Brochure 1943.Indd
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1943 Opérations contre les maquis 4 - 5 et 11 - 12 décembre Banon – Redortiers-le-Contadour – Col de Blaux Banon, Redortiers et les maquis Le capitaine de gendarme- de la montagne de Lure rie qui commande la section (Basses-Alpes, décembre de Forcalquier souligne, dans 1943-janvier 1944) son rapport au préfet du 30 novembre 1943, que dans sa circonscription des « crimes et «Vous tendez une allumette délits » (assassinats, incendie, à votre lampe et ce qui s’al- vols simples ou vols à main ar- lume n’éclaire pas. C’est loin, mée…) relèvent de deux foyers très loin de vous, que le cercle animés, selon ses propos, par s’illumine. » des « réfractaires ou autres » : René Char, Feuillets d’Hypnos, 120 l’un se situe entre Sisteron (Basses-Alpes), Ribiers, Laragne Secteur de Banon (photographie actuelle) et Orpierre (Hautes-Alpes), Coll. Mairie de Banon C’est une rude nuit d’hiver. Près l’autre dans la région comprise de quatre-vingts hommes por- entre Sault (Vaucluse), Séderon tant l’uniforme allemand, com- (Drôme) et Banon (Basses- mandés par un lieutenant (ou Alpes). Le capitaine conclut : un sous-lieutenant), sautent de quatre camions, descendent « Tous ces événements ont de deux voitures de tourisme. soulevé une grande émotion Ces hommes des « formations dans la région. La population de la sûreté des troupes alle- est très effrayée... L’action mandes » d’après la gendarme- de la gendarmerie est sans rie, ou de la « police de sûreté grande efficacité dans ces ré- allemande » selon la préfecture, gions vastes, montagneuses consultent leurs cartes, révisent et assez désertiques, et dans leurs listes, vérifient leur arme- lesquelles la densité des bri- ment. Ils se préparent à arrêter gades et leur effectif sont d’autres hommes, dont certains très faibles. Seules, des ac- à cette heure dorment profon- tions de forces importantes dément. Ils se rendent ensuite paraissent avoir quelques au domicile de ces personnes ou chances de succès. se dirigent vers des camps rudi- Les enquêtes et les recherches mentaires installés dans la mon- continuent. Elles sont diffi- tagne de Lure, occupés par des ciles, la population étant peu jeunes hommes qui, réfractaires prolixe. » au Service du Travail Obligatoire (STO), ont refusé leur départ La région de Banon n’a pas en Allemagne. Certains ont fui seulement attiré l’attention des Marseille et sa région afin de se autorités françaises. L’occupant cacher dans la montagne. allemand s’y intéresse aussi. 2 les gendarmes, Arnaud « a pu s’enfuir dans la nuit au moment où les perquisitions commen- çaient ». Son bureau et son domicile font l’objet d’une per- quisition. L’opération se poursuit tout d’abord à Redortiers, où le maire, Justin Hugou, 42 ans, cultivateur, père de deux en- fants, est arrêté à son domicile ; Secteur de Banon (photographie actuelle) puis, à l’école communale où, à Coll. Mairie de Banon trois heures, c’est au tour de Maurice Meffre, 20 ans, céliba- Dans la nuit du samedi 4 au taire, cultivateur à la ferme de dimanche 5 décembre 1943, l’œuf à Montsalier et de Louis vers 23 heures, les militaires Joseph, l’instituteur. Le médecin et les policiers allemands fon- André est accusé par les auto- dent brutalement sur le village rités allemandes de soigner les de Banon, neutralisent les gen- réfractaires, les autres de les darmes puis les gardent à vue, ravitailler, les héberger ou les coupent toutes les communica- transporter. tions téléphoniques. Les arres- tations s’enchaînent. Les forces Parallèlement, les militaires allemandes arrêtent, à Banon, à continuent leur opération de 23 heures 15, Pierre Martel, 55 « nettoyage » à partir d’une ans, et son fils Louis, 18 ans, heure du matin. Selon l’historien l’un et l’autre mécanicien ; à Jean Garcin, dans la montagne minuit 30, Henri Martin, 32 ans, sur la commune de Redortiers, exploitant forestier ; à minuit la troupe armée cerne les camps 45, Robert Icard, 34 ans, cor- des groupes des Aupillières et donnier ; à une heure du matin, de Cayandron et arrête une Jean André, 30 ans, médecin, vingtaine de réfractaires. En marié, un enfant. revanche, prévenus à temps, À Banon, l’ingénieur des Ponts les groupes des Granges-de-la- et Chaussées, M. Arnaud, est Roche et des Plaines, installés particulièrement visé par la sur la commune du Contadour, rafle car il serait « le chef d’une réussissent à se disperser. Trois organisation ayant pour but fermes abandonnées ayant ser- de recruter, loger et ravitailler vi à abriter les réfractaires sont les réfractaires ». Mais, selon incendiées. 3 tables » et vingt « défaillants » et « déserteurs des chantiers de jeunesse ». D’après l’historien spécialiste de la Résistance Jean- Marie Guillon, sept sont conduits à Hyères, où se trouve la GFP (la police militaire allemande), puis à Bandol où ils sont inter- rogés et torturés avant d’être envoyés à Marseille. Ce jour-là, les troupes allemandes, et parmi elles des Brandebourgeois, se sont contentées de faire des prisonniers. Par la suite, au cours de telles opérations, les Brandebourgeois procéderont le plus souvent à des exécutions précédées de tortures. Henri Martin est libéré de la Place en hommage à Pierre Martel prison des Baumettes fin dé- (Banon) cembre 1943, le docteur André Coll. Mairie de Banon le 6 février 1944. Pierre et Louis Martel, Robert Icard, Le 5 décembre, à 15 heures, à Justin Hugou, Louis Joseph et la suite des démarches entre- Maurice Meffre sont déportés de prises auprès des autorités alle- Compiègne en Allemagne par le mandes par le commandant de convoi du 6 avril 1944 : Louis la compagnie de gendarmerie, Martel et Robert Icard à Melk le préfet et l’intendant de police puis Ebensse, d’où ils sont libé- de Marseille, les gendarmes sont rés le 6 mai 1945, Louis Joseph libérés et récupèrent une partie à Melk puis Mauthausen, d’où il de leur armement. D’après le est libéré le 5 mai 1945. Quant commandant de la gendarmerie à Pierre Martel et Justin Hugou, des Basses-Alpes, « la caserne ils meurent en déportation : le a été évacuée à 17 heures 30 premier, qui souffrait depuis très en même temps que les per- longtemps d’une affection aor- sonnes conservées par la troupe tique et d’une lésion cardiaque, étaient conduites en camion à à Gusen en novembre 1944, le Marseille ». Au total, selon les second à Melk le 13 décembre différents rapports, vingt-huit 1944. Les gendarmes n’ont pas hommes sont arrêtés : huit « no- relevé les noms des réfractaires 4 arrêtés le 5 décembre 1943. écrit à son ministre le 17 janvier Parmi eux, selon l’historien Jean 1944 que l’état-major de liaison Garcin, des hommes ne revien- allemand installé à Digne : dront pas de la déportation, tels Robert Menache, Jean Weis ou « m’a fait appeler ce matin. un Italien, Genaro Brando, mort Il m’a dit que les services de à Melk le 8 juillet 1944. Jacques police allemands de Marseille Paget dit Marco, déporté par avaient reçu certaines décla- le même convoi à Melk puis rations de personnes arrêtées Ebensse, est libéré en 1945 d’après lesquelles M. Arnaud en même temps que Martel et était chargé de ravitailler les Icard. terroristes, notamment en car- burant et qu’en conséquence, Peu après les arrestations, les ils considéraient que le stock autorités françaises – en premier d’essence de Banon était des- lieu le préfet – entreprennent tiné à « l’Armée secrète » et des démarches afi n d’obtenir la ne serait pas restitué. » libération des prisonniers. Elles tentent aussi de récupérer les En décembre 1943, les troupes 750 litres d’essence confi squés d’opération allemandes conti- par les Allemands au cours de nuent leur action de déman- leur opération dans les locaux tèlement des maquis. Le 9 dé- des Ponts et Chaussées à Banon, cembre, le maquis de Pomet qui constituaient la réserve utili- (Hautes-Alpes) est attaqué par sée pour le déneigement de la des militaires allemands sou- route nationale 550. L’ingénieur tenus par des policiers français en chef du département, Liotard, des Groupes mobiles de réserve (GMR). Dans la nuit du 11 au 12 décembre, les Allemands inves- tissent sans coup férir le camp Robespierre au col de Blaux. Surpris dans leur sommeil, quatorze hommes sont arrêtés et transférés à Marseille. Selon Jean Garcin, treize sont jugés par la justice militaire allemande : dix sont condamnés à mort et fusillés le 31 mars 1944, deux – des Italiens – sont condamnés Plaque en hommage à Justin Hugou aux travaux forcés, un autre est dans le patio de la mairie de Redortiers – Le Contadour déporté, le dernier est envoyé au Coll. particulière STO. 5 Rapport des renseignements généraux sur les opérations allemandes des 4 et 5 décembre (6 décembre 1943) Archives départ. des Alpes-de-Haute-Provence, 42W102 (préfecture, cabinet) 6 Télégramme adressé par la préfecture des Basses-Alpes à Vichy sur les opérations allemandes des 4 et 5 décembre (5 décembre 1943) Archives départ. des Alpes-de-Haute-Provence, 42W102 (préfecture, cabinet) Pierre Martel, arrêté dans la nuit du 4 au 5 décembre 1943 à Banon. Mort en déportation en novembre 1944 Coll. particulière Robert Icard, arrêté dans la nuit du 4 au 5 décembre 1943 à Banon Coll. particulière 7 e La 8 compagnie leurs dires, il s’agissait de Brandebourg miliciens qui s’étaient infil- trés dans leur rang. Toutefois, Les Français revêtus de l’uni- j’ignorais où se trouvaient ces forme allemand – de jeunes cadavres, et où avait eu lieu gens, souvent membres du l’exécution. Parti populaire français de D’après les dires des jeunes, Doriot – sont des militaires de il s’agit de deux sujets ita- la 8e compagnie Brandebourg.