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L'Usine du futur 2ème partie : Les fiches variables

7 Juillet 2015

Conseil économique, social et environnemental régional Rhône-Alpes

L'Usine du futur 2ème partie : Les fiches variables

Rapporteur M. Jean-Pierre CLAVERANNE Président de la section Prospective

Rapport n° 2015-11

7 Juillet 2015

Les Avis et Contributions

Le CESER en quelques mots…

Le CESER concourt à l’administration de la région aux côtés du Conseil régional et de son Président.

Il s’agit d’une assemblée consultative qui émet des avis (saisines) et contributions (autosaisines). Elle est représentative de la vie économique et sociale de la région.

Expression de la société civile dans toute sa diversité, les propositions du CESER éclairent les choix des décideurs régionaux.

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Ce rapport a donné lieu à un débat sans vote lors de l’Assemblée plénière du CESER Rhône-Alpes du 7 juillet 2015

Les Avis et Contributions

Sommaire

Pages 2EME PARTIE : LES FICHES VARIABLES 7 VARIABLES DE CONTEXTE 10 VARIABLES ACTIVITES ECONOMIQUE – RECHERCHE – INNOVATION 33 VARIABLES PROXIMITE DE L’ENTREPRISE 49 VARIABLES ENVIRONNEMENT 67 VARIABLES TERRITOIRES 93 VARIABLES FORMATION – EMPLOI 109 VARIABLES FONCTIONNEMENT DE L’USINE 131 Bibliographie générale 171

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2EME PARTIE : LES FICHES VARIABLES

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VARIABLES DE CONTEXTE

Variable n°1 – Relations internationales et géopolitique

Variable n°2 – Economie mondiale

Variable n°3 – Accès aux ressources et aux matières premières

Bibliographie

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Variable n°1 Relations internationales et géopolitique

1. Définition de la variable

On entend par « géopolitique » l’évolution des rapports de force entre les puissances mondiales (ordre/désordre, stabilité / instabilité). Longtemps considérée comme l’étude des implications politiques de la géographie, et des espaces et États par la puissance (politique, militaire, culturelle, légale…), la notion de géopolitique s’est précisée, après la seconde guerre mondiale, afin de mieux traduire la complexité de la répartition des pouvoirs institutionnels dans le monde, au profit de 4 autres approches : − les relations internationales , qui s’appuient sur le droit international − la sociologie politique , qui s’arrête sur la division intergouvernementale du monde − la géographie politique , organisation du pouvoir et des territoires, découpage social de l’espace mondial, cartographie électorale − la géostratégie , étude des intérêts des États et des acteurs politiques (alliances, conflits, intérêts…). Les questions liées à la finance internationale et à la monnaie sont partiellement intégrées à cette variable ainsi 12 qu’à celle concernant l’économie mondiale. Dans le cadre du travail de la section Prospective, la notion de « géopolitique » s’étend donc à différentes problématiques englobant aux côtés des rapports de force entre puissances mondiales et pôles régionaux en compétition , celle relevant de l’ordre des idéologies , du rôle de la culture , des religions et de la gouvernance mondiale . En effet, les idéologies concernant les courants religieux et les mouvements culturels influencent l’organisation mondiale des systèmes sociaux et politiques, dans un mouvement parallèle ou croisé avec les institutions au pouvoir. Elles sont à prendre en compte dans le contexte de mondialisation où les capacités accrues de diffusion des messages religieux, la montée en puissance de l’individualisation et le pluralisme des courants religieux changent la donne. La question de la gouvernance mondiale se situe également dans le contexte de mondialisation actuel. Face aux interdépendances à l’échelle mondiale entre les sociétés humaines, la gouvernance mondiale se définit par la construction de régulations publiques et privées à la hauteur des défis lancés par la mondialisation. Les acteurs de la gouvernance mondiale sont : − au niveau public (étatique) : ONU, FMI, Banque mondiale, OMC, Union européenne, Unions régionales… − au niveau privé (acteurs non étatiques) : associations, organisations non gouvernementales, entreprises, multinationales… La gouvernance mondiale intègre également les éléments relatifs à la construction européenne et à la place de l’Europe qui sont du point de vue de Rhône-Alpes et de ses acteurs, des éléments de contexte déterminants pour l’avenir du territoire. Dans ce cadre, l’Union européenne est condamnée à s’adapter pour préserver ses atouts et à développer sa compétitivité et sa croissance. Ce développement doit répondre à des exigences d’innovation et d’efficacité sans pour autant compromettre celles de la cohérence des politiques publiques et de la solidarité entre territoires de

1 Système financier international Le système financier désigne l’ensemble des institutions, des mécanismes et des acteurs mobilisés pour permettre la rencontre entre des agents économiques qui, au cours d’une période, dégagent une capacité d’épargne et d’autres agents qui, au cours de la même période, ont un besoin de financement. 2 Système monétaire international Le système monétaire international recouvre les dispositifs institutionnels qui définissent et encadrent, de manière plus ou moins lâche, la manière dont les taux de change se forment (i.e. les prix d’une monnaie exprimés dans une autre monnaie). On distingue, à grands traits, le régime de change fixe (ou administré) et le régime de changes flottants (le taux de change est un prix de marché résultant de la confrontation entre l’offre et la demande).

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façon à tirer vers le haut l’ensemble des Régions européennes et pas seulement préserver la compétitivité indispensable des territoires les plus dynamiques. Plus que jamais, la qualité de la gouvernance locale en Europe et du rapprochement des citoyens par le lien des Régions constitue une condition de compétitivité globale de l’Union Européenne.

2. Indicateurs permanents

Pour évaluer la place d’un pays dans l’équilibre mondial : − taux de croissance − niveau d’exportations / activité économique − industries diversifiées − nombre de multinationales − poids démographique − main d’œuvre qualifiée : répartition / coût − poids militaire − contrôle des ressources / réserves financières − contrôle technologique. Concernant la dimension culturelle : − zones d’influence linguistiques et culturelles des puissances. Concernant les aspects religieux : − nombre de fidèles chrétiens, musulmans, hindous, bouddhistes, juifs,… − montée en puissance des mouvements religieux nouveaux. Concernant la gouvernance mondiale : − ratification des conventions internationales − recours devant les institutions chargées de faire respecter les règles de droit international (ex/ Cour européenne des droits de l’homme, Cour internationale de justice…) − nombre et poids (financier, en terme de ressources humaines…) des organisations non gouvernementales. Concernant la finance internationale : − mouvements internationaux de capitaux − volatilité des taux de change et des taux d’intérêt depuis 1985. Concernant la construction européenne : − mesure de la valeur ajoutée communautaire de la politique de cohésion et de son efficience − lisibilité de l’action de l’Europe et des Régions par le citoyen.

3. Rétrospective

Les 20 dernières années correspondent à une transformation majeure de l’ordre mondial avec la fin du monde bipolaire (Occident et bloc communiste). La chute du mur de Berlin en 1989 amorce la chute de l’URSS et du bloc soviétique dans les années 1990. Jusqu’à cette période, la gestion des relations entre États relevait davantage de l’interdépendance. Dans le contexte de l’après guerre froide, une nouvelle vision de la gouvernance mondiale est apparue pour répondre aux interrogations sur la montée de la mondialisation et l’affaiblissement des États, l’intensification des préoccupations relatives à l’environnement global…

Le nouvel équilibre mondial se caractérise alors par : − la transition des pays d’Europe centrale et orientale, puis leur adhésion à l’Union européenne, − les transformations internes des « nouveaux pays industrialisés » et des « grands émergents », et la concurrence qu’ils exercent sur les marchés mondiaux, − l’entrée des services, longtemps considérés comme non-échangeables, dans le champ de la mondialisation,

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− la crise financière et économique de 2008, le montant des dettes publiques dans les pays industrialisés notamment en Europe, − l’aspiration au changement dans les pays arabes caractérisé par le « printemps arabe » (Egypte, Tunisie, Libye,…), à la fois conséquence des prix élevés des matières premières et d’une revendication démocratique. Cela se caractérise par l’ouverture d’une période d’instabilité, − un certain nombre de conflits ont également jalonné les 20 dernières années (Balkans, Tchétchénie, Afghanistan, Moyen-Orient…), illustrant l’instabilité de la zone eurasiatique, résultant, notamment, de la montée en puissance de l’islamisme et des pratiques terroristes, − l’apparition des questions écologiques dans les préoccupations géopolitiques aux côtés de celles de l’accès aux ressources qui restent toutefois dominantes.

ème La population mondiale a par ailleurs fortement augmenté au cours du 20 siècle. A l’horizon 2040, elle devrait se situer aux alentours d’un peu moins de neuf milliards, selon les projections de l’ONU. L’accroissement de la population s’opérera principalement en Asie et en Afrique. L’Asie représentant déjà 60 % de la population. Les pays de l’OCDE représenteront moins de 10 % de la population mondiale. L’Inde devrait être le pays le plus peuplé devant la Chine, l’Indonésie et le Nigéria. Le PIB mondial reste toutefois pour l’instant concentré sur la triade « Etats-Unis, Union européenne-Asie », chacun des pôles en représentant 22 %. A l’horizon 2025, le PIB de la Chine devra probablement dépasser celui des Etats-Unis après avoir dépassé en 2009 celui du Japon.

Aujourd’hui, quels enjeux ? Une Union européenne en suspens et confrontée à un regain de tensions à ses frontières : Suite à la remise en question du projet de Constitution européenne en 2005, l’Union européenne est à la recherche d’institutions pouvant répondre aux enjeux à la fois de l’élargissement (à 27 et plus), et d’un renforcement de ses compétences autour de politiques de défense, de politiques économiques et de politiques étrangères communes. Fragilisé par la crise de 2008 et la difficulté à mobiliser une réponse collective, la crise de la dette publique dans certains pays a affaibli l’Europe au plan international, le vieillissement de sa population à l’horizon 2040 est une donnée fondamentale. Par ailleurs, l’Europe est confrontée à des tensions tant à l’est avec l’Ukraine, qu’au sud avec les suites des révolutions arabes dans certains pays du nord de l’Afrique.  L’Union européenne va-t-elle pouvoir se réinventer, et acquérir un poids important dans l’équilibre mondial ? Des États-Unis hégémoniques : Les Etats-Unis sont, et de loin, la première puissance mondiale au niveau économique, mais également en terme culturel et géopolitique. Malgré la montée en puissance de plusieurs pays par ailleurs, les Etats-Unis restent encore à ce jour un modèle de développement, qui domine la grande majorité des échanges internationaux. L’économie américaine, fortement touchée par la crise de 2008, montre déjà en 2011-2012 des signes de reprise nettement plus forts qu’en Europe.  Les Etats-Unis se maintiendront-ils au premier rang des puissances mondiales ? Des pays émergents en forte croissance : Avec 3 milliards d’habitants et une croissance à 2 chiffres en moyenne, les pays dits émergents (Brésil, Russie, Inde, Chine - les « BRIC », mais aussi Mexique, Indonésie, Afrique du Sud, Turquie) présentent un potentiel de développement très important, qui tend à redéfinir les équilibres mondiaux en place. La crise a toutefois montré leur interdépendance avec les pays développés et les aspirations à la consommation, à la démocratie d’une partie de la population est source de déséquilibres politiques qui peuvent être importants. Certains sont déjà qualifiés de pays « divergents », car si le potentiel de développement est réel, le déficit structurel de gouvernance est une menace qui pèse sur ces Etats.  Les pays émergents parviendront-ils à poursuivre leur développement tout en relevant les défis technologiques et environnementaux du monde de demain ? L’influence du facteur religieux : entre apaisement et source de conflits : « La modernité a pu, et peut toujours, avoir quatre effets religieux principaux : des effets de déclin, de renouveau (adaptation, réinterprétation), de réaction conservatrice et d’innovation, selon l’époque, le pays, la classe sociale, l’individu ».

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 Les courants religieux auront-ils une influence positive ou négative sur l’organisation sociale mondiale ? Une gouvernance mondiale à réinventer : Alors qu’auparavant, il s’agissait essentiellement de réguler et de limiter le pouvoir individuel des États pour éviter les déséquilibres et la rupture du statu quo, l'enjeu de la gouvernance mondiale est maintenant de peser collectivement sur le destin du monde en instaurant un système de régulation de ces nombreuses interactions qui dépassent l’action des États. La mise en place d’un G20 dans le cadre de la crise financière et économique mondiale a été un pas important vers l’introduction des émergents dans cette gouvernance mondiale, les effets concrets de cette gouvernance restent toutefois à confirmer.  Les acteurs de la gouvernance mondiale seront-ils en mesure d’apporter une réponse organisée et concertée aux défis de la mondialisation ? Les « certitudes » majeures − le vieillissement de la population − le déplacement mondial de la production de savoir − la disponibilité des ressources naturelles (raréfaction, accès à l’eau…) − l’accélération voire l’instantanéité entre percée technologique et diffusion. Les incertitudes majeures − la stabilité au Proche-Orient et les conflits au Moyen-Orient − la démocratie et pourtour méditerranéen − le devenir du continent africain − les ruptures technologiques − les évolutions sociales dans les pays émergents − les conséquences de la crise économique : renforcement de la coopération régionale ou internationale ? retour au protectionnisme ? − la régulation du système financier internationale ? − l’adaptation aux contraintes écologiques − le rapport entre développement économique et réchauffement climatique − le mix énergétique − le positionnement européen − la monnaie et l’ endettement.

4. Hypothèses d’évolution

Hypothèse 1 - Un monde multipolaire régulé sur le plan mondial « La culture, c’est l’industrie de l’intelligence » (Haruki Murakami)

Malgré les soubresauts ininterrompus qu’a connu le monde depuis 1970, malgré la grade crise de 2008, malgré les taux de croissance de la Chine du Brésil, de l’Inde et d’autres pays émergents à la fin du 20ème siècle, les Etats-Unis sont parvenus à conserver à maintenir une place prééminente dans le concert des grandes puissances même si elle a perdu la première place dans le champ économique au profit de la Chine. L’analyse du leadership américain, pendant des décennies, a montré qu’il ne reposait pas uniquement sur le cours du dollar ou des armées engagées sur tel ou tel théâtre d’opération mais sur des phénomènes qui tenaient également par une extrémité sur l’Entertainment (musique, cinéma, séries télévisées …) et par l’autre sur l’innovation permanente en matière de nouvelles technologies. Consciente que sa participation dans le concert des grandes nations la régulation du monde participait de sa place à la fois dans la créativité et dans l’innovation, l’Europe devenue fédérale a lancé un plan d’investissement immatériel pour concurrencer les Etats-Unis sur leur propre terrain et compenser pas ces deux éléments la domination industrielle des pays asiatiques. La prise en compte de la fragilisation du monde par l’accroissement des risques (économiques, énergétiques, sanitaires, climatiques, technologiques, etc…) ont conduit les états à imaginer une régulation mondiale prenant en compte la diversité des acteurs, leur puissance, leur situation intérieure et leur évolution historique tout en admettant l’impossibilité d’une voix unique.

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Et pour la première fois de son existence, les états sous la pression de leurs populations inquiètes des dangers liés au réchauffement climatiques et aidés en cela par la puissance des moyens de communication dans la science et dans l’innovation ont compris qu’il fallait réformer l’ONU, le FMI, de la Banque mondiale sur la base de deux règles un continent une voix, la décision à la majorité simple ou renforcée obligeant les 5 continents le G5 à se doter de structures permettant de s’exprimer d’une seul voix ou de perdre toute voix au chapitre. Ainsi le G5 est considéré par tous comme un lieu d’arbitrage efficace permettant de maintenir les équilibres entre les continents.

Hypothèse 2 – Durcissement des frontières autour de quelques ensembles structurés de pays

Les puissances en place ou émergeantes de la fin du XXème siècle (USA et Chine notamment) ne parviennent pas à imposer leur domination mondiale. Le monde se structure autour de cinq ou six agglomérats structurés, sans hégémonie de l’un ou de l’autre : USA et monde anglo-saxon, Chine et satellites asiatiques, Europe de la zone Euro, Amérique du Sud, Russie et satellites de l’est européen, Afrique émergeante … Il n’y a plus d’arbitre suprême, plus de règles du jeu acceptées et comprises par tous. Les intérêts exclusifs de ces grandes zones deviennent prioritaires.

Ces agglomérats fonctionnent de plus en plus en autarcie et le commerce mondial s’en ressent : protections douanières exacerbées, circulation des hommes, des biens et des données sévèrement entravée entre ces entités économico-politiques. La coopération nord-sud diminue, au profit d’un recentrage de chaque agglomérat au profit de sa propre économie. Exception notable : le monde francophone, partie européen et partie africain, se développe et constitue une « sous-structure » importante à l’intersection de l’Union européenne et de l’agglomérat africain.

Les sources d’énergie, mal réparties sur la planète, provoquent de graves tensions internationales. Le gaz de schiste connait un âge d’or en Europe. La circulation du savoir (depuis les universités ou centres de recherche) se heurte à des frontières de plus en plus difficiles à franchir. Les structures de gouvernance mondiale s’affaiblissent : ONU, OMC notamment.

Hypothèse 3 - « Dérégulation totale dans un monde multipolaire »

Ce scénario suppose la fin des grandes réglementations internationales (OMC,…) et la présence d’un ensemble de pôles constitués de pays ou d’ensembles de pays entre lesquels la concurrence s’exerce librement. Il suppose également l’affaiblissement ou la suppression de l’ensemble des barrières douanières et un libre exercice de la concurrence entre les entreprises à l’échelle planétaire. La régulation se fait alors par le jeu de la concurrence, avec la création probable de grands monopoles ou oligopoles multinationaux qui façonnent les marchés. Le propre de ce scénario est d’être éminemment instable, la tentation, quasi inéluctable, de restauration de barrières douanières par l’un ou l’autre pôle ne pouvant qu’entraîner un durcissement généralisé par effet de réciprocité. Les inégalités entre les sociétés se creusent.

Hypothèse 4 - « L’éclosion de l’hégémonie asiatique »

L’Asie dans un ensemble à géométrie variable construit autour de la Chine, de la Corée du Sud, du Japon et des pays d’Asie du Sud-Est (ASEAN + 3) et de l’Inde s’imposent comme la première puissance mondiale. Les relations entre l’Inde et la Chine ne sont pas toujours faciles, mais l’intérêt asiatique prévaut dans un souci majeur de stabilité de la zone et du monde.. Au-delà d’une puissance économique, cet ensemble s’impose comme la puissance politique mondiale, il s’affirme comme le nouveau « gendarme du monde » et souhaite jouer pleinement ce rôle. Son poids politique dans les instances internationales : ONU, Banque mondiale, FMI s’est considérablement accru au point de devenir dominant. Les Etats-Unis se sont repliés sur leurs problématiques internes et n’ont plus ni les moyens ni la volonté de jouer ce rôle. Le poids de l’Europe, continent avec une population vieillissante, est devenu faible à

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l’échelle de la planète, en effet son incapacité à affirmer une stratégie commune a considérablement réduit sa zone d’influence. Cette éclosion de l’hégémonie asiatique s’appuie sur une politique d’influence culturelle mondiale fortement promue par la Chine. L’Asie s’impose notamment dans le champ de l’art moderne, des médias, des jeux vidéos et des fictions. L’Asie et notamment la Chine s’impose comme la puissance majeure en terme d’excellence universitaire.

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Variable n°2 Economie mondiale

1. Définition de la variable

Le commerce entre les pays a connu une croissance sans précédent dans les 30 dernières années, dans le champ des matières premières, des biens de production et intermédiaires, des biens de consommation, mais également des services. Cette explosion des échanges s’est faite dans un contexte de baisse massive des coûts de communication et des transports internationaux. L’économie de la quasi totalité des pays s’est inscrite dans un mouvement de mondialisation, de « globalisation » du travail, des capitaux, des biens et des services. Des pays très peu présents, il y a encore deux décennies dans la production mondiale, connaissent aujourd’hui des taux de croissance très élevés depuis plusieurs années et accèdent au rang de pays émergents. Ces nouveaux venus, bouleversent la hiérarchie économique mondiale remettent en question certains avantages acquis par les pays de l’OCDE, exacerbent la compétitivité, modifient les pôles mondiaux de compétence, redessinent une division internationale du travail qui évolue très rapidement sous la forme d’équilibres instables successifs et se traduit par une mise en concurrence croissante des travailleurs de tous les pays. Ces bouleversements ont entraîné des bouleversements conséquents sur le marché du travail mondial. La crise de 2008, la plus importante que l’économie mondiale ait connue depuis 1929, vient bouleverser les équilibres existants et modifier les analyses ainsi que les comportements des agents économiques publics comme privés.

2. Indicateurs permanents

- Taux de croissance du PIB. - Part dans le PIB mondial. - Part dans le PIB mondial/habitant. - Rôle des Etats dans l’économie. - Déficits et dettes publiques. - Part des capitaux étrangers dans les entreprises locales/investissements directs à l’étranger. - Evolution du marché du travail. - Coût du travail. - Niveau de productivité. - Montant des flux commerciaux entre pays/continents et part des pays dans exportations et importations mondiales. - Répartition des activités. - Poids de l’économie souterraine dans l’économie mondiale et implantation géographique / principales filières concernées. - Règles du commerce extérieur.

3. Rétrospective

Le Commerce mondial a augmenté deux fois plus vite dans les dernières années que la production. Ainsi sur les 50 dernières années alors que le PIB mondial a été multiplié par 6, le commerce international a été multiplié par 12. Le montant des investissements directs (IDE) en provenance de l’étranger représente 23,9 % du PIB mondial en 2005 contre 6,7 % en 1980. Les moteurs de la croissance changent, ainsi sur les trente dernières années, la part des économies avancées dans la croissance mondiale diminue de moitié pour atteindre 20 % aujourd’hui, tandis que celle de l’Asie représente les deux tiers des 80 % de la croissance mondiale que l’on peut attribuer aux pays émergents, par contre celle de l’Afrique stagne à 4 %. La croissance mondiale a donc été tirée par les pays émergents.

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Les secteurs qui tirent la croissance mondiale sont différents suivant les zones, activité industrielle et exportations en Asie contre consommation de services domestiques en Europe. Les facteurs de croissance varient également suivant les cycles et les zones : investissement, consommation intérieure, progrès technique, et commerce extérieur. On peut observer en arrière plan de la mondialisation, une forte régionalisation des échanges : les deux tiers du commerce extérieur français sont concentrés sur le marché européen, mais ceci est également vrai pour l’Amérique du Nord, du Sud ou de l’Asie. Les échanges mondiaux se focalisent sur 3 pôles : l’Amérique du Nord, l’Union européenne et l’Asie. Ces 3 pôles représentent 85 % des exportations mondiales. L’Asie qui ne représentait que 12,4 % en 1953 représente 27,4 % en 2005, la Chine qui ne pesait que 1,2 % en représente 7,5 %. Le développement du commerce mondial s’accompagne d’un déplacement de la production de biens et de services qui s’explique par la fragmentation du processus de production qui a pris le relai d’une spécialisation par filière ou produit. Ainsi les entreprises multinationales ont-elles maintenu les activités de production et de conception, de création et de commercialisation en Europe, au Japon et aux Etats-Unis même si elles se sont accompagnées de stratégies d’externalisation, qui les ont conduit à délocaliser la production en Chine et le service de traitement des données en Inde. Toutefois, certaines entreprises délocalisent des activités à haute valeur ajoutée comme le design ou la recherche développement en Chine ou en Inde, ainsi qu’à Taiwan. Les différences relatives en terme de coûts du travail entre les pays, les niveaux de productivité et les réglementations du marché du travail ont bouleversé la division internationale du travail. On peut considérer qu’à partir de 1990, 1,47 milliards de personnes actives provenant d’économies fermées de l’ex-union soviétique et de ses satellites, de la Chine et de l’Inde ont doublé les effectifs de la main d’œuvre mondiale et modifié en profondeur l’économie mondiale. Les principaux changements intervenus en Asie, se sont traduits au cours des 20 dernières années par une spécialisation de la Grande Chine et de l’ASEAN dans des filières intensives en travail (textile, bois, papier) ou dans les activités intensives en travail de la filière électronique. La Chine et l’Inde que l’on rapproche dans les analyses, ont suivi des voies, des stratégies de croissance différentes. En effet, la Chine s’est appuyée sur des capitaux étrangers investis à grande échelle dans le secteur manufacturier alors que l’Inde a développé son industrialisation sur des entreprises et des capitaux domestiques. Les grandes entreprises indiennes sont des entreprises de haute technologie de classe mondiale. Toutefois, les deux modèles se rapprochent : la Chine préoccupée de la compétitivité de ses entreprises au plan mondial, l’Inde devenue à son tour un pôle d’attraction des investissements étrangers qui facilitent le développement d’un secteur manufacturier. La croissance indienne a ainsi tendance à s’accélérer, moins assise qu’en Chine sur une croissance capitalistique, la productivité combinée des facteurs (travail, capital, innovation) y joue un rôle plus important. En parallèle, les groupes chinois et indiens investissent de manière massive à l’étranger , Le rapport des Nations unies élargissait la réflexion en notant que les pays dits du groupe Brics (Brésil, Fédération de Russie, Inde, Chine et Afrique du Sud) sont restés les principales sources d’investissements directs (IED) parmi les pays émergents en 2012. Les flux en provenance de ces cinq pays sont passés de 7 milliards de dollars en 2000 à 145 milliards de dollars en 2012, représentant 10 % du total mondial. Le Japon et la Corée ont renoncé à la spécialisation dans la filière textile mais détiennent des avantages dans les filières et produits suivants (véhicules, mécanique, électronique). L’Union européenne et l’ALENA (Etats-Unis, Canada, Mexique) sont faiblement spécialisés : l’Union européenne possède des atouts (Chimie, mécanique, véhicule) et les points forts de l’ALENA se situent dans l’agro- alimentaire et la mécanique. L’insertion internationale des pays d’Amérique latine, d’Afrique, ainsi que l’Australie et la Nouvelle Zélande dépend fortement de leurs ressources naturelles, ces pays partagent une spécialisation dans les filières de métaux non ferreux, de la sidérurgie, de l’agroalimentaire et de l’énergie. Il en est de même pour l’OPEP, intégrée dans le commerce mondial par ses ressources fossiles dont la demande est dopée par la croissance asiatique. Le fractionnement de la valeur ajoutée se traduit par un poids croissant des flux de marchandises inter ou intra entreprises transnationales qui représente 2/3 des échanges internationaux. Les multinationales représentent ¼ de la production mondiale Concernant les services, les pays du Nord dominent les échanges de services ils représentent 82 % dans les exportations mondiales contre 71 % pour les produits manufacturés.

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En le part de l’emploi marchand dans les multinationales atteint presque 50 % en 2012 car une part croissante des PME appartient à un groupe. Le développement économique mondial s’est accompagné d’importants mouvements de main d’œuvre , avec une immigration légale et illégale. Le nombre de travailleurs migrants n’a jamais été aussi important, on l’évalue à 87,5 millions dans le monde dont 15 % en situation irrégulière. Le chômage et la pauvreté ont de nombreux travailleurs de pays en développement à rechercher du travail ailleurs, dans les pays industrialisés, la demande de main d’œuvre et en particulier de main d’œuvre non qualifiée a augmenté. En parallèle, la mondialisation de l’économie et la mobilité du capital humain entraînent une concurrence forte pour attirer des travailleurs migrants qualifiés. Ainsi le nombre d’étudiants non nationaux inscrits dans les pays de l’OCDE a connu une croissance de 70 % entre 1998 et 2004, les admissions de migrants qualifiés ont augmenté fortement en Australie, Canada, Nouvelle-Zélande, Etats-Unis, Royaume-Uni et Suède ainsi au Royaume-Uni ils sont passés de 4 000 par an en 1991 à 40 000 en 2001. Ce phénomène touche également les pays comme la France où la proportion de diplômés parmi les expatriés notamment aux Etats-Unis a augmenté fortement. Elle est 4 fois supérieure à celle de la population active française. La modification de la structure de la consommation des ménages avec l’augmentation de la part des loisirs, de la santé, du bien être mais également l’augmentation des dépenses contraintes comme le logement ou l’énergie favorise au plan mondial les déplacements des consommateurs , d’une part avec l’augmentation du tourisme de masse, mais également l’apparition de prestations associées comme le tourisme médical ou esthétique. Ainsi le coût d’une opération en Inde est entre un cinquième et un huitième de celui pratiqué en occident. Cette évolution tendancielle a été profondément marquée par la crise de 2008 La crise économique de 2008 , appelée souvent dans le monde anglophone Grande Récession ( Great Recession , en référence à la Grande Dépression de 1929), est une récession dans laquelle sont entrés la plupart des pays industrialisés du monde suite au krach de l'automne 2008, seconde phase de la crise financière mondiale débutant en 2007. Les États-Unis ont été les premiers à entrer en récession, en décembre 2007 suivis par plusieurs pays européens au cours de l'année 2008, ainsi que la zone euro dans son ensemble. La France n'entre comptablement en récession qu'en 2009. Cette crise économique mondiale est considérée comme la pire depuis la Grande Dépression. Contribution du CESER Rhône-Alpes – La crise : quelles mutations pour l’économie en Rhône-Alpes 23 mars 2010 « Le 4 mai 2009, le Professeur J.P. Allegret, professeur des Universités et directeur du Département Ingénierie Economique et Financière de Lyon 2, faisait un exposé à la commission « économie et emploi » du CESER sur les causes de la crise financière. Il nous est apparu utile de le rappeler pour la compréhension des mécanismes qui ont conduit à cette situation :

1- Un environnement favorable à l’élévation du risque dans le cadre d’une croissance soutenue sans inflation (une augmentation du PIB des pays développés presque continue depuis 2001, avec une inflation mondiale en chute depuis 2000) caractérisé par : • Une faible incertitude et une montée vertigineuse du prix des actifs (bourses et immobilier) soit 2,5 fois pour les prix de l’immobilier depuis 1996 en France, ceci favorisant l’endettement des ménages qui, quoique plus sage en France qu’aux Etats-Unis, passe de 40 % du revenu disponible brut en 1980 à 60 % en 2007. Cela dans un contexte de rigueur salariale, où la part des salaires dans la valeur ajoutée est passée de 62,5 % en 1975 à 59,5 % en 2004. • Des politiques monétaires qui sont expansionnistes (les crédits au secteur privé grimpent vertigineusement). Ceci s’explique par des politiques monétaires actives dans les pays développés et par des déséquilibres mondiaux, les excédents apparaissant dans les pays émergents et en développement. Ainsi une profonde divergence se creuse entre les Etats-Unis et la Chine (+10 à -5), ce qui conduit à une croissance très forte des réserves de change dans les pays émergents et en développement (78 % des réserves mondiales contre 56 % en 1998. A elle seule, la Chine détient 25 % des réserves mondiales contre 9 % 10 ans plus tôt). Ceci est un facteur de la croissance de la masse monétaire mondiale qui conduit à la baisse du prix du risque sur les marchés. Pour une recherche de rendements élevés, les investisseurs augmentent la prise de risque

2- La crise financière a provoqué une crise immobilière :

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• Le prix de l’immobilier connaît une chute de près de 20 % aux Etats-Unis et au Royaume Uni, et était resté stable en France jusqu’ à mi 2008. Le stock de maisons invendues est passé de 50 000 fin 2007 à 110 000 à mi 2008. • Le taux de défaut des ménages sur les crédits hypothécaires a progressé massivement et conduit à un effondrement du marché de la titrisation et un impact sur le système bancaire avec un retour dans les bilans de crédits impossibles à titriser et des pertes en capital. Cette situation implique des besoins importants de liquidités, et à long terme la nécessité de faire face aux exigences de fonds propres règlementaires. Ceci conduit à un accroissement du coût de la ressource pour les banques dans un contexte de suspicion interbancaire.

3- L’inversion des enchaînements : de la crise financière à la crise économique qui se traduit par : • La réduction de l’appétit pour le risque. • Des pertes bancaires accrues : le FMI a estimé à 4 000 Mds$ le montant total des pertes. • Une contraction massive du crédit aux ménages et aux entreprises. • Une baisse du cours des actions et du prix de l’immobilier produisant des effets négatifs sur la richesse des ménages ce qui les incite à moins consommer. • Une contraction du commerce mondial de 5 à 6 %. • Des coûts de financement de plus en plus élevés dans un contexte de dégradation marquée des notes.

4- Les perspectives posent la question : • Des ressorts financiers et des effets liés à la mise en place du G20 soit « quel système monétaire international ? » • De la répartition des revenus et des mutations économiques liés aux conséquences de la crise rencontrée soit : « comment favoriser les activités créatrices d’emplois et génératrices de revenus importants ? » Cette crise est marquée par une forte hausse des prix du pétrole et des produits agricoles. La montée exorbitante des prix des actifs et celle associée de la demande sont considérées comme la conséquence d'une période de crédit facile, de régulations et de supervisions inadéquates ou d'inégalités croissantes. Avec la baisse des actions et des prix des maisons, de grandes banques américaines et européennes ont perdu beaucoup d'argent. En dépit des aides massives accordées par les États pour pallier les menaces de faillite et de crise bancaire systémique, il en a résulté une récession mondiale qui a conduit à un ralentissement du commerce international, à une hausse du chômage et à une baisse des prix des produits de base. En janvier 2010 , le FMI constate un produit intérieur brut mondial en recul pour 2009 de 0,8 % et une baisse du commerce mondial de 12,3 % par rapport à 2008. En 2009, les pays ont en général opté pour des politiques de relance. Début 2010, si la plupart semblent sortir de la récession, le FMI reste prudent. Le chômage persiste, d'importants déséquilibres dans les balances des transactions courantes demeurent, et des risques d'éclatement de nouvelles bulles financières sont à craindre.

Les conséquences L’entrée en récession de la majorité des pays développés s’accompagne d’un ralentissement de la croissance des pays émergents. Cette crise a également montré l'absence de découplage entre les cycles économiques et financiers des pays développés et ceux du reste de la planète. En effet le ralentissement en Europe et aux États- Unis se transmet aux autres par le biais d'importations moindres et réduction des flux d'investissements. Par ailleurs la crise économique a entraîné une baisse des cours des matières premières (pétrole etc.) qui affecte notamment l'Argentine, une partie des pays d'Afrique et la Russie. Enfin ces pays sont également directement affectés par la crise financière d'une part parce qu'ils subissent les effets du resserrement du crédit, par les problèmes que connaissent leur système bancaire et par le fait que de nombreux pays qui ne disposent pas d'une monnaie considérée comme « sûre » voient la crise financière se doubler d'une crise monétaire d'autant qu'ils ont parfois empruntés en devises étrangères. C'est notamment le cas de l'Islande (voir crise financière de 2008 en Islande) et de l'Ukraine, qui étaient fortement endettés à l'international en monnaie étrangère, ce qui les a rendu vulnérables à une dépréciation de leur propre monnaie. Les pays les plus touchés sont la Hongrie, l'Espagne, l'Irlande, l'Islande, le Luxembourg, le Royaume-Uni et la Turquie.

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Commerce international et production industrielle

Évolution du commerce mondial, 2000-2011. Base 2000=100. Le pic est atteint au printemps 2008. En mars 2009, le journal britannique Daily Telegraph rapportait que de janvier 2008 à janvier 2009, la production industrielle avait chuté de : 31 % au Japon, 26 % en Corée du Sud, 16 % en Russie, 15 % au Brésil, 14 % en Italie, 14 % en Allemagne. Quelques analystes soutiennent alors que le monde était entré dans une période de démondialisation et de protectionnisme après des années d'intégration économique croissante Les fonds souverains et les investisseurs privés du Moyen-Orient et d'Asie (y compris la Chine), achètent de façon croissante des parts de sociétés européennes ou américaines y compris dans le domaine industriel. En effet, suite à la récession, elles sont à des prix très abordables. Le gouvernement chinois s'est particulièrement intéressé au secteur des ressources naturelles partout dans le monde dans le but de sécuriser son approvisionnement en pétrole et minerais. Cette crise s’accompagne d’une destruction massive d’emplois. Pour l'Organisation mondiale du travail (OIT) au moins 20 millions d'emplois seront perdus en 2009 et le nombre de personnes au chômage dans le monde atteindra environ 200 millions de personnes. Les principaux secteurs touchés sont : le bâtiment, l'immobilier, les services financiers et le secteur automobile Selon le FMI, la dette publique des dix pays les plus riches de la planète devrait passer de 78 % en 2007 à 114 % en 2014. La crise de la dette publique dans la zone euro

La crise de la dette dans la zone euro débute en 2010 avec la crise de la dette grecque, provoquée elle par la mise en lumière d'une dette grecque colossale ainsi que d'un important et constant déficit public. Elle s'étend à l'automne 2010 avec la crise de la dette publique de l'Irlande provoquée par le sauvetage de ses banques rendu nécessaire par les excès antérieurs de la dette privée. L'enchaînement et le cumul de ces évènements contribue à entretenir et à développer un mouvement de stigmatisation des pays « à déficit », que certains vont même qualifier de « PIIGS » (Portugal, Irlande, Italie, Grèce, Espagne). En partie à la suite de la crise de la dette publique grecque une tempête boursière survient durant l'été 2011. Dans la nuit du 9 au 10 mai 2010, pour faire face à la peur des marchés et éviter que la crise grecque s'étende à l'Espagne, au Portugal voire à l'Italie, l'Union européenne en coopération avec le FMI se dote d'un fonds de stabilisation de 750 milliards d'euros. (la Commission européenne est autorisée à emprunter 60 milliards d'euros, 440 milliards apportés par les États à travers la création d'un Fonds européen de stabilité financière (FESF) et 250 milliards apportés par le FMI). Ce montant est à mettre en lien avec les besoins de financement du Portugal, de l'Espagne et de l'Irlande, qui s'élèvent à 600 milliards d'euros pour la période allant jusqu'à 2012. Le 10 mai, la BCE décide de permettre aux banques centrales de la zone d'acheter de la dette publique et de la dette privée sur les marchés secondaires Les vingt-sept ministres des Finances se sont mis d'accord le 15 mars 2011 sur une réforme du pacte de stabilité dans le but de renforcer la discipline budgétaire et d'éviter un endettement excessif : • À partir d'un ensemble d'indicateurs la Commission européenne pourra alerter sur les déséquilibres (hausse trop forte des salaires, déficit de la balance des paiements, bulle immobilière, etc.). • Les pays dont la dette est supérieure à 60 % du PIB devront à raison d'un vingtième par an du différentiel entre le montant total de la dette et le seuil des soixante pour cent. Les sanctions. Leur déclenchement, autrefois très politique et soumis au bon vouloir des États, sera plus encadré, plus automatique, de façon à accroître leur crédibilité.

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En octobre 2011, les chefs d'États et de gouvernement tentent de stabiliser la zone euro quand il devient de plus en plus évident d'une part que la dette grecque doit être diminuée et que les banques doivent être recapitalisées. Au cours du mois de septembre un bras de fer oppose le FMI qui pousse à la recapitalisation des banques d'une part, et la France qui s'y refuse d'autre part.

Un accord est trouvé et prévoit : • Un abandon par les banques privées de 50 % de la dette publique qu'elles détiennent sur la Grèce (la BCE et le FMI ne sont pas concernés). • Les banques doivent être recapitalisées pour un montant de 106 milliards d'Euros (30 milliards pour la Grèce, 26,1 milliard pour l'Espagne, 14,7 milliards pour l'Italie, 8,8 milliards pour la France et 5,1 milliards pour l'Allemagne.) La recapitalisation sera faite soit par appel à l'épargne soit par les États soit, en dernier ressort par le FESF • Le FESF n'est pas autorisé à devenir une banque mais un effet de levier va être recherché à travers deux mécanismes : « un rehaussement de crédit pour de nouvelles émissions par les Etats membres » et/ou en faisant appel de façon complémentaire à des investisseurs privés ou souverains en coopération avec le FMI

Lors d'un sommet informel le 30 janvier 2012, 25 chefs d'États et de gouvernements européen sur 27 (l'Angleterre et la république tchèque n'ont pas signé) se sont mis d'accord sur un « Traité pour la stabilité, la coordination et la gouvernance fans l'Union économique et monétaire ». Ce traité donne un droit de regard à la Cour de justice de l'Union européenne sur les règles d'or qui devraient être mises en place dans les Etats de la Zone Euro. Par ailleurs l'article 3 stipule que le déficit structurel ne devra pas dépasser 0,5 % du PIB. Au delà de ce seuil, des mécanismes de correction seront automatiquement déclenchés. Enfin lorsque les déficits dépasseront 3 % du PIB les sanctions deviendront quasi-automatiques Les pays de la Zone euro; comme le souhaitait la France se réuniront seuls au moins deux fois par an. La Pologne a obtenu que les pays européens non euro soient conviés aux réunions lorsqu'il sera question de changements touchant à l'architecture de la zone euro ou lorsqu'il sera question de compétitivité À l'occasion de cette crise, selon Pisani-Ferry la zone euro a montré des limites : surveillance budgétaire inadaptée, absence d'un mécanisme de gestion des crises, insuffisance de débats économiques. C'est dans ce contexte que le débat sur la gouvernance économique a été rouvert. Pour sortir de la crise de la dette la seule solution réside pour certains des politiques d'austérité budgétaire. Pour d’autres au contraire, les politiques d'austérité poussent à une contraction du PIB, qui aggrave les problèmes de financement. Pour eux, il faudrait « remodeler la structure des budgets comme l'ont fait les Scandinaves après la crise bancaire de 1991-1992 ». Ils proposent de: • redonner du pouvoir d'achat aux salariés en réformant la fiscalité et en supprimant les avantages fiscaux aux très hauts revenus, par une « une fiscalité du capital réformé », et par un renouveau de la taxation des héritages. • augmenter la croissance potentielle en procédant à des investissements publics et en mettant en place de meilleures incitations à destination du privé. Ces mesures devraient pouvoir être financées par une TVA mieux harmonisée au niveau européen et par l'instauration d'une taxe carbone. Une partie de la taxe pourrait subventionner les plus modestes qui seraient les plus impactés, l'autre pourrait être utilisée pour financer les investissements

Cette crise de la dette dans la zone euro intervient dans un contexte général de crise de la dette dans les pays occidentaux. C'est également une crise de confiance où se jouent les intérêts des deux premières monnaies de réserve au monde: le dollar et l'euro. Certains médias européens pointent du doigt une possible volonté des États-Unis de peser sur le cours de l'euro pour conserver la suprématie du dollar après avoir vu leur notation financière abaissée par l'agence américaine Standard & Poor's. D'autres médias mettent en évidence la responsabilité plus ancienne de la Chine du fait de sa politique consistant à sous-évaluer sa monnaie, le yuan, pour soutenir son économie au détriment des économies occidentales. Si pour le FMI, 2010 marque la fin de la grande récession mondiale avec un retour de la croissance, les prévisions sont très variables selon les zones économiques et très défavorables pour l’Europe.

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Ainsi en 2013, la croissance mondiale a été de 3 % , mais de 1,3 % dans les pays avancés, 1,9 % aux Etats-Unis mais négative – 0,4 % dans la zone euro avec des écarts importants entre l’Allemagne (0,5 %), la France (0,2 %) et l’Italie (- 1,8 %) , les pays émergents ont une croissance de 4,4 % avec 7,7 % pour la Chine et 6,5 % pour l’Asie ( hors Japon). Pour 2014, si les prévisions sont un peu plus élevées mais les grandes tendances ne sont pas bouleversées. Les enjeux futurs de la mondialisation Dans la lettre trésor-éco n° 128 de mai 2014, Arthur Sode s’interroge sur les principaux enjeux liés aux évolutions futures de la mondialisation, à travers l’offre productive d’une part et la demande d’autre part. On peut retenir quelques points majeurs :  La réduction de l’avantage coût et l’accroissement du niveau de qualification dans les grands émergents devraient modifier la spécialisation de ces économies et redessiner la cartographie des sites de production mondiaux.  Les vingt prochaines années devraient être marquées par l’accroissement de la classe moyenne mondiale, passant de 1 milliards de personnes en 2012 à 2 milliards en 2030. Sur ce milliard de personnes supplémentaires plus de 4/5 seront dans les pays émergents et 3/5 en Asie, 15 % dans les pays développés et 5 % dans les pays en développement. Relativement à la période précédente, ces évolutions constituent une forte accélération du nombre de personnes accédant à un tel niveau de vie car si le nombre a augmenté de 50 % entre 1990 et 2010 on prévoit une hausse de 141 % sur 2010- 2030. L’émergence de cette classe moyenne constitue un puissant levier de croissance pour les économies concernées mais également pour l’économie mondiale.

4. Hypothèses d’évolution

Hypothèse 1 – La poursuite d’une mondialisation effrénée avec un développement accéléré des pays émergents et un décrochage de l’Europe Dans cette hypothèse, les pays émergents se développent rapidement et plus particulièrement la Chine. Ils réussissent aussi bien en ce qui concerne l’évolution de leur système institutionnel, que l’investissement dans les infrastructures. Ils sécurisent leurs approvisionnements énergétiques et miniers. Une intensification de la mondialisation et une concurrence accrue entre les économies caractérise la période. L’Europe se replie sur quelques activités technologiques. Après avois été contrainte à l’abandon de son industrie traditionnelle massivement délocalisée, elle se recentre sur les activités domestiques et les activités non technologiques à forte valeur ajoutée telles le luxe ou les produits alimentaires. Les entreprises investissement massivement en Asie, les capitaux y sont plus importants et leur rentabilité meilleure. Des usines de taille considérable, de type ville-usine apparaissent. La financiarisation de l’économie s’y est poursuivie sous l’impulsion des gouvernements soucieux de garder cette attractivité. Les normes sont fixées par les pays où la consommation est la plus importante et les entreprises européennes sont souvent en situation de sous-traitance pour les marchés asiatiques. L’emprise de l’Europe sur le marché diminue fortement. Les Etats-Unis sont moins marginalisés car leur industrie high-tech et les biotechnologies leur assurent une position dominante, et le rôle du dollar leur permet de maintenir une position dominante. L’Afrique est scindée en deux, une partie de pays qui ont su s’insérer dans la mondialisation et une autre partie dont le niveau de vie reste très faible et pour lesquels les matières premières sont les seules ressources.

Hypothèse 2 – Une mondialisation à deux vitesses et le rebond européen. Dans un univers d’ouverture mondiale, loin de céder aux tentations consuméristes en allant vers les productions low cost, l’Europe entend retrouver son rôle d’antan vis-à-vis à la fois des pays émergents et des USA. Elle le fait sur la base de ses nombreux atouts et, en particulier, la formation initiale et continue de ses populations qui s’est renforcée par l’expérience acquise au cours des années ainsi que sa situation géographique privilégiée. Evoluant dans un climat tempéré qui lui donne la disponibilité de l’eau qui sera un élément fort dans les politiques industrielles et agricoles, elle abrite aussi des bassins de consommation forts qui sont autant de débouchés proches pour ses usines.

Conscients des dangers d’une Europe désunie, les Etats européens ont abandonnée leurs revendications centrées sur les particularismes nationaux, régionaux et locaux pour enfin constituer de véritables Etats-Unis d’Europe.

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Les industries européeenes, loin d’entrer dans les politiques systématiques du low cost que le standard de vie des salariés ne permet pas d’atteindre, répondent aux défis mondiaux grâce à leurs capacités à innover et internationaliser. L’innovation produit et service (logistique, flexibilité, proximité) déplace la concurrence du seul sujet du prix à celui de la satisfaction des besoins existants ou nouveaux des clients. La qualité des produits ou services permet à son tour d’exporter et ainsi pouvoir alimenter des unités de productions plus grandes répondant au faible coût de main d’œuvre de certaines zones par un effet d’échelle industrielle. Une main d’œuvre formée et jouissant des effets d’expériences accumulées permet ce défi malgré son coût plus élevé ; un tel coût devient aussi un atout permettant plus de consommation et d’épargne de la part de nos agents économiques. La disponibilité d’eau et de sources d’énergie (nucléaire), le fort équipement en voie de communication, une main d’œuvre formée sont autant d’atouts que bien d’autres continents nous envient.

Hypothèse 3 - Une mondialisation régulée où la montée en puissance des pays émergents se poursuit avec des conséquences que les pays développés peuvent assumer Après une période de crise internationale économique et politique entre 2015 et 2020, les pays émergents et les pays développés ont accepté le fait que leurs développements économiques étaient fortement liés, Les instances de régulation économique mondiales : OMC, Banque mondiale etc... ont été réhabilités pour réguler l’économie mondiale et le commerce mondial. L’Europe avait montré la voie en se dotant de règles fiscales et économiques communes qui lui ont permis de sortir de la crise avant les autres continents. Des principes ont été accepté par la plupart des grandes économies développées ou émergentes pour maintenir et développer le niveau du commerce mondial. Le développement des pays émergents profite à l’ensemble de l’économie mondiale, ils sont considérés comme moteurs de la croissance plutôt que concurrents, ils jouent un rôle d’entraînement sur l’ensemble de l’économie mondiale. L’apparition d’une classe moyenne dans les pays émergents et la modification de la structure de consommation des ménages crée de nouveaux débouchés pour les entreprises notamment européennes qui peuvent dans un cadre règlementaire plus sécurisant investir sans réserve dans les pays émergents. Selon les activités de grands ensembles de production cohabitent avec des petites et moyennes entreprises, permettant des productions de plus petite série. La circulation des biens, des capitaux et des personnes est régulée par le biais de règlements internationaux. Les pays refusant de s’y soumettre sont de fait écartés des échanges mondiaux et marginalisés. Peu s’y risquent sous peine d’être considérés comme les responsables d’un désordre mondial, la situation est fragile dans sa construction mais les grandes multinationales veillent à ne pas rompre l’équilibre, synonyme de prospérité.

Hypothèse 4 – Démondialisation et retour sur une économie plus locale, plus vertueuse… un changement de paradigme La troisième révolution industrielle fondée sur l’épuisement des ressources fossiles a commencé. Contrairement aux deux révolutions précédentes qui ont associé successivement à la vapeur et à l’électricité ou aux ressources fossiles des moyens de communication (train et téléphone nécessitant des ressources considérables conduisant les entreprises aux gigantismes, la troisième révolution industrielle associe aux énergies renouvelables des moyens de communication et des modes de production basés sur la coopération, l’entraide et le partage qui s’opposent aux principes de fonctionnement du siècle passé fondés sur la compétitivité, les logiques financières. et la mise en concurrence permanente des entreprises et des salariés. L’ancien modèle a vécu, un nouveau modèle émerge. La prise en compte des données environnementales dans les calculs économiques ont profondément modifié les résultats des calculs conduisant aux décisions. L’intégration des coûts de déplacement et des utilisations intensives des ressources naturelles a substantiellement modifié l’échelle relative des coûts des produits et d e leurs prix de vente. Dans ces conditions les productions locales redeviennent compétitives par rapport aux productions délocalisées supportant outre les prix de transport des sanctions fiscales en contrepartie de leur nuisance sur l’environnement. De même des politiques volontaristes en matière de lutte contre le gaspillage ont entraîné la création de nouvelles industries centrées sur l’internet de l’énergie, sur la construction d’immeubles à énergie positive, sur de nouveaux moyens de transports électriques, sur la valorisation de déchets. Ces nouvelles industries, ces nouveaux services ont non seulement relancé la croissance et l’emploi mais crée des emplois nouveaux. Cette nouvelle chaine de valeur replace les besoins humains, sociaux sociétaux au cœur de l'économie replace le travail et sa finalité au cœur d'un développement humain durable.

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Variable n°3 Accès aux ressources naturelles et aux matières premières

1. Définition de la variable On peut définir les ressources naturelle une substance, un organisme ou un objet présent dans la nature et qui fait, dans la plupart des cas, l'objet d'une utilisation pour satisfaire les besoins (énergies, alimentation, agrément, etc.) des humains, animaux ou végétaux. Elles sont utilisées et mises en valeur aux plans économique et culturel par des activités artisanales, industrielles, agricoles, touristiques, sportives et autres. Les ressources naturelles sont l'eau, l'air, la terre, le soleil, mais aussi les matières premières (métaux, minerais), les organismes vivants (micro-organismes, matières végétales, forêts, animaux) et les combustibles fossiles (charbon, pétrole, gaz naturel). Dans le thème qui nous intéresse à savoir « l’usine du futur », les matières premières ne sont pas n’importe quel segment du cycle industriel. L’accès aux ressources naturelles – exploration, exploitation et transformation – précède la fabrication. Si cet accès n’est pas garanti et subit des perturbations, l’ensemble du processus industriel est menacé. C’est un enjeu fort pour garantir la continuité du cycle économique.

2. Indicateurs permanents - Productivité matière et consommation intérieure de matières par habitant (source SOes Insee). - Evolution des émissions agrégées des six GES (source SOes - Agence européenne pour le développement). - Empreinte carbone (source SOes – d’après Citepa – Insee). - Part des énergies renouvelables dans la consommation finale d’énergie (source Soes). - Consommation d’énergie (source Soes – Insee). - Evolution des zones artificialisées (source Ministère de l’agriculture). - Production des matières premières minérales. - Production des matières premières alimentaires. - Localisation des ressources sensible et accès à ces ressources.

3. Rétrospective La consommation des ressources naturelles n’a cessé d’augmenter depuis les 20 dernières années. La quantité extraite pour produire des biens et services s’élève aujourd’hui à 60 milliards de tonnes soit 50 % de plus que dans la fin des années 70. 20 % de la population mondiale consomment plus de 80 % des ressources naturelles.

L'épuisement des ressources du fait de la surconsommation humaine concerne la biodiversité, les ressources végétales (déforestation, prélèvement végétal), l'extinction des espèces mais aussi les minerais et matières premières. • Les ressources non renouvelables : ce sont principalement des matières premières minérales et les combustibles fossiles, qui proviennent de gisements formés au cours de l'histoire géologique de la Terre et correspondant à un stock, par essence même, épuisable. • Les ressources renouvelables : ce type de ressources peut être consommé raisonnablement sans être épuisées car elles peuvent se régénérer en permanence. Pour autant, c’est davantage la qualité de ces ressources qui sera déterminante plutôt que les questions de stock. Ces ressources sont notamment l'air, l'eau, les sols (terres cultivables) ou encore des ressources biologiques de la flore et de la faune (forêts, pâturages, pêcheries maritimes, biodiversité –espèces animales et végétales) et par les ressources génétiques (variétés de plantes cultivées et races d'animaux domestiques). De 1990 à 2008, le contenu en matière de PIB, ou « intensité matières » a baissé de 22 %, traduisant un moindre besoin apparent en matières pour générer chaque euro de valeur ajoutée. Malgré cela, la consommation de matières (14 tonnes par habitant) n’a pas diminué en raison de l’augmentation de la production. En 2009, la chute de la consommation intérieure de matières (- 11 %), plus marquée que celle de la production (- 4 %), a

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accentué la diminution de l’intensité matières. Les matériaux de construction ont joué un rôle prépondérant dans cette baisse (source Ministère de l'écologie). Parallèlement les marchés mondiaux des matières premières ont profondément évolué depuis dix ans. Les relations entre producteurs et consommateurs se sont transformés en trio avec l’apparition d’acteurs financiers et l’intrusion d’investisseurs qui gèrent « 60 fois plus de valeurs matières premières » qu’il y a dix ans. Ceci se caractérise par deux effets, une tendance à la hausse mais également une volatilité accrue. Depuis le début du siècle les variations des cours sont plus amples que par le passé. Cela a des conséquences fortes sur certains secteurs. L’ère 2000-2010 est appelée « l’ère exponentielle » pour les matières premières, une ère qui est celle de l’explosion des matières premières

Le tableau ci-dessous recense quelques taux de croissance annuels moyens des indicateurs mondiaux de prix de familles de matières premières : Taux de croissance annuels moyens de certaines familles Métaux et Matériaux de Période Énergie Fertilisants Aliments Bois minéraux base 1960- 2,9% -0,7% 2,5% 2,4% -2,7% 1,3% 1972 1960- 8,1% 4,2% 3,2% 4,7% 3,1% 3,7% 2010 1973- 8,4% 2,3% -0,4% 1,6% 1,9% 3,7% 2000 2000- 10,5% 10,8% 8,4% 13,3% 9,0% 3,7% 2010 Remarquons toutefois que, des productions industrielles telles les voitures électriques, les panneaux solaires ou les éoliennes permettent de réduire notre dépendance vis-à-vis du charbon, de l’uranium, du pétrole ou du gaz. De nouvelles dépendances vis-à-vis du lithium, de l’indium, du gallium peuvent apparaître. En matière de production industrielle, on distingue la matière critique, c'est-à-dire une ressource pour laquelle les risques industriels liés à un déficit de l’offre sont élevés et pour laquelle il n’y a pas de substitution possible. Mais le caractère critique ne doit pas être figé, il évolue selon les industries, les procédés. Les matières premières stratégiques sont des matières indispensables aux stratégies de développement d’un Etat ou d’une entreprise. En Asie, les enjeux sont centralisés et les entreprises sont très actives pour identifier les zones à risque et remonter en amont des chaînes de valeur. En Europe, l’habitude est plutôt de faire confiance aux marchés et à leurs intermédiaires, à savoir les banques. Mais ce modèle est en train d’évoluer et les acteurs ont défini les matières critiques dans leur secteur et nouent des alliances.

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L’Allemagne par exemple consciente de sa dépendance en matériaux critiques a créé en 2013 une junior minière exploratrice qui a pour but de découvrir et réserver de futurs gisements de terres rares, tungstène et charbon coke. Va-t-elle se heurter ou non au nationalisme des pays prospectés ? Pour d’autres ressources, les conflits d’usage entre un usage industriel, même si aujourd’hui certains équipements industriels sont extrêmement économes en eau et en énergie, et un usage domestique peuvent être sources de difficultés majeures.

4. Hypothèses d’évolution

Hypothèse 1 – Des tensions fortes, des risques d’instabilité La liberté des échanges, le décollage des pays du sud, des conditions géopolitiques instables et des restructurations économiques nombreuses et rapides entretiennent la croissance économique mondiale laquelle atteint 2,1 % par an entre 2020 et 2040 et l’efficacité énergétique ne s’améliore que de 0,8 % par an. Le recours aux combustibles fossiles est important et durable, ce qui implique une stabilisation du charbon dans les sources d’énergie primaire utilisées. L’augmentation des émissions de carbone modérées dans un premier temps s’accélère à partir de 2020. A partir de cette date il apparaît de graves tensions liées à l’épuisement des ressources en combustible fossile, à la charge financière de la mise en valeur des nouvelles sources d’énergie et aux conséquences de la détérioration considérable de l’environnement. Malgré la prédominance des énergies fossiles, le développement des ressources en énergie renouvelable commencent à remodeler le paysage. La production de celles ci est plus décentralisée ce qui entraine un développement des échanges régionaux au détriment des échanges mondiaux, et une modification des blocs. En ce qui concerne la demande de matières premières, il existe une instabilité profonde des marchés qui seront chahutés au quotidien par les échanges électroniques fonctionnant sur la planète, malgré les politiques de substitution qui vont se développer. En l’absence de régulation internationale et de véritables instances d’arbitrage, les marchés dérivés restent à la merci d’un risque systémique que provoquerait de la défaillance d’un acteur majeur. Dans ce paysage, l’Asie sécurise ses approvisionnements, les Etats-Unis développent une indépendance énergétique par le gaz et le pétrole de schiste. L’Europe divisée ne s’organise pas sur ces thèmes même si quelques pays l’exploitent, le refus d’exploitation coordonné des gaz de schiste accentue le coût de l’énergie qui pénalise l’industrie européenne. L’accès à la terre cultivable est également un facteur de concurrence et d’instabilité entre les pays.

Hypothèse 2 – L’Europe s’organise L’Asie et les pays émergents continuent d’augmenter leur consommation, la Chine notamment mène une politique d’autosuffisance énergétique. Les Etats–Unis ont réussi grâce au gaz de schiste et au pétrole de schiste à garantir leur indépendance également. En termes de matières critiques, l’Asie a sécurisé ses approvisionnements et capte la majorité des approvisionnements mondiaux. L’Europe après une période d’attentisme collectif, organise son autonomie. En matière énergétique, le recours aux gaz de schiste et au pétrole de roche a été accepté par la majorité des pays, dans des conditions d’exploitation contrôlée de s’appuyer sur cette ressource. Concernant les matières critiques, l’Europe a lancé un vaste programme de recherche visant à réduire les consommations dans les process et à chercher des matières de synthèse en substitution d’usage qui commencent à arriver sur le marché. De grands secteurs économiques mettent en œuvre les principes de l’économie circulaire. Cette stratégie repositionne l’industrie européenne sur la scène mondiale par des éléments de compétitivité renouvelés.

Hypothèse 3 – « Chacun chez soi » La poursuite de la mondialisation (la globalisation) a effrayé l’Europe (si elle a perduré en tant que puissance mondiale…), mais surtout, la plupart des pays européens qui, progressivement, se sont renfermés sur eux- mêmes. Les « barrières » douanières sont de nouveau apparues. Pour les ressources pondéreuses à vocation énergétique, elles pâtissent des coûts de transport devenus prohibitifs ; pour les ressources « critiques », les pays producteurs ont spéculé en profitant de la forte demande des pays très consommateurs.

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En Europe, la tendance est à la décroissance de façon à limiter les besoins en ressources et plus globalement au repli. Cette tendance ne favorise pas les échanges en matière de recherche développement. Les acteurs industriels ne profitent donc pas des avancées réalisées dans d’autres pays, les activités se rétractent et la croissance diminue. Au final, une pénurie des ressources survient et la seule solution viable viendra d’une réouverture des frontières tant au niveau des ressources que des idées…

Hypothèse 4 – Une exploration relancée et régulée mondialement La problématique de sécurisation des ressources devient une préoccupation partagée mondialement. Si cette façon de voir est vraie de longue date au niveau des ressources fossiles à vocation énergétique (charbon, gaz, pétrole) cela devient aussi le cas pour les métaux de base (fer, chrome, manganèse et aluminium, cuivre, zinc, étain) et les métaux high tech (lithium, cobalt, titane, terres rares …). La prospection longtemps confiée aux opérateurs privés a été délaissée. A l’instar de la Chine, l’Europe reprend en main cette activité qui a été à l’origine de sa création (la CECA). Elle entraine dans son sillage les autres grands acteurs économiques qui acceptent d’investir dans un vaste programme de recherche et développement et de recensement à l’échelle planétaire. Les experts s’accordent pour dire que la pénurie de ressources n’est pas pour demain et ces programmes d’état vont prouver que de nombreux gisements sont disponibles. Un mécanisme de rémunération équitable des pays concernés détenteurs des ressources est mis au point par l’OMC. Les opérateurs privés gardent une place déterminante dans l’exploitation des gisements détectés et dans la mise en œuvre de technologies innovantes en particulier en off-shore, les fonds sous-marins se révélant riches en réserves de ressources à haute valeur. Pour ce qui concerne les métaux cette stratégie associée à des actions de recyclages de plus en plus performantes assure que les limites physiques de ces ressources ne seront une contrainte pour le développement industriel dans les décennies à venir.

Sources : www.ocde.org/ www.agreste.agriculture.gouv.fr/ www.stats.environnement.developpement-durable.gouv.fr/ www.insee.fr www.fao.org/index_fr.htm

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Bibliographie

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VARIABLES ACTIVITES ECONOMIQUE – RECHERCHE – INNOVATION

Variable n° 4 – Image, attractivité, rayonnement

Variable n°5 – Recherche, innovation, progrès scientifique et acceptation sociale

Variable n°6 – Evolution du tissu économique

Bibliographie

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Variable n° 4 Image, attractivité, rayonnement

1. Définition de la variable

L’attractivité, l’image et le rayonnement d’un territoire se mesurent à la manière dont le territoire est perçu à l’extérieur mais également à l’intérieur. Différents facteurs, outre l’attractivité économique, entrent en jeu ; ils varient selon les cibles potentielles de cette attractivité .

2. Indicateurs permanents

- Sondage d’attractivité de la région - Positionnement dans les classements / région / villes et métropoles - Perception de Rhône-Alpes par les investisseurs - Communication sur les éléments d’attractivité - Nature des actifs du territoire - Accessibilité et réseaux - Système de gouvernance, accueil et offre de services - Accueil et qualité de vie - Animation et vie culturelle - Identité et image du territoire - Flux des investissements directs étrangers - Prix de l’immobilier.

3. Rétrospective Rhône-Alpes, région la plus attractive aux yeux des jeunes actifs Quelles sont les régions préférées des jeunes diplômés et des jeunes cadres ? Une étude de l'APEC permet de dresser un palmarès des régions les plus attractives. Une bonne qualité de vie . Interrogés sur les atouts régionaux quant à la qualité de la vie, jeunes diplômés et jeunes cadres mettent en avant des infrastructures de transport bien développées permettant d’avoir un temps de trajet domicile/travail court, un cadre de vie préservé, le climat et l’offre de loisirs. Les jeunes cadres sont un peu plus sensibles à la douceur du climat et à la présence de la nature, alors que les jeunes diplômés insistent davantage sur l’importance de l’offre de loisirs. Les atouts du point de vue du dynamisme économique . C’est l’existence d’un tissu économique dense et diversifié qui apparait, de loin, la réponse la plus fréquente. Viennent ensuite la présence de sièges sociaux, le développement des infrastructures de transport et des niveaux de rémunération attrayants. Seule différence notable entre les appréciations des jeunes cadres et des jeunes diplômés, ces derniers considèrent plus fréquemment un faible taux de chômage comme un élément important. Top 3 de l’attractivité des régions françaises 1. Rhône-Alpes 2. PACA 3. Ex Aequo : Midi-Pyrénées et Aquitaine

Rhône-Alpes est-elle une région attractive pour les investissements ? Chiffres 2013 Un total de 81 investissements internationaux en 2013 en Rhône-Alpes.

Selon les données collectées par le Conseil régional Rhône-Alpes, un total de 81 investissements internationaux ont eu pour cadre la région Rhône-Alpes, créant 4 186 emplois d’ici trois ans, soit près de 300 emplois de plus qu’en 2012.

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Cela porte à 4 600 établissements et à 215 000 emplois le nombre total d’entreprises a  capitaux étrangers dans la région Rhône-Alpes. L'année dernière, les principaux investisseurs en Rhône-Alpes ont été l'Allemagne, l'Italie, les Etats-Unis et le Japon qui ont généré 57 % des emplois créés dans la région. A noter que 67 % de ces nouvelles implantations ont été détectés et initiés par ERAI (Entreprise Rhône-Alpes International), le bras armé à l'international de la Région. Parmi les nouveaux arrivants dans la région, l'année dernière, on peut citer : les implantations de Schütz GmbH & Co. KGaA (Allemagne), Software Cradle Co, Ltd (Japon), Greenlane Biogas Holdings Limited (Nouvelle- Ze lande), Grupo Pascoal (Portugal), KWB GmbH Biomasseheizungen (Autriche), Salesforce.com (Etats-Unis), Group-Ips NV (Belgique), Terravent Ag (Suisse), Operation Technology, Inc. (E tats- Unis), Reflex Winkelmann Gmbh (Allemagne), Medspace, Inc (E tats-Unis), etc. On peut ajouter les développements de Fiat S.P.A. (Italie), d'Ebro Foods (Espagne), de NTN Corporation (Japon), de Charles river Laboratories Internationak Inc. (Etats-Unis), de Schmolz + Bickenbach KG (Allemagne), d'International Holding EVS (Luxembourg), etc. ème ème Pour la 10 année consécutive, Rhône-Alpes se classe au 2 rang national des régions les plus attractives pour les investissements directs étrangers selon le bilan de l’Agence Française pour les Investissements Internationaux (AFII) publié hier. Dans un contexte de crise économique mondiale, Rhône-Alpes affiche des résultats honorables en attirant 17% des projets d’investissements internationaux en France et 15 % des emplois qui y sont associés. Près du quart des projets dans des secteurs industriels à forte valeur ajoutée sont accueillis en Rhône-Alpes. Les 118 projets confirmés en 2012 et les près de 4 000 emplois programmés à 3 ans attestent du dynamisme et de l’attrait de Rhône-Alpes qui recense 4 600 établissements et 215 000 emplois relevant d’entreprises à capitaux étrangers. Depuis 2004, les investisseurs internationaux ont permis de créer 32 500 emplois à travers plus de 900 projets d’entreprises. En 2012, les principaux investisseurs sont les Etats-Unis, la Suisse, l’Allemagne, le Canada, le Japon et l’Italie ; ils comptent pour 75 % des emplois créés. Entreprise Rhône-Alpes International (ERAI), l’opérateur de développement économique de la Région Rhône- Alpes à l’international, contribue activement à ce dynamisme. 45 % des implantations étrangères réussies sont identifiées et initiées par ERAI et concrétisées en collaboration étroite avec les partenaires économiques des départements et des agglomérations. Dans un contexte très concurrentiel, les acteurs et experts internationaux portent un intérêt croissant au potentiel de Rhône-Alpes. Celui-ci repose sur de nombreux atouts : des pôles de compétitivité et des clusters tournés vers l’international, une structuration avancée des filières, une forte capacité de recherche et d’innovation, une population jeune, un vivier de compétences et de formations, la qualité des infrastructures et le dynamisme du marché rhônalpin. La région accuse toutefois une faiblesse relative concernant le nombre de centres de décision présents sur le territoire. En effet, la concentration de sièges en région parisienne reste prédominante. Elle possède toutefois une tradition de savoir-faire industriels et de qualification des salariés sur ces métiers. Par ailleurs, elle dispose d’une offre culturelle et de grands équipements très attractifs pour attirer des cadres de haut niveau. Par ailleurs, l’offre importante en matière d’enseignement supérieur est également un facteur d’attractivité très fort pour les familles. Des coopérations internationales qui favorisent le rayonnement de Rhône-Alpes à l’étranger. Dans les 20 dernières années, Rhône-Alpes s’est impliqué dans de nombreuses coopérations internationales (4 Moteurs, Shanghai, …).

4. Hypothèses d’évolution

Hypothèse 1 - Une attractivité correcte sur tous les secteurs, mais pas de secteur rayonnant La région Rhône-Alpes reste une région attractive par la diversité de ses activités, le niveau de formation des salariés et l'attractivité de sa géographie et son dynamisme culturel. Elle reste dans la moyenne haute européenne mais ne parvient toutefois pas à rivaliser avec des régions dont le pouvoir d'attractivité économique

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est soutenu par des secteurs leaders à l'échelle européenne et mondiale. Cet élément fragilise sa position vis à vis des investisseurs comme des jeunes cadres. L'absence de secteur rayonnant rend plus complexe la communication et la valorisation régionale. Cette diversité présentée comme un atout permet de maintenir un niveau d'attractivité élevée mais l'absence de secteur leader lui fait perdre des points dans les classements européens.

Hypothèse 2 - Une attractivité fortement tirée par certains secteurs La région a su, en s'appuyant sur ses pôles de compétitivité mondiaux (Axelera, Biopôle, Minalogic...), s'imposer comme une région leader dans certains secteurs. Cette réussite lui permet d'attirer des investisseurs et de jeunes talents. Cette dynamique forte sur certains secteurs est positive pour l'image de la région, malgré des secteurs dont l'activité reste stable et d'autres dont l'activité est en diminution. L'activité de certains secteurs, tels l’aéronautique, est également mieux valorisée. L'activité industrielle de la région reste un facteur d'attractivité fort qui permet de maintenir un tissu de sous-traitants de rang 1 et 2 dans les activités traditionnelles de la région. Cette attractivité est renforcée par une offre culturelle, un réseau d'enseignement supérieur et de recherche qui accompagnent l'attractivité de la région.

Hypothèse 3 - La désindustrialisation se poursuit La région connaît une poursuite de la désindustrialisation. Le poids de l'industrie dans la valeur ajoutée et l'emploi régional continue de se réduire. La tentative de combler cette désindustrialisation par le développement de services s'avère difficile. L'attractivité de la région s'en ressent à la fois auprès des investisseurs que des jeunes talents. En terme industriel, la région conserve une activité de sous-traitance compte tenu de son savoir- faire industriel mais dans un contexte de dépendance absolue vis-à-vis de donneurs d'ordre. Cette dynamique favorise peu le maintien d'une offre culturelle attractive. Les conséquences de la désindustrialisation sont également d'ordre social. Cela se traduit également par une insécurité croissante sur certains territoires, qui joue négativement sur l'attractivité du territoire et traduit une dégradation de la qualité de vie.

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Variable n°5 Recherche, innovation, progrès scientifique et acceptation sociale

1. Définition de la variable • La recherche recouvre les activités intellectuelles ayant pour objet la production et la progression des connaissances . Une distinction est souvent opérée entre la recherche fondamentale, placée au sens strict au service de la production de nouveaux savoirs et la recherche appliquée, où les connaissances produites visent une application, dans l’industrie ou dans la santé par exemple. • Les activités de recherche sont conduites au sein d’organisations dédiées, publiques ou privées, sur la base de champs disciplinaires relevant des sciences « dures » (mathématiques, sciences physiques, biologie, chimie…) ou « molles » (sciences humaines et sociales). • L’innovation désigne le processus par lequel on cherche à apporter une réponse nouvelle à un 3 besoin formulé de manière plus ou moins explicite . Selon Schumpeter, on distingue habituellement les innovations de produits et les innovations de process ou de procédés. Alors que l’invention est un savoir, un produit ou un procédé nouveau, l’innovation est indissociable de ses applications et se place dans le champ 4 de l’économie, de l’usage. Elle offre un avantage concurrentiel . • Le progrès scientifique désigne l'accumulation des connaissances produites par la recherche (fondamentale et appliquée) , dès lors que cette accumulation sert le développement humain dans son ensemble (nouvelles applications, amélioration des conditions de vie, de travail, de santé…). Au cours des dernières décennies, les sciences et technologies ont connu des avancées très significatives, notamment au croisement des corpus académiques constitués (sciences de la vie, sciences de la terre, sciences de la matière…). Toutefois, le lien entre recherche et progrès scientifique est aujourd’hui davantage distendu. Dans l’ensemble, le progrès scientifique et technologique ne suscite en effet plus le même enthousiasme ni la même confiance en l’avenir. Les nouvelles technologies apportent des solutions mais posent de nouvelles questions, justifiant le garde-fou du principe de précaution et d’un environnement juridique plus resserré. Cependant, dans un cadre mondialisé où les législations restent pour l’essentiel nationales, certains pays peuvent s’engager dans des recherches prohibées dans d’autres et prendre ainsi une avance décisive. • Le paradigme de l’apport bénéfique de la science a été remis en question à plusieurs reprises au cours du ème 20 siècle. Ce n’est pas tant la science en tant que telle qui est aujourd’hui questionnée, que ses résultats et ce qu’on est susceptible d’en faire. • Le citoyen s’interroge sur certains choix technologiques et de recherche, sur les avancées réelles de la science à son bénéfice (attentes pour partie déçues en matière de recherche médicale au regard des efforts déployés par exemple). La prise en compte de l’acceptabilité sociale des sciences et technologies est aujourd’hui une question centrale. Comme l’innovation, la recherche se place de fait dans le champ de l’usage et tend à n’exister qu’en relation avec ses utilisateurs, alors qu’elle en était en partie déconnectée en ce qui concerne la recherche fondamentale. L’acceptabilité sociale suppose de tenir compte des attitudes et des contraintes sociales et normatives conduisant le corps social à recourir effectivement à l’utilisation d’une technologie donnée ou à en tirer bénéfice. L’organisation de la recherche en Rhône-Alpes ne présente pas de caractéristiques institutionnelles spécifiques. La recherche est conduite dans des laboratoires publics du CNRS, de l’INSERM, du CEA, des Unités mixtes de recherche (UMR) dans les Universités, dans des laboratoires communs CNRS ou CEA/Entreprises ou dans des entreprises et organismes privés. La spécificité rhônalpine tient en revanche au poids de la recherche dans l’économie régionale : ème - 2 région de recherche après l’Ile-de-France en termes d’intensité de R&D ; - région équilibrée entre recherche fondamentale et appliquée ; - 13 pôles de compétitivité ;

3 D’après M Sarrazin, recteur de l’académie de Grenoble, La science : un enjeu sociétal, Les actes, CESR Rhône-Alpes, septembre 2007 4 Source : Rhône-Alpes 21

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- 2 pôles universitaires (Grenoble et Lyon) retenus dans le cadre de l’opération Campus.

Résultats Résultats Résultats Produisants IUF Docteurs ERC CNRS IA IA IA AA+ nominations 2010 nominations Médailles Idex Labex Equipex et 2009-2013 2007-2013 Or et autres Argent projets de 2001-2013 recherche PALSE 34 69 6303 123 1140 75 40

Au classement général de Shanghai de 2013 figurent l’université Grenoble I (101-150ème rang mondial) et l’université de Lyon I (201-300ème rang mondial). Au classement thématique, Grenoble I est classée en Maths et sciences de la terre (76-100ème), en Ingénierie et informatique (151-200ème) et en Sciences du vivant et agronomie (151-200ème). Lyon I est classée en Maths et sciences de la terre (151-200ème), en Ingénierie et informatique (151-200ème). Au classement par discipline, l’université de Lyon est classée en Mathématiques (151-200ème), en Physique (151-200ème) et en Chimie (151-200ème). L’université de Grenoble I est classée en Physique (101-150ème), en Chimie (151-200ème). L’École Normale Supérieure de Lyon est classée 201-300ème au classement général et en Mathématiques (101-151ème). 12,6% de la production scientifique française (2èmerang national) en 2010 (source OST), 122 projets lauréats dans le cadre du programme «investissements d’avenir»: 34 Labex, 12 Initiatives d’excellence en formations innovantes, 28 Équipex, 2 IHU prometteurs, 4 projets en bioinformatique, 7 en Biotechnologies/Bioressources, 1 démonstrateur, 4 cohortes, 10 infrastructures, 4 projets en nanobiotechnologies, 4 carnot «PME-PMI» et «International», 2 IRT, 3ITE, 3 plateformes mutualisées d’innovation, 1 action espace, 1Programme Avenir Lyon Saint-Etienne et 2 SATT. 68 projets sont portés par un établissement rhônalpin. Source MENESR -SIES (sauf indication spécifique)

Riche d’un passé scientifique et industriel de premier plan, Rhône-Alpes participe de longue date à la production de connaissances et de savoirs scientifiques, en lien avec les spécificités géographiques du territoire. Du fait de la présence d’un potentiel scientifique et technologique particulièrement développé, la région est de fait placée au cœur des interrogations sur le progrès scientifique au service du développement humain et de ses interactions avec l’environnement. Cette variable vise notamment à s’interroger sur la manière dont Rhône-Alpes s’est appuyé sur son environnement montagnard pour contribuer au progrès scientifique, notamment par un système intégrant ressources énergétiques, centres de recherche, établissements d’enseignement supérieur et industries et à la manière dont cet écosystème a évolué. Il s’agit en particulier d’examiner les lieux où le progrès scientifique est susceptible de se réaliser et au positionnement de Rhône-Alpes en la matière, notamment pour répondre aux fortes attentes à venir : changement climatique, devenir énergétique, déplacements… Particulièrement tournée vers la recherche « nano, micro, bio », et bénéficiant parallèlement d’un cadre naturel exceptionnel, la région Rhône-Alpes est de fait directement concernée par la manière dont le corps social peut s’approprier, rejeter, ou éventuellement être indifférent à la recherche scientifique et technologique menée dans ses territoires. Par l’impulsion qu’elle donne aux actions orientées vers la formation ainsi que la culture scientifique, la Région est un moteur puissant pour contribuer à l’appropriation, par le plus grand nombre, d’une culture territoriale de la science et de la technologie .

2. Indicateurs permanents

- Dépenses de R&D publiques et privées - Part du PIB régional consacré à la recherche - Nombre de chercheurs et d’enseignants-chercheurs - Nombre de thèses de doctorat soutenues - Production technologique mesurée par les brevets

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- Production scientifique mesurée par les publications - Diversité des champs de recherche, culture de l’interdisciplinarité - Environnement juridique de la recherche, limitations des droits d’intervention de l’homme sur la nature, le vivant… - Pratiques culturelles scientifiques, place de la science dans le débat public - Poids des mouvements citoyens.

3. Rétrospective

La région Rhône-Alpes est considérée de longue date comme un lieu de recherche et d’innovation référent, particulièrement dans le domaine des biotechnologies appliquées à la santé, de la chimie-environnement (Lyon), des nanotechnologies, de la microélectronique, du nucléaire et de l’informatique (Grenoble). Grenoble occupe une place particulière dans ce paysage : le « triptyque grenoblois », fondé sur la recherche, l’industrie et l’université, a marqué de son empreinte la vie de l’agglomération. Les interactions entre enseignement, recherche et applications sont particulièrement fortes au sein du pôle 5 scientifique grenoblois . Le polygone scientifique fait figure de pionnier des clusters et pôles de compétitivité, comme « espaces collaboratifs » en faveur de la recherche fondamentale et de la recherche technologique, de l’innovation et d’un enseignement en prise avec les axes de recherche et de développement industriels locaux. Bâti autour du LETI (laboratoire de recherche), puis de Minatec (centre d’excellence), de Minalogic (pôle de 6 compétitivité) et bientôt de GIANT (MIT « à la française »), le pôle affiche l’ambition de devenir un véritable 7 « écosystème d’innovation endogène » (J. Therme). Bannière unique visible et lisible au plan international, le projet GIANT, qui associe universités et grandes écoles, organismes nationaux de recherche et grands 8 9 instruments (ESRF , ILL ) s’installe au moment même où l’espace européen de la recherche se met progressivement en place et nécessite une taille critique importante pour continuer à exister au plan européen et international. Sur le site lyonnais, l’« Université de Lyon » rassemble un nombre important d’établissements, avec des profils très divers et une implantation au-delà du périmètre du Grand Lyon. Le PRES, puis la COMUE ont donc eu dès l’origine une vocation fédératrice. Ils ont joué un rôle important dans la coordination et la sélection des projets « investissements d’avenir », dont les sites rhônalpins ont su tirer parti, en particulier pour les EQUIPEX et les LABEX. Dans ce cadre, la COMUE s’est engagé dans une démarche probatoire intitulé PALSE (Programme Avenir Lyon Saint –Etienne), en lien avec l’Etat et l’ANR, afin de bénéficier d’une labellisation IDEX à l’horizon 2016. Le PALSE s’articule autour de deux thématiques principales : « santé globale et société » et « science et ingénierie du développement durable ». Il bénéficie d’un financement de 27 millions d’euros sur trois ans. Plusieurs chantiers ont été lancés :  pour la recherche : soutien à des projets émergents, inter-disciplinaires, et multi-établissements  pour la formation : internationalisation des masters et revalorisation du doctorat auprès es acteurs économiques, création de filières répondant aux besoins des industriels des biotechnologies et des énergies décarbonnées  pour l’international : création d’un réseau baptisé « alliance internationale » avec une dizaine d’établissements  création de packages d’accueil pour améliorer l’attractivité du site et recruter des chercheurs français et étrangers de très haut niveau  mise en place d’une « agence campus » pour accueillir les étudiants et chercheurs étrangers dans les meilleures conditions. De nombreuses enquêtes montrent que la population européenne n’éprouve pas de défiance particulière à l’égard de la science. Les Européens ont, dans l’ensemble, une confiance très robuste dans les valeurs

5 Forgé à la fin du XIXème siècle par l’action de chercheurs par des scientifiques, parfois jouant sur leur choix de rester à l'écart de la capitale, le pôle scientifique s’est constitué autour de structures de recherche, sachant jongler entre les diverses sources de financement : l'État, les pouvoirs locaux et l'industrie locale. Des hommes de premier plan, Louis Néel, René Fortrat ou Louis Weil ont su convaincre des collègues ou des organismes d'État, comme le CEA, d'installer des centres de recherche à Grenoble, avant qu’une politique de recherche nationale soit mise en œuvre. 6 Grenoble Isère Alpes Nano Technologie 7 Un écosystème peut, à grands traits, être défini comme un système intégré entre recherche, industrie et formations relevant de l’enseignement supérieur. Christian Blanc, Pour un écosystème de la croissance, rapport au premier ministre, 2004. 8 European Synchrotron Radiation Facility 9 Institut Laue-Langevin

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incarnées par les sciences et technologies, plus au Sud qu’au Nord de l’Europe, la France étant située dans une position médiane. Si cette « question de confiance » est souvent posée aux citoyens, c’est sans doute qu’elle est complexe et/ou que la réponse n’est sans doute pas unique et stabilisée. Les citoyens affichent en effet une position très ambivalente sur la science et sa perception : l’intérêt pour le fait scientifique croît (les gens s’informent davantage) mais il y a aussi un flou dans sa perception ainsi qu’un manque de culture et d’appropriation sur les avancées « nano et bio », bien plus difficiles à appréhender et à visualiser qu’un pas d’être humain sur la lune… 10 Si la science intéresse et intrigue, elle inquiète aussi. Dans une étude prospective récente, l’INRA constate une perte de confiance à l’égard de la science et une méfiance croissante à l’égard de ses applications. Le rapport de l’OCDE en 1979 « la technologie contestée » illustre les fissures du modèle de développement et de croissance porté par le chercheur/ingénieur (programme spatial, programme de construction de centrales nucléaires, programme supersonique…). Ces premières fissures sont perceptibles en 1968 dans la remise en cause, à la fois d’un modèle social, mais aussi d’un modèle de croissance qui serait sous-tendu par la science et la technologie. Elles se creusent dans les années 70 (en particulier dans le domaine du nucléaire civil). Au début des années 80, la dépense nationale en recherche et développement augmente de manière décisive. Le nouveau gouvernement entend donner une nouvelle impulsion à la recherche scientifique. Les biotechnologies prennent le relais du nucléaire civil comme têtes de pont de la modernité et du progrès scientifique au service de l’homme. Les applications en matière médicale (révolution du diagnostic, des thérapies), de lutte contre la pollution (procédés de méthanisation, de fermentation), d’agriculture sont nombreuses et les espoirs à la hauteur de ces nombreuses applications.

Ces attentes sont en partie déçues dans les années 1990-2000. Des crises sanitaires récurrentes (ESB- encéphalopathie spongiforme bovine…) brouillent l’image de la science, des gestionnaires de la recherche (scandale de l’ARC) et des politiques (sang contaminé). A cela s’ajoute le refus des OGM en France, assorti de la mise en place de dispositifs d’évaluation d’impact ou encore l’opposition au clonage thérapeutique par crainte de dérives eugénistes. Des comités d’éthique sont chargés d’examiner ces questions. L’éthique devient un critère d’acceptabilité des innovations. Le cadre réglementaire se resserre par ailleurs avec la création d’agences de 11 12 sécurité sanitaire (AFFSSA , AFSSE ). Les affaires du sang contaminé, la crise de la vache folle, sont emblématiques des rapports nouveaux entre science et société. D’ampleur potentiellement mondiale, cette crise « mêle une incertitude scientifique, des systèmes de production industriels susceptibles de diffuser le risque à grande échelle, une demande forte de réassurance des consommateurs et une intrusion du judiciaire dans les affaires scientifiques qui interroge le rôle 13 des Etats » . En Rhône-Alpes, la sensibilité de la population aux problèmes d’environnement en lien avec la santé (pollutions, pesticides, qualité des eaux…) est croissante. Les groupes et associations de défense de l’environnement, anti- nucléaire, ou de défense des animaux sont très actifs, dans une région qui compte un nombre élevé de chercheurs (près de 48 000). Grenoble est une métropole symptomatique de la richesse et de la complexité de la relation entre science, société et environnement. L’agglomération compte la plus forte densité de chercheurs au regard de la population totale en région. C’est aussi dans cette ville militante que la sensibilité « verte » est fortement ancrée et que la contestation scientifique est souvent vive (nucléaire, nanotechnologies, OGM…). L’implantation de grandes entreprises (ST Microelectronics, Schneider, Soitec, CEA…), la notoriété de ses laboratoires de recherche et la qualité du cadre de vie, au pied des montagnes, exercent un fort effet d’attractivité auprès des cadres supérieurs : chercheurs, ingénieurs, professions intellectuelles... qui sont surreprésentés dans la population grenobloise. C’est sur ce même territoire que des mouvements de défiance mêlant interrogations sur la science et considérations économiques et sociales (poids des lobbys, usage du progrès scientifique…) se sont développés, se traduisant par une implication citoyenne « alter » plus marquée que dans d’autres territoires.

10 INRA, INRA 2020, Des scénarios pour la recherche, Alimentation, Agriculture, Environnement, N°19, janvier 2004 11 Agence française de sécurité sanitaire des aliments 12 Agence française de sécurité sanitaire de l’environnement 13 Source : Fiche variable FutuRIS, Le droit d’intervention de l’homme sur la nature, janvier 2004

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4. Hypothèses d’évolution

Hypothèse 1 - Le statu quo : un appauvrissement différentiel continu et généralisé Apparemment rien ne diffère dans l’organisation de la recherche des années 2040 de ce qui se passait dans les années 2010. Le regroupement des universités initié dans les années 2010 a mis 20 ans pour prendre forme. Seuls les grands groupes (mais il y en a peu en Rhône-Alpes) continuent à faire leur marché dans les laboratoires universitaires qui ont quelque chose à offrir. Les PME sont absentes de ce mouvement de coopération entreprise universités soit par ignorance de cette possibilité soit du fait de la paperasserie qui annihile toute volonté de faire quelque chose. Dans les faits rien n’a changé, les gros laboratoires continuent de fonctionner comme par le passé mais la science qu’ils produisent en Rhône-Alpes est de facture « moyenne/bonne » mais très loin derrière les pôles d’excellence qui se sont développés en dehors de nos frontières. Par manque de volonté, on a refusé dans les années 20 de faire des choix drastiques, les crédits étant distribués non en fonction des résultats mais des effectifs en poste. Le résultat est qu’aucun secteur n’émerge vraiment et sans le vouloir on a favorisé le grand mercato international qui fait que chaque année les appels d’offre internationaux délestent nos laboratoires des éléments connus par leur publication au plan international et affaibli à petite dose mais régulièrement nos laboratoires. Les entreprises comme les laboratoires ont vu les meilleures d’entre elles être absorbées puis délocalisées. Restent en Rhône-Alpes au mieux des filiales et plus généralement des divisions de grandes entreprises sans pouvoir d’action véritables dont les centres de recherche sont situés en dehors de l’hexagone. L’ensemble donne le sentiment d’une région en anoxie de résultats de recherche mais dont on se doute de l’issue. Des choix peuvent être encore faits mais ils restent à faire.

Hypothèse 2 - La recherche publique et privée en chute libre La difficulté de mettre en œuvre des politiques drastiques pour résorber les déficits publics ont eu raison des crédits publics et en particulier de ceux destinés à la recherche. L’absence de croissance dans l’économie a réduit considérablement les marges des entreprises qui pour survivre à court terme ont également amputé les investissements consacrée à la recherche. Dans cette léthargie globale, seuls peuvent tirer leur épingle du jeu les grands laboratoires publics des universités qui trouvent dans les contrats avec les grandes entreprises et les appels d’offre d’excellence lancés par l’Etat les ressources pour financer leurs programmes et pour se constituer un autofinancement. De même au sein des entreprises seules les plus puissantes peuvent financer elles-mêmes leur recherche. Quelques secteurs comme la santé, les nanos, l'électronique ou la chimie peuvent encore financer leur propre recherche, dans les autres cas la « paupérisation » de la recherche publique ne permet pas de maintenir des recherches de rang international. La recherche rhônalpine publique reste éclatée et fragmentée, sous-dotée dans l'ensemble et très faiblement capitalisée. Les sciences humaines qui ont toujours été à l’écart des financements publics sont moins impactées par la crise des financements et continuent leur bonhomme de chemin sans remettre en cause leur mode de fonctionnement balkanisé les empêchant de participer à la concurrence internationale. La recherche qui avait du mal dans les périodes précédentes pour attirer et retenir de jeunes talents plus enclins à « négocier leur intelligence » dans des disciplines comme le management, est désormais le parent pauvre des politiques publiques. Les laboratoires qui ne sont pas labélisés au niveau international (la très grande majorité) sont désertés, les résultats de la recherche n’abondent plus les thésaurus liés à l’enseignement des asters, nombreux sont les étudiants qui disposant des moyens financiers vont faire leurs troisième cycle dans d’autres pays européens ou à l’étranger. Cette recherche en chute libre de la science cohabite avec sentiment de défiance des populations vis à vis de supposés risques technologiques que font courir la science, le développement industriel pour les hommes. La défiance vis-à-vis des nanotechnologies ou de certains vaccins s'accroît considérablement, relayée par les médias et les réseaux sociaux. Cela se traduit par une crise de l’emploi, non seulement sur les métiers scientifiques proprement dits, mais aussi sur les métiers d’ingénieur qui sont l’un des fondements de l’industrie.

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Hypothèse 3 - Cap sur la science et la disruption La crise de 2025 qui ressemble à s’y méprendre par sa force destructrice à celle qui a eu lieu un siècle avant a surpris tous les prévisionnistes y compris la section prospective du CESER. Face à ce tsunami économique l’Europe a compris que le seul moyen pour pouvoir exister au plan international était la recherche. Un grand emprunt public de 10 000 milliards destiné à la recherche et à la disruption a été voté en 2030, à charge pour chaque régions d’établir un plan stratégique prenant en compte le développement des territoires et la coopération avec d’autres régions. En Rhône-Alpes, un comité de la promotion de la recherche (CPR) regroupant des représentants du monde économique et politique a été mis en place pour décider après consultation d’un conseil scientifique international des grandes orientations de la recherche régionale. Le jumelage des villes et des villages a impulsé l’idée d’un jumelage des équipes de recherche performantes sur la base d’un programme de recherches complémentaires auquel est associé un pôle de compétitivité incluant des PME innovantes. Des clusters reposant sur des alliances volontaristes regroupent sur le territoire des ensembles gigognes mêlant au quotidien des entreprises, des lieux de formation et des mini unités de recherche appliquées reliées aux grands laboratoires. Les salaires revalorisés pour rejoindre les standards internationaux ont modifié la relation de la population à ses universités. Les meilleurs élèves des lycées choisissent en premier lieu les filières scientifiques, la renommé naissante des chercheurs, leur place dans la disruption internationale, la diffusion des retombées de la recherche a dissipé la méfiance des populations. Désormais, la nouvelle région PACAR résultant de la fusion ARA PACA est le premier pôle scientifique national. L’usine nouvelle en prise directe la recherche a eu raison de la désindustrialisation.

Hypothèse 4 - Un changement de modèle : le développement du financement privé de la recherche Le divorce entre les universités et les grandes entreprises comme entre les grandes entreprises et les petites, est consommé. Dans le grand tournant libéral qui a embrasé la France, seul le marché est source de ressources. Les universités ne vivent que des menus subsides que peut leur offrir un état concentré sur ses obligations régaliennes concernant la justice la police et l’armée. Tout le reste est privé. Au plan national, les grandes entreprises ont créé des sociétés de recherche en participation sur un secteur donné et sur un sujet donné et y consacrent 10 % de leur CA. Les entreprises régionales trop petites en sont exclues et essayent d’organiser le financement de leur maigre recherche par le mécénat : mécénat d’entreprises, fondations, crowdfunding, associations… Nombreux sont les chefs d’entreprise qui regrettent le temps jadis ou l’Etat finançait la recherche publique mais aussi de façon indirecte la recherche privée.

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Variable n°6 Evolution du tissu économique

1. Définition de la variable Le tissu économique en Rhône-Alpes a fortement évolué dans les 30 dernières années, il est passé d’une économie fortement industrielle à une économie où le poids des services a considérablement augmenté, du fait d’un double mouvement : une délocalisation importante d’activités industrielles vers d’autres régions du monde et un fort mouvement d’externalisation des entreprises industrielles. Ces effets ont conduit aujourd’hui à une réflexion au milieu des années 2000 sur les politiques et stratégies industrielles qui ont amené à la mise en place des pôles de compétitivité (Rhône-Alpes adhère à 15 d’entre eux) et des clusters. Certaines activités ont été impactées par des délocalisations. Le secteur des services est lui aussi touché par ce mouvement. Ces évolutions ont des répercussions fortes sur l’organisation des activités et de la chaîne de valeur. La région Rhône-Alpes doit aussi faire face à un éloignement important des centres de décision d’un certain nombre d’entreprises, hors région, ou même hors Europe. La relation des entreprises avec le système bancaire s’en trouve modifiée. La région, maillée d’un important tissu de PME, et de PME sous- traitantes, est particulièrement sensible. Toutefois, le nombre de PME/PMI à caractère patrimonial constitue un tissu économique équilibré face aux grands groupes souvent en situation de donneurs d’ordre. La crise de 2008 a été fortement ressentie en Rhône-Alpes compte-tenu du poids relatif de l’industrie dans la valeur ajoutée et dans l’emploi en région. La sous-traitance a notamment été fortement impactée. Rhône-Alpes dispose de territoires très différents. L’économie des territoires de montagne devra être davantage éclairée pour alimenter les hypothèses d’évolution. La région Rhône-Alpes comporte un certain nombre de filières d’excellence au plan mondial. L’industrie, la recherche et la formation avec l’appui de l’Etat et des collectivités territoriales se sont organisées notamment au sein de clusters ou de pôles de compétitivité, pour en assurer le développement. La création et la dynamique de certaines activités ne relèvent pas uniquement d’innovations technologiques mais également d’innovations organisationnelles (tourisme, textile, environnement...) qui sont autant sources de croissance et de compétitivité. La définition d’une stratégie régionale d’innovation pour une spécialisation intelligente adoptée en 2014 impacte fortement les projets qui seront soutenus par les fonds européens.

2. Indicateurs permanents - Part des différents secteurs/emploi - Evolution de l’emploi - Part des différents secteurs/PIB - Structure du tissu économique/grandes entreprises/PME/TPE - Types d’activités - Nombre de centres de décisions et évolutions - Part de la sous-traitance - Niveau de productivité - Part à l’international - Répartition des activités - Politique industrielle - Taux de croissance de la filière - Part et l’évolution de la filière dans la valeur ajoutée régionale - Organisation de la filière - Place de la filière rhônalpine dans le système mondial - Influence de la filière sur les filières traditionnelles - Influence directe ou indirecte de la filière sur l’emploi régional - Rôle de la filière comme porte-drapeau régional au plan international.

3. Rétrospective

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Rhône-Alpes représente environ 10 % du PIB national. Elle arrive seconde à la fois en part de PIB et la part de PIB/habitant, mais troisième quant à sa part par emploi. Avec un PIB de plus de 190 milliards d’euros, Rhône-Alpes figure parmi les dix régions de l’Union européenne qui créent le plus de richesses. La région compte 6,1 millions d’habitants ; elle affiche un taux de natalité élevé et un solde migratoire positif. Les jeunes y sont bien présents, avec notamment 245 000 étudiants. 16 % de la valeur ajoutée rhônalpine est produite par l’industrie. Le socle industriel rhônalpin est diversifié, avec notamment la mécanique, la chimie, la plasturgie, le textile, l’agroalimentaire, l’électronique ou l’énergie. Rhône-Alpes présente de nombreux points forts dans les activités de pointe comme le numérique, les industries culturelles, les composants électroniques, la pharmacie et les technologies médicales, les éco-technologies. La région est impliquée dans 13 pôles de compétitivité. Elle compte d’importants centres de recherche publics et d’entreprises. La performance de son économie se traduit également par une forte ouverture internationale et des échanges extérieurs structurellement excédentaires. Rhône-Alpes dispose en outre d’une offre importante de services aux entreprises (ingénierie, activités informatiques, R&D, travail temporaire…). Elle constitue également l'un des principaux pôles français du transport/logistique. La région bénéficie de solides atouts touristiques, qui la placent au premier rang national en termes de séjours. A son extraordinaire domaine skiable s’ajoutent de nombreux autres centres d’intérêt naturels ou culturels. La contribution de Rhône-Alpes à la richesse nationale s’est accrue ces dernières années mais selon Eurostat, la région a perdu des places au plan européen. Rhône-Alpes est caractérisé par une part supérieure à la moyenne nationale dans la valeur ajoutée produite par les industries de biens intermédiaires (chimie, plasturgie, textile, transformation des métaux, composants électroniques et électriques). La part des biens d’équipement est supérieure à la moyenne nationale, même si elle est inférieure à l’Alsace ou aux Pays-de-Loire. En revanche, les biens de consommation, l’agro-alimentaire et l’automobile représentent une part inférieure au national. L’agriculture rhônalpine se caractérise par une agriculture de montagne, une agriculture bio importante et une production très importante liée aux AOC, AOP ou labels. Par ailleurs, Rhône-Alpes, est la première région employeur de la filière bois. Les entreprises de la filière sont, en Rhône-Alpes, particulièrement nombreuses (10 200), majoritairement de petites tailles et aux savoir-faire diversifiés : exploitation forestière, scierie, menuiserie, charpente, constructeur, ameublement, négoce et une industrie papier carton très importante. Au total 41 300 personnes vivent de la filière forêt-bois. Rhône-Alpes affiche une position de leader national en part d’emploi dans sept secteurs : - textile - composants électriques et électroniques - équipements mécaniques - métallurgie - chimie, caoutchouc, plastique - énergie - équipements du foyer. Par ailleurs, en termes de parts de marché, on observe que Rhône-Alpes occupe des places de leader dans les domaines suivants : er - décolletage > 1 pôle mondial er - génie climatique / froid > 1 pôle européen er - nucléaire / chimie nucléaire > 1 pôle européen nucléaire ère - mécanique et construction mécanique > 1 région française ère - construction électrique, électronique > 1 région française ère - métallurgie et transformation des métaux > 1 région française ère - médical et instrumentation scientifique > 1 région française ère - sous-traitance mécanique > 1 région française ème - poids lourds - équipementiers de l'automobile > 3 région française (source UDIMERA : » L’industrie Rhône –Alpine un bâtisseur d’avenir) ère - édition numérique > 1 région française Source UDIMERA : » L’industrie Rhône–Alpine un bâtisseur d’avenir

Les entreprises rhônalpines comptent 99,8 % des PME (à 96 % des TPE), 2 975 entreprises entre 250 et 500 salariés et 516 entreprises de plus de 500 salariés. Les grandes entreprises rhônalpines ont toutefois un effectif moyen nettement moins important qu’au plan national (1 675 contre 2 034).

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Rhône-Alpes est caractérisé par un portefeuille d’activités très diversifié. Elle est la première région française de sous-traitance industrielle. Mais son tissu industriel est traversé par d’importantes mutations économiques à caractère structurel, variables selon les secteurs. Rhône-Alpes se caractérise également par un ensemble de bassins industriels à forte spécialisation et donc sensibles aux évolutions positives comme négatives. L’INSEE Rhône-Alpes a réalisé une étude sur le tissu industriel de la région. En 2011, sept secteurs de l’industrie manufacturière sont nettement mieux représentés en termes d’emploi en Rhône-Alpes qu’au niveau national. A eux seuls, ils regroupent 13 % de l’emploi des secteurs marchands régionaux et emploient plus de la moitié des 341 000 salariés des industries manufacturières régionales (près de 54 %). Ces sept secteurs sont : • la fabrication de produits métalliques (51 000), • la fabrication de machines et équipements (35 000), • la fabrication d’équipements électriques (23 400), • la fabrication de produits en caoutchouc et en plastique (22 000), • l’industrie chimique (21 000), • la fabrication de produits informatiques, électroniques et optiques (19 000) • l’industrie pharmaceutique (12 000). Les services sont inégalement répartis selon les territoires, les zones de Lyon et Grenoble concentrant près de la moitié des salariés des services dans la région contre 37 % pour l’industrie. Rhône-Alpes se caractérise comme une région riche en emplois métropolitains supérieurs. Le taux de ces emplois, 7,4 % des emplois localisés dans la région, situe Rhône-Alpes au second rang français, loin derrière l’Ile-de-France (16,1 %). Les fonctions représentées dans ces emplois sont principalement liées au caractère industriel de la région : commerce et gestion dans l’industrie, recherche et informatique. Par contre, les fonctions de banque et d’information sont nettement sous-représentées car elles restent très concentrées en Ile-de-France avec les centres de décision. Ces emplois sont bien représentés dans six villes de la région qui se classent dans les 30 premières villes françaises :

nde Grenoble 2 12,7 % de l’emploi ème Lyon 5 10,6 % de l’emploi ème Annecy 12 8,3 % ème Valence 19 7 % ème Chambéry 20 7 % ème Saint Etienne 28 6,3 %

Rhône-Alpes a été impacté par la crise de 2008 qui a fragilisé des entreprises et des secteurs confrontés à une forte concurrence internationale. La faible taille de ses entreprises comme l’insuffisance de fonds propres de ces dernières a mené à des réflexions et des actions autour de ces questions. Des stratégies régionales de développement économique et d’innovation (SRDEI) et d’innovation pour une spécialisation intelligente (SRI-SI) ont été mises en place par le Conseil régional.

4. Hypothèses d’évolution Hypothèse 1 - Un recentrage sur les métropoles Le développement des filières d'excellence régionales (santé, nanotechnologies, chimie...) se fait principalement à partir des pôles de compétitivité mondiaux situés dans les métropoles (Lyon et Grenoble), les activités traditionnelles tirées par ces activités se concentrent également autour des métropoles, à proximité des emplois métropolitains supérieurs caractéristiques de ces activités. Les investissements se concentrent sur ces zones engagées dans des concurrences avec des métropoles mondiales de niveau équivalent. Des activités de sous-traitance persistent en dehors des zones métropolitaines mais ce sont surtout des activités liées à l'économie résidentielle qui s'y développent. Hypothèses 2 - Une diffusion non concertée du tissu industriel sur le territoire Rhône-Alpes Le tissu industriel est extrêmement éclaté sur le territoire et dans ses activités. La logique de filières d'excellence n'ayant pu se mettre en place, la visibilité de l'industrie régionale n'apparaît pas. Pour autant, des entreprises performantes dans leur activité et sur leur marché réussissent à maintenir leur compétitivité. Mais pour l'essentiel, il s'agit de démarches individuelles qu'ont permis de soutenir les technologies de l'information et de nouvelles

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formes de production dans des entreprises dont la spécificité du positionnement en faisait des leaders dans un marché de niche. Cette forme de développement rend particulièrement difficile la mise en place de politiques publiques industrielles et conduit à une moindre appréhension des questions industrielles par les décideurs.

Hypothèse 3 - Un développement équilibré Le scénario est ici celui d'un développement conjoint de l’industrie, des services associés, mais aussi des activités permettant un développement harmonieux : l’agriculture, le tourisme, le bâtiment, les infrastructures, les réseaux… Rhône-Alpes réussit par la diversité de ses activités. Ce scénario s'appuie sur un tissu industriel relativement bien réparti sur le territoire et qui favorise un modèle de développement alternatif à la concentration. Ce scénario s'accompagnerait d'une forte dynamique de relocalisation d'activités industrielles notamment.

Hypothèse 4 - Un développement centré sur un petit nombre d’activités Dans ce dernier scénario, on peut imaginer une concentration de l'activité sur un petit nombre d'activités, que ce soit les services ou bien l'industrie, cela remet en cause toute forme d'équilibre du territoire. On peut avoir un développement centré sur quelques activités de services peu reliés à l'industrie et qui ne peuvent s'exercer que sur certaines parties du territoire : économie résidentielle, tourisme,… On peut imaginer également un développement centré sur quelques activités industrielles à faible valeur ajoutée mais qui ont pu se maintenir en raison de savoir-faire locaux ou régionaux mais qui sont loin de couvrir l'ensemble du territoire.

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Bibliographie

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o KAHANE Bernard, « Les nanotechnologies entre fiction et réalité », Futuribles , avril 2012, n 384, pp. 5 ‑20.

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VARIABLES PROXIMITE DE L’ENTREPRISE

Variable n°7– Chaine de valeur – relations clients- relations fournisseurs

Variable n°8 – Environnement règlementaire, fiscal et financier des entreprises

Variable n°9 – Transports, logistiques infrastructures

Bibliographie

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Variable n°7 Chaîne de valeur - Relations clients-relations fournisseurs

1. Définition de la variable Les entreprises industrielles peuvent être tour à tour cliente et fournisseur dans la chaine de valeur. Le tissu industriel de Rhône-Alpes se caractérise par un tissu industriel composé de nombreux sous-traitants, soit de spécialité, soit de capacité. Par ailleurs, les entreprises rhônalpines se caractérisent par un poids important de la production de biens intermédiaires. La relation client dans une relation B to B (business too business) se distingue d’une relation B to C (business to Customer)

2. Indicateurs permanents - poids de la sous-traitance en Rhône-Alpes - nature de la sous-traitance - relation donneurs d’ordre sous traitants - canaux de distribution - satisfaction des clients - services liés au produit.

3. Rétrospective De nouvelles formes de relations clients-fournisseurs Aujourd’hui, 80 % des coûts des entreprises sont des coûts d’achat. Les acheteurs les font baisser en moyenne de 2 à 3 % par an. Cette réduction est souvent le résultat d’une réflexion sur l’adaptation des méthodes de management en fonction de cette segmentation et sur la structure des relations inter-organisationnelles qu’elle s’établit. Les relations clients fournisseurs répondent à des typologies, en voici une qui tient compte des spécificités des produits achetés, des processus de fabrication dans la mise en œuvre, des enjeux financiers, de la complexité de la chaîne d’approvisionnement ou encore de la capacité qu’à l’entreprise cliente à influencer le mode de fonctionnement du fournisseur .

On peut à partir d’un travail réalisé dans l’aéronautique définir trois types de relations : − Les relations stratégiques caractérisées par un haut niveau de complexité technologiques, des enjeux économiques forts ainsi qu’une complexité élevées de la ressource. Dans ce cas la stratégie qui prévaut est la sécurisation pour le client avec un nombre restreint de fournisseurs qualifiés. Le client cherche à implique le fournisseur le plus en amont possible des programmes de développement, afin de partager des risques associés au projet. − Les relations tactiques, caractérisées par un niveau de complexité technologique modéré, des enjeux économiques importants mais le nombre de fournisseurs offre des alternatives. Dans ce cas, la stratégie consiste à mettre régulièrement les fournisseurs en concurrence. Le client mène des analyses et cherche des fournisseurs. Il cherche également à les impliquer dans des chantiers d’amélioration de la performance globale et leur assigner des objectifs liés aux capacités de la concurrence. − Les relations open-market, caractérisées par des enjeux financiers plus ou moins élevés, mais sans contrainte technologique avec une concurrence multiple. Le client cherche donc à limiter les coûts complets et à bénéficier d’effets volumes par une mise en concurrence systématique. En fonction du type de relations, l’implication du client varie fortement. Le management des relations clients-fournisseurs impliquent généralement trois niveaux hiérarchiques : - Les front line agents du client et du fournisseur qui travaillent sur éléments opérationnels, résolution de problèmes qualité, logistique, optimisation des produits et process de fabrication ;

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- Les middle managers du client et du fournisseur qui portent leurs efforts sur l’optimisation et l’efficacité des moyens à mettre en œuvre ; - Les top managers du client et du fournisseur créent et formulent les objectifs partagés. La confiance dans le partenaire apparaît depuis les années 90 comme un élément déterminant de la relation client-fournisseur. Dans des contextes d’incertitude et d’interdépendance inter-entreprise, la confiance donne de l’agilité aux partenaires. Des rassemblements d’équipes sur des plateaux projets ou des plateformes de R&D ou de présences d’agents sur les sites de production sont des actions permettant d’approfondir les liens véritables. Lors des Etats généraux de l’industrie, de nombreux sous-traitants ont fait part de la relation déséquilibrée entre sous -traitants et donneurs d’ordre, un guide pour la qualité de ces relations a été édité par le médiateur des relations industrielles et de la sous-traitance, allant de la commande au paiement en passant par la propriété intellectuelle. Le rôle majeur de l’innovation dans la compétitivité des entreprises incite à passer d’une relation de sous- traitance à une relation de co-traitance qui implique aussi bien les fournisseurs de rang 1, que ceux de rang 2 dont le potentiel d’innovation irrigue l’ensemble de la chaîne de valeur. Toutefois, les questions de propriété restent prégnantes et peuvent être des freins à des collaborations plus intenses sur les plateformes de R&D. Rhône-Alpes est la première région de sous-traitance et dans ses grands secteurs de production : plasturgie, mécanique, chimie etc… Les incidences des évolutions de la relations fournisseurs-clients est fortement déterminante sur son organisation industrielle et structurera fortement les formes de production liées à l’usine du futur.

4. Hypothèses d’évolution Hypothèse 1 - Un climat de coopération prévaut entre clients et fournisseurs et se caractérise par des regroupements de petits acteurs, de la mutualisation et du maillage. Les entreprises clientes et fournisseurs, quelles que soient leurs tailles, oublient les rapports de force (prix le plus bas, délocalisation des achats, délais de règlement non respectés) pour entretenir des relations de partenariat à long terme. Elles ont compris que ce type de relation permettait de développer la qualité des produits et services ainsi que l’accès à l’innovation par le contact : seul on va plus vite, ensemble on va plus loin. L’impératif de compétitivité demeure cependant face à la pression naturelle des pays dits « low cost ». Il amène les acteurs soit à mutualiser leurs moyens (ateliers communs, services communs, …) soit à fonctionner ensemble dans des relations dites de « maillage » qui permettent à chacun d’envisager des horizons à moyen et long terme. Des regroupements de petits acteurs sont même à envisager même si l’ouverture du capital reste une solution que beaucoup d’entrepreneurs choisissent en dernier. Les pouvoirs publics favorisent ces regroupements et incitent à la mutualisation des acteurs, notamment en favorisant ces démarches dans le cadre de la commande publique. L’économie régionale et ses opérateurs industriels de forte taille, ayant accès à l’exportation, peuvent ainsi fonctionner avec l’appui local, donc flexible, de sociétés type PME ou ETI spécialisées dans leurs propres domaines, compétitives et créatrices. Cette solide base de sous-traitance est un atout pour les grandes entreprises qui peuvent alors se dispenser d’internaliser des pans d’activités dont l’efficacité pourrait être altérée du fait de la taille de ces organisations. Cette relation est également un atout pour les petites entreprises innovantes, assurées d’un marché et conservant leur esprit entrepreneurial, qui peuvent à leur tour investir dans leurs moyens de production et exporter leur savoir-faire. La relation s’inscrit dans un cadre de co-management des problématiques de formation, et de partage de l’innovation qui sont incitatives pour les PME. Cette hypothèse peut se traduire également par la présence des clients sur le site de production permettant l’accompagnement de la production en vue d’un meilleur ajustement aux besoins. Cela implique un regroupement sur site des principaux contributeurs aux processus de production, intégrant notamment les principes d’une économie circulaire.

Hypothèse 2 - Les grands groupes font le choix d’internaliser certaines fonctions et le poids de la sous- traitance diminue fortement. L’intégration croissante des relations entre donneurs d’ordre et sous-traitants, les conditions de l’innovation ainsi que les questions de propriété intellectuelle et de sécurité, ont amené les donneurs d’ordre, les grands groupes

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en particulier à repenser le périmètre des entreprises. Si toutes les activités non directement liées à la production (logistique, nettoyage etc..) restent externalisées, elles ont souhaité réinternaliser les différents maillons de la chaine de valeur. Cette stratégie se met en œuvre à travers une politique de rachat de sous-traitants dont l’activité est menacée par la cessation d’activité du chef d’entreprise, la faible capacité financière de ces entreprises pour innover et surtout leur faible protection face aux pillages informatiques qui se multiplient compte tenu de l’intégration forte des process et des échanges de flux en temps réel.

Hypothèse 3 - Les rapports entre donneurs d’ordre et sous-traitants évoluent peu et le rapport de force se renforce pour les grands groupes. Les donneurs d’ordre ont peu modifié leur manière de travailler avec les sous-traitants, les conditions tarifaires et contractuelles, drastiques pour la plupart, n’ont pas évolué. Seuls, les sous-traitants de rang 1 porteurs de fortes innovations et de compétences spécifiques sont particulièrement ménagés. Les sous-traitants de rang inférieurs connaissent au contraire une dépendance forte et leur capacité d’évolution ainsi que leurs ressources financières sont très limitées. La concentration dans certains bassins d’emploi de ces activités les rend extrêmement vulnérables à tout mouvement conjoncturel et à fortiori à toute évolution structurelle. Toutes les tentatives pour favoriser le regroupement des PME, leur accès à la commande publique ont été vaines.

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Variable n°8 Environnement juridique et financier de l’entreprise

1. Définition de la variable Les entreprises évoluent dans un environnement juridique et financier qui dépend pour beaucoup d’éléments réglementaires mais aussi culturels et techniques. Ses caractéristiques peuvent être notées de la manière suivante : − Une entreprise a une forme juridique et un régime fiscal. − Elle a un propriétaire (ou plusieurs) qui assument plus ou moins le risque financier en fonction de la forme juridique de l’entreprise (risque financier limité aux apports en SARL, risque illimité en SNC par exemple). − et un dirigeant , le représentant légal de l’entreprise, qui devra choisir son statut social et qui assumera la responsabilité juridique de l’entreprise. L’ordre établi dans lequel nos entreprises évoluent, résulte des diverses évolutions techniques, juridiques, financières et sociétales des siècles et décennies précédents. Il apparaît qu’actuellement de fortes tendances viennent modifier cet ordre établi tant sur les aspects opérationnels que sur les sujets à caractère financier ; la révolution digitale est un de ces éléments modificateurs. On pourrait intituler cette fiche « l’ordre établi et les barbares ». C’est ce que nous allons nous attacher à voir et ensuite à scénariser.

2. Indicateurs permanents - type d’entreprises/formes juridiques - capitaux des entreprises/aspect quantitatif et qualitatif - direction des entreprises - propriétaires de l’entreprise - taux de marge des entreprises.

3. Rétrospective Nous reprenons ci-dessous un certain nombre de tendances qui ont présidé à la construction de ce que nous appelons plus haut l’ordre établi actuel. Cet exposé, qui n’est pas exhaustif, a pour objet d’expliquer les principales causes de la situation actuelle sur la base desquelles nous appliquerons ce que pourraient être les vecteurs (les « barbares ») de changement conduisant à la situation de demain. De façon synthétique, on pourrait dire que les décennies récentes (1970 et suivantes) ont vu l’émergence de grands groupes industriels nationaux, continentaux, puis mondiaux qui ont porté des valeurs d’excellence de gestion. Les métiers financiers (banque, marchés financiers, professions du chiffre et du droit) se sont mis au diapason et au service de ces grosses entités. Parallèlement, le monde des petites entreprises s’est trouvé quelque peu délaissé et en mal de compétitivité. Or paradoxalement, c’est précisément sur l’émergence de plus petites structures que porteront les évolutions futures. L’évolution de la situation financière des entreprises est ambiguë : les entreprises industrielles ont globalement assaini leur situation financière sur les 15 dernières années. En effet, l’évolution de leurs capitaux propres s’inscrit dans la tendance de fonds des sociétés non financières, à savoir un renforcement de leur fonds propres, en particulier pour les PMI. Cette tendance qui s’est poursuivie pendant la crise financière, est allée de pair avec une progression du poids de la trésorerie dans le bilan. Par ailleurs, leur endettement tend à diminuer. Toutefois, l’interprétation de ces éléments peut être ambiguë. En effet, cela peut être la résultante de faillites dans le secteur, assainissant la situation moyenne. Le besoin en fonds de roulement a connu une baisse entre 2000 et 2010, qui s’explique en partie par la loi de modernisation de l’économie qui a réduit les délais clients de 9 jours depuis 2000, de 12 jours le crédit fournisseur. Le taux d’investissement des entreprises est également en baisse, si les PME représentent 23,2 % de l’investissement total, les ETI en représentent 37,6 % et les grandes entreprises 39,2 %. En 2011, le taux

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d’investissement de plus de la moitié des PME était inférieur à 4 %, et pour les trois quarts, il reste inférieur à 11 %. Plus de la moitié des investissements concernent des biens mobiliers, mais cette proportion a connu une baisse depuis le début des années 2000 au profit des investissements immobiliers qui représentent 36 % des investissements. Les actifs incorporels représentent quant à eux des investissements inférieurs à 10 %. On constate un renforcement des fonds propres des PME : si les PME représentent la majorité des entreprises en France, leur poids relatif en terme de capitaux est faible, environ 13 % des capitaux propres des entreprises contre 28 % pour les ETI et 59 % pour les grandes entreprises.

La crise, puis l’application des nouvelles normes prudentielles Bâle 3, ont modifié l’accès au crédit. En 2008, l’Etat a mis en place un médiateur du crédit aux entreprises. De nouveaux outils de financement publics, la BPI a pris la suite d’OSEO et des activités de la Caisse des Dépôts et Consignations. Les dirigeants de PME sont réticents à ouvrir leur capital à des investisseurs extérieurs et on note depuis peu un développement important du capital-investissement et la France est le deuxième marché européen après le Royaume-Uni. Le Conseil national de l’Industrie a émis un avis sur la situation financière des entreprises. Il constate notamment que : « L’autofinancement et l’accès au financement sont des leviers déterminants du développement, du dynamisme et de la pérennité du tissu et des emplois industriels. L’industrie se distingue par un besoin de financement en fonds de roulement élevé et de grandes amplitudes de mouvements de trésorerie, ainsi que par une forte intensité capitalistique liée à des investissements productifs coûteux et à des cycles d’investissements productifs longs. Aussi, les entreprises industrielles ont elles besoin d’outils de financements diversifiés et spécifiquement adaptés à leurs besoins pour financer leurs investissements et leur cycle d’exploitation courant, soutenir le développement interne par l’innovation, la formation, l’export ou l’implantation à l’international, ainsi qu’accompagner leur croissance externe par fusion, acquisition, partenariats. L’effort d’investissement de l’industrie française, historiquement plus bas que chez nos partenaires européens, s’est dégradé depuis 2000. Cette baisse de l’investissement touche particulièrement les PME et ETI et se traduit par une obsolescence et un retard de modernisation de l’outil de production. Le vieillissement du parc de machines français est préoccupant ; le faible nombre de machines de moins de 15 ans est révélateur de l’insuffisance capacité de bon nombre de PME françaises à produire des produits complexes à forte valeur ajoutée, à monter en gamme et à se positionner de façon compétitive sur la demande mondiale. Relancer l’investissement pour rattraper ce retard de modernisation et de réorientation de l’outil productif est une priorité qui doit mobiliser les acteurs privés et l’appui des pouvoirs publics. L’un des leviers – ce n’est pas le seul - est d’améliorer l’accès des entreprises industrielles au financement, y compris dans les moments où elles conduisent une transformation nécessaire qui handicape leurs résultats financiers à court terme. Aussi le bureau du Conseil National de l’Industrie (CNI) a-t-il souhaité s’assurer des conditions d’accès des entreprises industrielles au financement. Au sein d’un groupe de travail présidé par Jeanne-Marie Prost, médiatrice nationale du crédit, des chefs d’entreprise et des représentants de fédérations industrielles, des représentants d’organisations syndicales de salariés de l’industrie, et des représentants de fédérations bancaires et financières ont confronté leurs points de vue, partagé un constat, identifié des difficultés et élaboré des propositions remises au bureau du CNI.

I - Trois constats majeurs ressortent du diagnostic  Sources de financement externe - Pour les TPE, les PME et les petites ETI, les banques sont et resteront la principale source de financement externe : en 2012, les crédits bancaires de moyen-long terme représentaient dans l’industrie encore 96 % de l’endettement externe des PME, et 77 % de celui des ETI. Parce qu’elles jouent un rôle majeur dans la croissance et l’emploi de l’économie nationale, le CNI insiste sur l’importance qui doit être attachée à ce que les banques maintiennent une capacité appropriée de prêts à ces entreprises ; - au-delà du financement bancaire, face aux nouvelles contraintes prudentielles (accords de Bâle 3 via la directive CRD4 et le règlement CRR et directive Solvabilité II), les modalités de financement externe des entreprises sont en pleine mutation, tant pour les fonds propres que pour la dette moyen-long terme. Ce mouvement progressif de désintermédiation est récent en France, et il demande à être accompagné et encouragé pour les PME et les ETI.

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 Accès au financement bancaire - La plupart des données statistiques et des enquêtes d’opinions réalisées auprès de chefs d’entreprises tant en France qu’au niveau européen ne mettent pas en évidence depuis 2012 de biais défavorable à l’industrie sur l’accès au financement long-terme : tous secteurs confondus, les statistiques fournies par la Banque de France font ressortir un taux d’octroi de crédit aux PME satisfaisant pour les investissements : 92 % des demandes sont satisfaites en totalité ou à plus de 75 % du montant sollicité. - Les crédits de trésorerie , qui n’offrent pas, sauf par la mobilisation de créances, la même possibilité de prise de sureté par les banques sur les actifs financés, font en revanche l’objet de tensions plus importantes , puisque ce même ratio s’élève seulement à 78 % et tombe à 71 % pour les demandes de crédits satisfaites en totalité . Il convient de s’attacher à améliorer le financement du cycle d’exploitation. - Il ressort toutefois, selon les témoignages de chefs d’entreprises, que la demande de financement n’est pas totalement exprimée. Un phénomène « d’autocensure » dans les demandes de crédit, plus élevé en France que chez nos voisins européens selon les enquêtes de la BCE, semble peser notamment sur les TPI et les PMI en difficultés. Ce phénomène étant aujourd’hui insuffisamment quantifié et analysé , le CNI recommande que l’enquête de la Banque de France sur l’accès au crédit soit complétée afin de l’éclairer (recommandation 1). - Enfin les données agrégées de ces enquêtes ne doivent pas masquer la diversité des situations individuelles et les difficultés rencontrées par les entreprises industrielles dans un contexte de crises conjoncturelles qui affectent fortement leur rentabilité.  Autofinancement - La baisse préoccupante du taux de marge des entreprises industrielles françaises , passé selon l’INSEE de 32,7 % en 2000 à 29,7 % aujourd’hui, pénalise leur financement à double titre : leur capacité d’autofinancement est moindre, et leur accès au crédit bancaire rendu plus difficile car la baisse de rentabilité affecte les ratios financiers pris en compte par les banques dans leurs décisions d’octroi de prêts. Il s’ensuit pour beaucoup d’entreprises un cercle vicieux de dégradation de leur activité et de leur situation financière, accroissant ainsi leur dépendance aux financements externes. Cette situation est d’autant plus préoccupante dans l’artisanat de sous-traitance industrielle que les dirigeants de cette catégorie d’entreprises financent pour la plupart leurs investissements par recours à l’autofinancement. - Le redressement du taux de marge des entreprises industrielles constitue une priorité pour pérenniser, moderniser et faire croître l’appareil productif et les emplois industriels en France, soutenir l’effort de R&D ainsi que la prospection et le développement à l’export. Même si le CNI regrette qu’elles n’aient pas été suffisamment ciblées sur les secteurs exposés, les mesures déjà mises en œuvre par les pouvoirs publics (CIR, CICE notamment) ou à venir (Pacte de responsabilité) sont nécessaires, et doivent être en totalité mises en oeuvre au plus vite. Elles devraient permettre un rétablissement progressif des marges industrielles. Cela ne suffira toutefois pas à rétablir durablement la compétitivité internationale de l’industrie française, qui doit être travaillée dans toutes ses dimensions, y compris hors coût, par l’engagement de tous les acteurs industriels. La baisse annoncée de l’IS de 33 % à 28 % à l’horizon 2020 va également dans le sens d’une amélioration de la capacité d’autofinancement. Afin d’accélérer son effet pour les PME, voire les ETI, dans l’objectif de rattraper le retard de modernisation du parc industriel, le CNI recommande que la baisse de l’IS soit anticipée pour les PME industrielles ou qu’un taux différencié soit appliqué aux bénéfices réinvestis dans des investissements productifs (recommandation 2) . De même une fiscalité allégée pourrait être appliquée aux plus-values de cession en cas de réinvestissement productif. »

Sur la notion de Place Financière La mise en œuvre de tout ce qui précède est le travail de ce que l’on appellera la Place Financière et Tertiaire (PFT) dont nous dressons ci-après les contours et les rôles. Schématiquement, la PFT est un ensemble de professions et d’organismes qui, agissant ensemble, constituent un intermédiaire entre, d’une part, le monde de l’entreprise qui, détenteur d’idées, est en quête de financement

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et, d’autre part, le monde de l’investissement qui a une « obligation » d’investir ses ressources au mieux (rentabilité, risque et liquidité). Ces professions interviennent sous deux registres : • Le monde du financement comprenant 3 environnements : - Le monde de la Banque privée communément appelé le monde « intermédié » ; - Le monde des marchés financiers (Bourses, marchés obligataires, …), monde de la désintermédiation puisque Entreprises et Investisseurs s’y rencontrent quasi directement ; - Le monde Public doté de fonds publics (régionaux, nationaux, européens, mondiaux) qu’il met à disposition des entreprises en fonction de critères précis visant en général à orienter une politique économique en substitution du secteur privé qui peut ne pas accepter le caractère risqué ou trop long terme de certains investissements : emploi, innovation, soutien local ou régional, … Ceci se fait via des engagements directs (dette ou fonds propres), octroi de garanties et de moins en moins de subventions. • Le monde Tertiaire comprenant les Professions du Droit (Notaire, Avocats) et du Chiffre (CAC, Expert- Comptables) ainsi que les professions du Conseil Financier ou autres sociétés de services financiers et tertiaire. Le rôle de cet ensemble de professions est d’assurer, au monde de l’entreprise en particulier, un accès fluide aux ressources et aux opérations financières ainsi qu’aux services et conseils qui contribuent à cet objectif. Une PFT Régionale (PFTR) se positionne en complément des grandes places nationales ou internationales telles que Paris, Londres, Francfort ou bien d’autres. …. Même si la région compte de grandes entreprises (Casino, SEB, …) ce n’est pas sur la Place Régionale que celles-ci trouveront les produits et services qu’elles recherchent ; elles travaillent en général avec les Places nationales ou internationales. Par contre, notre tissu de PME et d’ETI, dont les directions financières ne peuvent pas être aussi étoffées que celles des grands groupes, doit pouvoir trouver régionalement ce qu’il est en droit d’attendre d’une Place Financière : les produits de financement et les services attachés, souvent aussi sophistiqués que pour les grandes organisations, à un prix attractif malgré la faible volumétrie des besoins et avec un contenu pédagogique adapté à la nature de leurs équipes.

Au-delà de cette notion de service rendu (à savoir réponse à une question qui est posée), le rôle d’une Place est aussi d’assurer une sensibilisation des entreprises les plus petites aux nécessaires apports et contraintes du monde administratif et financier (réponse à la question qui n’est pas posée). La survie et le dynamisme de nos entreprises les plus petites en dépendent.

La Place Financière et Tertiaire Régionale est une force significative de notre région et emploie plus de 60 000 personnes soit 2 % de l’emploi régional. Cela se répartit de la façon suivante: • Profession bancaire : près de 3000 agences ouvertes par la quasi-totalité des banques françaises ainsi que certaines banques étrangères qui emploient, au total, 28 500 personnes • Professions du chiffre : plus de 1 000 personnes commissaires aux comptes auxquels s’ajoutent les quelques 2000 Experts comptables et leurs équipes, • Plus de 1100 Notaires et de très nombreux avocats (3000 avocats inscrits au barreau de Lyon) • Monde de l’assurance (10 0000 emplois) • Investisseurs avec d’une part des investisseurs institutionnels comme APICIL, Groupama et SHAM mais aussi une forte présence du monde du Private Equity • Monde du conseil avec de plus en plus de structures de conseil spécialisé dans le domaine financier (levée de fonds, accompagnement d’opérations d’acquisition, notation,…)

Selon diverses observations, il semblerait que la Place Financière française en général, régionale en particulier, ne soit pas le point fort de notre pays en termes d’attractivité. La capacité à réagir à cette observation en Rhône- Alpes sera un des facteurs des hypothèses que nous formulerons pour cette variable. Un autre facteur sera bien entendu relatif à la situation internationale des marchés financiers, situation qui ne peut pas être sans influence sur le fait régional. Le monde a traversé récemment une forte crise financière dite des « sub prime » qui s’est traduite par de forts décalages sur les marchés financiers (bourses, devises, …) et par une raréfaction des crédits ; on a pu connaître, avant cela (1987,...), des situations mondiales ou régionales de « credit squeeze » ou de fortes volatilités. L’apaisement actuel sera-t-il durable ? Les ressources en provenance des pays émergents (Chine,...) seront-elles toujours là ?

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Mais, sans aucun doute, le principal facteur de changement à moyen terme résultera de la révolution digitale et de tout ce qui l’entoure. On a vu dans d’autres variables l’effet du commerce Internet sur les structures de la distribution, donc de la logistique, donc du lieu d’implantation des usines : on ne va plus acheter un disque, on télécharge un contenu qui sait si un jour, imprimante 3D et drones à l’appui, on n’en viendra pas à attendre chez soi la livraison de produits physiques. Dans ce contexte, la naissance d’initiatives, dans le monde financier, telles que le crowdfunding est une réflexion des nouvelles et fortes tendances. Les débordements permis par la technique sur les marchés boursiers (hedge funds, high frequency trading) sont une autre facette de l’évolution du monde financier qui peut remettre en cause son propre fonctionnement. Quand on y ajoute la défiance des nouveaux diplômés à l’encontre des grandes structures (entreprises, banques,…) et leur préférence pour des structures individuelles, de leur recherche d’une certaine éthique qui est fortement mise à mal par le comportement « avide » de certains intervenants, on peut légitimement se demander si l’ordre établi dans lequel nous évoluons et pour lequel nous avons tenté ci-dessus d’exprimer quelques scénarios d’évolution « à la marge » ne va pas connaître, au contraire, une révolution radicale. Sur les aspects juridiques Les formes juridiques et fiscales des entreprises ont épousé les tendances des dernières décennies avec des formes juridiques adaptées aux groupes de sociétés et des dispositions fiscales les accommodant (intégration fiscale, consolidation fiscale mondiale). Encore une fois, on peut sentir à ce niveau, la différence de traitement entre l’économie d’hier (ordre établi pour les grosses structures) et celle de demain (initiatives prises par les toutes petites structures-autoentrepreneurs, …).La forme juridique des entreprises créées s’est traduit par une augmentation des SARL unipersonnelles et des SAS au détriment des autres SARL. Répartition des sociétés créées par forme juridique

SARL : société à responsabilité limitée ; SAS : société par actions simplifiée. Lecture : en 2011, la part de l'ensemble des SARL parmi les sociétés créées s'établit à 79 %, celle de l'ensemble des SAS à 16 %. Champ : ensemble des activités marchandes non agricoles. Source : Insee, répertoire des entreprises et des établissements (Sirene).

Au cours des trois dernières décennies, on a assisté à une quête constante du législateur pour renforcer la gouvernance des entreprises, assurer plus de transparence dans leur fonctionnement et protéger les grands intervenants contre eux-mêmes et leurs excès. Le premier axe, la gouvernance, s’est accompagné de lois et de formes juridiques visant à préciser les rôles respectifs des actionnaires et des dirigeants. A la clef des nouvelles formes d’entités juridiques (SAS, SCI, …), des textes contraignant sur les conseils d’administration (parité, administrateurs salariés). On peut estimer qu’une prochaine étape sera un alignement des solutions à l’intérieur de l’Europe et l’avènement du statut de société européenne. Le deuxième axe vise à protéger les parties prenantes à l’entreprise (actionnaires, salariés, clients et fournisseurs) en obligeant les dirigeants à donner plus d’informations. Cela vaut pour les sociétés cotées ou pas avec des obligations de publication. Enfin, des lois ou régulations nationales ou internationales se veulent réguler un certain nombre de professions : Bâle 3, Solvency 2, Sarbanne Oxley, ….

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4. Hypothèses d’évolution Dans les décennies qui viennent, les vecteurs de changement porteront sur des sujets déjà connus comme les crises financières locales ou mondiales (1929, 2009) mais ils résulteront des changements majeurs comme les évolutions de la taille des entreprises, comme la prise en compte de plus d’éthique et comme les évolutions techniques en particuliers celles issues de la révolution digitale.

Hypothèse 1 - Il n’y a pas de crise financière mondiale ni de révolution majeure dans le fonctionnement de l’économie et la place financière arrive à compléter l’offre de financement faite aux PME et ETI Le monde de la Finance fonctionne avec harmonie dans le cadre de codes éthiques généralement respectés. Nous évitons ainsi les grandes crises type sub prime et faillites retentissantes (Lehman Brother) et les capitaux circulent librement au plan mondial. La Place Financière Régionale a trouvé les ressorts pour devenir une référence et un élément d’attractivité ce qui se traduit par : − Des start up qui trouvent facilement, dès leur statut d’amorçage, les ressources en capital et en dette nécessaires à leur expansion ainsi que l’accompagnement financier et administratif nécessaire à leurs premiers pas. Ces ressources continuent de provenir des soutiens publics mais aussi de plus en plus de soutiens privés (business Angels, Crowdfunding, Bourse des PME, venture capital corporate ou financier, …) ; − Des entreprises devenues petites PME qui franchissent avec succès cette « death valley » qui voit les mécanismes d’accompagnement ne plus s’appliquer à elles parce que trop grosses, mais qui n’ont pas encore les moyens d’accéder elles-mêmes aux marchés financiers parce que trop petites. Elles en ressortent alors plus fortes (avec en particulier des fonds propres plus solides) et toujours aussi mobiles. − Des grandes PME ou ETI plus nombreuses s’appuyant de plus en plus sur les solutions financières qui ont fait le succès de nos grands groupes. Notre Région s’appuie ainsi sur des entreprises robustes et durables capables de mener une politique industrielle de long terme basée aussi sur l’innovation apportée par les petites structures et un vent d’entrepreneuriat qui pousse à « oser ».

Hypothèse 2 – L’ordre établi est bouleversé en cela qu’une orientation marquée vers de petites structures se fait jour mais la Place Financière parvient à trouver des solutions adaptées. Après les grandes concentrations, les ventes par les grands groupes d’activité non stratégiques conduisent à la création de plus de structures intermédiaires par opposition aux énormes groupes présentant des capitalisations boursières de plusieurs centaines de milliards d’euros. Cet état de fait conduit à plus de souplesse de fonctionnement ainsi qu’à une identification plus marquée des « managements » et des salariés à leurs entités dont ils sont le plus souvent actionnaires. Par contre, les tailles plus réduites des entreprises ne leur permettent pas, comme pour les grandes, de s’appuyer sur la compétence d’équipes financières juridiques et fiscales. La Place Financière, tant par vocation que par intérêt, a cependant pu créer des solutions propres à assurer le financement ainsi que la gestion financière juridique et fiscale des petites unités. En témoignent les initiatives suivantes : − La « banque directe » avec des solutions internet aux porteurs de projets : banque directe, plateformes de crowdfunding ; − Les investisseurs, par souci, de diversification, contribuent à la création de fonds investissant dans des entreprises de petite taille. Des initiatives telles que les fonds NOVO/NOVI/NOVA se multiplient aidées en cela par une plus grande fluidité de l’information permise par des initiatives comme celle d’ALTAVALUE ou la Banque de France en termes de notation d’entreprises ; − Le développement des activités régionales et locales des banques de réseau, appuyé par une formation de leurs agents leur permettant de jouer un rôle de conseil de nature à les singulariser par rapport au mode « direct » ;

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− Le développement de solutions boursières pour les petites entreprises. Le projet Place d’Echange a ainsi réussi apportant des modes de cotation simple (pas de cotation en continu) et un mode d’approche des entreprises adapté à leurs tailles (réseaux CCI, banques, experts comptables) ; − L’accentuation des actions du mode du conseil (CAC, experts comptables, conseils en gestion) vers le monde des PME avec des solutions simples et peu coûteuses ; − L’adaptation du monde d’intervention de l’Etat qui abandonne le mode subvention (coûteux budgétairement mais surtout fortement demandeur) au profit d’un rôle d’accompagnement où les ressources qu’il engage sont d’autant moins importantes qu’il se fait aider par le secteur privé (développement d’initiatives du type du Plan PME) − Le renforcement du rôle d’associations (DFCG, LPFT, clubs APM, réseau Entreprendre, …) fondées sur quelques permanents et beaucoup de bénévoles qui apportent de l’expérience aux toutes petites entreprises. Dans ce scénario optimiste, la Place Financière a su réagir et accompagner les plus petites entreprises pour leur permettre de survivre dans de bonnes conditions de rentabilité et leur permettre de grandir. Elles évoluent à côté d’entreprises plus grandes mais aussi des moyennes qui bénéficient de l’effet de taille pour être plus compétitives.

Hypothèse 3 – Le clivage entre grandes et petites entreprises se poursuit et aucune solution n’est trouvée pour les petites entreprises L’individualisme des uns (volonté farouche de rester dans « sa » petite structure quitte à en provoquer la fin prématurée) et l’avidité des autres (les plateformes de crowdfunding prennent des frais de levée dissuasifs, …) ne permettent pas de changer les tendances que l’on peut observer actuellement. Il en résulte une situation dans laquelle les grands groupes continuent à progresser et à bénéficier de leur position de force pour se renforcer au détriment d’entreprises plus petites (mais déjà de tailles conséquentes) dont les actionnaires décident de les leur vendre plutôt que de poursuivre seuls leur activité ; ils ont en effet trop de difficultés à trouver des capitaux dans un marché financier qui se consacre uniquement aux grands groupes. Les initiatives prises pour venir au secours des petites unités échouent pour diverses raisons : − Les initiatives existantes (plateformes de crowd funding, Place d’Echange) finissent par échouer car à la fois trop chères pour ceux à qui elles se destinent (frais de levée de fonds de l’ordre de 15 à 20 %), trop porteuses d’échec répétés avec la faillite des émetteurs (Les Atelières, …), … − Les investisseurs par souci de sécurité et de liquidité préfèrent continuer à financer des entreprises plus grandes, qui fournissent de l’information et dont la taille est garante de sécurité ; − Les Etats ne peuvent plus pour des raisons budgétaires continuer à allouer des subventions, subventions dont l’utilité reste également à démontrer. Il en résulte un contexte où de grandes entreprises de plus en plus puissantes côtoient des petites unités de plus en plus éphémères ce qui est un frein à la créativité et à l’innovation. Les entreprises sous-traitantes, de tailles plus respectables, deviennent de plus en plus fragiles et dépendantes de leurs donneurs d’ordre.

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Variable n°9 Transports - logistique, « supply chain » (chaine d’approvisionnement)

1. Définition de la variable La logistique désigne concernant les entreprises industrielles, commerciales et agricoles, l’ensemble des flux depuis l’acheminement des matières premières jusqu’à la vente de produits finis, et au-delà de la consommation jusqu’à la destruction des déchets ultimes. Gestion logistique, Supply chain management : peu importent les termes, toute entreprise industrielle et commerciale doit s’organiser pour servir les besoins de ses clients, exprimés ou latents, en mettant en œuvre des ressources internes - capacités de production, stocks, main d’œuvre, surfaces, équipements et externes auprès de fournisseurs et prestataires. Les logiques d’implantation de cette activité relèvent de deux types de logistiques : - une logistique endogène, au service des activités locales de production et de consommation, pour l’approvisionnement et la distribution des produits et au service de la population pour assurer sa demande en termes de consommation. - une logistique exogène, au service de réseaux d’approvisionnements ou de distribution dépassant le territoire de proximité. Il s’agit de grands entrepôts ou plateformes implantés pour rayonner sur une aire géographique importante. Les caractéristiques de Rhône-Alpes répondent à ces deux types de logistique.

2. Indicateurs permanents - poids de la logistique - nombre d’emplois - localisation des activités - positionnement par rapport aux marchés - intégration de la logistique.

3. Rétrospective Jadis considérée comme une activité secondaire, cantonnée à des activités de manutention dans les entrepôts, la logistique est aujourd’hui comprise comme un lien opérationnel entre les différentes activités de l’entreprise. Elle assure la cohérence et la fiabilité des flux. L’objectif est d’offrir un service de qualité au client en permettant l’optimisation des ressources et la maîtrise des coûts. Non plus basique et locale, la logistique est devenue globale et mondiale, avec le concept de supply chain ou chaîne logistique, chaîne complète d’approvisionnement, chaîne de service. Dans les années 60 et 70, les entreprises étaient dans une logique de production pure. A la fin des années 70, la logique de l’offre cède la place à une logique de la demande consistant à tirer et réguler les flux à partir des besoins des clients. Ainsi la fonction marketing se développe autour des années 80. Cette évolution modifie profondément la conception linéaire classique de la chaîne logistique. Cela se traduit par une recherche de rationalisation de la logistique, permises par de nouveaux systèmes d’information ou de nouveaux modes de production tel le juste à temps. Dans les années 90 la mondialisation entraîne des concentrations industrielles fortes qui vont avoir des impacts forts sur la chaine logistique. Le métier de logisticien apparaît alors. La dématérialisation de la supply chain avec des entreprises qui reçoivent les commandes en ligne du client, décloisonne les différentes activités pour s’inscrire davantage dans la collecte et le traitement de l’information, notamment à partir de planification collaborative. ème La région Rhône-Alpes est la 2 région logistique de France après l’Ile-de-France. La logistique concerne 170 000 salariés pour la fonction logistique au global (tous secteurs : industrie, commerce de gros, …) en 2010 ; soit 9,5 % de l’emploi Rhône-Alpes. Cette filière est devenue une filière de plus en plus externalisée et concentrée afin de limiter les coûts et de s’inscrire dans les politiques de développement durable. Elle nécessite une

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commercialisation moyenne annuelle de plus de 400 000 m² placés (2/3 neufs, 1/3 existants) représentant 20 à 25 % de l’activité nationale. L’effectif cumulé des transporteurs routiers de marchandises et des prestataires logistiques (établissements spécialisés dans ce domaine d’activités) représente 64 000 emplois en Rhône-Alpes en 2010 soit : - 3,6 % des emplois salariés de la région et environ 3 500 établissements localisés essentiellement à proximité des grandes agglomérations et le long de l’axe Rhône-Saône (voir carte ci-après)  Dans la Région Urbaine de Lyon - Ile d’Abeau secteur de Nord-Isère - le long de la rocade Est - secteur de l’aéroport de Saint-Exupéry - parc industriel de la Plaine de l’Ain - autour de Saint-Etienne - au Nord de Lyon secteur de Villefranche-Arnas  Dans la Vallée du Rhône - Valence, Montélimar, Pierrelatte  Autour des agglomérations du Sillon Alpin - Grenoble, Chambéry, Annecy

Suite à la crise économique, la reprise d’activité est sensible dans la filière transport et logistique, mais les entreprises sont prudentes.

 L’emploi - toutes les catégories d’emplois logistiques ont connu une progression de leurs effectifs en 2011, - les licenciements économiques et le chômage technique/partiel dans ce secteur se font plus rares, - 50 % des établissements ont recruté du personnel en 2011.

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 Structurellement, le nombre de postes à pourvoir va se maintenir à un niveau élevé entre 2010 et 2020, en raison principalement des départs en fin de carrière.  Les métiers qui auront une forte proportion de postes à pourvoir entre 2010 et 2020 seront aussi les plus créateurs d’emplois durables.  Les créations d’emploi devraient être importantes pour les cadres et agents d’exploitation des transports et de la logistique, dans un contexte de développement des services logistiques et pour répondre aux attentes.

L’intensification des productions et des échanges intercontinentaux en provenance des pays émergents voire émergés entraine une massification des flux, des flottes des navires porte-conteneurs et une concentration sur les hubs continentaux tels que les ports de la Mer du Nord. Rhône-Alpes bénéficie d’une situation privilégiée :

 Traversée par le premier axe massifié et intermodal français (axe Nord-Sud) et par des corridors ferroviaires européens.  Au carrefour avec l’Italie et le Sillon Alpin.  Dans l’hinterland proche du Grand Port Maritime de Marseille et du Port de Sète dont les rayonnements vont se renforcer.  Des solutions multimodales réelles par la présence d’une liaison fluviale à grand gabarit jusqu’à Pagny et d’un réseau de ports fluviaux.  Présence d’un bassin de consommation, élément essentiel pour le développement de ce secteur : - 6,2 millions d’habitants en Rhône-Alpes en 2010 avec un taux de croissance soutenu - 2,2 millions d’habitants dans l’Aire Urbaine de Lyon.  Une zone privilégiée par les investisseurs pour desservir le grand Sud-Est de la France et la Péninsule Ibérique.  Un aéroport international desservi par le réseau LGV avec la possibilité de mixer fer/air (projet Lyon carex) et disposant de réserves foncières exceptionnelles.  L’Europe passe d’une logique d’aide aux franchissements de relief (ex : tunnels de base), à une logique de corridors multimodaux, subventionnables sur tout l’itinéraire.  Elle définit un réseau central (Core network) à horizon 2030 qui positionne Rhône-Alpes au carrefour de deux corridors, le corridor méditerranéen Lisbonne-Budapest et le corridor Mer du Nord-Méditerranée. Le réseau incorpore parmi ses projets prioritaires européens de grandes infras rhônalpines (Lyon-Turin, Contournement Ferroviaire de l’Agglomération Lyonnaise, axe multimodal Nord-Sud, desserte de Marseille Fos, liaison à grand gabarit Saône Rhin).  Elle priorise un certain nombre de goulets d’étranglement (Lyon), de ports (Marseille) et d’aéroports (Lyon) qui seront reliés au Core Network.

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Hambourg

Amsterdam/ Rotterdam/ Anvers Proposition de Zeebrugge Core Network de Corridor n° 9 Francfort la CE Bruxelles Corridor n°5 Octobre 2011

Budapest Bâle Dijon Corridor n°6

Lyon Milan Ljubljana Venise

Turin

Gênes

Marseille Corridor n°3

Barcelone Méditerranéen Madrid Naples

Valence Rhône-Alpes : desservie par 3 corridors européens : 3, 9, 6. Séville Palerme Source : Commission Européenne /

Des équipements intermodaux à développer ou à moderniser : - une plate-forme d’autoroute ferroviaire à Grenay (type Modalhor) pour prolonger l’autoroute ferroviaire alpine jusqu’à Lyon connectée avec l’autoroute ferroviaire Perpignan-Bettembourg ; - la nécessité de poursuivre l’aménagement de la zone multimodale de Salaise sur Sanne au Sud de Vienne ; - le développement de la fonction logistique sur Valence au carrefour du sillon alpin qui dès 2014, va être totalement électrifié (contrat de projet Rhône-Alpes 2007-2013) ; - à horizon de l’ouverture du tunnel de base, une autoroute ferroviaire à grand gabarit sur l’axe Lyon-Turin.

Concernant la logistique et le développement durable : gain de productivité et Grenelle de l’environnement conduisent le secteur logistique à s’impliquer dans une démarche écologique. Cela incite les entreprises à une refonte des schémas logistiques (ex : Casino, desserte de ses magasins via la Seine, Feu Vert sur Plaine de l’Ain, 1 seul entrepôt pour toute la France (350 magasins). Les entreprises visent une limitation des retours à vide, et une externalisation de la fonction de stockage, distribution autour de centres à vocation nationale et une organisation spécifique de plus en plus pointue nécessitant de nouvelles compétences en gestion des commandes, systèmes informatiques, techniques de stockage. Enfin, cela entraîne un renouveau de la logistique urbaine lié aux contraintes environnementales et au développement du e-commerce qui va impliquer une nouvelle organisation pour la desserte du dernier kilomètre.

4. Hypothèses d’évolution Hypothèse 1 - Rhône-Alpes maximise ses atouts logistiques en leur accordant une priorité d’investissement et de réservation foncière, ce qui renforce sa capacité en faveur de l’industrie. Située au carrefour des axes de circulation Nord Sud et Est Ouest de la partie la plus occidentale de l’Europe, la région Rhône-Alpes est dotée des capacités pour valoriser cet atout majeur pour relier l’Europe centrale, l’Europe du nord et les pays du bassin méditerranéen, attirer les investisseurs, et implanter des industries émergentes. Une politique volontariste de réservation de grands tènements fonciers indispensables au développement logistique est conduite, avec les moyens financiers correspondants fournis par les collectivités territoriales et l’Etat. Cette politique permet :

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- d’augmenter les capacités de circulation (sillons) ferroviaires pour les voyageurs et pour le fret (Lyon Turin, contournement ferroviaire de l’agglomération lyonnaise). - d’optimiser la voie fluviale. - de désaturer la voirie routière et autoroutière par des capacités nouvelles, en particulier dans les nœuds lyonnais et grenoblois. - de jouer une complémentarité entre les ports de BARCELONE, TANGER, MARSEILLE-FOS et l’axe Rhône-Saône. Un foncier important est réservé dans la plaine de Saint Exupéry et dans la plaine de l’Ain pour l’implantation des plateformes logistiques multimodales de taille internationale. Tout cela s’opère dans le respect du bien vivre avec : - le développement de camions à énergie verte et décarbonée, et l’adaptation à la disparition progressive du moteur à explosion ; - la mise en place de protections sonores (murs antibruit ferroviaires) ; - la mixité fonctionnelle de l’immobilier industriel/logistique.

Hypothèse 2 - Rhône-Alpes n’a capitalisé aucune volonté pour valoriser ses atouts et l’axe NORD-SUD nervure du continent s’est déplacé vers l’EST. Faute d’investissements nouveaux dans des infrastructures routières, ferroviaires et fluviales adaptées, Rhône- Alpes n’a pas su profiter de ses atouts. Le phénomène NIMBY a pris le pas sur toute volonté de la part des décideurs pour préserver l’attractivité économique et la vision de long terme en matière d’implantation logistique. Par ailleurs, le port de Marseille-Fos a perdu d’importantes parts de marché au profit du Nord de l’Europe. Le transport de marchandises Sud-Nord, Nord–Sud de l’Europe vers la Méditerranée s’est déplacé fortement à l’est ; le poids de Barcelone ou de Tanger n’ayant pas suffi à « arrimer » un axe fort. Cela a entraîné la fragilisation du potentiel logistique de Rhône-Alpes. Les conséquences pour le maintien et le développement d’unités de production de grande série ont été très négatives et ont considérablement fragilisé l’activité industrielle en Rhône-Alpes.

Hypothèse 3 : Suite à l’augmentation des coûts de l’énergie, à la prise en compte de la finitude des énergies carbonées, à l’émergence d’un mouvement consumériste en faveur des énergies nouvelles conforté par les baisses de prix relatives, les entreprises ont mis en place, à côté des réseaux traditionnels de transport des matières premières, de nouveaux réseaux liés à une production relocalisée de produits manufacturés. Cette production relocalisée a permis le développement de voitures électriques, à hydrogène,… Ce mouvement entraine une revitalisation du commerce et des services de proximité et des rez de chaussée de centre villes et centre-bourg qui avaient été désertés au profit des grandes surfaces.

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Bibliographie

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CENTRE D ’ETUDE ET DE PROSPECTIVE STRATEGIQUE , « Restructuration de la filière aéronautique », mars 2012, Centre d’étude et de prospective stratégique, [en ligne], consulté le 8 juin 2015. Disponible sur Internet :

CONSEIL NATIONAL DE L ’INDUSTRIE , Rapport annuel du Conseil national de l’industrie 2013, Conseil national de l’industrie, 2014, 272 p.

DERROUICHE Ridha, NEUBERT Gilles et DOMINGUEZ -PERY Carine, « Relations collaboratives client-fournisseur : quel modèle de création de valeur ? », 9ème Conférence internationale de Modélisation, Optimisation et SIMulation MOSIM' 12 , Bordeaux, juin 2012, 9 p.

EYMERY Pascal, « Après vingt ans de supply chain management, quelles évaluations, quelles perspectives ? », Réalités industrielles , mai 2006, pp.5-10

GALLARDO Eric et HENRYON Eric, Contrat d’étude prospective dans la filière chimie-environnement en Rhône- Alpes , Ernst & Young, 2012, 23 p.

GROUPE RANDSTAD FRANCE , « L’évolution de l’emploi dans la filière automobile française », 5 mars 2014 [en ligne], consulté le 8 juin 2015. Disponible sur Internet : KPMG et CGPME, Panorama de l’évolution des PME depuis 10 ans , KPMG, juin 2012, 43 p.

LAURENT Michel, Simplifier l’environnement réglementaire des entreprises : une urgence pour la croissance française , Chambre de commerce et d’industrie de Paris, 2011, 94 p.

LE CERCLE DE L ’INDUSTRIE , Les facteurs de succès de la filière transport : focus sur l’aéronautique, l’automobile et le ferroviaire , Le Cercle de l’industrie, février 2013, 21 p.

MEDEF , La satisfaction clients : six bonnes pratiques d’entreprises pour un résultat gagnant/gagnant , Medef, décembre 2010, 86 p.

NOGATCHEWSKY Stéphane et NOGATCHEWSKY Gwenaelle, « Les nouvelles formes de management des relations client-fournisseur, ou comment produire de la confiance », in L’état des entreprises en management , La Découverte., coll. « Repères », 2009, pp. 18-27

OBSERVATOIRE DE LA METALLURGIE , Etude sur les besoins prospectifs en ressources humaines du secteur aéronautique et spatial , Observatoire de la métallurgie, juin 2012, 56 p.

PAGANO Stéphane, DERROUICHE Ridha et NEUBERT Gilles, « Collaboration et création de valeur : vers un modèle de valorisation des relations clients-fournisseurs », 10ème Congrès international de Génie Industriel , La Rochelle, EIGSI, juin 2013, 45 p.

POTAGE Jean, « Création de valeur pour la collaboration entre client et fournisseur », [en ligne], consulté le 8 juin 2015. Disponible sur Internet :

REY Marianne, « Construire l’usine du futur, un défi vital pour les PME », L’Express , 8 décembre 2014

ROUX Alain, « Vers la cotraitance », Le Nouvel Economiste , 16 février 2011 « Les sous-traitants subissent les délocalisations », L’Essor , 27 novembre 2014

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VARIABLES ENVIRONNEMENT

Variable n°10 – Les risques technologiques

Variable n°11 – Les rejets dans l’environnement

Variable n°12 – Attractivité pour l’écologie industrielle et territoriale

Bibliographie

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Variable n°10 Les risques technologiques

1. Définition

Le risque est le croisement entre : • l’ aléa , qui se définit comme un événement potentiellement dangereux ; • et les enjeux , qui représentent les biens, les personnes, l’environnement qui peuvent être concernés par un aléa. Les risques peuvent être classés en fonction de leur gravité et de leur probabilité . Cette dernière permet d’estimer la fréquence d’occurrence d’un évènement accidentel. A cela s’ajoute la notion de vulnérabilité , qui représente les conséquences possibles d’un aléa survenant sur des enjeux. Le niveau de vulnérabilité est évidemment fonction des caractéristiques de l’aléa et de l’importance des enjeux. Enfin, les risques technologiques posent la question de leur acceptabilité , en particulier pour les populations 14 locales .

Pour la réflexion sur l’usine du futur, les risques technologiques sont principalement liés à la réglementation qui s’applique aux installations classées pour la protection de l’environnement (ICPE). Insérées dans le code de l’environnement, ces dernières correspondent aux installations qui pourraient présenter des dangers ou des inconvénients pour : la commodité du voisinage, la santé, la sécurité, la salubrité publiques, l'agriculture, la protection de la nature, de l'environnement et des paysages, l'utilisation rationnelle de l'énergie, la conservation des sites et des monuments ainsi que des éléments du patrimoine archéologique. Il s’agit notamment d’usines, d’ateliers, de dépôts, de chantiers. Les ICPE sont soumis à trois régimes , en fonction de leur dangerosité : l’autorisation, l’enregistrement et la déclaration, comme rappelé dans le schéma ci-après :

Source : MEDDE, « Industrie et environnement : dossier en ligne », novembre 2011

Parmi les ICPE soumises à autorisation, il est possible de distinguer :

14 Ces différentes notions ont été développées par le CESER Rhône-Alpes dans sa contribution intitulée La prévention des risques naturels et technologiques : enjeu de société , CESER Rhône-Alpes, 2013, 80 p.

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- Les sites industriels dits SEVESO . Ils comportent des risques accidentels majeurs en termes d’incendie, d’explosion ou de rejets dangereux. - Les installations classées selon la réglementation européenne IPPC (Integrated Pollution Prevention and Control), modifiée par la directive relative aux émissions industrielles (IED) en 2010. Elles se caractérisent, quant à elles, par un risque persistant de pollution. Les industriels ont notamment l’obligation d’adopter les « meilleures techniques disponibles ou MTD » pour réduire leurs émanations. Les ICPE à autorisation peuvent entrer dans l’une ou l’autre catégorie ou bien les deux.

Outre la réglementation ICPE, les installations nucléaires de base bénéficient d’une réglementation spécifique, à travers notamment la loi du 13 juin 2006 relative à la transparence et à la sécurité en matière nucléaire (dite loi TSN) et l’arrêté du 7 février 2012. Cet arrêté précise notamment que « l'exploitant établit et s'engage à mettre en œuvre une politique en matière de protection » concernant la sécurité, la santé et la salubrité publique ou la protection de la nature et de l'environnement. Des dispositions encadrent les risques accidentels, en particulier : - L’application du principe de défense en profondeur. Plusieurs niveaux « consécutifs et indépendants » de défense sont associés. Ils garantissent une protection si l’un des niveaux n’assurerait pas sa fonction ; - La prise en considération d’accidents cumulatifs, en complément des accidents ponctuels ; - La démonstration de l’impossibilité de « rejets importants rapides ou à des effets dangereux rapides », 15 en dehors de l’installation nucléaire .

2. Indicateurs - Nombre d’installations classées pour la protection de l’environnement (ICPE) industrielles. - Nombre et type d’installations industrielles à risques, dites établissements SEVESO. - Nombre et types d’établissements IPPC. - Nombre d’INB. - Nombre de réacteurs électronucléaires. - Nombre de kilomètres de canalisation de matières dangereuses. - Nombre d’accidents provoqués par des installations industrielles et par le transport de matières dangereuses.

3. Rétrospective • A fin 2012, les installations classées 16 se répartissent de la manière suivante : - environ 450 000 installations entrent dans le régime de la déclaration. - 1 799 établissements sont soumis au régime de l’enregistrement. - 42 324 ICPE soumises à autorisation (ICPE A) sont répertoriées en France. Du fait d’une hausse des seuils d’autorisation, le nombre d’établissements soumis à autorisation décroît depuis 2003.

15 Source AUTORITE DE SURETE NUCLEAIRE : ASN, « Nouvelle réglementation applicable aux INB : ce qui change », Contrôle : la revue technique de la sûreté nucléaire et de la radioprotection , mars 2014, n o 197, pp.8-12 16 Chiffres issus du MINISTERE DE L ’E COLOGIE , DU DEVELOPPEMENT DURABLE ET DE L ’E NERGIE : DIRECTION GENERALE DE LA PREVENTION DES RISQUES , Inspection des installations classées : Bilan d’activité 2012 , Ministère de l’Ecologie, du Développement durable et de l’Energie, 2013, 219 p.

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Source : MEDDE, « Inspection des installations classées : Bilan d’activité 2012 », 2013

• Parmi les ICPE A, 1 173 ICPE industrielles dites SEVESO ont été enregistrées en France en 2012, dont 53 % 17 sont classées à seuil haut (AS) . Les principales activités concernées sont les industries chimiques et pharmaceutiques, les établissements de logistique pour entreposer des produits dangereux, les dépôts pétroliers.

Source : CGDD, « Industries et environnement », 2014

Ces installations sont principalement implantées le long des routes, des fleuves, sur le littoral et dans les zones industrielles afin de bénéficier des ressources substantielles en eau, des voies de communication et des productions des autres entreprises.

17 Chiffres issus du MINISTERE DE L ’E COLOGIE , DU DEVELOPPEMENT DURABLE ET DE L ’E NERGIE : DIRECTION GENERALE DE LA PREVENTION DES RISQUES , Inspection des installations classées : Bilan d’activité 2012 , Ministère de l’Ecologie, du Développement durable et de l’Energie, 2013, 219 p.

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Si le nombre d’installations reste relativement stable, il est important de rappeler que dans les zones où sont principalement situées ces usines, la population croît, notamment en Rhône-Alpes. Cette évolution rend les territoires plus vulnérables et pose également la question de l’acceptabilité des usines par les populations. Une des solutions proposées face aux risques majeurs est l’adoption de plans de prévention des risques technologiques (PPRT), instaurés par la loi du 30 juillet 2003, pour les établissements SEVESO à seuil haut. Au 18 21 mai 2014, 299 PPRT ont été finalisés, représentant 73 % des plans à élaborer .

• Concernant les installations classées IPPC , 6479 établissements sont répertoriés en France en 2012 dont 51 19 % concernent des installations industrielles . Ils se répartissent de la manière suivante selon les secteurs d’activité :

Source : CGDD, « Industries et environnement », 2014

Les populations locales et les espèces faunistiques et floristiques dans les Zones Naturelles d'Intérêt Ecologique Faunistique et Floristique (ZNIEFF) peuvent être impactées par ces installations. Rhône-Alpes est l’une des quatre régions les plus concernées.

18 Source : MINISTERE DE L ’E COLOGIE , DU DEVELOPPEMENT DURABLE ET DE L ’E NERGIE , « Maîtrise de l’urbanisation : plans de prévention des risques technologiques PPRT », février 2014 [en ligne]. 19 Chiffres issus du MINISTERE DE L ’E COLOGIE , DU DEVELOPPEMENT DURABLE ET DE L ’E NERGIE : DIRECTION GENERALE DE LA PREVENTION DES RISQUES , Inspection des installations classées : Bilan d’activité 2012 , Ministère de l’Ecologie, du Développement durable et de l’Energie, 2013, 219 p.

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Source : CGDD, « Industries et environnement », 2014

• En France, 125 installations nucléaires de base (INB) sont recensées (110 INB en fonctionnement et 15 en arrêt et démantèlement). Ces INB comprennent des réacteurs, mais aussi des laboratoires, des sites de stockage 20 de déchets… 58 réacteurs (soit 42 INB) sont répartis sur 19 sites à l’échelle nationale. • L’analyse de la situation en Rhône-Alpes montre qu’elle est la première région de France en termes d’installations industrielles SEVESO (134 sites à fin 2012) et d’établissements industriels polluants (353 IPPC à fin 2012).

Installations classées en Rhône-Alpes au 31 décembre 2012 Nombre d’installations classées soumises à enregistrement 202 Nombre d’installations classées soumises à autorisation 3 714 Dont SEVESO seuil haut (AS) 81 Dont SEVESO seuil bas (SB) 53 Dont établissements industriels IPPC 353 Source : tableau créé à partir de MEDDE, « Inspection des installations classées : Bilan d’activité 2012 », 2013

• Les risques technologiques sont également liés au transport de matières dangereuses (TMD), qui s’effectue par les transporteurs routiers, ferroviaires, aériens, maritimes, fluviaux ou par canalisation. 12 000 21 communes seraient concernées en France. En Rhône-Alpes, environ 5 000 kilomètres de canalisations de 22 matières dangereuses sont présentes sur le territoire (sur 50 000 kilomètres en France ).

20 AUTORITE DE SURETE NUCLEAIRE : ASN, « Nouvelle réglementation applicable aux INB : ce qui change », Contrôle : la revue technique de la sûreté nucléaire et de la radioprotection , mars 2014, n o 197, pp.8-12 21 Selon la base de données Gaspar, bilan non exhaustif. Source : MINISTERE DE L ’E COLOGIE , DU DEVELOPPEMENT DURABLE ET DE L ’E NERGIE , « Risques technologiques : le transport de matières dangereuses », mai 2012 [en ligne] 22 CONSEIL ECONOMIQUE , SOCIAL ET ENVIRONNEMENTAL REGIONAL RHONE -ALPES , La prévention des risques naturels et technologiques : enjeu de société , CESER Rhône-Alpes, 2013, 80 p.

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• Selon la base ARIA, entre 1992 et 2012, 22 606 accidents ou incidents 23 concernant les installations classées ont été enregistrés sur le territoire français, dont 919 pour l’année 2012. Ces accidents ont de multiples effets : - Des conséquences sur le plan humain. Sur cette période de 21 ans, 279 accidents ont conduit à des décès sur les 22 114 événements aux conséquences connues. - Des conséquences sur le plan économique avec notamment des dégâts matériels et du chômage technique. En 2012, 24 % des accidents ont entrainé des pertes d’exploitation. - Des conséquences sur le plan environnemental, avec des rejets dans l’eau, l’air, les sols et des impacts sur la faune et la flore sauvages et en agriculture. Par exemple, en 2012, 17 % des accidents ont provoqué une pollution de l’air.

Source : MEDDE, « Inventaire 2013 des accidents technologiques », 2014

24 Selon cette même base ARIA, entre 1992 et 2011, 3 280 accidents ont été comptabilisés lors de TMD, en majorité des accidents sur le réseau routier qui constitue le principal moyen de transport. Le TMD par canalisation est moins accidentogène (7 fois moins d’accidents que la route).

4. Hypothèses d’évolution

Hypothèse 1 - Le renforcement des exigences Les régions ont obtenu une certaine autonomie en matière de règlementation des installations classées. Comme cela se produit souvent pour les nouveaux promus, la tentation de se montrer plus sévère, plus intransigeant qu'avant trouve ici un champ inespéré. On multiplie par 10 le nombre de sites « installations classées », incluant les TPE et les fermes familiales jusqu'alors épargnées, on divise par 10 les seuils de détection des substances rejetées. Plus avant on s'interroge sur le fonctionnement des usines la nuit et le week-end, on limite par ailleurs les approvisionnements en énergie et matières premières. Enfin on demande aux usines de s'acquitter d'une A3P (Amende Pour Pollution Prévisionnelle)

Hypothèse 2 - Appréciation des équilibres/posture de conseil de l’administration /un contrôle administratif porteur de valeur ajoutée La gestion des risques technologiques évolue vers une logique de contractualisation avec les organes de contrôle au cœur desquels l’Etat reste un acteur clé. C’est cependant avec des moyens humains renouvelés et

23 Chiffres issus du MINISTERE DE L ’E COLOGIE , DU DEVELOPPEMENT DURABLE ET DE L ’E NERGIE : DIRECTION GENERALE DE LA PREVENTION DES RISQUES , Inventaire 2013 des accidents technologiques , Ministère de l’Ecologie, du Développement durable et de l’Energie, 2014, 19 p. 24 Source : MINISTERE DE L ’E COLOGIE , DU DEVELOPPEMENT DURABLE ET DE L ’E NERGIE , « Risques technologiques : le transport de matières dangereuses », mai 2012 [en ligne]

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dans le cadre de procédures rénovées que ce nouveau contrôle est organisé, tout en reposant sur une forte diminution des règles législatives et réglementaires. Par une action de conseil et d’accompagnement en amont des autorisations d’installations, une appréciation précise des risques de chaque installation, un engagement sur des cibles et des résultats, le tout faisant l’objet d’un contrat quinquennal avec l’Etat, les services apprécient en amont et à postériori les risques et constatent et mesurent objectivement les effets constatés à la fin de la période. Les conclusions sont alors présentées aux acteurs locaux, décideurs publics et représentants des collectivités territoriales concernées. Pour ce faire l’Etat et les collectivités territoriales ont révisé leurs stratégies de recrutement et engagé, formé et équipé des agents de contrôle spécialisés, aptes à apprécier, calculer, mesurer les risques technologiques, autant qu’à conseiller les aménagements à conduire au sein comme autour des installations industrielles. Leur posture de conseil et/ou de contrôle font l’objet d’assermentations séparées

Hypothèse 3 - « Les zones de moindres risques » La notion de Risque (probabilité d'un aléa X conséquences de cet aléa) se voit compléter par une analyse topographique et démographique. On cherche alors à trouver sur les territoires les zones disponibles pour accueillir les sites de production en corrélant risque et espace. Les zones urbaines se voient ainsi dessaisies de leurs activités à risques au profit de zones plus excentrées ou de zones « inexplorées » comme certains domaines de montagne quasiment déserts. L'évolution des technologies (robotisation, pilotage à distance,...) soutient ce mouvement qui intéresse une population de salariés compétents et motivés fonctionnant sur le modèle des plateformes pétrolières. Concomitamment les usines trouvent sur place une partie de leurs besoins en ressources (en particulier énergétiques) et organisent leurs flux de productions pour tirer avantage du relief. Les usines de fond de vallée retrouvent les sommets.

Hypothèse 4 - Au nom de la compétitivité La nécessité de restaurer une compétitivité à tout prix afin de relocaliser des activités industrielles et faire face à la concurrence des émergents est fortement encouragée au niveau européen et national. Dans ce contexte, la notion de risque est fortement atténuée dans les règlementations et Rhône-Alpes s’engage dans une démarche visant à rendre cette considération secondaire. Malgré les protestations des organisations environnementalistes, les citoyens se sont globalement rangés à l’idée que l’activité économique et l’emploi sont prioritaires et que les risques sont des éléments secondaires. Ils encouragent les décideurs à lever tous les freins susceptibles de freiner l’implantation d’activités à risque et à montrer la capacité du territoire régional à accueillir et maintenir ces activités.

Sources : • CESER Rhône-Alpes, La prévention des risques naturels et technologiques : enjeu de société • Commissariat général au développement durable, « Industries et environnement » • Inventaire 2013 des accidents technologiques • Inspection des installations classées, bilan activité 2012 • www.statistiques.developpement-durable.gouv.fr • www.installationsclassees.developpement-durable.gouv.fr • http://www.developpement-durable.gouv.fr , maîtrise de l’urbanisation – PPRT • Ministère de l’écologie – site internet www.statistiques.developpement-durable.gouv.fr , industrie et environnement • Ministère de l’écologie – site internet www.statistiques.developpement-durable.gouv.fr , le risque industriel • Ministère de l’écologie – site internet www.statistiques.developpement-durable.gouv.fr , le transport de matières dangereuses • Nouvelle réglementation applicable aux INB : ce qui change.

L'Usine du futur_2ème partie : Les fiches variables • CESER Rhône-Alpes • 7 Juillet 2015 75

Variable n°11 Les rejets dans l’environnement

1. Définition Du fait de son fonctionnement, une usine peut restituer des éléments dans le milieu naturel. Les sols, l’air et l’eau sont les trois grands écosystèmes concernés. - Site pollué « Site qui, du fait d’anciens dépôts de déchets ou d’infiltration de substances polluantes, présente une pollution 25 susceptible de provoquer une nuisance ou un risque pérenne pour les personnes ou l’environnement. » - Polluant de l’air Il s’agit « d’une substance présente à une concentration suffisamment supérieure à son niveau normal pour 26 produire un effet néfaste mesurable sur l'homme, les animaux, les végétaux ou les matériaux » . Dans cette étude, les polluants atmosphériques sont classés selon quatre catégories : les particules en suspension, les gaz acidifiants, eutrophisants et photochimiques (gaz AEP), les métaux lourds et les polluants organiques persistants (les gaz à effet de serre font l’objet d’une analyse particulière). - Gaz à effet de serre (GES) Ils représentent les « constituants gazeux de l’atmosphère, tant naturels qu’anthropiques, qui absorbent et 27 réémettent le rayonnement infrarouge » . Sont considérés comme gaz à effet de serre notamment : le dioxyde de carbone (CO 2), le méthane (CH 4), le protoxyde d’azote (N 2O), les gaz fluorés… - Eaux résiduaires Elles « sont issues des processus de fabrication (utilisation de solvants, réactions chimiques, nettoyage des matériaux, etc.). […] En France, l’industrie est responsable d’environ la moitié des rejets de polluants organiques 28 (l’autre partie étant d’origine domestique) et de presque la totalité des rejets de métaux lourds ». En majorité, les eaux rejetées par les industries sont épurées par les stations de traitement ou sur le site lui- même. Toutefois, il est possible que des éléments polluants soient restitués dans l’environnement.

2. Indicateurs Pollution des sols : - nombre de sites pollués - types de contaminants - répartition des sites en fonction du secteur industriel concerné - répartition des sites en région. Rejets dans l’eau : - nombre d’industries déclarant des émissions de polluants supérieures aux seuils fixés - types de rejets dans l’eau et leur évolution - répartition des rejets par secteur. Rejets dans l’air : - quantité d’émissions dans l’air et leur évolution, en fonction du type de polluants - répartition des émissions par secteur d’activité en Rhône-Alpes. Emissions de gaz à effet de serre (GES) : - quantité de GES et leur évolution pour l’industrie - origines des émissions de GES

25 Source : MINISTERE DE L ’E COLOGIE , DU DEVELOPPEMENT DURABLE ET DE L ’E NERGIE , « Pollutions des sols - BASOL » [en ligne] 26 Source : ATMO AUVERGNE , « Site internet d’Atmo Auvergne » [en ligne] 27 MINISTERE DE L ’E COLOGIE , DU DEVELOPPEMENT DURABLE ET DE L ’E NERGIE et CAISSE DES DEPOTS , Chiffres clés du climat France et Monde. Edition 2014 , Ministère de l’Ecologie, du Développement durable et de l’Energie, 2013, 48 p. 28 Source : MINISTERE DE L ’E COLOGIE , DU DEVELOPPEMENT DURABLE ET DE L ’E NERGIE , « Industrie et environnement : dossier en ligne », novembre 2011 [en ligne]

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- situation pour l’industrie manufacturière - situation en Rhône-Alpes pour le secteur industriel.

NB : il s’agit d’indicateurs relativement récents pour lesquels des ajustements seront peut-être nécessaires.

3. Rétrospective • Pollution des sols En France, en 2012, il existe 5 285 sites pollués (base BASOL) et 2 930 sites font l’objet d’une surveillance des 29 eaux souterraines . Quant aux anciens sites pollués, moins de 260 000 sites sont enregistrés dans la base 30 BASIAS . Parmi les sept grandes catégories de polluants, les hydrocarbures arrivent en tête avec 65 % des pollutions, puis viennent les métaux lourds (cf. schéma ci-dessous).

Source : MEDDE, « Les sites et sols pollués : en ligne », novembre 2011 A fin 2011, l’industrie est responsable de 83 % des sites et sols pollués recensés en France, selon la répartition suivante : 78 % pour l’industrie manufacturière, 17,5 % pour « eau, déchets et dépollution », 3 % pour les 31 industries extractives et 1,5 % pour la production d’énergie . La distribution des sites pollués sur le territoire national est inégale. Rhône-Alpes, avec 17,57 % des sites 32 pollués, au 17 octobre 2014, est la première région concernée . Lyon et Grenoble figurent parmi les 8 grandes 33 villes de plus de 100 000 habitants où sont implantés plus de 20 sites pollués .

• Pollution de l’eau Les IPCE A et les industries extractives doivent déclarer toute émission de polluants dans les milieux aquatiques 34 supérieure aux seuils fixés pour chaque catégorie. En 2011, 1 869 sites industriels ont fait cette déclaration .

29 Source : MINISTERE DE L ’E COLOGIE , DU DEVELOPPEMENT DURABLE ET DE L ’E NERGIE : DIRECTION GENERALE DE LA PREVENTION DES RISQUES , Inspection des installations classées : Bilan d’activité 2012 , Ministère de l’Ecologie, du Développement durable et de l’Energie, 2013, 219 p. 30 MINISTERE DE L ’E COLOGIE , DU DEVELOPPEMENT DURABLE ET DE L ’E NERGIE , « Pollutions des sols - BASOL » [en ligne] 31 Source : COMMISSARIAT GENERAL AU DEVELOPPEMENT DURABLE , Industries et environnement , Ministère de l’Ecologie, du Développement durable et de l’Energie, 2014, 68 p. 32 Source : MINISTERE DE L ’E COLOGIE , DU DEVELOPPEMENT DURABLE ET DE L ’E NERGIE , « Pollutions des sols - BASOL » [en ligne] 33 MINISTERE DE L ’E COLOGIE , DU DEVELOPPEMENT DURABLE ET DE L ’E NERGIE , « Les sites et sols pollués », novembre 2011 [en ligne]

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L’industrie manufacturière arrive en tête, en masse, des émissions de polluants dans les milieux aquatiques avec plus des trois quarts des rejets. Entre 2004 et 2009, parmi les secteurs industriels manufacturiers, la métallurgie et la chimie sont les deux premiers contributeurs. Les rejets d’autres polluants tels que le cyanure ou l’arsenic 35 sont, en masse, moins notables mais ils ont des impacts majeurs sur le milieu naturel .

L’agence de l’eau Rhône-Méditerranée-Corse a mené une étude intitulée « Analyse socio-économique de 36 l’industrie sur les bassins Rhône-Méditerranée et Corse » . Cette réflexion a permis de classer les industries en 37 fonction de trois marqueurs de pollution : les matières en suspension (MES) , la demande chimique en oxygène 38 39 (DCO) et les métaux toxiques (METOX) . Selon le marqueur analysé, les activités les plus polluantes sont différentes, comme le montre les deux graphiques ci-après : - pour les MES, la sidérurgie-fonderie-métallurgie arrive en tête ; - pour la DCO, le secteur « papier carton » est le premier contributeur ; - pour les METOX, la filière de chimie de base-raffinerie est la principale émettrice.

Source : Agence Eau RMC, « Analyse socio-économique de l’industrie dans les bassins Rhône Méditerranée et de Corse : synthèse », 2013

34 Source : COMMISSARIAT GENERAL AU DEVELOPPEMENT DURABLE , Industries et environnement , Ministère de l’Ecologie, du Développement durable et de l’Energie, 2014, 68 p. 35 MINISTERE DE L ’E COLOGIE , DU DEVELOPPEMENT DURABLE ET DE L ’E NERGIE , « Industrie et environnement : dossier en ligne », novembre 2011 [en ligne] 36 AGENCE DE L ’EAU RHONE MEDITERRANEE CORSE , Analyse socio-économique de l’industrie dans les bassins Rhône Méditerranée et de Corse : synthèse , Agence de l’eau Rhône Méditerranée Corse, 2013, 21 p. 37 MES : Particules insolubles présentes en suspension dans l'eau. Elles s'éliminent en grande partie par décantation. Une des mesures classiques de la pollution des eaux. Source : glossaire sur le site internet de l’agence de l’eau Seine Normandie. 38 DCO : Quantité de l'ensemble de la matière oxydable. Elle correspond à la quantité d'oxygène qu'il faut fournir grâce à des réactifs chimiques puissants, pour oxyder les matières contenues dans l'effluent. Source : AGENCE DE L ’EAU SEINE -NORMANDIE , « Glossaire de l’Agence de l’eau Seine Normandie » [en ligne]. 39 METOX : Paramètre de mesure de la pollution par métaux et métalloïde. Ils sont exprimés par la somme de leur masse en grammes, pondérée par les coefficients multiplicateurs significatifs de leur toxicité : arsenic, cadmium, chrome, cuivre, mercure, nickel, plomb, zinc. Source : AGENCE DE L ’EAU SEINE -NORMANDIE , « Glossaire de l’Agence de l’eau Seine Normandie » [en ligne].

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Source : Agence Eau RMC, « Analyse socio-économique de l’industrie dans les bassins Rhône Méditerranée et de Corse : synthèse », 2013

Pollution de l’air Si le secteur industriel émet encore de nombreuses substances dans l’atmosphère, de manière globale une diminution des rejets est observée. L’analyse ci-après cible quelques éléments polluants émis principalement par l’industrie.

Pour l’industrie manufacturière

Part des Catégories de Type de Classement Evolution 1990 2012 émissions 40 polluants polluants en 2012 en 2012 1990-2012

Particules en PM 10 128 kt 78 kt 29% 2ème rang - 39% suspension PM 2,5 64 kt 39 kt 22% 2ème rang - 39% Dioxyde de 415 kt 89 kt 38% 2ème rang - 79% soufre Gaz AEP Monoxyde de 1 783 kt 1 084 kt 34% 2ème rang - 39% carbone Arsenic 10,5 t 2,7 t 42% 1er rang - 74% Métaux lourds Cadmium 14,9 t 1,5 t 60% 1er rang - 90% Nickel 172 t 30 t 50% 1er rang - 83% Polluants organiques PCB 135 kg 33 kg 57% 1er rang - 76% persistants Source : tableau réalisé à partir de CITEPA et MEDDE, « Inventaire des émissions de polluants atmosphériques et de gaz à effet de serre en France : séries sectorielles et analyses étendues », 2014

40 Classement entre les secteurs transformation d’énergie, industrie manufacturière, résidentiel/tertiaire, agriculture/sylviculture, transport routier, autres transports, en fonction de la quantité émise en 2012.

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Pour la transformation d’énergie

Part des Catégories de Type de Classement Evolution 1990 2012 émissions en 41 polluants polluants en 2012 2012 1990-2012

Particules en PM 10 57 kt 5,2 kt 2% 6ème rang - 91% suspension PM 2,5 45 kt 3,4 kt 2% 6ème rang - 92% Dioxyde de 583 kt 105 kt 45% 1er rang - 82% soufre Gaz AEP Monoxyde de 58 kt 50 kt 2% 6ème rang - 14% carbone Arsenic 2,1 t 0,8 t 13% 4ème rang - 62% Métaux lourds Cadmium 4,2 t 0,3 t 12% 3ème rang - 93% Nickel 94 t 24 t 40% 2ème rang - 74% Polluants organiques PCB 27 kg 11 kg 19% 3ème rang - 59% persistants Source : tableau réalisé à partir de CITEPA et MEDDE, « Inventaire des émissions de polluants atmosphériques et de gaz à effet de serre en France : séries sectorielles et analyses étendues », 2014

La diminution des émissions de particules PM 10 et PM 2,5 entre 1990 et 2012 s’explique par des progrès technologiques limitant les rejets et par la fermeture des mines.

Parmi les gaz acidifiants, eutrophisants et photochimiques, le secteur industriel est le plus contributeur pour le dioxyde de soufre . Bien que les émissions de ce gaz puissent être impactées par le climat et le contexte économique, la tendance est à la diminution des rejets pour plusieurs raisons : - la baisse des énergies fossiles consommées liée au développement de l’électricité nucléaire ; - les économies d’énergie ; - le respect d’une réglementation plus contraignante ; - la réduction du soufre dans les combustibles utilisés et un meilleur rendement énergétique dans le secteur industriel. Pour le monoxyde de carbone , bien qu’une diminution globale apparaisse, des variations annuelles sont observées entre 1990 et 2012. L’industrie manufacturière est le deuxième secteur émetteur après le secteur résidentiel/tertiaire. er L’industrie manufacturière est le 1 contributeur parmi les trois métaux lourds analysés. Toutefois, depuis 1990, les émissions diminuent, malgré quelques variations annuelles. Cette tendance favorable peut s’expliquer notamment par l’installation de dépoussiéreurs et des filtres, par une optimisation de l’utilisation du minerai de fer (cadmium) et par une quantité de fioul lourd consommée moindre (nickel). Pour le secteur de la transformation d’énergie, trois principaux facteurs peuvent justifier la réduction des émissions : la baisse de la quantité de fioul lourd utilisée, l’arrêt de quelques centrales thermiques et l’interruption de deux sites de raffinage du pétrole pour l’année 2012. Enfin, la mise en conformité des sites de traitement des déchets industriels dangereux et la réduction des déchets hospitaliers brulés ont conduit à une diminution des rejets de PCB par l’industrie manufacturière. Dans le domaine de la transformation d’énergie, l’épuration des émissions dans l’air des incinérateurs avec récupération de chaleur est une des raisons de la réduction des rejets de PCB de 59 % depuis 1990. En Rhône-Alpes, selon les polluants, une baisse des rejets entre 2000 et 2012 est constatée. Toutefois, malgré les efforts entrepris, trois polluants posent encore des difficultés : le dioxyde d’azote, les PM 10 et les composés organiques volatils non méthaniques (COVNM). L’industrie est, avec 50 % des émissions, la première 42 contributrice pour les COVNM.

41 Classement entre les secteurs suivant : transformation d’énergie, industrie manufacturière, résidentiel/tertiaire, agriculture/sylviculture, transport routier, autres transports, en fonction de la quantité émise en 2012. 42 AIR RHONE -ALPES , Air Rhône-Alpes dresse le bilan de la qualité de l’air en 2013 , Air Rhône-Alpes, 2014, 29 p

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Source : Air Rhône-Alpes, « Air Rhône-Alpes dresse le bilan de la qualité de l’air en 2013 », 2014

Emissions de gaz à effet de serre (GES) En 2010, un tiers des GES est émis par l’industrie en France métropolitaine. La première responsable des émissions de GES est l’industrie manufacturière (63 % des émissions de l’industrie), puis la production d’énergie 43 44 (21 %) . Avec 86 % des GES rejetés, le dioxyde de carbone est le principal gaz émis par l’industrie . Entre 1993 et 2008, les émissions de GES par l’industrie ont diminué de 14 % (2 % seulement pour les émissions 45 françaises) . Zoom sur l’industrie manufacturière La combustion et la fabrication représentent près des ¾ des émissions de GES de l’industrie manufacturière. Une baisse importante de ces rejets est observée entre 1990 et 2011 : - 38,7 % (cf. schéma ci-après). L’industrie 46 manufacturière est à l’origine, en 2012, de 23 % des émissions totales de CO 2 hors UTCF (utilisation des terres, 47 leurs changements et la forêt) et hors biomasse.

43 Source : COMMISSARIAT GENERAL AU DEVELOPPEMENT DURABLE , Industries et environnement , Ministère de l’Ecologie, du Développement durable et de l’Energie, 2014, 68 p. 44 Source : COMMISSARIAT GENERAL AU DEVELOPPEMENT DURABLE , Industries et environnement , Ministère de l’Ecologie, du Développement durable et de l’Energie, 2014, 68 p. 45 Source : COMMISSARIAT GENERAL AU DEVELOPPEMENT DURABLE , Industries et environnement , Ministère de l’Ecologie, du Développement durable et de l’Energie, 2014, 68 p. Les rejets dus aux importations des matières et produits ne sont pas comptabilisés. 46 Source : CITEPA, « Site internet du Centre interprofessionnel technique d’études de la pollution atmosphérique : CITEPA » [en ligne] 47 Dans le cadre des activités humaines liées à la terre sont distinguées les émissions dues à l’agriculture et celles dues à utilisation des terres, leurs changements et la forêt (UTCF). Le secteur UTCF correspond à un découpage du territoire en unités géographiques sur lesquelles les différents flux, émissions et absorptions liées à l'utilisation du sol, sont estimés. Six catégories ont été identifiées : forêts, terres cultivées, prairies, terres humides, zones artificielles et autres terres. Source : CITEPA, « Site internet du Centre interprofessionnel technique d’études de la pollution atmosphérique : CITEPA » [en ligne].

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Source : ADEME, « Climat, air et énergie : chiffres-clés. Edition 2013 », 2014 Zoom sur Rhône-Alpes L’industrie représente 24 % des émissions de GES rhônalpines, soit 9,6 MteqCO 2 en 2012. Entre 1990 et 2012, 48 une baisse de -19 % est enregistrée pour ce secteur .

Source : OREGES, « Chiffres clés pour l’année 2012 », 2014

4. Hypothèses d’évolution

Hypothèse 1 - Passage de calcul par pression à une réelle mesure des impacts Le système de contrôle des rejets a évolué, sous la pression des milieux économiques qui ont fait valoir le différentiel de méthode au sein même de l’Europe et la relative déconnection entre l’application de normes prudentielles et les impacts réels. Les autorités de contrôle ont accepté de conduire des travaux et réflexions autour de la mesure réelle des impacts, appuyés dans ces démarches par la communauté scientifique. Cette évolution, plus près des réalités de terrain que d’une démarche purement règlementaire a permis de donner une dynamique plus positive et une meilleure lisibilité de l’action à mener sur ce sujet au sein des entreprises.

Hypothèse 2 - Les rejets dans l’environnement n’existent plus ont sont directement utilisables par l’usager Dans l’usine du futur, la question des rejets dans l’environnement n’est plus considérée comme une conséquence problématique mais comme un avantage au profit de l’environnement comme des divers usagers. Les progrès scientifiques réalisés en vingt ans ont eu pour conséquence une évolution phénoménale des procédés industriels et permettent désormais de minimiser les rejets de toute sorte ou de rendre directement

48 Chiffres issus de OBSERVATOIRE REGIONAL DE L ’ENERGIE ET DES GAZ A EFFET DE SERRE RHONE -ALPES : OREGES, Chiffres clés pour l’année 2012 , OREGES Rhône-Alpes, 2014, 27 p.

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utilisables tous ceux qui restent quantitativement décelables. Cette évolution vers le zéro déchet a pu être engagée après la mise en place d’un système international de contrôle des produits et substances en circulation, qui a eu pour effet de réduire tout approvisionnement suspect des usines, les contraignant à revisiter tous leurs procédés de fabrication. Les usines du futur qui produisent encore des déchets en quantité, n’ont plus la possibilité de les valoriser, et sont à leur tour contraintes de les rendre directement réutilisables par l’usager.

Hypothèse 3 - « Changement de thermomètre et de référentiel. » On sort d’une vision « normative », sachant qu’historiquement la norme se crée et s’aligne sur le seuil de détection et a tendance à se renforcer au fur et à mesure que les techniques s’améliorent... Faisant par ailleurs le constat qu’à l’échelle de l’Europe déjà, sans parler de l’échelle mondiale, les normes sont loin d’être uniformisées (ex : le seuil de 50 mg de nitrates dans l’eau en droit français) et que pour de nombreuses substances, il n’existe pas de seuils statistiquement validées vu la complexité du sujet. Forts de ce constat, de même que le Bouthan a créé la notion de Bonheur National Brut en lieu et place du PIB, nous regardons à l’avenir l’état de santé de nos concitoyens, l’allongement de la vie en pleine possession de ses moyens, la baisse de la mortalité des publics dit fragiles. Ainsi que la persistance en qualité et en diversité des milieux naturels et de notre environnement. On crée ainsi une perception du risque objectivée par des indicateurs concrets, accessibles à tous. On sort des débats contradictoires d’experts. On crée une dynamique collective et responsable, accessible à tous.

Hypothèse 4 - « Vers une convergence mondiale de la réglementation environnementale » Après plusieurs décennies de concertation mondiale difficile autour de la limitation des rejets de gaz à effet de serre (GES) les grandes puissances économiques ont enfin trouvé un accord permettant de concilier la protection globale de la planète et leurs intérêts propres. Cette prise de conscience de la vulnérabilité de l’environnement a permis de faire des progrès considérables en matière de protection de l'environnement, vis-à-vis des pollutions des sols, de l’eau et de l’air. Les pays les plus avancés avaient de longue date, élaboré un système normatif vis- à-vis des différents polluants, quelque fois avec excès du fait du principe de précaution et des évolutions technologiques permettant des mesures de plus en plus précises. Les grands écarts de réglementation ont générées des distorsions de concurrence, des délocalisations d’activités mais aussi des pratiques illégales dommageables finalement pour l’environnement. L’OMC et l’OMS sous l’égide des nations unies ont réussi à élaborer pour les principaux polluants une cible réglementaire vers laquelle les pays du G20 et de nombreux autres pays se sont engagés à converger en moins de 10 ans.

Hypothèse 5 - L’anarchie des rejets La compétitivité exacerbée avec les pays émergents et entre pays européens, a repoussé au second plan la question des rejets. Les réglementations des années 2010-2020 ont été fortement assouplies voir supprimées. Il faut maintenir et développer les activités économiques sur les territoires à tout prix, les rejets anarchiques sont tolérés et même acceptés par la population au grand dam des défenseurs de l’environnement. Les décideurs n’intègrent plus ou peu ce critère. Les effets sur la santé sont manifestes mais ce n’est plus une priorité affichée.

L'Usine du futur_2ème partie : Les fiches variables • CESER Rhône-Alpes • 7 Juillet 2015 83

Variable n°12 Attractivité pour l’écologie industrielle et territoriale

1. Définition Considérée comme l’une des parties de l’économie circulaire, l’écologie industrielle et territoriale (EIT) vise à « mettre en place un mode d’organisation industrielle sur un même territoire par une gestion optimisée des stocks 49 et des flux de matière, d’énergie et des services » . Cette démarche n’associe pas uniquement des entreprises mais aussi des chambres consulaires, des collectivités territoriales, des fournisseurs… 50 Trois étapes sont identifiées dans une démarche d’EIT : - le diagnostic des flux et stocks du territoire à travers une évaluation du « métabolisme » du territoire ; - la recherche de synergies ; - la mise en œuvre des pistes identifiées.

2. Indicateurs - La production de déchets par le monde industriel - La consommation d’énergie par les industries - Les prélèvements d’eau industriels - La consommation et la production de matières premières par le secteur industriel - Le nombre de démarches d’EIT en France et en Rhône-Alpes.

3. Rétrospective Quelques stocks et flux dans l’industrie 51 En 2010, 38 millions de tonnes de déchets sont recensés pour le monde industriel. L’industrie manufacturière arrive en tête selon la répartition suivante entre les branches :

Source : CGDD, « Industries et environnement », 2014

49 MINISTERE DE L ’E COLOGIE , DU DEVELOPPEMENT DURABLE ET DE L ’E NERGIE , « L’économie circulaire », juin 2014 [en ligne] 50 GRAND LYON : MILLENAIRE 3, Des modèles de développement économique durable pour la métropole , Grand Lyon, 2010, 117 p. 51 Source : COMMISSARIAT GENERAL AU DEVELOPPEMENT DURABLE , Industries et environnement , Ministère de l’Ecologie, du Développement durable et de l’Energie, 2014, 68 p.

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Pour les déchets non dangereux, les deux premiers secteurs sont celui du bois et celui de la métallurgie. Une petite diminution de la production de ce type de déchets est observée entre 2006 et 2008 et, en parallèle, une 52 augmentation de la part de recyclage est constatée . Pour les déchets dangereux, l’industrie chimique et la métallurgie sont les deux premiers contributeurs de 53 déchets. 35 % de la production est recyclé et 15 % est brûlé avec récupération de chaleur . En 2010, la consommation énergétique du secteur industriel représente 36 % de celle de la métropole (22 % pour les commerces et services ; 38 % pour les ménages). La production d’énergie (23 %) et la chimie/pharmacie (21 %) arrivent en tête. Le secteur industriel a légèrement moins consommé d’énergie (-0,3 %) entre 1993 et 2008. En revanche, dans le 54 même temps, sa production s’élevait de 39 % . Pour les prélèvements d’eau soumis à redevance, la production d’énergie, avec 66 % des ponctions totales, est le premier secteur, suivi de l’industrie manufacturière. Cette dernière a, depuis 2003, entrepris des efforts avec 55 une réduction de 32 % de ses prélèvements , comme le montre le schéma ci-après.

Source : CGDD, « Industries et environnement », 2014 En 2011, 398 millions de tonnes de matières premières ont été extraites par les industries sur le territoire. Sauf pour les minéraux de carrières, depuis 1990, une diminution de moitié de la quantité de matières brutes extraites du territoire est observée tandis que celle importée de l’étranger évolue peu. En revanche, les importations de produits semi-finis se sont accrues. Un nouvel équilibre entre matières brutes et produits semi-finis s’opère au sein du secteur industriel. Enfin, il est important de noter que 5,5 millions de tonnes de produits semi-finis importés proviennent de déchets 56 recyclés qui sont réinjectés dans le processus industriel . Ces quelques chiffres et leur évolution montrent l’intérêt d’une démarche d’écologie industrielle et territoriale afin d’optimiser au mieux les ressources disponibles et les services entre les parties prenantes d’un territoire.

L’écologie industrielle et territoriale (EIT) en France

52 Source : MINISTERE DE L ’E COLOGIE , DU DEVELOPPEMENT DURABLE ET DE L ’E NERGIE , « Industrie et environnement : dossier en ligne », novembre 2011 [en ligne]. 53 Source : MINISTERE DE L ’E COLOGIE , DU DEVELOPPEMENT DURABLE ET DE L ’E NERGIE , « Industrie et environnement : dossier en ligne », novembre 2011 [en ligne]. 54 Source : COMMISSARIAT GENERAL AU DEVELOPPEMENT DURABLE , Industries et environnement , Ministère de l’Ecologie, du Développement durable et de l’Energie, 2014, 68 p. 55 Source : COMMISSARIAT GENERAL AU DEVELOPPEMENT DURABLE , Industries et environnement , Ministère de l’Ecologie, du Développement durable et de l’Energie, 2014, 68 p. 56 Source : COMMISSARIAT GENERAL AU DEVELOPPEMENT DURABLE , Industries et environnement , Ministère de l’Ecologie, du Développement durable et de l’Energie, 2014, 68 p.

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Les premières réflexions d’EIT en France ont débuté en France en 1999. Mais, l’EIT a véritablement émergé à partir du milieu des années 2000 sous l’impulsion de nombreuses recherches et expérimentations mises en place. En France, une quarantaine de projets d’EIT a été recensée. Seuls quelques projets sont considérés comme pérennes. En Rhône-Alpes, 9 projets d’EIT sont en cours et un attend une nouvelle relance.

Source : OREE, « Recueil des démarches d’écologie industrielle et territoriales », 2014

Quelques exemples de démarches d’EIT sur le territoire français La démarche d’EIT reste relativement récente. Les trois exemples décrits ci-après permettent de mettre en relief quelques expériences réussies. 57  L’ECOPAL Ce projet fait figure de précurseur en France puisqu’il a débuté dès la fin des années 90. Initiée en 2001, l’association ECOPAL regroupe divers partenaires (entreprises, collectivités, associations, particuliers) sur le bassin industriel et portuaire de Dunkerque. Des subventions et les cotisations des entreprises assurent le financement de cette association. Le projet d’EIT a suivi plusieurs étapes : le recensement des besoins des parties prenantes via un questionnaire, la mise en place de groupes de travail thématiques et un bilan des flux pour développer des opérations. Au terme de ce travail, 5 000 flux pour plus de 150 entreprises et une trentaine de synergies ont été recensés. En complément, l’association offre des prestations pour ses adhérents tels que des accompagnements sur des thèmes environnementaux, des collectes mutualisées…

57 COMITE D ’ANIMATION TERRITOIRE DURABLE ET ECOLOGIE INDUSTRIELLE : CATEI, ECOPAL, l’écologie industrielle en dunkerquois , Ministère de l’Ecologie, du Développement durable et de l’Energie, 2014, 2 p

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Source : COMETHE, « Territoire dunkerquois », 2011

58  L’exemple de Métropole Savoie D’avril 2010 à avril 2011, un projet d’EIT s’est lancé en Savoie, associant des partenaires publics (Chambéry métropole, communauté d’agglomération du Lac du Bourget..) et privés (réseau éco industrie, GIE Chamnord…). Les secteurs du BTP, de l’agroalimentaire, de l’industrie et des espaces verts ont été sélectionnés et 20 bilans de flux ont pu avoir lieu. Si 7000 pistes « brutes » et 20 synergies ont été identifiées au départ, 7 pistes d’actions ont été choisies pour un travail plus poussé. Pour l’instant, le projet est arrêté.

59  La vallée de la chimie En 2007, une étude a été menée sur la vallée de la chimie, au sud de Lyon, afin d’identifier les flux et les synergies possibles pour les matières et l’énergie. 11 entreprises et 16 sites industriels ont participé à cette réflexion. Cette démarche d’écologie industrielle a été intégrée dans l’agenda 21 de la vallée de la chimie avec une action spécifique de sensibilisation des acteurs et de développement de cette démarche sur la vallée de la chimie.

 Les parcs naturels régionaux (PNR) comme territoires d’expérimentation Ayant une « capacité d’expertise » et reconnus comme « territoires d’expérimentation, d’innovation 60 économique » , les PNR peuvent jouer un rôle dans l’expérimentation de démarches d’écologie industrielle et territoriale. Les huit PNR de la région Rhône-Alpes, tous situés en zone de montagne, tiennent par exemple à assurer un développement durable de la filière « bois » sous toutes ses formes (bois d’œuvre, bois énergie...). En matière de bois énergie, les nombreux projets menés par les parcs rhônalpins montrent comment ils ont su 61 développer cette filière, la structurer, en trouvant des relais parmi les acteurs locaux .

58 COMETHE, Territoire d’expérimentation Métropole Savoie , Orée, 2011 59 OREE , Recueil des démarches d’écologie industrielle et territoriales , Orée, 2014, 50 p ; COMITE D ’ANIMATION TERRITOIRE DURABLE ET ECOLOGIE INDUSTRIELLE : CATEI, Ecologie industrielle et territoriale : guide pratique pour les territoires , Ministère de l’Ecologie, du Développement durable et de l’Energie, 2014 [en ligne] et GRAND LYON , Agenda 21 vallée de la chimie : document cadre orientations et plan d’action , Grand Lyon, 2007, 27 p. 60 CONSEIL ECONOMIQUE , SOCIAL ET ENVIRONNEMENTAL REGIONAL RHONE -ALPES , Parcs naturels régionaux et changement climatique , CESER Rhône-Alpes, 2012, 60 p. 61 CONSEIL ECONOMIQUE , SOCIAL ET ENVIRONNEMENTAL REGIONAL RHONE -ALPES , Parcs naturels régionaux et changement climatique , CESER Rhône-Alpes, 2012, 60 p.

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62 L’association Orée a également recueilli les expériences d’écologie industrielle conduites par le PNR 63 d’Armorique et par le groupement PNR du Livradois-Forez/CCI du Puy de Dôme/ville de Thiers/Macéo .

Outre les stocks et les flux, l’EIT s’intéresse à l’organisation des relations entre les acteurs du territoire. Le recensement des démarches en France a souligné que ces projets d’EIT associent de nombreux partenaires, et pas seulement deux entreprises. Toutefois, l’une des difficultés de ces nouvelles organisations est de maintenir la démarche sur le long terme. Il s’agit alors d’assurer l’émergence et la pérennisation de cette réflexion novatrice.

Favoriser l’émergence et la pérennisation d’une démarche d’EIT sur le territoire Le Comité d’animation territoriale durable et écologie industrielle (CATEI) a recensé 4 avantages pour les 64 entreprises , repris et résumés ci-après : 1. Optimiser les coûts de fonctionnement et d’exploitation Les entreprises y trouvent un triple intérêt : Economique • une négociation de tarifs plus favorables par la mutualisation de besoins • une moindre dépendance vis-à-vis de matières premières et de l’énergie • la substitution d’un coût (la gestion d’un déchet par exemple) par un « coût zéro » voire un revenu (revente du déchet comme ressource) Environnemental • une meilleure connaissance et gestion des effluents, déchets et produits • une réduction des impacts en amont par une meilleure connaissance des flux entrants • une anticipation ou mise aux normes vis-à-vis de la réglementation • une diminution des rejets polluants dans l’atmosphère Social et sociétal • la pérennisation et la création d’emplois non délocalisables • l’amélioration des services aux entreprises (exemple : conciergerie) • parfois, un facteur de motivation et de fidélisation pour une partie des collaborateurs • un ancrage territorial des entreprises

2. Saisir de nouvelles opportunités d’affaire et créer/maintenir de l’emploi local Les clients peuvent favoriser les entreprises qui portent une démarche d’EIT, notamment via la commande publique responsable ou les démarches de responsabilité sociétale et environnementale des entreprises/organisations (RSE/RSO). Face à ces nouveaux enjeux, les démarches d’EIT peuvent aider les entreprises à « définir leurs stratégies de positionnement de marché de manière opérationnelle ».

3. PME/PMI : bénéficier des effets de la coopération sur son territoire La démarche d’EIT repose sur des mécanismes de coopération entre acteurs, publics et privés. Ces mécanismes favorisent les rencontres entre les différents acteurs, montrant la force et l’intérêt du réseau multipartite. De plus, par ce dialogue avec les autres partenaires, les entreprises deviennent un acteur du territoire prenant part aux décisions publiques (agenda 21, plan climat…), voire co-construisant avec les collectivités un projet d’aménagement d’une zone d’activité. L’EIT apporte également une aide à des entreprises qui ne pourraient s’engager seules. C’est par exemple le cas pour les PME/PMI qui ne disposent pas des moyens suffisants pour développer une veille réglementaire, des réseaux… Enfin, un projet d’EIT favorise, au sein de l’entreprise, la diffusion d’une culture du développement durable.

62 OREE , Recueil des démarches d’écologie industrielle et territoriales , Orée, 2014, 50 p. 63 Association de développement économique du massif central. 64 COMITE D ’ANIMATION TERRITOIRE DURABLE ET ECOLOGIE INDUSTRIELLE : CATEI, Ecologie industrielle et territoriale : guide pratique pour les territoires , Ministère de l’Ecologie, du Développement durable et de l’Energie, 2014 [en ligne]

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4. Anticiper des enjeux stratégiques sur les ressources dont dépendent les entreprises Par l’analyse de tous les flux, les démarches d’EIT ne se cantonnent pas à une réflexion sur les déchets mais permettent d’élargir les stratégies des entreprises à l’ensemble des ressources (matières et énergie). De plus, ces analyses incitent à mieux connaître les ressources disponibles localement.

L’engagement des TPE/PME en Rhône-Alpes sur le développement durable Source : CCI Rhône-Alpes, 2ème baromètre TPE/PME et développement durable, avril 2014

Plusieurs conclusions du baromètre mené par la chambre de commerce et d’industrie de la région Rhône-Alpes montrent l’intérêt des TPE/PME pour le développement durable mais aussi leurs difficultés : - Le secteur de l’industrie est le plus concerné par les problématiques de développement durable ; - Plus l’effectif des salariés est important, plus ces préoccupations sont prises en compte ; - L’image de l’entreprise et la conviction personnelle arrivent en tête en 2013 et 2012 des motivations des TPE/PME pour développer une stratégie de développement durable ; - La question des moyens financiers est le principal obstacle pour mener une telle démarche dans le BTP et l’industrie.

Si l’EIT présente de nombreux avantages pour les entreprises et pour les acteurs du territoire plus généralement, les différents retours d’expériences des projets d’EIT ont permis de dégager des freins et des leviers qui sont regroupés dans le tableau suivant :

Source : CGDD, « L’écologie industrielle et territoriale, un levier pour mobiliser les acteurs de terrain en faveur de la transition écologique », 2014

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4. Hypothèses d’évolution

Hypothèse 1 - Rhône-Alpes passe à côté de cette démarche, ne s'en saisit pas Rhône-Alpes n’a pas pu imposer une image de marque dans le domaine de l’écologie industrielle et territoriale. De nombreuses initiatives se sont mises en place dans la région et beaucoup d’énergie et de moyens ont été déployés mais faute d’initiatives coordonnées et d’image globale, le territoire n’est pas identifié comme leader sur ce sujet. L’expertise des collectivités dans l’accompagnement des entreprises n’est pas reconnue comme un élément déterminant. D’autres régions en Europe ont su jouer cette carte et en tirer profit pour en faire un « label reconnu » et attractif, le positionnement médian de la région Rhône-Alpes ne lui permet pas d’attirer des investisseurs avec des attentes élevés sur ce sujet, qui est devenu un argument de valorisation très fort auprès des consommateurs.

Hypothèse 2 - Des territoires attractifs grâce aux nombreuses zones d’économie industrielle et territoriale, notamment de développement de l’économie circulaire Comme dans l’ensemble de la société, pour les responsables d’entreprise la notion d’usage a supplanté la notion de propriété. De plus, ils font tous partie d’un ou plusieurs réseaux professionnels ce qui leur permet par la connaissance réciproque d’établir des relations confiantes et d’envisager systématiquement des coopérations avec les entreprises voisines. Ce qui était cité en exemple dans une logique « d’économie circulaire » dans les années 2010 devient banal. La plate-forme de service OSIRIS dans le couloir de la chimie du Nord Isère ou l’association des 200 entreprises de la ZI de Meyzieu dans l’est lyonnais, précurseurs à l’époque, ont fait des émules en Rhône-Alpes. En effet, les entreprises y trouvent un triple bénéfice : économique, social, environnemental. Sur le plan économique les projets d’investissement trouvent une meilleure rentabilité, la mutualisation baisse les frais de fonctionnement et le partage d’informations donne une ouverture sur de nouveaux marchés. Sur le plan social, les salariés adhèrent à ces démarches ce qui les fidélisent et rend l’emploi plus durable. Sur le plan environnemental le partage d’expertise, la meilleure valorisation des ressources et déchets conduisent à une baisse de l’impact des activités industrielles. Les collectivités locales soutiennent ces démarches ce qui encourage les entrepreneurs et renforce l’attractivité de leur territoire.

Hypothèse 3 - Une usine recherchée par son environnement Dépassant le cadre maitrisé de l'écologie industrielle l'usine propose d’apporter, sans contrepartie, aux citoyens de son environnement, qu’ils soient partie prenante ou non à l'activité industrielle, ses services, en particuliers ses excédents d'énergie issus de ses ateliers de traitements de déchets, mais aussi ses véhicules électriques inutilisés le week-end et forts utiles pour les menus travaux domestiques. En matière de santé, l’usine ouvre à tous son pôle premier secours et son hélicoptère, les moyens de formation électroniques sont également disponibles. On se presse pour découvrir un tel endroit, s’y loger devient un véritable avantage qui tempère grandement les quelques fumées encore visibles par Vent du Sud ....

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Bibliographie

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L'Usine du futur_2ème partie : Les fiches variables • CESER Rhône-Alpes • 7 Juillet 2015 91

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VARIABLES TERRITOIRES

Variable n°13 – Gestion de l’espace

Variable n°14 - Les réseaux et la gouvernance des territoires

Variable n°15 – Accessibilité et infrastructures de transport matériel et immatériel

Variable n°16 – Services d’intérêt général

Bibliographie

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Variable n°13 Gestion de l’espace

1. Définition de la variable La gestion de l’espace de Rhône-Alpes pour accueillir et développer l’usine du futur est liée à la disponibilité foncière, dans un contexte de forte concurrence des multiples usages du foncier, de développement du phénomène NIMBY dans le comportement des populations et de différenciation selon des critères économiques, sociaux ou fiscaux.

2. Indicateurs permanents - Capacité de dialogue et d’échanges - Répartition de l’industrie - Prix moyen des terrains au m² - Outils fonciers et réglementation.

3. Rétrospective L’industrie est globalement bien répartie sur le territoire de Rhône-Alpes, avec une diversité assez importante et limitant les effets de la crise, à l’exception notamment d’Oyonnax ou de la Vallée de l’Arve assez mono industrielles. Lyon, Grenoble, St Etienne figurent parmi les premières zones d’emploi industriel de France. Mais Rhône-Alpes n’est pas épargné par une désindustrialisation relative générale dans plusieurs secteurs d’activité (ex. métallurgie, poids lourd, textile-habillement, cuir, bois-papier, chimie…). Seuls quelques pôles (Lyon, Grenoble) connaissent des secteurs tertiaires porteurs (ex. développement numérique, conseil et ingénierie, éducation, santé, …) compensant les pertes d’emploi industriels. Les chômeurs de l’industrie n’y deviennent pas cependant automatiquement les embauchés du secteur tertiaire, faute de qualification adaptée. Les emplois tertiaires de haut niveau se développent en priorité dans les métropoles têtes de réseau : 26,5 % de l’emploi total en Rhone Alpes est occupé par les fonctions métropolitaines de LYON, GRENOBLE et GENEVE, contre 22 % pour l’Ile de France. On constate que : - l’habitat est encore souvent le seul moteur de la concurrence pour l’espace, - le foncier agricole demeure une simple variable d’ajustement, - la compétitivité des entreprises industrielles et logistiques est compromise par des disponibilités foncières inadaptées à la demande d’une clientèle rarement captive. Il est à noter également la dégradation progressive de l’acceptabilité des populations vis-à-vis de l’industrie, ses risques et nuisances réels ou supposés, et le besoin croissant d’apporter des mesures de compensation pour son intégration environnementale. L’outil fiscal, à travers zones franches ou dégrèvements, et la péréquation, ont leurs limites. Ne sont pas réellement stimulées l’équité territoriale ni l’attractivité pour les usines de demain. La réforme de la taxe professionnelle, malgré certains dispositifs incitatifs, encourage moins les élus à accueillir les entreprises. On constate un foisonnement d’outils fonciers à caractère général (ex SCOT, PLU, PLH,…) ou spécifiques, ainsi que de nombreux acteurs (SAFER, EPF locaux et d’Etat (EPORA)) avec des problèmes de cohérence entre espaces de projet et des jeux d’acteurs locaux, ce qui ajoute souvent à la complexité du droit de l’urbanisme. Stratégie de développement global et prise en compte du développement économique à son juste niveau en pâtissent. Des tentatives existent toutefois, à encourager, pour gérer les conflits d’usage du foncier en privilégiant comme dans d’autres pays une culture du dialogue, de la confiance et de la régulation, et non pas de la réglementation. Le CESER avait recommandé en 2009 que le Centre de ressources foncières initié par la Région, la SAFER et les établissements publics fonciers soient autant d’outils pour ce dialogue. L’exemple de la démarche initiée par

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l’Etat sur la « plaine de Saint-Exupéry » montre bien la capacité des acteurs à se concerter et à dégager ensemble une vision partagée et équilibrée pour le territoire.

4. Hypothèses d’évolution Hypothèse 1 - Un développement harmonieux sur le territoire ; la primauté de l’intérêt général s’imposant sur les intérêts particuliers La Région assure une coordination harmonieuse de la gestion des espaces. L’échelon régional est devenu le lieu de coordination incontournable pour toutes les questions d’aménagement du territoire et du développement économique, avec l’accord des métropoles. Les diagnostics fonciers pour identifier atouts et faiblesses, puis les SCOT se sont généralisés sur le territoire. Les établissements publics fonciers en milieu urbain et la SAFER dans l’espace rural coordonnent leur action et l’inscrivent en cohérence avec des dynamiques foncières identifiées grâce à un observatoire régional du foncier on est parvenu à une simplification du dispositif pour optimiser le recyclage du foncier. L’usine du futur a ainsi pu se développer en s’appuyant sur l’histoire et la force de chaque territoire, intégrant des politiques coordonnées en matière de formation et de matière grise, de transition écologique et énergétique.

Hypothèse 2 - Une gestion de l’espace centrée sur des métropoles « insulaires » et non pas solidaires avec les territoires La territorialisation des capitaux de l’économie mondiale s’est faite autour des pôles métropolitains et l’intégration européenne a joué un rôle majeur dans un développement des territoires européens avec la sanctuarisation des métropoles, des logiques d’excellence et de concurrence. Les outils fonciers ont été orientés exclusivement vers la gestion des espaces métropolitains, le reste du territoire étant considéré comme variable d’ajustement. Les dispositifs et politiques publiques (SRI-SI) ont conforté les agglomérations dites d’excellence – Lyon, Grenoble, Genève - pour concurrencer leurs homologues au plan mondial, en les branchant directement sur les réseaux de la globalisation. La fertilisation croisée attendue, les effets d’entrainement de la concentration urbaine sur les territoires ruraux n’ont pas eu lieu et désormais les citoyens Rhônalpins ne sont plus égaux, n’ont plus accès à ce qui fonde la république (la santé, l’école, le transport, le social) en tout point du territoire. Nous sommes face à une nouvelle France des territoires, des fractures territoriales se sont creusées entre les territoires élus et les territoires exclus. L’agriculture a déserté les espaces proches des métropoles. Les espaces ruraux excentrés se sont dévitalisés par manque d’attractivité pour des investissements en amont et en aval de la filière agricole. Les activités industrielles à faibles nuisances sont acceptées sur les territoires métropolitains et les autres sont repoussées en dehors et sont fragilisées dans leur synergie avec les autres activités.

Hypothèse 3 - Un système anarchique de gestion de l'espace avec un mitage dominant Le mitage de l’espace s’est développé faute de dialogue et de coordination entre les différents acteurs qui interviennent sur le foncier dans notre région. Ce mitage a été exacerbé par une réaction classique autant des décideurs que des particuliers : le « Nimby ». Les décisions d’implantations d’infrastructures diverses, de zones telles que les ZAC, sont bloquées par cet effet « Nimby ». Les recours sont fréquents. La structuration des grands espaces autrefois déterminés par l’Etat ne se fait plus (Trame Verte, SNADT, …), le relais n’a pas été pris par les Régions ou les autres collectivités. La loi ne suffit plus à empêcher les dérives. Une concurrence effrénée se développe et chaque territoire essaye d’attirer des implantations industrielles nouvelles en particulier par des avantages fiscaux. Malgré la volonté politique, traduite dans les lois successives, les outils fonciers fonctionnent mal. Les infrastructures linéaires, les équipements logistiques, touristiques, économiques, demeurent à l’état incantatoire, compromettant ainsi la création de valeur et de richesse. Le laisser-faire nuit à l’attractivité du territoire et se retourne en boomerang contre les décideurs.

Hypothèse 4 – Un espace industriel spécifique accepté collectivement. Après une période de déclin de la part de l’industrie dans le PIB qui semblait la conduire à sa quasi disparition, le chômage et l’appauvrissement des populations a atteint un niveau tel que la société tout entière s’est ressaisie et a fini par rebondir, dans une spirale de renouveau des usines.

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Après le concept de trame verte et de trame bleue, est apparu celui d’espace de production spécifique doté d’une masse critique suffisante pour permettre une économie circulaire où sont conciliés tous les usages fonciers et différentes productions industrielles et agroalimentaires, en lien avec un espace agricole qui n’est plus variable d’ajustement… Les acteurs économiques qui subsistaient encore au moment le plus grave de la crise ont convaincu progressivement les citoyens puis les élites politiques de refonder le socle de l’économie et de l’emploi en concevant un tissu industriel organisé autour des habitants eux-mêmes, à travers des usines-villes plaçant la qualité de vie au premier plan. S’inspirant pour une part des grandes usines des trente glorieuses aménagées avec leurs rues, leurs services, ème leurs commerces comme BASF à Ludwigshafen, et pour une autre part des technopoles nées fin du 20 siècle, le concept est poussé à l’extrême pour intégrer lieux d’habitat, espaces de loisirs et détente, et d’importantes zones laissées à la faune et la flore. Travail en proximité de type campus universitaires anglosaxons, espaces de biodiversité, habitats semi collectifs, services publics dans des cœurs de quartier, limitation du mitage, sont associés au sein même d’espaces industriels spécifiques conjuguant connexion optimale matérielle et immatérielle, économie de ressources en énergie ou en fluides, préservation des milieux naturels. Les égoïsmes d’antan avaient généralisé le phénomène Nimby au point de risquer la disparition des usines et avec elle d’entrainer toute la population dans une spirale du déclin des richesses et de la société. Désormais, les nouvelles usines-villes sont acceptées voire attendues par les citoyens. La création de richesse a repris et avec elle la capacité contributive connaît un renouveau et permet de relancer un cercle vertueux au bénéfice de la société.

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Variable n°14 Les réseaux et la gouvernance des territoires

1. Définition de la variable Dans un contexte d’industrie mondialisée, la compétitivité des entreprises de production délocalisables s’inscrit dans la compétition des territoires. S’y entremêlent divers réseaux privés, privés-publics aux intersections des politiques publiques et des stratégies privées ; le tout ayant un impact sur la gouvernance des territoires.

2. Indicateurs permanents - Effet réseau - Fait régional - Coopération Région/autres collectivités et acteurs - Marges de manœuvre des collectivités - Réseaux d’entreprises.

3. Rétrospective La décennie 2000-2010 a été marquée par l’éclatement géographique des chaines de valeur industrielles, l’affaiblissement du tissu industriel, les pertes de filières et compétences, voire d’activités de service et de recherche ; ceci par suite de contraintes de compétitivité prix et hors prix ou un manque de disponibilité en capitaux. Les entreprises doivent cependant désormais faire preuve de plus en plus de réactivité face au marché qui demande des produits très variés, sur mesure, à cycle de vie plus différencié. Aussi, dès lors qu’elles peuvent développer des avantages de compétitivité hors prix par l’innovation, l’export, la qualité de la main d’œuvre, les capitaux, l’anticipation des mutations, ou une logistique haut de gamme, les entreprises peuvent se positionner sans délocaliser voire peuvent « relocaliser ». Ceci est facilité dans les territoires qui construisent des avantages compétitifs collectifs en écosystèmes. Cela peut être le fait de réseaux d’entreprises L’exemple de la Vallée de l’Arve est significatif : la profession du décolletage, après une chute de 30 % en 2008, est parvenue à bâtir un nouveau modèle de croissance grâce à un plan stratégique fédérant 300 entreprises pour mutualiser les achats, les ressources humaines, le marketing et pour créer un label « Mont blanc Excellence », en développant productivité et export. Cela peut être aussi le fait de réseaux mis en place par les élus. De manière générale, se déploient les pôles de compétitivité, les clusters et grappes d’entreprises, avec l’appui des acteurs publics. Mais le morcellement institutionnel, la clause générale de compétence, l’enchevêtrement des espaces de projet, l’absence de management territorial autour d’une stratégie régionale partagée, sont très pénalisants pour optimiser le voisinage de l’industrie avec les autres usages de l’espace. Ce sont pour l’instant les métropoles qui sont à l’œuvre pour tisser des réseaux public-/privé. Ainsi le Grand Lyon vient-il de lancer une opération emblématique en zone à risques sur la vallée de la chimie : « l’appel des 30 ». A travers cette opération sont fédérés 30 partenaires entreprises industrielles, professionnels de l’immobilier, collectivités locales et partenaires financiers. Il s’agit de créer les conditions de développement d’un schéma d’activités intégré autour des filières chimie-énergie-environnement et pensé pour tous les usagers salariés, riverains et habitants. La synergie recherchée doit stimuler la croissance économique. On y recherche aussi la compatibilité des usages, voire même leur mutualisation (ex. utilisation de l’énergie des usines pour le chauffage urbain sur le modèle de Rotterdam). De même, la Métro, communauté d’agglomération grenobloise élargie demain pour devenir métropole, fédère l’ensemble des acteurs privés et publics pour porter des projets. Ainsi en est-il avec le projet de campus GIANT qui vise à mutualiser et développer un écosystème d’innovation autour des nanotechnologies, des TIC, des

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énergies, des biosciences et de la santé. Ceci concerne 30 000 personnes de l’enseignement supérieur, la recherche et l’industrie. Il s’agit de dégager des plus values sociétales et économiques. Dans le champ spécifique du numérique, les forces vives grenobloises (acteurs publics et plus de 300 entreprises) se sont également fédérées autour de la bannière Digital Grenoble pour développer des partenariats et se porter candidates au label French Tech à différentes échelles : la Métro entend ainsi accélérer le développement et améliorer la visibilité internationale de ses champions.

La Région est reconnue de plus en plus au plan juridique comme le maillon de la coordination économique des différentes échelles d’intervention. Etre chef de file de la communauté d’acteurs, en valorisant le foisonnement est affiché comme un facteur de succès. Pour autant, dans les faits, cette compétence est revendiquée non seulement par les métropoles mais aussi par les Conseils généraux ou l’Etat demeurant présent et actif. Le nouveau caractère prescriptif des schémas régionaux d’aménagement, énoncé dans le projet de loi à débattre au parlement, permettra-t-il une avancée ? D’autres intentions sont exprimées, Ainsi, entre Rhône-Alpes et le bassin lémanique, les coopérations sur les filières d’excellence ont été inventoriées, mais pas engagées. A l’échelle européenne, la fondation Robert Schumann propose des coopérations renforcées entre régions pour développer des centres européens d’innovation et d’industrie afin de combler des retards sur les Etats-Unis. Il existe aussi une tentative de mise en synergie par l’Union Européenne, à l’échelle macroalpine, de la Slovénie à la Côte d’Azur. De manière générale, beaucoup reste à faire pour construire une intelligence collective afin de booster les territoires industriels de Rhône-Alpes.

4. Hypothèses d’évolution

Hypothèse 1 :- U ne gouvernance efficiente, et hiérarchisée où la Région chef de file dialogue avec les autres collectivités Après de longs et parfois difficiles débats politiques, l’Assemblée nationale et le Sénat ont voté une série de lois sur l’organisation territoriale qui assoient définitivement la hiérarchie et les compétences des différents niveaux d’administration territoriale, ainsi que le rôle de l’Etat comme arbitre et garant de l’intérêt national. Après avoir été pilote dans la construction des nouvelles métropoles à compétences élargies, la région Rhône- Alpes joue à nouveau un rôle pilote dans la mise en place de cette nouvelle organisation territoriale française, en profitant de ses atouts : diversité des paysages et des territoires, système urbain hiérarchisé et relativement équilibré, richesse et diversité économique s’appuyant sur trois piliers : l’industrie, l’économie présentielle, l’économie métropolitaine. Le chef de file est désormais clairement la Région, tant en matière économique que sociale ou territoriale ; ceci d’autant plus que ses schémas sont désormais prescriptifs et donc opposables aux autres collectivités. Pour ce faire, la région s’appuie sur des ressources fiscales propres lui permettant d’assumer ce rôle. Elle applique pleinement le principe de subsidiarité, organisant les délégations de responsabilités au niveau pertinent, les départements et la métropole de Lyon pour les affaires sociales ou les communautés de communes pour l’organisation des services publics, par exemple. Elle dialogue efficacement avec les métropoles, qui jouent leurs cartes au niveau européen et mondial tout en assumant leur rôle de locomotive du développement régional et en harmonisant leur projet de développement avec celui de la Région. La cohérence et la vision commune des acteurs régionaux et locaux assurent une visibilité et un poids international considérablement renforcés à la région Rhône Alpes, qui figure désormais par les régions leader au plan européen.

Hypothèse 2 - Concurrence entre les collectivités et absence de coordination Dans un contexte de mondialisation qui favorise les entreprises de taille internationale, l’usine du futur doit pouvoir s’appuyer sur une mise en réseau et un mode de gouvernance efficace. Nous sommes dans une situation où les compétences entre les différents échelons territoriaux n’ont pas été réparties de manière claire, et même quand elles sont réparties, la répartition n’est pas respectée, la Région et la Métropole de Lyon sont en forte concurrence pour toutes les questions économiques. Aucune coordination n’est assurée de manière globale. Les conséquences sont sans appel.

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La métropole de Lyon impose sa puissance en matière économique. Elle concentre une grande partie des investissements. Ses efforts d’impulsion et de coordination en matière de recherche et d’innovation sont vains : la recherche et la création de valeur apportée par les pôles universitaires et les grandes écoles, ont quitté les villes moyennes De la même façon, la formation des hommes et des femmes se concentre sur ces mêmes zones. Toutes les conditions sont réunies pour créer une zone géographique régionale organisée autour de grands pôles, entourés de déserts. La mise en réseau échoue. La Région ne peut pas éviter l’émergence de certaines zones désertiques. En réaction, la « Région des champs » se rebelle et s’organise pour jouer sa propre carte.

Hypothèse 3 - Une autonomie de décision de chaque collectivité dans un fonctionnement en silo. Les projets de réorganisation territoriale et les atermoiements des différents gouvernements successifs sur ce sujet, ont eu tendance à « siloter » les fonctionnements des différents niveaux de collectivités territoriales. Chacune d’entre elles décide de sa stratégie et de ses niveaux d’intervention dans une approche concurrentielle. Cette indépendance favorise quelque peu les entreprises qui font ainsi leur « marché » en particulier en termes d’implantation ou d’aides. Sous réserve du respect général des lois nationales et européennes, chaque collectivité développe son offre quitte à mettre en difficulté la collectivité voisine et surtout sans tenir compte d’une éventuelle mutualisation. Il n'existe aucun effet réseau inter collectivités, et la subsidiarité entre niveau n’existe pas. Seuls l’Etat ou l’Europe, dans la limite de leurs prérogatives, peuvent arbitrer certaines décisions . Cette organisation en silo trouve sa limite dans la paraphrase suivante : « une juxtaposition d’optimums ne sera jamais un optimum ». Même les métropoles échouent dans la compétitivité internationale compte tenu de leur jeu solitaire.

Hypothèse 4 - L’Europe des villes, des métropoles a succédé à l’Europe des régions Entre 2015 et 2040, le poids des métropoles s’est considérablement accru en Europe et en France. Les métropoles concentrent désormais la majorité des emplois et des activités à forte valeur ajoutée. Pour renforcer leur position, elles ont pour la plupart et c’est le cas en Rhône-Alpes tissé un réseau avec les villes moyennes dans le cadre de pôles métropolitains élargis en Rhône-Alpes. Lyon, Grenoble, et Genève ont tissé des liens avec les territoires de leur zone d’influence en leur offrant des potentialités de développement, bien que limitées sur certains champs mais réels et leur permettant d’éviter un décrochage. Les régions n’ayant pas su investir le champ du management territorial, sont marginalisées et leur intervention constituent une variable d’ajustement des projets territoriaux managés par les métropoles. Cette situation se retrouve dans de nombreux pays en Europe, mais plus encore en France où les régions ne se sont jamais réellement imposées, même après la réforme territoriale de 2015 qui n’a pas facilité leur capacité à être des collectivités de projet. Les industriels considèrent les métropoles comme leur interlocuteur et jaugent l’attractivité territoriale à ce maillon. Les instances communautaires, tout comme le gouvernement français s’adresse prioritairement aux métropoles. Certains élus vont même jusqu’à demander la suppression de l’échelon régional dans un objectif de simplification du mille feuille.

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Variable n°15 Accessibilité et infrastructures de transport matériel et immatériel

1. Définition de la variable

Les échanges sont le fondement même de la vie. La qualité des réseaux tous modes, à considérer dans une logique de complémentarité, est primordiale : elle constitue l’une des premières conditions d’implantation et/ou de développement des usines. Rhône-Alpes dispose d’un atout majeur lié à sa position de carrefour, qui est fragile dans l’espace européen car concurrencé par d’autres carrefours. Il importe de consolider ce carrefour pour préserver l’économie et l’emploi d’une région dans un continent marqué par le déplacement de son centre de gravité vers l’Est. Rhône-Alpes doit aussi être au rendez-vous de la révolution numérique. Or, le retard de l’équipement de la France en fibre optique et les disparités intra régionales en termes de densité de clientèle font peser un risque grave de fracture territoriale au sein de la région pour accéder au très haut débit numérique ; ce dernier devenant le premier facteur discriminant pour l’accueil des entreprises.

2. Indicateurs - Volonté politique sur les choix d’investissement d’avenir pour répondre à la demande d’échanges. - Anticipation. - Capacités de financement. - Progrès technologiques. - Croissance économique.

3. Rétrospective  S’agissant des infrastructures de transport physique

On constate un certain nombre de fondamentaux largement rappelés dans le document de cohérence des déplacements présentés en 2011–2012 par le Préfet de Région :

 Une périurbanisation de plus en plus dominante, augmentant la portée des déplacements domicile-travail. Prix du foncier au centre-ville, désynchronisation des activités et souci de la qualité de vie y contribuent.  Un poids marginal de la mobilité à longue distance 98 % des déplacements de personnes sont réalisés à moins de 80 km et 80 % des tonnages de marchandises transportées par route le sont à moins de 150 km,  Une demande croissante de mobilité automobile, surtout dans les zones moins denses. Ceci est le cas quelles que soient les hypothèses de contraintes imposées. A noter le phénomène naissant du covoiturage et de l’autopartage. La part des déplacements en transports collectifs en Rhône-Alpes est assez limitée (7 – 8 %).  Une progression de la congestion sur certains axes et pôles. Ceci est préoccupant en particulier dans les nœuds lyonnais, grenoblois, genevois pour les flux routiers et dans le nœud lyonnais pour les flux ferroviaires.  Une fiabilisation à préserver pour la voie fluviale.  Des progrès technologiques sur les moteurs et les carburants qui ont fortement réduit les émissions dans l’air par le transport. Ces émissions ont diminué pour les polluants de 20 à 25 % de 2000 à 2007 en Rhône-Alpes, et plus faiblement pour le Co2, gaz à effet de serre. Les progrès sont particulièrement significatifs pour les poids lourds. Une limitation des combustibles fossiles (pétrole relayé désormais par les gaz et huiles de schistes) stimule déjà les technologies économes en énergie ou les techniques alternatives préparant une disparition du moteur à

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explosion. A titre d’exemple, des recherches existent sur des « routes du futur » équipées soit de lignes électriques alimentant le véhicule par induction, soit de panneaux solaires. Ceci sans oublier les véhicules électriques avec batteries au lithium ou avec piles à combustible de type hydrogène…

Toutefois, les analyses du ministère des transports montrent une sensibilité très forte de la demande de transport à la croissance de l’économie et à la dépense de consommation des ménages, mais beaucoup moins forte aux autres paramètres tels que le coût des carburants. La demande de transport est appelée à croitre, sauf en cas de récession pénalisant ménages et entreprises. Il demeurera donc en tout état de cause indispensable d’accompagner la demande économique et sociale très forte de déplacement (tous modes). Par ailleurs, il faut ajouter de nombreux atouts propres à la position de Rhône-Alpes : - le carrefour des grandes liaisons ferroviaires pour le fret comme pour la grande vitesse, au croisement de deux des neuf corridors européens - la plateforme aéroportuaire Lyon Saint Exupéry dont le potentiel d’ouverture internationale doit être préservé et développé. - l’atout logistique majeur dans l’Est lyonnais. A l’échelle des aires urbaines, le problème de la congestion est aussi de plus en plus prégnant et appelle des solutions multimodales, y compris par le câble. A cela s’joute la problématique de la desserte des aires périurbaines et du monde rural Or, on constate un effet de ciseau déjà ancien avec l’offre d’infrastructures qui a décroché depuis 20 ans de manière préoccupante (réseau routier et autoroutier ; réseau ferré ; parcs relais). Ceci est prégnant en Rhône- Alpes, région dynamique au plan démographique et économique, et positionnée au cœur des grands flux d’échanges européens. Les indicateurs sont au rouge : - Un effet d’éviction des investissements dans les infrastructures de transport par les dépenses de fonctionnement et la charge de la dette de l’Etat. - L’absence de marge de manœuvre pour les collectivités territoriales invitées à prendre le relais - Des procédures d’instruction des projets qui se complexifient sans cesse et accroissent délais et coûts.  S’agissant des infrastructures numériques La Région Rhône-Alpes accompagne depuis 10 ans les collectivités publiques dans les infrastructures et les usages numériques. Le débit attendu connait une progression fulgurante. La technologie du fil de cuivre sera très rapidement obsolète, alors que les émissions à la vitesse de la lumière ouvrent des capacités toujours plus grandes. Or, l’Etat conduit une politique défavorable au développement des infrastructures numérique en fibre optique à l’abonné : il s’oppose à la péréquation tarifaire entre zones denses et moins denses. Ceci risque de laisser à l’écart la majeure partie des territoires de Rhône-Alpes et de bloquer le développement des usines du futur, voire d’inciter à leur départ. Il existerait pourtant un potentiel de développer en Rhône-Alpes non seulement la ville intelligente mais le village intelligent ; ce qui pourrait rendre au monde rural une attractivité comparable à celle précédant la révolution industrielle, voici deux siècles.

4. Hypothèses d’évolution

Hypothèse 1 - Une irrigation totale de l'investissement tant sur le numérique que sur les infrastructures physiques L’Europe, relayée par les gouvernements nationaux et les collectivités, s’est lancé dans un grand programme d’investissement s’appuyant sur des partenariats public-privé pour investir dans le numérique mais également dans les infrastructures routières.

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Les collectivités publiques prennent conscience de l’enjeu et accordent la première priorité au numérique à travers le cadre légal et les financements. Les décideurs, passant outre aux récriminations en faveur de dépenses courantes, choisissent d’investir pour l’avenir dans la fibre optique, les grands équipements autoroutiers et ferroviaires. Ainsi, reprenant les démarches coréenne, japonaise, australienne,… La France et Rhône-Alpes en particulier se positionne au « bon » débit attendu par les entreprises et les ménages. Les acteurs publics initient les investissements, stimulent l’intérêt des acteurs privés par des formules appropriées de partenariat public - privé et accordent l’accès des zones denses aux réseaux d’initiative publique. Des liaisons satellitaires sont également encouragées pour les zones très isolées. Une volonté de l’ensemble des collectivités publiques en faveur de la comodalité (utilisation complémentaire de l’ensemble des modes) se met en œuvre avec des ressources publiques constantes et l’apport de recettes complémentaires dédiées aux infrastructures. L’endettement public persiste dans toutes les catégories de collectivités. Toutefois, des ressources dédiées aux infrastructures tous modes sont mises en place : - partenariat public privé - retour de ressources propres pour les concessions autoroutières - eurovignette, après consensus de l’ensemble de l’Union Européenne. Les pouvoirs publics lancent les projets autoroutiers, ferroviaires, fluviaux, d’intermodalité périurbaine pour les transports de personnes, indispensables pour l’économie régionale. La congestion est limitée dans la région et notamment autour des métropoles, et les échanges se développent.

Hypothèse 2 - Mitage et loi de la jungle Sur la question des infrastructures et des transports matériel et immatériel, la coordination des choix d’investissement est primordiale. Dans cette hypothèse, aucune coordination, qu’elle soit administrative, politique ou économique n’a été possible. Ce qui aboutit immédiatement à des incohérences. Tout d’abord le choix de la fibre optique n’a pas été unanime. Certains territoires ont cédé aux avances des opérateurs pour faire d’autres choix techniques. Cela entraine un premier déséquilibre entre territoires intrarégionaux. Ce déséquilibre est renforcé par le fait que seules les zones rentables pour les opérateurs sont équipées. « Le gruyère numérique » devient la caractéristique de notre région. Les implantations d’entreprises suivent cette même évolution.

Hypothèse 3 - Un scénario d’investissement de choix raisonné privilégiant les modes non routiers La crise des finances publiques a perduré ; l’investissement demeure la variable d’ajustement par rapport aux dépenses de fonctionnement beaucoup moins maitrisés. Les acteurs publics ont néanmoins considéré qu’au sein d’une enveloppe plus réduite la priorité absolue devrait être consacrée aux infrastructures numériques fibre optique et aux modes non routiers. La péréquation tarifaire a pu être obtenue au profit des réseaux numériques d’initiative publique ; l’intérêt des opérateurs privés étant par ailleurs stimulé pour résorber progressivement la fracture numérique ; ce qui permet la préservation du tissu économique et des zones d’habitat peu dense. Les modes doux sont par ailleurs encouragés (pistes cyclables, câble en milieu urbain) ainsi que les modes ferroviaire et fluvial, lesquels ne concernent qu’une part limitée de la demande. Le réseau routier et autoroutier est par contre peu entretenu, pénalisant ainsi le développement de l’intermodalité notamment dans le périurbain, faute de parcs relais capacitaires, le transport collectif urbain croît avec peine. Malgré les progrès technologiques faisant disparaître progressivement le moteur à explosion, la congestion est devenue si préoccupante en milieu urbain et périurbain que les fonctions métropolitaines s’étiolent et entraîne une perte d’attractivité. De plus, les routes et ouvrages d’art non entretenues en milieu rural limitent les capacités d’accès PL pour la desserte du tissu industriel qui perd en compétitivité.

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Variable n°16 Services d’intérêt général

1. Définition de la variable Au-delà de toute approche juridique du droit communautaire (services d’intérêt général construits par la jurisprudence de la Cour de justice européenne) ou des spécificités françaises, sont appréhendés l’ensemble des services publics et privés d’intérêt général essentiels à la vie des territoires et à un environnement adapté pour les entreprises et leurs salariés : − Au centre du diagramme figurent les services publics définis par la puissance publique, leur périmètre évoluant selon la définition de l’intérêt général et l’engagement des opérateurs publics ; − A la périphérie les autres services au public, répondant à un intérêt général et reposant sur l’initiative privée, plus ou moins soutenus, régulés ou contrôlés par les autorités publiques.

* Par services marchands de proximité, on entend les services au Services marchands public fournis par les artisans, commerçants et professions libérales. de proximité* ** Par économie sociale et solidaire, on entend les activités économiques productrices de ser vices au public, Autres services Services publics exercées par des sociétés coopératives, d’intérêt général définis par les des associations, des mutuelles ou des indispensables à autorités publiques fondations, dont l’éthique se traduit par la vie des *** les principes suivants : territoires - finalité de service à la collectivité ou aux membres, plutôt que finalité de

profit ; - Economie sociale autonomie de gestion ; - gestion démocratique et participative. et solidaire** *** Délégation de service public, concession de service public, NTIC…

Cette approche permet de prendre en considération les différentes dynamiques d’adaptation des territoires. En effet, les acteurs de l’économie sociale et solidaire, les commerçants et artisans jouent aussi un rôle important dans la prise en compte des besoins d’intérêt général émergents.

2. Indicateurs permanents - Indicateurs de suivi de l’offre des services : • à l’échelle des ZTRA / NSEE • par types d’équipements. - Enquêtes sur la demande des populations. - Observation de la qualité du service (accessibilité, accompagnement de l’usager, sécurité, compétence, rapidité de réponse). - Fiabilité du service et continuité.

3. Rétrospective

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La réflexion sur les services au public doit combiner : - la question de l’attractivité des territoires pour les populations et les entreprises - celle de la création de richesse économique et de sa péréquation pour viabiliser les projets de services au public.

Dans un contexte où la croissance démographique est plus forte en zone rurale et où la demande de services au public croit en raison inverse des ressources publiques, l’offre ne peut pas être individualisée, multitâches et pérenne. Il convient donc d’analyser la demande de services à l’échelle des bassins de vie, puis d’y ordonner l’offre la plus adaptée en mutualisant les services dans les mêmes locaux, avec les mêmes outils informatiques. Un seul objectif est à rechercher : de meilleurs services en maîtrisant les coûts. Maisons de santé, maisons de service public, relais de service public, structures PIMMS, sont autant de pistes déjà engagées mais avec une réelle difficulté de gouvernance. Le management territorial, en faisant système entre les projets de territoires, doit être la clé du succès ; la Région exerçant un rôle d’orientation stratégique, dans le respect du principe de subsidiarité qui donne aux bons acteurs des bonnes compétences aux bonnes échelles.

4. Hypothèses d’évolution

Hypothèse 1 - Absence de régulation sur le territoire Par manque de volontarisme, et d’implication des collectivités territoriales, et par carence dans le management territorial, aucune anticipation sur les services d'intérêt général de demain n’a été possible, services pourtant déterminant pour la vie sociale et l’équilibre des territoires. Les seuls services qui pourraient répondre aux besoins des populations sont des services dont le coût d’accès est devenu progressivement prohibitif pour une majorité des usagers-clients. Les valeurs communes qui ont présidé en Europe à l’élaboration des services d'intérêt général (garanti d’accès de chaque habitant à des services essentiels – éducation, santé, sécurité, transports, énergie, etc… ; mise en œuvre de relations de solidarité, et souci de l’avenir, du développement économique, social et environnemental) sont caduques. La logique de libéralisation dans les secteurs des réseaux a créé une série de polarisations : - économique, du fait de concentrations rapides, débouchant souvent sur une concurrence oligopolistique entre quelques grands groupes qui structurent les marchés et abusent de leur position dominante ; - sociale : les gros consommateurs disposant d’un « pouvoir de marché », et la clientèle solvable sont favorisés par rapport aux petits consommateurs, ce qui met en cause l’égalité de traitement et les possibilités de péréquation des tarifs ; - territoriale, en faveur des zones denses au détriment des habitats isolés, avec accentuation des inégalités ; - temporelle, survalorisant le court terme au détriment du long terme, pour lequel le marché est myope, ce qui favorise les investissements les moins coûteux en capital au détriment d’une politique d’avenir et finalement de la recherche du moindre coût pour l’utilisateur ; - financière, chaque concurrent cherchant à externaliser les effets de ses activités en matière environnementale et à pratiquer des formes de dumping social. Par rapport à 2014, Rhône-Alpes compte désormais 1,8 million d’habitants de plus et la population des plus de 80 ans a été multipliée par 2.5. L’ensemble des territoires de Rhône-Alpes a connu une forte dynamique naturelle liée à l’installation de jeunes actifs en âge d’avoir des enfants. L’offre d’équipements et de services au public pour répondre à ces attentes nouvelles et notamment aux attentes des familles avec enfants est infime et réservée aux foyers les plus aisés. Concernant l’aménagement numérique et en l’absence de péréquation en faveur des zones les moins denses qui coûtent le plus cher à raccorder, les deux tiers des rhônalpins sont laissés hors de la desserte en très haut débit numérique, et par voie de conséquence exclus de l’une des toutes premières conditions d’aménagement du territoire.

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L’acheminement des populations les plus fragiles vers les pôles de services au public de proximité ou jusqu’aux lignes de transport collectif est devenue inopérante. Les salariés sont revenus massivement à l’utilisation du véhicule personnel pour se rendre au travail, d’autant que plus de la moitié d’entre eux ont des horaires atypiques. Se pose désormais la question de la norme que la société souhaite promouvoir.

Hypothèse 2 - Régulation régionale Grâce à sa vision stratégique anticipatrice, la Région a su coordonner les politiques de services d'intérêt général en tenant compte des besoins et des impératifs de l’intérêt général. Elle a impulsé une dynamique à l’échelle des bassins de vie. Les politiques territoriales (CDDRA, CTEF) ont permis d’impulser une démarche de management territorial au plus près du terrain en responsabilisant les acteurs locaux et de définir des méthodes d’intervention innovantes. Rhône-Alpes a connu une dynamique démographique naturelle forte et a su renforcer l’offre d’équipements et de services répondant à ces attentes nouvelles, notamment celles des familles avec enfants et des personnes âgées dont le nombre connait une croissance inégalée. La régulation tarifaire a servi de levier d’action aux collectivités pour garantir au mieux l’accès de tous aux services, pour influer sur les comportements de consommation et pour garantir les équilibres économiques. La Région a su renforcer l’information sur les services existants, expérimenter des formes de coproduction en associant différents acteurs (partenaires sociaux, élus, associations, populations, salariés, Conseils de développement …) au diagnostic des besoins, identifier un pilote, s’appuyer sur le bassin de vie et d’emploi pour favoriser l’expression des besoins et définir le zonage le plus approprié. L’approche stratégique régionale a rendu possible une approche de mutualisation anticipée, notamment dans les territoires mal desservis, garantissant une offre de services d’intérêt général de proximité et de qualité grâce au travail d’un personnel suffisamment formé et bénéficiant d’ une sécurisation juridique. De nombreuses Maison de Services Publics ont ainsi apporté qualité et proximité aux populations des zones rurales mais aussi péri- urbaines, offrant des services variés (aide à domicile, soutien informatique, accompagnement à la recherche d’emploi, renseignements sur les prestations liées à la personne, CCAS, information sur les droits de la famille, conciliateur de justice, assurance maladie, écrivain public, mission locale, relais d’assistantes maternelles, etc). La construction d’une offre de services et la compréhension des choix à opérer ont été largement facilitées grâce à l’association de l’ensemble des acteurs. L’approche stratégique régionale a aussi rendu possible une péréquation entre les territoires de Rhône-Alpes, la région ayant démontré qu’elle était l’échelle permettant d’organiser une péréquation efficace. Les Maisons de santé, par exemple ont connu d’importantes évolutions : l’utilisation de systèmes d’information pour les soins ambulatoires et le travail coordonné des professionnels de santé (qui par le passé communiquaient très peu). Dans le cadre du fonds d’intervention régionale, les collectivités territoriales ont su apporter des aides à l’investissement et au fonctionnement pour un maillage territorial pertinent. L’approche stratégique régionale a enfin rendu possible un panachage des différents accès (physique et numérique) aux services, en proposant un accompagnement au numérique afin de veiller à l’égalité d’accès aux services d’intérêt général et de prévenir la déshumanisation. Cette politique de régulation régionale s’est concrétisée par des « Etats généraux des Services d’Intérêt général au public en région » et par la construction d’une Charte des Services au public en Rhône-Alpes qui a permis de fixer les priorités et clarifie les compétences.

Hypothèse 3 - Une régulation sur certains territoires et pas sur d'autres Faute de vision stratégique équilibrée, la Région n’a pas su coordonner les politiques de services d’intérêt général ni organiser une péréquation. Sans vision territoriale équilibrée, elle ne pouvait répondre aux besoins des er usagers. Elle a dans un 1 temps cloisonné les territoires dans l’appellation « prioritaires » ou « non prioritaires », oubliant le développement économique, préalable à la pérennisation des services au public et à un accès équitable aux services pour l’intégralité de la population. L’effort de solidarité pour rééquilibrer les services entre les catégories de population et entre les territoires n’a pas été fait.

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Aujourd’hui, les deux tiers des rhônalpins sont hors desserte en très haut débit numérique. Les aires couvertes sont des zones assez denses pour dégager l’efficience, mais n’en font pas profiter les territoires voisins désertés. Aucune dynamique territoriale n’est à l’œuvre aujourd’hui et il n’existe par conséquent aucune viabilité financière des projets de services d’intérêt général. Les services existants sont concentrés dans les centres urbains et sont des services d’intérêt restreint puisque réservés à une population capable d’avoir accès au numérique. A côté des territoires métropolitains les plus puissants, les territoires ont perdu toute attractivité et sont redevenus des cités dortoirs concentrant les populations les plus déshéritées et toutes les difficultés sociales, sanitaires, culturelles, sécuritaires, etc. L’inégalité territoriale en termes d’offres de services à la population porte en elle le renforcement d’un différentiel d’attractivité, même voire surtout à l’intérieur du territoire métropolitain. Malgré l’installation de nombreux jeunes actifs en Rhône-Alpes, peu d’équipements et de services au public peuvent répondre aux attentes des familles avec enfants, en dehors des grands pôles urbains et, là encore, à des prix dictés par le marché. Aucune régulation non plus en matière de maisons de santé, ce qui explique l’existence de plusieurs d’entre elles sur la métropole lyonnaise et leur absence totale sur plusieurs bassins de vie de la Loire ou de l’Ardèche.

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Bibliographie

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CERDD, Manifeste pour une économie qui revitalise le territoire , CERDD, mai 2011, 6 p.

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MOUHOUD El Mouhoub et GRADEVA Milena, « Relocalisations, entreprises et territoires », La Lettre du Centre o Etudes & Prospective du Groupe Alpha , janvier 2014, n 14

o PINSON Gilles et ROUSSEAU Max, « Les systèmes métropolitains intégrés », Territoires 2040 , 2012, n 3, pp. 29- 58

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VIEL Karine et CHARLOT Antoine, Comment réussir l’ancrage territorial de son entreprise ? , Comité 21, 2010, 4 p.

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VARIABLES FORMATION – EMPLOI

Variable n°17– Education, formation, gestion des compétences

Variable n°18– Emploi, rapport au travail, flexibilité, dynamique sociale

Bibliographie

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Variable n°17 Education, formation et gestion des compétences

1. Définition de la variable Le système éducatif a pour vocation d’apporter aux « apprenants » un socle de connaissances (éducation aux savoirs et formation à une ou plusieurs disciplines) et/ou de compétences (formation à un métier ou à une fonction). Il affiche un objectif ambitieux de formation du citoyen et du professionnel. Il est de fait placé au cœur d’enjeux importants, comme en témoignent les conflits qui secouent régulièrement la société française à son sujet. Si des progrès considérables ont été accomplis ces 30 dernières années (massification de l’enseignement, élévation du niveau de formation générale), un certain nombre de problèmes persistent pour adapter l’éducation aux défis de la « société de la connaissance » et la formation aux métiers d’aujourd’hui et de demain. Le développement de la « société de la connaissance » a contribué à une centralisation des connaissances et à un déplacement des compétences situées en périphérie vers les pôles urbains. La problématique de l’usine du futur englobe forcément le périmètre de formations à vocation industrielle, mais au-delà c’est également les fonctions supports à l’activité industrielle qui sont concernées. Même si elle relève d’une approche plus transversale leur exercice dans un environnement industriel est spécifique et vient se positionner comme un élément déterminant.

2. Indicateurs permanents - Nombre d’écoles, collèges et lycées en zones de montagne. - Durée moyenne de la scolarité. - Nombre d’élèves issus de l’enseignement secondaire / supérieur. - Niveau de qualification de la population. - Taux de scolarisation. - Qualité de l’orientation / adaptation des formations aux besoins / taux d’insertion dans l’emploi. - Développement de la formation tout au long de la vie. - Filières de formation industrielles. - Orientation vers les métiers de l’industrie.

3. Rétrospective

3.1. Cadre d’ensemble Placé au cœur de ses fonctions régaliennes, l’éducation reste principalement en France sous le contrôle de l’État. Celui-ci intervient dans la définition et la mise en œuvre de la politique éducative, des programmes nationaux d’enseignement, du recrutement, de la formation et de la rémunération des enseignants mais aussi de la certification et de l’habilitation des diplômes. Le symbole emblématique du diplôme national est, depuis 1808, le baccalauréat, qui couronne la fin des études ème secondaires et délivre le passeport d'entrée dans l'enseignement supérieur. Dès le début du 20 siècle, la formation professionnelle s'est également développée sous la férule de l'État : les qualifications acquises sont attestées par les premiers diplômes que sont le Certificat d'aptitude professionnelle (CAP) et le Brevet d'études professionnelles (BEP). Depuis vingt ans, la France s'est toutefois engagée dans un double mouvement de déconcentration et de décentralisation afin d’introduire plus de diversité et de souplesse d'organisation au sein du système de formation. Les compétences régionales ont été élargies dans le domaine de la formation professionnelle avec la mise en place du Plan régional de développement des formations (PRDF) en 2006, puis du Contrat de plan régional de 65 développement des formations professionnelles (CPRDFP) signé par l’Etat et la Région en 2011 .

65 Le CPRDFP est issu de la loi n°2009-1437 du 24 novembre 2009 sur l’orientation et la formation professionnelle tout au long de la vie. Elle affirme que « la formation professionnelle doit permettre à chaque personne d’acquérir et d’actualiser des connaissances en favorisant son évolution professionnelle »

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Même s’il ne relève pas d’une compétence régionale, l’enseignement supérieur est entré de plain-pied dans les préoccupations régionales. La Région Rhône-Alpes s’est dotée dès 2005 d’un Schéma régional de l’enseignement supérieur et de la recherche, puis d’une Stratégie régionale de l’enseignement supérieur, de la 66 recherche, et de l’innovation (SRESRI) en 2011 . Etat, régions, partenaires sociaux sont mobilisés dans le processus d’éducation et de formation, à la fois initiale et continue, selon une gouvernance et un partage des compétences parfois complexes. La massification de l’enseignement conduit souvent à s’interroger sur la dépréciation de la « valeur de marché » de diplômes devenus moins « rares ». Cette crainte ne semble pas justifiée : le diplôme est plus que jamais nécessaire pour obtenir un emploi, comme le confirment les statistiques sur l’emploi des jeunes. L’évolution du taux de chômage des actifs de moins de 25 ans en fonction du niveau de diplôme montre un accroissement des 67 écarts de taux de chômage selon le niveau de diplôme et entre les diplômés et les non diplômés .

En outre, la création de nouveaux diplômes à vocation professionnelle (comme les licences professionnelles) et la promotion de l’apprentissage ont permis au système d’enseignement supérieur de répondre aux attentes et aux exigences d’une plus grande professionnalisation des formations.

3.2 Les enjeux pour l’usine du futur

La « société de la connaissance » accentue la concentration des savoirs et des compétences dans les pôles urbains. Elle pose la question des relations centre/périphérie, notamment pour l’accès à l’éducation.

 La place des enseignements scientifiques et techniques dans l’enseignement général En France, la place des enseignements scientifiques et techniques dans l’enseignement général tant en qualité qu’en quantité a fait l’objet de nombreux débats. La formation plutôt littéraire des enseignants du primaire a soulevé la question de l’approche des thématiques scientifiques et techniques dès le plus jeune âge.

 Des jeunes qui sortent du système scolaire sans qualification Chaque année, environ 20 000 jeunes sortent du système scolaire sans qualification, et des dispositifs contre le décrochage scolaire ont été mis en œuvre.

 La formation en alternance s’est considérablement développée En Rhône-Alpes, le nombre de jeunes en contrat d’alternance était de 43 227 fin 2012. Par ailleurs les niveaux IV et au-delà se sont développés au cours des 20 dernières années.

 L’enseignement supérieur : les universités rhônalpines entre « excellence » et « proximité » Plus de 240 000 étudiants suivent des études supérieures en Rhône-Alpes, un effectif en progression régulière. Avec plus de 10 % des étudiants du pays, Rhône-Alpes accueille le deuxième plus gros contingent étudiants du pays, ce qui s’explique par son dynamisme démographique mais également par des migrations interrégionales et 68 internationales importantes . La région Rhône-Alpes se singularise des autres régions françaises par une forte concentration de son offre de formation supérieure, autour de deux grands pôles universitaires : Lyon/St Etienne et Grenoble, qui regroupent 70 % des étudiants rhônalpins. La Région Rhône-Alpes soutient à travers la SRESRI, le développement de pôles d’enseignement supérieur de proximité, dans des villes comme Roanne, Valence, Bourg-en-Bresse, Chambéry et Annecy, dans une logique d’aménagement équilibré du territoire et d’accès à l’enseignement supérieur pour le plus grand nombre. Le programme des investissements d’avenir, qui vise à faire émerger des pôles universitaires à visibilité internationale en France, a donné des résultats en demi-teinte pour la région Rhône-Alpes. Si les appels à projets ciblés EQUIPEX, LABEX, IEED, et IRT ont été un succès, confirmant le potentiel scientifique présent en Rhône-Alpes, les résultats décevants des IDEX ont rappelé les limites de la gouvernance actuelle des pôles universitaires rhônalpins.

66 cf avis du CESER du 15 février 2011 sur la SRESRI et la SRDEI 67 cf enquête « Génération 2007 » du CEREQ 68 Cf étude INSEE-CESER sur les migrations étudiantes en Rhône-Alpes, octobre 2012

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3.3. Eléments issus de la réflexion d’Aravis « quel travail dans 20 ans ? »

3.3.1 Du modèle de l’emploi à vie aux parcours fragmentés

Entre les deux marqueurs temporels que sont : • le « contrôle de l’emploi » organisé par l’ordonnance de mai 1945 afin de superviser et protéger l’emploi dans les secteurs jugés prioritaires pour la reconstruction de l’économie, • et « l’objectif de permettre à chaque salarié d’être acteur de son évolution professionnelle » stipulé dans l’ANI de 2003, • … de l’eau a coulé sous les ponts des parcours professionnels.

L’évolution des parcours professionnels peut être lue à travers celle de la norme d’emploi. Celle-ci s’est ème transformée, au cours du 20 siècle, sous l’effet de la montée du chômage de masse et des mutations qui ont transformé l’organisation des entreprises au plan juridique, technologique ou encore stratégique, dans un contexte de globalisation de l’économie. Une règlementation légale et conventionnelle s’est progressivement mise en place, traduisant une volonté collective de faire face aux différents risques sociaux : risque lié à l’emploi lui-même face aux aléas de l’activité économique (assurance chômage), risque lié à l’accomplissement du travail (accidents du travail ou maladies professionnelles), risque social lié à la maladie, à la maternité ou à la vieillesse (sécurité sociale). La norme de l’emploi salarié a pris alors la forme d’un CDI à temps plein au sein d’une seule entreprise, apportant une réponse à la fois de protection des travailleurs, et, en contrepartie de la subordination, au souci des employeurs de stabiliser la main-d’œuvre dans l’entreprise.

Ce modèle a, par la suite, largement été ébranlé, en raison de plusieurs facteurs : • facteurs économiques : le choc pétrolier de 1973-74 a ouvert une période d’incertitudes inédites pour les entreprises. Des formes particulières d’emploi sont alors apparues (contrat à durée déterminée (CDD), temps partiel). Et elles ne cesseront de s’étendre jusqu’à nos jours ; l’injonction de réactivité productive des entreprises face à un marché mondialisé et de plus en plus concurrentiel ayant transformé une partie des salariés en « variable d’ajustement ». Entre 1982 et 2002, les formes particulières d’emploi tendent à devenir la norme de recrutement : elles représentent en 2005 environ les trois quarts des embauches (Bunel, 2007) et 13,6 % de l’emploi salarié total, avec toutefois des situations contrastées selon les catégories de salariés (femmes, séniors, jeunes), les professions et catégories socioprofessionnelles, les secteurs d’activité. • certains dispositifs de traitement social du chômage (de masse) ou d’orientations ciblées, tels que les contrats aidés ou l’exonération de cotisations sociales pour les contrats à temps partiel, ont également pu contribuer à affaiblir la référence à l’emploi en CDI à temps plein. • transformations des systèmes productifs : la sous-traitance et la filialisation « rampante » d’une partie des activités des grandes entreprises (nettoyage, informatique, logistique…) ont transformé le lien de subordination en contrat commercial, externalisant ainsi les risques liés aux fluctuations de l’activité, aux (mauvaises) conditions de travail, à l’absence de formation…

Partant du triple constat de l’augmentation de situations de rupture des parcours, de la multiplication des statuts (salarié, chômeur, stagiaire de la formation professionnelle, indépendant, bénévole) et de la discontinuité des droits sociaux, de nombreux travaux d’experts ont fait émerger dans le débat social la notion de sécurisation des parcours professionnels. La nécessité d’une meilleure gestion des parcours professionnels est alors déclinée autour de propositions aux contenus variables, allant dans le sens d’une plus grande continuité : • en 1995, le rapport Boissonnat propose le contrat d’activité « permettant d’englober toutes les situations professionnelles sans rupture de droits », • en 1999, le rapport Supiot évoque la possible constitution de « droits individuels, abondés au fil de la carrière, transférables d’un emploi à l’autre ou d’un statut à l’autre, à la libre disposition de la personne selon un mécanisme de droit de tirage, applicables notamment en matière d’assurance maladie et de formation », • depuis 2006, la stratégie de Lisbonne prône, à travers le concept de « flexicurité » une flexibilisation partielle, négociée et compensée par des garanties explicites et collectivement organisées, rassemblées sous le terme de « sécurité »,

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• depuis 1995, un groupe de chercheurs européens explore la voie des « marchés transitionnels du travail » (gazier 2005). Ainsi, la notion de parcours professionnel semble avoir succédé à celle de carrière. Les moyens efficaces pour articuler les périodes d’activité, d’inactivité, de reconversion ne semblent pas pour autant être devenus réalités. La « gestion des parcours » se réduit encore à un mode de gestion de l’emploi basée sur la mise en adéquation non anticipée de l’offre et la demande. La page suivante de l’histoire des parcours professionnels reste donc à écrire. Pour cela, il reste à inventer ce qui permettra aux entreprises et aux territoires de participer à l’employabilité des personnes en développant et partageant une connaissance prospective des métiers et des systèmes de production.

3.3.2 La gestion des ressources humaines, (la formation tout au long de la vie ou formation continuée, la gestion des compétences et des parcours professionnels)

Sous l’effet des facteurs évoqués ci-dessus la GRH a évolué de manière significative ces dernières décennies, avec : • Un accroissement de l’importance et de la complexité de la dimension juridique. • Le développement des approches compétences : de la formation professionnelle à la gestion des parcours et des mobilités, de la Gestion des Carrières à la Gestion Prévisionnelle des Emplois et des Compétences, … • Une individualisation croissante, en particulier pour les cadres. • Une fonction RH partagée et démultipliée (notamment par l’encadrement). • Une mise en lien avec la performance de l’entreprise et donc avec sa stratégie : une GRH qui se veut porteuse du sens et des valeurs, en anticipation des évolutions de l’entreprise et de la mobilisation interne mais qui est confrontée aux fortes contraintes économiques actuelles, et aux difficultés d’emploi. Plus particulièrement pour les grandes entreprises : • des outils et méthodes RH adaptés à une politique de segmentation des salariés, • une réorganisation de la fonction RH : externalisation et mutualisation des services.

Pour les TPE-PME , si la fonction RH reste encore peu professionnalisée, le dirigeant l’intègre de plus en plus en lien avec ses décisions stratégiques.

Evolution de la règlementation : toujours plus de textes, plus de complexité, plus de champs… Le code du Travail s’est enrichi tout au long des années 1974-2005. 1990-1997 : formation, recrutement, temps partiel, compte épargne-temps, aménagement du temps de travail, insertion professionnelle et apprentissage, assouplissement du droit au travail pour les PME, protection sociale, participation… Dans les années 2000 de nombreuses lois et accords sont signés : égalité professionnelle femmes-hommes (loi 2001 et 2006), modernisation sociale, soutien pour l’emploi des jeunes (loi 2002), salaires, temps de travail et développement de l’emploi (loi 2003), retraites (loi 2003), formation professionnelle, dialogue social (loi 2004), seniors, télétravail (accords 2005), cohésion sociale, handicap (lois 2005), temps de travail et emploi (loi 2005), égalité des chances et accès des jeunes à la vie active (loi 2006), représentativité syndicale, loi TEPA (loi 2008), emploi des seniors, modernisation du marché du travail, télétravail et portage salarial (loi 2009). Les évolutions du cadre règlementaire rendent de plus en plus complexes la gestion des ressources humaines et contraignent les champs d’action des entreprises (contrat de travail, règlement intérieur, conventions collectives et Code du travail). En corollaire, la dimension juridique se renforce au sein de la fonction RH soit au sein même des entreprises, soit par un recours accru aux prestataires extérieurs.

La formation professionnelle et la gestion des mobilités Le système de formation professionnelle (loi de 1971) est à bout de souffle (absence d’appropriation par les entreprises, notamment les TPE-PME, importance des coûts investis au regard du faible nombre de bénéficiaires notamment chez les salariés les moins qualifiés). Dans les années 1990, la politique de formation s’inscrit dans un cadre général de gestion des ressources humaines qui s’inspire des évolutions récentes de la pensée économique insistant sur les facteurs de capital humain. Depuis 1990, le taux de participation des entreprises s’est établi durablement au-dessus de 3 %.

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Mais les budgets formation et le nombre de salariés bénéficiaires est très différent selon la taille de l’entreprise : en 2003 ce budget est de 1,69 % de la masse salariale brute pour les entreprises de 10 à 19 salariés (qui envoient 8,8 % de leurs salariés en formation) et 3,77 % pour les entreprises de 2000 et plus (dont 49,2 % des salariés suivent une formation). Les formations techniques et métiers arrivent en tête et sont mises en œuvre pour l’essentiel avec des ressources internes. Les formations réglementaires peuvent représenter une part importante des efforts de formation. Les TPE de moins de 10 personnes ne mettent en œuvre le plus souvent que les formations obligatoires, la comptabilité en assure la gestion. Les formations en groupe oscillent toujours en moyenne entre 1 et 3 jours. Les formations « e-learning seul » sont majoritairement mises en place dans les entreprises de plus de 1 000 salariés alors que les entreprises de moins de 1000 salariés privilégient les solutions e-learning via des formations présentielles (« mixtes-blended ») ou avec un formateur en ligne. Les salariés demandent, plus encore que les DRH, des solutions pédagogiques utilisant les nouvelles modalités de formation qui sont aujourd’hui en capacité de réintroduire l’interactivité et les simulations (serious games).

La loi sur la formation professionnelle du 5 mars 2014 suite de l’accord interprofessionnel de décembre 2013, introduit de nombreux changements avec un nouveau système de financement et la mise en place d’un compte personnel de formation.

Les dispositifs de formation et de valorisation des compétences (bilan de compétences, DIF, CIF, VAE) sont connus par 6 salariés sur 10 mais très peu utilisés. Les formations individuelles sont par ailleurs en retrait (33 % des formations suivies). Le DIF , bien que encore très peu utilisé (16,3 % des salariés), a élargi le taux d’accès à la formation pour les catégories de salariés qui se formaient le moins (ouvriers et les employés). L’accès à l’information est le premier obstacle à l’utilisation du DIF. La VAE , dans une logique individuelle, est un outil de gestion des RH (logique de formation, de parcours, de promotion) qui reste ponctuel et lourd à gérer dans la durée : opacité de l’offre de formation, offre de certification difficile à identifier pour certains métiers, des diplômes non reconnus !… Par contre, la VAE collective (métier, fonction, génération) met l’entreprise qui fait ce choix en lien avec sa stratégie et par conséquent en forte implication sur les moyens et les résultats attendus : mise à niveau collective, réorganisation, employabilité. Les femmes sont 2 fois plus représentées que les hommes. En Rhône-Alpes, en 2008, 74 % des jurys de VAE concernent des femmes. Le poids du secteur sanitaire et social est fortement représenté (30 %) et les 30-44 ans sont largement majoritaires, suivis des 45 ans et plus. La formation en alternance (via le contrat de professionnalisation) est en progression (pour 67 % des contrats arrivés à terme, le salarié est resté dans l’entreprise) et le rôle du tuteur interne est prépondérant dans l’apprentissage.

La mobilité devient centrale dans les parcours professionnels. L’obsolescence de plus en plus rapide des savoirs et savoir-faire incite à promouvoir la « formation tout au long de la vie » (réformes 2002-2004). Plus aucune entreprise ne peut garantir l’emploi à vie caractéristique de la société salariale.

La gestion par les compétences

Du taylorisme aux démarches compétences A partir des années 1980, plusieurs mouvements convergent pour modifier profondément les modalités de gestion des ressources humaines. Le premier grand mouvement est d’ordre économique ouverture des marchés, serviciarisation… Les entreprises françaises résistent à la concurrence en augmentant la productivité et en se concentrant sur les segments à forte valeur ajoutée et métiers les plus qualifiés. Le deuxième grand mouvement est d’ordre sociologique. Les valeurs d’autonomie, la recherche d’un enrichissement des tâches pour tous, remplacent les valeurs d’obéissance et la stricte division du travail entre dirigeants et exécutants.

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Ces deux mouvements ont donc conduit à considérer que globalement le taylorisme et l’organisation scientifique du travail ont fait leur temps. Les définitions des métiers, des qualifications et des hiérarchies dans les Conventions collectives sont elles aussi associées à un monde industriel en déclin. La vision taylorienne basée sur l’idée que l’on pouvait se passer de la motivation du salarié est notamment remise en cause dans les années 70 par des indicateurs factuels (augmentation des taux d’absentéisme, de rotation des personnels, de la non qualité,) qui traduisent la faible implication des salariés et représentent des coûts cachés non négligeables. De nouvelles écoles de pensée vont insister sur les aspects psychologiques de la gestion du personnel. L’école des ressources humaines par exemple montre l’importance des communications internes, du style de commandement ou du travail en équipe comme facteurs de motivation du salarié. L’école sociologique insiste sur la diversité des besoins individuels ainsi que sur la distinction travail prescrit – travail réel. Après le transfert du pouvoir d’embauche et de gestion du personnel des contremaîtres vers des services centralisés, les responsables opérationnels sont sollicités par les responsables RH pour produire de la connaissance sur le travail réel. En effet, les évolutions contextuelles du travail (gestion des aléas de plus en plus fréquents, évolutions de la relation clients…), nécessitent des initiatives et de l’autonomie. Les procédures et la routine ne suffisent plus, il faut pouvoir mobiliser les compétences. Ce besoin d’articuler GRH et analyse du travail pour mieux prendre en compte les évolutions métiers amène les « démarches compétences » dans les années 2000. Contrairement aux qualifications indexées sur des diplômes et des progressions à l’ancienneté, les compétences se jugent en situation de travail. Alors que le taylorisme considérait l’initiative individuelle comme une source de dysfonctionnement, elle est maintenant célébrée comme le gage d’une adaptation aux évolutions technologiques et aux spécificités de situations de travail marquées par une présence de plus en plus constante du client lui-même (développement des services et des métiers de front- office). Les « démarches compétences » ont permis de construire de la connaissance sur le travail réel, mais les méthodes et outils – comme écrire un référentiel en réunissant des groupes où les salariés parlent de leur travail – ne garantissent ni l’« authenticité » d’une prise en considération du travail, ni la distinction entre travail réel et travail souhaité. Si les outils de gestion des compétences consistent essentiellement à faire le relevé exhaustif des attentes que l’employeur peut opposer à ses salariés, s’ils ne comportent pas, en sens inverse, de dispositifs faisant connaître régulièrement à cet employeur les épreuves qu’il impose à ses salariés à travers les situations productives issues de son positionnement stratégique, de sa stratégie d’offre, ces outils ne fonctionnent que dans un sens et leur dimension de contrat moral, de contrat d’engagement, est biaisée (Pascal UGHETTO 2007). Quoiqu’il en soit, comme le dit Hughes Bertrand, « les démarches « compétences » n’ont plus de raison de figurer au magasin des nouveautés managériales. Elles ont maintenant un passé ».

GRH et GPEC

A la suite de Gilbert P. (2006) et article RFG (1999), cinq périodes peuvent être distinguées dans l’apparition de la GPEC : - La gestion prévisionnelle des effectifs, caractéristique des années 60 : assurer l’ajustement quantitatif des salariés en mobilisant des modèles de simulation et d’optimisation et l’analyse de la pyramide des âges, - La gestion prévisionnelle des carrières, très pratiquée au cours de la décennie 70 : prévoir les affectations potentielles des salariés conformes aux besoins de l’entreprise et aux attentes des salariés (cadres notamment). Les outils privilégiés sont l’appréciation du potentiel, le plan de carrières, les filières promotionnelles, les organigrammes de remplacement, … - La gestion prévisionnelle des emplois dans les années 80 met l’accent sur la nature des emplois à pourvoir, en s’appuyant sur des outils comme le répertoire des métiers, la carte des emplois, l’observatoire des métiers, - La gestion prévisionnelle des compétences, au cours de la décennie 90, cherche à définir la nature des compétences que devront détenir les salariés et renforcer leurs capacités d’adaptation (référentiel des compétences, bilan de compétences, projet professionnel personnel), er - Enfin, l’évolution démographique met la gestion des âges au 1 rang des préoccupations de la décennie en cours.

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De la GPEC à la GTEC ? Le succès limité des démarches de GPEC incite à étendre le périmètre des mobilités accompagnées au bassin d’emploi. La GPEC territoriale a des objectifs de connaissance des besoins des entreprises d’un même bassin d’emploi et de soutien à la reconversion des salariés concernés par les réorganisations et restructurations d’entreprises. Les démarches menées à l’échelle de branches ou de territoires peuvent favoriser l’implication les TPE-PME (pour lesquelles l’« état d’esprit GPEC » reste à diffuser) sur ces questions dans des cadres mutualisés et interentreprises.

Les accords GPEC C’est dans ce contexte que s’inscrit le projet d’accord national interprofessionnel de 2008 sur la GPEC. Le texte marque la volonté des partenaires sociaux d’insuffler à la GPEC « une nouvelle dynamique, avec l’objectif que chaque salarié puisse bénéficier d’une visibilité sur les évolutions des emplois, des métiers et des qualifications ainsi que sur les parcours professionnels possibles », recentre la GPEC sur « l’anticipation de l’évolution des métiers, des compétences et des qualifications » et consacre un article spécifique à sa «dynamique d’accompagnement au niveau territorial ». Début 2008, plus de 200 accords sont signés dont 73 % dans des entreprises de plus de 1000 salariés (67 % dans l’industrie et 31 % dans les services). Les 55 accords GPEC étudiés par l’Anact mentionnent en premier les enjeux économiques pour l’entreprise et les enjeux de développement professionnel et d’employabilité pour les salariés. Mais seuls 25 % de ces accords aboutissent à des engagements précis des entreprises. Les partenaires sociaux ont largement négocié sur les divers outils d’accompagnement individuels mais ces accords restent très peu prospectifs dans l’ensemble. De plus ni les acteurs des territoires et des bassins d’emploi ni le management ne sont impliqués comme acteurs privilégiés dans ces accords. Aujourd’hui, la mission des territoires en matière de GPEC se voit renforcée par le contexte économique actuel de crise, l’accélération des mutations économiques, sociales et démographiques. L’Etat incite fortement les branches professionnelles et les territoires à multiplier les démarches de GPEC collectives : politique industrielle encourageant la création de clusters, les pôles de compétitivité et les réseaux d’entreprise qui coopèrent localement tout en restant compétiteurs globalement. « Il devient urgent de repenser l’organisation du travail en tenant compte de la notion de territoire », estime Entreprise & Personnel qui recommande « de chercher à regrouper les entreprises travaillant dans un même secteur en un même lieu, afin d’accroître les synergies industrielles et d’optimiser la gestion des ressources humaines. ». Les DRH évoluent en plein paradoxe, notent les auteurs. « D’un côté, les entreprises deviennent mondiales, les procédures globales, de l’autre, en beaucoup de domaines (recrutement, mobilité, employabilité) les politiques restent à usage domestique de l’entreprise ou de l’établissement local. » Pour Stéphane MICHUN, CEREQ Montpellier, la GTEC, si elle n’est pas une simple juxtaposition de GPEC individuelles, devrait privilégier une approche en termes de ressources. La GTEC suppose un volontarisme « politique », la définition de priorités, un projet de territoire et il faut penser la transférabilité des compétences d’un secteur à l’autre. Il faut jouer aussi bien sur la transmission d’entreprises, la formation des demandeurs d’emploi et des salariés, la formalisation des pratiques de recrutement et d’intégration dans l’entreprise, la diffusion de la GPEC mais aussi l’aménagement du territoire.

L’individualisation de la gestion des RH Dans ses prémisses le mouvement d’individualisation de la GRH, concomitant au mouvement de gestion par les compétences cherche à prendre en compte les mérites individuels du travail dans une volonté d’équité. L’objectif est de reconnaître les différences de performance entre salariés occupant des fonctions similaires en se libérant des règles collectives des grilles de classification et d’avancement. Des mesures et dispositifs variés (fixation d’objectifs quantifiés, entretiens d’évaluation, intéressement, avancement au mérite..) vont permettre l’individualisation des salaires et l’attribution d’une part variable de plus en plus importante, sans lien avec l’ancienneté. Cette individualisation, plutôt bien accueillie par tous, va profiter aux cadres supérieurs et aux plus performants des salariés. Mais en introduisant la concurrence entre salariés et la montée du « moi d’abord », elle tend à détruire les collectifs de travail comme lieux de construction de compétences et de solidarité. Des entreprises ont mis un frein à ces pratiques pour valoriser les performances collectives et les réalisations d’équipes de travail.

Le « partage » de la fonction RH : proximité avec le terrain

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Au milieu des années 90, les entreprises globalisées et financiarisées ont assigné de nouvelles fonctions aux RH, qui ont dû réduire leurs coûts et devenir contributrices de valeur au même titre que la fonction achat. L’individualisation de la GRH, le modèle « manager premier RH » et le salarié « acteur de son parcours professionnel » se sont généralisés. La fonction s’est d’abord répartie sur des RH opérationnels (RH de site dans les grandes entreprises) prenant en charge toute la partie administrative locale. La fonction RH passe d’une moyenne de 1,8 % de l’effectif total en 1996 à 1,23 % en 2003 : baisse conjoncturelle des coûts du recrutement, de la formation, du travail temporaire,… mais aussi transfert des tâches RH vers les managers opérationnels (gestion des absences et des congés). Si, pendant quelques années, les managers ont été accompagnés dans la prise en charge de cette démultiplication de la fonction RH (et notamment dans le rôle du « manager-formateur », animateur d’équipe et de compétences), ils sont aujourd’hui submergés par les contraintes de production et de commerce. L’incertitude permanente liée aux évolutions des entreprises relègue au second plan l’animation des RH. Le manager ne trouve alors plus sa place dans son rôle de relais d’une politique RH qu’il ne comprend plus et dans sa mission d’appui aux équipes.

Mise en lien de la GRH avec la performance de l’entreprise et donc avec sa stratégie Une GRH qui se doit d’être porteuse de sens et de valeurs, accompagnant les évolutions de l’entreprise et la mobilisation interne. Les entreprises communiquent davantage sur leurs engagements sociétaux, leurs valeurs et leur gestion des Ressources Humaines. Elles intègrent en cela le fait que les salariés sont plus sensibles à l’image et à la réputation de leur entreprise. Ainsi, selon le baromètre Labo du sens/IFOP, les critères qui contribuent le plus à la mauvaise image d’une entreprise sont la mauvaise qualité des produits et services (58 %), la mauvaise qualité des relations humaines et du management (53 %), le mauvais niveau de responsabilité sociétale (47 %), la mauvaise politique des ressources humaines (44 %)…bien loin devant les mauvais résultats financiers (35 %).

Pour les grandes entreprises…

Des outils et méthodes RH adaptés à une politique de segmentation des salariés Les entreprises segmentent davantage leurs salariés pour mieux adapter leurs offres de produits et services RH à des besoins différenciés selon l’âge, les cycles de vie, les diplômes… (utilisation des clivages plus ou moins spontanés entre salariés selon les milieux sociaux et les processus de formation).

Avantages : gestion plus souple des groupes précarisés et pression sur les groupes « centraux ». Bernard Gazier suit AL Morin qui parle de « diffraction de la relation salariale » : flexibilisation interne et externe ; externalisation des activités. Les tendances lourdes sont là qui poussent à une gestion toujours plus fine des « panels » de salariés, à un élargissement au global de la palette de services et à sa personnalisation en fonction des situations : • Pénurie de talents et fort taux d’ « infidélité » des jeunes diplômés, • Cohabitation de générations très différentes, nouvelles attentes chez les jeunes par rapport à la valeur travail et à la quête de sens (arrivée d’une génération contrat « donnant-donnant »), • Accélération des changements et place majeure du facteur humain dans les processus de travail ce qui accentue les besoins d’accompagnement de chacun en fonction de son profil et de ses compétences, • Cadre légal toujours plus foisonnant qui fournit de nouvelles opportunités, obligations et axes de travail.

Les effets sont parfois très significatifs dans certaines grandes entreprises et plus spécifiquement vis-à-vis des populations souvent les plus qualifiées : • Des prestations très larges : services à la personne (crèches, salles de sport, conciergerie…), • Un système de rémunération « à la carte », • L’accent mis sur le développement professionnel : coaching jeunes managers, parcours nouveaux embauchés, comités carrières managers, RDV carrières…, • Des dispositifs spécifiques pour les fins de carrière en réponse notamment à des problématiques de pyramide des âges (tutorat, missions au-delà de l’âge de départ à la retraite …), • Des horaires adaptés en fonction des situations de famille ou de vie, • Une politique de recrutement très ciblée par rapport à certains publics.…

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Les entreprises disent s’y retrouver : recrutement optimisé, rétention des compétences, motivation des collaborateurs, baisse de l’absentéisme… La diversification croissante des activités et modes de vie, l’accent mis sur la responsabilité sociale des entreprises et les enjeux d’amélioration des conditions d’exercice du travail…, sont de nature à renforcer encore ces tendances avec le risque de distendre davantage le lien social et sociétal compte tenu des iniquités perçues intra ou interentreprises. Par ailleurs, on observe déjà des décalages entre les méthodes d’attraction des DRH et les attentes des populations ciblées : • vis-à-vis des jeunes : méthodes centrées sur l’image et la notoriété de l’entreprise alors que les priorités des jeunes sont la rémunération et l’évolution de carrière, • vis-à-vis des cadres : politique de rémunération centrée sur la valorisation des compétences et la fidélisation des talents alors que la première priorité des cadres est la garantie d’un haut niveau de protection sociale.

Une réorganisation de la fonction RH : externalisation et mutualisation des services En 2009, la première priorité des DRH français est la maîtrise des coûts opérationnels (57 %) et les axes de travail sont l’accompagnement des transformations organisationnelles suivi de l’appui aux managers opérationnels. Quant à l’amélioration des compétences, elle est prioritaire pour 83 % des DRH Europe (31 % pour les DRH France). La crise de ces 3 dernières années et la chasse impitoyable aux coûts ont amené les entreprises de plus de 2 000 salariés à externaliser leur fonction RH et à rechercher le meilleur retour sur investissement possible (notamment pour la paie, les SIRH). L’externalisation et la création de centres de services partagés (CSP) sont des évolutions organisationnelles qui s’inscrivent dans le contexte plus général du développement des organisations en réseau. Elles répondent aux pressions concurrentielles et aux besoins de rentabilité qui nécessitent d’augmenter la contribution, la flexibilité et l’efficacité des ressources dédiées aux activités support. Les CSP voient leur périmètre progressivement s’élargir pour englober d’autres fonctions comme les achats, la logistique (centre de coordination), le service client (call center) ou la gestion des ressources humaines.

La fonction RH intégrée dans les décisions stratégiques des TPE-PME Les TPE-PME sont particulièrement touchées par la nécessité de s’adapter à des évolutions de plus en plus fréquentes et imprévisibles. Les impacts sur les métiers et sur les compétences se traduisent par des difficultés à recruter, à fidéliser, à transmettre les savoirs, à professionnaliser l’encadrement…

Plusieurs constats : Tout d’abord, le profil du dirigeant est une dimension déterminante du fonctionnement de l’entreprise. Dans une TPE, la stratégie est souvent intuitive ou peu formalisée et le système d’information interne peu complexe ou peu organisé. Les investissements RH (gestion informatique, outils de contrôle, suivi et analyse) sont en augmentation dans les entreprises de 10 à 50 salariés, (notamment lorsque liés aux obligations légales) en même temps que les effectifs de la fonction RH diminuent : transfert des tâches RH vers l’opérationnel, baisse conjoncturelle des coûts de recrutement… Aujourd’hui pour garantir souplesse, réactivité et innovation, les dirigeants de TPE-PME doivent mettre en place un management stratégique des RH : • gérer sans subir les évolutions métiers et compétences, anticiper sur les besoins et maîtriser les processus et les outils RH, • impliquer durablement les salariés dans la mise en œuvre récurrente des changements, • professionnaliser le management de proximité dans la gestion des ressources humaines. L’analyse en Nord-Pas-de-Calais et en Rhône-Alpes auprès des PME ayant mis en place le dispositif GPEC de la DRTEFP montre qu’une réflexion sur la gestion prévisionnelle des métiers, des emplois et des compétences entraîne une formalisation du projet d’entreprise et une formalisation de son organisation : fonctionnement, processus et outillage RH, communication, polyvalence…

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D’un côté, la stratégie RH doit répondre à la stratégie globale de l’entreprise, de l’autre la stratégie globale doit pouvoir analyser le champ des possibles ouverts par la stratégie RH.

4. Hypothèses d’évolution

Hypothèse 1 - Le statu quo Le système scolaire peine à s’ajuster aux exigences de la société du numérique, à ses contraintes dans les modes de production, de distribution des biens et des services. Des réformes « cosmétiques » engagées sous la pression sociale et économique ne parviennent pas à modifier en profondeur le système éducatif. Le fossé entre enseignement privé et public se creuse. A la sortie du primaire, les connaissances des fondamentaux, dont l’anglais, ne sont pas maîtrisées, exception faite des élèves issus des écoles européennes. La fracture sociale s’aggrave, de même que la fracture numérique. Compte tenu de la pyramide des âges l’Education nationale est amenée à recruter massivement. Confrontée en matière de rémunération aux salaires du secteur privé, elle peine à renouveler son personnel enseignant, dont la carrière n’apparaît plus suffisamment attractive. Les universités restent sous-capitalisées, sous dotées et fragmentées. A l’exception des majors regroupés sous une bannière commune à vocation européenne et mondiale, les établissements de « seconde zone » ne parviennent pas à se faire une place dans une compétition devenue plus sévère. Les universités asiatiques et américaines gagnent des parts de marché par une politique active d’implantation et la promotion d’outils de formation à distance. L’attractivité des universités rhônalpines connaît un sérieux revers : trop nombreuses et éclatées, elles ne sont pas parvenues à trouver ensemble un levier de développement, faute de s’être entendues sur une stratégie cohérente et lisible au plan régional comme européen. La formation continue n’est pas véritablement connectée au reste du système éducatif. On reste sur un schéma de forte segmentation entre formation initiale, formation continue des demandeurs d’emploi et formation continue des salariés. Les dispositifs de financement restent spécifiques et cloisonnés. L’appétence des moins qualifiés pour la formation reste faible. Seuls les plus qualifiés continuent à bénéficier de l’offre de formation continue. Les entreprises sont malgré un chômage important confrontées à des difficultés de recrutement, elles restent très influencées par le diplôme comme sésame d’entrée dans l’entreprise tout en constatant l’inexistence des profils recherchés sur le marché du travail. Dos à dos la plupart du temps, le système éducatif et l’entreprise travaillent ensemble toutefois sur quelques filières nouvelles. L’évolution reste sur les flux et non les stocks. Le dialogue entre système éducatif et entreprises reste éclaté et piloté par de multiples acteurs présents à l’échelle régionale mais dépendants de décisions nationales. La Région peine à mener une stratégie. Elle apparaît comme la variable d’ajustement du système sur laquelle la pression est maximale et les attentes surestimées. Les résultats décevants eu égard aux capacités déployées décourage les acteurs d’initiatives de changement du « système ». Les innovations se font à la marge mais n’irriguent jamais l’ensemble.

Hypothèse 2 - Le divorce ; le système éducatif ne réussit pas à s’adapter alors l’entreprise développe des stratégies de contournement. L’adaptation aux nouvelles technologies qui ne cessent de se développer contraint les entreprises à recruter du personnel de plus en plus qualifié et capable de s’adapter en permanence à la nouvelle donne. Force est de constater que le système éducatif coupé du reste de la société ne répond pas à la demande et aux besoins des entreprises. De plus en plus de diplômés bac + 5 ont d’immenses difficultés à trouver un emploi stable correspondant à leur qualification sur le papier et contraints de postuler à des emplois peu qualifiés, malgré de longues années d’études. L'université est toujours contrainte d'accueillir tous les ans une foule de bacheliers, dans des filières où les perspectives d'embauche à la sortie sont pourtant particulièrement faibles. L’orientation professionnelle essentielle dans les efforts visant à mettre en adéquation l’offre de formation et l’offre de travail n’est pas une priorité de l’Education nationale qui éprouve toujours de fortes réticences à considérer l’accès à l’emploi comme une de ses missions première. Les entreprises ne pouvant plus compter sur l’Education nationale, doivent donc tenter de d’anticiper les évolutions à venir. Elles doivent donc s’efforcer de prévoir les besoins, les situations de travail et de prévenir des

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risques de déqualification et d’usure professionnelle, mais aussi trouver des solutions et stratégies innovantes pour répondre à leurs besoins. Les employeurs ont donc recours à de nouveaux leviers pour répondre à leurs besoins de compétences, de ressources et encourager les chercheurs d’emploi, les personnes en transition professionnelle à intégrer leur entreprise en les formant et les accompagnant sur de nouvelles qualifications : − Des écoles de formations intégrées au sein de leur entreprise permettent la formation des salariés à leurs métiers et à la qualification attendue. Ces écoles mettent en œuvre des parcours de formation initiale et continue permettant aux salariés de s’adapter aux besoins évolutifs de l’entreprise. Un plan de formation collectif est établi chaque année, en collaboration étroite avec le management de l’entreprise. Il comprend des formations spécifiques aux métiers de l’entreprise face à son évolution et des formations générales (bureautique, langues, français,…). − Des groupements d’employeurs permettent de faire face à la pénurie de ressources humaines en mutualisant celles-ci. − Des possibilités d’évoluer à des postes différents sont données aux salariés par le biais de la polyvalence, ou dans le cadre de parcours de promotion leur permettant d’accéder à des responsabilités, ou encore, dans la possibilité d’établir des passerelles intermétiers en s’appuyant sur les compétences transversales. − De nombreuses entreprises vont chercher des compétences à l’extérieur du territoire national.

Hypothèse 3 – La course à l'échalote : « le système éducatif se réforme mais l'entreprise n'y croit pas et reste sur les stratégies qu'elle a développé » Le Ministère de l'Education poursuit sa mission et persiste à rendre obligatoire l'instruction des enfants de 6 à 16 ans. Les Programmes prennent en compte les bouleversements économiques et s'attachent à renforcer les fondamentaux que sont la lecture et l'écriture pour éradiquer l'illettrisme. Tout au long de la scolarité, le face à face pédagogique individuel ou par petit groupe se généralise pour accompagner les élèves détectés en difficultés. Les enseignements sont dispensés dans un environnement multi média pensé pour que réussisse l'élève. L'enseignant intervient plus pour expliciter ce qui n’a pas été compris, pour préciser une notion ou un concept, pour mettre en perspective des données éparses et leur donner sens, ou pour comprendre les raisons d'un échec et y apporter les remèdes que pour sanctionner une difficulté d’apprentissage Sous la pression des familles et des nouveaux modes de communication, l’enseignement universitaire connaît une véritable révolution. Les étudiants réalisent une partie de leur formation à domicile utilisant pour cela des outils leur permettant d’accéder à distance aux cours magistraux avec une grande souplesse puisque le système permet de revisualiser à loisir les enseignements dispensés et en même temps d’acquérir les nouvelles compétences requises par les technologies de l’internet. Ce nouveau modèle en évolution constante semble est en prise directe avec les réalités d’une société en perpétuelle mouvement. Composé de très petites entreprises, le tissu industriel ne voit pas l’utilité des ces nouvelles compétences qui arrivent sur le marché et dont il n’a que faire. Le divorce est consommé entre les rêveurs et les pragmatiques.

Hypothèse 4 – Un nouveau logiciel partagé Face à la difficile compétition avec les pays émergents compte tenu des différences de coûts, les pouvoirs publics comme les entreprises et les universités ont pris conscience que la seule façon de pouvoir jouer un rôle sur la scène internationale résidait une meilleure articulation entre l’école et l’entreprise. Dans les plus petites villages comme dans les plus grandes villes, des comités regroupant des enseignants et des entreprises sont mis en place pour permettre des échanges et des confrontations entre les fondamentaux enseignés à l’école, au collège, au lycée ou à l’université et les attitudes d’adaptation dont ont besoin les entreprises afin de permettre aux élèves et étudiants des passages d’un système à l’autre : l’application d’un enseignement trouvant son application dans l’entreprise, la technique d’entreprise décortiquée révélant les fondamentaux scientifiques. Cette expérimentation qui au début était source de railleries et de méfiances de part et d’autres s’est peu à peu répandue devant l’appétence affichée par les jeunes pour l’école et l’entreprise. Ce qui était ennuyeux devenait tout d’un coup ludique et chacun pouvait exprimer ses compétences et ses goûts : celui qui était porté sur l’abstraction voyait d’une autre œil celui qui brillait dans la résolution de problèmes techniques. Peu à peu, l’école

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et l’université ont compris qu’à côté de l’apprentissage des savoirs il y avait de la place pour prendre en compte les savoirs faire et la créativité. De même que tous les chemins mènent à Rome, il n’en est pas de privilégié pour accéder aux savoirs. A une école, la même pour tous au nom des principes républicains se sont substituées peu à peu des écoles correspondant aux aptitudes des apprenants. Au lieu d‘avoir une offre qui oblige l’enfant ou l’étudiant à s’adapter a été mise en place une école s’adaptant aux demandes de ses usagers ; ce mode de raisonnement a été même adopté par les services publics et par les entreprises. Le nouveau mot d’ordre, l’adaptation applicable par tout et par tous a modifié l’organisation et les relations entreprise école et les modes d’apprentissage des avoirs et des savoirs faire. L’accent a été mis sur les capacités d’adaptation et non plus sur les seules récitations des savoirs. Capacité d’adaptations de celui qui a des dispositions pour le concret et à revenir sur les principes fondamentaux et réciproquement. Un grand débat a eu lieu pour savoir si le Ministère de l’Education ne pouvait s’appeler le ministère de l’adaptation. Le système éducatif français s’est profondément transformé, en prenant en compte les besoins de compétences nouvelles requises par les évolutions économiques, en jouant son rôle de levier essentiel de la cohésion sociale et du développement durable et en s’ouvrant sur l’Europe et sur le monde. Dans le monde économique, la prise en compte de la formation - tout au long de la vie des salariés - est devenue l’outil principal de l’innovation et du développement économique, elle a changé la gestion des RH. La formation en alternance intégrée dans les « plans de carrière » tout en permettant aux entreprises de faire face à leur obligation de « créativité », joue également un rôle majeur dans le climat de dialogue social qu’elle aide à séréniser.

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Variable n°18 Emploi, rapport au travail, flexibilité, dynamique sociale

1. Définition de la variable L’emploi est considéré dans cette fiche variable autant par son côté qualitatif que quantitatif. Les formes d’emploi sont également des facteurs déterminants de cette variable. L’usine du futur interroge les formes d’emploi mais également les questions du rapport au travail et de l’ajustement d’une flexibilité entre temps de travail et autres temps (personnel, familial, social, civique) et les formes de dynamique sociale qui se mettent en place. Le rapport au travail est envisagé dans cette fiche variable comme élément de cohésion sociale, qui fait référence à son influence en termes d’intégration sociale. Le travail y est considéré comme une expérience dans laquelle les personnes sont amenées à prendre des responsabilités et à en répondre. Enfin, le travail est entendu en tant que valeur, et dans son articulation avec les différents temps de vie des individus (loisirs, …). On entend ainsi le rapport au travail non seulement en tant que concept, comme facteur de développement des individus et dans le sens du rapport des individus au travail, mais également en tant que donnée organisationnelle de la société (répartition des individus selon les activités, les branches, les secteurs d’emploi, et les territoires). Même si les éléments de réflexion prospective du rapport au travail comme concept peuvent s’appliquer au niveau national, et plus largement au niveau des sociétés occidentales, ils impactent Rhône-Alpes au son sens organisationnel, compte tenu des spécificités territoriales de la région en termes d’économie et de secteurs d’activité (prédominance du tertiaire, évolution des secteurs industriels, forte attractivité…).

2. Indicateurs permanents - Mobilité professionnelle - Gestion des stocks / gestion des flux - Départ en retraite (âge, taux, préretraite…) - Nature des contrats professionnels - Accompagnement des emplois et sécurisation des parcours - Répartition de la population active : par classe d’âge, par sexe, par niveau d’études… - Taux de chômage. - Niveau de salaire. - Organisation des temps - Perception de la valeur travail.

3. Rétrospective ème Avec la révolution industrielle de la fin du 18 siècle, la relation au travail des sociétés occidentales s’est profondément transformée pour donner une place centrale à l’emploi salarié. A partir de la période dite des « trente glorieuses », la situation de plein emploi est devenue une norme sociale. Les transformations de l’organisation du travail, notamment la taylorisation et les changements techniques, puis le développement des services et l’évolution des qualifications, entretiennent le débat sur le travail en tant que facteur d’autonomie, de réalisation de soi et d’intégration sociale. Depuis 1975, et principalement entre 1985 et 1990, la mobilité s’est fortement accrue sur le marché du travail. Elle s’est également transformée : les changements d’employeur s’accompagnent de plus en plus souvent de période de chômage, les recrutements se font de moins en moins en contrat à durée indéterminée (même si cela demeure la grande majorité des contrats actuels). Souvent associées aux jeunes cadres dynamiques, les mobilités sont pourtant deux fois plus fréquentes sur les postes non qualifiés. Dans ces emplois, en début comme en fin de carrière, les trajectoires prennent le plus souvent la forme d’une alternance entre périodes de chômage et d’emploi. A l’autre extrémité du marché du travail, un pôle d’emplois stables s’est fortement développé. Il est majoritairement composé de cadres et de

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professions intermédiaires de plus de vingt ans de carrière, salariés dans la fonction publique, dans de grandes entreprises industrielles ou dans des organismes financiers. Nous sommes aujourd’hui à un nouveau tournant des sociétés industrielles occidentales où l’intégration mondiale bouscule la capacité des États. L’activité économique, en pleine recomposition depuis près de 10 ans, est maintenant caractérisée par la prédominance du secteur tertiaire dans le marché du travail. Par ailleurs, les emplois relatifs aux fonctions métropolitaines en Rhône-Alpes représentent 30 % des emplois. er Le marché du travail régional reste marqué par un taux de chômage important 8,6 % au 1 trimestre 2014 même si il est plus faible que le niveau national (9,7 %)l. Entre 1990 et 2010, la région Rhône-Alpes a perdu un quart de son effectif industriel, passant de 552 600 à 418 400 emplois (- 24,3 %). Le phénomène de désindustrialisation a concerné l'ensemble de la France métropolitaine puisque, dans le même temps, l'industrie du pays perdait 1,25 million d'emplois (- 27,6 %). La part de l’emploi industriel était en 2011 de 17,2 % de l’emploi total contre 29,1 % au Bade-Wurtemberg 28,9 en Vénétie 26,6 en Lombardie et 26,2 au Piémont. Quelques éléments tirés de l’exercice de prospective d’Aravis « quel travail dans 20 ans ? 1. « Une baisse de la durée du travail sur une vie professionnelle » Le temps consacré au travail sur une vie, baisse de manière spectaculaire sur la longue durée : 70 % du temps de vie éveillé en 1850, 18 % en 1980, 13 % en 2000, moins de 10 % aujourd’hui. On observe d’une part une persistance du chômage de masse (10 % de la population française, 8,9 % en Rhône- Alpes au 4ème trimestre 2014) et de longue durée (7,6 mois en 1975 / 13,5 mois en 2014 – le chômage longue durée est passé de 16,9 % en 1975 à 43 % en janvier 2015) et d’autre part une grande mobilité avec un volume très important d’aller-retour entre l’emploi et le chômage. La population au chômage se renouvelle assez lentement : plus d’une personne sur deux avait déjà connu un ou plusieurs épisodes de chômage pendant les trois années précédant son inscription à l’ANPE. L’explication de ce phénomène s’explique principalement par la progression de la précarité des contrats de travail. Actuellement 4 personnes sur 10 s’inscrivent à l’ANPE à la suite d’une fin d’un CDD ou d’une mission d’intérim. La récurrence du chômage constitue ainsi un des aspects fondamentaux de la dynamique actuelle du marché du travail. Ces mutations n’affectent néanmoins pas de la même manière les différentes catégories sociales. Les épisodes de chômage sont en général plus courts pour les jeunes que pour les personnes plus âgées. L’extension du chômage touche davantage les moins diplômés, l’échelle des durées de travail professionnel des actifs occupés, s’inverse selon la hiérarchie des diplômes, les plus diplômés travaillant désormais le plus longtemps. La France a la particularité d’avoir un taux d’activité faible aussi bien pour les jeunes que pour les travailleurs âgés. L’âge moyen d’entrée dans la vie active se situe aux environs de 21 ans. La principale difficulté pour les jeunes est l’entrée sur le marché du travail. L’exigence d’expérience contraint les jeunes à enchaîner les stages qui deviennent des passages obligés sans réel statut juridique. Moins bien payés, les jeunes cadres évoluent moins rapidement dans l’entreprise et leur augmentation de salaire se fait souvent à titre individuel alors qu’elle se négocie collectivement pour les travailleurs âgés. Si le taux de chômage des travailleurs âgés (50 ans et plus) est moins élevé que la moyenne nationale (7,2 % au 4ème T 2014 vs 10 % pour l’ensemble de la population pour la même période) il s’explique en partie par les différentes catégories créées pour les statistiques : les sorties d’activité et les sorties vers la retraite (ou pré- retraites) ne sont pas comptabilisées dans la catégorie des chômeurs ; cependant, le taux d’activité des 55-64 ans est faible : 47,9 % en 2012. Le taux d’emploi des 60 ans a progressé de 20 points en 10 ans : 40 % en 2012. L’activité professionnelle a tendance à se concentrer sur les âges médians (25- 49 ans). Période pendant laquelle, il faut tout concilier : vie professionnelle, vie familiale, sportive, sociale, politique … Surtout pour les femmes qui continuent à réaliser la très grande majorité des tâches domestique et l’éducation des enfants. Pour les personnes ayant un emploi, la réduction globale du temps de travail a été contrebalancée au cours des 10 dernières années par une forte intensification. Allongement des journées de travail, recours aux heures supplémentaires se développent. Selon l’enquête conditions de travail 2005 INSEE – DARES, pour un salarié sur dix les principales contraintes horaires renvoient à la longueur de la journée de travail et à son imprévisibilité. Il s’agit en grande majorité d’hommes, cadres et professions intermédiaires exerçant des responsabilités hiérarchiques. Ils sont nombreux à

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avoir des horaires quotidiens variables, des dépassements d’horaires fréquents, à être joints par leur entreprise hors de leur lieu de travail, à être soumis à des astreintes, à emmener du travail chez eux. Par ailleurs, en 2006, 38 % des salariés à temps complets des secteurs concurrentiels (hors agricole) ont effectués des heures supplémentaires. Le volume annuel moyen d’heures supplémentaires était de 114h par salarié ayant fait des heures supplémentaires. Les salariés des entreprises de moins de 20 salariés ont compté pour environ 40 % du volume global d’heures supplémentaires dont plus de la moitié sur les 4 secteurs : activité immobilière, construction, services aux particuliers et commerce. Au fil des quatre enquêtes menées par le Ministère de l’Emploi et de la Solidarité entre 1978 et 1998, les salariés font état d’une dégradation de leurs conditions de travail. Alors que les efforts et les risques physiques ne diminuent pas, et que les horaires sont plus diversifiés et moins réguliers, les rythmes de travail deviennent plus exigeants, l’urgence réduit tant la prévisibilité des tâches que les marges de manœuvre pour les exécuter. La charge mentale s’accroît et avec elle la pénibilité du travail. L’enquête sur les conditions de travail réalisée en 2000 par la Fondation de Dublin confirme cette tendance à l’intensification et précise les types de contraintes en les classant en deux grandes catégories, les contraintes industrielles et les contraintes marchandes liées aux impératifs de la demande, pression du client, extension des heures d’ouverture du fait des exigences de consommation accrues. L’étude épidémiologique Samotrace (2009) de l’InVS, fait apparaître que 37 % des femmes et 24 % des hommes interrogés dans l’enquête ont exprimé un « mal-être au travail. Dans le champ de la souffrance mentale, on voit émerger de nouveaux secteurs notamment services publics, banque, finance, énergie – que l’on évoquait traditionnellement peu en matière de santé au travail. Pendant des décennies, la pénibilité et les contraintes physiques du travail ont été « traitées » par l’usage de primes et indemnisations (salissures, intempéries, horaires particuliers,…). Puis les services méthodes ont intégré des améliorations ergonomiques et tenté d’alléger les charges physiques. La qualité de l’emploi et du travail est évoquée pour la première fois en France dans les années 70. L’objectif à l’époque est d’accroître la satisfaction personnelle des salariés et la performance des entreprises. Elle réapparaît dans les années 90 au sommet européen de Lisbonne puis en 2001 au sommet de Laeken. En 2002, la commission européenne vise une « approche globale du bien être au travail ». C’est à la fin de la première décennie qu’on voit se développer dans les entreprises des négociations et des accords sur le thème de la QVT (Qualité de Vie au Travail), mouvement qui vient contrebalancer la montée de la « souffrance au travail ». Si Lucie Davoine et Dominique Méda affirment, en conclusion de leur article « quelle place le travail occupe-t-il dans la vie des Français par rapport aux européens? », que le désir de voir le travail prendre moins de place ne peut en aucun cas être interprété comme le signe d’une aspiration aux loisirs ou d’une inappétence pour celui-là. Il s’agit plutôt de l’expression d’un dysfonctionnement de la sphère du travail assez spécifique à la France (en raison de la dégradation des conditions de travail et du sentiment d’insécurité de l’emploi), ainsi que d’une intention positive de mieux concilier vie professionnelle et vie familiale. ». 2. La conciliation entre vie professionnelle et vie privée reste difficile malgré l’émergence de démarches collectives pour mieux gérer l’articulation des temps L’équilibre entre travail et vie privée est une aspiration forte et largement partagée. Toutes les enquêtes européennes et françaises, mettent en évidence que « la famille » se présente comme un domaine d’investissement affectif et de réalisation de soi extrêmement important. Dans l’enquête de l’EVS, la famille est citée comme très importante par 88 % des Français interrogés en 1999 (contre 66 % pour le travail). L’enquête « Histoire de vie – Construction des identités » met ainsi en évidence que, lorsque l’on demande aux personnes de dire si le travail est plus ou moins important que d’autres« activités » ou « temps de vie », notamment la vie familiale, la vie sociale et la vie personnelle, 66 % des actifs en emploi déclarent que « le travail est assez important mais moins que d’autres choses (vie sociale, vie familiale, vie personnelle…) » et 25 % « très important mais autant que d’autres choses ». 75 % des français souhaiteraient accorder plus de temps à leur famille La conciliation entre ces aspirations est pourtant de plus en plus difficile et de multiples inégalités persistent. Parmi les personnes qui exercent une activité professionnelle, 39 % trouvent que leur travail rend difficile l’organisation de leur vie de famille, 15 % que c’est très difficile et 24 % un peu.

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Avoir des enfants, notamment jeunes, et travailler avec des horaires atypiques accroît ce sentiment de difficulté. Dans l’enquête « histoire de vie –construction des identités », le fait que, les femmes ne semblent pas mentionner plus de difficulté que les hommes est surprenant et s’explique par le fait qu’un certain nombre d’entre elles s’est retiré du marché du travail pour éviter d’être confronté à cette difficile conciliation. 3. Le travail, une valeur (encore) pérenne Le contexte de crise fait bouger la nature des attentes … Il ressort de manière convergente de nombreux travaux que le travail reste important, mais n’est plus la seule dimension importante de la construction identitaire et de l’équilibre existentiel. Cette évolution vers une relativisation de la place du travail par rapport à d’autres domaines de la vie concerne plus particulièrement les jeunes. Les enquêtes sur les valeurs (European Value Surveys, EVS) mesurent depuis bientôt 30 ans le rapport au travail des Européens en étudiant le travail sous un double aspect : les attentes personnelles qu’il peut satisfaire chez l’individu et les normes sociales qui s’y rapportent. Les analyses des données européennes soutenaient jusqu’à l’édition 1999 l’hypothèse d’une dévalorisation du travail, qui tenait plus à un rejet des normes sociales s’y rapportant, plutôt qu’à une diminution de l’importance intrinsèque du travail. Les résultats français de l’enquête valeurs 2008 mettent en évidence deux changements importants : − Un fort ralentissement de la progression des attentes personnelles par rapport à l’emploi qui a pu être observé sur la période 1981-1999. Si le fait de « bien gagner sa vie », d’avoir un travail « intéressant » et de travailler dans « une bonne ambiance » restent le trio gagnant des 4 périodes observées (1981-1990- 1999-2008), la totalité des items proposés sont en net recul en 2008 par rapport à 1999. − Une forte progression (+17 points/1999) de l’idée que le travail est un devoir vis-à-vis de la société associée à une nette progression (+8 points/1999) du soutien à l’idée que le travail doit toujours passer en premier, ce qui renvoie fortement à la notion de devoir. Cette évolution très récente appelle plusieurs questions ou remarques. D’une part, est ce que cette diminution générale des attentes vis-à-vis du travail traduit un désenchantement par rapport au travail aux conditions de réalisation de plus en plus difficiles ? D’autre part, le contexte de crise économique mondial et l’inquiétude croissante sur l’avenir des retraites et l’équilibre des comptes sociaux semblent donner du poids à l’idée du travail comme devoir social. Mais ce sont les jeunes et les personnes les plus qualifiées qui adhèrent le moins aux normes sociales relatives au travail. Pierre Bréchon parle même d’une « quasi rupture générationnelle, comme si à partir d’une certaine époque, au cours des années 80, les générations adultes avaient cessé d’enseigner ces normes aux plus jeunes, ou comme si ce discours avait eu plus de difficulté à être admis par ceux-ci ». La transmission de la valeur travail devient-elle mission impossible ? Aujourd’hui, la transmission de la valeur travail se trouve doublement bousculée : D’une part, du fait des différences (structurelles) entre les générations. En effet, le regard que les jeunes portent sur le monde du travail a été façonné par un monde différent de celui de leurs parents : nés à une époque de prospérité et de croissance économique, ils ont grandi avec les TIC qui sont autant le moyen d’accéder à des informations complexes qu’à créer et développer des réseaux sociaux. Bénéficiant d’une meilleure éducation et plus diplômés, ils ont plus de confiance en eux-mêmes et aussi plus de recul sur le monde du travail : ils savent que leur insertion dans la vie professionnelle va être longue et difficile (notamment pour les moins qualifiés). Leur vision de l’entreprise est celle d’une organisation ouverte, un modèle promu à l’école, dans les médias, au niveau politique et leur ancrage professionnel se construit sur leurs compétences et non plus, comme pour la génération de leurs parents dans des métiers (relativement) stables qui étaient souvent appris sur le tas. Certaines différences mettent en évidence que le sens de la transmission cesse d’être unidirectionnel, voir qu’elle repose sur une « relation pédagogique inversée » (Gilles Achache). Ainsi, ce sont bien souvent les parents qui sollicitent leurs enfants pour des problèmes liés à l’informatique et qui se trouvent démunis face à l’évolution rapide des métiers ne leur permettant pas de faire bénéficier la génération de leurs enfants, de leur expérience professionnelle. D’autre part, confrontés aux transformations du travail et devant la suprématie de la logique économique, les parents s’interrogent sur le sens de ces évolutions et sur la nature du travail que connaîtront leurs enfants. Ils en

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arrivent à faire davantage confiance aux capacités de leurs enfants à améliorer le monde de demain qu’à leurs propres capacités ou à celles de l’école à préparer leurs enfants pour ce monde incertain. Ce trouble pédagogique les conduit à privilégier des métiers à forte valeur ajoutée intellectuelle et des métiers à diplômes pour leurs enfants. Une préférence qui révèle une nette contradiction entre les valeurs dont ils estiment qu’elles ont le plus d’importance dans le monde du travail (des valeurs intellectuelles) et celles qu’ils estiment importantes de transmettre à leurs enfants, qui sont plutôt des valeurs affectives (respect, partage, courage,…) ». La question du pouvoir de négociation est un élément important dans le sentiment d’appartenance. Elle concerne non seulement les syndicats, mais également les associations de consommateurs, les associations de protection de l’environnement, etc… - soit la société est de plus en plus individualisée : la négociation avec le supérieur hiérarchique, avec le client se réalise alors davantage au cas par cas, de manière bilatérale, et en fonction du contexte et des opportunités. Ceci correspond à la tendance actuelle, facteur de désintégration du lien social à terme ; - soit on assiste à une reconquête de la capacité de négociation collective et à un renforcement de la démocratie sociale »

4. Hypothèses d’évolution

Hypothèse 1 – Une société du travail individualiste et à deux vitesses Rhône-Alpes évolue au sein d’une société de plus en plus individualiste, et duale, avec d’un côté des salariés du high - tech, des emplois métropolitains supérieurs, qui ne connaissent pas de périodes d’inactivité sauf si elles sont choisies et de l’autre une main d’œuvre moins qualifiée, notamment concentrée dans les services à la personne ou le tourisme, dont les parcours sont marquées par des périodes d’inactivité plus ou moins longues. La main d’œuvre intermédiaire se raréfie pénalisant notamment les activités industrielles. Une partie de la population demeure durablement exclue de l’emploi tandis que d’autres travaillent. La culture du travail disparaît pour une partie de la population. Le pouvoir de négociation devient quasi inexistant, les déséquilibres entre les différentes classes sociales étant de plus en plus importants. On assiste en Rhône-Alpes à une segmentation du territoire, avec une forte spécialisation des espaces, entre secteurs résidentiels (tendance aux résidences fermées telles qu’aux États-Unis actuellement), et zones d’activité. Certains territoires sont majoritairement dominés par des emplois saisonniers. La tendance duelle et individualiste y est exacerbée compte tenu de la difficulté à s’inscrire dans des parcours et environnements de travail stables. L’implication dans le travail connaît un recul important au détriment de la qualité. Deux sous-hypothèses peuvent être envisagées : - une société duelle et individualiste libérale, où chacun est aux commandes de son parcours professionnel - une société duelle et individualiste munie d’un système de protection qui a été renforcé : la sécurisation des parcours y est alors davantage régulée.

Hypothèse 2 - Vers la fin du modèle salarial, l’emploi non salarié se développe choisi et/ou subi. L’organisation du travail n’est plus basée sur une production de masse en grande quantité, mais plutôt sur la fabrication en série limitée. Une sorte « d’artisanat de masse » axé sur la personnalisation des biens et des services. Pour accompagner ce changement, l’organisation du travail est de plus en plus flexible, les entreprises se recentrent sur leur cœur de métier et ont tendance à plus externaliser certaines fonctions périphériques. La relation salariale diminue donc et les employeurs font plus appel à des sous-traitants, des freelances, de l’intérim ou des CDD en fonction des projets et des fluctuations de la demande. Beaucoup de jeunes qui arrivent sur le marché du travail créent leur propre emploi, tout comme les séniors qui en sont sortis. La protection sociale accompagne cette mutation pour encourager le travail indépendant et la multi- activité. Plusieurs statuts cohabitent : salarié avec une petite activité commerciale complémentaire ou indépendante, ou auto-entrepreneur et pas forcément après avoir cumulé une expérience professionnelle.

Hypothèse 3 – La disparition du Code du travail Les relations sociales ont changé avec un Code de Travail qui a disparu, les relations salariés  employeur ne sont plus que contractuelles, aidées en cela par 3 outils fondamentaux dans le pilotage social :

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- L’identification des thèmes du dialogue social et leur importance respective pour les deux parties, - Une gestion dynamique des événements par l’exploitation régulière des informations, permettant de prendre la température et d’adapter la stratégie sociale, - La mise en place d’un baromètre de satisfaction permettant de mesurer les résultats des actions ainsi que le taux d’adhésion des salariés. La formation permanente de l’encadrement de proximité à la gestion des relations permet de connaitre et d’alimenter les outils du pilotage social et d’être suffisamment outillé et autorisé pour prendre en charge directement certains aspects du dialogue social « librement contractualisés).

Hypothèse 4 – La place centrale du travail et une nouvelle sécurité sociale professionnelle… « Une utopie bien réelle » Les constats sur les années passées sont sans appel et bien réels : société dualiste, individualiste, éclatement, émiettement des droits, mises en concurrence conduisent aujourd'hui à un affaiblissement, à des limites des garanties collectives actuelles. L'édifice du pacte social visant à corriger les inégalités d'intérêts liés à la subordination a trouvé ses limites. les protections antérieures n’ont plus suffi pour répondre à la précarité grandissante, à la mobilité, à l'instabilité de l'emploi, à l'extension de toutes les formes de flexibilité, aux nouvelles formes d'aliénation des salariés. Le mal travail est ressenti majoritairement, le travail n'est plus vécu, ni considéré comme émancipateur, il est dévalorisé, en perte de sens. Certains, en Europe particulièrement, ont vu un avenir dans un nouveau modèle de flexisécurité, alors qu’ils n’ont fait qu’échanger qu'un peu de sécurité pour beaucoup de flexibilité ? Les différents projets avancés dans ce concept ont montré que cela se résumait à un meilleur accompagnement du chômage mais sans garantie au bout de pouvoir disposer d'un travail, d'un emploi, ni de pouvoir en vivre décemment. La véritable sécurité n’étant en fait qu’au service des entreprises pour flexibiliser les droits et faire disparaitre tous types de protections, renforçant de fait la subordination. Or Le besoin des individus, d'être reconnus, considérés dans leur valeur sociale, répond à une transformation sociale, sociétale, où démocratie fera bon ménage avec émancipation, où intérêt général va pouvoir primer sur intérêt particulier. C'est pourquoi, la visée première a été de conquérir un ensemble de droits (à l'emploi, à une carrière, à la formation continue, à une sécurité sociale professionnelle, à la vie privée, à la santé, à la retraite, à la démocratie sociale), attachés à la personne, garantis collectivement, progressifs, cumulables, transférables et opposables tout au long de la vie. Cette continuité de droits s'entend avec des garanties interprofessionnelles pour tous. Dans cette nouvelle vision globale d'un nouveau statut du travail salarié, ont été repensés, périodes d'étude, de travail, de changement de travail, de formation pendant le travail et pour changement de travail, jusqu'à la cessation d'activité, pensé comme un contrat général d'évolution de carrière ou contrat de vie professionnelle ! Le volet sécurité sociale professionnelle mis en place s'entend comme dépassement de la vision exclusivement réparatrice de l'indemnisation chômage, en ce qu’il enclenche une nouvelle dynamique : pas de rupture, transitions assurées, maintien des garanties individuelles (opposabilité / transférabilité). Les risques ne sont donc plus supportés par les salariés mais renvoient à la responsabilité sociale de l'entreprise et appellent des politiques publiques en matière d'emploi, de droits sociaux guidés par l'intérêt général au détriment des seuls intérêts égoïstes des actionnaires.

Hypothèse 5 - Les salariés actionnaires, développement des SCOP : La crise économique d’une part, la mondialisation d’autre part ont détruit de nombreux d’emplois. Dans les années 80, Ronald Reagan et Margaret Thatcher imposent la libéralisation des marchés. Dans la même période, la France imagine une économie sans usine, une économie fondée sur les services. Face à la destruction massive d’emplois liée notamment à une forme d’abandon de l’industrie, Pôle emploi ne parvient plus à remplir une de ses missions consistant à permettre un retour rapide vers l’emploi. Cette situation conduit les salariés menacés par la fermeture de leur entreprise à s’organiser pour pérenniser leur emploi. Comme les investisseurs boudent la France en raison de retours sur investissement insuffisants, les salariés s’organisent et présentent des plans de reprises pertinents. Le modèle de SCOP se généralise. Les salariés, actionnaires et gestionnaires restent néanmoins sous statut. Ils sont plus impliqués, ils acceptent les contraintes de flexibilité liées au carnet de commande. Leur rémunération n’est pas forcement plus forte, cependant leur entreprise reste plus compétitive avec des outils de production moderne et à la pointe. La

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démarche des salariés actionnaires est aux antipodes de celles des fonds de pensions. Cohabitent ainsi deux types d’acteurs : les entreprises privées, et les entreprises coopératives. Des règlements permettent aux coopératives de bénéficier d’avantages dans les appels d’offre publics ou dans certains marchés. Sous l’effet de la crise ces coopératives se développent et représentent 40 % de l’activité. Certaines coopératives se sont développées et comprennent des milliers de salariés qui même s’ils sont actionnaires se sentent dévalorisés par rapport aux actionnaires gérants. Des syndicats investissent ces grandes coopératives pour faire mieux reconnaître les droits des salariés actionnaires de base.

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Bibliographie

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VARIABLES FONCTIONNEMENT DE L’USINE

Variable n°19 – Robotique, automatisme, nouvelles technologies, numérique

Variable n°20 – Eco efficience, recyclage, économie matières premières

Variable n°21 – Procédés innovants

Variable n°22 – Polyvalence, flexibilité

Variable n°23 – Vie sociale

Bibliographie

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Variable n°19 Robotique, automatisme, nouvelles technologies, numérique

1. Définition L’usine du futur sera impactée dans son fonctionnement par les technologies qui seront mobilisées. Les effets disruptifs des innovations majeures se conjugueront pour remodeler les fondamentaux de l’économie en général, et des activités industrielles en particulier. Elles risquent notamment de modifier les termes de l’équation industrielle en altérant la pondération relative des quatre facteurs de production de l’industrie – le travail, le capital, les ressources naturelles (matières premières, eau, énergie) et l’information. La robotique industrielle est officiellement définie par l'ISO comme un contrôle automatique, programmable dans trois ou plusieurs axes, reprogrammable, polyvalent et manipulateur. L’automatisation trouve ses origines dans la construction d’automates, dont les premiers modèles remontent à l’Antiquité. Héron d’Alexandrie met au point au 1er siècle apr. J.-C. de nombreux systèmes automatiques utilisant les ressources de l’énergie hydraulique. Les progrès amenés par la mécanique viendront contribuer au développement de la construction d’automates. En 1623, le scientifique allemand Wilhelm SCHICKARD invente la première machine à calculer, qui sera suivie de celle élaborée par Blaise Pascal dix-neuf ans plus tard. En 1745, Jacques de VAUCANSON conçoit le premier métier à tisser entièrement automatique, prototype dont s’inspire le mécanicien français Joseph-Marie JACQUARD pour fabriquer, en 1793, un métier à tisser dont les séquences d’opérations à effectuer sont inscrites sur des cartes perforées : l’automatisation appliquée à l’industrie est née. Elle s’épanouira et se généralisera à l’ensemble des activités industrielles dans la première moitié du XXe siècle, en association avec l’instauration de nouvelles méthodes d’organisation scientifique du travail, inspirées des travaux de Taylor. Depuis lors, elle ne cessera de se perfectionner grâce à l’utilisation des techniques issues de l’électronique, de la robotique et de l’informatique. Dès la fin du XVIIIe siècle, la division du travail, c’est-à-dire le découpage d’un processus de production en plusieurs étapes successives, avait déjà contribué à un accroissement de la productivité du travail. La révolution industrielle va accélérer ce processus. L’identification de tâches élémentaires qui composent tout cycle de production va permettre de construire des machines reproduisant les mouvements humains, ouvrant la voie à la constitution de chaînes de montage et d’assemblage. Dans les années vingt, ces méthodes seront largement appliquées dans l’industrie automobile, notamment dans les usines Ford aux États-Unis, qui mettent en pratique les enseignements issus du taylorisme. Ce que l’on dénommera l’organisation scientifique du travail, qui sera appliquée par l’ensemble des constructeurs automobiles avant d’être généralisée à l’ensemble de l’industrie, a permis à Ford de réduire considérablement le nombre d’heures de travail nécessaires à la fabrication de ses véhicules. L’utilisation de robots industriels ne représente qu’une partie, la plus visible sans doute, d’un phénomène de plus grande envergure qui concerne à la fois l’évolution de l’organisation du travail et celle des techniques de production.

2. Indicateurs - nombre de robots - processus d’automatisation.

3. Rétrospective La première révolution industrielle repose sur le charbon, la métallurgie, le textile et la machine à vapeur. Elle ème ème démarre en Grande-Bretagne à la fin du 18 siècle, puis se propage en France au début du 19 siècle avant de s’étendre en Allemagne, aux États-Unis, au Japon et à la Russie. ème La deuxième, démarrée à la fin du 18 siècle, trouve ses fondements dans l’électricité, la mécanique, le pétrole et la chimie. On peut ajouter l’apparition de moyens de communication (télégraphe et téléphone) et le succès du transport collectif grâce au développement des chemins de fer ou des bateaux à vapeur. Les moyens de communication et de transport favorisent les échanges internationaux.

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ème Une troisième révolution se produit au milieu du 20 siècle, dont la dynamique vient de l’électronique, des télécommunications, de l’informatique, de l’audiovisuel et du nucléaire. Ils rendent possibles la production de matériels miniaturisés, de robots et l'automatisation poussée de la production, le développement des technologies spatiales et celui des biotechnologies. Partie des États-Unis, puis du Japon et de l'Union ème européenne, la troisième révolution industrielle a vu naître également Internet, au crépuscule du 20 siècle. Le véritable démarrage de l’électronique miniature date de l’arrivée du transistor (et des circuits intégrés). Il est sorti des Bell Labs en 1948. Il est à l’origine du microprocesseur, pièce maîtresse de tous les produits électroniques dits intelligents, notamment les ordinateurs (Eniac, premier ordinateur tout électronique inventé en 1946 par Presper Eckert et John William MAUCHLY ; premier micro-ordinateur inventé en 1972 par le Français Henri LILEN de société R2E, société créée par André Truong, lui aussi français). Les télécommunications, de leur côté, firent de grands bonds avec l’autocommutation, le passage de la commutation de circuits à la commutation de paquets (à l’origine de Télétel et Internet) et de la mobilité. L’informatique en général et la commutation de paquets en particulier n’existerait pas sans l’invention du datagramme – bloc de données élémentaires – par le Français Louis POUZIN. Deux produits ont particulièrement impacté la production industrielle : l’automate et le robot. Inventé en 1968 par l’Américain Richard MORLEY, l’automate programmable industriel (API), destiné au contrôle-commande d’une machine ou d’un processus, s’est imposé dans toutes les industries, puis au fil du temps aux transports, à la gestion technique des bâtiments, etc. Le robot industriel, sorti de l’imagination de Georges DEVOL et le visionnaire Joseph ENGELBERGER, fut d’abord destiné aux opérations de manutention, puis aux tâches de production : soudage, assemblage, etc. Unimate, le premier robot industriel fut installé en 1959 dans l’usine de General Motors de Trenton, dans le New Jersey. La miniaturisation des instruments de mesure et de production, associée à l’informatique (et parfois au nucléaire) ont permis le développement des biotechnologies. De leur côté, les sciences du vivant ont également beaucoup progressé. En termes d’organisation, signalons le Toyota Product System (TPS) qui a vu le jour au lendemain de la Seconde guerre mondiale, au Japon. C’est la recherche de la performance (productivité, qualité, délais, coûts) par l'amélioration continue et l'élimination des gaspillages. Cette méthode a fait des petits : Lean Manufacturing, Lean Management... e La 4 révolution industrielle La dernière révolution industrielle est en train de prendre forme sous nos yeux, à l’aube de ce XXIe siècle. Elle sera mûre au plus tôt vers 2020. Toutes les briques technologiques sur lesquelles elle est bâtie sont là. On peut la résumer par la numérisation poussée à l’extrême des échanges économiques et productifs. L’Industrie 4.0 suppose une intégration horizontale. On réalise tout de A à Z en interaction entre les produits et les machines, et les machines entre elles. Nous sommes dans un système global inter-connecté. Le produit fini, qui sera personnalisé, pourra aussi communiquer avec les machines dans sa phase de réalisation. On parle alors de « Smart Product ». Selon le rapport de MacKinsey, 12 ruptures technologiques vont transformer l’industrie à horizon 2025. Pour évaluer les technologies à l’aune de leurs effets sur l’économie et la société d’ici 2025, le McKinsey Global Institute a considéré quatre critères : la célérité avec laquelle évoluent ces technologies ; leur portée – par exemple le nombre de citoyens ou de consommateurs touchés – ; la valeur économique créée ou déplacée dans la chaîne de valeur ; leur caractère disruptif, défini comme leur capacité à transformer des pans entiers d’activité économique y compris au-delà de leur champ d’application originel. Au total, la valeur créée et/ou déplacée par les douze technologies retenues serait comprise entre 14 000 et 34 000 milliards de dollars (entre 11 000 et 26 000 milliards d’euros) par an en 2025, dont une partie captée par les consommateurs sous forme de « surplus du consommateur », et l’autre convertie en surcroît de chiffre d’affaires par les entreprises. Nous décrirons ces technologies sous l’angle de leurs possibles répercussions potentielles sur l’industrie, par ordre décroissance de potentiel économique. a. L'Internet mobile. Début 2013, plus de 1,1 milliard de personnes utilisaient déjà un « smartphone » ou une tablette pour accéder à Internet. La vitesse fulgurante d’adoption de cette technologie et les nouvelles applications qui émergent désormais rapidement (« lunettes connectées », « bracelets connectés », etc.) démontrent que l’Internet mobile dépasse, et de beaucoup, la simple transposition en mode nomade de la navigation et du commerce sur le Web fixe. Les implications de cette technologie sur l’industrie seront

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nombreuses, à commencer par l’addition de 2 à 3 milliards d’internautes, aujourd’hui exclus de la sphère numérique faute d’accès aux réseaux câblés. De nombreuses régions du monde se verront offrir la possibilité d’un saut technologique (« leapfrogging ») en installant directement des réseaux de télécommunication de nouvelle génération, moins onéreux et contraignants à déployer. La croissance des marchés d’équipements, logiciels et applications liés à l’Internet mobile, s’annonce également considérable. Mais l’Internet mobile porte en terme des gains de productivité dans l’ensemble des secteurs de l’industrie, bien au-delà des technologies de l’information et de la communication. La plupart des maillons de la chaîne de valeur industrielle pourraient rapidement être concernés : design, conception, simulation, programmation des chaînes de montage robotisées, organisation des sites de production, assemblage, maintenance (ainsi Boeing et BMW ont-ils, par exemple, développé des lunettes connectées pour les personnels de leurs chaînes d’assemblage et de maintenance qui affichent en « réalité augmentée » des schémas et instructions de montage). b. L’automatisation des métiers du savoir. Sous l’effet du doublement tous les dix-huit mois de la puissance de calcul à coûts constants, des progrès des algorithmes d’apprentissage automatique, de l’exploitation des données informatiques volumineuses (le « big data ») et d’avancées spectaculaires dans le domaine des interfaces utilisateurs, il devient envisageable d'automatiser certaines tâches des « travailleurs du savoir » que l'on pensait jusqu'ici hors de portée des ordinateurs. Si la médecine, l’éducation, la finance, le droit ou la gestion sont concernés au premier chef, diverses fonctions industrielles ne manqueront pas d’être touchées. Ainsi, 15 millions de postes (équivalents temps plein) de scientifiques et d’ingénieurs pourraient être suppléés par des dispositifs d’intelligence artificielle à horizon 2025, tandis que la valeur ajoutée par tête de ce type de poste progresserait en moyenne de 60 000 dollars (47 000 €) du fait d’une productivité accrue. Les algorithmes d’apprentissage automatique de type probabiliste, tels que les réseaux neuronaux artificiels, sont particulièrement efficaces pour détecter des liens de corrélation, puis de causalité, dans de grandes séries statistiques. Ils trouvent dès lors des applications évidentes dans tous les secteurs industriels intensifs en recherche et développement, et notamment l’industrie pharmaceutique. (Récemment, une équipe de chercheurs financée par le laboratoire Merck a ainsi développé un programme informatique capable de définir lui-même les critères lui permettant d’identifier, parmi une bibliothèque de milliers de molécules, celles qui seraient les plus efficaces contre une pathologie donnée. L’industrie du logiciel, elle aussi, utilise d’ores et déjà ce type d’outils pour automatiser les phases de test et d’optimisation des programmes, ainsi que la gestion de projet liée au développement. Enfin, parallèlement à l’automatisation des tâches relevant de « métiers » industriels, l’industrie pourra également abaisser ses coûts de structure et d’administration grâce à l’automatisation partielle de diverses fonctions support). c. L'Internet des objets. La connexion à Internet de capteurs implantés dans les objets du quotidien, les machines, les containers, les infrastructures et tout type d’actifs physiques, offre un énorme gisement de valeur économique et sociétale, évalué entre 2 700 et 6 200 milliards de dollars par an (2 100 à 4 800 milliards d’euros) d’ici 2025, dont le tiers environ dans l’industrie. Entre 2,5 et 5 % de gains pourraient être réalisés sur les coûts de production des activités manufacturières, en particulier grâce à l’optimisation de la maintenance et de la productivité des ressources. Concrètement, des puces RFID doublées de GPS, de capteurs de température, humidité, accéléromètres, dynamomètres, etc. pourront être implantés dans la plupart des maillons des chaînes de production et d’approvisionnement, permettant d’améliorer la gestion des flux et de réduire la variabilité. Ce type de dispositif a permis, en l’espace de deux ans, à l’entreprise John Deere de réduire de 900 millions de dollars (700 millions d’euros) les coûts liés à la gestion de ses stocks. Les industries de process dont la rentabilité dépend de la capacité à réaliser des économies d’échelle seront vraisemblablement en première ligne pour adopter ces innovations. Mais à terme, entre 80 % et 100 % des activités industrielles seront concernées, tant le coût d’adoption de ces technologies devrait baisser d’ici 2025. Mais l’Internet des objets jouera également un rôle crucial en amont et en aval de la production : General Electric a équipé ses turbines à gaz d’une vingtaine de capteurs générant chacun 500 gigabits d’information par jour, qui lui permettent tout à la fois d’améliorer la conception des futures turbines avec pour objectif d’en réduire la consommation de l’ordre de plusieurs pourcents, et de déclencher à distance des opérations de maintenance prédictive pour en étendre la durée de vie. (Au-delà de ses usages transversaux, l’Internet des objets débouchera aussi sur des applications propres à certains secteurs industriels : extraction plus efficace dans les industries métallurgiques et minières, véhicules plus sûrs dans l’automobile, réseaux « intelligents » de distribution et optimisation de la consommation d’énergie, etc.).

L'Usine du futur_2ème partie : Les fiches variables • CESER Rhône-Alpes • 7 Juillet 2015 135

d. Le cloud computing. Le cloud computing représente un changement complet de paradigme pour l’informatique professionnelle et personnelle. Alors qu’auparavant, chaque ordinateur était limité par la puissance de calcul de son processeur et la capacité de stockage de sa mémoire, les aptitudes des systèmes informatiques reposent désormais sur l’accès à la demande, via des réseaux de télécommunication, à des ressources partagées et aisément configurables. L’utilisateur final consomme des services via Internet, sans avoir à s’inquiéter de considérations techniques. Dans le même temps, le fait de mutualiser les équipements permet des gains d’efficacité considérables : « louer » un serveur informatique dans le cloud est trois fois moins onéreux que d’acquérir un équipement comparable et d’en assurer la maintenance. Les économies réalisables seraient ainsi de 20 à 30 % sur les coûts d’équipements, et de 10 à 15 % sur les coûts de développement des applications, notamment grâce à une standardisation accrue de leur environnement d’exécution. Au niveau mondial, ces gains représentent un potentiel économique de 500 à 700 milliards de dollars par an (400 à 550 milliards d’euros). Partant, les perspectives de diffusion du cloud computing apparaissent fulgurantes : selon Cisco, le trafic de données liées au cloud serait multiplié par six au cours des cinq prochaines années. (Pour les entreprises industrielles, notamment les plus intensives en capital intellectuel, le cloud computing occasionnera de nombreuses transformations : la productivité de leurs équipements informatiques s’en trouvera améliorée (en moyenne, on estime que les calculateurs utilisés dans l’industrie sont utilisés au maximum de leurs capacités entre 30 et 40 jours par an seulement), le capital financier aujourd’hui immobilisé dans les systèmes d’information pourra être réduit, tandis que la flexibilité et la fiabilité seront accrus. La totalité des fonctions qui exigent une informatique véloce et réactive bénéficieront de ces avantages. Mais le cloud computing exercera certainement aussi un effet de démocratisation des avantages concurrentiels liés à l’IT, en rendant accessibles à des PME des applications et services auparavant réservés aux grandes entreprises du fait de tickets d’entrée élevés. Enfin, il permettra une intégration plus poussée des fournisseurs, notamment pour la conception des produits, ou encore pour la planification de la chaîne d’approvisionnement.) e. La robotique de pointe. En soi, la robotique ne constitue pas une grande nouveauté pour l’industrie, les premiers exemplaires de robots industriels datant du début des années 60 et Renault ayant adopté les premiers en France dès 1976. Pourtant, elle est sur le point de réaliser un "saut quantique" sous l’effet de plusieurs facteurs : d’abord, les progrès substantiels de l’intelligence artificielle, des capteurs et des matériaux, qui permettent désormais aux robots d’effectuer des tâches complexes, jusqu’ici réservées aux humains ; ensuite, leur aptitude récemment acquise à collaborer avec ces derniers ; enfin, une baisse régulière des coûts associée à la possibilité de reprogrammer beaucoup plus commodément les robots. En conséquence, un véritable "boom" de la robotique est attendu dans les années à venir, aussi bien dans les activités de production que dans les services industriels : le nombre « d’équivalents temps plein » qui pourraient être remplis par des robots à horizon 2025 est évalué entre 30 et 60 millions au niveau mondial. Un exemple issu de l’industrie agroalimentaire illustre le degré de sophistication désormais atteint par les robots : l’entreprise espagnole El Dulze a confié à 68 robots le rôle de sélectionner des laitues propres à la consommation, d’en dégager les têtes et de les empaqueter avec délicatesse. Il y a peu, seuls des yeux et des doigts humains étaient aptes à ce travail ; aujourd’hui les robots s’en acquittent avec un niveau de qualité quatre fois supérieur (de tels robots coûtent à l’heure actuelle entre 100 000 et 150 000 dollars (entre 80 000 et 120 000 euros), mais leur prix baisse de 10 % par an depuis plusieurs décennies et cette tendance régulière devrait se poursuivre, voire s’accélérer, dans les dix ans à venir). Signe révélateur de cette « révolution » robotique en marche, les ventes de robots industriels, qui progressaient en moyenne de 6 à 7 % par an depuis 1995, se sont envolées jusqu’à atteindre 166 000 exemplaires en 2011, en hausse de plus de 40 % par rapport à 2010. La Chine en est désormais le principal consommateur au niveau mondial. Dans les pays émergents en effet, c’est l’équivalent de 15 à 25 % des postes dans l’industrie qui pourraient être partiellement ou totalement robotisés d’ici 2025. Cette proportion est moindre dans les pays matures, mais s’élève tout de même entre 5 et 15 %. Outre ses répercussions sur l’emploi industriel et la réduction de la masse salariale, l’essor de la robotique de pointe permettra une meilleure réactivité face aux consommateurs, requerra des volumes de capitaux importants (entre 900 et 1 200 milliards de dollars au niveau mondial d’ici 2025, soit 700 à 930 milliards d’euros) et entraînera vraisemblablement une relocalisation des activités de production à proximité des bassins de consommation, au détriment des régions à faibles coûts salariaux.

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f. Les véhicules autonomes ou semi-autonomes. Longtemps cantonnés à la science-fiction, les véhicules autonomes, ou partiellement autonomes, sont une technologie maintenant à portée de main. Dans l’aviation et le transport maritime, les pilotes automatiques exercent depuis plusieurs décennies déjà un rôle d’assistance crucial, y compris dans les phases délicates telles que le décollage ou l’atterrissage. Avec les progrès récents de la télémétrie, de la vision, de l’interprétation et des processus de prise de décision artificiels, l’automatisation des transports terrestres ne dépend plus que de la vitesse à laquelle elle sera acceptée par le législateur et les consommateurs. En 2012, une Toyota Prius équipée par la société Google a parcouru plus de 480 000 kilomètres en n’essuyant qu’un seul accident, occasionné d’ailleurs par une erreur humaine ; le Nevada et la Californie ont depuis lors délivré l’agrément autorisant ce véhicule à emprunter le réseau routier sous certaines conditions. En France, les principaux acteurs de la filière automobile se sont associés au sein du programme VeDeCoM et testent leurs prototypes sur le circuit de Satory. En 2025, on pourrait ainsi voir circuler entre 120 et 240 millions de véhicules autonomes dans au moins 50 % des conditions de trafic. Au-delà de l’industrie automobile elle-même, qui connaîtra là sans doute l’une de ses principales mutations depuis son apparition, les enjeux sont considérables pour de nombreux secteurs d’activité, ainsi que plus largement, au plan sociétal. Un Européen moyen passe en effet 300 heures par an au volant, un Américain plus du double ; ce temps pourrait être réalloué au travail ou aux loisirs. Les accidents de la route, qui provoquent un million de morts par an dans le monde et dont 70 à 90 % résultent d’erreurs humaines, deviendraient largement évitables. De 15 à 20 % d’économies de carburant seraient réalisables, grâce à une conduite moins saccadée et à la possibilité d’organiser des « caravanes » de véhicules bénéficiant d’une aérodynamique optimisée. La logistique et les industries d’extraction pourraient également bénéficier de cette technologie : à l’heure actuelle, le géant de l’industrie minière Rio Tinto teste ainsi 150 engins de chargement partiellement autonomes sur l’un de ses sites australiens. Enfin, de nouveaux modèles économiques ne manqueront pas d’émerger, délibérément créés – tels par exemple des services d’abonnement pour accéder à une flotte de véhicules urbains sans conducteurs – ou résultant d’évolutions subies – comme dans le transport routier, où le métier de chauffeur de camion sera amené à s’orienter davantage vers la desserte et le service de proximité, délaissant la conduite sur de grandes distances. g. Le génie génétique de nouvelle génération. Tout comme la robotique, le génie génétique n’est pas à proprement parler une technologie nouvelle, mais son développement est sur le point de connaître une spectaculaire accélération grâce à la baisse continue des coûts de séquençage de l’ADN et à l’apport déterminant du « big data » pour son interprétation. Alors que le Human Genom Project, qui avait permis pour la première fois en avril 2003 de séquencer intégralement l’ADN du génome humain, avait mobilisé des équipes de scientifiques du monde entier et nécessité un budget de 3 milliards de dollars (2,3 milliards d’euros), il est aujourd’hui possible de réaliser cette tâche en quelques heures à peine, pour un coût de moins de 5 000 dollars (4 000 euros). Là où les biologistes procédaient auparavant par hypothèse, test et réfutation, il devient possible de mettre en oeuvre des démarches statistiques reposant sur l’analyse de données volumineuses (big data). Ces évolutions permettront de mieux comprendre les liens entre génotype, phénotype (caractères et comportements observables chez un individu) et environnement. Il en résultera de fait un bond en avant majeur pour le génie génétique, tandis que la « biologie synthétique » peut devenir une réalité, permettant de « coder » des organismes nouveaux comme on code un programme informatique. Les principales applications du génie génétique de nouvelle génération concerneront bien évidemment la santé humaine, et notamment l’industrie pharmaceutique. Des traitements mieux ciblés et plus efficaces contre les principales pathologies graves pourraient voir le jour : cancers, maladies cardio-vasculaires, diabètes, etc. ; le séquençage individuel permettrait une prévention plus performante. Outre de nouveaux produits, de nouveaux équilibres économiques sont susceptibles d’apparaître dans l’industrie pharmaceutique : le « ticket d’entrée » pourrait voir son montant sensiblement réduit, mais l’accès à l’information (y compris les données issues des systèmes de santé nationaux) deviendrait plus stratégique. Le caractère plus ou moins contraignant des réglementations encadrant la recherche sera un paramètre important pour la localisation des laboratoires, qui doivent aussi s’attendre à subir la concurrence d’acteurs opérant dans des « zones grises ». L’agriculture constitue le second champ d’application tout désigné du génie génétique de nouvelle génération, et notamment les biocarburants. Les coûts de production du bioéthanol pourraient baisser de 15 à 20 % tandis que ceux du biogazole rejoindraient ceux des carburants pétroliers à horizon 2025 – devenant dès lors plus compétitifs puisqu’ils seraient probablement encouragés

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par la législation. Pour de grandes puissances agricoles dépourvues de ressources pétrolières comme la France, il pourrait s’agir d’une immense opportunité. h. Le stockage d'énergie. Une large palette de technologies parvenues à maturité permet d’ores et déjà de stocker efficacement l’électricité ; le développement des énergies renouvelables, qui requiert une plus grande flexibilité des réseaux, et la forte croissance de la demande d’électricité dans des régions émergentes, vont favoriser leur adoption. Les systèmes de pompage-turbinage, qui convertissent l’électricité en énergie potentielle de pesanteur dans les barrages, peuvent déjà stocker 3 à 4 % de la production mondiale d’électricité. Les batteries, en particulier les modèles Lithium-ion et Lithium-polymères connaissent des progrès rapides : leur prix pourrait passer de 500-600 dollars par kilowatt-heure aujourd’hui à 160 dollars par kilowatt-heure en 2025 (soit d’environ 400 à environ 125 euros par kWh), et leur capacité pourrait doubler à poids. i. L’impression en 3D. Longtemps qualifiée de « gadget » par ses contempteurs, l’impression en trois dimensions se limitait jusqu’à récemment à un usage ludique ou à la réalisation de maquettes et prototypes. L’impression 3D est ainsi utilisée depuis déjà plus d’une décennie pour produire des prototypes permettant, par exemple, de constater de visu le design d’un objet, ou encore de tester et d’optimiser à moindre frais et plus rapidement l’aérodynamisme d’une pièce de Formule 1. Mais si elle ne permet pas encore de produire des objets complexes comme un téléphone portable ou une automobile, cette technologie est désormais entrée de plain-pied dans le champ de la production industrielle, sous le vocable de « fabrication additive ». Dans le domaine médical, des prothèses auditives et dentaires sont fabriquées sur mesure par impression en 3D. Celle-ci est aussi utilisée pour fabriquer des équipements sur mesure pour sportifs de haut niveau : lors des Jeux Olympiques de Londres, en 2012, l’équipe japonaise de fleuret masculin s’est ainsi adjugé la médaille d’argent avec des armes comportant des poignées fabriquées sur-mesure, par impression en 3D, par les chercheurs de l’Université de Tsukuba. Dans l’aéronautique, Airbus utilise d’ores et déjà l’impression 3D pour produire des composants qui entrent dans la fabrication de plateformes d’aéronefs. De même, l’avion de combat multirôle américain F-18 de McDonnell-Douglas vole aujourd’hui avec plus de 90 pièces fabriquées par impression 3D. Cette technologie présente plusieurs avantages décisifs : elle permet de construire d’un bloc des pièces qui devaient auparavant être assemblées avec des rivets, d’où un précieux gain de temps et de poids, et elle permet de réduire la consommation de matières premières souvent coûteuses. Ainsi, les pièces en titane peuvent désormais être fabriquées à partir d’une poudre dont la totalité est utilisée, au lieu d’utiliser des billes de titane dont une grande partie - jusqu’à 90 % - est perdue lors de la taille. Enfin, dans le secteur B2C, nombre de start-ups proposent désormais de réaliser des objets entièrement personnalisés, tels que des coques de protection de smartphones par exemple. En fonction de l’usage souhaité du produit, diverses technologies parvenues à maturité sont possibles : frittage sélectif par laser, fusion sélective par laser, modélisation par dépôt de filament fondu, stéréolithographie, stratification, micro- extrusion pour l’impression « à jet d’encre » de tissus biologiques. Le marché des biens de consommation devrait constituer le premier débouché pour l’impression 3D, dont le potentiel économique pour ce seul secteur est évalué entre 100 et 300 milliards de dollars (80 et 240 milliards d’euros) par an d’ici 2025. La démultiplication des possibilités de personnalisation correspondrait à la demande des consommateurs pour les jouets, vêtements, chaussures et accessoires, l’ameublement et la décoration. Dans l’industrie manufacturière, tous les objets complexes, produits en faible volume et nécessitant un haut degré de personnalisation, seront des candidats naturels pour ce nouveau mode de production : prothèses et implants médicaux, composants mécaniques. Ils pourraient représenter un marché de 770 milliards de dollars par an en 2025 (600 milliards d’euros). Par ailleurs, si le moulage par injection restera le mode de production privilégié pour les grandes séries, la création des moules elle-même entrera dans le champ d’application de l’impression 3D, permettant de raccourcir les temps de production et de gagner en qualité, par exemple en formant des circuits de refroidissement directement intégrés aux moules. Une réduction des coûts de 30 % serait dès lors envisageable. Au total, l’impression 3D provoquera sans doute une mue profonde de l’industrie. Les modèles économiques qui sont apparus sur le Web ces dernières années pour les biens immatériels (« crowdsourcing », « peer-to- peer », « open source ») vont probablement s’étendre au monde physique. Leurs répercussions pourraient être aussi profondes sur les entreprises productrices de biens de consommation qu’elles l’ont été sur les entreprises de médias par exemple. Dans l’industrie manufacturière, les gains de productivité potentiels

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auront le même type d’implications que la robotique : relocalisation de la production à proximité des marchés de consommation, effet de substitution du capital au travail. j. Les matériaux avancés. L’histoire économique abonde d’exemples où la découverte de nouveaux matériaux (acier, plastiques) a généré une vague importante d’innovation et d’expansion. Après une longue phase de recherche fondamentale et de développement, il semble que les matériaux avancés – en particulier le graphène – soient sur le point de déclencher un déferlement comparable. Les propriétés extraordinaires de ces matériaux les destinent à quantité d’applications : traitements médicaux, matériaux de construction faiblement émetteurs de CO2, matériaux auto-réparateurs, à « mémoire » de forme, composites plus résistants et moins coûteux. Quoi qu’il en soit, les industriels des semi-conducteurs, de l’électronique grand public, de la chimie, de la construction automobile et aéronautique, auront besoin d’investir substantiellement dans le développement de ces matériaux, soit directement, soit en partenariat avec de plus petits acteurs spécialisés, afin d’être bien positionnés au moment de leur essor commercial. k. Les hydrocarbures non conventionnels. Envisagées dès avant le premier choc pétrolier de 1973, les techniques de forage horizontal et de fracturation hydraulique, qui permettent d'extraire du pétrole et du gaz de gisements non conventionnels avec une efficacité croissante, sont désormais largement répandues en Amérique du Nord. D’autres régions du monde y recourront probablement bientôt, même si des considérations politiques et écologiques suscitent autour de ces technologies un débat houleux qui pourrait freiner leur adoption. Enfin, d’autres sources pourraient être exploitées à plus long terme, telles que le méthane houiller, les sables bitumineux ou les hydrates de méthane. Pour l’industrie, principale consommatrice d’énergie au niveau mondial, il s’agit d’une complète nouvelle donne, dont les conséquences s’entrevoient déjà dans le mouvement de réindustrialisation des Etats-Unis entamé depuis 2009. C’est de fait aux Etats-Unis que le potentiel des hydrocarbures non conventionnels est en passe d’être démontré le plus clairement : la production de gaz de schistes y est passée de 85 millions de mètres cubes par jour en 2007 à 680 millions de mètres cubes par jour en 2012, entraînant une division par trois des prix du gaz naturel. Les Etats-Unis pourraient, selon l’Agence Internationale de l’Énergie, devenir le principal producteur d’hydrocarbures d’ici 2020, et le premier exportateur mondial d’ici 2030. Le McKinsey Global Institute anticipe une contribution des gaz de schistes au PIB américain de l’ordre de 2 à 4 points chaque année d’ici 2020 (380 à 690 milliards de dollars) et la création de 1,7 million d’emplois, au travers du développement du secteur de l’énergie lui-même ainsi que des effets indirects sur les autres secteurs. La productivité, la sécurité et le contrôle des effets environnementaux négatifs, ne cessent de progresser : l’utilisation de grands volumes de données microsismiques rend envisageable un doublement de la production par puits d’ici 2025 ; le remplacement des générateurs diesel par des générateurs à gaz pour alimenter les pompes hydrauliques les rendra moins polluants ; le recyclage et le traitement des fluides de fracturation gagnent continuellement en efficacité. La dynamique induite par le développement des gaz de schistes commence à produire des effets sur les maillons industriels avals des hydrocarbures, ou bien très intensifs en énergie : pétrochimie, production d’électricité, d’engrais, de résines, d’acier, de verre, de pâte à papier, etc. Shell, Dow, BASF, Methanex ne sont que quelques exemples de grandes entreprises ayant récemment annoncé des investissements industriels substantiels sur le territoire américain. Au total, le PIB industriel des Etats-Unis pourrait progresser de 75 à 105 milliards de dollars par an d’ici 2020 grâce aux gaz de schistes. Il est malaisé d’anticiper toutes les répercussions du développement des hydrocarbures non conventionnels à l’échelle mondiale – tant le débat politique jouera un rôle déterminant – mais il paraît d’ores et déjà acquis que de grands équilibres économiques et géopolitiques seront bouleversés, même si toutes les régions du monde ne choisissent pas d’exploiter ces nouveaux gisements d’énergie. l. Les énergies renouvelables. Le solaire et l’éolien – les deux principales sources d’énergies renouvelables – progressent depuis plusieurs décennies et de nombreux facteurs devraient contribuer à l’amplification de ce mouvement d’ici 2025. Tout d’abord, la hausse de la demande, qui devrait atteindre 30 % au niveau mondial d’ici 2030, tirée par la croissance des pays émergents. Ensuite, les progrès techniques enregistrés par le solaire et l’éolien ont été considérables : le rendement des cellules photovoltaïques n’a cessé de progresser et atteint désormais 15 % (des cellules de nouvelle génération ont même été testées à 44 % fin 2012) ; le coût au watt a été divisé par dix en 25 ans ; et dans l’éolien aussi, les prix ont baissé de 15 % entre 2000 et 2010, approchant la parité avec les centrales à charbon ou à gaz. Enfin, trois technologies évoquées précédemment - l’Internet des objets, le stockage

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d’énergie et les matériaux avancés - sont susceptibles d’accélérer fortement l’essor des énergies renouvelables. L’intermittence de la production, qui est à l’heure actuelle l’un des principaux freins à leur développement, pourrait être surmontée grâce à l’Internet des objets – permettant d’optimiser la consommation et la distribution via des réseaux « intelligents » – et au stockage. Quant aux propriétés des matériaux avancés, elles laissent entrevoir des applications particulièrement attractives dans le domaine des énergies renouvelables : cellules photovoltaïques « imprimables » sur tout type de surfaces, y compris flexibles, ou encore revêtements hydrophobes et autonettoyants des pales d’éoliennes. La croissance effective du marché des énergies renouvelables dépendra au final beaucoup du niveau de subvention que les gouvernements leur attribueront, mais dans un scénario central, elles pourraient compter pour 16 % de la production mondiale d’énergie en 2025. Chacune de ces douze ruptures technologiques porte en germe nombre de biens et services nouveaux, d’améliorations ponctuelles de la productivité, de glissements dans les chaînes de valeur et de mutations d’envergure de certains secteurs, à l’image de celui de l’automobile. Cependant, c’est leur conjonction qui recèle les transformations économiques les plus radicales. Le qualificatif, souvent galvaudé, de « troisième révolution industrielle » apparaît pourtant comme le plus juste pour décrire le profond chamboulement des facteurs de production se profilant à l’horizon.

4. Hypothèses d’évolution

Hypothèse 1 - La robotique industrielle est totale, le pilotage humain disparait. Usine du futur : le robot est-il le meilleur ennemi de l’homme ? Les robots sont partout, dans l’industrie, les services, le commerce, la médecine et même la science. Le robot est un travailleur artificiel, il peut-être même virtuel. Il peut traduire l'information brute d'un capteur - directement en commande -, mais il peut aussi utiliser des algorithmes, des opérations mathématiques même complexes, la trigonométrie, des conditions (si…alors…) et d'autres outils dépendants du langage des humains. Ils deviennent de plus en plus intelligents et autonomes au point de prendre des décisions indépendantes de tout contrôle humain. Ils dépassent la capacité des travailleurs à accomplir la plupart des emplois, même les emplois qualifiés voir même hautement qualifiés, ils ont la capacité d’effectuer les tâches difficiles voir dangereuses et puis perdre un robot …… ! Pour l’économie, cela entraine une augmentation de la productivité, une diminution des coûts. Plus besoin de RH de GPEC, et personne n’a jamais vu des robots « en grève ». L’usine du futur est totalement robotisée. Ils ont colonisé tout l'espace humain.et le chômage n’est plus réservé aux salariés qui ont une formation faible. S’y ajoutent tous les ans les techniciens et ingénieurs qui ne se sont pas adaptés à l’évolution des technologies et aux nouveaux métiers induits pas la robotique. Mais dans cette situation de travaux entièrement robotisés vont se poser trois questions : 1) Pourquoi ne pas remplacer aussi le chef d’entreprise par un robot ? 2) Qu’allons-nous faire des hommes ? Et qu’allons-nous faire de nos fabrications et si l’humain ……….

Hypothèse 2 - la robotique s’impose mais le système expert reste humain. La robotique industrielle s’impose dans de nombreux secteurs de l’industrie et son développement s’explique par une recherche continue de l’amélioration des coûts de production liée à plus de qualité, sécurité, durabilité. Les champs d’action des robots ont évolué. Initialement limités pour remplacer les hommes sur des taches 3D : « dull » (ennuyeuse), « dirty » (sale) et « dumb » (qui ne requièrent aucune faculté intellectuelle), insensibles à la fatigue, capables de travailler nuit et jour, ils restent cantonnés dans leur capacités à manipuler, positionner, certes avec de grandes précisions mais dans des environnements « structurés ». Malgré l’arrivée de nouveaux capteurs sensoriels et de vision extrêmement performants, le développement de la robotique reste contraint à sa capacité d’interaction avec l’environnement et sa capacité à réaliser des taches variées et changeantes, (notamment avec des objets de formes souples et déformables). L’organisation continue d’impliquer un travail coopératif et coordonné entre les robots et les humains, notamment dans des environnements instables et par nature difficilement contrôlables (cas d’environnements « déstructurés »). Nous rencontrons encore de nombreux cas d’opérations industrielles demandant flexibilité, reprogrammabilté, avec des conditions de manipulation d’objets dont les propriétés dynamiques sont toujours difficiles à modéliser.

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Les robots feront partie intégrante de plateformes avec des codes de programmation ouverts et normalisés, sur base d’algorithmes qui continueront de nécessiter une expertise humaine. Dans un concept d’intelligence artificielle largement partagé et malgré les progrès importants réalisés dans les logiciels et algorithme de calcul des systèmes expert, (algorithmes eux-mêmes évolutifs et auto-apprenant), nous n’assistons pas à la généralisation de la robotique « intelligente ». Il y a un consensus autour du fait que qualité et efficacité ne peuvent dépendre uniquement des robots et de processus automatisés. Les robots restent des outils au service de l’homme mais dépourvus d’autonomie mentale, malgré un développement des systèmes expert décisionnels qui permettront au robot de modifier dans de rares situations la façon d’exécuter sa mission en fonction du contexte, simulant ainsi des mécanismes de la pensées humaine. L’utilisateur et l’homme en général continuent de garder une place prépondérante car, malgré la puissance augmentée des algorithmes pour piloter des processus de production, la création de systèmes experts continue de reposer d’une part sur l’expertise et bases des connaissances acquises par l’homme dans l’entreprise, mais aussi, d’autre part, dans la capacité à être utilisée par les opérationnels de l’entreprise qui devront continuer de gérer les interfaces entre systèmes et robots. Même si le concept reposant sur un accroissement des plateformes d’échanges entre robots et applications reste intéressant, il reste peu développé face à une notion de risque difficile à maitriser avec des architectures reposant sur des interfaces et liaisons externes au robot. Ces défis continueront d’impliquer les hommes de l’entreprise car on n’a pas su opérer efficacement et en sécurité des opérations sur des robots, et ce par incapacité à modéliser l’environnement à l’avance. Les possibilités de doter les machines de conscience restent définitivement une illusion. De nombreux verrous restent en matière de robotisation « intelligente » donc totale, car les opérations nécessitant capacités d’observation, réflexion, créativité et adaptabilité aux circonstances ne peuvent être exécutées par des machines. Si Intelligence artificielle (systèmes experts) et robotique se retrouvent sur des reconnaissances de forme et conduite de process dans des environnements structurés, les résolutions de problèmes et surveillance en environnement de risques continueront de procéder de la présence humaine pour traiter les imprévus. La robotique s’impose mais reste en autonomie contrôlée.

Hypothèse 3 - L'usine est automatisée mais décentralisée et de taille humaine Les progrès de l'impression 3D, depuis une décennie, ont été fulgurants. Il est maintenant possible d'utiliser pratiquement toutes les matières de base (polymères, métaux, matériaux composites et même bio-matériaux). De plus, les « machines 3D » ont pris de l'ampleur et sont désormais capables de traiter de très grandes dimensions. Elles ont aussi été « croisées » avec les concepts robotiques les plus innovants et sont désormais capables de : - télécharger elles mêmes leurs pièces à imprimer - autogérer leur maintenance - s'inscrire dans un cycle entièrement automatisé de gestion de production, en prise directe avec l'approvisionnement des matières d'un côté et l'écoulement des produits finis de l'autre. Ces concepts, au croisement de l'informatique, de la robotique, des objets connectés et de la gestion des flux matières, ont permis l'éclosion d'un très grand nombre de petites unités de production « décentralisées », véritables « usines de quartier ». Ces unités sont à taille humaine et sont très proches des lieux de résidence des consommateurs. À la simple production de prototypes ou de petites pièces détachées des années 2020, à succédé une vaste couverture du territoire par des usines de quartier produisant des biens complets de consommation : petits véhicules urbains, électroménager, éléments de maisons en kit, quincaillerie, etc. L’énergie est également produite et stockée localement. Des unités spéciales travaillant la « peau artificielle » ont été implantées près des hôpitaux. La logistique des flux de matières a, elle aussi, été totalement robotisée : les transports pondéreux sont pilotés entre ces usines locales et les voies de communication ferrées, fluviales ou routières, sans aucune rupture de charge. Les usines locales sont fédérées au sein d'une vaste entreprise dont la maison mère est, souvent, hors du territoire. Les équipes servant ces unités de quartier sont de faible effectif (essentiellement des contrôleurs qualité et des pilotes de robots). Le télétravail est d'ailleurs fréquent, hors les lundis matin et vendredi ou des réunions projet sont systématiquement organisées, en télé présence avec la maison mère.

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Hypothèse 4 - La « cobotisation » : les robots créent l'autonomie plus que la dépendance Les « roulantes » d'autrefois ont laissé la place à un parc de robots et d'automates de tailles et sophistications très différentes mais tous marqués par une très forte miniaturisation. Les opérateurs ont à disposition ces nouvelles boîtes à outils et les utilisent en tant que de besoin au fil des différentes étapes du processus de production. La maîtrise de ces robots fait la part belle à l'interactivité et à la convivialité rendant ainsi naturelle et enrichissante cette nouvelle forme de polyposticité. L'opérateur, dont la qualification est nécessaire, est le garant du mode conversationnel entre les robots mobiles et les machines fixes cœur de process : il gère également l'interface avec les Matières Premières Amont et la Demande Client (Interne ou Externe) Aval. L'intervention des opérateurs est concentrée sur les 2 fonctions principales que sont la G2P (Gestion de Production de Proximité) et la PAC (Production Autocontrolée Continue). La G2P permet en liaison avec le système MICMAC (Module d'Information Client/Module Assistance Commerciale) de programmer la chaîne de production en juste à temps pour satisfaire les demandes du marché, l'objectif zéro stock et l'efficience énergétique et consommation matières. La PAC, développée à l'échelle européenne, permet, à partir des datas relevées à chaque stade du process de production, d'une part de piloter l'auto efficience de la chaîne de valeurs et d'autre part, d'assurer la traçabilité et l'information en continu des clients et consommateurs.

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Variable n°20 Eco efficience, recyclage, économie de matières premières

1. Définition La nécessité d’agir en faveur d’un développement plus respectueux de l’environnement et de l’être humain est devenue aujourd’hui un paramètre incontournable pour notre société. Que ce soit par la réglementation ou par la pression sociétale, l’entreprise se doit aujourd’hui de renforcer sa politique en matière de développement durable. Une des voies possibles est de s’inspirer des processus écologiques. Ceux-ci sont généralement efficients puisque les résidus des processus sont totalement réintégrés comme matière première ou source d’énergie dans les systèmes naturels. Les organismes vivants vivent donc en totale harmonie avec leur milieu ambiant en utilisant efficacement les ressources du milieu et en mettant en place des échanges favorisant une utilisation optimale du milieu dans lesquels ils se trouvent. En appliquant ces principes au monde industriel, on obtient le concept d’éco-efficience industrielle, qui consiste à optimiser l’usage des ressources disponibles dans les systèmes de production. Ce concept appliqué au produit, correspond à l’éco-conception, et enfin l’éco-efficience appliquée à un système industriel, l’écologie industrielle.

2. Indicateurs - Le ratio entre la valeur de ce qui est produit (qualité, fonctionnalité) et l’impact environnemental du produit tout au long de son cycle de vie. - Le degré de prise en compte de l’éco-conception - L’application des normes.

3. Rétrospective  Le principe d’éco-efficience Dans un premier temps, les systèmes industriels de production et de consommation ont recherché l’éco-efficacité passant par la réduction des résidus et de la pollution de même que par l’utilisation moindre d’énergie et de ressources matérielles vierges. L’éco-efficacité présente donc l’avantage de contribuer à la protection de l’environnement. Néanmoins, lors du Sommet de la Terre de Rio de 1992, le Conseil mondial des entreprises pour le développement durable (World Business Council for Sustainable Development) a proposé un concept plus fonctionnel, celui d’éco-efficience. Ce concept désigne en fait l’efficacité avec laquelle les ressources naturelles (minérales, énergétiques et biologiques) sont utilisées par les systèmes industriels de production et de consommation afin de répondre aux besoins de l’être humain, tout en réduisant les incidences pour l’environnement qui y sont liées, en respectant la capacité de soutien des écosystèmes et en diminuant l’usage des ressources et de l’énergie tout au long du cycle de vie des produits de consommation et des services. En 1995, le WBCSD définit plus précisément l’éco-efficience, l’orientant vers un concept principalement industriel, valorisant notamment la création de valeur tout en la reliant aux préoccupations environnementales, ce qui est très attrayant pour l’entreprise. Le World Business Council for Sustainable Development (WBCSD) définit ainsi l’éco-efficience comme : « La production de produits et services à des prix concurrentiels qui satisfont les besoins humains et procurent une qualité de vie, tout en réduisant progressivement les conséquences écologiques et le recours à de nombreuses ressources pendant le cycle de vie, à un niveau équivalent au moins à celui de la capacité estimée de la planète ». a. La mesure de l’éco-efficience L’éco-efficience se formalise en une équation simple, à savoir le ratio entre la valeur de ce qui est produit (qualité, fonctionnalité) et l’impact environnemental du produit tout au long de son cycle de vie. Eco-efficience = Valeur du produit ou service/Somme des impacts environnementaux Cette équation met en évidence les 3 objectifs pour améliorer l’éco-efficience.

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1. Optimiser l’utilisation des ressources naturelles : cela doit inclure le fait de minimiser la consommation d’énergie, des matières, de l’eau, d’augmenter la recyclabilité et la durabilité des produits. 2. Réduire les impacts environnementaux : cela doit inclure notamment le fait de minimiser les déchets et les substances toxiques. 3. Accroître la valeur des produits ou services : cela signifie donner plus de valeurs pour les utilisateurs, par la modularité du produit, sa fonctionnalité, avec des services additionnels, la valeur de celui-ci doit être améliorée avec un impact environnemental plus faible. Conjointement à cette définition de l’éco-efficience, le WBCSD propose en 1995 différents points permettant d’appliquer ce concept :

Principes proposés par le WBCSD (1995) : - la réduction de la demande de matériaux pour les produits et services ; - la réduction de l’intensité énergétique des produits et services ; - la réduction de la dispersion des substances toxiques ; - l’amélioration de la recyclabilité des matériaux ; - l’optimisation de l’utilisation durable des ressources renouvelables ; - la prolongation de la durabilité des produits ; - l’accroissement de l’intensité de service des produits et services. En 1996, Schaltegger apporte une évolution à cette définition. Il souligne que l’éco-efficience peut se distinguer en 2 sous-ensembles : l’éco-efficience « produit » et l’éco-efficience « fonction ». Eco-efficience produit = Produit désiré/Somme des impacts environnementaux Eco-efficience fonction = Fonction désiré/Somme des impacts environnementaux Cette distinction est importante car elle met en valeur le degré d’ouverture de notre système. La formule incluant la fonction prend en effet une vue plus large en se focalisant sur la fonction qui remplit la demande. Par exemple, une voiture peut être éco-efficiente si on s’attache au produit mais ne sera pas aussi éco-efficiente qu’un vélo si la fonction est de transporter une personne sur deux kilomètres. b. L’éco-efficience sociale Afin de conclure ce descriptif de l’éco-efficience, il est important de noter que l’éco-efficience n’est pas seulement une hybridation des concepts d’écologie et d’efficience économique ou technique. En 2003, le gouvernement basque fait remarquer que l’éco-efficience vise à développer des actions de telle sorte que le bien être de la société s’améliore. L’éco-efficience fait donc aussi appel à l’aspect social pour un développement plus responsable. Comme le dit Almeida en 1998, le concept d’éco-efficience sociale s’applique à travers une démarche orientée pour l’emploi et la création d’entreprise. Le concept sous-entend que les entreprises soient capables d’exercer leurs influences, notamment pour faire diminuer le chômage. Le concept sous-entend aussi une intervention intelligente pour intégrer un nouveau modèle de développement.

c. Concepts associés à l’éco-efficience Il existe plusieurs niveaux d’intégration du concept d’éco-efficience au sein d’une organisation. La figure ci- dessous, adaptée des travaux de Bras, montre les différentes approches possibles en considérant le niveau d’organisation impacté et le temps demandé.

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d. Concepts axés produits et services 1. Ingénierie environnementale 2. Prévention de la pollution 3. Eco-conception, Design for environnement Life cycle design 4. Ecologie industrielle 5. Développement durable Cette figure indique clairement deux grands domaines d’application de l’éco-efficience : l’éco-efficience axée sur le produit ou service, et l’éco-efficience axée sur l’organisation globale de l’entreprise. e. Concepts axés produits et services

On peut distinguer trois domaines spécifiques : 1. Ingénierie environnementale : ce domaine concerne l’ensemble des activités de traitement de la pollution des eaux, de l’air, des déchets. Il s’agit donc avant tout de traitement curatif des problèmes. 2. Prévention de la pollution : cette approche permet une réflexion sur la réduction des déchets et la réutilisation de ressource. Il s’agit néanmoins d’une approche curative. 3. Eco-conception - Design for Environnement – Life cycle design : ces différents concepts sont très proches et cherchent à réfléchir sur l’ensemble du cycle de vie des produits ou services et à diminuer l’impact environnemental global de ceux-ci.

f. Concepts axés organisation

On peut distinguer dans ce cas deux grands domaines : 4. Ecologie industrielle : il s’agit d’une approche plus générale qui prend en compte non plus un seul produit fabriqué par un seul acteur industriel, mais une diversité de produits fabriqués dans des industries n’appartenant pas nécessairement au même secteur industriel. 5. Fonctionnement développement durable : cette approche, plus globale, consiste plus en une volonté de réflexion sur le mode de fonctionnement de la société. Les implications de cette approche dépassent les périmètres des entreprises ou des filières industrielles, pour considérer de manière exhaustive les flux de matières, d’énergie et de déchets (jusqu’à prendre en compte la dimension internationale des filières considérées).

Une des solutions efficaces et porteuses d’améliorations concerne le produit lui-même. Le principe d’éco-conception, outil puissant permettant de solutionner les problèmes environnementaux et apportant des opportunités d’innovation. L’éco-conception s’inscrit ainsi pleinement dans le champ du développement durable. Il s’agit de plus d’une réponse adéquate et efficace pour l’entreprise, puisqu’elle met en son cœur la conception et la fabrication des produits. L’éco-conception repose sur deux principes fondamentaux : l’approche globale, ou approche cycle de

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vie, et l’approche multicritères. Son objectif est de diminuer, sur l’ensemble du cycle de vie du produit, l’impact environnemental global de ce produit.

Approche cycle de vie

L’approche cycle de vie d’un produit consiste à considérer l’ensemble des étapes nécessaires pour réaliser les phases concernant l’élaboration, l’usage, et l’élimination du produit, c’est-à-dire depuis l’extraction et la fabrication des matières premières entrant dans la composition du produit, jusqu’à la fin de vie du produit et aux différents traitements nécessaires à son élimination. Le cycle de vie du produit est généralement segmenté en cinq phases distinctes : - La phase d’extraction des matières premières. Cette phase comprend les étapes depuis l’extraction et le raffinage des différents minerais jusqu’à la fabrication des matériaux et des produits semi-finis. - La phase de fabrication du produit. Cette phase comprend tous les procédés de fabrication des pièces et composants du produit, aussi bien chez les différents fournisseurs que chez le fabricant du produit. - La phase d’utilisation du produit par le client. Cette phase comprend, les cas échéants, la consommation d’énergie pour utiliser le produit, l’entretien, la réparation, l’utilisation de produits consommables nécessaires au bon fonctionnement du produit. - La fin de vie du produit. Cette phase comprend les moyens d’élimination du produit usagé : recyclage, incinération, mise en décharge. - La phase de transport. Cette phase comprend l’ensemble des moyens de transports qui ont été nécessaires pour réaliser le cycle de vie complet du produit : transport des matières premières, approvisionnement par les fournisseurs, expéditions vers les clients, collecte des produits en fin de vie.

A l’approche cycle de vie on peut compléter par une approche multicritères. L’approche multicritères consiste à considérer, sur cycle de vie du produit, l’ensemble des impacts environnementaux engendrés par le produit. Les catégories d’impacts environnementaux peuvent être exprimées sous de nombreuses formes.

Cependant, l’approche multicritère impose de considérer simultanément les problèmes environnementaux liés : - à l’impact sur l’écosystème - à l’impact sur les ressources - à l’impact sur la santé humaine

 Une réglementation en constante évolution

La réglementation environnementale peut participer à la mise en place d’une démarche d’éco-conception. L’Europe est d’ailleurs considérée comme pionnière dans l’élaboration d’un cadre réglementaire autour de l’environnement et l’éco-conception en particulier. Depuis presque 30 ans, des textes législatifs sont développés autour de la problématique environnementale. Dans un premier temps, la réglementation européenne a essentiellement concerné les impacts provoqués par l’activité industrielle. Mais à la fin des années 1990, une nouvelle approche réglementaire prend pour cible la réduction de la pollution des produits, ce qui a considérablement aidé au développement de l’éco-conception. Actuellement, un ensemble de propositions de textes législatifs est en cours de développement pour promouvoir l’éco-conception.

Principaux règlements :

- La Politique Intégrée Produit PIP L’Union européenne a mis en place une stratégie de politique environnementale relative aux produits en vue de promouvoir le développement d’un marché propice à la commercialisation de produits plus écologiques. Ce livre vert PIP concerne l’ensemble des produits et services existants et pose les bases d’une réglementation en éco- conception. La stratégie présente l’avantage de souligner l’implication de l’ensemble des parties prenantes tout au long du cycle de vie du produit et elle appelle au développement de l’éco-conception chez les industriels afin que les produits soient plus respectueux de l’environnement.

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Elle incite aussi à une meilleure information des consommateurs sur leurs achats, afin d’orienter leurs achats vers des produits plus responsables. La stratégie est axée sur les trois étapes du processus de décision qui conditionnent l’impact environnemental du cycle de vie des produits : - L’’application du principe du pollueur-payeur dans la fixation des prix des produits : le marché peut optimiser les performances environnementales des produits si tous les prix reflètent le coût environnemental réel de ces produits. L’idée principale énoncée par le livre vert en vue de mettre en œuvre le principe du pollueur-payeur est d’appliquer des taux d’imposition différenciés en fonction des performances environnementales des produits. Par exemple, appliquer des taux de TVA plus bas aux produits portant le label écologique ou mettre en place d’autres taxes et redevances écologiques. - Le choix éclairé des consommateurs : le livre considère que l’éducation des consommateurs et des entreprises est un moyen important pour que la demande des produits respectueux de l’environnement augmente et que la consommation devienne ainsi plus écologique. Il demande aussi à fournir des informations techniques intelligibles à travers l’étiquetage des produits. Le label écologique européen constitue déjà une source d’information pour les consommateurs, mais il faudrait élargir son application à un plus grand nombre de produits. - La conception écologique des produits : le livre vert signale que des lignes directrices en matière d’éco- conception et une stratégie générale d’intégration de l’environnement dans le processus de conception pourraient être utilisées comme instruments de promotion du concept de cycle de vie dans les entreprises.

- La directive EuP Adoptée en juillet 2005, cette directive entre dans le cadre de la politique intégrée produit PIP et vise donc à fournir un cadre pour la fixation d’exigences en matière d’éco-conception applicables aux produits consommateurs d’énergies. Il s’agit d’une directive « cadre » qui définit le contexte juridique au sein duquel des mesures d’exécution seront élaborées. Elle a pour objectifs principaux : - L’intégration des aspects écologiques dans la conception et le développement des produits. - La définition des exigences d’éco-conception pour évaluer des solutions de conception alternatives dans le but d’améliorer les performances environnementales des produits. Cette directive est suivie de nombreuses applications comme par exemple la réduction de 75 % de la consommation d’énergie des équipements électriques en mode veille d’ici 2020.

- Directive RoHs (Restriction of the use of certain Hazardous Substances in electrical and electronic equipment) En juillet 2006, la directive ROHS a été adoptée dans le but de limiter la présence de substances dangereuses dans les équipements électriques et électroniques. Elle interdit la présence des substances suivantes : le plomb, le mercure, le cadmium, le chrome hexavalent, le polybromobiphényle (PBB) et le polybromodiphényléther (PBDE). Néanmoins, la directive exclut notamment les appareils médicaux, les instruments de surveillance et de contrôle, les outils industriels stationnaires de grande échelle, les équipements électriques et électroniques mis sur le marché avant le 1er juillet 2006, les pièces détachées destinées aux réparations et aux réutilisations. Il existe donc des liens évidents entre cette directive et l’éco-conception. En effet, elle favorise la déclaration des matériaux et donc oblige à connaître le bilan matière du produit.

- La directive DEEE (Déchets d’Equipements Electriques et Electroniques) En janvier 2003, la directive DEEE a été adoptée et vise les produits électriques et électroniques. Cette directive coordonne différentes actions dans le but d’optimiser la fin de vie des produits ciblés : - Lors de la conception, la directive demande à favoriser le démantèlement en vue du recyclage, de même que l’obligation d’apposer un pictogramme spécifique. - La directive oblige les producteurs à participer à la collecte du produit : en mettant en place un système individuel de collecte sélective des déchets ou en contribuant à cette collecte en versant une contribution financière à un organisme coordonnateur agréé (éco-taxe). - La directive impose au producteur d’informer les exploitants d’installations chargés du traitement sur la meilleure façon de démanteler le produit en vue de son recyclage.

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- Le règlement REACH En juin 2007, un règlement européen sur les substances chimiques est entré en vigueur afin d’évaluer les risques potentiels de toutes les substances chimiques produites ou importées dans une quantité supérieure à une tonne par an et par fabricant ou importateur, y compris celles qui circulent déjà, sur une période de onze ans. Avec REACH, une substance non évaluée ou présentant un risque peut être retirée du marché. Ce règlement concerne l’ensemble des fabricants et importateurs qui fabriquent ou importent une substance à plus d’une tonne par an. Plusieurs jalons ont été instaurés : - 1er décembre 2010 : l’ensemble des substances produites ou importées dans une quantité supérieure ou égale à 1000 tonnes par année. Pour les substances qui sont classées comme très toxiques pour les organismes aquatiques et pouvant avoir des effets néfastes à long terme sur l’environnement aquatique, la quantité retenue est de 100 tonnes ou plus. Pour les substances cancérogènes, mutagènes ou toxiques pour la reproduction (CMR) de catégorie 1 ou 2, le seuil est de 1 tonne ou plus. - 1er juin 2013 : pour toutes les substances produites ou importées dans une quantité supérieure ou égale à 100 tonnes par année. - 1er juin 2018 : pour toutes les substances produites ou importées dans une quantité supérieure ou égale à 1 tonne par année.

- La Norme internationale d’éco-conception ISO 14062 Objectif de la norme L’éco-conception est une démarche normalisée qui bénéficie du référentiel international l’ISO 14062 intitulé « Management environnemental – Intégration des aspects environnementaux dans la conception et le développement de produits ». Ce document, destiné aux concepteurs et développeurs de produits, décrit des concepts et des pratiques actuelles liés à l’intégration des aspects environnementaux dans la conception et le développement de produit, en montrant les principaux enjeux stratégiques pour l’entreprise. Elle suggère également des voies pour favoriser l’établissement d’un dialogue et d’une coopération entre les différents acteurs impliqués dans une démarche d’éco-conception. Description de la norme L’ISO 14062 présente le processus de développement de produits offrant une réponse à une démarche d’éco- conception : - Planification Il s’agit de relever les principales caractéristiques du produit, les hiérarchiser selon leurs avantages et leur faisabilité, formuler les exigences environnementales, analyser les facteurs externes, choisir les approches de conception environnementale appropriées, vérifier l’approche choisie en fonction des enjeux fondamentaux, faire l’analyse environnementale d’un produit de référence. - Conception préliminaire Cette étape consiste en des analyses orientées sur le cycle de vie, la formulation des cibles mesurables, définir une conception préliminaire, respecter les exigences environnementales, intégrer le tout dans les spécifications et tenir compte des résultats de l’analyse du produit de référence. - Essais/Prototypes Vérifier les spécifications par des essais sur les prototypes. - Production/Lancement Communiquer les informations sur les aspects environnementaux, l’utilisation recommandée et l’élimination du produit. Tout au long de la norme, des « boîtes d’assistance pratique » sont réparties afin d’expliquer certains aspects essentiels de la mise en œuvre de cette démarche proactive.

4. Hypothèses d’évolution

Hypothèse 1 – Eco-efficience normative, punitive et limitée L’encadrement de la production industrielle par des normes et règlements, déjà en nombre élevé dans les années 2010, s’est encore plus complexifiée.

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Les directives européennes se sont multipliées, les nouvelles reprenant les anciennes et y ajoutant des contraintes supplémentaires notamment au niveau du développement durable et de l’éco-efficience sociale. Les contrôles (nationaux et désormais européens) sont devenus très fréquents, avec des sanctions dissuasives en cas de non respect des normes, pouvant aller jusqu’à des amendes équivalent à une année de chiffre d’affaires (à l’instar de l’échelle des sanctions en cas d’entente illicite) en cas de récidive. Certains règlements relatifs à la protection de l’environnement posent des problèmes ardus aux entreprises. Par exemple, faut-il renoncer à l’obsolescence programmée des produits de consommation, afin de limiter les déchets à recycler, au détriment de la profitabilité de l’entreprise ? Au regard de la sévérité des contrôles, la rentabilité des entreprises a baissé, au détriment de l’investissement. Les normes internationales n’ont pas été homogénéisées, ce qui conduit à une forte distorsion de concurrence entre les zones très normées (Europe, Amérique du nord) et les zones où la production est moins encadrée mais avec une qualité finale du produit le rendant parfaitement exportable vers « l’occident » (Amérique du sud, zone asiatique, mais surtout zone africaine).

Hypothèse 2 - L'éco-efficience encouragée et créatrice de valeur Les différents Sommets de la Terre qui se sont succédés après 2015 ont en particulier sur l'impulsion de la France valorisé les concepts d'éco-efficience sous ses différentes formes (produit, fonction, sociale, conception ou sociétale). Assez naturellement s'est « imposée » l'idée d'encourager les efforts des entreprises et de récompenser les consommateurs exigeants en matière d'éco-efficience. Non sans discussion préalable avec les autorités de régulation européennes, notre pays a mis en place un impôt négatif dit 3D (Détaxe au Développement Durable) qui vient en en déduction du taux de TVA normal, la déduction étant indexée sur la pertinence de l'éco-efficience. Cette approche fiscale innovante qui pousse le consommateur à privilégier un choix de produit éco-efficient conforte un des piliers du Développement Durable à savoir la pérennité des entreprises du territoire.

Hypothèse 3 - Une éco-efficience tirée par les consommateurs Les consommateurs sont de plus en plus sensibles aux conséquences environnementales de leurs actes. Aussi le degré d’éco-efficience est un critère de choix majeur dans leurs démarches d’achat. Les politiques de promotion d’une consommation durable développées par les pouvoirs publics ont des impacts majeurs. Les labels certifiant la démarche des entreprises sont reconnus et leur absence est synonyme de rejet des produits, même à des prix inférieurs. Un box office des productions et des produits les plus ou moins éco-efficients est publié de manière hebdomadaire sur des sites dont la consultation est forte. Les industriels se sont adaptés à cette demande et rivalisent d’ingéniosité et de communication pour faire en sorte que les consommateurs identifient leur produit comme gage de davantage d’éco-efficience que la concurrence. Des agences de communication spécialisés sur le sujet formalisent des publicités comparatives permettant de discriminer positivement l’éco-efficience des produits de leur client. Pour répondre à cette demande des consommateurs, les entreprises se regroupent dans leur communication pour montrer le caractère eco-efficient du produit, d’une filière ou d’un territoire. Les contrôles des éléments déclaratifs sont diligentés par les pouvoirs publics et incitent les industriels à une concordance entre le discours et les actes. Si un décalage est constaté, des class actions se constituent et les risques de verser des dommages et intérêts sont très élevés.

Hypothèse 4 - Une éco-efficience en grappes L’éco-efficience s’organise désormais autour de grappes d’entreprises s’appuyant sur la proximité de leurs activités pour permettre localement une mise en boucle des flux de matières/énergie et sous-produits… A l’intérieur d’un pôle éco-industriel, elles s’organisent donc de manière à ce que leurs sous- produits et/ou flux d’énergie résiduelle générés par l’une soit en capacité d’être utilisés comme intrant ou ressource pour d’autres entreprises du pôle, et ce de façon à ce qu’ensemble elles atteignent un degré d’éco-efficience et d’économies substantielles dans leur budget de fonctionnement (et largement supérieur à celui atteint si elles avaient été seules). Ces grappes d’entreprises organisées autour de leur proximité/sensibilité aux problématiques de l’éco- efficience mettent à profit d’autres avantages tels que accès aux ressources intellectuelles dans le voisinage immédiat, capacité à attirer des talents, collaboration avec les écoles d’enseignement supérieur, transfert d’expertise sur les entreprises en phase de démarrage et éco-localement associée dans la grappe.

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Ces grappes d’entreprises organisées en éco-pole favorisent les alliances stratégiques et pratiques de mutualisation des connaissances et/ou équipements autour du concept de durabilité, ce grâce à une parfaite connaissance des circuits et flux d’énergie et de sous-produits issus de la transformation de chacun, le tout facilité par la proximité. Ces pôles éco-industriels démontrent en plus une grande capacité d’implication sur leur territoire par une meilleure prise en compte des aspects sociaux et sociétaux.

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Variable n°21 Procédés innovants

1. Définition On appelle innovation de procédé (ou innovation de process) la mise en œuvre d’une méthode de production nouvelle, ou sensiblement améliorée. Ces méthodes permettent généralement une amélioration de la productivité, en réduisant les coûts ou les délais de fabrication. Elles visent aussi la qualité, avec des critères de plus en plus pointus, pour permettre à certaines entreprises de se différencier par l’excellence. Innovation de process ou de procédés : l'innovation de process concerne la mise au point ou l'adoption de méthodes d’organisation, de développement, de fabrication, de production ou de distributions nouvelles. De façon générale, l’innovation aujourd’hui tend vers des procédés industriels plus sobres - moins consommateurs d’énergie, d’eau et de matières premières - et plus sûrs, en réduisant les risques pour les salariés et l’environnement.

2. Indicateurs

− Dépenses en R&D.

3. Rétrospective Investissements et créations d’emplois. L’innovation de procédé requiert souvent d’importants investissements. Pour les PME, ces investissements représentent souvent des prises de risques considérables. Parfois près d’un an de chiffre. Une étude de l’INSEE en partenariat avec la CCIR et l’ARDI montre que les PME innovent toujours en Rhône- Alpes, et plus qu’en France de province. « Dans la région Rhône-Alpes, 58 % des PME ont innové entre 2010 et 2012, dans les secteurs de l'industrie manufacturière et des services technologiques et intellectuels. Ce taux est légèrement supérieur à celui de la France de province (56 %) et reste stable par rapport à la période précédente (2008-2010). Cet écart en faveur de Rhône-Alpes se retrouve aussi bien dans l'industrie (56 % pour 54 % en France de province) que dans les services (65 % pour 63 %). L'innovation est en effet présente dans tous les secteurs en Rhône-Alpes. Quelques secteurs apparaissent sur- innovants par rapport au niveau national, comme la chimie (82 % et + 9 points), la fabrication de matériels de transport (58 % et + 8 points) ou la fabrication de machines et équipements (80 % et + 7 points). Si l'innovation varie d'abord en fonction du secteur d'activité, la taille de l'entreprise est aussi très discriminante : les plus grandes entreprises innovent plus. Le taux d'entreprises innovantes passe ainsi de 47 % pour les entreprises de 10 à 19 salariés, à 62 % pour celles de 20 à 49 salariés et à 80 % pour les PME de 50 à 249 salariés. Pour les deux tranches de taille supérieure, les entreprises rhônalpines innovent plus que les autres entreprises françaises (avec respectivement 57 % et 74 % en France de province). L'innovation rhônalpine s'explique par un effet plus géographique que structurel. L'influence de la taille et du secteur d'activité ne suffit pas à expliquer la plus forte propension à innover des PME rhônalpines. Ces effets de structure ont, en effet, un très faible impact en Rhône-Alpes. Les PME de grande taille étant moins nombreuses, ce critère y est même très légèrement défavorable. L'influence de la structure sectorielle est perceptible essentiellement dans les services informatiques, très innovants et très présents dans la région. En l'absence d'effet structurel fort (en tout cas sur ces deux critères), on peut donc dire que la région Rhône-Alpes bénéficie d'un comportement d'innovation géographique de ses entreprises.

 L'innovation technologique se porte bien en Rhône-Alpes Les entreprises rhônalpines sont actives en matière d'innovation technologique : 46 % des PME (soit 4 PME innovantes sur 5) déclarent réaliser des innovations technologiques, 42 % en France de province. Elles sont même une sur deux pour les entreprises de 20 à 49 salariés et sept sur dix pour celles de 50 à 249 salariés

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(respectivement 43 % et 63 % en France de province). L'introduction d'un produit nouveau (bien ou prestation de service) est la forme la plus répandue d'innovation technologique. Ainsi, 32 % des PME rhônalpines ont développé une innovation de produit entre 2010 et 2012. Pour une majorité d'entre elles (70 %), au moins un de ces produits était nouveau sur leur marché. Pour plus d'un tiers (39 %) des entreprises innovantes en produit, ce produit était nouveau sur le marché mondial. Ces produits nouvellement introduits sur le marché représentent 16 % du chiffre d'affaires des entreprises innovantes. Une entreprise sur neuf réalise même plus de la moitié de son chiffre d'affaires avec ces innovations. Second type d'innovation technologique, l'innovation de procédés est mise en œuvre, par 29 % des PME. Pour le tiers de ces entreprises (35 %), ce procédé de production n'était pas disponible chez les concurrents. L'innovation, en produits ou procédés, s'accompagne très souvent de modifications organisationnelles ou des techniques de ventes. Plus de la moitié des PME innovantes en technologie procèdent ainsi à des innovations d'organisation (55 %) et une grande part adaptent ou modifient leurs stratégies de vente (39 %). Le lien entre les différents types d'innovation est donc très fort car seules 12 % des PME innovent en organisation et/ou marketing uniquement, alors que globalement les innovations d'organisation concernent 35 % des PME et les innovations de marketing, 23 % d'entre elles. S'il n'existe pas un profil type d'entreprise innovante, quelques facteurs sont cependant corrélés au degré d'innovation. Outre le secteur et la taille, la dimension du marché est un élément discriminant. Plus le marché de ventes de biens et services est vaste géographiquement, plus les entreprises innovent. Elles sont 38 % à innover quand leur marché est exclusivement local, 51 % lorsqu'il est aussi national et 68 % dans le cas d'un marché international. En lien avec ce constat, le taux d'exportation est en moyenne deux fois plus élevé dans les entreprises innovantes : il passe de 5 % à 12 % du chiffre d'affaires dans le secteur des services et de 10 % à 19 % dans l'industrie. Les entreprises innovantes emploient aussi une main-d'œuvre plus qualifiée. La part des cadres est deux fois plus forte en moyenne dans les PME innovantes (de 6 % à 12 %).  Les PME coopèrent pour mieux innover La possibilité pour l'entreprise de mobiliser des compétences et des moyens financiers ou humains est un autre facteur influençant l'innovation. À une très large majorité, les entreprises innovantes déclarent avoir développé seules au moins une innovation technologique, que ce soit une innovation de produits (80 %) ou de procédés (71 %). Mais une part des innovations nécessite des travaux conjoints avec d'autres entreprises ou organismes. Une entreprise innovante sur trois (35 %) indique avoir coopéré avec d'autres pour ses activités d'innovation technologiques. Dans ce cas, la proximité géographique du partenaire est souvent privilégiée : plus des deux tiers des entreprises (69 %) déclarent au moins un partenaire régional et la quasi-totalité (96 %) un partenaire situé en France. Mais elles sont également une sur trois (35 %) à coopérer avec un partenaire international, principalement européen. Les entreprises collaborent généralement (86 %) avec des partenaires de marché, en premier lieu avec les fournisseurs (61 %) puis avec les clients (35 %). Presque la moitié d'entre elles (43 %) coopère également avec des partenaires institutionnels (universités ou organismes publics de recherche).  Les groupes d'entreprises et les pôles de compétitivité sont propices à l'innovation Lorsque les ressources ne peuvent être trouvées en interne, l'appartenance à un groupe ou à un réseau d'enseignes devient un atout. Plus des deux tiers des PME appartenant à un groupe innovent (69 %), alors qu'elles ne sont qu'une sur deux dans le cas contraire (52 %). Pour les PME de moins de 20 salariés, le taux d'entreprises innovantes passe notamment de 44 % à 55 % quand l'entreprise peut s'appuyer sur une structure plus large. Dans le même esprit, la proximité des entreprises au sein des pôles de compétitivité stimule la circulation de l'information et des compétences et peut favoriser ainsi la naissance de projets plus innovants. Parmi les PME qui font partie d'un pôle, 83 % innovent contre 56 % pour les autres. L'écart est plus marqué pour les innovations technologiques où 78 % des entreprises innovent contre 43 % pour celles qui ne font pas partie d'un pôle. Forme particulière de « coopération », la sous-traitance est propice à l'innovation. Les deux tiers (65 %) des PME ayant eu des activités en tant que preneur d'ordre ont innové. Pour elles, les innovations technologiques sont ainsi plus fréquentes (51 %) et, surtout, des innovations d'organisation (44 %) semblent nécessaires pour répondre à ces demandes. Mais ces innovations apparaissent plus liées à une stratégie de l'entreprise qu'à une adaptation immédiate aux exigences du donneur d'ordre. En effet, seule une faible part (30 %) déclare avoir innové spécialement pour fournir cette prestation, l'innovation étant exigée dans le contrat pour seulement 12 % de ces entreprises sous- traitantes.

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La réduction des coûts reste la motivation première des PME innovantes. La réduction des coûts (coûts de fonctionnement internes, coûts d'achat de matériaux ou de services) est la stratégie privilégiée par 57 % des entreprises innovantes. C'est plus que pour les entreprises non innovantes (44 %), pour lesquelles la réduction des coûts pour se reconstituer des marges reste également la priorité. Augmenter la flexibilité ou la réactivité de l'organisation de l'entreprise est aussi une préoccupation majeure pour 37 % des PME et pour 45 % des PME innovantes. Plus d'une entreprise innovante en organisation sur deux (55 %) place même cette stratégie comme la plus importante. Le niveau des investissements liés à l'innovation se maintient. Sur l'année 2012, la plus grande part de la dépense totale consacrée à l'innovation technologique finançait des activités de Recherche et Développement (63 % de la dépense pour celles réalisées en interne, plus 8 % pour la recherche externe). En Rhône-Alpes, les trois quarts des PME innovantes en produits et procédés déclarent en effet avoir été engagées dans des activités d'innovation en R&D menées au sein de l'entreprise. C'est légèrement plus qu'en France de province (71 %) ; ce taux atteint 72 % dans l'industrie et même 84 % dans le secteur des services. L'acquisition de machines perfectionnées, de logiciels ou d'équipements représente quant à elle le quart de la dépense et concerne aussi une large part des entreprises innovantes (63 %). Enfin la formation, dont le coût global reste faible, est une activité pourtant essentielle à l'innovation et déclarée comme telle par plus de la moitié des entreprises (57 %). La protection juridique de l'innovation n'est pas systématique. Pour maintenir ou augmenter l'avantage apporté par les innovations technologiques, seules 36 % des entreprises innovantes ont déposé un brevet, une marque ou un modèle.  Le soutien financier public est fréquent mais les aides sont souvent méconnues Un soutien financier public a été accordé à plus de la moitié (59 %) des entreprises innovantes en technologie. Les exonérations fiscales, dont le crédit d'impôt recherche, sont les aides financières les plus fréquentes puisqu'elles concernent 87 % des PME bénéficiaires. Les collectivités territoriales et divers organismes nationaux soutiennent aussi l'innovation, tout comme l'Union Européenne. 6,7 % des PME engagées dans des innovations technologiques entre 2010 et 2012 ont déclaré avoir bénéficié d'un soutien financier de l'Union Européenne. La moitié de ces entreprises ont participé au programme cadre de R&D. Hors exonérations, la part de ce soutien public est estimée à 6 % des dépenses d'innovation. La capacité d'autofinancement est utilisée par beaucoup d'entreprises (75 %) pour financer ces dépenses et un tiers (33 %) déclarent avoir recours à l'emprunt. Même en cas d'obtention de soutien public, une entreprise sur deux juge les démarches lourdes (50 %) et les conditions exigeantes (53 %). Enfin, les dispositifs d'information des entreprises trouvent toute leur légitimité puisque 58 % des PME attribuent l'absence de financement public à leur méconnaissance des aides auxquelles elles pouvaient prétendre.

4. Hypothèses d’évolution Hypothèse 1 - L’innovation est réservée aux grands groupes, les PME et les start-up qui innovent fortement sont rachetées très vite par les grands groupes Afin de financer leurs développements, les start-ups se sont tournées sans succès vers les fonds de capital- risque/développement, lesquels dans le domaine des procédés ont continué de mener une stratégie de minimisation de risques et donc d’investissement. Conjointement, de nombreuses start-ups ont connu des difficultés à repartir après des échecs. Elles sont désormais conduites à imaginer une collaboration au travers d’une acquisition par de grands groupes internationaux (après que des tentatives d’innovation ouverte n’aient obtenu les bénéfices attendus), grands groupes capables de mobiliser de nombreuses ressources et leur apporter moyens structurés et financement qui leur font défaut. D’autre part, les grandes entreprises qui ont mené des politiques de R/D en interne, réticentes jusqu’ici à externaliser avec le souci/l’obsession de protéger la propriété intellectuelle (le management de la propriété intellectuelle dans le cadre de l’innovation collaborative s’étant avéré être un obstacle), et de surplus atteintes du syndrome paralysant « not invented here » ont compris tout l’intérêt et le besoin qu’elles avaient à décloisonner et à insuffler de nouvelles pratiques et cycles d’innovation plus créatifs et plus réactifs au marché, avec une ouverture sur la culture digitale. Cette prise de conscience se traduit par le rachat de PME, de start-ups, créant une rupture dans leurs organisations, en réintroduisant la culture du risque et le goût de l’expérimentation sur les procédés. Ceci prend plusieurs formes :

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- la structure de la PME ou de la start-up reste indépendante du corps de l’entreprise (vs « acqui hiring » uniquement motivé par la récupération de talents qui laisse une image décevante tant la perte d’illusion des start- ups rachetées est grande…) - la création au sein de l’entreprise d’espaces de co-working ouverts et lieux de rencontre entre les spécialistes/mentors qui apportent l’expertise de l’entreprise aux personnels de la start-up. De part une forte convergence d’intérêt, nous assistons à une intégration importante de start-ups au sein de grandes entreprises, ces grands groupes associant leur expérience de l’industrie à la créativité et souplesse des start-ups, le tout assorti d’un financement et d’un soutien logistique indispensable. Les difficultés ou divergences (vision différente sur la maturité d’une innovation, gestion de la confidentialité ou de la propriété intellectuelle, différences de culture, perception différente de la valeur temps) sont levées parce que les grandes entreprises ont su constituer des équipes internes porteuses du projet de rapprochement et d’intégration de la start-up dans un climat de confiance. Pour résumer, beaucoup d’entreprises non sensibilisées à la transformation numérique, ont pris du retard et voient dans l’achat de start-ups l’opportunité de se rapprocher de la sphère bouillonnante de l’innovation… et de rester ainsi présentes parce que compétitives sur leur marché.

Hypothèse 2 - Les procédés innovants donnés en franchise Le développement de petites unités de production au plus près des utilisateurs ou des consommateurs est intervenu de façon quasi exponentielle. Ces petites unités extrêmement mobiles font appel à des équipements miniaturisés et très intégrés tels qu'imprimantes 3D et autres robots et automates d'assemblage. Ces équipements, à la pointe de la technologie, font l'objet d'une évolution permanente seulement maîtrisée par les concepteurs appartenant presque exclusivement à des grands groupes situés dans les anciens pays émergents. Les usines de proximité ont alors un statut de Franchisé et paye des royalties aux concepteurs pour bénéficier des « upgrades » de leurs équipements de production sous peine de se voir évincer de la course au progrès... ème comme cela pouvait intervenir avec les logiciels Microsoft à l'orée du 21 siècle. Il est clair que ce processus permet aux concepteurs de choisir et maîtriser ses Franchisés à qui il reste cependant la latitude d'adapter l'offre produit aux attentes sans cesse renouvelées des consommateurs. L'agilité donnée par ces équipements performants et polyvalents permet d'élargir l'offre produit et de satisfaire les nouveaux défis de la customisation, faisant ainsi oublier quelque peu la terrible dépendance dans laquelle se trouvent ces usines franchisées.

Hypothèse 3 - Le consommateur-zappeur est friand de produits différenciés ce qui nécessite des procédés flexibles Les progrès en termes d’éco-efficience et de recyclage (le taux approche les 92 %) ont été considérables. Aussi la course à l’innovation, au changement s’est accélérée dégagée de toute critique sur « la consommation pour la consommation, le jetable, et le caractère superficiel des effets de mode et de tendance ». Le consommateur affirme et assume sa volonté de bénéficier de produits les plus différenciés possibles et la fidélisation des clients n’est plus de mise. Les industriels sont de fait soumis à une flexibilité maximale et ne s’engagent que sur des petites séries ou des séries qui sont fortement différenciées dans les processus finaux. Le poids du design s’est considérablement renforcé pour créer des tendances fortes. Par ailleurs, certaines entreprises se sont spécialisées dans la phase de customisation des produits, captant la valeur ajoutée de production de masse. A l’inverse, d’autres industries couplent customisation avec toutes formes d’innovation - produits, gardant ainsi la main sur la relation au client final. Cette nouvelle donne impacte l’industrie productrice de biens de consommation. De fait, celle-ci modifie fortement ses cahiers des charges à destination des industries de biens d’équipement qui intègrent cette nouvelle donne dans leur process.

Hypothèse 4 - Renforcement des grappes de PME ème Les anciens « pôles de compétitivité » et autres « clusters » du début du 21 siècle ont cédé la place à des « pôles d’innovation éco-industriels », regroupant des entreprises de même secteur. Les aides de l’Etat ont disparu, relayées par un dispositif régional de financement des travaux de recherche débouchant sur des procédés innovants, uniquement versé aux pôles d’innovation.

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Les nouveaux pôles intègrent de multiples services pour leurs adhérents, comme la mise en réseau, l’aide à l’export, des formations professionnelles qualifiantes, mais aussi de fortes structures de recherche appliquée pour améliorer les procédés de fabrication. De vastes structures ont été conçues en collaboration avec les établissements d’enseignement supérieur. On y exploite les brevets issus des laboratoires de recherche associés, en les complétant d’outils de prototypage performants (utilisant largement l’essor de l’impression 3D). Un incubateur pour idées nouvelles est inclus dans l’offre de services, ainsi qu’un « accélérateur » à disposition des PME pour raccourcir les délais de mise en œuvre des nouveaux processus industriels. L’accompagnement financier est également compris dans le « package », organisant, pour le compte des adhérents, le montage des financements privés nécessaires. Par ce dispositif, les pôles investissent directement dans les innovations de procédés réalisées par ou pour les adhérents.

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Variable n°22 Polyvalence, flexibilité

1. Définition L’usine du futur s’organisera autour de l’organisation de la production. Celle-ci conditionne pour partie l’organisation du travail. Elle a connu des évolutions avec la conception de plus en plus modulaire des produits pour répondre à la demande de personnalisation de la part du client. Cette tendance concerne autant la production industrielle que la production de service. Cela a concouru à faire évoluer les modèles organisationnels. Deux tendances se dessinent : − Une extension des tâches liées à un poste (production, maintenance, qualité, traçabilité…) sachant que ces extensions sont identifiées dans le milieu industriel et beaucoup plus aléatoires dans les services du fait du besoin de réactivité à la demande client. − Une évolution des modes de management de la production avec là encore un double système. D’une part, une logique de responsabilisation sur le résultat et une autonomie importante sur les méthodes de travail (sans avoir toujours le contrôle sur les moyens nécessaires). D’autre part, dans certains secteurs, un surdéveloppement des consignes et du contrôle dans l’exécution des tâches.

2. Indicateurs 1. Diffusion des différents modèles d’organisation de la production (ou du travail ?). 2. Champ et précision du prescrit. 3. Logique de contrôle.

3. Rétrospective Il est difficile d’avoir des données qui permettent d’apprécier la diffusion des modes d’organisation du travail au cours des ans. Une étude européenne permet de caractériser quatre formes d’organisation et d’en connaître la répartition. Les « organisations apprenantes » Elles représentent 39 % des salariés. Elles se caractérisent par : - une plus grande autonomie dans les méthodes de travail, un apprentissage de choses nouvelles, la résolution de problèmes et une complexité des tâches ; - une sous représentation des contraintes de rythme, la monotonie et la répétitivité des tâches. Elles s’apparentent aux modèles suédois ou américains fondés sur le principe d’équipes autonomes de travail qui s’auto-organisent pour réaliser les objectifs établis avec la hiérarchie et dont les membres sont polyvalents sur l’ensemble des tâches des équipes. Ce type d’organisation est plus particulièrement développé dans les banques et assurances, services aux entreprises, électricité, gaz et eau. Pour les auteurs E. Lorenz et A. Valeyre, cette catégorie d’organisation appelée « apprenante » semble être plus le résultat a posteriori des variables utilisées. Cependant, la proportion de ce type d’organisation semble trop importante pour correspondre à une autre définition à laquelle Philippe Zarifian se réfère à savoir : une organisation qui permet de faire face à des événements soudains et inattendus grâce à un processus continu d’apprentissage en situation afin de limiter les temps improductifs des équipements.

Le lean-production Elle concerne 28 % des salariés. Travail en équipe, rotation sur des tâches différentes, la qualité (normes et contrôle à opérer) sont particulièrement développés en même temps que les contraintes de rythme sont fortes pour des tâches souvent répétitives et monotones. Confrontés à des situations d’apprentissage et résolution de problèmes, les salariés ont moins de marges d’autonomie que dans l’ « organisation apprenante ». La relative autonomie procédurale s’exerce sous de fortes contraintes de rythme, de respect de la quantité et de normes qualité. C’est le type d’organisation où les contraintes de rythme sont les plus élevées.

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Ce type d’organisation est plus diffusé dans les activités industrielles, notamment la fabrication de matériel de transport, électrique et électronique, l’industrie du bois, papier carton, les industries extractives et l’édition/imprimerie. Les ouvriers « artisanaux ou industriels » sont particulièrement concernés. La proportion de salariés travaillant en « lean production » diminue avec l’âge mais pas avec l’ancienneté.

L’organisation taylorienne Elle concerne 14 % des salariés. Ils sont soumis à de fortes contraintes de rythme, qui exécutent des tâches répétitives et monotones avec des normes qualité précises ; ceci avec une faible autonomie procédurale, un faible contenu cognitif et un autocontrôle peu répandu. Le travail en équipe et la rotation sont plus fréquents que la moyenne des organisations. Ce sont plutôt les entreprises du textile, habillement cuir, agroalimentaire, du bois et papier carton et la fabrication de matériel de transport qui utilisent cette forme d’organisation. Les ouvriers industriels et les salariés peu qualifiés y sont particulièrement soumis. Ce type d’organisation s’étend aujourd’hui dans les services.

Organisation de structure simple Elle concerne 19 % des salariés. Ce modèle se définit par une faible formalisation des procédures et un mode de contrôle par supervision directe exercée par la hiérarchie directe voir le patron dans les TPE. Les salariés travaillent avec peu d’autonomie, un faible contenu cognitif. Ils sont peu contraints par les rythmes de travail, avec des tâches peu répétitives mais relativement monotones. Le travail en équipe et la rotation des tâches y sont peu diffusés. Cette organisation est plus particulièrement présente dans les activités de services, notamment le transport terrestre, les services aux particuliers, l’hôtellerie restauration, les postes et télécommunications et le commerce. Elle concerne plus particulièrement les employés (commerces ou administratifs) et les salariés peu qualifiés.

Organisation par projet Au-delà des modes d’organisation décrits précédemment dans cette recherche, il faut ajouter l’organisation par projet qui s’est développée de manière diverse. Cette logique projet, qui va jusqu’à se concrétiser dans l’espace de travail (open space) se différencie de la logique fonctionnelle pour souvent prendre une forme hybride d’organisation dite matricielle. Une même personne peut simultanément être affectée à plusieurs projets avec des niveaux d’avancement différents. Ce type d’organisation peut s’accompagner soit d’une spécialisation, soit d’une polyvalence. Dans ce cas, il serait possible de considérer que ce type d’organisation fait partie du modèle « organisation apprenante » de l’organisation complémentaire qui est limitée dans le temps (quelques mois) et par les personnes concernées (cela s’ajoute à leur activité principale) pour la conception d’une nouvelle ligne ou produit.

Tendance générale Si l’on se réfère à ce qu’observent les intervenants dans les entreprises, il y aurait une montée du « lean production » et une bonne résistance des organisations tayloriennes voire leur extension dans certains secteurs du tertiaire. Dans le même temps, beaucoup d’entreprises ont développé différentes formes de polyvalence (du simple bouche-trou à une polyvalence s’inscrivant dans une gestion des compétences) pour avoir une réactivité plus grande à la demande et augmenter leur productivité. Cette appréciation empirique serait plutôt le fait des années 1980-90. Ensuite, cette évolution semble marquer le pas, voire régresser car 40 % des dirigeants d’établissements considéraient que les salariés n’étaient pas mobiles en 1998 et ce chiffre passe à 50 % en 2005. Et la proportion de ceux dans lesquels une majorité des salariés passeraient fréquemment d’un poste à l’autre, passe respectivement de 28 à 20 %.

Eléments généraux Prescrit et contrôle sont en partie le résultat des exigences auxquelles l’entreprise est plus ou moins soumise.

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En 1997, 19 % des dirigeants déclarent que leur entreprise est organisée en centres de profit et 22 % ont recours à des contrats clients/fournisseurs internes. Les démarches de qualité concernent un peu plus de 50 % des entreprises (30 % avec des normes ISO, et 20 % d’autres normes). En 1997, 34 % des entreprises sont certifiées ISO, 28 % poursuivent une « démarche de qualité totale » et 53 % exigent de leurs fournisseurs une garantie de qualité. Avec l’arrivée potentielle de la norme 26 000 concernant la responsabilité sociale des entreprises, les exigences pourraient être multipliées et/ou renforcées. Le client serait de plus en plus présent dans l’organisation, ce qui a pour impact les logiques de diversité des produits et en matière d’organisation de modèle du type « Juste à Temps ». Cependant, le contact avec le public (usagers, patients, élèves, voyageurs, clients, fournisseurs …) est aussi une réalité : 69,9 % pour l’ensemble, avec des écarts importants, plus de 65 % dans la plupart des secteurs hormis l’industrie (42 %) et l’agriculture (53,3 %). Ce contact se fait en face à face dans 3/4 des cas, et pour un peu plus de la moitié, c’est aussi par téléphone.

Fixation de l’objectif Il n’y a pas d’évolution notable entre 1998 et 2004. D’après le dirigeant, la proportion d’entreprises dont le travail à accomplir est donné par la description de tâches précises est de 70 %. Seuls 30 % le font par la fixation d’objectifs globaux. D’après les salariés, le hiérarchique indique seulement l’objectif dans environ 80 % des cas et dans 20 % il dit comment faire le travail. Cela peut paraître contradictoire mais peut-être que le niveau auquel il est fait référence n’est pas le même (le dirigeant vis-à-vis de sa hiérarchie d’un côté et le travail de production de l’autre). 30 % des salariés déclarent devoir atteindre des objectifs chiffrés précis. La proportion de salariés, qui disent « pouvoir faire varier les délais », augmente un peu globalement entre 1991 et 2005, avec une forte différence entre le secteur de l’industrie qui augmente sensiblement de 38 à 45 % (automobile 34 à 50 %) et le tertiaire où elle reste stable (34 %). Dans le même temps, la proportion de ceux qui « ne peuvent pas faire varier les délais » est globalement en baisse (37 à 31,5 %) et cela concerne tous les secteurs. Il faut noter également une tendance non quantifiable mais perceptible d’une prescription sous la forme de slogan du type « Zéro défaut, Zéro accident » qui est adressée de manière collective mais qui renvoie chaque individu à devoir s’inscrire dans cette ambiance de l’excellence, de l’idéal qui peut aussi se décliner de manière plus précise pour chaque salarié.

Méthode et mode opératoire 70 % des salariés déclarent régler eux-mêmes les incidents « mineurs ». Les autres se référent à leur hiérarchie. L’évolution est difficile à apprécier car les données sont différentes (le terme « mineur » a été supprimé de la question). En cas d’incidents, plus de 50 % des salariés les règlent personnellement. Cela reste stable. L’indicateur « Ils ne les règlent que dans les cas prévus à l’avance » est en hausse (15 à 20 % entre 1991 et 2005). Dans le même temps, les salariés font moins souvent appel à d’autres salariés. Est-ce une marque d’autonomie ou sont-ils dans l’impossibilité d’avoir de l’aide ? L’enquête ne le dit pas. 45 % des salariés déclarent devoir suivre des procédures de qualité strictes : 58 % parmi les ouvriers, 33 % parmi les employés, 78 % dans l’industrie, 39 % dans le tertiaire.

Mais globalement il semblerait que la prescription procédurale diminue particulièrement dans l’industrie. La proportion de salariés qui appliquent strictement les consignes est en baisse (41 % en 1991 35 % en 2009). Dans le même temps, la proportion de ceux qui n’ont pas d’ordre, de consigne ou de mode d’emploi à tendance à augmenter (17,5 à 21 %). L’industrie est le secteur où la contrainte procédurale est la plus forte, mais aussi où la baisse de cette contrainte est la plus nette (respectivement 45 % à 38 %, et 14 % à 18 %), l’automobile en est l’expression la plus nette (55 à 37 % et 7 à 13 %).

La prescription procédurale serait en augmentation dans le tertiaire. La proportion de salariés auxquels les supérieurs hiérarchiques disent comment faire leur travail est en hausse dans le tertiaire (15 % en 1991, 18 % en

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2005). Les plus fortes hausses concernent les activités immobilières (8 à 19 %) activités financières (12,6 à 16,2 %) et services aux entreprises (18,6 à 22,6 %). La proportion d’employés auxquels les supérieurs hiérarchiques disent comment faire leur travail est en hausse (19 % en 91 21,7 % en 2005) concernant particulièrement la fonction publique, l’administration des entreprises et le commerce. En baisse pour les services aux particuliers. Mais c’est proportionnellement les cadres qui subissent cette augmentation qui passe de 3 % en 91 à 5,3 % en 2005 c’est une multiplication par deux pour les cadres d’entreprise (2,4 à 4,9 %). Il en est de même pour les professions intermédiaires dont la proportion globalement passe de 8 à 12 %. Il n’y aurait pas lieu à opposer la prescription et l’autonomie notamment lorsque l’organisation permet le travail en groupe. « Si les ordres ou les consignes disent ce qu’il faut faire », ils sont appliqués moins strictement par les salariés travaillant en groupe, ce qui conduit à la figure de l’«autonomie encadrée» : les règles et normes de production sont interprétées comme des guides pour l’action, des supports d’apprentissage ou des moyens de coordination plus personnels. »

Le contrôle Le contrôle est effectué principalement par la hiérarchie intermédiaire (environ 60 % des établissements) et 20 % par la hiérarchie supérieure. Quant à la fréquence du contrôle, dans 60 % des établissements, elle est permanente, dans 20 % elle est intermittente, et pour 15 % occasionnelle. Le contrôle fait en partie par le processus technique est en augmentation (via travail à la chaîne ou obligation de suivre le rythme d’une machine ou d’un produit). Le nombre de salariés qui déclarent y être soumis, était de 6,8 % en 1984, il est de 10,5 % en 2005. Avec des différences selon le sexe (toutes CSP) : de 7,4 % à 14 % pour les hommes, de 5,9 % à 6,6 % pour les femmes. Mais pour la seule catégorie « ouvriers », cela donne respectivement 13 % à 25 % pour les hommes et 32 à 39% pour les femmes. Et pour les employés (catégorie qui croît de 25% et représente 30% de la population active en 2005), la proportion est multipliée par trois (1,8 % à 5,6 %). L’affichage dans les ateliers de l’avancement de la production, ou de la file d’attente téléphonique fait partie des nouvelles manières d’exercer un contrôle qui selon les cas remplacent ou s’ajoutent au contrôle hiérarchique. Les TIC élargiraient la capacité de contrôle en opérant un glissement (ou la capacité de faire les deux : double écoute par exemple) d’une surveillance directe des personnes vers la possibilité de contrôle a posteriori de la part de la haute hiérarchie ou de l’encadrement de proximité (exemple : l’entretien individuel d’évaluation peut se faire avec les résultats chiffrés personnalisés). Le suivi par GPS des chauffeurs livreurs, ou le « voice picking » pour les préparateurs de commande (activité de logistique qui devrait croître de manière importante dans les années à venir) sont aussi d’autres formes de contrôle. Dans les services, le client est aussi mobilisé pour effectuer une forme de contrôle notamment via les questionnaires de satisfaction. Les indicateurs, prédéfinis et suivis par tous, se généralisent y compris dans le tertiaire. Souvent dénoncés, parce que n’étant pas bien construits, les indicateurs semblent néanmoins suivis par les salariés (y compris pour s’en plaindre) et ce d’autant qu’une prime (même si le lien n’est pas toujours très explicite) est souvent simultanément mise en place. Indicateurs d’une part, démarche qualité d’autre part, incitent à garder des traces de l’activité, soit du processus de fabrication (incidents, vérification des critères qualité, de la procédure, …) soit du résultat. De plus en plus de salariés participent aux recueils de ces données et pas seulement via des outils informatiques, mais aussi sur papier. On constate que les indicateurs influencent l’activité des salariés. Ces derniers pouvant travailler pour l’indicateur en perdant en partie de vue l’objectif de production réel. Cela peut entraîner des tensions et des contradictions entre salariés. La « falsification » des indicateurs est quelquefois perceptible et tend à dissimuler ce qui n’est pas conforme.

Organisation et TIC Les TIC : un outil de rationalisation et de productivité Ce ne serait pas tant la nature du matériel technique que l’ensemble « système technique/organisation/procédures » qui modifierait le fonctionnement de l’entreprise, l’impact sur les salariés étant surtout fonction des conditions dans lesquelles elles sont mises en œuvre. Les entreprises arrivent à des modes d’organisation comparables avec des trajectoires techniques différenciées.

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Les TIC ne remplacent pas seulement les règles traditionnelles, elles peuvent inciter à redéfinir le domaine principal d’activité (favorisant l’externalisation ou non de certaines fonctions). Les TIC irriguent l’ensemble des fonctions de l’entreprise et participent au mouvement de rationalisation des entreprises avec les logiciels de gestion intégrées qui assurent à la fois la fonction d’organisation de production ou de service mais aussi celle de contrôle. Elles touchent plus particulièrement les services commerciaux et les hiérarchies intermédiaires en modifiant l’organisation locale des activités et le rapport de l’homme au travail. Dans la mesure où une des fonctions principales de la hiérarchie intermédiaire consistait à traiter, filtrer, et restituer les différentes formes d’informations, les TIC la modifient. Il peut s’opérer un aplatissement de la ligne hiérarchique à mesure que les TIC sont introduites (cf. ci-avant § le contrôle).

Un outil pour construire une typologie de produits/services Du fait de l’informatisation croissante des processus et de leur automatisation, « le Central a plus de visibilité que l’Opérationnel. Ce qui avant était une expertise (ex. planification de la production) est devenu un processus automatisé largement défini par les fonctions d’Organisation » (ex. les centres d’appel). De ce fait, cela permet aux services organisations (via le marketing, conception et méthode) de préciser les caractéristiques des produits afin de répondre à la demande des clients, et simultanément, de présenter aux vendeurs en temps réel le profil et la demande du client, le salarié se trouve à devoir faire correspondre la demande du client avec des cas préconstruits.

Les limites des TIC Les TIC offrent des possibilités d’information descendante et ascendante sans intermédiaires. Mais, cette liberté trouve ses limites par le besoin de confidentialité de certaines informations. Les solutions techniques n’étant pas toujours en mesure de les discriminer.

4. Hypothèses d’évolution

Hypothèse 1 :- Le retour au taylorisme Le Taylorisme repose sur la division verticale et horizontale du travail en tâches rudimentaires et répétitives et sur le paiement des employés au rendement avec contrôle des temps le tout encadré par une hiérarchie fonctionnelle. Il y a certes eu des aménagements, des regroupements de tâches, des groupes autonomes et des cercles de qualité, qui ont été autant d'essai de dépassement des principes taylorienne, mais ils n’ont pas été cohérents. Au contraire, le taylorisme est un véritable système qui saisit le travail dans ces différentes dimensions : techniques, économique ou social. La parcellisation des tâches, la spécialisation , l'individualisation, la division des tâches, sont revenue en force dans le monde du travail. Le retour au taylorisme a permis aux entreprises de réaliser des gains de productivité considérables et un allègement significatif des coûts de production unitaires. La société de consommation de masse de produits différenciés redémarre, sans plus se préoccuper des destructions écologique et des diminutions des ressources naturels. Ce n’est plus le chef d’entreprise, mais le marché qui impose le retour à la taylorisation. « C’est le client qui constitue la norme ». Le retour du Taylorisme fait son beurre sur les trois millions de chômeurs qui guettent le premier poste disponible. « Si t'es pas content, il y en a dix qui attendent. » Mais avec le retour du taylorisme réapparait également l’idée de lutte des classes.

Hypothèse 2 -« La dolphin strategie » ou la polyvalence associée Après des décennies de terrorisme juridique séparant ceux qui dirigent (les propriétaires) et qui exécutent (les salariés), une approche fonctionnelle de la réalité productive a mis en évidence que la performance de la chaîne de valeur n'est pas un acquis donné une fois pour toute et reposait sur la coopération et est le résultat d une attention de tous les instants pour éviter les dysfonctionnements et diminuer les risques de conflits tant avec les salariés qu’avec les clients. Dans un contexte de fluctuation de la demande et de concurrence, les entreprises adoptent la stratégie du dauphin, capables de surfer sur la vague du changement, en anticipation en prenant en compte les aspirations de développement et de sécurité de chacun, en donnant du sens et de la reconnaissance personnelle aux hommes travaillant dans les entreprises. Les Trois principes organisateurs et directeurs ont

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bouleversé la production, le respect du client et de l’environnement, le respect des personnes et de leur implication, l’auto-audit comme outil de prévention au cœur des contrôles de gestion. Des comités d’organisation de la production composés de représentants de toutes les parties prenantes ont pour mission d’étudier les risques liés à l’environnement du travail, de proposer des améliorations aux conditions de travail et leur incidence sur le service rendu aux clients, de participer à la conception de plans de formation continue en lien avec les audits réalisés pour améliorer la plasticité de l'organisation pour la rendre plus agile C’est une stratégie du gagnant –gagnant, mettant les organisations en capacité de se remettre en cause, d’évoluer consciemment et résolument vers la meilleure version de chacun, car chacun se sait responsable dans un partage équitable des résultats mais aussi des difficultés. Chacun est un acteur de l’entreprise, responsable avec des marges de manoeuvre et d’initiative, en parfaite synchronie entre ce qu‘il fait, ce qu’il pense, pourquoi il est là et ce qu’il est ! Des formules multifactorielles de participation aux résultats ont été mises en place, associant à côté des indicateurs de rentabilité classique, des indicateurs liés à la diminution des risques constatés et à l’amélioration du service rendu au client pour s’assurer que le service rendu au client et le respect des salariés soient loin de s’opposer.

Hypothèse 3 - Artisanat industriel et industrie artisanale L’organisation des équipes de production a dépassé le salariat et s’appuie sur des petits groupes se gérant eux- mêmes. Ces groupes sont constitués « d’artisans », successeurs des tâcherons du XIXème siècle, Beaucoup ne sont plus salariés, mais « auto entrepreneurs ». Ils reçoivent des « commandes » des groupes voisins donneurs d’ordre, qu’ils traitent selon un cahier des charges et un contrat précis (coûts, délais, qualité). Ils livrent leur produit fini au groupe suivant (client), organisé selon les mêmes principes. Le groupe d’artisans ainsi constitué se constitue une « raison d’être » et organise le fonctionnement de ses membres en fonction des compétences, aptitudes et potentiels de chacun, en vue de satisfaire cette raison d'être. Chaque groupe dispose, de la part de l’entreprise, d'une large autonomie en vue de satisfaire ses objectifs. Cette organisation permet à l’entreprise, sorte de supra-groupe, de bénéficier du savoir ambiant, de fonctionner avec davantage de transparence et de susciter plus de motivation dans les équipes.

Hypothèse 4 -De la polyvalence à l'hypervalence La vocation des entreprises à se regrouper sur un même territoire afin de mutualiser tout ou partie de leurs activités ou de satisfaire aux concepts de l'économie circulaire favorise l'émergence de nouveaux emplois partagés. Fort de leurs expériences passées, les anciens Groupements d'Employeurs, rebaptisés GEM Plus, proposent leurs services aux entreprises d'un même territoire, qu'elles appartiennent ou non au même secteur d'activité. Forme ultime de la flexisécurité, ces nouveaux emplois se déclinent au gré des fluctuations d'activité des usines de plus en plus courantes ainsi que des saisonnalités inhérentes à certains secteurs. Il n'est pas rare alors de voir ces nouveaux salariés exercer alternativement dans une usine ou une autre, occuper un emploi agricole saisonnier et rendre service dans le tourisme. Cette exigence d'une polyvalence totale est, bien entendu, soutenu par un effort de formation permanent ; on intègre ici le concept d'alternance continue, pierre d'angle de cette nouvelle forme de flexibilité qu'est l'Hypervalence.

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Variable n°23 Vie sociale

1. Définition La vie sociale concerne l’organisation, les modalités de vie internes à l’entreprise en dehors des temps et des activités strictement organisées uniquement autour du processus productif.

2. Indicateurs − Organisation de la vie sociale. − Moyens dédiés à la vie sociale. − Acteurs de la vie sociale.

3. Rétrospective On peut aborder la question de la vie sociale dans l’entreprise sous deux angles : le premier concerne les règles du droit du travail organisant pour partie cette vie sociale dans l’entreprise, le second concerne la manière dont on peut par une approche sociologique aborder l’entreprise comme une communauté de vie. Cette dernière approche n’apparaît comme un sujet de recherches majeur, en effet les travaux sont peu nombreux aussi bien sur l’entreprise et à fortiori sur l’entreprise industrielle.

3.1. L’aspect réglementaire de la vie sociale Si elle emploie au moins 50 salariés, l'entreprise doit mettre en place un comité d'entreprise (CE). Ce comité est composé de représentants du personnel et présidé par l'employeur. Il a des attributions économiques mais aussi sociales et culturelles. Pour mener à bien ses missions, il dispose de moyens financiers versés par l'employeur .

Composition Le comité d'entreprise comprend : • l'employeur (ou son représentant), qui le préside et qui peut se faire assister de 2 collaborateurs, • une délégation du personnel composée de représentants du personnel élus par les salariés, • le délégué syndical (si l'entreprise a moins de 300 salariés) ou un représentant syndical par syndicat représentatif (si l'entreprise 300 salariés ou plus). Missions relatives au fonctionnement de l'entreprise Compétence générale du CE Le CE assure l'expression collective des salariés. Il permet la prise en compte de leurs intérêts dans les décisions relatives à la vie dans l'entreprise. Il formule ou examine, sur demande de l'employeur, toute proposition de nature à améliorer : • les conditions de travail, d'emploi et de formation professionnelle des salariés, • leurs conditions de vie dans l'entreprise, • et les conditions dans lesquelles ils bénéficient de garanties collectives de protection sociale complémentaires. Sur un certain nombre de sujets, le CE est obligatoirement consulté par l'employeur avant toute prise de décision. Il peut s'agir de consultations annuelles ou de consultations ponctuelles et spécifiques.

Information et consultations du CE Le CE est informé et consulté sur l'organisation et la marche générale de l'entreprise, notamment sur les sujets suivants : • mesures pouvant affecter le volume ou la structure des effectifs, la durée du travail, les conditions d'emploi, de travail et de formation professionnelle, • orientations stratégiques de l'entreprise (et leurs conséquences sur l'activité, l'emploi, l'évolution des métiers et des compétences, l'organisation du travail, le recours à des sous-traitants, à l'intérim, aux contrats temporaires et aux stages),

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• documents comptables et financiers, • politique de recherche et introduction de nouvelles technologies, • projets de restructuration et de compression des effectifs, • intéressement, participation et épargne salariale, • modification de l'organisation économique ou juridique de l'entreprise, • utilisation du crédit d'impôt compétitivité emploi (CICE).

Le CE est également informé et consulté sur : • les problèmes généraux sur les conditions de travail dans l'entreprise (organisation et temps de travail, qualifications et rémunérations...), • la formation professionnelle et l'apprentissage dans l'entreprise (orientations de la formation, plan de formation annuel ou triennal, objectifs en matière d'apprentissage, nombre et suivi des apprentis...), • en cas de procédure de sauvegarde, de redressement ou de liquidation judiciaire de l'entreprise.

Le CE reçoit ainsi notamment : • chaque trimestre, des informations sur les commandes, la situation financière, la production et les retards éventuels dans le paiement des cotisations sociales, • chaque année, un rapport sur la situation économique de l'entreprise.

À noter : Le CE peut se faire assister par divers experts, et notamment par un expert-comptable pour l'examen des orientations stratégiques de l'entreprise ou en cas d'opération de concentration.

Avis donnés par le CE À l'occasion de ces consultations, le CE émet des avis et des vœux. Le délai imparti au CE pour rendre ses avis est fixé en accord avec l'employeur. À défaut d'accord, le CE a un mois (sauf cas particuliers où ce délai peut être plus long) pour rendre ses avis, à partir : • de la communication par l'employeur des informations nécessaires à sa consultation, • ou de la mise à disposition des informations dans la base de données économiques et sociales de l'entreprise (qui contient des informations sur les orientations stratégiques de l'entreprise, l'utilisation du CICE et les informations transmises de façon répétée au CE). Passé le délai d'un mois, le CE est supposé avoir été consulté et rendu un avis négatif. L'employeur doit rendre compte de façon argumentée des suites données aux avis et vœux du CE.

À savoir : les entreprises de 300 salariés et plus ont jusqu'au 14 juin 2014 pour mettre en place leur base de données unique et celles de moins de 300 salariés jusqu'au 14 juin 2015.

Bilan social Si l'entreprise comporte au moins 300 salariés, l'employeur soumet chaque année au CE un bilan social. Le bilan social est un document qui récapitule les principales données chiffrées permettant d'apprécier la situation sociale de l'entreprise, d'enregistrer les réalisations effectuées et de mesurer les changements intervenus au cours de l'année écoulée et des 2 années précédentes. Il comporte des informations notamment sur l'emploi, les rémunérations et charges accessoires, les conditions de santé et de sécurité, les relations professionnelles, les conditions de vie des salariés et de leurs familles dans la mesure où ces conditions dépendent de l'entreprise.

Droit d'alerte du CE En cas de situation économique préoccupante de l'entreprise, le CE peut exercer un droit d'alerte et demander : • des explications à l'employeur qui doit répondre, • une expertise auprès des tribunaux, • la récusation du commissaire aux comptes. Le CE peut également exercer un droit d'alerte s'il constate un recours abusif (ou un accroissement important) des contrats à durée déterminée (CDD) ou du travail temporaire dans l'entreprise. Dans cette situation, le CE peut saisir l'inspection du travail.

Missions sociales et culturelles

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Le CE assure, organise et développe, en faveur des salariés de l'entreprise, des retraités, préretraités et de leur famille et des stagiaires des activités sociales et culturelles. Il peut s'agir notamment des actions suivantes : • prise en charge de tout ou partie d'une mutuelle de santé, • prise en charge de tout ou partie d'une cantine, • mise en place de jardins familiaux ou de crèches, • activités sportives ou de loisirs (colonies de vacance, séjours...), • activités culturelles (bibliothèque, tarifs préférentiels pour des spectacles ou des musées...), • prise en charge d'une partie du coût de services à la personne (garde d'enfant, assistance et soins à domicile, aide ménagère...). L'employeur verse chaque année une contribution pour financer les institutions sociales du CE.

3.2. L’entreprise et la vie sociale appréhendée en mobilisant le concept de communauté. Par cette approche, Dominique Bessire et Hervé Mesure souhaitent proposer une nouvelle vision, plus englobante de l’entreprise visant à dépasser des visions parcellaires économiques d’une part et sociologiques d’autre part. Les extraits ci-dessous permettent de comprendre cette approche originale. « Le concept de communauté a incontestablement des dimensions sociologique et politique. Mais avant de les évoquer, les auteurs rappellent quelques définitions. Ainsi Dans son Dictionnaire des racines des langues européennes , Grandsaignes d’Hauterive (1994) nous indique que le mot communauté est formé à partir de deux racines indo-européennes : kom qui a donné en latin cum , décliné en français sous forme de com-, con- et co-, qui signifie être ensemble, et mei qui suggère une idée d’échange, de fonction à accomplir, de charge à assumer et qui a donné en latin munis : qui accomplit sa charge, immunis : exempt de charge, communis : qui partage les charges et finalement communio : communauté . Le dictionnaire Le Robert (1980) repère deux sens principaux au mot communauté : 1) « état, caractère de ce qui est commun » (exemples : communauté d’intérêts, d’idées, de devoirs, d’espérance) ; 2) « groupe social caractérisé par le fait de vivre ensemble, de posséder des biens communs, d’avoir des intérêts, un but commun » (exemples : communauté de travail, communauté conjugale), et mentionne pour finir les communautés religieuses. En philosophie politique, la communauté est définie comme « un ensemble de sujets qui sont liés par un ou plusieurs facteurs de différente nature (ethnique, territoriale, linguistique, religieuse, économique, politique, etc.) qui les amènent à avoir plus de relations entre eux » (Vattimo, 2002) qu’avec les autres membres de la Cité ou de la société . Les membres d’une communauté partagent une histoire, des valeurs, des modes de vie ou des intérêts communs. Il démontre les parallèles entre entreprise et communauté d’un point de vue étymologique. L’exploration du mot communauté dans différents champs, étymologique, politique et sociologique, fait apparaître des parentés avec les caractères traditionnellement attachés à l’entreprise. L’histoire du mot entreprise tout comme le droit des sociétés, semblent eux aussi autoriser une réflexion sur l’entreprise en termes de communauté. De l’exploration du mot communauté, nous retenons trois éléments qui manifestent une proximité entre entreprise et communauté. Tout d’abord, la communauté apparaît comme une des formes possibles de groupements humains, plus large que la famille, plus petite que la nation ou la société, différente du clan ou de la bande. Ce groupement est fondamentalement « intermédiaire » puisqu’il englobe des groupements plus petits et s’insère dans d’autres plus larges. L’entreprise fait à l’évidence partie de ces groupements intermédiaires structurés. En second lieu, le mot communauté connote le fait d’être ensemble, ou pour reprendre l’expression de Zarifian (1996), il renvoie à une « mise en commun » d’individus. Une communauté est faite des interactions entre ses membres. Ces interactions génèrent un « nous » qui est plus que la somme des individus. Utiliser le mot communauté, c’est chercher ce qui est « commun » entre les membres de la communauté, quelle que soit sa nature, en sachant que l’intérêt économique stricto sensu n’est pas généralement considéré comme l’élément commun le plus significatif. Une communauté est plus que l’agrégation d’intérêts communs ; elle a des dimensions identitaires qui se manifestent notamment dans le but, la mission, qui l’anime de manière explicite ou implicite. L’entreprise, là aussi, apparaît comme un lieu d’interactions qui donne naissance à une nouvelle identité, mais aussi comme un projet au service d’une mission. Le sociologue Norbert Alter (1996, p. 93) de son côté souligne que « la réalisation des objectifs

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fixés par les dirigeants ne devient effective qu’à partir du moment où elle parvient à intégrer à sa cause un collectif humain, défi ni par son intérêt, son identité ou par ses normes de comportement » ce qui renvoie à la question de ce qui est « commun » dans le contexte de l’entreprise et nécessaire à sa bonne marche. En troisième lieu, la littérature, sociologique, théologique ou philosophique, souligne l’immense diversité des formes de communauté, en insistant sur leur absolue singularité. Même si nous nous épuisons à construire des typologies d’entreprise permettant de les classer en groupes homogènes, il nous faut reconnaître là aussi que chaque entreprise tout comme chaque communauté est éminemment singulière. » Le droit peut aussi appuyer la thèse de l’entreprise comme communauté de personnes engagées dans un projet. Dans le cadre du droit français des sociétés, les associés font « société » parce qu’ils sont réunis autour d’un but commun qui les dépasse individuellement et qui fonde la notion d’intérêt social opposable à toutes les parties prenantes, y compris les actionnaires. Or l’existence d’un but commun rassembleur est un des traits qui peut caractériser la communauté. Au-delà de ce but commun, une communauté peut aussi être définie par ce qu’ont en commun (mode de vie, patrimoine, culture, valeurs, territoire, etc.) un ensemble, limité, d’hommes et de femmes. Le droit des sociétés, du moins dans la forme archétypale de la SA, parle d’ailleurs explicitement d’ affectio societatis , c’est-à-dire d’un sentiment moral qui est censé vivifier la société. Le droit des sociétés apporte donc au moins deux éléments : un but commun et des « affinités électives », caractéristiques habituellement associées à la notion de communauté. Le droit du travail est encore plus suggestif puisque l’entreprise est prise en compte comme une collectivité d’hommes et de moyens qu’il revient à l’employeur de diriger. Le concept de communauté, longtemps méconnu des sciences de gestion, y rencontre aujourd’hui un intérêt de plus en plus marqué . Une revue succincte des champs de recherche où il est mobilisé permet de relever les caractéristiques attribuées à un type particulier de communauté, la communauté de pratique, mais met aussi en évidence la difficulté qu’il y a concevoir l’entreprise elle-même comme communauté per se . Dans une moindre mesure, le mot communauté est mobilisé dans le champ de la responsabilité sociale de l’entreprise . La « communauté » prend alors place aux côtés des autres parties prenantes, au même titre que les clients, les actionnaires, les fournisseurs et clients, les actionnaires… Elle forme le milieu au sein duquel l’entreprise déploie ses activités opérationnelles, sur lequel elle doit minimiser son impact et auquel elle doit éventuellement rendre des comptes. A noter que le concept de communauté dans ce cadre reste relativement flou, voire confiné à un usage incantatoire, aucun chercheur ne s’étant, à notre connaissance, aventuré à définir les contours de cette ou de ces communauté(s). Au terme de cette brève exploration, qui justifie selon nous de concevoir l’entreprise comme une communauté, nous nous risquons à proposer notre définition de l’entreprise : une communauté de sujets libres et responsables, parties prenantes à un projet qui a pour finalité la création d’un mieux . La première partie de la définition fait référence à la racine étymologique du premier élément du mot communauté, le kom- qui évoque le fait d’être ensemble, la seconde partie mobilise la racine du deuxième élément, le mei- qui évoque la mission. Nous explorons ci-après les implications de cette définition et de cette prise de position. L’irréductible dimension politique de l’entreprise communauté : implications pour la gouvernance A partir du moment où les parties prenantes, salariés, clients, fournisseurs, riverains… mais aussi dirigeants et actionnaires, se voient considérées comme des sujets libres et responsables qui tous investissent à des degrés divers des ressources dans l’entreprise, il n’est plus possible de faire l’impasse sur la dimension politique de l’entreprise. L’analyse menée dans la 1ère section de cet article l’a également mis en évidence, le concept de communauté a partie liée avec le politique au sens le plus large. Il ne s’agit pas d’une découverte mais d’une redécouverte : à la fin des années soixante-dix et au début des années quatre-vingt, Crozier et Friedberg (1981) mettaient en évidence le jeu politique des acteurs dans l’entreprise tandis que Jarniou (1981) proclamait dans le titre même de son livre que l’entreprise était un « système politique »15. Reconnaître cette réalité amène à envisager la gouvernance des entreprises sous une toute autre perspective que celle qui règne en maître dans les différents codes dits de « bonnes pratiques » et a pour objectif unique la maximisation de la richesse de l’actionnaire. Les effets pervers d’une gouvernance des organisations fondée sur cette vision utilitariste apparaissent chaque jour plus manifestes, tant du point de vue des pratiques que de la théorie. La multiplication des scandales financiers (faillites frauduleuses, manipulations comptables, envolée des rémunérations des dirigeants, délits d’initiés, crise financière dite des subprimes …) démontre le caractère de prophétie auto-réalisatrice de l’hypothèse d’opportunisme ; la prolifération des tentatives de dépassement théorique (perspective partenariale

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contre perspective actionnariale, approche sociocognitive contre approche disciplinaire, théorie de l’intendance contre théorie de l’agence, attention portée à la responsabilité sociale des entreprises, raisonnement en termes de conventions) ne fait que souligner la faillite du paradigme dominant. Penser l’entreprise comme communauté permet selon nous de sortir de ces impasses, d’articuler universalité et singularité, gouvernance et responsabilité sociale de l’entreprise et de repenser le concept de propriété. La communauté a, à la fois, une dimension universelle (son humanité), mais aussi une dimension qui lui est propre : elle rassemble autour de valeurs, d’un sens commun qui lui sont spécifiques ; la communauté a une histoire, elle est enracinée dans le temps, dans l’espace, dans une culture. Comme nous l’avons vu plus haut toutes les références au mot communauté insistent sur cette dimension culturelle. Par ailleurs, prendre en compte la dimension projet inhérente à l’entreprise-communauté, c’est aussi affirmer l’irréductible singularité de chaque entreprise et de sa gestion à une époque où la standardisation s’empare chaque jour davantage de l’entreprise et de ses modes de gestion (gouvernance, comptabilité, responsabilité sociale, qualité…), au travers de la prolifération de normes, de codes et de principes à la légitimité fragile. Cette singularité concerne notamment la manière dont travaillent ensemble les membres de l’entreprise et dans le projet qui les « met en commun ». Ils nous paraissent être les fondements « d’un partage de sens » (Zarifian, 1996, p. 163). Tout dispositif de gouvernance devrait en tirer les conséquences : il ne s’agit pas d’appliquer des principes uniformes, mais des principes universels dont les communautés visées par ces principes puissent se saisir pleinement (et non dans la seule optique répressive du comply or explain ). La gouvernance est nécessairement contextualisée : une entreprise familiale est différente d’une entreprise managériale ou d’une coopérative, une entreprise française d’une entreprise égyptienne ou américaine, une grande entreprise d’une PME, une entreprise minière d’une entreprise de haute technologie. Par ailleurs, communauté humaine, l’entreprise accueille en son sein de multiples communautés, dirigeants et actionnaires, mais aussi hommes et femmes, jeunes et vieux, financiers et commerciaux, chrétiens et musulmans, joueurs d’échecs et basketteurs. A l’opposé d’une vision totalitaire qui s’efforce de gommer tout particularisme, ou d’une vision « communautariste » (au pire sens du terme) qui ne considère les personnes que sous l’angle de leur appartenance à une communauté unique, une vision communautaire s’attache à prendre en compte les spécificités d’une personne dans son appartenance à de multiples communautés. L’enjeu de la gouvernance devient alors de faire émerger le sens commun, au sens premier du terme, le con-Sensus, qui permettra de rassembler l’ensemble de ces personnes.

Communauté humaine, l’entreprise s’inscrit dans des communautés plus larges, locales, régionales, nationales, mondiales et interagit avec d’autres communautés (les riverains, les ONG, les institutions politiques…). La régulation de la gouvernance doit donc être simultanément pensée à ces différents niveaux et intégrer l’articulation avec les différentes communautés, qui constituent autant de parties prenantes. La gouvernance trouve ici une articulation logique avec le concept de responsabilité sociale de l’entreprise, à condition toutefois de sortir de la vision unilatérale de la responsabilité qui préside aux discours dominants : dans le champ de la gouvernance des organisations, les dirigeants doivent rendre des comptes aux actionnaires (gouvernance actionnariale) ou aux parties prenantes (gouvernance partenariale) ; dans celui de la responsabilité sociale de l’entreprise, c’est l’entreprise qui est responsable devant les parties prenantes. Dans la vision que nous défendons, la responsabilité est partagée (Ricoeur, 2002) , chaque personne ou groupe de personnes étant appelée à l’assumer à la mesure des prérogatives qui sont les siennes. La responsabilité des actionnaires (Pérez, 2002) doit donc être pleinement intégrée dans l’approche que nous proposons, si nous voulons sortir de la schizophrénie qui règne au sein des sciences de gestion lorsqu’il s’agit de penser responsabilité sociale d’un côté et gouvernance des organisations de l’autre. Davis et al. (1997, p. 29) défendent le même point de vue lorsqu’ils indiquent que dans la perspective dessinée par la théorie de l’intendance, le mandant doit tout autant que l’intendant répondre de ses décisions. Il importe que les institutions politiques prennent également leurs responsabilités. Le développement d’un droit « flexible » (Carbonnier, 2001), d’un droit « souple » (Thibierge, 2004), n’est pas nécessairement néfaste, mais la généralisation d’un droit « mou », a-démocratique, comme celui qui a donné naissance à la plupart des codes de bonne gouvernance, nous semble devoir être fermement combattue. Nous rejoignons pleinement Pesqueux (2006) lorsqu’il s’élève contre la désinstitutionalisation des institutions. Notre réflexion sur la conception de l’entreprise comme communauté n’en est qu’à ses prémisses. Au stade actuel de notre enquête, elle nous paraît cependant ouvrir de nouvelles pistes pour réinterroger la nature, l’organisation, les fonctionnements et la place dans notre société des entreprises d’aujourd’hui.

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Dans l’immédiat, notre approche de l’entreprise en termes de communauté interpelle la gouvernance « canonique » en ce qu’elle réintroduit la vieille question de la démocratie dans les organisations. Comme l’ont défendu Sainsaulieu et al. (1983), cette question va au-delà de l’organisation de la direction de l’entreprise. Dans le contexte sociétal actuel, elle nous paraît conditionner, dans un premier temps, la performance et l’acceptabilité sociale des entreprises, dans un second temps, leur capacité d’adaptation puisque la « démocratie (en organisation) est fondamentalement une affaire d’expression au double sens du terme : celui de la parole et celui de la créativité » ( id. , p. 11). Notre conception de l’entreprise comme communauté de sujets ouvre également la question d’une lecture spirituelle de l’entreprise (la prise en compte de sa dimension verticale) en complément des lectures scientifiques habituelles. Cette approche peut paraître surprenante dans un contexte français. Pourtant elle est déjà très présente chez des auteurs comme Follett (1942), Maslow (2004), Etzioni (1998) et aussi dans les travaux d’autres chercheurs francophones, notamment canadiens (par exemple Pauchant et al , 2000). Il faut aussi rappeler que dans la plupart des pays occidentaux, notamment aux Etats-Unis, les facultés de business côtoient celles de théologie, d’humanités ou de philosophie, et surtout »

4. Hypothèses d’évolution

Hypothèse 1 - Une vie sociale basée sur une relation très formatée La judiciarisation des relations sociales met en exergue un système très règlementé. Le cadre, dans lequel évoluent le salarié et son employeur, est très sécurisé dans le sens où la part de subjectivité est réduite à sa plus simple expression. Le raisonnement repose avant tout sur des éléments factuels auxquels répondent les textes validés par le législateur. Un gros travail d’appréciation, des différentes situations du monde du travail, a été produit. C’est le fruit d’un véritable dialogue social qui s’est émancipé des contingences d’appareils. L’intérêt des salariés et l’intérêt des employeurs sont clairement exposés. De cette réflexion où l’utopie côtoie la réalité et le pragmatisme, les partenaires sociaux construisent les réponses aux contextes de crises susceptibles de se produire. Le recours au juge est toujours possible, cependant ce modèle très formaté réduit cette hypothèse en favorisant la conciliation qui conduit les deux parties à reconnaître les obligations et les devoirs de chacun. Une solution rapide est ainsi trouver tout en fluidifiant les relations sociales.

Hypothèse 2 - La recherche d'une autre dimension sociétale...... ou « l'usine à la carte » La volonté d'imposer la parité absolue dans les usines a favorisé l'émergence d'une organisation du travail societo-modulable, mouvement renforcé par la montée en puissance de emplois mixtes (usine/véhicule/domicile). L'organisation du travail reste juridiquement encadrée mais il privilégie pour chaque salarié(e) la capacité de choisir son menu de travail ; les horaires journaliers, le nombre de jours travaillés dans la semaine voire la saisonnalité sont choisis par le salarié(e) en fonction de sa vie personnelle. De même le salarié peut-il choisir de pratiquer son activité professionnelle respectivement à l'usine, dans son véhicule ou à son domicile. Dans ce cadre l'employeur a vocation à satisfaire ce travail à la carte en mettant à disposition les moyens fixes ou itinérants nécessaires à la réalisation du travail. Développé dans un premier temps sur les emplois indirects, le travail à la carte a progressivement gagné les postes de production en s'appuyant sur les « Accumulateurs de travail » qui permettent d'apporter sa force de travail en possible décalage par rapport aux besoins du processus industriel. L'équilibre personnel favorisé par le travail à la carte conduit à des gains de productivité de plus de 30 % et une utilisation plus étendue et plus rationnel des équipements de production. Les surcoûts demandés par cette nouvelle organisation du travail sont ainsi très rapidement amortis.

Hypothèse 3 - l'absence de vie sociale, l'entreprise est devenue un nœud de contrats. Le salariat, apparu très tôt dans l'histoire occidentale, ne s'est vraiment développé qu'à partir de la fin du XVIIIème siècle, avec la naissance du capitalisme industriel. Mais, sous la pression de la montée du chômage en Europe, il a nettement reculé dans les années 2015, pour laisser une place croissante à l'auto entrepreneuriat. La plupart des grandes industries ont alors progressivement remplacé une partie de leur personnel salarié par des équipes « sous contrat », composées de travailleurs libéraux ou d'auto entrepreneurs qui adressent leur facture à la fin de chaque mois. Ces personnels se vendent au plus offrant et le taux de rotation des collaborateurs s'est envolé.

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La vie sociale s'est considérablement réduite au sein de l'entreprise ou - du directeur à l'employé - chacun poursuit une gestion personnelle de sa petite entreprise. Le développement parallèle du télétravail (au moins 2 ou 3 jours par semaine hors de l’entreprise) a accru la distension du lien social entre les équipes attelées à un même projet. En revanche, le télétravail s’effectuant souvent au sein d’espaces de co-working, une nouvelle forme de lien, hors projet d’entreprise, s’est développée entre « télétravailleurs » d’un même espace de co-working.

Hypothèse 4 - Le renouveau d’une vie sociale et collective Le renouveau d'une vie sociale et collective très favorable et nécessaire à la productivité. Les crises qui se sont succédées depuis les années 70 et la fin des trente glorieuses ont amené économistes, chefs d’entreprise et syndicalistes à mettre de côté les explications toutes faites concernant les raisons de l’absence de croissance ainsi que les explications anciennes dans lesquelles l’anathème avait eu raison de la réflexion distanciée. Une union sacrée s’est constituée autour de la nécessité de restaurer la confiance entre patrons et salariés considérée comme le facteur de production déterminant de la compétitivité des entreprises et de replacer l’homme au centre de la démarche. Finis les anciens règlements top down, abolis les organigrammes hiérarchiques qui ne servaient qu’à rassurer les égos, supprimés les contrôles de gestion qui n’étaient en fait que de vulgaires contrôles budgétaires. Désormais l’innovation et la qualité de vie au travail sont les principes de la nouvelle gouvernance, incarnant une nouvelle posture en termes de responsabilité sociale des entreprises. Les ressources consommées autrefois dans les contrôles tatillons ont été investis dans les groupes d’innovation et de qualité (GIQ) où les jeunes profitent de l’expérience des seniors, les seniors du dynamisme des jeunes. Les séances de créativité qui font partie du temps de travail au même titre que l’animation des groupes de travail en relation avec les laboratoires universitaires profitent de la consultation des bibliothèques digitales et décident de la formation pilotée au sein des GIQ ouverte sur la vie et les désirs de chacun. L’exigeante démocratie du « bien faire ensemble » a remplacé la démocratie du doigt et les lignes en petit caractère de tous les règlements. Les responsables d’ilots sont élus tous les trois ans par les collaborateurs. Des réseaux sociaux internes aux entreprises ont été développés et favorisent l’expression des salariés. La productivité est revenue très vite au rendez vous et la compétitivité avec.

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L’usine du futur est un enjeu fondamental pour l’avenir de Rhône-Alpes. Ce sujet est au carrefour d’une multitude de bouleversements, d’évolutions qui traduisent le passage vers un nouveau monde.

Réaliser un exercice de prospective sur ce thème et contribuer à la réflexion régionale sur le sujet est l’objet de ce document.

La section prospective ne s’est pas livrée à une « prévision » mais à l’élaboration de scénarios exploratoires non normatifs, dont l’objectif est d’éclairer les enjeux.

Quatre scénarios de territoire, six scénarios de contexte ont été élaborés à partir de 23 variables clefs retenues par la section.

La mise en perspective des scénarios permet de les confronter aux scénarios de contexte et de déterminer les enjeux qui sont propres à chacun d’eux.

INDUSTRIE  INNOVATION  PROSPECTIVE  RHONE-ALPES