Archives Cantonales Vaudoises
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Archives cantonales vaudoises Histoire de l’administration cantonale vaudoise : pouvoir exécutif et administratif 1970-1998 Par Gilbert Coutaz Recettes et dépenses d'exploitation de l'Etat Vaud entre 1987 et 1997 Recettes Milliers de fr. 5'500'000 Dépenses 30'000 5'000'000 Différence -20'000 4'500'000 -70'000 4'000'000 . -120'000 r 3'500'000 f 3'000'000 -170'000 de 2'500'000 os -220'000 i M 2'000'000 -270'000 1'500'000 -320'000 1'000'000 500'000 -370'000 0 -420'000 1987 1988 1989 1990 1991 1992 1993 1994 1995 1996 1997 Années L’étude constitue le dossier thématique du Rapport d’activité 2006 des Archives cantonales vaudoises. Chavannes-près-Renens, octobre 2007 1200 exemplaires Page de couverture : Recettes et dépenses d’exploitation de l’Etat de Vaud entre 1987 et 1997. Source de référence : Annuaire statistique du canton de Vaud . © Archives cantonales vaudoises 2 « Je regrette que d’une façon générale, les préavis qui nous sont présentés soient dépourvus d’une analyse historique, de toute sensibilité historique – c’est très bien de savoir l’anglais, c’est très bien de pratiquer l’informatique, mais ce serait peut-être encore mieux de souvenir de nos racines ; cela éviterait quelques dérives de nos anciens conseillers d’Etat, soit dit en passant ! (Rires) » (Maurice Meylan, Bulletin des séances du Grand Conseil, 17 juin 1997, p. 1534) Introduction* Les années noires Le 7 février 1995, le Conseil d’Etat tenait une conférence de presse au cours de laquelle il révélait de graves événements survenus au Département des finances : il annonçait avoir dû licencier sur le champ Pierre-Alain Buffat, chef du Service de l’administration des finances, en charge depuis 1975 et accusé d’avoir dissimulé un montant de 106 millions de francs en relation avec l’acquisition d’un programme informatique, dénommé Procofiev. Maillon faible de l’administration, le Département des finances allait servir de détonateur. En effet, miné par les affaires et poussé à quitter le gouvernement, le conseiller d’Etat UDC, Pierre-François Veillon, arrivé au pouvoir en novembre 1991, démissionnait avec fracas de sa charge le 16 mars 1996, à minuit. Il était la victime de marque des critiques liées aux facturations fantaisistes, mais non payées des collaborateurs de Bossard Consultants, mandatés pour scruter l’administration cantonale vaudoise. La suspension immédiate, le 27 février 1996, de la collaboration avec l’entreprise parisienne n’avait pas suffi à dissiper le malaise. L’affaire profita à l’arrivée du premier conseiller d’Etat popiste jamais élu à la tête du canton de Vaud, en juin 1996, Josef Zisyadis, et l’échec du parti radical de récupérer son troisième siège, à la suite de la non-réélection de Philippe Pidoux en 1994. Les dysfonctionnements (le mot alibi et récurrent des années de crise) remontèrent l’un après l’autre à la surface : comptabilité truquée ; dérives informatiques ; détournement d’argent au Service des automobiles ; gestion approximative et fautive des caisses ; contrôles insuffisants ; manque d’outils de gestion et de planification, incompétence et autoritarisme de plusieurs cadres, autant de maux qui assaillirent le Conseil d’Etat englué dans ses conflits de personnes et dans ses contradictions. La crise des institutions politiques éclate au grand jour, le gouvernement vaudois est k.-o. debout. La vie politique fut dorénavant régulièrement émaillée d’incidents, suscitant des joutes oratoires féroces entre les différents camps politiques. A preuve, à l’occasion de la discussion du budget 1998, de nombreux députés de gauche quittèrent la salle du Grand Conseil, lors de la séance du 10 décembre 1997. Vingt jours après son arrivée au château cantonal, Josef Zisyadis rompt avec la collégialité, en organisant une conférence de presse alternative, qui amène le soutien des socialistes, furieux contre leurs propres représentants à l’exécutif. La grève des fonctionnaires, massivement suivie, de novembre 1995, les déficits abyssaux des comptes depuis 1992 et la rupture de la formule gouvernementale lors des élections de 1994 amenèrent à poser la question de la faillite de l’Etat. « Après deux siècles d’immobilité absolue, les plaques tectoniques sur lesquelles repose la société vaudoise se sont-elles remises en mouvement ? Les signes d’une réactivation du magma informe sont multiples. Les notables libéraux, héritiers des fondateurs du canton, * Note liminaire : les références sont simplifiées pour les publications mentionnées dans le chapitre BIBLIOGRAPHIE. Nous ne préciserons les pages du Bulletin des séances du Grand Conseil que lorsque nous lui empruntons des citations. Sinon, le texte signalera simplement la date de la séance. 3 se trouvent réduits au silence par d’injustes concours de circonstances. Le Parti Radical- Démocratique des Entrepreneurs a perdu avec le Président Pidoux et Chevallaz-le-Petit ses éléments les plus représentatifs. Il n’est jusqu’à la gauche, épuisée par une brutale nuit d’amour avec l’électorat, qui ne reste couchée, au lit, attendant avec anxiété le verdict du thermomètre. Quelqu’un a osé un jour dire du mal d’un livre de Jacques Chessex dans 24 heures. Les banques disparaissent avant même qu’on inculpe leurs directeurs. La Nouvelle Revue de Lausanne n’est plus coloriée en vert, mais en rouge et bleu. Tout fout le camp. Dans ce vide angoissant, fleurissent à nouveau les projets les plus audacieux de réforme politique ou sociale : faut-il rétablir le pouvoir des comtes de Savoie ? Allons-nous instaurer la République socialiste des Conseils ouvriers ? Va-t-on regrouper les communes de Dommartin, Poliez-le-Grand et Poliez-Pittet ? Le Nouveau Quotidien, toujours en avance d’une révolution, propose même de combattre les égoïsmes. 200 ans, serait-ce trop ? Le Château va-t-il s’effondrer prochainement ? Les élites actuelles ont-elles accompli leur mission historique ? Ces graves questions, qui méritaient un débat scientifique loin des ricanement faciles et des allusions perfides ont trouvé réponse dans ce colloque multimédia et métadisciplinaire qui a su mettre à plat sans fausse note les vraies questions dans l’église au milieu du village tout en jouant le jeu. »1 Et pourtant l’état de crise qui sembla un instant permanent et irréversible fut dépassé et la reconquête fut entreprise au nom de la modernisation, de l’efficacité et de la rationalisation, trois leitmotivs des mots d’ordre politiques et des diverses réorganisations de l’administration. Une nouvelle organisation de l’administration fondamentalement repensée et en rupture avec les pratiques anciennes entra en vigueur le 21 avril 1998. Le nouveau Conseil d’Etat, composé de 5 représentants de droite à la suite des élections du printemps 1998 dispose désormais d’un diagnostic impitoyable sur les années de crise ; il n’a pas pour autant la partie gagnée, puisqu’il doit atteindre l’équilibre des finances à l’horizon 2000, mettre en place une nouvelle loi sur le personnel et faire avancer et aboutir le chantier d’une nouvelle constitution. Les témoins, nombreux, qui se sont exprimés sur ces années, les ont comparées à un « séisme », à un « choc tellurique » par rapport au « ronronnement », à « l’autosatisfaction » des années 1970 et 1980. Le canton de Vaud avait continué à vivre dans les années euphoriques de l’après Exposition nationale de Lausanne de 1964 ; il se contentait de ce qui existait ; il cumulait effrontément les comptes favorables. Il tomba subitement et brutalement de son piédestal. Le choc fut d’autant plus rude que c’est la plus importante entreprise du canton qui fut touchée. Ce n’est pas seulement l’Etat qui est malmené, mais l’ensemble de la société et de l’économie. Ce qui semblait intangible est désormais menacé, plus rien n’est garanti dans une administration qui se pensait immuable et qui avait agi sans moyens de planification et sans outils appropriés. La conjoncture et la marche des affaires avaient donné longtemps l’illusion aux autorités d’être de bons administrateurs, car l’abondance des ressources financières permettait de différer les réformes et de répondre à toutes les demandes, sans remise en question. Les crises pétrolières des années 1974 et 1979 n’avaient pas eu l’effet d’un électrochoc ; elles restèrent des épiphénomènes. En permettant à l’époque l’exportation du chômage, elles empêchèrent les mutations structurelles devant lesquelles les autorités des années 1990 ne pourront pas se défiler. Mal préparées, elles durent subir les effets de la crise. Aveuglées dans les résultats à court terme, elles avaient, encore dans les années précédentes, décidé des allègements fiscaux et l’abaissement du coefficient des impôts, se privant par là même de recettes importantes. Les effectifs de la fonction publique, jugés pléthoriques par les partis politiques, avaient augmenté régulièrement durant vingt ans pour faire face à l’évolution des 1 L’Etat de Vaud existera-t-il encore en l’an 2000 ?, 4e plat de couverture. 4 tâches de l’administration et tenir compte de la croissance démographique. Ils s’imposaient aux autorités qui, prises à leur propre piège, ne pouvaient pas du jour au lendemain les réduire drastiquement. A la différence des autres crises, celle des années 1990 était structurelle et durable. La conjoncture florissante des années huitante fait place à un redimensionnement abrupt et obligé de l’administration. Se risquer à une première histoire des années 1970 à 1998 Il n’est pas sans risque d’aborder une période aussi proche qu’agitée, convulsive et chaotique, car l’onde de choc n’est pas encore complètement passée ; la sérénité des esprits n’est pas nécessairement retrouvée. Les témoins sont nombreux, ils ont diversement apprécié les années d’assainissement, durant lesquelles de grands coups de balais ont été donnés et on a procédé au ménage des structures vieillies et des baronnies départementales.