Joséphine Baker (1906-1975) Joséphine Baker dans Joséphine Baker en 1940 la nègre en 1926

Il est difficile de résumer la vie de cette femme car à elle seule elle a incarné plusieurs personnages de roman : roman réaliste par la misère de son enfance et de ses débuts comme artiste, roman d’aventure par son engagement comme espionne pendant la seconde guerre mondiale et enfin roman humaniste par son engagement contre la pauvreté et le racisme.

Joséphine Baker, de son vrai nom Freda Joséphine McDonald est née le 3 juin 1906 à Saint-Louis (Missouri) aux Etats-Unis de parents artistes. D’une famille pauvre, Joséphine alterne durant son enfance les petits boulots de domestiques et les cours à l’école. Joséphine quitte l'école en février 1920 pour se marier à l’âge de 13 ans. Elle débute sa carrière d’artiste en 1920 et enchaîne des petits rôles comme danseuse. C'est au cours d’une tournée à Philadelphie en 1921 que Joséphine fait la rencontre de son second mari. L'envie de danser à Broadway pousse Joséphine Baker, âgée d'à peine 16 ans, à quitter son second mari pour aller tenter sa chance à New York.

En 1924, elle fait la rencontre de Caroline Dudley Reagan qui lui offre un salaire de 250 dollars par semaine si celle-ci accepte de la suivre en . On lui proposera en 1925 de jouer dans un spectacle intitulé « la Revue Nègre » à , spectacle dont Joséphine Baker sera la vedette et qui fera d'elle une star. Le spectacle est un succès, porté par l’engouement pour le jazz et par l’enthousiasme des artistes cubistes et dadaïstes. Elle débute ainsi une carrière de danseuse et chanteuse à succès dans le milieu du music-hall parisien durant l’entre deux-guerres. En 1926, elle rencontre, Giuseppe Abatino avec qui elle entame une liaison qui dure jusqu'en 1936. Pendant cette période, il est son impresario, son manager, son mentor. Leur relation correspond à la période de l'ascension de Joséphine Baker. Après une tournée en , Joséphine Baker mène la revue des Folies Bergère de 1927. Cette même année, la jeune star se lance dans la chanson En 1931, elle remporte un succès inoubliable avec les chansons de Vincent Scotto J'ai deux amours et La Petite Tonkinoise.

Elle acquière la citoyenneté française en 1937.

Dès le début de la 2nd guerre mondiale, elle s’engage dans le contre-espionnage français. Elle entre après la bataille de France, dans les forces françaises libres le 24 novembre 1940. Entre 1941 et 1944 elle sillonne le Maghreb et le Machrek, de Marrakech à Damas, glanant des informations qu’elle transmet notamment en les dissimulant dans ses partitions. Elle débarque à Marseille en octobre 1944 et suit l’avancée de la 1ère armée française afin de chanter pour les soldats. Ses activités durant la guerre lui valle la médaille de la Résistance et les insignes de chevalier de légion d’honneur. L'ensemble de son action en tant que résistante au service de la France libre est détaillé dans un ouvrage intitulé Joséphine Baker contre Hitler.

Elle retourne aux États-Unis en 1947 et 1951 pour tenter de renouer avec le succès. Elle y est victime de la ségrégation raciale, la poussant à s’engager en faveur du mouvement des droits civiques auprès de l’opinion européenne.

Avec Jo Bouillon, qu'elle épouse en 1947, elle achète le château des Milandes en Dordogne. Elle y accueille onze enfants de toutes origines qu'elle adopte et qu'elle appelle sa « tribu arc-en-ciel ».Séparée de Jo Bouillon en 1957, elle engloutit toute sa fortune dans le domaine des Milandes, où elle emploie un personnel nombreux, et doit multiplier les concerts pour poursuivre son œuvre.

En 1963 elle participe à la Marche sur Washington pour l'emploi et la liberté organisée par Martin Luther King Jr., lors de laquelle elle prononce un discours, vêtue de son ancien uniforme de l'armée de guerre et de ses médailles de résistante. À cette époque, elle est engagée depuis un moment dans l'action de la LICA qui deviendra la LICRA.

En juin 1964, Joséphine Baker, criblée de dettes et harcelée par le fisc, lance un appel pour sauver sa propriété de Dordogne, où vivent ses enfants ; la mise en vente aux enchères du château est annoncée. Le château est finalement vendu pour un dixième de sa valeur en 1968. Jean-Claude Brialy la prend sous son aile et l’accueille dans son La Goulue pour se produire régulièrement à Paris. Le lundi, jour de relâche, Joséphine parcourt l'Europe en solitaire pour aller honorer des engagements à Bruxelles, Copenhague, Amsterdam ou Berlin.

Alors que Joséphine Baker est pratiquement ruinée, la princesse Grace de Monaco, lui offre alors un logement à Roquebrune pour le reste de sa vie et l'invite à Monaco pour des spectacles de charité. Aidée aussi par la Croix Rouge, Joséphine Baker remonte sur la scène de l'Olympia, en 1968, puis à Belgrade en 1973, à Londres en 1974 ainsi qu’à Paris au Gala du cirque.

Le 24 mars 1975, pour célébrer ses cinquante ans de carrière, elle inaugure la rétrospective Joséphine à Bobino, dont le prince Rainier III et la princesse Grace figurent parmi les mécènes. Elle retrouve son appartement parisien le 9 avril 1975 alors que le rideau vient de tomber devant une salle enthousiaste pour sa quatorzième représentation. Le lendemain matin, 10 avril, Joséphine Baker, victime d'une attaque cérébrale, est transportée dans un coma profond à l'hôpital de la Pitié-Salpêtrière, où elle meurt, le 12 avril 1975, à 68 ans. Elle reçoit les honneurs militaires et, après des funérailles catholiques le 15 avril 1975 à l'église de la Madeleine, à Paris, elle est enterrée au cimetière de Monaco.

Bien qu'initialement Joséphine Baker ait été perçue comme un phénomène exotique avec un déhanchement incroyable, elle a su se forger une solide réputation dans les hautes sphères de la société parisienne. Elle a su intelligemment se façonner son personnage public synonyme d'émancipation, symbolisant toute forme de liberté jusqu'aux droits civiques en passant par la lutte contre le fascisme.