Les Hébrides extérieures: Lewis, Harris, North-Uist 6 Première autonomie sur le littoral natal 15 Roaring Water Bay 18 Nouvelle Zélande: paradis du kayak 23 Echouage massif de dauphins communs 24 Une ïle est un bateau immobile 27

Juin 2002 N° 94

36 rue de Berder—56870 Larmor-Baden http://www.ckmer.com 1 Juin 2002 CK/mer

Alternative ? 36 rue de Berder 56870 Larmor Baden Les kayaks de mer non moussés peuvent naviguer en 5 http://www.ckmer.com ème catégorie en Bretagne à la condition d’avoir une - bilité extérieure répartie en 2 objets flottants de force res- pective 70 et 150 Newtons. Parution : Soit : 1 gilet aide à la flottabilité (70 N) et 1 engin flottant mars, juin, septembre, décembre agréé (150 N) ou 1 Rolling Float (160 N).

Ou : 1 gilet autogonflant (150 N) et 1 paddle float (70N) (2 planches de natation). Adresses utiles Ces dispositions permettent au randonneur de disposer de l’intégralité du volume intérieur de son kayak tout en Président: Jean-Marc Janvier, 3 rue Ravial, 35000 apportant une réponse à la flottabilité demandée dans le Rennes- !02 99 32 05 93 ème cadre de la 5 catégorie de navigation des navires sub- E-mail: [email protected] mersibles (engin flottant 150 N par personne, ce qui veut dire assurant la flottabilité d’un lest métallique de 15 Vice président: Guy Lecointre, 13 square René kgs ). Coty, 35000 Rennes -! 02 99 54 01 23 J’approuve et désire soutenir totalement ces dispositions qui à mon avis constituent une alternative séduisante au Secrétaire: Henri Mahé, 36 rue de Berder, 56870 moussage des kayaks. Larmor Baden -! 06 85 04 92 03 E-mail: [email protected] Il est nécessaire aujourd’hui que cette alternative de flot- tabilité extérieure au kayak soit soutenue par les kayakis- Secrétaire adjoint: Guy Van Achter, les tes marins de tous bords et de tout poils afin d’être défen- Beaumains, 22270 Plédéliac -! 02 96 51 22 09 due efficacement sur un plan national , je rappelle qu’à partir de août 2003, dans l’état actuel de la réglementa- Trésorier: Thierry Lassègue, 6 rue des Cottages, tion, nos kayaks non moussés ne pourrons plus naviguer 56100 Lorient - ! 06 63 28 74 85 - légalement à plus de 300 m d’un abri ! E-mail: [email protected] J’attends avec impatience vos nombreuses réactions. Je vous souhaite bonne lecture de ce bulletin chargé, Bulletin: cette fois encore, d’embruns salés… Coordinatrice: Josée Conan, Castel Pic, 22930 Cordialement, YVIAS - !02 96 22 62 70 - Jean- Marc JANVIER E-mail: [email protected] Nota 10N = 1kg Maquettiste: Patricia Beaugeard , 73 rue de Mesly, 94 000 Créteil -! 01 43 99 47 23 - E-mail: [email protected] Saisie textes, photos: Ivan Leguérinel, 139 la voie Romaine, 29000 Quimper -! 02 98 95 01 72

Responsable du livre sur le littoral: Laurent Pierson d’Autrey, Le bulletin est interne à l’association CK/Mer. Il présente 9 chemin de la butte rouge tous les caractères d’une correspondance privée et ne 78690 Les Essarts le Roi saurait être utilisé sans autorisation. ! 06 81 52 92 85 Les articles sont publiés sous la responsabilité de leurs auteurs. L’association n’est en aucun cas engagée par les Responsable du site internet: opinions émises ou les caractéristiques publiées. Muriel Robert, 16 quai P.Brossolette, 94340 Joinville-le-Pont - ! 01 45 11 93 35 Couverture: E-mail: [email protected]

2 Juin 2002 UUNN STANDSTAND CK/merCK/mer àà «« REVESREVES ARCTIQUESARCTIQUES »»

Les 27 et 28 avril 2002, CK/mer a tenu un stand à Binic (22), pour faire connaître l’associa- tion à l’extérieur et rencontrer d’autres mondes du kayak et de la nature. Christian Scalbert, responsable du club « Binic kayak de mer », a voulu ce salon autour d’une rencontre qu’il a eu, lors de plusieurs séjours kayakistes au Groenland, avec un Inuk : Kamp Absalonsen, Groenlandais d’Ilulissat, spécialiste du kayak traditionnel. Ce dernier a collecté toutes les méthodes d’esquimautage qui correspondaient aux différentes situations de pêche des Inuit. Parallèlement Kamp a œuvré pour faire revivre ce savoir de survie et organisé des compétitions d’esquimautage au Groenland. Il a eu l’honneur de plusieurs publications dans la presse kayakiste anglaise et américaine. Kamp nous a projeté et commenté sommairement, via la traduction de Christian, des vidéos illustrant son environnement. Si la qualité des images pouvait faire hurler un professionnel, l’authenticité et la simplicité de la démarche ne pouvaient que séduire un public très curieux. Il y avait plusieurs exposants : GNGL avec Yann Lemoine, Plasmor avec Dominique et Clau- dine, l’artiste Kistinig (céramiques d’animaux marins), etc… Une exposition de la Corderie Royale, sur le monde Inuit, était présentée. Plusieurs projections vidéo ou diapos ont retenu notre attention et tout particulière ment celle de Christian Morel, relatant son expédition en duo et en kayak sur la côte Est du Groenland. Une aventure particulièrement engagée, racontée de façon originale et personnelle. Bravo ! Ce week-end a été l’occasion d’une petite sortie sur l’eau clôturée par un apéro en kayak dans le port , et d’une séance matinale d’esquimautage commentée par Kamp. Des contes inuit étaient racontés aux enfants, sous une tente lapone, par Véronique Olivier. Responsable du stand CK/mer, je fus secondé par Guy Van Achter, Josée Conan, Jean-Marc Janvier, Véronique et de nombreux adhérents qui passaient par là (Denys Sacré, France Au- debourg, Alain Hémeury,etc…). Yves Béghin nous a également aidé, tout en tenant le stand de « Pagayeurs Marins ». Ce fut l’occasion de nombreux échanges de visu (c’est plus riche et complet que les e-mail), ce qui recollait parfois un peu les morceaux après les périodes turbulentes récentes. Plusieurs adhésions ont été enregistrées. Bilan d’ouverture et de ren- contres très positif.

Guy Lecointre Info : Le club de Binic a un site Web http://perso.wanadoo.fr/dh.bkm/ [email protected]

Calage des hanches dans un kayak Ces derniers se fixent aux membres postérieurs du cheval, alors que les protecteurs pour genoux (qui sont très rares et n'ont pas du tout la même J'ai regardé avec intérêt la description du calage forme) se fixent aux antérieurs. des hanches dans le bulletin de mars de CK Mer mais j'ai henni d'étonnement. Je vous laisse, mon kayak piaffe d'impa- tience ! En effet, une précision non pas maritime mais équestre s'impose: Les protecteurs figurant en photo sont en réalité des protecteurs pour boulets. Jacques De Bruce

3 Juin 2002 CompteCompte rendurendu dudu WEWE sécuritésécurité des 22 etet 33 marsmars dansdans lele GolfeGolfe dudu MorbihaMorbihan

L’idée était de rassembler un groupe de gens motivés pas. L’organisation était légère et efficace. et d’un niveau cohérent pour aller jouer dans les cou- Départ : pointe de Kerners, cale de Bilouri. rants et s’entraîner à des exercices de sécurité, cha- Zone de navigation : pointe de Kerners – Creizic – cun naviguant sous sa propre responsabilité, tout en Berder –île de la Jument – Gavrinis – Er lannic – île étant co-responsable de celle des autres. Cette for- longue – Port Navalo. mule de kayakistes « autonomes-indépendants » s’auto-organisant permet de dégager l’association Conditions de navigation : samedi coef 108, vent de CK/mer de toute responsabilité. Jean-Marc Terrade, NE 5 à 6 Beaufort, rafales à 7 ; dimanche coef 102, Guy Lecointre, Véronique Olivier et Jean Labous ont vent de NE 2 à 3 Beaufort, soleil. envoyéscoups de fil et e-mail vers des copains kaya- Exercices sous la direction de Jean-Marc Terrade : kistes. Les demandes ont afflué plus que prévu. Nous bacs dans les courants, divers remorquages, récupé- nous sommes retrouvés à 19 le samedi et 15 le di- rations, esquimautages… et très peu de bains invo- manche (2/3 de C/K mer, 1/3 de personnes extérieu- lontaires. Excellent week-end. Absolument à recom- res). L’hébergement (9 euros) s’est fait au gîte d’é- mencer. tape de Tumiac 56640 ARZON 02 97 53 70 05, dans la presqu’île de Rhuys. Chacun apportait tous ses re- Guy Lecointre

Tableau impressionniste de bonnes balades

Salut, selon les géologues de 60 mil- lions d’années ! Rien que ça ! et Un petit mot de ce qui se fait à « Wind 14, activité kayak de on dira que la Manche est mer » dans le Calvados, cœur de Guillaume Le Conquérant froide ! pffhh ! et du duché de Normandie. Au retour, il est possible d’aller sur les En décembre, 60 ans jour pour jour après Pearl Habour, rochers les plus lointains (coeff 79, ce jour là !) inacces- « raid sur un port ! » : nous étions sept, dont deux invités du sible sans embarcation. Les moules sont balèzes ! Je club d’escalade mais qui avaient déjà navigué en rivière. connais aussi un coin à bulots à Hermanville et un autre à L’un d’eux a chaviré et dessalé 3 fois, alors exercices de ré- tourteaux vers Bernières (je le dis sans vergogne becose cupération, remorquage etc… (il avait une assurance à la que comme à Wind 14, on est fédérés à la FFCK, on a peut journée, je ne tiens pas à ce qu’on m’apporte des oranges !). être l’intelligence bête, mais en groupe et en ligne de file, Ensuite, puisque c’était dans les restes du port artificiel d’Ar- inversement, on n’est pas fiers et on a le sens de la solidari- romanches, haut lieu historique du débarquement de Nor- té) mandie, nous avons fait un grand tour de slalom entre les gros pontons en béton avant de se faire plaisir avec des at- Temps et sortie super pour démarrer 2002 ! terrissages en surf, face au célèbre musée ‘vent NNE, mer 2 Samedi, on s’est enfermés dans le club pour élaborer un à 3 Beaufort) programme de balades : le prochain coup, on ira dans la Début janvier, v’là qu’on frappe à ma porte : un copain, un Baie de Sallenelles, réserve ornitho où j’ai trouvé la pointe nouveau qui débarque du Finistère (céouça ?) à peine remis arrière d’un vieux kayak en polyéth des années 70, on va du dernier jour sans euro, me propose une sortie ! aller chercher l’autre morceau dans les marais pour récupé- rer la mousse (on sait jamais !) soit on va à Cabourg, pren- OK ! Le dimanche suivant, à quatre (sans encadrant ni zo- dre un thé au grand hôtel du côté de chez Swan, avec Mar- diac de sécu) nous nous baladons à marée descendante et cel, un habitué du coin, à moins qu’on fasse un temps super pour janvier, sur les rochers du Calvados, kayak+escalade+vélo, à la pointe du Hoc. Bref, il y a le entre Langrune et Courseulles (une petite dizaine de nauti- choix. ques AR). On voit au fond, sous deux mètres d’eau, les ré- cifs formés par les restes d’un lagon corallifère qui datait, Ou alors pousser jusqu’à Etretat chez les Normands de l’est

4 Juin 2002

Par Guy Lecointre et Véronique Olivier

Du 7 au 21 juillet 2001, Guy Lecointre et Véronique Oli- vier organisaient, pour sept autres kayakistes, et dans le cadre de l’Auberge de jeu- nesse de Paimpol, une ran- donnée aux Hébrides Exté- rieures. Voici quelques ex- traits de leur journal de bord. Après deux jours de route, ar- rivée sur l’île de Skye le 8 juil- let au soir. Demain : traver- sée du Minch en ferry, à par- tir d’Uig, avec un minibus et 9 kayaks sur la remorque.

Lundi 09 juillet 2001 : Lever tôt : le check-in est à quatre heures trente ! Un breakfast sur le ferry suivi d’un petit roupillon pour compléter cette courte nuit. Guy et Véro arrivent in extremis à trouver un coin de pont pour saisir la météo BBC en plein vol, au milieu des embruns. Ce n’est pas spécialement encourageant. Le vent souffle SE 5 à 6 et le temps est très mouillé jusqu’à jeudi prochain, avec un épisode cyclonique demain, au centre de la dépression. de moutons, longeant quelques lacs ver ? Guy décide donc que nous irons pa- sombres striés d’écume. Pas une bico- gayer autour de l’île de , Nous visitons le joli bosquet de cailloux que en 30 km, d’autant que nous avons tout près de – «c’est d’ailleurs qui surplombe les eaux de notre pro- pris, grâce à Véro, un itinéraire bis : parce que la météo y est clémente que chain périple. Treize hautes lames de merci Vison Buté ! Sur le chemin du les pierres poussent bien droit » remar- pierre font une ronde, ornées et prolon- pont de Great Bernera, notre point de que Olivier. gées de quatre alignements qui ont départ, nous passons comme par ha- bien dû être cardinaux il y a quelque La route ressemble un peu à un far- sard tout près du mythique cercle de temps. west mouillé, ponctué de linaigrettes et pierres de Callanish. Pourquoi s’en pri-

6 Juin 2002 Embarquement près de Larsiadar gneux. d’observer de nombreux oiseaux de Bridge, après de multiples contorsions Pas un arbre à l’horizon… mer (mouettes tridactyles, pétrels, un gynéco obstétrique (voir Yves pour les malheureux bébé cormoran sur une Pour clore la journée, repas gastrono- consultations sur Kitiwec) destinées à paroi en plein milieu du tunnel) et quel- mique : moules ouvertes au barbecue introduire le nécessaire et néanmoins ques phoques dont un gros fort peu et bananes au chocolat sur la braise. suffisant dans les soutes des navires. farouche. De là, vu la météo favorable Nous prenons des provisions pour trois Mardi 10 juillet 2001 : nous prenons vers l’Ouest en direction jours et demi. Le seul rayon de soleil de la journée est de l’îlot très escarpé de Searna Chnoc. Et là, par vent presque arrière, Guy sur à 8h00, histoire d’encourager les trou- Soudain Estelle change brusquement «le vaisseau amiral», Véro sur pes à se lever et il dure 10 à 15 minu- de direction, elle a entendu le « chant « Inishoo », Estelle sur « Gaïa », Yves tes à la faveur d’un minuscule coin de des sirènes » ou plutôt les vocalises sur «Beg Hir», Jean-Yves sur ciel dégagé. Voici qui augure bien de la d’une colonie de phoques qui se prélas- « Modez », Paul sur « La Moisie », journée ! Départ vers 11h00, sous la sent au Sud de Bearasaigh, nous lui Louis sur « Pen bur’ch », Dominique pluie. emboîtons la pagaie, subjugués. sur « Dom’s boat » et Olivier sur Nous continuons vers le Nord en lon- A notre approche les pinnipèdes déci- « Filovent » rebaptisé « Pinardier » geant les falaises qui nous protègent dent d’interrompre la chorale, puis leur pour l’occase, s’élancent en direction des vents dominants puis traversons bronzette mais ils restent autour des de Callanish. vers (Bearnaraigh Beag). kayaks, à nous regarder en cercle, si- Moutons à tribord, phoques à bâbord, A la pointe Sud-Est de celle-ci, au- lencieux. Nous nous arrachons peu à route, pêche de méga moules à gogo dessus d’une plage de rêve, nous visi- peu à leur compagnie et reprenons le sur la petite île Scarastaigh, l’ambiance se met en place. Les pierres de Calla- nish nous apparaissent soudain à contre-jour, puis il se met à pleuvoir : l’ambiance s’installe ! Après deux heures de pagaie, escale dans un petit port de Great Bernera et discussion météo avec un pêcheur. Le temps sera « cyclonic » dit le pêcheur et « windy » avec ça ! Voilà qui nous rassure alors que nous n’avons goûté que des « local showers ». On remonte vers le Nord de l’île après cette pause bavette et c’est un bien curieux clébard qui attire l’attention d’O- livier au fond d’une faille rocheuse. Mu- seau rond, dos souple, poil clair, longue queue pointue, un plongeon discret, tons un petit cimetière abandonné do- rase caillou près d’un îlot voisin. c’est la première loutre de la rando ! miné par une minuscule chapelle. Ici Paul décide de lancer une tentative ha- La recherche d’un bivouac commence, gisent des Mac Donald, Mac Leod, lieutique. Deux minutes après, il appelle nous visons le fond du Loch Riosaigh mais pas de Mac Adam. L’île est très les deux kayakettes à la rescousse pour échapper au vent de Sud. Il ac- sauvage. pour l’aider à sortir un lieu jaune d’1 kg cueillera notre « camp, sweet camp ». Nous pique-niquons sur une plage plus 412g (mais si mais si !), ce qui décide A quelques pas d’un ruisseau un semi- au Nord puis zigzaguons au travers Olivier et Guy à tenter leur chance. Bi- plateau tout près d’une ancienne tour- d’un dédale d’îlots jusqu’à celui de lan global : 6 lieux jaunes. bière domine le loch. Beau point de vue dont l’arche naturelle, avec La recherche du bivouac commence sur un paysage sauvage et monta- ses trois entrées / sorties, nous permet

7 Juin 2002 dans la baie de Tobson. Nous nous enfonçons dans le minuscule et long chenal qui se trouve au Sud de la baie. Observation de deux grandes « piscines » rondes en pierres sèches: servaient-elles de pièges à poissons ? Nous arrivons en fin de jusant au fond du chenal, il reste un peu de courant contraire. Quel endroit étrange ! Sertie dans un décor de rochers nus, une tourbière (creusée pour servir de port de carénage ou lieu d’une érosion bi- zarre ?) jouxte un lac séparé de la mer par un cordon de galets. L’érosion ou le travail des hommes y laisse apparaître une série de langues herbues triangu- laires adossées à une grande roche. Après concertation et sous une pluie îles, roches et moutons et nous arri- tarif préférentiel. Il s’étonne de notre tenace, nous décidons de nous instal- vons assez rapidement à notre point de manque d’enthousiasme. A la stupeur ler : il y a même un ruisseau à proximi- départ, en remarquant les « standing succède un fou rire général tandis que té, couleur whisky ou thé, comme il se stones » (menhirs) qui le dominent en la maîtresse de céans nous informe du doit et aussi deux mini-piscines où nous silhouette. Avant de débarquer, Véroni- mode d’emploi des installations. Mer- nous lavons les pieds après le portage que récolte quelques « himanthalia veille ! Il y a même un « spin dryer » bien glissant. elongata » pour accompagner le pois- séchoir essoreuse aussi vieux que l’an- Pour certains, la soirée se termine tôt, son de ce soir : voilà un légume pas cien de l’A.J. pour la plupart des autres, elle est une cher ! Quelques vagues midges se manifes- occasion d’explorer les différents al- On charge la remorque et on se met en tent mollement, juste pour nous rappe- cools emportés tout en essayant – sous quête d’un camping. Sur la carte, il n’y ler où nous sommes pendant que nous la pluie – de faire sécher ses fringues en a qu’un seul, à Procapool , à quel- mangeons avec appétit les poissons de près du feu. La pluie s’arrêta-t-elle ce ques miles de Tarbert. La route est bien la veille au court-bouillon accompagnés soir-là ? On en débat encore. Ce qui tortueuse avant d’arriver là, puis la bi- des algues bouillies, puis sautées avec est sûr, c’est que certains avaient mal furcation, complètement pentue, nous des oignons. aux cheveux le lendemain ! oblige à descendre, laissant Olivier Demain, nous annonce Yves, la « vraie conduire le camion. A l’arrivée, chacun Mercredi 11 juillet 2001: rando » commence : au dodo ! reste songeur : quelques caravanes Il y aura une embellie ce week-end, Et pour conclure cette journée, descrip- bleues ou beiges des années cin- d’ici-là il faudra se planquer du vent tion collective du lieu le plus marquant quante, certaines bâchées, d’autres d’Ouest / Nord Ouest : nous partirons de ce camping : la douche en cara- sans roue et même une étayée par donc demain par le East Loch Tarbert. vane. « Entrant par la porte branlante deux gros troncs. Une d’elle annonce En attendant, à nos pagaies. Pour le dans un lieu rose qui fut bonbon… » sa fonction « showers » (douches). En début , la mer étant plus haute qu’à l’ar- « …Les tapis nombreux nous masquent vis-à-vis, des toilettes de guingois, va- rivée, nous n’avons d’autre choix que la vacuité du plancher… » « …La hau- guement décorées de revêtements de faire un départ en phoque sur la teur disponible sous la douche est d’1, plastiques antédiluviens, dont une porte tourbe. Nous choisissons soigneuse- 72 m … » « …Si tu t’appuies sur la pa- kitchissime qui nous laisse perplexes : ment le lieu et prenons quelques pho- roi, elle s’enfonce, si tu veux t’accro- où sont donc nos bivouacs de rêve ? tos souvenirs des glissades toutes ré- cher tout tombe… » « …Les champi- Alors que tous les visages commencent ussies qui amusent tout le monde. En- gnons s’élancent à l’assaut des parois à s’allonger, Louis revient triomphant : il suite, quelques détours vers de petites pour en assurer l’étanchéité… » « …Et a déjà séduit la gérante et a obtenu un

8 Juin 2002 malgré tout cela, la pomme de douche Et nous embarquons vers 11h00, vent Louis a obtenu l’autorisation de camper est d’une technologie dernier cri ! … » arrière, ce qui impressionne un peu sur les sillons en étage, traces de cultu- Louis. Le décor nous apparaît contour- res anciennes qui jouxtent le champ de Jeudi 12 juillet 2001 : né à souhait, un appel aux « patates du bonhomme. Sur la cale de Tarbert, sous un crachin Coastguards » pour les informer du dé- venteux, nous chargeons laborieuse- Les habitudes se prennent vite : Yves but de la balade, ils nous demandent ment nos kayaks en gardant chacun sa installe l’apéro, Paul nous prépare un notre numéro d’immatriculation, une spécialité de cargaison (Dominique : petit feu ronflant gentiment, nous man- appréciation du temps de navigation et desserts , Estelle : petit déjeuner et ga- geons ce que Jean-Yves et ses marmi- d’être rappelés à l’étape. Nous nous melles , Véronique : vaisselle et assai- tonnes ont préparé, nous devisons en glissons entre les îles et pointes, fai- sonnement, Paul : feux et combusti- sirotant diverses boissons et le sons un peu de saute cailloux et voici bles, Olivier : pinardier et pain, Jean- concours de blagues bat son plein. Geocrab, là où nous pensons chercher Yves : repas du soir, Yves : apéro, Louis et Yves vont faire la vaisselle en un bivouac. L’anse par elle-même ne Louis : repas du midi, Guy se réserve la stockant dans une nouvelle caisse semble pas particulièrement accueil- l’électronique du bord : radio ondes lon- bleue trouvée là. Les caisses bleues lante, mais du Loch partent deux longs gues et moyennes, GPS, anémomètre seraient-elle de bonne augure pour un boyaux étroits que nous envisageons et baromètre, plus un jeu de fusées, la bivouac ? d’explorer. Le premier sera le bon : un boîte à outils et les cartes). Guy, Véro et Estelle vont faire une bal- petit courant contre en entrant, quel- Véro a la pharmacie, la boîte de survie, lade sur les hauteurs. La vue plonge ques varechs étalés et un mini port la radio VHF et un jeu de fusées . sur notre mini Loch et les dentelles de nous tend les bras. Près de la maison la côte, ponctuée de maisons abandon- Guy, Véro et Olivier, après rangement décatie qui le domine, un vieil écossais nées ou non et de ruines. Sur les hau- du camion ont été s’informer de la mé- nous attend. Louis l’interpelle d’un : teurs, un cairn, auquel chacun ajoute sa pierre. Sur Harris, les cairns avaient une fonction de protection des habi- tants. Un guetteur faisait la ronde des cairns. En cas d’invasion ou de danger venant de la mer, il faisait un feu à proximité d’un d’entre eux pour prévenir la population. Non loin de là, une route panoramique ; les hauteurs sont déso- lées et pierreuses en comparaison avec la toute petite frange côtière verte et presque boisée Retour au bivouac. Il fait beau, pas de midges. Elle est pas belle, la vie ? Vendredi 13 juillet 2001 : Soleil au lever : que demander de plus ? téo à cinq jours à l’Office du Tourisme. « Latha Math » (bonjour) puis d’un Les prévisions pour le week-end sont La formule « Samedi, Dimanche O.K. », « Cha Fluich An Dhui ! » (il fait humide engageantes (NW 3 à 4 Beaufort). pour être lapidaire, nous donnera du aujourd’hui ! ). L’autochtone lui répond : Dominique est promu guide du groupe, baume au cœur pour la suite. « Cha Mi Gu Math » (je vais bien) puis et, armé de la carte, s’ingénie à slalo- Pendant ce temps, le reste de la troupe ils passent à l’anglais. Ils parlent du mer au plus court. Rythme rapide, le observe une nuée de goélands qui se champ de patates, des maisons du coin groupe s’étale un peu, attente derrière gobergent de granulés pour saumon (nombreuses et en ruine pour la plu- un îlot et reprise énergique jusqu’à Ro- entreposés dans un camion : sacs cre- part, presque neuves pour d’autres), de del, le vent arrière ne nous fait pas dé- vés, c’est l’orgie ! l’école… Et ils se quittent bon copain. faut, il arrive qu’il soit plus à l’ouest au

9 Juin 2002 débouché d’un loch, mais ce phéno- mène est moins marqué que la veille. Le pub très attendu de est bien là… mais il est en réfection ! Guy va sur les hauteurs pour guetter l’état du Sound of Harris au-delà de Renish point, il revient plutôt content : il n’est pas impossible que ça passe. Jean-Yves nous trouve un super petit coin d’herbe au-dessus du port : soupe au soleil, fromage, tapenade… Après une sieste générale et le remplis- sage des vaches à eau, passé Renish point, nous longeons la côte vers le Nord Ouest. A un mille au Sud de Guy décide d’aller voir si , le petit chenal du fond qui débouche une des deux grandes îles du sur le Loch Amhlasaraigh. milieu du Sound est campable. Soudain, au détour d’un îlot, l’impo- Appel aux coastguards pour leur sante silhouette d’un cerf éblouit tout le signaler la traversée. Arrivée en- groupe. L’animal nous regarde et dispa- tre Ensay et . On se fau- raît sur l’autre versant de son rocher. file dans le courant contre pour aller Long portage en biais sur le sable : vive Aussitôt, sprint pour contourner l’obsta- voir comment ça se présente : nous les poignées de portage ! cle : le cerf nage, sa ramure progresse constatons que l’autre côté du Sound On s’installe, qui sur la dune, qui sous moins vite qu’un kayak mais pourquoi est fréquentable. Nous décidons de le vent sur la plage selon les tempéra- le stresser ? Pris par le démon de faire continuer jusqu’à Bernera. Estelle et tures perçues la nuit. Paul choisit la une bonne photo, Yves et Dominique Véro, heureuses de retrouver un peu plage pour son feu d’anciennes poutres traquent l’animal d’un peu près. Il de houle WNW se font un plaisir de et d’anciens poteaux de clôture. grimpe sur un îlot puis s’immerge de glisse au 250°, pour contrer une éven- nouveau et gagne la terre ferme. Il a du tuelle dérive du courant. Nous sentirons Le ciel est bleu, il vente un peu (Noroît), avoir un bon coup d’adrénaline, la pré- seulement celle du vent, assez négli- la nuit sera fraîche. Un phoque nous sence humaine ne doit pas être cou- geable. fait un clin d’œil en guise de bonne nuit. rante en ces chenaux tortueux, sorte de En fait de maison, face à un cordon de Samedi 14 juillet 2001 : mini Golfe du Morbihan – sans le cou- galets qui se prend pour un mini sillon Au réveil, une loutre a relayé le phoque, rant de la jument – dont les îles font de Talbert, au lieu dit Baile, nous trou- elle déambule en chassant dans les cinq mètres au-dessus du niveau maxi- vons deux «Tigh Dhu» (prononcer Taï vagues devant la plage. mum des marées et sont couvertes de Dou), maisons traditionnelles écossai- Cette fois encore, une caisse bleue bruyères et de tourbe. ses. Basses, larges murs chaulés, toit marquée « Hebridean Fisheries » nous Après cet intermède assez magique, le de chaume lesté de cailloux par un filet, attendait au bivouac : multi-usage jeu reprend et Guy se met de la partie elles ne sont pas franchement bien res- (siège, support pour réchaud, transport pour découvrir le fameux chenal entre taurées mais elles sont le site d’une de vaisselle… ) malgré son inscription les deux lochs. Véro veut tourner à Auberge de Jeunesse qui peut aussi « ne pas utiliser à d’autres usages ». gauche avant une grande île mais Oli- accueillir les campeurs. Trente balles, La navigation d’aujourd’hui se fera sur- vier cherche plus loin. Nous aboutis- c’est un peu cher pour une douche tout sur le mode de l’orientation. sons dans un charmant boyau non rem- chaude ! Après vote, nous décidons pli complètement par la marée : il fait d’aller bivouaquer sur la plage d’à côté. L’idée de base est d’aller s’enquiller dans le Loch Mhic Phail et de chercher cul-de-sac.

10 Juin 2002 A ce moment, nous décidons, pour ar- laquelle nous trouvons un tout petit les casiers remplis de grosses langous- bitrer, de consulter le GPS de Guy. Le phare blanc. Nous apercevons à l’en- tines soigneusement amarrés sous la chenal recherché est plus à l’Est . trée du loch trois roches étranges et ligne de flottaison d’un bateau. Sur ces entrefaites, Guy et Estelle s’a- triangulaires aux reliefs acérés. On trace vers la sortie du loch puis in- visent que le loch voisin pourrait ne pas Ce sont probablement d’anciennes che- termède pêche balade autour de deux déboucher sur la mer vu le petit coef. minées de volcans et c’est à leur base îlots spectaculaires, très raides et peu du jour (42) et Guy nous entraîne vers que l’on trouvait autrefois les colonisés par la végétation et la faune des mouillages signalés dans les ins- « maddies » (grosses moules) qui ont des airs. Les eaux alentours grouillent tructions nautiques, qu’il a soigneuse- donné leur nom au Loch. de méduses et de poissons. En une ment relevés sur sa carte. Entre les îles Un autre jeu d’orientation commence : heure, pêche miraculeuse : 2 lieus de Sursaigh et Taghaigh, le courant où trouver un recoin abrité du Noroît, noirs, un tacaud et sept lieus jaunes contre portant au Sud-Ouest se fait facile à débarquer, au portage simple et dont un monstre pêché par Paul. sentir. Guy et Dominique décident donc où il y a de la place pour nos sept ten- Nous visons maintenant un lieu connu d’une halte repas à la pointe Nord de tes ? Sur la carte, le loch est labyrinthi- des kayakistes bretons rencontrés Taghaigh, dans une ruine accueillante, que à souhait. avant notre départ : An Aigeach. Un près d’un ancien mini-port : bon appé- Pour fêter le 14 juillet, Jean-Yves nous petit paradis au débouché d’un torrent tit ! concocte un repas marocain : chorba entre deux montagnes. Nous y déjeu- Enthousiastes, tous nos kayakistes se plus couscous avec chorizo, oignons, nons au soleil, à l’abri du vent thermi- font une mega sieste au soleil, protégés poivrons et surtout ne pas oublier les que qui remonte la vallée. A regret, du vent et « midgeless » (sans midges). trois « bouillons Kub » pour la semoule. nous le quittons car nous savons que C’est sur cette île qu’est trouvé le crâne Comme c’est la fête et que Guy et Véro nous sommes à la charnière de notre de bélier n° 1, dont Olivier proclamera se refusent à lancer des fusées même voyage : si nous voulons aller plus au qu’il est « l’attribut du chef » en l’offrant pas périmées, Paul ne se dégonfle pas Sud, il faut le faire maintenant. Nous respectueusement à Guy, en signe d’al- et nous prépare un feu d’enfer avec au passons donc devant l’étroite entrée du légeance. Le crâne trônera donc à la moins quatre palettes ! A l’Ouest de l’île Loch Eport, qui est très long et ser- proue du vaisseau-amiral pour marquer où nous sommes, belle vue sur Loch- pente dans un paysage plat, puis conti- le statut de son propriétaire. Par la maddy. On situe les feux du chenal nuons à belle allure, arrêtant juste pour suite, les découvertes de crânes se d’approche des ferries et le phare de admirer une arche naturelle. multiplieront, affaiblissant peu à peu la Rubha an Ehigheadair, la silhouette de Nous cherchons un bivouac en entrant symbolique de l’objet, ce qui n’empê- l’embouchure du Loch et tout au fond dans Bag Moraig, le loch suivant. Beau- chera pas Guy de rester le chef in- Skye apparaît comme une fine bande coup de bruyères, de fougères et coins contesté jusqu’à la fin de la navigation. grisée. Pas de bal ce soir, au lit ! d’herbe peu accessibles nous découra- Pour sa part, Dominique a déjà décoré gent de dormir là. Guy décide donc que Dimanche 15 juillet 2001 : sa poupe de deux gros coquillages spi- ce point sera le plus au sud de la ran- En sortant de « sploutch bay »(l’arrivée ralés qu’il a disposés de part et d’autre donnée, chacun se sentant attiré par le était bien boueuse) petit coup d’œil à la de sa dérive sans nous préciser de quel bivouac paradisiaque repéré aupara- héronnière qui en marque l’entrée. Le symbole il se réclame. vant. Le retour est direct. Pagayant moindre petit arbre reçoit un nid consé- sans faiblir, les kayakistes sentent l’é- Nous reprenons la pagaie. quent, il y en a au moins une quinzaine. curie. Le portage est vite terminé et le Passage entre Vaccasay et Hermetray, La crise immobilière a amené certains à campement se transforme en camp de courant portant pour rallier les falaises se choisir une faille de roche à défaut naturistes, chacun s’ébrouant joyeuse- qui mènent au Loch de Lochmaddy. de branches… Visite de Lochmaddy : ment dans les baignoires naturelles du Changement complet d’ambiance : on téléphone, cheval blanc, soignage des torrent. L’eau est couleur malt whisky, retrouve les pétrels, les tombants spec- pieds, chagrin des gamines… un vieux mais il n’y a pas de moutons dans ce taculaires et les falaises noires et longi- monsieur arrose son jardin : il pleut coin reculé, elle est donc saine. Appel lignes. Au bout d’une heure de naviga- pourtant suffisamment dans le pays ! aux coastguards sur les hauteurs. La tion nous passons Rubha an Ehigea- Départ vers midi et quart de ce petit communication est très sobre mais se dair (Rubha = pointe) au sommet de port en jetant un coup d’œil d’envie sur

11 Juin 2002 termine par un gentil « enjoy your trip ». avoir fait nos adieux aux trois gros chi- pain, coup de fil . Nous décidons d’y Quelques midges au moment de l’inver- cots de volcans. Petit arrêt pipi sur Her- aller en sauts de puce, de roche en ro- sion thermique, chacun prend ses op- metray où nous sommes accueillis par che, pour bien profiter du coin. Nous tions : stoïque sans rien, puant le un pacifique couple de sternes perché surprenons çà et là quelques phoques « repellent » ou version moustiquaire ssur un rocher – serions-nous invisi- intrigués de nous voir : un grand coup de tête. Heureusement, le vent se réta- bles ? de reniflage avant de plonger lentement blit rapidement dans l’autre sens. La traversée du sound vers la tête dans l’eau. Le bivouac est très confortable : le coin « Scarabée » est agrémentée de nom- Nous débarquons au terminal du ferry des tentes, les kayaks et l’eau sont très breux passages d’oiseaux (Fous de de Leverburgh, qui est en pleine réno- rapprochés et il y a même du bois – un Bassan, trois macareux, des eiders à vation. Après les espaces préservés peu seulement, car c’est le seul endroit duvet, quelques petits pingouins, des revoici le béton, les machines, les han- où nous avons senti l’âme des kayakis- guillemots de Troïl et à miroir, des ster- gars, la circulation automobile éton- tes qui nous ont précédé : banc de ron- nes, plus d’innombrables cormorans). Il namment intense pour des lieux aussi dins, trace de foyer. Où pagaient-ils en est probable que les îles du Sound, peu peu peuplés. ce moment, ceux qui sont passés là ? visitées, d’orientation et d’exposition L’opération « eau » est facile dans les variées, soient un refuge efficace pour Efficaces, Jean-Yves et Paul nous pré- toilettes du restaurant à côté de la cale, les espèces de la gent ailée, chacune y parent des papillotes de darnes, filets et l’opération « pain » nécessite une né- trouvant un milieu propice. tronçons divers… avec des assaison- gociation avec des automobilistes qui nements changeants sur lesquels se Scarabaigh, alias « Scarabée », est un gentiment amènent Véronique au ma- jette le reste de la troupe… espace préservé malgré le fait que, gasin juste avant la fermeture. comme toutes les îles du coin, elle Le feu du soir est moins ronflant que Difficile sur les rayons de choisir entre serve de pâture à moutons. Il y a même d’habitude, il y a peu de bois flotté dans les différents pains proposés, tous plus un petit étang sur la colline est. L’habi- le coin, nous nous couchons donc rela- spongieux les uns que les autres. Un tuelle caisse bleue est là qui témoigne tivement tôt. Paul, Olivier et Louis se seul avantage : ce type de pain se com- que les lieux sont accueillants. Du haut retrouvent comme d’hab pour le dernier presse aisément, on peut lui faire per- de chacune de ses deux collines, on grog tandis que Guy et Véro vont se dre les deux tiers de son volume. Pour- peut admirer l’ensemble du sound , son coucher pour avoir les yeux en face des rait-il servir de « mousse britannique » cortège d’îlots et de roches et les mon- trous à 5h30, heure de la météo BBC… en remplacement de la « mousse amé- tagnes de Harris et qui le ème Parfois le réveil à 8h00 tire un peu, ricaine » pour l’homologation en 6 dominent. d’autant que la tendance à arriver plus catégorie ? Yves, consulté, semble du- tard est nette, même si nous conti- Le prochain cap est Leverburgh : eau, bitatif. nuons à partir à 11h00. Nous sommes bien amarinés et nous ressentons le besoin de fonctionner avec le soleil… qui se couche très tard, aux alentours de 22h 45. Nous nous faisons la réflexion que s’il pleuvait nous pagaierions beau- coup plus en écourtant les pauses. Lundi 16 juillet 2001 Départ à 11h00, comme d’habitude ! L’itinéraire de retour ne devant pas être le même qu’à l’aller, et comme des vents ESE puis NE sont annoncés pour le lendemain, nous nous dirigerons vers l’Ouest de South Harris à ce moment là. Nous longeons de loin les belles fa- laises au nord de Lochmaddy après

12 Juin 2002 Quelques petits îlots plus tard, Ensay davres et autres « attributs du chef » (à le site est aussi grandiose, au moins, nous tend les bras. ce niveau, ça tourne à l’anarchie !) que le Cap Fréhel, malgré les différen- Face à nous, une colline molle Petit dessert autour du feu que Paul ces manifestes de roches. Cette com- striéesde sillons anciens ou « billons ». nous a préparé dans une anfractuosité paraison fait rire les autres. En arrivant Presque toute l’île a été cultivée. Un de rocher, sur l’estran. Demain sera un derrière la pointe de l’orteil, nous allons superbe cordon de dunes, accroché à autre jour. visiter une imposante grotte et y impro- visons un chœur encore plus poignant chaque bout à son rocher, s’ouvre à Mardi 17 juillet nous sur des eaux turquoises. Un étang que celui des phoques. Ca sonne su- Au lever, le vent de sud-est a forci, il lagunaire est caché derrière. perbement bien. nous poussera dans la direction souhai- Dépassant la pointe, nous découvrons En débarquant, le charme nostalgique tée. Le courant de flot se fait légère- la vraie direction du vent (NE) et la vue d’une « mansion » (in english) grande ment sentir à l’opposé, sans pour au- sur , l’île aux deux collines. demeure abandonnée nous serre un tant lever le mer. peu la gorge. Nous continuons à suivre le rivage qui Après la traversée vers le nord-est, devient de plus en plus doux. Un mille Éloignons-nous. A mi-pente, une petite nous passons devant la jolie plage où après, constatant que notre progression chapelle ancienne cerclée de grillage à Louis allait se baigner avec sa petite est plus difficile (vent 5 Beaufort de moutons est mangée d’herbes folles. famille il y a vingt-cinq ans. Nous dé- nord est), Guy décide d’effectuer une Au sommet de la colline, dans le même barquons à la suivante en admirant la traversée pour s’approcher de la pointe alignement, un menhir isolé style variété de couleurs : le turquoise pro- Aird Niosaboist pour ensuite faire un « lame de pierre » comme à Callanish. fond de l’eau exalte le jaune lumineux bac au vent vers Taransay ; en cours Plus loin encore un cairn devait servir des plages et Toe Head (339 m d’alti- de route, il s’aperçoit que le vent est un d’amer. La vue vers le large est magni- tude) offre un très joli dégradé de verts peu fort : nous avançons à deux nœuds fique d’autant que le coucher du soleil – tendres (en bas) vers les bruns pro- et certains fatiguent un peu. Taransay qui avec ses volutes de cirrus nous an- fonds (en haut), le tout moucheté du étant une île, il faudra en revenir le len- nonce la prochaine perturbation – a des pourpre des bruyères. Nous visitons la demain, nous partons le 19 à 11 h : il couleurs psychédéliques. chapelle, modeste ruine plus émou- est donc urgent de s’assurer de la mé- Nous distinguons deux minuscules vante que spectaculaire, site chrétien téo du 18 juillet, la voici : triangles acérés sur l’horizon. La carte primitif, probablement installé sur un Ä Hébrides, vent de nord est 4 à 5 nous confirme notre intuition, nous site défensif préhistorique si l’on en Beaufort forcissant 6 et de la pluie. sommes en vue de St Kilda, à 46 mil- croit le fossé et la levée de terre qui les ! isolent le lieu. Demain, les conditions pour rentrer de Taransay ne seront pas géniales, d’au- Olivier nous prépare un excellent punch Le repas sur la plage, au soleil, donne tant que l’arrivée par le West Loch Tar- à l’orange pressée aux doigts salés une petite touche balnéaire à l’arrêt. bert bénéficiera certainement d’un effet pour l’apéro. Jean-Yves, notre doréna- Nous faisons nos adieux au Sound of venturi vue son orientation par rapport vant « chef cuisinier » officiel, se lance Harris qui nous a si bien accueilli. au lit du vent. Il s’agit donc maintenant dans un morceau de bravoure : La mer se fait plus agitée, malgré la de trouver un bon bivouac protégé du “Nouilles chorizo poivrons au gra- « corde à tourner le vent » que Guy a vent sur Harris car certains commen- tin” (sans four ! ). Il doit d’abord lutter trouvé près de la chapelle. Le rivage cent à pagayer dans la semoule. Nous contre le sable lancé par un vent facé- est de plus en plus escarpé au fur et à sommes tentés par la traversée vers tieux, puis initie Guy aux joies du gratin mesure de la remontée vers l’orteil de Losgaintir, sa belle baie sableuse, mais au MSR, opération assez risquée. Il Toe Head, très visible du sud. cela nous donnera la garantie d’avoir 2 s’agit de retourner la flamme et donc le Au sud ouest de la montagne, une colo- km de portage à l’arrivée, ce qui n’est réchaud vers la surface du fromage. Ce nie d’oiseaux variés (Pétrels, mouettes pas excellent pour le moral. Tout à sera excellent ! tridactyles, goélands et guillemots et. coup, sur la droite, un havre nous appa- La grande densité de moutons qu’il y a c.. ) évolue dans un immense cirque de raît. Sa haute dune est surmontée de sur l’île indique bien la qualité du pierres fortement coloré qui mange une tente et de caravanes, on peut toujours « », nous trouvons une multi- partie du versant le plus abrupt. Estelle aller voir si Traigh Niosaboist est un tude de boules de laine, quelques ca- et Véronique se font la même réflexion :

13 Juin 2002 bon bivouac. On grimpe la pente Pendant ces quelques jours, nous - Cartographie abrupte qui mène en haut de la butte et avons pu parcourir en tout sens les Carte routière Michelin 986.401 GB/Irlande. nous allons interroger le couple oc- paysages extraordinairement variés Carte terrestre Ordonnance Survey 250000 cupant la caravane la plus proche. Ils des « western isles » : montagnes pe- Road map2 Western et The West- ern Islees. Plan général des Hébrides exté- nous ont vu arriver de loin et nous ont lées et érodées par les glaciers, tourbe rieures. confondu, dans un premier temps avec à profusion, lacs et loch inextricable- Cartes terrestres Ordonnance Survey 50 une bande de dauphins. Ils doivent être ment mêlés (où est la mer ? Où est 000 n°13-14-18-22. Utilisées pour la navi- un peu daltoniens ! Ils nous informent l’eau douce ?), immenses plages de gation. que ce camping est gratuit avec toilet- sables fin et falaises farouches, mou- - Instructions nautiques : tes et eau potable à disposition des tons, phoques et pétrels…tout donne Simpson-Laurence. Yachtsman’s Almanac campeurs. Rapide discussion, tout le envie d’y revenir ! North and West. monde est d’accord pour rester ici. La The yachsman’s Pilot to Western Isles Remerciements à Anne Marsouin, Pa- (Martin Lawrence) IMRAY 41.16 euros. question se pose déjà de savoir si on trick Lemoine et Guy Cloarec pour leurs Déja paru: ré-embarque demain : cela dépendra conseils éclairés. Les articles de Karin « Voyages aux Hébrides », JM Janvier CK/ de la météo de cinq heures et demie du Huet et de Jean Marc Janvier nous ont Mer N°55 (1992), paru aussi dans Canoë- matin. Face à notre camping, Taransay aidés et fait rêver. kayak- Magazine N°108. nous nargue ! « Cap sur », JM Janvier CK/ Véronique Olivier et Guy Lecointre Mer N°65 (1995). Mercredi 18 Juillet Ecrit avec la participation d’Olivier Fri- « En Orcadian Sea II aux Hébrides Exté- La météo prévue est là, nous décidons conneau et Dominique Levieil. rieures » (traduction) CK/Mer N°71 (1996). « Aller à Callanish en kayak », Karin Huet d’arrêter la randonnée : nous devons Photos Dominique Levieil et Véronique (avec Anne Marsouin), parution Olivier. prendre le ferry le 19 à 11 heures. « Association Trégor-Goëlo » 1997. Renseignements pratiques Adhésion ou Renouvellement 2002 Coupon à retourner à : Thierry Lassègue 6 rue des cottages 56100 Lorient

Nom, Prénom : Adresse: Date de naissance Téléphone : Adresse e-mail : Possède un kayak de mer : oui /non type (s): Mon lieu habituel de navigation est : Je verse 30 euro (membre actif) ou 46 euro (bienfaiteur, club pour 3 bulletin), 52 euro (professionnel), 15 euro pour le conjoint et les enfants qui cotisent à la même adresse J’autorise la publication de mes noms et adresse dans l’annuaire de l’association : oui – non (rayer les mentions inutiles) Date : Signature :

L’adhésion CKMer 2002 couvre la période allant du 1er juin 2001 au 31 août 2002, et donnent droit à 4 bulletins : décembre 2001, mars, juin, et septembre 2002 Le renouvellement pour l’année 2003 est à réaliser courant septembre 2002. Les personnes ayant adhérées en cours d’années peuvent demander les bulletins manquant correspondant à leur année d’adhésion en contactant de Muriel ROBERT Tel :01-45-11-93-35 , Email : [email protected]

14 Juin 2002 Par Philippe Landrein

Ca n'a pas de sens ! Tu parles moins l’atteindre donc tu as acquiescé. progression. Enfin, au bout de cent mi- des remous à la Cormorandière Le Goulet, haut couloir pour l'Atlanti- nutes, tu accostes. Un brave rotomou- en ce 14 juillet 2001. La rade de que, accentue les vents d'ouest. liste t'aide à remonter ta longue valise. Brest essaie de refluer à travers « Mortes-eaux » est déplacé aujour- Par téléphone tu brises la promesse les obstacles. Le noroît de 20 d'hui. Le jusant par coefficient 45 ne inconsidérée qui dépassait tes possibili- nœuds s’y oppose (foi du séma- compense pas le presque six Beaufort. tés. phore). Des pyramides instables clapotent méchamment. L’eau Après deux heures de lutte, le Fort du Appel de l’archipel Dellec, rive nord, abrite une pose. Si le change de couleur et désoriente Le 15 juillet, le levant colore le paysage ministre de la Défense permet, tu pour- l’avant. Cale les genoux, guette d’un camaïeu rose, bleu, or. Le vent est les pièges ! Malgré l'adhésion à rais y bivouaquer. oublié. T’apprécies autant que les mar- CK/mer et une annonce dans l'autre revue en couleur nul ne cheurs le chemin de la Pointe Saint Ma- t'accompagne. Tu comptes sur thieu. Ce cap si désiré la veille n'est l'esquif pour adhérer à la sur- pas farouche en ce matin radieux. Pour face. Tantôt l’étrave se dresse ; fêter son passage, tu savoures une en retombant on entend le char- pomme et constate le tapis roulant ! gement retomber à contre Trois Fous de Bassan t’accueillent au temps ; telles deux ailes de pa- chenal du Four. A bâbord, Molène puis pillon éphémères l’écume jaillit. Ouessant semblent à portée... quand tu Tantôt la proue plonge ; selon le seras en cinquième... constructeur il y a 25 kg de sur- charge. Pas de mauvaise plai- Cette magnifique journée ainsi que la santerie... non, la proue remonte suivante, permettent une progression encore. Et le cargo, derrière, t'a tranquille avec de longues visites de t’il vu sur une crête ? politesse servant d’alibi pour ménager Dans le but de te réapproprier le Ce vent et surtout une douleur trop fa- l’inflammation du premier jour. Le cha- littoral breton, un club t’initie de- milière dans l'épaule le suggèrent. A ce riot flanche aussi. Dorénavant à chaque puis trois ans. Trente sorties en moment passent trois kayakistes ! Se- portage tu devras trouver de l'aide. mer depuis l'achat du matos per- raient-ils en cinquième catégorie ? Ras- Belle houle so en novembre t'ont fait préfé- séréné, tu les poursuis. Ils vont t’ouvrir rer les caps aux baies et l’idée Le 17 et 18 une tempête sévit tragique- le vent ! Hélas, ces chercheurs d'Ifre- du camping est venu naturelle- ment surtout en Bretagne sud. Tu réali- mer qui ont emprunté le matériel au C. ment. On t'avait dit de donner du ses deux courtes et stressantes naviga- E. font demi-tour au phare du Petit Mi- sens à ton projet. Alors s’imposa tions par vent arrière. La houle pro- nou. Là cesse l'abri relatif de la falaise la côte du Nord Finistère où tant fonde t’isole visuellement du continent. de souvenirs et d’anecdotes ont Nord. A deux milles au nord ouest, le A l'île Stagadon un phoque vient voir accompagné ta découverte de la camping de Portrez est fort attractif. On les tentes envolées. Au Curnic une mer. t'attend au-delà. De toutes manières, tu grande déferlante te pousse dans le ne veux pas faire demi-tour. L’objectif Gageure familiale port en un surf aussi involontaire que visible t’aide à supporter la sensation Tout à l'heure, ta famille devait simple- réussi. de brûlure. Tu pagaies bas pour minimi- ment te déposer à Plougastel. Mais au ser la prise au vent. Surtout ne pas se premier coup de pagaie, inquiète, elle Révélation mettre de travers. Plusieurs fois tu te cria : « On va t'attendre au Treiz Le 20, un cantonnier du Léon tombe en contrôles sur le rivage la réalité de la Hir » (Longue Plage). Tu pensais au arrêt devant ton bivouac... va t’il te

15 Juin 2002 chasser ? Non, il s’enthousiasme : A l’ombre d’une auberge Iles à malices « alors cette façon de voyager permet Vendredi 10 août, chargement rapide et Le 13, tu reviens sur tes sillages pour de faire étape où l'on veut ! », puis il optimisé du matériel. Première étape : chercher la passe du lagon. En fait rêve : « je voudrais voyager pareille- Brehec - Ile de Bréhat. Le vent est Saint Gildas sera un anneau quand la ment, mais à vélo, avec papa qui est si moyennement contraire. Pour atteindre planète sera très réchauffée. Cap sur loin dans les Alpes. » Tu déclines son le camping, un nouveau chariot fait l'île Tomé au vent. Un voilier t’accom- offre d’assistance. Dépité, il te lance merveille. pagne puis abandonne. A Tomé, tu une crêpe chocolatée d'un geste aussi Le 11, un temps de demoiselle permet sors ton déjeuner et laisse le kayak au généreux que maladroit et promet de te le tour de l'île et un pique-nique sur l'îlot mouillage. Du sommet de l'île, Plouma- rejoindre ce soir à l'île de Batz. de Raguenez Braz en compagnie d'une nac’h est insignifiant. Déception: l'avo- Au camping de l'île, il n'y a que la foule d'apprentis voileux. Le soir, après cat transporté depuis 4 jours n'est pas bruine. R. est en week-end sur le conti- avoir erré dans le jardin de granit rose, mûr. De sortir de la baie de Trestraou, nent. Dans la soirée on t’invite à une l'île Olone accueille ta solitude: Feu de te met en garde une mère de famille conférence sur l'œuvre roscovite du bois et d'artifice, passage d'étoiles filan- nombreuse et pagayeuse. Mais tu as peintre Mathurin Méheut. tes, de satellites dont l'ISS. trop envie de visiter les blocs de granit Septième jour qui rougeoient déjà. Au crépuscule les Mammifère rochers s’estompent et s’éteignent un à L'état de l’épaule et des mains contrarie De bonne heure le 12, en contournant un tandis que deux molosses compre- la poursuite du périple. Ces 63 miles Olone, un rocher t'intrigue. Sa couleur nant l'allemand veulent te priver de des- douloureux t’ont comblé en rencontres et sa forme sont différents, sa position sert. et impressions. Tu décides d’arrêter ce inattendue. Ah ! Bonjour Monsieur le Excès de vitesse premier voyage à Roscoff. Ton kayak te Phoque. Il ne répond pas. C'est peut surprends à le remercier. Rassuré sur être un veau marin ? En Bretagne on Le 14. Cette fois le vent pousse hors de la faisabilité de ce genre de voyage, tu élève des veaux sous la mer (mère). Le ta carte. Se présente une presqu'île. Un en projettes un second sur une aussi sillon du Talbert tire sa langue à la catamaran de location t'échange la to- jolie côte. pleine mer. Tu déjeunes près de Port ponymie contre l'heure : l’Ile Grande ! Béni qui t'évoque un départ de scouts Tu choisis de naviguer à vue par le DEUXIEME AUTONOMIE SUR pour le paradis. En digérant, tu contour- large. Soudain la houle est plus pré- LITTORAL CHOISI nes avec le courant la pointe du Châ- sente et brise de partout. L’endroit est solitaire. Vent et courant t’aident. Lors Après deux semaines de repos, c'est le teau. Tu croises plusieurs kayaks dont du franchissement d’une passe étroite plaisir des yeux qui oriente ton choix un Indiana qui ne répond pas à ton sa- faute d’avoir observé assez, une défer- sur les Côtes d'Armor. Tu utiliseras les lut. Est-il volé ? Au sortir de plusieurs lante te fait un "croc-en-jambe". Tu ac- marées descendantes de Plouha (22) à passes charmantes tu débouches dans célères pour t’éloigner des rochers me- Batz (29) en misant sur une période de un Port-Blanc très coloré. Un campeur naçants en maugréant. vent d'est qui n'arrivera pas. Tu vou- te compare à Jean-Louis Etienne. Au ème drais bien rencontrer R. alors il faut arri- bar sur une carte du XIX tu crois voir Trois offres en l'île Saint Gildas un lagon. ver à l'île de Batz avant le week-end. Plus loin tu repères une forêt de mâts. Serait-ce le port de plaisance de Tré- beurden ? Non, ce sont des antennes expérimentales. L’Ilot est parfait pour tester des denrées avec deux Robin- sons. Tu passes entre Trébeurden et l'île Millau en pensant déboucher sur la baie de Lannion. Mais l’horizon est masqué par la flottille de la fête de la mer. Il faut se faufiler. Un marin du Sant C'hiriec propose un verre de gwinn rhu. Loupé ! Par contre, un 12 mètres hau- tain te manque de peu. Enfin la visibilité

16 Juin 2002 se dégage sur la baie. A bâbord l’es- Un grain survient. Tu enfiles l’anorak chauffer. Roger arrive, sympa ; mais tu tuaire du Léguer, au sud la « Lieue de sur ton buste mouillé. La pointe de Pri- n’as pas rendez-vous. En te rejetant à grève » que tu ne tiens pas à arpenter. mel se défend. Avant de traverser la la mer, il promet de raconter les Tua- Entre les deux la côte est élevée et ver- baie, il faut attendre la bascule et te motus à l’A.G. de CK/mer. Il y a encore doyante. Il reste deux heures de cou- réchauffer. Le port du Diben s’y prête du courant et le phare éclaire le cam- rant favorable. Un plaisancier te rensei- sauf qu’une averse crache précisément ping. Des voileux portent le kayak et gne sur le camping de Locquirec et t'of- dans ta soupe. Croisé là, un poulet aident à monter la tente, puis t'invitent à fre une bière. Puis il ose revenir t'offrir mouillé avoue cesser la patrouille. Au partager leur repas et à fêter en chan- une remorque ! Long chariotage parmi moment de repartir, ta forme n’est pas sons autour du feu la fin du stage de les pêcheurs de coques. Nul ne se revenue. Un vent de force 4 complique voile et ta plus longue étape. plaint des algues vertes. la traversée de la baie. Et pour com- Coup de vent au mental mencer les gendarmes maritimes t’in- Jour férié terrogent : 17 Août. Au matin passe la sœur de Le 15 août : tu t’offres du repos sur le Roger, amicale. Le temps superbe per- - Vous avez vu l'état de la mer ? plancher des vaches et des chevaux. met de faire le tour de Batz. A la plage - Le vent vient de l'ouest, la houle du En auto stop, tu gravis le Méné Bré. A roscovite, tu retrouves ton chapeau ! En nord-ouest, la mer descend : en somme 302 mètres d’altitude on distingue le le recoiffant, tu t'envoies du sable dans ça va tout droit ! Tuchenn Gador à 52 km. On cause les yeux, ce qui t'empêche de te rincer - Et vous allez où ? Breton sous les casquettes ; une dou- le l’œil et de répondre au chant des si- - Saint Pol de Léon, mens-tu zaine de crêpières transpirent bénévo- rènes. Feuilles de vigne au déjeuner et -Soyez prudents" lement ; ça sent la saucisse et le crot- rencontre d’une autre kayakiste de tin : « Grand concours de chevaux de Et s’ils t’avaient demandé la puissance Roscoff. Tu retraverses la baie pour trait ! ». Les poulains sont parfois bruta- du moteur ? C’est vraiment l’envie de saluer un copain à Térénez. Il est ab- lisés. Les juments bretonnes offrent des trouver R. qui te pousse. Sur une plage sent. On annonce un coup de suroît. Si tonnes de flegme. L'orage interrompt ce de Roscoff tu t'affales épuisé. Prévenu ton épaule n’altérait pas ton mental, tu succès. Voyager en stop vers l’auto par deux kayakistes de Roscoff, tu rat- aurais patienté à Calot. Tu renonces à sera aussi aisé que vers le kayak, trapes ton esquif que la mer emporte. prolonger le voyage jusqu’à Morlaix. La d’où : cap sur Brehec. Retour à Locqui- Au coin d'un talus tiède, tu captes quel- moyenne journalière de 14,5 milles rec avec essuie-glaces. ques calories. Un pêcheur insiste pour contre 10 en juillet s’explique particuliè- t’y installer car d'autres l'ont déjà fait, rement par un temps plus clément et Ce soir où jamais mais tu repars. Le vent est tombé. A moins d’escales diplomatiques. Par Aube du 16. Le camping dort et la mer Port Bloscon les nombreux passagers contre découvrir un tel littoral est exal- descend encore un peu. Pour trouver de l’Irish Ferry t'observent de haut. Tu tant. Maintenant place aux petits soins. R. il faut arriver ce soir à Batz. Après siffles les saluts d'usage. Pas de ré- Beg ar Fry, (bout du nez) tu rases la ponse. Peu après, tu débarques au falaise pour sentir les contres courants. centre de vacances. R. revient bientôt. En l’attendant, tu cherches à te ré-

Ecrire, ce n’est pas si compliqué… Accrocher le lecteur par le titre… Le chapeau pourra inciter à aller plus loin… Aller au message (émotions) essentiel… Bref si vous avez une info, une petite histoire, un truc qui vous intéresse et qui peut être partagé.. n’hésitez pas à nous ramener votre prose et vos illustrations pour le prochain bulletin avant le 10 août !

17 Juin 2002 Par Jean-Marc Janvier

Saint-Pol de Léon, 20h00, la moto d'Olivier précède la pe- tite R5 rouge d'Eric. Je distin- gue la tête moustachue et ri- golarde de Jean-Luc à tra- vers le capharnaum qui en- combre jusqu'au plafond l'ha- bitacle de la voiture. Nous embarquons pour Cork, ce vendredi 8 juin 2001. Ouf, ça passe, transfert réus- si dans la remorque et ma vieille « opel ». Ils sont fous ces gaulois, j'ai l'impression de transporter un vrai maga- matelas thermarest à même le sol: c'est crêtes blanches qui parcourt la baie. sin d'alimentation générale. la garantie d'une bonne nuit de som- L'étonnant en Irlande, c'est aussi de C'est vrai que c'est la pre- meil. rencontrer immédiatement Dave et Eli- mière fois que notre équipée sabeth, musiciens traditionnels. Dave part pour une semaine en- Samedi 9 juin - Le trésor du est également instructeur de kayak. Le tière, mais quand même, il y a jour. Au débarquement à Cork un voyage s'éclaire d'une manne de ren- peut-être un peu d'exagéra- quatuor d'hommes en blanc, masqués, seignements. Ensuite, escale à la base tion ? encagoulés, désinfectent copieusement les véhicules à la lance haute-pression. des Glénans de Baltimore. Hervé, un La fièvre aphteuse sévit en Eric me dit d'accélérer pour franchir le marseillais buriné nous reçoit genti- Irlande et en Angleterre. Les barrage nauséabond. Sur les maisons ment, nous avons droit à un bon topo contrôles douaniers sont ren- de nombreuses affichettes sont placar- sur les conditions de navigation dans la forcés et des mesures draco- dées: le peuple Irlandais proteste, et zone. Pour finir, il nous met en garde niennes de désinfection sont demande d'arrêter l'inutile massacre sur les tiques dont il a été la victime appliquées. Le regard inquisi- des animaux ! horrifiée et affolée. teur du douanier nous met tous mal à l'aise. Je descends Chercher la route avec 3 copilotes agi- la vitre, petit échange poli en tés n'est pas une mince affaire - bien 19h00 - Parés à appareiller, c'est sur- anglais « yes, I live in St- prendre garde de rouler à gauche - pru- prenant ! les bateaux flottent malgré un Pol..., beautiful church... » et dence - l'escargot bleu se hâte lente- chargement que je juge excessif. Pre- nous franchissons la barrière ment vers sa destinée. miers coups de pagaies qui nous éloi- avec toutes nos charcuteries, Baltimore est choisi comme point de gnent de Baltimore la bariolée. fromages et autres denrées départ de la randonnée parce que la S'orienter, chercher le passage à illicites. sonorité de « Baltimore » est plus poéti- l'ouest de R1NGA-ROGA Island, fran- que que celle de « Skull ». Baltimore chir l'étroit chenal avec l'étrave qui La croisière est tranquille, nous squat- Bay apparaît en haut d'une côte, beau, pousse la masse compacte des va- tons le salon n°2 avec nos duvets et magique, la vision donne envie de rechs noirs - voir ces minuscules îlots prendre la mer malgré le clapot aux habités par quelques chèvres, voir des

18 Juin 2002

Nous installons notre bivouac au- dessus d'une plage de galets située à 1 mille du port côté est. Ce soir, c'est Oli- vier le cuisinier. I1 a prévu de faire des frites, une première en randonnée. Ex- périence faite, c'est possible, c'est bon, mais c'est une véritable gabegie de car- burant. La nuit est tombée (c'est long les frites). Nous faisons route pub. En chemin, nous rencontrons Julie la doyenne de l'Ile, 90 ans, rigolote au possible, bon pied, bon œil: elle a le coup de foudre pour Olivier qu'elle embrasse avec fou- gue. Elle dit qu'elle est la reine de l'Ile; maintenant Olivier est le King ! têtes de phoques qui jouent au yo-yo, ISLAND en point de mire. Puis nous apparaissant et disparaissant, voir, ai- longeons CAPE CLEAR ISLAND par le Les montées et les descentes se suc- grettes, hérons cendrés, huîtriers. sud. Nous découvrons une grotte im- cèdent avant d'arriver au pub où Dave Toute une exubérance de vie animale pressionnante située à l'entrée de et Elisabeth expriment leurs talents. s'offre à notre regard, bonheur d'une SOUTH PORT du côté est: nous péné- Ambiance sympathique, les présenta- sortie tranquille sur l'eau assagie, dé- trons dans une galerie souterraine de tions et le contact s'établit facilement. tente inimaginable après le stress d'un peut-être 100 m de profondeur. Tous se taisent lorsqu'une voix se met à chanter. Un canadien originaire de départ oublié, lointain, est-ce l'Irlande Le fond de SOUTH PORT est jonché l'île prétend qu'avant tout le monde vi- qui déjà nous capture et nous en- de blocs rendant l'accostage difficile, de vait centenaire ici, mais maintenant voûte ? plus, le bivouac n'est pas recommandé avec la vie moderne et la pollution, l'es- Atterrissage dans le nord de l'Île SHER- du fait de la présence d'un camping pérance de vie diminue. J'arrive à avoir KIN avec comme décor une vieille cale visible sur les premières hauteurs. une météo avec le capitaine du ferry: délabrée, et, au milieu d'un beau tapis Nous retrouvons DAVE et ELISABETH beau temps pour deux jours. herbeux, un vieux bateau en aluminium au port du sud. C'est leur récréation réduit à l'état d'épave. Eric, cuisinier du entre deux concerts, nous irons les Après deux Guiness, le franco-anglais jour, déniche un barbecue à deux écouter ce soir. d'Eric et d'Olivier va bon train. C'est trop drôle, les mots anglais inconnus foyers idéal pour sa grillade généreuse. Des plongeurs nous renseignent d'un d'Olivier sont exprimés en français. Le Sur l'épave une plaque d'identification vent de force 5 à 6 pour la fin de la jour- barman prête une oreille des plus atten- rivetée m'attire. Je l'effleure à peine et née. Nous nous hâtons de contourner tive à des propos qu'il semble compren- elle me tombe dans le creux de la main: CAP CLEAR avant l'arrivée de ce vent dre. le trésor du jour ! frais. Au pied de CAP CLEAR des pho- ques d'un superbe gris argenté sem- Je les arrache à la chaleur du pub, le mot de la fin est pour Jean-Luc qui Dimanche 10 juin - Julie la blent être les gardiens d'une grotte hos- lance « on devrait rentrer si on veut reine de CAPE CLEAR tile balayé» par des risées de plus en avoir la « face nette » demain ! » ISLAND plus fortes, fulmars, guillemots, pin- gouin torda, exécutent un ballet inces- L'équipage reprend sa route maritime Lundi 11 juin - Cap sur le sant et bruyant au-dessus de nos têtes. en longeant SHERKIN. L'ambiance est FASTNET au calme. Il y a de nombreux coins de Escale au port principal et première C'est vrai, c'est dommage de partir si bivouacs possibles le long de SHER- pêche de crevettes. Un résultat positif à vite de CLEAR ISLAND que l'on vient à KIN. Traversée de CASCANANE la surprise de mes amis. Je sais que peine d'effleurer mais c'est la journée SOUND, zone à courants traversiers lorsqu'ils auront goûté les crevettes ir- de rêve pour le FASTNET. Départ à forts, avec la falaise de CAPE CLEAR landaises sautées à l'huile d'olive et à midi avec un léger contre temps de der- l'ail, il ne pourront plus s'en passer !

19 Juin 2002 nière minute: Jean-Luc oublie d'enlever les encombrantes protections d'étrave du Belouga, alors ça freine ! 12h30. CAP CLEAR est doublé, devant nous à 4 milles, on distingue FASTNET ROCK. 13h45 arrivée au FASTNET: mer calme, beau temps, le rocher est im- pressionnant de verticalité. Atteindre un grand phare c'est vivre un grand mo- ment de kayak. Nous apercevons des gens sur la tourelle alors que nous le croyons automatisé. La mer est si calme que le débarque- ment est possible sur le rocher. Pic-nic improvisé sur le phare mythique suivi d'une visite. Notre passage coïncide Nous quittons le phare à 16h30. Nous temps dans l'air. Une grotte traverse la avec les travaux de réfection des pein- avons 10 milles à parcourir pour attein- falaise et nous permet d'accéder à la tures qui se déroulent une fois tous les dre BARLEY COVE juste avant MIZEN baie de CROOKHAVEN. deux ans et durent 3 semaines. Les HEAD. Mer belle. Eric impose un Petite escale dans une anse. Nous re- peintres sont déposés en hélicoptère rythme soutenu. Jean-Luc et Olivier trouvons le jeune homme et sa mère pour la durée des travaux. Une bou- sont un peu à la peine. C'est vrai que le qui tentent une pêche aux crevettes teille de vin ça aide, les peintres nous Belouga bien chargé de Jean-Luc ne avec un filet à papillons ! Je suis sûr autorisent l'accès. Nous montons jus- peut rivaliser avec le fringant coursier qu'ils se souviendront de leur pêche qu'à la 2ème tourelle, qui, malgré sa hau- d'Eric et Olivier était gravement malade miraculeuse ! teur arrive à être recouverte par la mer il y a quelques temps. en furie. En ce qui concerne l'ancien Nous choisissons de quitter la très belle Nous dénichons un petit havre herbeux phare sa forme « blockhaus » fait plus baie de CROOKHAVEN pour faire un au fond de BARLEY COVE. La pan- penser à un sous-marin qu'à un phare. cap direct sur LONG ISLAND. Change- carte NO CAMPING se fait immédiate- J'imagine la vie de ces anciens forçats ment de pays dans une ambiance de ment recouvrir par la tente. L'équipage de la mer réfugiés dans leur carapace houle formée s'engouffrant dans un harassé est heureux de la journée et de de fonte recevant les paquets de mer, long couloir entre deux falaises. Pen- la blague du moment. et l'humidité qui ruisselle sur les parois dant un moment nous nous sentons de fer glacées. Vision de cauchemar si Mardi 12 juin - Le mystère de petits et vulnérables face à cette nature en plus ils n'ont plus rien à manger. LONG ISLAND BAY impressionnante et forte. Eric s'offre une chasse en apnée au Le matin, le jeune tenancier français de 20h15, arrêt apprécié sur la première pied du phare malgré son appréhension la petite gargote nous offre un café. Sa crique hospitalière rencontrée sur pour les phoques qui hantent le sec- mère accueillante et curieuse nous fait LONG ISLAND. teur. Il n'a pas oublié sa mésaventure goûter sa fricassée de coques, palour- La soirée est humide, sensation d'être dans l'archipel de Molène, le jour où un des, et moules ramassées au fond de en ECOSSE. L'île est truffée de grottes, phoque s'est agrippé à son dos et lui a CROOKHAVEN BAY, tout en nous un vrai gruyère. Un mystère me turlu- mordillé le gras de l'épaule peut-être questionnant sur notre périple et nos pine: pourquoi cette île a donné son pour lui signifier son affection ? Il avait pédigrés respectifs. nom à l'ensemble de la baie « Long dû attendre au fond la fin de cette mani- Nous sommes sur l'eau à 14h00. Nous Island Bay ». festation d'amour, avant de remonter à contournons la péninsule de CROOK- Mercredi 13 juin- Le lagon de la surface. A 10 mètres du phare, je HAVEN. La mer a changé d'allure; la LONG ISLAND plonge ma mitraillette et sors en quel- houle s'est intensifiée, la montre baro- Olivier surprend une loutre occupée à ques minutes une splendide brochette mètre signale une chute de pression dévorer un poisson plat. Peu farouche, de superbes lieus jaunes. significative. Il y a du changement de elle se livre pour notre plaisir à une

20 Juin 2002 multitude de cabrioles. On devrait dire « Le voile se lève un peu sur le nom de la Départ précipité, 8h30 nous sommes faire une loutre » plutôt que « faire un baie (LONG ISLAND BAY) marqué sur sur l'eau sous une pluie battante. Le canard ». ma carte marine. Pour nos hôtes, la passage entre LONG ISLAND et CAS- Découverte du village, c'est calme, très baie se nomme « ROARING BAY » TLE ISLAND est musclé compte tenu calme. Malgré la proximité de la ville de (carte et livre à l'appui). « La baie qui de sa situation géographique en fond SKULL à 1 mille. Nous apprenons rapi- fait du bruit les jours de tempête ». Voi- de la baie. Le rivage de CASTLE dement qu'il y a 7 habitants sur l'île, là une explication et voilà pourquoi ISLAND entre-aperçu à travers le ri- pas de pub, pas de magasins. Le télé- Jean-Luc n'a pas bien dormi la nuit der- deau de pluie laisse imaginer une île phone public est situé dans une maison nière, ce n'était pas des explosions charmante avec quelques vieilles rui- particulière. mais le bruit du ressac qu'il entendait. nes ensevelies par les mousses et les lichens. Le passage entre CASTLE Nous ne voyons pas de moutons, mais Petite chasse à la pointe de l'île, les « ISLAND et HORSE ISLAND est plus seulement des vaches qui semblent pollocks » (lieus jaunes) si peu appré- facile. HORSE ISLAND, c'est le luxe: la afficher une santé insolente. ciés des Irlandais sont présents en masse. Par contre le coup d'œil sur les digue en béton est neuve; quelques Le port est récent, des rangées de ca- fonds du chenal est décevant avec son maisons en pierre aux façades impec- siers à crevettes flambant neuf atten- tapis de coquillages morts et son duvet cables sont édifiées près du port. Un dent leur heure. Les crevettes irlandai- d'algues vertes. Nous trouvons quel- grand zodiac à quai doit faire office de ses ont du mouron à se faire. ques crevettes dans le lagon qui se ferry. Nous savons par Dave que l'île Nous demandons de l'eau, du coup forme au sud de l'île. Un seuil naturel est la propriété d'une communauté alle- nous sommes invités à prendre un café crée une retenue d'eau à basse mer, il mande. Il y a également un restaurant chez un couple habitant l'île. Ici les tem- se forme là une vraie piscine d'eau chic spécialisé dans les fruits de mer pêtes marquent les esprits; le petit che- sur l'île. En vue de SKEAM ISLAND, pas pressé de retrouver la civilisation, également attiré par la plage de l'île et les ruines du petit village, je propose une escale. La proposition est acceptée par l'équipe, bien que Jean-Luc aurait pré- féré un retour direct sur BALTIMORE. SKEAM ISLAND est à un demi-mille de la côte et à trois milles de BALTIMORE. L'abri me semble satisfaisant et peu apte à se transformer en souricière si le temps continuait à se dégrader et la dépression durer. De plus, au même moment, pluie et vent redoublent d'in- tensité: la mer est blanche entre nous et le rivage ! chaude. A mi-marée montante le seuil Découverte d'une nouvelle île, cette fois nal de 1 mille de largeur qui mène à est recouvert et il est possible de ren- sous la pluie. Deux chèvres malades SKULL peut devenir impraticable avec trer par la mer dans ce lagon et d'accé- avec les pattes de devant bloquées au des vagues de 3 mètres de hauteur. Le der à un bivouac de rêve. phare du FASNET est régulièrement niveau des genoux rampent dans un recouvert par la mer pendant les tem- Jeudi 14 juin 2001 - Le soleil cabanon infect et refusent toute nourri- pêtes. Il y a peut-être, seulement 20 d'Olivier ture. Je sombre dans un sommeil de jours dans l'année où l'accostage sur le La pluie tambourine furieusement la plomb après la petite collation prise rocher du phare est possible par la mer. tente; cette fois le changement de sous la tente. Le message de la VHF Nous avons vraiment eu beaucoup de temps annoncé arrive. Un bulletin mé- me sort de ma torpeur; il règne à l'inté- chance de vivre une journée comme téo spécial à la VHF signale l'arrivée rieur de la tente une chaleur torride. La celle d'hier. d'un « gale ». tente est complètement sèche !

21 Juin 2002 J'essaye de capter le bulletin météo, Vendredi 15 mai - Avez-vous nous oblige à marcher sur un fond de Jean-Luc cause en même temps « la frite ? vase en tirant le kayak. Enfin nous re- Quoi ? Des vents de 110 km/h ? ». Je Au réveil, le troupeau de vaches circule trouvons BALTIMORE. n'arrive pas à comprendre le message, autour des tentes d'Eric et de Jean-Luc. Pauvre Jean-Luc, cette fois c'est trop ça m'énerve un peu. Le troupeau de chèvres s'est égale- pour lui, il en a marre d'attendre sous la Olivier déboule de je ne sais où, sourire ment approché de nous. pluie la cuisson des frites d'Olivier. jusqu'aux oreilles: « non, je n'ai pas fait Un tique s'est logé dans un repli de Écœuré, il regagne sa tente en évitant la sieste, juste après le repas la pluie a peau du ventre d'Olivier, résistant ces de poser le pied dans une des bouses cessé, la mer est redevenue calme, le bêtes-là ! Alcool, essence C, puis ciga- de vache fraîches qui constellent le soleil brille. J'ai visité toute l'île, c'est rette pour en venir à bout ! Grosse gri- champ, où nous avons élu domicile ce super, j'ai trouvé une crique avec de mace d'Olivier en constatant l'étendue soir. l'eau claire, j'ai pris un bain tout nu, je de la brûlure mais plus de tique ! Oh, c'était pas un bon plan de quitter me suis séché au soleil,... vous avez Départ à 9h30 sous la pluie. Au lieu de BALTIMORE et de s'arrêter en chemin, dormi 2 heures ! » faire route BALTIMORE direct on choi- ok, nous aurions été mieux dans un Je pense que ça aussi c'est l'Irlande, sit, pour prolonger un peu le voyage, de bon pub, ok, c'est pas un bon plan non résigné, j'enfile mon ciré et part me pro- contourner les îles de RINGAROGAL et plus les frites en rando, promis, on fera mener sous la pluie qui recommence... INISHBEG. C'est un tour dans la cam- plus... peut-être... J'espère que ça Grand nettoyage de plage, nous ramas- pagne Irlandaise qui nous attend avec n'égratignera pas une belle amitié sons des tas de déchets, un grand feu ses paysages vallonnés et verdoyants. après une si super semaine passée s'aperçoit à travers les fenêtres d'une C'est aussi un labyrinthe où nous trou- dans « la baie qui fait du bruit » (la ruine. Ce soir SKEAM ISLAND est un vons parfois avec hésitation notre che- ROARING BAY) et son rocher mythi- phare habité, demain ce sera une île min. Le saut d'un saumon sauvage sa- que le FASNET déserte propre ! lue notre passage téméraire. En fin de ROCK que nous avons eu le bonheur parcours, une zone avec très peu d'eau de en ce printemps 2001.

22 Juin 2002 Par Ivan Leguérinel

Au mois de décembre 2001 une opportunité m’a permis de voyager pendant 6 jours à travers l’île nord de la Nouvelle Zélande pour faire de belles randonnées pédestres sur les volcans centraux et près de Rotorua la ville aux geysers actifs. Mais je n’allais pas traverser le globe sans plonger une pagaie dans les eaux limpides de Nouvelle Zélande. J’avais repéré sur les guides la « bay of Islands » à 150 km au nord d’Auckland. Par Internet j’ai obtenu l’adresse d’un loueur de kayak à Pahia que j’ai contacté pour louer un K2 (étant accompagné par un non-kayakiste). Réticent à nous louer le matériel pour naviguer seul j’ai donné mon CV de kayakiste, rivière surf et mer, et montré la bosse à la base du pouce droit qui vaut n’importe quel certificat. Il nous a donc fourni du bon matériel, un K2 rapide, une forme venant du Canada, équipé de pompes et de pagaies légères, de qualité. Avec Pierre nous sommes partis pour une randonnée d’environ 20 milles. Au centre de cette baie des îles à la végétation abondante s’élève au-dessus d’eaux bleues et translucides. C’est un lieu très prisé par les voiliers et les touristes l’été, de décembre à février. A l’aller une faible brise nous rafraîchissait, au retour un vent de 5 à 6 Beaufort dans le nez a rendu la fin de la randonnée très physique. La côte dans cette région est très découpée, variée et très sauvage. La végétation luxuriante et les eaux chaudes et claires forment un cadre idylli- que pour la randonnée en kayak de mer. Le nombre de loueurs et d’organisateurs de randonnées dans cette zone en sont la preuve. La Nouvelle Zélande, l’île nord et l’île sud forment un paradis pour les kayakistes de mer ou de rivière. Il est possible de trouver des voyages aller retour Paris Auckland à moins de 1100€. Un séjour de 3 se- maines tous frais compris : voyage, location de voiture, logement en motel et nourriture peut revenir à moins de 5000€ pour deux personnes. De nombreuses possibilités de randonnées en kayak sont offer- tes à des prix raisonnables. Je vous donne ce site internet qui répertorie un très grand nombre de loueurs de kayak et d’organisa- teurs de randonnées sur l’ensemble de la nouvelle Zélande : http://www.qualitykayaks. co.nz/tours.html#hauraki

Et l’adresse de notre loueur de kayak : New Zeland Sea Kayak Ad- ventures Mark Hutson & Pauline Mo- retti, E mail : nzakayak@clear. net.nz

23 Juin 2002 Par Jean-Paul Gendry

Suite à l’appel lundi soir d’un ami : Gérard Le Lundi 18 février 2002, des goëmoniers découvrent un Gautier, j’ai tout de suite répondu présent groupe d'environ 150 dauphins communs piégés dans la pe- pour cette opération. Bien sûr, je ne savais tite Anse de Pen Lan à Larmor-Pleubian (Côtes d'Armor). pas très bien ce qui allait m’attendre là-bas, Les sapeurs pompiers, intervenus les premiers, ont constaté n’ayant jamais vu ou vécu l’analyse d’un une centaine d'individus échoués à marée basse. Une échouage mais je pouvais sans doute être chaîne humaine, composée de sapeurs pompiers, de gen- utile. darmes, de policiers municipaux et de particuliers, s'est rapi- dement mise en place pour tenter de les remettre à l'eau. Les deux rapports complémentaires ci-joints d’Olivier et de Gérard que j’ai souhaité vous transmettre ont pour objectif Il est difficile d'estimer le nombre d'individus sauvés, mais d’apporter de l’information sur les réseaux d’échouages et nous pensons que plusieurs dizaines d'animaux sont repartis sur la protection de l’environnement. vers le large. Le lendemain, nous comptabilisions 53 indivi- dus morts sur la grève (41 retrouvés le 18/02 en fin d'après Un rappel important semble nécessaire : Que faire en cas midi et 12 le 19/02). Le groupe était composé de 50 femelles d’échouage de mammifères marins ; phoque, dauphin, "adultes" (10 gestantes) et 3 juvéniles (2 femelles et 1 mâle). baleine,… ? Les dauphins morts ont tous été transférés vers les services Attention, ne jamais les toucher ! techniques de la commune de Pleubian. Trois personnes du

Centre de Recherche sur les Mammifères Marins de La Ro- ► Vous devez prévenir en priorité : chelle se sont rendus sur place afin d'organiser l'exploitation - CRMM Centre de recherche des mammifères marins à scientifique de cet échouage massif. Des équipes, compo- la Rochelle : 05 46 44 99 10 sées de l'Office National de la Chasse et de la Faune Sau- vage (ONCFS), d'Océanopolis (coordinateur du réseau ► et préciser : date, heure, lieu, nombre, type mammifère, échouages Bretagne), de la Maison de la Baie de St Brieuc, mort, vivant ou blessé. du Groupe Mammalogique Normand (GMN), et de la Station En cas d’échouage de mammifères vivants, la prudence est Ornithologique de l'Ile Grande (LPO), ont travaillé pendant de mise pour ne pas aggraver la situation en créant du deux longues journées pour collecter le maximum d'informa- stress, vous pourrez avoir des conseils sur les mesures indis- tions biologiques, aidés des services techniques de la com- pensables à prendre en compte pour les remettre à l’eau mune de Pleubian, et de la Direction des Services Vétérinai- dans de bonnes conditions. res des Côtes d'Armor et de la DIREN Bretagne pour la ges- tion administrative. ► Sinon, vous devez également contacter la gendarmerie ou les pompiers et éventuellement le vétérinaire le plus pro- Grâce à ce rassemblement de compétences, pour la pre- che. mière fois en France sur un échouage massif, nous avons pu collecter des données et des prélèvements biologiques sur C’est une expérience surprenante et enrichissante que j’ai l'ensemble des animaux retrouvés morts. Tous ont été sexés, vécu à travers ces deux jours. Avec les explications fournies mesurés, pesés et ont fait l'objet de prélèvements pour le par les chercheurs, mon investissement a pris un sens no- compte du programme européen BIOCET*. Trois dauphins tamment sur l’utilité de telles analyses pour mieux connaître ont été transférés vers l'Ecole Nationale Vétérinaire de Nan- les populations de dauphins et les répercutions de l’humain tes pour une autopsie complète. sur la nature. Par ailleurs, elle m’a fait prendre conscience de La cause de cet échouage en masse** n'est pas clairement l’équilibre fragile de la nature. élucidée, mais l'hypothèse de l'accident et du piège dans la * Rapport transmis le 26/02 par Olivier Van Canneyt : du baie est la plus probable sur ce site à topographie et couran- Centre de Recherche des Mammifères Marins de la Ro- tologie complexes. chelle.

24 Juin 2002 Cette opération a pu être bien menée grâce à la participation que je vais chercher des personnes en plus. de nombreux organismes. Et nous tenions à remercier toutes Je commence par contacter Patrick DESGUE du GMN, qui les personnes qui ont donné de leur temps en s'investissant va voir comment il peut s’organiser. Il me rappelle : c’est OK. pleinement, et plus particulièrement les bénévoles du Ré- Je joins Jean Paul que je pense disponible, il est partant. Je seau National d'Echouages, l'ONCFS (Brigade des Côtes contacte Gaël et Samuel qui malheureusement ne peuvent d'Armor et BMI Atlantique), les sapeurs pompiers et les servi- se libérer. ces techniques de la commune de Pleubian. Je prépare mon matériel : trousse de dissection, bottes, ta- * BIOCET est un programme qui consiste à quantifier et mo- blier, documents, flacons BIOCET, brancard, ciré complet déliser les voies de transfert et l'impact sur la reproduction de (haut et bas), longue vue, appareil photo la bioaccumulation des polluants organiques persistants Willy a fixé le rendez-vous vers 9 h à PLEUBIAN, je décide (POPs), chez quatre espèces de petits cétacés des eaux eu- de partir vers 6 h. Nous prenons Patrick à 6h15 et en route ropéennes. Les contaminants recherchés sont principale- pour la Bretagne. ment des organochlorés et les espèces étudiées sont les plus abondantes des eaux européennes : le marsouin com- Après 213 km et 2h30 nous arrivons à Larmor PLEUBIAN. mun, le dauphin commun, le dauphin bleu et blanc et le Nous cherchons la plage où a eu lieu l’échouage pensant grand dauphin. Le projet vise d'une part à analyser les trans- trouver de l’animation. Tout est calme et désert, nous mon- ferts des contaminants par l'alimentation et d'autre part à tons sur PLEUBIAN et cherchons la mairie. L’adjoint au évaluer les effets de ceux-ci sur la reproduction, en prenant maire nous indique les ateliers municipaux où sont entrepo- en considération les effets combinés de l'âge, de l'état de sés les animaux. Nous trouvons des dauphins mis en tas santé et d'autres éléments toxiques comme les métaux sous une bâche. Les premiers individus visibles sont des fe- lourds. melles. Willy n’étant pas arrivé, nous allons boire un café. Trois personnes font de même dans le café ouvert du village.

Il va s’avérer qu’ils viennent comme nous pour les dissec- ** De mémoire du Réseau National d'Echouages... et plus loin en- core : tions. -Janvier 1812 : Paimpol (22) - 70 globicéphales noirs. Retour aux entrepôts, Willy et son équipe sont arrivés. Il est -Janvier 1834 : Pleubian (22) - 29 globicéphales noirs. accompagné de Ghislain et de Cécile stagiaire véto au -Janvier 1979 : Ile de Bréhat (22) - 12 delphinidés. CRMM et sont passés voir la zone d’échouage. Willy évalue -Mai 1984 : Tréguier, Ilot de Loaven (22) - 11 dauphins de Fraser. -Décembre 1963 : Ile d'Yeu, Port Joinville (85) - 96 globicéphales la situation et organise les opérations. noirs. Arrivée dans la matinée de Céline Liret avec un soigneur et -Janvier 1989 : Ile Madame (17) - 7 dauphins communs. un stagiaire d’OCEANOPOLIS. -Avril 2000 : Ile d'Oléron (17) - 8 dauphins communs. Willy met les gardes à la pesée et aux mensurations. Les

animaux sont numérotés à l’aide d’une bombe de peinture, Olivier Van Canneyt Centre de Recherche sur les Mammifères Marins l’inconvénient est de s’effacer avec les frottements et la pluie. Institut de la Mer et du Littoral Elle rendra l’âme avant la fin et les derniers numéros seront Port des Minimes, 17000 La Rochelle marqués au scalpel. Dès que les premiers animaux sont FRANCE prêts, ils sont disposés pour pratiquer les ouvertures et les Tel 33 (0) 5 46 44 99 10 prélèvements. C’est une véritable chaîne qui est mise en Fax 33 (0) 5 46 44 99 45 place avec six animaux ouverts simultanément. Email : [email protected] La difficulté est de faire le choix du type de prélèvement : ni- http://crmm.univ-lr.fr veau 1 ou intermédiaire. Vu le nombre d’animaux il semble évident que tous ne pourront être faits et ceci pour trois rai- * Compte rendu du 26/02 de Gérard Gautier : Guide de la sons : 1) le temps 2) la disponibilité du flaconnage 3) la dis- baie du Mont-Saint-Michel, membre du Groupement ponibilité des compétences pour les prélèvements. Mammologique Normand et kayakiste de mer La mise en place des ateliers terminée, ce sont des dissec- Lundi 17 février 18h45 : appel de Willy DABIN du CRMM tions de niveau 1 que je pratique le matin. Je tâtonne un peu pour un échouage massif à PLEUBIAN près de Paimpol. Il et dérange très régulièrement Willy qui est sollicité de toutes recherche des bras pour pratiquer les dissections, les ani- parts. La presse ne posant pas le moindre des problèmes, il maux se sont échoués vivants. Les premiers chiffres parlent doit également passer du temps à expliquer à la DIREN, re- de 30 individus morts, d’une vingtaine à venir pour la nuit et présentée par sa directrice Annick HELIAS, l’organisation peut être autant demain. Je lui dit que je suis disponible et

25 Juin 2002 des opérations. La DSV est également présente. Le sous nuit est agitée par la tempête et la pluie qui ne présage rien préfet arrive en fin de matinée. Un point presse est prévu à de bon. 13 h30 avant le repas. Sur place vers 8h30, il est décidé de s’installer dans le bâti- C’est la commune qui s’est occupée de nous trouver un lieu ment où avait été rentrés les animaux. Pour commencer, ins- pour le repas du midi. tallation de bâches sur le sol, organisation de l’espace et ré- En fin de matinée, les gardes nous annoncent : 41 dauphins partition des tâches aux nouvelles équipes et dès 9h environ communs femelles dont 3 jeunes et un seul mâle. nous sommes d’attaque. Valérie arrive vers 9h et est mise dans le bain immédiatement, chapeau pour une première. Ghislain pratique une dissection de formation pour que les gardes puissent à leur tour disséquer l’après midi. Les gardes sont aux ouvertures et dissections de niveau in- termédiaire. Toutes les femelles gestantes sont mises de cô- Le repas est pris dans une maison de retraite. Il faut souli- té pour l’après midi pour des prélèvements de niveau 1. gner la bonne volonté et la gentillesse de l’accueil pour un Océano. arrive en renfort dans la matinée. groupe prévu le matin de 10 personnes et qui arrive à 16, avec en plus un certain retard. Le point presse à lieu à la Le repas est pris au même endroit que la veille, nous som- mairie avec : le Sous Préfet, Annick HELIAS de la DIREN, le mes une vingtaine. responsable des pompiers, le maire et Willy CRMM. Nous reprenons vers 14h00, pour finir les prélèvements de Après le déjeuner, vers 15h le travail reprend. Il y a moins de niveau 1 vers 16h00. Cela nous semble un peu incroyable ! dérangement mis à part les nombreux badauds venus en Tout le monde est ravi, le rangement ne tarde pas. Le seul famille ! souci semble venir de l’équarrissage qui fait des difficultés quant au lieu de chargement des cadavres. Ils veulent que J’ai pu faire deux dissections le matin, avec la découverte les animaux soient sortis du bâtiment par les services munici- d’un fœtus lors de la deuxième dissection. Patrick de son paux le lendemain. Les animaux sont recouverts de plasti- côté pratique des ouvertures et dissections de niveau inter- que. La remorque, le matériel et l’aire bétonnée sont passés médiaire. Jean Paul quant à lui, passe d’un atelier à l’autre à l’eau de javel. Un petit mur de sable est disposé dans le notamment à la pesée et au transport des animaux vers le sens de la pente autour du tas de dauphins pour retenir les lieu des dissections. écoulements de sang. Au niveau des dissections, ce sont en fait des équipes de Après le chargement du matériel et des prélèvements, tout le deux ou trois qui se forment, un qui prélève et un ou deux qui monde se quitte en quelques minutes comme une volée de conditionnent. moineaux. Les premières dissections du matin ont permis d’augmenter Retour à la maison vers 20h00. Fin de l’opération avec des le nombre de personnes pouvant assurer les prélèvements courbatures plein les cuisses à force de travailler accroupis de niveau 1 et intermédiaire. L’après midi, du fait de l’arrivée pendant 2 jours. Pas besoin de berceuse pour s’endormir. de nouvelles bonnes volontés, ce sont de nouvelles équipes qui se forment. Je sais que Willy, Cécile et Ghislain sont rentrés sur la Ro- chelle bien tard et qu’il leurs a fallu terminer les conditionne- La nuit et la fatigue vont arrêter nos ardeurs. ments après ces longues journées et la route. Willy va goûter aux joies du direct sur FR3 Bretagne Il s’en Quelques observations : tire remarquablement malgré les questions saugrenues du journaliste. 1) Un coup de chapeau à Willy pour l’organisation parfaite dans l’urgence mais sans précipitation. La DVS a ordonné de charger les animaux non autopsiés dans une remorque et mis à l’abri avec les autres dauphins 2) Le travail de formation en amont a je pense pleinement pour éviter des prédations par les chiens errants. joué son rôle. Il est décidé de continuer le lendemain. Patrick ne peut pas Un grand merci à tous ceux qui ont participé dans la bonne rester, nous nous organisons avec Jean Paul pour ne pas humeur à ces deux journées, je pense que j’en garderai long- avoir à rentrer. Je contacte Gaël qui trouve Valérie pour ra- temps le souvenir et je ne suis pas le seul. mener ma voiture que Patrick va prendre pour rentrer. J’espère qu’il n’y aura pas trop de problèmes dans les échan- Nous mangeons dans l’auberge qui nous accueille pour la tillons et que tout ce travail sera profitable, ce dont je ne nuit. Nous sommes 7 : Willy, Cécile et Ghislain du CRMM, doute pas. Frédéric et Arnaud des BMI, Jean Paul et moi du GMN. La reprise des hostilités est prévue pour 8h le lendemain. La

26 Juin 2002 UUnene îleîle estest unun bateaubateau immobileimmobile Par Olivier de Kersauson* (*Avec son aimable autorisation, article paru dans Terre sauvage n°109)

J’aime ces fausses îles qui rappellent les îles de l'enfance. On peut s'y faire surprendre par la marée, avec l'impression d'être parti loin. Puis de se retrouver avec un cordon ombilical à marée basse. La plus surprenante, c'est Callot. Un monde qui a gardé une certaine magie, comme tous les lieux qui s'ouvrent et qui se ferment. Callot s'ouvre à l'aube quand on y arrive, puis se referme avec la mer. A ce moment-là, elle s'éloigne petit à petit, comme si elle appareillait, comme si elle quittait le monde. Ses habitants ne sont pas de vrais îliens. Ils ont la mentalité de ceux qui partent. Avec cette conscience mêlée de plaisir, que l'hiver arrive et que les visiteurs vont partir. Alors, ils pensent que la mer les protège, les enferme, les endort. Pour moi Callot est la plus belle, la plus touchante, celle qui a le plus de charme. Je l'ai découverte par hasard. En me promenant en baie de Morlaix. J'ai pris le passage, et j'ai eu un coup de foudre. Ah! la magie d'autrefois de Callot, la petite église tout en haut... A l'île Grande, j'y ai vécu, il y a quarante ans. Là-bas, il y a toujours eu le passage. Cette île a toujours été habi- tée, bien quelle fût éloignée. Sur cette côte, il y a quarante ans, il n'y avait personne. Je m’en souviens, on pêchait le crabe le long de la digue du port. Je devais avoir huit ou neuf ans. Et cette île, je l'aimais bien, c'était encore la campagne en bord de mer. Dans l'après-guerre il n'y avait vraiment personne. Un monde rural. je me souviens encore de ceux qui labouraient les champs, avec la mer derrière. Ils descendaient à la grève avec le même cheval pour aller prendre le goémon. Des fermes isolées, au bord de la mer. Personne n’y venait. Les marées privent les visiteurs de leur habitude de sortir et de rentrer à l'heure de leur choix. Les marées imposent une discipline ru- gueuse. Incompatible avec l'insouciance et le goût de cette liberté-là. Ces îles-là, avec le temps, se rattachent à la terre. On ne peut plus en faire le tour avec les bateaux d’aujourd'hui. Ce sont des îles où l'on n'accoste plus ja- mais. Elles hésitent encore entre la terre et la mer. Un jour, il faudra bien qu’elles se décident ! Tout le monde ne peut pas être de Sein ou d'Ouessant. A Sein et à Ouessant, ils ont cet esprit d'îliens sauvages. L’île Grande de mon enfance, c'était une version de 1'île au Trésor, avec l'imagination des enfants et cette notion d'aventure. Ce côté « on est sur une île ». L’avantage de ces îles, c'est que tout individu y est immédiatement identifié. Ami ou ennemi. Notre trésor, c'était ce qu’on allait pêcher. Savoir qu’un jour, comme les grands, nous allions trouver un vrai ho- mard dans les cailloux. On passait des heures à farfouiller avec maladresse. A l'époque, I'île Grande était déjà rattachée à la terre. On passait à marée haute comme à marée basse. A très grande marée haute, je crois bien que l'on ne passait plus. On restait. Et puis, il y avait les grandes marées. Une grande marée, c'est sublime. Changement de couleur, de lumière, d'odeur. Odeurs de varech. Se baigner dans la mer par un jour de grande marée, par beau temps. Le soleil a chauffé le sable, puis la mer se met à monter vers 11 h 30 du matin. Elle est à son maximum vers cinq heures de l'après-midi. L’eau, le sable ou les rochers sont chauds de soleil. Ce sont des moments inoubliables. Quand on est sur un bateau, une grande marée ça ne se ressent pas du tout. Au large, on ne la voit pas. C'est un phénomène de côte. Au large, vous ne savez pas l'heure de la marée. Elle ne commence à agir que lorsqu’elle parvient près des côtes. Là ce sont des courants, des bascules. Avec ce côté bouillonnant. Il faut être près de la terre pour le voir. Il faut s'approcher des rochers, il faut entendre le courant chuinter sur la roche. Là, dans le chenal du Four ou à la sortie du Conquet, par temps clair, la marée, on l'entend loin à l'intérieur des terres. Mais il faut que le temps soit calme et que le vent porte un peu. On entend cet espèce de grondement dans les chenaux entre la pointe de Saint-Matthieu, le phare du Four, Ouessant et Molène. Alors on l'entend comme au bord des récifs. Ce grondement-là, je me rappelle avoir tendu l'oreille, j'étais dans les terres, pas loin d'un kilomètre et demi de la mer à vol d'oiseau. Un souvenir frappant. Imaginez entendre tous ces cailloux qui gueulent. J'aime voir la mer. Naviguer, être sur l'eau. Les îles ont une autre saveur particulière. Elles donnent de la sécurité. On sait que les loups-garous imaginaires ne viendront pas. C'est leur côté forteresse. La haute mer enferme, elle chasse ceux que l'on n'a pas envie de voir. Et ceux qui ne sont pas capables d'attendre une marée de plus pour rester avec vous sont des gens de peu

27 Juin 2002 d'intérêt. Il y a là une logique, un système formidable. Alors, certains rêves, comme la marée, se retirent. je me souviens de cette sensation de déchirement à la fin des grandes vacances. Ce chagrin et cette détresse, je les ai retrouvés à travers les affres de l'amour. Mais je les avais déjà connus vers l'âge de cinq ou six ans, quand je savais qu'on allait à la plage pour la dernière fois. C'est la raison pour laquelle j'ai voulu naviguer. Pour ne plus jamais être séparé de la mer. Si on m’ôtait de l'âme, ou de la mémoire, tous les souvenirs, tous les moments, que m’a donnés la mer, je ne sais pas ce qu'il resterait de ma vie! je me demande ce que serait l'esprit d'un homme qui n’aurait jamais vu la mer. Qui ne saurait pas que la mer existe. je crois que cela ressemblerait à un monde où Il n’y aurait pas d'amour. Pour le marin que je suis, une île est un bateau immobile. Ce serait bien de la faire naviguer! Appareiller vers le large avec une île de quarante hectares , avec des chevaux, des plans d'eau, et toute la campagne. Prendre la mer.

*Propriétaire d’un bar / moules frites, « Le tour du monde » port de plaisance du Moulin Blanc ( à coté d’Océa- nopolis) 29200 Brest tel : 02.98.41.93.65

28 Juin 2002