CVN46:- 11/12/12 12:05 Page 1 CVN46:- 11/12/12 12:05 Page 2 SommaireSommaire

La Vie de la Fondation Le mot du président 1 Les archives de la Libre 1 Cérémonies du 9 novembre à Paris 2

Histoire Le débarquement en Afrique du Nord et de Gaulle 3 De Tananarive à Diego-Suarez 4 Précision sur Madagascar et la France Libre 5

Revue d’information Le ralliement de la Côte française des Somalis à la France Combattante 6 trimestrielle de la Extraits des souvenirs de guerre de Jean Candelot (1re partie) 8 Fondation de la France Libre Ralliement de l’île de La Réunion aux Forces françaises libres 12 Parution : Décembre 2012 Numéro 46 Histoire de la famille Mademba-Sy 13 Résister dans les camps nazis 17

Livres 19 In memoriam 22 Carnet 23 Dans les délégations 24 Chez nos amis 27 La vie au club 28

© « BULLETIN DE LA FONDATION DE LA FRANCE LIBRE ÉDITÉ PAR Il est interdit de reproduire intégralement ou partiellement la présente publica- LA FONDATION DE LA FRANCE LIBRE » tion - loi du 11 mars 1957 - sans autorisation de l’éditeur. L’image en couverture N° commission paritaire : 0212 A 056 24 est le détail d’une photo prise lors du discours du général de Gaulle à l’Albert Hall N° ISSN : 1630-5078 de Londres le 18 juin 1942 (© Fondation Charles de Gaulle). Reconnue d’utilité publique (Décret du 16 juin 1994) MISE EN PAGE, IMPRESSION, ROUTAGE : RÉDACTION, ADMINISTRATION, PUBLICITÉ : Imprimerie MONTLIGEON - 02 33 85 80 00 59, rue Vergniaud - 75013 Paris Dépôt légal 4e trimestre 2012 Tél. : 01 53 62 81 82 - Fax : 01 53 62 81 80 E-mail : [email protected] DIRECTEUR DE LA PUBLICATION : Général Robert BRESSE VERSEMENTS : CCP Fondation de la France Libre RÉDACTEUR EN CHEF : Sylvain CORNIL-FRERROT Paris CCP La Source 42495 11 Z CONCEPTION GRAPHIQUE : Bruno RICCI Prix au N° : 5 Euros Abonnement annuel : 15 Euros 01-02_Vie de la Fondation:- 27/11/12 14:28 Page 1

LA VIE DE LA FONDATION

Le mot du président

a page 2012 se tourne. Elle fut pour notre Fondation une année de fort engagement tant humain que financier pour accompagner les L pouvoirs publics dans l’éclat donné à la célébration du 70e anniversaire de la bataille de Bir Hakeim. Le succès de cette commémoration est dû d’abord à l’aide déterminante de la DMPA et de l’ONAC. Il est à partager avec l’Amicale de la 1re DFL, le Souvenir Français et aussi tous ceux qui, à la mesure de leurs moyens, ont soutenu notre action. Il faut souligner que les contributions et participations dédiées à Bir Hakeim ont contribué pour plus d’un tiers au financement de l’opération. Que tous en soient remerciés. 2013 se situe 70 ans après l’année charnière que fut 1943. Le ralliement de l’Afrique du Nord, l’installation du gouvernement d’Alger,l’unification de la Résistance par Jean Moulin, mandataire du général de Gaulle, aboutissent au concept de « la France au combat » remplaçant sans les effacer la France Libre et la France Combattante, qui avaient jusque-là porté les trois couleurs. Notre Fondation sera naturellement présente aux côtés de tous ceux qui entendent conserver cette mémoire. Si un pèlerinage en Tunisie semble à ce jour bien plus aléatoire que le voyage à Tobrouk et Bir Hakeim, des solutions alternatives existent et nous les étudions. Qu’au-delà du rappel de ces événements, cette année 2013 soit aussi bénéfique à tous, à notre pays et à ses citoyens, à notre Fondation et à ceux qui l’accompagnent, et surtout à nos vétérans, que nous souhaitons encore conserver longtemps à nos côtés. Général Robert Bresse

Les archives de la France Libre

La mémoire de la France Libre passe par la conservation et la mise en valeur de ses archives. Or, pour une grande part, celles-ci demeurent méconnues et inexploitées, isolées dans des collections privées, sans classement.

Afin de soutenir le recueil des archives de la France Libre, la Fondation de la France Libre se dote d’un centre de documentation et de recherches, destiné à les accueillir, les trier, les inventorier et les mettre à disposition des chercheurs.

À terme, ces archives feront l’objet d’un dépôt au Service historique de la Défense.

Les anciens Français Libres et leurs familles qui s’interrogent sur le devenir de leurs archives et souhaitent assurer leur préservation peuvent prendre contact avec la Fondation :

à l’adresse électronique suivante : [email protected]

par courrier postal à : Fondation de la France Libre 59 rue Vergniaud 75013 Paris

Décembre 2012 • N° 46 l 1 01-02_Vie de la Fondation:- 27/11/12 14:28 Page 2

LA VIE DE LA FONDATION

Le 9 novembre à Paris

e vendredi 9 novembre dernier, la Fondation de la France Libre a orga- nisé à Paris, avec l’Amicale de la Lre 1 DFL, les traditionnelles cérémonies d’hommage en mémoire du général de

Gaulle, du général Brosset et de l’ensemble Crédit photo : Yves Ropars des morts de la France Libre.

La journée a commencé au monument du général Diego Brosset et de la 1re DFL, à 10 heures, où le général Robert Bresse, président de la Fondation de la France Libre, et Thierry Terrier, le secrétaire géné- ral, ont rappelé le sens de cette commémo- ration, avant le dépôt des gerbes, en pré- sence d’une nombreuse assistance parmi laquelle on reconnaissait de nombreux anciens de la France Libre, notamment Henri Beaugé, compagnon de la Libération, et Bernard de Gaulle, neveu du Général, ainsi que des représentants de la Fondation et de l’Amicale de la 1re DFL. Monsieur Jean- Manuel Hue, maire adjoint chargé de la Thierry Terrier mémoire, du monde combattant de la prononce une citoyenneté, de l’intégration et des allocution au monument du grandes causes nationales, représentait général Diego Brosset Monsieur Philippe Goujon, maire du et de la 1re DFL. quinzième arrondissement. À 11 heures, au rond-point des Champs- Élysées, le général Robert Bresse a déposé au pied de la statue du général de Gaulle une gerbe tricolore en forme de croix de Lorraine, avec le général Hervé Charpentier, gouverneur militaire de Paris. Un déjeuner a ensuite réuni les participants au Club de la France Libre. Cette journée de mémoire et d’hommage s’est conclue à 16 heures par une messe en Le général Robert la chapelle de l’École militaire. Bresse et le général Hervé Charpentier, après le dépôt de la

Crédit photo : Yves Ropars gerbe de la Fondation. Crédit photo : Yves Ropars Crédit photo : Yves Ropars

De gauche à droite : Jean-Manuel Hue, Patrice Armspach et le général Robert Messe à la mémoire du général de Gaulle, du général Brosset et de tous les morts de la Bresse, accompagnés de deux descendants d’anciens, après le dépôt de la gerbe de France Libre, en la chapelle Saint-Louis de l’École militaire. la Fondation.

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HISTOIRE

Le débarquement en Afrique du Nord et de Gaulle

e débarquement des forces anglaises division de Casablanca, et quelques Clark signe avec Darlan la convention et américaines au Maroc et en Algérie contrôleurs civils. L’autre branche est née d’occupation qui doit ramener l’armée Lle 8 novembre 1942 est la première de la volonté de José Aboulker et de sa d’Afrique dans les rangs alliés, créant un opération d’envergure montée par les famille, juif, antifasciste, gaulliste, réunis- imbroglio politique qui révulse de Gaulle, deux alliés occidentaux. Elle répond pour sant près de 400 jeunes (dont de nom- les chefs des mouvements de résistance en partie à la demande pressante de Staline breux juifs) et quelques gaullistes, tous France et les opinions publiques alliées. de desserrer l’étau de la Wehrmacht en unis par la volonté d’aider les Alliés. Ces Roosevelt doit qualifier cet accord URSS par la création d’un second front. patriotes fournissent aux Américains d’« expédient temporaire ». Jamais la des renseignements sur l’état d’esprit des menace d’une scission entre une Afrique L’annonce du message sur les postes radio représentants de Vichy, sur l’activité du Nord vichyste et les territoires français d’Amérique et d’Angleterre « Robert arrive ! » des commissions allemandes et italiennes libres n’a été aussi forte. Lors de la réunion le 7 novembre – Robert pour Murphy le d’armistice, sur la fourniture d’armes, de des Français de Grande-Bretagne à l’Albert conseiller de Roosevelt en Afrique depuis véhicules, de ravitaillement pour les forces Hall le 11 novembre, de Gaulle rappelle fin 1940 – est bien interprétée par le géné- de l’Axe en Libye. que les bases de l’unité ne peuvent se faire ral de Gaulle comme l’imminence d’un « qu’autour de la France qui se bat » puis, débarquement en Afrique du Nord, même Les modalités de leur intervention ont été fixées le 23 octobre 1942 à Cherchell lors s’adressant au Département d’État le len- si elle le prend tout de même de court. demain, exclut tout « arrangement avec le Le 8, Churchill convoque de Gaulle, gêné d’une réunion à laquelle le généralissime Eisenhower a envoyé depuis son PC à haut-commissaire ». La Résistance inté- de lui avouer que les Américains ont exclu rieure exige que « les destins de l’Afrique les Français Libres de l’opération, allé- Gibraltar, son adjoint, le général Clark. Pour Alger, Jousse détourne au profit des du Nord française libérée soient, au plus guant leurs craintes d’un combat fratri- tôt, remis entre les mains du général de cide. Passée la première colère, de Gaulle résistants munis d’un brassard de volon- taires de places, le plan de maintien de Gaulle ». Mais la censure américaine se ressaisit et réagit avec grandeur sur les sévissant, seuls Radio-Brazzaville et les ondes de la BBC en invitant les chefs, les l’ordre qui aurait dû être mis en œuvre par les membres du service d’ordre légion- postes de Douala et Beyrouth diffusent ce soldats, les fonctionnaires, les colons fran- message. çais d’Afrique du Nord à aider « nos alliés ! naire en cas d’agression extérieure. Le Joignez-vous à eux sans réserves ! Ne vous groupe gaulliste « Combat » de René Cet événement accélère la légitimation de souciez pas des noms, ni des formules ! [..] Capitant, prévenu le 6 novembre, apporte la Résistance intérieure sous les ordres de Français d’Afrique du Nord, que par vous son aide dans la nuit du 8 au groupe de de Gaulle, grâce à la création par Jean nous rentrions en ligne d’un bout à l’autre José Aboulker qui fait prisonniers Juin, Moulin du Conseil de la Résistance inté- de la Méditerranée, et voilà la guerre Darlan, la plus haute autorité présente for- grant mouvements, partis et syndicats. gagnée grâce à la France ! » tuitement, permettant aux Américains de Ce défi politique pour la France Libre a pénétrer dans Alger de signer un armistice paradoxalement ouvert, en Afrique du Pour cette opération risquée dont ils pour la seule ville. Le général Giraud qui a Nord, un réservoir dont les FFL ont large- estiment à 50 % les chances de réussite, les fait un détour par Gibraltar au PC ment profité dans le bras de fer avec les Américains misent sur la Résistance pour d’Eisenhower pour négocier la direction giraudistes lors de la campagne de Tunisie. neutraliser les réactions des autorités de des opérations ne peut jouer le rôle À l’approche du premier anniversaire du Vichy. Ces résistants très minoritaires attendu à Alger où Juin, lui signifie : « Vous débarquement en Afrique du Nord, le rassemblent des civils et des militaires de n’êtes rien ». À Oran et au Maroc, le colonel général de Gaulle, fait le 31 octobre 1943, toutes convictions, gaullistes, partisans de Tostain et le général Béthouart ont compagnons de la Libération pour leur la Révolution nationale, monarchistes. Il escompté négocier avec les proconsuls aide aux Alliés, les résistants José est né de l’unification de plusieurs noyaux. mais ont échoué. Trois jours de combat Aboulker, Henri d’Astier de la Vigerie, Le « groupe des Cinq », désigné ainsi en font 1 827 morts et 2 717 blessés. Des Germain Jousse, Louis Dreyfus, tué lors de 1945, est constitué d’une composante avions de la Luftwaffe atterrissent dès le l’opération, et, en mars 1944, Alfred d’extrême droite dirigée par Lemaigre- 9 novembre en Tunisie qui devient le trem- Pillafort, autre victime, puis Roger Dubreuil, patron des huileries Lesieur, plin des forces de l’Axe pour la reconquête Carcassonne en novembre 1945. Ces six Jean Rigault, Tarbé de Saint-Hardouin, de l’Afrique du Nord. croix de la Libération constituent un geste Jean Van Hecke, chef des chantiers de jeu- Les troupes allemandes envahissent la fort de la reconnaissance exceptionnelle nesse, le monarchiste Henri d’Astier de la zone sud le 11 novembre et le général que le chef de la France Libre témoigne à Vigerie. S’y sont agrégés des officiers, le Bridoux, ministre de la guerre, donne ces résistants. Il entend souligner l’impor- colonel Jousse, commandant la place l’ordre de démobilisation à l’armée tance de cette Résistance et veut sceller d’Alger en contact avec les Américains d’armistice, entraînant l’entrée en l’union avec la résistance métropolitaine. depuis 1941, rejoint par le général Mast, clandestinité de nombreux officiers. De commandant la division d’Alger représen- l’affaire de Dakar, en septembre 1940, au tant le général Giraud choisi par les 8 novembre 1942, le gouvernement de Christine Levisse-Touzé Américains pour être le chef militaire à Vichy montre son vrai visage en recourant l’issue du débarquement ; le général de Directrice du Musée du Général Leclerc aux armes contre les Alliés et les FFL et, Monsabert, commandant la brigade de et de la Libération de Paris sur le plan intérieur, par les rafles de Blida, le colonel Baril commandant le et du Musée Jean Moulin Juifs, achevant de faire basculer l’opinion de la Ville de Paris 29e régiment de tirailleurs algériens, le publique française. colonel Tostain de l’état-major à Oran, Directeur de recherche à Paris 4 puis le général Béthouart, commandant la Tout à sa logique de guerre, le général BIBLIOGRAPHIE José ABOULKER La Victoire du 8 novembre 1942. La Résistance et le débarquement des Alliés à Alger, préface de Jean-Louis Crémieux-Brilhac, collection Résistance, liberté Mémoire, éditions du Félin, Paris, 2012. Christine LEVISSE-TOUZÉ, L’Afrique du Nord dans la guerre 1939-1945, Albin Michel, 1998. Christine LEVISSE-TOUZÉ, L'Algérie sous le régime de Vichy, Paris, Odile Jacob, 2002. Jean-Louis CRÉMIEUX-BRILHAC, La France Libre, de l’appel du 18 juin à la Libération, Gallimard, 1996. Décembre 2012 • N° 46 l 3 04-18_Histoire:- 4/12/12 9:42 Page 4

HISTOIRE

De Tananarive à Diego-Suarez 35 jours de marche, pour s’engager dans les Forces françaises libres

Ce récit est paru dans le Bulletin du Comité Kenya, Uganda, Tanganyika du 15 septembre 1942, puis repris dans le numéro 30 des Documents, paru à Londres le 15 novembre 1942, c’est-à-dire avant la signature de l’accord de Gaulle-Eden du 14 décembre 1942, plaçant Madagascar sous l’autorité de la France Combattante. Les événements décrits se déroulent entre le déclenchement de l’opération Ironclad à Diego-Suarez, le 5 mai, et la capitulation des autorités vichystes de l’île, le 8 novembre.

ans les derniers jours du mois der- nier (août 1942), nous étions avi- Dsés par les forces britanniques de Diego-Suarez de l’arrivée, en cette place, d’un jeune homme de 19 ans, venu à pied de Tananarive pour s’engager dans les Forces françaises libres. Nous l’avons fait venir ici et il nous a fait le récit suivant : « Dans la matinée du 5 mai dernier, une nouvelle sensationnelle, bien qu’attendue depuis bien longtemps, se répand comme un coup de foudre sur Tananarive. « Les Anglais ont débarqué à Diego ». La radio malgache clame : « Nous devons nous battre jusqu’au dernier pour l’hon- neur de la France ». Ainsi donc, messieurs nos dirigeants, en prenant leur petit déjeuner, ont décidé une lutte sans espoir et ont décidé la mort de jeunes Français. Vue aérienne de l’avenue Maréchal Pétain, avec la gare au premier plan, à Tananarive, capitale de Madagascar en Dans la population, deux sentiments se janvier 1943. Photographie du ministère de la guerre britannique (Fondation de la France Libre). font jour : la joie de penser que la déli- vrance est proche et une grande fureur certaines que nous rencontrerions, hésitent marchai vers l’est pendant deux jours et contre les chefs stupides et inhumains. encore. En outre, impossible de quitter j’atteignis la grande forêt de l’est, très belle, Tananarive sans autorisation. Des autori- mais très difficilement pénétrable, car la Durant la bataille, une émotion a saisi la sations, valables cinq jours seulement, pluie y tombe jour et nuit. Le sol est extrê- population, la jeunesse surtout est très agi- étaient accordées pour les environs de la mement boueux et glissant, les sangsues tée : les lycées sont fermés, des groupes, des capitale. abondent, les fleuves sont de dangereux conciliabules partout. rapides et les villages sont très éloignés les La bataille de Diégo est terminée et l’on Je perdis contact avec mes camarades, et, le uns des autres. Aucun Européen dans ces attend impatiemment la suite. Le temps 11 juillet, je partis pour la grande aven- parages. passe. Les Anglais ne bougent pas. Mais ture, ayant obtenu de ces messieurs de la que font les Anglais ? « gestapo » l’autorisation d’aller passer C’est principalement cette dernière cir- cinq jours de vacances à Moramanga, constance qui m’avait fait choisir comme L’inquiétude, stimulée par la propagande petite ville située à cent kilomètres environ itinéraire la forêt de l’est, car j’étais presque vichyste, grandit. Certains se laissent de Tananarive, sur la voie ferrée allant à sûr de ne pas être inquiété par messieurs même aller au découragement. Tamatave. les vichystes. La réaction des jeunes ne tarda pas à se De Moramanga, le 12 juillet, à 3 heures du Les premiers jours en forêt furent vraiment produire. « Il faut partir. » matin, je partais à pied portant un léger pénibles. J’étais très fatigué, mais il fallait Pour ma part, je me dis : « Puisque les bagage. à tout prix continuer, car, le délai de Anglais ne viennent pas, j’irai vers eux ». cinq jours étant passé, les autorités de Les jours qui suivirent furent assez mono- Il ne restait plus qu’à préparer l’itinéraire Tananarive avaient certainement donné tones. J’évitai avec soin les agglomérations l’ordre de me rechercher. et à partir. de quelque importance, marchant de Mais l’affaire se révélait difficile. Certains 3 heures du matin à 7 heures du soir. Je Au bout de cinq jours de marche, j’arrivai camarades, un peu effrayés des difficultés passai sur la rive gauche du lac Alaotra, je dans une région très montagneuse et beau-

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HISTOIRE

coup moins boisée : le massif de l’Ankesina. gué et qu’il fallait m’envoyer une filan- plus bon du tout. Le second jour je me suis Au nord de ce massif se dresse une zane 1. Les miliciens, bornés et confiants, vu pleurer comme un gosse (ce qui me fait chaîne de montagnes dominée par le me crurent sur parole et s’en retournèrent sourire aujourd'hui). Tsaratanana, le plus haut sommet de aussitôt. Je pris rapidement un léger repas Enfin je parvins au pied de la chaîne de Madagascar, près de 3 000 mètres. Pour et, à 18 heures 30, je levai le camp, malgré l’Antsihabé. Je la franchis en une journée de pouvoir franchir cette chaîne de mon- la nuit qui tombait, me servant d’une marche, et j’arrivai enfin dans la vallée de la tagnes, je fus obligé de passer par un vil- lampe tempête pour éclairer un peu le che- Mahavavy qu’il me suffisait de descendre lage, Mangindrano, où se trouve un chef de min, brûlant du pétrole acheté au marché pendant 100 kilomètres pour atteindre canton, mais je n’y ai pas perdu de temps. noir, à Tananarive. Ambilobé,premier poste britannique.J’y par- Arrivé à huit heures du soir; j’en suis Je marchai toute la nuit, ne m’accordant vins le 16 août, et, après une courte visite aux reparti avec deux indigènes le lendemain, une heure de repos que le matin. Puis, officiers anglais, je gagnai une chambre à à deux heures du matin, afin de franchir la toute la journée suivante, je marchai l’hôtel et je me couchai. double chaîne en l’attaquant dans la direc- encore. Un petit repos à la tombée de la tion de l’est. J’ai dormi deux jours entiers.Enfin le 19 août, nuit, et je me remis en marche. dans la matinée, un capitaine anglais me Pendant quatre jours nous n’avons rencon- conduisit en voiture à Diégo. J’y fus très bien tré aucun village. Enfin, dans l’après-midi Au matin, je tombais de fatigue, mais je ne reçu, hospitalisé aussitôt à l’hôpital pour du quatrième jour, vers trois heures, pouvais m’empêcher de songer aux mili- nous arrivâmes à un village nommé ciens. Aussi je décidai de marcher coûte deux insignifiants abcès aux pieds. J’y fus Andranomolola dont je me souviendrai que coûte pendant une journée encore. Ce retenu cinq jours au lit.J’ai ensuite passé deux longtemps, car c’est à 16 heures le même soir-là, il m’aurait été impossible de conti- jours dans la ville. Pendant ce temps, le jour que j’y reçus la visite de quatre mili- nuer. Aussi, pensant que j’avais certaine- Comité de Gaulle de Nairobi, averti de mon ciens indigènes qui me remirent un pli du ment distancé des poursuivants possibles, arrivée, me faisait réclamer,et, par le premier chef de district de Bealanana m’invitant… comme le besoin de dormir me terrassait, bateau en partance pour le Kenya, j’ai quitté gentiment, selon la manière chère à ces je me suis arrêté et j’ai dormi. Ce fut heu- la Grande Île,« L’Île Heureuse », comme disait 2 messieurs, « à me présenter aux bureaux reux, car les deux journées qui suivirent M. le gouverneur-général Léon Cayla . du district pour affaire concernant ma furent de beaucoup les plus pénibles. Et maintenant je suis incorporé dans les famille ». Je dus avancer dans la boue jusqu’aux forces de la France Combattante. » Je répondis aussitôt, aussi gracieusement, genoux, littéralement dévoré par les sang- Ce jeune homme a donc marché pendant que je me ferais un plaisir de me rendre à sues, tombant vingt-cinq ou trente fois par 35 jours pour s’engager dans les Forces cette convocation, mais que j’étais très fati- heure. À bien des moments, le moral n’était françaises libres.

1 La filanzane est une chaise à quatre porteurs employée pour le transport des voyageurs à Madagascar (NDLR). 2 Léon Cayla (1881-1965), gouverneur-général de Madagascar de 1930 à 1939 puis de l’Afrique occidentale française de 1939 à 1940 et de nouveau de Madagascar en juillet-décembre 1940, avant d’être remplacé par Armand Annet (1888-1973), qui dirige l’île jusqu’en 1942 (NDLR).

Précision sur Madagascar et la France Libre

Suite à la parution, dans le précédent numéro de notre revue, de l’article de M. Jean Giraud-Vinet, intitulé : « Madagascar et la France Libre », M. Roger Arnault nous a adressé cette précision. Nous pensons qu’elle intéressera un certain nombre de nos lecteurs.

n ce qui concerne les engagements pour un stage de six mois, nous étions une premiers du stage, son remplacement m’a dans la marine, en dehors de la base dizaine d’apprentis « timonier ». été proposé. Breveté provisoire, j'ai accepté, de Diégo-Suarez, déjà structurée, les ce qui m’a conduit par la suite jusqu’à E À la suite de ces formations, il n’y a jamais eu Guadalcanal, via l’Australie et la Nouvelle- FNFL avaient mis sur pied un centre apte à d’embarquement massif, mais elles permet- Calédonie. Puis retour en métropole. J’ai former des « matelots brevetés » dans diffé- taient de pallier à des manques dans les terminé la guerre sur le Triomphant, ayant rentes spécialités : entre-autres, des timo- équipages des bâtiments croisant dans servi sous les ordres du commandant niers et des radios. C’est à Tamatave, dans l’océan Indien et le canal du Mozambique, Jubelin sur les deux bâtiments. des bâtiments désaffectés que cette école les premières unités à en bénéficier furent le a été installée, elle était commandée par le Commandant Duboc et le Savorgnan de Je tenais à compléter le récit de Jean commandant Pierre Rathouis, capitaine Brazza. En juillet 1943, j’étais dans mon Giraud-Vinet en rappelant l’existence de de corvette de réserve. L’instructeur pour quatrième mois d’apprentissage, le « l’unité marine de Tamatave » qui a fourni les timoniers était le quartier-maître chef Savorgnan de Brazza a fait escale à bon nombre de marins spécialisés à la Pierre Kerloch. Après mon engagement à Tamatave ; un timonier avait été débarqué à France Libre. Tananarive, j’ai donc rejoint Tamatave Durban pour raison sanitaire. Étant dans les Roger Arnault

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HISTOIRE

Le ralliement de la Côte française des Somalis à la France Combattante

l’été 1940, le général ment précaire d’Afrique orientale ita- de J. R. Montcalm, ancien directeur de la Legentilhomme, commandant lienne, complété par des transports mari- Banque de l’Indochine à Addis-Abeba, de À supérieur des troupes de la Côte times en provenance du Yémen. Enfin des française des Somalis (CFS) depuis janvier hydravions à long rayon d’action, trans- 1939, refuse l’armistice franco-allemand portant le courrier et des denrées de pre- du 22 juin. Mais il doit faire face à l’hosti- mière nécessité, effectuaient des liaisons lité de la marine, sous les ordres du capi- avec la France via Beyrouth. taine de corvette Monnot, ainsi que de la Devant le refus des autorités de rallier la plupart des pouvoirs administratifs et des France Libre, plusieurs préfèrent tenter milieux d’affaires de la ville, que ne peut l’aventure d’une évasion. Le 4 septembre, suppléer l’intervention, à partir du 14 juil- onze hommes sont arrêtés au large de let, du colonel de Larminat. Le 21 juillet, le Djibouti par une vedette de la marine. gouvernement du maréchal Pétain inves- Parmi eux figurent Karl Kalbfleisch et Jean tit le général Germain1 de l’ensemble Laloe. Ils sont mis aux arrêts de rigueur. Pierre de Maismont (à gauche), ici en Angleterre des pouvoirs civils et militaires, qu’il avec Henri de Rancourt de Mimerand, transmet le 1er août au général Aymé2, Le 6 septembre, à six heures du matin, un Édouard Corniglion-Molinier, le général Martial Valin et Jean-Louis Garot (coll. de l’Amicale des FAFL). nommé commandant supérieur des groupe d’aviateurs s’évade de Djibouti. troupes du territoire. Legentilhomme Après s’être glissés dans un hangar la rédiger Djibouti libre, un journal qui passe au Somaliland britannique en veille au soir et fait en sorte que les Potez 63 paraît à partir de mai. camionnette dans la nuit du 1er au 2 août de chasse ne puissent les poursuivre, l’ad- avec seulement deux officiers de son état- judant François Giocanti prend les com- Le 27 avril, une mission militaire compre- major, les capitaines Robert des Essars et mandes du Potez 29 n° 106, avec à son nant le lieutenant-colonel Brosset, le Raymond Appert. bord le lieutenant Edmond Magendie, commandant Appert et le capitaine major de garnison, l’adjudant Louis Magendie, est envoyée au Somaliland Pierre Nouailhetas3, ancien officier de Duprat, chef mécanicien A/C, le sergent pour prendre des contacts avec le terri- marine et administrateur en Indochine, Marius Guyot, le sergent Roger Mery et le toire et rassembler des renseignements, proche de Darlan, succède, le 7 août, au sergent-chef Yves Michel, radio. Le ser- en vue d’un ralliement pacifique, mais le gouverneur Deschamps4, révoqué le 3 car gent Gataud pilote un second Potez 29, gouverneur vichyste réagit à la menace en jugé trop tiède, tandis que le général mais l’appareil ne peut décoller, et les Germain prend le commandement des faisant arrêter les personnes suspectes de hommes rejoignent discrètement leur troupes. sympathie gaulliste. Le 7 mai, les mesures cantonnement. Filant en rase-mottes sur de sécurité sont renforcées, et le gouver- Les combats entre les forces françaises et Obock (sur la côte septentrionale du terri- nement annonce que les personnes sus- italiennes se seront limitées, du 18 au 24 juin, toire), Giocanti et ses cinq compagnons pectées d’entretenir des rapports avec les à des accrochages d’avant-postes dans la rejoignent le Yémen, où ils s’engagent gaullistes seront fusillées. Deux femmes région d’Ali Sabieh, tous favorables aux dans les Forces françaises libres5. sont ainsi exécutées au col d’Ambato le Français. Tout au plus, l’aviation italienne En avril 1941, dans le contexte de la 10 mai, un homme à Ali Sabieh le 12. a bombardé Djibouti le 21 juin. En conquête des possessions italiennes revanche, le retrait des 8 000 hommes du Peu désireux d’engager un combat fratri- d’Afrique orientale, la France Libre lance territoire du dispositif allié déstabilise la cide, le général Legentilhomme fait sus- l’opération « Marie ». Ainsi, au poste fron- défense du Somaliland, que les Italiens pendre l’opération « Marie » le 12 mai et tière d’Ali Sabieh, on assiste à des scènes conquièrent en quinze jours, entre le 4 et quitte Aden pour la Palestine le 28. de fraternisation entre les Forces fran- le 19 août. çaises libres qui viennent de participer à Le général Catroux crée le 26 juin suivant un À partir de septembre 1940, les la libération de l’Éthiopie et les militaires détachement somali des FFL dont le com- Britanniques et les Français Libres ins- vichystes. Gaston Palewski, qui a été mandement est confié au chef de bataillon taurent un blocus maritime, qui ne nommé en mars délégué politique et mili- Appert. Composé à l’origine de trois pelo- devient réellement rigoureux qu’à partir taire de la France Libre dans l’Est africain, tons méharistes et de quelques détache- de la fin mars 1941. Avant la reprise du charge le lieutenant Pierre de Maismont, ments d’infanterie, il est renforcé en janvier Somaliland et la libération de l’Éthiopie, libéré des geôles italiennes le 24 avril, et le 1942 par l’arrivée de cadres venus de Syrie et la voie ferrée entre Addis-Abeba et lieutenant René Loiseau, servant au squa- d’Afrique équatoriale française, ainsi que de Djibouti permettait l’envoi d’un ravitaille- dron n° 8 de la Royal Air Force sous le nom volontaires évadés de CFS.

1 Le général de division Maxime Germain, selon Henry de Monfreid dans le Radeau de la méduse. 2 Georges Aymé (1889-1950), frère de l’écrivain Marcel Aymé (1902-1967), commande la 3e division d’infanterie coloniale, la 10e division d’infanterie (1er juin 1940) puis le camp de Rivesaltes (28 juin suivant), avant de prendre le commandement des troupes de la Côte française des Somalis. La même année, il passe en Indochine. Il est capturé par les Japonais le 9 mars 1945. 3 Pierre Marie Élie Louis Nouailhetas (1894-1985). 4 Hubert Jules Deschamps (1900-1979). 5 « Les anciens du Bretagne », « La mort de François Giocanti : “Le soldat qui ne s’avoue pas vaincu a toujours raison” », Revue de la France Libre, n° 284, quatrième trimestre 1993, p. 15.

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HISTOIRE

Le 27 avril 1941, le sergent-chef mécani- Toutefois, le 22 décembre, un tract appe- cien René Gatissou, membre d’un réseau lant au ralliement, signé « Chancel », de renseignements et d’évasion, en liaison du nom du délégué de la France avec la Royal Air Force, menacé d’arresta- Combattante dans l’Est africain et l’Éthio- tion, s’empare de la vedette du gouver- pie, Ludovic Chancel, est lancé sur neur, avec le commandant du port de Djibouti, suivi le lendemain d’un tract Djibouti, André Griveau6, et rejoint Zeilah anonyme. Le 27, un troisième tract signé (Somaliland). Le 5 décembre 1942, au terrain d’aviation de Diré- « Raynal » est jeté sur la ville. Daoua (Éthiopie), l’avion Potez 25 TOE n° 1525 Le 17 août suivant, plusieurs hommes, de la base aérienne de Djibouti. À son bord, Igor Le 23 décembre au matin, deux compa- parmi lesquels Émile Cayre et Noël Eichenbaum (debout) (Coll. de l’Amicale des FAFL). gnies des Forces françaises libres, regrou- Lemarie, passent à la nage le poste fron- pées en avril à Urso (Éthiopie) puis trans- tière de Loyada et se rendent à Zeilah, où férées en juillet à Gigiga, sous le comman- ils sont pris en charge par le commandant dement des colonels Appert et Raynal, se Griveau. portent à Daouenle (un poste éthiopien près de la frontière avec la CFS) et Le 4 novembre 1942, après trois tenta- pénètrent le 26 en Somalie française par tives, Auguste L’Her s’évade de nuit à bord Ali Sabieh, dont la garnison refuse de tirer, d’un canot, au large de Loyada, avec s’emparent de la voie ferrée et avancent quelques camarades, dont le maréchal jusqu’aux abords de Djibouti. Deux jours des logis Jean Lewalter. plus tard, le général Dupont signe à Le débarquement anglo-américain en Chebele (une petite gare sur la ligne du Afrique du Nord, le 8 novembre 1942, chemin de fer franco-éthiopien, à une et l’installation de l’amiral Darlan Igor Eichenbaum et Pierre Labat, après leur évasion, quinzaine de kilomètres de Djibouti) un avec le colonel Raynal et le lieutenant Pascal Alfonsi, accord plaçant le territoire sous l’autorité comme haut-commissaire de la France devant l’avion Potez n° 1525, à Diré-Daoua en Afrique, suscite des remous dans le le 5 décembre 1942, vers 11 heures du matin de la France combattante. Ludovic territoire. Dès avant cette date, le (coll. de l’Amicale des FAFL). Chancel représente le général de Gaulle, 21 octobre, Vichy rappelle le gouverneur le général Fowkes les autorités britan- Nouhailhetas, que ses contacts avec les démission, celui-ci passe ses pouvoirs au niques. Le lendemain, les Forces fran- 8 Britanniques ont fini par rendre suspect. général Dupont , son adjoint, qui les çaises libres pénètrent dans Djibouti, et Son successeur, le général Truffert7, refuse abandonne lui-même au secrétaire géné- André Bayardelle, nommé gouverneur par de rallier la France Combattante comme ral du territoire, Pouvreau, partisan de la le général de Gaulle, prend ses fonctions. ligne jusqu’au-boutiste comme le général les autorités d’Afrique du Nord. Avec ses 300 officiers et ses 8 000 hommes, Truffert, et comme lui obligé de démis- la Côte française des Somalis apporte un Le soir du 27 novembre, trois compagnies sionner. du 1er bataillon de tirailleurs sénégalais renfort important à la France (1er BTS) du colonel Raynal quittent Le 4 décembre, à la suite d’une rumeur Combattante, dans un contexte difficile. Djibouti avec six batteries du groupe annonçant que des dispositions étaient Face aux anciens vichystes d’Alger, il d’artillerie coloniale du lieutenant- prises pour évacuer les derniers appareils marque la dynamique du rassemblement colonel Pierre Hanneton, un détachement de CFS avec l’Afrique occidentale fran- autour de la France Combattante, après la de transport, un peloton hors rang, un çaise, deux mécaniciens, le sergent Igor Réunion et Madagascar, avant la Guyane service de l’artillerie, deux détachements Eichenbaum9 et l’adjudant Pierre Labat et les Antilles. d’isolés d’autres corps, dont l’un est sous s’emparent du Potez 25 n° 1525, avec Sylvain Cornil-Frerrot les ordres du capitaine Armand Lanlo, lequel ils décollent de la base aérienne de enfin un détachement de DCA com- Djibouti, après avoir mis hors service le BIBLIOGRAPHIE mandé par le sergent-chef Roger Vauclair, Potez 63 encore en état de marche. Les SYLVAIN CORNIL-FRERROT, « Le bataillon de soit un total de 39 officiers, 252 sous- deux hommes se posent à Aïcha, puis à marche n° 21 », Fondation de la France Libre, n° 30, décembre 2008, p. 17-22. officiers, 270 hommes de troupe et Diré-Daoua, où ils sont accueillis par 868 tirailleurs africains. Faisant mouve- l’adjudant Pierre Leboucq. Eichenbaum VITAL FERRY, Croix de Lorraine et croix du sud ment vers le village de Loyada, où il passe rejoint le groupe de chasse Normandie- (1940-1942) : aviateurs belges et de la France Libre en Afrique, Éditions du Gerfaut, 2005. la frontière, il atteint Zeilah le lendemain. Niemen, où il sert jusqu’à la fin de la HENRI LABROUSSE, « Le blocus de Djibouti pen- guerre. Le capitaine Bernard Oursel, les lieute- dant la Seconde Guerre mondiale », dans nants Alfred Munch et Pierre Marnay et Récits de la mer Rouge et de l’océan Indien, Confirmé par Vichy dans ses fonctions de des sous-officiers les rejoignent bientôt, Paris, Economica, 1992. gouverneur le 18 décembre, le général après l’échec de leurs efforts pour rallier la ROGER LAMY, « Le bataillon de marche somali », 2e compagnie du 1er BTS. Avec le 4e BTS, ce Dupont tente de négocier avec le consul Revue de la France Libre, n° 47, avril 1952. sont 1 800 hommes qui rallient les Forces américain à Aden Clare H. Timberlake LOUIS-GILLES PAIRAULT, « Le verrou de la mer françaises libres. (6-8 décembre) puis le major-général bri- Rouge. L’armée et la Côte française des tannique Fowkes10 (15-18 décembre), le Somalis (1884-1977) », Revue internationale Parmi ceux qui restent, la grande majorité maintien du territoire sous l’autorité de d’histoire militaire, n° 82, 2002. des militaires comme des civils refuse Vichy et la neutralité de ce verrou de la VLADIMIR TROUPLIN, Dictionnaire des compa- d’obéir au général Truffert. Contraint à la mer Rouge. gnons de la Libération, Bordeaux, Elytis, 2010.

6 Engagé dans les Forces navales françaises libres, André Griveau sert au Levant puis au 1er RFM. 7 Le général de brigade Auguste Charles Jules Truffert (1886-1967). 8 Edmond Gustave Dupont (1888-1957). 9 En service à Madagascar, Igor Eichenbaum avait été muté à Djibouti pour « propos défaitistes » à la fin de 1941. 10 Le major général Charles Christopher Fowkes (1894-1966), commandant la 12th East African Division.

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Extraits des souvenirs de Jean Candelot (1re partie)

Ce document est extrait des souvenirs de guerre de Jean Candelot, quartier-maître fusilier au 1er régiment de fusiliers marins (1er RFM), édités en 2012 par les soins de son fils, Jean-Louis. Né le 11 mai 1912 à Viviers-au-Cours, dans les Ardennes, Jean Candelot s’engage en juillet 1939 dans la Marine nationale. Après un passage à bord du Condé, le navire-école des fusiliers marins, à Lorient, il sert comme matelot-fusilier mitrailleur contre-avion à bord du chasseur de sous- marins n° 9, basé à Dunkerque. Blessé lors du bombardement de son navire à Dunkerque, il est fait prisonnier dans la poche et part en captivité en Allemagne, où il est interné dix-huit mois au camp de Versen, le stalag VI B, hormis un séjour d’un mois au bataillon de discipline du camp de Fullen. Après Mers el-Kébir, il fait partie d’un groupe de marins rapatriés « sanitaires » en France par les Allemands.

ers le milieu de l’après-midi, nous direction Toulon, après avoir passé un an - Regarde… » partions à six accompagnés de et demi en captivité en Allemagne, de dix- Vdeux sentinelles, direction la gare huit ans à dix-neuf ans et demi. Il déboutonne sa veste et me fait voir sa de Versen. Le train, on [n’]y croyait pas et poitrine (blessures). Un mois après, je rejoins Toulon où, pas- puis, après plusieurs heures, ce fut sant devant l’officier-major celui-ci com- Didenhoffen (Thionville) ; alors on com- « J’étais sur l’Adroit. Dis donc petit, tu files mence par me dire : mença à y croire. Puis nous arrivâmes à la un mauvais coton. Je pars pour Dakar avec ligne de démarcation, nous descendîmes « Plutôt que de mal porter une décoration, un contingent, veux-tu que je te mette sur du train à Mâcon ; une rangée de soldats moi je n’en porte pas ! » la liste ? » français et de légionnaires de Pétain nous Je répondis affirmativement et, le lende- rendaient les honneurs, des infirmières (Ayant été décoré de la croix de guerre à main, je partais pour rejoindre le croiseur nous offraient café chaud et cigarettes etc. Dunkerque, je n’avais pu perforer la bar- Gloire4, sur lequel j’étais affecté. Au cours On se dirige vers la salle d’attente, un civil rette en métal pour y placer l’étoile de ma de mon embarquement, en quarante- français nous dit : citation). Je lui réponds : trois [1943], après la tentative de débar- « Comment pourriez-vous en porter quement des Français Libres, je participai « Les vrais sanitaires à droite, les faux à puisque vous n’avez pas fait la guerre ? gauche ! » à l’embarquement de l’or de la Banque de D’ailleurs, si elle vous intéresse (j’arrachai France. J’étais chargé de pointer les ma décoration et lui jetai sur le bureau), Je partis avec les vrais, deux camarades caisses de lingots ; nous avons emmené prenez-là, vous en aurez au moins une ! » partis à gauche furent obligés de remonter cet or à Casablanca. Ensuite, un jour, un dans le wagon et repartirent destination « Sortez ! » message de détresse touchant aussi bien Allemagne avec deux gardiens. J’avais les Anglais, les Américains que les déjà des doutes sur le maréchal, mais là Cet officier, comme beaucoup d’autres Français : il fallait rechercher les naufra- j’ai compris, et, de ce jour je devins un d’ailleurs, était totalement pétainiste. gés du Laconia5, un grand paquebot gaulliste convaincu. On nous dirigea Bref, je sortai du bureau avec un rapport anglais, la malle des Indes, avec deux ensuite sur Montluçon où l’on nous du conseil de discipline aux fesses. Dans mille personnes à bord, civils, militaires, donna cinq mille francs que nous dépen- l’après-midi de ce jour, un grand enseigne prisonniers italiens, qui avait été torpillé sâmes dans les bistrots et avec les filles de de vaisseau m’interpelle : par un sous-marin allemand. Il s’agissait de retrouver les survivants et de les sauver joie. Je revis ma mère ainsi que mon oncle « Tu n’étais pas à Dunkerque ?... Gaston1, son épouse la tante Suzanne et (notre combustible était extrait de l’huile leurs enfants2 à Sceau-les-Chartreux3 et - Oui ! d’arachides, au moment où j’écris ces

1 Boussard Gaston : oncle maternel de Jean Candelot, douanier qui sera par la suite affecté en famille à Tahiti (il y terminera sa carrière comme contrô- leur des douanes) et sera à l’origine du choix de l’affectation de l’auteur dans cette île après la guerre. 2 André, Bernard et Serge. 3 Lire Saulx-les-Chartreux (NDLR). 4 Le croiseur Gloire : croiseur lourd d’une série de 6. Entré en service en 1937, longueur : 179 m, largeur : 17,5 m, tirant d’eau : 6,5 m, tonnage : 10 850 tonnes, vitesse : 31 nœuds. 32 officiers, 732 officiers mariniers et quartiers-maîtres, matelots. Ceinture blindée de 114 mm, pont 63 mm. 3 tourelles triples de 155 mm, 4 tourelles doubles de 90 mm, 24 canons Bofors de 40 mm, 16 canons Oerlikons de 20 mm, 2 plateformes de tubes lance-torpilles. Modernisé aux USA en 1943, présent au débarquement de Provence en 1945, en Indochine de 1945 à 1954, réformé en 1958. 5 Laconia : paquebot de la Cunard Line lancé en 1921. Torpillé dans l’Atlantique par l’U-Boat 156 le 12 septembre 1942 à quelque distance de l’île Ascension ; sur un effectif d’environ 2 500 personnes, l’explosion seule de la torpille en tue 450, la plus grande partie étant des prisonniers de guerre ita- liens dans les cales. Trois sous-marins allemands, dont l’U-156, se porteront immédiatement au secours des victimes, ainsi que trois navires français basés à Dakar : le Dumont d’Urville, l’Annamite et le Gloire, qui embarqueront 960 rescapés.

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mémoires, nous sommes en pénurie de s’en rappellent plus ; c’est tout juste si rejoindre, dans quelques jours un camion pétrole et je repense à cela). même les collaborateurs n’étaient pas de fusiliers-marins qui devait repartir vers gaullistes). la Tripolitaine12. Retourné à bord, je ne me Après vingt jours de mer nous ramenions cachai pas ; j’ai même vendu mes effets de six cent rescapés parmi lesquels des Bref, je fis donc de la propagande pour la marine ; je savais que l’équipage ne me femmes et des enfants, des prisonniers France Libre et du renseignement béné- trahirait pas, mes matelots non plus. italiens, des militaires anglais. Au cours de vole, en premier avec un genre de bureau notre destination retour nous eûmes plu- qui fonctionnait à Casablanca7 sous une Au jour fixé, grâce à des vêtements civils sieurs morts, des naufragés décédés suite forme de consulat, je ne me souviens plus prêtés par un ami belge, Monsieur à leurs blessures et ce fut la première fois exactement. À une secrétaire, je donnais Harpman, habitant Casablanca, je me que j’assistai à une immersion en mer. les renseignements sur les troupes et les rendis au centre d’où, des pains plein les Une anecdote, au cours de cette mission marins en AOF8, leur mentalité, ainsi que bras, j’embarquai dans un camion anglais nous fûmes stoppés par un sous-marin le nombre de navires avec le pourcentage et, ô surprise, le chef de bord était un allemand. Grazziani, notre commandant, des équipages favorables aux FFL9. ancien fusilier-marin de mon stage sur le avait engagé des obus dans les pièces et Condé en 1939, Becq (il sera tué à Saigon nous étions prêts à faire feu, les Je me débrouillai à demander une autre lors de l’explosion de la poudrière). En Allemands aussi sans doute ; les deux affectation en me portant comme volon- cours de route, nous prîmes deux autres équipages se regardaient en chiens de taire pour l’armement des bâtiments de marins : Thomas Gaby (tué plus tard en faïence. Ce sous-marin nous remit trente commerce, car, à bord du Gloire, même Italie) et René Flandin, deux sous-mari- naufragés qu’il avait retrouvés. Nous mon capitaine fusilier Vivien m’avait niers, et nous arrivâmes après un voyage retrouvâmes les autres en plusieurs fois averti que je baissais, et que mes senti- de plusieurs jours à Zuara13, en et, au moment où les marins anglais ments… Je n’avais jamais caché que je ne Tripolitaine, où nous fûmes affectés, après embarquaient sur le croiseur, ils avaient pouvais sentir le Maréchal et que mes un passage devant Colmay pour interro- vu le pavillon français et croyaient que sentiments, en tant qu’ancien prisonnier gatoire, à la 1re section d’assaut du 1er régi- nous étions des Français Libres. Ils étaient de guerre, étaient gaullistes. Comme la ment de fusiliers-marins de la 1re division écœurés car ils furent gardés par des fac- situation était trouble, aucun officier ne tionnaires baïonnette au canon. Comme voulut prendre de décision à mon sujet, j’en étais responsable, j’avais la facilité les uns étant pour, les autres neutres, d’aller souvent parmi eux, j’étais sans question d’avancement, ou contre, sans armes et ne leur cachais pas mes senti- oser le montrer. ments gaullistes. J’ai pu recueillir auprès Quelque temps après je fus affecté à d’eux des renseignements sur la France l’armement du Médie II10, de la compagnie Libre qui n’ont fait que renforcer mon Paquet, qui faisait le trajet Casa-Dakar. intention de la rejoindre. Nous fîmes Nous étions six marins, moi comme quar- route vers Casablanca où, hélas, ces tier-maître et un second. Je ne cessais ma marins et soldats furent internés, les pri- propagande et, dans le milieu équipage, la sonniers italiens, eux, libérés. majorité des matelots était pour la France Libre, mais sans vouloir prendre de déci- sion. Je réussis à convaincre l’officier- En Afrique du Nord radio en second à déserter et l’emmenai moi-même à l’endroit où on devait le Voilà ce qui se passait en Afrique du Nord prendre en charge pour rejoindre la où il y avait peu de gens pour la France France Libre ; ceci ne s’est pas passé en Libre. Plus tard, il y en aura beaucoup… Il quelques jours, il m’a fallu du temps. Je faut quand même dire que quatre-vingt- voulais [la] rejoindre, mais au centre de dix pour cent des gens étaient pétainistes Casa[blanca] où j’avais des contacts avec (s’ils ne s’en souviennent plus mainte- un officier dont je n’ai jamais connu le 6 nant). Il y avait en AFN des commissions nom et qui se trouvait toujours en civil, ce, d’armistice dirigées par des Allemands, à travers une femme qui se disait l’épouse mais on ne voyait aucun uniforme chleuh du commandant Drogou11 et ne Photo de Jean Candelot envoyée à sa tante Lucienne Lardennet, à Reims. Elle est accompagnée de ce texte : (je tiens à mettre entre parenthèses ; aussi m’autorisait pas à [la] rejoindre. bien en France qu’en AFN, la majorité des « Casablanca, 11 mai 1942. Jour anniversaire de mes 20 ans. Lulu un peu de nouvelles. Baisers à tous et gens était encore pétainiste ; maintenant, Enfin, au cours d’un contact, l’on me dit remercier le copain qui vous apporte cette photo. » avec trente-sept ans derrière eux, ils ne qu’il y allait avoir fusion et que je pouvais (coll. particulière).

6 AFN : Afrique française du nord d’autrefois, comprenant essentiellement l’Algérie, qui était formée de trois départements (Oranie, Algérois, Constantinois), mais aussi à cette époque l’influence sur le Maroc et la Tunisie qui étaient des protectorats. 7 Casablanca : Plus grande ville du Maroc et port stratégique durant la Seconde Guerre mondiale ; le Maroc était un protectorat français depuis 1912 ; les Européens formaient à cette époque la majorité de la population de Casablanca. 8 AOF : Afrique occidentale française, qui regroupait dès 1895 les huit colonies françaises de l’Afrique de l’ouest, soit la Mauritanie, le Sénégal, le Soudan français, la Guinée, la Côte d’Ivoire, le Niger, la Haute-Volta et le Dahomey, soit près de 25 millions de personnes. L’appellation disparaîtra en 1958. 9 FFL : Forces françaises libres. 10 Le Médie II : ce paquebot français de la compagnie maritime Paquet faisait la ligne Marseille-Dakar avec escales à Tanger et Casablanca. 11 François Drogou : commandant du sous-marin Narval, avec lequel, le 25 juin 1940, il gagne Malte pour rejoindre le général de Gaulle. Disparaît avec son bâtiment, probablement victime d’une mine, le 15 décembre 1940. 12 Tripolitaine : une des divisions historiques de l’actuelle Libye, annexée par l’Italie en novembre 1911, suite à sa déclaration de guerre avec la Turquie. 13 Port de la Libye quasiment frontalier avec la Tunisie.

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française libre qui, encore à ce moment, nécessaire pour le poste. Je fis cette corvée ensuite chef de Jeep. Je me souviens d’une faisait partie de la huitième armée une fois ; c’était la nuit, nous étions deux, avance au cours de laquelle nous traver- anglaise. Ensuite, nous nous rendîmes en on partait de notre poste vers vingt-deux sâmes le Tibre avec six heures d’avance Tunisie, à Meltine14 pour [rejoindre] le heures trente et, silencieux, aux aguets, on sur les prévisions ; à 7 km de là, le général deuxième escadron qui était commandé se rendait au QG ; nous prenions le mulet Juin, croyant que c’était des Allemands, par Savary15, après à Bouficha16, où nous à qui on avait entouré les sabots de chif- ordonna un tir de barrage de 15524. Les avons touché du matériel et des habits fons et retour au poste, toujours aux obus pleuvaient à droite et à gauche, américains, pour cette fois être entière- aguets, l’angoisse dans la gorge de ren- devant, pendant notre traversée. Miracle, ment « armée française », en restant indé- contrer une patrouille chleuh. Quelques nous établissons cette tête de pont sans pendant. fusées éclairantes, quelques tirs d’armes avoir eu ni tués ni blessés, mais qu’est-ce automatiques et ouf ! On était de retour… que nous avons pu maudire les artilleurs Je ne me souviens plus très bien, trente- de Juin ! sept ans après, comment le mulet retour- La campagne d’Italie Un jour nous faisions une avance de nait ; je crois que nous le déchargions et soixante kilomètres, un autre les chars Ce fut entraînement sur entraînement, qu’il retournait seul ou se faisait prendre pour un jour embarquer à Bizerte17 et allemands contre-attaquaient… Colmay et abattre par les Allemands. 25 direction l’Italie, où nous débarquions à nous désigne à trois avec une musette Naples pour de suite être regroupés à Le dix mai, à onze heures du soir, on aurait de grenades et nous donne pour mission Albanovar18. Quatre jours plus tard nous pu lire le journal : toute notre artillerie, de nous établir en bordure d’un talus 22 montions relever les tabors19 sur les crêtes celle de Juin , celle des Anglais et des boisé et de balancer nos musettes de gre- bordant le Garigliano20. Américains tirait et ce fut l’attaque. Des nades sur les chars. Après un quart livres ont été écrits sur ce sujet dans lequel d’heure d’attente, le bruit des chenilles se Étant du 1er peloton du 2e escadron, notre on oubliait bien souvent les actions de fait entendre, le cœur monte dans la commandant était l’officier des équi- notre DFL. Je ne m’étendrai pas sur le gorge, il est difficile de déglutir : trois pages21 Colmay, un dur et un baroudeur, il sujet, ce fut dur, très dur, nous eûmes nos chars Tigre s’amènent et le premier s’ar- avait donc choisi le poste le plus dange- premiers blessés et tués. Ensuite, ce fut rête juste à notre hauteur. Le chef de char reux ; tandis que les autres pelotons se l’avance ; nous avions repris nos véhicules a le buste qui sort de la tourelle, il inspecte trouvaient installés dans des bâtiments, et notre travail était la reconnaissance. aux jumelles. Nous nous regardons : il y a nous, nous tenions un coin à plein décou- Mon chef de scout-car, Hafliquaire, fut environ dix mètres entre nous et le char, vert, avec des tranchées en cercles. tué ; Thomas, l’un des deux marins qui impossible de balancer nos musettes, Chaque poste était livré à lui-même avec avait rejoint avec moi, fut tué, ainsi que elles sont trop lourdes. On a l’impression des no man’s lands de plusieurs kilo- plusieurs camarades. Nous foncions, d’être repérés, le canon du char se tourne mètres. Nous dominions le Garigliano et, avancions jusqu’au moment où nous vers nous. La guerre, c’est bien, mais il ne en face, l’autre versant était truffé étions arrêtés par une grosse résistance, s’agit pas de se faire tuer pour rien… On d’Allemands, même dans un cimetière, où ou parfois encerclés, et l’infanterie venait recule un peu, nous trouvons une dénivel- ils s’étaient retranchés dans des caveaux. nous dégager et exploiter. Nous avions lation de terrain et, à toutes jambes, direc- Nous faisions des patrouilles de nuit entre gardé le casque anglais, souvenir du tion le peloton alors que le char tire où les postes et sur les bords du fleuve. Les passé, mais, pour nous, c’était un acces- nous étions auparavant. Allemands faisaient de même, mais nous soire souvenir de la huitième armée Il m’arrivera deux autres fois d’être face à ne nous rencontrâmes pas souvent, juste anglaise et, dans la plupart des combats, face avec un char Tigre. La première fois, le temps de faire quelques prisonniers on ne voyait que des têtes avec le béret et au cours d’une avance où j’étais en tête pour du renseignement. le pompon23, ou la casquette de nos officiers. des chefs des « suicidés » comme nous Pour nous ravitailler en vivres et en muni- Au cours de cette campagne, avec le nom- nous appelions [entre-nous]. J’arrivais à tions, il fallait se rendre au quartier géné- bre de blessés et de tués, nous permutions pieds dans un virage à la sortie duquel il y ral, distant d’environ cinq kilomètres, et [de poste] et, de canonnier sur scout-car, avait un pont détruit ; à plat ventre au là, nous prenions un mulet bâté avec le je me retrouvai mitrailleur sur Jeep, milieu de la chaussée, j’aperçois le char

14 Meltine : ville tunisienne en bord de mer, non loin de la base navale française de Bizerte. 15 Alain Savary : lieutenant de vaisseau en 1943, ancien représentant du général de Gaulle à Saint-Pierre et Miquelon, sera maire de Toulouse et ministre de l’enseignement sous la présidence de François Mitterrand. 16 Bouficha : Ville tunisienne à 60 km au sud de Tunis, grand camp militaire des Alliés en 1943. 17 Le 25 avril 1944 selon d’autres sources. 18 Lire Albanova, commune de la province de Naples (NDLR). 19 Tabor : troupes d’infanterie marocaines souvent équipées de mulets. 20 Garigliano : petit fleuve du centre de l’Italie, à environ 70 km au nord-ouest de Naples. Pendant la guerre, le Garigliano servit de point d’appui à la ligne Gustav, qui fut le théâtre de la bataille du monte Cassino en 1944. 21 Officier des équipages : officier de marine s’étant élevé par son mérite du rang des matelots et sous-officiers. 22 Le général Alphonse Juin, commandant du corps expéditionnaire français en Italie. 23 Je relate ici une anecdote dont m’avait fait part oralement mon père : marins français et anglais ne se côtoyaient pas facilement : il restait des relents de Trafalgar et de Mers el-Kébir. Lors de leur séjour forcé à Naples, leurs loisirs communs étaient les bars à filles. Dans l’un de ceux-ci, les marins français avaient devancé les Anglais et, lorsque ces derniers arrivèrent, toutes les filles étaient occupées à danser avec les matelots qui portaient leurs célèbres bérets à pompon rouge. Pour se moquer d’eux, des marins anglais posèrent une tomate sur leurs coiffes blanches pour aller inviter à leur tour des filles… Il s’ensuivit une bagarre générale où les Anglais furent rossés et, depuis lors, un certain respect envers les pompons rouges… 24 155 : Canons de gros calibre 155 mm. 25 Musette : petit sac en toile que l’on porte en bandoulière et qui sert de fourre-tout.

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milieu de la chaussée, j’aperçois le char Stupeur ! Dix-sept Allemands sortent des bruits de chars devant nous. Nous qui nous guettait de l’autre côté du pont… fourrés, les bras en l’air. sommes seuls et pas armés pour arrêter Je rejoignis ma Jeep pour transmettre à des chars surtout que notre obusier a été Une autre fois je remplis les fonctions de Colmay de m’envoyer les deux TD26 qui détaché, il n’est donc pas avec nous. Tout- chef de Jeep, c’est-à-dire que je fais de la étaient avec nous : me trouvant à une à-coup nous sommes allumés par une reconnaissance à pied cinquante mètres vingtaine de mètres du char ennemi, je ne mitrailleuse, le tir venant de la droite, heu- devant ma Jeep, couvert par mon mitrail- pouvais élever la voix et Colmay ne reusement trop haut. Nous nous replions leur. J’arrive dans un virage pas catho- m’entendait pas bien, il me faisait répéter. un peu, quelques minutes d’attente, les lique, la route est bordée de talus assez Enfin les deux TD arrivent et l’officier qui chars repartent et nous continuons notre hauts ; je commence à grimper sur la les commandait arrive auprès de moi. Je reconnaissance sans aucune résistance. gauche (je suis armé d’une mitraillette ita- lui explique la situation, on rampe tous les lienne, prise de guerre). Arrivé au sommet Une autre fois nous sommes en recon- deux au milieu de la chaussée et j’aperçois des fils sur deux rangs : bizarre ils bougent naissance sur Bolsena ; nous arrivons à nouveau le char ; cet officier, ne et il n’y a pas de vent. Je redouble de pré- dans un virage masqué, j’avance, toujours s’avançant pas assez, ne le voit pas ; il me cautions… J’aperçois une cabane, je à pied devant ma Jeep, couvert par mon faut le pousser un peu à la main et, tout-à- continue à avancer et je tombe sur une mitrailleur et, une trentaine de mètres en coup, il l’aperçoit. On revient en arrière et table sur laquelle il y a trois tasses de café ; arrière, par Tarius, Ranguet et Régereau il me dit : je les tâte : elles sont tièdes et, sur deux (ils seront plus tard tués tous les trois en « Comment faire ? Une seule solution : faire chaises, il y a des vestes allemandes. Je France à Dracy-Saint-Loup). Je redouble engager un obus dans le canon des deux de précautions, j’arrive vers la fin de la TD et en avant ! Du Tigre ou de nous, le courbe et j’aperçois à une cinquantaine premier qui tirera sera le bon »… de mètres, sur le côté, un [canon] anti- char. Je rends compte à Colmay en À ce moment on entend les chenilles [du demandant le soutien porté et nous atten- char ennemi] qui grincent, ordre aux deux dons. Tout à coup une Jeep s’amène à TD d’avancer, ce qu’ils font et tirent droit toute vitesse et s’arrête pile près de nous. devant ! Hélas le Tigre avait disparu. « Nom de Dieu, qu’est-ce que cela, les La seconde fois, les chars [ennemis] fusiliers-marins n’avancent plus ? » contre-attaquant sur notre reconnais- sance, le peloton s’arrêta avant un virage. C’est le général Brosset28 et son chauffeur Colmay me fit prendre un bazooka et Jean-Pierre Aumont29 ; à peine me laisse-t- m’emmena à cent cinquante mètres de là, il le temps de lui dire que nous étions dans un fossé en bordure de route, dans stoppés par un [canon] anti-char qu’il un second virage et me dit : ordonne à Jean-Pierre : « Tu as la médaille militaire à ta main, « Allons voir ! » tâche de t’en tirer. » Ils font quelques mètres avec la Jeep… J’étais sacrifié. Le bruit des chenilles se fit Poum ! Une manœuvre… Poum ! Une entendre, les chars montaient, au bruit ils autre et les voici revenus auprès de nous. se trouvaient à environ soixante mètres et ils s’arrêtent… Quelle attente ! J’entends Brosset me dit : les battements de mon cœur dans les « Petit, tu n’aurais pas un coup de oreilles… Dix minutes, dix siècles se pas- pinard30 ?» sent, rien. Un bruit de moteur, des grince- Jean Candelot (coll. particulière). ments, les chars font demi-tour. J’ai loupé Chaque marin qui se respecte possède ma médaille militaire mais j’ai sauvé ma une ancienne boîte de conserve que l’on peau, j’en suis aussi content. Nous conti- décide de me replier lorsque j’aperçois, de appelle « moque » ; nous la remplissons nuons cette avance sans trouver beau- l’autre côté de la route, dans un champ de d’un litre de vin et le général, ainsi que coup de résistance, les Allemands se blé, un ennemi qui me vise avec son Jean-Pierre, l’ont vidée totalement. replient. arme ; vite, je tire, un coup, flac… Enrayé. « Petit, on a eu chaud ! » Un jour, devant Montefiascone27, voici Je réarme, un second coup, l’ennemi se Et Brosset repart vers l’arrière… deux heures que nous sommes en recon- couche et réapparaît… Je tirerai trois fois, naissance, quelques coups de feu isolés chaque fois enrayé ! La troisième fois, il Quelque temps après, les amis du et, soudain, la résistance se fait plus forte. [l’ennemi] tombe et ne se relèvera plus. Je bataillon de marche qui nous suivaient Nous sommes en vue du village et nous reviens sur mes pas pour explorer cette avaient anéanti cet anti-char et la progres- nous arrêtons aux ordres pour l’attaque. cahute lorsqu’un obus éclate à une sion reprenait. Nous menons [ensuite] Un copain braque sa mitrailleuse 12,7 sur dizaine de mètres, ensuite un autre. Je me une attaque à pied où, pour une fois, un buisson pour voir si elle est bien ali- replie vers la Jeep. Colmay est monté aux l’aviation américaine doit nous aider ; ils mentée ; il lâche cinq ou six coups… nouvelles lorsque nous entendons des [les Américains] se trompent et nous

26 TD : tank-destroyer, char spécialisé dans le combat anti-char. 27 Montefiascone est une ville située dans le centre de l’Italie (province de Viterbe). 28 Le général Diego Brosset, commandant de la 1re DFL, tué dans les Vosges. 29 Aumont Jean-Pierre : Jeune premier du cinéma français d’avant-guerre, engagé volontaire. Un autre acteur célèbre, Jean Gabin, est aussi fusilier-marin mais dans la 2e DB. 30 Pinard : vin ordinaire.

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lâchent leurs bombes sur nous, au lieu des Ce jour-là, mon peloton, le premier, n’est où il transmet, on voit des larmes qui Allemands. Lors de cette attaque, pas engagé au cours de notre reconnais- coulent sur ses joues… Nous y retournons Humblot reçoit deux balles de mitrail- sance ; je suis cette fois dans un scout-car et, cette fois, passons. Mes souvenirs ne leuse lourde qui se fichent dans sa commandé par Metzger lorsque, d’un seul sont plus très nets, mais nous avions récu- colonne vertébrale, mais probablement coup, c’est l’enfer, particulièrement pour péré deux blessés, dont un gravement, le en fin de course ou après ricochet ; elles ceux qui nous précèdent, à quelques mai- quartier-maître Daviault, ancien de Bir ne sont que fichées sous la peau : on dirait sons et un léger repli de terrain situé à une Hakeim, que nous sommes allés recher- deux petites saucisses ! Delobelle, lui, est cinquantaine de mètres de là. Le peloton cher sous un feu meurtrier. Aussitôt après, grièvement blessé par éclat de mortier ; qui s’est engagé subit un feu meurtrier de c’était le calme complet, la campagne lorsqu’on le met sur un brancard, sa mortiers, mitrailleuses et artillerie ; cer- d’Italie était terminée pour la 1re division 31 deuxième partie tombe à terre … tains camarades ont pu se replier avec française libre. 18 juin 1944, mauvaise date dans mes plusieurs morts, mais des véhicules sont souvenirs car elle marque la mort de plu- atteints, il y a des blessés ; l’ordre vient de sieurs de mes camarades, tués au combat Colmay de foncer et de ramener morts et le dernier jour de notre campagne d’Italie blessés. Notre scout-car et une Jeep Nous prîmes nos quartiers, pour ma part à dans l’attaque de Radicofani32, comme tentent de passer [alors que] c’est un feu Brindisi, en Calabre, où nous waterprouf- l’illustre le tableau de Chapelet dans les d’enfer, nous faisons demi-tour. Colmay fions33 nos véhicules pour, cette fois, le annales de la 1re DFL. rapporte que c’est terrible et, au moment débarquement en France.

31 C’est-à-dire que l’éclat de mortier a coupé Delobelle en deux (NDLR). 32 Radicofani : village médiéval de la province de Sienne sis en altitude sur une colline basaltique dominant plaines et collines, dans la région de Toscane. Elle est surmontée d’une forteresse. 33 Waterprouffions : néologisme de l’époque pour définir l’opération d’étanchéisation (« waterproof ») des véhicules et des armes en vue d’un débarquement maritime.

Ralliement de l’île de la Réunion aux Forces françaises libres

n mai 1942, après l’occupation de débarque à son tour sans opposition et inutile et sachant que l’Afrique du Nord Diego-Suarez par les forces britan- occupe la station de radio, la gendarme- avait rejoint la cause des Alliés et des Eniques de l’opération Ironclad 1, le rie, la gare et le central de la poste, puis la Français Libres, fait part à l'évêque de sa contre-amiral Auboyneau des Forces résidence du gouverneur. Ce dernier, décision de cesser toute hostilité dès le navales françaises libres (FNFL) décide de Pierre Aubert, est en déplacement et se 30 novembre au matin. trouve dans sa résidence d’été à Hell- faire effectuer le ralliement de La Réunion Un certain nombre de jeunes gens de l’Île Bourg, dans le cirque de Salazie. André par le contre-torpilleur Léopard et l’aviso s’engagera dans les FFL et les FNFL, Capagorry, administrateur désigné par le Commandant Dominé. notamment de futurs candidats aux général de Gaulle pour gouverner l’île, écoles militaires de Ribbesford et de À la suite d’incidents divers, l’opération quitte le Léopard et s’installe dans l’hôtel Dartmouth. C’est ainsi que Paul Vergès ira est retardée et ce n’est que le 4 novembre du gouvernement, remplaçant de fait à l’École des Cadets et Jacques, son frère, à 1942 que le Léopard appareille du Cap ; il Pierre Aubert. Le capitaine de corvette celle de Cherchell, tandis que Paul Joly et arrive à l’Île Maurice le 27 au matin. Raymond Baraquin installe son PC au Louis Herbecq opteront pour l’école Il y reçoit l’aide des Britanniques et même endroit. embarque le capitaine Hector Patureau, navale de Dartmouth. Ces éléments représentant du général de Gaulle dans Un comité de sympathisants gaullistes, rejoindront la Grande-Bretagne via cette colonie. Le navire appareille le soir dirigé par Léon de Lépervanche et Tamatave et embarqueront en compagnie même et il est à dix miles au nord de Raymond Decugis, ingénieur des ponts et du contingent important des volontaires Saint-Denis à 22 h 30. Le bâtiment se rap- chaussées, cherche à s’emparer d’une bat- de la Grande Île. Ils effectueront cette proche de la côte et met deux embarca- terie d’artillerie placée à la Pointe des longue traversée de deux mois sur le S/S tions à l’eau. Le capitaine Patureau et un Galets qui tire sur les embarcations du Orduña et le S/S Duchess of Richmond, en petit détachement commandé par l’en- Léopard. On déplore deux morts à l’issue faisant escale à Durban, Cape Town et seigne de vaisseau Moreau y prennent de cette opération, dont Raymond Freetown. Decugis, et des blessés. Toute résistance place. Ils débarquent sans problème vers Jean Giraud-Vinet cesse dans la soirée, sans que le gros des 00 h 20. Cadet de la France Libre troupes se soit manifesté. Monseigneur de Promotion 18 Juin Plusieurs heures plus tard, ne recevant Langavant, évêque de l’Île, a pris contact aucun signal de ce premier groupe, le avec le nouveau gouverneur, André capitaine de frégate Richard Évenou, Capagorry et accepte de se rendre à Hell- « pacha » du Léopard, décide de mettre la Bourg, auprès de Pierre Aubert. Ce der- 1 Nom de code de l’opération de débarquement compagnie de fusiliers à terre. Elle nier, estimant que toute résistance serait anglais à Madagascar, le 5 mai 1942 (NDLR).

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Histoire de la famille Mademba-Sy Cent cinquante ans de fidélité à la France

Cet article est paru, dans une version légèrement différente, dans l’hebdomadaire Voix du Midi Lauragais du 30 août 2012. C’est avec son aimable autorisation que nous le publions aujourd’hui dans nos colonnes.

e qui se passe aujourd’hui à Claude Mademba-Sy est un héros de la au lycée Carnot de Tunis. En 1943, le géné- Tombouctou est extrêmement France Libre, français et sénégalais. Né ral Leclerc et sa colonne, après la très dure Cgrave. Le Mali risque aujourd’hui la français, il est d’abord officier supérieur mais victorieuse bataille de Kasserine, mort. Nous, qui sommes au bord de l’apo- français : il sert en France, en Indochine part dans la foulée vers Alger, pour plexie économique, serions aussi en crise puis en Algérie. À mi-course, recruté par rejoindre Londres. Âgé de 20 ans, Claude morale si nous restions indifférents à ce Léopold Sédar Senghor, il devient sénéga- Mademba-Sy, comme beaucoup de qui se joue là-bas. lais, ambassadeur du Sénégal à jeunes Français de Tunisie, s’engage dans Brazzaville, à Rome, à Vienne et à l’ONU. Alors que les Maliens, parmi d’autres, sont ce qui deviendra la 2e DB, où il est affecté depuis longtemps des musulmans in- À la fin de la guerre d’Algérie, il est officier au régiment de marche du Tchad. tègres et paisibles, les bandits et les ultra- de la Légion d’honneur et lieutenant- Mitrailleur de char, son chef direct est le islamistes qui les attaquent aujourd’hui colonel parachutiste. Il est fait comman- capitaine Massu. Il débarque en sont hystériques, violents et intolérants. Il deur de la Légion d’honneur en 1979. Il Normandie, en août 1944, file vers Paris ne s’agit pas d’un problème religieux, vient d’être élevé à la dignité de grand offi- qui est libéré, poursuit vers Strasbourg, mais de l’utilisation d’une religion, aux cier de la Légion d’honneur et a reçu sa fait hisser le drapeau tricolore sur la flèche seules fins de couvrir les pires folies. plaque, à Fréjus, le 31 août 2012. J’ose dire de la cathédrale et aussitôt franchit le que c’est justice. Rhin en direction du nid d’aigle d’Hitler à Le contexte est celui du marché envahis- 1 sant de la drogue qui, s’appuyant sur une Berchtesgaden, en Bavière . Le 4 mai 1945, importante circulation d’argent blanchi l’assaut est donné et, victorieux, Leclerc y e mais d’origine mafieuse, nuit gravement Son Excellence le colonel installe la très fameuse 2 DB. Le lende- au développement, nuit aux sociétés et Claude Mademba-Sy main, c’est la section du lieutenant aux peuples qui subissent ce véritable Messiah, 2e section, 12e compagnie du fléau, engendre des guerres tribales ou Claude Mademba-Sy est né à Versailles, le régiment de marche du Tchad, qui plante nationales, en armant certaines popula- 11 décembre 1923. À la mort de son père, le drapeau tricolore de la France, avec sa tions qui, minoritaires mais surarmées, il est pupille de la Nation et fait ses études croix de Lorraine, cette fois-ci sur le sont en pleine folie mortifère. Il ne s’agit donc pas d’une guerre sainte mais d’une guerre sale, par les trafics des armes, de la drogue et de l’argent de la drogue. Si le Mali, qui a été pendant les seize der- nières années l’un des pays les plus démo- cratiques d’Afrique, venait à tomber,d’autres suivraient dans la foulée. Ce pays est fier, mais dans une situation existentielle pathé- tique. Il nous faut bien le sentir : c’est à l’aide qu’il nous appelle ! Lorsque la situation est grave, il faut trou- ver des symboles, des emblèmes et savoir donner des signes qui mesurent la recon- naissance que nous devons à ceux qui se sont engagés avec nous, lorsque nous étions en danger. Pendant cent cinquante ans, au fil de quatre générations d’officiers de tirailleurs sénégalais, couverts de gloire au service de la France, l’engagement de toute la famille Mademba-Sy est un exemple émouvant et hautement emblématique. L’actualité nous fait devoir de le rappeler ! Le général Massu remet la cravate de la Légion d’honneur au colonel Claude Mademba-Sy, en 1979 (DR).

1 Après la libération de Strasbourg (13 novembre 1944), la 2e DB participe à la réduction de la poche de Colmar (3 février 1945) et de Royan (14-18 avril), avant d’être rattachée en mai 1945 à la VIIe armée américaine du général Patch, en Bavière (NDLR).

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Berghof du Führer, encore couvert d’em- On se le dispute. Il répond toujours : À peine à la retraite, il fait plusieurs fois le blèmes nazis. présent ! tour du monde, invité à défendre ses idées, à faire part de son expérience et de À la fin de la guerre, Claude Mademba-Sy À l’indépendance des pays d’Afrique en sa connaissance de l’Afrique, où il est entre à Saint-Cyr : promotion « Victoire ». 1960, Léopold Sédar Senghor, le président vénéré comme un grand marabout. Ses Plus tard, il sera breveté d’état-major et du Sénégal, l’appelle pour organiser la interventions s’adressent autant aux gou- admis à l’École de guerre à Paris. Ses états nouvelle armée de son pays. Il prend donc vernements qu’aux jeunes élèves, dans de services dans l’armée française, en naturellement la nationalité sénégalaise, tous les lycées et collèges de France et de France, en Allemagne, en Indochine et en mais Senghor désire qu’il conserve aussi Navarre. Algérie sont exemplaires à plus d’un titre. la nationalité française. Il y défend inlassablement la contribution État des services : engagé, simple soldat, Entre 1963 et 1965 il est chef d’état-major des troupes coloniales à la défense de le 11 mai 1943, caporal le 31 mai 1944, ser- général de l’Union africaine et malgache notre territoire et le statut que l’on aurait gent le 1er janvier 1945, sergent-chef le et attaché militaire du Sénégal à Paris. dû très tôt reconnaître à tous ceux que 1er mai 1945, aspirant le 25 juin 1945, sous- Peu après, les événements du Congo se l’on range ici, pour simplifier, sous la lieutenant le 26 décembre 1945, lieute- déclenchent. Colonel, il est envoyé rubrique des tirailleurs sénégalais. Il y nant d’active le 25 décembre 1946, capi- comme commandant de la force africaine défend, avec beaucoup d’énergie, l’épo- taine le 31 décembre 1955, chef de d’intervention de l’ONU au Congo- pée de la Résistance et de la France Libre, bataillon le 31 décembre 1960, lieutenant- Léopoldville, plus tard le Zaïre, en France et en Afrique. C’est un orateur colonel le 1er mars 1962 et enfin colonel le aujourd’hui la République démocratique magnifique, très direct, plein d’humour, 1er juillet 1970, démission acceptée le du Congo. Il est commandant de l’ONU de conviction et, pour tout dire, de gran- 29 janvier 1973. au Kivu et Burundi. Peu après, Modibo deur, qu’il sait parfaitement transmettre. Citations : Keïta, le président du Mali, rompt les liens Pour sa retraite, il s’établit avec sa famille, qui unissaient son pays et le Sénégal, dans dans un petit village du Tarn, dans le – en France : à l’ordre de la 2e DB le 3 janvier la confédération sénégalo-malienne, éta- Lauragais. Sa mère était française, son 1945, du corps d’armée le 13 janvier 1945 blie à l’indépendance et dont les troupes épouse Josette est française, ses enfants (croix de guerre 39-45). étaient alors unies sous son commande- sont français, certains d’entre eux sont ment. La force est dissoute. – en Indochine : à l’ordre de la division le même des fonctionnaires français. Il est 19 mars 1954, de l’armée le 11 juin 1954 Alors, nommé ambassadeur du Sénégal, né à Versailles, pupille de la Nation, il était (croix de guerre des TOE avec palme). Claude Mademba-Sy commence une car- français et l’est resté. Aujourd’hui, pour sa rière diplomatique : gloire, il mourra aussi sénégalais, mais en – en Algérie : à l’ordre de l’armée, le 2 août France ! On disait à Tunis où il a fait ses 1959 (croix de la Valeur militaire avec – à Brazzaville, avec compétence étendue études : « plus français que lui, je meure ! » palme), du corps d’armée le 17 no- à tous les pays voisins d’Afrique cen- Le connaissant bien, Claude Mademba- vembre 1959 (croix de la Valeur militaire trale : Zaïre, Burundi, Ruanda (1966- Sy, couvert de gloire, est resté un homme avec étoile de vermeil). 1970) et, je ne sais si on a le droit de dire, modeste : humble pour lui même, mais Katanga, qui prétendait alors entrer en Légion d’honneur : chevalier le 13 juillet très fier pour la France et pour ses tirail- sécession ; 1955, officier le 29 janvier 1973, comman- leurs sénégalais qu’il a toujours défendus deur en 1979, grand officier en 2012. – en Italie et Yougoslavie (1970-1972), en avec acharnement. Tunisie (1972-1973), en Autriche (1977- Claude Mademba-Sy est un grand soldat 1980). de l’armée française. Il est jeune et d’un Les tirailleurs sénégalais courage inouï. Il passe à travers les balles, Pendant ces mêmes périodes, il est aussi les obus et les bombes qui pleuvent de nommé représentant permanent auprès Le père de Claude, Abd-el-Kader toute part. Il a la « baraka » et se dit de la FAO à Rome (1970-1980), ainsi Mademba-Sy, capitaine de tirailleurs aujourd’hui, pour rire, qu’il fut toujours qu’auprès de l’ONUDI et de l’Agence ato- sénégalais, a fait toute la guerre de 14-18. protégé par le « karma » d’El Hadj Oumar mique de Vienne (1977-1980). Il se Musulman, marié à une Française catho- Tall de Hamdallaye, son ancêtre lointain. retrouve, ensuite, conseiller interrégional lique, chef de bataillon après la guerre, il Il fait montre d’un charisme sans égal de l’ONU à New York (1974-1977), est alors officier de la Légion d’honneur. mais aussi, dans les combats, d’un sens membre de la mission des Nations Unies Gazé en 1918, il meurt en 1932 à Versailles. singulier de la situation militaire. au Cambodge (1992-1993), membre de la mission des Nations Unies pour les élec- Le jeune frère d’Abd-el-Kader, l’oncle de Tout comme les officiers colonels ou tions en Afrique du Sud (1994). Claude, le sous-lieutenant Cheikh généraux des troupes coloniales de la Mademba-Sy, s’engage au service de la guerre de 14-18 connaissaient son grand- Depuis 1963, comme chef ou comme France en 1917 et meurt avec la croix de père : Bougari Mademba-Sy, Fama (roi) de membre de la délégation du Sénégal, il guerre, devant Soissons, en 1918. Sansanding, les officiers colonels ou géné- participe à de nombreuses conférences de raux des troupes coloniales de 39-45, de l’Organisation de l’Unité Africaine et de Georges Clemenceau, le « Tigre », le « Père vingt ou trente ans ses aînés, ont connu et l’Organisation des Nations Unies. de la victoire », écrit : « Un jour,sur le front, apprécié son père : le commandant je voyais passer comme ça, de loin, une Abd-el-Kader Mademba-Sy, héros de la Il est également professeur associé de troupe de gens avec un homme à cheval guerre de 14-18, couvert de gloire. l’International Peace Academy of New qui tournait autour d’eux (c’était peut- York, de l’Institut International être Abd-el-Kader Mademba-Sy, leur capi- Ainsi, dès l’âge de vingt ans, Claude est d’Administration Publique de Paris et de taine ?). Je demande ce que c’est. On me fameux et déjà porteur d’un grand destin. l’Institut Européen des Hautes Études répond qu’on n’en sait rien. Alors avec ma Tout le monde le veut dans sa section, Internationales de Nice. On ne compte voiture, j’y vais. C’étaient des Noirs qui dans sa compagnie ou dans son régiment. plus ses décorations. revenaient des tranchées, où on les avait

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laissés dix-huit jours ! Vous devinez ce que agronome de Maison-Carrée, et Ben instituteurs, des comptables, des employés ça pouvait être ! Des blocs de boue qui reve- Daoud devint professeur au Soudan. et même des agriculteurs et plusieurs naient avec des fusils cassés, des vêtements générations de gens instruits. À preuve, Sa mission accomplie, Bougari Mademba- en loques, des gueux… magnifiques ! Et les élèves et les descendants des élèves du Sy, le Fama de Sansanding, est foudroyé quand ils m’ont vu, ils se sont mis à chan- maître Mahmadou Racine-Sy, capitaine par une congestion pulmonaire. Il meurt ter et jouer la Marseillaise, avec je ne sais du régiment des tirailleurs sénégalais, ainsi dans ses champs de chanvre souda- quoi, en tapant sur des morceaux de bois, officier de la Légion d’honneur, parlent le nais, aux environs du village de Kayo, le des pierres, des gourdes trouées. Je leur ai peuhl en famille, lisent l’arabe dans le 25 juillet 1918. Il eut droit à des funé- parlé. J’ignore s’ils m’ont compris. Je leur ai texte du Coran, écrivent et parlent dans railles nationales à Ségou. dit qu’ils étaient en train de se libérer eux- une langue française impeccable pour les mêmes en venant se battre avec nous ; que Deux des frères du Fama de Sansanding, usages administratifs et charmante pour nous étions frères (dans le sang versé), fils incorporés au régiment des tirailleurs diffuser l’instruction : belle synthèse ! Où de la même civilisation et de la même sénégalais, sont officiers de la Légion sont donc nos maîtres aujourd’hui ? idée… Des mots qui étaient tout petits à d’honneur : Ahmadi Coumba-Sy, recruté Le président Abdoulaye Wade écrivait lui- côté d’eux, de leur courage, de leur en 1865, meurt interprète de 1re classe en même qu’à l’inverse de la méthode utili- noblesse. » 1924 ; Mahmadou Racine-Sy, jeune imam, sée par les Russes en Afrique, l’instruction recruté comme instructeur en 1852, et délivrée par les Français aux Africains Ceux-là aussi ont fait la France ! Plus tout premier officier africain du régiment dont ils avaient la charge, était stricte- encore que de mémoire, c’est de destin des tirailleurs sénégalais, meurt au grade ment la même que celle que délivraient dont il s’agit aujourd’hui. de capitaine, en 1902. Celui-ci, s’est parti- les Français à leurs propres élèves. culièrement distingué pendant la guerre Le grand-père de Claude, Bougari coloniale menée par la France, en étroite « Le propre d’un professeur n’est pas de Mademba-Sy naît le 3 mars 1852 dans le collaboration avec les Toucouleurs, contre transmettre sa propre idéologie mais de Fouta-Toro, au Sénégal. Il va à l’école à le djihad d’El Hadj Oumar Tall. respecter celles de ses élèves. Il n’est pas non Saint-Louis du Sénégal. Ses succès sco- plus de se placer à leur niveau mais de se laires le font très vite remarquer à l’atten- mettre à leur portée. Son autorité ne se er tion du gouverneur. Le 1 février 1869, il Le capitaine Mahmadou transmet que par la rigueur de son ensei- entre dans l’administration des postes et gnement et le respect d’une discipline télégraphes, en qualité de commis auxi- Racine-Sy, grand oncle du acceptée. » liaire. Au fil des années, la conquête du colonel Claude Mademba-Sy : Soudan se poursuit. Il est alors engagé Cette devise, déjà appliquée aux tirailleurs comme télégraphiste, ne quitte pas le Un imam, au régiment sénégalais, il y a cent cinquante ans, reste front et gravit très rapidement tous les des tirailleurs sénégalais. encore aujourd’hui, valable pour tout le échelons. monde. Le capitaine Mahmadou Racine-Sy (1838- En 1886, le colonel Galliéni est nommé 1902), issu d’une famille très religieuse et Pour comprendre tous les détails et péri- commandant supérieur du Soudan musulman fervent, est un tout jeune péties de cette « grande aventure », il suffi- français, à un moment où les revers imam, maître d’école coranique. Repéré rait de lire le livre du capitaine Abd-el- s’accumulent. Il fait appel à Bougari par Faidherbe, il est en quelque sorte Kader Mademba : Au Sénégal et au Mademba-Sy dont il connaissait les quali- recruté comme « aumônier musulman » Soudan français. L’histoire du Fama de tés de diplomatie et de bravoure dans les dans le régiment des tirailleurs sénéga- Sansanding (Librairie Larose, édité en situations difficiles. Tous deux se tutoient. lais, alors en voie de formation. Il en fut le 1931 à Paris). On peut au passage retenir Avec la croix de chevalier de la Légion tout premier officier instructeur, forma- la dernière phrase de la préface du général d’honneur, il est nommé directeur des teur et maître d’école, combattant et Archinard : « En occupant le Soudan, la Affaires politiques et du renseignement. administrateur. France ne s’est pas seulement agrandie ter- ritorialement, elle s’est grandie morale- Le principe proclamé par Faidherbe était ment, en augmentant le nombre de ses fils Sous la direction du colonel Archinard, que la religion des Français n’avait aucun qui succède à Galliéni en 1888, Mademba- et en gagnant leur cœurs. » C’était il y a rapport avec l’étude de l’arithmétique ou cent cinquante ans. Sy déploie une énergie de conciliation du système métrique. Il en allait de même considérable. Plusieurs fois on lui confie de la religion musulmane, qui n’était pas Mahmadou Racine-Sy et Bougari la direction des troupes. C’est lui qui dés- du tout opposée à l’instruction, celle des Mademba-Sy sont des demi-frères qui ont ormais discute des conditions de reddi- langues étrangères, celle des sciences et combattu côte à côte. A la mort d’El Hadj tion des vaincus. Après la défaite d’El Hadj celle des techniques, comme à Djenné au Oumar Tall, en 1864, chacun épouse une Oumar Tall, il est nommé Fama de XVIe siècle et comme Jules Ferry le recom- demoiselle Tall, deux des petites filles de Sansanding. En 1897, il est officier de la mandait aux maîtres d’école français en l’empereur vaincu. De demi-frères, ils Légion d’honneur puis commandeur du 1883. Ainsi, sans contradiction, conver- deviennent donc beaux-frères. Leurs Mérite agricole, dont il disait : « Je l’aime, sion ou reniement, l’imam devint franc- descendants portent le titre de cheik, cette cravate, et j’en suis plus fier que si l’on maçon. Très tôt, le principe de laïcité fut c’est dire celui de prince. Les Peuhls m’avait donné les Palmes académiques. » inculqué aux Toucouleurs ralliés à la Toucouleurs du Sénégal et du Mali sont France. Cependant, tout s’est peut être tous apparentés. À la mode de Bretagne, En 1901, il dirige ses sept fils vers le lycée passé comme si nous n’avions rien à leur ils sont les descendants du Fama de d’Alger. Après de brillantes études, apprendre sur le sujet. Dit vulgairement, Sansanding et de son beau frère, le tout Gustave, Souleymane et Abdoulaye, ils avaient déjà cela dans le sang ! premier officier des tirailleurs sénégalais. tombent malades et meurent. Abdel- Quelle belle famille ! kader et Cheikh Mademba-Sy devien- De cette école de Saint-Louis du Sénégal dront officiers d’infanterie coloniale. devaient sortir plus tard des chefs de pro- Leurs très nombreux enfants, petits- Racine obtint un diplôme d’ingénieur vince, des interprètes, des officiers, des enfants, arrière-petits-enfants… se sont

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alliés à d’autres familles d’ethnies diffé- Enfin, pour ne pas revenir sur la conquête atmosphère de terreur hystérique, la fla- rentes : Sérers et Wolof, au Sénégal, coloniale, mais ne considérer que l’évolu- gellation des mères devant leurs filles, Bambaras et Peuhls du Macina, au Mali, tion des pays du Sahel, après cinquante l’amputation des pères devant leurs fils, la pour ne citer que quelques exemples. ans d’indépendance, on ne peut que se destruction des icônes et le bris, à coup de réjouir de constater que, dans tous les machette, des objets d’art. C’est bien là, domaines, l’effort consenti et les succès l’agression sauvage d’une civilisation qui remportés sont considérables. Pratique- a tant de charmes à cultiver. Histoire récente ment partout, la démocratie s’est instal- lée. Le Mali vient de vivre, grâce à Amani L’épopée de la famille Mademba-Sy et tout ce que cela représente, ainsi que le Il ne faudrait pas croire que tous les Toumani Touré il faut le dire, dix-huit ans destin des peuples et des États du Sahel, tirailleurs sénégalais aient été recrutés de démocratie. Les conditions d’un déve- particulièrement celui du Mali, sont parmi les Sénégalais ou parmi les loppement équilibré sont en devenir. seuls Toucouleurs. Beaucoup étaient Partout, un Islam intègre et paisible est aujourd’hui sous le feu des kalachnikov. Maliens, Voltaïques (Burkinabés), vécu dans la tolérance des autres reli- Ressuscitons donc les symboles ! Ce n’est Ivoiriens, Nigériens, Gabonais, Congolais, gions. Partout, aussi, le rôle de la France y pas seulement une question de mémoire Centrafricains et Tchadiens. Vingt ans est reconnu, c’est donc le moment de res- mais c’est aussi et surtout une question de plus tard, dès le début de la guerre de 14- ter modeste mais déterminé. Partout, destin collectif. 18, ils étaient à nos côtés. À partir de 1943, enfin, le charme civilisé des peuples du au moment des campagnes d’Italie, de Sahel est apprécié, c’est donc le moment Yves Tardy France et d’Allemagne s’y sont ajoutés des de savoir le sauver. Professeur des universités honoraire régiments de tirailleurs marocains, algé- Montgeard riens et tunisiens : tabors, goums, spahis, Lourde tâche accomplie et réussie, aux zouaves… Leur contribution, qui fut déci- antipodes de ce qui se fait aujourd’hui à Toute ma reconnaissance va à Martine Cuttier, sive, et le prix du sang payé ne furent Tombouctou, à Gao et ailleurs, où se pra- professeur d’histoire, pour m’avoir permis de peut-être pas suffisamment reconnus. tiquent sur la place publique, dans une disposer de ses archives personnelles.

OUVRAGES CONSULTÉS L’auteur Professeur de Géochimie. CAPITAINE ABD-EL-KADER MADEMBA, Au Sénégal et au Soudan français, Paris, Librairie Larose, 1931, 117 p., préface : « lettre du général Archinard du 16 octobre 1930 ». Spécialiste des sols et des milieux

DIRECTIONDU SERVICE D’INFORMATION DES ARMÉES, Du Tchad au Danube, 80 rue Saint Lazare, tropicaux. Paris, Éditions G.P., 1946, 339 p. Universités : Louis Pasteur CHEF DE BATAILLON D’INFANTERIE DE MARINE DE LAVERGNE DE TRESSAN, Inventaire linguistique de l’Afrique Occidentale Française et du Togo, RIFAN-Dakar, Mémoire n° 30, 1953, 241 p. à Strasbourg, Paul Sabatier

AHMADOU HAMPÂTÉ BÂ ET JACQUES DAGET, L’Empire Peul du Macina (1818-1853), Paris, Mouton à Toulouse, et Institut polytechnique & Co, 1962 ; Abidjan, The Hague, 1962 ; Paris, Les Nouvelles Éditions Africaines et Éditions de Toulouse. de l’École des Hautes Études en Sciences Sociales, 1984, 306 p.

HUBERT DESCHAMPS, Histoire générale de l’Afrique noire, tomes 1 : « Des origines à 1800 », Directeur de Recherche, Institut et 2 : « De 1800 à nos jours », Paris, Presses Universitaires de France, 1970-1971, 572 et 720 p. français de Recherche pour le

MARYSE CONDÉ, Ségou (roman), tomes 1: « Les Murailles de terre », et 2 : « La Terre en miettes », Développement (IRD) à Bamako, Paris, Robert Laffont, 1984-1985, 491 et 429 p. Mali, et à l’Université de São Paulo, INSTITUT PÉDAGOGIQUE DE BAMAKO, Histoire. Classe de 6e, EDIM, Larousse Afrique, 1986, 94 p. Brésil. AMADOU HAMPÂTÉ BÂ, Amkoullel, l’enfant peul. Mémoires, Actes Sud, 1991, 412 p. Membre de l’Académie brésilienne MARTINE CUTTIER, Portrait du colonialisme triomphant. Louis Archinard (1850-1932), Paris, Charles Lavauzelle, 2006, 583 p. des Sciences.

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Résister dans les camps nazis

Le 26 septembre dernier,le jury national du Concours national de la Résistance et de la Déportation s’est réuni à Paris, afin d’établir le palmarès de l’année 2011-2012. Nous publions aujourd’hui la copie de l’un des lauréats de la première catégorie : « réalisation d’un devoir individuel en classe » (classe de lycée). Il s’agit de Jean Bernard, 18 ans, élève au lycée Georges Clemenceau de Jean Bernard en 2012 Reims (actuellement élève en Hypo-Chartes au lycée Henri-IV à Paris). (coll. particulière).

a Résistance et les camps de concen- intellectuelle, particulièrement réfractaire donné à l’un est mathématiquement tration sont deux domaines qu’on a parce qu’elle est gratuite et sans utilité retiré à un autre. Un exemple cependant Lrarement recoupés malgré quelques dans un monde où il faut mobiliser toutes d’aide, rendue possible par l’union des exemples notoires comme la révolte du les chances de survie. Par exemple, Jean efforts et la mise en commun, fut la fonda- ghetto de Varsovie, d’autres, nombreux mais Gavard, déporté à Mauthausen, rapporte tion dans un camp d’un petit stock consti- moins connus, notamment parce qu’ils sont qu’il s’entretient avec le « père Jacques », lui tué de bouts de rations « grands comme souvent individuels et spontanés, et que leur fait part de son goût pour la poésie notam- un ongle » prélevés sur chacune d’elles, et auteur a emporté avec lui le souvenir de son ment Alfred deVigny, et d’autres choses qui l’homme qui le raconte en a bénéficié au action dans la tombe. En effet, le monde à perdraient leur sens s’il n'y avait des retour de l’infirmerie après une dysente- part des camps nazis place les hommes hommes pour les incarner. rie : il ne pesait plus que 35 kilos pour 1,81 dans un univers aux conditions extrêmes, mètre. On voit, là encore, que la où des individus sont forcés de se replier sur D’autre part, la Résistance peut aussi être la Résistance n’est pas toujours frontale et eux-mêmes et tendent à rendre vaines poursuite d’un engagement moral et/ou peut être simplement la survie, et c’est un toutes tentatives de témoignage et de com- politique. On montre ainsi qu’on est caractère essentiellement humain d’avoir munication. Cependant, en maints homme de pensée et homme de conscience qu’elle peut dépendre de celle endroits, la dignité humaine s’est élevée conscience. Que cela soit la poursuite d’un d’autrui, permettant par là de bâtir une comme un sentiment qu’il y avait une limite engagement résistant intérieur ou la société improvisée. à ne pas franchir dans la déchéance pour volonté spontanée de nuire à l’ennemi et de que la vie garde son sens. Nous verrons donc mettre un grain de sable dans la machinerie La cohésion entre des hommes affaiblis d’abord que la Résistance dans les camps se nazie, on est ainsi amené à attaquer des ins- constitue parfois la seule forme de survie fonde sur une intégrité morale et qu’elle a titutions qui ont toute puissance. Il y a physique mais aussi morale, car la perte de pour but de la défendre ; par ailleurs, celle-ci notamment des sabotages perpétrés par les tout rapport nous laisse dans le désarroi, doit tendre vers l’agrégation de personnes commandos du travail, qui reçoivent la sans valeurs ni ressources. Cette fraternité libres luttant pour la survie de l'homme et punition exemplaire de la pendaison. La évoquée par Jean Gavard est ici la conti- de son caractère social qui lui est propre ; volonté d’empêcher cette entreprise nuité d’une amitié. Mais les rapproche- enfin ces groupes d’individus, en gardant, néfaste se manifeste aussi par l’évasion, en ments sont parfois plus récents malgré les au moins en esprit, la tête haute, peuvent soustrayant sa personne à l’autorité nazie, obstacles de langue, la fatigue, etc. C’est alors lancer un message à leurs contempo- comme ces cinq détenus évadés du camp ainsi que se développèrent parfois de véri- rains et prochains, message de détresse de Natzweiler1 qui, guidés par l’un d’eux, tables structures parallèles, ainsi un asso- mais aussi d’avertissement. Alsacien et connaisseur de la région, sont cié de Jean Moulin2 a recréé un comité à repassés en France occupée. La Résistance l’image du CNR pour défendre l’intérêt des Tout d’abord, résister dans les camps c’est est dans l’opposition, même dérisoire, de Français dans ces institutions. Celles-ci s’opposer à l’entreprise nazie, qui vise à l’individu à l’entreprise nazie, ce qui mon- pouvaient alors influer, par le biais de faire perdre toute humanité et individua- tre son échec de déshumanisation. postes attribués à des détenus, sur la lité aux détenus, qui deviennent alors des répartition des Kommandos les plus diffi- cadavres vivants dénués de volonté, affai- D’autre part, la volonté d’isoler les déte- ciles, etc. Cependant se pose, dès lors que blis, ce qui explique que des poignées nus est parfois contrecarrée par l’en- des détenus ou une communauté de déte- d’hommes ont pu diriger des camps traide : on cherche en effet à provoquer nus obtiennent une influence secrète dans immenses. Toute activité spécifiquement une lutte de tous contre tous par la pro- l’organisation du camp, le problème de la humaine encore pratiquée est alors un acte miscuité et le mélange des nationalités, ce participation forcée à la destruction de ses en opposition avec les objectifs du camp : qui crée une barrière du langage comme membres, en envoyant par exemple cer- se laver est la marque d’un être encore sou- l’explique Eugen Kogon dans l’État SS : le tains plutôt que d’autres dans les endroits cieux de lui-même, comme cet officier système des camps de concentration nazis. aux conditions les plus difficiles. C’est la autrichien dont Primo Levi rapporte le dis- L’entraide et le souci de l’autre, valeurs lourde responsabilité de la gestion, qui cours. La vie s’attache alors aux actes du fondamentales de l’humain, deviennent permet cependant, par un mal moindre, quotidien qui sont effectués avec alors un défi, car on attribue à chacun des d’en atténuer un plus grave. Ainsi ces conscience. Si le souci de son corps montre chances minimum, voire insuffisantes, de groupes eurent pour but, à plus ou moins qu’il n’est pas mort, plus encore l’activité survie. Or dans un monde clos ce qui est long terme, d’échapper à cette domina-

1 Il s’agit de l’Autrichien Karl Haas, du Français Martin Winterberger, qui rejoint ensuite la France Libre et s’engage dans la 1re DFL, du Tchécoslovaque Joseph Mautner, du Polonais Joseph Cichosz, ancien légionnaire français et combattant de la guerre d'Espagne, et de l’Allemand Alfons Christmann (NDLR). 2 Henri Manhès, alias le colonel Frédéric, ancien adjoint de Jean Moulin (NDLR).

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tion, surtout pendant la Libération, qu’on le monde et à des traces écrites qui circu- tant engagé et humain. En effet la sphère essayait alors de planifier. laient comme la carte de l’avancée des privée est favorisée et les intérêts particu- Il y a plusieurs exemples d’évasions, troupes alliées, réalisée à partir d’informa- liers sont poussés par la volonté et la pos- comme celle de Mauthausen. Grâce à une tions radiophoniques par Luc Châtaigné. sibilité d’abondance, là où le manque fai- planification précise, les détenus s’empa- La Résistance est donc un refus de se lais- sait de la survie une priorité exclusive. rent des postes de surveillance, emploient ser enfermer, et toutes les portes, de l’es- C’est en dépassant le statut de simples une série de stratagèmes comme l’utilisa- prit, des camps ou celles qu’ouvre un mes- êtres (sur)vivants que des hommes et des tion d’extincteurs comme armes ou poser sage, sont explorées et forcées. femmes ont pu se projeter dans la des couvertures mouillées sur les barbelés conscience morale puis collective et se pour les franchir. Cependant, cette tenta- Dans l’immédiat de la Libération, souvent libérer en pensée puis en acte de l’autorité tive d’échapper à la violence quotidienne accompagnée de révoltes internes des nazie. du camp jette souvent dans un péril plus camps, des serments sont prononcés à grand encore les évadés. C’est le problème Mauthausen, Buchenwald et Neuen- Aujourd’hui la servitude est différente et de toute action de résistance, qui peut gamme. Si les textes sont évidemment dif- moins évidente à abolir, car, comme l’écrit entraîner des représailles collectives. Ainsi férents, il y a cependant quelques points Emmanuel Levinas, « on fait aimer à l’es- à l’évasion de Mauthausen, succéda une principaux en commun : la volonté de clave sa servitude ». Si les résistants se sont grande chasse à l’homme qui fit périr la juger les responsables qui mène au procès battus pour un niveau de vie acceptable, plupart des évadés. Néanmoins, la vio- de Nuremberg, la volonté de poursuivre c’est surtout pour mener une vie « digne » lence elle-même est utilisée parfois pour les idéaux de départ qui leur ont permis de qui ne peut l’être sans engagement auprès garder la vie sauve, on en devient ainsi tenir, la volonté d’entraide et d’échange de l’autre, puisque toute autarcie est fic- l’auteur et non plus l’objet, on élève la entre les peuples et les nations mise en tion – car nous sommes redevables au lutte au niveau du combat. pratique pendant l’incarcération, qui moins de notre éducation. Une société conduit à l’ONU et à l’UE pour dépasser plus confortable donne, avec les outils et C’est le cas de la révolte du ghetto de les conflits, et enfin le devoir de mémoire à les occasions de réflexions, la tentation de Varsovie qui, après des déportations mas- travers les témoignages et différentes insti- s’en passer. La sphère privée, qui vise le sives à Treblinka, tenta de se soulever, tutions d’évènements, comme bonheur individuel, a pris le pas sur le encore fort de ses 60 000 habitants, à l’ini- aujourd’hui. D’une consultation des public et le politique, et les émeutes sont tiative d’une organisation juive de combat. anciennes déportées de Ravensbrück, il plus souvent la revendication d’un meil- C’est lors de la reprise des déportations ressortait que le contenu du témoignage leur niveau de vie que la résistance oppo- que fut déclenché un assaut qui prit les devait favoriser les valeurs d’humanité, sée à une autorité jugée injuste. Allemands totalement par surprise, les for- ainsi que l’engagement civique sans les- Finalement, malgré l’évolution de l’envi- çant à se retirer avec des pertes et à enga- quels il n’y a pas de Résistance, ni rêve de ronnement, certaines questions se posent ger une véritable bataille, qui, elle, ne conscience sociale possible. On peut encore qui étaient déjà présentes dans les laissa pas de survivant du côté juif. De la cependant se demander quelle est la camps, comme le débat bioéthique sur les même façon, ce sont 17 officiers russes qui valeur de ce témoignage de résistance à expériences ou les morts et avortements fomentèrent une révolte, menée après leur laquelle des conditions extrêmes don- assistés : ainsi la psychiatre Adélaïde mort. On voit l’importance d’un noyau de naient sens : chanter La Marseillaise en Hautval refusa d’assister les SS dans leurs départ souvent lié au militaire, même s’il arrivant à Birkenau, comme le rapporte expériences. On voit donc que les témoi- faut de la part de chacun un grand courage Adélaïde Hautval, était un acte courageux gnages des résistants de l’extrême sont pour commencer un combat sans armes. de Résistance, tandis que la dernière encore valables, soit par similitude du Forcément inégal, ce combat n’est pas Marseillaise grandiloquente semble être débat, soit par l’actualité de l’engagement vain pour autant : même si cela donne une celle que joua Pierre Cochereau aux par rapport aux intérêts personnels pri- mort d’honneur à ceux qui étaient grandes orgues de Notre-Dame de Paris maires. condamnés, c’est toujours un témoignage pour les obsèques du général de Gaulle, en réalité d’une résistance qui est faite lente et funèbre, grave et sublime. La Résistance dans les camps nazis, si elle dans l’ombre, et d’une volonté de résis- L’écouter devient alors même un simple a d’abord pour but la survie immédiate, tance qui, pour certains, n’a pas pu se tra- respect presque conventionnel, et de traduit surtout la volonté de perpétuer duire en actes. Gaulle pose la question de l’avenir de la l’individu, qui manifeste sa liberté dans Résistance, incarnée par la flamme de son engagement, qui conduit à perpétuer Enfin la Résistance est une ouverture sur le l’ambition nationale ranimée par la tem- une forme de société cohérente, qui va monde depuis des environnements her- pête et moribonde sous la brise, à la fin du tenter de sauvegarder l’intégrité de tous et métiques, dans le sens où, non seulement chapitre IV (« La Libération ») du troisième leur offrir un appui et un but. Enfin, elle elle fait sortir le détenu de sa condition tome (Le Salut) des Mémoires de guerre. est témoignage pour les contemporains et passive et le propulse dans un combat les suivants. Car, si les conditions chan- mondial et universel de la défense de Si les conditions extrêmes de destruction gent, si le pire est derrière nous, pour évi- valeurs communes, mais où, en outre, elle et de haine ne sont plus là, la vigilance ter qu’il ne soit devant nous, l’engagement porte au monde un témoignage de la dure reste cependant nécessaire contre toute conscient est nécessaire, et la Résistance réalité subie et de l’engagement nécessaire dérive. Les problèmes à résoudre sont plus dans des situations extraordinaires reste qu’elle appelle. D’où la volonté de laisser nombreux et complexes, entre autres un exemple d’engagement au-delà de soi- des documents, ces photos de parce qu’ils se sont pas toujours accessi- même qui n’est jamais évident, quand Sonderkommandos, mais aussi des dessins bles à notre esprit. Néanmoins l’éloigne- s’accumulent les difficultés ou les facilités. (alors que le papier et un quelconque ment des tensions et des préoccupations C’est un choix qui est toujours actuel et moyen d’écriture sont quasiment introu- ne sont pas la seule cause d’un désintérêt indispensable et dont la profondeur n’a vables), légués à la postérité. Mais il y a pour un engagement politique qui fut rien à voir avec le milieu car il n’a rien de également des tentatives de communica- moteur pour la Résistance, il faut en fait déterminé. tion immédiate, grâce à quelques radios revenir à la problématique de départ, qui artisanales, qui ouvraient la Résistance sur fait passer du statut de bête passive à résis- Jean Bernard

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LIVRES

La Flamme de la Résistance Qu’ont donc en commun la capitale de la France, celle du Dauphiné, un village du Vercors, la plus grande métropole de Bretagne et une petite île du Finistère ? Avoir été honorés par la plus rare et la plus prestigieuse décoration française de la Seconde Guerre mondiale : la croix de la Libération. Aujourd’hui, ces communes portent témoignage pour les générations futures de leur combat, des crimes commis par l’occupant nazi et le régime de Vichy et des hauts faits qui leur ont valu d’être nommées compagnon de la Libération ainsi que 1 038 hommes et femmes et 18 unités combattantes. De l’exécution des « 50 otages » à Nantes à la libération de Paris, du ralliement collectif des Sénans au général de Gaulle, des coups d’éclat des combattants de l’ombre à Grenoble au drame du Vercors, huit historiens, spécialistes de ces années sombres, nous livrent des synthèses historiques de haut niveau. Leur récit, émaillé de plus de 200 illustrations, dont plusieurs inédites, porte aussi sur la mémoire de cette époque dramatique qui s’est construite dès la fin de l’Occupation, à Nantes, Grenoble, Paris, Vassieux-en-Vercors et sur l’île de Sein. Au moment où les derniers compagnons disparaissent, les uns après les autres, l’oubli serait une seconde mort, encore plus cruelle. C’est pourquoi, à partir du 16 novembre 2012, le Conseil national des communes « Compagnon de la Libération » assurera la pérennité de la mémoire de l’ordre de la Libération. Ce livre officiel rend hommage aux compagnons de la Libération et à tous ceux, résistants, déportés et combattants de la Seconde Guerre mondiale, qui ont participé à la Libération de la France. Ce livre adresse un message d’espoir et de paix à notre jeunesse, mais aussi au monde, pour que ne s’éteigne pas « la flamme de la Résistance ». Vladimir Trouplin, coauteur et directeur de ce livre, est historien et conservateur du musée de l’ordre de la Libération depuis douze ans. Membre du conseil scientifique du musée du Général Leclerc de Hauteclocque et de la Libération de Paris et du musée Jean Moulin (Ville de Paris), il a collaboré au Dictionnaire de Gaulle (Robert Laffont, 2006) et au Dictionnaire de la France Libre (Robert Laffont, 2010). Il est l’auteur du Dictionnaire des compagnons de la Libération (Elytis, 2010).

La Flamme de la Résistance Les 5 communes compagnon de la Libération Vladimir Trouplin (dir.), Jean-Pierre Bois, Olivier Cogne, Jean-Claude Duclos, Pierre-Louis Fillet et Céline Hoeffler, Christine Levisse-Touzé et Serge Ribault

Le Cherche Midi, 15 novembre 2012

       





 

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LIVRES

Pierre Denis, Français libre et citoyen du monde Le 20 juin 1940, Pierre Denis (1883-1951) embarque à Biscarosse, avec René Pleven, Emmanuel Mönick et Robert Marjolin, à bord de l’hydravion affrété par Jean Monnet pour rejoindre Londres. Qu’est-ce qui, dans ses origines familiales, son parcours personnel, a pu déterminer cet ancien normalien de 57 ans, agrégé d’histoire et de géographie, à tenter l’aventure de la France Libre ? Né dans une famille d’intellectuels protestants, il étudie à l’École normale supérieure, rue d’Ulm, et passe l’agrégation d’histoire, avant d’obtenir, en 1906, une bourse « Autour du monde » financée par la Fondation Albert Kahn, qui lui permet d’étudier l’évolution de la grande culture moderne et de la petite culture traditionnelle en Italie, en Tunisie, en Libye, au Brésil, en Argentine, dans les Antilles, aux États-Unis, où il donne une série de conférences à l’université John Hopkins de Baltimore pour l’Alliance française, puis, renonçant à son trajet initial, qui devait l’emmener aux Philippines, aux Indes, à Ceylan, aux Mascareignes et en Afrique du Sud, se dirige vers le Pérou. De retour en France, il enseigne un an au lycée de Bar-le-Duc (1909-1910), avant d’obtenir un poste de chargé de cours à l’université de Buenos Aires, où il prépare une thèse de géographie sur la mise en valeur de l’Argentine, qu’en raison de la Grande Guerre, il ne soutient qu’en 1920. Rentré en France pour s’engager en août 1914, il combat dans l’infanterie, avant de rejoindre, en avril 1915, le front d’Orient, à Salonique, où il sert dans le renseignement. Après la guerre, son chemin bifurque. Mis à la disposition du ministère du commerce afin de préparer les clauses économiques des traités de paix, il se lie avec Jean Monnet. Faute de pouvoir retourner en Argentine, et après un bref passage par l’université de Strasbourg, il devient l’adjoint de Paul Mantoux à la section politique du secrétariat général de la Société des Nations (SDN) puis chef de cabinet de Monnet, secrétaire général adjoint. Dans ces fonctions et au-delà, il participe au règlement de la question de la Haute-Silésie et à la stabilisation de la monnaie de plusieurs pays d’Europe centrale et orientale. En décembre 1926, nouvelle bifurcation, il démissionne de la SDN pour se lancer dans les affaires, à la suite de Monnet, comme secrétaire général du bureau parisien de la banque Blair & Co puis comme associé et directeur du bureau parisien de la firme Monnet, Murnane & Co. Mobilisé à sa demande en septembre 1939, il est détaché au cabinet du ministre de l’air, avant de rejoindre son ami Roger Auboin, secrétaire général du Comité des programmes et des achats alliés, puis Monnet, qui préside le Comité de coordination franco- britannique. À Londres en juin 1940, au contraire de Monnet, et plus immédiatement que Pleven, Denis choisit, parmi les tous premiers, de rallier le général de Gaulle, même s’il conservera jusqu’au bout des liens d’amitié avec son ancien patron. Chargé des finances de la France Libre, il crée en décembre 1941, avec René Cassin, la Caisse centrale de la France Libre, qu’il installe dans les territoires ralliés d’Afrique et du Proche-Orient. Appelé à Alger après la formation du Comité français de libération nationale (CFLN) en juin 1943, il retrouve Monnet, qui le prend à son service au Commissariat au ravitaillement, avant de retourner aux Finances comme attaché financier de la délégation française à Londres. S’il doit renoncer à la Caisse centrale de la France Libre, devenue Caisse centrale de la France d’outre-mer, il en devient le directeur honoraire en 1944, avant de présider son conseil de surveillance. Après un bref séjour en septembre-octobre 1944, au cours duquel il retrouve les siens, dont il a été séparé durant quatre longues années, il rentre en France en juillet 1945 et participe en 1946 aux travaux du Commissariat au Plan, confié à Monnet par le général de Gaulle. Dans le même temps, il préside de 1945 à 1951 la Société d’études et réalisations industrielles, agricoles et commerciales (SÉRIAC), qui a pour but de stimuler et de coordonner les initiatives et les intérêts privés, au moment de l’accession à l’indépendance de la Syrie et du Liban, et en 1948 la délégation française à la 1re session de la Commission économique pour l’Amérique latine (CEPAL), organisation régionale créée par le Conseil économique et social des Nations unies (ECOSOC) afin de promouvoir le développement économique et le progrès social. L’après-guerre est également pour lui un retour à l’écriture, même si ses travaux de géographe et d’économiste laissent désormais la place à des récits de souvenirs (Souvenirs de la France Libre et Les Métiers et les jours) et à un roman d’anticipation à caractère autobiographique (Les Apprentis sorciers). Cet ouvrage biographique a le mérite de mettre en lumière Pierre Denis, un homme austère et sérieux, qui a élevé le travail au niveau des vertus cardinales, un patriote sans chauvinisme et un citoyen du monde, figure de la SDN et de la France Libre, volontiers bougon, mais non dénué d’humour, avare de confidences et plutôt porté à demeurer dans l’ombre, mais dont l’action fut plus d’une fois décisive. Agrégé d’histoire et de géographie et ancien directeur des Études et recherches à la Fondation Charles de Gaulle, Philippe Oulmont a également publié De Gaulle (2008), Larminat, un fidèle hors série (2008) et Les 18 Juin, enjeux et commémorations (2010). Il est membre du conseil scientifique de la Fondation de la France Libre. Pierre Denis, Français libre et citoyen du monde : Entre Monnet et de Gaulle Philippe Oulmont Nouveau Monde Éditions, novembre 2012, 470 p., 25 € - Disponible à la Fondation à partir de janvier 2013

AVIS À NOS ABONNÉS Sauf avis contraire de notre part, les ouvrages faisant l’objet d’un compte-rendu dans notre revue ne sont pas disponibles à la vente à la Fondation de la France Libre.

20 l Décembre 2012 • N° 46 19-21_Livres:- 4/12/12 10:54 Page 21

LIVRES

Prix littéraire de la Résistance 2012 Le prix littéraire de la Résistance a été décerné, à l’unanimité, le 6 septembre dernier à Jean-Mathieu Boris, ancien de Bir Hakeim et délégué de la Fondation dans les Hauts-de-Seine (sous-délégation de Boulogne-Billancourt), pour son ouvrage autobiographique, Combattant de la France Libre (Éditions Perrin).

Le lauréat a reçu son prix des mains du président du jury, M. Yves Guéna, ancien président du Conseil constitutionnel, de la Fondation Charles de Gaulle et de la Fondation de la France Libre, le 6 novembre, dans les salons de Boffrand, au Palais du Luxembourg, à l’issue de l’assemblée générale du Comité d’Action de la Résistance.

Créé en 1948 par le Comité d’Action de la Résistance, le prix littéraire de la Résistance a été attribué pour la première fois en 1952, avant de devenir annuel en 1963. Il récompense les ouvrages significatifs consacrés à l’histoire de la Résistance et de la Déportation.

La rédaction Aide Aidez-nousz-nousàcompléter à compléter la la l listeiste des des Français Français Libres Libres

Le 18 juin 1940, le général de Gaulle lance son Appel Si vous disposez de renseignements pouvant améliorer historique, fondateur de la France Libre. De cette son contenu, vous êtes cordialement invités à les com- date jusqu’à la clôture des engagements dans les muniquer à Stéphane Longuet, responsable actuel de la Forces françaises libres, le 31 juillet 1943, quelque liste, à l’adresse suivante : 54 000 volontaires s’engagent sous l’étendard à croix de [email protected] Lorraine. Vous pouvez également nous transmettre les éléments Depuis des années, Henri Écochard, ancien des Forces à votre disposition à l’adresse postale suivante : françaises libres, se consacre à l’établissement d’une liste recensant ces 54 000 Français Libres. Cette liste a été mise en ligne sur Internet en 2005, afin de permettre Fondation de la France Libre à des contributeurs éventuels de l’aider à la compléter. Liste des Français Libres 59 rue Vergniaud Vous pouvez la consulter sur les sites de la Fondation de la France Libre (www.france-libre.net) et de la Fondation 75013 Paris Charles de Gaulle (www.charles-de-gaulle.org). Cette lilissteestencoreincomplète.teestencoreincomplète. La rédaction

ABONNEMENT - ABONNEMENT - ABONNEMENT - ABONNEMENT ABONNEZ-VOUS A LA REVUE DE LA FONDATION DE LA FRANCE LIBRE Mme,Mlle, M. : ...... Adresse :...... Code Postal : ...... Ville : ...... Ì Désire s’abonner à la revue de la Fondation de la France Libre pour 1 an (4 numéros) Ì Désire offrir l’abonnement à la revue de la Fondation de la France Libre pour 1 an (4 numéros)

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Décembre 2012 • N° 46 l 21 22_In memorial:- 11/12/12 12:48 Page 22

IN MEMORIAM

Jean-François milieu des jardins d’Eysines (banlieue bordelaise). Pour ce sauvetage il a reçu d’Autheville une décoration militaire allemande. C’était une belle conclusion pour un Jean-François d’Autheville, spahi des ancien combattant de la 2e DB. Forces françaises libres, s’en est allé rejoindre ses compagnons sur le chemin Jean-Joseph Laborde de l’au-delà. Le 16 août, au temple du Haa, une nom- breuse assemblée d’amis et d’anonymes Roland de La Poype entourait la famille de Jean-François. Il Né le 28 juillet 1920 aux Pradeaux (Puy- avait cinq enfants. Le culte était présidé de-Dôme), le comte Roland Paulze d’Ivoy par Mme Valérie Mali, pasteur au temple de La Poype est le fils d’un ingénieur agro- du Haa. nome, colonel de réserve tué à l’ennemi Pendant la prédication, le pasteur en mai 1940. Galeran, ancien aumônier militaire de la Le 5 décembre 1939, le jeune étudiant, qui région Aquitaine rappela l’engagement du se passionne pour l’aviation depuis ses médecin au service des autres après avoir études chez les Jésuites au Mans, s’engage Roland de La Poype (coll. Amicale des FAFL). combattu dans les rangs de la 2e DB. Ses pour la durée de la guerre au bataillon de nombreuses décorations, en particulier la l’air 131, installé dans la Sarthe. Élève 15 appareils ennemis, et même deux dans croix de guerre, la croix de combattant pilote à l’École élémentaire de pilotage une seule journée le 14 et le 16 octobre. volontaire de la Résistance, la médaille de d’, il obtient son brevet et le grade Après une permission en France, au début la France Libre, posées devant le cercueil de caporal en février 1940. de 1945, celui qui a été fait « héros de recouvert de l’emblème tricolore rappe- Passé à l’École principale d’aviation l’Union soviétique » avec son camarade laient son engagement dans les Forces d’Étampes en mars, il décide de rallier , reçoit le commandement françaises libres en Juin 1943 à Sabratha, l’Angleterre, après avoir entendu l’Appel de la 1re escadrille et le grade de capitaine. en Tripolitaine. Le drapeau de la 2e DB du 18 Juin, et embarque avec les troupes Lors de la Victoire, après un bref séjour à accompagnait cette cérémonie. polonaises sur l’Ettrick à Saint-Jean-de- Moscou, avec les autres survivants du Les cantiques, les prières, prononcées par Luz le 24 juin. régiment, il rentre en France, arrivant au Mme Valérie Mali, tout cela était empreint Débarqué à Plymouth, il s’engage dans les Bourget le 20 juin 1945. Titulaire de de ferveur et de fidélité à la mémoire Forces aériennes françaises libres. Promu 10 citations à l’ordre de l’armée de l’air et huguenote. sergent le 1er août 1940, il sert en qualité de 2 citations à l’ordre de l’aviation de En juin 1943, avec sa famille au Maroc, de mitrailleur du groupe réservé de bom- chasse, il totalise 1 200 heures de vol et a Jean-François veut rejoindre les Forces bardement n° 1 (GRB 1) lors de reçu, comme les autres pilotes, françaises libres qui ont combattu en l’expédition de Dakar et de la campagne l’autorisation de Staline de ramener son Tripolitaine, au Fezzan, en Tunisie et du Gabon. Yak en France. viennent d’être regroupées près de Tripoli. De retour en Grande-Bretagne en no- Après une affection au 2e bureau de l’état- Sa mère est d’accord, mais d’abord il faut vembre, il s’entraîne dans les écoles de major de l’armée de l’air en mars 1946, qu’il passe son bac. C’est fait. pilotage de la Royal Air Force à Odiham en Roland de La Poype quitte l’armée en 1947 Il se promène dans les rues de Casa et est février 1941, Sywell en avril et Ternhill en pour se consacrer à l’agriculture, en qua- intrigué par deux jeunes militaires, en juillet, avant de suivre les cours de lité de propriétaire de fermes modèles et short et chemise kaki, coiffés d’un l’Operationnal Training Unit de Llandow d’éleveur, et à l’industrie, à la tête de la superbe calot rouge. Ce sont deux spahis (Pays-de-Galles), en octobre. Société d’études et d’applications du de la Colonne Volante des Forces fran- Affecté en février 1942 au 602 Squadron plastique, inventant le berlingot des çaises libres, en mission au Maroc. Jean- « City of Glasgow » au sud de Londres, il shampooings Dop et la carrosserie de la François les accoste et leur demande effectue une soixantaine de missions Citroën Méhari. Élu, de 1959 à 1971, maire comment rejoindre les FFL. Rendez-vous d’escorte de bombardiers pendant six de Champigné (Maine-et-Loire), où il crée pris pour le lendemain. Pas de perte de mois, comme adjoint du Squadron Leader un golf, il est également le fondateur temps, quelques affaires dans un sac à . Promu aspirant en mars, du parc animalier et d’attractions dos. Il ne sera pas en retard au rendez- il endommage un Messerschmitt 109 le Marineland d’Antibes en 1970. vous. Un camion est là. Il y a d’autres gar- 13 avril et en abat un autre le 22 août. Membre du conseil de l’ordre de la çons candidats au départ. En route, en Après la mort de Paddy Finucane, abattu Libération depuis septembre 2002, il est passant sur les routes les plus directes le 15 juillet 1942, il se porte volontaire décédé à Saint-Tropez (Var) le 23 octobre pour arriver à Sabratha, en Tripolitaine. Il pour rejoindre le groupe de chasse n° 3 2012. Il a été inhumé à Trept (Isère). s’engage aussitôt dans le RMSM, qui sera « Normandie », qui doit se constituer au Il était grand croix de la Légion d’honneur, e un des régiments de la 2 DFL. Enfin, la Levant avant de rejoindre le front russe. compagnon de la Libération par décret du 2e DB est formée et il participera à tous les Après un périple par l’Afrique noire, 29 décembre 1944, héros de l’Union sovié- combats jusqu’à la Victoire. l’Égypte et Téhéran, il arrive à Astrakan, tique, titulaire de la croix de guerre 1939- Sur la route de Paris, en août 1944, un fin novembre, avec le premier contingent 1945 avec 12 citations, de la croix de aumônier protestant offre une bible à du groupe. Volant sur un Yak avec le grade guerre tchécoslovaque, ainsi que de Jean-François. Cette bible de sous-lieutenant, il est pilote chef de diverses distinctions soviétiques : l’ordre l’accompagnera jusqu’à ce 10 août 2012. patrouille, avant de prendre le comman- du Drapeau rouge, l’ordre de Lénine, le La guerre finie, il entreprend des études dement en second de la 1re escadrille du Mérite de la guerre pour la Patrie et l’ordre en médecine. Médecin de ville, il est aussi groupe en octobre 1943 et d’être promu de la Victoire. médecin conseil du gaz de Bordeaux et lieutenant en décembre. Engagé dans En 2007, il avait publié, en collaboration des pompiers. Il a l’occasion d’extraire et les batailles d’Orel, de Briansk, d’Ielna, avec Jean-Charles Stasi, ses mémoires soigner deux aviateurs de l’armée de l’air de Smolensk, de Vitebsk, d’Orcha, de sous le titre : L’Épopée du Normandie- allemande, dont l’avion s’est crashé au Borissov, de Minsk et du Niemen, il abat Niémen.

22 l Décembre 2012 • N° 46 23_Carnet:- 4/12/12 11:00 Page 23

CARNET

DÉCÈS

AJACCIO Cervoni DEMUYTER Jean, MIZRAHI Salvator (CCI 2, 1re DFL), e re (13 DBLE, 1 DFL), le 30 juin 2012 à Roscanvel (29) le 28 janvier 2012 à Paris (75) le 22 février 2011 à Bastia (20) DENIZARD Marcel (BM5, 1re DFL), PENGUILLY Jacques Le Bel de AUTHEVILLE Jean-François d’ (BCRA), (2e DB), le 27 novembre 2011 à Tergnier (02) le 10 août 2012 à Bordeaux (33) le 16 octobre 2012 DESCOMBES Bernard (FNFL), à Saint-Samson-sur-Rance (22) BARRÈRE Pierre (BCRA), le 27 juin 2012 à Toulon (83) en juillet 2012 PERIOU Mme (veuve de Louis, DEVILLE Odette (épouse de CCI 4, 1re DFL), BENOIST Jacques, re Claude, 1 DFL), en octobre 2012 le 9 octobre 2012 le 25 novembre 2012 à La Garenne-Colombes (92) BOUDREAU Angèle, DEYZAC Jean, PERRENX Gilbert, épouse Théault (FNFL), le 20 octobre 2012 à Saint-Pierre le 7 février 2012 en octobre 2012 (975) GIBELLINI Jules, REGEOLE Louis, re BOULAIS Roger (1 DFL), le 24 octobre 2012 le 29 octobre 2012 en novembre 2011 à Saint-Malo (35) GIRARD Raymond, SALEM Daniel, BOURDAIS Louis (FAFL), le 20 septembre 2012 le 21 avril 2012 à Londres (Royaume-Uni) le 20 octobre 2012 à Christchurch HERRY Louis (train, 1re DFL), (Dorset, Angleterre) le 14 octobre 2012 SOURDIN Jean-Pierre (FNFL), COELENBIER Jacques (1er RFM, le 9 octobre 2012 à Berry e 1re DFL), LAPLÉNIE Claude (2 DB), (New South Wales, Australie) le 18 octobre 2012 à Toulon (83) le 30 septembre 2012 SPORÉNO Joseph, CROISY Marc (transmissions, LA POYPE Roland de (FAFL), le 8 juin 2012 à Cagnes-sur-Mer 1re DFL), le 23 octobre 2012 à Saint-Tropez (06) le 16 septembre 2011 à Lisieux (14) (83) er re CROISY Mme (veuve de Marc), TAOUSS Raymond (1 RA, 1 DFL), MAILLARD René, le 5 juin 2012 à Plaisir (78) le 30 octobre 2012 à Courbevoie en novembre 2012 (92) DARDARD Roger, en janvier 2012 MARIOTTI Ambroise VILLANOVA François (1re DFL), (103e compagnie auto, 1re DFL), DAUDON Alfred, le 7 août 2012 le 16 juillet 2012 à Bastia (20) en mars 2011 WOIRIN Jean (FAFL), DEHEZ Marc, MAROLLEAU Raphaël (FAFL), le 27 juillet 2012 à Neuilly-sur-Seine en janvier 2010 le 20 octobre 2012 (92)

Légion d’honneur : Palmes Académiques : Grand officier : Daniel Cordier Chevalier : colonel (ER) Jacques Joly Chevalier : Philippe Rambach

Décembre 2012 • N° 46 l 23 24-26_Delegations:- 4/12/12 11:31 Page 24

DANS LES DÉLÉGATIONS

Finistère ayant vécu et participé à cette bataille qui regroupé de nombreux participants, fut en réalité une victoire et a été un tour- maires ou leurs représentants, présidents Douarnenez nant dans la guerre en 1942. d’associations et leurs drapeaux, famille À l’entrée de cette place a été érigée une du général de Gaulle (famille Maillot), stèle portant le nom de Bir Hakeim, sur Français Libres et délégués de la laquelle figure la plaque offerte par la Fondation, ainsi que la fanfare des Fondation de la France Libre, qui rappelle sapeurs pompiers de l’Hérault. l’histoire de ce fait d’armes de la La plaque commémorant le 70e anniver- Deuxième Guerre mondiale. saire de la bataille de Bir Hakeim a Une exposition réalisée par la Fondation été dévoilée par Mme Theule-Bacquet, de la France Libre et l’ONAC s’est tenue Française Libre. dans le hall de la mairie du 6 juillet au Le rond-point « Bir Hakeim » se situe près 9 août 2012. Elle a été mise en place par de la médiathèque d’Agglomération « La Michel Balannec, adjoint au maire et délé- Gare », à l’extrémité de l’avenue du géné- gué au patrimoine, fils d’un ancien FNFL, ral de Gaulle et côtoyant sa stèle souvenir. par Louis Briens et Louis Hénaff, délégués Gérard Verdanet de la Fondation secteur Douarnenez. Louis Briens Lot-et-Garonne

Hérault Villeneuve-sur-Lot Inauguration du rond-point Bir Hakeim et « Voilà la 68e plaque Bir Hakeim dans le commémoration de la disparition du département que je fais poser. C’est le général de Gaulle à Pignan le 10 novembre département en France qui en possède le 2012. plus » explique en confidence Francis Ruffier-Monet qu’il n’est plus besoin de Le 6 juillet 2012 à Douarnenez, inauguration de la présenter. place et de la plaque. « Et à chaque fois que j’assiste à une inau- L’inauguration de la place Bir Hakeim à guration comme celle-là, je ne peux m’em- Douarnenez a eu lieu le vendredi 6 juillet pêcher de penser à tous mes camarades qui à 11 heures en présence du colonel (h) sont tombés là-bas » continue-t-il, des Fred Moore, chancelier de l’ordre de la sanglots dans la voix. Libération, de M. Jean-Jacques Brot, pré- C’est l’année du 70e anniversaire de la fet de Finistère, du général Pontbriand, bataille de Bir Hakeim que la municipalité représentant le général Royal, comman- de Villeneuve-sur-Lot a décidé d’honorer dant la région de défense Centre-Ouest, le souvenir de ce haut fait d’armes des du sénateur-maire Philippe Paul, d’Alexis Dévoilement de la plaque. Forces françaises libres, en procédant à Le Gall, ancien de la 1re DFL, du colonel l’inauguration de la rue Bir-Hakein au Stéphane Bras, commandant la gendar- lotissement « Le Clos de Massanès ».À merie départementale, des capitaines cette occasion, une plaque commémo- Orefice et Pogeant, des conseillers géné- rant cette bataille, offerte par la Fondation raux Erwan Le Floch et Didier Guillon, des de la France Libre a été dévoilée. généraux (cr) Duguet et Le Bot, de nom- breux maires du secteur, de personnalités locales, des présidents et membres des associations d’anciens combattants de Douarnenez et de la région avec leur dra- Le rond-point Bir Hakeim. Au second plan, la plaque peau, dont celui de la France Libre du Bir Hakeim à droite et le monument signalant secteur, du directeur départemental de l’avenue du général de Gaulle (« inaugurée le l’ONAC, M. Stéphane Marec, de nom- 21 décembre 1990 par Pierre Messmer ancien breux amis et familles d’anciens FFL, dont Premier ministre ») à gauche. celle de Paul Édouard Paulet, héros de Bir Hakeim disparu dans le torpillage du Nino Afin de rester fidèle au devoir de mémoire, Bixio au large des côtes italiennes, et aussi une cérémonie a été organisée à Pignan le une délégation de l’île de Sein et de deux 10 novembre 2012. C’est par une matinée fils de compagnons, Roger Guillaumet et radieuse que cette cérémonie a regroupé Régis Vallée. deux évènements : l’inauguration du Après l’allocution de M. le sénateur-maire rond-point « Bir Hakeim » et une commé- Philippe Paul, Alexis Le Gall a retracé l’his- moration de la disparition du général de torique de la 1re brigade de la France Libre Gaulle. du général Kœnig face aux Germano- Ces évènements étaient présidés respecti- italiens de Rommel dans le désert de vement par Mme Cassar, maire de Pignan, Libye. Puis M. le chancelier Fred Moore a et M. Georges Fontès, ancien ministre des rappelé l’héroïsme de plusieurs jeunes anciens combattants. Cette cérémonie a La plaque offerte a été dévoilée (photo DDM, FP).

24 l Décembre 2012 • N° 46 24-26_Delegations:- 4/12/12 11:31 Page 25

DANS LES DÉLÉGATIONS

Trémons C’est sous un beau soleil et en présence Pour la commémoration du 70e anniver- des autorités civiles et militaires que nous saire de cette bataille de Bir Hakeim, l’un avons commémoré le ralliement à la baie des hauts faits de guerre de notre histoire, de l’Orphelinat. Marie-Thérèse Pouchou, maire de la com- La cérémonie a débuté par la diffusion du mune, et Francis Ruffier-Monet, observa- « Chant des marais » puis le lieutenant de teur d’artillerie au cours de la Seconde vaisseau François-Xavier Madec, com- Guerre mondiale, ancien de la première mandant du patrouilleur La Moqueuse, a division française libre et, aujourd’hui, remis à chaque FNFL un bachi d’honneur délégué départemental de la Fondation orné du bandeau FNFL. de la France Libre, ont dévoilé la plaque Nos marins coiffés, ce fut la levée des cou- commémorant cette bataille, près du leurs et un grand moment d’émotion pour monument aux morts. nos anciens de voir flotter le pavillon

FNFL dans le ciel calédonien. De gauche à droite, MM. Courtot, Lucien, Goujon, Vint l’évocation du ralliement et l’hom- Bon, Betfort, Tiburzio et Mme Ignatieff, devant le mage posthume à notre dernier compa- monument FNFL de la Nouvelle-Calédonie. gnon de la Libération, M. Jean Tranape, dont la sœur, Mme Mignard-Tranape, cement, l’exécution des travaux néces- nous a fait l’honneur et l’amitié de repré- saires à l’édification de celui-ci, ainsi que senter son frère en exposant sa croix de la pour le financement du cocktail, le capi- Libération. taine de vaisseau Bruno Jeannerod, com- Puis ce fut le moment tant attendu par mandant de la base navale de Nouméa, nos marins de la France Libre. Ils allaient pour le don des bachis de nos anciens, la enfin avoir un monument où venir se mise à disposition du carré des officiers et recueillir et un témoignage de leur his- la réalisation du buffet, le lieutenant de toire et de leur engagement au service de vaisseau François-Xavier Madec, com- Francis Ruffier-Monet, Jean-Pierre Lorenzon et mandant de La Moqueuse, et son équi- Marie-Thérèse Pouchou (photo DDM). la France Libre et de son chef le général de Gaulle. page pour la constitution du piquet d’honneur et pour la présence de son L’éloge de nos marins accompli, M. Fred Marie-Thérèse Pouchou rappelait que « le fanion, M. Éric Minocchi, participant de la Fichet, notre sculpteur, dévoila son œuvre courage, la détermination des combattants Fondation, à l’origine de la création de ce re et nous vîmes apparaître un marin scru- de la 1 brigade française libre commandée monument, et enfin M. Fred Fichet, notre tant l’horizon avec des jumelles, rappe- par le général Kœnig ont contribué à une sculpteur, qui a fait preuve de dévoue- lant ainsi le rôle majeur de nos FNFL calé- victoire complète face à l’Afrika Korps du ment et d’un grand enthousiasme dans la doniens dans la surveillance des côtes du général Rommel et ses Panzers, barrant réalisation de notre projet. ainsi la route vers un point stratégique par territoire. Michel Mourguet excellence pour l’ennemi ». Un dépôt de gerbe effectué par Vice-président « Un virage dans l’histoire de la Deuxième MM. Courtot et Tiburzio, la Sonnerie aux Guerre mondiale », dira Jean-Pierre morts et la Marseillaise des chœurs de Lorenzon. « Le moment où, avec courage, l’armée française ponctuaient cette céré- ténacité, abnégation, on peut renverser des monie suivie d’un cocktail au carré des Pyrénées-Orientales montagnes et tenir tête à des bataillons dix officiers de la base navale. fois plus nombreux. Bir Hakeim a démontré Nous tenons dans ces lignes à remercier la Le samedi 22 septembre dernier, le géné- aux yeux du monde que l’armée française gouvernement de la Nouvelle-Calédonie ral Robert Bresse, président de la pouvait se sortir d’une situation désespérée, et son président, M. Harold Martin, parti- Fondation, faisait l’honneur de sa pré- pouvait redevenir conquérante et qu’il fal- cipant de la Fondation, qui nous a octroyé sence au département et à la ville de lait désormais compter avec elle ». la subvention nécessaire à la réalisation Canet-en-Roussillon. Jean-Claude Gouget, député, Jean-Pierre de ce monument, la mairie de Nouméa et Lorenzon, conseiller général, des maires son maire, M. Jean Lèques, participant de et des élus du canton, le général Vilain, la Fondation, pour la cession de l’empla- président du comité du Villeneuvois des membres de la Légion d’honneur, des pré- sidents d’associations d’anciens combat- tants et la population assistaient à cet évé- nement : une plaque offerte par Francis Ruffier-Monet au nom de la Fondation de la France Libre. Extraits de La Dépêche du Midi Les drapeaux et une partie de l’assistance.

Nouvelle-Calédonie En effet, c’est son ami et camarade de 72e anniversaire du ralliement de la régiment Bernard Dupont, maire de Nouvelle-Calédonie à la France Libre et Canet, qui l’invitait à inaugurer le monu- inauguration du monument des FNFL ment dédié au 70e anniversaire de la calédoniens. Mme Mignard-Tranape. bataille de Bir Hakeim. C’est sur proposi-

Décembre 2012 • N° 46 l 25 24-26_Delegations:- 11/12/12 12:50 Page 26

DANS LES DÉLÉGATIONS

Seine-Saint-Denis Toulon-Var Le 16 septembre 2012, par un temps clé- ment, a eu lieu une brillante cérémonie de commémorations à la mairie puis au cime- tière des Lilas, devant une nombreuse assistance et de hautes personnalités. Après une commémoration du 70e anni- versaire de la rafle du Vélodrome d’Hiver, à travers la lecture d’une lettre par une élève de lycée et l’allocution de M. François Szulman, co-président de l’UEVACJEA, un Le général Robert Bresse et le colonel André Salvat. hommage vibrant a été rendu aux Français Libres pour le 70e anniversaire de la tion du conseil municipal qu’il a été bataille de Bir Hakeim. Claude Duprez, décidé de l’ériger sur la commune. délégué départemental de la Fondation, a Notre président commença une longue prononcé une allocution, suivi par Daniel journée par une visite du Centre départe- Guiraud, maire des Lilas et vice-président mental de Mémoire à Perpignan. L’après- du conseil général de Seine-Saint-Denis, midi, c’est sous le soleil catalan que la et Claude Bartolone, président de cérémonie de dévoilement a eu lieu, en l’Assemblée nationale. présence de nombreux drapeaux, de la Ensuite s’est formé un cortège, précédé Au monument aux morts, place Charles de Gaulle du population canetoise, d’officiers de la pro- par les drapeaux des différentes associa- Beausset. motion de Saint-Cyr « Bir Hakeim », du tions d’anciens combattants et de la colonel André Salvat, grand croix de la musique des Lilas. Il a rejoint le cimetière Les cérémonies du 11 novembre, hono- Légion d’honneur, compagnon de la communal, où la plaque en mémoire des rant tous les morts pour la France, se sont Libération, héros de Bir Hakeim, d’élus, combats de Bir Hakeim a été dévoilée par placées, dans l’aire toulonnaise, sur la de représentants, des armées, de la gen- M. le préfet de Seine-Saint-Denis, mise en avant de la jeunesse. darmerie, des pompiers et d’une forte Christian Lambert, MM. Daniel Guiraud, Des gerbes ont été remises à Toulon, au délégation de présidents d’associations Claude Bartolone et Claude Duprez. nom de la Fondation de la France Libre, patriotiques. Claude Duprez par Morgan Maginot, étudiant de 21 ans C’est au théâtre Jean Piat que le général en master droit représentant les lauréats Robert Bresse prononça, devant 300 per- au jury varois du concours de la sonnes, une conférence débat sur : « les Résistance et de la Déportation, accompa- grandes démocraties dans la seconde gné d’un jeune garçon élève en maternelle guerre mondiale », donnant lieu à de nom- de cinq ans, Vincent Guiol. Sur la com- breux échanges, entre le public et le mune du Beausset, la gerbe de notre fon- conférencier. dation fut remise par un groupe composé d’élèves de maternelle, M. Noah Magnaldi, À l’issue, le maire remit la médaille de la de primaire, Mlle Maélys Deltour, de col- ville, aux anciens combattants de la lège, Mlle Emma Derougemont et de sa Deuxième Guerre mondiale, résidant à sœur lycéenne Gaelle Derougemont. Canet. Comme dans le Roussillon tout se Un devoir scolaire sur les deux guerres termine bien, c’est avec un verre de mus- Au cimetière, dévoilement de la plaque. De gauche à mondiales fut l’occasion de mêler pra- cat de Rivesaltes que s’est terminée cette droite, Pascal Charpentier de La Rochemacé, direc- tique et histoire pour la lycéenne pour la belle journée. teur départemental de l’ONAC, Christian Lagrange, maire adjoint à la sécurité et aux anciens combat- compréhension des deux terribles tants, Claude Duprez, Claude Bartolone, Daniel guerres mondiales. Lieutenant-colonel Marc Gervais Guiraud, Christian Lambert et le colonel Dominique Délégué des Pyrénées-Orientales Giraud, représentant les armées. Michel Magnaldi Appel à contributions Héritière de la Revue de la France libre, organe de l’Association des Français libres de 1946 à 2000, Fondation de la France libre publie des articles consacrés à l’histoire de la France libre, de son chef, le général de Gaulle, de ses membres et des ses combats, jusqu’à la victoire de 1945. Longtemps organe de la mémoire française libre, la revue se veut aujourd’hui un relais entre cette mémoire, la recherche scientifique et la vulgarisation de la connaissance historique. Les auteurs désireux d’y contribuer doivent adresser leurs propositions d’articles : à l’adresse électronique suivante : [email protected] ou par courrier postal à : Fondation de la France Libre 59 rue Vergniaud 75013 Paris.

26 l Décembre 2012 • N° 46 27_Chez nos Amis:- 12/12/12 10:36 Page 27

CHEZ NOS AMIS

Le Conseil national des communes Fédération « Compagnon de la Libération » Nationale des Anciens Le 16 novembre 2012, le soixante-douzième anniversaire de la création de l’ordre de la Libération a été l’occasion d’une cérémonie de transfert de l’ordre au Conseil national des Missions des communes « Compagnon de la Libération » prévu par la loi du 26 mai 1999. Extérieures-OPEX

21e édition de l’opération Colis de soutien aux soldats français en opération extérieure

Le colonel (h) Fred Alors que les troupes françaises ont Moore, dernier chancelier amorcé leur désengagement du conflit de l’ordre national et afghan, presque 3 000 soldats français se premier délégué national trouvent toujours en opération au cœur du conseil national des de celui-ci, plus fortement exposés à communes « Compagnon de la Libération ». mesure que moyens et matériels mili- Crédit photo : Sylvain Cornil-Frerrot taires sont également rapatriés.

a journée a commencé à 9h30 par Moore, chancelier de l’ordre de la Par delà ce conflit, ce sont également 3 000 une présentation de l’ordre, dans Libération, a décrit la volonté à l’origine autres soldats qui œuvrent en notre nom Lles salons de l’Hôtel de Ville. Après de ce transfert et le processus qui en a au Tchad, au Liban, en Côte d’Ivoire, au un échange d’Hubert Germain, compa- rendu la réalisation possible. Kosovo, en République centrafricaine, au gnon de la Libération et ancien ministre, large de la Somalie, dans le golfe de Cette présentation a été accompagnée de Guinée, etc., et les tensions actuelles lais- Vladimir Trouplin, conservateur du la diffusion d’une évocation historique sent présager l’investissement plus impor- musée de l’ordre de la Libération, et sur les communes « Compagnon de la tant de nos armées au Moyen-Orient dans Michel Anfrol sur les valeurs de l’ordre les temps à venir. Aussi lançons-nous la 21e Libération », réalisée par Daniel Charpentier de la Libération, une « chevalerie excep- édition de l’opération Colis de soutien aux et projetée lors de la cérémonie du 68e anni- tionnelle, créée au moment le plus grave soldats français en opération extérieure : versaire de la Libération de Paris, mais de l’histoire de France, fidèle à elle- aussi d’un extrait du film amateur tourné Collecte de tous les messages de soutien même, solidaire dans le sacrifice et dans  à Paris en août 1944 par Charles Duduy, (cartes postales, lettres, poèmes, dessins…). la lutte » suivant les propres mots du commenté par Christine Levisse-Touzé, Collecte des dons pour l’achat de produits général de Gaulle, le colonel (h) Fred  directrice du Musée du Général Leclerc et du terroir, la confection des colis et le transport de la Libération de Paris et du Musée Jean de ceux-ci aux bénéficiaires. Chaque colis contient une entrée, un plat et un dessert, de Moulin de la Ville de Paris. petits gâteaux ou des chocolats, une lettre, une carte ou un dessin, une revue Infos extérieures, un courrier explicatif et la carte du parrain de ce colis libellée à son adresse, permettant au 15 heures, était organisée dans la militaire de le remercier, s’il le souhaite, s’il le cour d’honneur de l’Hôtel national peut. Àdes Invalides une prise d’armes  Appel à tous les volontaires pour diffuser rassemblant des détachements des unités l’opération Colis autour d’eux, en mairie, dépar- « Compagnon de la Libération », ainsi que tement, région, auprès des médias (mise à dispo- Patrick Rimbert, maire de Nantes, Michel sition d’affiches, de dépliants, etc.).

Crédit photo : CCH Chatard-DICOD Destot, maire de Grenoble, Bertrand Vous pouvez envoyer vos chèques, Les drapeaux des unités « Compagnon de la Delanoë, maire de Paris, Michel Repellin, libellés à l’ordre de FNAME colis, Libération » en forme de croix de Lorraine. maire de Vassieux-en-Vercors, Jean-Pierre à l’adresse suivante : Kerloc’h, maire de l’Île de Sein, sous la présidence de M. le Premier ministre, FNAME Colis Jean-Marc Ayrault, qui était accompagné 178, rue Garibaldi 69003 Lyon du chancelier de l’ordre de la Libération, Tél : 04 78 95 45 du ministre de la défense, Jean-Yves Le Courriel : [email protected] Drian, et du ministre délégué aux anciens Site : www.fname.info combattants, Kader Arif. Vous pouvez également effectuer nfin, à 17 heures, l’ouvrage La un virement à : Flamme de la Résistance : Les cinq FNAME Colis communes de la Libération, publié Crédit photo : Sylvain Cornil-Frerrot E Banque Populaire Loire et Lyonnais Le Premier ministre, Jean-Marc Ayrault, accompagné sous la direction de Vladimir Trouplin, au 13907 00000 00111746114. du ministre de la défense, Jean-Yves Le Drian, du Cherche Midi, a fait l’objet d’une présen- ministre délégué aux anciens combattants, Kader tation officielle à l’auditorium Austerlitz Laurent Attar-Bayrou Arif, et du gouverneur militaire de Paris, le général du musée de l’Armée, en présence d’une Hervé Charpentier, dans la cour d’honneur des Président national FNAME-OPEX Invalides. partie des auteurs.

Décembre 2012 • N° 46 l 27 28_La vie au Club:- 12/12/12 10:29 Page 28

LA VIE AU CLUB

Les dîners ESSEC : Sir Winston Churchill

e dîner organisé par l’ESSEC le 27 septembre dernier, qui a réuni une bonne cinquantaine de convives, a été placé L sous le patronage de Sir Winston Churchill. En premier lieu, parce que la photographie de Sir Winston trône en bonne place dans la galerie des figures tutélaires de la Fondation, ce qui situe donc toutes les manifestations organisées à la FFL sous la surveillance de cet illustre homme d’État. Mais aussi parce que l’invité d’honneur de la soirée, le journaliste Olivier de Lagarde, outre les émissions qu’il présente quotidiennement à la radio ou à la télévision, préside actuellement le club Churchill qui réunit chaque mois des personnalités des médias, de la haute administration, des affaires et des arts. Et enfin parce que Jérôme Aubert, directeur général de la société Belrive, a présenté le fameux MB Churchill. Il était donc fort logique pour Daniel Chenain, maître de la cérémonie, de régaler les convives d’un florilège de citations de Sir Winston Churchill, bien choisies par ses soins. La soirée a été en outre l’occasion de fêter le départ vers de nouvelles aventures de François Hautekeur, œnologue chez Veuve Clicquot Ponsardin à Reims depuis le printemps 2004, qui va quitter la France pour rejoindre le Brésil. Il était accompagné de sa charmante future épouse, Adriana Chaves Borges. Les participants les ont chaudement félicités, en souvenir notamment des merveilleux flacons que François leur a fait découvrir depuis plusieurs années, de son talent de conteur (tout le monde avait en mémoire son récit de la découverte et de la dégustation des bouteilles de champagne de la mer Baltique à l’été 2010) et de sa passion communicative pour les grands vins.

L’équipe de restauration de la Fondation de la France Libre a été félicitée par F. du Repaire, Jérôme Aubert, D. Desjardins, François l’ensemble des convives. Hautekeur, Adriana Chaves Borges, Olivier de Lagarde, Daniel Chenain

Demain au Club Samedi 26 janvier 2013 Déjeuner-débat avec Jacques Sapir, économiste et historien, à l’occasion de la sortie de 1941-1942 : et si la France avait continué la guerre…, deuxième volume de l’uchronie (genre littéraire imaginant le déroulement de l’histoire si tel ou tel événement ne s’était pas produit) qu’il a dirigée avec Frank Stora et Loïc Mahé, aux éditions Tallandier. Cartes de vœux 2013 Au seuil de l’année 2013, la Fondation € vous propose ses cartes de vœux. (port compris) 15le paquet de 10 cartes Pour toute commande, veuillez retourner le bon ci-dessous, accompagné du chèque correspondant à l’ordre de : et enveloppes. « Fondation de la France Libre »

Mme/Mlle/M. : ……………………………………………………………………………………

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Désire recevoir ……………...... paquet(s) de 10 cartes de vœux 2013.

Je joins, à cet effet, un chèque de : ………………………………………………………... euros.

Fondation de la France Libre – 59 rue Vergniaud – 75013 PARIS

28 l Décembre 2012 • N° 46 CVN46:- 11/12/12 12:05 Page 3

Dans l’un des derniers lieux emblématiques à Paris, leClub de la France Libre organise vos déjeuners et dîners, réunions et séminaires ...

PARKING

- Ouvert tous les jours pour déjeuner - Le soir sur réservation à partir de 25 personnes

Fermeture : dimanche et lundi

Club de la France Libre - 59 rue Vergniaud 75013 PARIS – tél : 01 53 62 81 81 Contact groupe : tél : 01 53 62 81 83 – fax : 01 53 62 81 80 – e-mail : [email protected] CVN46:- 11/12/12 12:04 Page 4

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