CANTATES PECHINEY Parraine
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J.-S. BACH CANTATES PECHINEY parraine La musique baroque témoigne d'un temps où la créa- tion, au-delà des frontières et des langues, voulait s'adresser au plus grand nombre et établir un dialo- gue universel. PECHINEY, entreprise française de dimension inter- nationale, choisit d'ancrer dans la culture française l'action de parrainage qu'elle entreprend en liant son nom à celui des ARTS FLORISSANTS de William Christie pour la diffusion d'une esthétique qui aide à la compréhension du monde contemporain. Un chef américain à la tête d'une formation qui a pris son nom dans le dix-septième siècle français, des interprètes jeunes et désireux de faire vivre un art du passé, sans pour autant s'y confiner, tous portés par une exigence de perfection : ces éléments ont dicté le choix de PECHINEY. A ses 70.000 employés répartis dans le monde et à tous ses partenaires aux cultures variées PECHINEY dédie cet engagement. CANTATES DE BACH (1685-1750) PROGRAMME "Non sa che sia dolore" BWV 209 "Ich habe genug" BWV 82 5e Concerto brandebourgeois BWV 1050 "Schweigt stille, plaudert nicht" BWV 211 (Kaffee-Kantate) DISTRIBUTION Soprano : Sandrine Piau Ténor : Mark Padmore Basse : Jérôme Corréas Violons : Ryo Terakado Florence Malgoire Alto : George Willms Hautbois : Marcel Ponseele Flûte traversière : Marc Hantaï Violoncelle : Bruno Cocset Contrebasse : Vincent Charbonnier Clavecin et direction : Christophe Rousset AOÛT 1991 Le 24 à 21 h 00 Coutances Cathédrale Le 25 à 18 h 00 Bagnoles-de-l'Orne Auditorium Le 26 à 21 h 00 Lisieux Cathédrale Saint-Pierre Le 28 à 21 h 00 La Souterraine Eglise Le 29 à 21 h 00 Bourges Salle du Duc Jean Le 31 à 17 h 00 Utrecht Geertekerk Festival d'Utrecht Avec la participation du ministère de la Culture, de la ville de Caen, du Conseil régional de Basse-Normandie et de PECHINEY LPRO 1991/19 Si l'emploi du terme de "cantate" a été étendu à une grande variété de formes d'oeuvres chantées, Bach n'utilise que rarement une dénomination qui peut recouvrir chez lui aussi bien une allégorie mythologique qu'un véritable petit oratorio, un grand cérémonial sonore autant qu'un divertissement privé. Mais on oublie parfois un peu quelle place primordiale tiennent le chant et la pratique instrumentale dans la vie quotidienne d'une société à ce point imprégnée de musique que l'est celle de l'Allemagne du début du XVIIIe siècle : la musique accompagne toutes les manifestations de la vie sociale, et pour être moins connue, la consommation musicale dans les foyers - la "Hausmusik" - n'en joue pas moins un rôle essentiel. Profanes ou religieuses, méditatives ou familières, les trois cantates de ce programme sont Reproduction B.N. caractéristiques de l'intimité du compositeur. Pouvant être jouées dans le petit cercle de la famille et des proches, on ne saurait donc les exécuter aujourd'hui que dans la texture sonore d'un ensemble extrêmement réduit, tel qu'on pouvait alors le réunir dans l'intimité de l'environnement domestique : deux violons et un alto, ici ou là un instrument à vent apportant sa touche de couleur et de poésie, et un continuo (violoncelle, contrebasse et clavecin), auxquels se joignent un ou deux, voire trois solistes vocaux - mais pas d"'orchestre" ni de chœur, évidemment. Trop rarement exécutée, la Cantate Non sa che sia dolore figure au nombre des pages profanes relevant directement de la pratique musicale domestique, conviviale ; loin de toute célébration officielle, on y voit quelques amis réunis pour fêter en musique le départ de l'un d'eux. Et bien entendu, ladite musique se doit d'être à la mode ! Or, de toutes les cantates de Bach, c'est ici l'une de celles qui soulèvent le plus de questions sans réponse à ce jour. Qu'on en juge : elle est écrite, fait rarissime chez Bach, en italien, à partir de quelques vers d'opéras du temps raboutés tant bien que mal ; mais ce texte semble avoir été ajouté après coup à la place d'un autre, perdu... comme l'est l'autographe lui-même, la cantate n'étant connue que par une copie tardive. On ignore tout des circonstances possibles de sa composition, de sa date, et on se demande même si elle est authentique. Le livret nous apprend seulement que l'ami qui s'éloigne est jeune et intelligent, plus vertueux encore, et qu'il se rend à Ansbach. Si minces soient-elles, ces indications ont permis d'échafauder plusieurs hypothèses qui toutes tendent à dater cette œuvre de la maturité du compositeur, dont elle présenterait une face moins connue, celle du musicien attiré par le style nouveau de l'opéra italien qu'il a connu à Dresde dans les années 1730-1740. Trois parties principales la composent, une sinfonia instrumentale et deux airs, tous deux précédés d'un bref récitatif ; ces trois morceaux obéissent à la forme da capo, que Bach pratiquait alors et qui procède des airs de l'opéra italien de l'époque. On a de longue date relevé la parenté de la sinfonia liminaire, en si mineur, avec l'allégro de la Suite pour orchestre dans la même tonalité ; beau mouvement concertant, où la flûte traversière dialogue avec les cordes dans un tissu contrapuntique ici moins rigoureux, mais très habilement maillé dans sa combinaison de divertissements et d'éléments de refrain. Le premier air, en mi mineur, est celui de la séparation douloureuse. Dans une carrure binaire (mesure à quatre temps), la flûte se déploie en guirlandes de sextolets qui semblent évoquer l'inévitable fuite de l'ami ; on remarquera également les doux halètements instrumentaux qui escortent l'évocation de l'onde et des vents. Et alors que l'on s'attend à un retour à si mineur, le soprano s'élance pour son second air en un dansant sol majeur à trois temps qui, malgré la solidité très bachienne de son élaboration, fait davantage songer à une ariette de Pergolèse ou de Hasse, le jeune ami de Dresde. Est-il donc bien de Jean-Sébastien ? Accents rythmiques, harmonie, ornementation pittoresque de la flûte, simplicité presque populaire du chant appartiennent en effet à un monde sonore qui est beaucoup plus celui de La Servante maîtresse de Pergolèse (1733), voire de la Cleofide de Hasse (1731) que d'un air de la Messe en si mineur de Bach (1733). Si le climat change du tout au tout avec la Cantate Ich habe genug, il n'en demeure pas moins étroitement lié à une dévotion intime, et même personnelle. Bach devait d'ailleurs tenir tout particulièrement à cette œuvre et à ce qu'elle véhiculait pour lui d'essentiel, puisque après l'avoir fait jouer en 1727 dans un premier état pour basse avec hautbois solo (celui qui est habituellement joué au concert ou au disque aujourd'hui), il en donna une nou- velle version transposée pour soprano, sans doute à l'intention d'Anna Magdalena, en 1731, puis une autre encore en 1735, pour mezzo-soprano avec flûte solo, et puis une dernière, à nouveau pour basse, mais cette fois avec hautbois da caccia. En outre, le musicien devait en recopier deux morceaux (le premier récitatif et la fameuse "berceuse mystique" qui le suit) dans le Notenbiichlein d'Anna Magdalena, ce journal intime tenu de longues années par la famille Bach. L'auteur du texte - anonyme, serait-il Jean-Sébastien lui-même ? - s'y exprime à la première personne pour paraphraser le Nunc dimittis ou Cantique de Siméon. On sait qu'accomplissant le rite de purification, au quarantième jour suivant la naissance de son fils (le 2 février, donc, fête de la Chandeleur), Marie s'en vint présenter l'enfant Jésus au Temple de Jérusalem. Entre alors un vieillard pieux et juste, Siméon, à qui il avait été révélé qu'il ne mourrait pas sans avoir vu le Messie ; inspiré par l'Esprit saint, le vieillard prend l'enfant dans ses bras et le bénit. Tout est accompli, il peut désormais quitter en paix cette terre : "Ich habe genug", "Je suis comblé !". Ainsi, la longue introduction instrumentale de la cantate, en ut mineur, confie-t-elle au hautbois une langoureuse mélopée (très proche de l'air "Erbarme dich, mein Gott" dans la Passion selon saint Matthieu), où se reflète la nostalgie d'une mort pacifiée, le désir presque sensuel du long sommeil qui reposera l'homme des vicissitudes de la vie terrestre avant le réveil et la nouvelle naissance, pour une félicité éternelle ; c'est ce chant que reprend la basse, dialoguant alors avec les vibrantes arabesques du hautbois. Le récitatif qui suit, avec sa section arioso ("Allons-nous-en avec cet homme"), prolonge le climat de l'air, avant le très célèbre "Schlummert ein" (en mi bémol majeur) dans lequel le chrétien se laisse doucement envahir par le sommeil de la mort libératrice. Un nouveau et très bref récitatif, conclu par un "Gute Nacht" typiquement germanique, amène à l'air final qui boucle la cantate en ut mineur : vivace, à 3/8, on y entend le juste Siméon - ou le croyant Bach -, comme déjà délivré mentalement de la vie, s'élancer joyeusement vers la mort : l'accord d'ut majeur qui termine l'œuvre apporte enfin la lumière tant désirée. On ne présente pas le Cinquième Concerto brandebourgeois, concert royal s'il en fut. Mais en pareil contexte, il faut rappeler que s'il en appelle volontiers à des exécutions sinon "orchestrales", du moins à effectifs assez fournis, il se prête également au divertissement intime de quelques musiciens. Et il y a tout lieu de penser que si le compositeur le fit jouer en public avec l'apparat désirable, il dut aussi en faire sa délectation privée : en témoignent les parties séparées que l'on a conservées de sa main même, ainsi qu'un autre jeu copié par son gendre Altnikol.