DANS NOS RÉGIONS

VISITE PRÉFECTORALE | Dix jours après son arrivée dans les Alpes-de-Haute-Provence, la nouvelle préfète Violaine Demaret s’est rendue dans une station fruitière, puis à la rencontre d’éleveurs ovins pour entamer son initiation à l’agriculture bas-alpine. Entre coûts de production et pénurie de main-d’œuvre : la difficile équation

eu de temps après sa prise les problèmes de main-d’œuvre position de la chambre d’agricul- P de fonction, la préfète des rencontrés par les petits exploi- ture 04 est de dire : les vergers sont là Alpes-de-Haute-Provence tants. « Les gens ne veulent pas tra- où ils sont, il y a éventuellement une Violaine Demaret s’est rendue sur le vailler dans les champs. Ils préfèrent demande d’extension des zones à terrain pour découvrir la filière rester chez eux », déplorera le vice- aménager, faisons en sorte que, arboricole du département. président de la chambre d’agricul- lorsqu’on va étendre ces zones La première visite, qui s’est dérou- ture. Une pénurie que la crise sani- d’aménagement, on respecte au titre lée en présence du premier vice- taire n’a évidemment pas arrangée de la réciprocité les cinq ou 10 mètres président de la chambre d’agricul- et dont les arboriculteurs souffrent des parcelles agricoles de manière à ture 04 David Frison représentant le particulièrement. ce que ce ne soit pas à nouveau l’agri- président Frédéric Esmiol, et du « Les arboriculteurs des Alpes-de- culture qui soit obligée de reculer ». directeur de l’organisme consulaire Haute-Provence recrutent environ un « La charte ne règle pas tout, mais Bernard Savornin, le 2 septembre millier de saisonniers chaque année l’une de ses vertus est de nous prému- au Domaine Saint-Georges, géré pour la récolte », a souligné Bernard nir des décisions unilatérales. Mais ça par Didier Miolan, a été l’occasion Savornin, en pointant le travail suppose un vrai dialogue et une vraie de faire un point sur les spécificités engagé par la profession « pour concertation , a répondu la préfète. de la production départementale, St.M.C. communiquer sur ces métiers ». Entre La charte est un des éléments pour Une visite de la station fruitière du Domaine Saint-Georges a clôturé la matinée consacrée avancer. Ce n’est pas le seul, mais il dont le Domaine Saint-Georges, à l’arboriculture. les travaux de taille, d’éclaircissage, qui fait désormais partie du groupe la pose des filets, la récolte… « On faut que vous arriviez à développer les Les Vergers du sud est certes peu de la Granny Smith et de variétés Aider les petits peut presque pérenniser de l’emploi métiers de la communication ». « Il y a représentatif. De par sa superficie, club comme la Joya, la Pink lady ou sur une année ». Reste, ajoutera le des campagnes de communication , producteurs à s’organiser signalera David Frison . Ce qu’il faut pour commencer. Si le seul Domai- l’Ariane. Sur l’ensemble des domai- directeur de la CA 04, que le rapport « Le verger bas-alpin, d’une superfi- arriver à casser, c’est cette idée que ne Saint-Georges exploite 230 ha nes que compte la SCEA Les Vergers salaire/pénibilité demeure peu cie de 2 000 ha produit en moyenne dans un atomiseur et un pulvérisateur Didier Miolan, qui est par ailleurs du Sud, situés en Provence et en attractif. « On a des coûts de produc- 80 % de pommes, dont un taux équi- il n’y a que des produits nocifs. Il peut vice-président du groupe Blue Occitanie, Didier Miolan exploite valent de Goldens », a rappelé tion qui ne nous permettent pas de y avoir des produits qui sont tout à Whale, exploite 1 100 ha de pom- 2 700 ha, dont 1500 ha de melons, Bernard Savornin. Au cœur des revaloriser les salaires comme on fait respirables, comme des biostimu- miers au niveau national, contre et 50 ha de kiwis jaunes, dont 2 ha dossiers évoqués, la rénovation des pourrait le souhaiter », pointera-t-il lants ». Sur ce point, il est clair que une moyenne départementale qui sont à l’essai dans le 04. vergers qui nécessite « d’aider en soulignant par ailleurs les difficul- tout reste à faire. est de 17 ha par exploitation. De En dépit de ce caractère exception- les petits producteurs à s’organiser ». tés rencontrées par une autre orga- Une visite de la station fruitière a par sa production, ensuite, le nel, cette visite a néanmoins été « Nous sommes dans un départe- nisation de producteurs du départe- clôturé le volet arboriculture. Domaine Saint-Georges produisant l’occasion d’aborder les difficultés ment où la démarche collective ment pour trouver des caristes. notamment à peine 34 % de rencontrées par les producteurs n’est pas naturelle », a-t-il ajouté. La charte Riverains fera également Goldens au profit de la Royal Gala, bas-alpins. David Frison évoquera pour sa part l’objet d’un focus. « Aujourd’hui, la Stéphanie Martin-Chaillan Prédation : « La réactivité, c’est la base que l’on vous doit, à vous éleveurs » endez-vous était donné au afin de les informer sur les bons tée la perte génétique du Patou. R lac des Eissaupres, à une réflexes à adopter en cas de ren- « On a fait le choix d’un chien avec quinzaine de kilomètres de contre avec un troupeau et des zéro génétique. On a perdu trente Jausiers, dans la vallée de l’. chiens, Thierry Oger déplorera « de ans », estime Laurent Garde. Ce 4 septembre, la préfète des AHP plus en plus de violence à l’égard des Certains éleveurs ont préféré se Violaine Demaret devait rencontrer chiens de protection ». Et de lister les tourner vers d’autres races comme les éleveurs du groupement pasto- instruments utilisés : gaz lacrymo- le Berger d’Anatolie. Là encore, pas ral (GP) de Jausiers, présidé par gène, taser, matraques télesco- toujours pour le meilleur. « On a des Serge Rebattu. Un cadre magni- piques. « C’est Chicago ! », s’est in- accidents tragiques avec des Ana- fique choisi pour exposer à la pré- digné l’animateur également ber- tolie , avertira Thierry Oger. C’est un fète les problématiques générées ger de métier. chien qui va aller au conflit avec les par la prédation. Outre le coût représenté par les loups, mais également avec le « Il n’y a pas meilleur que l’agneau de campagnes de communication, Yorkshire de mamie ou le Labrador », introduira Serge Rebattu, Olivier Pascal, vice-président de la de papi… » avant de montrer les tardons pâtu- chambre d’agriculture représentant St.M.C. « Le seul moyen Une rencontre qui s’est déroulée notamment en présence du DDT Rémy Boutroux, rant à proximité : « ce sont des le président Frédéric Esmiol, poin- d’un lieutenant de louveterie, d’un représentant du parc du Mercantour, du directeur agneaux qui ont grandi en alpage, ils tera le problème récurrent de la que l’on demande, adjoint du Cerpam Laurent Garde et du 2 e vice-président de la CA 04 Olivier Pascal. ne savent pas ce que c’est que le gra- responsabilité juridique dévolue c’est le prélèvement » nulé ». Par chance, ceux-là ne savent aux éleveurs. « Le patou est un À tout cela s’ajoute, comme le sou- « Il faut que le loup sente le risque. vous doit à vous, éleveurs, qui souf- pas trop non plus ce qu’est le loup, moyen de protection lourdement lignera Olivier Pascal, « une suren- Attendre trois attaques avant de tirer, frez sur ce dossier ». le GP ayant été épargné cette sai- conseillé par l’État et la responsabilité chère dans la protection » de la part c’est contre-productif. L’objectif, c’est La présidente de la communauté son. Leur problème, en revanche, juridique doit revenir à l’État. C’est des éleveurs qui s’efforcent tout de réguler les loups, le quota n’est pas de communes de la vallée de c’est le chien de protection. « Le une demande qui est faite depuis bonnement d’être plus dissuasifs un but en soi », confirmera Laurent l’Ubaye-Serre-Ponçon et maire de patou, c’est une bonne solution pour 20 ans et ça n’aboutira jamais ! » pour les loups que leurs voisins Garde. Sophie Vaginay le loup, mais vis-à-vis des humains, Bien sûr, conviendra Thierry Oger, d’alpages, mais aussi au niveau de Restent les limites des équipe- interviendra pour dire l’importance c’est un moyen de protection à dou- certains chiens sont des « gre- la biodiversité, des dégâts considé- ments dont disposent les louve- de l’activité pastorale dans le ble tranchant », a-t-il souligné en nades dégoupillées » et les éle- rables en particulier sur les popula- tiers. Un équipement « perfectible », département. « Dans un contexte de expliquant qu’un touriste s’était fait veurs y ont leur part de respon- tions de marmottes. « Les chiens selon le lieutenant de louveterie réchauffement climatique, c’est une pincer au cours de l’été. « Cela m’a sabilité mais, insistera le directeur font le ménage dans l’espace de Patrice Borel, avec des adaptateurs profession qui permet de laisser des valu trois visites chez le vétérinaire à adjoint du Cerpam Laurent Garde, patrouille, soit 500 mètres autour du pour lunettes thermiques, dont les espaces ouverts et qui participe à 90 euros chacune, plus une visite de la source de certaines difficul- troupeau », a précisé Laurent Garde. performances sont insuffisantes. la vie économique des territoires », comportement à Digne parce que le tés vient aussi des premières Tout cela pour obtenir les chiffres « Ce que j’aimerais, c’est que le peu de a-t-elle rappelé avant de demander promeneur avait porté plainte », consignes données aux éleveurs que l’on connaît : « 95 % des brebis marges de manœuvre que l’on a, on « à quel moment l’espèce (le loup, ndlr) explique le président du GP. en matière d’éducation, et qui tuées sont dans des troupeaux proté- puisse l’utiliser », conclura la préfète ne sera plus considérée comme proté- Embauché depuis quelques années étaient précisément de ne pas les gés », rappellera Olivier Pascal qui lors de la réunion organisée à la gée ? » La réponse est en suspens. comme animateur pastoral pour sociabiliser. Des conseils « en dépit conclut : « le seul moyen qu’on mairie de Jausiers dans la foulée. aller au-devant des promeneurs du bon sens » auxquels s’est ajou- demande, c’est le prélèvement ». « La réactivité, c’est la base que l’on St.M.C.

4 Vendredi 18 septembre 2020 - L’ESPACE ALPIN