Actes Des Trente-Troisièmes Assises De La Traduction Littéraire (Arles 2016)
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ACTES DES TRENTE-TROISIÈMES ASSISES DE LA TRADUCTION LITTÉRAIRE (ARLES 2016) TRENTE-TROISIÈMES ASSISES DE LA TRADUCTION LITTÉRAIRE (ARLES 2016) L’EMPIRE CONTRE-ÉCRIT Si l’on considère que chaque langue exprime une façon unique de concevoir le monde, à la fin d’un conflit, il en apparaît toujours deux : la langue du vainqueur et celle du vaincu. Ce phénomène, que l’on constate pour toute sorte de conflits – mondiaux, sociaux, familiaux – est d’autant plus flagrant quand on considère le fait colonial, où de toute évidence, l’entre-langues qui naît de ces différentes conceptions du monde trouve un terreau fertile. Comment cela se traduit-il dans la littérature ? Et surtout, comment le traduit-on ? C’est à ces questions que vont tenter de répondre nos 33es Assises. Bien sûr, le sujet est vaste, et nous n’en couvrirons que certains aspects, sans volonté d’exhaustivité, mais plutôt avec celle d’illustrer, au gré des tables rondes, des rencontres et des ateliers, telle ou telle caractéristique de ce rapport entre la langue de “l’oppresseur” et celle de “l’opprimé”, au travers de textes et d’auteurs d’origines aussi diverses que possible. Un écrivain nous a paru emblématique du thème de cette année : Salman Rushdie, dont un article essentiel, “The Empire Writes Back”, porte sur ces questions. La traduction de ce titre constitue un parfait exemple de la problématique que posent ces Assises, qui s’intitulent donc : L’Empire contre-écrit. Que la force soit avec nous ! Santiago Artozqui La préparation de cet ouvrage a été assurée par les auteurs des conférences, les participants aux tables rondes et les animateurs des ateliers ; la transcription par le cabinet de sténotypie Ordioni et meridiem – traductions et services pour l’édition franco-italienne ; la préparation de copie par Karine Louesdon ; la relecture par Santiago Artozqui, Marie-Claude Auger, Geneviève Charpentier,Agnès Desarthe, Paul Lequesne, Margot Nguyen Béraud, Mona de Pracontal, Dominique Vittoz et Emmanuelle Flamant ; la mise en page par Emmanuelle Flamant. © atlas 2017 Image de couverture : © Lea Lund & Erik K / Erik, Port House, Anvers, novembre 2015 TRENTE-TROISIÈMES ASSISES DE LA TRADUCTION LITTÉRAIRE (ARLES 2016) L’Empire contre-écrit TRADUIRE L’ORATURE EN ÉCRITURE par Souleymane Bachir Diagne POUR UN IMAGINAIRE HÉTÉROLINGUE ENFANTS DE SHAKESPEARE, ENFANTS DE MINUIT ENGLISH IN PROGRESS DIALOGUE AUTOUR DE PARTITION ROUGE TABLE RONDE ATLF : TRADUIRE DANS LES PAYS DU MAGHREB LE FRANÇAIS, BUTIN DE GUERRE ? CLÔTURE par Jacques Bonnaffé avec la participation de : SANTIAGO ARTOZQUI REGINA KEIL-SAGAWE EMMANUELLE AYMÈS HENRI MAQUET SOULEYMANE BACHIR DIAGNE YASMINA MELAOUAH CAMILLE BLOOMFIELD MAYA MICHALON JACQUES BONNAFFÉ LOTFI NIA DANY BOUDREAULT ANNELISE ORIOT LUDIVINE BOUTON-KELLY SYLVAIN PRUDHOMME LAURA BRIGNON JEAN-PIERRE RICHARD FLORENCE DELAY JACQUES ROUBAUD PIERRE-MARIE FINKELSTEIN WALID SOLIMAN YVES GAUTHIER MYRIAM SUCHET CLAUDE GUERRE MIREILLE VIGNOL RICHARD JACQUEMOND DOMINIQUE VITALYOS MOHAMED-SGHIR JANJAR DOMINIQUE VITTOZ CLAIRE JOUBERT FRANK WYNNE HÉDI KADDOUR Conception et coordination des Assises : Le conseil d’administration d’atlas (Association pour la promotion de la traduction littéraire) Santiago Artozqui, président Bernard Hœpffner, vice-président Paul Lequesne, secrétaire général Geneviève Charpentier, trésorière Marie-Claude Auger, Olivier Chaudenson, Agnès Desarthe, Dieter Hornig, Laurent Muhleisen, Margot Nguyen Béraud, Mona de Pracontal, Dominique Vittoz Le directeur d’atlas, Jörn Cambreleng assisté de Chloé Roux, Caroline Roussel, Emmanuelle Flamant, Loraine Drescher et Béatrice Brociner Parmi les organismes publics et privés qui nous ont apporté leur aide, nous tenons à remercier : Le ministère des affaires étrangères et du Développement international La Délégation générale à la langue française et aux langues de France (dglflf) – Ministère de la Culture et de la Communication Le Centre national du livre (cnl) L’Institut français Le département des Bouches-du-Rhône Le conseil régional Provence-Alpes-Côte d’Azur La Ville d’Arles Konishi Foundation for international exchange La Société française des intérêts des auteurs de l’écrit (Sofia) L’Association des traducteurs littéraires de France (atlf) L’Association du Méjan et les éditions Actes Sud La Fondation Manuel Rivera-Ortiz L’antenne universitaire d’Arles France Culture SOMMAIRE PREMIÈRE JOURNÉE Vendredi 11 novembre 2016 ALLOCUTION D’OUVERTURE par Santiago Artozqui, président d’ATLAS p. 11 TRADUIRE L’ORATURE EN ÉCRITURE Conférence de Souleymane Bachir Diagne p. 17 POUR UN IMAGINAIRE HÉTÉROLINGUE Conférence de Myriam Suchet p. 32 PROCLAMATION DES PRIX DE TRADUCTION p. 59 DEUXIÈME JOURNÉE Samedi 12 novembre 2016 ATELIERS DE TRADUCTION Anglais (Népal) : Poèmes de l’Himalaya, traduire Yuyutsu R. D. Sharma, avec Camille Bloomfield p. 64 Anglais (Papouasie-Nouvelle-Guinée) : Maiba, traduire Russell Soaba, avec Mireille Vignol p. 73 Arabe (Égypte) : Goghrafia badila (Géographie alternative), traduire Iman Mersal, avec Richard Jacquemond p. 77 Italien (Sicile) : Traduire l’autobiographie de Vincenzo Rabito (deuxième version), avec Laura Brignon p. 81 TRADUCTEUR D’UN JOUR : ATELIERS POUR NON-PROFESSIONNELS Italien (Sardaigne) : La Légende de Redenta Tiria, traduire Salvatore Niffoi, avec Dominique Vittoz p. 86 “ENFANTS DE SHAKESPEARE, ENFANTS DE MINUIT” : POÉTIQUE DE L’ANGLAIS DEPUIS 1981 Carte blanche à Claire Joubert p. 89 ENGLISH IN PROGRESS Table ronde animée par Maya Michalon, avec Ludivine Bouton-Kelly, Jean-Pierre Richard et Dominique Vitalyos p. 107 DIALOGUE AUTOUR DE PARTITION ROUGE Jacques Roubaud et Florence Delay en dialogue avec Maya Michalon p. 148 TROISIÈME JOURNÉE Dimanche 13 novembre 2016 ATELIERS DE TRADUCTION Afrikaans : traduire trois poèmes respectivement de Marius Crous, Ronelda Kamfer et Nathan Trantraal, avec Pierre-Marie Finkelstein p. 176 Espagnol (Guinée équatoriale) : Matinga, sangre en la selva, traduire Joaquín Mbomío Bacheng, avec Annelise Oriot p. 179 Provençal : Le Poème du Rhône, traduire Frédéric Mistral, avec Claude Guerre p. 183 Russe (Sibérie, teinté de tchouktche) : L’Étrangère aux yeux bleux, traduire Youri Rytkhèou, avec Yves Gauthier p. 185 TABLE RONDE ATLF : TRADUIRE DANS LES PAYS DU MAGHREB Animée par Richard Jacquemond avec la participation de Mohamed-Sghir Janjar, Walid Soliman et Lotfi Nia p. 194 ENCRES FRAÎCHES DE L’ATELIER FRANÇAIS-JAPONAIS DE LA FABRIQUE DES TRADUCTEURS p. 225 LE FRANÇAIS, BUTIN DE GUERRE ? Table ronde animée par Hédi Kaddour, avec Regina Keil-Sagawe, Yasmina Melaouah et Frank Wynne p. 226 CLÔTURE par Jacques Bonnaffé, témoin des Assises p. 256 Biobibliographies des intervenants p. 257 ANNEXE Sommaire des Actes des Assises de 1984 à 2015 p. 271 8 PREMIÈRE JOURNÉE 9 10 ALLOCUTION D’OUVERTURE par Santiago Artozqui Bonjour, et bienvenue aux 33es Assises de la traduction littéraire, qui s’intitulent cette année “L’Empire contre-écrit”. Le caractère quelque peu cryptique de ce titre ne vous aura pas échappé, et nous ne l’avons choisi qu’à la suite d’une longue réflexion collective sur le thème dont nous souhaitions débattre. Nous sommes partis d’un constat : il existe des littératures dites postcoloniales qui posent d’intéressants problèmes de traduction. Vous l’aurez compris, tout est dans ce “postcoloniales”, un adjectif qui ne revêt pas le même sens selon qu’il qualifie une nation ou une littérature. En effet, dans le premier cas, il fixe une situation historique dans sa temporalité, alors que dans le second, il décrit un processus qui peut avoir débuté plus ou moins tôt, mais qui est encore à l’œuvre aujourd’hui, sans qu’on puisse nécessairement déduire une relation directe de causalité entre le fait colonial et la nature de la littérature contemporaine dans un espace géographique ou culturel donné. La confusion, parfois délibérée, entre les deux acceptions de ce terme est donc un problème politique, ou pour le moins une prise de position politique, car elle effectue un transfert de sens qui voudrait nous faire croire à la perti- nence d’une définition territoriale ou historique de l’identité culturelle. On commence comme ça, et on finit en construisant des murs pour empêcher les Mexicains d’entrer. Voilà pourquoi, au terme d’un long mais passionnant débat, nous avons décidé de ne pas faire figurer ce terme ambigu dans l’intitulé de ces Assises. En outre, si la colonisation, puis la décolonisation, ont donné lieu à des évolutions dans les langues et les littératures des colonisateurs autant que des colonisés, elles n’expliquent pas tout, et on sait bien qu’une langue peut évoluer en fonction d’événements d’une autre nature. Alors, “L’Empire contre-écrit”, dans tout ça. Eh bien, ça tombe bien, 11 ce syntagme est une traduction, mais une traduction qui a une histoire. En 1982, Salman Rushdie écrit un article, “The Empire Writes Back with a Vengeance”, dans lequel il ne parle pas vraiment de littérature, mais plutôt du racisme dont sont victimes en Grande-Bretagne les ressortissants non blancs des anciennes colonies. Sept ans plus tard, en 1989, Ashcroft, Griffiths et Tiffin publient The Empire Writes Back. Theory and Practice in Post-Colonial Literature, un livre qui forge et théorise le concept selon lequel le fait colonial a contri- bué et contribue encore (c’est le post), à modeler la littérature de langue anglaise. Comme vous vous l’imaginez, tout le monde n’est pas d’accord, même si le propos de ces auteurs est plus subtil que l’image que j’en donne en deux phrases. Toujours est-il que ce livre, qui a beaucoup circulé dans le milieu des études littéraires, n’a été traduit en français qu’en 2012, par Jean-Yves Serra et Martine Mathieu-Job, et a été publié sous le titre L’Empire vous répond, une traduction très littérale – car effectivement to write back, c’est répondre par écrit –, mais qui laisse de côté un élément important : la référence à Star Wars, The Empire Strikes Back. Or, cette référence, loin d’être anecdotique, puisqu’elle renvoie au contenu du film (l’empire hégémonique et maléfique, Dark Vador), mais également au film en tant qu’élément de la culture populaire et mondialisée de la seconde moitié du XXe siècle, est au cœur du débat.