L’ÉGLISE DE LA NATIVITE NOTRE DAME, MARGENCY

Un peu d’histoire locale. Le nom de Margency est peut-être d’origine celte (Marg = terre grasse, selon l’abbé Lebeuf, historien) mais sans certitude. La première mention du lieu « Margency » apparaît en 1360 sur un acte « Aveu, foi et hommage » daté du 3 juin 1360, fait par Jacquemin Vauquier au seigneur de Montmorency, pour divers héritages faits à Margency (archives du musée Condé de Chantilly). De la même époque, plusieurs aveux au même seigneur, dont celui de Jean du Luat du 20 juillet 1362. Un aveu du 1er janvier 1367 concerne « le château, de trois quartiers de vigne, de trois maisons, à savoir la maison qui fut à Jehanne de Margency ».

HISTOIRE DE L’EGLISE DE MARGENCY Chapelle de la seigneurie et paroisse : La chapelle qui existait depuis le début du 16e siècle fut consacrée en 1548, par Charles Boucher, évêque de Mégare, selon l’abbé Lebeuf (Histoire de la ville et de tout le diocèse de Paris 1754-1755) . Elle est dédiée à « Notre Dame », plus précisément à la Nativité de la Vierge, célébrée le 8 septembre. La chapelle est réparée de « fond en comble » en 1650. Cette remise en état semble être une transformation de la chapelle d’origine pour des critères religieux (adjonction de l’abside, du clocher ou de la façade). C’est en 1698 que les habitants de Margency exposèrent au cardinal de Noailles, archevêque de Paris, que « le curé de la paroisse ne voulait plus les desservir depuis dix-huit mois, qu’ils étaient en effet éloignés d’un quart de lieue de l’église paroissiale et que les chemins étaient mauvais en hiver. Ils firent valoir que l’église de Margency avait des fonts baptismaux, un cimetière et cinq cents livres de rente pour entretenir un curé et obtinrent l’érection de leur village en paroisse ». Ceci ne s’est pas fait sans de vives oppositions : celle de Louis Bucaille, curé d’Andilly ; celle de Robert Aubry, seigneur d’Andilly ; celle enfin des « Grandmontins, qui craignaient de devoir en payer pour la cure de Margency. » La comtesse de La Mark, propriétaire de la seigneurie, fit pencher la balance en offrant 800 livres pour la construction du presbytère et 300 livres de rente pour le nouveau curé, à condition que celui-ci s’engage à prier et à faire le catéchisme chaque soir. La comtesse se réservait également le droit de présentation à la cure. Le décret du 13 mai 1699 du cardinal de Noailles, archevêque de Paris, consacre la création de la paroisse. Il fait obligation au curé et aux habitants de Margency de se rendre en procession à Andilly pour assister à la grand’messe le jour de la fête de Saint Médard, patron de la paroisse. Vitraux et pillages : « Margency. Il y a là, à l’un des vitrages, le visage d’un Christ que l’on estime fort », selon l’abbé Lebeuf (1754-1755). Ce vitrail est également mentionné par Jean-Élie Bertrand dans son ouvrage « Description des Arts et Métiers », « L’enceinte de la capitale ne renferme pas foule de belles vitres peintes du seizième siècle. Le goût de la peinture sur verre était si accrédité en ce temps qu’elle fut prodiguée, si j’ose m’exprimer ainsi, dans les églises même de la campagne. Celles de Montmorenci, , Margency, ,… conservent encore de très bonnes vitres peintes de ce siècle. On remarque entr’autres beautés, à celle de Margency, une tête de Christ inestimable. » « Perte d’un vitrail remarquable – Les révolutions ont saccagé nos églises. La petite église de Margency (Seine-et-Oise) possédait pour tout trésor un Christ en vitrail que Levieil, disait d’un prix inestimable. Cette figure a été proprement démontée et emportée ». (Alphonse-Napoléon Didron 1846) Les rénovations de l’édifice : L’église a périodiquement menacé de tomber en ruine, jusqu’à sa dernière restauration en 2002. Faisant suite à la consécration de la chapelle du château comme église de Margency en 1548, une rénovation est effectuée « de fond en comble », en 1650. Il n’est pas fait état de l’édifice avant et après la Révolution. Cependant, la paroisse de Margency n’ayant plus de curé, il est probable que les habitants de Margency l’ont maintenue en état « a minima » pour permettre d’y célébrer occasionnellement des cérémonies religieuses. La précédente cloche de l’église, nommée Henriette-Julie-Claude et baptisée le 17 mars 1729, ayant sans doute été enlevée et fondue lors de la Révolution, une nouvelle cloche fut achetée par souscription des paroissiens, baptisée Joséphine-Anne et installée le 26 octobre 1820. En 1864, le maire demande à un architecte de vérifier l’état de l’église ; celui-ci conclut : « La façade est détachée de 0,10 m de hauteur, la pile à droite est poussée en dehors et présente au-dedans un puits de 0,20 m sur une hauteur de 2,50 m. Elle garde son équilibre grâce aux dépendances du château. L’église est dans un état de décrépitude très avancé, difficile à réparer, et le moindre changement dans son équilibre en causerait inévitablement la ruine. » Ce rapport transmis au sous-préfet, celui-ci demande une réunion en session extraordinaire du Conseil municipal pour décider « soit de réparer l’église, soit de la détruire ». La réparation fut décidée. « Après la guerre de 1870, l’église, qui avait beaucoup souffert de la part des Allemands, fut réparée aux frais des familles du château de Margency, du château de Bury et du château de Maugarny. » (Abbé Lauderaut) En 1877, le clocher, le faîtage et la toiture ont besoin de réparations. Deux ans plus tard, l’architecte diocésain constate que la cloche est « fêlée, mais ne présente pas de danger pour le public… dans l’immédiat. » En 1886, grâce à une souscription, le clocher qui menaçait de s’écrouler est solidement réparé. En 1892, des réparations sont encore nécessaires. En 1896, des problèmes de sécurité se posent à nouveau. Le Conseil municipal est saisi par le curé d’Andilly d’un projet ambitieux de construction d’une nouvelle église. Les plans du futur édifice sont établis. En attendant, il décide de faire étayer les voûtes et colmater certaines infiltrations ; travaux partiellement pris en charge par la commune. En 1933, une partie du plafond s’effondre. Le maire signale au préfet l’état de vétusté de l’édifice et le manque de ressources de la commune pour le réparer. Une nouvelle souscription est ouverte. En 1966, nouveau cri d’alarme : « L’église menace ruine ». À la suite de la rupture d’un étai/échafaudage mis en place depuis des décennies. La consolidation des contreforts responsables des déformations et la suppression des étaiements sont décidées ; il s’agit toujours de rafistolages (contreforts extérieurs, fondations, pavage du sol). À cette occasion des ossements furent trouvés dans le sol de l’église et réunis, puis transférés au cimetière. Plusieurs défunts furent enterrés dans le sol de la nef dont le curé Michel Chatelain.: En 1990-1992, la toiture doit être refaite et une restauration complète de l’édifice est projetée et reportée faute de moyens. En 1999 l’état de péril est une nouvelle fois constaté. L’église est interdite de cérémonies. Sa restauration sera enfin réalisée en 2001-2002.

HISTOIRE DE LA PAROISSE DE MARGENCY Les desservants de la Paroisse : À partir de 1648, date de la consécration de l’église, la paroisse de Margency, qui existait sans doute depuis quelques décennies, fut rattachée par tutelle ecclésiastique à Andilly, et desservie par des vicaires, chapelains ou curés d’Andilly. Nous retrouvons sur les registres paroissiaux (avant la Révolution) les noms de ces divers desservants. Après la Révolution, la paroisse étant de nouveau rattachée à Andilly, les curés se déplacent à Margency pour les principaux offices religieux.

Les curés de Margency : Dépourvus de ressources sûres, ces prêtres de Margency, comme de nombreux prêtres à l’époque, eurent des conditions de vie parfois difficiles. Cinq prêtres ont habité le presbytère entre 1699 et 1792 : Michel Touraine (1699-1720), venu du diocèse de Coutances. Ce prêtre paraît s’être vivement intéressé aux débats qui, à l’époque, agitaient l’Église (Jansénisme). On lui doit notamment plusieurs brochures, conservées à la Bibliothèque Nationale, concernant les corrections du calendrier grégorien. François Bletterie (1720-1734) : il a baptisé une cloche nommée Henriette-Julie-Claude, le 17 mars 1729. Michel Chatelain (1734-1784) : il a exercé pendant cinquante années à Margency. Il a dû procéder à dix-neuf sépultures entre décembre 1741 et janvier 1742. Fut enterré dans la nef de l’église. Alexandre-Jacques Vastel (1784-1791 ?) : ce prêtre fut sans nul doute très impliqué dans la séparation des communes. Le curé Vastel s’est rétracté. Il sera curé de Soisy en 1802, après le Concordat. Abbé Thyrion (1792-1793) : curé républicain, ne fit qu’un bref séjour à Margency ; il quitta Margency en 1793 et ne fut pas remplacé. La paroisse resta sans curé titulaire et sera même périodiquement menacé de rattachement à ou à Andilly. Selon Lauderaut, « les fidèles privés de pasteur et de culte public se rendaient dans l’église certains jours, isolément ou par groupes, pour y implorer le secours de Dieu ». Sans doute les plus pratiquants reprirent- ils le chemin d’Andilly. La transformation des paroisses en communes fut l’occasion de procéder à des regroupements de petites paroisses, dans un souci d’économie. La question fut posée pour Andilly, Margency et . Une commission composée de deux commissaires du District et d’un représentant de l’évêque conclura qu’il est reconnu que Margency est le point central du regroupement projeté mais que l’église est petite et en mauvais état, qu’il faudra la reconstruire ainsi que le presbytère, et qu’ « il paraît donc plus convenable d’établir le chef-lieu [.....] à Andilly où l’église est bonne ainsi que le presbytère, en laissant subsister un desservant à Montlignon, attendu qu’une partie du chemin pour y arriver (à Andilly) est mauvaise en hiver. » Une lettre du 22 frimaire an XII (14 décembre 1803) du sous-préfet de signifie au maire que la paroisse de Margency est rattachée à celle d’Eaubonne pour l’exercice du culte et précise que la décision est sans appel. En 1809 c’est à Andilly que fut rattachée Margency. L’église ne fut pas vendue et, peu après, le curé d’Andilly fut autorisé à y célébrer la messe, mais de façon occasionnelle. Le 13 mai 1878, l’autorisation est accordée par Mgr l’évêque de « conserver » la sainte Eucharistie dans l’église de Margency pendant la belle saison, c'est-à-dire du 1er mai au 1er novembre de chaque année. Les registres paroissiaux : L’obligation faite aux curés de paroisse de consigner sur des registres les dates de baptême, les noms et dates de naissance des baptisés, ainsi que les mariages et les décès a été instaurée par une ordonnance de François 1er dite « ordonnance de Villers-Cotterêts » (1539). Le premier acte du premier registre paroissial de Margency, qui date de 1550, est l’un des plus vieux du département. L’école paroissiale : Les seuls indices de l’existence d’une école figurent dans plusieurs actes paroissiaux des années 1730– 1731 mentionnant la présence, à différents enterrements, d’un certain Simond Louette qualifié tantôt de « maître d’école », tantôt de « clerc de cette paroisse », et un acte de décès de Catherine Thibaud en 1782 qui « a rempli avec succès, pendant 46 ans, les fonctions pour l’éducation de la jeunesse. » Ce qui est certain, c’est qu’au début du 18e siècle, rares étaient les habitants qui savaient lire et écrire.

L’ÉGLISE DE MARGENCY AUJOURD’HUI Vue de la rue principale, l’église n’offre qu’un aspect humble et l’on oserait dire sans intérêt, avec un clocher court et massif. C’est depuis le parc de la propriété du château de la Croix-Rouge qu’elle prend sa vraie grandeur. Son abside très pure, ses baies relativement harmonieuses et son toit en tuiles traditionnelles en font un édifice attachant. A l’intérieur, on perçoit les diverses retouches de l’édifice, de style pseudo-gothique : voûte en ogive et clés de voûte. Les clés de voute représentent : le Christ sur la croix, la Nativité Notre-Dame, et Dieu le Père tenant dans sa main une mappemonde. Les piliers sont de dimensions remarquables et inclinés en raison des différentes évolutions et rénovations. On note la présence de deux bas-reliefs. Sur celui situé à droite de l’autel, il y a représentés les instruments liés à « La Passion » du Christ (poteau, fouet, corde) ; sur celui de gauche, qui est très « érodé » il est difficile de distinguer le motif ; est-ce une croix ? (scène de la passion ou de la crucifixion), ou est-ce une représentation d’un autre fait religieux, ou les armoiries de l’un des seigneurs de Margency ? (familles de Saveuse, de La Mark, Fayette et autres seigneurs du lieu). A l’exception des tomettes de la chapelle où est situé le baptistère et de celles de la sacristie, les céramiques du sol sont récentes. Vitraux : « St Charles Borromée » : le vitrail représente Saint Borromée donnant la communion aux mendiants, malades de la peste. Charles Borromée (1535-1584) fut archevêque de Milan Les trois vitraux du chœur, réalisés par les ateliers Ch. Champigneul et Fils à Paris, représentent l’Annonciation, l’Assomption et le Baptême de Jésus. Tableaux : Sainte Famille : huile sur toile, 130x97cm, signé RHVR 1631. « La Vierge assise est une paysanne qui tient avec beaucoup de naturel, l’enfant emmailloté sur ses genoux. Les visages, qui expriment avec beaucoup de vérité la tendresse mêlée d’interrogation, la curiosité ou l’attention concentrée, sont ceux que l’on rencontre dans les œuvres des petits maîtres hollandais de la suite de Rembrandt. » Ce tableau, classé à l’inventaire des monuments historiques depuis 1951, est attribué à Gabriel METSU (1629-1667), peintre de l’école Hollandaise du 17e siècle. Il a été présenté dans plusieurs expositions consacrées à l’école hollandaise du 17e siècle (peintre influencé par Gerard Ter Borch). Christ en Croix : c’est probablement une réalisation du début du 18e siècle. On remarque que les clous de la crucifixion sont enfoncés dans les poignets et non dans les mains du Christ, comme il est généralement représenté. Vierge à l’enfant : le tableau situé derrière le baptistère représente la Vierge et l’enfant Jésus, ainsi que sainte Élisabeth tenant un agneau et une palme, et saint Jean Baptiste. C’est une copie, du 19e siècle, d’une toile vénitienne du 16e siècle. Baptistère : il y a peu de doute sur l’ancienneté du baptistère, réalisé en pierre, dont l’existence même est attestée par différents documents en 1699 ; sans doute fut-il déjà présent dès 1648, date de la consécration de l’église. Des baptêmes furent célébrés dans la paroisse de Margency à partir de 1551, (actes des registres paroissiaux). Confessionnal : ce meuble est typiquement du style de ceux que l’on réalise au début du 18e siècle pour les églises de notre région. Il est constitué de deux loges latérales cintrées, qui flanquent la loge centrale plus élevée et couronnée d’un fronton galbé, avec sculptures sobres centrées sur la partie centrale. Chemin de Croix : c’est une réalisation du 19e siècle ; il fut officiellement béni le 17 avril 1878. Statue de la Vierge à l’enfant bois polychrome : cette statue en bois de fruitier date de la fin du 17e siècle. La dorure a été refaite au 19e siècle. Statue de St Roch avec son bâton et son chien : aucune information (ni date, ni origine). Les légendes rattachent Saint Roch (1295-1327) aux épidémies de peste du Moyen Âge. Son culte se répandit avec les ravages de la peste. On invoque St Roch pour être protégé des calamités, dont le phylloxéra. Cloche : « Joséphine-Anne » En 1820, une souscription lancée parmi les paroissiens avait permis de doter le clocher d’une nouvelle cloche de 312 kg, bénie par l’abbé Henrion, curé d’Andilly et de Margency, le 26 octobre 1820, en présence de Paul-Auguste Alfred Le Roux et de Marie-Delphine-Ernestine Le Roux, celle-ci représentant Catherine-Joséphine-Didière de Lattier-Bayane, comtesse de Rochefort. Les modifications « ornementales » à l’intérieur de l’église ont été réalisées en 1964, après le Concile et les nouvelles prescriptions liturgiques. La chaire qui n’est plus utilisée est supprimée, l’autel abaissé, les boiseries du chœur supprimées, la barrière de communion également. « La messe sera dite face au peuple ». En 1967, après consolidation de l’église, un autel de pierre est installé pour remplacer l’autel existant et il fut décidé que seront ensevelies dans l’autel les reliques attribuées à St Juventus et à Ste Félicité.

Claude Collineau Cercle Culturel de Margency le 19 septembre 2014