La Tordeuse, Dichelia Cedricola Diakonoff, Un Ravageur D'asie
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RISQUES NATURELS ET HUMAINS La Tordeuse, Dicheliacedricola Diakonoff, un ravageur d’Asie Mineure potentiellement important pour le Cèdre en France J EAN-P IERRE F ABRE -M OHAMED A VCI -A LAIN C HALON Dans unprécédent article (Alptekin et aL .,1997)intitulé “ LeCèdre deTurquie :aire naturelle, insectes ravageurs,perspectives d’utilisation pourles reboisementsenFrance ”,nousavions recensé plusieurs ravageurs (tableauI, ci-dessous). SurleCèdre du Liban Cedruslibani A.Rich.,les plusimportantsappartiennent au groupe des tordeuses consommatrices d’aiguilles. C’est le casenparticulier en Turquie d’ Acleris unduLana Walsingham. Cependant,dans cetteliste(tableauI, ci-dessous),nousavions omis dementionner La tordeuse, Dicheliacedricola Diakonoff, unLépidoptère défoliateurimportant du Cèdre du Liban en Asie Mineure. Cetteespècen’avait encore Jamais étésignalée en Turquie. Pourcombler cette Lacune,nousdonnons dans cettenotelarépartition géographiqueet les principales caractéris- tiques delabiologie decetteespèce. Comme Epinotiacedricida Diakonoff, Dicheliacedricola asouvent étéconfondueparles forestiers turcsavec Acleris unduLana considérée,pas toujours avecraison,comme le ravageurprincipaL responsable des défeuillaisons des cédraies. Àl’inverse, Dicheliacedricola est considérée à tort tableau I Les principaux ravageurs du Cèdredu LibanenTurquie (Alptekin et al.,1997) Type dedégâtsGroupe deravageurs Espèces Les défoliateurs Les processionnaires Thaumetopoeapityocampa (Denis et Schiffermüller) Thaumetopoeasolitaria Freyer Les tordeuses Acleris unduLana (Walsingham) Epinotiacedricida Diakonoff Les insectes piqueurs Les pucerons Cinaracedri Mimeur Les cochenilles Six espèces surles aiguilles Les xylophages Les Scolytes Xyloteruslineatus Olivier Phloeosinusacatayi ScheldL Orthotomicus tridentatus Egg. Orthotomicuserosus (Wollaston) Surles cônes La Tordeuse Barbaraosmana Obr. Dans les graines LeChaLcidien Megastigmusschimitscheki NovitzKy Rev.For. Fr. LIII - 2-2001 131 J EAN-P IERRE F ABRE - M OHAMED A VCI - A LAIN C HALON P HOTO 1 AduLtes de Dicheliacedricola PhotoJ.-P.FABRE P HOTO 2 Pontede Dicheliacedricola P HOTO 3 Chenille âgée de Dicheliacedricola PhotoJ.-P.FABRE sur unmésobLastedeCèdre PhotoJ.-P.FABRE P HOTO 4 Nymphe de Dicheliacedricola sur unmésobLastedeCèdre PhotoJ.-P.FABRE 132 Rev.For. Fr. LIII - 2-2001 Risques naturels et humains comme Laseule tordeuse responsable des défeuillaisons surleCèdre au Libanoù elle aété repérée depuis 1973. Enréalité, Dicheliacedricola constitue unravageurdu Cèdre potentiellement dangereux qu’il est utile deconnaître même si pourl’instant il n’est pasencore signalé surleCèdre del’AtLas,ni dans son aire naturelle,ni dans son aire d’extension en particulier en France. Actuellement,dans notre pays,pourlegroupe des tordeuses,deux espèces importantes seulement sont signalées surleCèdre. La première, Epinotiacedricida,provoquant l’essentiel des dégâtsest originaire de l’aire naturelle du genre Cedrus (Fabre,1976,1994,1997;Fabre et al.,1999). La seconde, Choris- toneuramurinana (Hübner),provient du Sapin pectiné, Abies aLba Mill.,surlequel elle est présenteenFranceet dans le restedel’Europe (Fabre et al.,1987;Du Merle etal.,1989). Nous regrouperons dans un tableau quelques différences biologiques permettant dedistinguer ces différentes espèces de tordeuses spécifiques des Cèdres. RÉPARTITION GÉOGRAPHIQUE D i c h e L i a c e d r i c o L a aétédécriteau Libanen1974parDiakonoff àpartir despécimens originaires delacédraie deBarouK, vers 1800 md’aLtitude. Enréalité,ceravageurest Largement répandu surleCèdre du LibanenAsie Mineure,aussi bien au Libanqu’en Turquie. Depuis une dizaine d’années, Dicheliacedricola aété trouvédans les localités suivantes : —EnTurquie (figure 1,ci-dessous),en octobre 1990 (J.-P.Fabre) àAbanoz et àPozanti (région d’Adana),àElmadagi et àHassa(région deKharamanmaras),àArsaLankoy et àDuden (région deMersin),enfin àSarkikaraagaç (région d’Isparta)en1998 (M.Avci). —Au Liban(figure 2,p. 134),en septembre 1992 (M.Bariteau,INRA Avignon) àBarouK, dans une vieille cédraie et dans unreboisement,àMasser ELChouff,dans le vieux peuplement F IGURE 1AIRE NATURELLE DE CEDRUS LIBANI EN TURQUIE ET LOCALITÉS OÙ ON ATROUVÉ LA TORDEUSE DICHELIA CEDRICOLA TURQUIE Sarkikaraagaç Elmadagi ISPARTA Pozanti Abanoz K. MARAS ANTALYA Arsalankoy ADANA MERSIN Hassa Düden Principales villes et localités Mer Méditerranée SYRIE Principaux lacs Aire naturelle de Cedrus libani 100 km Rev.For. Fr. LIII - 2-2001 133 J EAN-P IERRE F ABRE - M OHAMED A VCI - A LAIN C HALON F IGURE 2 SYRIE AIRE NATURELLE DE CEDRUS LIBANI AU LIBAN ET LOCALITÉS OÙ ON ATROUVÉ LA TORDEUSE DICHELIA CEDRICOLA Jabal Kammouah Jabal Jaje TRIPOLI Mer Méditerranée et à1750md’aLtitudedans un jeune reboisement âgé d’environ LIBAN 20 ans,àMguïte,près du col de Dahr ELBaïdar,dans unreboise- ment artificiel âgé d’une vingtaine d’années,àJabaLKammouah,surle versant Est et àJabaLJaje dans le vieux peuplement.Enfin,elle aété BEYROUTH Mguïte ànouveau récoltée en 1998 dans La vieille cédraie deMasser ELChouff Barouk (Nabil Nemer,UniversitédeBeyrouth; G.Demolin,INRA Avignon). Masser El Chouff Les chenilles récoltées en Turquie à 10 km Sarkikaraagaç ont étéélevées au aturelle de C. libani Airen Laboratoire d’Entomologie dela FacuLtéforestière d’Isparta.Pourles autres,récoltées en Turquie et au Liban,nousavons effectuéleurélevage au Laboratoire INRA d’Avignon,en condition dequaran- taine,Jusqu’àl’obtention des aduLtes. Dans certains cas,les élevages ont étémaintenuspendant plusieurs générations. Les principales caractéristiques biologiques observées confirment les données antérieures (Balochet Kawar,1978),exceptépourlenombre destades Larvaires car, dans les élevages,on obtient souvent unnombre destades plusélevéquedans les conditions naturelles. Une espèced’ Ichneumonidae parasitoïdedes chenilles est importanteau Libancomme en Turquie. Son impact était de18%àSarkikaraagaç.Parailleurs,seuLL’examen des génitalia du mâle permet d’identifier aveccertitudel’espèce. Cettedernière opération aétéeffectuée systématiquement,pourchaqueprovenance,parJ.-P.Chambon du Laboratoire INRA deBiosysté- matiquedel’insectedeVersailles. BIOLOGIE La biologie decette tordeuse aétédécriteparBalochet Kawaren1978au Liban. Dans les conditions naturelles,les aduLtes (photo1,p. 132)émergent (il existe une légère prothandrie(1)) au mois dejuin (maximumdes sorties le 15 Juin). L’accouplement s’observe tôt le matin. Chaque (1) Les premières sorties sont des mâles. 134 Rev.For. Fr. LIII - 2-2001 Risques naturels et humains femelle ponden moyenne 126 œufs quiéclosent 7à12jours plus tard.Les œufs sont déposés surles aiguilles deCèdre,insérés les uns surles autres,en une double rangée,comme les tuiles d’un toit (photo2,p. 132). La jeune chenille pénètre dans une aiguille del’année et devient mineuse pendant ses deux premiers stades au cours du mois dejuillet Jusqu’au mois d’octobre. Au Laboratoire,les chenilles poursuivent leuralimentation dans les aiguilles mais,dans les condi- tions naturelles,elles s’attaquent également aux bourgeons. La chenille passe tout l’hiver au troi- sième stadejusqu’au printemps del’année suivante. C’est alors queseproduisent les dégâtsles plusimportants. IL y aurait 5stades Larvaires (L1,L2,L3,L4,L5). Au dernier stade,Lachenille devient brouteuse,autrement dit,elle consomme les aiguilles del’extérieur(photo3,p. 132). La nymphose se produit au mois demaientre les aiguilles (photo4,p. 132). Dans les conditions delaboratoire (18-20 °C),Ladurée delanymphose est d’environ 12jours. Trois espèces d’Hy- ménoptères parasitoïdes ont étéobtenues au Laboratoire. IMPORTANCE ET DÉGÂTS Cette tordeuse est donc unravageurlargement répandu dans les cédraies d’Asie Mineure. Au Liban,en 1998,elle acommis des dégâtsimportantsàMasser ELChouff (Nabil et Demolin,non publié). La même année,pourlapremière fois,des dégâts très importantsont éténotés àSarki- Karaagaç en Turquie (M.Avci). Les défeuillaisons peuvent atteindre au printemps La totalitédela frondaison, y compris les aiguilles des années précédentes. Des fils desoie relient les aiguilles ensemble et denombreuses déjections témoignent delaprésencedes chenilles. Cette tordeuse est doncàinscrire au rang des ravageurs redoutables surleCèdre, tout en restant pourl’instant limitée àl’aire naturelle du Cèdre du Liban. DICHELIA CEDRICOLA,UNRAVAGEUR POTENTIELLEMENT IMPORTANT POUR LA FRANCE La tordeuse Epinotiacedricida est l’espèceintroduitelaplusrépanduedans les cédraies du Sud- Est delaFrance(Fabre,1976,1994,1997;Fabre et al.,1999). Elle passe Laplusgrandepartie deson développement au stadechenille. D’abordmineuse,puis brouteuse,elle consomme uniquement les aiguilles âgées. L’éclosion s’effectueàpartir delami-juillet Jusqu’au mois de septembre ;début avril,Lamajoritédes chenilles s’est enfouie dans le sol poursenymphoser. Àpartir decettedate,même si les Cèdres sont totalement défeuillés,le débourrement alieu et les arbres peuvent subsister grâceàleurs nouvelles aiguilles. L’existencedu quart ou du cinquième des aiguilles du mois demaiàoctobre-novembre permet demaintenir les arbres en survie. Ilenserait sans doute tout autrement si Dicheliacedricola était introduiteaccidentelle- ment dans notre région et y provoquait defortes défeuillaisons. Eneffet,cettedernière tordeuse est également consommatriced’aiguilles deCèdre mais saphénologie est différentedecelle d’ Epinotiacedricida (tableauII, p. 136). Àpartir du mois d’avril,après le débourrement des Cèdres,elle consomme les nouvelles aiguilles del’année. Ainsi,si les gradations des deux espèces entraient