La Revanche De Baccarat Ponson Du Terrail, Pierre
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Les Exploits de Rocambole - Tome III - La Revanche de Baccarat Ponson du Terrail, Pierre Publication: 1859 Catégorie(s): Fiction, Policiers & Mystères Source: http://www.ebooksgratuits.com 1 A Propos Ponson du Terrail: Pierre Alexis, vicomte Ponson du Terrail (8 juillet 1829 à Montmaur (Hautes-Alpes) - 10 janvier 1871 à Bordeaux) est un écrivain populaire au xixe siècle et l’un des maîtres du roman- feuilleton. Il est célèbre pour son personnage Rocambole. Pon- son du Terrail commence à écrire vers 1850. Ses premiers écrits sont de style gothique. Par exemple, La Baronne trépas- sée (1852) est une histoire de vengeance située autour de 1700 dans la Forêt-Noire. Pendant plus de vingt ans, il fournira en feuilletons toute la presse parisienne (L'Opinion nationale, La Patrie, Le Moniteur, Le Petit Journal, etc.) Son œuvre contient de nombreux calembours, par exemple : « En voyant le lit vide, son visage le devint aussi. » Écrivant très vite et sans se relire, il parsème ses romans de phrases fantaisistes telles que « Ses mains étaient aussi froides que celles d'un serpent » ou « D’une main, il leva son poignard, et de l'autre il lui dit… » C'est en 1857 qu'il entame la rédaction du premier roman du cycle Rocambole (cycle parfois connu sous le titre Les Drames de Pa- ris): L'Héritage mystérieux, qui paraît dans le journal La Pa- trie. Il vise principalement à mettre à profit le succès des Mys- tères de Paris d'Eugène Sue. Rocambole devient un grand suc- cès populaire, procurant à Ponson du Terrail une source de re- venus importante et durable. Au total il rédigera neuf romans mettant en vedette Rocambole. En août 1870, alors que le ro- mancier vient d'entamer la rédaction d'un autre épisode de la saga de Rocambole, Napoléon III capitule devant les Alle- mands. Fidèle à l'image du chevalier Bayard - à qui Ponson a emprunté son nom de seigneur « du Terrail » -, il quitte Paris pour Orléans, où il forme une milice en vue de faire la guerilla. Mais il est vite obligé de s'enfuir à Bordeaux, les Allemands ayant incendié son château. Il meurt à Bordeaux en 1871, lais- sant inachevée la saga de Rocambole. Il est enterré au cime- tière de Montmartre à Paris. Parmi ses autres romans, citons Les Coulisses du monde (1853) et Le Forgeron de la Cour-Dieu (1869). En dépit de sa vaste production romanesque - on l'estime à 73 titres -, son style diffus a cantonné sa renommée à la « para-littérature ». Disponible sur Feedbooks pour Ponson du Terrail: • L'Héritage Mystérieux (1857) 2 • Les Exploits de Rocambole - Tome I - Une fille d'Espagne (1859) • La Baronne trépassée (1852) • La Femme immortelle (1869) • Le Club des valets de cœurs (1858) • La Résurrection de Rocambole - Tome I - Le Bagne de Toulon - Antoinette (1866) • Les Exploits de Rocambole - Tome II - La Mort du sau- vage (1859) • La Résurrection de Rocambole - Tome II - Saint-Lazare - L’Auberge maudite - La Maison de fous (1866) • Les Chevaliers du Clair de Lune (1860) • La Résurrection de Rocambole - Tome III - Rédemption - La Vengeance de Vasilika (1866) Note: Ce livre vous est offert par Feedbooks. http://www.feedbooks.com Il est destiné à une utilisation strictement personnelle et ne peut en aucun cas être vendu. 3 Chapitre 1 Environ deux mois après les événements que nous racontions naguère, une chaise de poste, partie d’Orléans la veille à dix heures du soir, roulait, vers cinq heures du matin, en pleine Touraine, sur la route impériale qui conduit de Tours à la pe- tite ville de G… C’était à trois lieues de cette modeste sous-pré- fecture, située hors de tout rayon de chemins de fer, que se trouvait la terre seigneuriale de l’Orangerie, où la marquise douairière de Chamery, mère de feu Hector de Chamery et de mademoiselle Andrée Brunot, avait rendu le dernier soupir, dix-huit années auparavant. La chaise, qui allait bon train, emportait deux personnages bien connus de nous : le vicomte Fabien d’Asmolles, le marquis Frédéric-Albert-Honoré de Chamery, c’est-à-dire notre héros Rocambole. Certes, ceux qui avaient vu quelques mois auparavant le brillant aventurier signant d’une main ferme et le sourire de la fortune aux lèvres son contrat de mariage avec mademoiselle Conception de Sallandrera auraient eu peine à le reconnaître. Rocambole n’était plus que l’ombre de lui-même. Pâle, le re- gard morne, le front soucieux, le faux marquis semblait être en proie à une tristesse mortelle. Plongé en une sorte de prostra- tion douloureuse, il regardait autour de lui comme un homme à qui tout est désormais d’une indifférence absolue. Le vicomte tenait dans ses mains une des mains du marquis et le considérait avec compassion. – Mon pauvre Albert, disait-il, sais-tu bien que tu m’effraies ?… – Moi ? fit Rocambole, à qui ces mots arrachèrent un tres- saillement nerveux. Et il essaya de sourire. – Moi ? répéta-t-il, je t’effraie ? – Sans doute. 4 – Comment ? – Ta tristesse, depuis deux mois, est incompréhensible. – Elle est cependant facile à expliquer, murmura Rocambole. – Je ne trouve pas… – Tu sais que j’aime Conception. – Eh bien ! tu l’épouseras dans six semaines. Rocambole hocha la tête. – J’ai des pressentiments, dit-il tout bas, si bas que Fabien l’entendit à peine. – Mon pauvre Albert, reprit le vicomte, tu as la faiblesse ner- veuse des enfants et tu es sans force aucune contre la fatalité. – La fatalité ! murmura Rocambole avec un accent de ter- reur. Oh ! ne prononce pas ce mot… il m’épouvante ! – Cher frère, continua le vicomte avec émotion, je te croyais plus fort, plus courageux, plus à l’épreuve des revers de la vie. Des revers ! comme si l’on pouvait ainsi nommer un événement inattendu, mais, hélas ! bien ordinaire, qui est venu retarder tout à coup ton bonheur et le remettre à six mois. Certes, le ha- sard a été cruel en frappant d’une apoplexie foudroyante le père de Conception le matin même de ton mariage, en permet- tant que la pauvre enfant, fiancée la veille, se trouvât orpheline à son réveil et dût changer en vêtement de deuil sa parure blanche de mariée ; il s’est montré rigoureux et terrible en tou- chant deux cadavres, celui du duc, celui de ton pauvre matelot, victime de l’orage et de sa cécité, sous ce toit où, le soir même, devait retentir le bruyant orchestre d’un bal de noces ; mais est-ce donc là une raison, mon ami, pour que tu perdes ainsi courage ? Rocambole soupira et se tut. – Conception ne pouvait pas t’épouser le lendemain des funé- railles de son malheureux père, poursuivit Fabien, et il a bien fallu que votre mariage fût retardé, afin de suivre l’usage espa- gnol. Mais elle t’aime toujours, plus que jamais ; depuis qu’elle est avec sa mère au château de Sallandrera, où elles sont al- lées conduire la dépouille mortelle du duc, as-tu passé un seul jour sans recevoir d’elle une longue et bonne lettre ? – Non, dit le faux marquis, toujours triste et rêveur. – Et cependant tu es sombre, préoccupé sans cesse, tu tres- sailles au moindre bruit, tu as des rêves agités, des paroles 5 incohérentes t’échappent souvent durant ton sommeil, et il y a des jours où Blanche et moi nous craignons pour ta raison. – Je souffre… murmura Rocambole. – Mais tu es fou, mon ami. L’heure de ton bonheur est proche maintenant. – Qui sait ? Et dans ces deux mots il y eut tout un poème d’angoisse et de terreur. Tout à coup, M. le marquis Frédéric-Albert-Honoré de Cha- mery releva la tête. – Tu n’es pas superstitieux, toi ? demanda-t-il, s’efforçant de sourire. – Moi ? non. – Tu es bien heureux !… – Que veux-tu donc dire, mon frère ? – Écoute, dit Rocambole, qui sembla faire un effort sur lui- même et redevenir l’homme des anciens jours, le bandit auda- cieux et sceptique, toujours sûr de lui, toujours confiant en l’avenir, toujours dédaigneux des avertissements de la desti- née ; écoute, je n’ai point impunément passé ma jeunesse sous les tropiques, parmi des nations superstitieuses. J’ai fini par croire aveuglément à la bonne et à la mauvaise fortune. – Fou ! dit Fabien en souriant. Mais Rocambole poursuivit : – Pendant cette nuit fatale qui a précédé la mort de M. de Sallandrera et durant laquelle mon malheureux matelot Walter Bright s’est précipité, sans doute en marchant à tâtons, du haut de la plate-forme du Haut-Pas, j’ai fait un rêve étrange… – Et ce rêve ?… – Je venais de m’endormir. Tout à coup, un bruit étrange m’éveilla. Un homme vêtu de blanc, couvert d’un suaire, vint s’asseoir sur le pied de mon lit. Je reconnus Walter Bright. Non plus celui que tu as connu, ce malheureux aveugle, cette vic- time de la fureur des sauvages ; mais le Walter Bright d’autre- fois, avec sa bonne et franche figure, son regard bleu, son sou- rire loyal. Le fantôme s’était assis près de moi, et il me dit alors : « Maintenant que je suis mort, je viens t’apprendre l’avenir… » Et sa main me montra le ciel à travers la fenêtre ouverte, et dans le ciel, entre les nuages, une étoile. Cette 6 étoile brilla un moment, puis elle sembla se détacher de la voûte céleste, glissa dans l’espace et s’éteignit. – Eh bien ? dit Fabien, qui ne put réprimer un sourire, que prouve ce rêve ? – Cette étoile qu’il me montrait, c’était la mienne. – Quelle folie !… – Et j’ai le pressentiment que je n’épouserai jamais Conception.