La Vallée De Barèges. Ses Pâturages Et Les Méfaits De L'occupation
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LA VALLÉE DE BARÈGES Cartes des Frontières : de Fer — Paris 1694. Raymond RIVIÈRE-CHALAN .LA VALLEE DE BAREGES. SES PATURÂGES ET LES MEFAITS DE L'OCCUPATION ANGLAISE AU MOYEN.ÂGE SCEAU DE LA VALLÉE DE BARÈGES AU XVIIIe SIÈCLE Ets buths quérats dét bielh Castèt Qué Si esmicaillén d'ab ét teins... Mès ét bêrmi lou caü haiissiù 1 R. CHALAN. AVANT-PROPOS Avant de commencer la relation d'événements qui ont fait l'histoire de la vallée de Barèges, il convient de préciser que le nom de « Barèges » est pris, ici, au sens initial du terme, c'est-à-dire historique : il désignait de temps immémorial — et uniquement — la haute vallée du gave de Pau au-dessus de l'échelle du Lavedan à Aygue Rouye. En aucun cas il ne désigne, par conséquent, ici, le bourg des bains de la vallée, actuel- lement appelé Barèges, qui n'existait pas il y a quatre ou cinq siècles et auquel on a abusivement ou tout naturellement donné le nom de la vallée qui l'a fondé. C'est à tort, en effet, que M. Meillon a écrit dans son ouvrage (Histoire de la vallée de Cauterets) en note du mot « Valletica » : « petite vallée que les anciens documents distinguent de la localité de Barèges, est la petite vallée du Bastan qui va de Luz au pied du Tourmalet. Barèges est située en son milieu. Cette petite vallée et son gave sont tributaires de la grande vallée de Gavarnie qu'on nomme improprement dans son entier vallée de Barèges; ce sont deux vallées distinctes... » Et la mention se termine par l'indication suivante ,non moins extraordinaire: « Toutes deux, aujourd'hui, constituent un territoire indivis administré par la commission syndicale dite de Barèges ». Cette explication, peu banale, accrédite l'idée dans l'esprit du public qu'il existait, anciennement, une localité du nom de Barèges, que c'est d'elle que la vallée aurait tiré son nom et que la véritable vallée de Barèges est le bassin du Bastan, connu de temps immémorial sous le nom de La Bat-sus, et non l'ensemble de la haute vallée du gave de Pau ; en outre, par l'inclusion du mot « aujourd'hui » dans la phrase relative à l'indivision, l'auteur semble laisser croire que cette indivision n'existait pas anciennement. Ce sont là autant de contrevérités qu'on s'étonne de rencontrer dans un ouvrage aussi méticuleux que celui de M. Meillon. La localité actuellement appelée Barèges n'a d'existence propre que depuis quelques années ; elle était jusqu'alors et depuis 1789 un hameau dépendant de la commune de Betpouey. Antérieurement, c'était une dépen- dance directe de la vallée. En 1801, lorsque les valléens protestèrent contre l'arrêté du 1er floréal An IX qui leur retirait la propriété des bains, ils affirmèrent que la découverte des bains remontait à trois siècles et que depuis ils avaient toujours appartenu à la vallée. D'après un vieux registre datant de 1415, cité par le chanoine Laporte, curé de Sazos, et repris par le CI Tournier-Lasserve (Histoire Médico-Mili- taire de Barèges), une dame Condoo, de Saint-Martin, aurait légué par testament, en 1395, la somme de trois florins pour l'entretien du luminaire de Sainte-Marie-Madeleine du bain ; ce qui indiquerait qu'à ce moment-là il y avait dans la vallée et sans doute à proximité de Saint-Martin un oratoire dans un lieu appelé seulement « le bain ». Mais le bain en ques- tion existait, semble-t-il, bien avant puisque l'une des familles de Luz, victime de la guerre des partis qui ensanglanta la vallée à la fin du XJJJ° siècle, s'appelait « du bain ». Dans l'énumération des victimes de cette guerre donnée par la sentence du 15 avril 1307 on trouve, en etfet, un habitant de Lu z nommé : « Guilhem del banh ». Ainsi donc, en 1307, c'est à Lu z qu'on trouve trace d'une famille apparemment propriétaire du bain, auquel la dame Condoo, de Saint- Martin, attribue un oratoire en 1395. C'est d'elle, sans doute, que la vallée aura acquis par la suite la propriété de ce bain. Un règlement valléen de 1568, ayant trait à ces bains, qu'il désigne sous le nom de « bain de Labatsus » ou simplement « le bain », fait état des conditions mises par la vallée de Barèges, dont la capitale a toujours été Lu z, à la reconstruction de quelques « cabanes » destinées aux malades en remplacement de celles qui avaient brûlé. Il y avait aussi quelques maisons et dans l'une d'elles, qui appartenait en propre à la vallée, celle-ci faisait tenir une « vendellerie » pour le débit d'aliments aux baigneurs. Donc, à cette époque, le lieu s'appelait « le bain » ou le « bain de Labatsus ». Ce n'est que plus tard, lorsque la réputation des eaux gagna la réqion, que les « étranqers » à la vallée l'appelèrent « le bain de la vallée de Barèges », puis, par contraction, le bain de Barèges et enfin Barèges. Par contre, le nom de Barèges, plus exactement Baredge ou Baretge, désigna de tout temps la haute vallée du gave de Pau et de ses affluents, Bastan compris. C'est ainsi que la délimitèrent les Fors de Bigorre vers 1106 et la Charte de Centot en 1175. C'est bien ainsi que la considérait la comtesse Béatrix lorsqu'elle venait en Barèges pour y percevoir les droits ou rendre la Justice, puisqu'elle tenait ses assemblées en l'église de Sère, qui n'appartint jamais à Labatsus. Ce furent bien, également, toutes les communautés de l'actuel canton de Lu z qu'elle astreignit à l'obligation de fournir otages supplémentaires en punition de l'acte de rebellion des valléens, tout comme le fit plus tard Centule II. Et c'est bien à Sère que siégeait l'archiprêtre de Barèges ! D'ailleurs, en 1319, les notables de la vallée, en majorité Labatsusans, qui procédèrent au partage des biens communs entre les villages et Vics de Barèges, dirent bien, et c'est écrit au traité, que la terre de Barèges est comprise entre l'escale du Lavedan à Aygue Rouye, les ports d'Espa- gne et celui d'Ourdits ou Tourmalet. Sans doute, les novateurs Révolutionnaires de 1790, créant de nou- velles divisions administratives, substituèrent-ils le canton de Lu z à la vallée de Barèges ; mais ils n'en changèrent pas les limites. De sorte que, parallèlement à l'évolution du nom du bourg des bains, la vallée qui le lui donna ne fut plus officiellement désignée que par le nom de sa capitale. Mais les initiatives révolutionnaires, justifiées ou non par la haine de l'Ancien Régime, ne sauraient avoir changé la géographie ni l'histoire du passé, pas plus que n'y avaient réussi les débordements du cartographe De Fer un siècle auparavant. La force probante qui se dégage des chartes précitées est tellement évidente et les limites de la vallée y sont tellement bien définies qu'il semble indispensable d'examiner sur quels documents M. Meillon a pu fonder son opinion erronée. Le premier qui vient à l'esprit est justement la carte de De Fer, qui date de 1694. En effet, De Fer y allonga le bassin du Bastan qu'il nomma seul « val de Baretge », au centre duquel il matérialisa la ville de « Baretge les bains » par un château fort de même grandeur que celui par lequel il désigna Navarrenx ou Saint-Palais ! Par contre « Luz en Barège » sans « t », placé hors du val de Baretge, n'y fut représenté que par un tout petit cercle, comme Sère et... Lourdes ! C'est de la pure fantaisie et elle peut être prise d'autant moins au sérieux que ce cartographe plaça Luz à moins d'une lieue de Pierrefitte et à plus de deux lieues des bains de Baretge, alors que c'est, au moins, l'inverse qu'il eût fallu noter... qu'il situa Campan sur le gave de Pau entre Argelès et Lourdes et Beaucens à l'entrée du val d'Aran ! On doit penser, en outre, qu'il ne connut pas les châteaux de Beau- cens et de Lourdes puisqu'il ne les nota pas sur sa carte... et pas davan- tage celui de Sainte-Marie ni l'église fortifiée de Luz... à moins que le signe qu'il plaça généreusement au bain, où n'exista jamais ni église remarquable ni château fort, les concernât. Mais, dans ce cas, ce n'est pas le hameau du bain qu'il nomma « Baretge les bains ». Il paraît donc difficile de retenir pareil document ! Plus sérieux est le recueil des « Monasticum Gallicanum », ouvrage du 18c siècle. Tout comme l'œuvre bénédictine des « Monasterium Bene- dictum », il dressa l'inventaire historique des couvents et monastères français. M. Meillon y fit de larges emprunts. Au chapitre relatif aux dépendances du couvent de Saint-Savin, Monasticum Gallicanum, porte, folio 231 : « Prioratas Sta Maria alias Sancti Martini de Baregia seu balneiis regiis » ; semblant dire, ainsi, que le prieuré de Sainte Marie s'appela également Saint Martin de Barèges, encore que l'alternative avec bain royal soit absurde. Il existait bien, près de Sers, un village et, sans doute, une église Saint-Martin, aux abords desquels, au dire de Grégoire de Tours, se réfugia, au Ve siècle, l'évêque Justin. Mais ce village avait été rasé par une avalanche en 1601, donc bien avant que le bain de la vallée prît le qualificatif de « bain royal ». Les auteurs du « Monasticum Gallicanum » ne s'arrêtent pas à celà, car un peu plus loin, au chapitre consacré à ceux qui participèrent au développement de Saint-Savin, on peut lire après qu'il ait été fait mention du Comte de Bigorre, du Vicomte du Lavedan, de l'évêque de Tarbes et de l'archevêque d'Aùch : « ..