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NOUVELLES OBSERVATIORS sur la FAUNE des VERTÉBRÉS

DU DÉPARTEMENT DE L'

par M. l'abbé A.-L. LETACft '

II y a deux ans, lors du Congrès de l'Association normande à Alençon, j'avais préparé pour répondre au questionnaire de l'enquête scientifique un mémoire sur les Vertébrés de l'Orne ; c'était un sujet d'étude absolument neuf, une mine jusqu'alors inexploitée. Quelques naturalistes avaient bien re- cueilli çà et là des faits particuliers, noté des phéno- mènes accidentels, mais personne n'avait encore abordé la question à un point de vue général.; la zoologie restait chez nous la partie la plus obscure de l'histoire naturelle. Je voulus faire quelque chose, là où tout était à faire ("1). Mon travail, en fixant l'état de nos connaissances relatives aux Vertébrés, a eu au moins le mérite

(1) Matériaux pour servir à la Faune des Vertébrés du dépar- tement de l'Orne, in Annuaire normand, 1896, p. 67-130. — Tirage à part, Caen, Delesques, in-8°, 66 p. " Manuscrit présenté à la séance du 7 décembre 1896 ; épreuves corrigées parvenues au Secrétariat le lti décembre. — 80 — d'attirer l'attention des observateurs sur cette classe d'animaux, car depuis lors on m'a adressé de différents côtés des échantillons de mammifères, d'oiseaux, de reptiles qui me permettent aujourd'hui de combler plusieurs lacunes, de rectifier certaines assertions et même de corriger quelques erreurs. A , j'ai pu, grâce à l'obligeance de notre excellent confrère M. Lecœur, examiner la très curieuse collection réunie par M. Moulin, qui est tout à la fois chasseur intrépide et préparateur très habile. M. Moulin possède une bonne partie de nos oiseaux de proie, plusieurs granivores, des échassiers, des palmipèdes, la plupart de nos mam- mifères, en tout près de cent exemplaires intéressant la faune régionale. Il est à désirer qu'il porte main- tenant sa patiente attention sur nos petites espèces d'oiseaux, qui sont les plus nombreuses et les moins connues. L'attrait du nouveau et l'espoir de faire des découvertes sont des stimulants pour les chercheurs zélés. La liste que j'ai l'honneur de présenter aujourd'hui à la Société Linnéenne est un premier supplément à mon Catalogue. Est-il besoin d'ajouter que je recevrai avec la plus vive reconnaissance tous les exemplaires de Vertébrés de l'Orne, que l'on voudra bien me communiquer ? La localité et la date de la capture devront être indiquées avec précision. Les espèces litigieuses ou critiques seront toujours soumises à des spécialistes dont l'autorité sera la meilleure garantie de mes indications. — 81 —

MAMMIFERES

Plecotus aurilus L. — AC. Lupus vulgaris L. — Deux individus de la variété noire, regardée par la plupart des auteurs comme un cas de mélanisme accidentel, furent tués en 1876 près de Nécy par M. Pichon, d', qui a con- servé la peau du plus gros, dont le poids était de 40 kilogrammes. Le Verrier de La Conterie, originaire de Saint- Brice-sous-Rasne, nous dit qu'au milieu du siècle dernier, les loups fourmillaient dans les forêts d'An- daine et d'Écouves et causaient dans le voisinage des dégâts considérables. Il parle même, sans donner d'autres détails, d'une race dé loups noirs venue vers cette époque s'établir en Normandie, et qui fut détruite par M. d'Enneval, d'Argentan, « le plus grand et le plus habile chasseur de loups du Royaume » (1). Martes abietum Ray. — Cette belle espèce, déjà signalée en Écouves, se trouve aussi dans les forêts du Perche et de Bellème. Mustela lutreola L. — Le Vison observé à Saint- Germain-du-Corbéis, Fontenay-les-Louvets, toujours commun aux environs de Vimoutiers, existe éga- lement près de Chambois, sur les bords de la

(1) L'École de la chasse aux chiens courants (1763), p. 7, 258 et 263. 6 — 82 - Dive. — On le considérera bientôt comme une espèce commune. Talpa europosa L. — Un individu complètement blanc, pris aux environs de Vimoutiers, se voit dans la collection Moulin. Sciiirus vulgaris L. — M. Corbière m'écrit avoir observé la variété noire près de l'Etoile, dans la forêt d'Andaine. Myoxus quercinus L. — Le loir lérot n'est pas inconnu, comme je l'avais dit, aux environs d'Alen- çon ; il y est seulement plus rare que dans le Pays- d'Auge. Arvicola arvalis Pall. — Commun surtout dans nos grandes plaines d'Argentan, de Sées et d'Alençon; cette année encore, les Campagnols des champs ont dévasté les récoltes à Occaignes,Sentilly, Montgarout, Moulins-sur-Orne près Argentan (1).

OISEAUX

Asio otus L. — , Camembert. A. accipitrinus Pall. — Camembert. Circus rufus Briss. — Neauphe-sur-Dives. C. cyaneus L. — Aubry-le-Panthou. AG. cette année dans la plaine d'Argentan, à la poursuite des Campagnols. C. cineraceus Naum. — Plaine de Trun.

(1) Cfr. A.-L. LETACQ : Les Campagnols et les Oiseaux de proie dans la plaine d'Argentan, Journal de l'Orne, du 14 au 21 novembre 1896. — 83 — Aquila albicilla L. — Un individu de cette espèce a été tué, il y a une vingtaine d'années, dans la vallée de la Touque, aux environs de Gacé. Falco œsalon Tunst. — A plusieurs localités aux environs de Vimoutiers : Grouttes, Camembert, , . Accipiter palumbarius L. — . Buteo apivorns L. — De passage périodique dans nos grandes forêts d'Andaine et d'Écouves; bruyères de Crouttes. Cormes cinereus Briss. — TR. aux environs de Vimoutiers. Pica caudata L. — Un exemplaire de la collection Moulin présente un très curieux cas d'albinisme : les joues, le front, le vertex, les couvertures des ailes, les couvertures inférieures de la queue, le ventre, sont de couleur brune, le dos blanc varié de brun, toutes les autres parties blanches, les épaules surtout d'un blanc très pur. Picus major L. — Le Pic-Ëpeiche est AG. dans le département de l'Orne. P. minor L. — Camembert, Heugon, le Sap- André. Hirundo riparia L. — AC. aux environs de Vimou- tiers. Caprimulgus e.uropseus L. — AG. aux environs de Vimoutiers, Gacé et la Ferté-Fresnel, où on l'appelle vulgairement Fresas. Locustella nœvia Bodd. — Heugon , le Sap- André. Oriolus galbula L. — Le Loriot n'est pas égale- ment répandu sur toute la surface du département ; très rare au nord près de Laigle et de Vimoutiers, il l'est moins à Argentan et ne devient commun qu'à Alençon et au sud des collines de Normandie. Turdun merula L. — Un exemplaire de la collec- tion Moulin, capturé à Camembert, présente quelques plumes blanches à la tête et sur le dos. Carduelis spinus L. — Alençon, Garrouges, Joué- du-Bois, etc., sans doute AG. Fringilla montifringilla L. — AR. aux environs de Vimoutiers. Coccolhraustes vitlgaris Briss. — Vimoutiers, Camembert, Guerquesalles, etc., probablement AC. Loxia curvirostra L. — Se voit presque chaque année aux environs de Vimoutiers ; les exemplaires de la collection Moulin ont été tués dans des sapins près du château de . Perdix rubra L. —Plusieurs exemplaires capturés il y a quelques années près d'Anceins et de la Ferté- Fresnel. P. cirenea var. damascena Klein. — , Fresnay-le-Samson. Charadrius morineUus L. — Le Pluvier guignard se montre chaque année à son double passage dans les plaines d'Argentan, de Sées et d'Alençon ; Vimou- tiers. — Cette espèce signalée au siècle dernier par Magné de Marolles sur les monts d'Eraine près Falaise, s'y voit toujours au printemps et à l'au- tomne, et au mois de mai dernier, les élèves de l'Ecole de pharmacie de Caen , sous la direction de M. le professeur Pihier, se trouvant à herboriser sur cette colline, en ont fait lever un très grand nombre; ces oiseaux étaient si fatigués, que deux — 85 — exemplaires ont pu être capturés. (A. Chevalier, in litt. ad auct., 28 octobre 1896). Niimenim arquata L. — Le Courlis cendré se montre chaque année très abondant au mois de septembre dans les plaines de Chambois. Ardea stellaris. L. — Etangs d'. A. ardeola Briss. — Sur les bords de la Touque, à Orville. Grus cinerea Bchst. — Ticheville. Fulica atra L. — Radon, Fresnay-le-Samson. Larus ridibiindiis L. — Sur la Touque, à Canap- ville et . L. tridaclylus L. — Canapville. Sterna minor Briss. — Vimoutiers. S. major Briss. — AC. à Saint-Céneri-le-Géret et Saint-Léonard-des-Bois pendant la belle saison. Colymbus minor Briss. — Un exemplaire tué sur le Guiel, à Heugon.

REPTILES

Lacerta vivipara L. — , Tessé-la-Made- leine, Tessé-Froulay, etc., probablemunt AC. Coronella tews.Lacép. — C. dans tout le départe- ment. Coluber AZsculapii Host. — AC. surtout au midi des collines de Normandie (1).

(1) Cfr. A.-L. LETACQ : La Couleuvre d'Esculape et ses stations dans le département de l'Orne, Bulletin de la Société des Amis des Sciences naturelles de Rouen, séance du 4 novembre 1896. — 86 — C. viperinus Latr. — De nouvelles observations sont nécessaires pour être bien fixé sur la présence de cette espèce dans l'Orne. Vipera berus Dum. — TC. dans toute la région, où elle présente les trois variétés de pelage cinerea, tartarea et rubiginosa. Cette dernière appelée vul- gairement Vipère rouge, Aspic, ne doit pas être confondue avec le Vipera aspis, qui se trouve très probablement chez nous, mais doit y être assez rare. Comme c'est une espèce méridionale, on aura plus de chance de la rencontrer aux environs d'Alençon et dans le sud de l'arrondissement de Morlagne. — Les indications données sur le Vipera aspis dans mon premier travail sont inexactes.