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© A L 1991. 30 rue de la Cachette, Cairon, 14610 Thaon. ISBN 2-909033-08-2 MARKO RISTIC

VILLE-ÂGE poèmes en français

textes établis

et présentés par BRANKO ALEKSIC Portraits de Marko Ristić et Aleksandar Vučo Collage sur carte postale extrait de la Vie Mobile 1926

CLANDESTINITÉ DE LA POÉTIQUE ALÉATOIRE par BRANKO ALEKSIC

Les poèmes français de Marko Ristié, demeurés inédits pendant plus de cinquante ans, nous font découvrir cet homme étrange et discret qui, au moment de sa troublante participation au mouvement surréaliste, vint à Paris s'abandonner à une valse de synonymes. Le Jardin des Plantes - à la visite duquel ne résista pas même He- gel en 1828 - est devenu chez notre héros, dans un poème écrit du- rant un séjour parisien : « Jardin des pentes » surréalistes. Ce que Marko Ristić rencontre à Paris au coin des hasards - une passa- gère baudelairienne qui le séduit dans un omnibus bleuâtre le 3 janvier 1931, figure d'une poésie lumineuse opposée à toute dégra- dation de l'habitude; ce qu'il voit à Paris s'envole au jeu d'éveil, comme la pulsation de l'idéal dans l'écriture automatique surréa- liste; ce qui persiste de son rêve, comme du jardin public désert et hanté par l'absence des amants - tout cela subit l'adaptation mal- larméenne des « cygnes de ces signaux ». Ces signaux de l'époque surréaliste sont éminemment : le vieux pervers Horus de Gérard de Nerval (dans le poème « Monstres glauques »); l'affiche de la Mati- née de danses surréalistes (fin 1926); « Vagualame » de René Cre- vel; non le miroir de Crevel (dans sa prose le Clavecin de Diderot, traduite à Belgrade par Ristić dès 1932), mais « le Miroir d'Ara- gon » ; le blé noir de Benjamin Péret, et une carte posthume lascive de Rémy de Gourmont, envoyée à André de Rouveyre pour célébrer « la turpitude » d'une image de la belle Amazone (il s'agit de la dame Clifford Barney, que Ristié, toujours fidèle à son salon des souvenirs, rencontrera après la seconde guerre mondiale, comme le raconte Jean Cassou dans la revue Adam, en 1962). Cette carte se- rait à l'origine du long poème Turpituda de Ristić « phantaisie para- noïaco-didactique » à la Salvador Dali commencée en 1932 et pu- bliée en 1938 à Zagreb. Autres signes de l'époque : la polémique surréaliste, comme dans ce poème sur l'affaire Aragon-marxiste qui reprend le titre de la brochure d'André Breton : Misère de la poésie (et qui d'une façon plus directe que le commentaire de Ristié publié dans la revue belgradoise Nadrealizam danas i ovde - Le Surréa- lisme ici et aujourd'hui, n°3, 1932, exprime la désillusion du poète). Avec chaque séjour à Paris, les temps et les âges se condensent dans les coulisses de la grande ville, ramenée par son intimité grandissante aux dimensions d'un « village ». Devançant la théorie de Marshal Mc Luhan sur le monde moderne en tant que village global, Ristić emporte dans ses bagages, comme dans le cylindre du voyant, un mot-valise : « Ville-âge ». Le poème emblématique qui porte ce titre se prête à la polémique au sujet du fabuleux concept formulé tour à tour par , et André Breton concernant l'image poétique produite par rapproche- ment hasardeux de deux réalités séparées. La réponse de Ristić est « héraclitéenne » - titre d'un autre poème, signe de préoccupations communes avec les poètes T.S. Eliot, J.L. Borges, René Char, Oc- tavio Paz et Milan Dedinac dans les années 30. Et « quelle stupé- fiante histoire d'Hésiode » (poème « les Grâces ») que celle de Ristić qui se déroula à la manière d'une « grâce aléatoire ». L'obsession du temps est manifeste : tous ses poèmes écrits en français sont datés - à l'instar des œuvres complètes, Nox micro- cosmica (Nolit, Belgrade, 1956), roman poétique se présentant comme un seul grand ouvrage. Cet auteur « diurne » se vantait d'être « Du même auteur », titre de son recueil d'essais (Matica srpska, Novi Sad, 1956). La vie poétique de Ristié, poète français clandestin, se déroule ainsi que les Travaux et les jours du didac- tique Hésiode à propos duquel, à son crépuscule, il prit l'habitude de comparer son emploi du temps personnel. Rassemblant ses souvenirs de l'esthétique proustienne sur la soie puérile du lac de Plitvice, précise et claire, Ristić croyait que l'on pouvait construire sa vie comme une œuvre d'art. UN SURRÉALISTE DE LA PREMIÈRE HEURE

On me présente à Marco, l'ami des Apaches. , Bon apôtre, 1923

Ristić rencontre pour la première fois le nom d'André Breton en 1917-18, lors d'un séjour en Suisse, dans la revue gauloise l'Éventail, où Breton avait publié son premier essai sur et le poème « Décembre », «... encore plus ou moins mallarméen » 1 De retour à Belgrade après la fin de la guerre, Ristié suit « de loin » le mouvement . Mais après l'arrivée de Tristan Tzara à Paris - qui a encouragé Breton, Aragon et Soupault à lancer la « nouvelle série » de leur revue Littérature - la fascina- tion de Ristié se manifeste par la traduction de trois courts frag- ments choisis parmi plusieurs essais de Breton : Clairement, et les Mots sans rides, publiés à l'origine dans Littérature en 1922-23 Le premier de ces fragments aidera Ristić à se trouver lui-même, et fera d'André Breton son « maître à penser » Dans Clairement, en 1922, Breton expose pour la première fois une nou- velle conception de la poésie, où elle prend un sens plus large et plus important, débordant tout genre littéraire :

La poésie, qui est tout ce qui m'a jamais souri dans la littéra- ture, émane davantage de la vie des hommes, écrivains ou non, que de ce qu'ils ont écrit ou de ce qu'on suppose qu'ils pouvaient écrire.

Et Breton précise :

La vie telle que je l'entends n'étant même pas l'ensemble des actes finalement imputables à un individu (...) mais la manière dont il semble avoir accepté l'inacceptable condition humaine.

1. Marko Ristić, « la Nuit de Tournesol » — Nouvelle Revue Française, n° 172, Paris, avril 1967, p. 700. 2. « Delovi iz Andre Bretona », Putevi (« Chemins »), n.s., n°1, Belgrade, octobre 1923, pp. 11-12. 3. « La Nuit de Tournesol », op. cit., pp. 699-700. 4. André Breton, « Clairement » - Littérature, n°4, 1922; repris dans les Pas perdus (1924). En octobre 1923, Ristié, depuis Belgrade, fait parvenir à Breton la revue Putevi, n avec les traductions enthousiastes des « Frag- ments », et plus tard une petite histoire du mouvement Dada, « la Métamorphose de Dada », qu'il publie dans la revue Knjinževnik (« l'Écrivain ») à Zagreb en 1924, et l'article « À l'ordre du jour » où il fait la découverte du premier livre théorique de l'époque, les Pas perdus C'est de cette période que date le roman à clef de Philippe Sou- pault, grand ami de Rastko Petrovié, un précurseur poétique pari- sien des futurs surréalistes de Belgrade, dans les années 1920-22. Le nom de « Marco » y est peut-être cité comme un écho exotique des « Apaches » yougoslaves Évoquant ces longues années comme les Mille et une nuits de la fable, aussi profondes que les Vingt milles lieux sous les mers, Philippe Soupault dit que parmi les surréalistes yougoslaves qu'il a personnellement rencontrés,

Marko Ristić était le plus actif et le plus clairvoyant, mais

aussi le plus averti .

Initié aux voies surréalistes, Ristié a reçu entre-temps de Breton successivement son recueil de poèmes Clair de terre, le dernier numéro de Littérature et le Manifeste du surréalisme. Le Manifeste est imprimé en octobre 1924, et immédiatement salué par Ristić, en novembre de la même année, dans le premier numéro de la revue Svedočanstva (« Témoignages »), à travers l'article « Nadreali- zam ».

Dans l'étude Otkrivenje u nadrealizmu (« la Révélation dans le surréalisme », Prosveta, Belgrade, 1983), j'ai montré que cette même citation de « Clairement » se trouve répétée au moins trois fois dans les oeuvres de Ristić. 5. « Fragments d'André Breton » et « la Métamorphose de Dada » sont réédités dans notre collection de textes : Hommage à André Breton, 1898-1968/1978; « À l'ordre du jour » est repris par Ristić dans Od istog pisca (« Du même auteur »). 6. Cf. Philippe Soupault, le Bon apôtre, rééd. Garnier 1980, p. 119. Des lectures privilégiées de l'enfance, deux héros favoris sont communs à Soupault et à Ristié : le capitaine Nemo de Jules Verne et le détective Nick Carter, chantés dans le Bon apôtre et dans Sans me- sure, ainsi que dans l'Anatomie d'Oskar Davičo. 7. Vingt mille et un jours, par Philippe Soupault - entretiens avec Serge Fauchereau, éd. Belfond, 1980, p. 208. Dans l'entretien que j'ai eu avec lui à Paris, le 21 janvier 1985, Phi- lippe Soupault m'a parlé aussi de Rastko Petrović (dont le nom n'a pas été mentionné à côté de ceux de Matić et de Ristić dans Vingt mille et un jours). 8. Cf. « la Nuit de tournesol », op. cit., p. 702. Le tout premier cahier de la revue la Révolution surréaliste du 1er décembre 1924 signale :

Marko Ristié. Lire Témoignages et les divers articles de Marko Ristić dans les revues de Belgrade et de Zagreb.

André Breton, par cette notice, non seulement exprime sa re- connaissance personnelle envers l'engagement de Ristić, mais avec la précision qui le caractérise, il met l'accent sur l'activité d'un « Apache » dont le nom sera de nouveau cité dans le Dictionnaire abrégé du surréalisme de Breton et Éluard, où Ristić atteindra la ré- putation internationale indiscutable de « poète et écrivain surréa- liste, promoteur de ce Mouvement en Yougoslavie; directeur de Na- drealizam danas i ovde » 10 Dans ses souvenirs littéraires, Ristić confesse la lecture émue de cette première notice parlant de lui à Paris 11 En échange, dans Svedočonstva, n°2, il annoncera la sortie de la revue surréaliste parisienne et de l'ouverture d'un Bureau de re- cherches surréalistes Enfin, à travers le poème « Se tuer », Ris- tić sera directement présent dans LRS, n°5, le 15 octobre 1925. Le poème est écrit en français, langue qu'il maîtrise si bien qu'André Thirion soulignera :

Si tous les surréalistes serbes avaient une bonne connais- sance du français, Ristić, comme (Koča ) Popović, le parlait en 1930 sans accent et l'écrivait mieux que la plupart de

mes compatriotes13.

9. Dans la rubrique « Revues », la Révolution Surréaliste, n°1, p. 31. 10. Cf. Dictionnaire abrégé du surréalisme (1938) par André Breton et ; rééd. José Corti, Paris, 1980, p. 24. 11. Marko Ristić, Svedok ili saučesnik (« Témoin ou complice »), éd. Nolit, Belgrade, 1970, p. 251. 12. Marko Ristić, « la Révolution surréaliste — 15, rue de Grenelle, Paris » (titre en français dans l'original), Svedočanstva, n° 2, Belgrade, 1. 1. 1925, p. 15. 13. André Thirion, Révolutionnaires sans révolution, éd. Laffont, Paris, 1972, p. 246. L'humour devient immoral, dès qu'il tente (même inconsciem- ment) de parer à son incapacité de validité durable par une systé- matisation non moins immorale que toutes celles opérées abusive- ment sur les éléments subversifs de l'esprit, excepté celle, consciente et consciemment relative et pratique, de la morale mo- derne. Statiquement généralisé à des fins narcissistes et illusoires, l'humour n'est plus l'expression désintéressée et directe de l'inconscient. Traître à sa propre particularité concrète et irration- nelle, il n'est pas non plus une systématisation rationnelle néces- saire, au but objectivement, c'est-à-dire révolutionnairement effi- cace, il se réduit à rien. Il n'est plus qu'une désertion, un alibi et couvre tous les compromis. Pour que la liberté de la vie désystématisée puisse devenir uni- verselle, il faut une systématisation (tout le contraire de la générali- sation de certains éléments pris à part) qui englobe tous les élé- ments présents et incomplets et, non moins que les autres, ceux de l'humour, image fuyante de l'arbitraire déchaîné. Le surréalisme va droit à la zone interdite. Mais si, dans son ex- périmentation spécifique, il ne saurait en rien être rationalisé, il s'est, d'autre part, mis au service d'une cause - la seule histori- quement inévitable et décisive - qui exige une organisation ration- nelle de la pensée, le surréalisme s'est mis au service de la révolu- tion qui, elle-même, en travaillant à transformer les conditions ma- térielles de l'existence humaine, est au service d'une liberté concrète et certaine dont les éléments, autant qu'il est actuellement possible, se sont déjà incorporés au surréalisme, se mettant à leur propre service. L'humour, par exemple, peut être une arme à ne pas négliger. Mais le fatalisme - qui devient son fait dès qu'il se géné- ralise - n'a rien à voir avec le caractère déterministe de l'attitude morale du révolutionnaire. Un révolutionnaire sait qu'on n'atteint à la liberté que par la connaissance de la nécessité, et qu'on ne se dé- robe pas à la responsabilité devant la nécessité de cette connais- sance et de l'action avec laquelle elle s'identifie.

Le Surréalisme au service de la révolution, n°6, Paris, 15 mai 1933. LA RENCONTRE CAPITALE

Réponse à l'enquéte : Pouvez-vous dire quelle a été la rencontre capitale de votre vie? Jusqu'à quel point cette rencontre vous a-t-elle donné, vous donne-t-elle l'impression du fortuit? du nécessaire?

Il ne me paraît pas que telle des rencontres qui eurent une in- fluence plus ou moins décisive sur le cours, d'ailleurs assez mono- tone, de ma vie aussi bien que de ma pensée, puisse véritablement être qualifiée de capitale, et ainsi mise en valeur aux dépens et à l'exclusion de toutes les autres. Ma réponse à cette enquête pour- rait donc se résumer dans un simple « non », et s'y astreindre, n'était le risque que cette négation laconique restât dépourvue des regrets, des virtualités et des conclusions qu'elle devrait impliquer. C'est la seconde des deux questions qui me semble surtout apte à provoquer une certaine suite de représentations affectives et intel- lectuelles qui donnent à la première question et à l'éventuelle répon- se biographique qu'elle suscite, une perspective plus profonde et plus exigeante. Il s'agit là d'une réciprocité causale de jugement, d'un renversement de critérium.

L'impression du fortuit que pourrait laisser une expérience vitale aussi chargée de signification émotive et de dynamisme boulever- sant, latent ou manifeste, qu'est une rencontre, expérience où mer- veilleusement viennent se résoudre et s'identifier dialectiquement l'un et le multiple, cette impression du fortuit serait, surtout si elle se montre durable, plutôt faite pour nier que pour confirmer et exal- ter cette valeur d'événement capital, unique, irremplaçable, valeur qui donnait ce prix inestimable à la rencontre dont, pour un homme, à travers cette impression et en dehors d'elle, il continue de s'agir. La rencontre capitale d'une vie doit nécessairement non seulement donner l'impression du nécessaire, mais, avoir un caractère de né- cessité objectivable ne serait-ce qu'en vertu de la vérité détermi- niste objective et de l'acceptation paranoïaque-critique de la parole, si je ne trompe, héraclitéenne : « Le caractère est la destinée de l'homme », qu'il ne faut, bien entendu, comprendre ni d'un point de vue psychologique ni d'une façon fataliste ou idéaliste. C'est donc justement parce que cette impression, cette certitude du nécessaire ne s'attache pour moi suffisamment à aucune des rencontres concrètes qu'à ce jour j'ai vécues, que je pense pouvoir affirmer qu'aucune n'a encore été capitale, qu'aucune n'a été la rencontre que peut-être je continue à attendre de cette tendance qu'a l'amour, « soumis chez un être au rythme général de son évo- lution, à se perfectionner philosophiquement ». Cette rencontre, je la reconnaîtrai, peut-être a posteriori, car il se peut qu'elle appar- tienne au passé et que je n'aie pas été capable de pleinement sen- tir, de réaliser sa nécessité essentielle, je la reconnaîtrai dans la lumière qui lui est propre, dans le bref et défaillant éclat de liberté exceptionnelle et improbable mais possible, dans ce brusque et splendide éclat dont sera faite un jour - le jour où le conditionne- ment social de la vie passionnelle sera surmonté par tous et pour tous, le jour où la révolution aura « rendu pleinement l'homme à sa destination éternelle » et où le déterminé et l'indéterminé, le néces- saire et le fortuit ne s'opposeront plus l'un et l'autre - la perma- nente lumière.

Minotaure, n°3-4, 1933 À PROPOS DES

« SOURCILS DÉSYSTÉMATISÉS »

par VAN BOR

Peintre et théoricien du surréalisme, Stevan (Vane) Zivadinovié-Bor, né en Serbie à Bor, en 1909, a collaboré avec Koča Popović et Marko Ristić à la première partie du poème « les Sourcils désystématisés ». Collègues d'un lycée de Belgrade, Vane Bor et Koča Popović ont co-signé, pour la première fois — avant la proclamation de l'organisation du groupe surréa- liste à Belgrade en 1930 — un manifeste à Paris : « Un homme de goût », dans la revue Cinéma (n°3, mai 1929). D'autre part, Vane Bor est le beau- frère de Marko Ristié, ce qui explique, par exemple, que le nom de celui-ci soit mentionné dans une lettre confidentielle de Vane Bor à Salvador Dali (publiée dans le Surréalisme au service de la révolution, n°6, Paris, 15 mai 1933). Comme je lui avais demandé à l'occasion de cette première des Sourcils, de faire un commentaire sur la manière dont a été composé le poème à l'époque, Vane Bor m'a répondu d'Oxford où il vit actuellement, et sa lettre est par hasard datée du « 14 juillet ! 1985 » (c'est lui qui souligne).

B.A.

Pour bien comprendre le surréalisme serbe, il faut savoir comment il s'est organisé, spontanément, dans la vie quotidienne. Le groupe de Belgrade avait, tout naturellement, des séances assez fréquentes, souvent quotidiennes, où l'on discutait des problèmes théoriques et de la politique du mouvement. La vie surréaliste était solide, intense. Naturellement, les femmes y jouaient un rôle impor- tant. Lula Vučo (le femme d'Alexandre) et Ševa Ristić (ma sœur, la femme de Marko) invitaient à tour de rôle dans leurs « salons ». Bien entendu, on n'invitait pas tous les surréalistes dans ces ré- unions intimes, mais seulement ceux qui étaient déjà de bons amis. Le nombre variait. La plupart du temps on y voyait (outre les per- sonnes déjà mentionnées) Milan Dedinac, Koča Popovič et des sympathisants comme le poète Rastko Petrovié, Nikola Vučo (le photographe) et sa très belle femme; quelquefois V. Ribnikar (rédacteur en chef du quotidien Politika) et sa femme qui, née Djurić, était une virtuose du piano sous ce nom. Également Mladen Dimitrijević, le frère de Dedinac, poète aujourd'hui bien connu. Ces réunions sociales étaient des fourmilières d'esprit et d'humour. Les discussions théoriques ardentes alternaient avec des plaisanteries surréalistes et dadaïstes incongrues ou subtiles. Une grande partie du temps était consacrée aux jeux surréalistes. On dessinait des « cadavres exquis », on découpait des images pour réaliser des collages, on faisait des simulations et, surtout, des « écritures exquises ». C'était une activité fiévreuse et heureuse. C'est dans ces conditions que furent composés « les Sourcils désystématisés ». Le poème consiste en de nombreux fragments écrits par l'un ou l'autre des auteurs, à tour de rôle. On écrivait li- brement, sans se consulter, si bien que les enchaînements sont souvent inattendus. La longueur du poème n'a pas été préméditée. Elle est le résultat de l'entrain souterrain qui possédait les auteurs de ces fragments nombreux et variés. Si le lecteur y découvre une unité poétique, c'est que les auteurs participaient au même état d'esprit, et avaient une inspiration commune. Il faut noter ici qu'une méthode toute semblable avait été utilisée auparavant. Ristié et moi avions passé des vacances ensemble en 1928, et écrit un grand drame historique surréaliste : Knut, prince du Schleswig-Holstein. Ce duché est voisin du Danemark, et l'action se déroule en même temps que le Hamlet de Shakespeare. Ce drame fut également écrit scène par scène et à tour de rôle. Le texte final et les notes, donnant un aperçu du drame, ont été conservés dans les archives Ristié à Belgrade.

Oxford, juillet 1985. bio-bibliographie

1902 Le 20 juin, à Belgrade, « né au début de ce siècle, à l'époque de l'Exposition Universelle de Paris, de la Tour Eiffel, de l'Affaire Dreyfus et de la reine Draga *, de l'Art Nouveau et des peignes de Sarah Bernardt, des tandems et des premières automobiles... » (« les Données subjectives et leur signification objective pour l'analyse d'une société », 1933)

1909-1921 De l'école élémentaire et du début du lycée à Belgrade, à travers l'exode à Kruševac et en Suisse (où son père va travailler avec la Croix rouge), ses études sont souvent interrompues à cause de la guerre et des maladies. Commence à tenir un journal, où il décrit l'emprisonnement de sa famille en Suisse au moment de la déclaration de guerre de l'Autriche à la Serbie. Dans le sanatorium de Leysin, se lie d'amitié avec la « citoyenne Sidis », la jeune Suzanne Didisheim qui finit ses lettres par le « salut et fraternité » jacobin; influence de .

1922-1923 Avec Milan Dedinac et Dušan Timotijevié, fonde la revue d'avant-garde littéraire Putevi (« Chemins »), où il traduit en serbe Pierre Reverdy, Aragon et André Breton à qui il écrit personnellement. Collabora- tion des poètes modernes et avant tout de Miloš Crnjanski et de Rastko Pe- trovié. Ce dernier les met en rapport à Paris avec les parutions des revues Littérature, l'Œuf dur, Sic, etc.

1924 Avec Miloš Crnjanski, auteur du célèbre poème Stražilovo publié d'abord dans Putevi, édite le triple numéro d'été de la nouvelle série de Putevi. Commence la rubrique littéraire « Commentaires » des associations libres, dans l'hebdomadaire Pokret (« le Mouvement »), où il écrit sur Proust et sur Joyce, sur Breton et « le climax de l'Europe qui se brise au- dessous de la ville de Belgrade ». Avec Rastko Petrović, Dušan Matić, Milan Dedinac et Mladen Dimitrijevié (Dimitrije Dedinac), lance une nouvelle revue, Svedočanstva (« Témoignages »), et y écrit pour la première fois sur le surréalisme, traduisant également un fragment du Poisson soluble de Breton, le texte automatique accompagnant le Manifeste du surréalisme que l'auteur lui manda de Paris.

1925 Diplômé de la Faculté de Philosophie de Belgrade. Le premier recueil de poèmes, Od Sreće i od Sna (« Du bonheur et du Rêve »), dans lequel n'entrent pourtant ni les expériences sur la « poésie cubiste » de Putevi, ni son texte automatique « Exemple » de Svedočanstva, mais bien les poèmes de facture classique, d'ambiance sentimentaliste selon l'interro- gation de sa conscience, avec pour mots-clés : le sans souci, l'esprit, le destin. Traduction en français du poème « l'Accompagnatrice » dans l'almanach allemand Europa (Gustav Kiepenheuer Verlag, Postdam). Le poème « Se tuer » en français paraît dans la Révolution surréaliste (n°5, 15 octobre, Paris).

* Mašin, que chantera dans le Libertinage sous le nom de « Machine ». 1926 Part en décembre avec sa jeune femme Seva pour Paris, où il reste plusieurs mois. Au café « Cyrano », les uns après les autres, les visages du groupe surréaliste, qu'il est venu rencontrer, « surgissent de l'ombre », et il note dans son carnet : « 1. X (?), 2. X — Bernier (?), 3. Breton, 4. Éluard, 5. Sadoul, 6. Fourrier, 7. Noll * »

1927 La Vie mobile, cycle de collages surréalistes. L'année se révèle troublante pour le groupe surréaliste parisien qui décide de son entrée au Parti communiste, et Ristié réalisera qu'il est arrivé à Paris au mauvais moment. André Breton lui parle, dès leur première entrevue, 42 rue Fon- taine, du communisme et, fortement impressionné, il note le 3 février l'équation suivante * :

Savoir, à la fin des fins : Kant-Fichte-Schelling Hegel-Feuerbach-Marx Engels-Lénine-Breton Aragon.

Au printemps, se plonge dans l'expérimentation d'un livre surréaliste : Bez mere (« Sans mesure », d'après le programme de Rimbaud), qui sera publié l'année suivante à Belgrade et qu'il considérera, « en tant qu'essai d'une expression totale », comme son livre le plus important.

1928 L'auteur de Sans mesure signe ses critiques littéraires « L.S. » dans le quotidien belgradois Politika. L'abréviation signifie « Lalin Sin », « fils de Lala », car c'est grâce aux relations de son père qu'il y est introduit. Les articles seront réunis dans Književna politika (éd. Prosveta, Belgrade, 1952) : « Politique littéraire », celle qu'il menait afin de préparer le terrain à une littérature moderne. Protestation du jeune anarchiste révolutionnaire Djordje Jovanovié de la revue surréaliste Tragovi (« Traces »), qui le voit perdu et enfermé dans sa bibliothèque. (La superbe lettre ouverte de Djordje Jovanovié, publiée dans Du même auteur par Ristić en 1957, doit être comparée à la lettre ouverte de René Daumal, du Grand Jeu, à Breton en 1930 : « Prenez garde, André Breton, de figurer plus tard dans les ma- nuels d'histoire littéraire... »). « Du Rêve », dernier poème du recueil de 1925, est traduit en allemand dans Prager Presse (VIII, n°49, 2 décembre).

1929 Répond à l'enquête sur l'amour de la Révolution surréaliste (n°12, Paris). Outre les critiques littéraires dans Politika, publie les « Marginalia » (d'après E.A. Poe et Paul Valéry) dans Letopis matice srpske (Novi Sad). Traduit les Caves du Vatican d'André Gide.

1930 S'active à l'organisation du groupe surréaliste à Belgrade (Oskar Davičo, Milan Dedinac, Mladen Dimitrijević, Djordje Jovanovié, Djordje

* Cf. le journal parisien, dans À la veille du surréalisme, posthume, 1985. Kostié, Dušan Matié, Koča Popovié, Aleksandar Vučo, etc.) et de concert avec Matié et Vučo, à la préparation de l'almanach poético-philosophique surréaliste bilingue Nemoguče — l'Impossible, auquel collaborent également les surréalistes français. Héberge l'un deux, André Thirion, à Belgrade, et l'aide dans son exploit bulgare : l'enlèvement de son amour d'étudiant, Katia Drenovska (Cf. André Thirion, Révolutionnaires sans révolution, mémoires, ch. XVI, Laffont, Paris, 1972). Cosignataire, avec une vingtaine d'autres surréalistes européens, de la déclaration d'une nouvelle voie : le Surréalisme au service de la révolution, qui sera reproduite par Breton dans le Second Manifeste du surréalisme.

1931 En collaboration avec Koča Popovié : Esquisse pour une phéno- ménologie de l'Irrationnel (aux éditions surréalistes, Belgrade), et traduction en français de la majeure partie de l'étude, destinée à la nouvelle revue le Surréalisme au service de la révolution. Mais à Paris Koča Popovié diverge et lui fait seulement envoyer sa traduction d'« Humour 1932 » de la revue Nadrealizam danas i ovde (qui sera repris par le Surréalisme A.S.D.L.R., n°3). Défend l'Esquisse face à l'attaque du professeur Dušan Nedeljkovié, dans la brochure : Quels sont les mobiles et quels sont les résultats de la philosophie scolaire? — À propos d'une critique de l'Esquisse (éd. surréalistes). Nouveau voyage à Paris où il entreprend un cycle de poèmes en français. Pendant son absence, Matié, Kostié et Jovanovié publient à Belgrade le premier cahier de la revue Nadrealizam danas i ovde (« Surréalisme ici et aujourd'hui »). « Une matinée claire de juin 1931, quelques-uns d'entre nous, du café "Cyrano", situé en face de chez lui — il suffisait de traverser la place Blanche — ont été conduits par Breton dans son pigeonnier, où il nous offrit les premiers exemplaires de son poème alors inconnu, devenu vite célèbre : "l'Union libre", » (12 C - Le journal postérieur parisien )

1932 En janvier, édite et imprime le second numéro de Nadrealizam danas i ovde à Belgrade, cette fois avec la collaboration renouvelée des surréa- listes français. Dans cette même perspective internationale, édite et im- prime le troisième et dernier numéro, en collaboration avec Koča popovié et Milan Dedinac, où il défend le mouvement surréaliste face aux attaques de la gauche stalinisée, des adeptes de la « littérature sociale » dirigée : « l'Incompréhension de la dialectique ». Fournit le même effort, avec l'aide de Vane Živadinović-Bor, dans Anti-Zid (« Anti-Mur », brochure aux éd. surréalistes) « pour une meilleure compréhension du surréalisme »; cette fois, il lance un appel à la fraction Matić-Davičo-Kostić, lesquels se sont déclarés pour la Position du surréalisme dans le processus social (titre de leur brochure). Dissolution du groupe surréaliste de Belgrade et fin des activités.

1933 Répond à l'enquête de Breton et d'Éluard sur la rencontre capitale dans la revue Minotaure (n°3-4). L'écrivain léniniste Miroslav Krleža, anima- teur des revues les plus avant-gardistes de Croatie (Plamen, Književna Republika, etc.), venu à Belgrade, l'invite à collaborer à une nouvelle revue, Danas (« Aujourd'hui »). Ristić considérera que cette rencontre avec Krleža fut « d'une grande importance pour (son) développement littéraire et (son) attitude envers le monde réel » (« Chronologie », 1962).

1934 Dans Danas, de janvier à mai (date à laquelle la revue sera saisie), il développe la thèse « fautive » de « la signification morale et sociale de la poésie », établissant entre les deux pôles une causalité qu'il ne reniera pourtant jamais.

1935 En souvenir des procédés d'André Gide : Préface à quelques romans non-écrits et Journal de cette préface (éd. Almanach des problèmes contemporains, Zagreb).

1936 « Les Intellectuels devant le problème de la guerre », et une confé- rence à l'occasion du 70 anniversaire de Romain Rolland. Commence une longue étude sur l'Histoire et la poésie « sous l'illumination de l'Espagne en feu ».

1937 Essai sur dans la revue Ars 37 de Zagreb. Séjour à Paris où il vit exposé « Guernica »; en compagnie de Dora Marković (dite Maar) et de Pablo Picasso qui dessine pour lui sur une nappe de café. Dernière entrevue avec Breton à la Galerie « Gradiva ». Critique le pavillon soviétique à l'Exposition Universelle et tombe en disgrâce devant le PC yougoslave.

1938 Turpitude, « rapsodie paranoïaco-didactique » — selon la méthode de Savador Dali, avec des dessins de Krsto Hegedušić, éditée à Zagreb avec comme sous-titre TURPITUDA - LA MAJA DESNUDA. TURPITUDA - LUPA GRA- VIDA. Le poème, qui a pu être chanté par le frénétique Pétrus Borel, dit « le Lycanthrope », dont le souvenir est évoqué, est saisi par la police. Il sera réédité dans la revue Delo après la guerre, et aux éditions Liber (Zagreb, 1972).

1939 Avec Miroslav Krleža, Krsto Hegedušić, Vasa Bogdanov, Zvonimir Richtmann, etc., édite la revue Pečat (« Le Sceau ») à Zagreb. Paraphra- sant le titre des eaux-fortes de Picasso « Songe et mensonge de Franco », il y publie « Songe et vérité de Don Quichotte ». Mais une explication avec un écrivain et dirigeant communiste (qui dans un de ses poèmes avait mis Don Quichotte dans l'avion franquiste), fruit d'une nouvelle incompréhen- sion, constitue l'ultime confrontation avec le PC et la littérature dirigée; le conflit « derrière lequel, en effet, s'occultent les procés de Moscou » (Krleža, « Prolégomène à l'Anti-Barbare »).

1940 Essai « De nuit à nuit » et collaboration à l'Anti-Barbare de Krleža (qui d'ailleurs fut écrit en grande partie « pro domo Marko Ristić »), dans Pebat.

1941-1942 Aide le poète Louis Fürnberg, émigrant « condamné à mort en Allemagne et en France », à s'enfuir vers Lisbonne (où ce dernier écrira un poème dédié à Ristié, ainsi que « Ein Tito-Lied », dans le recueil Hölle, Hass und Liebe publié à Londres en 1943 avec une préface d'Arnold Zweig, puis, en 1947, censuré par l'auteur lui-même pour l'édition Verlag JHW Dietz, à Berlin). Vit à Vrnjaèka Banja, petite ville thermale du sud de la Serbie, dans le sanatorium de ses beaux-parents. Les « Marginalia », écrits sur la guerre, le nationalisme et le défaitisme deviennent Hacer Tiempo (éd. Prosveta, Belgrade). Arrêté en novembre 1942 par la Gestapo et enfermé à Kruševac. Expulsé- de Vrnjaèka Banja à sa sortie de prison, par ordre de la « Feldkommandatur » allemande qui, ainsi, lui sauve involontairement la tête, mise à prix par les četnici du général royaliste collaborateur Draza Mihailovié.

1943-1944 Retour à Belgrade; auto-psychanalyse devant les Vases com- municants.

1944 À la libération de Belgrade, prend un engagement de citoyen à travers une série d'articles politiques. Premier texte : « Mort au fascisme, liberté au peuple » — le slogan des partisans en guerre — qui donnera son titre à un recueil aux éditions Prosveta en 1945. Directeur littéraire de la maison d'édition d'État yougoslave (DIZJUG), qui publie entre autres Ivo Andrié.

1945 Poursuit la série de ses articles politiques dans Politika et Borba (« Combat »). Nommé ambassadeur de la République Fédérative Yougo- slave à Paris.

1948-1951 Présente à Paris l'ouvrage du poète partisan tué par les četnici durant la guerre, Ivan Goran Kovačić : la Fosse commune, précédé du poème, « Tombeau de G. Kovatchich » de Paul Éluard, et illustré par Pablo Picasso (traduction du serbe par K. Stojanović et S. Béraud, éd. La Biblio- thèque Française). Cependant, suite à la proclamation du Kominform contre la Yougoslavie, le livre est accueilli par un silence sépulcral. Par ailleurs, il répond aux menaces proférées par les communistes français (encouragés par Staline) contre la Yougoslavie, à travers des lettres polémiques et des articles virulents à l'adresse de Charles Tillon, de Jacques Duclos, de Mar- cel Cachin, de Claude Morgan, d'André Wurmser et de Claude Roy (ce dernier lui répondra par des excuses dans son autobiographie Nous, t. 2, en 1972 seulement). Ces textes seront réunis dans Politička književnost (Za ovu Jugoslaviju) 1944-1958 (« La Littérature politique — pour cette Yougos- lavie », éd. Naprijed, Zagreb, 1958). Amitié avec les écrivains Claude Aveli- ne, Jean Cassou et Vercors. 1951 De retour à Belgrade, prépare la publication du journal Hacer Tiempo.

1952 Avec Otto-Bihalji Merin, Oskar Davičo, Milan Dedinac, Eli Finci, Du- šan Matié et Aleksandar Vuco (tous quinquagénaires!), essaie de réactuali- ser le vieux titre Témoignages par un « remake » de la revue. Pourtant, ayant, comme Vučo, une autorité politico-culturelle, sa situation est ambiva- lente, car il entre en négociation avec des dirigeants politiques demeurés stalinistes en culture (tel Milovan Djilas) sur le destin de journaux tel que la Jeunesse (Mladost), qui fut saisi. Enfin, les Témoignages eux-mêmes sont saisis.

1953 Prostor-Vreme (« Espace-Temps »), essais et articles de 1933 (Danas) à 1952 (les infortunées Svedočanstva, n°2) ; essais et articles sur des auteurs yougoslaves (éd. Zora, Zagreb). Essai à l'occasion du 60 anniversaire de Krleža (éd. Zora, l'année suivante). Préface à la traduction de Phèdre de Racine que Milan Dedinac avait ramené d'un camp de concentration allemand. Président de la Commission pour les relations cul- turelles avec l'étranger.

1954 Long essai : « Trois poètes morts : Paul Éluard, Rastko Petrovié et Miloš Crnjanski » (Académie d'Art et de Sciences de Zagreb), le dernier étant bien vivant mais émigré à Londres; dogmatisme culturel des thèses fautives de 1933 dans la revue Aujourd'hui. Sa popularité s'amenuise considérablement.

1955 Figure parmi les fondateurs de la revue littéraire Delo à Belgrade. Postface à la traduction de la Mémoire courte de Jean Cassou, traduit à Sarajevo. « Culture et coexistence », article pour la revue Comprendre.

1956 Participe aux rencontres Est-Ouest organisées par la revue Com- prendre (Cf. n°16, septembre) à Venise, et dialogue avec Jean-Paul Sartre, Maurice Merleau-Ponty, Stephen Spender, etc. (Cf. la Littérature politique, 1958). Nox microcosmica (éd. Nolit, Belgrade), recueil des poèmes de la période 1923-1953: titre programme des " souterrains de l'homme», de « ce que dit la Bouche d'Ombre » (Hugo). Essai Ljudi u nevremenu (« les Êtres dans la tempête »), éd. Kultura, Zagreb.

1957 Od istog pisca (« Du même auteur »), éd. Matica srpska, Novi Sad, livre d'essais et d'articles dont le titre, « au lieu d'une esthétique », est déterminé depuis les « Marginalia » de 1929.

1958 Engagement contre l'armement nucléaire. Participe à la 12° Confé- rence de l'UNESCO à Paris, qui donnera le titre de son long journal parisien « 12 C » publié en série dans la revue Forum à Zagreb. Répond aux questions de la revue les Temps modernes de Jean-Paul Sartre.