LE BULLETIN DE L’ARORY

Yonne numéro 12 - mai 2004 - 3€ Mémoire40/44

Sommaire INTRODUCTION par Jean Rolley La libre, les Alliés, Ce numéro est consacré au soixantième par la Résistance de l’ dans la et la Résistance intérieure / anniversaire du débarquement en bataille engagée sur les plages de pages 1, 2, 3, par Jean Rolley. Normandie, qui sera l’occasion de reve- Normandie, comment elle participe aux nir sur ce moment décisif. Après les événements, dans le cadre de l’action des La participation alliée à désillusions de l’automne 1943, les rudes armées alliées, au cours du mois de juin l’action militaire de la Résistance de l’Yonne / coups portés par les Allemands, les 1944. Il n’est pas question ici de pré- pages 4, 5, par Joël Drogland. effets des bombardements alliés sur le tendre présenter un tableau exhaustif, moral de la population, la mise en place mais simplement de montrer comment Les parachutages dans de l’Etat milicien, voici venu enfin le les actions des résistants de l’Yonne ont l’Yonne en juin et début moment tant attendu du Débarquement. leur place dans la bataille qui s’engage juillet 1944 / pages 6, 7, par ❚ Claude Delasselle. Nous essayons de montrer la part prise pour la libération du territoire. La mise en application du plan Vert dans l’Yonne / pages 8, 9, par Claude Delasselle. La France libre, les Alliés, La stratégie d’insurrection nationale dans le département de l’Yonne / pages 9, à 11, par Joël Drogland. et la Résistance intérieure La stratégie du responsable C’est au cours du mois de janvier 1944, quand le débarquement a été militaire de Libération-Nord décidé, que les Alliés, et d’abord les Anglais, ont changé d’attitude vis à vis de l’Yonne en juin 1944 / pages 12, 13, par Jean Rolley. de la Résistance. Le responsable du Service national maquis, Brault, alias Jérôme, rencontre Churchill ; il semble avoir réussi à le convaincre de la Avec le Débarquement, la croissance rapide des nécessité d’aider la Résistance, et de lui fournir plus d’armes en particulier. maquis de l’Yonne /pages 14 Le 27 janvier, une réunion a lieu autour de Churchill ; d’autres suivent au à 18, par Joël Drogland. cours du mois de février. Juin 1944 : les Allemands Quel rôle pour la Résistance ? ne veut évidemment pas dire « action attaquent les maquis / pages 18 à 20, par Thierry Roblin. Mais ceci ne règle pas la question concer- généralisée », comme le préconise le PCF. nant le rôle, et la part que doit prendre la Il y a une concurrence très forte entre Résistance dans les combats de la de Gaulle et les mouvements pour la Libération. Cette question est bien sûr direction des forces militaires de la essentielle, car la place de la Résistance Résistance. Jean Moulin avait commencé déterminera, en partie au moins, le retour , à rassembler les forces de la Résistance Yonne ou non, à la souveraineté dans la France derrière de Gaulle, mais sa disparition 40/44 d’après la Libération, et quelles seront les gèle en partie ce processus, même si Mémoire forces en mesure de l’exercer. Depuis l’hi- théoriquement toutes les opérations doi- Bulletin de l’Association pour la Recherche sur l’Occupation et ver 1943-44 les données ont profondé- vent se déclencher sur l’ordre personnel la Résistance dans l’Yonne. Directeur de publication : C. Delasselle ment changé, avec la poussée des maquis du général de Gaulle. Celui-ci sait bien Rédacteur en chef : J. Rolley (afflux des réfractaires), et la pression des que sa capacité à diriger, et contrôler, les Iconographie : A. Fouanon Coordination : T. Roblin mouvements. forces de la Résistance est déterminante Graphisme et réalisation : F. Joffre Arory, 2002. Photos : D.R. Cette situation nouvelle conduit à dire : dans son bras de fer avec les Alliés. site internet : www.arory.com e-mail : [email protected] « l’action militaire doit être maintenant Au printemps 1944, quand le Débarquement Centre de documentation : le but principal de la Résistance. » ; cela approche, l’opposition porte sur « l’in- 15 bis, rue de la Tour d’Auvergne > 89000 Tél. / fax : 03 86 48 23 68. Yonne numéro 12 - mai 2004 Mémoire JUIN 44

>surrection nationale » dont de Cela ne veut pas dire que de Gaulle Rochet ; ce dernier accepte de renon- avec ce qu’a signé de Gaulle le 16 Gaulle parle le 18 avril 1944 ; il l’es- ne voulait pas « d’insurrection » cer à l’appel à l’insurrection immé- mai précédent, bien sûr avec ce qu’il time « inséparable de la libération En annexe de l’instruction du 16 diate. Cet accord n’est pas sans déclare le lendemain. Les Anglais, nationale ». Le 5 mai, à un mois du mai, figurent quelques phrases de arrières pensées, car le PCF laisse les en accord avec Eisenhower, veulent débarquement, un message du Bureau Clausewitz sur « l’insurrection mains libres à la direction clandesti- ruser avec les Allemands, en semant Central de Renseignement et d’Action populaire contre l’ennemi, après le ne du parti, qui pourra prendre des le doute jusqu’au dernier moment indique : « …qu’il importe pour le soulèvement de la Prusse de 1813 », gages sur le terrain. sur le lieu du Débarquement. Non succès de nos plans que ne se et ce n’est pas un hasard. De Gaulle seulement les plans Vert et Violet déclenche en France ni insurrection ne veut certes pas d’un soulèvement Le Débarquement sont mis en œuvre, mais des opéra- générale, ni soulèvement partiel, ni le jour J, qui serait sans doute écra- Une semaine avant le Débarquement, tions de libération sont lancées dans grève générale. » Ce message semble sé dans le sang. Il voit l’action mili- le 30 mai 1944, l’état-major certaines régions ( le PCF agit dans contradictoire avec la déclaration de taire en technicien, il veut contrôler d’Eisenhower a donné son accord à ce ). de Gaulle ; il est très mal compris en l’action armée de la Résistance. la nomination de Koenig comme France, où beaucoup pensent à Mais de Gaulle est un politique, et commandant en chef des FFI, recon- Comment réagissent le « l’insurrection nationale » ( non c’est de ce point de vue qu’il veut naissant par là même l’autorité fran- Gouvernement Provisoire de la seulement le PCF, bien sûr, mais utiliser le soulèvement populaire, çaise sur la Résistance militaire, et République Française et les FFI ? aussi les Mouvements Unis de la tout en le limitant, en le contrôlant. son contrôle. Son état-major inclura Dès le 10 juin, devant l’importance Résistance…). Une grande partie de Il veut ainsi mettre les Alliés devant des représentants anglais et améri- des représailles, Koenig envoie ce télé- la Résistance intérieure pensait que le fait accompli, accréditer l’idée des cains, responsables en particulier du gramme : « Ordre du général Koenig. l’insurrection serait dirigée par le Français se libérant eux-mêmes, ravitaillement des FFI. Ce comman- Freinez maximum activité guérilla. Conseil National de la Résistance et faire reconnaître sa légitimité ; mais dement est effectif à compter du 6 Stop. Impossible vous ravitailler la Commission d’Action Militaire. il veut aussi maintenir l’alliance juin. Au milieu du mois de juin, il a actuellement en armes et en muni- communiste, et contrôler le PCF, le statut de tout commandant allié, tions en quantité suffisante. Stop. Du côté de la France libre, on se pré- connaissant les ambitions de ce der- dépendant directement d’Eisenhower. Rompre partout contact dans mesu- pare à une action militaire, mais pas nier. Ceci permet à l’adjoint de Koenig, re du possible pour permettre phase à un soulèvement Dans le courrier qu’envoie d’Astier Zieler, alias Vernon, d’obtenir des de réorganisation. Stop. Evitez gros Depuis 1943, les services secrets le 29 mai 1944, l’insurrection est Américains des parachutages de rassemblements. Formez petits français préparaient le Débarquement envisagée dans des limites très pré- jour ; le premier a lieu le 25 juin : groupes isolés. » dans une perspective bien différente, cises, très encadrées ; elle doit se ter- 176 sorties de forteresses volantes Le 12 juin, le GPRF s’adresse aux celle de l’efficacité technique, en miner avec l’arrivée du premier sol- qui larguent 2077 containers. résistants : « Partout la France se accord avec les Anglais. Ces der- dat allié, et la mise en place des Le 6 juin, quelques heures après les soulève contre l’Allemand [..] Déjà niers attendent de la Résistance fonctionnaires du Comité Français premières opérations de débarque- vous avez fait pencher la bataille. qu’elle retarde, ne serait-ce que de de Libération Nationale ; elle ne ment, de Gaulle fait une allocution à Mais ne vous y jetez pas tous 48 heures la concentration des doit excéder trois ou quatre jours, la radio de Londres ( où il est arrivé ensemble à moins d’être menacés, ne Le Courrier de l’Air du 10 février 1944. forces allemandes dans la phase ini- Archives privées : M. Caré. de la Résistance française », envoyée à 48 heures si c’est possible ; il ajoute : d’Alger, et s’est violemment opposé vous rassemblez pas trop tôt. Ne pas- tiale du Débarquement. tous les responsables militaires « il serait extrêmement grave que à Eisenhower et Churchill ). Il y sez pas trop vite d’une guérilla de C’est dans cette perspective qu’est régionaux clandestins. Cette ins- l’insurrection nationale n’aît pas déclare aux Français qu’ils doivent : harcèlement à la bataille ouverte. » créé à la fin de 1943 le « Bloc voies ferrées, le plan Violet, visant truction ignore « l’insurrection lieu et qu’elle ne soit pas relative- « suivre les ordres de l’autorité fran- Et le 17 juin, Koenig lance le mot Planning », dirigé par le colonel les lignes téléphoniques souterraines nationale », et met en avant une ment généralisée. Mais elle doit être çaise qualifiée », ne pas se lancer d’ordre de « guérilla insaisissable ». Combeaux, assisté d’un Tchèque, le allemandes à longue distance. Le « conception purement militaire, dirigée et, pour éviter tout risque de dans une « insurrection prématurée », capitaine Mischke. Il est chargé de Bloc Planning » a prévu un volet technicienne, des opérations pour la surenchère, elle doit rester entre les enfin que « l’administration appartient Ceci montre bien comment les préparer un plan rationnel de parti- guérilla, devant mettre en œuvre Libération. mains des Comités Départementaux à l’autorité française ». choses ont été complexes, avec des cipation de la Résistance au succès 70 000 hommes. Il a été prévu de De Gaulle, quant à lui, adopte ces de Libération, contrôlés autant que En réalité, à ce moment, de Gaulle positions bien différentes. de la stratégie alliée. Mischke imagi- constituer six « réduits », dont le vues, indiquant que le Débarquement possible par le CNR. » ne peut être entendu, ses consignes Interviennent de Gaulle, et la France ne un scénario du Débarquement, Morvan, d’où partiraient des opéra- ne doit pas être le signal de « l’in- Cette ligne rencontre des difficultés, sont même mal reçues. En effet, la libre, qui essaient d’exister sur le en trois phases : la bataille côtière, tions sur le flanc ou les arrières alle- surrection nationale », qu’aucune d’un côté avec les Britanniques, qui veille, la BBC a passé 210 messages plan politique et militaire face aux devant durer cinq jours, la bataille mands. action de masse ne doit avoir lieu ne veulent pas entendre parler d’action ( cela dure seize minutes !) Alliés ; ils s’appuient pour cela sur la de création de la tête de pont, Le « Bloc Planning » déconseille de avant le déploiement des armées « d’insurrection nationale », mais destinés aux forces FFI, aux réseaux Résistance intérieure, traversée par devant durer de quatre à six recruter trop d’hommes ( seulement alliées sur le territoire français. aussi avec les communistes. Mais, et groupes sous contrôle anglais ; ils des contradictions sur le long et le semaines, la bataille de la ceux qui peuvent être équipés et Il signe le 16 mai 1944 une dans ce dernier cas, malgré l’appel ordonnent d’appliquer tous les court terme. La période qui com- Libération, devant durer de quatre à armés ), et demande de fragmenter « Instruction concernant l’emploi lancé de Moscou par M. Thorez le plans dans toute la France, non seu- mence avec le Débarquement est six mois ; ce scénario est présenté les maquis en petites unités mobiles. de la Résistance sur le plan militaire 18 mai 1944, appel à la mobilisa- lement de sabotages, mais aussi de bien sûr décisive.❚JEAN ROLLEY dans un rapport du « Bloc Planning » Tout ceci est approuvé par les au cours des opérations de libéra- tion de toute la population, à la passage à la guérilla. du 20 janvier 1944. Sont également Anglais, et l’état-major allié, ce qui tion. » Les mots « insurrection », et grève générale, à la prise de contrô- Cet appel qui vient des Anglais Sources : ce travail s’est largement appuyé sur le livre de Jean-Louis Crémieux-Brilhac, La France libre, élaborés plusieurs plans de sabo- se traduit le 31 mars 1944 par une « insurrection généralisée » n’y figu- le des bâtiments publics, un accord semble contradictoire avec les pro- Gallimard, 1996, et sur celui de Daniel Cordier, La tages, dont le plan Vert, visant les « Instruction sur l’action militaire rent pas. est trouvé à Londres avec Waldeck- jets du « Bloc Planning », mais aussi République des catacombes, Gallimard, 1999. 2 3 Yonne numéro 12 - mai 2004 Mémoire JUIN 44

>surrection nationale » dont de Cela ne veut pas dire que de Gaulle Rochet ; ce dernier accepte de renon- avec ce qu’a signé de Gaulle le 16 Gaulle parle le 18 avril 1944 ; il l’es- ne voulait pas « d’insurrection » cer à l’appel à l’insurrection immé- mai précédent, bien sûr avec ce qu’il time « inséparable de la libération En annexe de l’instruction du 16 diate. Cet accord n’est pas sans déclare le lendemain. Les Anglais, nationale ». Le 5 mai, à un mois du mai, figurent quelques phrases de arrières pensées, car le PCF laisse les en accord avec Eisenhower, veulent débarquement, un message du Bureau Clausewitz sur « l’insurrection mains libres à la direction clandesti- ruser avec les Allemands, en semant Central de Renseignement et d’Action populaire contre l’ennemi, après le ne du parti, qui pourra prendre des le doute jusqu’au dernier moment indique : « …qu’il importe pour le soulèvement de la Prusse de 1813 », gages sur le terrain. sur le lieu du Débarquement. Non succès de nos plans que ne se et ce n’est pas un hasard. De Gaulle seulement les plans Vert et Violet déclenche en France ni insurrection ne veut certes pas d’un soulèvement Le Débarquement sont mis en œuvre, mais des opéra- générale, ni soulèvement partiel, ni le jour J, qui serait sans doute écra- Une semaine avant le Débarquement, tions de libération sont lancées dans grève générale. » Ce message semble sé dans le sang. Il voit l’action mili- le 30 mai 1944, l’état-major certaines régions ( le PCF agit dans contradictoire avec la déclaration de taire en technicien, il veut contrôler d’Eisenhower a donné son accord à ce sens ). de Gaulle ; il est très mal compris en l’action armée de la Résistance. la nomination de Koenig comme France, où beaucoup pensent à Mais de Gaulle est un politique, et commandant en chef des FFI, recon- Comment réagissent le « l’insurrection nationale » ( non c’est de ce point de vue qu’il veut naissant par là même l’autorité fran- Gouvernement Provisoire de la seulement le PCF, bien sûr, mais utiliser le soulèvement populaire, çaise sur la Résistance militaire, et République Française et les FFI ? aussi les Mouvements Unis de la tout en le limitant, en le contrôlant. son contrôle. Son état-major inclura Dès le 10 juin, devant l’importance Résistance…). Une grande partie de Il veut ainsi mettre les Alliés devant des représentants anglais et améri- des représailles, Koenig envoie ce télé- la Résistance intérieure pensait que le fait accompli, accréditer l’idée des cains, responsables en particulier du gramme : « Ordre du général Koenig. l’insurrection serait dirigée par le Français se libérant eux-mêmes, ravitaillement des FFI. Ce comman- Freinez maximum activité guérilla. Conseil National de la Résistance et faire reconnaître sa légitimité ; mais dement est effectif à compter du 6 Stop. Impossible vous ravitailler la Commission d’Action Militaire. il veut aussi maintenir l’alliance juin. Au milieu du mois de juin, il a actuellement en armes et en muni- communiste, et contrôler le PCF, le statut de tout commandant allié, tions en quantité suffisante. Stop. Du côté de la France libre, on se pré- connaissant les ambitions de ce der- dépendant directement d’Eisenhower. Rompre partout contact dans mesu- pare à une action militaire, mais pas nier. Ceci permet à l’adjoint de Koenig, re du possible pour permettre phase à un soulèvement Dans le courrier qu’envoie d’Astier Zieler, alias Vernon, d’obtenir des de réorganisation. Stop. Evitez gros Depuis 1943, les services secrets le 29 mai 1944, l’insurrection est Américains des parachutages de rassemblements. Formez petits français préparaient le Débarquement envisagée dans des limites très pré- jour ; le premier a lieu le 25 juin : groupes isolés. » dans une perspective bien différente, cises, très encadrées ; elle doit se ter- 176 sorties de forteresses volantes Le 12 juin, le GPRF s’adresse aux celle de l’efficacité technique, en miner avec l’arrivée du premier sol- qui larguent 2077 containers. résistants : « Partout la France se accord avec les Anglais. Ces der- dat allié, et la mise en place des Le 6 juin, quelques heures après les soulève contre l’Allemand [..] Déjà niers attendent de la Résistance fonctionnaires du Comité Français premières opérations de débarque- vous avez fait pencher la bataille. qu’elle retarde, ne serait-ce que de de Libération Nationale ; elle ne ment, de Gaulle fait une allocution à Mais ne vous y jetez pas tous 48 heures la concentration des doit excéder trois ou quatre jours, la radio de Londres ( où il est arrivé ensemble à moins d’être menacés, ne Le Courrier de l’Air du 10 février 1944. forces allemandes dans la phase ini- Archives privées : M. Caré. de la Résistance française », envoyée à 48 heures si c’est possible ; il ajoute : d’Alger, et s’est violemment opposé vous rassemblez pas trop tôt. Ne pas- tiale du Débarquement. tous les responsables militaires « il serait extrêmement grave que à Eisenhower et Churchill ). Il y sez pas trop vite d’une guérilla de C’est dans cette perspective qu’est régionaux clandestins. Cette ins- l’insurrection nationale n’aît pas déclare aux Français qu’ils doivent : harcèlement à la bataille ouverte. » créé à la fin de 1943 le « Bloc voies ferrées, le plan Violet, visant truction ignore « l’insurrection lieu et qu’elle ne soit pas relative- « suivre les ordres de l’autorité fran- Et le 17 juin, Koenig lance le mot Planning », dirigé par le colonel les lignes téléphoniques souterraines nationale », et met en avant une ment généralisée. Mais elle doit être çaise qualifiée », ne pas se lancer d’ordre de « guérilla insaisissable ». Combeaux, assisté d’un Tchèque, le allemandes à longue distance. Le « conception purement militaire, dirigée et, pour éviter tout risque de dans une « insurrection prématurée », capitaine Mischke. Il est chargé de Bloc Planning » a prévu un volet technicienne, des opérations pour la surenchère, elle doit rester entre les enfin que « l’administration appartient Ceci montre bien comment les préparer un plan rationnel de parti- guérilla, devant mettre en œuvre Libération. mains des Comités Départementaux à l’autorité française ». choses ont été complexes, avec des cipation de la Résistance au succès 70 000 hommes. Il a été prévu de De Gaulle, quant à lui, adopte ces de Libération, contrôlés autant que En réalité, à ce moment, de Gaulle positions bien différentes. de la stratégie alliée. Mischke imagi- constituer six « réduits », dont le vues, indiquant que le Débarquement possible par le CNR. » ne peut être entendu, ses consignes Interviennent de Gaulle, et la France ne un scénario du Débarquement, Morvan, d’où partiraient des opéra- ne doit pas être le signal de « l’in- Cette ligne rencontre des difficultés, sont même mal reçues. En effet, la libre, qui essaient d’exister sur le en trois phases : la bataille côtière, tions sur le flanc ou les arrières alle- surrection nationale », qu’aucune d’un côté avec les Britanniques, qui veille, la BBC a passé 210 messages plan politique et militaire face aux devant durer cinq jours, la bataille mands. action de masse ne doit avoir lieu ne veulent pas entendre parler d’action ( cela dure seize minutes !) Alliés ; ils s’appuient pour cela sur la de création de la tête de pont, Le « Bloc Planning » déconseille de avant le déploiement des armées « d’insurrection nationale », mais destinés aux forces FFI, aux réseaux Résistance intérieure, traversée par devant durer de quatre à six recruter trop d’hommes ( seulement alliées sur le territoire français. aussi avec les communistes. Mais, et groupes sous contrôle anglais ; ils des contradictions sur le long et le semaines, la bataille de la ceux qui peuvent être équipés et Il signe le 16 mai 1944 une dans ce dernier cas, malgré l’appel ordonnent d’appliquer tous les court terme. La période qui com- Libération, devant durer de quatre à armés ), et demande de fragmenter « Instruction concernant l’emploi lancé de Moscou par M. Thorez le plans dans toute la France, non seu- mence avec le Débarquement est six mois ; ce scénario est présenté les maquis en petites unités mobiles. de la Résistance sur le plan militaire 18 mai 1944, appel à la mobilisa- lement de sabotages, mais aussi de bien sûr décisive.❚JEAN ROLLEY dans un rapport du « Bloc Planning » Tout ceci est approuvé par les au cours des opérations de libéra- tion de toute la population, à la passage à la guérilla. du 20 janvier 1944. Sont également Anglais, et l’état-major allié, ce qui tion. » Les mots « insurrection », et grève générale, à la prise de contrô- Cet appel qui vient des Anglais Sources : ce travail s’est largement appuyé sur le livre de Jean-Louis Crémieux-Brilhac, La France libre, élaborés plusieurs plans de sabo- se traduit le 31 mars 1944 par une « insurrection généralisée » n’y figu- le des bâtiments publics, un accord semble contradictoire avec les pro- Gallimard, 1996, et sur celui de Daniel Cordier, La tages, dont le plan Vert, visant les « Instruction sur l’action militaire rent pas. est trouvé à Londres avec Waldeck- jets du « Bloc Planning », mais aussi République des catacombes, Gallimard, 1999. 2 3 Yonne numéro 12 - mai 2004 Mémoire > La participation allié e JUIN 44

La Résistance icaunaise a bénéficié dès le lendemain du Débarquement de Normandie de plusieurs de résistance puissamment armée, (deux britanniques et deux français). Ces par d’importantes forces ennemies dans missions militaires alliées qui avaient pour objectif de mieux l’organiser, de l’armer et de l’intégrer capable d’arrêter et de combattre les hommes sont rompus à toutes les formes son camp du Bois Blanc le 3 juillet 1944, dans leurs plans stratégiques. troupes allemandes en retraite. de combat, formés à l’utilisation de le Maquis 3 du Service national maquis toutes les armes et explosifs et préparés dispose d’un armement qui lui permet de Missions Jedburgh et à vivre en territoire contrôlé par l’ennemi. livrer un véritable combat. Des groupes détachements SAS Ils sont parachutés en France avec du de SAS s’installent au maquis de Merry- Pour créer ce « hérisson » du Morvan, matériel lourd : jeeps de combat tirant de Vaux en août. Les maquisards reçoivent l’état-major allié avait prévu d’importants petites remorques où sont entassées les des armes et des uniformes. Guy de La participation alliée à l’action parachutages qui devaient fournir les bombes explosives-incendiaires, les Kergommeaux témoigne cependant du maquis en armes (y compris en armes détonateurs retard, les mortiers, les fait que les SAS, tout en étant installés à militaire de la Résistance de l’Yonne lourdes) et en munitions. Il faudrait pro- réserves d’essence. Ils ont avec eux des proximité du maquis qu’il commande, poser des terrains d’atterrissage et de opérateurs radio qui les maintiennent en menaient leurs propres opérations quoti- parachutage et veiller à l’encadrement constante liaison avec Londres. Dans la diennes sur les routes du département des maquisards. C’est dans cette pers- nuit du 6 au 7 juin 1944 et dans les jours sans liaison avec lui. pective que les Alliés parachutent dans le suivants deux missions Jedburgh (la Le « hérisson » du Morvan ne prit jamais Morvan des missions Jedburgh et des mission Harry et la mission Isaac du lieu- la dimension du projet initial. La rivalité groupes de SAS. tenant-colonel Hutchinson) et plusieurs tenace entre le COMAC et l’état-major lon- Les équipes Jedburgh ont été instituées groupes de SAS (dont ceux du major donien du général Koenig représenté par le commandement anglo-américain, Frazer et du major Melot) sont parachu- dans le Morvan par le colonel Rondenay au début de 1944, pour assurer de tés dans le Morvan, sur les territoires de freina considérablement sa réalisation. meilleures relations avec les FFI, sur les- la Nièvre et de l’Yonne au sud d’. Ils D’autre part les stratèges qui l’avaient quels il n'avait le plus souvent que des prennent contact avec les maquis niver- préparé abandonnèrent assez vite la informations vagues, incomplètes ou nais (le maquis icaunais des Iles conception des « maquis mobilisateurs » inexactes. Du point de vue institutionnel, Ménéfrier ne sera constitué qu’à la fin du au sein de laquelle il s’inscrivait.

LES ÉQUIPES JEDBURGH ONT ÉTÉ INSTITUÉES PAR LE COMMANDEMENT Ce n’est qu’ensuite, durant l’été, que la ANGLO-AMÉRICAIN, AU DÉBUT DE 1944, POUR ASSURER DE coopération des forces armées de la MEILLEURES RELATIONS AVEC LES FFI, SUR LESQUELS IL N'AVAIT LE Résistance icaunaise avec l’état-major allié se renforça. Le 22 juillet, le colonel PLUS SOUVENT QUE DES INFORMATIONS VAGUES, INCOMPLÈTES OU Viat (« Diagramme ») fut parachuté dans INEXACTES. le Morvan où il succèda à Hutchinson à la tête de la mission Isaac rebaptisée elles dépendent du 6e bureau de l’état- mois de juillet), en particulier avec le Verveine. Le 3 août il devint le chef de la Une équipe du SAS sur une jeep venant du nord du département. major FFI du général Koenig. Chaque maquis Camille près duquel ils s’instal- sous-région P3 qui rassemblait les trois 1944. équipe est composée de trois hommes : lent. Les officiers anglais y rencontrent départements de l’Aube, de la Nièvre et Archives privées : Pierre Buret un officier anglais ou américain, un offi- deux hauts responsables de la de l’Yonne. Dans la nuit du 14 au 15 août, cier français et un sous-officier radio Résistance française qui viennent eux une nouvelle mission Jedburgh (mission (bénéficiant d’un équipement ultra- aussi d’arriver dans le Morvan : le colonel Bruce) fut parachutée. Elle prit contact Un projet ambitieux : le « hérisson » visant à paralyser les communications de l’habitat y est extrême, les circonscrip- moderne), généralement anglais ou amé- Rondenay, Délégué militaire régional, et à avec l’état-major FFI et avec celui du du Morvan etc.). Il vise à constituer dans le Morvan tions administratives sont divisées ricain, tous volontaires. Ces hommes ce titre représentant direct des services réseau Jean-Marie Buckmaster. Les résis- Les contacts précoces entre les Alliés et un regroupement massif de forces com- entre quatre départements (Côte-d’Or, subissaient d'abord un entraînement londoniens, et Alain Grout de Beaufort, tants de l’Yonne regroupés en quatre la Résistance de l’Yonne et de la Nièvre battantes en se basant sur deux constata- Nièvre, Saône-et-Loire et Yonne) et trois intensif, à la fois sportif et militaire, qui responsable du Bureau des opérations demi-brigades furent alors intégrés à la ont pour origine un projet stratégique tions : le Morvan est l’une des régions Kommandanturen ou leurs annexes devait leur apprendre à vivre dans un aériennes (BOA), spécialisé dans les stratégie globale de libération du territoire.❚ connu sous le nom d’Opération Morvan ou françaises où les maquis sont les plus (Avallon, Château-Chinon et Autun). pays occupé par l'ennemi et les initier aux parachutages. Tous sont en liaison radio JOËL DROGLAND de « hérisson » du Morvan. Il a été élabo- nombreux et les plus actifs au printemps L’objectif est de réorganiser les maquis du méthodes de la guérilla. Ensuite ils directe avec Londres et peuvent obtenir ré en mai 1944 à Paris par la Commission 1944 ; les conditions physiques, Morvan en de véritables unités combat- étaient parachutés en France, en unifor- rapidement les parachutages qu’ils militaire du Conseil national de la me, de manière à pouvoir revendiquer le demandent Résistance (COMAC) d’une part, à Londres L’OBJECTIF EST DE RÉORGANISER LES MAQUIS DU MORVAN EN DE VÉRI- statut de prisonnier de guerre s’ils étaient par l’état-major FFI du général Koenig et TABLES UNITÉS COMBATTANTES. capturés. Une influence réelle mais limitée les services de la France combattante Le Special Air Service (SAS) a été créé en Pour aussi précoce et importante qu’elle d’autre part. Ce projet s’inscrit dans un Afrique à l’automne 1941. Il s’agissait soit, la présence de ces forces alliées eut Sources : Archives nationales, 72 AJ 83. Témoignage ensemble de directives qui organisent la humaines et administratives locales en tantes, de nommer à la tête de cette alors de petits groupes d’hommes entraî- une influence limitée sur la Résistance de Guy de Kergommeaux (1997). Canaud Jacques, participation des forces armées de la font une région idéale pour l’intensifica- région un chef unique, de renforcer les nés à des actions de commando à l’inté- de l’Yonne. Elle renforça les maquis du Les maquis du Morvan, Autun, Académie du Morvan, 1981, 425 pages. Rousselet Maurice, Occupation et Résistance intérieure à la libération du tion de la guérilla contre les Allemands. En forces locales par de vastes opérations rieur des lignes de l’Afrika Korps. La cam- sud du département grâce aux nombreux Libération d’un coin de Bourgogne. Bierry-les-Belles- territoire (constitution de gros « maquis effet, le massif est isolé, couvert de aéroportées qui fourniront des cadres et pagne d’Afrique terminée, quatre régi- parachutages qui furent réceptionnés en Fontaines, 1980 (bibliographie très complète au sujet mobilisateurs », application des plans forêts, de bois et de friches ; la dispersion des armes. Ainsi sera constituée une zone ments de SAS furent créés en Angleterre par le BOA durant l’été. Attaqué des SAS, en français et en anglais). 4 5 Yonne numéro 12 - mai 2004 Mémoire > La participation allié e JUIN 44

La Résistance icaunaise a bénéficié dès le lendemain du Débarquement de Normandie de plusieurs de résistance puissamment armée, (deux britanniques et deux français). Ces par d’importantes forces ennemies dans missions militaires alliées qui avaient pour objectif de mieux l’organiser, de l’armer et de l’intégrer capable d’arrêter et de combattre les hommes sont rompus à toutes les formes son camp du Bois Blanc le 3 juillet 1944, dans leurs plans stratégiques. troupes allemandes en retraite. de combat, formés à l’utilisation de le Maquis 3 du Service national maquis toutes les armes et explosifs et préparés dispose d’un armement qui lui permet de Missions Jedburgh et à vivre en territoire contrôlé par l’ennemi. livrer un véritable combat. Des groupes détachements SAS Ils sont parachutés en France avec du de SAS s’installent au maquis de Merry- Pour créer ce « hérisson » du Morvan, matériel lourd : jeeps de combat tirant de Vaux en août. Les maquisards reçoivent l’état-major allié avait prévu d’importants petites remorques où sont entassées les des armes et des uniformes. Guy de La participation alliée à l’action parachutages qui devaient fournir les bombes explosives-incendiaires, les Kergommeaux témoigne cependant du maquis en armes (y compris en armes détonateurs retard, les mortiers, les fait que les SAS, tout en étant installés à militaire de la Résistance de l’Yonne lourdes) et en munitions. Il faudrait pro- réserves d’essence. Ils ont avec eux des proximité du maquis qu’il commande, poser des terrains d’atterrissage et de opérateurs radio qui les maintiennent en menaient leurs propres opérations quoti- parachutage et veiller à l’encadrement constante liaison avec Londres. Dans la diennes sur les routes du département des maquisards. C’est dans cette pers- nuit du 6 au 7 juin 1944 et dans les jours sans liaison avec lui. pective que les Alliés parachutent dans le suivants deux missions Jedburgh (la Le « hérisson » du Morvan ne prit jamais Morvan des missions Jedburgh et des mission Harry et la mission Isaac du lieu- la dimension du projet initial. La rivalité groupes de SAS. tenant-colonel Hutchinson) et plusieurs tenace entre le COMAC et l’état-major lon- Les équipes Jedburgh ont été instituées groupes de SAS (dont ceux du major donien du général Koenig représenté par le commandement anglo-américain, Frazer et du major Melot) sont parachu- dans le Morvan par le colonel Rondenay au début de 1944, pour assurer de tés dans le Morvan, sur les territoires de freina considérablement sa réalisation. meilleures relations avec les FFI, sur les- la Nièvre et de l’Yonne au sud d’Avallon. Ils D’autre part les stratèges qui l’avaient quels il n'avait le plus souvent que des prennent contact avec les maquis niver- préparé abandonnèrent assez vite la informations vagues, incomplètes ou nais (le maquis icaunais des Iles conception des « maquis mobilisateurs » inexactes. Du point de vue institutionnel, Ménéfrier ne sera constitué qu’à la fin du au sein de laquelle il s’inscrivait.

LES ÉQUIPES JEDBURGH ONT ÉTÉ INSTITUÉES PAR LE COMMANDEMENT Ce n’est qu’ensuite, durant l’été, que la ANGLO-AMÉRICAIN, AU DÉBUT DE 1944, POUR ASSURER DE coopération des forces armées de la MEILLEURES RELATIONS AVEC LES FFI, SUR LESQUELS IL N'AVAIT LE Résistance icaunaise avec l’état-major allié se renforça. Le 22 juillet, le colonel PLUS SOUVENT QUE DES INFORMATIONS VAGUES, INCOMPLÈTES OU Viat (« Diagramme ») fut parachuté dans INEXACTES. le Morvan où il succèda à Hutchinson à la tête de la mission Isaac rebaptisée elles dépendent du 6e bureau de l’état- mois de juillet), en particulier avec le Verveine. Le 3 août il devint le chef de la Une équipe du SAS sur une jeep venant du nord du département. major FFI du général Koenig. Chaque maquis Camille près duquel ils s’instal- sous-région P3 qui rassemblait les trois 1944. équipe est composée de trois hommes : lent. Les officiers anglais y rencontrent départements de l’Aube, de la Nièvre et Archives privées : Pierre Buret un officier anglais ou américain, un offi- deux hauts responsables de la de l’Yonne. Dans la nuit du 14 au 15 août, cier français et un sous-officier radio Résistance française qui viennent eux une nouvelle mission Jedburgh (mission (bénéficiant d’un équipement ultra- aussi d’arriver dans le Morvan : le colonel Bruce) fut parachutée. Elle prit contact Un projet ambitieux : le « hérisson » visant à paralyser les communications de l’habitat y est extrême, les circonscrip- moderne), généralement anglais ou amé- Rondenay, Délégué militaire régional, et à avec l’état-major FFI et avec celui du du Morvan etc.). Il vise à constituer dans le Morvan tions administratives sont divisées ricain, tous volontaires. Ces hommes ce titre représentant direct des services réseau Jean-Marie Buckmaster. Les résis- Les contacts précoces entre les Alliés et un regroupement massif de forces com- entre quatre départements (Côte-d’Or, subissaient d'abord un entraînement londoniens, et Alain Grout de Beaufort, tants de l’Yonne regroupés en quatre la Résistance de l’Yonne et de la Nièvre battantes en se basant sur deux constata- Nièvre, Saône-et-Loire et Yonne) et trois intensif, à la fois sportif et militaire, qui responsable du Bureau des opérations demi-brigades furent alors intégrés à la ont pour origine un projet stratégique tions : le Morvan est l’une des régions Kommandanturen ou leurs annexes devait leur apprendre à vivre dans un aériennes (BOA), spécialisé dans les stratégie globale de libération du territoire.❚ connu sous le nom d’Opération Morvan ou françaises où les maquis sont les plus (Avallon, Château-Chinon et Autun). pays occupé par l'ennemi et les initier aux parachutages. Tous sont en liaison radio JOËL DROGLAND de « hérisson » du Morvan. Il a été élabo- nombreux et les plus actifs au printemps L’objectif est de réorganiser les maquis du méthodes de la guérilla. Ensuite ils directe avec Londres et peuvent obtenir ré en mai 1944 à Paris par la Commission 1944 ; les conditions physiques, Morvan en de véritables unités combat- étaient parachutés en France, en unifor- rapidement les parachutages qu’ils militaire du Conseil national de la me, de manière à pouvoir revendiquer le demandent Résistance (COMAC) d’une part, à Londres L’OBJECTIF EST DE RÉORGANISER LES MAQUIS DU MORVAN EN DE VÉRI- statut de prisonnier de guerre s’ils étaient par l’état-major FFI du général Koenig et TABLES UNITÉS COMBATTANTES. capturés. Une influence réelle mais limitée les services de la France combattante Le Special Air Service (SAS) a été créé en Pour aussi précoce et importante qu’elle d’autre part. Ce projet s’inscrit dans un Afrique à l’automne 1941. Il s’agissait soit, la présence de ces forces alliées eut Sources : Archives nationales, 72 AJ 83. Témoignage ensemble de directives qui organisent la humaines et administratives locales en tantes, de nommer à la tête de cette alors de petits groupes d’hommes entraî- une influence limitée sur la Résistance de Guy de Kergommeaux (1997). Canaud Jacques, participation des forces armées de la font une région idéale pour l’intensifica- région un chef unique, de renforcer les nés à des actions de commando à l’inté- de l’Yonne. Elle renforça les maquis du Les maquis du Morvan, Autun, Académie du Morvan, 1981, 425 pages. Rousselet Maurice, Occupation et Résistance intérieure à la libération du tion de la guérilla contre les Allemands. En forces locales par de vastes opérations rieur des lignes de l’Afrika Korps. La cam- sud du département grâce aux nombreux Libération d’un coin de Bourgogne. Bierry-les-Belles- territoire (constitution de gros « maquis effet, le massif est isolé, couvert de aéroportées qui fourniront des cadres et pagne d’Afrique terminée, quatre régi- parachutages qui furent réceptionnés en Fontaines, 1980 (bibliographie très complète au sujet mobilisateurs », application des plans forêts, de bois et de friches ; la dispersion des armes. Ainsi sera constituée une zone ments de SAS furent créés en Angleterre Puisaye par le BOA durant l’été. Attaqué des SAS, en français et en anglais). 4 5 Yonne numéro 12 - mai 2004 Mémoire > Parachutages 44 JUIN 44

Les parachutages 14 au 15 juin, ce sont deux lier) et surtout de solides du débarquement à la Libération Les parachutages dans l’Yonne en juin parachutages qui arrivent chaussures de cuir, dont les (1944) dans la même région, sur « maquisards ont le plus grand Caricature » encore et sur le besoin. et début juillet 1944 terrain « Pochoir », situé près Grâce à cet armement impor- 0 25 km d’Etais-la-Sauvin. Dans la nuit tant, ces maquis sont désor- Avec le Débarquement Containers ayant du 21 au 22 juin, un très mais capables de résister aux et les consignes d’ac- servis lors de important parachutage (45 attaques de la Wehrmacht. parachutages tion (sabotage des Archives privées : containers) se produit sur le C’est ainsi que le Maquis 3 voies de communica- collection M. Caré. terrain « Croquis », situé lui réussit à tenir tête pendant tion notamment) aussi à proximité d’Etais-la- plusieurs heures aux Sauvin et un autre, dans la Allemands lors de la bataille envoyées à la nuit du 25 au 26 juin, dans la du Bois-Blanc, le 3 juillet 1944 Résistance intérieure, région de . Dans ( voir l’article sur les attaques les parachutages s’in- la nuit du 4 au 5 juillet, trois de maquis). Au cours du com- tensifient : il fallait à la parachutages « tombent » bat, l’usage d’un bazooka, aux fois fournir des armes dans la même nuit, sur mains de « Tatave » (Chabin), aux maquis dont le « Pochoir », « Caricature » et qui détruit la mitrailleuse « Croquis », et un autre sur le lourde ennemie, s’avère nombre et les effectifs terrain « Anjou », situé près déterminant pour l’issue du sont en forte croissan- de Val-de-Mercy : au total 54 combat (par contre, le PIAT, ce, leur permettre de containers et de nombreux jugé par les maquisards d’un pratiquer les sabo- paquets sont largués en une maniement délicat, sera rare- tages réclamés (voir seule nuit, représentant plu- ment utilisé). article sur la mise en sieurs tonnes d’armes et d’ex- plosifs. D’autres manquent application du plan d’armes sables FTP et ceux d’autres d’armes, d’explosifs et de Vert), et leur donner Parachutages dans planter son PC dans la région, vélo puis en auto, sous la pro- Certains maquis sont Si les maquis du Service natio- formations pour partager, matériel divers qui ont été les moyens de se l’Aillantais d’attirer à lui d’autres organi- tection de deux hommes du puissamment armés nal maquis et ceux du réseau malgré l’interdiction signifiée parachutées sur l’Yonne dans défendre contre les D’assez nombreux parachu- sations, comme le groupe Maquis 3, « Pad » (Jean Tout ce matériel est partagé Jean-Marie Buckmaster sont par Londres, une partie du le mois suivant le débarque- attaques allemandes tages avaient eu lieu dans Bayard ou le groupe Chevreuil, Biéler) et « Cacane » entre les différents groupes particulièrement bien appro- matériel reçu. C’est ainsi que ment. Ces parachutages qui se multiplient (voir l’Yonne en 1943 et au début en leur fournissant les armes (Germain Delacroix), pour du Service national maquis de continuent ensuite, en juillet de 1944, notamment dans le qui leur font cruellement repérer les terrains les plus la région, à l’exception du Au total, ce sont des tonnes d’armes, d’explosifs et août 1944, à une cadence article sur les Sénonais, organisés par le défaut. appropriés, en transmettre Maquis 2 (maquis de Merry- encore plus soutenue (voir la attaques de maquis). et de matériel divers qui ont été parachutées sur Bureau des Opérations Aériennes, les coordonnées à Londres, et Vaux) dont les dirigeants se l’Yonne dans le mois suivant le débarquement. carte des parachutages de et dans l’Aillantais, organisés La Puisaye favorisée contrôler la distribution des plaignent à cette époque de l’été 1944), contribuant ainsi par le Service Opération Mais c’est la Puisaye et les armes et du matériel parachu- ne pas recevoir les armes à armer les volontaires qui Executive, anglais, pour le hommes du Service national tés entre les différents dont ils ont besoin. De ce fait visionnés en armes et explo- des membres de la compa- affluent au maquis et à ren- compte du réseau Jean-Marie maquis qui vont surtout béné- groupes de maquisards. ces maquis, notamment le sifs, les autres formations gnie FTP Colbert devaient forcer leurs capacités de Buckmaster. Après une longue ficier des parachutages dans Un premier parachutage, fin Maquis 3, se trouvent forte- sont moins favorisées. Le venir le 9 juillet aider les défense et d’attaque. période de disette qui dure cette période. Grout de mai, avait déjà permis d’équi- ment armés : les maquisards maquis Organisation de la membres du Maquis 4 à Quelques parachutages depuis novembre 1943, le Beaufort, responsable du BOA per et d’entraîner les hommes disposent de nombreuses Résistance Armée Chevalier réceptionner un parachutage auront même lieu après la réseau Buckmaster reçoit pour la zone Nord, a confié la du Maquis 3, installés alors mitraillettes et fusils anglais reçoit, le 20 juin, un parachu- à proximité de Charentenay et Libération, jusqu’en sep- coup sur coup plusieurs para- direction départementale du aux Vrines, près de Saint- et canadiens, mais aussi d’un tage près de Coulanges-la- en recevoir une part : malheu- tembre 1944.❚CLAUDE DELASSELLE chutages. Deux se produisent nombre conséquent de fusils- Vineuse, mais les formations reusement ce parachutage, le même jour, le 28 mai 1944, C’est la Puisaye et les hommes du Service national mitrailleurs et surtout possè- Francs Tireurs Partisan n’ob- prévu dans la nuit du 8 au 9 l’un à Chassy, au lieu-dit Le maquis qui vont surtout bénéficier des parachu- dent des armes anti-chars tiennent (sauf exception, juillet, n’eut pas lieu et le four-à-chaux, l’autre à Malicorne. tages dans cette période. puissantes, bazookas améri- comme le groupe Hoche, en Maquis 4 fut attaqué et Un troisième parachutage a cains et PIAT anglais, sans forêt d’Othe, le 31 mai) aucun démantelé par les Allemands lieu le 1er juin sur le terrain compter les grenades de dif- parachutage dans cette pério- dans la journée du 9 juillet. des Miniers, dans la région de BOA à un professeur de Sauveur-en-Puisaye. Dans la férents modèles et les explo- de, du fait de la méfiance des Enfin, pour Libération-Nord, Villefranche-Saint-Phal, et un mathématiques de Paris, nuit du 4 au 5 juin a lieu un sifs nécessaires aux opéra- services alliés et gaullistes « Verneuil » se plaint dans un quatrième à Malicorne, le 27 Michel Paillier (« Mic »), qui parachutage sur le terrain tions de sabotage. Les contai- envers la Résistance commu- rapport du 6 juillet de ne pas juin. Ceci va permettre à Henri est venu s’installer au prin- situé près de , ners apportent parfois aussi niste. Il est arrivé cependant recevoir d’armes. Frager, chef du réseau temps 1944 en Puisaye. « Mic » dont le nom de code est des tenues militaires (uni- que des accords soient Sources : La Résistance dans l’Yonne, Buckmaster, qui vient d’im- parcourt la région, d’abord en « Caricature ». Dans la nuit du formes canadiens en particu- conclus entre des respon- Au total, ce sont des tonnes cédérom, ARORY-AERI, 2004. 6 7 Yonne numéro 12 - mai 2004 Mémoire > Parachutages 44 JUIN 44

Les parachutages 14 au 15 juin, ce sont deux lier) et surtout de solides du débarquement à la Libération Les parachutages dans l’Yonne en juin parachutages qui arrivent chaussures de cuir, dont les (1944) dans la même région, sur « maquisards ont le plus grand Caricature » encore et sur le besoin. et début juillet 1944 terrain « Pochoir », situé près Grâce à cet armement impor- 0 25 km d’Etais-la-Sauvin. Dans la nuit tant, ces maquis sont désor- Avec le Débarquement Containers ayant du 21 au 22 juin, un très mais capables de résister aux et les consignes d’ac- servis lors de important parachutage (45 attaques de la Wehrmacht. parachutages tion (sabotage des Archives privées : containers) se produit sur le C’est ainsi que le Maquis 3 voies de communica- collection M. Caré. terrain « Croquis », situé lui réussit à tenir tête pendant tion notamment) aussi à proximité d’Etais-la- plusieurs heures aux Sauvin et un autre, dans la Allemands lors de la bataille envoyées à la nuit du 25 au 26 juin, dans la du Bois-Blanc, le 3 juillet 1944 Résistance intérieure, région de Charentenay. Dans ( voir l’article sur les attaques les parachutages s’in- la nuit du 4 au 5 juillet, trois de maquis). Au cours du com- tensifient : il fallait à la parachutages « tombent » bat, l’usage d’un bazooka, aux fois fournir des armes dans la même nuit, sur mains de « Tatave » (Chabin), aux maquis dont le « Pochoir », « Caricature » et qui détruit la mitrailleuse « Croquis », et un autre sur le lourde ennemie, s’avère nombre et les effectifs terrain « Anjou », situé près déterminant pour l’issue du sont en forte croissan- de Val-de-Mercy : au total 54 combat (par contre, le PIAT, ce, leur permettre de containers et de nombreux jugé par les maquisards d’un pratiquer les sabo- paquets sont largués en une maniement délicat, sera rare- tages réclamés (voir seule nuit, représentant plu- ment utilisé). article sur la mise en sieurs tonnes d’armes et d’ex- plosifs. D’autres manquent application du plan d’armes sables FTP et ceux d’autres d’armes, d’explosifs et de Vert), et leur donner Parachutages dans planter son PC dans la région, vélo puis en auto, sous la pro- Certains maquis sont Si les maquis du Service natio- formations pour partager, matériel divers qui ont été les moyens de se l’Aillantais d’attirer à lui d’autres organi- tection de deux hommes du puissamment armés nal maquis et ceux du réseau malgré l’interdiction signifiée parachutées sur l’Yonne dans défendre contre les D’assez nombreux parachu- sations, comme le groupe Maquis 3, « Pad » (Jean Tout ce matériel est partagé Jean-Marie Buckmaster sont par Londres, une partie du le mois suivant le débarque- attaques allemandes tages avaient eu lieu dans Bayard ou le groupe Chevreuil, Biéler) et « Cacane » entre les différents groupes particulièrement bien appro- matériel reçu. C’est ainsi que ment. Ces parachutages qui se multiplient (voir l’Yonne en 1943 et au début en leur fournissant les armes (Germain Delacroix), pour du Service national maquis de continuent ensuite, en juillet de 1944, notamment dans le qui leur font cruellement repérer les terrains les plus la région, à l’exception du Au total, ce sont des tonnes d’armes, d’explosifs et août 1944, à une cadence article sur les Sénonais, organisés par le défaut. appropriés, en transmettre Maquis 2 (maquis de Merry- encore plus soutenue (voir la attaques de maquis). et de matériel divers qui ont été parachutées sur Bureau des Opérations Aériennes, les coordonnées à Londres, et Vaux) dont les dirigeants se l’Yonne dans le mois suivant le débarquement. carte des parachutages de et dans l’Aillantais, organisés La Puisaye favorisée contrôler la distribution des plaignent à cette époque de l’été 1944), contribuant ainsi par le Service Opération Mais c’est la Puisaye et les armes et du matériel parachu- ne pas recevoir les armes à armer les volontaires qui Executive, anglais, pour le hommes du Service national tés entre les différents dont ils ont besoin. De ce fait visionnés en armes et explo- des membres de la compa- affluent au maquis et à ren- compte du réseau Jean-Marie maquis qui vont surtout béné- groupes de maquisards. ces maquis, notamment le sifs, les autres formations gnie FTP Colbert devaient forcer leurs capacités de Buckmaster. Après une longue ficier des parachutages dans Un premier parachutage, fin Maquis 3, se trouvent forte- sont moins favorisées. Le venir le 9 juillet aider les défense et d’attaque. période de disette qui dure cette période. Grout de mai, avait déjà permis d’équi- ment armés : les maquisards maquis Organisation de la membres du Maquis 4 à Quelques parachutages depuis novembre 1943, le Beaufort, responsable du BOA per et d’entraîner les hommes disposent de nombreuses Résistance Armée Chevalier réceptionner un parachutage auront même lieu après la réseau Buckmaster reçoit pour la zone Nord, a confié la du Maquis 3, installés alors mitraillettes et fusils anglais reçoit, le 20 juin, un parachu- à proximité de Charentenay et Libération, jusqu’en sep- coup sur coup plusieurs para- direction départementale du aux Vrines, près de Saint- et canadiens, mais aussi d’un tage près de Coulanges-la- en recevoir une part : malheu- tembre 1944.❚CLAUDE DELASSELLE chutages. Deux se produisent nombre conséquent de fusils- Vineuse, mais les formations reusement ce parachutage, le même jour, le 28 mai 1944, C’est la Puisaye et les hommes du Service national mitrailleurs et surtout possè- Francs Tireurs Partisan n’ob- prévu dans la nuit du 8 au 9 l’un à Chassy, au lieu-dit Le maquis qui vont surtout bénéficier des parachu- dent des armes anti-chars tiennent (sauf exception, juillet, n’eut pas lieu et le four-à-chaux, l’autre à Malicorne. tages dans cette période. puissantes, bazookas améri- comme le groupe Hoche, en Maquis 4 fut attaqué et Un troisième parachutage a cains et PIAT anglais, sans forêt d’Othe, le 31 mai) aucun démantelé par les Allemands lieu le 1er juin sur le terrain compter les grenades de dif- parachutage dans cette pério- dans la journée du 9 juillet. des Miniers, dans la région de BOA à un professeur de Sauveur-en-Puisaye. Dans la férents modèles et les explo- de, du fait de la méfiance des Enfin, pour Libération-Nord, Villefranche-Saint-Phal, et un mathématiques de Paris, nuit du 4 au 5 juin a lieu un sifs nécessaires aux opéra- services alliés et gaullistes « Verneuil » se plaint dans un quatrième à Malicorne, le 27 Michel Paillier (« Mic »), qui parachutage sur le terrain tions de sabotage. Les contai- envers la Résistance commu- rapport du 6 juillet de ne pas juin. Ceci va permettre à Henri est venu s’installer au prin- situé près de Lainsecq, ners apportent parfois aussi niste. Il est arrivé cependant recevoir d’armes. Frager, chef du réseau temps 1944 en Puisaye. « Mic » dont le nom de code est des tenues militaires (uni- que des accords soient Sources : La Résistance dans l’Yonne, Buckmaster, qui vient d’im- parcourt la région, d’abord en « Caricature ». Dans la nuit du formes canadiens en particu- conclus entre des respon- Au total, ce sont des tonnes cédérom, ARORY-AERI, 2004. 6 7 Yonne numéro 12 - mai 2004 Mémoire > La straté gie du > Le plan Vert JUIN 44 PCF et des FTP

Les groupes de résistants sédentaires et les maquis de l’Yonne n’ont bien sûr pas attendu le Débarquement pour tenter appliqué lui aussi immédiate- civils et des troupes alle- LA STRATÉGIE d’entraver les transports et les communications au service des Allemands : de nombreux sabotages de lignes électriques ment le plan Vert en réalisant mandes, mais surtout parce et téléphoniques, d’écluses et surtout de voies ferrées et de matériel ferroviaire ont eu lieu dans l’Yonne dès 1943 (et toute une série d’opérations que les maquis s’orientent de D’INSURRECTION NATIONALE même avant) et au début de 1944. Mais avec le débarquement du 6 juin 1944, le mot d’ordre général est lancé par la sur la ligne PLM : le 7 juin, la plus en plus vers des actions DANS LE DÉPARTEMENT DE radio de Londres à tous les groupes de résistants de l’intérieur d’appliquer immédiatement les plans prévus (voir l’article : ligne PLM est sabotée à l’ex- militaires proprement dites, plosif en quatre endroits sur la en se défendant contre les L’YONNE La France Libre, les Alliés et la Résistance intérieure). commune de Cézy et en deux attaques et en attaquant à autres endroits sur les com- leur tour les convois ennemis. Le Comité militaire régional (état-major départemental) sur-Armançon, ce qui pro- munes de Laroche et de Par ailleurs, les forces des FTP de l’Yonne est composé de militants commu- voque peu après le déraille- . Le 9 juin, la voie aériennes alliées prennent le nistes. Réunis le 6 juin 1944 sous la présidence de La mise en application du ment d’un train transportant PLM est à nouveau coupée relais des saboteurs pour cadres interrégionaux, ils décident d’appliquer immédia- des troupes et du matériel près de Cézy. Par ailleurs les détruire les ponts et voies fer- tement la stratégie d’insurrection nationale défendue PLAN VERT dans l’Yonne allemands. Roger Quillin, affec- sabotages de matériel ferro- rées : ainsi le pont ferroviaire depuis plusieurs mois par le Parti communiste. Plusieurs té ensuite au Maquis 4, effec- viaire s’intensifient au dépôt de la ligne PLM sur l’Yonne à la villages de l’Yonne se trouvent ainsi « libérés » les 7 et 8 tue dans la deuxième quinzai- de Laroche- : des sortie de la gare de Laroche- juin 1944 alors que les combats font rage sur les plages Les plans ne de juin trois sabotages locomotives et des wagons Migennes, que les résistants de Normandie. Il s’agit en premier lieu du plan dans l’Auxerrois : il fait sauter sont détériorés, une plaque ne peuvent approcher du fait Vert, concernant les trans- le pont de la ligne Auxerre- tournante est bloquée ; le 14 d’une garde renforcée, est la 6 juin 1944 : l'état-major des FTP de l’Yonne décide ports ferroviaires, classé en Avallon à l’entrée du tunnel de juillet, en plein jour, « Max » cible de plusieurs bombarde- « l’insurrection nationale » première urgence. Il a pour Saint-Moré, puis le pont de la (René Millereau) et « Dany » ments massifs en juillet et La réunion clandestine hebdomadaire du Comité militaire régio- objectif, par le sabotage des ligne Auxerre-Clamecy près de (André Dessèvre) font sauter août 1944. ❚CLAUDE DELASSELLE nal de FTP (CMR) se tient le 6 juin 1944 chez un cultivateur de ponts, des voies ferrées, des Mailly-le-Château, coupant deux plaques tournantes et . Deux dirigeants interrégionaux sont présents dont installations et du matériel ainsi durablement les liaisons deux locomotives. Marcel Asmus, qui avait exercé le commandement des FTP de ferroviaire, de retarder et de ferroviaires entre Auxerre et le Plus au nord, dans le Sénonais, l'Yonne et qui était alors commissaire aux effectifs interrégio- limiter le plus possible l’ache- sud du département. Ne pou- la compagnie FTP Paul Bert naux. Compte-tenu de son grade, c'est lui qui préside la réunion et minement des renforts alle- vant réaliser le sabotage du sabote l’écluse de Port-Renard ; non André Chamfroy qui est alors le responsable des FTP de mands en hommes et en pont de la ligne Auxerre-Gien à sept autres sabotages d’écluses l'Yonne. Asmus n'a évidemment pas encore reçu de consignes matériel vers le front de Auxerre, trop bien gardé, il se ont lieu, fin juin et début juillet, particulières adaptées à la situation nouvelle créée par le Normandie. Viennent en rabat sur le sabotage du trans- sur l’Yonne et le canal de Débarquement. Il a reçu les messages de la BBC lançant les opé- deuxième urgence d’autres formateur de l’usine d’Augy Bourgogne. D’autres sabotages rations de sabotage, et les actions de guérilla, mais cela ne signi- plans : le plan Brun, ou plan qui fabriquait du matériel de ont lieu aux environs du 14 fie évidemment pas insurrection. Militant communiste, il décide Tortue, qui vise à la neutralisa- guerre pour l’Allemagne. En juillet dans le Sénonais, d'appliquer à la lettre les consignes dont il a connaissance et qui tion des mouvements des juillet, les maquis du Service notamment ceux de la ligne traduisent une certaine conception de la tactique à appliquer à la Bombardement du 31 juillet 1944 à Laroche-migennes. Panzer allemands, le plan Archives privées : Roger Brissat. national maquis procèderont PLM à Champigny-sur-Yonne Libération. Violet (sabotage des lignes à d’autres sabotages ferro- par la compagnie Paul Bert, et Deux conceptions s’opposent à ce sujet depuis des mois entre téléphoniques), le plan Bleu viaires sur les lignes d’intérêt le sabotage du transformateur Alger (où se trouve le Comité Français de Libération Nationale du (sabotage des lignes élec- consignes, en juin et juillet assurée par deux canadiens stratégique de la Puisaye. de par le groupe FTP général de Gaulle et le Comité d’action en France, Comidac), triques à haute tension), etc. 1944, figurent les unités du français, «Jacques » et «Jean », Hoche. Londres (où travaillent aux côtés de l’état-major allié et de celui Selon le témoignage de Guy de Service national maquis, pour envoyés par l’état-major du Les actions de sabotage du général Koenig, les services de la Délégation générale des ser- Kergommeaux, c’est Marcel la plupart installées en Service national maquis. des autres groupes vices spéciaux, ex BCRA) et Paris (où siègent le Conseil national Choupot, chef de l’état-major Puisaye et dans l’Auxerrois. Le 5 juin, les responsables du (Bayard, ORA, FTP) Le bilan de la Résistance et sa Commission d’action militaire, le COMAC). FFI, installé au maquis de Les hommes du Maquis 3, Maquis 3, « Dédé » Cagnat et Dans la même région et la Au total, pour la seule période La DGSS, les Alliés, mais aussi certaines organisations de résis- Merry-Vaux, qui avait en char- noyau initial du National Raymond Thomasset, ont reçu même période, juin et début du 6 au 30 juin 1944, on comp- tance intérieure dont l’ORA (Organisation de résistance de ge l’exécution du plan Vert. maquis dans l’Yonne, avaient l’ordre de partir dans le juillet, le maquis ORA Chevalier, tabilise dans l’Yonne 33 sabo- l’Armée, plutôt giraudiste) défendent une conception purement Tonnerrois pour une mission installé en forêt de Fretoy, réa- tages de voies ferrées (dont militaire de la libération : l’action de la Résistance intérieure doit Avec le Débarquement du 6 juin 1944, le mot d’ordre général est lancé par la radio de Londres à visant à paralyser durable- lise deux sabotages d’ai- 22 sur la grande ligne PLM) et être intégrée dans la stratégie des Alliés et se limiter à appliquer tous les groupes de résistants de l’intérieur d’ap- ment le trafic de la ligne PLM guillages en gare de Cravant 39 autres sabotages, visant les plans Violet, Vert et Bleu pendant la phase critique du pliquer immédiatement les plans de sabotage par un sabotage pratiqué sous et de Vincelles, le sabotage du notamment des lignes télé- Débarquement. A l’opposé, le Parti communiste milite depuis trois prévus. le tunnel de Lézinnes. pont ferroviaire de Champs- phoniques. La cadence des ans pour la lutte armée immédiate, à base de sabotages, d’atten- Apprenant sur place que le sur-Yonne, ainsi que la des- sabotages ferroviaires dimi- tats et de guérilla. Depuis mai 1944 l’état-major national FFI et le tunnel est fortement gardé, ils truction de pylônes servant à nue lentement ensuite, au COMAC sont dirigés par des communistes et leur conception est Les actions de sabotage bénéficié, en mai 1944, à la modifient leurs plans : le 7 l’alimentation en courant élec- cours du mois de juillet et désormais celle de presque toute la Résistance intérieure : dès du National maquis ferme des Vrines, d’une forma- juin, en plein après-midi, Roger trique de l’usine souterraine encore plus au mois d’août, que les Alliés lanceront la grande offensive sur les côtes fran- Parmi les groupes de résis- tion à l’utilisation des armes et Quillin et Raymond Thomasset d’aviation de Cravant. sans doute à cause du renfor- çaises, la Résistance intérieure devra déclencher l’insurrection tants icaunais les plus actifs des explosifs parachutés et placent une charge d’explosif Dans le Jovinien et le cement de la garde des voies Sources : La Résistance dans l’Yonne, populaire, la grève générale, et occuper les bâtiments publics. dans l’application de ces aux techniques de sabotage, sur la voiePLAN ferrée près de Pacy- Migennois, le groupe Bayard a VERTde transport par des requis cédérom, ARORY-AERI, 2004. L’objectif de la Libération est aussi politique : établissement d’une > 8 9 Yonne numéro 12 - mai 2004 Mémoire > La straté gie du > Le plan Vert JUIN 44 PCF et des FTP

Les groupes de résistants sédentaires et les maquis de l’Yonne n’ont bien sûr pas attendu le Débarquement pour tenter appliqué lui aussi immédiate- civils et des troupes alle- LA STRATÉGIE d’entraver les transports et les communications au service des Allemands : de nombreux sabotages de lignes électriques ment le plan Vert en réalisant mandes, mais surtout parce et téléphoniques, d’écluses et surtout de voies ferrées et de matériel ferroviaire ont eu lieu dans l’Yonne dès 1943 (et toute une série d’opérations que les maquis s’orientent de D’INSURRECTION NATIONALE même avant) et au début de 1944. Mais avec le débarquement du 6 juin 1944, le mot d’ordre général est lancé par la sur la ligne PLM : le 7 juin, la plus en plus vers des actions DANS LE DÉPARTEMENT DE radio de Londres à tous les groupes de résistants de l’intérieur d’appliquer immédiatement les plans prévus (voir l’article : ligne PLM est sabotée à l’ex- militaires proprement dites, plosif en quatre endroits sur la en se défendant contre les L’YONNE La France Libre, les Alliés et la Résistance intérieure). commune de Cézy et en deux attaques et en attaquant à autres endroits sur les com- leur tour les convois ennemis. Le Comité militaire régional (état-major départemental) sur-Armançon, ce qui pro- munes de Laroche et de Par ailleurs, les forces des FTP de l’Yonne est composé de militants commu- voque peu après le déraille- Champlay. Le 9 juin, la voie aériennes alliées prennent le nistes. Réunis le 6 juin 1944 sous la présidence de La mise en application du ment d’un train transportant PLM est à nouveau coupée relais des saboteurs pour cadres interrégionaux, ils décident d’appliquer immédia- des troupes et du matériel près de Cézy. Par ailleurs les détruire les ponts et voies fer- tement la stratégie d’insurrection nationale défendue PLAN VERT dans l’Yonne allemands. Roger Quillin, affec- sabotages de matériel ferro- rées : ainsi le pont ferroviaire depuis plusieurs mois par le Parti communiste. Plusieurs té ensuite au Maquis 4, effec- viaire s’intensifient au dépôt de la ligne PLM sur l’Yonne à la villages de l’Yonne se trouvent ainsi « libérés » les 7 et 8 tue dans la deuxième quinzai- de Laroche-Migennes : des sortie de la gare de Laroche- juin 1944 alors que les combats font rage sur les plages Les plans ne de juin trois sabotages locomotives et des wagons Migennes, que les résistants de Normandie. Il s’agit en premier lieu du plan dans l’Auxerrois : il fait sauter sont détériorés, une plaque ne peuvent approcher du fait Vert, concernant les trans- le pont de la ligne Auxerre- tournante est bloquée ; le 14 d’une garde renforcée, est la 6 juin 1944 : l'état-major des FTP de l’Yonne décide ports ferroviaires, classé en Avallon à l’entrée du tunnel de juillet, en plein jour, « Max » cible de plusieurs bombarde- « l’insurrection nationale » première urgence. Il a pour Saint-Moré, puis le pont de la (René Millereau) et « Dany » ments massifs en juillet et La réunion clandestine hebdomadaire du Comité militaire régio- objectif, par le sabotage des ligne Auxerre-Clamecy près de (André Dessèvre) font sauter août 1944. ❚CLAUDE DELASSELLE nal de FTP (CMR) se tient le 6 juin 1944 chez un cultivateur de ponts, des voies ferrées, des Mailly-le-Château, coupant deux plaques tournantes et Vergigny. Deux dirigeants interrégionaux sont présents dont installations et du matériel ainsi durablement les liaisons deux locomotives. Marcel Asmus, qui avait exercé le commandement des FTP de ferroviaire, de retarder et de ferroviaires entre Auxerre et le Plus au nord, dans le Sénonais, l'Yonne et qui était alors commissaire aux effectifs interrégio- limiter le plus possible l’ache- sud du département. Ne pou- la compagnie FTP Paul Bert naux. Compte-tenu de son grade, c'est lui qui préside la réunion et minement des renforts alle- vant réaliser le sabotage du sabote l’écluse de Port-Renard ; non André Chamfroy qui est alors le responsable des FTP de mands en hommes et en pont de la ligne Auxerre-Gien à sept autres sabotages d’écluses l'Yonne. Asmus n'a évidemment pas encore reçu de consignes matériel vers le front de Auxerre, trop bien gardé, il se ont lieu, fin juin et début juillet, particulières adaptées à la situation nouvelle créée par le Normandie. Viennent en rabat sur le sabotage du trans- sur l’Yonne et le canal de Débarquement. Il a reçu les messages de la BBC lançant les opé- deuxième urgence d’autres formateur de l’usine d’Augy Bourgogne. D’autres sabotages rations de sabotage, et les actions de guérilla, mais cela ne signi- plans : le plan Brun, ou plan qui fabriquait du matériel de ont lieu aux environs du 14 fie évidemment pas insurrection. Militant communiste, il décide Tortue, qui vise à la neutralisa- guerre pour l’Allemagne. En juillet dans le Sénonais, d'appliquer à la lettre les consignes dont il a connaissance et qui tion des mouvements des juillet, les maquis du Service notamment ceux de la ligne traduisent une certaine conception de la tactique à appliquer à la Bombardement du 31 juillet 1944 à Laroche-migennes. Panzer allemands, le plan Archives privées : Roger Brissat. national maquis procèderont PLM à Champigny-sur-Yonne Libération. Violet (sabotage des lignes à d’autres sabotages ferro- par la compagnie Paul Bert, et Deux conceptions s’opposent à ce sujet depuis des mois entre téléphoniques), le plan Bleu viaires sur les lignes d’intérêt le sabotage du transformateur Alger (où se trouve le Comité Français de Libération Nationale du (sabotage des lignes élec- consignes, en juin et juillet assurée par deux canadiens stratégique de la Puisaye. de Bagneaux par le groupe FTP général de Gaulle et le Comité d’action en France, Comidac), triques à haute tension), etc. 1944, figurent les unités du français, «Jacques » et «Jean », Hoche. Londres (où travaillent aux côtés de l’état-major allié et de celui Selon le témoignage de Guy de Service national maquis, pour envoyés par l’état-major du Les actions de sabotage du général Koenig, les services de la Délégation générale des ser- Kergommeaux, c’est Marcel la plupart installées en Service national maquis. des autres groupes vices spéciaux, ex BCRA) et Paris (où siègent le Conseil national Choupot, chef de l’état-major Puisaye et dans l’Auxerrois. Le 5 juin, les responsables du (Bayard, ORA, FTP) Le bilan de la Résistance et sa Commission d’action militaire, le COMAC). FFI, installé au maquis de Les hommes du Maquis 3, Maquis 3, « Dédé » Cagnat et Dans la même région et la Au total, pour la seule période La DGSS, les Alliés, mais aussi certaines organisations de résis- Merry-Vaux, qui avait en char- noyau initial du National Raymond Thomasset, ont reçu même période, juin et début du 6 au 30 juin 1944, on comp- tance intérieure dont l’ORA (Organisation de résistance de ge l’exécution du plan Vert. maquis dans l’Yonne, avaient l’ordre de partir dans le juillet, le maquis ORA Chevalier, tabilise dans l’Yonne 33 sabo- l’Armée, plutôt giraudiste) défendent une conception purement Tonnerrois pour une mission installé en forêt de Fretoy, réa- tages de voies ferrées (dont militaire de la libération : l’action de la Résistance intérieure doit Avec le Débarquement du 6 juin 1944, le mot d’ordre général est lancé par la radio de Londres à visant à paralyser durable- lise deux sabotages d’ai- 22 sur la grande ligne PLM) et être intégrée dans la stratégie des Alliés et se limiter à appliquer tous les groupes de résistants de l’intérieur d’ap- ment le trafic de la ligne PLM guillages en gare de Cravant 39 autres sabotages, visant les plans Violet, Vert et Bleu pendant la phase critique du pliquer immédiatement les plans de sabotage par un sabotage pratiqué sous et de Vincelles, le sabotage du notamment des lignes télé- Débarquement. A l’opposé, le Parti communiste milite depuis trois prévus. le tunnel de Lézinnes. pont ferroviaire de Champs- phoniques. La cadence des ans pour la lutte armée immédiate, à base de sabotages, d’atten- Apprenant sur place que le sur-Yonne, ainsi que la des- sabotages ferroviaires dimi- tats et de guérilla. Depuis mai 1944 l’état-major national FFI et le tunnel est fortement gardé, ils truction de pylônes servant à nue lentement ensuite, au COMAC sont dirigés par des communistes et leur conception est Les actions de sabotage bénéficié, en mai 1944, à la modifient leurs plans : le 7 l’alimentation en courant élec- cours du mois de juillet et désormais celle de presque toute la Résistance intérieure : dès du National maquis ferme des Vrines, d’une forma- juin, en plein après-midi, Roger trique de l’usine souterraine encore plus au mois d’août, que les Alliés lanceront la grande offensive sur les côtes fran- Parmi les groupes de résis- tion à l’utilisation des armes et Quillin et Raymond Thomasset d’aviation de Cravant. sans doute à cause du renfor- çaises, la Résistance intérieure devra déclencher l’insurrection tants icaunais les plus actifs des explosifs parachutés et placent une charge d’explosif Dans le Jovinien et le cement de la garde des voies Sources : La Résistance dans l’Yonne, populaire, la grève générale, et occuper les bâtiments publics. dans l’application de ces aux techniques de sabotage, sur la voiePLAN ferrée près de Pacy- Migennois, le groupe Bayard a VERTde transport par des requis cédérom, ARORY-AERI, 2004. L’objectif de la Libération est aussi politique : établissement d’une > 8 9 Yonne numéro 12 - mai 2004 Mémoire > La straté gie du PCF et des FTP JUIN 44

Ruines de la maison de la famille Dumont établit des barrages sur les routes qui allemands. Le 7 juin, trois maquisards : département. Dans la journée du 9 juin bien vite les couper d’une partie de la Archives privées : « une auto s’arrêtait population ». Robert Loffroy conduisent à Arces, particulièrement sur Maurice Sellier, Guy Mathieu et Ferrucio raconte R. Loffroy, Prenant acte de cette situa- la RN 5. Villechétive est également « libé- Ricco arrivent à dans la camionnet- soudain devant la mairie de Bérulle. Elle tion, l’état-major FTP décide de faire éva- ré ». « Max » et « Serge » roulent désor- te du maraîcher après être passés à était aussitôt entourée par la population cuer Guerchy le 13 juin. C’est dans ce mais dans des voitures réquisitionnées. Guerchy chercher des armes au domicile qui accourait à sa vue. C’était une voiture contexte que les Allemands investissent Le 6 juin au soir, Champfroy arrive au d’une famille de résistants sédentaires, découverte et occupée par quatre ou cinq le village, attaquent la maison Dumont et hameau de La Fourchotte où il rassemble les Dumont. Ils retrouvent les maquisards gars, casqués et équipés de vêtements en massacrent les habitants. une trentaine d’hommes : le groupe FTP et sédentaires locaux que commande militaires et armés jusqu’aux dents. Un Minard qui y réside et que commande Gaston Chavanne. C’est l’effervescence seul était en civil. Très beau garçon, il se De tels événements se sont produits dans René Larrivé, les sédentaires de Laroche présentait à moi comme étant le comman- de nombreux départements du centre, du et ceux de Bussy-en-Othe. Le 7 juin en Dans notre département ces dant Francoeur ». Jean-Marie Reynaud sud et de l’ouest de la France. A plusieurs début d’après-midi René Larrivé accom- initiatives apparaissent parti- (« Francoeur ») est le responsable du reprises ils ont conduit à des drames. Le pagné de trois maquisards prend posses- culièrement aventureuses et Bureau des opérations aériennes (BOA) 7 juin 1944, sur ordre de la direction du sion de la mairie de Brion et du clocher prématurées compte-tenu de sa de l’Aube et le chef du maquis de Saint- PCF de zone Sud, des FTP investissent dont il fait un observatoire. Il fait convo- situation géographique, des Mards-en-Othe qui assure la sécurité des Guéret, préfecture de la Creuse, et Tulle, quer sur la place du village toute la popu- forces encore très réduites de terrains de parachutage. Il est furieux. Il préfecture de la Corrèze. Ils font prison- lation par le garde-champêtre « par son la résistance armée et de l’im- démontre à R. Loffroy le caractère aventu- niers les soldats des garnisons alle- de corne ». On sonne le tocsin. Larrivé ins- plantation ennemie. reux et terriblement dangereux de cette mandes. Deux jours plus tard, ces deux >démocratie directe d’un type nouveau, talle son PC dans le local de la pompe à entreprise des FTP de l’Yonne. « Serge » et préfectures sont reconquises par des uni- reconstruction de la France sur la base du Au matin du 6 juin 1944 Marcel incendie et dispose des hommes aux sur la place. Les drapeaux tricolores flot- « Max » doivent admettre le bien fondé de tés de la division Das Reich. Les habitants programme du Conseil national de la Asmus estime sans doute que diverses entrées de Brion. Vers 17h, deux tent sur la mairie et le monument aux ses affirmations. Le 10 juin, ils donnent de Guéret échappent aux représailles, Résistance, publié en mars 1944 et inspi- le Débarquement ouvre l’ère de militaires allemands en moto arrivent de Morts. Les cloches sonnent à la volée. aux maquisards l’ordre d’évacuer les vil- mais 99 habitants de Tulle sont pendus et ré très directement d’un texte rédigé par la libération et il décide de ; les sentinelles tirent, la moto fait Gaston Chavanne est élu maire par accla- lages qu’ils avaient « libérés ». Ces 149 déportés dont 111 ne reviendront le communiste Jacques Duclos. déclencher l'insurrection natio- demi-tour. Larrivé rassemble ses hommes mations. Les FTP défilent en armes et hommes vont constituer l’ossature de la pas. Dans l’Yonne les libérations antici- Au matin du 6 juin 1944 Marcel Asmus nale dans le département de et tous partent en direction de Bussy-en- décident d’attaquer le poste de surveillan- compagnie FTP Rouget de Lisle. pées ne sont pas étrangères au massacre estime sans doute que le Débarquement l'Yonne. Othe. A Bussy, Chamfroy dispose d’une ce allemand installé dans le clocher de Dans l’après-midi du 8 juin, tandis que les de la famille Dumont à Guerchy le 13 juin ouvre l’ère de la Libération et il décide de trentaine d’hommes dont André Dessèvre l’église de Pourrain. Après une courte hommes sont rassemblés sur la place de et ont sans doute renforcé les Allemands déclencher l'insurrection nationale dans part l’est du département où il agira avec (« Dany »), venu de Migennes, prend le fusillade, ils doivent se replier précipitam- Bussy-en-Othe et attendent « Dany » qui dans leur détermination à anéantir les le département de l’Yonne. Il sépare le le maquis Vauban. commandement. ment à l’arrivée des renforts. Après cette est parti chercher un véhicule, alors « bandes terroristes » comme le montrent département en deux zones, Nord et Sud, opération, les FTP se rendent à Mailly-la- qu’aucun poste de garde n’a été disposé les attaques des maquis dans les jours qui chacune divisée en plusieurs secteurs. « Libérations » dans « Libérations » dans l’Auxerrois et le Ville où ils tuent deux Allemands au cours aux entrées du village, un véhicule alle- suivent. Chaque membre du CMR se voit confier la la forêt d’Othe Tonnerrois d’un accrochage. mand arrive par la route, entre dans le vil- Dans notre département ces initiatives responsabilité d'un secteur du départe- Robert Loffroy arrive à Bérulle, petit villa- Asmus arrive au maquis Vauban le 7 juin. Il Georges Montchanin prend contact avec lage et ouvre le feu. La panique s’empare apparaissent particulièrement aventu- ment, à charge pour lui d’y déclencher l’in- ge de l’Aube à la limite de l’Yonne, dans la en prend le commandement et occupe la Roland Souday, responsable des des jeunes maquisards. Chamfroy ne se reuses et prématurées compte-tenu de sa surrection en s’appuyant sur les forces nuit du 6 au 7 juin. Il rassemble les résis- mairie d’Asnières-en-Montagne vers 21h. Il Jeunesses communistes puis du Front montre pas à la hauteur de la situation. Un situation géographique, des forces encore locales des FTP, maquisards et séden- tants sédentaires de Bérulle, de Boeurs- FTPfait poster des sentinelles autour du villa- national./ Tous deux se rendent à Guerchy homme est tué, tous se dispersent dans la très réduites de la résistance armée et de taires. Robert Loffroy écrit dans ses en-Othe ainsi que les hommes du maquis ge et mobilise tous les hommes de 18 à 35 chez les Dumont, pour y chercher des crainte des représailles. l’implantation ennemie. Robert Loffroy Souvenirs de Guerre : « Nous avions la Politzer. Ils occupent la mairie, pavoisent ans qu’il a décidé d’incorporer dans la armes. A Branches comme à Guerchy, on Constatant que l’insurrection ne s’étend estime aujourd’hui que ce fut une « action conviction qu’à l’annonce du Débarquement, aux couleurs tricolores et mettent en compagnie Vauban. Il fait faire des bras- bat le tambour et on occupe la mairie. Les pas, admonesté par le maire du village, irréfléchie aux conséquences négatives les Français, dans leur immense majorité place un nouveau conseil municipal. Les sards aux femmes du village et instruire jeunes sont mobilisés, des arbres coupés Marcel Asmus doit renoncer à son entre- incalculables ». On retiendra aussi que allaient se lever et participer au combat volontaires affluent ; « les revolvers, les les jeunes recrues. en travers des routes. Le 8 juin vers 20 h, prise et laisser tous les mobilisés rentrer ces événements sont révélateurs des libérateur. L’année précédente, (ceci est fusils de récupération sortent de partout » Guy Garoche rassemble dans les Bois un convoi allemand fait demi-tour devant chez eux dans les jours qui suivent. Il est immenses espoirs suscités par le important, cette action est prévue depuis raconte R. Loffroy. Un avion de chasse Labbé, entre Lichères et Aigremont, les l’un de ces barrages. lui même rappelé à Dijon peu après. Débarquement et de la culture politique de longtemps, donc) le Parti m’avait confié en allemand ayant fait un atterrissage forcé maquisards des trois groupes Desmoulins, R. Loffroy explique dans ses Mémoires de ceux qui les déclenchèrent. Ils montrent dépôt un important stock de petits tracts près du hameau du Bois de Rigny, les Leroy et Mirabeau qui constituent le Après l’enthousiasme, guerre que le groupe FTP de Guerchy était encore que le travail d’unification de la bleus qui, ayant pour titre « Les Alliés sont hommes du maquis Politzer ont capturé le noyau de la compagnie FTP Colbert. Il l’inquiétude, le réalisme réduit et que les volontaires qui prirent Résistance est loin d’être achevé, que les débarqués » appelaient les Français à l’in- pilote et l’ont amené à la mairie de Bérulle. reçoit le 7 juin au matin l’ordre de Maurice et le drame alors les armes étaient de jeunes gens stratégies des uns et des autres sont pro- surrection. » Des véhicules allemands font demi tour Sellier d’attaquer les Allemands, partout Au soir du 7 juin, R. Loffroy sent monter en qu’il avait jusqu’alors « tenu à l’écart de la fondément divergentes. Enfin, et ce n’est Les tâches sont réparties : à Robert devant les barragesPCF routiers. Un avion où ils seront en état d’infériorité. Maurice lui « une sourde inquiétude » : « à part Résistance, les jugeant trop légers de pas le moins important, que si l’opinion de Loffroy (« Serge »), le nord-est de la forêt d’observation survole le secteur. Sellier n’applique donc pas les ordres Bérulle et Arces, rien ne semblait bouger. caractère ou qui, en raison de leur com- la grande majorité de la population est d’Othe, à René Millereau (« Max ») le sud- René Millereau arrive à Arces dans la d’Asmus de déclencher l’insurrection, Le soulèvement général qui, selon nos portement dans leur vie privée, ne jouis- favorable à la Résistance, elle n’en demeu- ouest de la même région, à André même nuit. Il réveille Henri Lefèvre, chef mais il choisit de lancer la guérilla. espoirs, devait spontanément se produire saient pas de la confiance de la popula- re pas moins encore prudente, voir atten- Chamfroy, le secteur de Migennes, à d’un groupe local de sédentaires et lui Garoche et ses hommes occupent tardait vraiment à se manifester ». Il n’a tion. » Il constate d’ailleurs avec regret tiste ; elle ne s’engage pas. ❚JOËL DROGLAND Georges Montchanin le secteur de ordonne de mobiliser ses hommes et de Lichères. Le 8 juin, ils tendent une embus- aucun contact avec les autres respon- que « des menaces inconsidérées profé- Sources : ADY, 6W 22570. Loffroy Robert, Souvenirs de Guerchy, à Maurice Sellier et Guy Garoche, remettre les armes dont il dispose. Les cade à un autocar d’Allemands. Quelques sables FTP qui devaient déclencher l’in- rées à l’égard de certains habitants, des Guerre, manuscrit inédit. Témoignage de Robert l’Avallonnais ; Asmus se réserve pour sa sédentaires d’Avrolles accourent. « Max » jours plus tard, ils abattent deux soldats surrection dans les autres secteurs du propos et des gestes outranciers allaient Loffroy (1999). 10 11 Yonne numéro 12 - mai 2004 Mémoire > La straté gie du PCF et des FTP JUIN 44

Ruines de la maison de la famille Dumont établit des barrages sur les routes qui allemands. Le 7 juin, trois maquisards : département. Dans la journée du 9 juin bien vite les couper d’une partie de la Archives privées : « une auto s’arrêtait population ». Robert Loffroy conduisent à Arces, particulièrement sur Maurice Sellier, Guy Mathieu et Ferrucio raconte R. Loffroy, Prenant acte de cette situa- la RN 5. Villechétive est également « libé- Ricco arrivent à Diges dans la camionnet- soudain devant la mairie de Bérulle. Elle tion, l’état-major FTP décide de faire éva- ré ». « Max » et « Serge » roulent désor- te du maraîcher après être passés à était aussitôt entourée par la population cuer Guerchy le 13 juin. C’est dans ce mais dans des voitures réquisitionnées. Guerchy chercher des armes au domicile qui accourait à sa vue. C’était une voiture contexte que les Allemands investissent Le 6 juin au soir, Champfroy arrive au d’une famille de résistants sédentaires, découverte et occupée par quatre ou cinq le village, attaquent la maison Dumont et hameau de La Fourchotte où il rassemble les Dumont. Ils retrouvent les maquisards gars, casqués et équipés de vêtements en massacrent les habitants. une trentaine d’hommes : le groupe FTP et sédentaires locaux que commande militaires et armés jusqu’aux dents. Un Minard qui y réside et que commande Gaston Chavanne. C’est l’effervescence seul était en civil. Très beau garçon, il se De tels événements se sont produits dans René Larrivé, les sédentaires de Laroche présentait à moi comme étant le comman- de nombreux départements du centre, du et ceux de Bussy-en-Othe. Le 7 juin en Dans notre département ces dant Francoeur ». Jean-Marie Reynaud sud et de l’ouest de la France. A plusieurs début d’après-midi René Larrivé accom- initiatives apparaissent parti- (« Francoeur ») est le responsable du reprises ils ont conduit à des drames. Le pagné de trois maquisards prend posses- culièrement aventureuses et Bureau des opérations aériennes (BOA) 7 juin 1944, sur ordre de la direction du sion de la mairie de Brion et du clocher prématurées compte-tenu de sa de l’Aube et le chef du maquis de Saint- PCF de zone Sud, des FTP investissent dont il fait un observatoire. Il fait convo- situation géographique, des Mards-en-Othe qui assure la sécurité des Guéret, préfecture de la Creuse, et Tulle, quer sur la place du village toute la popu- forces encore très réduites de terrains de parachutage. Il est furieux. Il préfecture de la Corrèze. Ils font prison- lation par le garde-champêtre « par son la résistance armée et de l’im- démontre à R. Loffroy le caractère aventu- niers les soldats des garnisons alle- de corne ». On sonne le tocsin. Larrivé ins- plantation ennemie. reux et terriblement dangereux de cette mandes. Deux jours plus tard, ces deux >démocratie directe d’un type nouveau, talle son PC dans le local de la pompe à entreprise des FTP de l’Yonne. « Serge » et préfectures sont reconquises par des uni- reconstruction de la France sur la base du Au matin du 6 juin 1944 Marcel incendie et dispose des hommes aux sur la place. Les drapeaux tricolores flot- « Max » doivent admettre le bien fondé de tés de la division Das Reich. Les habitants programme du Conseil national de la Asmus estime sans doute que diverses entrées de Brion. Vers 17h, deux tent sur la mairie et le monument aux ses affirmations. Le 10 juin, ils donnent de Guéret échappent aux représailles, Résistance, publié en mars 1944 et inspi- le Débarquement ouvre l’ère de militaires allemands en moto arrivent de Morts. Les cloches sonnent à la volée. aux maquisards l’ordre d’évacuer les vil- mais 99 habitants de Tulle sont pendus et ré très directement d’un texte rédigé par la libération et il décide de Joigny ; les sentinelles tirent, la moto fait Gaston Chavanne est élu maire par accla- lages qu’ils avaient « libérés ». Ces 149 déportés dont 111 ne reviendront le communiste Jacques Duclos. déclencher l'insurrection natio- demi-tour. Larrivé rassemble ses hommes mations. Les FTP défilent en armes et hommes vont constituer l’ossature de la pas. Dans l’Yonne les libérations antici- Au matin du 6 juin 1944 Marcel Asmus nale dans le département de et tous partent en direction de Bussy-en- décident d’attaquer le poste de surveillan- compagnie FTP Rouget de Lisle. pées ne sont pas étrangères au massacre estime sans doute que le Débarquement l'Yonne. Othe. A Bussy, Chamfroy dispose d’une ce allemand installé dans le clocher de Dans l’après-midi du 8 juin, tandis que les de la famille Dumont à Guerchy le 13 juin ouvre l’ère de la Libération et il décide de trentaine d’hommes dont André Dessèvre l’église de Pourrain. Après une courte hommes sont rassemblés sur la place de et ont sans doute renforcé les Allemands déclencher l'insurrection nationale dans part l’est du département où il agira avec (« Dany »), venu de Migennes, prend le fusillade, ils doivent se replier précipitam- Bussy-en-Othe et attendent « Dany » qui dans leur détermination à anéantir les le département de l’Yonne. Il sépare le le maquis Vauban. commandement. ment à l’arrivée des renforts. Après cette est parti chercher un véhicule, alors « bandes terroristes » comme le montrent département en deux zones, Nord et Sud, opération, les FTP se rendent à Mailly-la- qu’aucun poste de garde n’a été disposé les attaques des maquis dans les jours qui chacune divisée en plusieurs secteurs. « Libérations » dans « Libérations » dans l’Auxerrois et le Ville où ils tuent deux Allemands au cours aux entrées du village, un véhicule alle- suivent. Chaque membre du CMR se voit confier la la forêt d’Othe Tonnerrois d’un accrochage. mand arrive par la route, entre dans le vil- Dans notre département ces initiatives responsabilité d'un secteur du départe- Robert Loffroy arrive à Bérulle, petit villa- Asmus arrive au maquis Vauban le 7 juin. Il Georges Montchanin prend contact avec lage et ouvre le feu. La panique s’empare apparaissent particulièrement aventu- ment, à charge pour lui d’y déclencher l’in- ge de l’Aube à la limite de l’Yonne, dans la en prend le commandement et occupe la Roland Souday, responsable des des jeunes maquisards. Chamfroy ne se reuses et prématurées compte-tenu de sa surrection en s’appuyant sur les forces nuit du 6 au 7 juin. Il rassemble les résis- mairie d’Asnières-en-Montagne vers 21h. Il Jeunesses communistes puis du Front montre pas à la hauteur de la situation. Un situation géographique, des forces encore locales des FTP, maquisards et séden- tants sédentaires de Bérulle, de Boeurs- FTPfait poster des sentinelles autour du villa- national./ Tous deux se rendent à Guerchy homme est tué, tous se dispersent dans la très réduites de la résistance armée et de taires. Robert Loffroy écrit dans ses en-Othe ainsi que les hommes du maquis ge et mobilise tous les hommes de 18 à 35 chez les Dumont, pour y chercher des crainte des représailles. l’implantation ennemie. Robert Loffroy Souvenirs de Guerre : « Nous avions la Politzer. Ils occupent la mairie, pavoisent ans qu’il a décidé d’incorporer dans la armes. A Branches comme à Guerchy, on Constatant que l’insurrection ne s’étend estime aujourd’hui que ce fut une « action conviction qu’à l’annonce du Débarquement, aux couleurs tricolores et mettent en compagnie Vauban. Il fait faire des bras- bat le tambour et on occupe la mairie. Les pas, admonesté par le maire du village, irréfléchie aux conséquences négatives les Français, dans leur immense majorité place un nouveau conseil municipal. Les sards aux femmes du village et instruire jeunes sont mobilisés, des arbres coupés Marcel Asmus doit renoncer à son entre- incalculables ». On retiendra aussi que allaient se lever et participer au combat volontaires affluent ; « les revolvers, les les jeunes recrues. en travers des routes. Le 8 juin vers 20 h, prise et laisser tous les mobilisés rentrer ces événements sont révélateurs des libérateur. L’année précédente, (ceci est fusils de récupération sortent de partout » Guy Garoche rassemble dans les Bois un convoi allemand fait demi-tour devant chez eux dans les jours qui suivent. Il est immenses espoirs suscités par le important, cette action est prévue depuis raconte R. Loffroy. Un avion de chasse Labbé, entre Lichères et Aigremont, les l’un de ces barrages. lui même rappelé à Dijon peu après. Débarquement et de la culture politique de longtemps, donc) le Parti m’avait confié en allemand ayant fait un atterrissage forcé maquisards des trois groupes Desmoulins, R. Loffroy explique dans ses Mémoires de ceux qui les déclenchèrent. Ils montrent dépôt un important stock de petits tracts près du hameau du Bois de Rigny, les Leroy et Mirabeau qui constituent le Après l’enthousiasme, guerre que le groupe FTP de Guerchy était encore que le travail d’unification de la bleus qui, ayant pour titre « Les Alliés sont hommes du maquis Politzer ont capturé le noyau de la compagnie FTP Colbert. Il l’inquiétude, le réalisme réduit et que les volontaires qui prirent Résistance est loin d’être achevé, que les débarqués » appelaient les Français à l’in- pilote et l’ont amené à la mairie de Bérulle. reçoit le 7 juin au matin l’ordre de Maurice et le drame alors les armes étaient de jeunes gens stratégies des uns et des autres sont pro- surrection. » Des véhicules allemands font demi tour Sellier d’attaquer les Allemands, partout Au soir du 7 juin, R. Loffroy sent monter en qu’il avait jusqu’alors « tenu à l’écart de la fondément divergentes. Enfin, et ce n’est Les tâches sont réparties : à Robert devant les barragesPCF routiers. Un avion où ils seront en état d’infériorité. Maurice lui « une sourde inquiétude » : « à part Résistance, les jugeant trop légers de pas le moins important, que si l’opinion de Loffroy (« Serge »), le nord-est de la forêt d’observation survole le secteur. Sellier n’applique donc pas les ordres Bérulle et Arces, rien ne semblait bouger. caractère ou qui, en raison de leur com- la grande majorité de la population est d’Othe, à René Millereau (« Max ») le sud- René Millereau arrive à Arces dans la d’Asmus de déclencher l’insurrection, Le soulèvement général qui, selon nos portement dans leur vie privée, ne jouis- favorable à la Résistance, elle n’en demeu- ouest de la même région, à André même nuit. Il réveille Henri Lefèvre, chef mais il choisit de lancer la guérilla. espoirs, devait spontanément se produire saient pas de la confiance de la popula- re pas moins encore prudente, voir atten- Chamfroy, le secteur de Migennes, à d’un groupe local de sédentaires et lui Garoche et ses hommes occupent tardait vraiment à se manifester ». Il n’a tion. » Il constate d’ailleurs avec regret tiste ; elle ne s’engage pas. ❚JOËL DROGLAND Georges Montchanin le secteur de ordonne de mobiliser ses hommes et de Lichères. Le 8 juin, ils tendent une embus- aucun contact avec les autres respon- que « des menaces inconsidérées profé- Sources : ADY, 6W 22570. Loffroy Robert, Souvenirs de Guerchy, à Maurice Sellier et Guy Garoche, remettre les armes dont il dispose. Les cade à un autocar d’Allemands. Quelques sables FTP qui devaient déclencher l’in- rées à l’égard de certains habitants, des Guerre, manuscrit inédit. Témoignage de Robert l’Avallonnais ; Asmus se réserve pour sa sédentaires d’Avrolles accourent. « Max » jours plus tard, ils abattent deux soldats surrection dans les autres secteurs du propos et des gestes outranciers allaient Loffroy (1999). 10 11 Yonne numéro 12 - mai 2004 Mémoire > La straté gie de Libé ration-Nord JUIN 44

Nous avons évoqué Libération-Nord dans un précédent numéro de Yonne-Mémoire. Nous nous proposons de présenter ici chefs départementaux de Libération- demi. Je lui ai donné pas mal de rendez- sachiez bien : les gens d’ici : paysans, arti-

la stratégie du mouvement en juin 1944. Nous le ferons à travers le regard de Jean Chapelle, que nous désignerons LIB Aube, Nièvre, Yonne-.» vous et je n’ai jamais pu le joindre […] Je lui sans, ouvriers d’usine, bien entendu, désormais sous son pseudonyme de « Verneuil ». Il est venu dans l’ Yonne en juin 1943. Cette approche est bien enten- « Verneuil » maintient son attitude, il se ai procuré une ronéo qu’il a cachée et que employés divers, sympathisent instincti- due partielle, mais nous bénéficions de trois documents, de « Verneuil », une instruction aux responsables militaires du place avec discipline dans le cadre des je n’ai pu reprendre, ce qui paralyse le tra- vement avec Libération parce qu’ils en mouvement dans l’Yonne, datée du 8 juin ; une lettre à Gaston Vée, « Lejeune », du 14 juin, que nous avons déjà évoquée FFI, et pour au moins deux raisons, qui se vail de propagande. » Il fait un tableau espèrent quelque chose. Le Front National ; G. Vée a remplacé Pierre Vauthier après l’arrestation de ce dernier, en mars 1944, comme responsable civil du mouve- rejoignent. Il réalise, avec beaucoup de assez sombre de la situation du mouve- les inquiète par son activité prématurée ( ment ; enfin un courrier du 6 juillet, destiné à la direction du mouvement, probablement à Henri Ribière. lucidité, que pour beaucoup de résistants, ment un mois après le débarquement : voir sur ce point l’article de Joël Drogland pour la partie de la population qui sympa- « Les effectifs de Libération se montaient sur les opérations de libération entre- thise avec la Résistance, les divisions à 8000 environ en mars et se localisaient prises par les FTP) ; l’ ORA les exaspère par entre résistants seraient très mal accep- dans tout le département. Aujourd’hui, j’ai son esprit de caserne et de réaction. Je La stratégie du responsable militaire de tées, mais il sait que pour se développer, 2000 hommes, ce qui est bien (ces rencontre au gré de mes déplacements un pour atteindre ses objectifs, Libération- chiffres sont bien entendu à prendre avec grand mouvement de sympathie en Libération-Nord de l’Yonne en juin 1944 Nord doit démontrer sa capacité dans les beaucoup de précautions, notamment faveur d’un groupe qui préparerait l’avenir, NORD combats à venir, et pour cela doit profiter ceux de mars qui sont très surestimés ). car maintenant nous avons obtenu que les

ser plus loin. Le calme, l’esprit de discipli- n’est évidemment pas question «d’ insur- É de la logistique FFI, et de ses moyens Je ne contrôle que deux secteurs ( une gens y songent. ne et la plus ferme volonté de combattre rection ». Il n’applique pas les consignes ( liaisons avec Londres contrôlées par quinzaine de cantons ). Mais les gens et surtout les jeunes veulent sont les trois qualités nécessaires à la contenues dans les messages de la BBC Koenig, armes). Il espère que Libération, Libération a donc perdu beaucoup. Je n’ai avant tout se battre et Libération n’a rien à réussite de notre but. Vous ne devez du 5 juin, il se range aux schémas prévus devenu le mouvement le plus puissant plus personne à Auxerre, ni à Sens, ni à leur mettre en mains. De cette façon non jamais l’oublier. Il est possible que nous ne du « Bloc Planning », et dans l’instruction « dirigera la Résistance dans l’Yonne », et Joigny. Tous nos anciens camarades de seulement le gros de la population, tout en

commencions la lute que dans deux ou de de Gaulle du 16 mai. « Verneuil » mobi- RATION- permettra aux idées socialistes de l’em- ces parages sont passés à l’ ORA ou au étant de pensée avec nous, nous quitte ; trois semaines au plus. Vous avez mainte- lise, prépare les forces du mouvement, porter. Il semble travailler à la consolida- Service national maquis. Grosse propa- mais les jeunes que nous pourrions édu- nant l’assurance que les Alliés s’appuie- mais ne lance pas l’action. tion de Libération, « si mon affaire gande contre nous, contre moi et mon quer dans le maquis, se dirigent là où on ront sur nous ( message du général marche. Émile s’y emploie beaucoup ( il adjoint. Je n’ai pas d’armes et c’est la leur procure bazookas et mousquetons Eisenhower au peuple français du 6 juin Une stratégie très politique s’agit sans doute d’Ernest Laureillard ) » ; seule raison de ces défections [...] Ce mitrailleurs. Je sais bien que cela est un 1944 ). Mes chefs et moi, nous vous don- La lettre du 14 juin est de nature très dif- il est en train de constituer dans la forêt manque d’armes m’a forcé à passer la tout petit épisode dans la révolution qui nons à notre tour l’assurance que vous férente ; elle s’adresse au responsable d’Othe un rassemblement qu’il souhaite moitié de mes maquis à l’ ORA [...] Je vous vient et que nos partisans nous revien- serez armés sous peu. Attendez mainte- civil de Libération-Nord, G. Vée, son ton est important de maquisards. demande encore une fois de faire votre dront bien un jour. Mais je crois utile de nant nos ordres pour agir. Nos ordres très direct. Elle confirme l’instruction du 8 Mais « Verneuil » est-il très réaliste ? Il possible pour m’avoir des armes [...] Je commencer dès maintenant leur forma- directs et non ceux de la radio anglaise, juin. « Verneuil » écrit : « Le mouvement évoque la création d’un NAP ( Noyautage suis, bien entendu en rapport avec le BOA tion, de déclencher dès maintenant un qui ne peut connaître toutes les conditions qui dirigera la Résistance dans l’Yonne ne des Administrations Publiques, organisa- local. Mais son mauvais vouloir est systé- mouvement de pensées en faveur d’une d’une action locale. peut être FFI ( je veux dire le commande- tion présente notamment dans les préfec- matique.. » Ce que dit « Verneuil » ici est rénovation sociale. Une simple question Je vous avertis en outre de ceci : toutes les ment, presque inconnu des hommes ), tures, les sous-préfectures, etc.) : « bien loin de la réalité telle que nous la connais- de matériel nous freine. » formations de résistance, tant groupes mais bien le groupement qui aura le plus entendu, c’est un NAP Libération », puis il sons aujourd’hui : l’ORA ( l’Organisation de Cette vision est très significative de ce paramilitaires que comités civils, sont d’hommes disciplinés et armés et ordon- écrit : « Pour les groupes de Résistance de Résistance de l’Armée ) n’a jamais été que préconise la direction du mouvement, « Verneuil » mises sous le commandement direct du nés. Si mon affaire marche , c’est la Puisaye, faîtes les adhérer dès mainte- présente dans les régions de Sens et dont les membres appartiennent au Archives privées : Robert Blot. bureau FFI départemental, par consé- Libération qui est en voie de le devenir. nant. Je passerai deux ou trois jours dans Joigny. Par contre à Joigny, le groupe Comité d’Action socialiste (parti socialiste quent sont militarisées complètement. Mais à une condition : une entente parfai- cette région pour les organiser et leur Bayard a été rattaché à Libération-Nord, clandestin). Dans le CDL, Libération-Nord ’instruction du 8 juin commence par Tout ordre non exécuté ou toute infraction te avec les chefs FFI et une entière fran- apporter des armes. » C’est une phrase même si les relations entre Paul Herbin et est fortement représenté, le préfet de la ce long préambule : « La fin tant aux consignes qui vont suivre seront chise avec eux. N’oubliez pas que ce sont étonnante, car pour l’essentiel, à notre « Verneuil » sont mauvaises, ce dernier Libération, Gibaud, appartient au mouve- Lattendue du débarquement est arri- sévèrement punies, selon les lois mili- eux qui reçoivent les consignes d’action connaissance, il n’y a pas eu de NAP dans acceptant très mal l’indépendance de ment. Il reste à donner à Libération-Nord vée. A partir d’aujourd’hui commence la taires. » immédiate, le matériel, etc. N’oubliez pas l’Yonne ( y a-t-il eu un NAP à la préfecture ? ), et Bayard. une force militaire qui lui permette de période insurrectionnelle, mais je vous Et dans toutes les consignes, « Verneuil » que les gens de bonne volonté qui tra- d’autre part les membres clandestins du Libération-Nord a connu un mois de juin s’imposer naturellement le moment venu. rappelle dès maintenant que le jour du ordonne de ne pas pour le moment lancer vaillent actuellement chez nous ne com- Mouvement Résistance, après la crise de très difficile, avec les attaques meur- Est-ce-que cela n’expliquerait pas les débarquement ne constitue et n’a jamais l’action ; aux groupes francs il dit : « ces- prendraient pas que nous marchions, l’automne 1943, ont rejoint pour la plupart trières contre les maquis de la forêt risques considérables pris à la fin du mois nous Libération, « en enfants perdus » le Service national maquis. Ceci donne d’Othe ( voir l’article sur les attaques de juillet pour réaliser le plus grand ras- « VOUS AVEZ MAINTENANT L’ASSURANCE QUE LES ALLIÉS S’APPUIE- dans la bataille qui va commencer. C’est l’impression que Verneuil surestime les contre les maquis ). « Verneuil » évoque semblement de maquisards aux Iles RONT SUR NOUS ( MESSAGE DU GÉNÉRAL EISENHOWER AU PEUPLE bien le sentiment général : tout le monde forces et l’influence de Libération-Nord. ces pertes dans ce courrier ; il indique Ménéfrier ? Mais « Verneuil » n’exagère-t- FRANÇAIS DU 6 JUIN 1944 ). MES CHEFS ET MOI, NOUS VOUS DONNONS veut être FFI et je suis le premier à dire, aussi sa décision de revenir à des groupes il pas l’influence politique de son mouve- pour le moment, « soyons FFI » [...] Ainsi, Au début de juillet, des convictions de 10 hommes, abandonnant ce qu’il ment ? Quand il aura des armes, les À NOTRE TOUR L’ASSURANCE QUE VOUS SEREZ ARMÉS SOUS PEU. pour le moment, tout en développant en intactes mais beaucoup de désarroi appelle les « gros maquis ». Or, trois jeunes qui sont allés dans d’autres ATTENDEZ MAINTENANT NOS ORDRES POUR AGIR.» sous main l’action de Libération Le courrier du 6 juillet est d’une toute semaines après, sera organisé le grand maquis reviendront-ils ? Rien n’est moins ( et Ernest s’y emploie aussi beaucoup ), je autre tonalité. « Verneuil » y apparaît rassemblement des Iles Ménéfrier, qui sûr.❚JEAN ROLLEY constitué pour nous le signal de nos opé- ser immédiatement toute activité ( sabo- suis foncièrement un FFI. En tant que FFI, isolé, à la fois de la direction du mouve- atteindra environ 1500 hommes ! Malgré Sources : Archives départementales de l’Yonne, ins- rations. Par conséquent, vous devez conti- tage, attaques contre les Allemands, etc.) » je m’oppose à toute action qui pourrait ment, dont il dit ne pas avoir de nouvelles, toutes ces difficultés, « Verneuil » » main- truction du 8 juin ; archives privées de M. G. Vée, lettre manuscrite de J. Chapelle, du 14 juin ; archives de nuer comme auparavant votre activité Les choses semblent très claires, il se faire dévier cette ligne de conduite que je et des autres dirigeants du département : tient les perspectives politiques évoquées Libération-Nord, courrier du 6 juillet, aimablement normale, sauf exceptions que je vais préci- place dans le cadre des directives FFI, il me suis fixée, en accord avec les trois « Je n’ai pas vu Lejeune depuis un mois et le 14 juin : « Je voudrais que vous le communiqué par M. Charles Pot. 12 13 Yonne numéro 12 - mai 2004 Mémoire > La straté gie de Libé ration-Nord JUIN 44

Nous avons évoqué Libération-Nord dans un précédent numéro de Yonne-Mémoire. Nous nous proposons de présenter ici chefs départementaux de Libération- demi. Je lui ai donné pas mal de rendez- sachiez bien : les gens d’ici : paysans, arti-

la stratégie du mouvement en juin 1944. Nous le ferons à travers le regard de Jean Chapelle, que nous désignerons LIB Aube, Nièvre, Yonne-.» vous et je n’ai jamais pu le joindre […] Je lui sans, ouvriers d’usine, bien entendu, désormais sous son pseudonyme de « Verneuil ». Il est venu dans l’ Yonne en juin 1943. Cette approche est bien enten- « Verneuil » maintient son attitude, il se ai procuré une ronéo qu’il a cachée et que employés divers, sympathisent instincti- due partielle, mais nous bénéficions de trois documents, de « Verneuil », une instruction aux responsables militaires du place avec discipline dans le cadre des je n’ai pu reprendre, ce qui paralyse le tra- vement avec Libération parce qu’ils en mouvement dans l’Yonne, datée du 8 juin ; une lettre à Gaston Vée, « Lejeune », du 14 juin, que nous avons déjà évoquée FFI, et pour au moins deux raisons, qui se vail de propagande. » Il fait un tableau espèrent quelque chose. Le Front National ; G. Vée a remplacé Pierre Vauthier après l’arrestation de ce dernier, en mars 1944, comme responsable civil du mouve- rejoignent. Il réalise, avec beaucoup de assez sombre de la situation du mouve- les inquiète par son activité prématurée ( ment ; enfin un courrier du 6 juillet, destiné à la direction du mouvement, probablement à Henri Ribière. lucidité, que pour beaucoup de résistants, ment un mois après le débarquement : voir sur ce point l’article de Joël Drogland pour la partie de la population qui sympa- « Les effectifs de Libération se montaient sur les opérations de libération entre- thise avec la Résistance, les divisions à 8000 environ en mars et se localisaient prises par les FTP) ; l’ ORA les exaspère par entre résistants seraient très mal accep- dans tout le département. Aujourd’hui, j’ai son esprit de caserne et de réaction. Je La stratégie du responsable militaire de tées, mais il sait que pour se développer, 2000 hommes, ce qui est bien (ces rencontre au gré de mes déplacements un pour atteindre ses objectifs, Libération- chiffres sont bien entendu à prendre avec grand mouvement de sympathie en Libération-Nord de l’Yonne en juin 1944 Nord doit démontrer sa capacité dans les beaucoup de précautions, notamment faveur d’un groupe qui préparerait l’avenir, NORD combats à venir, et pour cela doit profiter ceux de mars qui sont très surestimés ). car maintenant nous avons obtenu que les

ser plus loin. Le calme, l’esprit de discipli- n’est évidemment pas question «d’ insur- É de la logistique FFI, et de ses moyens Je ne contrôle que deux secteurs ( une gens y songent. ne et la plus ferme volonté de combattre rection ». Il n’applique pas les consignes ( liaisons avec Londres contrôlées par quinzaine de cantons ). Mais les gens et surtout les jeunes veulent sont les trois qualités nécessaires à la contenues dans les messages de la BBC Koenig, armes). Il espère que Libération, Libération a donc perdu beaucoup. Je n’ai avant tout se battre et Libération n’a rien à réussite de notre but. Vous ne devez du 5 juin, il se range aux schémas prévus devenu le mouvement le plus puissant plus personne à Auxerre, ni à Sens, ni à leur mettre en mains. De cette façon non jamais l’oublier. Il est possible que nous ne du « Bloc Planning », et dans l’instruction « dirigera la Résistance dans l’Yonne », et Joigny. Tous nos anciens camarades de seulement le gros de la population, tout en

commencions la lute que dans deux ou de de Gaulle du 16 mai. « Verneuil » mobi- RATION- permettra aux idées socialistes de l’em- ces parages sont passés à l’ ORA ou au étant de pensée avec nous, nous quitte ; trois semaines au plus. Vous avez mainte- lise, prépare les forces du mouvement, porter. Il semble travailler à la consolida- Service national maquis. Grosse propa- mais les jeunes que nous pourrions édu- nant l’assurance que les Alliés s’appuie- mais ne lance pas l’action. tion de Libération, « si mon affaire gande contre nous, contre moi et mon quer dans le maquis, se dirigent là où on ront sur nous ( message du général marche. Émile s’y emploie beaucoup ( il adjoint. Je n’ai pas d’armes et c’est la leur procure bazookas et mousquetons Eisenhower au peuple français du 6 juin Une stratégie très politique s’agit sans doute d’Ernest Laureillard ) » ; seule raison de ces défections [...] Ce mitrailleurs. Je sais bien que cela est un 1944 ). Mes chefs et moi, nous vous don- La lettre du 14 juin est de nature très dif- il est en train de constituer dans la forêt manque d’armes m’a forcé à passer la tout petit épisode dans la révolution qui nons à notre tour l’assurance que vous férente ; elle s’adresse au responsable d’Othe un rassemblement qu’il souhaite moitié de mes maquis à l’ ORA [...] Je vous vient et que nos partisans nous revien- serez armés sous peu. Attendez mainte- civil de Libération-Nord, G. Vée, son ton est important de maquisards. demande encore une fois de faire votre dront bien un jour. Mais je crois utile de nant nos ordres pour agir. Nos ordres très direct. Elle confirme l’instruction du 8 Mais « Verneuil » est-il très réaliste ? Il possible pour m’avoir des armes [...] Je commencer dès maintenant leur forma- directs et non ceux de la radio anglaise, juin. « Verneuil » écrit : « Le mouvement évoque la création d’un NAP ( Noyautage suis, bien entendu en rapport avec le BOA tion, de déclencher dès maintenant un qui ne peut connaître toutes les conditions qui dirigera la Résistance dans l’Yonne ne des Administrations Publiques, organisa- local. Mais son mauvais vouloir est systé- mouvement de pensées en faveur d’une d’une action locale. peut être FFI ( je veux dire le commande- tion présente notamment dans les préfec- matique.. » Ce que dit « Verneuil » ici est rénovation sociale. Une simple question Je vous avertis en outre de ceci : toutes les ment, presque inconnu des hommes ), tures, les sous-préfectures, etc.) : « bien loin de la réalité telle que nous la connais- de matériel nous freine. » formations de résistance, tant groupes mais bien le groupement qui aura le plus entendu, c’est un NAP Libération », puis il sons aujourd’hui : l’ORA ( l’Organisation de Cette vision est très significative de ce paramilitaires que comités civils, sont d’hommes disciplinés et armés et ordon- écrit : « Pour les groupes de Résistance de Résistance de l’Armée ) n’a jamais été que préconise la direction du mouvement, « Verneuil » mises sous le commandement direct du nés. Si mon affaire marche , c’est la Puisaye, faîtes les adhérer dès mainte- présente dans les régions de Sens et dont les membres appartiennent au Archives privées : Robert Blot. bureau FFI départemental, par consé- Libération qui est en voie de le devenir. nant. Je passerai deux ou trois jours dans Joigny. Par contre à Joigny, le groupe Comité d’Action socialiste (parti socialiste quent sont militarisées complètement. Mais à une condition : une entente parfai- cette région pour les organiser et leur Bayard a été rattaché à Libération-Nord, clandestin). Dans le CDL, Libération-Nord ’instruction du 8 juin commence par Tout ordre non exécuté ou toute infraction te avec les chefs FFI et une entière fran- apporter des armes. » C’est une phrase même si les relations entre Paul Herbin et est fortement représenté, le préfet de la ce long préambule : « La fin tant aux consignes qui vont suivre seront chise avec eux. N’oubliez pas que ce sont étonnante, car pour l’essentiel, à notre « Verneuil » sont mauvaises, ce dernier Libération, Gibaud, appartient au mouve- Lattendue du débarquement est arri- sévèrement punies, selon les lois mili- eux qui reçoivent les consignes d’action connaissance, il n’y a pas eu de NAP dans acceptant très mal l’indépendance de ment. Il reste à donner à Libération-Nord vée. A partir d’aujourd’hui commence la taires. » immédiate, le matériel, etc. N’oubliez pas l’Yonne ( y a-t-il eu un NAP à la préfecture ? ), et Bayard. une force militaire qui lui permette de période insurrectionnelle, mais je vous Et dans toutes les consignes, « Verneuil » que les gens de bonne volonté qui tra- d’autre part les membres clandestins du Libération-Nord a connu un mois de juin s’imposer naturellement le moment venu. rappelle dès maintenant que le jour du ordonne de ne pas pour le moment lancer vaillent actuellement chez nous ne com- Mouvement Résistance, après la crise de très difficile, avec les attaques meur- Est-ce-que cela n’expliquerait pas les débarquement ne constitue et n’a jamais l’action ; aux groupes francs il dit : « ces- prendraient pas que nous marchions, l’automne 1943, ont rejoint pour la plupart trières contre les maquis de la forêt risques considérables pris à la fin du mois nous Libération, « en enfants perdus » le Service national maquis. Ceci donne d’Othe ( voir l’article sur les attaques de juillet pour réaliser le plus grand ras- « VOUS AVEZ MAINTENANT L’ASSURANCE QUE LES ALLIÉS S’APPUIE- dans la bataille qui va commencer. C’est l’impression que Verneuil surestime les contre les maquis ). « Verneuil » évoque semblement de maquisards aux Iles RONT SUR NOUS ( MESSAGE DU GÉNÉRAL EISENHOWER AU PEUPLE bien le sentiment général : tout le monde forces et l’influence de Libération-Nord. ces pertes dans ce courrier ; il indique Ménéfrier ? Mais « Verneuil » n’exagère-t- FRANÇAIS DU 6 JUIN 1944 ). MES CHEFS ET MOI, NOUS VOUS DONNONS veut être FFI et je suis le premier à dire, aussi sa décision de revenir à des groupes il pas l’influence politique de son mouve- pour le moment, « soyons FFI » [...] Ainsi, Au début de juillet, des convictions de 10 hommes, abandonnant ce qu’il ment ? Quand il aura des armes, les À NOTRE TOUR L’ASSURANCE QUE VOUS SEREZ ARMÉS SOUS PEU. pour le moment, tout en développant en intactes mais beaucoup de désarroi appelle les « gros maquis ». Or, trois jeunes qui sont allés dans d’autres ATTENDEZ MAINTENANT NOS ORDRES POUR AGIR.» sous main l’action de Libération Le courrier du 6 juillet est d’une toute semaines après, sera organisé le grand maquis reviendront-ils ? Rien n’est moins ( et Ernest s’y emploie aussi beaucoup ), je autre tonalité. « Verneuil » y apparaît rassemblement des Iles Ménéfrier, qui sûr.❚JEAN ROLLEY constitué pour nous le signal de nos opé- ser immédiatement toute activité ( sabo- suis foncièrement un FFI. En tant que FFI, isolé, à la fois de la direction du mouve- atteindra environ 1500 hommes ! Malgré Sources : Archives départementales de l’Yonne, ins- rations. Par conséquent, vous devez conti- tage, attaques contre les Allemands, etc.) » je m’oppose à toute action qui pourrait ment, dont il dit ne pas avoir de nouvelles, toutes ces difficultés, « Verneuil » » main- truction du 8 juin ; archives privées de M. G. Vée, lettre manuscrite de J. Chapelle, du 14 juin ; archives de nuer comme auparavant votre activité Les choses semblent très claires, il se faire dévier cette ligne de conduite que je et des autres dirigeants du département : tient les perspectives politiques évoquées Libération-Nord, courrier du 6 juillet, aimablement normale, sauf exceptions que je vais préci- place dans le cadre des directives FFI, il me suis fixée, en accord avec les trois « Je n’ai pas vu Lejeune depuis un mois et le 14 juin : « Je voudrais que vous le communiqué par M. Charles Pot. 12 13 Yonne numéro 12 - mai 2004 Mémoire > Les maquis en juin 1944 JUIN 44

Les maquis à la veille des organisations auboises de résistance. depuis plusieurs mois. Leur regroupement du Débarquement Le maquis de Saint-Mards-en-Othe a été a lieu dans la forêt d’Hervaux, près du Né au début de 1943, installé à la ferme constitué par le Bureau des opérations Grand Val de la Nef. Maurice Sellier et Guy des Essarts près d’Asnières-en-Montagne aériennes (BOA) afin de protéger plu- Garoche en prennent le commandement. (Côte-d’Or), le maquis FTP Vauban est le sieurs terrains de parachutage homolo- Henri Lefèvre qui commandait un déta- plus ancien des maquis de l’Yonne. Les gués au cœur de la forêt d’Othe. Début juin chement de la compagnie Rouget de Lisle quelques autres maquis FTP créés au 1944 la direction auboise des FTP a déci- a refusé d’obéir à l’ordre de départ vers le printemps 1943 ont disparu à l’automne. dé d’implanter un maquis au nord-est sud. Il est resté dans les bois près de Dilo Au printemps 1944 trois organisations d‘Arces, sur le territoire de l’Yonne, c’est le et a constitué avec des hommes venus le créent de nouveaux maquis : les FTP, le maquis de Suy. rejoindre un maquis qu’il a installé dans le AVEC LE DÉBARQUEMENT, Service national maquis et Libération- Plusieurs maquis sont ainsi déjà actifs bois des Centaines, près de Villechétive . Nord. Robert Loffroy, chargé du recrutement au AU PRINTEMPS 1944 TROIS ORGANISATIONS CRÉENT DE NOUVEAUX LA CROISSANCE RAPIDE DES MAQUIS sein de l’état-major départemental FTP MAQUIS : LES FTP, LE SERVICE NATIONAL MAQUIS ET LIBÉRATION-NORD. implante plusieurs maquis dans la forêt d’Othe : le maquis Bourgogne près des dans le département quand se produit le Obligé de reconnaître le fait accompli, DE L’YONNE Bordes, les maquis Victoire et Liberté près Débarquement. Ils se livrent à des sabo- l’état-major FTP en a fait la seconde com- de Paroy-en-Othe, le maquis Politzer près tages, en coopération avec les groupes de pagnie Rouget de Lisle. La Résistance icaunaise est devenue une force structurée, active et combattante en 1943. Les orga- de Bérulle (Aube), le maquis Gaulois près sédentaires. Au sein de Libération-Nord, l’organisation de , le maquis des Clérimois près Le Débarquement a un triple effet sur les des maquis se renforce également. Le nisations de résistance se sont alors solidement implantées à partir de groupes locaux constitués de Sens. Attaques ou menaces d’attaque maquis de l’Yonne : leur nombre augmente, maquis Garnier a pris position près de dans les deux années précédentes. La réception de parachutages et les premiers sabotages s’ajou- les ont contraint à quitter la forêt d’Othe leurs effectifs explosent, leur stratégie , à Villers-Tournois, sur les tent alors aux actions de propagande. Quelques petits groupes d’hommes armés se constituent en et la plupart de leurs éléments se sont évolue. falaises qui dominent la route. Le 8 juin il maquis au début de l’été 1943. Les attaques de l’ennemi et les rigueurs du climat les contraignent à regroupés sur la rive gauche de l’Yonne, est attaqué par un détachement de disparaître au début de l’hiver. Au printemps 1944, tandis que grandit l’espoir d’un débarquement près de Saint-Sérotin où ils vont constituer La naissance de nouveaux maquis Russes blancs et doit se replier. Regroupé allié et que les conditions de l’occupation se durcissent encore, les maquis se multiplient. le noyau du maquis Paul Bert. Chez les FTP on assiste à un double phé- à Villiers-la-Grange, il y est attaqué de Le Service national maquis s’implante nomène simultané : la création de nou- nouveau le lendemain. Dans le Tonnerrois, L’événement tant attendu se produit le 6 juin 1944 sur les plages de Normandie. dans le département au printemps 1944. veaux maquis et l’organisation de compa- le maquis Aillot reste actif quelques jours Quel est son impact sur les maquis de l’Yonne ? Il crée son premier maquis dans un bois gnies qui regroupent maquisards et encore, mais il ne survivra pas à l’attaque du situé entre Mézilles et Saint-Sauveur, près sédentaires d’un même secteur géogra- 18 juin 1944 (voir l’article sur les attaques Maquisards dans la forêt (été de la ferme des Vrines : ce sera le Maquis phique. Au nord du département contre les maquis). 1944). Source : Musée de la 3. Il réceptionne son premier parachutage Constantino Simo (capitaine « Castagne ») Au lendemain du Débarquement, Résistance, Auxerre. le 23 mai 1944. L’organisation se fonde sur prend la direction du maquis Paul Bert qui « Verneuil » conçoit la création d’un les militants rescapés du démantèlement devient une compagnie. Le maquis se ren- maquis d’un type nouveau, adapté à une du mouvement Résistance en 1943. Pour force, se structure et se déplace dans les nouvelle tactique. Il s’agit de créer un puis- cette raison, le Service national maquis bois de Chatillon près de le sant maquis qui deviendrait une unité est essentiellement implanté en Puisaye : 1er juillet. A la suite de l’échec des « libé- combattante intégrée dans les plans stra- le Maquis 1 entre Saint-Fargeau et Charny, rations anticipées » (voir notre article tégiques alliés de la libération du territoi- le Maquis 2 à l’orée de la forêt de Merry- p9), 80 maquisards et sédentaires de la re. Il fait accepter son projet par Marcel Vaux, le Maquis 4 dans un secteur triangu- forêt d’Othe sont regroupés près de Dilo Choupot, chef départemental FFI. La laire délimité par les routes Auxerre- où ils constituent la compagnie Rouget de région choisie est la partie centrale de la Clamecy et Auxerre-Avallon. La localisa- Lisle commandée par le très douteux lieu- forêt d’Othe, autour de , à la limite tion du Maquis 6 (ou maquis Bourgogne) tenant « Jo ». Ayant reçu l’ordre de gagner des départements de l’Yonne et de l’Aube, dans la forêt d’Othe est une exception à la le sud du département, la compagnie près des maquis aubois de Suy et de règle de localisation en Puisaye. s’installe en maquis près de la Ferté- Saint-Mards-en-Othe. Les premiers Libération-Nord a envoyé dans l’Yonne Loupière. Relevé de son commandement hommes s’installent près du hameau de Jean Chapelle (« Verneuil ») au printemps vers le 20 juin parce que ses méthodes Vaudevannes le 12 juin ; « Verneuil » arri- 1943, avec la fonction de responsable font fuir les hommes, « Jo » est remplacé ve le lendemain pour installer son PC dans militaire. Il a implanté solidement son par Paul Charruet. La compagnie est atta- le maquis baptisé Horteur. Ce maquis ne organisation dans le Tonnerrois et quée le 25 juin à Chevillon. Elle est dissou- survivra pas à la puissante attaque du 23 l’Avallonnais et contrôle deux maquis au te à la fin du mois et la trentaine de res- juin. « Verneuil » renonce pour un temps à printemps 1944 : le maquis Garnier près capés intègrent la compagnie Colbert son choix d’un grand rassemblement ( voir d’Avallon et le maquis Aillot au sud de dans les bois de Lisle-sur-Serein. Cette l’article sur sa stratégie, et son courrier du Tonnerre. compagnie est née un mois plus tôt de la 6 juillet ). Mais il y reviendra très vite, et Deux importants maquis doivent encore fusion de quatre petits groupes mobiles organisera le grand rassemblement des être mentionnés bien qu’ils dépendent de maquisards constitués pour certains Iles Ménéfrier. > 14 15 Yonne numéro 12 - mai 2004 Mémoire > Les maquis en juin 1944 JUIN 44

Les maquis à la veille des organisations auboises de résistance. depuis plusieurs mois. Leur regroupement du Débarquement Le maquis de Saint-Mards-en-Othe a été a lieu dans la forêt d’Hervaux, près du Né au début de 1943, installé à la ferme constitué par le Bureau des opérations Grand Val de la Nef. Maurice Sellier et Guy des Essarts près d’Asnières-en-Montagne aériennes (BOA) afin de protéger plu- Garoche en prennent le commandement. (Côte-d’Or), le maquis FTP Vauban est le sieurs terrains de parachutage homolo- Henri Lefèvre qui commandait un déta- plus ancien des maquis de l’Yonne. Les gués au cœur de la forêt d’Othe. Début juin chement de la compagnie Rouget de Lisle quelques autres maquis FTP créés au 1944 la direction auboise des FTP a déci- a refusé d’obéir à l’ordre de départ vers le printemps 1943 ont disparu à l’automne. dé d’implanter un maquis au nord-est sud. Il est resté dans les bois près de Dilo Au printemps 1944 trois organisations d‘Arces, sur le territoire de l’Yonne, c’est le et a constitué avec des hommes venus le créent de nouveaux maquis : les FTP, le maquis de Suy. rejoindre un maquis qu’il a installé dans le AVEC LE DÉBARQUEMENT, Service national maquis et Libération- Plusieurs maquis sont ainsi déjà actifs bois des Centaines, près de Villechétive . Nord. Robert Loffroy, chargé du recrutement au AU PRINTEMPS 1944 TROIS ORGANISATIONS CRÉENT DE NOUVEAUX LA CROISSANCE RAPIDE DES MAQUIS sein de l’état-major départemental FTP MAQUIS : LES FTP, LE SERVICE NATIONAL MAQUIS ET LIBÉRATION-NORD. implante plusieurs maquis dans la forêt d’Othe : le maquis Bourgogne près des dans le département quand se produit le Obligé de reconnaître le fait accompli, DE L’YONNE Bordes, les maquis Victoire et Liberté près Débarquement. Ils se livrent à des sabo- l’état-major FTP en a fait la seconde com- de Paroy-en-Othe, le maquis Politzer près tages, en coopération avec les groupes de pagnie Rouget de Lisle. La Résistance icaunaise est devenue une force structurée, active et combattante en 1943. Les orga- de Bérulle (Aube), le maquis Gaulois près sédentaires. Au sein de Libération-Nord, l’organisation de Vaumort, le maquis des Clérimois près Le Débarquement a un triple effet sur les des maquis se renforce également. Le nisations de résistance se sont alors solidement implantées à partir de groupes locaux constitués de Sens. Attaques ou menaces d’attaque maquis de l’Yonne : leur nombre augmente, maquis Garnier a pris position près de dans les deux années précédentes. La réception de parachutages et les premiers sabotages s’ajou- les ont contraint à quitter la forêt d’Othe leurs effectifs explosent, leur stratégie Massangis, à Villers-Tournois, sur les tent alors aux actions de propagande. Quelques petits groupes d’hommes armés se constituent en et la plupart de leurs éléments se sont évolue. falaises qui dominent la route. Le 8 juin il maquis au début de l’été 1943. Les attaques de l’ennemi et les rigueurs du climat les contraignent à regroupés sur la rive gauche de l’Yonne, est attaqué par un détachement de disparaître au début de l’hiver. Au printemps 1944, tandis que grandit l’espoir d’un débarquement près de Saint-Sérotin où ils vont constituer La naissance de nouveaux maquis Russes blancs et doit se replier. Regroupé allié et que les conditions de l’occupation se durcissent encore, les maquis se multiplient. le noyau du maquis Paul Bert. Chez les FTP on assiste à un double phé- à Villiers-la-Grange, il y est attaqué de Le Service national maquis s’implante nomène simultané : la création de nou- nouveau le lendemain. Dans le Tonnerrois, L’événement tant attendu se produit le 6 juin 1944 sur les plages de Normandie. dans le département au printemps 1944. veaux maquis et l’organisation de compa- le maquis Aillot reste actif quelques jours Quel est son impact sur les maquis de l’Yonne ? Il crée son premier maquis dans un bois gnies qui regroupent maquisards et encore, mais il ne survivra pas à l’attaque du situé entre Mézilles et Saint-Sauveur, près sédentaires d’un même secteur géogra- 18 juin 1944 (voir l’article sur les attaques Maquisards dans la forêt (été de la ferme des Vrines : ce sera le Maquis phique. Au nord du département contre les maquis). 1944). Source : Musée de la 3. Il réceptionne son premier parachutage Constantino Simo (capitaine « Castagne ») Au lendemain du Débarquement, Résistance, Auxerre. le 23 mai 1944. L’organisation se fonde sur prend la direction du maquis Paul Bert qui « Verneuil » conçoit la création d’un les militants rescapés du démantèlement devient une compagnie. Le maquis se ren- maquis d’un type nouveau, adapté à une du mouvement Résistance en 1943. Pour force, se structure et se déplace dans les nouvelle tactique. Il s’agit de créer un puis- cette raison, le Service national maquis bois de Chatillon près de Villemanoche le sant maquis qui deviendrait une unité est essentiellement implanté en Puisaye : 1er juillet. A la suite de l’échec des « libé- combattante intégrée dans les plans stra- le Maquis 1 entre Saint-Fargeau et Charny, rations anticipées » (voir notre article tégiques alliés de la libération du territoi- le Maquis 2 à l’orée de la forêt de Merry- p9), 80 maquisards et sédentaires de la re. Il fait accepter son projet par Marcel Vaux, le Maquis 4 dans un secteur triangu- forêt d’Othe sont regroupés près de Dilo Choupot, chef départemental FFI. La laire délimité par les routes Auxerre- où ils constituent la compagnie Rouget de région choisie est la partie centrale de la Clamecy et Auxerre-Avallon. La localisa- Lisle commandée par le très douteux lieu- forêt d’Othe, autour de Chailley, à la limite tion du Maquis 6 (ou maquis Bourgogne) tenant « Jo ». Ayant reçu l’ordre de gagner des départements de l’Yonne et de l’Aube, dans la forêt d’Othe est une exception à la le sud du département, la compagnie près des maquis aubois de Suy et de règle de localisation en Puisaye. s’installe en maquis près de la Ferté- Saint-Mards-en-Othe. Les premiers Libération-Nord a envoyé dans l’Yonne Loupière. Relevé de son commandement hommes s’installent près du hameau de Jean Chapelle (« Verneuil ») au printemps vers le 20 juin parce que ses méthodes Vaudevannes le 12 juin ; « Verneuil » arri- 1943, avec la fonction de responsable font fuir les hommes, « Jo » est remplacé ve le lendemain pour installer son PC dans militaire. Il a implanté solidement son par Paul Charruet. La compagnie est atta- le maquis baptisé Horteur. Ce maquis ne organisation dans le Tonnerrois et quée le 25 juin à Chevillon. Elle est dissou- survivra pas à la puissante attaque du 23 l’Avallonnais et contrôle deux maquis au te à la fin du mois et la trentaine de res- juin. « Verneuil » renonce pour un temps à printemps 1944 : le maquis Garnier près capés intègrent la compagnie Colbert son choix d’un grand rassemblement ( voir d’Avallon et le maquis Aillot au sud de dans les bois de Lisle-sur-Serein. Cette l’article sur sa stratégie, et son courrier du Tonnerre. compagnie est née un mois plus tôt de la 6 juillet ). Mais il y reviendra très vite, et Deux importants maquis doivent encore fusion de quatre petits groupes mobiles organisera le grand rassemblement des être mentionnés bien qu’ils dépendent de maquisards constitués pour certains Iles Ménéfrier. > 14 15 Yonne numéro 12 - mai 2004 Mémoire > Les maquis en juin 44 JUIN 44

> Le Débarquement donne une impulsion est assurée par le maquis de l’Etang-Neuf dans le hameau de la Grilletière et non Les maquis de l’Yonne forte au Service national maquis. Ses diri- (près de Grandchamps) commandé par dans les bois, il ne s’agit pas véritable- geants sont en relation directe avec ceux André Soustre. Dans la première quinzai- ment d’un maquis. vers le 15 juin 1944 du BOA qui sont venus s’installer dans le ne de juin, le réseau entreprend de créer L’impact du Débarquement est évident sur Morvan pour appliquer les plans alliés de des maquis dans le nord-ouest et le nord les maquis de l’Yonne dont il augmente carte établie par BERNARD DALLES-RIVES création d’un puissant rassemblement de du département. Moïse Flottet (« Kléber ») fortement le nombre comme le montre la maquisards, le « hérisson du Morvan ». Le rencontre Roger Bardet, adjoint de Frager, carte établie par Bernard Dalle-Rive. A l’ex- 0 25 km colonel Rondenay, Délégué militaire pour le 11 juin à . Il reçoit mission ception du puissant rassemblement des la zone Nord est lui aussi présent et dis- de fonder un maquis dans le Sénonais. Le Iles Ménéfrier fin juillet 1944, aucun gros pose de moyens importants. C’est pour- 17 juin il s’installe avec quelques hommes maquis n’apparaîtra plus dans l’Yonne. quoi de nombreux parachutages ont lieu près de . Ainsi naît le maquis en Puisaye qui bénéficient d’abord au Kléber, ou maquis du Bois de Bruneau. Au Des effectifs en forte croissance Service national maquis dont les maquis même moment, un groupe s’installe dans La mutation des maquis ne tient pas seu- se renforcent en juin. Le 14 juin, Guy de les bois de et s’organise en un lement à leur nombre. Les hommes Kergommeaux est envoyé de Paris pour maquis composé d’une vingtaine de affluent de plus en plus nombreux dans prendre le commandement du Maquis 2. Il jeunes. Ce maquis de Cudot devient une les maquis qui voient leurs effectifs bon- rencontre Marcel Choupot et installe ses antenne du groupe jovinien Bayard et dir dans le contexte nouveau d’une libéra- tion désormais certaine. Pour reprendre la L’ORGANISATION DE RÉSISTANCE DE L’ARMÉE (ORA) S’EST IMPLANTÉE pertinente typologie établie par Jacques DANS L’AUXERROIS EN 1943 AUTOUR DU JEUNE FRANÇOIS DE Canaud dans sa thèse consacrée aux maquis du Morvan, les maquis du dépar- MONTAUDOIN (« CHEVALIER »). tement deviennent en juin des maquis refuge. On y afflue des villages proches, hommes à la Fontaine Joubert, dans la bénéficie par la suite des armes récep- des villes du département mais aussi forêt de Merry-Vaux. Le Maquis 3 est atta- tionnées par le réseau Jean-Marie sur le beaucoup de la région parisienne. A qué le 9 juin au camp de la Gaillarderie terrain de parachutage des Miniers, entre chaque fois qu’elles sont possibles, les près d’Etais-la-Sauvin. Il se déplace et les bois de Cudot et Villefranche-Saint- études précises menées sur tel ou tel s’installe le 22 juin au Bois Blanc, au nord Phal. Ce maquis est en relation étroite maquis confirment le phénomène. Au d’. Les maquisards effectuent plu- avec le maquis de Machefer créé au milieu Service national maquis, le Maquis 4 sieurs sabotages ferroviaires. Charles- des bois de Saint-Loup-d’Ordon par des compte 20 hommes début juin et 60 Albert Houette, châtelain de Lamothe- réfractaires qui connaissent parfaitement début juillet ; le Maquis 3 passe de 40 Jarry, prend le commandement du Maquis le secteur. Au nord du Sénonais se consti- hommes fin mai à 140 début juillet. La 1 et l’installe début juillet dans les bois de tue fin juin ou début juillet le maquis de compagnie FTP Rouget de Lisle compte la Coutelée, entre Bléneau et Lavau, à Courlon, installé sur le plateau qui borde 110 hommes vers la mi-juin ; le maquis l’ouest de Saint-Fargeau. Le 26 juin, le l’Yonne aux limites du département de aubois de Suy en regroupe 120 à la même Maquis 4 reçoit un important parachutage Seine-et-Marne. époque ; la compagnie FTP Colbert en ras- dans les bois de Charentenay, qui permet L’Organisation de Résistance de l’Armée semble 140 vers la mi-juillet. de vêtir et d’armer les hommes. Chargé (ORA) s’est implantée dans l’Auxerrois en Cette forte croissance pose aux maquis d’exécuter le Plan Vert dans son secteur, le 1943 autour du jeune François de refuge de nombreux problèmes qu’il leur Maquis 4 effectue plusieurs sabotages Montaudoin (« Chevalier »). Il a pris de faut impérativement résoudre : celui de ferroviaires. Dans la forêt d’Othe le Maquis 6 nombreux contacts, en particulier avec l’armement, celui du nécessaire encadre- – totalement indépendant de l’état-major d’anciens militaires dont le capitaine de ment d’hommes jeunes et fougueux et départemental – est installé depuis la fin réserve André Perrot et le lieutenant bien évidemment celui du ravitaillement. du mois près du hameau de la Grange-aux- Pierre Thouverey. Le 6 juin 1944, celui-ci, C’est pourquoi le nomadisme continue, ce Malades (commune des Bordes). Les accompagné de quelques hommes, instal- qui multiplie les risques d’accrochages et volontaires affluent dans les jours qui sui- le un maquis ORA dans une grange du fragilise les maquis. vent le Débarquement. hameau des Champs Gras sur la commu- Deux organisations qui n’avaient pas ne de Mailly-le-Château, au nord-est de la Vers la guérilla encore créé de maquis le font dans les forêt de Fretoy. Rapidement les effectifs Lentement, progressivement, inégale- jours qui suivent le Débarquement. grossissent et le maquis s’installe dans ment selon les organisations et selon les Fortement implanté dans l’Aillantais et les bois près de la maison forestière des régions, le maquis refuge devient un véri- dans le Jovinien, le réseau Jean-Marie Champs Gras. A la fin du mois de juin, un table maquis de combat. Deux conditions Buckmaster se renforce encore par l’ins- second maquis ORA est créé dans la doivent être réunies pour que cette étape tallation du PC national de l’organisation région d’Escamps, au sud-ouest d’Auxerre, puisse être franchie : il faut que le maquis et de son chef Henri Frager, le 24 mai 1944 sous la responsabilité d’André Perrot et de soit armé et il faut qu’il soit encadré. près de Sommecaise. La sécurité du PC Marcel Marien, lui aussi militaire. Installé L’armement des maquis durant l’été 1944 > 16 17 Yonne numéro 12 - mai 2004 Mémoire > Les maquis en juin 44 JUIN 44

> Le Débarquement donne une impulsion est assurée par le maquis de l’Etang-Neuf dans le hameau de la Grilletière et non Les maquis de l’Yonne forte au Service national maquis. Ses diri- (près de Grandchamps) commandé par dans les bois, il ne s’agit pas véritable- geants sont en relation directe avec ceux André Soustre. Dans la première quinzai- ment d’un maquis. vers le 15 juin 1944 du BOA qui sont venus s’installer dans le ne de juin, le réseau entreprend de créer L’impact du Débarquement est évident sur Morvan pour appliquer les plans alliés de des maquis dans le nord-ouest et le nord les maquis de l’Yonne dont il augmente carte établie par BERNARD DALLES-RIVES création d’un puissant rassemblement de du département. Moïse Flottet (« Kléber ») fortement le nombre comme le montre la maquisards, le « hérisson du Morvan ». Le rencontre Roger Bardet, adjoint de Frager, carte établie par Bernard Dalle-Rive. A l’ex- 0 25 km colonel Rondenay, Délégué militaire pour le 11 juin à Sommecaise. Il reçoit mission ception du puissant rassemblement des la zone Nord est lui aussi présent et dis- de fonder un maquis dans le Sénonais. Le Iles Ménéfrier fin juillet 1944, aucun gros pose de moyens importants. C’est pour- 17 juin il s’installe avec quelques hommes maquis n’apparaîtra plus dans l’Yonne. quoi de nombreux parachutages ont lieu près de Villebougis. Ainsi naît le maquis en Puisaye qui bénéficient d’abord au Kléber, ou maquis du Bois de Bruneau. Au Des effectifs en forte croissance Service national maquis dont les maquis même moment, un groupe s’installe dans La mutation des maquis ne tient pas seu- se renforcent en juin. Le 14 juin, Guy de les bois de Cudot et s’organise en un lement à leur nombre. Les hommes Kergommeaux est envoyé de Paris pour maquis composé d’une vingtaine de affluent de plus en plus nombreux dans prendre le commandement du Maquis 2. Il jeunes. Ce maquis de Cudot devient une les maquis qui voient leurs effectifs bon- rencontre Marcel Choupot et installe ses antenne du groupe jovinien Bayard et dir dans le contexte nouveau d’une libéra- tion désormais certaine. Pour reprendre la L’ORGANISATION DE RÉSISTANCE DE L’ARMÉE (ORA) S’EST IMPLANTÉE pertinente typologie établie par Jacques DANS L’AUXERROIS EN 1943 AUTOUR DU JEUNE FRANÇOIS DE Canaud dans sa thèse consacrée aux maquis du Morvan, les maquis du dépar- MONTAUDOIN (« CHEVALIER »). tement deviennent en juin des maquis refuge. On y afflue des villages proches, hommes à la Fontaine Joubert, dans la bénéficie par la suite des armes récep- des villes du département mais aussi forêt de Merry-Vaux. Le Maquis 3 est atta- tionnées par le réseau Jean-Marie sur le beaucoup de la région parisienne. A qué le 9 juin au camp de la Gaillarderie terrain de parachutage des Miniers, entre chaque fois qu’elles sont possibles, les près d’Etais-la-Sauvin. Il se déplace et les bois de Cudot et Villefranche-Saint- études précises menées sur tel ou tel s’installe le 22 juin au Bois Blanc, au nord Phal. Ce maquis est en relation étroite maquis confirment le phénomène. Au d’Andryes. Les maquisards effectuent plu- avec le maquis de Machefer créé au milieu Service national maquis, le Maquis 4 sieurs sabotages ferroviaires. Charles- des bois de Saint-Loup-d’Ordon par des compte 20 hommes début juin et 60 Albert Houette, châtelain de Lamothe- réfractaires qui connaissent parfaitement début juillet ; le Maquis 3 passe de 40 Jarry, prend le commandement du Maquis le secteur. Au nord du Sénonais se consti- hommes fin mai à 140 début juillet. La 1 et l’installe début juillet dans les bois de tue fin juin ou début juillet le maquis de compagnie FTP Rouget de Lisle compte la Coutelée, entre Bléneau et Lavau, à Courlon, installé sur le plateau qui borde 110 hommes vers la mi-juin ; le maquis l’ouest de Saint-Fargeau. Le 26 juin, le l’Yonne aux limites du département de aubois de Suy en regroupe 120 à la même Maquis 4 reçoit un important parachutage Seine-et-Marne. époque ; la compagnie FTP Colbert en ras- dans les bois de Charentenay, qui permet L’Organisation de Résistance de l’Armée semble 140 vers la mi-juillet. de vêtir et d’armer les hommes. Chargé (ORA) s’est implantée dans l’Auxerrois en Cette forte croissance pose aux maquis d’exécuter le Plan Vert dans son secteur, le 1943 autour du jeune François de refuge de nombreux problèmes qu’il leur Maquis 4 effectue plusieurs sabotages Montaudoin (« Chevalier »). Il a pris de faut impérativement résoudre : celui de ferroviaires. Dans la forêt d’Othe le Maquis 6 nombreux contacts, en particulier avec l’armement, celui du nécessaire encadre- – totalement indépendant de l’état-major d’anciens militaires dont le capitaine de ment d’hommes jeunes et fougueux et départemental – est installé depuis la fin réserve André Perrot et le lieutenant bien évidemment celui du ravitaillement. du mois près du hameau de la Grange-aux- Pierre Thouverey. Le 6 juin 1944, celui-ci, C’est pourquoi le nomadisme continue, ce Malades (commune des Bordes). Les accompagné de quelques hommes, instal- qui multiplie les risques d’accrochages et volontaires affluent dans les jours qui sui- le un maquis ORA dans une grange du fragilise les maquis. vent le Débarquement. hameau des Champs Gras sur la commu- Deux organisations qui n’avaient pas ne de Mailly-le-Château, au nord-est de la Vers la guérilla encore créé de maquis le font dans les forêt de Fretoy. Rapidement les effectifs Lentement, progressivement, inégale- jours qui suivent le Débarquement. grossissent et le maquis s’installe dans ment selon les organisations et selon les Fortement implanté dans l’Aillantais et les bois près de la maison forestière des régions, le maquis refuge devient un véri- dans le Jovinien, le réseau Jean-Marie Champs Gras. A la fin du mois de juin, un table maquis de combat. Deux conditions Buckmaster se renforce encore par l’ins- second maquis ORA est créé dans la doivent être réunies pour que cette étape tallation du PC national de l’organisation région d’Escamps, au sud-ouest d’Auxerre, puisse être franchie : il faut que le maquis et de son chef Henri Frager, le 24 mai 1944 sous la responsabilité d’André Perrot et de soit armé et il faut qu’il soit encadré. près de Sommecaise. La sécurité du PC Marcel Marien, lui aussi militaire. Installé L’armement des maquis durant l’été 1944 > 16 17 Yonne numéro 12 - mai 2004 Mémoire > Les attaques contre les maquis JUIN 44

> se fait par des parachutages réalisés par Un nombre important de monuments, stèles et plaques érigés dans prise fait six victimes. Le 20 et 23, le les Alliés dans le cadre du BOA et dans les communes de notre département témoignent de la lutte menée maquis de Saint-Mards en Othe et le celui du réseau Jean-Marie Buckmaster maquis Horteur (alors en cours de créa- (voir l’article consacré aux parachutages contre les maquis à partir de juin 1944. Avant le 6 juin, la répression tion) sont totalement détruits. Le 25 juin p6) La qualité de l’encadrement varie des maquis, encore peu fréquente, était assurée conjointement par 1944, les membres du PC du réseau Jean- selon les maquis. Ceux du sud du départe- les Allemands et par le régime de Vichy. Ce dernier avait mis en Marie Buckmaster installé au lieudit la ment bénéficient de la présence des offi- place les corps francs de lutte contre le terrorisme. Ces unités Petite Ermite dans les bois de Perreux ciers et des soldats alliés parachutés dans étaient composées d’un peloton de gendarmerie et d’une section de réussissent à échapper à leurs assaillants le cadre des missions Jedburgh et des GMR (groupes mobiles de réserve). Après le Débarquement, un tout comme la compagnie FTP Rouget de groupes de SAS (voir notre article). La pré- Lisle implantée au maquis de l’Etang-Sec sence d’officiers de réserve (au sein de changement s’opère. L’état-major allemand prend seul en charge la près de Chevillon. Toutefois, les maqui- l’ORA par exemple), d’officiers de gendar- répression des maquis lesquels commencent à se multiplier (voir la sards FTP subissent des pertes impor- merie (Jean Magendie à la seconde com- carte de l’implantation des maquis vers le 15 juin). tantes, un mort et une dizaine de blessés pagnie FTP Rouget se Lisle) ou de chefs à ce qui provoque la dislocation de leur com- l’autorité solide et au charisme certain (le pagnie. Rendus certainement nerveux par capitaine « Castagne » au maquis FTP l’échec de cette vaste offensive qui avait Paul Bert) permet à beaucoup de maquis mobilisé des forces venant d’Auxerre et de d’être correctement encadrés. Le problè- JUIN 1944 : Montargis, les soldats allemands abattent me devient encore plus aigu au cœur de trois jeunes garçons lors d’un contrôle l’été avec l’explosion des effectifs. d’identité dans un café à Bleury, près De véritables actions de guérilla peuvent LES ALLEMANDS d’Aillant-sur-Tholon. alors être entreprises. Il s'agit d’actions Jusqu’alors les maquisards avaient tou- offensives, préparées, menées avec rapi- jours l’ordre de décrocher en cas d’at- dité pour bénéficier de l’effet de surprise, ATTAQUENT LES MAQUIS taque. Ils n’avaient en effet ni les armes ni suives d’un repli immédiat dans les bois. les effectifs suffisants pour affronter Elles s’insèrent dans la stratégie globale oucieux de dégager leurs lignes de général Vlassov passé au service de directement l’ennemi. La situation change Corps de maquisards tués lors de l’attaque du maquis de des Alliés. L’attaque d’un car allemand à communication avec le front de l’Allemagne nazie au cours de l’été 1942. Saint-Mards-en-Othe, le 20 juin 1944. vers la fin juin. Le rapport de force devient Lichères le 8 juin 1944 par la compagnie SNormandie, les Allemands décident Dans l’Yonne, les attaques de maquis sont Archives privées : Ferrucio Ricco. moins inégal sans pour autant s’équili- FTP Colbert marque le début d’une longue de combattre tout ce qui pourrait faire généralement le fait des unités dépen- brer. La multiplication des parachutages série d’embuscades tendues sur les obstacle. L’anéantissement des maquis, dantes de l’Ostbataillon 615, de passage voies d’accès, car la localisation des Grange, les hommes du maquis Garnier après la mi-juin, le renforcement des routes. Ce n’est cependant qu’en juillet et en particulier ceux implantés en forêt ou stationnant dans certaines communes maquis était connue des Allemands. commandés par Robert Montchanin maquisards par des membres des Special août 1944 que la guérilla sera effective et d’Othe, entre dans ce plan d’action. du département, Avallon ou Saint- Certains ont été infiltrés par des agents affrontent des unités de l’Ostbataillon Air Service (SAS) (voir article sur les Alliés générale dans notre département : 90 Parallèlement, l’action des maquis connaît Florentin par exemple. travaillant pour les services de renseigne- 615. L’accrochage fait une victime et pro- et la Résistance dans l’Yonne) et l’aug- actions en juin et surtout juillet, 73 en au cours de ce mois de juin, une mutation Les rapports de gendarmerie et les diffé- ment allemand (l’Abwehr) ou de police voque la dislocation du maquis. Le même mentation des effectifs expliquent la août. importante. Plus riches en effectifs et en rents témoignages nous permettent de (Gestapo). D’autres ont été dénoncés ou jour, le camp de la Gaillarderie près transformation de certains maquis en armes grâce à la multiplication des para- saisir l’importance des effectifs engagés ont été simplement victimes du manque d’Etais-la-Sauvin, lieu d’implantation du maquis de combat. Davantage armés, Si l’on ajoute une quarantaine d’accro- chutages, certains maquis deviennent de contre les maquis, généralement deux à de prudence des maquisards. A cela Maquis 3 (Service national maquis), est constitués d’effectifs plus conséquents, chages à ces 160 actions offensives, on véritables organisations de combat. Les trois cents hommes. Cependant, vers la fin s’ajoutent des risques de plus en plus attaqué. La vingtaine de maquisards pré- mieux structurés et encadrés, les maquis appréhende la réalité de l’action des Allemands réagissent en durcissant la du mois de juin, les forces ennemies sont grands pour les maquis d’être repérés du sents parvient à se replier mais cette deviennent des organisations préparées à maquis dans l’Yonne durant le printemps répression et en l’élargissant aux popula- nettement plus nombreuses, signe de la fait de l’augmentation significative des attaque surprise fait cependant trois vic- l’affrontement direct. Ainsi le combat du et surtout l‘été 1944. En multipliant les tions civiles accusées d’aider les maqui- radicalisation de la lutte contre les effectifs dépassant la centaine de volon- times parmi eux. Bois Blanc, le 3 juillet, constitue la plus maquis, en faisant croître leurs effectifs, sards. La cruauté des exactions alle- maquis. Par exemple, le 20 juin, plus d’un taires, comme pour le Maquis 3 qui comp- en permettant par des parachutages nom- mandes montre toute la détermination de millier de soldats allemands prennent te environ 120 hommes début juillet. A PARTIR DE LA MI-JUIN, LA RÉPRESSION S’ACCÉLÈRE ET S’INTENSIFIE. breux leur armement, en renforçant leur l’occupant à anéantir « les terroristes et d’assaut le maquis de Saint-Mards-en- DE GRANDES OFFENSIVES SONT LANCÉES CONTRES LES MAQUIS volonté de combattre et de vaincre, le leurs complices». Othe. Protéger la ligne de communication IMPLANTÉS DANS LE TONNERROIS, LA FORÊT D’OTHE ET LE NORD DE LA Débarquement a marqué un tournant fon- Les Allemands ont toujours préparé avec allemande avec le front de Normandie PUISAYE. damental dans l’histoire des maquis de Les « Russes blancs » avaient en méthode leurs offensives contre les Un des plans d’action de la Wehrmacht l’Yonne. ❚JOËL DROGLAND charge la répression des maquis maquis. Une attaque était presque tou- avait pour objectif d’anéantir tous les A partir de la mi-juin, la répression s’accé- importante confrontation qui ait eu lieu Opérant aux côtés de la Wehrmacht, les jours décidée le matin, à l’aube, afin de maquis afin qu’ils ne puissent menacer lère et s’intensifie. De grandes offensives dans notre département. 120 hommes du « Russes blancs » sont spécialisés dans bénéficier de l’effet de surprise. Seule l’at- les liaisons nécessaires avec le front de sont lancées contres les maquis implan- Maquis 3, bien équipés et disciplinés, tien- la répression des maquis. Ces soldats taque du Maquis 3 du Service national Normandie. Début juin, les Allemands tés dans le Tonnerrois, la forêt d’Othe et le nent tête pendant plusieurs heures à russes, ukrainiens ou bien encore baltes maquis, au lieudit le Bois Blanc, s’est réagissent aux actions de guérilla des nord de la Puisaye. Le 18 juin, à la suite leurs assaillants pourtant beaucoup plus Sources : Canaud Jacques, Les maquis du Morvan étaient des anciens combattants de déroulée en fin d’après midi. A chaque fois, maquis. Les accrochages commencent à d’une attaque, les quarante volontaires du nombreux. Si l’on ne déplore que trois (1943-1944), Académie du Morvan, Château-Chinon, l’Armée Rouge faits prisonniers sur le front l’ennemi investit et encercle les villages se multiplier : le 8 juin à Villers-Tournois maquis Aillot réfugiés dans les bois de morts parmi les maquisards, ils sont par 1981, 425 pages. La Résistance dans l’Yonne, cédé- de l’Est. Ils avaient été recrutés par le proches du maquis afin de bloquer ses près de Massangis et le 9 juin à Villiers-la- , se dispersent. Cette attaque sur- contre probablement une cinquantaine rom, ARORY-AERI, 2004. > 18 19 Yonne numéro 12 - mai 2004 Mémoire > Les attaques contre les maquis JUIN 44

> se fait par des parachutages réalisés par Un nombre important de monuments, stèles et plaques érigés dans prise fait six victimes. Le 20 et 23, le les Alliés dans le cadre du BOA et dans les communes de notre département témoignent de la lutte menée maquis de Saint-Mards en Othe et le celui du réseau Jean-Marie Buckmaster maquis Horteur (alors en cours de créa- (voir l’article consacré aux parachutages contre les maquis à partir de juin 1944. Avant le 6 juin, la répression tion) sont totalement détruits. Le 25 juin p6) La qualité de l’encadrement varie des maquis, encore peu fréquente, était assurée conjointement par 1944, les membres du PC du réseau Jean- selon les maquis. Ceux du sud du départe- les Allemands et par le régime de Vichy. Ce dernier avait mis en Marie Buckmaster installé au lieudit la ment bénéficient de la présence des offi- place les corps francs de lutte contre le terrorisme. Ces unités Petite Ermite dans les bois de Perreux ciers et des soldats alliés parachutés dans étaient composées d’un peloton de gendarmerie et d’une section de réussissent à échapper à leurs assaillants le cadre des missions Jedburgh et des GMR (groupes mobiles de réserve). Après le Débarquement, un tout comme la compagnie FTP Rouget de groupes de SAS (voir notre article). La pré- Lisle implantée au maquis de l’Etang-Sec sence d’officiers de réserve (au sein de changement s’opère. L’état-major allemand prend seul en charge la près de Chevillon. Toutefois, les maqui- l’ORA par exemple), d’officiers de gendar- répression des maquis lesquels commencent à se multiplier (voir la sards FTP subissent des pertes impor- merie (Jean Magendie à la seconde com- carte de l’implantation des maquis vers le 15 juin). tantes, un mort et une dizaine de blessés pagnie FTP Rouget se Lisle) ou de chefs à ce qui provoque la dislocation de leur com- l’autorité solide et au charisme certain (le pagnie. Rendus certainement nerveux par capitaine « Castagne » au maquis FTP l’échec de cette vaste offensive qui avait Paul Bert) permet à beaucoup de maquis mobilisé des forces venant d’Auxerre et de d’être correctement encadrés. Le problè- JUIN 1944 : Montargis, les soldats allemands abattent me devient encore plus aigu au cœur de trois jeunes garçons lors d’un contrôle l’été avec l’explosion des effectifs. d’identité dans un café à Bleury, près De véritables actions de guérilla peuvent LES ALLEMANDS d’Aillant-sur-Tholon. alors être entreprises. Il s'agit d’actions Jusqu’alors les maquisards avaient tou- offensives, préparées, menées avec rapi- jours l’ordre de décrocher en cas d’at- dité pour bénéficier de l’effet de surprise, ATTAQUENT LES MAQUIS taque. Ils n’avaient en effet ni les armes ni suives d’un repli immédiat dans les bois. les effectifs suffisants pour affronter Elles s’insèrent dans la stratégie globale oucieux de dégager leurs lignes de général Vlassov passé au service de directement l’ennemi. La situation change Corps de maquisards tués lors de l’attaque du maquis de des Alliés. L’attaque d’un car allemand à communication avec le front de l’Allemagne nazie au cours de l’été 1942. Saint-Mards-en-Othe, le 20 juin 1944. vers la fin juin. Le rapport de force devient Lichères le 8 juin 1944 par la compagnie SNormandie, les Allemands décident Dans l’Yonne, les attaques de maquis sont Archives privées : Ferrucio Ricco. moins inégal sans pour autant s’équili- FTP Colbert marque le début d’une longue de combattre tout ce qui pourrait faire généralement le fait des unités dépen- brer. La multiplication des parachutages série d’embuscades tendues sur les obstacle. L’anéantissement des maquis, dantes de l’Ostbataillon 615, de passage voies d’accès, car la localisation des Grange, les hommes du maquis Garnier après la mi-juin, le renforcement des routes. Ce n’est cependant qu’en juillet et en particulier ceux implantés en forêt ou stationnant dans certaines communes maquis était connue des Allemands. commandés par Robert Montchanin maquisards par des membres des Special août 1944 que la guérilla sera effective et d’Othe, entre dans ce plan d’action. du département, Avallon ou Saint- Certains ont été infiltrés par des agents affrontent des unités de l’Ostbataillon Air Service (SAS) (voir article sur les Alliés générale dans notre département : 90 Parallèlement, l’action des maquis connaît Florentin par exemple. travaillant pour les services de renseigne- 615. L’accrochage fait une victime et pro- et la Résistance dans l’Yonne) et l’aug- actions en juin et surtout juillet, 73 en au cours de ce mois de juin, une mutation Les rapports de gendarmerie et les diffé- ment allemand (l’Abwehr) ou de police voque la dislocation du maquis. Le même mentation des effectifs expliquent la août. importante. Plus riches en effectifs et en rents témoignages nous permettent de (Gestapo). D’autres ont été dénoncés ou jour, le camp de la Gaillarderie près transformation de certains maquis en armes grâce à la multiplication des para- saisir l’importance des effectifs engagés ont été simplement victimes du manque d’Etais-la-Sauvin, lieu d’implantation du maquis de combat. Davantage armés, Si l’on ajoute une quarantaine d’accro- chutages, certains maquis deviennent de contre les maquis, généralement deux à de prudence des maquisards. A cela Maquis 3 (Service national maquis), est constitués d’effectifs plus conséquents, chages à ces 160 actions offensives, on véritables organisations de combat. Les trois cents hommes. Cependant, vers la fin s’ajoutent des risques de plus en plus attaqué. La vingtaine de maquisards pré- mieux structurés et encadrés, les maquis appréhende la réalité de l’action des Allemands réagissent en durcissant la du mois de juin, les forces ennemies sont grands pour les maquis d’être repérés du sents parvient à se replier mais cette deviennent des organisations préparées à maquis dans l’Yonne durant le printemps répression et en l’élargissant aux popula- nettement plus nombreuses, signe de la fait de l’augmentation significative des attaque surprise fait cependant trois vic- l’affrontement direct. Ainsi le combat du et surtout l‘été 1944. En multipliant les tions civiles accusées d’aider les maqui- radicalisation de la lutte contre les effectifs dépassant la centaine de volon- times parmi eux. Bois Blanc, le 3 juillet, constitue la plus maquis, en faisant croître leurs effectifs, sards. La cruauté des exactions alle- maquis. Par exemple, le 20 juin, plus d’un taires, comme pour le Maquis 3 qui comp- en permettant par des parachutages nom- mandes montre toute la détermination de millier de soldats allemands prennent te environ 120 hommes début juillet. A PARTIR DE LA MI-JUIN, LA RÉPRESSION S’ACCÉLÈRE ET S’INTENSIFIE. breux leur armement, en renforçant leur l’occupant à anéantir « les terroristes et d’assaut le maquis de Saint-Mards-en- DE GRANDES OFFENSIVES SONT LANCÉES CONTRES LES MAQUIS volonté de combattre et de vaincre, le leurs complices». Othe. Protéger la ligne de communication IMPLANTÉS DANS LE TONNERROIS, LA FORÊT D’OTHE ET LE NORD DE LA Débarquement a marqué un tournant fon- Les Allemands ont toujours préparé avec allemande avec le front de Normandie PUISAYE. damental dans l’histoire des maquis de Les « Russes blancs » avaient en méthode leurs offensives contre les Un des plans d’action de la Wehrmacht l’Yonne. ❚JOËL DROGLAND charge la répression des maquis maquis. Une attaque était presque tou- avait pour objectif d’anéantir tous les A partir de la mi-juin, la répression s’accé- importante confrontation qui ait eu lieu Opérant aux côtés de la Wehrmacht, les jours décidée le matin, à l’aube, afin de maquis afin qu’ils ne puissent menacer lère et s’intensifie. De grandes offensives dans notre département. 120 hommes du « Russes blancs » sont spécialisés dans bénéficier de l’effet de surprise. Seule l’at- les liaisons nécessaires avec le front de sont lancées contres les maquis implan- Maquis 3, bien équipés et disciplinés, tien- la répression des maquis. Ces soldats taque du Maquis 3 du Service national Normandie. Début juin, les Allemands tés dans le Tonnerrois, la forêt d’Othe et le nent tête pendant plusieurs heures à russes, ukrainiens ou bien encore baltes maquis, au lieudit le Bois Blanc, s’est réagissent aux actions de guérilla des nord de la Puisaye. Le 18 juin, à la suite leurs assaillants pourtant beaucoup plus Sources : Canaud Jacques, Les maquis du Morvan étaient des anciens combattants de déroulée en fin d’après midi. A chaque fois, maquis. Les accrochages commencent à d’une attaque, les quarante volontaires du nombreux. Si l’on ne déplore que trois (1943-1944), Académie du Morvan, Château-Chinon, l’Armée Rouge faits prisonniers sur le front l’ennemi investit et encercle les villages se multiplier : le 8 juin à Villers-Tournois maquis Aillot réfugiés dans les bois de morts parmi les maquisards, ils sont par 1981, 425 pages. La Résistance dans l’Yonne, cédé- de l’Est. Ils avaient été recrutés par le proches du maquis afin de bloquer ses près de Massangis et le 9 juin à Villiers-la- Vireaux, se dispersent. Cette attaque sur- contre probablement une cinquantaine rom, ARORY-AERI, 2004. > 18 19 Yonne numéro 12 - mai 2004 Mémoire > Les attaques contreJUIN les maquis 44

> chez l’ennemi, auxquels il faut ajouter de Rue-Chèvre situé sur la commune de ne de combats et subit de lourdes pertes. nombreux blessés. Cette résistance dominant Chailley. La ferme des Une quarantaine de combattants sont maquisarde surprend le colonel allemand Mathieu est investie. La violence se tombés lors des attaques allemandes qui commandait l’attaque. Croyant avoir déchaîne contre cette famille qui rendait contre les maquis, victimes auxquelles il eu affaire à un groupe de soldats alliés de nombreux services aux maquis envi- faut ajouter les violentes représailles diri- parachutés, le colonel décide de ne pas ronnants. Marcel Mathieu, son fils et un gées contre les populations civiles. engager de représailles contre la popula- ami de ce dernier sont fusillés. Au matin Cette forte répression qui se retrouve tion des villages située à proximité du maquis. Celle-ci a donc eu beaucoup de LES OPÉRATIONS DE REPRÉSAILLES MENÉES PAR LES TROUPES chance car dès la mi-juin, la répression ALLEMANDES CONTRE LES CIVILS FAISAIENT PARTIE INTÉGRANTE DE engagée contre les maquisards et les LA RÉPRESSION CONTRE LES MAQUIS ET LEURS COMPLICES. civils accusés d’êtres leurs complices était de plus en plus violente. du 23 juin, les Allemands investissent ailleurs en France, fait réagir Londres. Radicalisation de la répression Chailley soupçonné de servir de base Ordre est donné d’éviter les gros rassem- allemande contre les maquis arrière « aux terroristes. » Tous les blements et de privilégier la formation de L’attaque du maquis de Saint-Mards-en- hommes sont rassemblés sur la place. Ils petits groupes isolés plus aptes « à la Othe le 20 juin symbolise la radicalisation y demeurent jusqu’au soir sous un soleil guérilla insaisissable » selon la déclara- de la répression contre les maquis. Près accablant. 29 otages sont rassemblés tion du général Koenig, du 17 juin 1944. de 300 maquisards installés dans les bois devant un mur. La population craint le pire. Si les maquis de combat renforcés par les à la frontière de l’Aube et de l’Yonne sont Sous leur yeux, les Allemands massacrent parachutages deviennent moins vulné- attaqués par plus de mille soldats armés quatre maquisards, un rescapé de l’at- rables face à l’ennemi, à l’inverse, les de canons, d’obusiers, et de véhicules taque de Saint-Mards et trois prisonniers populations civiles restent toujours expo- blindés légers. L’attaque se porte sur trois du maquis Horteur dont Lucien Cormeau sées à la férocité des opérations de police fronts, très tôt le matin. Les combats sont commerçant, nommé lieutenant, monté allemande. Pour preuve, le 14 juillet 1944, terribles. Pourtant, la majorité des maqui- au maquis le 22 juin. L’épicière Marcelle à Charny où en représailles contre les sards réussit à se replier et à échapper à Guillemot qui ravitaillait le maquis Horteur actions du maquis de l’Etang-Neuf dépen- l’encerclement. En fin d’après-midi, les est frappée sauvagement. Finalement dant du réseau Jean-Marie Buckmaster, installations du maquis sont détruites. seize otages sont transférés à Auxerre. l’occupant organise la plus grande arres- Finalement, 27 résistants sont tués et D’autres opérations de représailles ont eu tation collective du département : 37 per- massacrés, la plupart horriblement muti- lieu dans le département : le 9 juin à Saint- sonnes sont arrêtées et 19 d’entre elles lés (émasculation, énucléation). Cet Maurice-Thizouaille, le 16 juin à Arces, le seront déportées. ❚THIERRY ROBLIN affrontement montre que la Wehrmacht 28 juin à Châtel-Censoir et le 30 juin à continue de considérer les maquisards Saint-Mards-en-Othe. A chaque fois, la comme des francs-tireurs et se conduit à population est rassemblée sur la place du leur égard avec une extrême férocité mal- village, prise comme otage. Certains sont gré leur incorporation, en tant que FFI, à ensuite arrêtés puis déportés. D’autres l’Armée française (décision prise le 13 juin ont été assassinés comme le 18 juin par le gouvernement provisoire de la 1944, à la suite de l’attaque du maquis République française). L’acharnement sur Aillot, où cinq civils originaires de Vireaux les corps des maquisards s’explique éga- sont exécutés au lieudit, les Granges- lement par les nombreuses pertes côté . Les opérations de représailles allemand : plus d’une quinzaine de morts contre les civils faisaient partie intégrante et de blessés. Dans l’espoir de capturer les de la répression contre les maquis et leurs résistants rescapés, les soldats alle- complices. En instituant ce climat de ter- mands ratissent pendant plusieurs jours reur, l’occupant voulait réduire les possibi- la forêt d’Othe. Ils espèrent aussi débus- lités de reformer un maquis. Toutefois, quer d’autres maquis. Un véritable climat nous observons que la répression contre de terreur qui touche aussi les civils est les civils s’est intensifiée dans les régions dès lors, institué par l’occupant. où avaient eu lieu quelques jours après le Débarquement, des libérations antici- Les représailles contre les civils : pées. En tout, ce sont une trentaine d’opé- terreur en forêt d’Othe rations de représailles contre les villages Quelques heures après l’attaque du de l’Yonne qui ont été commises par la Wehrmacht maquis de Saint-Mards-en-Othe, les repré- après le Débarquement. En Sources : La Résistance dans l’Yonne, cédérom, sailles avaient débuté au hameau de la juin 1944, les maquis ont mené une dizai- ARORY-AERI, 2004. 20