« Si L'amour Physique Apportait Le Bonheur... »
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charles IX l’édItO de FraNçOIs MItterraNd « sI Je ne reproche pas à la pornographie la vérité de ses images mais le mensonge de ses mythes. l’aMOur La fable d’un bonheur qui naîtrait de la science du geste et du pittoresque des situations me désole. La physIque main d’Alissa qui, dans La Porte étroite, se détache de celle de Jérôme, parce qu’au haut de la route, ils appOrtaIt ont chaud, me raconte mieux ce qu’est l’amour que la mimique de La Bête de Borowczyk honorant sa le bONheur... » partenaire. Si l’amour physique, les jeux et les puis- sances du corps apportaient le bonheur, je veux dire cet état qui prête à l’espèce humaine le sentiment de découvrir un secret de la vie, par là-même justifiée, on n’aurait pas attenduEmmanuelle pour le savoir. Au contraire de l’ordinateur, quand il marche, cette machinerie sexuelle poncée, huilée, déodorée qui consiste, selon les films porno, à joindre d’ingénieuse façon les pièces éparses d’un « Meccano » – toujours les mêmes, quelles que soient l’imagination du scénario et la bonne volonté des acteurs, désespérément peu nombreuses, ce qui borne d’autant la variété des figures – ne restitue pas à ceux qui l’in- terrogent les données qu’on lui a fournies. Il manque toujours une réponse. « Cette amoureuse pieuvre faite de jambes et de bras » que chante Cocteau, croire qu’on l’aura inventoriée quand on aura décompté le nombre de combinaisons qu’elle relève d’un grossier contresens. N’exagérons pas cependant les méfaits de la pornographie en tant que phénomène social. Elle n’est après tout que le produit d’une société marchande dont la morale consiste à servir en toute chose ses intérêts. Le porno rapporte, vive le porno ! Mais on voit ses limites. Je m’inquiète davantage de la drogue de More et de la violence d’Orange mécanique. Au bout du « toujours plus » la déchéance et la mort guettent. L’argument que les professionnels du cinéma tirent du succès des films pornographiques vaut ce qu’il vaut : en boudant pas leur plaisir les spectateurs prouvent la réalité du besoin. Est-ce suffisant pour laisser faire ? Non, mille fois non. Le dressage minutieux, sous les yeux d’un public record, d’O violentée, lacérée et le sexe SourceS : L’ABEILLE ET L’ARCHITECTE, annelé, rappelle trop qu’au jardin des supplices il FlaMMarION, 1978 n’est pas d’autre fleur que le sang. — 3 renseignements généraux je t'aime moi non pluS P. 6 graine de Star P. 26 raPhaëlle Bacqué journaliste au monde Politologue à 17 ans politburo P. 16 l'interview d'un charleS P. 32 andré santini Par anne le strat pour qui votez-vouS ? P. 20 franz-olivier giesBert PATRICE NORMAND PATRICE © 5 Charles reNseIgNeMeNts géNérauX Je t’aiMe MOi nOn PLUS raPhaëLLe Bacqué « Hollande ferait un très bon rédacteur en chef » Depuis plus de quinze ans, le nom de raphaëlle Bacqué est accolé de manière indissociable à celui du journal Le Monde. après des débuts – entre autres – à l’aFP, au Parisien et à Marianne, la journaliste a disséqué avec sa plume l’ensemble de la classe politique française, depuis l’agonie de la mitterrandie jusqu’aux années Hollande. elle livre un constat cruel et amusé sur un milieu fait de grandeur, parfois, et de petitesses, souvent. propos recueillis par olivier Faye portraits Yannick labrousse 7 Charles reNseIgNeMeNts géNérauX raPhaëLLe Bacqué Le Masque roMain de Jacques cHirac, De VillePin, mitterranD L’eMMuré de L’éLysée un « fou » au PaLais Le premier souvenir marquant de ma carrière de Chirac était un cas particulier : on pouvait le voir pendant Villepin, lui, est très volcanique. Il pouvait chercher à 1997, Villepin, qui poussait journaliste politique, c’est d’avoir rencontré une heure et il ne disait rien d’important. J’ai couvert vous intimider, jouer la comédie pour vous séduire ou en faveur de cette décision, François Mitterrand. C’était son dernier 14 son septennat à l’Élysée, entre 1995 et 2002. J’avais vous impressionner. Il se levait, s’asseyait, parlait en a testé l’idée auprès de jour- juillet à l’Élysée, en 1994. Il était déjà très été trompée par la biographie écrite par Franz-Olivier martelant ses phrases, avec une façon très particulière de nalistes pour voir comment affaibli par son cancer, avec un teint jaune Giesbert, en 1988, qui racontait un Chirac extraordi- scander ses mots. Vous aviez l’impression d’être devant la presse le prendrait. J’ai su et cireux et cette peau fine sur l’ossature naire, drôle, épique, un véritable Cyrano. Or, quand je un acteur, il joue ce qu’il dit, c’est un spectacle. Cela m’a après coup qu’il avait donné qui dessinait une espèce de masque l’ai rencontré, je n’ai vu qu’un homme emmuré dans son toujours beaucoup amusé de le décrire dans mes papiers. ce jour-là trois rendez-vous romain très particulier. Ce jour-là, palais, qui ne disait rien sinon des banalités, soumis à une Et, en même temps, il y avait toujours quelque chose successifs à trois journa- Alain Delon était l’un des hôtes de équipe de communicants dirigée par sa fille et qui prenait d’un peu fêlé chez lui, d’un peu fou, ce qui fait que je ne le listes différents : Anne Fulda marque de la garden party. Et parmi mille précautions pour donner une information parfai- prenais pas vraiment au sérieux. Anna Cabana a d’ailleurs du Figaro, Gilles Bresson de les 3 000 autres invités, Alain Delon tement anodine. Et, pendant ce temps-là, Dominique écrit un livre sur lui qui s’appelle Villepin : La Verticale du Libération, et moi, qui était à comme Mitterrand, dans deux genres très de Villepin (alors secrétaire général de l’Élysée – NDLR) fou. C’est à cause de cet aspect de sa personnalité que j’ai l’époque au Parisien. Auprès différents, possédaient une sorte d’aura, jouait un rôle théâtral pour occuper la scène. Il a fallu commis un des plus gros ratages de ma carrière. de chacun d’entre nous, à l’antique. Il se formait comme un cercle chroniquer le rien, l’impuissance, ce qui est un exercice de Lorsque le président Chirac a envisagé la dissolution en il a évoqué l’hypothèse autour d’eux. Ils étaient comme deux fauves. style intéressant. de la dissolution. Ce qui L’un, Alain Delon, encore très beau, acteur légendaire Chirac est un homme qui en a vu d’autres, donc ce n’était paraissait le plus attendu, et magnifique du cinéma. L’autre, Mitterrand, tout petit pas un mauvais papier du Monde qui pouvait le blesser. Il à l’époque, c’était plutôt un et incroyablement diminué par son cancer, dégageant ne faut pas se surestimer. En tout cas, il n’appelait jamais remaniement et le renvoi pourtant une force impressionnante, qui était bien sûr pour se plaindre. De temps à autre, par représailles, je d’Alain Juppé. J’ai donc trouvé cette hypothèse dingue. Je liée à ce qu’on savait de lui et de son mythe. n’étais pas invitée avec mes confrères à un petit briefing me souviens de lui avoir dit tout de suite : « Vous prenez un J’étais une journaliste trop inexpérimentée, trop jeune « off », mais cela n’avait pas beaucoup d’importance parce risque incroyable de perdre les élections alors que vous avez pour parler à Mitterrand, je n’étais rien. Je l’ai donc sim- qu’il y a mille autres façons d’obtenir des informations la majorité. Personne ne comprendra que vous le fassiez. » plement regardé. Aujourd’hui, n’importe qui aborde et beaucoup de conseillers, de proches de Chirac, conti- Sur le moment, j’ai eu un raisonnement cartésien. Donc, n’importe qui. Mais, à l’époque, cela ne se faisait pas. Mit- nuaient à me parler. dans mon papier du lendemain, j’ai simplement écrit que terrand était marmoréen, on aurait dit une statue flottant Toutefois, je réalise maintenant qu’à l’époque, j’étais trop la dissolution était une hypothèse parmi d’autres. Gilles dans l’air. Seuls quelques journalistes triés sur le volet, jeune pour comprendre un homme de son âge. Lorsque je Bresson, lui, a fait la une de Libé en disant : « Chirac va les grands noms de l’époque, Ivan Levaï, Alain Duhamel, relis ce que j’écrivais, ce n’est pas mauvais, il y a de l’infor- dissoudre. » Bresson était un confrère formidable, intelli- Pierre Favier de l’AFP, etc., étaient d’ailleurs invités à mation, mais il manque de la finesse psychologique. Tout gent et drôle. Il avait vingt ans de plus que moi et donc venir prendre place autour de lui dans un des petits salons simplement parce que c’est difficile pour une jeune femme la supériorité de l’expérience. Il savait que le journalisme du rez-de-chaussée. C’était vraiment la cour du Roi Soleil. de 30 ans d’écrire sur une personne qui en a le double et « Chirac était un cas consiste aussi à prendre au mot vos interlocuteurs et non Beaucoup d’entre eux avaient d’ailleurs des liens étroits a donc bien plus vécu que vous. Surtout sur un homme particulier : on pouvait à raisonner à leur place. Moi, je me disais « Il y a un fou avec Mitterrand, certains même étaient militants. Ivan aussi compliqué à saisir que Chirac, qui se livre assez à l’Élysée. » Mais le fou prend quand même des décisions. Levaï en 1981 avait quand même participé à l’écriture peu, dont la culture est cachée et qui se présente sous les le voir pendant une heure Ce qui est important, c’est au moins de les rapporter à du discours de victoire dans l’auberge du Vieux Morvan, dehors d’un type indécis et sans relief.