L'ecume Des Jours
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Fiche pédagogique L’Ecume des jours Sortie en salles : 24 avril 2013 deux tourtereaux convolent et Résumé emménagent ensemble. Mais le bonheur sera de courte durée. Réalisation : Michel Gondry Colin, jeune oisif souriant et La douce Chloé développe en Scénario : Boris Vian (roman), charmant, vit dans un Paris atem- effet une anomalie pulmonaire Michel Gondry, Luc Bossi porel, au sein d’un fantasque et pendant le voyage de noces. Le foutraque appartement. Il partage diagnostic tombe, terrible et poé- Acteurs : Romain Duris, sa routine entre des inventions tique : il s’agit d’un nénuphar dans Audrey Tautou, Gad Elmaleh, loufoques (le pianocktail), des le poumon droit. Dès lors, Colin Omar Sy, Aissa Graba, repas concoctés par son talen- n’aura de cesse de tenter de sau- Charlotte Lebon tueux ami et cuisinier personnel ver sa bien-aimée, de se ruiner en Nicolas, et les visites de son meil- traitements coûteux, de pilules Musique : Etienne Charry leur ami Chick, intellectuel incon- métalliques en séjours à la mon- ditionnel de Jean-Sol Partre, le tagne. Il en vient finalement à Distribution : Frenetic Films philosophe à la mode. Rien ne devoir quitter son existence oisive semble manquer au fortuné inven- et à se mettre à travailler dans Durée : 125 minutes teur parisien, pourtant, quand des usines absurdes et sordides Chick lui annonce avoir rencontré où les chaises se rétractent quand Public concerné : l’amour en la personne d’Alise, et on veut s’asseoir, où les hommes quand Nicolas lui avoue sa liaison couvent des armes à feu sur un Age légal : 12 ans passionnée avec la belle Isis, nid de terre, ou viennent sonner Colin se rend vite compte qu’il aux portes pour annoncer les Age suggéré : 14 ans désire plus que tout lui aussi par- prochaines mauvaises nouvelles. tager son quotidien avec une http://filmages.ch amoureuse. Autour de lui, Chloé décline, le nénuphar se développant dans sa http://filmrating.ch/fr/ L’amour, Colin le rencontre poitrine, ses amitiés sont mises à grâce à Chloé, une jeune fille mal par l’addiction aggravante que rayonnante qui lui est présentée Chick porte à Jean-Sol Partre, et lors d’une fête chez Isis. Les sen- son appartement se métamor- timents sont réciproques et vite phose sinistrement en caveau célébrés entre notes de jazz, obscur et étouffant. dance langoureuse de « bigle- moi », sorties en nuage sur les toits de Paris ou à la Molitoire, patinoire tenue par des hommes- pigeons. Six mois plus tard, les ___________________________________________________ Disciplines et thèmes concernés : Français : Analyser un récit PER : analyser des récits de genres différents et en dégager les multiples sens (L1 31) ; apprécier et analyser des pro- ductions littéraires diverses (L1 35) Les figures de style PER : Analyser le fonction- nement de la langue et élabo- rer des critères d'appréciation pour comprendre et produire des textes (L1 36) Colin (Romain Duris) effectuant une recherche « Google » sur une Education aux médias : machine inventée pour l’occasion, héritage des minitels des années 90, l’adaptation d’un roman en sous l’œil de son cuisinier Nicolas (Omar Sy). film ; filmer la poésie PER : Décoder la mise en scène Commentaire trices du film : Audrey Tautou de divers types de messages en considère en effet Chloé comme découvrant la grammaire de En 1947 sort un étrange roman une icône d’amour tragique de la l'image par l'analyse de formes cruel et poétique, vite méprisé par littérature, au même rang qu’une iconiques diverses; en identifiant la grande majorité des intellec- Juliette shakespearienne. Elle les stéréotypes les plus fre- tuels de l’époque : L’Écume des était ravie de pouvoir interpréter quents (FG 21 MITIC) jours. Il crée un petit univers litté- l’héroïne de son adolescence, tout raire à lui seul, dans lequel un comme le réalisateur Michel Exercer des lectures multiples dans la consommation et la jeune homme banal tombe amou- Gondry, qui porte un attachement production de médias et d'infor- reux d’une jeune fille radieuse tout particulier au roman de Vian. mations…en analysant des dans un Paris chaud, jazzy, musi- images fixes et animées au cal, où les nénuphars tuent en C’est donc après avoir tâté du moyen de la grammaire de poussant dans vos poumons, où blockbuster américain (The Green l'image (FG 31 MITIC) les meubles ont une identité Hornet) que Gondry se retrouve à propre, et où on peut créer des nouveau dans une histoire mélan- Musique : cocktails en jouant du clavier d’un colique – on se rappelle Eternal La musique comme person- « pianocktail ». Déroutant, lou- Sunsine of the Spotless Mind - nage dans un film foque, absurde, jouant constam- dans laquelle il envoie les specta- PER : Analyser ses perceptions ment sur le sens propre et figuré teurs dans un Paris atemporel sensorielles en prenant cons- des mots, l’histoire d’amour de foisonnant d’inventions et de poé- cience et en restituant des im- Chloé et Colin présente un style sie. Cette poésie s’imposant pressions ressenties (A 32 Mu) peu accessible pour l’intelligentsia comme une des marques de fa- littéraire française qui n’y voit brique de celui qui a commencé Arts visuels et activités qu’une avalanche d’allusions à la comme dessinateur puis vidéaste créatrices : pop culture de l’époque. Le livre de clips musicaux, on aurait diffici- Débattre de l’univers plas- ne sera pas un succès du vivant lement pu trouver meilleur réalisa- tique très particulier d’un réalisateur de Boris Vian, bien qu’il soit loué teur pour adapter ce roman. par Raymond Queneau et par Jean-Paul Sartre, qui apparaît Vian et Gondry partagent en PER : Représenter et expri- mer une idée, un imaginaire, dans le roman sous le nom de effet cette idée commune que les une émotion, une perception « Jean-Sol Partre ». L’ouvrage objets ont une identité propre et dans différents langages deviendra néanmoins par la suite que les représenter anthropomor- artistiques (A 31 AV et A 32 un classique étudié au collège et phisés est donc d’une logique AC&M) un livre de chevet pour bien des implacable : « L’idée que les adolescents, dont une des ac- choses sont presque plus vivantes 2 que les gens correspond bien à Cet univers a d’ailleurs enchanté ma personnalité. J’ai souvent eu jusqu’aux acteurs eux-mêmes : tendance, quand j’étais enfant, à Omar Sy, qui campe le sympa- prendre les objets pour des per- thique Nicolas, a maintes fois sonnes (…) », déclare le cinéaste souligné l’atmosphère « enfan- pour justifier un principe qui a tine » du tournage : « J’ai eu le servi de fil rouge pour toute la sentiment de retrouver le sens création de l’univers visuel de son propre du terme jouer, comme si film, mais qu’on retrouve aussi j’étais à nouveau un enfant de six dans la bouche du héros roma- ans qui a envie de s’amuser avec nesque Colin, pour qui « ce sont tous les accessoires autour de les objets qui changent, pas les lui ! ». Reste que les décors ne gens ». sont pas moins le résultat d’un travail extrêmement précis, « sur- Parmi les autres influences qui réaliste de manière quasi mathé- graviteraient derrière ce principe matique » comme le rapporte d’autonomie de vie des objets, Romain Duris, qui interprète Colin Gondry cite sa propre enfance et est de plus un ancien étudiant parisienne et sa fascination pour en arts plastiques. les passerelles vitrées entre les grandes galeries marchandes, la Et qu’en est-il des specta- culture « récup' » américaine – teurs du film ? Partageront-ils le pays cher à Vian mais où il n’ira ravissement de son casting ? jamais à cause de ses problèmes Pour qui est fan des univers bric- cardiaques – où un wagon peut à-braco-tricotés de Gondry ou devenir un diner, le travail de Anderson, l’exercice stylistique est Jean-Christophe Azerty, ou même des plus réussis. Mais, l’effet de les courts-métrages de Disney surprise passé, on ne peut dans les années 30. Un cocktail s’empêcher de sentir parfois un qui, avec l’aide de Stéphane léger trop-plein d’innovations. Rozenbaum, son talentueux chef Trop de poésie tue-t-elle la poé- décorateur, se marie harmonieu- sie ? Les plats cuisinés ont beau sement avec l’univers de Vian, être magnifiques, les cadavres- distillant des notes d’innocence, torchons débarrassés comme de d’inventivité et de poésie parfois vieux coussins criants de « véri- presque enfantine tout au long du té », on fait un peu – c’est un film. comble - une indigestion d’objets feutrés en stop-motion et de ma- chines cocasses fabriquées avec des boîtes de conserve. On n’en tiendra pourtant pas rigueur au réalisateur mais on s’interrogera cependant sur un autre choix artistique : celui d’avoir pris Romain Duris, Audrey Tautou, Gad Elmaleh et Omar Sy pour incarner les personnages à l’écran. L’ensemble de ces têtes d’affiche fortement sollicitées reste charmant, impliqué, et in- carne toute la poésie de Vian à l’écran avec grâce et même un certain panache, mais il manque à ces trentenaires – voire quadra- génaires – la fraîcheur des héros Michel Gondry répète volontiers de papier tout juste sortis de qu’une partie de son travail a été l’adolescence. marquée par Boris Vian. 3 Les inconditionnels du roman travers images et accords, c’est devraient néanmoins être pleine- une petite synthèse de son uni- ment satisfaits, tant la poésie de vers, son manifeste esthétique de Gondry et celle de Vian réalisateur « bricorama » fausse- s’accordent, se complètent de la ment régressif, que Gondry fait page à l’écran.