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à mes chats. Contre certains spiritualistes aux arguments bas (1921-2012) de plafond, écoutons aussi les matérialistes. Comme vous, « je ne sais ni lire ni écrire » ; mais je me soigne. J’indique simple- ou le discours de la mythode ment qu’il existe d’autres médecines, à côté de la marchandise Hommage au maître de l’imaginaire spirituellement correcte. Par Frédéric Vincent L’histoire veut qu’à l’heure de la mort du très très vieux Démocrite, sa sœur – alors qu’on était en pleins préparatifs des Thesmophories, fête religieuse de grande importance – se enio loci ignoto » : telle penchant vers son frère, lui exprima le désir qu’il voulût bien « Gest l’inscription que l’on attendre la fin des cérémonies pour décider (comme seul un sage peut observer sur la stèle surplom- saurait le faire) de passer de l’autre côté du monde. Profondément bant la tombe d’Olga Föbe- respectueux des obligations religieuses de sa cité, Démocrite se Kapteyn, fondatrice du célèbre fit apporter chaque matin des pains chauds. Respirant de temps cercle à Ascona (Suisse), en temps leur fumet, le bonhomme se maintint en vie et, les et qui rappelle que les lieux sont trois jours sacrés s’étant écoulés, se laissa enfin glisser vers le bien souvent habités par des néant d’où l’on ne revient pas. génies inconnus ou méconnus. Certes, Eranos compte en son Eliade, Durand et Corbin à Eranos Pour qu’une histoire soit vraie, il suffit d’y croire. À défaut, on sein les illustres Corbin, Jung, dira que tout est symbole. Et qu’il y eut bien de la grandeur Eliade, Campbell, Hillman, Suzuki. Mais d’autres génies, plus dans la vie et la mort du père de la pensée matérialiste. discrets et moins médiatisés, faisaient partie intégrante de l’esprit Lucrèce, disciple d’Épicure et de Démocrite, écrivait : Eranos et parmi eux, il faut citer notre regretté Frère Gilbert « [C’est] la philosophie [qui] nous élève jusqu’au ciel. » Durand, ce « Juste parmi les Nations », ce Résistant savoyard, cet anthropologue de l’Imaginaire dont l’œuvre monumentale et érudite a su redonner force et vigueur aux symboles, mythes, et images qui inondent la vie quotidienne. Gilbert Durand nous a quittés, le vendredi 7 décembre 2012, à l’âge de 91 ans. Son passage à l’Orient Éternel nous interpelle et nous attriste. Nous gémissons, mais l’œuvre qu’il nous laisse, nous donne malgré tout espoir et courage parce qu’elle incarne à la fois un « nouvel esprit anthropologique » et une « mythode » permettant de révéler la dimension profonde des mythes et des symboles. C’est dire la manière dont son œuvre contribue à mieux vivre et comprendre notre démarche maçonnique. Il faut ici préciser que son engagement au sein de notre Ordre demeure exemplaire. Initié en 1971 au Rite Ecossais Rectifié, affilié aux loges La

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Constance (Annecy) et Saint Jean des Trois Mortiers (Chambéry)1, régimes anthropologiques de l’image. On trouve tout d’abord il a toujours fait preuve d’une attitude fraternelle constante et les structures héroïques ou schizomorphes attachées au réflexe sans faille à l’image de son parrain . Il est élevé postural qui définissent les images incarnant le dualisme entre en 1975 au grade de Maître Écossais de Saint-André, puis celui les visages du temps (symboles thériomorphes, nyctomorphes de Chevalier Bienfaisant de la Cité Sainte (CBCS) en 1978 et catamorphes) et les symboles ascensionnels et diarétiques avant d’accéder au grade (épée, soleil). On peut prendre l’exemple de saint Georges de Grand Profès en 1985. tuant le dragon. Dans les structures héroïques, on peut dire Gilbert Durand a toujours en quelque sorte que les ténèbres sont toujours balayées par su puiser au cœur de la la lumière. Les structures mystiques (réflexe digestif), quant démarche maçonnique à elles, rassemblent les images qui protègent, miniaturisent, pour mieux étayer ses gullivérisent, amoindrissent la portée des visages du temps. recherches. Ce sont surtout les symboles féminins que l’on retrouve comme Son ouvrage publié le ventre maternel, le cocon, la coupe, la barque ou la maison. chez Dervy Les Mythes Les structures synthétiques ou disséminatoires (réflexe copulatif) fondateurs de la dévoilent enfin les images qui concilient les opposés à l’instar du Franc‑maçonnerie l’atteste yin et du yang ou du pavé mosaïque. Les visages du temps font et prouve la ferveur avec alors partie intégrante d’une image qui dit et redit la manière Saint Georges terrassant le dragon laquelle il défendait notre dont on peut harmoniser les contraires. Jost Haller, peinture sur bois, XVe siècle. Musée d’UnterLinden, Colmar idéal : Avec les structures anthropologiques de l’imaginaire, Gilbert « La Franc-maçonnerie, nous dit-il, par ses redondances surmul- Durand ouvre la voie à une nouvelle conception de l’imagination tipliées est bien le terrain privilégié où peut se dérouler une humaine où celle-ci n’est plus cette folle du logis comme le disait mythanalyse !2 ». Malebranche, mais bien cette fée du logis qui sait si bien donner Gilbert Durand doit sa renommée scientifique à son premier sens et réenchanter nos vies. Non seulement, Gilbert Durand chef d’œuvre Les Structures anthropologiques de l’imaginaire démontre qu’il existe une rationalité de la « faculté fabulatrice » publié en 1960, et qui se présente comme une sorte de (Bergson) mais il expose également la manière dont l’imaginaire traité d’archétypologie. Gilbert Durand propose ici une nous permet de lutter contre l’angoisse existentielle liée à notre classification pertinente des mythes et des symboles à partir conscience objective de la mort et à notre expérience négative du temps. L’Homo Sapiens possède donc cette faculté incroyable de d’une observation réflexologique3 où l’on peut distinguer trois produire des images qui lui permettent d’échapper à l’horreur 1 1 La loge Saint Jean des Trois Mortiers dans laquelle l’éminent savoyard Joseph de Maistre fut orateur est devenue indépendante et n’est rattachée à aucune obédience. d’un temps historique objectif et lui offrent la possibilité de C’est Gilbert Durand qui fut à l’initiative du rallumage des feux de cette loge en 1973 lutter contre la mort elle-même. L’Imaginaire est ainsi l’outil en compagnie d’Henry Corbin, d’Antoine Faivre et de Jean Servier. par excellence à l’origine de toute transformation du monde. 2 Gilbert Durand, Les Mythes fondateurs de la Franc-maçonnerie, Paris, La thèse des structures anthropologiques de l’imaginaire ne se 2002, p. 22. 3 Gilbert Durand estime que l’image archétypale est verbale et qu’elle est issue contente pas de classifier les symboles et les mythes, elle rend de notre gestuelle de base. L’homo sapiens possède des réflexes qui en font sa spécifi- aussi compte de la fonction vitale de l’imaginaire dans l’existence cité comme la verticalité, la digestion ou encore la copulation.

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humaine et ce à une époque où l’on croit encore naïvement que initiatiques d’antan qu’il s’agisse de l’hermétisme, de l’alchimie, la « raison est la reine des facultés ». de l’astrologie ou encore de la Franc-maçonnerie. Il faut dire que Les structures anthropologiques de l’imaginaire ouvrent également la France est issue d’une tradition cartésienne qui a instauré une la voie à quelques concepts-clefs comme le trajet anthropolo- grande méfiance vis-à-vis de l’imagination. En ce sens, on peut gique que Gilbert Durand définit comme « l’incessant échange imaginer toute la difficulté que Durand a dû rencontrer pour qui existe au niveau de l’imaginaire entre les pulsions subjectives imposer ses concepts. On comprend dès lors et assimilatrices et les intimations objectives émanant du milieu les raisons qui l’ont poussé à se rapprocher du La France est issue cosmique et social4 ». Le trajet anthropologique a le mérite de champ littéraire qui était certainement le lieu d’une tradition montrer que les images que notre cerveau fabrique sont influencées le plus approprié pour élaborer une mythocri- tique puis une mythanalyse. C’est bien d’une cartésienne qui a par la rencontre entre notre intériorité subjective et l’extériorité instauré une grande objective. Dans la même continuité, Durand développe la notion mythode dont il s’agit, méthode symbolique de bassin sémantique, c’est-à-dire la manière dont un mythe qui cherche à expliquer l’esprit d’une société à méfiance vis-à-vis s’installe et se désagrège dans une société à travers différentes partir des mythes qui la composent et ce dans de l’imagination. phases, en s’appuyant sur l’image du fleuve : ruissellement (ce sont tous les recoins de la vie sociale, qu’il s’agisse des mythèmes qui apparaissent spontanément dans un groupe de la politique, de la littérature, du cinéma, des culturel donné et qui peuvent être issus autant de l’inconscient arts, des nouvelles technologies, etc. collectif que d’événements historiques, scientifiques ou sociaux), On le comprend bien, la pensée durandienne est essentielle partage des eaux (les mythèmes se relient pour former une entité puisqu’elle fait émerger de nouvelles perspectives paradigma- culturelle, un courant, une école qui entre directement en conflit tiques là où le cogito cartésien n’est plus le centre du monde. Les avec les mythes dominants), confluences (le courant constitué structures anthropologiques de l’imaginaire ont ainsi permis à gagne en reconnaissance institutionnelle), au nom du fleuve Gilbert Durand d’asseoir une certaine autorité scientifique et de (apparition de figures réelles ou fictives qui imposent le courant faciliter la création du Centre de Recherche sur l’Imaginaire (CRI) à constitué), aménagement des rives (le courant constitué prend l’université de Grenoble en 1966 avec ses amis Léon Cellier et Paul place et domine la société en définissant des contours esthétiques, Deschamps, lequel, après cette date, n’a pas cessé de s’agrandir. philosophiques, symboliques, rationnels), épuisement des deltas Depuis un demi siècle, le CRI n’a pas cessé de se développer. (le courant constitué devenu dominant se désagrège et se laisse En France, on compte plus de 15 centres dans les plus grandes envahir par de nouveaux courants). universités françaises (Paris, Lyon, Bordeaux, Grenoble, Dijon, Ces deux concepts durandiens nous éclairent déjà sur la manière Montpellier, Lille, Perpignan, Nice, Angers, etc.) au Brésil plus dont ils s’opposent à l’école structuraliste qui dominait largement la de 28 ! Il existe également plus de 18 centres étrangers (Portugal, recherche en sciences humaines dans les années 1960-1970 et dont Espagne, Italie, Belgique, Pologne, Roumanie, Canada, Israël, l’approche demeurait essentiellement déterministe et matérialiste. Corée du Sud). Depuis un demi-siècle, l’imaginaire a pris une Au contraire de Lévi-Strauss ou de Lacan, Durand revendique une importance éminente dans les réflexions d’une bonne partie de approche beaucoup plus spiritualiste en phase avec les traditions l’humanité. Il faut aussi ajouter que l’esprit du CRI n’aurait pas été ce qu’il est s’il n’avait pas été créé et maintenu selon l’expérience 4 Gilbert Durand, Les Structures anthropologiques de l’imaginaire, Paris, 1960, p. 38

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« résistante » de Gilbert Durand, qui repose, selon ses dires, sur accolé d’une part à l’hôpital de saint Denis, d’autre part au parc trois pieds fondamentaux : « de la Légion d’Honneur ». • Ne jamais considérer l’adversaire comme un ennemi Au-delà de cette douloureuse expérience et des nombreuses irréductible ; actions (évasion, renseignement, surveillance des trains, protec- e • Ne pas tenir compte des organisations stériles (universités !) ; tion des juifs) du 5 bureau de l’A.S. (armée secrète) départe- mentale dont Durand était le commandant, il faut rappeler • Se fondre sur des une autre anecdote importante de son parcours de résistant. organismes en place. En mars 1945, le général de Gaulle missionne Durand pour C’est en tenant compte aller négocier la libération immédiate des déportés alsaciens de cette structure auprès d’Himmler : « résistante » que le J’ai pris sur moi de changer la demande et d’exiger que CRI allait investir les soient libérés des camps tous les Français prisonniers, avec universités dans cinq naturellement tous les juifs. Les Allemands ont accepté à parties du monde. une condition : ils voulaient des papiers de sauf‑conduits De fait, Gilbert pour deux cent cinquante SS et leurs familles. De Gaulle Le Fort de l’Est, Saint-Denis Durand a une expé- a refusé. Les alliés s’étaient mis d’accord pour exiger la Carte postale ancienne éditée par ELD, N° 44 Carte oblitérée en rience de la Résistance reddition sans conditions. Cent mille déportés en sont 1910 – Col. Claude Shoshany qui ne peut être morts, en attendant l’armistice. J’étais furieux d’avoir négligée si l’on souhaite mieux appréhender sa pensée. Rappelons échoué. C’est ainsi…5. tout d’abord qu’il a été blessé par la Gestapo, et transféré début avril au 24 juillet 1944, au « Lazaret », une dépendance du Ces quelques mots nous font comprendre à quel point Durand Fort de l’Est à saint Denis. Le « Lazaret » sonne ici comme une était investi dans son engagement humaniste. Il était vraiment épreuve à part entière. Captivité difficile et douloureuse qui le reflet de la Résistance. Comme le disait Raymond Aubrac forgera néanmoins des liens fraternels uniques et extrêmement lors de son allocution où il remit les insignes de Commandeur forts entre Durand et ses camarades : parmi eux, le chef de de la Légion d’Honneur à Gilbert Durand : chambrée Gibert, J.Sellier, Ménabréa, Pinon, Destrac, le procu- Vous n’êtes pas entré dans la résistance, vous étiez la Ré- reur Ancelin, un Espagnol Frédérico, Van den Brook. Ils ont tous sistance. été très « amochés » par les mauvais traitements qu’ils ont subis Tout comme son ami Edgar Morin, c’est probablement à partir (blessures de guerre réouvertes, paralysie des membres supérieurs de son expérience de la Résistance que Durand suggère une dus à une longue suspension par les bras, etc.). Van den Brook herméneutique qui refuse de se replier sur elle-même ou de est mort en juin 1944, Sellier meurt une semaine après leur s’enfermer dans une logique schizoïde. Contrairement à une libération. Ils ont été évacués comme « non transportables », soit herméneutique réductive que l’on trouve chez Freud ou Lévi- la totalité des prisonniers, via le « Val de Grâce » (allemand) où Strauss, Durand propose une herméneutique instaurative qui ils étaient préalablement installés. Ils sont restés au « Lazaret » 5 Patrice van Eersel, « Le Retour des dieux. Entretien avec Gilbert Durand » in Nouvelles Clés, 30, été 2001, pp. 54-59.

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insiste bien sur le fait qu’un « symbole renvoie bien à quelque à les séparer. Contre la logique bivalente ou schizoïde des grands chose, mais il ne se réduit pas à une chose6 ». Le problème systèmes philosophiques de l’Occident chrétien, Durand prend de l’herméneutique réductive rend tout symbole univoque donc position pour une logique des antagonismes ou de l’hété- alors que dans la vie ordinaire il est avant tout multivoque. rogénéité que l’on retrouve par ailleurs dans de vieilles traditions Pour la psychanalyse freudienne par exemple, les symboles comme le taoïsme ou l’alchimie. Ce rapprochement heureux sont des métaphores de la sexualité humaine, notamment ses entre les savoirs modernes et les savoirs ances- symptômes. Pour un psychanalyste freudien, le mythe d’Hiram traux a bien entendu provoqué de nombreuses est l’illustration parfaite du meurtre du père renvoyant par critiques au sein de l’université française si bien là-même au complexe œdipien. On réduit ici le mythe à la ancrée dans le système bivalent et réducteur du manifestation par image symbolique de pathologies affectives cartésianisme. Seulement, c’est oublier que Durand et sexuelles et on oublie ainsi que mythes et symboles sont est aussi le disciple de Bachelard et qu’il possède avant tout la présence d’un sens existentiel et transcendant une connaissance accrue des sciences nouvelles qui est différent selon le contexte culturel. En effet, un même comme la physique quantique. La conception symbole ne révèle pas toujours le même sens. Dans les cultures euclidienne d’un espace homogène et continu amérindiennes, le symbole du serpent est contraire au sens est radicalement renversée par les découvertes de qu’on lui attribue dans le christianisme. Et pourtant pour Planck, Bohr et Einstein qui ont su se démarquer un psychanalyste freudien qui accepte la théorie stérile de de la logique bivalente du système scientifique Max Planck l’univocité des symboles, il s’agit toujours du même symbole pour réintégrer une logique des antagonismes. Considéré comme le père phallique renvoyant à la sexualité masculine. L’herméneutique Heisenberg, avec son principe d’incertitude, ne dit de la physique quantique. La instaurative nous dit aussi qu’un symbole peut perdre son sens pas autre chose que cela lorsqu’il montre qu’il nous constante de Planck, y joue un rôle central. initial pour en adopter un autre. Elle montre par là que l’objet est impossible de connaître à la fois la vitesse et la ©Courtesy of the Clende- symbolique n’est pas un objet mort et figé mais qu’il évolue position d’une particule. En d’autres termes, nous ning History of Medicine Library, University of Kansas constamment au même rythme que nos vies et aspirations. sommes ici dans la discontinuité et l’hétérogénéité, Medical Center. C’est bel et bien en résistant que Gilbert Durand s’est opposé à et non plus dans la continuité et l’homogénéité de l’hégémonie du positivisme régnant dans les sciences humaines la physique classique. « Ce n’est que de nos jours, avec la physique afin d’ouvrir l’esprit du chercheur à un paradigme qui revendique moderne, qu’ « un nouvel esprit scientifique » a osé s’avouer non une harmonisation des contraires, un principe de contradiction aristotélicien, non cartésien, non newtonien7 ». Étrange paradoxe, qui, contrairement au principe aristotélicien du tiers exclu, ce sont bien ces mêmes sciences dures qui doivent leur hégémonie dit qu’une « chose peut à la fois être et ne pas être ». Nous au principe aristotélicien de non-contradiction et qui ont su retrouvons ici toute la pensée de la complexité d’Edgar Morin, réinvestir la logique des antagonismes si chère aux vieilles traditions fervent défenseur de la transdisciplinarité, et qui enseigne philosophiques et ésotériques. Il revient alors aux sciences molles depuis toujours la nécessité pour nos sociétés contemporaines d’opérer le même tournant épistémologique. Le sociologue se doit d’intégrer un mode de production du savoir qui tenterait de par exemple de se dégager de ses habitudes positivistes pour ne relier les connaissances plutôt que de chercher constamment pas limiter l’individu à sa position sociale ou économique ou à sa

6 Gilbert Durand, L’Imagination symbolique, Paris, PUF, 2012, pp. 66. 7 Gilbert Durand, Structures Eranos, Paris, La Table Ronde, 2003, pp. 198-199.

50 Le maillon n°121 ▲ Février 2013 Le maillon n°121 ▲ Février 2013 51 Philosophie Les éditions catégorie socio-professionnelle. L’individu n’est pas singulier ou unidimensionnel mais pluriel et contradictoriel, c’est-à-dire que l’on ne peut pas connaître à la fois « sa position et sa vitesse » pour De nouveau reprendre le principe d’incertitude d’Heisenberg. L’individu n’est disponible pas un objet fixe mais dynamique, à l’image de la particule. Ce Daniel Béresniak n’est ici qu’un exemple parmi d’autres qui illustre la manière dont Gilbert Durand enseignait le « nouvel esprit anthropologique » Les Clefs du Maître secret autour de lui. ISBN : 978-2-916094-30-4, 13 cm x 21 cm, 9,5 € Le Frère Gilbert Durand restera toujours un maillon essentiel de notre chaîne d’union et un modèle exemplaire, non seule- ment pour son attitude de Résistant et son engagement fraternel, mais aussi pour son œuvre qui en dit long sur la manière dont la Franc-maçonnerie doit défendre ce trésor d’antique mémoire qu’incarnent l’initiation et ses mystères et qui repose à juste titre Daniel Béresniak sur une logique des antagonismes. Car le désenchantement du Le Sens de l’Initiation Sacerdotale monde est avant tout le reflet d’une sécheresse sociale provoquée ISBN : 978-2-916094-39-7, 13 cm x 21 cm, 9,5 € par une conception du monde trop utilitariste et monocéphale qui a été très « démythisante ». Certes, une telle conception est bien à l’origine des innovations technologiques et de la transformation du monde. Mais pour arriver à un tel résultat, il a fallu inciter les hommes à renoncer aux « productions délirantes et infantiles » de Daniel Béresniak la psyché humaine, rejeter les dieux et autres êtres fantastiques pour privilégier le fameux logos et oublier ainsi que ce sont les mythes Du Temple de Salomon véhiculés par les rites qui sont à la source de toute cohésion sociale. à l’Échelle Mystiquet La voie maçonnique est alors une alternative dans la mesure où ISBN : 978-2-916094-40-3, 13 cm x 21 cm, 9,5 € elle demeure une des rares institutions en Occident à proposer une conception initiatique du monde qui dit et redit le besoin pour tout un chacun d’habiter l’univers des symboles et des mythes. La pensée de Gilbert Durand a ainsi toujours été la marque d’une résistance contre un idéal prométhéen et faustien contre-productif Jacques Fontaine pour la fraternité entre les hommes et ce, pour favoriser l’intégration Les Clefs du Maître secret d’autres idéaux, mythes, symboles. De fait, elle éclaire le Maçon sur ISBN :978-2-916094-32-8, 16 cm x 24 cm, 27 € le chemin qu’il doit tracer pour remythologiser le monde.

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