Baccalauréat 2007

LITANIES de , 1937

«Quand l’âme chrétienne ne trouve plus de mots nouveaux dans la détresse pour implorer la miséricorde de Dieu, elle répète sans cesse la même invocation avec une foi véhémente. La raison atteint sa limite. Seule la foi poursuit son ascension.» Jehan Alain

TABLE DES CHAPITRES I. Le compositeur II. L’instrument : L’orgue et ses divers plans sonores 1. Le buffet 2. La console 3. La tuyauterie 4. Le sommier et la mécanique 5. Historique de l’orgue III. Les Litanies IV. La registration des Litanies V. Commentaire de Marie-Claire ALAIN VI. Analyse de l’œuvre VII. Bibliographie

I. Le compositeur Jehan ALAIN est né le 3 février 1911 à Saint-Germain-en-Laye et tué le 20 juin 1940 près de Saumur , pendant la dernière guerre. Fils de l’organiste (Saint-Germain-en-Laye 1-03-1880 / 15-10-1971), il fut au Conservatoire de l’élève de Caussade, de Roger-Ducasse, très brillant élève de Paul Dukas et de Marcel Dupré. Il remporta de nombreux Premiers Prix. Organiste de Maisons - Laffitte, improvisateur remarquable, il a composé de 1929 (à l’âge de 18 ans) à 1939 (à l’âge de 28 ans) des pièces pour orgue très personnelles, des pages pour piano.

Travail d’Isabelle BAUDRILLART – page 1

93 numéros d’opus : - Œuvres chorales, dont 3 messes - Œuvre d’orgue en 3 tomes chez Leduc : Berceuse sur deux notes qui cornent (1929), Lamento (1930), Postlude pour l’office de Complies (1930), Ballade en mode phrygien (1930) Petite Pièce (1932), Variations sur « Lucis Creator » (1932), Grave (1932) Premier Prélude Profane (1933), Deuxième Prélude Profane (1933), Le Jardin Suspendu (1934), Deux Danses à Agni Yavishta (1934), Première Fantaisie (1934), Andante (inédit) (1934) Climat (1935), Intermezzo (1935), Choral dorien et Choral phrygien (1935), Choral cistercien ( ?), Prélude et Fugue (1935), Suite pour orgue (1934-1936), Deuxième Fantaisie (1936), Variations sur un thème de Clément Janequin (1936), Fantasmagorie (1936), Trois Danses (1937 – 1939), Litanies (1937) Monodie (1938), Aria (1938) - Œuvre de piano en 3 tomes - Trois Mouvements pour piano et flûte - Suite monodique pour piano - Chant Funèbre (1950), oratorio - nombreux Motets inédits - Etude sur l’Harmonie, Paris, PUF, 1965

Olivier ALAIN, frère du précédent, Saint-Germain-en-Laye 3-08-1918 Marie-Claire ALAIN sœur du précédent , Saint-Germain-en-Laye 10-08-1926

II. L’instrument : L’orgue et ses divers plans sonores

Écoute : orgue médiéval (bourdon + une mélodie) ou Écoute : « Toccata en ré mineur » de J-S.BACH (Réflexions orales sur l’instrument entendu) Dessin de positif distribué (voir plus bas).

Écoute : « Sonate en trio en mi b Majeur » (1 er mouvement) de J-S.BACH

Écoute : Chaconne des « Prélude, fugue et chaconne en sol mineur » de BUXTEHUDE (chanter la basse pour la reconnaître)

Écoute : « Offertoire » de Beauvarlet – Charpentier (XVIIIe s.)

Écoute : « Toccata » de Maurice Duruflé « organiste », dessin de Jehan Alain (début XX e s.) L’orgue est un instrument à vent polyphonique . Il est constitué de plusieurs éléments :

1. le buffet , énorme caisse de bois dans laquelle sont alignés les tuyaux.

Travail d’Isabelle BAUDRILLART – page 2

2. la console , poste de commande de l’organiste.

• 1, 2 à 5 claviers manuels souvent, un pédalier (Si c’est possible, montrer une photo de pédalier aux élèves) De haut en bas, on les nomme ECHO BOMBARDE RÉCIT (abréviation Réc. ) GRAND ORGUE (abréviation G.O. ) POSITIF (abréviation Pos. ) + PÉDALIER (abréviation Péd. )

dessin d’Isabelle BAUDRILLART

Les tirasses (abréviation Tir. ) sont des pédales qui accouplent (additionnent) les claviers entre eux ou avec le Pédalier. La pédale d’expression date de l’époque romantique et permet d’ouvrir des volets dans le buffet du récit (mais oui !), ce qui permet des nuances. La tuyauterie contenue dans le buffet. (Si c’est possible, apporter en cours des tuyaux d’orgue afin de les montrer aux élèves ou montrer des photos) Les pieds des tuyaux en bois ou en métal sont placés sur un sommier , sorte de réservoir plat en bois contenant l’air. Ils sont de formes et de tailles diverses (petits = aigus ; grands = graves) les tuyaux à bouche (bois ou métal) les tuyaux à anche (métal)

MÉTAL BOIS

dessins d’Isabelle BAUDRILLART

Travail d’Isabelle BAUDRILLART – page 3

Écoute : « Hymne Ave Maris Stella » de ? pour les tuyaux à bouche Écoute : (chamade) – SCHEIDT (ranquette) – Th. de Sancta Maria pour les tuyaux à anche

On appelle jeu ou registre une série de tuyaux de même matière et de même timbre (couleur sonore). Il est caractérisé par un nom, suivi d’un chiffre : exemples : bombarde 32 pieds Le tuyau le plus grave mesure 32 pieds (le pied, ancienne mesure, encore utilisée en Grande Bretagne, mesure 0,33m) , soit 32 x 0,33m = 10,56 m !

On appelle jeu ou registre une série de tuyaux de même matière et de même timbre (couleur sonore). Il est caractérisé par un nom, suivi d’un chiffre : exemples : bombarde 32 pieds Le tuyau le plus grave mesure 32 pieds (le pied, ancienne mesure, encore utilisée en Grande Bretagne, mesure 0,33m), soit 32 x 0,33m = 10,56 m ! Exemples on écrit BOURDON 16 MONTRE 8 on lit bourdon de 16 pieds montre de 8 pieds (5,26 m) (ce sont les tuyaux de façade que l’on « montre ») (2,64 m)

FLÛTE 4 DOUBLETTE 2 SIFFLET 1 flûte de 4 pieds doublette de 2 pieds sifflet de 1 pied (1,32 m) (66 cm) (33 cm)

« nain à l’orgue », dessin de Jehan Alain

Les tuyaux sont regroupés par familles : - Les fonds (tuyaux à bouche) : c’est la base de l’instrument. principaux (ou montres) violes (ou gambes) flûtes bourdons

- Les mutations (tuyaux à bouche) : c’est la « lumière » de l’instrument. Les mutations simples font entendre les harmoniques du son. Exemples : tierce, quinte ou nasard, larigot… Les mutations composées ou mixtures possèdent plusieurs tuyaux par note (on dit des « rangs »). Exemples : cornets, plein-jeux …

Travail d’Isabelle BAUDRILLART – page 4

- Les anches (tuyaux à anche) : ce sont les « couleurs ». Elles font souvent les solos ou renforcent les tutti. Exemples : hautbois, cromorne, basson ; mais aussi clairon, trompette, bombarde !

Écoute : Cantate n°147, « Jésus que ma joie demeure » de J-S.BACH 3. le sommier et la mécanique Lorsqu’on appuie sur une touche , l’air envoyé par le(s) soufflet(s) est alors projeté dans le tuyau, grâce à l’ouverture d’une soupape .

Mécanisme simplifié de l’orgue :

Écoute : « Dieu parmi nous » d’ (XXe s.) ou Écoute : « Toccata de la 5ème symphonie » de C - M. WIDOR

4. Historique de l’orgue Apparu au III e siècle avant Jésus-Christ sous le nom d’hydraule , on le trouve au Moyen-Âge sous forme de portatif et de positif . Au fil des siècles, il occupe de plus en plus de place à l’église, souvent à la tribune. Au XX e siècle, l’électricité simplifie l’arrivée de l’air dans les soufflets. Parfois même, on supprime les tuyaux grâce ( ?) à l’électronique !

orgue positif

dessin d’Isabelle BAUDRILLART, d’après la tapisserie de « La Dame à la Licorne » (XVI e siècle - Musée de Cluny à Paris)

Travail d’Isabelle BAUDRILLART – page 5

III. La registration des Litanies Quatre plans sonores principaux : 3 claviers manuels et un pédalier - Les trois claviers manuels : G.O. Pos. Réc. (soit Grand Orgue, Positif et Récit) Jeux de Fonds 8, 4, et de Mixtures + ou - les Anches 8 et 4 - Le clavier de pédale : Péd (soit Pédalier) : Jeux 16 doux, 8, 4 + ou - les Anches Pour additionner les sonorités, on utilise également - Les pédales d’accouplement: Pos / GO (qui additionne le Positif sur le Grand Orgue) . Réc /GO (qui additionne le Récit sur le Grand Orgue). Ainsi, lorsque l’on joue sur le Grand Orgue, on entend les jeux des trois claviers manuels! Réc / Pos (qui additionne le Récit sur le Positif). Ainsi, lorsque l’on joue sur le Positif, on entend aussi les jeux du Récit. - La tirasse (Tir.) Pos et Réc qui permet d’entendre les jeux de ces deux claviers manuels sur le Pédalier.

IV. Les Litanies A l’origine, ce sont des cérémonies religieuses. Aujourd’hui, ce sont des prières formées d’une longue suite de courtes invocations chantées lors de ces cérémonies en l’honneur de Dieu, de la Vierge et des saints . Exemple : « Sainte Blandine, priez pour nous ». Elles se chantent pendant les Rogations, la cérémonie de l’ordination, au sacre des évêques, à la dédicace des églises, à la bénédiction des fonts baptismaux. Les autres litanies (Jésus, Sacré-Cœur, Sainte Vierge) n’entrent pas dans la liturgie officielle de l’Eglise. Toutes commencent par Kyrie eleison , Christe eleison , mots suivis de l’invocation des trois personnes de la sainte Trinité (le Père, le Fils et le Saint-Esprit). L’Eglise luthérienne a gardé le nom et l’usage des litanies, mais en ne conservant que l’invocation des trois personnes de la sainte Trinité.

V. Commentaire de Marie-Claire ALAIN Les Litanies sont dédiées à Madame Virginie Schildge-Bianchini. Bernard Gavoty rapporte les explications que lui donna Jehan ALAIN en déchiffrant sa partition devant lui : « … Il faut, quand tu joueras çà, donner l’impression d’une conjuration ardente. La prière, ce n’est pas une plainte, c’est une bourrasque irrésistible qui renverse tout sur son passage. C’est aussi une obsession : il faut en mettre plein les oreilles des hommes… et du Bon Dieu ! Si, à la fin, tu ne te sens pas fourbu, c’est que tu n’auras ni compris ni joué comme je le veux. Tiens-toi à la limite de la vitesse et de la clarté. Tant pis, cependant pour les sixtes de la main gauche, à la fin. Au vrai tempo, c’est injouable. Mais le rubato n’est pas fait pour les chiens, et il vaut franchement mieux “ bousiller” un peu que de prendre une allure qui défigurerait mes Litanies. »

Travail d’Isabelle BAUDRILLART – page 6

Marie-Claire ALAIN écrit en 1974 : « La phrase en exergue date probablement de la mort de notre sœur Marie-Odile (3 septembre 1937) dans un accident de montagne. Pourtant je suis sûre d’avoir entendu des fragments de Litanies avant cette date. Dans la pièce d‘orgue inédite qui porte le titre de Fantasmagorie (une sorte d’improvisation comique et parfois grotesque, se terminant par le dessin d’une vache caricaturale dansant sur un pré), nous trouvons déjà l’élément rythmique des mesures 19, 24 et 39. Ce rythme pourrait fort bien être un souvenir de voyage en chemin de fer, les accords de main gauche scandant les chocs irréguliers des roues sur le ballast.

Sur ce manuscrit de la Fantasmagorie (1936), une note au crayon, écrite par l’auteur, précise : “Les meilleurs fragments de cette pièce ont été utilisés dans la pièce d’orgue Supplications ”. Le titre de Litanies ne vint donc que plus tard, probablement après la mise en forme de l’œuvre, le compositeur se trouvant lui-même frappé par la similarité de son ostinato avec les invocations, sans cesse répétées, d’une foule en prière. Point n’est besoin d’analyser Litanies . Il suffit de se laisser entraîner par l’ envoûtement rythmique qui découle de cette phrase obsédante, inégalement découpée en 3 + 5 + 2 + 4 + 2 croches et qui s’enchaîne avec elle-même sans nous laisser reprendre haleine . Les trois manuscrits laissés par l’auteur portent des indications de registration, de changements de claviers et même de tempo différentes . On pourra ainsi constater à quel point l’interprétation de l’œuvre peut être flexible, à condition de savoir ménager l’ accelerando progressif pour terminer dans un sentiment de tension presque insoutenable . Cependant, une lettre inédite de l’auteur (1940) insiste sur la nécessité de respecter scrupuleusement la mention Plus large , dans l’avant-dernière ligne, cette dernière respiration étant nécessaire pour mettre en valeur le stringendo * final.

Si Litanies est l’œuvre la plus fameuse de Jehan ALAIN, celle qui “porte” à la première audition sur tous les publics, c’est sans doute par ce côté d’absolue sincérité, d ‘abandon naturel à une frénésie désespérée, parfois coupée de traits humoristiques (exemple : mesure où le rythme est inspiré du passage du train sur le ballast) ou nostalgiques (mesure 28 – l’un des manuscrits porte, ici, la mention Tendrement ). J’évoquerai aussi cet indéniable penchant de Jehan ALAIN pour une musique magique, envoûtante (il adorait Borodine et de Falla). La “magie” de Litanies , il l’obtient par une économie de moyens très concentrée. La répétition doit être implacable. Il faut se garder d’accélérer dans la toute première partie. Le thème du “train” (mesure 19) est plus rapide que le thème principal qui, à l’exception des deux mesures marquées Subito più lento e intimo (mesure 28), doit toujours être repris dans le tempo de la deuxième ligne. L’accelerando n’intervient que lorsque le thème est exposé, en force, à la Pédale, mais il doit être très important et le passage célèbre des accords de la main gauche se déchaîne, par deux fois, dans un effet de tornade. Ménager à nouveau une possibilité d’accélérer, en ne démarrant pas trop vite sur les accords plaqués, respirer sur le Più largo qui prend alors un côté grandiose et désespéré, et accélérer une dernière fois dans une conclusion haletante. »

*stringendo : de l’italien en pressant (abréviation string. ) Terme d’exécution qui demande une accélération progressive du mouvement (synonyme accelerando ).

Travail d’Isabelle BAUDRILLART– page 7 VI. Analyse de l’œuvre, réalisée par Isabelle BAUDRILLART et Claire DOLIBEAU « Point n’est besoin d’analyser Litanies » dit Marie-Claire ALAIN ! … Malgré les recommandations de sa sœur, voici une proposition d’analyse…

Voir tout d’abord le musicogramme, réalisé par Claire DOLIBEAU et Isabelle BAUDRILLART, en ligne sur le site de l’académie de Besançon.

Procédés d'écriture : contrepoint (écriture horizontale) ou harmonie (écriture verticale par suites d’accords) puis superposition des deux écritures ! 1. Espace Échelle : mode de ré (sur mi bémol) dit « mode dorien », polymodalité et gamme par tons Présence de trois motifs principaux A, B et C

Tempo rapide la plupart du temps Temps - non pulsé à l’exposition de la phrase principale, - pulsé le reste du temps. 2. Temps Répétitions de croches sur le principe suivant : 3 - 5 - 2 - 4 - 2 Points d'appui sur la première croche de chaque groupe décrit ci-dessus (3 - 5 - 2 - 4 - 2) Répétition sans variation de cellules mélodiques, ostinato, polyrythmie

Caractère : emphatique et lancinant Formation : orgue (3 claviers et 1 pédalier) 3. Couleur Modes de jeu : alternance de passages bien articulés et de phrases liées Registres : couleurs variées des timbres grâce aux registrations Nuances : de pp à fff Pas de texte , mais Alain utilise le principe des « Litanies », prière répétitive

4. Forme En trois parties, sorte de ABA’

Nous ne trouverons pas de mesure écrite . Celle-ci, principalement à 4 / 4 (ou peut-être devrait-on écrire 8 / 8), se découpera comme suit : 3 croches - 5 croches - 2 croches - 2 croches / noire - noire

C’est le rythme du motif de la litanie , qui, par principe, va devenir un véritable ostinato, rythmique mais également mélodique . Nous pourrions presque qualifier Alain de « minimaliste » avant la lettre, car c’est pratiquement le seul matériau dont il se servira dans cette pièce !

Jehan Alain aime les modes ecclésiastiques, échelles mélodiques médiévales, tirées des anciens modes grecs (exemple de la pièce d’orgue « Ballade en mode phrygien »). Nous sommes sur une échelle dont la note principale est mi bémol. Il s’agit du mode de ré (sur mi bémol) dit « mode dorien ». (comparer avec la « toccata dorienne », pour orgue, de Jean-Sébastien BACH)

Brève introduction vivo (quasi recitativo) en forme de paraphrase sur la tête de ce qui va être le motif principal.

Travail d’Isabelle BAUDRILLART et Claire DOLIBEAU – page 8

La première partie (mesures 1 à 18) se construit sur deux motifs principaux, inlassablement répétés.

Pour le motif A , les écritures horizontale de la Main Droite et verticale de la Main Gauche se superposent. On l’entend deux fois.

(On remarque l’écriture pour orgue : Main Droite en haut, Main Gauche au milieu (claviers manuels reliés par une accolade), Pédalier en bas)

Motif A : ostinato mélodico-rythmique poco staccato (sorte de mélodie accompagnée) justifiant le titre, il est composé de 3 croches - 5 croches- 2 croches,-2 croches/noire- noire

Ce motif est ensuite repris un ton plus bas deux fois également. On trouve une gamme par tons en main droite (mesure 18) dans l’accompagnement de la mélodie principale. L’harmonisation est polymodale (A dans le mode de mi et gamme par tons).

Le motif B est deux fois plus court, joué dans une autre couleur, comme « diminué » sur deux mesures.

Motif B : ostinato 2 fois plus court à la tierce, 3 croches et 5 croches (répétées 2 fois) construit sur la tête du motif A

Travail d’Isabelle BAUDRILLART et Claire DOLIBEAU – page 9 Cette partie progresse de forte à mezzo-forte et diminue jusqu’à la fin. On trouve un jeu sonore avec les jeux d’anches de 8 et 4 alternés au début.

La deuxième partie (mesures 19 à 46) se construit avec le motif C (mesure 19), fameuse imitation de la rythmique des roues de train sur le ballast, superposition plus complexe des deux techniques (mélodique et harmonique) à chaque main !

Motif C : ostinato en accords 3 croches et 5 croches (répétées 2 fois) construit sur le rythme de la tête du motif A

Celui-ci est parfois morcelé par l’intervention du motif A Nuances : piano, pianissimo, forte, mezzo-forte L’alternance des jeux d’anches de 8 et 4 revient cette fois en fin de partie et prépare le crescendo de la partie qui suit.

Dans la troisième partie (mesures 47 à la fin) on retrouve les motifs initiaux, un peu comme une réexposition. Mais, le motif C est parfois présent. Les échanges de claviers se font plus rapides (parfois plusieurs dans une même mesure) et font scintiller l’orgue ! Les enchaînements se précipitent, l’écriture devient plus dense, plus tendue, comme la prière peut devenir plus intense à force de répétition (penser aux transes occasionnées par la répétition dans le gospel ou certaines mélopées initiatiques incantatoires) La machine s’emballe (mesures 62 à 72). Les motifs tentent de s’échapper, aux claviers manuels vers l’aigu, au pédalier vers le grave. Ils se trouvent chaque fois coupés dans leur élan, jusqu’au cri final avec sa note pédale sur le mi bémol ! Nuances : fortissimo à fortississimo avec le tutti de l’orgue.

VII. Bibliographie • « L’œuvre d’orgue de Jehan ALAIN », partition intégrale en 3 volumes, aux éditions Leduc, Paris (Les Litanies se trouvent dans le volume I) • Disque vinyle « L’encyclopédie de l’orgue », l’orgue français, l’époque contemporaine : Jehan ALAIN, l’œuvre pour orgue, enregistrement intégral par Marie-Claire ALAIN aux grandes orgues Valtrin – Callinet – Schwenkedel de la Basilique Saint – Christophe à Belfort – éditions Erato – EDO 250 / 252 • Dictionnaires de Marc Honegger – éditions Bordas • « L’orgue » de Norbert Dufourcq dans la collection Que sais-je ? aux Presses Universitaires de France

Travail d’Isabelle BAUDRILLART et Claire DOLIBEAU – page 10

Pour la fiche de synthèse , devant être renseignée par chaque candidat et présentée par ses soins au jury le jour de l’épreuve facultative de musique au baccalauréat, voici quelques exemples d'entrées d'étude pouvant nourrir certaines problématiques :

L’œuvre et son organisation interne : - Structure du morceau construit sur des cellules mélodiques et rythmiques avec irrégularités d’accents - Transformation et traitement de ces cellules

L’œuvre et ses références au passé : - Retour sur le type de musique vocale ancienne que sont les litanies - Utilisation de modes ecclésiastiques par Jehan ALAIN - Similitudes avec le negro-spiritual (répétition des textes sacrés pour les intégrer) - Mélodies indigènes incantatoires - « Minimalisme » et humour de Jehan ALAIN (« souvenir de voyage en chemin de fer, les accords de main gauche scandant les chocs irréguliers des roues sur le ballast »)

L’œuvre et son interprétation : - Comparer les deux versions proposées pour le baccalauréat (Jean-Louis GIL et André MARCHAL), mais aussi d’autres versions comme celle de Marie-Claire ALAIN elle-même… ou la version pour deux pianos, arrangée par Marie-Claire et !

Travail d’Isabelle BAUDRILLART – page 11