LA DEUXIÈME PORTE Dossiers

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LA DEUXIÈME PORTE Dossiers LA DEUXIÈME PORTE Dossiers Ouvrages déjà parus Dassault, Douglas, Boeing et les autres par Bernard Marck. Le Défi soviétique par Claude Durand-Berger. Une enquête de police sur « le Canard enchaîné » par Christian Plume et Xavier Pasquini. La Guerre des Truands par Claude Picant. Complots en France par Jean Renaud-Groison. L'Affaire de Broglie par Jacques Bacelon. Le Réseau Curiel ou la subversion humanitaire par Roland Gaucher. Elysée, sens interdit par Jean Renaud-Groison. Le 23 mars 1979, une provocation politique par Claude Picant. Nous avons tué Mountbatten, l'IRA parle par Roger Faligot. L'Argent nazi à la conquête de la presse française par Pierre-Marie $^àç_è_ç=)àçèyu%!mµùmù*lmù**ùmùµ*ùmµ$*^pmù*$*ù^pomù^$**ùm,k;!m:lm%µù^$*µ$ù§$^ùm:ù*ù*!ù*µ%mù!*µùmù*%mù**$ù^*µ%*ùmpùµµ%§m:µùù$*ùµ%mù**µ*ù*Dioudonnat. Dictionnaire maçonnique par Jean-André Faucher. Le Mythe de l'Hexagone par Olier Mordrel. © Éditions Jean Picollec, 1981. ISBN n° 2-86477-037-7 LA DEUXIÈME PORTE Editions Jean Picollec 47, rue Auguste Lançon - 75013 Paris Tél. 589-73-04 Enquête à Marseille de Dominique Gonod. Lorsque, le 25 mai 1981, les avocats de Philippe Maurice se retrouvent dans la cour de l'Elysée pour être reçus par François Mitterrand afin de plaider une dernière fois en faveur de la grâce du jeune criminel, ils ont une attitude qui choque presque les gardes républi- cains et les huissiers. Jean-Louis Pelletier et Philippe Lemaire se sont arrêtés face à face, à deux mètres de distance, ils ont regardé leurs pieds et ils ont éclaté de rire. Leur manège a une histoire qui symbolise admira- blement le style giscardien. Au-delà de sa futilité apparente, elle éclaire la personnalité de l'ex-président de la République et le climat qui régnait à l'Élysée à la fin de son septennat. Philippe Maurice avait été condamné à mort le 28 octobre 1980 par la cour d'assises de Paris et son pourvoi en cassation avait été rejeté le 19 mars 1981. Quelques jours avant cette dernière date, Valéry Gis- card d'Estaing, interrogé sur la peine de mort, avait déclaré : « Je remplirai les obligations de mon mandat jusqu'au bout. » Dès lors, les avocats étaient en alerte. Ils savaient qu'à tout moment ils pouvaient être convoqués par le chef de l'Etat. Rien n'empêchait celui-ci de gracier ou de laisser exécuter l'assassin d'un policier qui s'était ensuite rendu coupable d'une tentative d'évasion et qui avait, à cette occasion, blessé grièvement un gardien de prison. Afin d'être prêts pour cette ultime démarche, les défenseurs, soucieux de mettre toutes les chances de leur côté, avaient cherché à savoir ce qu'il fallait faire ou ne pas faire en présence du chef de l'État. A l'époque, la bataille électorale est épicée par des révélations sur le protocole de monarque que le chef de l'État imposerait à son entourage. Au cours d'un dîner, Jean-Louis Pelletier rencontre un dirigeant du Parti républicain, le parti du président, et lui fait part de ses préoccupations. « Giscard, lui dit celui-ci, n'aime pas que l'on porte des mocassins. » Un jour, il en fait le reproche à un membre du gouverne- ment : " Quand on est ministre, on soigne sa tenue, on ne porte pas de mocassins. " Tenez-le-vous pour dit : si vous ne voulez pas faire sur lui une mauvaise impression, mettez des chaussures à lacets... » Ce soir-là, M Pelletier avait noté sur un pense-bête qu'il devait acheter au plus vite des chaussures adé- quates, et prévenir son confrère Lemaire pour qu'il en fasse autant! Aussi, deux mois plus tard, lorsqu'ils arrivent à l'Élysée, les deux avocats regardent sponta- nément leurs chaussures... pour découvrir qu'ils portent tous les deux des mocassins! Bien que le motif de leur visite fût grave, ils n'étaient pas anxieux car ils savaient qu'ils allaient au-devant de la grâce de leur client. François Mitterrand avait été sans équivoque pendant sa campagne : « Je ne suis pas favorable à la peine de mort », avait-il dit à l'émission télévisée Cartes sur table du 16 mars 1981. « Je ferai ce que j'aurai à faire dans le cadre d'une loi que j'estime excessive, c'est-à-dire régalienne; un pouvoir excessif donné à un seul homme : disposer de la vie d'un autre. Mais ma disposition est celle d'un homme qui ne ferait pas procéder à des exécutions capitales. » Les avocats pénètrent donc dans le bureau présiden- tiel sans appréhension. M Marion Fondanèche s'est jointe à M Pelletier et à M Lemaire, auxquels le chef de l'État dit : « Je vous ai fait venir pour écouter vos observations. » Premier à intervenir, Philippe Lemaire se permet de dire : « Monsieur le Président, nous venons en quelque sorte vous remercier pour la décision que vous allez pren- dre... » François Mitterrand ne relèvera pas le propos et dira seulement aux avocats, après les avoir entendus : « Vous avez fait votre travail, maintenant je vais faire le mien. » M Lemaire demande : « Peut-on savoir quand vous ferez connaître votre décision? - Très rapidement », répond Mitterrand. L'audience, qui a duré une quarantaine de minutes, est terminée. Le président raccompagne ses visiteurs jusqu'à la porte en s'excusant toutefois de ne pas aller plus loin car il avoue ne pas encore connaître la maison. Il exerce ses fonctions depuis trois jours seulement. « Quelqu'un va vous guider », ajoute-t-il. Jacques Attali, témoin de la scène, dit : « Cela fait plaisir de voir des avocats, venus pour tenter de sauver la tête d'un condamné à mort, sortir du bureau du président de la République le sourire aux lèvres. - Les temps ont changé », conclut Mitterrand avant de refermer sa porte. Une heure plus tard, le porte-parole de la présidence publiait un communiqué annonçant que la peine capitale pour Philippe Maurice était commuée en réclusion criminelle à perpétuité! La peine de mort aura marqué la victoire de François Mitterrand et l'échec de Valéry Giscard d'Estaing, même si pendant la campagne électorale le débat autour de son maintien ou de son abolition n'aura pas tenu une place éminente. Huit peines capitales ont été prononcées dans les sept mois ayant précédé l'arrivée de la nouvelle équipe au pouvoir. Au moment même où François Mitterrand, immobile sous la pluie, écoutait, face à la foule, sur la place du Panthéon, les dernières notes de l'Hymne à la joie de Beethoven, un criminel était condamné à mort, à Aix-en-Provence. Le lendemain, n'était-il pas, depuis quelques heures seulement, en fonctions, que deux autres verdicts de mort étaient rendus, l'un à Saint Omer, l'autre à Charleville- Mézières. Le problème le poursuivait. Déjà, avant la cérémonie officielle de passation des pouvoirs, le 21 mai, au cours de son tête-à-tête matinal avec le président sortant, la question avait été évoquée. Valéry Giscard d'Estaing avait à lui communiquer, sans témoin, plusieurs secrets d'État. Le premier d'entre eux était le code de la force de frappe. Comme un soldat qui communique le mot de passe à celui qui le relève de sa fonction, l'ex-président délivrait à son successeur les moyens de déclencher les représailles nucléaires. Mais, avant de prendre congé et de lui souhaiter « bonne chance », Giscard a également remis à Mitterrand une enveloppe dans laquelle se trouvait sa décision relative au sort de Philippe Maurice. A-t-il ajouté des commen- taires? Mitterrand ne l'a révélé à personne et refuse d'en parler. Il estime que cette affaire de conscience ne doit pas être portée sur la place publique. Giscard avait fait la promesse de laisser ce testament au cours d'un débat à France-Inter avec cinq journalis- tes. C'était le 25 mars, dans l'émission Face au public. Le droit de grâce est évoqué ainsi que la possibilité d'en user jusqu'au terme de son mandat : « Ce que je ne veux pas, explique alors Giscard, c'est que la décision finale paraisse soit être inspirée par des considérations électorales, soit qu'elle puisse être exploi- tée à des fins électorales. Donc, précise-t-il, toute la procédure se déroulera et je prendrai ma décision, mais elle ne sera rendue publique qu'après l'élection prési- dentielle. Elle sera rendue publique par moi-même si je suis réélu et, si je ne le suis pas, je transmettrai à mon successeur la conclusion à laquelle j'aurai abouti. » Valéry Giscard d'Estaing venait d'inventer la grâce à retardement. Il s'est expliqué de cette curieuse procé- dure en ajoutant : « Pourquoi la lui transmettrai-je? Parce qu'il s'agira de crimes commis du temps où j'étais président de la République et de jugements rendus par les tribunaux du temps où j'étais président de la République. » L'émission se termine à 20 heures et, curieusement, Giscard téléphone lui-même à France-Inter à 22 h 30. Il demande le directeur de l'Information. Déjà parti : « Passez-moi, alors, le rédacteur en chef ». Plus là, non plus. C'est finalement le journaliste de permanence, Jacques Chabot, qui prend la communica- tion. Elle ne durera que trente secondes. « Je vous appelle, explique Giscard, pour un détail. Au cours du débat de ce soir, j'ai été surpris qu'on ne me pose pas de questions sur la peine de mort. Je voudrais simplement vous rappeler, ainsi que je l'ai déjà dit, que je n'étais pas partisan, dans le climat actuel, de la suppression de la peine de mort.
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