justifiées. Cette même caractéristique permet de traiter Pour les juges, la question de la gestion de la preuve et, des contrats à multiples acteurs et/ou soumis à de mul- d’une manière plus générale, celle de la responsabilité tiples conditions. La blockchain en rend la résiliation tout seront à n’en pas douter deux grandes difficultés à ré- aussi impossible, sauf à entrer strictement dans des caté- soudre : gories prédéterminées et codifiées. l du côté de la preuve, que vaudra une preuve issue de la Reposant sur la cryptographie, la blockchain permet de blockchain devant un tribunal ? Les juristes rencontrent garantir l’intégrité des termes d’une transaction. Or, il est déjà les pires difficultés quand il s’agit de produire des primordial, pour les juristes, de pouvoir démontrer avec logs ou des données de connexion : qu’en sera-t-il avec certitude l’existence même d’un accord et des engage- la blockchain ?

ments des parties. l du côté de la responsabilité, l’absence de responsable, de gouvernance et donc de « porteur juridique » qui ca- La qualité de « registre » de la blockchain permet égale- ractérise la blockchain constitue également une source LES SMART CONTRACTS ET LES ORACLES LES SMART ment à celle-ci d’assurer la traçabilité des actions réali- de difficultés. sées, ainsi que les dates auxquelles elles l’ont été. Il n’y a donc plus de discussion sur le fait de savoir si un engage- Sur la blockchain, tout test est… public. Ceux qui vou- ment a été tenu ou non. draient garder les termes de leur contrat confidentiels devront donc trouver des modèles « privatifs » de smart La blockchain assure également une fonction d’archivage contracts. Sur la blockchain, oubliez le droit à l’oubli, et d’une durée quasi indéfinie. Il est courant de perdre un donc la capacité d’effacer les mauvais deals. contrat ou des documents d’exécution : tel n’est pas le cas sur la blockchain, grâce à laquelle on ne perd jamais rien. Le caractère automatique et intègre qui fait la force de la Au contraire, on y retrouve tout, et tout le monde y a accès. blockchain peut également se révéler une faiblesse, no- tamment quand il s’agit de rompre un contrat de manière À ce propos, la blockchain publique assure de manière na- anticipée, ou d’en modifier les termes. La notion d’avenant turelle une « publicité » aux contrats et aux engagements n’est pas des plus compatibles avec les smart contracts. pris. De fait, elle peut permettre de répondre, là encore par essence, aux obligations de publicité ou de publication de Les smart contracts, cas d’usage certains actes juridiques. Le concept même de smart contract ne date pas d’hier. Au-delà de leurs impacts juridiques, les smart contracts Il a été « inventé » par Nick Szabo qui, dès la fin des an- sont de véritables business makers, car le fait de faciliter nées 1990, donnait comme exemple le contrat de loca- l’exécution d’un contrat facilite assurément la vie des af- tion, facile à codifier et prévoyant une restitution immé- faires. On peut passer plus de temps en avant-vente et diate de la propriété d’un véhicule en cas d’impayé. moins en contract management. Il existe bien quelques solutions « opérationnelles (3) », Les faiblesses des smart contracts mais elles restent encore confidentielles et pourraient da- vantage être considérées comme des démonstrations de Reposant sur la blockchain, les smart contracts em- faisabilité (Proofs of Concept – PoCs). barquent donc avec celle-ci l’ensemble de ses limites et de ses contraintes (1). S’il est vrai que tout le monde en parle, peu peuvent se prévaloir d’avoir été confrontés « pour de vrai » aux smart Une première critique régulièrement formulée à l’encontre contracts. Il est cependant avéré que la blockchain inté- des smart contracts est leur propension à augmenter les resse bon nombre de secteurs. risques de fraude. À cet égard, nombreux sont les spécia- listes qui estiment que la blockchain est un environnement ultrasécurisé qui nécessite, pour être forcé, une puissance (1) « Blockchain, un nouveau champ d’études pour les juristes », de calcul tellement considérable qu’il est quasi impossible Revue Télécom, n°183, décembre 2016. de la mettre en œuvre. (2) http://www.20minutes.fr/high-tech/1868399-20160618-pirates- derobent-50-millions-dollars-monnaie-virtuelle Ce serait toutefois oublier l’attaque perpétrée en 2016 (3) www.codius.org ou www.ethereum-france.com ou encore www. contre The DAO (2) pour un montant estimé à 50 millions slock.it

78 RÉALITÉS INDUSTRIELLES - AOÛT 2017 Sont en premier lieu concernés les secteurs (tels que la tomer (B2C) seront plus compliqués à mettre en œuvre banque ou les établissements financiers) dans lesquels il sous cette forme, nombre de leurs clauses étant existe de nombreux contrats parfaitement automatisables, « sensibles » et nativement discutables. dont les caractéristiques sont parfaitement maîtrisées. Le Plus complexes également à passer en smart contracts chiffre de 40 milliards de dollars a été avancé comme esti- seront les contrats dans lesquels la part d’inconnu ou mation du coût du suivi des milliards de transactions ban- d’imprévu est forte. caires (4) effectuées annuellement dans le monde entier. Enfin, il est évident que les contrats qui doivent rester Les smart contracts intéressent également l’ensemble Éric BARBRY confidentiels échapperont à la blockchain publique. des secteurs ou des acteurs dont l’activité repose sur la mise en place d’un « registre » et induisent une fonc- Le déploiement des smart contracts tion de « notarisation ». Ainsi, à l’instar des autres tiers de confiance, les notaires s’intéressent de près à l’impact Personne ne peut à ce stade prédire si les smart contracts des smart contracts sur leurs activités. auront ou non l’avenir radieux qu’on leur prédit, mais plu- sieurs questions se posent dès à présent. De la même manière, les smart contracts pourraient « dis- rupter » les fonctions de séquestre, notamment financiers, La première question est celle des problèmes juridiques par le fait que cette fonction pourrait devenir totalement faisant obstacle au passage aux smart contracts. Au- codifiée. jourd’hui, de nombreux acteurs se lancent dans l’aventure sans même avoir vérifié si le cadre légal, ér glementaire ou La blockchain intéresse également les acteurs dont le cœur même jurisprudentiel rendait possible l’usage des smart de métier (core business) repose sur la répartition de rede- contracts. vances financières… À ce titre, elle intéresse assurément la filière musicale, avec l’application du principe selon lequel La deuxième question porte sur la réalisation de PoC sans « si j’écoute tel morceau, alors je paye tel artiste », et sa la moindre précaution juridique. Or, les smart contracts faculté d’alléger considérablement les frais de gestion (5). génèrent un certain nombre de problématiques juridiques, à commencer par celles du droit des données à caractère Les smart contracts pourraient également « disrupter personnel ou de la responsabilité des acteurs impliqués. Il les disrupteurs ». Un des principaux avantages qu’ils est indispensable de mettre en œuvre ces PoC dans des présentent est leur capacité à faire office de « tiers de conditions juridiques maîtrisées (contrat PoC, convention confiance ». De fait, ils pourraient fort bien sonner le glas d’expérimentation, expérimentation CNIL si besoin, etc.). des plateformes de mise en relation et d’intermédiation qui ont fleuri sur le Net ces cinq dernières années. La troisième question porte sur l’opposabilité des smart contracts aux juges (notamment de leurs éléments issus Les investissements nécessaires aux études relatives aux de la blockchain). Ici, le droit est déjà prêt, en France tout smart contracts conduisent naturellement la réflexion vers du moins, grâce au droit des « conventions de preuve » (6), les relations de type business-to-business (B2B). Toute- qui permettent de définir entre parties contractantes les fois, les représentants des consommateurs se sont eux règles d’opposabilité en termes de preuve. Cependant, aussi intéressés aux atouts que peuvent représenter les ces conventions de preuve devront assurément être smart contracts pour les consommateurs. conclues avant les smart contracts et ne pourront, quant Ils ont en effet constaté que bon nombre de contrats à elles, être codifiées. conféraient des droits aux consommateurs – des droits À terme se posera également la question de l’opportu- que ceux-ci « oubliaient » de réclamer ou d’exercer. On nité de légiférer ou non en matière de smart contracts. À peut penser, par exemple, au droit à une indemnité en cas l’instar de la blockchain ou des bitcoins, cette question ne de retard de livraison ou de difficulté de transport (retard manquera pas de se poser. de train ou d'avion). En France, le législateur est déjà intervenu sur le sujet de En pratique, les potentiels des smart contracts sont in- la blockchain, en termes de mini-bons. nombrables. Prenons l’exemple des paris, secteur dans lequel ils permettraient l’adoption d’une procédure ul- L’introduction de toutes les nouvelles technologies (radio, tra-simplifiée : je parie, je gagne, l’autre paye automati- télé, télécom, Internet, robot…) ayant été accompagnée quement, on le livre, je paye… Rien de plus naturel… d’évolutions juridiques majeures, on peut facilement ima- giner que le législateur se saisira de la question et qu’il Les smart contracts apparaissent donc comme un moyen modifiera le Code civil en matière de droit des contrats, privilégié de gérer des contrats conclus en nombre : ils per- comme il l’avait déjà fait en 2000 pour consacrer l’écrit mettent d’assujettir les parties à des obligations claires. Ils sous forme électronique et en 2004 pour créer une nou- sont également à privilégier pour les contrats en cascade ou pour les contrats à engagements multiples, dès lors qu’il est possible, grâce à ces contrats intelligents, d’en modéliser la mise en œuvre. (4) Voir l’article de Daniel Tourre, www.latribune.fr/opinions/tribunes/ blockchain-smart-contract-ou-la-promesse-encore-floue-d-une-re- Toutefois, tous les contrats ne sont pas nécessairement volution-de-la-finance-681096.html « smartisables ». (5) www.alain-bensoussan.com/avocats/technologie-blockchain- avenir-musique/2016/09/23/ On peut penser que les contrats de type business-to-cus- (6) Articles 1353 et 1368 du Code civil.

RÉALITÉS INDUSTRIELLES - AOÛT 2017 79 velle catégorie de contrats, en l’occurrence les « contrats Ce monde est certes d’ores et déjà bousculé par le nou- sous forme électronique ». veau secteur des LegalTech, mais les prises de conscience et les capacités d’évolution sont un peu lentes chez nos Gageons que, dans ce cas, les dispositions nouvelles amis les juristes… « porteront » les smart contracts au lieu de les brider. Nombreux sont les secteurs économiques qui se sont lan- Épilogue… cés dans une réflexion détaillée sur l’impact potentiel des smart contracts sur leur profession. Et si les smart contracts étaient les pires ennemis des ju- ristes ? Aussi les juristes, qui sont au cœur même du droit des contrats, seraient-ils bien inspirés d’en faire de même… En effet, ils risquent surtout de… « disrupter » les juristes ! Singulièrement ceux du monde du contract management. LES SMART CONTRACTS ET LES ORACLES LES SMART

80 RÉALITÉS INDUSTRIELLES - AOÛT 2017 au seindecemêmeréseauet ajoutéàlablockchain. réseau P2Petintégréeàun bloc, puisceblocestvalidé Dans cesystème,chaque transaction est publiée sur le 106 Coinmarketcap sur Omni)(voirlaFigure SNGLS basé sur Ethereum) ou MaidSafeCoin (maid, basé comme SingularDTV(asset pendant d’unsystèmeexterne) (s’apparentant àdescrypto-monnaieslocales,maisdé Ethereum (ether),puiscomplétépardesservicesd’ Namecoin (crypto-monnaienamecoin),Omni(omnicoin)ou réseau bitcoin.Ilaétésuivipard’autres systèmescomme création dupremier blocdela Le systèmebitcoinaétélancéle3 tries culturelles article blocs La technologie Les caractéristiquesdelablockchain normalisation delablockchainchezMusicwon’t stop Consultant entechnologiesetstratégiesnumériquesdanslessecteursdelaculture etdéléguéàla Par JérômePONS les industriesculturelles et dessmartcontractspar La miseenœuvre delablockchain de transactionélectronique bitcoin(ouréseaubitcoin) troduit à la fois la crypto-monnaie bitcoin et le réseau P2P système detransactionélectronique pair- kamoto àtraverssadescriptiondusystèmebitcoin.Ce culturelles-9579)) aétéimaginée en2008parSatoshiNa article/la-blockchain-une-revolution-pour-les-industries- blockchain réponddansunecertainemesure àcettequestion. ayants droit reflétant laconsommationautéléchargement ouàl’écouteprès?Latechnologie tributeurs, diffuseurs etconsommateurs decontenusnumériquesetàunerémunérationdes conduiraient àunpartage«équitable»delavaleurentre créateurs,producteurs, éditeurs,dis est-il utopiqued’imagineruneprogrammation etuneexécutionautomatiquesdescontrats,qui liser larémunérationdesayantsdroit (lesartistes-interprètes,parexemple).Danscecontexte, valeur verslesproducteurs etleséditeurs,l’absencedemétadonnéesjuridiquespeutpéna distribution. Car, eneffet, lesminimagarantispeuventconduire àuntransfert«excessif»dela toujours applicablesouexécutés,qu’ils’agissedescontratsd’auteur, d’édition,delicenceou teurs ducinéma,delavidéoetmusiqueenregistrée. Cependant,lescontratsnesontpas La contractualisationestomniprésentedanslesindustriesculturelles, notammentdanslessec

assets

», quenousavonsprésentéedansunprécédent :

«

La encirculation au10 blockchain, unerévolutionpourlesindus- dénombrait727

? blockchain (littéralement,

» (http://www.inaglobal.fr/numerique/

1 delapagesuivante). bitcoin, au sein du blockchain bitcoin,auseindu

mai

2017. janvier crypto-monnaies et à-pair (P2P)in-

« 2009, date de 2009, datede

chaîne de assets (1,2) . - -

tion française). nale) ethttp://bitcoin.fr/bitcoin-explique-par-son-inventeur/ (traduc tem”, 30octobre2008,www.bitcoin.org/bitcoin.pdf (version origi (2) NAKAMOTOS.,“Bitcoin:APeer-to-Peer ElectronicCashSys relles-9579 rique/article/la-blockchain-une-revolution-pour-les-industries-cultu culturelles ?»,INAGlobal,13mars2017,www.inaglobal.fr/nume (1) PONSJ.,«La Une transaction N se caractérise par une empreinte (pré d’application dela d’informations libres quiautorisedenouveauxdomaines La troisième lignedesscripts desortieprésenteunchamp œuvre graphique(voirlaFigure Monegraph etintégrantlesmartcontractliéaudépôtd’une permet devisualiserunetransactioninitiéeparleservice L’explorateur deblocsBlockchain.infodusystèmebitcoin de blocetpardesscriptsd’entréesortie. taire B(N)(préfixe0xsuivi de40 des frais,adresses d’expéditeur A(N)etdedestina fixe 0xsuivide60 vidéo etdelamusique. fondir cesapplicationsdanslessecteursducinéma,dela tronique. Nousvousproposons, danscetarticle,d’appro gestion dedroits, lacontractualisationetlepaiementélec la désintermédiationdansdistributiondescontenus, relles, notammentlacollaborationcréativeetproductive, RÉALITÉS INDUSTRIELLES - AOÛT 2017 Blockchain, unerévolutionpourlesindustries

caractères), unhorodatage, unmontant, blockchain danslesindustriescultu

2 delapagesuivante).

caractères), unnuméro

81 ------

Jérôme PONS Figure 1 : Exemples de crypto-monnaies et d’assets associés à la technologie blockchain. © Jérôme PONS LES SMART CONTRACTS ET LES ORACLES LES SMART

Figure 2 : Visualisation d’une transaction initiée par le service Monegraph. © Jérôme PONS

82 RÉALITÉS INDUSTRIELLES - AOÛT 2017 Les secteurs du cinéma, de la vidéo et budgets de production de l’ordre de 1 à 10 millions d’euros, de la musique avec un devis moyen des films d’initiative française s’éle- vant à 5,47 millions d’euros en 2016, d’après le bilan annuel Avec la généralisation de la distribution d’œuvres sur du Centre national du cinéma et de l’image animée (CNC) (6). Internet, les secteurs de la culture exploitent la même chaîne de transmission convergente des contenus numé- De plus, les métadonnées sont consolidées (harmonisées, riques, qui comporte les mêmes étapes de création, de complétées, fiabilisées), en particulier les métadonnées ju- production, d’édition, de distribution, de diffusion et de ridiques utilisées pour la gestion de droits (droit d’auteur) et les métadonnées de contenu utilisées en postproduc- consommation (3). Jérôme PONS tion (montage) ou en amont de la distribution (affiche du Les principales caractéristiques des secteurs du film, copie Digital Cinema Package - DCP, DVD). Celles-ci cinéma et de la vidéo sont renseignées par le scripte, collaborateur artistique et Dans les secteurs du cinéma et de la vidéo, la chronolo- technique du réalisateur, à travers différents rapports (rap- gie des médias séquence l’exploitation du film en salle, sa port montage, rapport production) (7). distribution physique et numérique (de 4 à 48 mois après Enfin, en amont de la publication coexistent des bases de sa sortie en salle) et sa diffusion à la télévision (de 10 à données centralisées accessibles. Par exemple, le registre 30 mois après sa sortie en salle (4)). du cinéma et de l’audiovisuel (RCA) du CNC enregistre Les processus métiers sont organisés en workflow, grâce les contrats associés à la production cinématographique notamment à la norme internationale de cinéma numé- rique DCI (Digital Cinema Initiative). Les différentes étapes (3) PONS J., Distribution, partage et stockage des contenus nu- de la chaîne de transmission étant chaînées, le passage mériques, Éditions techniques de l’Ingénieur, TI 7536, 10 août 2014, www.techniques-ingenieur.fr/base-documentaire/technolo- de relai des données multimédia et des métadonnées gies-de-l-information-th9/diffusion-distribution-des-images-et-du- d’une étape à la suivante est garanti (5). son-42507210/distribution-partage-et-stockage-des-contenus-nu- meriques-te7536/ Par ailleurs, la contractualisation est rigoureuse, grâce (4) Chronologie des médias, CSA, www.csa.fr/Television/Le-suivi- notamment au contrat d’auteur (artiste auteur, comme le des-programmes/La-diffusion-des-oeuvres/Les-obligations-de-dif- réalisateur, le scénariste, le dialoguiste, auteur d’œuvre fusion-d-oeuvres-cinematographiques/Chronologie-des-medias (5) PONS J., Technologies des contenus numériques : de la pro- littéraire), de coproduction, d’artiste-interprète (comé- duction à la protection, Éditions techniques de l’Ingénieur, TI 7537, dien), d’engagement (technicien comme le chef opérateur 10 août 2015, www.techniques-ingenieur.fr/base-documentaire/ ou le monteur, collaborateur comme le scripte, l’ouvrier), technologies-de-l-information-th9/diffusion-distribution-des- de distribution (exploitation) et de diffusion (télévision) ou images-et-du-son-42507210/technologies-des-contenus-nume- riques-de-la-production-a-la-protection-te7537/ bien le mandat de distribution (VàD – vidéo à la demande, (6) Bilan 2016 du CNC, CNC, 11 mai 2017, www.cnc.fr/web/fr/bi- VàDA – vidéo à la demande par abonnement) et de télévi- lans/-/ressources/11870403 sion (voir la Figure 3 ci-dessous). (7) PANNETIER A., « Le métier de scripte », Commission paritaire nationale Emploi Formation – Audiovisuel (CPNEF-AV), décembre Il en ressort une certaine transparence des flux financiers 2010, www.cpnef-av.fr/metiers-realisation/infos/scripte-etude-com- liés à des projets de films très subventionnés et à des plete.pdf

Figure 3 : Exemples de contrats dans les secteurs du cinéma et de la vidéo. © Jérôme PONS

RÉALITÉS INDUSTRIELLES - AOÛT 2017 83 Figure 4 : Exemples de contrats dans le secteur de la musique enregistrée. © Jérôme PONS

(par exemple, les contrats d’auteur ou de coproduction) L’opacité de certains flux financiers liée à des projets d’al- et délivre un code d’identification propriétaire (numéro bums peu subventionnés et à des budgets de produc- LES SMART CONTRACTS ET LES ORACLES LES SMART d’immatriculation CNC). La base des visas du CNC enre- tion moins élevés que pour les films (de l’ordre de 10 à gistre les distributeurs et délivre un numéro de visa. Enfin, 100 milliers d’euros) a été en partie levée dans le cadre de la base ISAN (International Standard Audiovisual Num- la procédure d’introduction en bourse de Deezer. Nous y ber) délivre un code d’identification normalisé de l’œuvre avons appris notamment que de 80 à 85 % des royalties audiovisuelle (code ISAN). et des minima garantis sont versés aux producteurs-édi- teurs phonographiques, tandis que de 10 à 15 % des De même, en aval de la publication se côtoient des bases royalties le sont aux sociétés de gestion collective du droit de données centralisées accessibles. En particulier, la d’auteur (8). base IMDb d’Amazon donne accès aux noms des artistes auteurs, comédiens (casting) et techniciens présents lors Les métadonnées apparaissent non consolidées, c’est du tournage, au genre du film (comédie, drame…), aux en particulier le cas des métadonnées juridiques utilisées dénominations sociales du distributeur et des coproduc- pour la gestion de droits (droit d’auteur, droits voisins), les- teurs, au budget estimé du film (Box Office), ainsi qu’aux quelles gagneraient à être systématiquement renseignées spécifications techniques du film (par exemple, le modèle par l’ingénieur du son en marge des sessions d’enregis- de caméra utilisé). trement (noms des auteurs, des compositeurs et inter- prètes et partage des recettes). Il en va de même pour les Les principales caractéristiques du secteur de la métadonnées de contenu assemblées à l’étape d’édition musique (pochette et livret du disque, fichier MP3 via le tag ID3) (9). Dans le secteur de la musique, la simultanéité accom- pagne chaque publication d’album en termes de distribu- Pour limiter ce problème, en amont de la publication, tion physique et numérique, de diffusion à la radio ou à la se côtoient des bases de données centralisées proprié- taires (non accessibles). Par exemple, les bases SCPP télévision et de concerts dans le cadre de tournées. (Société civile des producteurs phonographiques), SPPF Cette publication s’appuie notamment sur la norme inter- (Société civile des producteurs de phonogrammes en nationale d’échange de données DDEX, qui présuppose France), Sacem, Adami (Société civile pour l’administra- que tous les producteurs et éditeurs phonographiques tion des droits des artistes et musiciens interprètes) ou renseignent les métadonnées juridiques et de contenu Spedidam (Société de perception et de distribution des avant l’étape de la distribution. De même, la contractualisation est rigoureuse, avec no- (8) PONS J. (auteur principal), « La Révolution numérique, une ré- tamment les contrats de cession et d’édition d’œuvre volution musicale ! », AFDEL (renommée depuis TECH IN France)/ musicale (auteur, compositeur), de commande (de Forum de Tokyo, 24 novembre 2015, www.forum-tokyo.fr/s/LB_ musique originale), d’artiste (artiste-interprète), d’engage- CULTURE_AFDEL_2015_SITE.pdf ment (technicien, ingénieur du son), de licence, de distri- (9) PONS J., Les Métadonnées : un enjeu majeur pour le secteur de la musique, INA Global, 21 avril 2015, www.inaglobal.fr/musique/ bution ou de synchronisation (de musique préexistante) article/les-metadonnees-un-enjeu-majeur-pour-le-secteur-de-la- (voir la Figure 4 ci-dessus). musique-8226

84 RÉALITÉS INDUSTRIELLES - AOÛT 2017 droits des artistes-interprètes) permettent à leurs adhé- Les principaux contrats du secteur de la musique rents de déposer une œuvre musicale ou une musique De même, le rapport « Zelnik » présente les contrats enregistrée. Les bases IPI de la CISAC (Confédération d’artiste, de licence et de distribution, tandis que les en- internationale des sociétés d’auteurs et compositeurs) gagements « Hoog » portent sur la publication des condi- et IPD de l’IPDA/SCAPR délivrent respectivement des tions générales de vente (CGV), la pérennité et la stabilité codes d’identification normalisés d’ayants droit (code IPI) des contrats, la justification des avances, la transparence et d’artistes-interprètes (code IPN). D’autres bases sont des minima garantis, le délai de versement des rému- accessibles, comme les bases ISWC de la CISAC et ISRC nérations ou les rémunérations versées au bénéfice des de l’IFPI, qui donnent respectivement accès aux codes artistes-interprètes. En outre, le rapport « Selles » étend Jérôme PONS d’identification normalisés d’œuvres musicales (code l’analyse des contrats précédents aux contrats de ces- ISWC) et de musiques enregistrées (code ISRC). sion et d’édition d’œuvres musicales, de synchronisation et d’engagement, et il propose l’adoption du contrat d’as- En aval de la publication coexistent des bases de don- sociation à la production dans le secteur de la musique, nées centralisées propriétaires. En particulier, la base ainsi que la mise en place d’un contrat d’objectifs et de BIPP (Base de données interprofessionnelle des pro- moyens. Le rapport « Phéline » se consacre au partage de ducteurs phonographiques) du SNEP/UPFI/Kantar Me- la valeur et présente les contrats d’artiste et de licence. dia donne accès aux catalogues des producteurs pho- Enfin, le protocole d’accord « Schwartz » promeut de nographiques actifs sur le marché français, tandis que bonnes pratiques contractuelles par un code des usages la base BOEM (Base d’œuvres de l’édition musicale) de et garantit aux artistes une juste rémunération (16,17,18,19,20). la CSDEM/SEAM (Chambre syndicale de l’édition musi- cale/Société des éditeurs et auteurs de musique) (Paroles (10) « Rapport Chevalier », CHEVALIER P., « Les SOFICA », rapport remis CSDEM) fournit les paroles de chansons. D’autres bases au CNC, juillet 2008, www.cnc.fr/web/fr/rapports/-/ressources/21531 sont accessibles, mais elles ne sont pas toujours conso- (11) « Rapport Bonnell », BONNELL R., « Le droit des auteurs dans lidées, comme le répertoire Sacem, qui associe le code le domaine cinématographique : coûts, recettes et transparence », ISWC aux codes IPI (mais pas aux codes ISRC) ou bien la rapport remis au CNC, décembre 2008, http://www.cnc.fr/web/fr/ rapports/-/ressources/21505 base MusicBrainz, qui relie l’artiste, l’album ou le morceau (12) Protocole d’accord « Transparence dans la filière cinématogra- de musique aux bases externes (par exemple, Discogs, phique », APC/API/ARP/La Guilde (des scénaristes français)/SACD/ IMDb, Wikidata), à des codes d’identification internes SCAM/SFAAL/SPI/SCELF/SRF/UPF, 16 décembre 2010, http:// (MBID de MusicBrainz) ou externes (par exemple, code- guildedesscenaristes.org/uploads/ressbao/accords/protocole_ac- cord_transparence_filiere.pdf barres, IPI, ISNI, ASIN d’Amazon, identifiant Discogs), aux (13) « Rapport Gomez », GOMEZ M., « Mission sur la transparence plateformes de distribution (comme iTunes, Spotify) et aux de la filière cinématographique – La relation entre le producteur et empreintes numériques de chaque morceau (AcoustID). ses mandataires », rapport remis au CNC, septembre 2011, http:// www.cnc.fr/web/fr/rapports/-/ressources/622607 Voyons ci-après quels sont les principaux contrats établis (14) « Rapport Lescure », LESCURE M., « Mission Acte II de l’ex- dans ces différents secteurs, et étudions-en le contenu et ception culturelle – Contribution aux politiques culturelles à l’ère nu- mérique », rapport remis au ministère de la Culture et de la Commu- la modélisation. nication, mai 2013, www.culturecommunication.gouv.fr/var/culture/ storage/culture_mag/rapport_lescure/files/docs/all.pdf (tomes I et II). Les principaux contrats attachés (15) Soutien à la production cinématographique et audiovisuelle : à ces différents secteurs des changements nécessaires, rapport de la Cour des Comptes, avril 2014, www.ladocumentationfrancaise.fr/var/storage/rapports- Le financement de la culture, la transparence des flux- fi publics/144000197.pdf nanciers et le partage de la valeur sont régulièrement ana- (16) « Rapport Zelnik », ZELNIK P., TOUBON J. & CERUTTI G., « Création et Internet », rapport remis au ministère de la Culture et de lysés au travers des contrats, et font l’objet de rapports et la Communication, janvier 2010, www.ladocumentationfrancaise.fr/ de protocoles d’accord. var/storage/rapports-publics/104000006.pdf (17) « Engagements Hoog », HOOG E., « 13 engagements pour la Les principaux contrats des secteurs du cinéma et musique en ligne », rapport remis au ministère de la Culture et de de la vidéo la Communication, 17 janvier 2011, Adami/Apple (iTunes)/Beezik/ Deezer/ESML/GESTE/MMFF/Orange/Sacem/SCPP/SFA/SNAM/ En particulier, le rapport « Chevalier » présente les enjeux SNEP/Spedidam/SPPF/Starzik/UPFI/VirginMega, www.culturecom- du contrat d’association à la production (via les SOFICA), munication.gouv.fr/content/download/2292/15440/version/1/file/ le rapport « Bonnell » se focalise sur le contrat d’auteur, signature%20accord%20musique%20en%20ligne.pdf tandis que le protocole d’accord « Transparence dans la (18) « Rapport Selles », RIESTER F., SELLES D., CHAMFORT A., COLLING D. et THONON M., « Création musicale et diversité à l’ère filière cinématographique » porte sur les contrats d’au- numérique », rapport remis au ministère de la Culture et de la Com- teur et d’édition vidéographique. Par ailleurs, le rapport munication, septembre 2011, www.ladocumentationfrancaise.fr/ « Gomez » analyse les contrats d’édition vidéographique, var/storage/rapports-publics/114000585.pdf de distribution et d’exportation, et le rapport « Lescure » (19) « Rapport Phéline », PHÉLINE Ch., « Musique en ligne et par- tage de la valeur – État des lieux, voies de négociation et rôles de étudie les politiques culturelles de l’ensemble des sec- la loi », rapport remis au ministère de la Culture et de la Communi- teurs de la culture (dont le cinéma, la vidéo et la musique cation, novembre 2013, www.culturecommunication.gouv.fr/Docu- enregistrée). Enfin, le rapport de la Cour des Comptes mentation/Rapports/Musique-en-ligne-et-partage-de-la-valeur détaille les contrats d’association à la production, de pré- (20) « Protocole d’accord Schwartz », SCHWARTZ M., « Pour un déve- loppement équitable de la musique en ligne », 2 octobre 2015, CFDT- achat ou d’achat, de distribution, d’artiste-interprète, ain- F3C/ESML/FELIN/GAM/IDOL/MMFF/PRODISS/Qobuz/Sacem/SCPP/ si que le mandat de distribution, et propose un « contrat SFA/SMA/SNACOPVA CFE-CGC/SNAM-CGT/SNAPS-CFE-CGC/ d’objectifs et de moyens (10,11,12,13,14,15) ». SNEP/SPPF/UPFI, www.culturecommunication.gouv.fr/Presse/Com- muniques-de-presse/Accord-historique-pour-la-filiere-de-la-musique

RÉALITÉS INDUSTRIELLES - AOÛT 2017 85 LES SMART CONTRACTS ET LES ORACLES LES SMART

Figure 5 : Modélisation du contrat traditionnel. © Jérôme PONS

86 RÉALITÉS INDUSTRIELLES - AOÛT 2017 La modélisation du contrat traditionnel ditionnel (concernant, par exemple, la rémunération) Après analyse, la modélisation du contrat traditionnel nous dans le langage de programmation (langage de script) conduit aux éléments constitutifs suivants (inspirés du rap- du système blockchain. La seconde étape enregistre le port Gomez) : en-tête, clauses contractuelles récurrentes, programme informatique associé au smart contract dans conditions financières, conditions générales, en-queue et une blockchain. La troisième étape exécute le programme annexes contractuelles (voir la Figure 5 ci-contre). informatique, qu’il s’agisse d’une exécution immédiate de la transaction (comme le paiement électronique) ou d’une Remarquons que dans le contrat d’artiste, le producteur exécution déclenchée plus tard par un événement interne

phonographique ne s’engage à obtenir que les métadon- Jérôme PONS au smart contract (notamment par la fixation d’une date nées juridiques concernant sa rémunération (par exemple, d’exécution) ou externe (exécution générée par un oracle, le code ISRC), mais pas celles qui sont nécessaires à la tel que défini par le mathématicien et cryptologue anglais rémunération des auteurs ou de l’éditeur de musique Alan Turing) (23). (comme le code ISWC). Voyons maintenant comment transposer un contrat tradi- La mise en œuvre du smart contract dans le sys- tionnel dans un smart contract. tème Bitcoin Le langage de script du système Bitcoin, nommé Script, La mise en œuvre du smart contract est qualifié d’incomplet au sens de Turing, puisqu’il ne par les industries culturelles permet pas la création de boucles à l’aide de fonctions récursives. Dans un précédent article, nous avions vu à travers la collaboration créative et productive qu’une organisation Ce langage est présenté en piles (stacks) dont chacune des autonome décentralisée (DAO) était en mesure d’accom- lignes comporte une chaîne de caractères ou d’éléments pagner les créateurs et les producteurs dans leurs pro- binaires. Les instructions sont traitées séquentiellement cessus de création et de production. Pour cela, un smart jusqu’à la fin du script, sans saut en arrière (absence de contract (littéralement : « contrat intelligent ») peut être mis boucle). Elles reposent sur plus d’une centaine d’opéra- (24) en œuvre pour encadrer la description d’une tâche « artis- teurs de scripts (voir la Figure 6 de la page suivante). tique » (par exemple, écrire une scène d'un scénario ou Une transaction est associée soit à un service de paie- un couplet d’une chanson, jouer une scène ou un mor- ment électronique, qui utilise des opérateurs de scripts ceau) ou « technique » (par exemple, filmer une scène ou basiques et qui a pour principal objet l’échange de enregistrer un morceau, saisir les métadonnées) ou bien bitcoins entre un émetteur A et un destinataire B, soit à un le montant de la rémunération et les droits acquis sur le service « basé sur les scripts », qui utilise des opérateurs résultat de la tâche. de scripts basiques et évolués et qui n’a pas pour seule finalité d’échanger des bitcoins. En particulier, l’opérateur Les principes du smart contract de script évolué OP_RETURN signale un champ d’infor- L’expression smart contract a été définie en 1994 par l’in- mations libres contenant les données du smart contract. formaticien et cryptographe américain Nick Szabo : « un smart contract est un protocole de transaction informatique La mise en œuvre du smart contract dans le sys- qui exécute les termes d’un contrat. La conception d’un tel tème Ethereum contrat a pour principaux objectifs de satisfaire les condi- Le langage de script du système Ethereum, nommé lan- tions contractuelles courantes, de minimiser les exceptions gage EVM, est qualifié de complet au sens de Turing (Tu- tant malveillantes qu’accidentelles ou le besoin d’inter- ring-complete), puisqu’il autorise les sauts et la création médiaires de confiance. Les buts économiques associés de boucles. Pour éviter qu’une transaction bouclant à incluent la réduction des coûts de fraude, d’arbitrage, de l’infini ne bloque le système, l’exécution de la transaction mise en application, et autres coûts de transaction (21) ». est limitée par la notion de « carburant » (gas). Ainsi, lors Dans le contexte de la blockchain, les smart contracts de la saisie d’un ordre de transaction, le « carburant » est constituent juridiquement des « programmes autonomes, payé à l’avance afin de couvrir le coût d’exécution de la codés sur la blockchain, qui exécutent automatiquement transaction. Une transaction se trouvant « à court de car- tout ou partie d’un contrat sans intervention humaine. Dès lors qu’une des conditions préprogrammées du smart contract se réalise, la clause contractuelle lui correspon- (21) SZABO N., Smart contracts, Best.com, 1994, http://web.ar- dant est automatiquement exécutée » (22). chive.org/web/20160323035617/http://szabo.best.vwh.net/smart. contracts.html Par souci de concision, les notions d’identité numérique, (22) VERBIEST Th. (De Gaulle Fleurance & Associés), « Smart contracts et blockchain vont-ils conduire à une révolution juri- de signature électronique, d’oracle ou d’application dé- dique ? », L’Écho, 21 avril 2016, http://www.lecho.be/actualite/ centralisée ou distribuée (DApp) ne sont pas développées archive/Smart-contracts-et-blockchain-vont-ils-conduire-a-une-re- dans la suite de cet article. volution-juridique/9757157 (23) LAMELA SEIJAS P., THOMPSON S. & McADAMS D., “Scrip- Les trois étapes de la mise en œuvre du smart ting smart contracts for distributed ledger technology”, Université contract de Kent au Royaume-Uni/Input|Output Hong Kong, 10 février 2017, http://kar.kent.ac.uk/61162/1/1156.pdf La première étape programme le smart contract, de sorte (24) « Opérateurs de scripts du système Bitcoin » : Script, Bitcoin qu’il transpose une ou plusieurs clauses du contrat tra- Wiki, version du 4 mars 2017, http://en.bitcoin.it/wiki/Script

RÉALITÉS INDUSTRIELLES - AOÛT 2017 87 Figure 6 : Exemples d’opérateurs de scripts utilisés par les systèmes Bitcoin et Ethereum. © Jérôme PONS

burant » est annulée, prévenant ainsi le risque de générer Une transaction est associée nativement à un service

LES SMART CONTRACTS ET LES ORACLES LES SMART d’éventuelles boucles à l’infini. « basé sur les scripts », appelé smart contract, utilisant des opérateurs de scripts basiques et évolués et échan- Ce langage est exécuté par la machine virtuelle Ethereum geant des ethers (le paiement électronique est un usage (EVM - Ethereum Virtual Machine) et est présenté en piles, parmi d’autres du smart contract). sous la forme de chaînes de caractères. Les instructions sont traitées séquentiellement, permettent le saut en ar- (25) « Opérateurs de scripts du système Ethereum », WOOD Gavin, rière (présence de boucles) et s’appuient sur plus d’une “Ethereum: A Secure Decentralised Generalised transaction Ledger, centaine d’opérateurs de scripts (25). Ethereum/Ethcore”, révision EIP-150, http://gavwood.com/Paper.pdf

Figure 7 : Transposition de certaines clauses du contrat traditionnel en langage de script de haut niveau avec EtherScripter.

88 RÉALITÉS INDUSTRIELLES - AOÛT 2017 Ce smart contract est vu comme une entité virtuelle dis- L’explorateur de blocs Etherscan du système Ethereum posant de son propre code de script capable d’émettre et permet de retrouver le numéro de bloc 857458 et de vi- de recevoir des messages et des ethers, de créer d’autres sualiser la transaction de 0,48 ether initiée par le service contrats ou de s’autodétruire. Il ne peut pas initier de tran- Ujo Music, intégrant le smart contract lié au télécharge- saction, mais il peut être activé par une autre transaction ment du morceau (voir la Figure 9 ci-dessous). lui étant destinée (26). En plus du langage EVM, un langage de script de haut niveau peut être utilisé comme Solidity, Serpent ou LLL. Jérôme PONS Dans la pratique, un éditeur comme EtherScripter permet de transposer certaines clauses du contrat traditionnel (par exemple, contrat de vente), qu’il traduit alors en lan- gages de script de haut niveau tels que Serpent ou LLL (voir la Figure 7 de la page précédente). Un cas d’usage, l’expérimentation Ujo Music

Lors de l’ouverture du service Ujo Music en version al- pha (le 2 octobre 2015), seul le morceau Tiny Human de l’artiste anglaise Imogen Heap était disponible. No- tons que ni l’œuvre musicale ni l’enregistrement asso- ciés à ce morceau ne sont inscrits dans les bases ISWC et ISRC. En revanche, l’artiste est identifiée par le code ISNI 0000000078404022 et créditée, d’après le service, comme auteure, compositrice, arrangeuse, interprète et productrice du morceau. Cinq modes de distribution du morceau étaient proposés, dont le téléchargement au prix de vente de 0,6 dollar et le streaming à 0,006 dollar par écoute. Les conditions géné- rales de vente indiquent que le partage des recettes était de 91,25 % pour Imogen Heap et de 1,25 % pour chacun des six musiciens et pour l’ingénieur du son. L’achat et le téléchargement du morceau mettaient en œuvre un smart contract dans le système Ethereum. Le service Ujo Music s’interconnectait à la plateforme d’échange Kraken afin d’indiquer le taux de conversion du prix de vente (par exemple, 0,6 dollar = 0,48 ether) et pour permettre à l’acheteur de créer un portefeuille élec- tronique, d'obtenir une adresse de compte, d'alimenter son compte (par exemple, 1 ether) et de saisir l’ordre de Figure 9 : Visualisation d’une transaction initiée par le service Ujo transaction à destination de l’adresse fournie par le ser- Music. vice Ujo Music (27).

Par ailleurs, le service Ujo Music fournissait en toute Identifiée par son empreinte, la transaction comporte un transparence la liste des transactions associées au mor- horodatage (16 janvier 2016 à 14h 18m 41s), elle men- ceau (voir la Figure 8 ci-dessous). tionne la présence d’un smart contract, un « prix du carbu- rant » et des frais de transaction. L’exécution immédiate du smart contract a réparti le montant de la transaction (0,48 ether) vers l’adresse d’Imogen Heap (0,438 ether) et vers chacune des 7 autres adresses (0,006 ether), ce qui

(26) BUTERIN V., “Ethereum: A Next-Generation Cryptocurren- cy and Decentralized Application Platform”, Bitcoin Magazine/ Ethereum, 23 janvier 2014, http://bitcoinmagazine.com/articles/ ethereum-next-generation-cryptocurrency-decentralized-applica- tion-platform-1390528211/ (27) “Part 1: How we tried to buy Imogen Heap’s song on Ethe- reum“, Hatching Amazing, 24 janvier 2016 http://medium.com/ hatching-amazing/part-1-how-my-ssn-prevented-me-from-buying- Figure 8 : Liste des transactions associées au morceau Tiny Hu- music-on-the-blockchain-and-why-blockchain-for-music-a85eaea- man. ca7ad

RÉALITÉS INDUSTRIELLES - AOÛT 2017 89 correspond bien au partage des recettes indiqué dans les Acronymes CGV. AàD : Audio à la Demande Les perspectives des smart contracts pour les industries culturelles AFNOR : Association française de normalisation ASIN : Amazon Standard Identification Number Lorsque la technologie blockchain est exploitée pour mettre en œuvre des smart contracts dans les secteurs de CGV : Conditions Générales de Vente la culture, cela implique nécessairement un dialogue entre CNC : Centre national du cinéma, de l’image et du son des informaticiens, des juristes et des acteurs de la chaîne de transmission des contenus numériques. DAO : Decentralized Autonomous Organization Face à un cas d’usage, ceux-ci doivent d’abord adopter DCI : Digital Cinema Initiative une crypto-monnaie (par exemple, Bitcoin, Ethereum, DCP : Digital Cinema Package Omni) ou un asset, ce qui les orientera vers un système DDEX : Digital Data Exchange blockchain. Ensuite, ils doivent transposer une ou plu- sieurs clauses du contrat traditionnel dans le langage de DLT : Distributed Ledger Technology script de ce système, pour, enfin, s’assurer, à l’aide d’un EVM : Ethereum Virtual Machine explorateur de blocs, que le smart contract est effective- ment exécuté. GSA : Grande Surface Alimentaire La blockchain apporte des solutions à des problèmes GSS : Grande Surface Spécialisée connus, comme le rapprochement des codes ISRC et IPD : International Performers Database ISWC (dans le secteur de la musique enregistrée). À cet effet, trois sociétés de gestion collective du droit d’auteur IPI : Interested Parties Information (ASCAP aux États-Unis, PRS for Music au Royaume-Uni IPN : International Performer Number et la Sacem en France) se sont alliées à IBM, en avril 2017, LES SMART CONTRACTS ET LES ORACLES LES SMART afin de rapprocher ces codes en s’appuyant sur le projet ISAN : International Standard Audiovisual Number Hyperledger Fabric. Des smart contracts automatisant ISO : International Standards Organization l’attribution de couples (ISRC, ISWC) et simplifiant la ges- tion des droits pourraient alors émerger (28). ISRC : International Standard Recording Code Les codes d’identification utilisés par les industries cultu- ISWC : International Standard Musical Work Code relles (par exemple, ISAN, ISRC, ISWC) ont été norma- LLL : Lisp Like Language lisés par l’Organisation internationale de normalisation (ISO), qui a d’ailleurs créé en 2016 le Comité technique MBID : MusicBrainz IDentifier ISO/TC 307 consacré à la blockchain et aux technologies MG : Minimum Garanti de registre distribué (DLT). Comptant 19 pays participants (dont la France, représentée par l’AFNOR), ce comité s’est P2P : Peer-to-Peer réuni pour la première fois en avril 2017. Il a voté la créa- PGHT : Prix de Gros Hors Taxes tion d’un groupe d’étude dédié aux smart contracts (ISO/ TC 307/SG5) qui devra « considérer l’application de mé- PPHT : Prix Public Hors Taxes thodes de programmation et de langages de script per- RCA : Registre du Cinéma et de l’Audiovisuel du CNC mettant à des non-informaticiens d’exprimer des clauses contractuelles (29) ». RNPP : Recettes Nettes Part Producteur Dans le contexte de la blockchain, le secteur de la mu- SOFICA : Société de financement de l’industrie cinémato- sique se trouve encore une fois aux avant-postes de la graphique et de l’audiovisuel transformation numérique. Il pourrait se voir emboîter le VàD (A) : Vidéo à la Demande (avec Abonnement) pas par les secteurs du cinéma et de la vidéo, d’autant VPC : Vente Par Correspondance plus que les travaux de normalisation internationale des smart contracts apporteront davantage de limpidité.

(28) « Blockchain : la Sacem, Ascap et PRS for Music s’allient pour une meilleure identification des œuvres », Sacem, communiqué de presse du 7 avril 2017, http://societe.sacem.fr/actualites/innovation/ blockchain--la-sacem-ascap-et-prs-for-music-sallient-pour-une-meil- leure-identification-des-oeuvres (29) « ISO/TC 307 Chaîne de blocs et technologies de registre dis- tribué électronique », ISO, www.iso.org/fr/committee/6266604.html

90 RÉALITÉS INDUSTRIELLES - AOÛT 2017 L des données(envérifiantla source del’information, elle- L’Oracle peutattester cryptographiquementdel’origine ou desinstitutsmétéorologiques. gnies aériennes,desagrégateurs dedonnéesfinancières être extraitesdesources fiablestellesquedescompa etpeuvent données sontdisponiblesenligne,surInternet, existe différentes implémentationspossiblesd’Oracles. consensus sur l’état de ce le « En fonctiondecequenousappelonsmanière exacte avion aconnuunretard deplus30 est lavaleurd’unbitcoineneuros Ils répondentàdesquestionssimplestellesque dessolutionsefficaces. tations logiciellespeuventfournir disponible enligne,desOraclesbaséssurimplémen Lorsque laconnaissancedel’informationrecherchée est Les Oraclesfondéssurl’attestationd’origine Les Oracleslogiciels Chief Technical Officer,Ledger et NicolasBACCA Customer SuccessManager,Ledger Par Vanessa RABESANDRATANA et lemondephysique de confianceentre lesblockchains L’Oracle encore la Chaque casd’usagenousrenvoie alorsàcetteproblématique :commentlesapplicationsliéesà se superposentjamais. entoure. Onpeutmêmeparlerd’orthogonalité:cesdeuxuniversexistentsurdesplansquine tralisées etautres crypto-monnaiesontdoncuneempriselimitéesurlemondeconcret quinous par construction complètement séparé du monde réel. Les Les applications tisser desliensentre lemonde réeletlablockchainporteunnom:Oracle. fallu concevoirdesoutilsetinterfacesadaptés.Laplateformedeconfiancequipermet Cette question s’est posée tout naturellement dès les balbutiements de cette technologie et il a et efficace? letout,defaçonsécurisée ment lessmartcontractspeuvent-ilssenourrirdedonnéesexternes,

blockchain peuvent-ellesinteragirdefaçonefficaceetsécuriséeaveclemonderéel,com monde physique monde. (et attestent)desrevendicationsl’ concernant es Oracles sont des entités de confiance qui signent «

Est-ce qu’ilpleuvaithier, danscetteville

blockchain évoluentdansleurpropre environnement entièrement virtuelquiest », et que nous devons évaluer, il : la couche :lacouche hardware de l’existenceounond’un

?

»

;

«

minutes Est-ce quecet

: «

? état du

?

Quelle »

. Les » ou - - pose unproblème detaille Si cette approche est plutôt simple à mettre en œuvre, elle passerelle utilisablepardes applicationsdécentralisées. contenu depagesWeb fait unedéclaration publique et vérifiée sur la véridicité du vers un même signéeparuncertificatTLS)etpousserl’information mer l’information,maisvousdevezsurtoutfaire confiance faire confianceàl’Oracle surlefaitqu’ilnevapasdéfor en Wikipédia Devrions-nous, parexemple,avoiruneconfianceaveugle à lasource elle-même giques provenant d’unsiteWeb à enprésenteruneversionbiaisée. rentes enfonctiondequilesobserveouaunintérêt complexes quipeuventdonner lieuàdesvéritésdiffé mais celanefonctionnerapas pourdesquestionsplus financiers, donnéesmétéorologiques, résultatssportifs...), rifiés àpartirdedifférentes sources deconfiance (index Les événementstrèsconcrets peuventtoujoursêtre vé final, sesaffirmationsseraientsansvaleur. sions pourraient sérieusement mettre à mal l’Oracle et, au faits oud’événementspastoujours soi. Mais qu’en est-il de questions plus complexes, de . En quelque sorte, ce type d’Oracle smart contract.Enquelquesorte,cetyped’Oracle smart contracts, applications décen-

RÉALITÉS INDUSTRIELLES - AOÛT 2017 ? Lescontroverses entre sesdifférentes ver , tout en fournissant une une sécurisées,toutenfournissant

! Pourlesdonnéesmétéorolo

: vousdeveznonseulement réputé,celapeut facilesàexprimer

aller de

91 -

? - - - - -

Vanessa RABESANDRATANA et Nicolas BACCA Les Oracles fondés sur le consensus l les smart grids, Les marchés prédictifs sont d’excellents exemples d’appli- l ... cations décentralisées qui ne peuvent exister en l’absence Prenons l’exemple d’une assurance automobile smart d’Oracles « parfaits ». Le principe est de pouvoir parier sur contract dont les conducteurs paieraient une prime dans des événements, quels qu’ils soient, et de pouvoir déduire l’espoir d’être récompensés pour leur bon comportement des enjeux des tendances fortes, et donc d’avoir une vision sur la route. Les conducteurs coupables d’excès de vi- de l’avenir. Si l’on pense immédiatement aux paris spor- tesse perdraient leur prime, qui serait reversée dans un tifs ou aux dérivés financiers et auxfutures , les marchés pot commun partagé au final entre tous les « citoyens prédictifs peuvent aussi apporter des informations critiques respectueux de la loi ». Les associations de sécurité dans le domaine du renseignement, des opérations mili- routière pourraient contribuer localement via l’octroi de taires ou de la lutte contre le terrorisme. Si quelqu’un avait primes supplémentaires à inciter plus encore à une bonne des informations valables sur un fait majeur et s’il pouvait conduite. les monétiser de façon sécurisée et anonyme, alors celles- ci finiraient par être exposées sur le marché prédictif. La difficulté dans cette approche est de trouver un moyen sécurisé et infalsifiable permettant de surveiller la vitesse L’accès à certaines informations étant un monopole d’État des véhicules : si l’on pouvait soit simuler une conduite et la réglementation ne permettant pas l’opération de parfaite soit attacher le tracker à une autre voiture, le sys- tels marchés prédictifs, l’approche décentralisée est au- tème d’assurance deviendrait totalement inutilisable et jourd’hui la seule solution. L’Oracle, qui détermine au final finirait par péricliter. la vérité d’un fait pour solder les paris, doit donc lui aussi être décentralisé et de toute confiance. Comme il est im- Les capteurs sécurisés par attestation cryptogra- possible de se baser sur une source unique (celle-ci étant phique trop facilement manipulable ou censurable), il est néces- Si l’on souhaite pouvoir effectuer une mesure de façon saire de faire appel à la sagesse de la foule et d’utiliser des totalement sécurisée en ayant la garantie de son origine, il mécanismes de consensus plutôt complexes basés sur la est nécessaire de mettre en place les éléments suivants : réputation et sur la nécessité d’enjeux pour « punir » ceux LES SMART CONTRACTS ET LES ORACLES LES SMART qui ne respecteraient pas l’obligation de vérité. l une attestation cryptographique du capteur créant une authentification de l’origine de la lecture : un élément sé- Ces Oracles décentralisés font l’objet aujourd’hui d’une curisé effectue l’orchestration de la carte électronique et R&D active dans le cadre de marchés prédictifs tels signe les paquets de données sortants (avec un nonce, qu’Augur ou Gnosis. Mais il reste encore à démontrer que pour éviter les répétitions) ;

le système pourra fonctionner de façon « parfaite », seule l une installation anti-falsification du dispositif de mesure, possibilité pour qu’il ait la moindre valeur. le rendant immédiatement inopérant via l’effacement des clés privées en cas de tentative de manipulation Les Oracles hardware (connexion à un autre objet, injection de faux stimuli, etc.). Si nous avons vu que les Oracles permettent de traiter Ces dispositifs de lecture sécurisés portent le nom les événements que l’on pourrait qualifier de publics et d’Oracle hardwares : ils jouent le rôle de passerelles per- d’observables par tous, qu’en est-il des événements en mettant de passer du monde physique à l’espace virtuel temps réel, privés et centrés sur un utilisateur ou sur un blockchain. objet en particulier ? Le déploiement de ces Oracles nécessite la mise en place Il existe des faits qui ne peuvent être déterminés par de provisionnements (clés d’attestation et clés d’identifi- consensus ou par attestation de données publiques. Nous cation de l’appareil), ainsi que l’établissement d’une stra- pourrions, par exemple, citer les questions suivantes : tégie de supervision d’installation (permettant de s’assu- rer que les capteurs mesurent bien ce que l’on souhaite l « Où est ce conteneur, maintenant ? » mesurer). La confiance à long terme est garantie par l’an- l « Est-ce que cette porte est verrouillée ? » ti-falsification et la protection des clés privées grâce à l « Quelle est la vitesse actuelle de ce véhicule ? » l’usage d’éléments sécurisés. l « Combien ai-je fait de pas aujourd’hui ? ». Dans le cas de l’exemple de l’assurance auto précédem- Sources de données locales et privées ment évoqué, l’Oracle doit avoir les clés d’attestation ap- Certaines applications nécessitent d’obtenir des informa- propriées (ce qui implique qu’il se soit approvisionné au- tions liées à des événements physiques dont les données près de fournisseurs spécifiques) et une stratégie d’audit n’existent que dans l’objet ciblé (ou dans la personne ci- doit être mise au point afin de vérifier que la mise en place blée). La mesure doit être effectuée localement, souvent initiale est correcte (cela nécessitant des parties/vérifica- en temps réel. Comme les données sont privées, la pré- teurs externes). cision de l’information ne peut être vérifiée ni par un flux public ni par consensus. Vers une généralisation des Oracles ?

On peut imaginer de nombreux cas d’usage : Pour multiplier les cas d’usage, les applications décentra-

l l’économie collaborative, lisées ne peuvent échapper à la nécessité de puiser des

l la traçabilité industrielle, informations dans l’univers physique qui nous entoure.

92 RÉALITÉS INDUSTRIELLES - AOÛT 2017 La notion d’Oracle devient donc essentielle. Elle se posi- des blockchains ou avec des véhicules électriques inté- tionne au cœur des éléments indispensables au dévelop- grant des portefeuilles cryptographiques permettant un pement de ces technologies. paiement machine-à-machine. Aujourd’hui, les industriels ont tout intérêt à anticiper sur L’Internet des objets devra donc aussi compter avec les l’évolution de ces nouveaux modèles et à intégrer dans technologies blockchain, celles-ci étant de nature à fa- leurs équipements les fonctionnalités d’Oracle hardware. ciliter l’intégration d’éléments de sécurisation qui font On peut donc imaginer qu’il y aura, dans un futur proche, aujourd’hui grandement défaut dans ce nouvel univers des compteurs intelligents dialoguant nativement avec désormais si proche. Vanessa RABESANDRATANA et Nicolas BACCA RABESANDRATANA Vanessa

RÉALITÉS INDUSTRIELLES - AOÛT 2017 93 LES OPPORTUNITÉS, LES ENJEUX 94 l’historique exhaustif de toutes les « Il s’agitd’unsystèmedécentraliséd’enregistrement de de notarisationdistribué Qu’est-ce qu’unsystème potentiels augmente-t-elledejouren maturité destechnologies Nées il l’économie avantleurentréedansl’ère digitale. tion deprincipes respectés pardenombreux servicesde confiance. Elleconstitue,enquelquesorte,unetransposi saire pourl’ nécessairement financières. Cettetraçabilité estnéces forme del’enregistrement detransactionsvariées,non breux acteursexpriment un besoindetraçabilitésousla Avec latransformationnumérique delasociété,nom Introduction Responsable développementAfnor et Jean-FrançoisLEGENDRE Directeur généraldel’Associationfrançaisenormalisation(Afnor) Par OlivierPEYRAT s’intéresse-t-elle àlablockchain ? Pourquoi lanormalisation Dans untelsystème,lestransactions sontconsignées entreprises pourtracerleursentréesetdépenses. de comptes,paranalogieavec lapratiqueancestraledes tuées depuissacréation.On parleainsid’ungrandlivre ments sansrecourir àaucuntiersdeconfiancecentralisé. robuste, ouvertetpublicdenotarisationd’enregistre La promesse dela lectuelle, gestiondecadastres oud’héritages,etc. gie, agroalimentaire, gestiondedroits depropriété intel cier (dontlesassurances),industriedumédicament,éner ainsi ausommetdupicd’inflationdelacourbed'Hype de lasociétéetdesentreprises. Lesujet tie grâceàl’accélérationdelatransformationnumérique citent unvifintérêtdepuisquelquesmois,etce,pourpar de notarisationdistribuées,appeléesblockchains,sus- technique à la monnaie virtuelle bitcoin, les technologies aspects desprocessus misenœuvre. qui impliqueledéveloppementdenormesafind’apporterlaconfiancenécessaire surcertains nombreux secteurs.Toutefois, la déploiement. L’impact potentieldela considérable, avecdenombreux casd’usageenvisagés,dontcertainssontdéjàenphasede La

RÉALITÉS INDUSTRIELLES - AOÛT 2017 concerne unensembledetechnologies.Sonpotentieldéveloppementest blockchain concerne

y

a unedizained’années établissement et l’utilisation de services blockchain estd’offrir unsystèmesûr,

! Aussilalistedescasd’usage (1) entantquesupport

transactions ? blockchain figure

: secteurfinan blockchain devraatteindre unpremier niveaudematurité,ce blockchain estdisruptif,etsansdoutestratégiquepourde

» ef fec ------sein d’unréseau.Chaque nœud du réseau possède ainsi comptes est partagé et mis à jour de façon distribuée, au d’enregistrement décentralisé,c’estlefaitquecelivre de Ce quicaractérisedefaçonfondamentalecesystème soit ajoutéàlachaîne. ayant chaque blocréunissantunensembledetransactions dans le« l l l l l de comptes sa propre copieactualiséeenpermanencedu« protocole étaitlancée,sousl’appellation debitcoin. baséesurl’implémentationdece plateforme decrypto-monnaie blockchain dansunlogicielécritenC++.Un anaprès,lapremière Satoshi Nakamoto,publiesouslicence libreMITleprotocoledela (1) En2008,undéveloppeur(ou un collectif?),sefaisantappeler et standards susceptibles d’ un impact certain surlecahier des charges desnormes tif. Onenretiendra lescaractéristiques suivantes,quiont quera pasici,permettentd’assurer lasécuritédudisposi

dans une é une m la l fient lestransactions. spécifique pour rémunérer les nœuds de réseauqui véri d’une transaction,grâceàdestechniquesdemulti-si des transactionseffectuées transaction majorité desnœudsderéseaupourpouvoirvaliderune seau etfondéesuruneméthodede« gnatures digitales transaction ; chaque nœud pour pouvoir calculer la validité d’une e respect del’anonymat,entre l’ transparence totaledu« inimisation delaconnaissancequedoitposséder été validées,conditionnécessaire pourquelebloc lecasd’usageBitcoin,unmodèleéconomique criture comptablepartagéeparlesnœudsduré-

grand livre decomptes

; ». Différents mécanismes,quel

;

être développésàceteffet

;

grand livre decomptes

» parblocsconsécutifs, émetteur etlerécepteur

consensus ’on n’expli-

grand livre

» dela

» et

: - - - Photo © Romanpoet Wikimedia Photo © Jens Kalaene/Picture alliance-ZB-MAXPPP « Lapremière applicationdelablockchainaétémonnaievirtuellebitcoin». Possibilité offerte d’unpaiementenbitcoinssurunsitedecommerce électronique. cation. » blockchain lesrèglesden’importe quelle appli- complet afinquel’on puisseécrire dansla qui intégrerait unlangagedeprogrammation rin eutl’idéedecréerun protocole « En2013,unétudiantdunomdeVitalik Bute Portrait deVitalik Buterin(WikimediaCommons). blockchain - d’utiliser lablockchain la monnaie virtuelle bitcoin. En effet, la première application de la comptes mettant d’inscrire etdetracerdansle« possible de mettre en œuvre un système dynamique per en faitdesélémentsexécutablesdelogiciels,ildevient Avec cettenotionde« service, en2015. sur ceprincipequelaplateformeEthereum aétémiseen cipatives del’histoire desnouvellestechnologies,c’est Après l’unedesplusimportanteslevéesdefondsparti la programmation complet afin quel’onpuisseécrire dans un protocole blockchain quiintégrerait unlangage de un étudiantdunomdeVitalik Buterineutl’idéedecréer Le termede« décès. exemple déclencherleversement d’unhéritageaprèsun conditions de production d’un résultat sont remplies, par chaîne desactionsàréaliserautomatiquement lorsqueles titres, parexemple–,etd’intégrer danslesblocsdela tionnelle, uneélection,uncadastre ouuneémissionde ser – tels qu’un diplôme, qui sera validé de façon condi- blockchain lesrèglesden’importequelleapplication.

» toutessortesd RÉALITÉS INDUSTRIELLES - AOÛT 2017

transaction pourtoutautre chose. En

contrats intelligents

» estàentendre ausens large. ’actes « Très vite, il a été envisagé

intelligents blockchain aété

grand livre de

», quisont » àsécuri

2013,

95 - - -

Olivier PEYRAT et Jean-François LEGENDRE Ce système permet donc à chaque acteur de connaître une identification du requérant. De ce fait, les questions potentiellement tout ce qu’il se produit dans le monde di- de la garantie de confidentialité ne se poseront pas dans gital, d’enregistrer le fait que l’événement a eu lieu, le cas les mêmes termes et il en sera de même des sujets de échéant qu’il s’est déroulé correctement, de déclencher protection des données personnelles, d’évaluation de la des actes associés – le tout, naturellement, sans exposer chaîne de confiance du nouveau système et de méthode des détails confidentiels à propos du sujet ou des parties d’enrôlement de ses acteurs. prenantes impliquées. Enfin, une attaque lancée en juin 2016 contre un contrat Les enjeux de la normalisation intelligent d’Ethereum, par l’exploitation d’une faille dans le volontaire code, a permis à un utilisateur indélicat de tenter de sub- tiliser 3 millions d’« ethers » (la monnaie virtuelle de cette Les normes sont des documents d’application volontaire plateforme), soit environ 36 millions de dollars. Cela a établies par un organisme de normalisation reconnu comme changé la perception de facilité que certains acteurs pou- respectant des principes de pluralité de la représentation vaient avoir eue jusque-là de cette technologie, qui n’est des parties intéressées, d’ouverture et de transparence en pourtant pas facile à appréhender, même en ayant des matière de gestion des droits de propriété intellectuelle. connaissances poussées en technologies de l’information. De prime abord, le protocole blockchain est un ensemble Cet avertissement sans frais s’avère intéressant, parce de technologies « ouvertes », c’est-à-dire publiées en qu’il montre que les mécanismes de sécurité doivent être source libre suivant une licence ouverte et largement do- évalués si l’on veut que la technologie puisse répondre cumentée (2). Les fonctions de sécurité utilisées sont elles- à des critères de maturité. Surtout, il marque la fin d’une LES OPPORTUNITÉS, LES ENJEUX LES OPPORTUNITÉS, mêmes bien connues (hash, signature digitale, etc.). Tout doctrine dans laquelle la technologie se suffirait à elle- cela, a priori, ne requiert pas d’action particulière au ni- même sans qu’il fût nécessaire d’y associer un dispositif veau de la normalisation internationale ! de gouvernance. À ce titre, il y a eu un débat intéressant et intense au sein de la communauté pour comprendre si Ce point de vue devra cependant considérablement évo- l’on pouvait ou non scinder de façon délibérée une chaîne luer si l’on souhaite que ces technologies entrent rapide- pour réparer l’erreur, et éviter ainsi le versement fraudu- ment et à juste titre dans une phase de maturité. leux de l’argent – et, si oui, qui avait le droit d’agir ? C’est Un premier risque est en effet constitué par la multiplica- ainsi que la question de la gestion d’éventuels conflits tion des implémentations du protocole blockchain : même d’intérêt est apparue. si l’on se limite aux seules crypto-monnaies, il s’agit d’un La Commission européenne, consciente de l’intérêt et protocole de réseau qui, aujourd’hui, régit plusieurs cen- des enjeux que présentent ces nouvelles techniques, taines de plateformes à des stades plus ou moins avancés vient de mettre en place un groupe de travail autour des de déploiement, dont la plus connue est évidemment la « Fintechs », la blockchain et sa normalisation y sont poin- plateforme historique bitcoin. Cette multiplication repré- tées comme un sujet essentiel. La Commission souhaite sente en soi un sujet de préoccupation pour les utilisa- s’appuyer sur les organismes de normalisation européens teurs, car on ne peut se satisfaire d’une standardisation pour évaluer les besoins liés aux spécificités de l’Europe de fait qui s’effectue aujourd’hui au travers d’une API (In- et mettre en place, si besoin en est, un programme de terface programmatique) spécifique à chaque plateforme travail. (Bitcoin, Ethereum, Nxt…). Dans ce contexte, les enjeux pour la normalisation tels Avec cette multiplication de ses usages potentiels, de qu’ils ressortent des débats tenus à l’Afnor, où l’écosys- nombreuses questions sont soulevées quant à la capacité tème français de la blockchain (y compris la famille des de cette technologie à monter en puissance (changement start-ups) est bien représenté, portent en particulier sur : d’échelle dans les temps de latence pour incrémenter des blocs dans la chaîne) : un des enjeux sera donc de dispo- l le besoin d’harmoniser une terminologie et un vocabu- ser de méthodes pour évaluer la qualité et la fiabilité du laire communs ; service. l le lien avec l’identité numérique pour gérer la confi- dentialité entre intervenants et contenus, avec un cas À cela s’ajoutent des questions environnementales. En d’usage concernant des dispositions techniques de ges- effet, le consensus basé sur des arguments cryptogra- tion des données répondant aux exigences du nouveau phiques et sur des règles protocolaires, qui est le fonde- règlement européen RGPD (Règlement général sur la ment de la confiance décentralisée elle-mêmeà la base Protection des Données) relatif à la protection des don- de cette technologie, s’avère par nature gourmand en nées personnelles (3) ; calcul, en stockage – et donc en énergie. l le besoin de gouvernance pour faciliter le déploiement Par ailleurs, la blockchain ne se limitant pas aux cryp- des blockchains dans un cadre maîtrisé ; to-monnaies, il peut s’agir, suivant le cas d’usage consi- déré, d’une implémentation publique, privée ou hybride. Les enjeux ne sont dès lors pas nécessairement toujours (2) Voir, par exemple, les travaux du groupe BIPS : https://github. les mêmes : par exemple, dans le premier cas, l’anonymat com/bitcoin/bips (3) L’atelier CEN ISAEN est une initiative de l’association française des émetteurs de transactions est requis, pour des rai- AETERNAM soutenue dans le cadre de la collaboration franco-alle- sons de sécurité. Dans l’autre, on souhaitera, au contraire, mande sur la normalisation de l’économie numérique.

96 RÉALITÉS INDUSTRIELLES - AOÛT 2017 l la nécessité d’organiser la répartition des travaux entre, des travaux soient menés sur les thématiques suivantes : d’une part, un référentiel normatif générique applicable l de terminologie ; à tout secteur et, d’autre part, des déclinaisons par sec- l d’architecture de référence (distinguer le réseau du ser- teur, dont le secteur financier qui a commencé à réfléchir vice) ; sur la normalisation d’applications « FinTech » ; l de classification des cas d’usage ; l donner un cadre de référence concernant l’interopérabi- l de sécurité et de confidentialité des données person- lité, la portabilité et la sécurité d’usage. nelles ; Une opportunité : le nouveau comité l de gestion des identités ; technique ISO TC 307 « Blockchain l des contrats intelligents. and electronic distributed ledger Au travers de ces travaux, les acteurs économiques technologies » cherchent à sécuriser leurs investissements, sans brider pour autant l’innovation apportée par la technologie. À la demande de son membre australien, l’organisme de normalisation international ISO a décidé en sep- En conclusion, la blockchain est née dans un esprit de tembre 2016 de créer un nouveau comité technique, dont rupture s’inspirant d’idées libertaires. Pour autant, afin la mission sera de développer des normes génériques de progresser en maturité et de gagner la confiance de transversales à tous les secteurs et s’appliquant aux tech- toutes les parties intéressées, la blockchain devra s’ap- nologies de la notarisation distribuée. puyer sur une normalisation volontaire. Par rapport à l’offre des consortiums qui s’emparent de la blockchain Les réunions tenues à l’Afnor depuis l’été 2016 montrent pour produire nombre de spécifications souvent foison- que les acteurs français, qui comprennent des start-ups, nantes, l’ISO, tout comme l’International Electrotechnical voient dans l’initiative de l’ISO une opportunité pour que Commission (IEC), dispose d’atouts décisifs en matière la normalisation apporte des réponses en termes de de confiance, car les normes volontaires que ces orga- confiance afin que lablockchain se développe en tant que nisations élaborent sont de portée internationale et s’ins- technologie accompagnant la transformation numérique, crivent dans la durée. Elles sont extensibles, car elles sont même si elle ne saurait répondre à elle seule à tous les

maintenues à long terme par un processus maîtrisé de fa- et Jean-François LEGENDRE Olivier PEYRAT enjeux de cette transformation. çon à être suffisamment générique. À condition d’y contri- Les discussions qui ont eu lieu lors de la première réunion buer activement, l’ISO et/ou l’IEC, en se positionnant de l’ISO/TC 307 (tenue en Australie début avril 2017) ont de façon complémentaire aux initiatives d’open source, démontré que les acteurs internationaux sont sur la même sont à même d’apporter à l’ensemble des acteurs, privés longueur d’onde à ce sujet. Un consensus indéniable comme publics, et ce, internationalement, des réponses s’établit autour du fait que la consolidation de la confiance aux défis d’organisation, de portabilité, d’interopérabilité dans les nouvelles applications blockchain requiert que et de sécurité que la blockchain devra relever.

RÉALITÉS INDUSTRIELLES - AOÛT 2017 97 Sécurité et insécurité de la blockchain et des smart contracts

Par Jean-Pierre FLORI Expert en cryptographie à l’Agence nationale de la sécurité des systèmes d’information (ANSSI)

La sécurité des nombreuses applications utilisant les blockchains repose non seulement sur la façon dont sont construites les blockchains sous-jacentes, mais aussi sur les spécificités de l’application construite à l’aide des données stockées dans ces blockchains, ainsi que sur le comportement des entités participant à l’expansion de la blockchain. Dans cet article, nous nous intéresserons à ces différents niveaux de sécurité et nous les illustrerons en nous appuyant

LES OPPORTUNITÉS, LES ENJEUX LES OPPORTUNITÉS, sur deux applications phares des blockchains : la crypto-monnaie bitcoin et l’ordinateur-monde d’Ethereum.

Introduction sont encore plus nombreux). La propriété attendue de la fonction de hachage cryptographique est la résistance au Les blockchains sont un élément central de la monnaie calcul de seconde préimage : pour remplacer un bloc N au cryptographique bitcoin, de l’ordinateur-monde Ethe- sein de la liste, il faudrait en effet être capable de trouver reum, ainsi que de nombreux projets récents. La sécurité un autre bloc ayant le même haché que celui stocké dans de telles applications repose non seulement sur la façon le bloc N+1. Les fonctions de hachage sont bien heureuse- dont sont construites les blockchains sous-jacentes, mais ment spécialement conçues pour qu’il soit illusoire d’espé- aussi sur les spécificités des applications construites à rer pouvoir réaliser une telle opération. l’aide des données stockées dans ces blockchains. Une telle structure peut alors être utilisée comme registre. La sécurité des blockchains Les blocs ajoutés deviennent immuables : en remontant depuis le dernier bloc ajouté à la chaîne, il est possible de Pour aborder la sécurité apportée par les blockchains, il s’assurer qu’aucun des blocs précédents n’a fait l’objet est tentant de réduire la blockchain à sa plus simple ex- d’une substitution. pression. On obtient alors un concept d’une simplicité, et même d’une pauvreté technique, extrême : c’est une liste La mise à jour des blockchains chaînée où chaque nouveau bloc pointe vers le précédent Le défi technologique majeur des blockchains réside dans bloc. Si une telle construction est constamment utilisée en la distribution d’un tel registre. Il faut s’assurer que l’en- informatique afin de stocker des données, elle n’apporte semble des acteurs s’accordent sur une version com- aucune garantie de sécurité sur les données stockées mune de la blockchain, mais aussi empêcher des entités dans un environnement malveillant et il est encore plus malicieuses de prendre le contrôle de l’ajout de blocs à la malaisé de partager et de mettre à jour une telle structure blockchain. Ce problème, qui a déjà été beaucoup étudié de données de façon distribuée. par les informaticiens, dans le cadre des modèles dits « à permission » (c’est-à-dire de modèles où l’ensemble des La rigidité des blockchains acteurs sont connus et contrôlés) est connu sous le nom Si aucun mécanisme de sécurité n’est mis en place, com- du « problème des généraux byzantins ». ment s’assurer qu’un bloc de la liste n’a pas été remplacé S’il existe de nombreux protocoles permettant de parvenir par un autre bloc ? Il est donc tout d’abord nécessaire de à un consensus dans un cadre maîtrisé où tous les ac- « rigidifier » la liste chaînée. teurs sont préalablement connus, ceux-ci ne fonctionnent Cette rigidité est généralement obtenue en incluant dans plus quand des acteurs non authentifiés peuvent prendre le nième bloc de données une empreinte numérique du part au protocole, ou s’en désister à leur gré. La principale i-1ième bloc de données de taille fixée (par exemple, 256 bits) innovation de bitcoin est d’avoir proposé un protocole calculée en appliquant à ce dernier une fonction H de ha- permettant de parvenir à un consensus dans un tel en- chage cryptographique publique et non paramétrée par vironnement « sans permission » en utilisant des puzzles un secret, telles que SHA-2 ou SHA-3 (les choix possibles cryptographiques appelés « preuves de travail ».

98 RÉALITÉS INDUSTRIELLES - AOÛT 2017 Photo © Ran Wen/Featurechina-ROPI-REA aujourd’hui environ 70, danslecasdubitcoin). veau blocsoitgénérétoutesles dixminutesenviron (i alors dejouersurlavaleur d’omettre quelquestoursdelafonctionhachage).Il suffit ler lehachécorrespondant (plusexactement,ilestpossible blème quedetirer desvaleursdeNiauhasard etdecalcu n’existe àcejourpasdemeilleure façonderésoudre cepro il les fonctionsdehachagecryptographiquesmodernes, première préimaged’unefonctiondehachage.Pourtoutes graphe précédent)serapproche duproblème decalcul difficile àrésoudre queleproblème évoquédanslepara H(Bi) commencepari tion decesélémentssatisfasselaconditionquelehaché nouveau blocBi=(Ni,H(Bi-1),Li)constituédelaconcaténa il s’agit essentiellement de trouver un préfixe Ni, tel que le liste Lidetransactionsàvaliderdanslecadre debitcoin), ainsi quelesdonnéesàintégrer aunouveaubloc donné lehaché intervenir desfonctionsdehachagecryptographiques Dans le cas du bitcoin, ces preuves de travail font à nouveau blockchain, ilfautrésoudre unproblème difficile. de pouvoirproposer unnouveau blocvalideàajouterla Le principedela« L’utilisation de « paramètre importantdesécurité. » « Le fait que la difficulté de la résolution du puzzle cryptographique soit suffisamment grande est un Chongqing (Chine),6décembre 2013. Un employédeLandminersdevantunordinateur dédiéauminagedebitcoins,uneactivitédanslaquellecettesociétéestspécialisée,

H(Bi-1) dublocprécédentdela

preuves detravail

preuve detravail

bits nuls.Ceproblème (encore plus

i pourfaire ensortequ’unnou

» » estlesuivant blockchain,

Bi (une Bi (une

! Étant

: afin

vaut vaut - - - - -

permet de se prémunir des doubles dépenses (un utilisa- que la« réécrire l’histoire encréant sapropre « stratégie permette de se prémunir d’une entité essayant de plausible (maisnonprouvé defaçonformelle à en obtenantainsiuneprobabilité strictementsupérieure contrôle pasplusdelamoitiépuissancecalcul important desécurité dessus pour prolonger sacopielocale dela nœud choisitaléatoirement undesdeuxblocsvalides préconise decommencerpar« éventualité, etpourconverger versunconsensus,bitcoin fusés àtraversleréseau,aumêmemoment.Danscette pas des’accorder lorsque deuxblocsvalidessontdif En soi,l’utilisation d’une « tographique soitsuffisammentgrandeestunparamètre Le faitqueladifficultéderésolutiondupuzzlecryp rabattent surlablockchainpluslongue. l’autre etleconsensusseraalorsquetouslesnœudsse conduira àune temps, ilestfortementprobable qu’undecesdeuxchoix jusqu’au momentoùladitebranche deviendrapluslongue du nœud de son choix et

½ de générer un blocavant les autres nœuds, ilparaît

(on parlealorsde«

branche RÉALITÉS INDUSTRIELLES - AOÛT 2017 blockchain strictementpluslongueque

» officielle.Enparticulier, cettestratégie

: tantqu’uneentitémalicieusene en y ajoutant de nouveaux blocs

branche preuve detravail

ne rienfaire

», ou« blockchain ettravaille

branche

fork

» nepermet

!) quecette »

»

). Avec le : chaque » àpartir

99 - -

Jean-Pierre FLORI teur transfère une première fois ses fonds, attend que suf- La sécurité des transactions fisamment de blocs soient ajoutés à la blockchain afin que Afin de dépenser les bitcoins transférés à l’adresse z, il faut le bénéficiaire considère la transaction comme confirmée, être capable de produire une signature cryptographique à puis réécrit l’histoire pour remplacer le transfert initial par l’aide de la clé privée associée, ce que seul le possesseur un autre), mais aussi de prévenir la censure (un attaquant de ladite clé pourra faire si le mécanisme cryptographique pourrait produire une « branche » plus longue dès qu’une de signature sous-jacent est sûr et, bien évidemment, si transaction qu’il ne voudrait pas voir apparaîtrait). cette clé privée n’a pas été divulguée ou dérobée.

La sécurité formelle Il existe de nombreux schémas de signature crypto- graphique adéquats. La plupart reposent sur des pro- Un axe de recherche actuel est de formaliser un tel proto- blèmes mathématiques tels que la factorisation de grands cole tout en prouvant de façon formelle sa sécurité. Parmi nombres entiers ou la résolution du problème du loga- les notions de sécurité formalisées, notons : rithme discret dans des groupes. C’est sur ce deuxième

l la cohérence spatiale : différents acteurs honnêtes doivent problème que s’appuie le mécanisme de signature cryp- partager la même vision de la blockchain officielle (ou au tographique utilisé par bitcoin. Plus précisément, bitcoin moins un préfixe commun, afin de prendre en compte une s’appuie sur la difficulté de la résolution du logarithme légère désynchronisation ou de brefs « forks ») ; discret sur une courbe elliptique à travers le mécanisme

l la cohérence temporelle : au cours du temps, la de signature ECDSA (Elliptic Curve Digital Signature Al- blockchain d’un acteur honnête doit conserver un pré- gorithm). fixe fixe (c’est-à-dire que sa vision de lablockchain ne

LES OPPORTUNITÉS, LES ENJEUX LES OPPORTUNITÉS, peut changer que marginalement, à la fin de la chaîne) ; Le regroupement des « mineurs » Un effet pervers de l’utilisation de « preuves de travail » (en l la croissance : la longueur de la « chaîne » officielle croît tant qu’un nombre suffisant d’acteurs y contribue ; dehors du côté hautement énergivore du minage) est que la majeure partie de la puissance de minage se concentre l la qualité : une proportion satisfaisante des blocs géné- rés par les acteurs honnêtes finit toujours par être inté- dans des zones proches de celles où sont produits les grée à la chaîne. Application-specific Integrated Circuits( ASIC) et où l’élec- tricité est bon marché. Notons que tous ces travaux posent encore des restric- tions plus ou moins fortes sur la modélisation du réseau De plus, les acteurs particuliers s’adonnant encore au mi- reliant les acteurs et sur la dynamique de la population des nage n’ayant pas la puissance de calcul nécessaire pour acteurs. Cependant, ils proposent d’autres améliorations espérer rentabiliser leur investissement énergétique se par rapport au protocole original du bitcoin afin d’accélé- regroupent habituellement au sein de « piscines » de mi- rer la vitesse moyenne de validation des blocs en utilisant nage. Un serveur central centralise les calculs effectués des chaînes secondaires et en mélangeant protocoles de par l’ensemble des mineurs de la piscine et leur redistri- consensus « à permission » et « sans permission ». bue les gains de manière proportionnelle. Le responsable du serveur central a alors un contrôle complet sur la puis- L’attaque des 51 % sance de calcul des mineurs de sa piscine vis-à-vis de l’extérieur. Un certain nombre de crypto-monnaies alternatives dont la puissance de minage est moindre que celle du bitcoin Il n’est donc pas exclu qu’un acteur unique puisse finir par ou d’Ethereum ont été attaquées par des groupes qui ont posséder plus de la moitié de la puissance de minage, re- pu réécrire la blockchain et dépenser plusieurs fois leurs mettant en cause le modèle sur lequel repose la non-mal- avoirs en regroupant des puissances de calcul supérieures léabilité de la blockchain. à 51 % de la puissance de minage. C’est, par exemple, le Des principes différents ont été proposés afin de pal- cas de Krypton et de Shift, qui sont des clones d’Ethereum. lier ces problèmes, tels les preuves d’espace (« proof of space ») ou les preuves de possession (« proof of stake »). La sécurité du bitcoin Les clients « légers » Bitcoin propose de construire une crypto-monnaie Une autre dérive des utilisations des bitcoins remet en au-dessus de la blockchain en stockant dans chaque bloc question le modèle entièrement distribué sur lequel re- un certain nombre de transactions monétaires. Chaque pose la confiance dans cette crypto-monnaie. Afin de acteur possède un couple de clés (l’une étant publique s’assurer qu’une transaction est valide, chaque acteur de- et l’autre privée) de signature cryptographique et chaque vrait stocker l’intégralité de la blockchain afin de s’assurer transaction est représentée en utilisant un langage de de la validité des transactions le concernant. Cette chaîne script très simple reposant essentiellement sur l’ins- représente aujourd’hui plusieurs gigaoctets de données, truction « transférer les bitcoins de la transaction y vers et ne serait-ce que le fait de l’obtenir requiert beaucoup l’adresse z », accompagnée d’une signature « s », où : de temps. Pour cette raison, des clients dits légers sont

l l’adresse z est (le haché d’)une clé publique de signature ; apparus qui ne stockent pas la blockchain et préfèrent

l le numéro de transaction pointe vers une transaction an- s’adresser au reste du réseau pour s’assurer qu’une tran- térieure dans laquelle des bitcoins ont été transférés à la saction a bien été effectuée. clé publique correspondant à la clé privée ayant produit la signature « s ».

100 RÉALITÉS INDUSTRIELLES - AOÛT 2017 La gestion des portefeuilles un langage de haut niveau nommé Solidity est utilisé, De nombreux utilisateurs préfèrent déléguer la gestion de avant d’être compilé. Cependant, la sémantique d’appel leur portefeuille, et donc celle de leurs clés privées, à des de fonctions de Solidity est assez complexe. En parti- sites spécialisés. Ces derniers deviennent donc des cibles culier, chaque programme peut définir une fonction de de choix pour des attaquants cherchant à dérober ou à « callback » qui sera appelée ou non, en fonction de la détruire des crypto-monnaies. De nombreuses attaques syntaxe utilisée. de ce type ont été perpétrées contre des sites de stockage et d’échange de bitcoins, tel le site d’échange de crypto- L’attaque contre DAO monnaies MtGox. Aucun recours technique n’est possible Le principe du programme DAO était relativement simple : dès lors que le tiers dit « de confiance » n’est plus capable recevoir de divers utilisateurs des dons destinés à un autre utilisateur, puis transférer à l’utilisateur final ces dons de restituer les clés secrètes des clients. FLORI Jean-Pierre quand celui-ci en fait la demande (c’est une forme de ca- La sécurité d’Ethereum gnotte virtuelle).

Ethereum utilise la blockchain de la même façon que Le code du programme peut être simplifié et ramené à bitcoin : des utilisateurs proposent d’ajouter des transac- deux fonctions : tions et celles-ci sont regroupées en blocs par des mi- l « donate (address) », qui enregistre le fait que la quantité neurs qui vérifient la validité des transactions et cherchent de crypto-monnaie renseignée lors de l’appel de fonc- ensuite à résoudre un puzzle cryptographique pour ajou- tion est maintenant associée à l’adresse (address) dans ter officiellement le nouveau bloc à la chaîne. Tandis que un tableau interne au programme DAO ; bitcoin utilisait un langage de script simple de transfert l « withdraw (amount) », qui permet à un utilisateur de de- monétaire, Ethereum permet d’utiliser un langage de mander au programme DAO de lui reverser une [certaine] script Turing-complet, et ainsi de déployer un « ordina- quantité (amount) de crypto-monnaie. teur-monde ». Chaque « transaction » permet de créer ou d’exécuter un programme de façon distribuée entre tous Malheureusement, la syntaxe utilisée par le programme les mineurs. Cette richesse s’accompagne malheureuse- DAO avait la propriété d’appeler la fonction de « callback » ment de l’introduction de nouveaux problèmes de sécuri- du programme appelant. Ainsi, un utilisateur malveillant té, qui ne sont plus d’ordre cryptographique mais d’ordre pouvait écrire un programme demandant le retrait d’une informatique et qui concernent la sûreté des langages de somme légitime en appelant « withdraw », dont la fonction programmation. de « callback » émettait un appel similaire permettant de récupérer deux fois la somme due, tirant ainsi profit d’un Ethereum Virtual Machine et Solidity « bug » dans le programme originel. Les données stockées sur la blockchain permettent de dé- terminer l’état courant de l’Ethereum Virtual Machine, une Conclusion machine virtuelle complètement distribuée. À chaque uti- Les aspects sécuritaires des blockchains et de leurs ap- lisateur, mais aussi à chaque programme stocké dans la plications sont nombreux et une faille à n’importe quel blockchain, est associée une variable « balance » représen- niveau de la chaîne peut avoir des conséquences catas- tant la quantité de crypto-monnaie en sa « possession ». trophiques. Avant de parvenir à un niveau de maturité et Afin de faciliter la conception des programmes destinés de confiance permettant des applications critiques, de à être déployés sur l’Ethereum Virtual Machine (EVM), nombreuses innovations sont encore nécessaires.

RÉALITÉS INDUSTRIELLES - AOÛT 2017 101 La (ou les) blockchain(s), une réponse technologique à la crise de confiance

Par Arnaud MANAS Ingénieur, docteur en économie et en histoire, chercheur associé à l’Université de Paris I – Sorbonne (IDHES) et Yoram BOSC-HADDAD Spécialiste de la gouvernance des initiatives émergentes et du pilotage économique

LES OPPORTUNITÉS, LES ENJEUX LES OPPORTUNITÉS, Dans sa forme canonique, la blockchain est un refus des tiers de confiance. Cette technologie repose sur une posture idéologique qui n’est pas exempte de populisme. Ce refus des institu- tions établies s’explique en partie par la crise de confiance que traversent les sociétés modernes. Le solutionnisme technologique qui voudrait établir la confiance par algorithmes, sans ancrage social ou juridique, est illusoire. Compte tenu des coûts et des risques, l’usage de la blockchain canonique (sans tiers de confiance) présente peu d’intérêt en dehors d’un nombre limité de do- maines. En revanche, la mise en œuvre des technologies blockchain par des institutions déposi- taires de confiance, à l’intérieur d’un cadre juridique et social, paraît promise à un bel avenir. Mais seule une veille active permettra à ses acteurs d’en bénéficier pleinement.

Introduction traditionnels et les technologies blockchain. Celle-ci per- mettra de surmonter la crise de confiance que traversent Créer un cadastre dans l’ancienne République « très très les sociétés modernes et d’offrir de nouvelles opportuni- démocratique » du Gondwana après le départ de son tés technologiques. président-fondateur ne serait probablement pas tâche aisée. Dans ce pays (imaginaire) bien connu pour sa cor- Crise de confiance des sociétés ruption, la transposition d’une administration « à l’occi- modernes et solutionnisme dentale » serait probablement vouée à l’échec. En effet, technologique les cadastres classiques sont coûteux, peu efficaces, peu résistants à la corruption et leur fonctionnement est rela- La blockchain, assemblage habile de protocoles et de tivement opaque. De plus, ils n’ont pas effectué leur mue primitives cryptographiques adossées à Internet, appa- technologique post-Internet. raît comme une solution idéale moderne au problème de la confiance. Les solutions sociales (publicité foncière, Pour d’aucuns, la « révolution de la blockchain » permettrait dépositaires, banques centrales…) qui ont été élaborées sans nul doute de résoudre le problème. La solution serait par le passé semblent doublement critiquables au nom de de créer un wiki-cadastre transparent et certifié par la l’efficacité et de la perte de confiance dans les institutions. communauté informatique mondiale reposant sur la blockchain canonique respectant les cinq critères de Ca- Il faut reconnaître que les institutions en place sont sou- seau-Soudoplatoff (1). Ainsi, le Gondwana disposerait d’un vent conservatrices et lentes à profiter des innovations cadastre moderne sans infrastructure étatique ni tiers de technologiques. De même, la perte de confiance est un confiance, et ce, pour un faible coût. phénomène bien réel. Comme le montrent Yann Algan et Pierre Cahuc (2), une méfiance croissante gagne les pays Cependant, un tel projet issu du solutionnisme techno- logique et sans lien avec la réalité sociale risquerait de finir comme un « éléphant blanc 2.0 ». L’acceptation et (1) CASEAU Y. & SOUDOPLATOFF S., « La Blockchain, ou la la diffusion de la blockchain repose sur la confiance. Or, confiance distribuée », Fondapol.org, 2016. cette dernière ne peut être réduite à un algorithme. Une (2) ALGAN Y. & CAHUC P., La Société de défiance : comment le hybridation est donc nécessaire entre les mécanismes modèle social français s’autodétruit, ENS, 2007.

102 RÉALITÉS INDUSTRIELLES - AOÛT 2017 la Ruéeversl’OrduXIX l’imaginaire historiquedesmineursd’orindividualistesde reposemodernes surunelogiqueanarcho-libertaire etsur nologique àlacrisedeconfiancequiminelessociétés renaissance d’uncertainpopulisme.Cetteréponsetech t recours faceàdesinstitutionsdiscréditées.Soncarac- Après lebitcoin,la lible ridique. Latechnologiedelamonnaiefiduciaire estfail son fondement essentiel estledroit etlaconstruction ju par des crises. Elle repose sur des technologies La monnaieestunelenteconstructionsociale probablement cellequirepose leplussurlaconfiance. Parmi lesinstitutionssociales,lamonnaiefiduciaire est Un détourparlamonnaie rique présentedesrisques. ment parleurintérêtindividuel. Cette approche anhisto par une communauté immatérielle d’individus mus seule- confiance (droits etdevoirs) aunomdel’intérêtgénéral placer desindividusouinstitutionsdépositaires dela Dans saformecanonique,la anonyme deconfiance seau « lequel, dansunecertainemesure, les« période desannées l’État des libertariens et du communautarisme « mateurs etlesinstitutions lièrement accentué ce divorce entre les citoyens-consom financière de2008etl’affaire Snowdende2013ontsingu occidentaux, etplusparticulièrement laFrance.Lacrise et Facebook. Les deux sont nés de l’Internet socialsur et Facebook.Lesdeuxsontnésdel’Internet breux esprits, il existe un parallélisme entre la du systèmesontdifficilesàappréhender. Dansdenom religieuse dans la mesure où les protocoles et l’économie blockchain. Cetteconfiances’apparente àunefoiquasi informatiques etdanslatechnologiealgorithmiquede titutions va de pair avec une confiance dans les systèmes Paradoxalement, la défiance enversles individus etlesins largement retombés dansl’oubliaveclaguerre. piré unelittérature considérable. Cesmécanismessont tampillage, quiontvulejouràcetteépoque,avaientins (WIR et avecla sont passansprésentercertainsparallèlesaveclebitcoin breuses initiativesdansledomainedelamonnaiequine philique lice, quipoursuiventlesfaussaires. Àl’opposé,lebitcoin réprime le faux-monnayage, et grâce aux services de po- niveau socialementacceptable grâceauCodepénal,qui n’éliminera les contrefacteurs. Néanmoins, il reste à un nique, qu’ellesoittypographique, papetière ouautre, seulement – privésproduirait delavertupublique.Elles’opposenon d’une visionoùlaconjonctiond’intérêts–voire devices Il estintéressant denoterque,manière analogue, la confiance etdelarégulationparledroit. rêt public,maisaussiauxmécanismestraditionnelsdela ère «

(3) : lefaux-monnayageestune réalitéetaucunetech

antisystème

etexpériencedeWörgl likent

», la blockchain. Enparticulier, lamonnaiefondante à l’Étatetlaconceptionrégaliennedel’inté » une transaction, créant ainsi une « est l’incarnation contemporaine blockchain estl’incarnation

» et«

1930 avaitvuse blockchain estapparuecommeun

».

e anti siècle.Àlacroisée durefus de

: «

- Trust no blockchain propose derem establishment (4) ) etlatechniquedel’es développerdenom one

amis ».

» répondàla

blockchain » d’unré

multitude éprouvée

techno , mais ------té etderesponsabilité. d’endos qui crée unechaîne ininterrompue de transferts de proprié même, onpeuttrouverunparallèle entrela technologie deconfiancequ’était lalettrederecommandation.De tème denotationn’ontfaitquereprendre etmoderniserl’ancienne (8) Ilestintéressantdenoterqu’Airbnb oueBayavecleursys (7) HIRSCHMANA.,Bonheurprivé,actionpublique , Fayard. on-the-original-chain-here-s-why-1469038808/ jecting-today-s-hard-fork-the-ethereum-classic-project-continues- et https://bitcoinmagazine.com/articles/re (6) Ethereum Wikipedia (5) VONHAYEK F., Scientismeetsciencessociales,Plon,1953. Une-solution-pour-des-temps-de-crise_a29371.html perience-de-monnaie-fondante-de-Worgl-a-pris-fin-il-y-a-75-ans- (4) Voir surWörglethttp://www.alterinfo.net/L-ex l’articleWikipedia mique-wir-une-monnaie-suisse-depuis-1934 (3) réinventées retrouveront desformesdeconfiance ce cas,lecyclefinirapars’inverseretdesinstitutions sphère privéeaccompagnédedéfiancesociale.Dans engagementpublicetreplisociétés alternent versla les objetsressemblent àdesclous ment deleurutilitémarginale descendante d’un cycle d’Hirschman sieurs dizaines d’années correspond peut-être àlaphase Ce mouvementdedéfiancequisembleclairdepuisplu bancaire etinstitutionnel,surunrefus du L’essor dubitcoinrepose en partie sur le « La formule« de responsabilité illimitée danslatechnologie.CommelesouligneHayek construit endehorsdel’Étatetprofesse uneconfiance est l l les institutionssenourritdetrois sources Dans lecadre denotre propos, lacrisedeconfiancedans Faire confianceaudarwinisme et aspirationsmodernes entre monopolesinstitutionnels pour répondre àlatension croissante Des opportunitéstechnologiques mieux répondre àlaquestion posée. à lafoissociales,juridiquesettechnologiques pourraient que d’autres mécanismes mixtes alliant des dimensions blème àlarecherche exclusived’unalgorithme,alors une manifestationdusolutionnismequiréduittoutpro l’intérêt suscitéparlatechnologiedeblockchainsoit leuse. Lafoiaveugleenlatechnologieposeunproblème la conceptionapriorideconstructionssocialesestpéril n’est véritablementresponsable niencharge delalutte plus largement possiblelesnouveauxoutils indépendam qui partduconstatqu’ilestnaturel devouloirutiliserle Enfin, ilestprimordial d’éviterl’écueildusolutionnisme

les institutionsensituationdemonopoledr la transparence etdupeer-to-peer. gard desaspirationsdelasociétél’immédiateté, sont souventdestiersdeconfianceinefficacesau re notables (comme les actes authentiques électroniques) fait, malgrédesaméliorationsetmodernisations nien son émergence soixante-huitarde et son ancrage califor porteengermeunevisionlibertariennereflétantInternet

http://www.alpesolidaires.org/le-cercle-de-cooperation-econo

; RÉALITÉS INDUSTRIELLES - AOÛT 2017

Code islaw

: siun casse le système, personne hacker casselesystème,personne

» esttrompeuse

: «

pour unmarteau,tous

» (7) . Ilsepourraitque blockchain etlasuite , selon lequel les «

:

système , àcetégard.

dégagisme oit oude (8)

. ». 103 (5) (6)

» ------. ,

Arnaud MANAS et Yoram BOSC-HADDAD Paradoxalement, la multiplication des transactions dé- En revanche, le rythme d’émergence des modèles écono- sintermédiées, au sens classique, mais passant par des miques viables nous semble encore très incertain. plateformes de « confiance » (dont BlaBlacar et Airbnb sont des archétypes) éduquent le consommateur digital Des impératifs prospectifs pour à prendre des risques si la valeur perçue lui semble suffi- les institutionnels, pour les opérateurs sante et si les commentaires sont globalement favorables. installés et pour les start-ups Cette crise et l’espoir de profits élevésà terme conduisent qui veulent durer à un foisonnement d’initiatives et d’investissements pour Dans cet environnement, les stratégies extrêmes sont très répondre à travers la blockchain à des problématiques de risquées, et ce, pour tous les acteurs : transactions C2C, et, par diffusion, B2B ou pourquoi pas

X2Y2Z. l Attendre, c’est prendre le risque de passer à côté d’une disruption réelle ou de continuer à investir massivement Il y a probablement une bulle comparable à l’explosion dans une infrastructure dont la valeur peut chuter bruta- de l’Internet dans les années 1990 : au minimum ce sont lement ; 80 % des start-ups de la blockchain qui vont mourir (9). l Tout miser sur la blockchain, c’est combiner risque tech- Mais « l’exaptation » – c’est-à-dire le fait qu’un caractère nologique et risque financier, sauf, bien sûr, pour les sélectionné, au sens darwinien, par un bénéfice initial -fi start-ups et leurs investisseurs, qui viseraient de « pivo- nisse par prospérer sur d’autres bases – nous semble un ter (12) » en se revendant rapidement à un consortium ins- scénario plus probable que l’extinction dans l’œuf. titutionnel.

LES OPPORTUNITÉS, LES ENJEUX LES OPPORTUNITÉS, Les technologies blockchain plutôt que la blockchain Il est préférable, dans une logique prospective, de se don- Nous considérons que les freins que sont la vulnérabilité, ner les moyens, d’une part, d’une veille active pour com- la puissance de calcul, les besoins en énergie, l’absence prendre en profondeur le sujet et, d’autre part, de l’appren- de gouvernance et les conséquences négatives en termes tissage par l’expérimentation focalisée et répétée pour se d’emploi (10) vont limiter les « vraies » blockchains à peu de confronter à un monde réel, lui-même en mouvement. cas se situant souvent en marge de la légalité. Nous pen- En particulier : sons, en revanche, que les composantes technologiques

de la blockchain vont permettre, à terme et à une échelle l pour les institutions, il s’agira d’embrasser les besoins large, de reconstruire des infrastructures de transaction et de transparence et de vitesse en ayant des stratégies de partage à moindre coût, et ce, avec des performances de couverture permettant de contrôler (si possible) les très supérieures, en termes : émergences sur les points de faiblesse ;

l pour les start-ups qui veulent durer, il nous semble im- l d’automatisation (par exemple, agent de transfert pour portant de cristalliser leur essence comme fournisseurs l’échange de parts de fonds (11) ou les crédits documen- de briques de savoir-faire technologique ou comme taires) ; créateurs/développeurs de nouveaux usages ; l de temps de latence pour l’enregistrement (de quelques l pour tous, il nous semble essentiel de favoriser la créa- mois aujourd’hui, pour la publicité foncière, à quelques tion de consortiums d’expérimentation confrontant ces millisecondes, demain, avec un contrat automatique) ; logiques, et d’incubateurs verticaux qui soient des creu- l et, sans doute encore davantage, d’accès transparent et sets d’émulation et de raffinement des savoirs sur les immédiat à une information authentifiée. usages des technologies blockchain. Ignorer le foisonnement créatif (ou, pire, le combattre) serait donc prendre le risque de passer à côté du potentiel élevé Conclusion d’innovation des briques technologiques de la blockchain. Au vœux de Jean-Paul Delahaye : « Imaginez […] un C’est dans ce sens que nous interprétons, par exemple, très grand cahier que librement et gratuitement tout le le projet Hyperledger (Linux Foundation) ou l’approche monde puisse lire, sur lequel chacun puisse écrire, mais d’Ethereum. qui soit impossible à modifier et indestructible (13) ! », on peut ajouter : « Imaginez des gardiens du registre dépo- Les scénarios plausibles sitaires d’une mission d’intérêt général, responsables de- Entre le tiers de confiance « canal historique » lent, opa- vant la Loi et la société (14), chargés de l’interprétation des que et inefficace, et le « machin » distribué anonyme dans le darkWeb, il y a de la place pour des tiers de confiance réinventés. (9) MOUGAYAR W. : http://www.ibtimes.co.uk/ethereums-wil- Des consortiums vont probablement émerger pour pro- liam-mougayar-successful-ico-not-indicative-success-ico-1607859 poser des solutions hybrides, à l’instar de ce qui s’est fait (10) TAPSCOTT in McKINSEY, May 2016, How blockchains could change the world. par le passé pour les systèmes de paiement ou de com- (11) Les Échos, « Gestion d’Actif », 4 avril 2017, SCHAFROTH E., pensation, mais, cette fois, sans opérateurs centralisés, « La Blockchain s’invite dans la gestion d’actif ». avec une approche du tiers de confiance très différente (12) Au sens lean start-up. et des solutions ouvertes et transparentes (à l’instar de ce (13) DELAHAYE Jean-Paul, « Les Blockchains, clé d’un nouveau monde », in Mathématiques et mystères, Belin, 2016, p. 40 qu’est un Blablacar ou un Airbnb par rapport à une chaîne (14) Le faux en écritures publiques ou authentiques est puni de 10 d’hôtels ou à un transporteur public). ans de prison, contre 3 ans pour un faux « ordinaire ».

104 RÉALITÉS INDUSTRIELLES - AOÛT 2017 règles ! ». que les algorithmes règleront tout est illu- ou des institutions insérés dans la société, le meilleur des soire, car l’expertise juridique et la responsabilité sociétale deux mondes est possible. sont nécessaires chez des dépositaires de confiance. Laissons donc manches de lustrine, registres jalousement Est-il vraiment nécessaire de choisir entre le dépositaire conservés et refus idéologique des tiers de confiance. de confiance« à l’ancienne » et la blockchain moderne Préparons-nous à créer un ensemble de technologies informatisée reposant sur une communauté immatérielle et de concepts alliant confiance sociale et algorithmique anonyme ? pour réaliser, avec une signature digitale, des partages En alliant la technologie du registre signé, transparent et horizontaux et transparents, en toute responsabilité et à accessible sans coût à la confiance envers des individus la vitesse d’Internet. Arnaud MANAS et Yoram BOSC-HADDAD Arnaud MANAS et Yoram

RÉALITÉS INDUSTRIELLES - AOÛT 2017 105 Un nouvel outil numérique pour la fiabilisation des supply chains : la blockchain

Par Matthieu HUG Serial entrepreneur, cofondateur et CEO de Tilkal

Les registres numériques distribués (blockchains) promettent de réinventer la confiance en ren- dant possibles des systèmes de notariat désintermédiés et décentralisés. Leur application à l’in- dustrie financière, largement étudiée et commentée, pourrait modifier nos systèmes d’échanges LES OPPORTUNITÉS, LES ENJEUX LES OPPORTUNITÉS, basés sur des tiers de confiance. D’autres applications de ces technologies visent, quant à elles, non pas simplement à se subs- tituer aux mécanismes de confiance existants, mais bien à établir de la confiance là où celle-ci fait défaut. Une application ayant un intérêt sanitaire majeur est l’assurance de la traçabilité des produits de bout en bout, depuis le fabricant jusqu’au consommateur : d’abord pour fournir au consommateur la transparence qu’il réclame sur ce qu’il consomme, et la conformité, dont il veut pouvoir juger, par rapport à ses critères de santé ou d’éthique. Ensuite pour lutter contre l’incroyable croissance de toutes les formes de contrefaçon, qui touchent toutes les industries, du médicament aux aliments pour nourrissons, en passant par les pièces automobiles.

epuis quelques années, les différentes formes de années. Plusieurs éléments expliquent cette situation : commerce illicite (contrefaçon et « marchés gris ») l l’essor du e-commerce (en particulier, des places de sont devenues la première manifestation de crimi- D marché) a facilité l’écoulement des produits détournés nalité mondiale, avec un « chiffre d’affaires » de l’ordre ou falsifiés, générant une forte demande d’approvision- de 1 000 milliards de dollars (qui les place bien avant le nement en amont ; trafic de drogue). Ce que l’on croit cantonné au luxe dans l cet appel d’air sur la distribution en ligne a favorisé la struc- l’imaginaire collectif européen concerne en réalité toutes turation d’une véritable chaîne d’approvisionnement illicite les industries : du médicament aux pièces détachées au- à l’échelle globale, couvrant les matières premières, la fa- tomobiles, du lait pour enfants aux sachets de parmesan, brication, la vente en gros, les transports ou la logistique ; des téléphones portables aux batteries, des jouets au vin l ces supply chains illicites sont massivement inter- et aux huîtres. Concrètement, à eux seuls, les médica- connectées aux supply chains légitimes, échangeant, ments contrefaits tuent 700 000 personnes dans le monde mélangeant, substituant des produits à tous les niveaux chaque année (par comparaison, le SIDA a fait 1,1 million et à toutes les étapes ; de victimes en 2015). Ainsi, la traçabilité des produits et l l’ampleur du trafic illicite : avec 1 000 milliards d’euros en des biens est devenue un enjeu global de santé et de sé- jeu, ceux qui s’y livrent ont globalement plus de moyens curité publique. financiers pour l’organiser qu’aucun industriel seul n’en Si le risque reste pour l’instant relativement maîtrisé en Eu- a pour les contrer. Ainsi, lorsqu'en 2013, 28 laboratoires rope occidentale, ce fléau est devenu dramatique ailleurs pharmaceutiques mondiaux lancent le financement sur dans le monde : l’organisme algérien de protection des 3 ans d’un programme de lutte avec Interpol, il s’agit de marques déposées (Inapi) estime que 80 % des produits 5,9 millions de dollars, résultant de la saisie de faux mé- en vente dans ce pays sont des faux. Selon le laboratoire dicaments pour 81 millions de dollars en 2015 (à compa- rer à un marché global du faux médicament de probable- pharmaceutique Lilly, ce sont plus de 90 % des médi- ment 150 à 200 milliards de dollars…). caments vendus en ligne qui relèveraient du commerce illicite. Et cette situation s’aggrave rapidement : globale- En bout de chaîne, l’exigence grandissante de transpa- ment, les contrefaçons et les marchés illicites ont connu rence de la part des consommateurs est donc largement une croissance d’un facteur 10 au cours des 10 dernières justifiée.

106 RÉALITÉS INDUSTRIELLES - AOÛT 2017 fiabilité desdonnées. rantissant laconfidentialité. Enfin, il cela pose une question évidente non seulement il de confidentialité, mais ausside transparence. Ensuite, activité intervenant doit partager des informations relatives à son confiance, ausenslarge duterme. Tout d’abord, chaque Au-delà, elleposesurtoutdesquestionscomplexesde de volumétrie d’information et de performance d’accès. questions techniquesévidentes,maispasinsolubles, La mise en des zonesgéographiquesnonautorisées. des reconditionnements anormaux, voire des ventes dans permet dedétecterentempsréeldesproduits inconnus, a là, d’ores et déjà, un mécanisme simple et unitaire qui tutif del’identiténumériqueduproduit un événementdela un QRcode).Cettelecture enboutdechaîneestsoi puyant sur le marquage unique du produit (par exemple, lue parunconsommateur(avec de chaîne,l’identiténumériqueainsiconstituéepeutêtre mise surpalette,sontransportenconteneur, etc.).Enbout origine, ses conditions de fabrication ou de stockage, sa son utilisationfinale l l peut espérer réaliserdeuxavancéesimportantes aveugles Cette rupture delachaînedesinformationsnousrend éventuel ses conditionsdetransport,sonlieuventeou produit, qu’ils’agissedesalocalisationàuninstant connaissance consolidéeetfiableducycledevieréeld’un en clair, il n’existe dans pratiquement aucuneindustrie de pés etmêmemultipliés.Maisalorsqueles quage physiquedesproduits etdesbienssesontdévelop l’évidence, étédéficientes.Certes,lesdispositifsdemar de fiabilisationdeschaînesindustrielleslégitimesont, tion deproduits issusdeschaînesillicites,lesapproches Face àl’utilisationdunumériquepourglobaliserladistribu- Établir lacontinuitédel’information donc consolidersanscentraliser, etpartager toutenga rattaques etdepiratages,compte tenudesenjeux.Ilfaut mation centraliséeseraitinévitablement lacibledecybe étape desa les actionseffectuées sur celui-cisontdéclaréesàchaque À partird’uneidentificationuniqueopposéesurleproduit, tifs demarquage restent confinéesàchaqueintervenant se sontglobalisées,lesinformationsissuesdecesdisposi-

une analysestatistique,grâceàdesalgorithmesspé la créationd’ authentification fortedesproduits identité numériquecréelesconditionsd’unevéritable et denature différente dumarquage physique,cette tuée desoncyclevieconsolidé. tionnement delachaîned’approvisionnement. trafics illicites ou des sources d’amélioration du fonc- détecter lesanomalies,quecesoientdesindicateursde cialisés, del’ensembledescyclesviepermettant y

a unrisquegraved’effet «

: reconditionnement). (repackaging

: ellepermetlestraficsillicites.Enlapalliant,on supply chain,depuissaproduction jusqu’à œuvre d’une telle plateforme pose des une identiténumériqueduproduit consti

supply chainquiestluiaussiconsti (par exemple

pot demiel

, saprovenance, son ;

smartphone) ens’ap- y

Étant indépendante a laquestionde

: onvoitquel’on

supply chains »

: uneinfor

:

T, de à

------:

riations (parfoisinterdépendantes) sontpossibles À partirdecesdeuxpointsvue,nombreuses va plus hautniveau. une surfaced’attaqueplusfaiblequedesprotocoles de logicielle de plusbasniveaudansunréseau, offrant ainsi nisation dedonnéesopérantdirectement surlacouche technologie cipants. D’unpointdevuetechnique,onpeutaussivoirla canisme deconsensusappliquépartouslesautres parti- en mêmetempstouslesblocsultérieursettromper lemé transactions qu’ilcontient le tempsetinterdit leurmodificationultérieure qui enregistre des transactions séquentiellement dans peut être vuecommeunebasededonnéesdistribuée D’un pointdevuefonctionnel,latechnologie supply chains gie peut-elle être utilisée à bon escient dans le cadre des numérique décentralisé(blockchain).Maiscettetechnolo centralisée amènentnaturellement àl’idéed’unregistre Les questionsdeconfidentialitéetconsolidationdé Pourquoi lablockchain des algorithme deconsensusplussimplequedanslecas dite « voire lesinstitutionnels.Ilvadoncs’agird’une seurs, lesindustriels, les transporteurs, les distributeurs, - typiquementlesfournis de lasupplychainconcernée, et identifiésindividuellement numérique distribué et privéàdeuxfins Dans lecasdes La miseenœuvre (et l’onpeut)établirceconsensusdeconfiance. savoir autour de quelle information, précisément, l’on veut un coût« peut servirde« repose sur deux piliers gistre est partagé entre des nœuds qui sont tous connus ment constituantl’identité numérique duproduit. Ce re grâce àcelles-ci,l’origineetlecontenudechaqueélé seau decollected’informationsetprouver ultérieurement, difficile pants auregistre. Unefoisvalidé,unblocdevient vite très validation, par consensus de tout ou partie des partici- férence explicitementleprécédent,puisilestsoumisà rement, ungroupe detransactionsestcréé,cebloc ré l’établissement d’uneconfianceconsensuelle.Celle-ci posant technologique qui rend un service précis, à savoir Dans touslescas,onvoitquela en fonctionduproblème quel’oncherche àrésoudre. non, etc.Lesconfigurationschoisiesvarientnaturellement privé auxdonnéeséchangées,celles-ciétantchiffrées ou ou limitéeàdesmembres pré-identifiés,accèspublicou nismes deconsensus,participationouverteauconsensus nant delasupplychainsefaitlocalement,ausein son La collectedesinformations auprèsdechaqueinterve mances bienmeilleures qu’aveccesdernières). blockchains publiques(etdoncbénéficier deperfor

à permission»pourlaquelleonpeutappliquerun à

raisonnable modifier, etilenvademêmepourtoutesles RÉALITÉS INDUSTRIELLES - AOÛT 2017 blockchain commeunprotocole desynchro et,sioui,comment

preuve supply chains,onvautiliserunregistre

». Laquestioncrucialeestalorsde

») et

: sa

: ilfaudraitpourcelamodifier son inaltérabilitéentouscasà non-répudiabilité (la donnée

: cesontlesintervenants

blockchain estuncom ?

?

: organiser unré blockchain blockchain

: réguliè

:

méca- 107 ------

Matthieu HUG système d’information, via un nœud packagé avec une existent, mais dépassent le cadre de cet article. Au-delà couche d’API (interface de programmation applicative) : des tests initiaux, la question désormais posée est celle l’information est ensuite recopiée par le protocole sur de l’utilisation de cette brique technologique, en conjonc- chaque nœud du réseau. Les nœuds du réseau apparte- tion avec d’autres, pour résoudre des problèmes se po- nant a priori à différents acteurs industriels, chaque infor- sant à une échelle industrielle. mation est chiffrée avec une clé propre à chaque nœud afin d’assurer la confidentialité. Conclusion

On utilise ainsi la blockchain pour créer la confiance sur Les technologies de registre numérique distribué, ou deux dimensions : l’origine de l’information et son inal- blockchain, apportent une brique de confiance. L’ap- térabilité (son intégrité dans le temps). La confidentialité proche envisagée ici n’est pas de chercher à utiliser de l’information est gérée par des mécanismes de chif- une technologie pour forcer la confiance entre les par- frement avancés en amont de la blockchain. La scalabi- ticipants à la blockchain, ni même pour avoir confiance lité de l’accès aux données ainsi que leur consolidation dans les données qu’ils déclarent dans la blockchain : et leur agrégation statistique sont, quant à elles, gérées cela reviendrait à résoudre à l’avance le problème posé. en aval sur des données extraites de la blockchain, mais Dans ce contexte, on crée les conditions pour que les in- qui référencent celle-ci. À aucun moment ne se pose la formations ne soient pas altérées : l’intégrité des données, question de la véracité des informations entrées dans leur quasi immutabilité, est au cœur de la confiance ga- le registre par les intervenants : une information fausse rantie par le registre numérique distribué. Grâce à cette reste une information qu’il est fondamental de capturer. immutabilité, on peut utiliser des algorithmes d’analyse

LES OPPORTUNITÉS, LES ENJEUX LES OPPORTUNITÉS, C’est l’analyse de la supply chain à partir des informations des cycles de vie des produits tels que déclarés par les fournies par les intervenants, que celles-ci soient vraies intervenants d’une supply chain et y détecter des signaux ou fausses, qui permettra de détecter les « faux » et de les faibles caractéristiques d’anomalies, quelle qu’en soit corriger. De fait, l’objectif n’est pas de constituer un re- la nature (dysfonctionnement, malveillance, irrégularité, gistre d’informations « vraies » : cela n’aurait aucun sens, non-qualité, etc.). On génère ainsi une boucle de rétroac- car cela présupposerait que toutes les malveillances et tion permettant de responsabiliser chaque intervenant et, toutes les erreurs auraient été résolues, et donc que le in fine, de fiabiliser le fonctionnement des supply chains. problème initial des supply chains décrit plus haut l’au- C’est une logique d’amélioration continue similaire à une rait été également. L’objectif est de constituer un registre approche de type lean manufacturing qui est ainsi mise d’informations qui ne soient pas modifiables afin d’être en en place, mais à l’échelle d’une filière industrielle. Cette mesure, en les analysant, de détecter des problèmes et amélioration continue établit les conditions de la transpa- d’établir une boucle de rétroaction transparente, laquelle, rence, base d’un nouveau contrat de confiance avec le progressivement, fiabilisera l’ensemble de lasupply chain consommateur. en responsabilisant chacun des intervenants. Ce mécanisme est notablement évolutif : il n’est pas né- Références bibliographiques (en ligne) cessaire que tous les intervenants de la supply chain four- Eli Lilly & Co, Integrated Report 2015, Part Operating Re- nissent de l’information, puisque même une vue partielle sponsibly. permettra d’amorcer la boucle de rétroaction. En outre, un nouvel intervenant qui se connecte au système n’a http://fightthefakes.org qu’à déployer son nœud : une fois celui-ci autorisé dans International Chamber of Commerce. le réseau, le protocole blockchain assurera sa synchro- nisation avec le reste du réseau. Chaque nouvel interve- OCDE, Trade in Counterfeit and Pirated Goods: Mapping nant connecté au réseau augmente à la fois la sécurité the Economic Impact, 2016. du réseau, la transparence globale et la pertinence de la Europe & UN-OHIM, 2015 Situation Report on Counter- rétroaction. La blockchain est donc un mécanisme propre feiting in the European Union, April 2015. à unir progressivement des acteurs industriels ayant à la fois des intérêts et des valeurs en commun. 2016, KPMG and AGMA, Gray Markets Report. D’autres points sont à traiter pour un déploiement indus- ONUDC, Le Trafic illicite de biens contrefaits et la crimi- triel de la blockchain, notamment l’archivage des don- nalité transnationale organisée, 2014 : http://www.unodc. nées ou encore le cadre juridique (en particulier en ce org/documents/counterfeit/FocusSheet/Counterfeit_fo- qui concerne les données personnelles). Des réponses cussheet_FR_HIRES.pdf

108 RÉALITÉS INDUSTRIELLES - AOÛT 2017 Rotterdam SchoolofManagementandCopenhagenBusiness By Louis-FrançoisPAU the evolution Smart businessnetworks: or otherformsofbusinessarrangements. SmartBusiness “better” results thanother, lesssmartbusinessnetworks Smartness isaproperty whereby thenetworkcancreate networks” istherefore notanabsolutebutarelative term. being short-lived.Theword “smart”in“smartbusiness tation withfashionableand distinguished,butalsoof “better thanusual”businessresults. “Smart”hasaconno thought ofasinnovative.Smartactionscreate remarkable, attributed to an action that is novel and different, hence are necessary. Inmanagement,theadjective“smart”is All three words inthetitle“smartbusinessnetworks” tor executionofbusinessprocesses. they alsocontrol, orown,thebusinesslogicformulti-ac these capabilitiestogether, andmaketheseplayinunison; capabilities from many business network actors, plug and quickdisconnectcapabilities;theycanpickthebest Business networksthatare “smart”,displayquickconnect logistic networks between these actors using shared communication and nomic outcomesfrom quickly (re-)configuring links communication network development, andembeddingtheseinsidetheunderlying raction protocols andtransactions betweenpartiestothe siness processes, toreplace itwithasynchronous inte reshuffle theverynotion oflinearpaths(orgraphs)inbu A (SBN). To address thetwoaboveparadigms, hasbeendefinedtheconceptof“SmartBusinessNetwork” velops overtime. or partsofthesameinitialtransaction,thusbuildinganetworkbusinessrelations whichde partners. Newtransactionscanbecreated withthesameorotherpartners,bycascadingwhole ly inanelectronic commerce context,buttheeconomic valueaccruesalready thenforboth Conversely, alonetransactionbetweentwobusinesspartnersrarely standsisolated,especial value). prove theutilityofinformationinmultipleways(thatissynonymouswithcreating economic information networkaugmentedbyformalizedbusinessrelationships canbe“smart”;itim but business-wisetheyare “dumb”pipesthattransportinformationwithoutenhancingit.An bute, store, assemble, or modify information). Transmission networks are technically complex, The intelligence of an information network is augmented by its functionality (its ability to distri dynamic andunpredictable way, creating eco- people andorganizations, boundtogetherina Business Network is a developing web of Smart [1,2] . Ultimately, smart business networks [3] . - - - - more operationallythefollowing characteristics A “smartbusinessnetwork”(SBN)asdefinedabove,has business network. competitive capabilityistoconstructandmanageasmart can nowgoonestagefurtherandsaythatafundamental cesses bywhichtoselectsuppliersfrom thenetwork.We processes forjoiningor leaving anetwork,andonpro- attention then focuses on managing the network, on the l l l l l networks in order to survive and thrive businesscompetitivenessrequirekets andmodern such them todevelop,butmore significantlybecausemar Networks develop not onlybecause technology permits e linkedtogether as well by ashared ontology e linkedtogetherviaoneormore communica oup ofparticipatingbusinesses-“partners” or“ac The SBNisper The partnersinteractinnovelwaystheycouldnotim Actors ar Actors ar A gr tions maybedifferent; asimpleillustrativecasemetric his ownvalue,evenifindividual overallgoals/utility func ments (SLA’s) ofatemporarynature; of bilateralattributedagreements orservicelevelagree partner discoveryandbysmart networkdynamics is theSBNnetworkbenefit, oftenlinkedtothemutual plement ontheirown,orpossibly withotherparties;this des; tion networksformingthelinks,orlines,betweenno sarily visibletotheoutside; tors” -that form thenodes, and thisgroup isnotneces RÉALITÉS INDUSTRIELLES - AOÛT 2017 ceived byeachparticipantas increasing

[1] . Management [3] :

[4] 109 ; ------

Louis-François PAU LES OPPORTUNITÉS, LES ENJEUX LES OPPORTUNITÉS,

Figure 1: Smart business network at node level, showing the interaction architecture with other partners/nodes, using the interaction networks.

for the utility is the incremental turnover, profit and ca- l electronic CAD networks, where building blocks get as- pacity utilization for each partner when he joins the SBN; sembled with custom blocks, simulated, tested and pro- the basic equilibrium concept providing governance in- totyped; side the SBN is one of a non-cooperative Nash game, l health management insurance networks where specific and not of a collaborative Pareto game. The forces of expertise in a localized way has to be assembled togeth- attraction and repulsion, which generalize the utility, er with service delivery facilities such as clinics; must be measurable between any two partners of the l mass customization services, such as video-on-demand SBN sharing the same ontology; for lack of further data, subscription services, where the customer requests and these forces are set equal to the business outcomes de- their time profile shape the sequence of SLA’s between termined by a simple joint bidding auction; content owners, re-purposing services, transport net- works, and CRM systems [6]; l The SBN is sustainable over some time as a network, [7] l support services for software development ; subject to agreed-upon termination rules; [8] l book routing services for bookshops ; Upload once l The SBN must normally be resilient if one or more bu- for multiple indexing sites; Change inventory pricing for sinesses nodes in the network drop out, disappears, or different services; Create subsets of books for various malfunctions. sites; Add information or web site links to each record; Figure 1 further specifies at the level of a given SBN Check your data for completeness; Save hours per partner, the 3-tiered node architecture, where the second week/month; level is the one linked to other SBN nodes, sharing as well l translation and internationalization services in the UK [9] communications and logistic networks. business . Deployments A case from outsourcing in the high-tech sector Whereas some physical supply networks exhibit the attri- The case is a snapshot of the direct implementation of the butes of smart business networks, already today most of above approach by one of the world’s top management their attributes can be found for example in [5]: consultancies, to cater to a strategic goal, i.e. turn the

l mobile content delivery networks, where quick-connect company “A”, a global high tech systems supplier to the must be done in quasi real-time with content/DRM own- communications & media operator sector, into a systems ers at end user request [3]; and service integrator benefiting from the outsourcing

110 RÉALITÉS INDUSTRIELLES - AOÛT 2017 trend amongst its customers. This goal had to be shared references these same companies were citing. across the other parties in the smart business network, The outcome parameters were (cost, delay, quality) KPI’s before they could possibly join it. in supplying outsourcing contracts to operators as single Case specification but ever changing smart business networks. So far, over 10 joint bids to operators have not lead to questions on More precisely, the case is about designing a smart busi- the methodology, but rather on the goals and organiza- ness network around the field support, installation and tions of the operators. consulting Division of the company “A”, to allow “A” to achieve a significant worldwide market share in com- munications and media distribution network operations Implementation frameworks amongst its worldwide public operator customers, at To realize the three following properties of smart business a time where these customers change their core busi- networks: Louis-François PAU ness; they shift from running networking services to the l quick connect and disconnect between actors; new core business of interconnecting networks they do l pick, plug and play; not want to operate themselves any more. This can only l business network specific business logic. succeed if, on a global scale, “A” can identify, select, use and sever links to a wide diversity of smaller technology Fortunately some open standards developed over the or skills suppliers, many of them only operating in local- last 10 years offer the required tools. They include BPM ized markets, or having de facto only one key customer. process specifications, OMG Model driven architecture Vice-versa, these smaller suppliers find a resilient busi- (with its evolution), open mediating ontologies (such as ness in supplying “A” on a repetitive basis. As the out- SymOntoX), XML specifications, and Web Services [10]. A sourcing opportunities are time-critical, and as “A” wants number of commercial tools also exist, such as e.g. Mic- to leverage its systems know-how (about its own products rosoft BizTalk, IBM WebSphere, BEA WebLogic or Tibco and those of selected other ones), financial terms are in ActiveEnterprise. At the network level, and this was one of effect of secondary importance compared to the ability to the key contributions to smart business networks, the idea bid fast and comprehensively. Very often the track record is to use extensions to the IP signaling protocols (such as of the smaller high tech companies may have been with DIAMETER), by the IEEE P1520 network interface stan- competitors to “A” or with “A”'s own customers without dard, to carry out the asynchronous partner search and any direct connection to “A”. The potential number of matching. BPM protocols between partners have to be partners in the total smart business network is about 500, tailored to a domain, and [3] provides a simple example in with, on a country or regional basis, a minimum of three the form of SNMP Simple Network management protocol, and maximum of about 15. The capabilities mapped out with a payment function and due authorization when the to model the business logic fell into the broad ontological required resources are made available. categories of: skills sets, available staff on short or medi- um term notice, prior systems/product/tools experience, The next frontier: managing incentives and penalty conditions, geographical distance intellectual property rights of pockets of skills sets to the operators’ sites, etc. as smart business networks

Case discussion Today, more and more joint ventures or co-developments The smart business network approach of Section 1 was extend the notion of individual supply transactions to found to be extremely powerful and relevant, first because reach the development of the intellectual property rights of the shear automated exhaustive handling of all possi- (IPR) supporting a joint product or service development; ble partner configurations, with their evolutions over time sometimes even, the above discussed business logic (from known track records into fulfilment horizons on the (Figure 1) becomes an element of the intellectual property outsourcing contracts ) [4]. Next, the possibility for “A”, with of the smart business network. One of the difficulties is help of the consulting company, to tailor the forces of at- that a lot of legal and technical expertise must go into the traction and repulsion between partners (usually via simple crafting of the intellectual property right claims and their look-up tables expressing real capabilities) allowed to se- ownership. At the same time, co-development should not lect efficiently the partners in different bidding situations. be at the expense of development times and of blocking the licensing to third parties. This is especially true in the One drawback was the learning time it took for tradition- case of SME’s who want to offer their IPR to some parties, al management consultants to adapt to this novel way of while needing some from yet other parties. thinking; but actually this time was far less than the time [11] “A”'s sourcing division would have taken to tackle the The Swedish company Upgötva AB has embarked into same volume of analysis. The other drawback was the re- a setting up an IPR brokering platform using basic IPR luctance by some of the 500 possible parties to disclose attributes filled out by the IPR owners, and managing on- some capabilities and track record characteristics; but ac- tologies and matching tools to create smart business net- tually this was never a show-stopper, as information was works. In this way, third parties can discover not just what readily available by indirect channels such as the business IPR is available, but also the complementary needs inside a product or service business network.

RÉALITÉS INDUSTRIELLES - AOÛT 2017 111 Conclusion: risks involved in smart References business networks and some research challenges [1] VERVEST P. H. M., HECK E., PREISS K. & PAU L.-F., “Emergence of smart business networks”, Journal of in- As process events can be linked very quickly, and eco- formation technology (JIT), vol. 19, 2004, pp. 228-233. nomic agents may recompose themselves and/or their ca- [2] VERVEST P. H. M., HECK E., PREISS K. & PAU L.-F., pabilities, the dynamic resource optimization across many “Introduction to smart business networks”, Journal of in- economic agents can become overly complicated. We formation technology (JIT), vol. 19, 2004, pp. 225-227. suggest that some genetic and bio-informatics algorithms may be useful to realize the corresponding attraction-re- [3] PAU L.-F. & VERVEST P. H. M., “Embedding business pulsion selection, and to execute in a distributed way the logic inside communications networks: a network based recalculations of the business benefits inside the shared business process management”, in VERVEST P. H. M., SBN network. HECK E., PRICE K. & PAU L.-F. (Eds.), “Smart business Smartness may emerge spontaneously and not be inten- networks”, Springer Lecture series in Computer Science, tionally designed; and conversely, if designed smartness September 2004, 15 p., www.springer.de/comp/lcs may not deliver its promises, it may enhance some busi- [4] PAU L.-F., “Discovering the dynamics of smart business ness risks. While much theoretical and experimental re- networks”, Computational Management Science, vol. 11, search is still needed to identify the causal relations lead- Issue 4, 2014, pp. 445-458, http://dx.doi.org/10.1007/ ing to smart business network risk formation, some of the s10287-013-0162-x underlying forces are the following [12]: LES OPPORTUNITÉS, LES ENJEUX LES OPPORTUNITÉS, [5] VERVEST P. H. M., HECK E., PREISS K. & PAU L.-F., l Bounded group rationality that limits the actors’ group Smart business networks (Eds.), Springer, Berlin, ISBN: mind sharing in a same way as for individuals; 3-540-22840-3, 2005, 442 p. l Dynamic emergence and decay of key information bro- kers, information creators, and information users. Mea- [6] CHEN H. & PAU L.-F., “Mass Customization in Wire- surement on SBN networks shows that most nodes can less Communication Services: Individual Services and be categorized as one of these three types; Tariffs”, in PILLER F. T. & TSENG M. M. (Eds.), Handbook

l Sometimes lack of agreed upon and transparent confi- of research in mass customization and personalization (in dence, governance, and trust maintenance procedures 2 Volumes: vol. 1: Strategies and Concepts, vol. 2: Ap- inside a SBN; plications and Cases), World Scientific, Singapore, 2010,

l Changing behaviors due to the SBN networking itself; http://www.worldscibooks.com/business/7378. cases have already shown that when a company orga- [7] HEIKKILÄ J., HEIKKILÄ M., LEHMONEN J. & PEKKO- nized itself as a smart business network across business LA S., “Smart ICT support for business networks”, in (5). units, it ultimately disappeared as the entities felt their accountability, initiatives, discipline, focus and expertise [8] http://www.bookrouter.com did not require the same attention as this was “taken [9] http://www.thebigword.com care of by others in the network”;

l What should be the granularity of the operations at each [10] WERTHNER H., FODOR O. & HERZOG M., “Web in- smart business network partner when networked? Too formation extraction and mediation as a basis for smart high granularity leads to overlaps, inefficiencies and con- business networking”, in (5). flicts, while too low granularity reduces innovation and [11] Upgötva AB, Stockholm, Suede. flexibility; the notion discussed here is not the one of modularity in a linearized supply chain, but instead about [12] PAU L.-F., “Smart business networks: interaction-co- the range of the specialized activities at each business ordination aspects and risks”, Business Process Man- partner in a smart business network, which can be for- agement Journal, vol. 18, n°5, pp. 829-843, http://dx.doi. malized by task graph decomposition within a network. org/10.1108/14637151211270180

112 RÉALITÉS INDUSTRIELLES - AOÛT 2017 Blockchains and smart contracts: The technology of trust?

Introduction 2 – Uses and the transformation of business and industry Jean-Pierre Dardayrol 2.1 Le financial sector 1 – Blockchains Distributed register technology: What impact on The blockchain: The concept, techniques, inte- the financial infrastructure? rested parties and uses Alexis Collomb, chair of Finance (Conservatoire national Côme Berbain, assistant manager in Expertise, Agence na- des Arts et Métiers, CNAM), Klara Sok, researcher and tionale de la sécurité des systèmes d’information (ANSSI) doctoral student (CNAM), and Lucas Léger, researcher and doctoral student (CNAM) Blockchains are a fad. This hard-to-ignore word is fre- quently used with varying acceptations! To grasp this new There has been much talk about how distributed register phenomenon, the effort must be made to define it, identify technology, in particular blockchains, will transform the fi- its structural components and check on the relevance of nancial infrastructure. By focusing on payment systems its properties and promises. Given the multitude of exper- and the infrastructure, this article seeks to discover the iments in several branches of the economy, we wonder reasons why parties in the financial sector have been pru- whether the term “blockchain” relevantly applies to cer- dently enthusiastic about this technology. The problems of tain uses. We also wonder about the motivation that leads adopting it and hesitation about doing so are discussed, various parties to take interest in this phenomenon. Far in particular the presupposition of a new paradigm, “coo- from being merely technical, the fundamental issues of petition”. A concise inventory of recent initiatives by pay- blockchain technology have to do with organization and ment institutions, banks (in particular central banks) and governance, with the finding of solutions for trustworthy international institutions explores this technology’s possi- transactions among human beings. In this sense, this new bilities, in particular that of putting it into production. The technology has a part in the digital transition in several prospects… areas, especially the legal professions. Blockchains, the Bank of France and the ACPR The economic stakes of blockchains Nathalie Beaudemoulin, coordinator of Pôle FinTech In- Patrick Waelbroeck, professor, Télécom ParisTech – Insti- novation (Autorité de Contrôle prudentiel et de Résolu- tut Mines-Télécom tion), Didier Warzée, engineer from the corps des Mines, expert at Pôle FinTech Innovation (Autorité de Contrôle Blockchain technology extends far beyond time stamps, prudentiel et de Résolution), and Thierry Bedoin, chief di- bitcoins and the security of financial transactions. An eco- gital officer (Banque de France) system involving smart, connected objects (the Internet of things) probably cannot develop without some form of this The ACPR (Autorité de Contrôle prudentiel et de Résolu- technology, which opens the way toward a “liquefaction” tion), which oversees banks and the insurance industry of the physical world, an economics of real-time micro- in France, and the Bank of France (the central bank) are transactions and the smart sharing of data bases. How- coming to grips with the technological revolution under ever it is important to distinguish between types of block- way in financial services. Blockchains figure among the chains, in particular private and public ones, since they techniques that call for optimizing, or even modifying, the have quite different economic properties. The problems processing and delivery of financial services. However this related to the governance of public blockchains suggest technology is not very mature. It must cope with four ma- that this technology cannot, by itself, create trust. jor dilemmas before it can be used for financial operations.

Blockchains? The challenges of implementation Blockchains, a lever of digitization for investment Ilarion Pavel, engineer from the corps des Mines (Conseil banks général de l’économie, de l’industrie, de l’énergie et des Éric Rossignol, in charge of quantitative analysis and of technologies) and Laboratoire de physique théorique Innovation Laboratory (Department Securization at Crédit (École Normale Supérieure) Agricole CIB), and Xavier Laurent, member of the team Innovation and of the department Strategy & Business Blockchains encounter several technical, legal, societal Transformation, and leader of the Blockchain Community and regulatory difficulties during implementation. These (Crédit Agricole CIB) problems are reviewed; and a few solutions, suggested.

RÉALITÉS INDUSTRIELLES - AOÛT 2017 113 The reason investment banks are designing so many pro- have attracted interest and opened new perspectives for totypes using blockchain technology is that their business collaboration among parties in the culture and entertain- heavily depends on the trust they bring to customer rela- ment industries. In the short run however, this emerging tions. Trust is the driving force in blockchain technology. technology is still too frail to be used as a lever for accel- Till now, investment banks have seen this technology as erating the music industry’s digital transformation. an opportunity for curbing costs and delivering a better service to customers rather than as a threat. After all, firms Art objects and blockchains still need a supplier of liquidity at the best price… Jurgen Dsainbayonne, founder of Seezart The art market is undergoing digitization. Several fac- How is the French Post Office, a long trusted ins- titution, tackling blockchain technology with the tors are at work: the impact of the new technology, the help of IRT SystemX? changing profile of art collectors (turnover of generations) Alain Roset, La Poste; and François Stephan, assistant and the 2008 financial meltdown, which, by upending the general manager in charge of development et internation- bond market, reinforced the view of art as a financial as- al affairs at the Institut de Recherche Technologique (IRT) set. Digitization has also exposed the flaws of a system SystemX that is, rightly or wrongly, deemed to be opaque and cliqu- ish. Several scandals have broken out about intellectual Some pundits are predicting that blockchains will deeply property rights, authenticity and the origins as well as val-

TRADUCTIONS DES RÉSUMÉS change the nature of trusted third party relationships. The ue of artworks. This is the context where blockchain tech- digital revolution and the “power of the multitude” have nology, owing to its inherent properties, can boost confi- made this possible. According to some experts, this new dence, make digital transactions secure and respond to breakthrough technology has the power to radically alter the issues that have cropped up on this changing market. business models, not only those that have prevailed for decades or centuries but also more recent ones. A his- Chains of books and blocks torically trusted party for centuries now, the French Post Arnaud Robert, director of legal affairs, groupe Hachette Office (La Poste) has been staking out an ever stronger Livre position on the Internet and in the field of digital trust ser- Apart from a few experts and experiments, blockchain vices, thus warranting its role as a trusted third party in technology is still “promising”. Among these promises both the real and virtual worlds. Since 2014, it has invest- are the new uses owing to its purported characteristics: ed in blockchain technology. In 2016, it formed a partner- the qualities of being open but unforgeable and of being ship with IRT SystemX, a research institute with industrial reliable even in the absence of a trusted third party to a and academic credentials, the goal being to accelerate its transaction. The book market could make its digital activ- cycle of innovation thanks to this new technology. ities much more efficient if this technology were to keep The operation of a blockchain its promise of being an inviolable register, a secure means Gautier Marin-Dagannaud, engineering student at for transferring files, or even an automatic machine for au- Télécom ParisTech-Institut-Mines Télécom and Master’s thorizing, controlling and collecting royalties. For it to be student at École polytechnique, currently at Ledgys the revolutionary tool announced, it must keep its most far-reaching promise, namely: being a peer-to-peer tool Blockchains are a disruptive technology. To gauge its po- at everyone’s service instead of a toy in the hand of new tential, we must understand how it operates by examining monopolistic middlemen. its original use for bitcoins. A blockchain is a distribut- ed register, i.e., a ledger divided among actors on a net- 2.3 Other uses work. Like any register, transactions will modify entries in the ledger; and users must be identified. Unlike nearly all Blockchains at the service of public actions Malo Carton, engineer from the corps des Mines, Agence current registers however, a blockchain works without a des participations de l’État (APE); and Pierre Jérémie, en- central controlling authority… whence several issues and gineer from the corps des Mines, head of the risk-preven- technical problems. tion service (direction régionale et interdépartementale de 2.2 The culture and entertainment industries l’environnement et de l’énergie, DRIEE) in Île-de-France Thanks to blockchains, decentralized registers can be de- Blockchains and smart contracts: A first round of signed; and trust in the validity of these registers, shared feedback from the music industry among concerned parties. Inherent in this technology is a Christophe Waignier, director of resources and strategy, decentralization of the data bases underlying blockchains. Société des auteurs, compositeurs et éditeurs de musique For public authorities, this decentralization marks a shift of (SACEM) paradigm away from the usual organization whereby public For fifteen years now, the music industry has been at the data are stored by public operators subject to close over- center of the digital revolution. Blockchain technology has sight. This article presents two fields where the application stirred up debate among recording artists and other play- of blockchain technology is under study: a new chain of ers in this industry, in both the United States and Europe. more fluid financial securities that are easier to control; and Start-ups and, too, traditional actors, such as the SACEM the possibility of keeping the records of easements so as to in France, are conducting experiments. The first results better inform buyers on the real estate market.

114 RÉALITÉS INDUSTRIELLES - AOÛT 2017 The Internet’s infrastructure and services eration or transaction in the real world will thus have a Stéphane Bortzmeyer, engineer in the Department of In- counterpart in the digital realm. Though not answering all formation Systems, Association Française pour le Nom- questions, blockchain technology is appropriate whenev- mage Internet en Coopération (AFNIC) er trust, transparency and traceability are indispensable. Let us not fail to mention, however, what blockchains can- Several applications have been proposed for blockchains. not do, namely: verify the authenticity of registered data or In many cases however, the description of the actual use the legitimacy of “nonelectronic” operations. of blockchains is so vague that we are unable to assess whether or not it is reasonable to have recourse to this 3 - Smart contracts and oracles new technology. Blockchains are not useful for any- and every application. Herein, two widely discussed applica- Regulating smart contracts and the regulator’s tions related to the Internet’s infrastructure come under smart contracts discussion: computer logs and the registry of filenames. Catherine Barreau, professor at the Faculty of Law and How to make a registry using blockchains? What are the Political Science: Université de Rennes 1, IODE UMR advantages, problems and obstacles? CNRS 6262, Université Bretagne-Loire MakerNet: Distributed manufacturing Sooner or later, a technological innovation becomes a Pierre-Alexis Ciavaldini, student-entrepreneur, École 42, matter of law. Users of the innovation ‒ those who benefit

and cofounder of BlockFest from it but also those who fall victim to it ‒ demand regu- TRADUCTIONS DES RÉSUMÉS lations. Blockchains are quietly entering the legal world in “Release early, release often!” This well-known saying in the field of corporate financing. Smart contracts, though the computer world comes from The Cathedral and the still of limited use, should soon join them. Since they are Bazaar (1997). This basic book on the open source move- so complex that their development depends on a secure ment has shed light on the competitive advantages gained legal framework, the nature of this new sort of contract from this new vision of digitization. This philosophy, when must be defined; and its uses, determined. Although most applied to material objects, leads to designing a new mod- uses are private, we can imagine a public use by regula- el – distributed manufacturing – that will be made secure tory authorities… thanks to blockchain technology. France has offshored its cutting edge industries and lost much of its know-how in Smart contracts… legal aspects microelectronics. Meanwhile, electronics has become a Éric Barbry, attorney, director of the Digital Law Pole, form of craftwork in Shenzhen. As a result, dozens of new Cabinet Alain Bensoussan Avocats Lexing smartphones, called shanzai, are created day after day: a sort of open standardized hardware, which exists only Smart contracts are not a new, nor the opposite of idiotic in China. MakerNet proposes generalizing this model to contracts. To tell the truth, they are not even contracts. other cultures through an ecosystem of distributed manu- They are a way of encoding a contract and making its facturing, a possibility offered by blockchains. application automatic, therefore, easier, faster and surer. Smart contracts rely on blockchain technology, which in- Blockchains and smart contracts: Prospects for terests several branches of the economy: finance, music, the Internet of things and e-health and services involving middlemen, depositories or trusted Philippe Genestier, PhD in Microelectronics, Orange third parties. Like any technique, smart contracts have ad- Labs; Loïc Letondeur, engineer in R&D, Orange Labs; Sa- vantages, but they also raise questions. What about secu- jida Zouarhi, engineer and doctoral student in information rity? And, too, programming errors? sciences and networks at Orange Labs and Laboratoire d’informatique de Grenoble, LIG, INP); Alain Prola, inven- Blockchains and smart contracts in the culture tor/developer of applications for Androïd; and Jean-Marc and entertainment business Temerson, research engineer, head of projects at Orange Jérôme Pons, consultant on digital technology and strat- Labs, now retired egies in the culture and entertainment business and del- egate on blockchain standardization at Music won’t stop Given the growing use of objects connected through the Internet of things (IoT) and the increasing interconnection Contracts are omnipresent in the culture and entertain- of heterogeneous systems producing myriads of personal ment business, in particular in the film, video and music data, our digital society faces new questions about: the industries. Nonetheless, whether passed with authors, decentralized and “mixed” administration of these things, producers, publishers or distributers, they are not always resilience, confidentiality of the access to data, traceability applicable or executed. The minimum sums guaranteed of uses, etc. Blockchain technology replies by proposing: under a contract might transfer an “excessive” share of a decentralized organization, procedures for reaching a the value toward producers and editors; and the absence consensus that satisfies diverging interests, and a shar- of legal metadata might reduce the amount paid to the ing of trust – since the trusted third party is no longer a rightful owners (e.g., performing artists). Is it utopian to single person. New opportunities will arise in a sharing imagine a contract that is programmed and executed au- economy based on social networks 2.0, where connected tomatically so as distribute a “fair” share of the value to human beings and things will interact without any differ- the creators, producers, editors, distributors and consum- ence being made between the two. Blockchains can drop ers of digital contents and to provide a remuneration to “anchors” between the physical and virtual worlds: an op- the rightful owners that reflects consumption (via down-

RÉALITÉS INDUSTRIELLES - AOÛT 2017 115 loading or audience ratings)? Blockchain technology is stance tainted with populism. This refusal of established part of the answer… institutions can partly be set down to the crisis of con- fidence in modern societies. Technological “solutionism” Oracle hardware, the layer of trust between tries to establish trust through algorithms, without any le- blockchains and the physical world gal or social grounds; but it is an illusion. Taking account Vanessa Rabesandratana, customer success manager, of costs and risks, the use of blockchains without trusted Ledger; and Nicolas Bacca, chief technical officer, Ledger third parties has little interest outside a few fields. In con- Blockchain applications are evolving in a totally virtual en- trast, the use of blockchain technology by the institutions vironment that has been designed to be fully separate from that serve as trusted third parties, within an established le- the real world. Smart contracts, decentralized applications gal and social framework, is promising since active mon- and cryptocurrencies have a limited hold on the physical itoring and oversight are an indispensable condition for world around us. We can even describe these two univers- benefitting fully from blockchains. es as existing on planes that are never superimposed. Each use of this technology thus raises the following questions: A new digital tool for making supply chains re- liable, blockchains How can blockchain applications interact efficiently and in Matthieu Hug, serial entrepreneur, cofounder and CEO of security with the real world? How can smart contracts tap Tilkal external data with efficiency and in security? This sort of

TRADUCTIONS DES RÉSUMÉS question cropped up quite naturally from the very first days Distributed digital registers – blockchains – hold the of this new technology. Tools and interfaces thus had to be promise of reinventing the conditions for trust through adapted. The trusted platform for relating the real world to decentralized notary systems without go-betweens. Ap- blockchains has a name: Oracle. plying them to the financial industry has been the subject of much study and many comments; such applications 4 - Opportunities and stakes could modify systems of transactions based on trusted third parties. Other applications of this technology do not Why standardize blockchains? simply replace the existing arrangements but even try to Olivier Peyrat, managing director of Association française establish trust there where it is in shortage. An application de normalisation (AFNOR); and Jean-François Legendre, of much interest in the field of health is the tracing and in charge of development at AFNOR tracking of drugs from manufacturer to consumer. For one Blockchain technology has a considerable growth poten- thing, consumers will thus obtain the accountability they tial, since so many uses have been imagined, some of demand about the products they consume and will be able them now being deployed. It will be potentially disruptive, to judge the product’s compliance with health or ethical and probably become a strategic issue in several indus- criteria. For another, such an application will hamper the tries. However blockchain technology must first attain a unbelievable growth of all kinds of counterfeit products in certain level of maturity, whence the need to adopt stan- all industries: drugs, automobile parts, baby food… dards for offering the necessary reassurance about cer- Smart business networks: The evolution tain aspects of the processes used. Louis-François Pau, Rotterdam School of Management The security and insecurity of blockchains and and Copenhagen Business School smart contracts The intelligence of an information network is augmented Jean-Pierre Flori, expert in cryptography, Agence natio- by its functionality (its ability to distribute, store, assem- nale de la sécurité des systèmes d’information (ANSSI) ble, or modify information). Transmission networks are The security of many blockchain applications depends technically complex, but business-wise they are “dumb” not just on the construction of a chain of blocks. It also pipes that transport information without enhancing it. An depends on the specific characteristics of the application information network augmented by formalized business as it uses the data stocked in such a chain. In addition, relationships can be “smart”; it can improve the utility of it depends on the conduct of the entities involved in the information in multiple ways (that is synonymous with cre- expansion of a blockchain. Two flagships of blockchain ating economic value). technology are used to examine these various levels of Conversely, a lone transaction between two business security: the crytocurrency bitcoin and the virtual machine partners rarely stands isolated, especially in an electron- Ethereum. ic commerce context, but the economic value accrues already then for both partners. New transactions can be Blockchains, a technological response to the cri- created with the same or other partners, by cascading sis of confidence whole or parts of the same initial transaction, thus building Arnaud Manas, engineer, PhD in Economics and History, a network of business relations which develops over time. associate researcher at Université de Paris I - Sorbonne (ID- HES); and Yoram Bosc-Haddad, specialist on the gover- To address the two above paradigms, has been defined nance of emerging initiatives and steerage of the economy the concept of “Smart Business Network” (SBN). In its canonical form, a blockchain eliminates trusted third parties from transactions, thus reflecting an ideological Issue editor: Jean-Pierre Dardayrol

116 RÉALITÉS INDUSTRIELLES - AOÛT 2017 Blockchains y smart contracts, ¿tecnologías de confianza?

La blockchain, algunos retos de implementación Introducción Ilarion Pavel, Ingeniero jefe de Minas, Consejo General de Jean-Pierre Dardayrol la Economía, Industria, Energía y Tecnología y Laboratorio de Física Teórica de la Escuela Normal Superior 1 - Las blockchains En este artículo se analizan las dificultades técnicas y otros problemas jurídicos, sociales o reglamentarios La blockchain, concepto, tecnología, actores y usos que se deben enfrentar durante la implementación de la Côme Berbain, Subdirector adjunto de experiencia de la blockchain, y se sugieren algunas soluciones potenciales. Agencia francesa de Seguridad de Sistemas de Informa- 2 - Casos de uso, transformaciones ción (ANSSI) de las empresas y sectores TRADUCTIONS DES RÉSUMÉS La blockchain está de moda. De hecho, es difícil ignorar económicos este término que se usa en abundancia, con acepciones diversas. Con el fin de abordar este nuevo fenómeno, es 2.1 El sector financiero necesario tratar de definirlo, identificar sus elementos -es Tecnología de los registros distribuidos, ¿qué im- tructuradores e interrogarse sobre la pertinencia de sus pacto tiene sobre la infraestructura financiera? propiedades y promesas. Alexis Collomb, Catedrático de finanzas del Conservatoire La multitud de experimentos en un gran número de sec- national des Arts et Metiers (CNAM), Klara Sok, Investiga- tores económicos nos invita a reflexionar sobre la perti- dora y estudiante de doctorado del CNAM, y Lucas Léger, nencia de la utilización de la blockchain dependiendo de Investigador y estudiante de doctorado del CNAM sus casos de uso y de los motivos reales de los diferentes Se ha hablado mucho de la tecnología de los registros actores. distribuidos, y en particular de las blockchains, que pue- Los retos fundamentales de la blockchain, lejos de ser den modificar profundamente las infraestructuras finan- únicamente técnicos, tienen que ver con la organización, cieras. Este artículo, el cual se focaliza en los sistemas la gobernabilidad y la definición misma de soluciones que de pago y las infraestructuras de mercado, trata de ex- permitan responder al problema de la confianza en las in- plicar en primer lugar las razones del entusiasmo, aún teracciones humanas. En este sentido, la blockchain es prudente, de los agentes financieros por esta tecnología. un nuevo instrumento técnico que induce y participa en la Se analizan también los problemas y la desconfianza que transformación digital de muchos sectores, en particular genera su adopción, incluyendo el nuevo paradigma de en los oficios relacionados con el derecho. coopetición que presupone. Posteriormente, se establece un pequeño balance de las últimas iniciativas de las insti- Los retos económicos de la blockchain tuciones de pago, bancos (en particular, los bancos cen- Patrick Waelbroeck, Profesor de Telecom ParisTech – trales) e instituciones internacionales para entender mejor Institut Mines-Télécom las posibilidades de la tecnología o incluso, en algunos casos, ponerla en marcha. Por último, se presentan sus La blockchain es una tecnología que va mucho más allá perspectivas futuras. del registro de fecha y hora, del bitcoin y de la seguridad de las transacciones financieras. El desarrollo de un eco- sistema en torno a los objetos inteligentes conectados no Los retos de la Blockchain para el Banco de Fran- cia y la Autoridad de Supervisión Prudencial y de podrá realizarse sin la blockchain (bajo una forma u otra). La Resolución (ACPR) blockchain abre las puertas de la fusión del mundo físico, Nathalie Beaudemoulin, Coordinadora del Centro Fin- la economía de las micro-transacciones en tiempo real y Tech Innovation de la Autoridad de Supervisión prudencial la distribución inteligente de bases de datos. No obstante, y de resolución, Didier Warzée, Ingeniero de Minas, espe- es importante distinguir los diferentes tipos de blockchain, cialista del Centro FinTech Innovation de la Autoridad de especialmente las blockchains públicas de las privadas, Supervisión prudencial y de resolución, y Thierry Bedoin, ya que sus propiedades económicas son muy diferentes. Chief Digital Officer del Banco de Francia Por otra parte, los problemas de gobernabilidad de las blockchains públicas dejan entrever que la tecnología La Autoridad de Supervisión prudencial y de resolución blockchain no puede garantizar la confianza por sí sola. (que controla los bancos y las aseguradoras), al igual que

RÉALITÉS INDUSTRIELLES - AOÛT 2017 117 el Banco de Francia han sabido transformarse para po- gistro distribuido; es decir, compartido entre los diferentes der enfrentar los desafíos de la revolución tecnológica actores de una red. Como en cualquier registro, hay usua- que viven los servicios financieros. Lablockchain forma rios, que es necesario poder identificar, y transacciones parte de los temas tecnológicos que pueden optimizar, e que modifican el estado del registro. Sin embargo, a dife- incluso modificar, la materia que alimenta las actividades rencia de la inmensa mayoría de los registros actuales, la financieras. Sin embargo, esta tecnología carece de ma- blockchain funciona sin autoridad central de control. Esto durez y deberá superar cuatro grandes dilemas antes de implica muchos desafíos y problemas técnicos. poder ser utilizada para realizar operaciones financieras. 2.2 Las industrias culturales La blockchain, una palanca de digitalización para Blockchains y smart contracts, primeros retornos los bancos de financiación e inversión (BFI) de experiencia de la industria musical Eric Rossignol, Encargado del análisis cuantitativo y del Christophe Waignier, Director de recursos y de estrate- laboratorio de innovación del Departamento de titulariza- gia, Sociedad de Autores, Compositores y Editores de ción del Crédit Agricole CIB, y Xavier Laurent, Miembro Música de Francia (SACEM) del equipo de innovación y del Departamento Strate- gy & Business Transformation y líder de la Comunidad Desde hace más de quince años, la industria musical está Blockchain del Crédit Agricole CIB en el punto central de la transformación digital. En este contexto, las blockchains suscitan naturalmente muchos

TRADUCTIONS DES RÉSUMÉS Los bancos de financiación e inversión (BFI) (o bancos debates en la comunidad artística y entre los actores de al por mayor) realizan muchos prototipos basados en la industria musical, tanto en los Estados Unidos como en la blockchain ya que sus actividades se basan amplia- Europa. Actualmente, varias experiencias concretas, de- mente en la confianza que proporcionan a sus clientes. sarrolladas por start-ups, pero también por agentes más La confianza es también el motor de la blockchain. Hasta tradicionales como la SACEM, comienzan a emerger. Los la fecha, los BFI piensan que la blockchain es más una primeros resultados obtenidos suscitan interés, ya que oportunidad para limitar los costes y proporcionar un me- abren nuevas perspectivas de colaboración entre los dife- jor servicio a sus clientes que una amenaza. En efecto, las rentes actores de la industria. No obstante, estas tecno- empresas todavía necesitan un proveedor de liquidez al logías emergentes siguen siendo demasiado frágiles para mejor precio. poder representar, a corto plazo, una verdadera palanca Cómo aborda La Poste, un actor de confianza se- de aceleración de la transformación digital del sector. cular, la blockchain, con el apoyo de IRT SystemX Objetos de arte, los desafíos de la blockchain Alain Roset, La Poste, y François Stephan, Director Ge- Jurgen Dsainbayonne, Fundador de Seezart neral Adjunto encargado del desarrollo y de asuntos inter- nacionales del Instituto de Investigación Tecnológica (IRT) El mercado del arte ha emprendido en los últimos años SystemX una transformación digital. Esta transformación ha sido impulsada por varios elementos: el impacto de las nuevas Algunos dicen que la blockchain, nueva tecnología revolu- tecnologías, una renovación generacional del perfil de los cionaria, permitirá un cambio profundo de los terceros de coleccionistas, y finalmente la crisis de 2008 que, al afec- confianza gracias a la tecnología digital y a la potencia de tar el mercado de los bonos y obligaciones, tuvo como la multitud. Para otros, la blockchain parece tener el poder efecto un fortalecimiento de la visión del arte como un no sólo de modificar radicalmente los modelos económi- activo financiero. cos históricos, establecidos desde hace décadas o siglos, sino también apoyar modelos económicos muy recientes Esta digitalización también subraya los fallos de un sis- (igualmente revolucionarios). La Poste, operador histórico tema que se considera, con o sin razón, como opaco y de confianza en Francia, afianza desde hace varios años propio a una élite. Ha habido muchos escándalos que im- su presencia en Internet y ha puesto en marcha servicios plican los derechos de autor, la legalidad, autenticidad, digitales de confianza, confirmando así su papel de ter- procedencia y hasta el valor mismo de las obras de arte. cero de confianza tanto en el universo físico como en el Es este contexto, la tecnología blockchain, por sus propie- universo digital. Desde 2014, el grupo postal francés in- dades intrínsecas, puede reforzar y garantizar una confianza vierte en la blockchain y en 2016 ha decidido trabajar con digital y responder a los desafíos de un mercado cambiante. IRT SystemX, un instituto de investigación que cuenta con conocimientos laborales y académicos, con el fin de ace- La cadena del libro y las blockchain lerar su ciclo de innovación basado en esta tecnología. Arnaud Robert, Director jurídico del Grupo Hachette Livre El funcionamiento de la blockchain Salvo el caso de algunos expertos y algunos expe- Gautier Marin-Dagannaud, Estudiante-ingeniero de Tele- rimentos, la blockchain aún se encuentra en la fase de com ParisTech - Institut-Mines Telecom y estudiante de promesas. Promesas de nuevos usos posibles gracias master de la École Polytechnique, actualmente en Ledgys a las cualidades principales que se le presta: la de ser abierta y al mismo tiempo a prueba de falsificaciones, ser La blockchain es una tecnología profundamente revolucio- fiable incluso en ausencia de terceros de confianza. naria. Para entender su potencial es indispensable com- prender las bases de su funcionamiento a través de su El mundo del libro podría ganar en eficiencia en sus activi- caso de uso original, el Bitcoin. Una blockchain es un re- dades digitales si la blockchain cumple con sus promesas

118 RÉALITÉS INDUSTRIELLES - AOÛT 2017 de registro inviolable, medio seguro de transferencia de «Release early, release often!ˮ Este proverbio conocido archivos, e incluso de máquina automática para autorizar, del mundo informático proviene de The Cathedral and the controlar y cobrar tasas. Bazaar (1997), una de las obras fundamentales del movi- miento open-source que revela la ventaja competitiva que Sin embargo, para que constituya la herramienta revolu- ofrece esta nueva visión de la informática. Esta filosofía, cionaria que pretende ser, será necesario que cumpla con aplicable al hardware, permite la elaboración de un nuevo su mayor promesa, la de ser un instrumento de relación modelo de producción distribuida cuya seguridad se pue- entre usuarios, de igual a igual, al servicio de todos, y no de garantizar gracias a la blockchain. el juguete de nuevos intermediarios monopolistas. Francia ha deslocalizado su industria de punta y ha per- 2.3 Otros casos de uso dido gran parte de su know-how en microelectrónica. La blockchain al servicio de la acción pública Por el contrario, en Shenzhen, China, la electrónica se Malo Carton, Ingeniero de Minas, Agencia de participa- ha convertido en una forma de artesanía. Gracias a ella ciones del Estado (APE), y Pierre Jérémie, Ingeniero de China puede crear cada día decenas de nuevos teléfonos Minas, Jefe del Servicio de Prevención de riesgos y mo- inteligentes que se denominan «Shanzai», una forma de lestias, Dirección regional e interdepartamental del medio open-hardware estandarizado (que sólo existe allí). Ma- ambiente y energía (DRIEE) de la región Île-de-France kerNet propone la generalización de este modelo y su apertura a otras culturas a través de un ecosistema de

La tecnología blockchain ofrece la posibilidad de construir fabricación distribuida posible gracias a la blockchain. TRADUCTIONS DES RÉSUMÉS registros descentralizados y compartir la confianza entre los operadores sobre la validez de estos registros. La des- Blockchains y Smart Contracts, perspectivas para centralización de las bases de datos subyacentes a una el Internet de las cosas y para la e-salud blockchain es inherente a esta tecnología. En el caso de Philippe Genestier, Doctor en microelectrónica de Orange la acción pública, esta descentralización constituye un Labs, Loïc Letondeur, Ingeniero de Investigación y De- cambio de paradigma de la organización habitual de da- sarrollo, de Orange Labs, Sajida Zouarhi, Ingeniero y es- tos públicos hasta ahora almacenados por uno o varios tudiante de doctorado en informática y redes de Orange operadores públicos vigilados de cerca. En el artículo se Labs y del LIG (Laboratorio de informática de Grenoble presentan dos campos de acción pública, estudiados ac- INP), Alain Prola, diseñador/desarrollador de aplicaciones tualmente, que incluyen la aplicación de soluciones que Android, y Jean-Marc Temerson, Ingeniero de Investiga- utilizan esta tecnología: la creación de una nueva cadena ción, responsable de equipo y de proyectos de Orange de títulos que garantice una circulación de títulos financie- Labs, jubilado ros, más fluida pero también más fácilmente controlable, Debido a la creciente utilización de objetos conectados y y las posibilidades ofrecidas por la blockchain para el re- la interconexión de sistemas heterogéneos que generan gistro de derechos y servidumbres sobre los suelos con el innumerables datos personales, nuestra sociedad digital fin de información mejor a los compradores. enfrenta nuevos retos: la administración descentralizada y heterogénea de estos objetos, su resistencia, el respeto Las infraestructuras y los servicios de Internet de la vida privada en el acceso a los datos, la trazabilidad Stéphane Bortzmeyer, Ingeniero de la dirección de sis- de los usos, etc. temas de información y operaciones de la Asociación La blockchain propone soluciones a estos desafíos. francesa para el sistema de nombres de Internet y la coo- l un funcionamiento descentralizado, peración (AFNIC) l mecanismos consensuales que permiten asociar intere- Muchas aplicaciones se han propuesto para la cadena de ses divergentes, bloques (blockchain). Pero cabe anotar que, en muchos l una confianza distribuida mediante la supresión del ter- casos, la descripción de «cómo» se puede utilizar la cade- cero de confianza único. na de bloques para esta aplicación es tan aproximada que Nuevas oportunidades surgirán en una nueva economía es imposible saber si su uso es, en dicho caso, razonable de la distribución basada en las redes sociales 2.0, donde o no. Sin embargo, esta cadena no es útil para todas las humanos y objetos conectados interactuarán de forma aplicaciones. indiferenciada. La blockchain nos permite crear «anclas» El texto presenta dos aplicaciones relacionadas con la in- entre el mundo físico y el mundo virtual. Así, una ope- fraestructura de Internet: los diarios (en el sentido de diario ración o transacción en el mundo real puede tener su de a bordo) y, sobre todo, los registros de nombres, cuyo contraparte en el mundo digital. funcionamiento ya ha sido objeto de numerosas discusiones. Incluso si la blockchain no responde a todas las pro- ¿Cómo puede realizarse un registro de nombres en una blemáticas, este tipo de solución es muy relevante en cadena de bloques? ¿Cuáles son sus ventajas? ¿Cuáles campos donde la confianza, transparencia y trazabilidad son los problemas y obstáculos? son indispensables. Sin embargo, no hay que pasar por alto los puntos débiles de la blockchain (en particular, la verificación de la autenticidad de los datos almacenados MakerNet o la fabricación distribuida o la verificación de la legitimidad de una operación «no Pierre-Alexis Ciavaldini, Estudiante-emprendedor de la electrónica». escuela 42 y cofundador del BlockFest

RÉALITÉS INDUSTRIELLES - AOÛT 2017 119 3 - Los smart contracts y los oráculos imaginar una programación y ejecución automáticas de los contratos, que llevaría a una repartición «equitativa» La regulación de los smart contracts y los smart del valor entre creadores, productores, editores, distri- contracts de los reguladores buidores, operadores y consumidores de contenidos di- Catherine Barreau, Profesora de la Facultad de Derecho gitales y una remuneración de los derechohabientes que y Ciencias Políticas de la Universidad de Rennes 1, IODE refleje el consumo basado en el número de descargas o UMR CNRS 6262, Universidad Bretagne-Loire escuchas? La tecnología blockchain responde en cierta medida a esta pregunta. Tarde o temprano, toda innovación tecnológica debe en- frentarse a la prueba del derecho. La necesidad de regu- El oráculo hardware, la capa de confianza entre lación se expresa tanto por parte de los usuarios de la las blockchains y el mundo físico innovación, que se benefician de ella, como por aquel- Vanessa Rabesandratana, Customer Success Manager, los que pueden ser víctimas de ella. De esta forma, las Ledger, y Nicolas Bacca, Chief Technical Officer, Ledger cadenas de bloques han tomado discretamente su lugar en el entorno legal, en el ámbito de la financiación de las Las aplicaciones blockchain evolucionan en su propio en- empresas. Los smart contracts, cuyos casos de uso aún torno totalmente virtual que por naturaleza está comple- son limitados, deberán dentro de poco hacerles com- tamente separado del mundo real. Los smart contracts, pañía, ya que la complejidad de la herramienta requiere aplicaciones descentralizadas y otras monedas virtuales TRADUCTIONS DES RÉSUMÉS un marco jurídico seguro para su desarrollo. Reglamentar tienen una influencia limitada sobre el mundo concreto este nuevo objeto requiere determinar su naturaleza para que nos rodea. Ni siquiera se puede hablar de ortogona- establecer sus usos. Aunque éstos sean principalmente lidad ya que estos universos existen en planos que no se privados, su uso público, por parte de una autoridad de superponen nunca. regulación, puede también considerarse. Cada uno de los casos de uso nos remite a esta pro- blemática: ¿cómo pueden las aplicaciones relacionadas Aspectos jurídicos de los Smart contracts con la blockchain interactuar de manera eficiente y segura Eric Barbry, Abogado, Director del Centro de Derecho di- con el mundo real, y cómo los smart contracts pueden gital del Gabinete Alain Bensoussan Avocats Lexing alimentarse de datos externos, todo ello, de forma segura y eficaz? Los smart contracts (contratos inteligentes) no son una nueva forma de contrato que se opone a los contratos Esta pregunta surgió naturalmente desde el comienzo idiotas... de esta tecnología y hubo que diseñar las herramien- tas e interfaces adaptadas. La plataforma de confianza En realidad, los smarts contracts ni siquiera son contra- que permite establecer vínculos entre el mundo real y la tos... blockchain tiene un nombre: oráculo. Los smart contracts son una forma de codificar un contra- to y hacer que su aplicación sea automática, por lo tanto 4 - Oportunidades y retos más fácil, rápida y segura. Por qué se interesa la normalización en la Los smart contracts están basados en la tecnología de la blockchain blockchain. Esta tecnología interesa a muchos sectores: Olivier Peyrat, Director General de la Asociación France- las finanzas, la música, los intermediarios o los secuestres. sa de Normalización (Afnor), y Jean-François Legendre, Responsable de desarrollo de la Afnor Como todas las técnicas, los smart contracts ofrecen mu- chas ventajas, pero también presentan muchos interro- La blockchain se refiere a un conjunto de tecnologías. Su gantes, entre los cuales: ¿Cómo se garantiza su seguri- potencial de desarrollo es enorme, con numerosos ca- dad? ¿Qué pasa con los errores de programación? sos de uso previstos, algunos de los cuales ya están en fase de despliegue. El impacto potencial de la blockchain La aplicación de la blockchain y de los smart es revolucionario y sin duda estratégico para muchos contracts por parte de las industrias culturales sectores. Sin embargo, la blockchain deberá llegar a un Jérôme Pons, Consultor en tecnologías y estrategias digi- primer nivel de madurez, lo que implica el desarrollo de tales en el ámbito de la cultura y responsable de la norma- normas con el fin de aportar la confianza necesaria en al- lización de la blockchain de Music won’t stop gunos aspectos de los procesos puestos en marcha. La contractualización es omnipresente en las industrias culturales, especialmente en los sectores del cine, vídeo Seguridad e inseguridad de la blockchain y de los smart contracts y de la música grabada. Sin embargo, los contratos no Jean-Pierre Flori, Experto en criptografía de la Agencia siempre se pueden aplicar o ejecutar, ya sea que se trate Nacional de seguridad de los sistemas de información de contratos de autor, edición, licencia o de distribución. (ANSSI) En realidad, los «mínimos garantizados» pueden llevar a una transferencia «excesiva» de valor hacia los produc- La seguridad de muchas aplicaciones que utilizan tores y editores, y la falta de metadatos jurídicos puede las blockchains se basa no sólo en la forma en que se afectar la remuneración de los derechohabientes (como construyen las blockchains subyacentes, sino también en los artistas intérpretes). En este contexto, ¿es utópico las particularidades de la aplicación construida con ayuda

120 RÉALITÉS INDUSTRIELLES - AOÛT 2017 de los datos almacenados en estas blockchains, así como Por su parte, otras aplicaciones de estas tecnologías de- el comportamiento de las entidades que participan en la sean no solamente sustituir los mecanismos de confianza expansión de la blockchain. En este artículo, se analizan existentes, sino también crear confianza allí donde ésta estos niveles de seguridad, ilustrándolos gracias a dos hace falta. Una aplicación con un interés sanitario princi- aplicaciones emblemáticas de las blockchains: la cripto- pal es la garantía de la trazabilidad de los productos a todo moneda bitcoin y el ordenador-mundo Ethereum. lo largo de la cadena, desde el fabricante hasta el consu- midor: en primer lugar, para proporcionar al consumidor La o las blockchain(s), una respuesta tecnológica la transparencia que reclama sobre lo que se consume, a la crisis de confianza y la conformidad, que quiere evaluar, según sus criterios Arnaud Manas, Ingeniero, Doctor en economía e historia, de salud o ética. A continuación, para luchar contra el investigador asociado de la Universidad de París I - Sor- increíble crecimiento de todo tipo de falsificaciones, que bonne (IDHES), y Yoram Bosc-Haddad, especialista de afectan a todas las industrias, desde la industria farmacé- la gobernanza de las iniciativas emergentes y de pilotaje utica hasta los alimentos para lactantes o las piezas para económico automóviles. En su forma canónica, la blockchain es un rechazo de los terceros de confianza. Esta tecnología se basa en una po- Smart business networks: The evolution Louis-François Pau, Rotterdam School of Management sición ideológica que no está exenta de populismo. Este and Copenhagen Business School rechazo de las instituciones establecidas se explica en TRADUCTIONS DES RÉSUMÉS parte por la crisis de confianza que atraviesan las socie- The intelligence of an information network is augmented dades modernas. El solucionismo tecnológico que desea by its functionality (its ability to distribute, store, assem- establecer la confianza mediante algoritmos, sin anclaje ble, or modify information). Transmission networks are social o jurídico, es ilusorio. Teniendo en cuenta los costes technically complex, but business-wise they are “dumb” y riesgos, el uso de la blockchain canónica (sin terceros pipes that transport information without enhancing it. An de confianza) presenta poco interés con excepción de un information network augmented by formalized business número de campos limitado. Por el contrario, la aplicación relationships can be “smart”; it can improve the utility of de las tecnologías blockchain por parte de instituciones de information in multiple ways (that is synonymous with cre- confianza, dentro de un marco jurídico y social, parece te- ating economic value). ner un futuro brillante. Pero sólo una vigilancia activa per- Conversely, a lone transaction between two business mitirá que sus agentes se beneficien plenamente de ella. partners rarely stands isolated, especially in an electron- Una nueva herramienta digital para la seguridad ic commerce context, but the economic value accrues de las supply chains, la blockchain already then for both partners. New transactions can be Matthieu Hug, Serial Entrepreneur, cofundador y CEO de created with the same or other partners, by cascading Tilkal whole or parts of the same initial transaction, thus building a network of business relations which develops over time. Los registros digitales distribuidos (blockchains) prome- ten reinventar la confianza, haciendo posibles sistemas de To address the two above paradigms, has been defined notariado descentralizados y sin intermediarios. Su apli- the concept of “Smart Business Network” (SBN). cación a la industria financiera, la cual se ha estudiado y El dossier ha sido coordinado por Jean-Pierre Dardayrol comentado ampliamente, podría modificar nuestros siste- mas de intercambios basados en terceros de confianza.

RÉALITÉS INDUSTRIELLES - AOÛT 2017 121 BACCA Nicolas travail de l’Autorité bancaire eu- ropéenne sur l’innovation finan- Nicolas Bacca est Chief Technical Officer de Ledger. cière et contribue aux travaux du Comité de Bâle et du Forum BARBRY Éric de stabilité financière consacré à cette même question. Avocat à la Cour d’appel de Pa- ris, Éric Barbry est directeur du pôle Droit numérique du cabi- BIOGRAPHIES net Alain Bensoussan Avocats - Lexing. Il intervient en matière D.R de conseil, de contrats et de BEDOIN Thierry contentieux dans les domaines du droit de l’Internet, des plate- Thierry Bedoin est diplômé de formes, des données person- l’École centrale de Lyon et de nelles, du marketing digital, de la Supélec. Il travaille à la Banque D.R dématérialisation et de la sécurité de France depuis 1983. Après des systèmes d’information. avoir dirigé la production infor- Il a été nommé membre du Conseil supérieur de la pro- matique de la Banque, il a été priété littéraire et artistique, par arrêté du ministre de la nommé directeur de l’organisa- Culture et de la Communication du 30 septembre 2015, et tion du système d’information. est également chargé d’enseignement en droit des tech- Depuis octobre 2016, il est chief nologies de l’information et de la communication à Télé- digital officer (directeur de la com ParisTech. D.R transformation digitale). Son rôle Il préside la Commission juridique de l’ACSEL, l’association est d’impulser et d’animer la transformation digitale de la de l’économie numérique et de la transformation digitale. Banque de France, d’en élaborer la stratégie digitale, de Il est coauteur de plusieurs articles publiés dans des re- coordonner la mise en œuvre des actions digitales, d’ac- vues professionnelles de la presse spécialisée et a contri- compagner les métiers dans leur transformation et de bué à la rédaction de plusieurs ouvrages, dont Droit de développer la démarche d’innovation en construisant une l’informatique, télécoms et Internet (Éditions Francis Le- relation collaborative avec les acteurs innovants au sein febvre, 5ème édition 2012) et Code de la sécurité informa- du Laboratoire Banque de France. tique et télécom (Éditions Larcier, mai 2016). BERBAIN Côme BARREAU Catherine Ingénieur des mines et docteur en cryptologie, Côme Ber- Catherine Barreau est professeur à la Faculté de droit et bain est sous-directeur adjoint Expertise à l’Agence natio- de science politique de l’Université de Rennes 1, où elle nale de la sécurité des systèmes d’information (ANSSI). dirige le magistère « juriste d’affaires franco-britannique ». En 2004, il débute sa carrière chez Orange en R&D, où il Membre de l’Institut Ouest Droit Europe (UMR CNRS s’occupe de cryptographie et contribue à la normalisa- 6262), elle est membre de l’équipe de droit européen et tion de la 4G. En 2008, il rejoint le ministère de la Dé- s’intéresse aux questions de politique européenne en ma- fense en qualité d’expert en sécurité, avant d’y exercer tière de concurrence, de protection des consommateurs des responsabilités managériales. En 2012, il intègre la et de droit du numérique. Ses travaux portent sur la re- PME Trusted Logic, qui est spécialisée dans la fabrication prise de l’acquis communautaire en matière de droit de la de cartes à puce, en tant que responsable de la sécurité. consommation (Pologne, France), sur l’articulation entre En 2014, il revient au ministère de la Défense en tant que le droit européen et les droits nationaux de la concur- conseiller en stratégie chargé d’opérer un rapprochement rence (compétences comparées des Autorités nationales entre deux services. En 2015, il s’intéresse à la transfor- compétentes en la matière et de la Commission). Elle a mation numérique du secteur de l’assurance avant d’inté- aussi publié plusieurs articles en droit de l’entreprise et grer l’ANSSI, où il se voit confier notamment une mission sur la marchandisation des données personnelles. Elle est d’optimisation numérique de l’Agence. vice-présidente de l’Université numérique juridique fran- Ses principaux sujets d’intérêt portent sur la sécurité du cophone (U.N.J.F.) et est en charge du Conseil pédago- numérique et la transformation numérique des organisa- gique et scientifique de cette même université. tions. BEAUDEMOULIN Nathalie BORTZMEYER Stéphane

Diplômée de Sciences-Po Paris, Nathalie Beaudemoulin Stéphane Bortzmeyer est ingénieur à la direction Système est coordinatrice du pôle Fintech Innovation de l’Autorité d’information et opérations de l’AFNIC (https://www.afnic. de Contrôle prudentiel et de Résolution (ACPR). Elle justi- fr/), où il est en charge notamment de la veille technolo- fie de vingt ans d’expérience dans la supervision bancaire. gique, ce qui l’amène tout naturellement à s’intéresser à la Elle a été notamment directrice adjointe des agréments et chaîne de blocs : il a à ce titre conçu le tutoriel blockchain de la réglementation à l’ACPR. Elle préside le groupe de ayant servi de support à la Journée du Conseil scienti-

122 RÉALITÉS INDUSTRIELLES - AOÛT 2017 fique de l’AFNIC (https://www. blockchain et co-fondateur du afnic.fr/fr/l-afnic-en-bref/actua- BlockFest, un festival pédago- lites/actualites-generales/10075/ gique consacré aux blockchains. show/jcsa16-retour-sur-la- Convaincu de l’importance de la journee-du-conseil-scientifique- culture maker en tant que moyen de-l-afnic-2016.html) organisée citoyen pour garder un certain en 2016. Il a également contribué contrôle sur la technologie, il à l’élaboration du dossier théma- cherche à mettre en place de

tique de l’AFNIC (https://www. nouveaux paradigmes de gestion BIOGRAPHIES afnic.fr/fr/l-afnic-en-bref/actua- distribuée, d’éducation continue D.R D.R lites/actualites-generales/10306/ et de liberté dans le travail. C’est show/l-afnic-publie-un-nouveau-dossier-thematique-sur- dans cette optique qu’il crée MakerNet au sein du mouve- la-chaine-de-blocs-blockchain.html) consacré à ce sujet. ment FabCity, en 2015. Il rejoint AllMade Consulting aux Il réserve dès qu’il le peut un peu de son temps à son ordi- cotés de Jean-Pierre Seck après avoir découvert le projet nateur personnel qui constitue un nœud des technologies de gestion des droits d’auteur AllMedia lors de la première Bitcoin, Namecoin et Ethereum. On peut le joindre par édition du BlockFest organisée en 2016. Il repense ainsi courrier électronique à l’adresse suivante : bortzmeyer@ le système des droits d’auteur en apportant son expertise nic.fr, ou sur le réseau social Mastodon sous l’adresse aux industries créatives. [email protected] COLLOMB Alexis BOSC-HADDAD Yoram Alexis Collomb est titulaire de la chaire de finance du Yoram Bosc-Haddad est statisticien économiste (EN- Conservatoire national des Arts et Métiers (CNAM), où il SAE) et docteur en informatique (Paris-Sud Orsay). Il est dirige également le département Économie Finance As- directeur associé d’Ylios, société de conseil en gestion surance Banque (EFAB). Il a fondé le SciChain Lab, qui se des affaires. Il était précédemment lean officer au sein focalise sur les blockchains et autres registres distribués. du Groupe Capgemini, et avait auparavant exercé pen- Il est co-directeur scientifique du projetBlockchain Pers- dant quinze ans des activités de conseil en management pectives Joint Research Initiative réalisé en partenariat et avait consacré six années à la transformation engagée avec BNP Paribas. dans la sidérurgie. Il est un spécialiste de la gouvernance des initiatives émergentes et du pilotage économique : il DARDAYROL Jean-Pierre a à ce titre dirigé de nombreuses missions de conseil au- près de directions générales et financières dans les sec- Ingénieur général des mines, teurs du numérique, de la pharmacie, de l’industrie, de Jean-Pierre Dardayrol est pré- l’énergie et des services financiers. sident du Comité de rédaction Il est également administrateur d’ESIEA, qui est une de la nouvelle série des Annales grande école d’ingénieurs en informatique et membre des Mines intitulée Les enjeux du comité d’honneur des Glénans et d'Ashoka Support numériques. Le premier numé- Network. ro de cette nouvelle série, dont la parution devrait intervenir en CARTON Malo mars 2018, sera consacré à l’In- telligence artificielle. Malo Carton est diplômé de l’École polytechnique (pro- D.R motion 2008) et ingénieur du corps des Mines. Il a débuté sa carrière dans l’administration à la direction générale DSAINBAYONNE Jurgen du Trésor, au sein du bureau « Épargne et marchés finan- Juriste en droit des affaires, une formation qu’il a complé- ciers », où il a travaillé sur des sujets touchant à la ré- tée par des études en économie et en analyse financière, glementation de l’organisation et du fonctionnement des Jurgen Dsainbayonne a rapidement délaissé le droit pour marchés secondaires d’instruments financiers. À cette se tourner vers le Web en tant qu’autodidacte, renouant occasion, il a contribué aux travaux relatifs à la définition ainsi avec sa passion initiale pour les nouvelles technolo- d’un cadre réglementaire adapté à la blockchain France gies et les mathématiques. consacrée aux minibons et aux titres financiers. Il travaille Travaillant sur des projets digitaux, en tant que consul- actuellement à l’Agence des participations de l’État. tant tout d’abord, puis de free lance SEO, Jurgen Dsain- CIAVALDINI Pierre-Alexis bayonne s’est très tôt intéressé au phénomène bitcoin et à la technologie sous-jacente, la blockchain. Amoureux CEO de MakerNet, programmeur et inventeur, Pierre- d’art et très attiré par ce milieu, il a très vite réalisé le po- Alexis Ciavaldini est étudiant-entrepreneur à l’École 42. tentiel que cette innovation majeure pouvait représenter De la création d’imprimantes 3D pour les Beaux-Arts à la pour le marché de l’art. conception d’objets connectés, c’est tout naturellement C’est ainsi qu’il s’est lancé dans l’aventure start-up en qu’il rejoint le mouvement Maker. fondant Seezart, dont l’ambition est d’être le garant d’un Il est aujourd’hui intervenant spécialiste de la technologie marché de l’art en pleine mutation digitale, et ce en implé-

RÉALITÉS INDUSTRIELLES - AOÛT 2017 123 mentant la technologie blockchain de manière à dévelop- LAURENT Xavier per une nouvelle solution de certification des œuvres d’art et d’attestation de leur provenance qui soit infalsifiable. Diplômé de l'IUP MIAGE – IFSIC et titulaire d’un Master 1 Accounting & Control of Management de l’Université FLORI Jean-Pierre Laval (Québec), Xavier Laurent, après une expérience de deux ans au NYSE Euronext, travaille pendant sept ans Jean-Pierre Flori est diplômé de l’École polytechnique et au sein du groupe Crédit Agricole où il est successive- est titulaire d’un doctorat en informatique. Depuis octobre ment PMO Compliance IT-team leader, responsable de la 2011, il exerce en qualité d’expert en cryptographie au

BIOGRAPHIES PMO Risk & Compliance IT, responsable du pilotage des sein de l’Agence nationale de la sécurité des systèmes projets IT et membre de l’équipe Innovation transverse et d’information. est à ce titre responsable de la communauté blockchain. GENESTIER Philippe LEGENDRE Jean-François

Docteur en microélectronique, Responsable Développement Philippe Genestier travaille de- de l’Association française de puis 1999 au sein d'Orange normalisation, Jean-François Labs, successivement en qualité Legendre est le rapporteur du de responsable d’équipe, puis Comité stratégique de l’Afnor sur de chef de projet. Ses activités la normalisation du secteur de actuelles englobent la responsa- l’information et de la communi- bilité des activités de recherche cation numérique, un Comité qui d’Orange dans le domaine de la a anticipé et instruit les besoins santé, lesquelles recouvrent no- normatifs pour la Blockchain. D.R tamment l’interopérabilité dans D.R Jean-François Legendre est par la collecte de données de santé. Dans le cadre de ses ailleurs membre de plusieurs groupes de coordination recherches, il a initié plusieurs projets mettant en œuvre stratégique existant au sein de diverses instances inter- la blockchain dans les domaines IoT et de l’e-santé. Il est nationales, notamment le Comité européen de normali- l’auteur de plusieurs publications sur les différents usages sation (CEN) et l’Institut européen de standardisation des de cette technologie. Il assure également la responsabilité télécommunications (ETSI). de l’encadrement de travaux de thèse. LÉGER Lucas HUG Matthieu Lucas Léger est chercheur et Matthieu Hug est un serial entrepreneur, co-fondateur et doctorant au CNAM, où il réalise CEO de Tilkal, une plateforme d’identité numérique pour une thèse sur la blockchain et les produits et les biens. Passionné par les technologies les smart contracts. Il s’intéresse numériques, Matthieu Hug siège, en parallèle de ses ac- plus particulièrement aux pro- tivités, au sein des conseils d’administration de plusieurs blématiques d’automatisation et start-ups innovantes. d’incomplétude de ces derniers. Entre 2007 et 2016, Matthieu Hug co-fonde et dirige RunMyProcess, une plateforme « cloud » unique qui aide D.R des centaines d’entreprises à surmonter les obstacles technologiques qu’elles rencontrent dans leur transforma- LETONDEUR Loïc tion numérique. RunMyProcess est acquise en 2013 par le groupe Fujitsu. Ingénieur de l’École polytech- Ingénieur Supélec de formation (promo 97) et détenteur nique de Grenoble, Loïc Leton- d’un Master of Science du prestigieux Georgia Institute of deur est titulaire d’un doctorat en Technology, Matthieu Hug a débuté sa vie professionnelle informatique (2014) de l’Universi- dans le conseil en matière de numérique. té Joseph Fourier, ses travaux de thèse ont porté sur l’intelligence JÉRÉMIE Pierre artificielle des systèmes auto- nomiques en environnement de Pierre Jérémie est diplômé de Cloud computing. l’École polytechnique (promo- Après avoir travaillé pendant un tion 2008) et ingénieur du corps D.R an au sein d’une filiale du groupe des mines. Il est actuellement en japonais Fujitsu en tant qu’ingénieur en recherche et dé- poste à la direction régionale et veloppement, il rejoint en 2016 Orange Labs pour y pour- interdépartementale de l’envi- suivre ses travaux. Depuis lors, il s’implique fortement ronnement et de l’énergie en tant dans des problématiques de gestion autonomique du cy- que chef du service de prévention cle de vie des applications massivement distribuées en des risques et des nuisances. environnement de Fog Computing et de l’intelligence des D.R

124 RÉALITÉS INDUSTRIELLES - AOÛT 2017 applications dévolues à l’internet des objets par Complex on behalf of IEEE. Event Processing. Ses travaux l’ont ainsi amené à étudier He is a Fellow of IEEE (USA), BCS (UK), and JSPS (Japan). la technologie Blockchain et à l’utilisation de celle-ci en He holds an MSc from ENS Aéronautique et Espace (Par- environnements à la fois contraints, conflictuels et massi- is) , MBA from Institut d’études politiques, Dr. Ing. from vement distribués. Univ. Paris 9 , and DSc from Univ. Paris 6, besides execu- Auteur de plusieurs publications et impliqué dans l’enca- tive education at IMD & INSEAD. drement de travaux de thèse, il a également participé à de He has over 400 publications (h-index: 19, g-index: 36, nombreux projets collaboratifs. over 3000 citations, & SSRN rank: in top 1,5 %). BIOGRAPHIES MANAS Arnaud PAVEL Ilarion

Arnaud Manas est ingénieur, docteur en économie et Docteur en physique, ingénieur en histoire. Il est chercheur associé à l’Université Paris en chef des mines, Ilarion Pavel I-Sorbonne (IDHES). Ses travaux portent principalement travaille au sein du Conseil géné- sur l’histoire des monnaies françaises et sur celle de la ral de l’Économie, de l’Industrie, Banque de France. Il a été le modérateur du cycle de de l’Énergie et des Technologies conférences « Monnaies virtuelles et monnaies locales, et du Laboratoire de physique quels enjeux ? » organisé par la Bibliothèque nationale théorique de l’École normale su- de France en mars 2017. Il est aussi l’auteur de deux périeure, dans le domaine de la ouvrages récents : L’Or de Vichy (Éditions Vendémiaire, physique des particules élémen- 2016) et Zweig & la Souterraine de la Banque de France taires et interactions fondamen- (Artélia Éditions, 2016). En 2015, il reçoit le Highlight de D.R tales. l’European Journal of Physics. Il a été ingénieur de recherche chez Thomson-CSF et a effectué un séjour post-doctoral à Caltech (Californie). MARIN-DAGANNAUD Gautier Pendant trois ans, il a travaillé à la délégation régionale de la recherche et de l’innovation de l’Île-de-France, dans Gautier Marin-Dagannaud est le domaine de l’innovation et du transfert de technologie, élève-ingénieur à Télécom Paris- puis il a été en charge durant cinq ans du Réseau national tech et est étudiant en master à de recherche en télécommunication, au ministère de la l’École polytechnique. Il travaille Recherche. Par la suite, au sein de ce même ministère, il a actuellement chez Ledgys, une été conseiller scientifique en nanotechnologies. start-up française développant des solutions blockchain. Il est PEYRAT Olivier également rédacteur chez Ethe- reum France et co-fondateur de Olivier Peyrat est directeur géné- l’association Asseth. ral d’AFNOR (Association fran- D.R çaise de normalisation). Ancien élève de l’École polytech- PAU Louis-François nique, ingénieur en chef au corps des mines, Olivier Peyrat est ad- Louis-François Pau (email: [email protected]) is Professor ministrateur du Comité européen at Rotterdam School of Management, Erasmus University, de normalisation (CEN) et admi- in the field of High tech business , and Adjunct Professor nistrateur de l’Organisation inter- in Mobile business at the Copenhagen business school, nationale de normalisation (ISO). besides other governmental or industrial assignments. D.R Il a été également vice-président He was 1995- 2008 Chief Technology Officer (Executive Finances de l’ISO de 2013 à 2016. Il est par ailleurs admi- CTO) of L.M. Ericsson’s Network Systems division with nistrateur et membre du bureau du Groupe des industries worldwide responsibilities , which he joined from a prior métallurgiques (GIM). position (1990-1995) as CTO for Digital Equipment Europe Olivier Peyrat a également présidé diverses commissions / Hewlett Packard Europe with oversight over engineering ou groupes de normalisation aux plans national, européen staff in Europe and Asia. In this CTO role, he oversaw the et international, ainsi que le CASCO (Conformity Assess- product developments and technology engagements in ment Committee), le Comité de l’ISO chargé de la poli- infrastructure, services and tools. tique ISO et de l’élaboration des normes internationales He was earlier (or in parallel) on the faculties of Danish dans le domaine de l’évaluation de conformité : essais, Technical University, Ecole Nationale Supérieure des certification, inspection, accréditation, etc. Il est égale- Télécommunications (Paris), M.I.T, University of To- ment, depuis 2016, membre du Comité d’experts norma- kyo, and has been lecturing also at: University of Mary- lisation auprès du gouvernement chinois. land, University of Mannheim, University of Regensburg, George Washington University, Institut Aéronautique et de PONS Jérôme l’Espace, University of Brasov. He is on the IEEE European Policy Committee, which in- Jérôme Pons débute sa carrière chez Orange, étant teracts with the Commission on technology policy issues successivement délégué à la normalisation 3GPP, chef

RÉALITÉS INDUSTRIELLES - AOÛT 2017 125 de projet Orange Media Player ROSET Alain (Music Podcasts), chef de projet marketing Web TV (OCS), puis Après des études à l’École polytechnique (75) et à Télécom de responsable du programme Paris Tech (80), Alain Roset débute sa carrière en travaillant de tests d’interopérabilité (IOT). à la conception de l’architecture du premier microproces- En 2011, il fonde la société de seur européen, avant de participer au financement de pro- production de spectacles Music jets d’électronique au ministère de l’Industrie. Après avoir won’t stop, qui se diversifie en participé à l’organisation des Jeux Olympiques d’Albertville

BIOGRAPHIES 2013 en développant une activité où il était en charge des télécommunications, il rejoint La de conseil en matière de tech- Poste pour y exercer des responsabilités opérationnelles nologies et de stratégies numé- au niveau régional, puis au niveau national, au sein de la riques. Spécialiste des enjeux division Courrier. Par la suite il travaille au développement associés à la transformation numérique des secteurs de des technologies de rupture dans les marchés du courrier la culture (financement de la culture, partage de la valeur, et des colis, il teste et développe de nouvelles activités gestion de droits basée sur les métadonnées, protection pour les facteurs, puis rejoint, en 2014, la nouvelle division de la propriété intellectuelle), il a développé une solide ex- numérique qui vient juste d’être créée, il a à y connaître les pertise dans la modélisation et la gestion des données. nouveaux défis numériques que posent les échanges sé- Depuis 2016, il se consacre à la normalisation internatio- curisés de documents, le développement de la technologie nale de la blockchain et anime le groupe de travail « Ar- Blockchain, la traçabilité et l’Internet des objets. chitecture et modélisation » de l’Afnor. Il participe éga- lement à plusieurs groupes d’étude (dont celui consacré ROSSIGNOL Éric aux smart contracts) de l’ISO/TC 307. Ancien élève de l’École normale supérieure de Lyon et de l’École nationale des Ponts et Chaussées, il travaille PROLA Alain pendant cinq ans sur la structuration de produits dérivés Alain Prola est concepteur/dé- sur actions au sein du groupe Caisse des Dépôts, puis, veloppeur d’applications sur pendant une douzaine d’années, au sein du département plateforme Android. Il a co-dé- Titrisation du groupe Crédit Agricole. Il est actuellement veloppé un connecteur Continua en charge de l’analyse quantitative et du laboratoire d’in- dans une chaîne de collecte de novation du département Titrisation, au sein duquel ont données médicales. Précédem- été conçus deux prototypes basés sur la blockchain Ethe- ment il a développé plusieurs reum. applications mobiles pour les pays émergents. Avant cela, il a SOK Klara travaillé pendant dix ans dans la Klara Sok est chercheuse et doc- D.R recherche en microélectronique. torante au CNAM, où elle réalise une thèse sur la blockchain et la RABESANDRATANA Vanessa question de l’intermédiation. Elle Vanessa Rabesandratana est Customer Success Manager s’intéresse tout particulièrement chez Ledger aux changements sociologiques et organisationnels générés par ROBERT Arnaud cette technologie en tant qu’al- ternative organisationnelle aux Arnaud Robert est directeur juridique du groupe Hachette structures existantes. Livre depuis 2011. D.R Il est président du Centre français d’exploitation du droit de copie (CFC) depuis 2014 et président de la mission juri- STEPHAN François dique du Syndicat national de l’édition (SNE) depuis 2016. Il est chargé d’enseignement en droit des médias à l’Insti- François Stephan est directeur tut national de l’audiovisuel (INA). général adjoint en charge du dé- De 1998 à 2001, il a été avocat au barreau de Paris exer- veloppement et de l’international çant au sein du Cabinet Fourgoux & Associés. de l’Institut de recherche techno- Il a ensuite travaillé au sein du groupe de médias NRJ logique SystemX, un Institut dé- Group, en tant que directeur juridique adjoint du groupe, dié à l’ingénierie numérique des de 2001 à 2011. systèmes complexes. Arnaud Robert est titulaire du CAPA (barreau de Paris), du Ingénieur diplômé de l’École po- DESS de droit européen des affaires - Université Paris II lytechnique (86) et de Télécom Panthéon-Assas (L. Vogel) et est diplômé du Trinity Colle- ParisTech (91), il justifie de plus ge of Dublin. D.R de vingt-cinq ans d’expérience professionnelle dans le secteur des technologies de l’in- formation, au sein duquel il a assuré des fonctions de

126 RÉALITÉS INDUSTRIELLES - AOÛT 2017 pilotage de projets, de direction produit, de conseil, de WAIGNIER Christophe direction technique et d’animation d’écosystèmes. Il est co-auteur avec Jean-Pierre Briffaut de l’ouvrage Christophe Waignier pilote les do- Cloud Computing : évolution technologique, révolution maines Finances, Ressources hu- des usages, publié en mai 2013 aux Éditions Hermes maines, Informatique, Stratégie et Science - Lavoisier. Développement de la Sacem. Il est également président de TEMERSON Jean-Marc FastTrack, qui regroupe les treize

sociétés de gestion de droits BIOGRAPHIES Jean-Marc Temerson est ingé- d’auteur les plus importantes du nieur en chef des mines diplômé monde. Ce réseau développe de l’École polytechnique (X 75) des solutions devant permettre et de l’École nationale supérieure D.R un meilleur partage des métadon- des télécommunications (ENST nées musicales entre les acteurs du secteur considéré. 80). Titulaire d’un DEA en mi- Diplômé de l’Institut d’études politiques de Paris, Chris- croélectronique, il a débuté sa tophe Waignier débute sa carrière en tant qu’auditeur carrière au CENT, puis a rejoint chez Price Waterhouse, puis il exerce pendant dix ans en Orange Labs, où il a été succes- qualité de directeur administratif et financier dans l’indus- sivement ingénieur de recherche, trie audiovisuelle. En 1995, il rejoint BMG Entertainment D.R responsable d’équipe et respon- en tant que directeur financier, puis est nommé, en 1999, sable de projet. senior vice-président Finance et opérations Europe. En Débutant celle-ci dans la microélectronique silicium, où il 2003, Christophe Waignier devient directeur général de a piloté de nombreux projets européens, et la poursuivant BMG France, avant d’occuper les mêmes fonctions chez en prospective de services, il s’est ensuite investi dans SonyBMG France. Entre 2008 et 2012, avant de rejoindre le domaine des télécommunications sous l’angle du dé- la Sacem, il a travaillé en tant que consultant dans le do- veloppement durable, puis, dans le cadre de projets eu- maine de la stratégie de transformation des entreprises. ropéens, il a travaillé à la conception de réseaux mobiles reconfigurables, avant de s’intéresser à la télémédecine, WARZÉE Didier plus particulièrement à la télé-imagerie médicale en ana- tomocytopathologie (projet collaboratif national). Ingénieur des mines, diplômé Depuis 2015, il s’implique dans la télécollecte de données de l’École nationale de la sta- de santé issues des objets connectés. Plus récemment, son tistique et de l’administration travail s’est centré sur l’intérêt que revêtent certains méca- économique et actuaire certifié nismes de la Blockchain en matière de gestion du consen- de l’Institut des actuaires, Di- tement des patients à l’accès à leurs données médicales. dier Warzée est expert au sein Auteur de nombreuses publications et responsable d’en- du Pôle Fintech Innovation de cadrement de travaux de thèse, il est retraité d’Orange l’ACPR. Après avoir débuté sa depuis mars 2017. carrière en qualité d’actuaire, il développe une expertise en risk WAELBROECK Patrick D.R management, avant d’encadrer une équipe de scoring au sein d’une société de finance- Patrick Waelbroeck est titulaire d’une thèse en écono- ment. En 2009, il rejoint l’ACPR pour intégrer des équipes mie de l’Université de Paris 1 Panthéon-Sorbonne et est de contrôle des organismes d’assurance. De 2013 à juin professeur d’économie industrielle et d’économétrie à 2016, il est nommé adjoint au sein du service des orga- Télécom ParisTech. Ses travaux portent sur l’économie nismes d’assurance, où il est en charge des agréments. de l’innovation, l’économie de la propriété intellectuelle, Il fait depuis lors partie de l’équipe constituante du pôle l’économie de l’Internet et des données personnelles. Il Fintech-Innovation de l’ACPR. est membre du bureau de l’association EPIP (European Policy for Intellectual Property), dont il a été le président ZOUARHI Sajida en 2013-2014. Il est cofondateur de la chaire « Valeurs et politiques des informations personnelles » de l’Institut Sajida Zouarhi est ingénieure et Mines-Télécom qui aborde les problèmes des données doctorante en informatique et ré- personnelles et du Big data sous différents angles : juri- seaux depuis 2014 chez Orange dique, économique, technique et philosophique. Patrick Labs et au LIG (Laboratoire d’in- Waelbroeck enseigne l’économie de l’Internet et des formatique de Grenoble INP). données dans le mastère spécialisé Big data de Télécom Ses travaux de recherche portent ParisTech, ainsi qu’aux ingénieurs élèves du corps des sur la qualité de service de sys- mines. Il est area editor de la revue Annals of Telecom- tèmes complexes et hétérogènes munications et membre du comité éditorial du Journal of de transmission de données cri- Cultural Economics. tiques. Elle étudie également les D.R mécanismes des blockchains.

RÉALITÉS INDUSTRIELLES - AOÛT 2017 127 Cofondatrice de l’association française Chaintech, elle Elle est également l’auteure de plusieurs publications en crée en 2015 la communauté Magmateek, constituée lien avec la blockchain et notamment d’un outil de ré- autour d’un meetup blockchain à Grenoble, celle-ci ras- flexion, le Blockchain Canvas, qui est utilisé par différents semble plus de 330 personnes qui s’intéressent à diffé- acteurs (Healthcare Data Institute, EDF, Orange, etc.) et rents sujets (impacts et défis de la blockchain et projets dans le cursus scolaire d’élèves ingénieurs (ESILV). de demain). Elle assure depuis 2015 le pilotage du projet Kidner, un Elle a participé à la création du BlockFest, le premier fes- projet collaboratif qui vise à réduire le temps d’attente des tival pédagogique des blockchains. La première édition personnes ayant besoin d’une greffe de rein en augmen-

BIOGRAPHIES de ce festival a été organisée par l’École 42 en juin 2016, tant leur chance de trouver un donneur compatible grâce elle a été suivie depuis lors de plusieurs autres éditions au don croisé (www.kidner-project.com). (Rennes, Grenoble, etc.).

128 RÉALITÉS INDUSTRIELLES - AOÛT 2017