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Du sport au cinéma

Ciné-club universitaire He Got Game Activités culturelles culture.unige.ch

Lundi 23 avril 2018 à 20h | Auditorium Arditi âge légal: 16 ans

Générique: US, 1998, Coul., Blu-ray, 136’, vo st fr mise en liberté officieuse, à faire signer à son Interprétation: , , fils un contrat pour un certain club, cher au cœur du politicien derrière cette manigance. Bien que le procédé puisse paraître capillo- Après la projection: discussion avec Markos tracté vu d’Europe, rien ne dit qu’il ne soit Michaelides, arbitre international de réellement concevable aux États-Unis, au vu et Imad Fattal, président des Lions de Genève. de la place qu’y occupe le sport en politique (et comme enjeu économique). Sollicité de He Got Game selon Jean-Gavril Sluka, toutes parts pour une décision de carrière à dvdclassik.com rendre publique le lundi suivant, Jesus (l’ironie Si le titre se réfère à un morceau célèbre de pénible de son prénom ne détonne guère , commandé pour les besoins du dans un film où un maquereau violent a le film, ce sont les compositions néo-classiques bon goût de se faire surnommer Sweetness) d’Aaaron Copland qui dominent majestueu- ne sait plus à qui faire confiance, à quel saint sement He Got Game. À la gloire, ou l’élégie, se vouer. Lui qui s’est occupé seul de l’éduca- de quelle institution sont-elles ici mises au tion d’une petite sœur (Zelda Harris) voit sa service? Rien de moins, ou de plus, que celle famille éloignée prévoir de se refaire une vie du basketball américain. Lee est un fanatique sur le compte de sa réussite, sa petite copine de la NBA, n’hésitant pas à snober les cérémo- Lala (Rosario Dawson, dans un premier rôle nies du cinéma, dans un contexte médiatique chez le cinéaste à l’aura, comme le second, où cela revient à un crime de lèse-majesté, de traîtrise) insister de façon suspecte pour pour ne pas manquer des matchs de la saison. qu’il rencontre un démarcheur, son père surgi Le film qu’il consacre en propre au basket est de nulle part, venu le supplier de signer pour pourtant loin du panégyrique, mais consti- un autre groupe... Les pressions augmentent, tue au contraire une critique d’un modèle de l’intégrité d’une vie intime et familiale se sélection des joueurs aux rouages ubuesques. trouve remise en question par les intérêts en Prisonnier de longue durée pour l’homi- jeu. Jesus doit de plus choisir s’il se consa- cide (involontaire) de son épouse, Jake crera entièrement à un club (solution la plus Shuttlesworth (Denzel Washington), père d’un immédiatement lucrative) ou intégrera une jeune prodige du basket (Ray Allen, véritable équipe universitaire (choix plus raisonnable à sportif de haut niveau), se voit proposer une long terme). Les méthodes de racolage usitées remise de peine s’il réussit, en une semaine de par l’établissement académique le convoitant n’ont ici rien à envier à celles du privé. Il communication dans sa ville natale) ses découvre en une après-midi par quel avantage études de cinéma à , avant de comptant cette option serait rétribuée: de contribuer par nombre de ses créations à défi- l’étudiante à n’en plus finir. nir l’identité cinématographique de la Grosse Lee se montre d’une franchise brutale sur un Pomme. Son court métrage de fin d’études élément, corrélé au racisme, qui fournirait (Joe’s Bed-Stuy Barbershop: We Cut Heads) ne paradoxalement à un jeune athlète afro- manque pas de le faire remarquer. Se lançant américain une sorte de niche écologique: dans l’aventure du long-métrage, il fonde sa l’érotisation du mâle noir dans l’imaginaire boîte de production: 40 Acres and a Mule, en des filles blanches aisées. C’est à ce moment référence à la promesse d’indemnisation – critique d’intensification de son expérience jamais tenue par la suite – faite aux esclaves que réapparaît un père qu’il renie, coupable affranchis de la Guerre civile. Le ton est donné. pour lui de la mort d’une mère qu’il a choisie La suite? Une filmographie, abordant un sujet contre son géniteur. Celui-là même dont les socio-politique après l’autre, qui n’aura pas entraînements sportifs imposés confinaient à peur de réclamer des comptes au passage. Lee la maltraitance par leur acharnement et leur possède un point de vue assumé, parle d’une brutalité. Déchu de ce statut de patriarche place précise dans la société américaine. autoritaire, Jake n’est plus qu’un paumé, Ce faisant, le spectre des problématiques un pauvre type désespéré d’améliorer sa abordées en trois décennies de Spike Lee situation par l’entremise de son fils, n’ayant Joints a de quoi donner le tournis. Capturées pour soutien moral que la compagnie d’une au point d’intersection du racisme et de la voisine de palier prostituée (Milla Jovovich). lutte des classes, elles esquissent, film après Un homme en peine qui, quels qu’aient été film, un panorama national, un tableau ses manquements et ses torts irréparables, moderne. Il y aurait déjà de quoi faire en ne suscite désormais que la sympathie s’en tenant à recenser les enjeux explorés, allant à ceux engagés dans une simple lutte dans le sillage d’une personnalité publique de survie. Qu’un portrait aussi déconfit de alimentant activement un degré jugé utile de l’envers du rêve américain puisse se permettre polémique. Or Lee est un esthète, un forma- des caméos de ou Shaquille liste sûr dont l’œuvre a généré une forme O’Neal étonne. Une déclaration d’amour à de poésie urbaine, une manière de raconter un sport choisissant ceux qui le pratiquent visuellement ses histoires de quartier, de (serait-ce pour leur simple plaisir, tel le géné- structurer son exposé par la mise en scène, en rique compilant des amateurs) contre ceux offrant du liant par ses jonctions musicales. qui en profitent structurellement. L’amour du Son apport est essentiel. jeu par-dessus tout – car que fait-on d’autre Sources: http://www.dvdclassik.com/article/ que s’amuser, avec les gens qu’on aime, parmi spike-lee-a-travers-ses-films les manèges de Coney Island? http://www.dvdclassik.com/personnalite/ spike-lee Spike Lee: un réalisateur engagé Né à Atlanta d’une mère institutrice et d’un Fiche proposée par Francisco Marzoa, père musicien, il fait (après un master en membre du comité du Ciné-club universitaire

Prochain film du Ciné-club: The Loneliness of the Long Distance Runner ▶ Tony Richardson, 1962 | 30 avril à 20h, Auditorium Arditi