Laissez-Vous Conter Les Retables En Coëvrons-Mayenne
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Villes et Pays d’art et d’histoire Le Pays Coëvrons-Mayenne laissez-vous conter les retables en Coëvrons- Mayenne Les retables en Mayenne « Le centre, la raison d’être de toute église, est l’autel, lieu normal du sacrifice cultuel ». 1 Les églises du département de la Mayenne et donc du Pays d’art et d’histoire Coëvrons- Mayenne, sont riches d’un meuble monumental dont le rôle est de mettre en valeur l’autel. Au XVII e siècle, un architecte actif autour de Laval a même conçu et développé un modèle de retable aux formes originales et caractéristiques. Le rôle du retable dans la liturgie catholique. On l’aura compris à la citation ci-dessus, l’autel, lieu Ce thème est repris dans une œuvre un peu plus où le prêtre célèbre l’Eucharistie, est l’élément le plus tardive, conservée à Saint-Berthevin-la-Tannière. important dans la liturgie catholique. Quelques églises conservent des panneaux de retables À cause de son statut, il a très vite fait l’objet de en bois figurant des scènes ou des personnages peints. toutes les attentions des architectes et a été entouré de Ils proviennent souvent de polyptiques amputés ou l tout le faste dû à son importance. Pour compléter son démembrés (basilique d’Évron). Deux retables à dais e décor, on prit l’habitude de placer une « image » en de la fin du XV e et du début du XVI e siècle viennent t u retrait de la table : retro tabulam , qui a sans doute compléter la liste des retables médiévaux. Le premier, a e ’ donné le mot retable. Celui-ci a donc pour fonction conservé à Mayenne au début du XX siècle et l principale de comporter une iconographie dans un disparu depuis, était en bois et représentait un r e encadrement plus ou moins grand et plus ou moins Calvaire entouré de donateurs. Le second, sculpté i f i orné. dans du tuffeau et dédié à Notre-Dame-de-Pitié, est n La date d’apparition des premiers retables reste énig - toujours visible dans l’église de la Chapelle-Rain - g a matique. Les premières mentions certaines datent du souin. XI e siècle et les plus anciennes œuvres conservées sont Comparée au Moyen Âge, la Renaissance en m du XII e siècle. Ils sont souvent en pierre ou en cuivre. Mayenne est relativement pauvre en retables conser - r u Les retables se multiplient par la suite et se dévelop - vés. Pourtant, ceux-ci attestent une évolution stylis - o pent en dimension grâce à la présence de volets rabat - tique de cet art et notamment l’adoption des formes p tables, parfois superposés. On les appelle alors des architecturales antiques (retable de la chapelle Saint- e l polyptiques. Eustache dans l’église d’Hambers, retable de la b Nativité dans l’église de Vimarcé). a t Les retables médiévaux et de la Renaissance. Au lendemain des Guerres de Religion, le renouveau e En Mayenne, les retables les plus anciens datent du spirituel issu de la Contre-Réforme provoque la r XV e siècle et se caractérisent par une grande diversité transformation des églises et surtout la multiplication n de formes et de matériaux. Toutefois, les thèmes des retables. Le marbre noir d’Argentré et le marbre U iconographiques représentés sont relativement rose de Saint-Berthevin, sans doute utilisés dans deux communs et centrés sur la vie du Christ ou de la autels placés en 1580 dans la nef de Notre-Dame- Vierge. L’église paroissiale de Saulges abrite le retable d’Avesnières, contribuent au renouvèlement stylis - de Valtrot, qui date de 1401. Sculpté dans du calcaire tique du retable. Ces matériaux commencent à être et peint, il représente une scène de Calvaire. largement employés, sous forme d’incrustations et de colonnes. Calvaire (XV e siècle) : église de Saint-Berthevin-la-Tannière (détail). Le retable lavallois : style, architectes et zone surplombant le tabernacle, et encadré par des niches d’influence. latérales où des statues en terre cuite de saints Le début du XVII e siècle représente pour les artistes prennent place, la plupart du temps. Le niveau retabliers du Bas-Maine une période de création supérieur est occupé par d’autres niches accueillant féconde, qui va les conduire à inventer un retable aux des statues de saints. formes originales, promis à une grande diffusion au Autre caractéristique du retable lavallois : la perma - cours du siècle. Il va prendre le nom de « retable nence des matériaux. La structure est toujours en lavallois ». Par l’ampleur de leurs formes et leur style, tuffeau, pierre calcaire très blanche, extraite dans le ces retables apparus à partir de 1630, constituent une Saumurois ou la Touraine et acheminée dans le véritable rupture par rapport aux réalisations des Bas-Maine par la rivière Mayenne. Les marbres périodes précédentes. d’Argentré et de Saint-Berthevin sont utilisés comme éléments de décor, dans les colonnes, mais aussi en s i Les conséquences de la Contre-Réforme ont formé un incrustations. o l terreau propice à l’éclosion de l’école lavalloise. l Grâce à la savante organisation de la composition et a Pour répondre aux préceptes dictés par le Concile de la hiérarchisation du décor, le retable lavallois est v a Trente (1545-1563), le décor des églises se trans - l’œuvre d’un architecte bien plus que d’un sculpteur. l forme. Pour réaffirmer le rôle de l’Eucharistie, mis à La qualité de ces œuvres se mesure en effet à l’équili - e l mal par les thèses de Luther et de Zwingli, on décide bre des masses et le jeu des couleurs dans la structure b de magnifier l’autel et le tabernacle. Le renouveau d’ensemble. En dehors de quelques privilégiés qui dis - a t monastique amène la fondation de nouveaux posent d’un banc dans le chœur, la plupart des fidèles e r couvents dans les villes. Les couvents des Ursulines voient le retable de loin et ne peuvent percevoir la de Château-Gontier et de Laval ont été construits e finesse du décor. L’organisation de l’espace architectu - L par deux architectes membres d’une même famille, ral du chœur par les volumes, la couleur, les jeux Étienne et Pierre Corbineau . Pierre Corbineau est d’ombres et de lumières du retable prend donc toute l’inventeur du retable lavallois. son importance. Celui-ci adopte les principes architecturaux du De fait, les concepteurs de retables, les premiers d’en - maniérisme français. Sa structure se décompose en tre eux du moins, sont des architectes renommés. trois parties, horizontales et verticales pour un Pierre Corbineau est à la fois l’inventeur du retable maître-autel, seulement verticales pour un retable lavallois et l’un des plus grands architectes de l’Ouest. latéral. Un soubassement forme le premier niveau, Il collabore avec son père, Étienne Corbineau , sur les où se trouve la table d’autel avec le tabernacle. chantiers des Ursulines et des Bénédictines de Laval ; La partie centrale est occupée par un tableau, puis dirige peut-être seul la construction du couvent Cour intérieure du couvent des Ursulines de Château-Gontier, conçu par Pierre Corbineau. du Buron, à Azé. Il travaille aussi aux Minimes de La question se pose de savoir comment ces premiers Tours, aux Jésuites de la Flèche, aux couvents des retabliers ont été formés au maniérisme français, Ursulines de Château-Gontier et d’Angers, à la car ces formes, si différentes des retables Renaissance, Couture du Mans et surtout dirige le chantier du sont obligatoirement dues à une influence étrangère Palais du Parlement de Rennes à partir de 1646. au Bas-Maine. Aucun d’eux n’a fait de « pèlerinage » De 1646 à 1655, il achève le Palais du Parlement ; artistique à Rome et les traités d’architecture de 1654 à 1678, la façade de la cathédrale de Rennes, d’Alberti, de Serlio ou de Bullant, n’ont pas servi de les travaux de la cathédrale de Dol de Bretagne ainsi modèle au retable lavallois. que la construction de l’abbaye Saint-Georges de En réalité, l’influence extérieure est venue du contact Rennes, pour les Bénédictines. direct avec des architectes parisiens venus dans l’Ouest de la France pour diriger de grands chantiers : Tugal Caris , un autre retablier, a joué aussi un rôle Louis Métezeau , architecte d’Henri IV, puis Martel - important d’architecte : il a été responsable pendant lange ont travaillé à la construction du collège des quelques années de la construction de la façade de Jésuites de la Flèche. Sur le chantier de la cathédrale la cathédrale de Rennes et aussi « entrepreneur du du Mans, Gervais Delabarre fait le trait d’union entre Palais de Rennes ». Pierre Corbineau, avec qui il collabore en diverses occasions, et Jacques Bugier , architecte parisien Pierre Corbineau ou Tugal Caris établissent donc leur chargé de la construction du jubé de 1605 à 1610. renommée avec la réalisation de retables mais surtout La reconstruction du château de Brissac est dirigée en recevant la responsabilité des plus grands chantiers par Jacques Dangluze , fils de l’architecte du roi à d’architecture de l’Ouest. Ils le doivent à leur talent Fontainebleau. L’équipe d’architectes angevins qui mais aussi à la protection des ordres religieux et de coordonne le chantier est dirigée par Jacques Corbi - la grande noblesse. Ainsi, l’ordre des Ursulines fait-il neau , oncle ou cousin de Pierre Corbineau. Quelques appel à Pierre Corbineau autant que possible, depuis années avant Pierre, Jacques Corbineau a également qu’il s’est fait connaître sur le chantier du couvent de travaillé au chantier du Palais du Parlement de Laval.