Un Kosovo Unitaire Divisé
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No 51 Politorbis Zeitschrift zur Aussenpolitik www.eda.admin.ch/politorbis Revue de politique étrangère Rivista di politica estera Un Kosovo unitaire divisé Les politiques des acteurs locaux et internationaux au Nord du Kosovo à la lumière de la division de la région de Mitrovica 1 / 2011 Contact: Federal Department of Foreign Affairs FDFA Directorate of Political Affairs DP Political Affairs Secretariat POLS Politorbis Bernastrasse 28 3003 Bern Phone: + 41 31 325 81 52 Fax: + 41 31 324 38 39 mailto: [email protected] www.eda.admin.ch/politorbis Die Texte werden normalerweise in der Sprache der Verfasser gedruckt. Der Inhalt muss nicht zwingend mit der Meinung des EDA übereinstimmen. En principe, les articles sont publiés dans la langue de travail de leurs auteurs. Le contenu ne reflète pas nécessairement la position du DFAE. The articles are published usually in the language in which they were written. The contents do not necessarily reflect the views of the FDFA. 2 Politorbis Nr. 51 – 1 / 2011 Politorbis Table des Matières Préface 5 1. Introduction 11 1.1. Définitions constitutionnelles du Kosovo 11 1.2. Les prérogatives de l’Etat au Kosovo dans la pratique 14 1.3. Approche 16 2. Environnement humain au Nord du Kosovo 19 2.1. Grille d’analyse, hypothèses et concepts 20 2.2. Géographie 24 2.3. Populations : descriptions et chiffres 25 2.4. La division au quotidien 28 2.5. Economie 30 2.6. Niveaux de vie 32 2.7. Perceptions 34 2.8. Conclusions 41 3. Institutions 43 3.1. Trois niveaux de blocages 43 3.2. Etat de droit : quel droit ? 43 3.3. Institutions locales 44 3.4. Efficacité des institutions ? 46 3.5. Les institutions vues par les citoyens 47 3.6. Conclusions 50 4. Organisations internationales 53 4.1. MINUK, OSCE, KFOR 53 4.2. EULEX 54 4.3. ICO / EUSR 55 4.4. Le facilitateur de l’UE pour le Nord du Kosovo 61 4.5. Conclusions 61 Politorbis Nr. 51 – 1 / 2011 3 5. Stratégies et discours 65 5.1. Absence de dialogue – politique du fait accompli 65 5.2. Discours inachevés 65 5.3. Stratégie de Belgrade 66 5.4. Stratégie de Pristina 68 5.5. Du partage à la partition ? 68 5.6. Implications d’une partition pour le Kosovo 69 5.7. Dialogue et coopération régionale 71 6. Conclusions 73 7. Recommandations 77 Abréviations 81 Bibliographie 83 4 Politorbis Nr. 51 – 1 / 2011 Préface1 Olivier Haener2 Mars 2011 Trois ans après la déclaration de son indépendance, l’unité du Kosovo. Pourtant, plutôt que d’être le Kosovo est un Etat indépendant et souverain selon pleinement indépendant ou pleinement la Constitution du Kosovo, une province autonome intégré à la Serbie, le Kosovo est, dans les faits, de la Serbie selon la Constitution de Serbie et une divisé. Au quotidien, la partie du Kosovo se entité sous administration internationale provisoire trouvant au Sud de la rivière Ibër/Ibar,3 soit selon le Cadre constitutionnel établi par la Mission la plus grande, peuplée en large majorité d’Administration Intérimaire des Nations Unies d’Albanais, fonctionne à maints égards comme un au Kosovo (MINUK), basée sur la Résolution 1244 Etat indépendant ; tandis que la partie Nord, adjacente (1999) du Conseil de Sécurité de l’ONU. Ces trois à la Serbie, fonctionne en bien des points com- fondements juridiques, à l’évidence contradictoi- me une partie cette dernière. Ainsi, aucune des res entre eux, définissent la forme de l’Etat sur ce définitions précitées de l’Etat ne correspond petit territoire de moins de 11’000 km2, peuplé de entièrement à la réalité. près de 2 millions de personnes. La « communauté internationale » est également divisée sur la Dans ce contexte, la région de Mitrovica acquiert question, puisqu’à ce jour, en mars 2011, 75 une signification particulière, puisqu’elle est le lieu Etats sur 192 membres de l’ONU ont reconnu de confrontation de ces divers systèmes, le lieu où l’indépendance du Kosovo. les contradictions deviennent apparentes, le lieu même de la division. Division entre populations, Bien que contradictoires entre elles, ces trois cultures, perceptions, modes et niveaux de vie et, de définitions de l’Etat au Kosovo ont cependant au manière bien plus marquée depuis 2008, entre systèmes moins une chose en commun : toutes affirment politiques et institutionnels. De fait, si l’on considère la carte des populations plutôt que celle des Etats, 1 Ma grande reconnaissance va aux amis qui à Mitrovica — au la rivière Ibar trace à peu près la limite entre une Sud comme au Nord —, m’ont accueilli, encouragé, soutenu et réjoui, de même qu’à ceux de Pristina, de Belgrade, de Tirana, aire de population à majorité serbe qui s’étend au de Skopje, de Sarajevo, de Fribourg, de Lausanne, de Berne, de Nord jusqu’à la Hongrie et une zone de peuplement Baden, de Berlin, de Londres, de New York, du Pied du Jura, à majorité albanaise qui s’étire au Sud jusqu’à la de la Côte et du Lavaux, du Seeland, du Pays de Gex ou de Grèce. Rhénanie-du-Nord-Westphalie pour leur écoute et leur conseil. Mes remerciements particuliers vont au Département fédéral des Affaires étrangères qui a rendu cette étude et sa publica- tion possibles (et spécialement la DP IV et le POLS). Ma gratitude s’adresse tout particulièrement à Monique 3 Les toponymes au Kosovo connaissent des formes variables en Schafer et Noémie Charton pour la relecture du manuscrit, langue albanaise et en langue serbe. Ils sont parfois identiques, comme à Marlene Stefania pour son attention à la mise en comme dans le cas de Prizren (à la fois en albanais et en serbe, page. prononcé « Prizrène » en français), ou proches comme dans le 2 Olivier Haener est analyste politique indépendant, spécialisé cas de Prishtinë (en albanais, prononcé « Prichtine » en fran- sur l’Europe du Sud-Est. Historien et slaviste de formation, il çais) / Priština (en serbe, prononcé « Prichtina » en français), a travaillé de 2000 à 2008 comme analyste politique pour les parfois ressemblantes, comme pour Gjakovë (en albanais, Balkans au Centre d’analyse et de prospective du Département prononcé « Djakove » en français) / Đakovica (en serbe, pro- fédéral des Affaires étrangères (DFAE), puis au Kosovo (de noncé « Djakovitsa » en français), voire de racine différente 2008 à 2009) comme Policy Adviser au bureau de Mitrovica comme Skënderaj (en albanais, prononcé « Skendéraille » en de l’International Civilian Office / EU Special Representative français) / Srbica (en serbe, prononcé « Srbitsa » en français). (ICO/EUSR). Il est membre du Pool d’experts suisse pour la Dans ce texte, on indiquera, la première fois, les deux noms et promotion civile de la paix. Le présent travail est basé sur des ensuite, une forme unique, pour simplifier la lecture. Les diffé- recherches menées entre l’été 2009 à l’été 2010 et ne tient pas rentes variantes sont utilisées indifféremment et sans sous-en- à rendre compte des évolutions survenues entre cette période tendre d’implication politique à l’usage de telle ou telle langue. et la date de publication ; malgré l’accélération des événements De manière générale les formes les plus répandues en français des derniers mois, il nous semble que les tendances de fond seront utilisées, telle Pristina (et non Prishtinë ou Priština) et décrites ici gardent dans l’ensemble leur pertinence. Mitrovica (et non Mitrovicë ou Kosovska Mitrovica). Politorbis Nr. 51 – 1 / 2011 5 De ce point de vue, Mitrovica est une dépende à nouveau de Belgrade, même si ceci périphérie. C’est même deux périphéries. Ou pouvait avoir quelques avantages pratiques. De la plutôt deux demi-périphéries : Mitrovica Nord sorte, ni les populations ni leurs élites ne sont pas gravite autour de la capitale de la Serbie, Belgrade prêtes à échanger leur dépendance contre celle de (à 350 km), Mitrovica Sud autour de la capitale l’autre communauté. du Kosovo, Pristina (à 35 km). Comme bien des villes-frontières, leur développement se passe Prise dans sa perspective locale, la problématique loin des centres et, dans ce cas, sans possibilité de de Mitrovica réside dans le cumul d’un conflit compensation par des relations de bon voisinage, en intercommunautaire et d’une profonde crise de tout cas à court terme. désindustrialisation. Le premier est bien plus médiatisé que la seconde, dans laquelle pourtant Divisée et doublement périphérique, Mitro- résident probablement des causes plus vica, en tant que ville, donne l’impression d’un profondes du conflit. Une troisième strate s’ajoute dépérissement et d’un non sens, de deux non par la dimension de point de cristallisation de sens. Nombre de ses habitants nés dans une autre l’affrontement entre Belgrade et Pristina qui Mitrovica (« à l’époque où nous ne savions pas qu’il caractérise la région; une quatrième par y avait un Nord et un Sud »), souligne avec une la dimension internationale prise par le tristesse amusée que les ponts ici ne rapprochent conflit (en termes de reconnaissances, des pas, mais divisent. organisations internationales, et des missions sur place). Aussi, est-ce dans cette agrégation de A cette situation périphérique s’ajoute une situation causes qui faut à notre avis voir la particularité de de dépendance. Au Sud comme au Nord, aucune la situation à Mitrovica et non dans la seule production économique substantielle ne caracté- dimension communautaire. rise plus cette région, ainsi privée de moyens de subvenir à ses besoins et donc orientée vers la dépen- Le quotidien de cette « double périphérie dépendan- dance envers des pôles lui garantissant une subsistan- te » se résume souvent à la mise en place de stratégies ce. De fait, la région de Mitrovica qui, avec ses mines de captation des ressources provenant de ses centres et son combinat métallurgique, était — à l’époque de respectifs comme de la « communauté internatio- la Yougoslavie socialiste — la plus riche du Kosovo, nale » (donations, tenders, emplois, exemption de en est devenue la plus pauvre, celle qui connaît le taxes ou de paiement de services).