ntrer à la , c’est d’abord faire l’expérience d’un lieu. EIl y a une magie propre au site, à la beauté du jardin adoucissant une architecture rigoureuse, fonctionnelle, pensée dans ses moindres détails par un créateur, pour des créateurs. La Villa Arson est en elle-même ce qu’on pourrait définir comme l’alliance réussie de l’intention et de la forme. C’est une vaste architecture paradoxale, qui épouse les formes de la colline qui la porte tout en la recouvrant entièrement, et se fond dans un paysage urbain qu’elle domine pourtant. C’est un jardin clos de murs qui invite aussi, depuis les trois terrasses qui surplombent les bâtiments, à la contemplation de la ville de et de la Baie des Anges, au loin. C’est enfin une architecture à la fois moderniste et méditerranéenne, écrasée de lumière et ombragée, sèche de réalisation et chaleureuse d’esprit. Entrer à la Villa Arson, c’est d’abord et avant tout faire une expérience de l’art. Comme toutes les autres écoles supérieures d’art en , la Villa Arson a bien sûr pour mission de former des artistes et des créateurs, et elle dispense pour cela un enseignement à la fois théorique et pratique, qui privilégie les parcours singuliers, en valorisant l’appropriation critique des savoirs, la liberté d’association des contenus et en portant l’accent sur l’expérimentation plastique. Etudier à la Villa Arson, c’est tracer son chemin parmi les possibles, trouver la singularité de son intelligence sensible, par le dialogue avec les enseignants, tous porteurs d’une vision personnelle d’artiste ou d’auteur. L’interaction constante avec le monde l’art et ses acteurs, qu’ils soient des débutants ou des artistes confirmés, constitue la base du dispositif de formation. Les ressources propres de l’école, la richesse d’équipement des ateliers techniques et de la bibliothèque d’étude, le nombre et la variété des espaces d’enseignement sont autant d’atouts qui créent un environnement propice à l’innovation et à la recherche. La présence d’un centre d’art et de résidences d’artistes in situ constitue le cœur du projet original et fondateur de la Villa Arson : les missions de diffusion artistique sont complémentaires des missions de formation. Cette interpénétration des mondes permet aux étudiant-es d’affiner leur perception des enjeux professionnels du monde de l’art. Entrer à la Villa Arson, en somme, c’est faire cette expérience collective et irréductiblement personnelle. Chaque étudiant-es est invité-e à s’engager, à cultiver son regard, à découvrir de nouvelles possibilités formelles, à apprendre par lui-même, à formuler sa propre vision des choses. L’objectif de la Villa Arson serait simplement de préserver la dynamique de pensée, les flux d’échanges, d’encourager la vitalité créatrice, en un mot, de peupler d’une communauté vivante et contemporaine un lieu historique en réinvention permanente.

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Historique de la Villa Arson

1881 création de l’école des arts décoratifs de Nice, rue Tonduti de l’Escarène 1946 acquisition du domaine de la Villa Arson par la ville de Nice 1962 conception du projet de Michel Marot 1965 la ville de Nice cède le domaine de la Villa Arson à l’état 1970 ouverture de la nouvelle école nationale d’arts décoratifs de Nice (ENAD) 1971 création du centre artistique de rencontres internationales (CARI) 1972 inauguration officielle de la Villa Arson 1984 création du centre national d’art contemporain (CNAC) qui remplace le CARI 1986 l’école devient école pilote internationale d’art et de recherche (EPIAR), abandon des options de design, communication visuelle, environnement et scénographie, au profit d’une unique orientation centrée sur l’art contemporain 2002 création de l’EPA Villa Arson / Ouverture du Studio de Création en Arts Numériques (SCAN) actuel pôle numérique. 2003 La Villa Arson est labellisée Patrimoine du XXe siècle

La création de l’école nationale des arts décoratifs de Nice remonte à 1881. à cette date, l’établissement est situé en centre ville et dispense un enseignement centré sur les arts décoratifs et appliqués à l’architecture, dont le style Belle époque sera le parfait exemple. Les espaces sont considérés rapidement comme exigus et la ville de Nice cherche à établir une école plus grande dans un des nombreux domaines patriciens niçois tombés en déshérence après la première Guerre Mondiale. Le projet peine à se concrétiser et il faut attendre le début des années soixante et la rencontre entre Jacques Médecin, Député-Maire de Nice et André Malraux, Ministre des affaires culturelles, pour qu’un ambitieux projet culturel en région voit le jour. André Malraux a le souci de mettre en place un plan d’aménagement du territoire dans le domaine culturel. Il souhaite ainsi renforcer l’image de la France comme nation culturelle, héritière du siècle des Lumières. C’est ainsi qu’est présenté le projet d’ouverture d’un lieu unique dans le domaine des arts plastiques et des arts visuels, et qui doit réunir toutes les composantes de la création la plus contemporaine en s’inscrivant résolument dans une dimension internationale. En 1946 la municipalité de Nice avait acquis un ancien domaine agricole de la famille Arson, transformé en maison de repos. Le lieu est assez dégradé mais les jardins et les bâtiments évoquent encore une splendeur passée. La ville décide de céder l’édifice à l’Etat dans la perspective de créer cette école d’art d’un genre nouveau : la Villa Arson. L’architecte Michel Marot, récemment Grand Prix de Rome, est l’auteur du projet architectural, qu’il construit avec Pierre Oliver, directeur de l’école jusqu’en 1983. Sa longue expérience de l’enseignement de l’architecture à l’École des Beaux-Arts de Paris lui permet de définir un programme qui réponde à la fois aux besoins mais aussi à l’ambition du lieu.

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L’idée est de concevoir un espace de rencontres, de formation et d’échanges dont l’objectif est de mêler les domaines de la création. Sur environ deux hectares, en préservant le bâtiment principal de la fin du XVIIIe siècle, l’architecte édifie un ensemble homogène de constructions en toiture terrasses couvrant environ 20 000 m2 . Son ambition est d’instaurer un dialogue constant entre le végétal méditerranéen et le minéral d’une construction conçue sur différents niveaux. On préserve ainsi la mémoire du lieu en rehaussant la villa ancienne, dite Villa Arson, en préservant des espèces végétales (oliviers, pins parasols, cyprès), et on donne au site un caractère résolument moderne introduisant ainsi à la création contemporaine.

Il est difficile de ne pas songer aux similitudes qui peuvent exister entre la création de l’Institut des arts et des métiers fondé en 1919 à Weimar par Walter Gropius, le Bauhaus, et la Villa Arson. Michel Marot a d’ailleurs rencontré Walter Gropius aux États-Unis où l’architecte s’était réfugié pour fuir le nazisme. On peut cependant souligner un point particulier qui montre la volonté de faire un travail de grande rigueur. L’éclairage des ateliers a donné lieu notamment à une réflexion intéressante : la présence de lames de béton dans les cages de lumière surmontées de pyramidions (ses skydômes sont, avec les dalles trapézoïdales dites veronico, un des leitmotivs ou symboles de la Villa Arson) a pour but d’empêcher la formation au sol d’ombres portées, quelque soit l’heure du jour. Le programme initial était très ambitieux puisqu’il s’agissait pour répondre à la volonté ministérielle, de créer un établissement, certes école des arts décoratifs, mais qui intégrait une dimension internationale en invitant des artistes étrangers à se produire dans le cadre du Centre artistique de rencontres internationales (CARI). Le métissage des différents domaines de la création donnait au lieu une dimension très exceptionnelle dans le contexte de la mise en place du nouveau ministère dans lequel chacune des directions définissait son unique champ de compétence. Les événements de mai 68 ont apporté quelques modifications au programme initial puisque les étudiant-es en révolte ont obtenu la transformation de la grande salle audio-visuelle en théâtre, symbole de la liberté d’expression. Lors de son ouverture en 1970, l’établissement (qui ne sera inauguré qu’en mai 1972 par le ministre Jacques Duhamel, successeur d’André Malraux) offre un aspect très novateur : il comporte une école des arts décoratifs avec les options habituelles (communication, art, scénographie) et un vaste dispositif en matière de théâtre (une grande salle avec une cage de scène de 16,50 m de hauteur, des locaux techniques, une salle de répétition). Cet ensemble important est complété par des résidences d’artistes, un internat, des chambres pour héberger les étudiant-es étrangers, voire les enseignants de passage, un restaurant, et une vaste bibliothèque. Des problèmes techniques de remontées d’eau conduiront rapidement à la fermeture du grand théâtre mais l’établissement connaîtra très vite une véritable notoriété due en grande partie à la qualité des enseignements.

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L’année 1984 correspond à une nouvelle étape dans l’évolution de l’établissement. Le ministre de la Culture et de la Communication, Jack Lang, vient de créer au sein de son ministère la Délégation aux arts plastiques, il souhaite ainsi donner une toute autre dimension à la création contemporaine dans ce secteur et sur l’ensemble du territoire. Il encourage ainsi la création de nombreux centres d’art et met en place dans chacune des régions un Fond régional d’art contemporain (FRAC) qui acquiert des œuvres auprès des jeunes artistes, et propose sur la région des expositions. L’aménagement du territoire en matière culturelle se poursuit et le ministre vient inaugurer à la Villa Arson la transformation du Centre artistique de rencontres internationales (CARI) en un Centre national d’art contemporain. C’est cette forme qui est désormais en place et qui constitue un des points forts de l’établissement. Une étape est ainsi franchie et l’établissement affiche clairement sa prédisposition pour l’art contemporain dans le domaine des arts plastiques : à la nouvelle orientation du centre d’art va correspondre une nouvelle appellation de l’école qui devient École pilote internationale d’art et de recherche (EPIAR). C’est la nomination en 1985 de Christian Bernard, directeur artistique de l’ensemble de la structure, école et centre d’art, qui va donner le nouveau ton pendant dix ans.

La création du Centre national d’art contemporain correspond à l’émergence d’une nouvelle politique d’établissement. Chacune des composantes enrichit le dispositif d’ensemble. L’offre de formation des étudiant-es se trouve renforcée par la présence continue d’artistes : ceux qui sont invités dans le cadre d’une résidence, et ceux qui sont exposés dans les galeries du centre d’art. Cette volonté affichée de faire fonctionner ensemble les trois éléments indissociables de l’établissement a été déterminante pour le succès, sinon l’efficacité, de la Villa Arson.

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