Recherche entomologique dans les écosystèmes forestiers africains Recherche entomologique dans les écosystèmes forestiers africains

Directeurs de la publication: Guy Couturier Juste Boussienguet Henri Dosso Rapport de l'atelier régional organisé par l'Institut d'Ecologie Tropicale (lET), le Comité national de Côte d'Ivoire pour le MAB, l'ORSTOM, l'Unesco-MAB, le Programme des Nations Unies pour l'Environnement (PNUE) et le Réseau Africain de Biosciences (RAB), qui s'est tenu à Abidjan et Taï (Côte d'Ivoire) du 25 novembre au 6 décembre 1985.

Unesco Le Programme intergouvernemental sur l'homme et la biosphère (MAD), lancé par ('Unesco en 1970, a pour objectif de développer, avec l'apport des sciences naturelles et sociales, une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des ressources de la biosphère et pour l'amélioration des relations entre "homme et l'environnement. Afin d'atteindre ce but, le MAD a adopté une approche écologique intégrée pour ses activités de recherche et de formation, qui sont axées autour de quatorze thèmes internationaux et orientées vers la solution de problèmes concrets de gestion dans les différents types d'écosystèmes.

Publié en 1986 par l'Organisation des Nations Unies pour l'éducation, la science et la culture 7, place de Fontenoy, 75700 Paris Imprimerie des Presses Universitaires de France, Vendôme

© Unesco 1986 TABLE DES MATIERES

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SECTION l - INTRODUCTION ET RESUME

OBJECTIFS 3

ORGANISATION 3

PARTICIPANTS 3

PROGRAMME D'ACTIVITES 4

SECTION II - RECOMMANDATIONS ET REMERCIEMENTS 7

PREAMBULE 9

RECOMMANDATIONS 9

REMERCIEMENTS 10

SECTION III - EXPOSES TECHNIQUES 13

PROBLEMATIQUE ET PERSPECTIVES DE LA RECHERCHE SCIENTIFIQUE ET TECHNIQUE EN COTE D'IVOIRE, par Dognenenan Coulibaly 15

Introduction 15 La recherche scientifique en Côte d'Ivoire 15 Adaptation du système de programmation scientifique 17 La constitution d'un potentiel-chercheur de qualité 17 Organisation et structuration de l'appareil de recherche 17 Approfondissement de la coopération scientifique et technique 20 Le financement de la recherche 20 Le transfert des résultats au développement 21 Conclusion 21

LES RECHERCHES ENTOMOLOGIQUES DANS QUELQUES PAYS DE LA REGION

A. CONGO, par Daniel Diangana et Antoine Ki y indou 23 B. GABON, par Paul Posso 24 C. GUINEE, par Bakary Coulibaly 26 D. REPUBLIQUE CENTRAFRICAINE, par Eugène Kaine et Christophe Lah Saraga 27 E. TOGO, par Sanda Kolla 28 TABLE DES MATIERES (suite)

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LA FORET SEMPERVIRENTE CADRE DE L'ENTOMOLOGIE FORESTIERE, '9":J ,- par Yves Gillon FZCfo7;:> 29 Introduction 29 Distribution 30 Le climat des forêts sempervirentes 31 Richesse spécifique 32 Conclusion 39 Références citées et ouvra~es sur la forêt tropicale 40

L'ECOLOGIE TROPICALE ET LES ETUDES ENTOMOLOGIQUES QUELQUES APERCUS DU PROGRAMME MAB, par M'alcolm Hadley 41

La forêt tropicale et ses ressources 41 Les actions du programme MAB dans les tropiques humides 42 Conclusion 46 Bibliographie 46

EFFETS DES BRULIS SUR L ES ARBRES EN AFRIQUE, par Yves Gillon 49

Introduction 49 Interdépendance du feu et de la végétation 49 Zone de fréquence max imale des feux 50 Incendie en forêts 51 Incendies en zones arides 52 Conclusion 52

L'ENTOMOFAUNE DES STOCKS DE VIVRiERS DES PAYSANS DE COTE D'IVOIRE, par Kouahou Foua-Bi 55

Les productions vivrières 55 Buts et limites 56 Etude pratique des problèmes 57 Principaux résultats 57 Conclusion 60

CONTRIBUTION A LA CONNAISSANCE DE QUELQUES INSECTES ENNEMIS DES GRAINS ET GRAINES CULTIVES EN BASSE COTE D'IVOIRE, par Kouassi Bekon 61

Introduction 61 Identification "rapide" des insectes des denrées 61 Description et biologie des espèces nuisibles 62 Conclusion 64 Bibliographie 64

PRINCIPAUX PROBLEMES ENTOMOLOGIQUES DES PLANTATIONS FORESTIERES EN COTE D' IVOIRE, par Bernard Mallet et Lambert Kanga 65

La situation forestière en Côte d' Ivoire 65 Principaux problèmes entomologiques des plantations forestières en Côte d'Ivoire 66 Bibliographie 71

LES LEPIDOPTERES DEFOLIATEURS DU FRAKE ET DU FRAMIRE EN COTE D'IVOIRE, par Gilles Fédiere, Lambert Kanga et Annie Monsarrat f 24 'Y1?- 73

Préambule 73 Les plantations mécanisées de Tenninalia sp. en Côte d'Ivoire 73 Les lépidoptères défoliateurs 75 Conclusions et moyens de lutte 78 Remerciement 78 Bibliographie 79 TABLE DES MATIERES (suite)

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EPICERURA PERGRISEA HAMPSON (LEPIDOPTERE NOTODONTIDAE) - DEFOLIATEUR PRINCIPAL DES TERMINALIA SP. EN COTE D'IVOIRE: BIOLOGIE ET LUTTE, par Lambert H.B. Kanga 81

Les plantations forestières de Terminalia sp. en Côte d'Ivoire 81 Les problèmes entomologiques 81 L'Insecte et sa bIologie 82 Mét hode de lutte 83 Conclusion 84

LES RECHERCHES D'ENTOMOVIROLOGIE DE L'ORSTOM A ADIOPODOUME, par Gilles Fédiere 87

ETUDE DES POPULATIONS D'INSECTES - 1. ENQUETES ET ECHANTILLONNAGES, par Juste BoussIenguet 91

Introduction 91 ChoIx du type d'enquête 91 Méthode d'échantillonnage 92 Pratique de l'échantillonnage 93 Traitement du matériel récolté 93

L'INSTITUT FRANCAIS DE RECHERCHE SCIENTIFIQUE POUR LE DEVELOPPEMENT EN COOPERATION, par Jean Launay 95

L 'ORSTOM et ses hult départements 95 Le Centre d'AdIopodoumé 96

ETUDE DES POPULATIONS D'INSECTES - II. METHODOLOGIE D'ETUDES DES PARAME TRES BIOLOGIQUES DU COMPLEXE ENTOMOPHAGE DE LA COCHENILLE DU MANIOC PHENAcocr;us MANIHOTI, par Juste Boussienguet 97

Considérations générales 97 Les méthodes de terrain 98 Bibliographie 99

APERCU DE LA NICHE TROPHIQUE DES COLEOPTERES CERAMBYCIDAE DE LA REGION DE LAMTO (COTE D'IVOIRE), par Jean-Marie Leroux 101

La Station d'écologie tropicale 101 Méthodes 101 Résultats 102 Conclusion 102

LE PROJET TAI : HISTORIQUE ET REALITES, par Henri Dosso 105

Historique 105 Le Projet Taï 105 Grands axes de recherche 106 Organisation du projet 108 Bibliographie 109

LE PROGRAMME SUR L'EVOLUTION DES POPULATIONS D'INSECTES PARASITES DES CULTURES DANS LE PROJET TAI. PROBLEMATIQUE, METHODES DE COLLECTE, te ?I. O:ll'to 111 RESUL TATS. par Guy Couturier If ~., 1 Y::1

Introduction 111 Les méthodes de collecte 111 Résultats 117 Conclusion 117 Bibliographie 119 TABLE DES MATIERES (suite)

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TECHNIQUES D'ETUDES ECOLOGIQUES DES TERMITES FORESTIERS, par Yaya Sangaré 121

Contexte historique et régional du Projet TaI 121 Techniques des études sur les termites 121

LES FORMICIDAE TERRICOLES DE FORET OMBROPHILE METHODOLOGIE, RESULTATS OBTENUS, par Tlemoko Diomandé 123

Méthodes 123 Résultats 123 BIbliographIe 124

UN CAMPEMENT BAOULE, REGION DE TAI, SUD-OUEST DE LA COTE D'IVOIRE, par Anneke de Rouw 125

Introduct ion 125 Le cycle culture vivrière-jachère-culture vivrière 125 Forêt "noire" - cultures vivrières et cultures pérennes 127 Bibliographie 128 L'état sanitaire des cultures à Sangbékro 129

RECOLTE, ELEVAGE, CONSERVATION ET MONTAGE DES HYMENOPTERES PARASITES POUR ETUDES MORPHOLOGIQUES, par Juste Boussienguet 131

Récolte et élevages 131 Conservation et montage 131 Etude des larves 132

UTILISATION DES COCCINELLES PREDATRICES LOCALES POUR LA LUTTE CONTRE LA COCHENILLE AU CONGO, par Antoine Kiyindou 133

Paramètres bioécologiques 133 Etude de terrain 133 Bibliographie 135

LES COLLECTIONS DE REFERENCE, LES COLLECTIONS NATIONALES, LES IDENTIFICATIONS D'INSECTES, par Guy Couturier 137

Nécessité et limites des collections d'insectes 137 Le problème des ident ifications 138 Bibliographie 139

SECTION IV - ANNEXES 141

ANNEXE 1 Liste des participants 143 ANNEXE 2 Programme de l'Atelier 145 ANNEXE 3 Allocutions d'ouverture 149 SEC T ION

INTRODUCTION ET RESUME

INTRODUCTION ET RESUME

œJECTIFS

Un atel ier régional de sensibi l isat ion à la recherche entomologique dans les écosystèmes forest iers ­ aspects techniques - a été organisé à Abidjan et Taï, Côte d'Ivoire, du 25 novembre au 6 décembre 1985.

L'atel ier étai t dest iné à assurer un complément de format ion aux chercheurs, ingénieurs et techni­ ciens nationaux travaillant en zone forestière humide et se spécialisant en entomologie générale ou agricole. Les nécessités actuelles de l'aménagement impliquent de tenir compte tant des impératifs de conservation du milieu naturel que de son exploitation sur le plan agricole et forestier. C'est pourquoi les activités du cours ont eu une orientation écologique et ont porté principalement sur la méthodologie applicable aux recherches dans les écosystèmes forestiers anthropisés (milieux cultivés) ou non.

L'objectif poursuivi a été double: premièrement, promouvoir des contacts entre entomologistes africains francophones travaillant en zone forestière et favoriser ainsi le développement d'un réseau de recherches; deuxièmement, améliorer les connaissances techniques liées aux recherches entomologiques.

Le stage a été organisé conjointement par l'Institut d'Ecologie Tropicale dans le cadre du programme MAS de Côte d'Ivoire et l'Institut français de Recherche Scientifique pour le Développement en Coopération (ORSTüM), avec l'appui technique et financier de l'Unesco-MAB, du Programme des Nations Unies pour l'Environnement (PNUE) et du Réseau Africain de Biosciences (RAB).

Sur le plan technique, la planification et le déroulement du cours ont été assurés par deux en­ cadreurs, M. Guy Couturier, entomologiste agricole de l'ORSTO'vI, et M. Juste-Lié Boussienguet, Assistant en Zoologie de l'Université Omar Bongo à Libreville (Gabon) - avec l'aimable participation d'autres conférenciers venant de la Côte d'Ivoire et d'ailleurs. Bien que le cours se soit déroulé sous le titre de cours de sensibilisation, les activités ont revêtu la forme d'un atelier informel et interactif où chacun a partagé ses connaissances et ses expériences.

PARTICIPANTS

Ont participé à ce cours une trentaine de spécialistes et stagiaires venant de neuf pays d'Afrique de l'Ouest et Centrale (Bénin, Congo, Côte d'Ivoire, Gabon, République de Guinée, République Centrafricaine, Sénégal, Togo, Zaïre), ainsi qu'une quinzaine de spécialistes et de stagiaires du pays hôte. La liste des participants se trouve en annexe 1.

3 PRlGWwt.E D'/lCfIVITES

Le stage a été organi sé en deux par t ies (annexe 2). La première semaine a été consacrée à quelques exposés d'ordre général ainsi qu'à des visites de laboratoires à Abidjan et dans ses environs. La deuxième semaine du stage s'est tenue à la Station d'Ecologie Tropicale de Taï, où s'est réalisée la part ie technique de celui-ci.

La séance d'ouverture s'est déroulée le 25 novembre 1985, avec les discours d'accueil prononcés par le Secrétaire technique du Comité lv\AB de Côte d'Ivoire, le Directeur de l'Institut d'Ecologie Tropicale, le représentant de l'Unesco et le représentant du Ministère de l'Education nationale et de la Recherche scientifIque. Un résumé de ces discours figure en annexe 3. L'après-midi a été consacrée à une confé­ rence sur la problématique et l'évolution de la recherche scientifique en Côte d'Ivoire, prononcée par le responsable pour la politique de recherche scientifique au Ministère de l'Education nationale et de la Recherche scientifique. Des discussions ont également eu lieu sur les recherches entomologiques dans les différents pays participants.

Le 26 novembre a pris place une visite à l'Ecole Nationale Supérieure d'Agronomie au cours de laquelle ont été examinés sur le terrain di fférents problèmes posés par les insectes prédateurs des plantat ions de cacao, café et palmiers à huile, et les di fférentes méthodes de contrôle de ces popula­ t ions. Nous avons été condui ts par M. K. Foua-Bi, professeur, et M. K. Bekon, assistant.

Les plantations de café (Coffea X arabusta) sont attaquées principalement: au niveau des racines par les courtilières et grillons; d'importants dégâts sont causés par Bixadus sericola (coléoptère Cerambycidae), borer du tronc. Les feuilles sont surtout at taquées par Zonocenus variegatus, dont on peut limiter les dégâts en traitant à l'aldrin au début de la saison sèche. Les cerises sont dépréciées par Stephanoderes hampei, le scolyte des grains. Xyleborus morstatti, le scolyte des rameaux, est considéré ici comme le ravageur le plus important.

Sur les palmiers à huile, on note surtout la présence de Coelenomenodera minuta, dont la larve se développe dans les palmes, Oryctes monoceros ivorensis. Augosoma centaurus et les Curculionidae Temnoschoita quadrimaculata et quadripustulata dont les larves, avec Rhynchophorus phoenicis, creusent des galeries dans les stipes. Sur les fruits, on trouve la cochenille Aspidiotus destructor. L'augmen­ tation des surfaces cultivées est actuellement encouragée par le gouvernement qui donne à de jeunes ingénieurs agronomes souhaitant devenir planteurs des parcelles de 100 à 150 ha afin de favoriser la création de plantations modernes i la Palmindustrie en assume l'encadrement.

Nous avons pour finir visité une plantation de manioc et J. Boussienguet nous a exposé quels étaient les principaux insectes ravageurs du manioc. On a cité Zonocenus variegatus, défoliateur polyphage, les cochenilles Phenacoccus madeirensis et Ferrisia virgata (Pseudococcidae), un Coccidae, Coccus sp. qui est en cours d'étude systématique, et l'aleurode Bemisia tabaci vecteur de la mosaïque du manioc.

Nous n'avons pas, lors de cette visite, rencontré Phenacoccus manihoti, la cochenille du manioc, dont cependant les dégâts commencent à se manifester en Côte d'Ivoire. Des exposés plus formels ont été présentés dans l'après-midi par les professeurs de l'Ecole sur les insectes ennemis des denrées stockées en zone forest ière et les ravageurs de l'igname.

Deux visites ont été effectuées le 27 novembre. Le matin le stage a été accueilli par le Centre Technique Forest ier Tropical (CTFT) à Vapo, forêt classée de 30.000 ha gérée par le CTFT avec les di ffé­ rentes expériences sylvicul turales. On y a examiné quelques problèmes et contraintes posés par les insectes prédateurs des forêts et des plantations forestières en Côte d'Ivoire. L'après-midi s'est passée au centre National de Floristique, avec son jardin botanique et son herbarium où ont été discutés des problèmes d'établissement et de gestion de collections de référence.

Le 28 novembre a eu lieu la visite à l'ORSTOM à Adiopodoumé où s'est faite la présentation d'une revue générale des activi tés de cet organisme en Côte d'Ivoire ainsi que des visi tes des différentes parcelles et des exposés sur les recherches entomovirologiques telles que l'utilisation des virus pour contrôler les défoliateurs lépidoptères des palmiers à huile, de la noix de coco et des bananiers. Cette méthode offre une al ternative intéressante au contrôle chimique, tout en n'étant pas encore passée au stade de mise en pratique sur le plan extensif. Nous avons discuté des maladies virales des cultures telles que le manioc ainsi que des prédateurs entomologiques des cacahuètes et d'autres cultures d'ordre économique importantes dans la région.

Ensui te, sous la conduite de G. Fédière, responsable du laboratoire d'entomovirologie du Centre, nous avons visité les collections dont la création remonte à l'origine de l'ORSTCM à Adiopodoumé, soit 1949. Enrichie au cours des années par les différents spécialistes qui se sont succédés au laboratoire, cette collection recèle principalement une belle collection de rhodalocères et hétérocères dont la plupart sont identifiés ainsi qu'une collection de référence comprenant des acridiens (s.1.), mantes, hétéroptères, tous ident i fiés, et surtout représentat ifs de la région de Lamto. Parmi les Coléoptères, on a noté surtout la présence de Cerambycidae, Scolytidae, Curculionidae, ainsi que quelques autres familles, souvent identifiées au nIveau de l'espèce. Les diptères, hyménoptères, homoptères sont peu représentés.

Actuellement, l'accent est mis sur l'amélioration de la présentat ion par la confect ion de pré­ sen toi rs, l'achat de ma tér iel et l'aménagement de la salle. L'enrichissement en spécimens porte surtout

4 en ce moment sur les lépidoptères rhopalocères, les coléoptères Cetoni idae et une collect ion de réfé­ rence sur la faune de la région de Taï. La gestion de la collection nécessite en permanence un personnel quaI i f ié et des moyens financiers suff isants, actuellement uniquement assurés par le laboratoire d'en­ t()T()virologie.

A l'Institut d'Ecologie Tropicale, la discussion a continué le 29 novembre sur les recherches entomologiques dans les différents pays participants. Des études de cas ont été présentées sur l'étude bioécologique de la cochenille du manioc et sur la place des coléoptères xylophages dans la biocénose forestière (exemple des Cerambycidae). Une conférence magistrale a eu lieu sur le thème de l'écologie tropicale, de la distribution et des caractéristiques biocénotiques des forêts sempervirentes.

Deux films ont été projetés, l'un sur "Le Projet Taï, une forêt et des hommes", produit par le Ministère de l'Education nationale et de la Recherche scientifique de Côte d'Ivoire et de l'Unesco (r~alisateur Georges Keita). Des prises de vue sur le développement économique de la Côte d'Ivoire, du sud-ouest en particulier, nous mettent en contact avec les problèmes posés par un aménagement rationnel. Au cours du film, Son Excellence le Dr. Balla Keita, Ministre de l'Education nationale et de la Recherche scientifique, nous expose les motivations qui ont conduIt à mettre en place le Projet Taï, nous parle des grands aXeS de recherche et de la volonté du Gouvernement de Côte d'Ivoire de concilier développement économique, exploitation rationnelle de la forêt et protection intégrale du patrimoine mondial que représente le Parc national de Taï. Des prises de vues de la forêt à l'intérieur du Parc national, de la station écologique, de scientifiques au travail sur le terrain, complètent ce panorama qui témoigne des grands changements que vit actueilement le sud-ouest de la Côte d'Ivoire.

L'autre film, "La cendre et ia vie", a été tourné dans la savane préforestière de Lamto en Côte d'Ivoire centrale. La savane de Lamto est chaque année l'objet de feux de brousse, allumés par les villageois baoulés depuis des temps irrrnémoriaux. Ces feux, qui sont allumés dans le courant de la saison sèche, ont une influence importante sur la vie animaie et végétale. Ils conditionnent la survie des Individus les mieux adaptées et permettent la cohabitation de millIers d'espèces. Après le passage du feu, où tout ce qui n'est pas protégé par la fui te, l'enfouissement ou un système de résistance végéta­ tive est détruit, on assiste avec les premières pluIes au "retour de la vie" : éclosions, métamorphoses, germinat ions, floraisons... Insectes et autres arthropodes, rept i les, pet i ts marrrni fères, sortent de leurs abris. Des prises de vue exceptionnelles nous montrent un troupeau de buffles "à l'abreuvoir", des cobs de Buffon, une échis capturant un rongeur, etc. De très belles images, un commentaire accessible à tous et une musique bien adaptée font de ce film de 1h30 autant un spectacle "grand pubi ic" qu'un document scientifique de haute quaiité. Ce film a été réalisé par le Centre national de la Recherche scientifique français (réalisateur A. Devez) à la Station d'Ecologie tropicale de Lamto. Conseillers scient i f iques, Y. Gi 1 ion et toute l'équipe des chercheurs de la stat ion.

La deuxième semaine, le stage s'est déplacé à la Station d'Ecologie Tropicale à Taï au sud-ouest de la Côte d'Ivoire, si te de la pius grande étendue de forêt tropicaie humide de l'Afrique de l'ouest. Ici, le groupe des participants a été renforcé par six élèves ingénieurs agronomes de l'Ecole Nationale Supérieure d'Agronomie, se spéciaiisant dans ieur dernIère année sur les questions de la protection des cuitures.

Le 2 décembre, une vue générale de l'historique, des activités, des résultats et des perspectives de la stat ion d'écologie et du projet pi lote de Taï a été présentée (dont une sorte de bi ian a été publ ié par l'Unesco en 1984 comme Note Technique du MAS n015). Une présentation a également été faite sur les recherches en entomologie forestière dans le cadre de ce projet et qui ont fait l'objet d'un fascicule spécial de la Revue Française d'Entomologie (Tome 7, 1985).

Le 3 décembre, ie stage a été accueilli par la famille Sangbé dans sa plantation villageoise de café, cacao et de cui tures vivrières telles que le manioc, le riz et le gombo. Ont été passés en revue les problèmes présentés par les insectes aux populations d'agricul teurs. De retour à la Station d'Ecolo­ gie Tropicale de Taï, des études de cas ont été présentées telles que la méthode d'étude des termites en forêt. La technique de capture et piégeage des insectes en forêt a été démontrée, en utilisant des méthodes comme l'usage de filets, les pièges lumineux, les pièges à drosophiles, etc.

Une visite du Parc National de Taï fut organisée le 4 décembre au cours de laquelle furent étudiées les différentes populations d'insectes qui habitent la forêt primaire, ies iisières, les parcelles à différents stages de succession, etc. C'est au laboratoire de Taï que furent abordés les problèmes liés à l'identification des spécimens, à la constitution des collections de travail, à la notion de collec­ tions nationales, aux techniques de conservation, de préparation et de mise en coilection des insectes.

Le retour de Taï à Abidjan s'est fai t le 5 décembre, et le 6 déceniJre fut consacré à l'examen du bilan du cours et à la discussion et à l'adoption de quelques reoDmmandations générales, parmi lesquelles l'importance d'encourager le déveioppement des réseaux d'entomologistes en Afrique de l'ouest et cen­ trale. •••••

5 En publiant ce rapport, l'Unesco tient à remercier: les différentes institutions et personnes qui ont contribué à l'organisation de l'atelier; Guy Couturier, Juste Boussienguet et Henri Oosso qui ont assuré la rédaction et la mise au point de ce rapport; Jean Piart qui a dessiné la couverture; Marie­ Caroline Vidican qui a assuré la dactylographie et la mise en page. Les photographies non attribuées ont été faites par Guy Couturier ou Malcolm Hadley.

Il convient de souligner que les points de vue exprimés dans ce rapport ne reflètent pas nécessaire- ment ceux de l'Unesco, du PMJE et des autres institutions associées à ce travail. Ils sont ceux des auteurs des différentes communications.

Séance inaugurale à l' Inst i tut d'écologie tropicaie. Ouverture de l'Atelier.

La salle de réunion à l' Inst i tut d'écologie tropicale lors d'un exposé

Visi te à l'Ecole nationale supérieure agronomique Une plantation de manioc

Visite de la plantation du Centre technique forestière tropicale, à Yapo

6 SEC T ION l l

RECOMMANDATIONS ET REMERCIEMENTS

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RECOMMANDATIONS ET REMERCIEMENTS

Les participants à l'atelier de sensibilisation à la recherche entomologique dans les écosystèmes fores­ tiers (Aspects techniques) organisé par le PNLD, l'Unesco, l'üRSTC\'v1, le Réseau Africain de Bio-sciences (RAB) et le Comité MAS de Côte d'Ivoire, qui s'est tenu à Abidjan du 25 au 30 novembre et à Taï du 1er au 6 décembre 1985 :

Font remarquer que les insectes font partie intégrante du patrimoine naturel au même titre que la flore et la grande faune, plus connus du grand public,

Rappellent les graves préjudices causés aux cultures, aux denrées stockées et autres productions végétales par les insectes,

Font valoir que l'entomologie contribue à la connaissance des interrelations des insectes avec le milieu et qu'elle est, donc, indispensable à la gestion rationnelle des ressources, notamment à l'amé­ l iorat ion des systèmes de product ion et de protect ion des product ions végétales, af in d'accroître la product i v i té et d'assurer l 'autosuf f i sance al imentai re,

Constatent une insuffisance numérique de spécialistes africains de l'entomologie et tout particulière­ ment de systématiciens,

Regrettent l'insuffisance des échanges d'information et d'expériences entre les entomologistes de la sous-région.

Les participants recommandent, premièrement, la formation et la promotion de chercheurs en entomologie et en particulier de systématiciens, en accord avec les recommendations du colloque international sur les légumineuses, tenu du 19 au 23 novembre 1985 à Niamey.

Les participants recommandent, deuxièmement, la promotion et le développement des échanges d'infor­ mations, d'expériences et de matériels scientifiques entre entomologistes de la sous-région. Pour ce faire, les participants à l'atelier sont convaincus de la nécessité de créer un réseau africain d'entomo­ logie sous l'égide de l'Unesco, en collaboration avec le Réseau Africain de Bio-Sciences. Le secrétariat de ce réseau sera assuré par le Comité MAS de Côte d'Ivoire.

Le Comité exécutif provisoire est composé de cinq (5) membres dont les noms suivent: Profes­ seur Foua-Bi (Côte d'Ivoire), coordonnateur; rv'me Constance Agbogba (Sénégal) ; M. Marcel Baglo (Bénin) ; M. Juste Boussienguet (Gabon) ; M. Eugène Kaine (République Centrafricaine). Le siège du Comité est fixé à Abidjan, à l'Institut d'Ecologie Tropicale (lET).

Le réseau aura pour mission de: recencer les entomologistes africains de la sous-région; pro­ mouvoir les études entomologiques; coordonner les efforts en matière de recherche entomologique en développant des recherches spécifiques comparatives sur des sujets d'intérêt sous-régional et notamment sur la cochenille du manioc; susciter les vocations en la matière; favoriser la circulation de l'infor­ mation par l'édition d'un bulletin de liaison entre entomologistes africains; favoriser l'utilisation des connaissances entomologiques à des fins de développement économique, social et culturel.

9 Troisièmement, les participants à l'atelier saisissent cette heureuse occasion pour féliciter le Gouvernement de Côte d'Ivoire et son Président, Son Excellence M. Félix Houphouet-Boigny, d'avoir créé la réserve de Taï et de l'avoir doté de moyens humains et matériels appropriés. Ils recommandent la pour­ sui te et le renforcement des efforts déjà consent is.

M:ltion de renercienents adressée à l'lilesco

Les participants à l'Atelier de sensibilisation à la recherche entomologique dans les écosystèmes fores­ tiers (aspects techniques), représentant neuf pays africains (Bénin, Centrafrique, Congo, Côte d'Ivoire, Gabon, Guinée, Togo, Sénégal et Zaïre) et la France réunis à Abidjan et Taï du 25 novembre au 6 décembre 1985 :

Considérant les efforts déployés par l'Unesco pour promouvoir le développement de la science et de la culture en Afrique et dans le monde,

Considérant l'intérêt sans cesse croissant de l'Unesco pour le développement des sciences écologiques en général et la connaissance de la faune entomologique africaine en particulier,

Considérant les efforts consentis par l'Unesco pour promouvoir le développement de la coopération interrégionale en Afrique,

Remercient le Directeur Général de l'Unesco, M. Amadou-Mahtar M'Bow, et les responsables du programme des sciences écologiques pour toutes les facilités apportées au présent atelier pour assurer son plein succès.

Ils leur témoignent par la même occasion leur profonde gratitude et souhaitent que l'Unesco continue de favoriser de telles rencontres scientifiques en Afrique.

M:lt ion de renercienents adressée au Gouvernement de la République de Côte d'Ivoire

Les participants à l'Atelier de sensibilisation à la recherche entomologique dans les écosystp.mes fores­ tiers (aspects techniques) :

Considérant les efforts déployés par le Président de la République de Côte d'Ivoire pour l'éducation et la promotion de la recherche scientifique en particulier,

Considérant la place primordiale accordée par Monsieur le Président de la République, premier planteur de Côte d'Ivoire, à la recherche agronomique en vue d'accroître la productivité agricole afin d'assurer l'autosuf f i sance alimenta ire,

Remercient le Gouvernement de Côte d'Ivoire en général et Son Excellence le Président de la République, M. Félix Houphouet Boigny, en particulier, pour tous les efforts qu'il ne cesse de déployer pour la promotion de la science et de la technologie,

Souhaitent que le Président de la République favorise l'installation en République de Côte d'Ivoire d'un musée zoologique africain et la formation de spécialistes en sciences entomologiques.

M:lt ion de renercienents adressée au Ministre de la Recherche scientifique, Président du MtIB

Les participants à l'Atelier de sensibilisation à la recherche entomologique dans les écosystèmes fores­ tiers (aspects techniques) :

Considérant les efforts déployés pour la formation en général et pour la promotion scientifique en particulier,

Remercient le Ministre de la Recherche scientifique, Président du Comité MAS, M. Balla Keita, pour les mesures prises afin de permettre au présent atelier de se dérouler dans les meilleures conditions et lui témoignent leurs sincères remerciements.

10 Motion de remerciements aux organisateurs de l'atelier

Les participants, à l'unanimité, adressent leurs plus vifs remerciements aux collègues de Côte d'Ivoire pour leur accueil, leur aide, leur assistance et les en fél ici tent.

Fait à Abidjan, le 6 décembre 1985

l'Atelier

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SEC T ION III

EXPOSES TECHNIQUES

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PROBLEMATIQUE ET PERSPECTIVES DE LA RECHERCHE SCIENTIFIQUE ET TECHNIQUE EN COTE D'IVOIRE

Dognenenan Coul iba1Y 1

INTRXU:TIGI

Les organisateurs de cet atelier m'ont demandé de vous présenter la problématique et les perspectives de la recherche scient ifique et technique en Côte d'Ivoire. J'ai accepté bien volont iers, parce qu'après plusieurs années d'administration et de gestion de la recherche, j'en arrive à la triste constatation que ies pays de ia sous-région ignorent totalement ce qui se fait en matière de recherche dans nos différents pays; ce qui a pour conséquence les dupl icat ions, le gaspi liage des moyens financiers, l'absence d'éChanges d'informations scientifiques, etc.

Les efforts entrepris tant par l'Unesco que par les organisations régionales (CEAO, CDEAü, ex­ OCAM...) pour combler ces lacunes n'ont pas toujours apporté les résul tats escomptés tant les divergences du point de vue option politique ou organisationnel ont été très marqués. Je reste persuadé que c'est à l'occasion de rencontres d'hommes de sciences, appartenant à la même discipline ou confrontés aux mêmes problèmes, que des progrès notables peuvent être obtenus quant au rapprochement des communautés scienti­ fiques et des options à prendre pour mettre la science, la technique et la technologie au service de nos populations pour un mieux-être.

LA Ft;:0ERl-E SCIENTIFlaE EN COTE D' 1\K)1Ft;:

La recherche scientifique et technique en Côte d'Ivoire ne constitue pas un secteur autonome fonctionnant en vase clos. Elle est avant tout au service du développement et, dans ce sens, elle rempli trois fonctions essentielles

premièrement, une fonction d'accompagnement des actions du développement agricole et rural j

deuxièmement, une fonction d'anticipation et de prévision dans la mesure où elle ne se contente pas seulement d'apporter des solutions aux problèmes prioritaires actuels mais qu'elle entreprend des travaux destinés à répondre à des besoins du développement à moyen et à long terme, en particulier, dans les domaines de l'amélioration variétale, des techniques culturales, de la défense contre les ravageurs et les maladies, des associations culturales, de la protection et de la conservation des sols, de l'aménagement et de la gestion rationnelle des ressources forestières, halieutiques, enfin de la modernisation des exploitations agricoles j

troisièmement, une fonction d'information et de diffusion des technologies nouvelles mises au point, aussi bien auprès des organismes chargés de la vulgarisation qU'auprès des paysans de nos différen­ tes régions, au travers de ses bases d'expérimentation mul tilocales et des points d'appui répartis sur l'ensemble du territoire.

Directeur de la Programmation, du Financement, de la Formation et de la Promotion des Personnels de la Recherche scientifique, Ministère de l'Education nationale et de la Recherche scientifique, B.P. V34, Abidjan, Côte d'Ivoi re.

15 Ces missions se sont concrétisées dans les objectifs prioritaires assignés à la recherche scientifi­ que dans les différents plans quinquennaux de développement économique; social et culturel. A partir de 1976, grâce à une concertation permanente avec les responsables du développement et de la planification, une politique spécifique concernant la recherche scientifique et technique a été définie dans le Plan 1976-1980 et dans le Plan 1981-1985.

Cette volonté politique visant à orienter et articuler les activités de recherches en fonction des objectifs prioritaires du développement agricole et rural et des besoins réels du monde paysan s'est affirmée de manière encore plus rigoureuse à la suite des décisions et des recommandations des sixième et sept ième Congrès du POCI-ROA.

C'est ainsi qu'au cours de la période 1981-1985, la politique de la recherche scientifique et technique a été définie en tenant compte des impératifs du développement, résultant de la conjoncture économique mondia le et de l 'évolut ion économique, sociale et cul turelle de la nat ion. Ces impératifs étaient les suivants

la réduction de la dépendance extérieure dans le domaine alimentaire et énergétique;

la promotion des exportations de produits agricoles et agro-industriels et le maintien de leur qualité et de leur compétitivité sur le marché international

la lutte contre la dégradation des écosystèmes naturels sous l'effet des facteurs climatiques, de la déforestation et du développement urbain et rural ;

la nécessité de répondre aux aspirations des populations rurales dans le domaine de la qualité de la vie, notamment en matière de santé, d'éducation et de cadre de vie.

Pour répondre à ces impératifs, il s'est avéré indispensable de définir une stratégie qui permette de mobiliser et d'utiliser au mieux le potentiel scientifique et technique existant et les moyens dispo­ nibles.

La premlere option a été de renforcer l'ivoirisation de l'appareil de recherches par trois senes d'actions: la création de structures nationales de recherches sous la forme d'établissements publics nationaux dans les secteurs clés pour notre développement; l'intégration dans les structures de recher­ ches d'une masse critique de chercheurs et de techniciens nationaux; et l'accroissement des responsabi­ lités des nationaux dans la gestion administrative des structures, la conduite de programmes de recherches prioritaires ou de projets spécifiques sur le plan sous-régional africain.

La seconde option a été de concentrer, en priorité, la contribution financière de l'Etat et l'aide extérieure sur les recherches destinées à accroître la production vivrière et à améliorer les technolo­ gies en matière de stockage, de conservation des denrées alimentaires. A cet effet, trois actions essentielles ont été conduites:

le renforcement du potentiel scientifique et technique de l'Institut des Savanes chargé des recher­ ches sur les cultures vivrières et l'élevage ainsi que l'élargissement de ses activités dans la zone de savanes à travers les bases regionales d'expérimentation,' les points d'appui et les antennes villageoises ;

l'extension des activités des Instituts de recherches de la zone de forêt aux problèmes concernant l'association des cultures vivrières aux cul tures pérennes comme le café, le cacao, l'hévéa ou aux cultures annuelles comne l'ananas et à l'agroforesterie ;

la restructuration de la recherche technologique par la mise en place du Centre Ivoirien de Recher­ ches Technologiques dont les activités sont orientées sur les problèmes du stockage, de la conserva­ tion et de la transformation des denrées alimentaires et l'utilisation de la biof!lélsse à des fins énergétiques.

La troisième opt ion a été de compresser dans la mesure du possible le coOt des programmes de recherches consacrés aux cultures d'exportation, fondamentales pour l'approvisionnement du marché inté­ rieur et pour l'équilibre de la balance des paiements, tout en les maintenant à un niveau suffisant qui permette de garantir la productivité et la qualité des produits à l'exportation.

La quatrième option a consisté à privilégier quelques grands programmes de recherches visant à la connaissance et à la mei lleure gest ion des écosystèmes naturels et des systèmes aménagés, afin que la recherche puisse répondre aux problèmes posés par la déforestation, la pollution urbaine, atmosphérique, lagunaire et marine, les aménagements hydroélectriques et hydroagricoles, l'utilisation des engrais chimiques et des pest ic ides, la dégrada t ion et la ba i sse de fert il i té des sols.

La cinquième option a porté sur la diversification des sources de financement au niveau des institu­ t ions na t ionales, sous-rég ionales et internat ionales.

Le système national de recherche scientifique et technique a connu, depuis l'indépendance, d'impor­ tants changements tendant à améliorer, de manière significative, la prise de décision quant aux program­ mes de recherche il entreprendre, la maîtrise de leur gestion,- l'ivoirisation de l'appareil de recherche et la coopération scientifique et technique à l'échelon régional et international. A cet égard, cette évolution quantitative et qualititative apparaft clairement à l'analyse des paramètres suivants: l'adaptation du système de programmation scientifique; la constitution d'un potentiel-chercheur de qualit~ j l'organisation et la structuration de l'appareil de recherche; l'appro­ fondissement de la coopération scientifique et technique j le financement de la recherche j le transfert dans le développement d'importants résultats de recherche.

AOAPTATI()II [l.J SYSTEM:: Œ: PRJGRMoMl\TI()II SCIENTIFla.E

L'adaptation du système de programmation scientifique, à partir de 1971, d~coule des orientations et des recommandat ions des différents congrès du POCI-ROA, notamment du 7e Congrès qui a retenu parmi ses priorités: l'aide à la paysannerie; la formation des cadres nationaux et leur intégration dans le processus de développement j enfin, l'indispensable ouverture aux progrès de la science, de la technique et de la technologie.

A cet effet, les améliorations apportées au système de programmation scientifique ont eu pour objectif essentiel la prise en compte des préoccupations du développement à l'échelon national et ré­ gional, en part icul ier : l 'amél iorat ion des systèmes de product ion en zone de savane et en zone de forêt j la conservation, la transformation et la valorisation des produits vég~taux et animaux j la pr~servation et l'exploitation rationnelle des écosystèmes naturels et des systèmes aménagés continentaux et mari t imes j l 'éducat ion, la santé et le développement j l'énergie et le d~veloppement.

La définition et la mise en oeuvre des programmes de recherche concernant ces différents thèmes ont été réalisées en ~troite concertation avec les autorités politiques et administratives, les agents du développement et les diff~rents partenaires sociaux dans le cadre de Commissions de programmes et de Comités techniques, il périodicité définie, ou à la demande des utilisateurs des produits de la recherche.

Afin de favoriser la formation de cadres nationaux pour la recherche et leur intégration dans les structures de recherche, une place de choix a été faite, dans le système de programmation scientifique, à la planification des besoins en personnels en vue d'assurer la conduite et la maftrise des activités de recherche dans des domaines prioritaires pour le développement national. A titre d'illustration de cette volont~ d'orienter les programmes de recherche vers les nécessités du développement, il convient de souligner que sur 318 programmes de recherche en cours, 163 concernent les sciences exactes et naturel­ les, agronomiques et zootechniques, 33 les sciences de l'ingénieur, 43 les sciences biomédicales, et 79 les sciences humaines et sociales.

LA aN>TITUTI()II D'l.1'l POTENTIEL-a-ERlflR Œ: Cl.W..lTE

Dès 1960, la formation des cadres nationaux dans le domaine scientifique et technique a été une préoccu­ pation constante du Parti et du Gouvernement. A cette date, au niveau de la recherche scientifique et technique, la Côte d'Ivoire ne comptai t pratiquement aucun chercheur, à temps plein, oeuvrant dans les structures nationales.

L'effort consenti à partir de 1971 a permis de sélectionner et de former des chercheurs et techni­ ciens grâce à une politique appropriée d'octroi de bourses de stages de sensibilisation et d'initiation à la recherche, d'études approfondies et de perfect ionnement. Le taux d' ivoir isat ion, qui étai t inférieur à 5 pour cent entre 1970 et 1975, a atteint 25 pour cent en 1981 et 40 pour cent en 1985. Globalement, sur un total annuel d'env i ron 5.000 moi s-chercheurs, les chercheurs nat ionaux en assument donc près de 2.000.

~ISATI()II ET STR.r:TlflATI()II Œ: L'APP~IL Œ: ~QER)-E

Evolution des structures de la recherche scientifique

Durant la période 1960-1985, l'évolution des structures de la recherche scientifique est caractérisée:

au niveau de l'administration centrale, par l'unicité du pouvoir de décision et de tutelle et la réorganisation des services centraux j

au niveau des organismes de recherche, par des réorganisations structurelles et par la création de nouvelles structures j

17 au niveau de la gestion et du financement de la recherche, par la redéfinition des modalités de gestIon et de financement des organismes de recherche français du GERDAT implantés en Côte d'Ivoire, en application d'un accord-cadre signé avec la France.

Au niveau de l'administration centrale

En ce qui concerne l'unicité du pouvoir de décision et de tutelle, le décret nO 79-006 du 15 novembre 1979 revenai t à une si tuat ion antérieure, en partageant le pouvoi r de déc ision et de tutelle sur les organismes de recherche entre le Ministère de l'Education nationale, compétent pour les organismes ayant vocation de recherches en sciences économiques, humaines et sociales, et le Ministère de la Recherche scientifique, compétent pour tous les autres organismes de recherches fondamentales ou appliquées.

La fusion de ces deux départements en un seul Ministère (réalisée par le décret nO 83-1314 du 18 novembre 1983) met fin à cette dualité. Tous les organismes de recherche sont désormais placés sous la tutelle du Ministère de l'Education nationale et de la Recherche scientifique, ce qui permettra d'assurer une meilleure coordination de la recherche et de faciliter sa planification (en réponse à l'objectif structurel n04 du plan), les choix nécessaires n'étant plus soumis qu'à l'arbitrage d'un seul décideur.

Sur le plan de la réorganisation des services centraux, au sein du nouveau Ministère de l'Education nationale et de la Recherche scientifique, les services centraux de la recherche sont réorganisés sur les bases suivantes:

Les fonctions spécifiques précédemment assurées par le Ministère de la Recherche scientifique sont regroupées et confiées il deux directions techniques: la direction de la Prograrrmation, du Financement, de la Formation et de la Promotion des Personnels de la Recherche scientifique la direction de la Valorisation de la Recherche et de l'Information scientifique et technique.

De nouvelles fonctions sont créées dans le cadre de la valorisation de la recherche et de l'informa­ tion scientifique et technique et confiées à trois sous-directions. Ce sont, principalement: l'organi­ sation de la prévulgarisation et le suivi des systèmes post-production; l'identification des besoins en information scient i f ique et technique et la créat ion d'un réseau de documentat ion et de di ffusion de l'information avec les organismes de recherche; l'identification et la protection des résultats de la recherche (découvertes-brevets) et la promotion des produits technologiques. La création de ces trois sous-directions répond aux objectifs structurels n01 et nOS du plan.

Les fonctions de gestion (administrative et budgétaire-gestion du personnel et des bourses de formation) sont assurées par des directions centrales communes il l'Education nationale et à la Recherche scientifique.

Au niveau des organismes de recherche

La réorganisation des structures existantes, dans le domaine de la recherche, touchant la santé publique, réorganisation de l'Institut Pasteur en Côte d'Ivoire en un établissment à caractère administratif, suivant les normes prévues par la loi nO 80-1070 du 13 septembre 1980 fixant les règles générales rela­ tives aux établissements publics nationaux, a été réalisée (décret nO 82-1029 du 26 novembre 1982).

Cette réorganisation de l'Institut doit permettre, avec la nomination d'un directeur national, d'orienter les programmes de recherche dans un sens plus conforme aux objectifs nationaux par l'introduc­ tion, notamment, de recherches sur la pharmacopée traditionnelle (en réponse à l'objectif thématique n03 du plan) et d'assurer un contrôle budgétaire plus efficace.

En ce qui concerne la création de nouvelles structures, deux nouveiles structures de recherches pluridisciplinaires ont été créées, à la fin de l'année 1982.

Le Centre ivoirien de recherches technologiques (CIRT) est un établissement public à caractère administratif implanté à Abidjan. Cet établissement à vocation de recherche pour l'application des technologies nouvelles à la transformation, conservation, stockage et conditionnement des produits agri­ coles, pour la valorisation des sous-produits, pour l'utilisation des énergies renouvelables, et pour la promotion et l'adaptation des innovations technologiques au secteur rural, agro-industriel et industriel et la mécanisation de l 'agricul ture. Le CIRT, dont la créa t ion répond aux obj ect ifs thémat iques 4 et 5 du plan, est appelé à reprendre, notamment, les activités de recherche dans le domaine de la technologie alimentaire précédemment menées par l'ITIPAT, société d'Etat dissoute.

L'Institut des Savanes (IDESSA) est un établissement public à caractère industriel et commercial implanté à Bouaké, avec des stations secondaires dans le centre et le nord du pays. Cet organisme a repris les activités de recherche menées précédemment dans la région des savanes par trois instituts du GEROAT (l'IRCT, l'IRAT et l'IEMVT).

Son domaine de recherche couvre douze fil ières: riz-maïs, mi l-sorgho-fonio et autres céréales, légumineuses à graines, plantes à racines et tubercules (igname-manioc-taro), banane plantain et cul tures maraîchères, product ion de viande, pisciculture, pâturage et association agriculture-élevage, coton et plantes textiles, canne à sucre et plantes sucrières, systèmes de production en Côte d'Ivoire et énergies nouvelles (biomasse à partir des déchets agricoles et animaux}. Après avoir fonctionné quelques

18 années à titre expérimental sous la gestion du GEROAT, l'IDESSA fonctionne depuis le 1er janvier 1984 sous gestion autonome de Côte d'Ivoire en sa qualité d'établissement public j le GEROAT lui assure une assistance technique pour l'exécution de ses programmes de recherches. La création de cet établissement public tend à réaliser, à l'échelon régional, les objectifs thématique n01 et structurel n04 du plan.

En ce qui concerne leur mode de gestion et de financement, les organismes de recherches placés sous la tutelle du MENRS peuvent être classés en trois groupes.

Premièrement, les structures de recherche qui ont la quali té de services publics de Côte d'Ivoire, sans l'autonomie de gestion administrative et financière. Font partie de cette catégorie tous les instituts et structures de recherche universitaires, l'Institut de Recherches mathématiques (IRMA), l'Institut d'Ecologie tropicale (lET), le Centre national de Floristique sur le Microscope électronique (GERME) et les Laboratoires de Substances naturelles. Le financement de ces organismes est assuré essentiellement sur le budget général de Côte d'Ivoire, avec des possibilités de financements extérieurs laissées à l'Initiative du Gouvernement de Côte d'Ivoire pour des opérations particulières.

Deuxièmement, les structures de recherche organIsées en établissements publics de Côte d'Ivoire, avec l'autonomIe de gestion administratIve et financière. Elles sont actuellement au nombre de trois: l' Inst i tut Pasteur de Côte d'Ivoire (IPe!), le Centre i voi rien de recherches technologiques (CIRT), et l'Institut des Savanes (IDESSA). Le financement de ces structures est assuré par des subventions sur le budget général de Côte d'Ivoire, par autofinancement et, éventuellement, par des prêts ou des subventions d'organismes extérieurs nationaux ou internationaux.

Troi sièmement, les structures de recherche françai ses implantées en Côte d'Ivoi re : l'ORSTO'vI et les Instituts de Recherches agronomiques appliquées du GEROAT. Ces structures, dotées à l'origine de statuts juridiques variés, ont toutes leur autonomie de gestion administrative et financière. Leur financement est assurée, en application de la Convention générale nO 16/C/60/E du 13 avril 1962 relative à l'aide et à la coopération en matière de recherche scientifique conclue entre la République Française et la Répub­ l ique de Côte d'Ivoi re : pour les programmes de recherches d'intérêt général et les dépenses des sièges socIaux, par la République Française; pour les programmes de recherches d'intérêt local, à parité par la Côte d'Ivoire sur une subvention inscrite au budget général et par la France sur une contribution du Fonds d'Aide et de Coopération. Le montant de la participation française et de Côte d'Ivoire est fixé chaque année, par un Avenant à la Convention.

Le Gouvernement français a procédé récemment à la réorganisation de ses structures de recherche par la création du Centre de coopération internationale en recherche agronomique pour le développement (CI RAD) , et par la transformation de l'ORSTO'vI en établissement public à caractère scientifique et techni­ que, dénommé "Inst i tut français de recherche scient if ique pour le développement en coopérat ion".

Cette réorganisation de la recherche scientifique française en coopération et l'action menée paral­ lèlement par le Oépartement de la Recherche scientIfique de Côte d'Ivoire pour créer et mettre en place des structures de recherche nationales ont amené les gouvernements des deux pays à réactualiser les modalités d'application des dispositions de la Convention générale nO 16/C/60/E du 13 avril 1962. A cet effet, un Accord-cadre a été signé à Paris le 27 avril 1984, à l'issue de la 11ème Corrmission mixte France-Côte d'Ivoire en matière de recherche scientifique et technique. Il prévoit notarrment :

la souveraineté et la propriété de la Côte d'Ivoire sur les biens fonciers et immobiliers des structures de recherche françaises en Côte d'Ivoire j les modalités de transfert de ces biens seront arrêtées d'un commun accord en fonct ion de l'évolu t ion de la rest ructura t ion des inst i tut ions de recherche françaises et de Côte d'Ivoire;

l'ouverture de la coopération à l'ensemble des organismes de recherche français et de Côte d'Ivoire pour la réalisation de programmes menés en commun j

le choix et l'exécution des programmes de recherche sur les bases contractuelles, la contribution de chaque pays étant fixée, programme par programme, par la Commission mixte j

des mécanismes de concertation pour assurer le choix, les modalités d'exécution et le suivi des programmes j

la valorisation des résultats des recherches menées en commun en Côte d'Ivoire sur la base du principe d'une gestion mixte j

l'extension de la coopération au domaine de l'information scientifique et technique (constitution d'une base de données scientifiques en Côte d'Ivoire et appui à la création d'un réseau d'informa­ tion connecté avec les bases de données françaises et internationales)

la prise en compte des actions de fOnmBtion des chercheurs

le statut des personnels de la coopération scientifique et technique.

19 Perspectives pour la période 1985-1989

L'évolution des structures de recherches de Côte d'Ivoire amorcée au cours des trois dernières années devrait se poursuivre dans la perspective d'une responsabilisation totale de la Côte d'Ivoire quant à la gestion des structures de recherches françaises implantées sur son territoire, le transfert là l'Etat de Côte d'Ivoire des biens fonciers et immobiliers de ces structures étant prévu par l'article 2 de l'Accord-cadre signé le 27 avril 1984 avec la France.

Cette responsabilisation implique pour la recherche en Côte d'Ivoire la nécessité de réorganiser l'ensemble du système de recherches pour y insérer les anciennes structures françaises de recherches agronomiques appliquées du GEROAT (I~, IRCC, IRFA, IRCA, CTFT), en dotant ces dernières d'un statut de Côte d'Ivoire. En vue de cet te réorganisat ion, une réforme profonde du système de recherche est à l'étude. Il est envisagé de restructurer ces organismes de recherches agronomiques appliquées dans les zones de forêt en un établissement public (IDEFOR), à l'instar de ce qui a été fait en zone de savanes, avec la création de l'établissement public IDESSA. La coordination et la gestion de la recherche agrono­ mique sur l'ensemble du territoire seraient assurées par la création d'un organisme central, l'Institut na t ional i voirien de la recherche agronomique (INlRA).

Une deuxième nécessité est de créer et mettre en place les nouvelles structures de recherche indis­ pensables au développement agricole, dès que le besoin s'en fait sentir, indépendamment de la restructu­ ration envisagée dans le cadre de l'IDEFüR. A cet effet, il est proposé de créer dans la région de San Pédro une station expérimentale hévélcole (Station du Go), sur le volet-recherche affecté à l'opération de développement hévéicole dans le sud-ouest financée par la Banque mondiale, le CCCE et la COC.

APPfVRNHSSEMNT OC LA axFERATI(]Ij SCIENTIFIOL ET TEOfHOL

Conformément aux orientations et recommandations du Parti et du Gouvernement, la coopération scientifique et technique, à l'échelon bilatéral, sous-régional et international, s'est consolidée et élargie au cours de la période 1970-1985.

Dans le domaine de la coopération bilatérale, la coopération ivoiro-française a connu un nouvel élan tant dans la forme que dans le fond, tandis que dans le cadre du dialogue Nord-Sud et du dialogue Sud­ Sud, on a enregistré un approfondissement des relations avec de nouveaux partenaires.

LE FINI\IIllM:NT OC LA REQ-ER:I-E

A partir de 1971, date de mise en place d'un budget spécifique à la recherche scientifique et technique, l'Etat de Côte d'Ivoire a consenti annuellement, en moyenne, quelque trois milliards de francs CFA au soutien des activités de recherche, ce qui représente une dépense globale, sur la période, de l'ordre de 45 milliards.

Cependant, la participation de l'Etat au financement de la recherche, toutes sources confondues, est estimée à un peu plus de 20 pour cent. A titre d'illustration, au cours de la période 1981)-1984, les dépenses globales de recherche ont été évaluées à 52,4 milliards de francs CFA, dont la répartition est comme suit: budget général - 22,9 pour cent; aide extérieure - 45,2 pour cent; autofinancement ­ 31,9 pour cent.

Il ressort que le financement de la recherche est fortement dépendant de la contribution extérieure, en particulier de la France, aussi bien pour le fonctionnement des structures de recherches que pour les investissements. Par ailleurs, l'autofinancement, dont la majeure partie provient des ressources d'ex­ ploitation, très variable d'une année à l'autre, de certaines structures de recherche agronomique couvre une large part des dép~nses de fonctionnement et d'investissement.

Si l'on considère la nature des dépenses, on s'aperçoit que les dotations destinées aux investisse­ ments sont largement en-deçà des besoins exprimés. En effet, elles représentent, pour la période 1981­ 1984, un volume global de l'ordre de 1,8 milliard alors que les demandes cumulées atteignent 4 milliards. Il importe de souligner la contribution de la Banque mondiale dans le cadre du prêt d'Assistance techni­ que et du Fonds d'Aide et de Coopération de la France qui a atteint un montant de 250 millions de francs CFA grâce auquel il a été possible de maintenir les investissements à un niveau acceptable.

En ce qui concerne les dépenses de fonctionnement, la contribution de l'Etat a régressé au cours de la période 1981-1984 (de 25,9 pour cent en 1981 à 19,6 pour cent en 1983) ; ce qui a limité le bon fonctionnement des structures de recherche et de leurs activités déjà lourdement grévées par la crois­ sance du coat des personnels expatriés, en particulier, au niveau des structures de recherche agronomique et zootechnique. La part du personnel dans le coat global d'un programme est en moyenne de l'ordre de

20 70 pour cent pour un chercheur expatrié et environ 20 pour cent pour un chercheur national, le reste servant au fonctionnement du programme.

Quant à l'aide extérieure (Tableau 1), elle est demeurée stationnaire si l'on tient compte du taux d'inflation variable d'une année à l'autre. De même, les ressources propres (34,7 pour cent) en 1981 ont baissé de façon notable à partir de 1983 avec la chute des prix des matières premières et en raison du déficit hydrique enregistré durant cette période.

TABLEAU 1

Evolution des dépenses globales consacrées à la recherche par rapport au Produit IntérIeur Brut (PIB)

Année 1981 % 1982 % 1983 % 1984 TOTAL %

SOURCE DE FINANCE- MENT

Etat de la Côte d'Ivoire 2.959 0,13 3.733 0,15 2.597 0,10 2.703 0,09 11.992 0,11

Dépense globale 11.414 0,50 14.335 0,56 13.262 0,40 13.439 0,47 52.450 0,50

PIB 2.294.000 100 2.530.000 100 2.700.000 100 2.863.000 100 10.387.000 100

LE T1W'SFERT ŒS ~TATS AU ŒVEL~

En Côte d'Ivoire, la valorisatIon des acquis de la recherche est surtout fonction du statut des struc­ tures impliquées dans ce mécanisme. Elle est également fonction du type de spéculation, selon qu'il s'agi t de cul tures pérennes (cul tures industrielles d'exportation) ou de cul tures annuelles (principale­ ment le vivrier).

Le développement de chaque grande culture est soutenu par l'effort de recherche mené dans un insti­ tut. Ainsi, il s'est établi des relations fonctionnelles entre les sociétés de développement et les instituts spécialisés. Ce sont les sociétés de développement qui ont la charge de vulgarIser auprès des paysans l'innova t ion technologique mise au point par la recherche, et le transfert de ses résul tats au développement est étroitement lié à la capacité de la société de s'approprier l'innovation; aux liaisons organiques établies entre elle et la structure de recherche; à l'organisation, sur le terraIn, pour conduire les actions de prévulgarisation ; enfin, à l'encadrement et à l'assistance fournis aux paysans.

D'importants acquis technologiques sont à la disposi t ion du monde rural ou sont passés dans le développement. Le tableau 2 donne quelques résul tats, tant au niveau des cul tures d'exportat ion qu'à celui des plantes alimentaires et d'élevage.

Voici, sans doute rapidement présentée, la recherche scientifique et technique en Côte d'Ivoire, avec ses lacunes, ses faiblesses, mais également avec ses espoirs et les perspectives qui sont les siennes à l'horizon 2000. Mais il m'importe de présenter quelques indications sur la recherche entomologique en Côte d'Ivoire ou plus exactement sur la lutte contre les ravageurs de nos plantes cultivées, qu'il s'agisse des cultures pérennes (café, cacao, hévéa, palmier à huile, cocotier... ) ou des cultures vivrières (céréales, tubercules, légumineuses, cultures maraîchères).

21 TABLEPtI 2

Carparaison des rende11eflts, en tonnes/ha, entre les stations de recherche et les cultures paysannes pour les principales cultures industrielles et vivrières

Cultures Industrielles Cultures vivrières

Rendement/ha Rendemen t / ha Rendement/ha Rendemen t /ha stat ion paysan stat ion paysan

café robusta 2,5· FM Riz pluvial 4,5 1,3 arabusta 1,7· FM irrigué 8 cacao 1,8·· FM rv'aïs carposite D 4 IRAT 81 11 Hévéa 2 1,6 rv'anioc (selon cycle) 20 à 35 Coton 1,33 Igna-ne (Florido) 30 à 40 Palmier à hui le 9 5,5 (hui le) (hui le) Sorgho 2,5 à 3 0,6

Cocot ier 4 à 4,5 3,5 Banane plantain 20 à 40 20

Ananas 55 40 Mil 1,8 0,6

• café marchand •• cacao marchand

La défense des cultures consiste à lutter directement contre les ennemis ou à protéger la plante contre toute attaque prévisible. Pour aboutir à des résultats intéressants, les chercheurs de toutes les disciplines concernées adoptent généralement la même démarche méthodologique en mettant en oeuvre deux types d'actions: établissement d'un diagnostic de l'attaque associé à l'identification du parasite, ce qui permet de préconiser une première stratégie de lutte; caractérisation du parasite et recherche des données concernant sa biologie.

Il devient alors possible de dégager diverses méthodes de lutte dont le choix est souvent fonction des moyens financiers disponibles et de l'urgence de la défense à mettre en oeuvre. C'est ainsi que la lutte chimique continue à être utilisée par la plupart des grandes plantations dotées de moyens impor­ tants. D'autres, de conception plus récente telle que la lutte agronomique, géneralement plus économi­ que, devraient satisfaire les petites exploitations. Un accent particulier doit être mis sur les possibilités offertes par les travaux sur l'amélioration génétique de variétés de plantes visant en partie à une amélioration de leur rendement mais également et surtout à une sélection de variétés résis­ tantes aux multiples agressions naturelles. Enfin des espérances sérieuses sont offertes par les méthodes de lutte biologique en pa~se de devenir moins coûteuses que les méthodes chimiques et présentant aussi l'avantage d'être moins perturbantes pour les écosystèmes naturels.

Quelles sont les contraintes? Premièrement, la faiblesse du potentiel-chercheur qui n'autorise pas la mise en place d'équipes multidisciplinaires. En effet, la lutte contre les ravageurs et la protection des cultures utilisent le savoir-faire d'un grand nombre de spécialistes qui dans bien des cas coordon­ nent leurs efforts dans les limites de leurs compétences propres. Il s'agit principalement des agro­ nomes, des généticiens, des entomologistes agricoles, des nématologistes, des phytopathologistes, des bactériologues et des virologues, sans oublier l'intervention d'ornithologues et de mammalogistes qui peut être fort utile. Bien des disciplines ci-dessus citées sont sous-représentées dans le dispositif nat ional de recherche.

Deuxièmement, l'absence d'un service organisé d'avertissement agricole. Cette lacune est criante dès lors qu'il s'agit de lutter contre un fléau comme le criquet puant. La Côte d'Ivoire dispose de nombreuses études sur les insectes ravageurs des cul tures, s'agissant même de leur biologie, leur repro­ duction, les facteurs de pullulation et leur éthologie. L'ensemble de ces connaissances devrait pouvoir être collecté, regroupé et traité de telle sorte que les paysans soient informés à tout moment des risques d' invasion ou d' infestat ion des champs.

22 LES RECHERCHES ENTOMOLOGIQUES DANS QUELQUES PAYS DE LA REGION

Lors de l'atelier, quelques participants ont présenté des résumés de la situation de l'entomologie agricole et forestière dans leur pays. Ces résumés, bien que personnels et partiels, sont présentés ci­ dessous pour cinq pays de la régIon: Congo, Gabon (avec un accent particulier sur les recherches à Makokou), Guinée, République Centrafricaine et Togo.

A. aND

Daniel Diangana 1 et Antoine Ki yindou Z

Au Congo, les principales cultures vIvrières paysannes sont l'arachide, la banane, l'igname, le manioc, le maïs et le riz, le manIoc étant la plante dominante. En cul ture industrIelle café, cacao, canne à sucre, palmier à hui le, manioc et arachide, auxquels s'ajoute pour la foresterie un programme à grande éChelle de plantation d'Eucalyptus (en cours de réalisation).

Il n'existe pas actuellement au Congo d'inventaire exhaustif des parasites des cultures. Cependant les insectes parasites du manioc ont été inventoriés. Le problème de la protection du manioc contre la cochenille Phenacoccus manihoti est le plus important. Un programme sur l'écologie et la lutte biologi­ que, notamment par entomophages, contre la cochenille du manioc a été entrepris depuis plusieurs années et mobilise plusieurs chercheurs.

Pour ce qui concerne les Eucalyptus, une liste des parasites déjà observés a été dressée, la protec­ tion contre certains Hétéroptères est à envisager. Pour ce qui concerne la protection des essences forestières de plantation, des programmes de recherche et de lutte vont être initiés très bientôt avec la création d'une cellule de recherches (le massif forestier planté en Eucalyptus fera partie des prio­ ri tés). L'étude de la faune forestière proprement di te est actuellement limitée à quelques programmes ponctuels intéressant la biologie et l'écologie de certains groupes d'insectes, notamment les termit/?s. Il n'y a pas, à notre connaissance, de programme d'inventaire actuellement. De plus un programme sur les insectes des denrées stockées a été entrepris depuis deux ans.

Nos activités personnelles se rapportent

à l'étude des prédateurs Coccinellidae de la cochenille du manioc, les contacts sont permanents avec d'autres chercheurs de l'ORSTCM et de l'Université. Ultérieurement, j'envisage de contribuer à l'inventaire et à la connaissance des espèces d'insectes présents en forêt (A. Kiyindou)

à la mise en place de programmes de recherches sur les ravageurs potentiels des essences forestières cultivées. J'envisage la réalisation d'inventaIres exhaustifs des parasites d'espèces de reboise­ ment au Congo: Eucalyptus, Acacia, Pins, etc... en zone de savane; limba , Okoumé, etc... en zone de forêt avec l'appui de l'entomologiste du CTFT de Nogent-sur-Marne (France) (O. Diangana).

Il n'existe pas de collection nationale au Congo mais des collections, plus ou moins importantes, existent à l'ORSTCM et à l'Université. Nous envisageons:

la mise sur pied d'une collection nationale bien entretenue. Pour cela des moyens financiers suffisants et une formation de longue durée dans un musée sont indispensables. Il convient d'in­ sister sur les nombreuses difficultés auxquelles nous devons faire face, financières, techniques et relatives aux identifications (A. Kiyindou) ;

Centre technique forestier tropical, BP 764, Pointe Noire, Congo. ORSTOM, BP 181, Brazzaville, Congo.

23 de fournir régulièrement du matériel, soit par l'envoi d'échantillons, soit en invitant les col­ lègues entomologistes de l'ORSTOM et de l'Université à prospecter avec moi dans les plantations; de constituer une collection thématique sur les ravageurs des essences de reboisement. Comme observé ci-dessus, les moyens matériels font défaut (D. Diangana).

B. GAEOl

Paul Possa l

Les recherches entœvlogiques du Projet M/\B à Mikokou

Dans le cadre du Projet MAB à Makokou, les insectes sont étudiés dans le cadre de deux programmes différents (Programme 02 : compartiment sol, et 05 : interactions faune-flore). L'étude des invertébrés du sol (opération 04 du programme 02) a jusqu'à présent plus porté sur les inventaires que sur la biologie et l'écologie.

Parmi les résultats obtenus, on peut citer l'identification de 60 espèces de thecamoebiens étudiés par Bonnet en 1966, de treize espèces de chllopodes, dont trois nouvelles, par Demange et Mauries en 1968, et 21 espèces de diplopodes, dont 15 nouvelles, par Jacquemin, Mauries et Demange. Fain et Coineau (1968) ont découvert quatre espèces nouvelles d'acariens, dont trois genres nouveaux.

Pour ce qui concerne les insectes, Massoud et Barra en 1968, puis Texen en 1979, ont identifié 19 espèces de collemboles comprenant dix espèces nouvelles. L'inventai re des Scarabeldae coprophages a montré l'existence de 157 espèces; parmi celles-ci dix sont nouvelles, cinq d'entre elles vivant dans la canopée. Les fourmis, les termites (par Y. Sangaré) sont en cours d'étude. Pour mémoire, ci tons les oligochêtes, aussi en cours d'étude.

Dans le programme 05, l'opération relative aux ravageurs de forêt inclut la "comparaison de la phytophagie sur les di fférents types de plantes du sous-bois en forêt dense humide". Dans le but de mieux comprendre le phénomène de dynamique en forêt dense, la mesure de la phytophagie est envisagée sur trois types de plantes du sous-bois: les plantules d'arbres en attente, celles de lianes, et les plantes sciaphiles accomplissant tout leur cycle en sous-bois.

Etude de la composition du sous-bois et de la consommation différentielle des plantes

Un transect d'étude de 50 m de long et 50 cm de large a été mis en place dans une zone primaire de la forêt. Toutes les espèces rencontrées ont été notées, ainsi que leur hauteur (jusqu'à 3 ml, leur type de réparti tion, et leur taux moyen de consommation. Le tableau suivant indique les principales données récol tées :

Nart:Jre % Nart:Jre % Consomma t ion d'espèces d'espèces d'ind. d'ind.

ü% 0-25% < 25%

Plantules arbres 15 25,4 97 21,8 21,4 78 0,5

Plantules arbustes 10 16,9 29 10,8 11,6 57,7 30,5

Herbacées 14 23,7 120 27,5 14,4 78,7 6,6

Plantules lianes 20 33,8 160 39,8 27,4 65 7,5

TOTAL 59 100 406 100 18,7 70 11,2

Les proportions des différents types biologiques rencontrés sont mesurées tous les trois mois, et permettront de préciser la variation, sur un cycle annuel, de la composition floristique du sous-bois, ainsi que de la consommation des végétaux. D'autres transects sont commencés dans d'autres types de sous-bois; leur étude permettra de comparer les différences au niveau de la phytophagie.

Directeur, Institut de Recherche en Ecologie tropicale, BP 13 354, Libreville, Gabon.

24 Impact sur la croissance des végétaux de la consommation par les insectes herbivores

Neuf espèces de plantes ont été sélectionnées parmi les plus fréquentes du sous-bois. Elles sont actuel­ lement suivies quant à leur croissance (apparition de jeunes feuilles, latence du bourgeon apical), et au type de consommation dont elles font éventuellement l'objet. Ces mêmes espèces sont suivies sur le terrain d'une part, et en laboratoire d'autre part, où des expériences de section de feuilles simulant la phytophagie seront faites. Le suivi de ces plantes pendant une année apportera d'intéressantes données sur les conséquences de la phytophagie.

Les principaux herbivores de forêt sont les orthoptères et les lépidoptères. Les chenilles sont souvent inféodées à une espèce végétale donnée, et certaines sont élevées en terrarium. Les papillons, chenilles et orthoptères mangeurs de feuilles sont envoyés en France pour détermination.

Parmi les activi tés prévus, les transects font l'objet d'un suivi trimestriel. Les plantes marquées en forêt et au laboratoire sont suivies hebdomadairement. Une étude plus approfondie des propriétés chimiques des plantes étudiées sera fai te ul térieurement, ainsi que l'étude de la spéci fici té plante­ insecte.

Etude de l'impact des insectes herbivores sur les différents types de plantes rencontrées dans le sous-bols

Le sous-bois de la forêt dense abrite deux principaux types de plantes : les plantes d'ombre, adaptées à ce mi lieu et y effectuant tout leur cycle, et les plantules d'arbres et de lianes dont le cycle sera bouclé lorsqu'elles auront at teint les couches lumineuses de la forêt. Il existe toute une faune d'in­ sectes (chenilles et criquets principalement) qui se nourrissent de ces plantes.

L'impact de ces consommateurs sur les plantes du sous-bois est étudié de trois manières:

1. Suivies de 170 plantes marquées in situ: huit espèces de plantes de sous-bois (herbacées: Comme­ lina longicapsa, Dorstenia picta, Geophila obvallata, culcasia cf scandens, Leptaspis cochleata ; arbus­ tes : Alchornea f1oribunda, Microdesmis puberula, Baphia leptobotrys). Sept espèces de lumière (trois lianes: Dalhouseia africana, Roureopsis obliquifoliolata, Lavigeria macrocarpa ; quatre arbres: Peter­ sianthus macrocarpus, Scorodophloeus zenkeri, Santiria trimera, Polyalthia suaveolens). Ce suivi est effectué par relevés mensuels des taux de consommation des feuilles, et de leur rythme d'apparition ainsi que de l'architecture des plantes marquées. Les résultats de ce suivi seront analysés ultérieurement sur ordinateur (mémoire de D.E.A.).

2. Transects permanents en forêts (0,50 m x 200 m), où sont relevés, à différentes périodes de l'année, la composition floristique et le spectre biologique du sous-bois.

J. Expériences in situ de traumatismes artificiels par coupage de feuilles (5 pour cent, 25 pour cent, 50 pour cent, 75 pour cent) sur quatre espèces de plantes: Dorstenia picta (Moraceae), plante de sous­ bois peu attaquée par les insectes; Alchornea floribunda (Euphorbiaceae), plante de sous-bois attaquée par les insectes; Santiria trimera (Burseraceae), plantule d'arbre peu attaquée par les insectes; Petersiar.thus macrocarpus (Lecythidaceae), plantule d'arbre attaquée par les herbivores.

Constitution d'une collection d'insectes herbivores récoltés en forêt

Les chenilles ramassées sur les espèces végétales étudiées sont élevées en terrarium, et les couples chenilles/papillons obtenus sont envoyés en France pour détermination (Laboratoire d'Entomologie, Univer­ sité Paris-Sud, BT 446, 91800 Orsay). Les orthoptères récoltés dans les mêmes conditions sont soit élevés en terrarium pour déterminer l'ampleur de leur régime alimentaire, soit disséqués. Le contenu stomacal (débris d'épidermes de feuilles) est comparé à un catalogue de référence d'épiderme de feuilles de plantes connues.

Les ravageurs des cultures au Gabon

Une liste des insectes nuisibles et des maladies des cultures au Gabon, établie par Peter D. rv\anser, a été communiquée par J. Boussienguet. Bien que donnée comme provisoire par son auteur, cette liste est déjà très complète et, pour ce qui concerne les insectes, la plupart des ravageurs importants sont cités. On s'étonnera pourtant de ne pas y voir figurer certains déprédateurs classiques tels que Coelenomenodera minuta pour le pëlmier à huile, Xylosandrus morstatti pour le café et les différents borers du riz par exemple, alors que des insectes d'intérêt secondaire sont souvent signalés pour ces mêmes plantes.

La division de la liste est faite par plantes - classées par ordre alphabétique - et pour chacune, les maladies bactériennes, virales et cryptogùmiques rencontrées puis les insectes, les nématodes, ainsi que, dans certains cas, les oiseaux et mammifères sont cités.

L'importance des dég.§ts est donnée selon un indice de 1 à 5 dég.§ts présents mais rares, dégâts présents mais peu importants, dégâts sensibles, dégâts importants, cultures ravagées.

25 Cette liste est un outil precIeux pour les entomologistes agricoles qui exercent ou exerceront au Gabon et l'on peut souhaiter voir paraftre ultérieurement une liste complétée, sinon définitive puisque, en la mat 1ère, rien n'est jamais déf ini tif !

c. WIN:E

Elakary Coul ibaly 1

La République de Guinée, malgré les nombreuses missions de recherche scientifique enregistrées depuis les années '20, n'a jusqu'ici pas connu le développement escompté des recherches entomologiques. Ce phéno­ mène a été dénoncé à la dernière Conférence nationale scientifique en 1985 sur le plan général de la recherche. Aussi, suite aux décisions de cette conférence, des décisions ont été prises pour la promo­ tion de la recherche scientifique dans tous les domaines. Dans ce cadre, avec la priorité accordée à l'heure actuelle à l'agriculture dans le pays, l'entomologie est lancée pour toute intervention utile. Les recherches fondamentales sur l'entomofaune, ainsi que l'entomologie médicale, ne seront cependant nullement négligées.

Les cultures dominantes en Guinée sont actuellement les cultures vivrières (riz, mil, fonio, manioc, patate, taro, pomme de terre, tomate, etc... ). Une nette reprise des cultures industrielles est enre­ gistrée à l'heure actuelle: café, cacao, banane, ananas, hévéa, palmier à huile, etc... L'inventaire des insectes parasites des cultures est loin d'avoir été fait de façon exhaustive. Aussi devant les dégâts causés par ces parasites dans les champs de riz, de mil, fonio, manioc, tomate... ou dans les plantations de café, de banane et d'ananas, un séminaire international vient de se tenir à Conakry (KIndia) autour de la protection des végétaux (particulièrement des cultures) et dont les recommandations ne tarderont pas d'être appliquées par les cadres intéressés. Le traitement des cultures industrielles pose un. grand problème pour les producteurs exportateurs.

Des programmes de lutte contre les ravageurs des cultures ont été définis pendant les travaux du dernier séminaire international: lutte chimique (et biologique) pour les plantations de cultures in­ dustrielles (café, cacao, ananas, banane, etc... ), essais de lutte intégrée dans les exploitations expérimentales des centres de recherche agronomique. Les programmes de lutte biologique sont encore à l'état de projets en raison de moyens insuffisants.

Pour ce qui concerne la recherche et la lutte contre les insectes d'intérêt forestier, des program­ mes sont en projet mais non encore mis en exécution comme DU CTFT de Côte d'Ivoire. L'entomologie forestière est très peu développée.

Ma participation aux programmes existants se situe au niveau de la formation des étudiants pour lesquels j'établis des programmes, et qui exécutent des travaux dans certaines stations agronomiques et forestières avec la bonne collaboration de certains collègues guinéens et étrangers. Les travaux d'in­ ventaire dominent pour le départ. Ces programmes ne sont pas en général focalisés sur un groupe précis d'insectes mais plutôt axés sur l'étude du complexe faunistique parasite d'une culture déterminée. Les spécialisations par groupe d'insectes se feront un peu plus tard. Dans ce cadre, avec une spécialisation en entomologie dès la 3ème année d'université (à la Chaire de Zoologie), une formation complète (dont celle en systématique) sera très bientôt atteinte dans mon pays.

Il n'y a pratiquement pas encore de collections nationales car celles qui existent sont dispersées dans di f férents laboratoires (Uni versi té, inst i tuts agronomiques, stat ions agronomiques expér imentales, Centre national de protection des végétaux... ). Conservées de manières diverses, elles devront être réunies (collections de référence) en un point (soit dans un Muséum, soit à l'Université) pour une meilleure gestion. Ceci faciliterait l'évaluation des efforts de recherche des entomologistes du pays.

C'est d'ailleurs l'occasion de regretter que beaucoup de missions étrangères, pourtant soutenues par le Gouvernement, n'aient pas plus contribué à la constitution de nos collections nationales. Sur ce point on pourrai t espérer davantage de la recherche sc ienti f ique dans nos pays en développement, où beaucoup de jeunes chercheurs sont en quête d'une assistance hautement qualifiée.

Des collections de travail sont en train de se constituer. Elles serviront dans les laboratoires de zoologie de la Faculté de Biologie de l'Université de Conakry, en attendant d'être mises en valeur. L'identification reste un problème dont la solution sera certainement trouvée avec la bonne collaboration de collègues guinéens, africains ou étrangers. Ces premières collections seront conservées au Musée zoologique de l'Universi té. J'envisage personnellement de regrouper toutes les collect ions existantes dans le pays au-niveau des institutions de recherches, pour le départ, au niveau du Musée de zoologie de l'Université en attendant qu'un Muséum d'Histoire naturelle soit créé avec l'aide de quelques institu­ t ions internat ionales.

Division de l'Environnement, ICCRDG-DRST, BP 561, Conakry, République de Guinée.

26 En at tendant la créat ion d'u-e revue d'entomologie par le Comi té nat ional de Biosc iences, ou au ni veau de la région par le Réseau africain de Biosciences, je demanderais aux inst i tut ions internat ionales (notamment l'IFAN) de bien vouloir accepter sans trop de restrictions la publication des articles des jeunes chercheurs d'Afrique travaillant sur la faune africaine. Entre temps, des dispositions sont déjà prises pour l'installation dès le premier semestre 1986 du Comité national de Biosciences, devant cerner tous les problèmes de recherches biologiques dans le pays. Vers la fin de l'année 1986 sera constituée la première Association d'Entomologistes de Guinée.

Mes projets de recherche personnels sont les suivants Importance des Medecera (Diptera Dollcho- podidae) en économie forestière; Etude des Lépidoptères déprédateurs des écosystèmes forestiers et savanicoles.

o. REPlD...Ia...E CENTRAFRICAIIIE

Eugène Kaine 1 et O1ristophe Lah Saraga •

Les inventaires et recherches entomologiques

En République Centrafricaine, les cultures de type paysan sont: arachide, maïs, sésame, sorgho, mil, manioc et une gamme importante de légumes tels que gombo, citrouille, piment, tomate, igname, etc. Les cul tures industrielles importantes sont le caféier de type "Robusta" qui couvre le sud-ouest et le sud­ est, et de type "Excelsa" à l'est du pays. On ajoute aussi le cotonnier et la canne à sucre au centre, le tabac au nord-ouest, et le palmier à huile au sud-ouest (Société Centrapalm).

Des inventaires sérieux des insectes parasites des cultures ont été réalisés par les sociétés mixtes de développement, la Société Centrafricaine de développement agricole (SOCAOA) pour le cotonnier, et l'Agence de développement du café (ADECAF). Les problèmes phytosanitaires se posent dans les petites plantations de type paysan, qui sont dispersées dans toutes les régions de culture, et que le service de protection des végétaux ne parvient pas à contrôler.

Un programme de lutte contre la cochenille du manioc (Phenacoccus manihoti) a été mis en place. Pris en charge dans un programme national, le PRODE~, il est coordonné par l'Institut international d'Agriculture tropical à Ibadan et financé par un programme allemand (!TZ). Un groupe de chercheurs allemands travaille actuellement sur les denrées stockées.

Il n'existe pas en ce moment, à notre connaissance, de programme de recherche sur les insectes d'intérêt forestier, sauf information contraire auprès du Ministère des eaux et forêts de la République Centrafricaine.

L'un de nous (E. Kaine) va entreprendre l'inventaire des insectes comestibles de la forêt de la Basse Lobaye af in d'établ i r, à long terme, la relation d'interdépendance en tre cet te forêt et les popula­ tions environnantes. En Centrafrique en effet, les insectes comestibles constituent une source non négligeable de protéines. Devant la déforestation active, la destruction des populations de chenilles comestibles par l'action des pesticides, la destruction des arbres nourriciers en forêts contrôlées (arboretum) au moyen de produits toxiques, il est urgent d'étudier le rôle exact des insectes (chenilles, "sauterelles", termites) dans l'alimentation humaine en République Centrafricaine.

Un programme sur les hémiptères est par ailleurs envisagé (C. Lah Saraga).

Les collections

Au niveau national, il existe des collections: à l'Institut superieur du Développement rural (ISDR) de M'Baiki (ce sont de vieilles collections servant de matériel didactique. Il n'a pas été créé de nouvel­ les collections depuis longtemps) ; au Centre de recherches de Boukoko à M'Baiki ; et à l'Institut national de recherches des cultures textiles à Bambari.

Il faut signaler que, avant leur départ des Centres de recherche de Boukoko et de la Baboké, les chercheurs expatriés avaient laissé de belles collect ions d'insectes. Le manque d'entret ien à l'époque par défaut de cadres compétents avait entraîné la détérioration partielle de ces collections. La notion de collections nationales au sens de patrimoine n'est pas développée. L'intérêt des collections existan­ tes est actuellement d'ordre didactique et phytosanitaire.

Faculté des Sciences, BP 908, Bangui, République Centrafricaine. Institut supérieur de Développement rural de M'Saiki, BP 909, Bangui, République Centrafricaine.

27 Nous sommes personnellement intéressés par la constitution de collections nationales, mais souhai­ tons auparavant être en possession d'un matériel assez complet de piégeage et de conservation, qui nous fait actuellement entièrement défaut et pour lequel nous n'avons aucun moyen financier.

Il n'y a pas d'inventaire faunistique pour le moment, si l'on excepte ceux réalisés sur les plantes cultivées citées ci-dessus. Il nous semble que cette motivation doit passer par les écoles d'agricul­ ture, qui devront s'équiper de matériel de travail, de piégeage et de préparation, afin de sensibiliser les élèves et formateurs.

E. Toro

Sanda Kolla 1

Au Togo, les principales cultures industrielles sont le café, le cacao, le coton et le palmier à huile; les plantes vivrières les plus cultivées au niveau paysan sont maïs, manioc, mil, sorgho, igname et patate douce. La protection des cul tures est assurée par le service de la protect ion des végétaux, assisté de deux instituts: la Société de rénovation café-cacao (SRCC) , qui s'occupe de la vulgarisation, et l' Inst i tu't de recherche café-cacao (IRCC), qui est plus spécialement chargé de la recherche. Des relat ions exIstent aussi avec l'Universi té.

Un inventaire des insectes parasites a été réalisé et le Service de la protection des végétaux a édité des fiches techniques de vulgarisation sur les principaux parasites des cultures, insectes, plantes adventices, champignons, à l'usage des paysans. Ces fiches décrivent sommairement le parasite, sa biologie, ses dégâts, et donnent des conseils de lutte, tant par les mesures snnitaires et culturales que par la méthode chimique. Ces méthodes, simples, sont applicables par les cultivateurs.

Des recherches sur l'ut i l isat ion des substances actives toxiques ou antiappétentes (azadirachtine) contenues dans le neem (Melia indica) sont actuellement effectuées, avec le concours du Gouvernement de la Républ ique fédérale d'Allemagne. On utilise le feuillage de cet arbre en paillage et les graines broyées et filtrées en pulvérisations sur les cultures maraîchères, l'huile des graines dans le stockage du haricot, etc.

Parmi les problèmes entomologiques préoccupants actuellement, on peut citer la cochenille du manioc (Phenacoccus manihoti) depuis cinq ans, ainsi que les acariens verts (Mononychellus spp.), qui peuvent occasionner des pertes considérables et pour lesquels des essais de lut te biologique sont ou seront entrepris.

Un borer Cerambycidae (Philemativum festivum (Fab.)) provoque des dégâts sur le kari té (Butyro­ spermum parkii) et la cochenille des arbres fruitiers (Rastrococcus spinosus) par l'action de la fumagine surtout, entraîne une situation catastrophique sur les manguiers particulièrement.

Pour ce qui concerne les denrées stockées, c'est le capucin du maïs (Prostephanus truncatus) qui pose le plus de problèmes et a justifié une fiche technique de lutte et de prévention détaillée.

Actuellement, il existe des programmes de lutte contre la cochenille farineusedu manioc (lutte biologique), ainsi que contre les acariens verts du manioc et le capucin du maïs. Je participe person­ nellement à ces programmes avec d'autres entomologistes togolais et étrangers (lITA, CIse et GTZ). Un programme de lutte contre la cochenille des arbres fruitiers va être entrepris.

Il n'existe pas de collections nationales, mais nous souhaitons les créer dans la mesure où nous pourrons bénéficier d'une assistance extérieure. J'ai constitué des collections de travail dans le cadre de la protection des végétaux et dans celui de la recherche, mais la gestion, l'entretien, le développe­ ment et les identifications présentent des difficultés.

Service de la protection des végétaux, Ministère de l'aménagement, Lomé, Togo.

28 LA FORET 5EMPERVIRENTE CADRE DE L'ENTOMOLOGIE FORE5TIERE

Yves Gi 1100 1

1NTRD.I:TI()Il

Du point de vue de la richesse spécifique, une forêt dense humide n'est pas essentiellement peuplée de végétaux, mais d'insectes! Toutefois, l'énorme diversi té des insectes qui vivent dans ces forêts est liée à celle de la végétation. Le nombre d'espèces à prendre en compte est d'autant plus important qu'il ne faut pas considérer l'entomologie forestière comme la science des insectes xylophages, mais comme celle de tous ceux dont l'existence dépend du milieu forestier. Nous examinerons donc quelles sont les caractérist iques de ce mi lieu qui peuvent condi 1ionner la présence des Insectes "forest iers".

La richesse spécifique constitue à la fois un obstacle majeur aux recherches sur ces insectes et une raison impérative de les étudier. Cet obstacle, le nombre immense, et même, jusqu'à présent, incalcula­ ble, des espèces d'insectes, est malheureusement lié à d'autres difficultés considérables d'étude:

Méconnaissance taxonomique. La majeure partie des espèces ne sont pas décrites, et celles qui le sont n'ont fai t l 'obj et que de très rares synthèses, même part ielles et régionales: quelques groupes spectaculaires ou d'intérêt médical.

Rareté des individus dans chacune des espèces, à tel point que globalement, la forêt paraît peu "peuplée".

Di f f icul té d'échant i llonnage, et même d'accessibi lité pour la collecte, en raison de la hauteur et de la structure de la végétation.

Il faut aussi savoir que lorsque l'on dit "connaître" une espèce, cela signifie seulement, le plus souvent, que quelques individus, adultes, parfois un seul en mauvais état, ont été affublés d'un binôme latin. Baptême accompagné d'une description sommaire de leur morphologie. Or l'ancienneté du milieu forestier et le nombre même des espéces en présence, font penser que l'évolution a pu se traduire par la différenciation de phénomènes biologiques très variés, inconnus ailleurs, qui restent à découvrir.

La vi tesse à laquelle disparaissent les forêts donne une urgence à ces études. La forêt semper­ virente de plaine étant un milieu condamné à relativement brève échéance, l'est donc aussi la grande majorité des espèces animales qui en vivent. Il ne faudrait pas en déduire que l'étude de son entomo­ faune est sans incidence pratique.

En effet, l'origine de la faune des milieux anthropisés pose problème. De plus sa dynamique ne peut s'expliquer en dehors des adaptations aux conditions origineiles. Dans des forêts constituées d'une mosaïque de mi lieux différents, avec des chabl is dispersés, et où les pieds d'une même espèce d'arbre sont séparés par d'autres végétaux, l'appauvrissement spécifique lié à l'extension des peuplements pion­ niers - sans compter les cas de sylvicul ture ou arboriculture monospéci fiques - peuvent provoquer la prolifération d'insectes dont le potentlel biotique était adapté à des conditions intermittentes et discontinues.

Chef du Département Milieux et Sociétés, ORSTCM, 213 rue la Fayette, 75480 Paris Cedex 10, France.

CENTRE DOCUMENTATION 29 Montpellier DI STRIEUT I(JII

Etendue

La forêt sempervirente couvre près de la moitié de l'ensemble des forêts intertropicales (1.160 millions d'hectares sur 2.970 millions). Elle est centrée approximativement sur la bande équatoriale, mais peut at teindre, ou même dépasser, le tropique : en Chine au nord, à Madagascar et sur la côt e aust rai ienne orientale au sud.

Les trois principaux massifs de forêt sempervirente ont en effet une distribution équatoriale. Ce sont

6 2 le bassin amazonien (4,0 x 10 km ), qui couvre un tiers du continent sud américain et draine près de 20 pour cent des eaux douces du globe

6 2 le bassin congolais (1,8 x 10 km ) en Afrique

6 2 les îles et presqu'îles indomalaises (1,5 x 10 km ) en Asie Java + Kalimantan + Sumatra + Nouvelle Guinée..•

Ces valeurs ne doivent pas être considérées corrme absolues car les limites entre forêts semper­ virentes et semi-caducifoliées sont progressives. Aussi les chiffres sont-ils assez variables suivant les auteurs.

Trois pays seulement sont couverts par la moi t ié des forêts sempervirentes du globe: le Brésil, le Za1re et l'Indonésie. Cependant, le nombre des pays où l'on trouve ce type de forêts est bien plus élevé: 37 en Afrique, 23 en Amérique et 16 en Asie.

En plus de leurs limites latitudinales, ces forêts sont d'autant plus limitées par l'altitude que le climat est plus sec; sécheresse qui varie considérablement suivant l'exposition. Elles peuvent, à l'Equa teur, dépasser 2.000 m d'al t i tude.

La biomasse que constitue cet écosystème atteint 205 x la tonnes si l'on se base sur une extra­ polation à partir des volumes.

Variations temporelles

Un écosystème de type forestier humide a pu se maintenIr sans discontinuité, par endroi t, depuis 50 millions d'années. Cependant Coole a trouvé des strates de pollens de plantes de savane en forêt ama­ zonienne et des sables d'origine éolienne dans le bassin inférieur du Zalre. A l'écheile de temps humaine on voit, sans action directe de l'homme, fluctuer le tracé des lisières. L'étendue des forêts a donc varié considérablement au cours des temps. La vitesse de disparition actuelle de la forêt, du fait de l'homme, est évaluée au minimum à 11,4 millIons d'hectares par an : 20 ha/minute! Cette moyenne recouvre des réalités très différentes suivant les pays. Les déforestations les plus rapides s'observent actuellement en Indonésie (500.000 ha/an), en Thaï lande (333.000 ha/an) et au Brési 1.

Pour Eisner, la surface totale de ce type de forêt a déjà été réduite de moitié depuis un siècle, et pour Holden, il n'en restera rien, en plaine, avant 50 ans.

Les causes de ces destructions sont variées, mais l'exploitation du bois n'en représente qu'une faible fraction. Les forestiers qui exploitent les essences commercialisables ne sont pas directement responsables de la déforestation, mais, en ouvrant des pistes, ils ouvrent la forêt à l'agriculture itinérante sur brQlis.

De grandes étendues sont aussi déforestées au profit de plantations monospécifiques (Hevea et Elaeis en particulier). Les "squelettes" des arbres abattus, disposés en lignes (andins) par les engins mécani­ ques (dont le rôle néfaste sur les sols a été démontré), se désagrègent sur place sans profit pour personne. On a pu parler des forêts surexploitées et sous utilisées.

Aux destructions massives il faut ajouter les dégradations progressives, qui se traduisent par un assèchement du milieu (moindre évaporation et plus fort ruissellement) qui augmente les risques d'in­ cendie. C'est ainsi que 3,5 mi Il ions d'hectares furent détrui ts à Kal imantan Est, dans un immense incendie qui dura de février à juin 1983.

11 existe, en théorie, une volonté internationale de protection de ces milieux. Cependant, les zones bénéficiant, ne serait-ce que sur le papier, d'un statut les protégeant couvrent au total moins de 2 pour cent des surfaces et sont choisies pour des raisons indépendantes de leur richesse biologique, puisque celle-ci est largement méconnue, mais pour des raisons de corrmüdité ou d'opportunité.

30 LE a..IM\T ŒS ~S SEM'ERVlRENTE5

La sécheresse et le froid sont les deux principaux facteurs cl imat iques l iml tant l'extension des forêts sempervirentes, mais la forêt modifi~ le climat à tel point qu'elle peut persister dans des conditions où sa réinstallation n'est plus possible après destruction.

En zone forestière, les mesures du macroclimat sont obligatoirement biaisées par les répercussions du microclimat. Les "conditions standard" des stations météorologiques (à 2 m du sol et à une distance au moins égale à la hauteur de la végétation) nécessitent la destruction de la forêt dans la station d'étude. Ces mesures "en clairière" n'ont pas de valeur pour la canopée, où l'albedo est moindre, donc l'absorption énergétique plus élevée.

Le rracrocl ÎlTBt

Les principaux caractères du macroclimat sont d'ordre radiatif, thermique et hydrique. L'ennuagement est généralement important, ce qu i l imi te l 'énerg ie incidente, donc la tempéra ture et l 'évapot ranspi rat ion, malgré la surface d'échange liée à la surface foliaire.

La proportion d'énergie solaire atteignant la végétation (la canopée lorsque la forêt est en place) représente souvent moins de la moitié du rayonnement incident au niveau de la troposphère: 58 pour cent à Samaru (Nigéria) ; 48 pour cent à Kinshasa (Zaïre) ; 44 pour cent à Abidjan (Côte d'Ivoire) ; 41 pour cent à TaI (Côte d'Ivoire).

Pour cette dernière station, la valeur moyenne recouvre de grandes différences. Les valeurs mini­ males de transmission s'abaissent à 15 pour cent (maximum d'ennuagement après le solstice d'été et maximum de poussière atmosphérique lorsque la convergence intertropicale est en positIon australe), et les valeurs maximales s'élèvent à 62 pour cent, lorsque l'atmosphère est "lessivé" après les fortes pl~ies. Il en résulte que les périodes de rayonnement maxImal coïncident, contradictoirement à première vue, avec les périodes de forte pluviosité: ce qui est favorable à la croissance végétale.

Les écarts thermiques saisonnIers sont les plus faibles que l'on puisse observer en mIlieux terres­ tres. Les valeurs moyennes sont le plus souvent situées entre 25°C et 30°C. Les écarts nychthéméraux sont les plus faibles de la ceinture Intertropicale.

Les pluies sont abondantes, mais leur distribution est plus importante que leur total annuel. AinsI la forêt gabonaise ne reçoit que 1.750 m d'eau par an. En Asie, des zones à climat de mousson peuvent recevoIr beaucoup plus d'eau, mais présenter une période sèche trop longue pour le maintien d'une forêt serrpervirente.

Le minimum d'apport hydrique nécessaire dépend de l'évapotranspiration, qui atteint 1.200 à 1.500 mn par an dans ces zones climatiques.

C'est l'eau apportée aux racines plus qu'au feuillage qui importe, d'où une irrégularité de distri­ but ion des format ions forest ières en fonct ion du modelé du terrain: forêts en bas de pente ou au pied des inselbergs par exemple.

Le bilan hydrique s'exprime, en mm, par

PE + R + 1\ S

P Précipitations

E Evapotranspiration

Elle est élevée en raison de la persistance du feuillage, de la surface foliaire étagée, du manque de mécanismes s'opposant à la dessication. Elle reste pourtant inférieure à celle de l'eau libre. On observe toujours des périodes Où E > P. L'existence de la forêt dépend de la durée et de l'intensité de la période déficitaire.

R Ruissellement, qui dépend de la structure de la végétation et de la litière, mais aussi de la pente et de la nature du sol.

1\ S = Variation du stock édaphique. Le maximum (capacité au champ) est limité par l'espace disponible dans les pores du sol.

L'analyse décadaire permet, mieux que l'analyse mensuelle, la mise en évidence de périodes défici­ taires.

Un autre facteur- climatique localement important est le passage des cyclones. Leur trace dans la structure de la forêt s'observe pendant longtemps.

31 Microclirrats

Pour l'homme, la forêt sempervirente est un milIeu perpétuellement sombre, sans variations thermiques marquées. Cependant, le microclimat de la canopée est totalement différent de celui qui s'observe au pied des arbres. Un arbre participe donc à plusieurs microclimats (sans compter le milieu édaphique racinaire) et la couronne d'un individu traversera ces différentes condItions au cours de sa croissance.

Suivant la strate occupée par la faune, les microclimats possibles sont donc extrêmement variés. Durant le jour, lorsque l'insolation est forte, la température de la canopée est plus élevée que celle du sol, à l'inverse des conditions nocturnes.

La rosée peut se déposer sur les feuilies supérieures, lorsque leur température s'abaisse, mais non sur les feuilles inférieures. Cependant, l'évapotranspiration est si faible en sous-bois, Où l'air est calme et saturé d'humidité, que les feuilles restent souvent mouillées entre deux pluies.

Le taux d'absorption de la lumière est évidemment d'autant pius élevé que la couche de végétation est plus épaisse, donc que l'on est plus proche du sol et que la position du soleil est plus éloignée du zéni th.

Une moyenne de 2 pour cent correspond à la majorité des valeurs mesurées au sol sous végétation en pleine journée. Près de la moitié de ce rayonnement provient des taches solaires. On a cru longtemps que la trace au sol de ces taches solaires permettait seule d'atteindre une intensité suffisante pour être utilisable par la photosynthèse. Il semble que pour certaines piantes, bien adaptées à la pénombre du sous-bois, ces courtes périodes d'éclairement intense saturent les possibilités d'utilisation des plantes et ne soient pas favorables. Ces modifications brutales d'intensité sont associées à des diffé­ rences de la composition spectrale du rayonnement.

L'éclaIrement direct des trouées provoquées par les châbiis est trop intense pour les espèces d'ombre, mais profite à des essences particulières qui se développent rapidement à partir de graines ou des germinations "en attente" dans le sous-bois.

Enfin, la composition de l'air est caractérisée par une teneur en CO' d'autant plus élevée que l'on s'approche du sol (dépassant 1.000 ppm), et par une faible teneur en poussières, pollens et spores.

On peut définir une "surface d'inversion" diurne, comme en milieu aquatique. Au-dessus de cette limite, les prélèvements de CO' par photosynthèse dépassent les dégagements par respiration, au contraire de ce qui a lieu en-dessous. La canopée, "centrale énergétique solaire" de l'ensembie de l'écosystème forestier, est située au-dessus de la surface d'inversion (Fig. 1).

RlOESSE SPECIFICl.E

On estime connaître environ un sixième des espèces vivantes, bien plus en zone tempérée et dans le monde végétal, bien moins en zone tropicale et dans le monde des insectes. Or, la moitié des espèces vivantes terrestres environ se trouve en forêt sempervirente.

La diversité biologique est non seulement grande en forêt par la richesse en espèce, mais aussi par une équitabilité élevée, les peuplements étant constitués d'un très grand nombre d'espèces peu abondan­ tes, sans dominance nette comme en forêts tempérées ou en forêts tropicales à forte contrainte abiotique (sols salés de mangroves, sols hydromorphes de bas-fonds). De plus, cet te diversi té des espèces est accompagnée d'une complexité de la structure du milieu et d'une multiplicité d'interactions, qui se traduisent par des modes de vie variés.

Rid1esse de la flore

Les mesures de la richesse spécifique sur une aire donnée ont toujours à trouver un compromis entre la nécessité de prospecter une grande étendue pour rencontrer la majorité des espèces d'arbres dans une région, et la nécessité d'étudier de petites surfaces pour pouvoir prendre en compte toutes les espèces végétales présentes: lianes, épiphytes, buissons et herbacées... en plus des arbres (Fig. 2 B).

Autant dire que les inventaires réalisés sont rarement comparables. Les forestiers tendent à privilégier la première approche, en se limitant aux arbres dont le diamètre de base dépasse 20 ou 30 cm (la largeur d'une planche), et les botanistes la seconde.

Ainsi, au Gabon, en forêt de Bélinga, N. Halle dénombre sur 400 m2 150 espèces végétaies dont 75 espèces (la moitié) sont des arbres et 25 espèces des lianes. Mais dans cette forêt cohabitent 3.000 espèces végétales au total.

32 pjrh~c~lIobium

tO t5 20 25 30 m

Fig. 1. Profil d'une parcelle de forêt de 20 x 30 m, à une altitude de 300 m, dans la région de Saül (Guyane). D'après Oldeman, 1974.

33 240

200

160

Cf) (l) u (l)120 a. Cf) (l)

"0 80 (l)

.0 E o 40 z

0·5 Surf ace (ha) A

300 2 _T Cf) (l) u (l)

Cf)a. 200 (l) -. 1 ..

1 f 1 1 1 2000 4000 6000 8000 10000 Surface (m 2)

B

Fig. 2. Relation entre le nombre d'espèces d'arbres et la surface en forêt tropicale humide. A. D'après Ashton, 1964 : 1 et 2 Malaisie; 3 et 4 Bornéo; 5 Suriname; 1, 2 et 5 pour diamètre ~10 cm ; 3, 4, 6 et 7 pour diamètre ~30 cm. B. D'après Lawson et al., 1970. 1 - espèces arborées; 2 - ensembie des plantes vascula ires.

34 En se limitant aux ligneux dont le diamètre à la base est au moins égal à 2,5 cm, ~ Hladik trouve 2 au Gabon 117 et 135 espèces, dans deux échantillons de 1.000 m ; et Gentry trouve, sur la même surface, 110 espèces au Brésil, 117 en Equateur et 167 à Panama.

Une comparaison à partir des individus de 5 cm de diamètre donne 92 espèces/4.000 m2 au Gabon (A. Hladlk) ; 101 espèces/5.000 m2 en Guyane (H. Puig).

Pour un diamètre minimal de 30 cm, on a trouvé en moyenne par ha à partir d'inventaires régionaux 40 espèces à M'passa et 50 espèces à Bélinga (Gabon); 30 espèces à Taï (Côte d'Ivoire) ; 26 à 38 espèces à Barro Colorado (Panama). Il ne semble donc pas y avoir de différence marquée de diversité des espèces ligneuses entre l'Afrique et l'Amérique.

Dans tous les cas le nombre d'espèces augmente avec la surface prospectée et l"'aire minimale" asymptot ique n'est jamais at teinte (Fig. 2).

Une conséquence de la forte diversi té est la nécessi té de préserver de vastes zones si l'on veut conserver la majorité des espèces. Ainsi dans une réserve de 1.000 ha délimitée à Bornéo, on a recensé 377 espèces d'arbres, dont 81 pour cent représentées par dix individus au maximum et 38 pour cent (143) par un seul individu.

Les différences taxonomiques sont énormes d'un continent à l'autre. Moins de 100 arbres sont COrmluns à l'Afrique et à l'Amérique, mais on retrouve les mêmes familles parmi les dominantes (Tab. 1). En Asie, la famille dominante dans la strate arborée est celle des diptérocarpacées.

TABLEAU 1

Surface terrière comparée pour les principales familles d'arbres (par ordre décroissant) dans une forêt africaine (Gabon, M'Passa) et dans une forêt sud-américaine (Guyane, Piste St. Elie). les légumineuses constituent ici 42% de la surface terrière totale au Gabon et 3~ en Guyane

FI>MILLES m2 /ha %curulés

G Caesalpiniaceae 8.2 m2 35 Myrist icaceae 3.5 50 A Burseraceae 2.3 60 Mirrosaceae 1.5 66 B Euphorbiaceae 1.5 69 lecythidaceae (1 sp. ) 1.0 73 0 Annonaceae 1.0 77 Ulrœceae 0.8 80 N TOTAl ..•...... 23.3

G Caesalpiniaceae 7.0 32 Lecythidaceae 4.5 53 U Chrysobalanaceae 2.4 64 Sapotaceae 2.4 75 y Clusiaceae 0.8 79 Mirrosaceae 0.6 81 A TOTAl ...... 21. 7 N

E

Les épiphytes montrent une prospérité très variable suivant le type de forêt. Elles prennent leur importance maximale dans les forêts à humidité élevée constante et sur le continent sud-américain. Là, les bromél iacées ont développé une grande diversi té d'espèces adaptées à ce mode de vie (Tab. 2). En dehors de cette famille spécialisée, on trouve des espèces épiphytes dans des familles végétales variées. Inversement, les légumineuses qui dominent chez les arbres n'ont aucun représentant chez les épiphytes, et pratiquement pas non plus dans les herbes du sous-bois.

La diversi té animale répond d'une part aux mêmes facteurs climatiques dont dépend la diversi té végétale, d'autre part se trouve renforcée par l'existence même de cette diversité végétale.

35 TA8l...EJlU 2

Nc.nt>re d'espèces épiphytes dans les féITÙlles de plantes vasculaIres (d'après Madison (1977), in Benzing (1983»

PTERlOOPHYTA DI COTYL EI:X:)'.lAE

Aspidiaceae 159 Aqui fol iaceae 1 Aspleniaceae 400 Aral iaceae 73 Davall iaceae 185 Asclepiadaceae 135 Hypenophyllaceae 500 Balsaminaceae 5 Lycopodiaceae man y Begoniaceae 10 Ophioglossaceae 2 Bignoniaceae 3 Polypol iaceae 970 Cactaceae 133 Psi lotaceae 8 Carrpanulaceae 18 Schizeaceae 2 Celastraceae 2 Selaginellaceae many Clusiaceae 92 Vittariaceae 142 Cooposi tae 3 Crassulaceae 4 GYM\OSPERVAE Cunoniaceae 3 Dulongiaceae 1 Gnetaceae 3 Elacocarpaceae 1 Podocarpaceae 1 Ericaceae 483 Za-niaceae 2 Gentianaceae 1 Gesneriaceae 549 M:)'ŒOTYL E!JO'.lAE Griseliniaceae 3 Lentibulariaceae 12 Agavaceae 1 rv

La comparaison des faunes fait apparaftre un plus grand nombre d'espèces dans la plupart des groupes zoologiques forest iers sur le cont inent sud américain qu'en Afrique, à l 'except ion des mammifères (si l'on ne tient pas compte des chauve-souris). En ce qui concerne les insectes, la connaissance des faunes est trop faible pour se faire une idée globale.

Richesse de la faune entamlogique

La richesse spécifique des insectes tient à la complexité du milieu forestier, qui combine une stratifi­ cation, ou un gradient, des conditions verticales, avec une richesse particulière des hautes strates (Fig. 3), à une mosaïque de végétaux, imbriqués dans le plan horizontal.

La complexité de ce monde est tel, et nos connaissances si imparfaites, que nous nous limiterons à quelques remarques générales. Tout d'abord, il ne faut pas assimiler les insectes des forêts ombrophiles aux formes géantes. Il est vrai que les conditions abiotiques favorables permettent des développements cont inus qui about issent à des adul tes de grande tai Ile. Les plus gros coléoptères, les plus grands rhopalocères, les mantes et les phasmes les plus longs, proviennent de ce type de forêt, mais aussi les plus petits! Un plus grand nombre d'espèces signifie une plus grande probabilité d'atteindre des tailles extrêmes, qu'elles soient petites ou grandes.

36 Homoptera Heteroptera Hauteur Nombre d'individus (L) (S) Nombre d'individus (Ll du piege 500 1000 1500 100 0 100 200 300 1 1 30 m 29 48 1 1 1

20 m 49 25 29

10 m

lm

~ Cicadellidae DDerbidae fi] Achilidae IDelPhacidae

Fig. 3. Distribution verticale du nombre d'hémiptères capturés à différentes hauteurs dans la forêt primaire de l'est Sulawesi (Indonésie) entre 19 et 22 heures en février 1980. (S) = au piège à succion. (L) = à la lumière. Les valeurs de part et d'autre des barres horizontales représentent le nombre d'espèces distinguables par leur morphologie externe. (D'après Rees, 1983)

Une caractéristique comportementale des insectes forestiers semble être la sédentarité, à tel point que beaucoup d'ent re ceux que l'on observe en sous-boi s, orthoptères par exemple, sont brachyptères ou aptères. Cependant, les chasses de nui t à la lumière permet tent la capture d'un grand nombre de formes ailées. Il est difficile actuellement de se faire une idée générale de l'amplitude des déplacements chez les populat ions d'insectes en forêt.

Par ailleurs, la diversité globale du couvert végétal ne doit pas masquer la réalité à l'échelle de l'insecte. En effet, les frondaisons des arbres émergeants sont isolées les unes des autres. On a même parlé de la "timidi té des cimes" pour les arbres de la strate supérieure à propos de l'espace laissé entre feuillages d'espèces différentes. Les insectes, à l'échelle individuelle, vivent donc dans une végétat ion monospéci f ique composée de la "populat ion" des feui Iles d'un même arbre. Un insecte phyto­ phage vit donc en forêt dans un contexte trophique bien moins diversifié qu'un phytophage de milieu herbacé.

En forêt, l'apport de litière est continu, sinon régulier (quelques grammes par jour et par m') (Fig. 4). Le rôle des termites et autres organismes détritiphages est essentiel pour le recyclage rapide des éléments minéraux.

Une autre particularité importante du monde forestier est l'irrégularité des floraisons et fructifi­ cations. Des lianes du genre Leptoderris peuvent rester des années sans fructifier. Comment, dans ces conditions, survivent les populations d'insectes spécialisés qui dépendent d'une espèce végétale donnée? On l'ignore. Les contraintes abiot iques des mi lieux à forts contrastes saisonniers ont cet "avantage" d'imposer un même rythme à la flore et à la faune, facilitant les coïncidences de cycles.

Il n'est guère possible de considérer globalement les irrégularités de cycle de fructification comme des défenses contre les insectes séminivores spécialistes, car ce serait au détriment aussi des poliini­ sateurs. Les couples Ficus-agaonides donnent l'exemple de plantes à fructifications très irrégulières bien que la poilinisation dépende strictement d'un agaonide spécifiquement inféodé à un Ficus.

Une autre difficulté des théories concernant les défenses des végétaux vis-à-vis des insectes, dans le domaine des substances chimiques cette fois, est ia grande diversité, et l'étroite spécificité souvent, des cérambycides. Pourquoi les branches ou arbres morts auraient-ils à se préserver d'attaques de larves xylophages au même titre que les graines? Des comparaisons précises restent à établir.

37 (poids sec) 10

A

Bois

Fr u i t s 5

Poussieres

Feuilles

A

1 !I j 1 1 !) ï:.!

5

4 B o Total ~ Feuilles

3

2

FMA MJJ ASON 1979 1981

Fig. 4. Chute de 1i t ière en forêt dense humide. A. Au Gabon, M'Passa (d'après Hladik, 1978). B. En Malaisie, Penang, dans une forêt à Dipterocarpaceae (d'après Gong et Ong, 1983)

38 La distribution disséminée des individus dans une espèce végétale de forêt semble limiter les possibIlités de prolifération des insectes qui y sont inféodés. Ainsi explique-t-on que l'on n'observe pratiquement jamais de défoliation en forêt sur l'ensemble des arbres appartenant à une espèce, et même rarement sur un arbre de forêt quel qu'il soit. Ce qui est moins rare en milieu ouvert où les popula­ tions de phytophages sont plus variables en effectifs.

La réponse démographique des insectes à l'éparpillement des plantes-hôtes semble être une forte hétérogénéité des pieds occupés, mais une assez grande constance des effectifs moyens, liée à une faible vi tesse de renouvellement des populat ions. Ainsi, la durée de vie imaginale des acridiens de forêt serait très supérieure à celle des espèces de savane.

Ces observations encore fragmentaires tendent à confirmer l'idée que l'on se fait de l'écologie forestière: dans ces milieux à forte occupation biologique (compétition ?) et faibles contraintes abiotiques, les facteurs de régulation l'emportent sur les facteurs de perturbation.

Nous terminerons ce paragraphe entomologique par la comparaison que permettent de faire deux groupes relativement bien connus: les termites et les rhopalocères. On trouve en Afrique 570 espèces de ter­ mites, en Asie 525 et en Amérique 408. Tous ne sont pas forestiers mais la richesse spécifique est globalement simi laire. Pour les rhopalocères, les di fférences d'un cont inent à l'autre ne sont pas non plus très importantes 1912 espèces sud-américaines, 1353 en Indo-Australie et 1199 en zone éthiopienne.

Ces valeurs sont évidemment provisoires. Elles permettent tout de même de se faire une idée de la similitude entre continents, à latitude corrparable, et du travail qu'il reste à accomplir pour connaître la fonction et les particularités biologiques de chacune des espèces.

La dlversi té des forêts sempervirentes a fait couler beaucoup d'encre. Plusieurs théories s'affrontent, ou se complètent, qui met tent en cause tant le facteur temps que la compét i t ion entre les espèces (qui pousserait à la spécialisation) ou la prédation (qui empêcherait la saturation du milieu par chacune des espèces). Personne pourtant ne s'est jamais étonné que les espèces soient moins diversifiées en haut des montagnes qu'à leur pied. Plus les contraintes abiotiques sont sévères et moins élevé est le nombre d'espèces parvenues à s'y adapter. Le problème de la diversité des forêts sempervirentes serait donc un faux problème: un point de vue ethno-centrique lié à l'origine "tempérée" de la majorité des écologis­ tes. En inversant la question: pourquoi les pays secs et les pays froids sont-ils si pauvres en espèces, le problème disparaît.

Pour des raisons similaires on peut augurer que les contrées désertiques ne le seront pas toujours. La vie en sortant des mers est parvenue à coloniser des terrains marécageux puis chauds et humides, s'avançant progressivement vers des condi tions de plus en plus éloignées de celles d'origine. Si les déserts d'hier sont les forêts d'aujourd'hui, pourquoi les déserts d'aujourd'hui ne seraient-ils pas les forêts de demain?

Si les interventions humaines n'étaient pas venues brutalement perturber cette marche de l'évolu­ tion, rien ne s'opposerait à un enrichissement progressif des milieux encore inhospitaliers... sur quelques centaines de mi Il ions d'années.

Les forêts sont-elles parvenues au degré maximal de complexité des communautés vivantes? Tout semble dépendre du temps que peut durer une phase climatique compatible avec la forêt sempervirente. Il est clair en tout cas que l'écologie des milieux simples, qui est à l'origine de théories comme celle de l'exclusion compétitive, ou des alternances démographiques proies-prédateurs, rende bien mal compte des communautés complexes. Aucun modèle prédictif n'existe encore, ni sur la diversité des forêts continen­ tales en fonction des conditions, ni sur la régulation des populations spécifiques.

L'écologie reste à inventer en forêt sempervirente. L'étude des insectes peut, comme dans les milieux mieux connus, contribuer fortement à la compréhension générale des lois de la nature.

39 ~ CITEES ET

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40 L'ECOLOGIE TROPICALE ET LES ETUDES ENTOMOLOGIQUES QUELQUES APERCUS DU PROGRAMME MAS

Malcolm Hadley 1

LA F<ŒT TRPICALE ET SES RESsa.R:ES

C'est un truisme d'affirmer que parmi tous les di fférents types d'écosystèmes du monde, c'est la forêt tropicale qui soulève le plus de quest ions, possède le plus grand nombre d'espèces at tendant encore d'être découvertes et décrites, présente les lacunes les plus évidentes dans sa connais~qnce et sa compréhension (Hadley et Lanly, 1983). Les forêts tropicales représentent une énorme ressource re­ nouvelable de bois, de fibres, de substances médicinales et de combustible, à condition d'être gérées de façon avisée. Elles mettent à notre disposition quantité de produits et de valeurs utiles. Un diction­ naire bien connu des produi ts économiques de la péninsule de Malaisie, publié en 1936, recense 1.061 genres et 2.432 espèces de plantes locales considérées comme utiles. Un spécialiste de la faune travail­ lant dans un projet du MtI8 dans la vallée de Gogol, en Papouasie Nouvelle Guinée, a rapporté que la population locale fait usage de 68 des 251 espèces de tétrapodes (vertébrés quadrupèdes observés dans cette région). Ces animaux sont utilisés comme aliments, pour la production de produits artisanaux ou à d'autres fins, et ils comptent 16 espèces de mammifères, 42 d'oiseaux, huit de reptiles et deux de batraciens.

La gestion des forêts tropicales est un problème qui revêt une importance exceptionnelle pour les pays dans lesquels elles sont situées. On y dénombre des cultivateurs, des chasseurs et des cueilleurs et elles fournissent de nombreux produits utilisés par ces populations rurales et recherchés par les habitants des villes. Elles donnent du bois pour la construction et le papier et constituent une source importante de devises étrangères pour ces pays. Seulement 6 pour cent environ des bois prélevés sur la forêt - en particulier les bois durs - sont destinés au commerce international, cependant la Conférence des Nat ions Unies sur le commerce et le développement (CNUCED) est ime leur valeur à quelque 8 milliards de dollars US par an. Ce que l'on appelle les "sous-produits de la forêt" (tous les produits forestiers autres que le bois) peut également représenter une valeur commerciale importante. Par exemple, la valeur annuelle estimée du rotin dans le commerce mondial atteint 1,2 milliard de dollars et cette production est souvent source pour les villageois d'un profit beaucoup plus direct que beaucoup d'opérations réal isés sur le bois d'oeuvre.

De plus les forêts tropicales remplissent un certain nombre d'autres fonctions importantes et sont la source d'autres valeurs. Elles contribuent à la régulation de la qualité et du débit des eaux et à la protection des sols. Elles ont également pour les populations des tropiques une signification considéra­ ble sur les plans culturel, spirituel et esthétique.

Mais les forêts intéressent également la communauté mondiale dans son ensemble. Elles inf luent sur le climat en contribuant au maintien de la température de la terre et sont un élément important du bilan global de carbone. C'est pour cela qu'on les considère parfois comme un "poumon" de la terre. Les végétaux et les arbres rares qu'elles abritent constituent un pool de gènes dont on commence maintenant à étudier l'intérêt pour la recherche de médicaments efficaces contre certaines maladies graves auxquelles l'homme est exposé. L'utilisation rationnelle et soutenue des forêts et des terres boisées des régions tropicales humides et subhumides est donc dans l'intérêt de nous tous.

Quand on regarde l'histoire des changements du couvert végétal de notre monde, on peut constater qu'i 1 Y a 8000 ans, la végétat ion médi terranéenne étai t déjà très modi fiée par l'homme; 4000 ans, une

Division des Sciences Ecologiques, Unesco, 7, place de Fontenoy, 75700 Paris, France.

41 déforestation massive commençait en Chine; 500 ilns, beaucoup de forêts européennes avaient été conver­ ties en terres agricoles; 100 ilns, les forêts d'Amérique du Nord étaient déjà largement transformées. Le siècle en cours Elst une période de changements profonds pour les forêts et les peuples des zones tropicales humides. Un exemple ce ce changement est la massive transformation des forêts tropicales et ses taux de déforestation qui varient selon différents critères de quelque 6 millions d'hectares par an jusqu'à 18 à 20 millions. ~~is ce n'est pas seulement un temps de changement, mais également un temps de bouleversement d'échelle. Jusqu'il une période récente les mouvements de produi ts et de biens se sont limités à un petit secteur de la zone de forêt tropicale. Il existe aujourd'hui des liens importants avec d'autres régions comme l'illustre l'accroissement des quantités de bois exportées vers les pays développés qui sont passées de 4,2 à 42,2 millions de m' entre 1950 et 1976.

Une autre manifestation de ce temps de mutation est celle des populations humaines. Il est bien connu que les zones tropicales humides sont porteuses de civilisations anciennes telles que maya, khmère, béninoise. Mais c'est dans les dernières décennies que les populations ont augmenté rapidement et que poussés par l'insuffiSilnce des ressources, beaucoup ont émigré. Ce sont des mouvements spontanés. D'autres sont provoqués par des projets gouvernementaux de transmigrat ion. Beaucoup sont liés à de nouveaux plans d'exploi tat ion des ressources.

Dans toutes les régions des tropiques humides, ce temps de changement, ce changement d'échelle, se manifestent par des liens plus étroits avec l'économie mondiale, des investissements financiers impor­ tants, de grands proj ets d'aménagement, le passage d'une économie de subsistance à une économie de marché, les conflits accrus entre les différentes utilisations des sols. Mais malheureusement il manque encore des bases scientifiques pour guider ces changements.

C'est dans ce contexte d'un monde très riche, très inconnu, en pleine mutation, que se si tuent les actions du Programme de l'Unesco sur l'Homme et la Biosphère (MtIB) dilns les tropiques humides et sub­ hUTlides.

Les questions

Le problème général que le MtIB s'efforce de résoudre dans les zones tropicales s'énonce: Comment aider à mettre au point des stratégies et des systèmes d'utilisation des terres qui soient durilbles et adaptés aux caractéristiques sociales, culturelles et biologiques des pays et des populations de ces régions. De ceci découle une série de questions.

Quelle est lil productivité biologique propre à chacune des sous-régions tropicales et subtropicales et comment cette productivité est-elle influencée par l'environnement?

Quelle est l'importance de la diversité biologique et sociille dans les tropiques?

Comment les différents habitants des régions tropicales perçoivent-ils et utilisent-ils leur envi­ ronnement, et dans quelles conditions ces perceptions et utilisations changent-elles?

Comment les habitants des régions tropicales ont-ils géré leurs ressources en terres dans le passé? Leurs techniques sont-elles utiles aujourd'hui?

Comment des techniques de gestion des terres qui ont fait leurs preuves dans une région peuvent­ elles être adaptées à une autre région?

Comment les forêts et les sols tropicaux réagissent-ils aux perturbations et comment se régénèrent­ ils?

Les projets pilotes••. et les recherches entomologiques

Pour faire face à ce genre de problèmes et de questions, le MtIB a mis particulièrement l'accent sur la mise en place d'un réseau international de projets pilotes intégrés de recherche, de formation et de démonstration (Unesco, 1977, 1980). Il Y a une vingtaine de ces projets pilotes, répartis dans les trois régions tropicales. L'information sur leur historique et leur contenu est donnée dans l'Unesco (1977, 1984). Un certilin nombre de ces projets comportent des recherches sur les insectes, comme il est indiqué dans les paragraphes suivants qui donnent un aperçu sur une demi-douzaine de projets pilotes (deux dans chaque continent) ayant inclus une composante entomologique.

42 Kalimantan oriental, Indonésie

Le projet pilote du Kalimantan oriental était axé sur les effets écologiques et sociologiques des acti­ vités humaines sur les écosystèmes forestiers tropicaux. Ce projet se subdivise en sous-projets relatifs aux effets des exploitations forestières sur les activités économiques des villageois, études compara­ tives sur les cultivateurs vivant dans leurs villages d'origine en amont et dans des zones de réinstalla­ tion en aval et travaux concernant les effets sur l'environnement de différents modes d'utilisation des terres.

Le sous-projet sur les effets sur l'environnement de différents modes d'utilisation des terres a Inclus quelques études sur les changements des populations d'insectes à la suite des interventions humaines. Le résultat d'un inventaire aérien a montré que les groupes suivants, classés par série décroissante d'abondance, sont présents dans la forêt primaire ainsi que dans la forêt secondaire de 30 ans: coléoptères, diptères, homoptères, orthoptères, hyménoptères, lépidoptères et neuroptères. Le nombre de familles dans la forêt primaire est plus grand que dans la forêt secondaire. Environ 65 pour cent du nombre total d'individus, tant dans la forêt primaire que dans la forêt secondaire, sont des phytophages. Le nombre d'individus prédateurs et perforateurs des graines et du bois est plus important dans la forêt primaire que dans la forêt secondaire de 30 ans.

Luquillo, Porto Rico

La forêt expérimentale de Luquillo située à Porto Rico compte parmi les rares forêts tropicales où des recherches écologiques sont menées depuis longtemps. Des scientifiques y travaillent, en effet, depuis la fin du siècle dernier. Luquillo fait partie du réseau international de réserves de la biosphère et, en septembre 1983, le service forestier des Etats-Unis a publié un rapport sur l'histoire et les perspec­ tives de la recherche dans cette forêt expérimentale de Luquillo. Ce rapport récapitule les principaux résul tats de la recherche entreprise sur ce si te, y compris la recherche sur les populat ions d'insectes (Brown et al., 1983, pp.90-94). Ces études comprennent des discussions taxonomiques, sur la diversi té spécifique, sur la distribution saisonnière des moustiques, sur les effets de l'irradiéltion sur deux espèces de termi tes, et sur les relations énergétiques d'une espèce de celles-ci (Nasutitermes costalis) et des estimations de consommation de la production primaire par des insectes, mesurée par la superficie des trous dans les feuilles.

Mlkokou, Gabon

L'Institut de Recherche en Ecologie Tropicale de Makokou, et la réserve de la biosphère de M'Passa (10.000 ha) avec laquelle il est associé, constitue un des sites dans les tropiques où les études sur l'écologie tropicale ont été poursuivies depuis les années 1960. Un effort important a été déployé pour l'étude des insectes qui a été menée sur quatre plans principaux (IRET, 1980, 1983) : (a) systématique et évolution, en particulier les lépidoptères, odonates et coléoptères; (b) l'écologie des groupes comme les blattes (sex ratio, distribution spatiale, reproduction), les odonates (densité, zonations écologi­ ques), les drosophiles, les lépidoptères (étude particulière des stratégies de protection par mimétisme, coloration cryptique ou disruptive, réflexe d'immobilisation, etc.), les fourmis, les abeilles, etc. ; (c) la biologie et le développement, surtout des odonates et des lépidoptères; (dl le comportement et les phénomènes sociaux, surtout des blattes, des termites et des abeilles. Des études sur d'autres arthropodes ont compris des recherches sur les arachnides sociaux qui, contrairement à la plupart des représentants de ce groupe, vivent en colonies dans des nids communautaires et mènent une vie soàale assez poussée, comparable à certains points de vue à celle des insectes.

Plus récemment, le travail à Makokou dans le cadre du Programme MAS s'articule autour de sept grands programmes portant notamment sur la structure et la dynamique du sol, la structure et la dynamique de la forêt, l'inventaire et lél dynamique des populations de vertébrés, les interactions faune-flore, le complexe pathogène. La recherche entomologique a comporté la recherche sur la composition du peuplement et les aspects écologiques et biologiques des Scarabéidae coprophages (par exemple, Wal ter, 1983), et l' impac t des insec tes herbivores sur les plantes du sous-bois. D'autres i nformat ions sur les recherches entomologiques figurent ailleurs dans ce volume (voir la contribution de P. Posso).

Tva Yart:>e , Congo

En 1985 un nouveau projet pilote a pris corps axé sur les bases scientifiques du développement intégré de la région du Mayombe (Unesco et al., 1986), prujet pilote qui envisage la participation d'entomologistes dans des domaines tels que la biodynamique du sol et l'entomologie médicale. Ce projet pilote profite des possibilités qu'offre la station de recherches bioécologiques forestière de Dimonika (créée dans le Mayombe en 1967 par l'Université de Brazzaville) et des résultats acquis par celle-ci (DCRST, 1982).

Les recherches entomologiques à Dimonika comprennent des études sur les anophèles, vecteurs du paludisme. Elles comportent des captures de nui t sur les sujets humains et l'évaluation de la faune résiduelle matinale dans les maisons ainsi que le recensement des gîtes larvaires. Des recherches sur la faune phlébotomienne (Vattier-Bernard et Trouillet, 1978) ont comporté l'inventaire des espèces et la phénologie et la structure des peuplements, et ont utilisé les méthodes de capture manuelles et les pièges adhésifs lumineux.

43 Les études d'écologie des insectes ont comporté l'inventaire de l'entomofaune, de la variation saisonnière et des préférences trophiques des insectes xylophages et phytophages, l'utilisation des drosophiles comme indicateurs écologiques et modèles biologiques, et l'étude de l'apiculture dans le Mayombe. Le rythme nycthéméral des sphinx est également étudié (Morin et Grillot, 1982). Les études sur la dynamique du sol ont porté sur le rôle des termites dans le fonctionnement de l'écosystème forestier, en particulier dans la dégradation des matières organiques et sur la richesse en bactéries des sols avoisinants les termi t ières.

Sakaerat, Thaïlande

La réserve de la biosphère et station de recherche sur l'environnement de Sakaerat se situe au nord-est de la Thaïlande. Elle consiste en 7.200 ha avec deux principaux types de végétation - les forêts semper­ virentes sèches et les forêts sèches de diptérocarpes. Etabli au début des années 1970, Sakaerat a été le site d'un projet pilote du MAS, basé sur six grands éléments, notamment les aspects juridiques de la conservation à Sakaerat, l'évaluation des ressources naturelles et des effets des changements écologi­ ques, les échanges socio-économiques entre Sakaerat et les établissements urbains et ruraux voisins de la province de Nakhon Ratchasima, l'analyse des politiques de la conservation et de l'utilisation des terres appliquées par différents organismes.

Un rapport de 230 pages sur les résultats de ce projet a été publié en novembre 1980 et réimprimé en 1983, sur le rôle de la station de recherche sur l'environnement de Sakaerat comme source de connais­ sances permettant de déterminer les politiques de conservation des terrains forestiers propres à assurer une production soutenue maximale des ressources forest ières. Une part ie de ce rapport (Tongyai, 1983, pp.62-75 et 183-197) expose quelques résultats des collectes d'arthropodes, en particulier dans la 1 i t ière et le sol, et surtout les acar iens (des Tet ranychidae, Tuckerell idae,... ). Les résul tats sont fournis sur les activités des acariens en différentes saisons de l'année et leur rôle dans la décomposi­ tion des matières organiques. Des données sont également fournies sur les insectes des deux principaux types de forêts, ainsi que des champs de maïs et de manioc qui ont remplacé la forêt, et des estimations des effets des communautés d'insectes prédateurs du maïs.

San Carlos de Rio Negro, Venezuela

En 1973, le Centre d'Ecologie de l'Instituto Venezolano de Investigaciones Cientificas (IVIC) a décidé d'organiser un projet de recherche au Venezuela méridional à un moment où la politique du gouvernement et la pression économique accroissaient l'intérêt pour l'ouverture de la forêt tropical de l'Amazonie au développement agricole et forest ier. Le projet de recherche a porté sur le si te de San Carlos près du confluent du Casiquiare et du Rio Negro. La problématique du projet était axée sur les adaptations structurelles et fonctionnelles qui permettent à la forêt tropicale, avec une biomasse de 400 tlha, de subsister dans une région où les sols sont très pauvres en éléments nutritifs et d'une capacité de rétention très basse. La recherche impliquait la participation de scientifiques du Venezuela, mais aussi des Etats-Unis (surtout de l'Institut d'Ecologié de Géorgie) et de la République fédérale d'Allemagne (l'Institut de Foresterie Mondiale à Hamburg-Reinbeck et l'Institut Max Planck à Plon).

Le projet prévoyait des études sur la structure et la dynamique de la végétation, la croissance de la productivité, le cycle des éléments nutritifs, les relations végétation-microclimat, l'écophysiologie des principales essences d'arbres, la microbiologie et la faune, l'écologie humaine appliquée. Une centaine de publications scientifiques ont été produites sur le projet, dont quelques synthèses générales sont en préparation ou sous presse.

En ce qui concerne la recherche sur les arthropodes, y compris les insectes, une variété de méthodes ont été utilisées pour collecter les individus des différentes strates de la forêt (sol, litière, sous­ bois, voûte) et Jordan (1986) donne un résumé des résultats obtenus sur la densité des populations et la diversité des différents groupes d'insectes. Des études plus approfondies ont été menées sur les fourmis Atta sp. et Acromyrex octospinosus (Haines, 1983), ainsi que sur la biomasse des termites et les estima­ tions de leur consommation de litière (Salick et al., 1983).

Bilan et perspectives

Ces illustrations montrent la gamme des différents problèmes rencontrés dans le réseau de projets pilotes ainsi que les méthodes et approches suivies. Beaucoup de ces projets abordent des problèmes prioritaires de mise en valeur des terres dans telle ou telle situation géographique. En s'appuyant sur des études de cas, ils ont fourni des informations qui non seulement présentent un intérêt scientifique, mais sont en outre utiles aux planificateurs locaux et, dans certains cas, susceptibles d'être extrapolées.

Parallèlement, certains projets ont contribué de façon très importante à améliorer les connaissances scientifiques sur les écosystèmes tropicaux: par exemple, le travail effectué à San Carlos de Rio Negro, au Venezuela, sur les mécanismes de rétention des éléments nutritifs par la forêt dite vierge.

Dans quelques cas, d'importants moyens de recherche sur le terrain ont été mis en place ou ren­ forcés, souvent associés à la désignation de ces zones comme réserves de la biosphère. Les exemples en

44 Afrique comprennent Makokou et la réserve de M'Passa au Gabon, Luki et Yangambi au Zaïre, le Parc National de Taï en Côte d'Ivoire.

Mais en même temps que ces accomplissements réels, les différentes évaluations ont montré les déficiences qui restent à combler et les défis à relever.

Une première déficience est qu'on n'a pas toujours réussi à harmoniser les aspects di ts scientifi­ ques des projets avec ceux dits de développement. Il y a eu des projets, par exemple, où n'a pas été définie clairement dès le début l'hypothèse de travail, tant sur le plan scientifique que sur le plan du développement. Dans les projets mis en oeuvre plus récemment, on a essayé de mettre un plus grand accent sur la définition de la problématique du travail. Un exemple en est un projet au Mayombe, au Congo, où l'hypothèse pratique consiste en ce que le processus d'exode rurale puisse être arrêté et l'auto­ suffisance alimentaire augmentée par des moyens tels que la diversification des productions agricoles, et surtout par l'agroforesterie, et le développement de nouvelles ressources d'énergie sur le plan local.

Une deuxième constatation est qu'on n'a pas suffisamment profité des possibilités de développer les études comparatives dans des domaines techniques bien focalisés, entre les groupes de projets pilotes qui peuvent eux-mêmes être axés sur toute une gamme de différents problèmes pratiques. Des exemples d'études comparatives entreprises dans le passé comprennent des études comparatives sur: les structures des habitats forestiers en Asie du Sud-Est et en Australie (Smitinand et al., 1983) ; la caractérisation des sols dans les zones tropicales, en coopération avec le Centre International de Référence et d'Infor­ mation sur les Sols (Breimer et al., 1986) ; la culture sur brûlis dans cinq pays d'Asie (Unesco, 1985).

Mais ces études comparatives ont été menées de façon très partielle et isolée. On essaie maintenant de lancer d'autres études comparatives, avec un protocole de recherche bien élaboré, avec les méthodolo­ gies recommandées, avec des groupes de scient ifiques de haut niveau pour assurer la crédibi lité et la coordination des programmes.

Ainsi en est-il du travail sur les relations entre les processus biologiques et la fertilité des sols tropicaux qui a été lancé en 1984 comme une opération conjointe de l'Unesco-MAB et de l'Union Internationale des Sciences Biologiques (Swift, 1985, Swift et Sanchez, 1984), opération qui comprend déjà des contributions de sites comme Taï et le Mayombe en Afrique et d'entomologistes (par exemple des chercheurs intéressés par le rôle des termites dans la dégradation de la matière organique). Un autre prograrrme de ce même type entre l'UIBS et l'Unesco concerne les réponses des savanes aux perturbations dont les propositions préliminaires ont été examinées et raffinées au cours d'un atelier au Zimbabwe en décembre 1985 (Frost et al., 1986).

Un autre type d'études comparatives - nécessairement plus limité quant au nombre des sites impli­ qués - est celle des analyses démographiques des populations ligneuses dans des parcelles d'observation d'une large envergure. Basée sur l'expérience d'une parcelle de 50 ha qui a été établie et dont on a fait le recensement à Barro Colorado, Panama, une deuxième parcelle a été établie sur les mêmes critères à Pasoh en Malaisie en 1985, et l'intention est d'en établir une troisième en Chine. L'idée générale est que dans chaque parcelle chaque arbre soit marqué, son diamètre mesuré, une carte de la distribution des arbres dans cette parcelle dressée et qu'on y identifie toutes les plantes d'un diamètre supérieur à un centimètre. Un recensement est prévu tous les cinq ans. Ce travail cl long terme a pour but de répondre à beaucoup de questions sur la diversité des espèces d'arbres tropicaux (y compris aux théories de l'équilibre et du non-équilibre dans les écosystèmes terrestres), mais aussi a une signification pratique pour la sylviculture tropicale, afin d'obtenir une meilleure base scientifique pour encourager la re­ population par des essences d'importance commerciale.

Un troisième défi serait d'obtenir une meilleure utilisation des sites de recherche qui, dans le passé, ont été insuffisamment développés pour répondre aux besoins de démonstration, d'éducation et de formation. Comme réaction dans ce sens, on peut citer en exemples l'organisation d'un stage de formation et de sensibilisation à l'agroforesterie en zones tropicales qui s'est déroulé en juillet 1985 à Makokou, Gabon (Maldague et al., 1986), et un atelier sur la gestion de la forêt tropicale pour rapprocher la recherche de la pratique (Kepong, Malaisie, juin-juillet 1986).

L'information technique sur l'écologie tropicale est un autre domaine où l'on s'efforce d'apporter une certaine contribution dans le cadre du MAB. Des exemples: les rapports sur l'état des connaissances sur la biologie et sur les ressources naturelles en Afrique (Ayensu et Marton-Lefèvre, 1981, Unesco, 1963), sur les écosystèmes pâturés tropicaux (Unesco, 1981) et sur les écosys tèmes forestiers tropicaux (Fournier et Sasson, 1983, Unesco, 1979) ; la carte de la végétation de l'Afrique et le mémoire des­ criptif qui l'accompagne (Whi te, 1986) ; les synthèses et les bilans des projets pilotes, tels que celle sur le Projet Taï (Guillaumet et al., 1984) ; les bilans des études dans un domaine technique spécifique dans le cadre d'un projet pilote ou d'une réserve de la biosphère, comme celui sur la recherche entomolo­ gique à Taï qui a été publié fin 1985 comme tome 7 de la Revue française d'entomologie. A ces activités s'ajoutera l'organisation de colloques techniques visant à produire des synthèses en écologie tropicale, par exemple sur la régénération et la gestion de la forêt tropicale pluviale (Caracas, novembre 1986) et sur l'écologie" reproductive des plantes de la forêt tropicale (Bangi, Malaisie, juin 1987).

45 CXJ'O...USI(JI,I

La gamme des problèmes de l'aménagement du territoire traités dans les projets pilotes du MAS dans les tropiques humides ont un parallèle dans la diversité des recherches entomologiques entreprises dans les divers si tes qui comprennent l'inventaire fondamental des populations irrportantes, l'entomologie médi­ cale, le rôle des insectes dans la régénération forestière, les prédateurs entomologiques des cultures, ...

A l'avenir, il est probable que cette diversité d'approches continuera avec des études plutôt fondamentales à long terme entreprises dans les si tes des réserves de la biosphère, des études plutôt appliquées, d'une durée déterminée, entreprises dans le cadre des projets pilotes axées sur les problèmes d'aménagement du territoire, et des études plutôt comparatives dans le cadre des prograrrmes telles que celle sur les processus biologiques et la fert i lité des sols tropicaux, débouchant sur des données en partie comparables d'un site à l'autre.

Et ainsi les entomologistes peuvent coopérer avec les autres chercheurs dans la mise à l'épreuve de ce qui peut vraiment être comparé dans les recherches écologiques comparatives, et donc contribuer à ce que l'écologie devienne une science plus capable de prévoir et plus crédible (di Castri et Hadley, 1985), aussi bien qu'aux efforts pour une meilleure gestion des forêts tropicales (FAO, 1985).

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EFFETS DES BRULIS SUR LES ARBRES EN AFRIQUE

Yves Gillon 1

L'homme entretient vis-à-vis du feu des relations émotives et ambigües.

Le feu est indispensable à la cuisson des aliments et utile à l'éclairage, à la chasse, à l'entre­ tien des pâturages, au bien-être en période froide, etc. Cependant il arrive aux flammes de retourner contre l'homme leur chaleur, faisant éclore, jusqu'au coeur des cités modernes des brasiers incontrôlés.

Si la charge émotive qui vient de ces relations ne se traduit plus en termes de divinités, elle persiste dans la richesse des formules qui lui sont associées et qui, avant que Lavoisier n'en établisse les bases scientifiques, suggéraient une relation entre le feu et la vie: "mourir à petit feu", "s'éteindre", "brOler sa vie"... Elle se révèle enfin par la fréquence des manifestations pyromanes.

Il en résulte une subjectivité, alimentée par les chroniques estivales, qui entrave les recherches bIen plus qu'elles ne les favorisent.

Ainsi le rapport de l'Unesco (1981) sur les "Ecosystèmes pâturés tropicaux" mentionne (p.35) que les effets des feux sont "très superficiellement connus" mais croit pouvoir affirmer cependant (p.35) que les feux annuels ont "pour conséquence une réduction de la valeur fourragère". Nous allons voir que tout dépend du contexte.

I~ [)J FEU ET OC LA VEGETATI()II

Dans le contexte naturel, les feux et la végétation sont le plus souvent présentés comme deux acteurs antagonistes. Or, si le feu, comme ferait un , est capable de croissance, de mouvement, de dé­ placarent , s'il dévore la végétation mieux que n'importe quel herbivore, il n'est pourtant rien d'autre qu'un mode de transformation des tissus végétaux. Pas de production végétale, pas de feu.

L'ampleur des feux et leur fréquence sont donc directement dépendants de la production de biomasse qui, elle-même, résulte des disponibilités hydriques du sol pour les plantes. Pas d'eau, pas de feu.

Réciproquement, un milieu suffisamment humide ne peut brOler. Les tissus vivants, qui contiennent habituellement plus de 70 pour cent d'eau, ne peuvent brûler, à moins que le dégagement de chaleur provenant de matériaux enflammés n'évapore, au préalable, l'eau des tissus. Leur combustion pouvant, à son tour, dessécher les tissus vivants voisins, propageant ainsi la réaction en chaîne de l'incendie qui néanmoins nécessite au départ des conditions particulières.

Les incendies de vëgétation se manifestent donc, après une période de croissance végétale, avec d'autant plus de probabilité que des tissus morts (bois et feuilles) se sont accumulés et que le climat s'assèche. La sécheresse de l'air agissant aussi, bien entendu, en accélérant le flétrissement de la végétation.

Chef du Départarent B ("Milieux et Sociétés"), ORSTOM, 213 rue Lafayette, 75480 Paris, Cedex 10, France.

49 En zone intertropicale, ces évidences générales expliquent la répartition des incendies dans le temps et dans l'espace. Cette répartition, liée à celle des formations végétales, rendant compte, à son tour, de la variabilité extrême des conséquences de ces feux.

ConditIons écocllJœtIques

Les zones les plus favorables aux incendies sont donc celles où alternent saisons à forte productivité végétale - c'est-à-dire saison à pluies abondantes et réparties dans le temps, et saisons sèches, avec une végétation annuelle qui se dessèche alors. Ce type bioclimatique correspond en ~frique aux savanes guinéennes. Des formations équivalentes existent sur d'autres continents: comme les Llanos sur la rive gauche de l'Orénoque.

Dans ces conditions optimales pour les feux, leur rythme est annuel. Toutes les espèces qui vivent là sont alors, par définition, aptes à résister dans ces conditions. Leur cycle de vie est, comme l'incendie, modelé par le retour périodique des saisons sèches. De plus, la variabilité (d'étendue, d'intensité et de date) du brOlage, introduit des facteurs d'hétérogénéité dans le temps et dans l'espace qui, favorisant la cohabitation d'espèces (aux besoins analogues, mais différentes dans le détail de leur mode d'occupation de l'espace), enrichit la diversité.

Survle des espèces Ilgneuses

Les espèces pérennes ne peuvent que très partiellement accorder leur rythme de vie à ces conditions de feu annuel. Les jeunes stades en particulier se trouvent encore incorporés au sein de la végétation annuelle au moment des feux, donc dans la strate où les températures sont les plus élevées, dépassant 600°C. Seuls les bourgeons au niveau du sol, lorsqu'ils existent, peuvent avoir résisté.

Il faut donc des circonstances rares pour que, l'incendie épargnant plus ou moins un emplacement donné plusieurs années consécutives, un jeune individu atteigne une taille suffisant à la protection de ses rameaux supérieurs. Certains ligneux une fois installés vont favoriser l'arrivée d'autres espèces, d'une part en limi tant la croissance des herbes, donc l'incendie, sous l'ombrage de leur frondaison, d'autre part en servant de perchoir ou d'abris aux animaux disperseurs de graines. Ainsi s'installe un îlot forest ier.

En 1imi tant la propagat ion des feux et en favor isant les di sponibi 1i tés hydriques dans le sol, les bas fonds et les alentours des affleurements rocheux sont des lieux de prédilection des ligneux. L'anta­ gonisme entre ligneux et herbacés se manifeste très visiblement le long des lisières de forêts galeries où l'on passe d'un type de végétat ion à l'autre sans transi t ion. Une fois installée, la forêt ent ret ient un microclimat sombre (défavorable aux herbacées héliophiles) et humide (défavorable aux feu).

VarlatIon dans le tSJllS

Suivant l'heure de la journée, la saison et l'année, les répercussions seront dans un même lieu très variables.

Variations nycthémérales

L'intensité du feu est liée à sa vitesse de propagation, si bien que les plus grandes étendues subiront les feux les plus intenses. Ces conditions particulières se rencontrent le plus souvent en plein jour. Inversement, lorsque le soir la rosée se dépose et le vent tombe, l'incendie se calme. Il peut alors poursuivre lentement sa progression, protégeant les espaces parcourus des feux qui survien­ draient les jours suivants.

Variations saisonnières

La date de passage des feux est importante en raison des modifications des conditions microclimati­ ques nycthémérales évoquées ci-dessus, mais surtout en raison de la coïncidence ou non avec les rythmes biologiques. Lorsque le feu passe avant le dessèchement du milieu, les espèces annuelles peuvent être détruites avant d'avoir accompli leur cycle. Les graines sur le sol ne risquent pratiquement rien de l'incendie, au contraire de celles qui occupent encore la strate épigée.

50 Par ailleurs, en supprimant la couverture végétale, les feux précoces dénudent le sol et le soumet­ tent à l'érosion éolienne. Les germinations de ligneux de l'année encore très jeunes sont particulière­ ment vulnérables. Les arbres adultes verront leur feuillage se dessécher. Il tombera à leur pied, ou sera emporté par le vent, en quelque jours. Au moment des premières pluies, la strate herbacée couvrira déjà le sol grâce à l'utilisation des réserves souterraines et aux remontées d'eau capillaire, ce qui limitera l'érosion de ruissellement.

Les feux tardifs s'attaquant à une végétation très sèche, enrichie en litière d'arbre et de feuilles d'arbres, sont intenses et destructeurs. S'ils passent après les premières pluies, après la levée des germinations et le débourrage des bourgeons, ils les détruisent. Les effets dépendent donc du temps écoulé entre le coeur de la saison sèche et le passage du feu, mais ce point "central" de la saison sèche qui correspond à l'expression la plus nette des mécanismes de résistance à la sécheresse, donc au feu, varie d'une espèce à l'autre, d'un emplacement à un autre (suivant les condi t ions hydriques du sol et le polymorphisme phénologique de chaque espèce), et d'une année à l'autre.

Variations annuelles

Si les années "moyennes", en termes statistiques, sont l'exception, les années dont le climat est assez éloigné de la moyenne pour modi fier la distribution des feux sont rares: moins d'une fois par décennie en première approximation.

Le caractère exceptionnel peut se manifester en régime sub-équatorial bixérique par une petite saison sèche assez intense pour permettre le passage des feux. Ils arrivent alors à un moment très défavorable du point de vue de la phénologie des adaptations à la sécheresse, mais sont le plus souvent limités en intensité et en étendue.

Beaucoup plus graves pour les ligneux sont les incendies des années exceptionnellement sèches. Dans ce cas les forêts galeries ne les arrêtent plus. Non seulement le feu consume la iitière de feuilles mortes, mais il peut s'étendre dans la frondaison des arbres, dont la plupart, appartenant à des espèces différentes de celles de savane, ne résistent pas à ce stress. On voit ainsi de ~e des plantations de café ou de cacao détruites par les feux de savane échappées de leur cadre habituel.

En effet, les arbres et arbustes de savane, une fois qu'ils dépassent la hauteur de deux ou trois mètres, supportent l'incendie des herbes. Ce sont des espèces part icul ières, di tes pyrophytes, peu nombreuses en comparaison de l'extrême diversité des espèces de forêt humide, mais qui résistent dans la savane incendiée régulièrement alors qu'ils succombent s'ils entrent en compétition avec des espèces forestières. Dans les zones volontairement protégées du feu, la concurrence (hydrique ?) avec les herbacées de savane peut suffire à "étouffer" certains ligneux, corrme le palmier r6nier par exemple. Inversement, une forêt sèche brOlée tardivement, donc intensément, année après année, est progressivement envahie par les graminées de savane.

Les arbres des savanes qui brOIent régulièrement ont un port "tortueux" du fai t des traumatismes liés aux feux. De plus la dispersion des individus évite la competition pour la lumière, qui favorise la formation de fats rectilignes.

On ne peut sinon découvrir beaucoup de caractérisation communes à l'ensemble des "pyrophytes". Ils appartiennent à des familles variées, qui se retrouvent en forêt humide, parfois même dans le même genre (Pterocarpus erinaceus en savane, Pterocarpus santalinoides en forêt par exemple pour les Papilionaceae).

Le bois peut être tendre et à fibres grossières (Cussonia barteri : Araliaceae) ou dur à grains fins (Pterocarpus erinaceus, Papilionaceae; Crossopteryx febrifuga,Rubiac.eae). L'écorce est souvent épaisse et creva~ (Piliostigma thonningii) mais ce n'est pas obligatoirement le cas, et en tout cas pas le cas des jeunes individus et des jeunes rameaux.

Lorsqu'un pied adulte est détruit, la souche peut émettre des rejets annuels après chaque feu. Ces rejets peuvent être fertiles (Annona senegalensis, Annonaceae) ou stériles (Piliostigma thonningii, Caesalpiniaceae). Lorsque l'on protège du feu une parcelle de savane en zone guinéenne, surtout si cette parcelle est adossée à une lisière forestière, les essences de forêt se propagent rapidement et la savane se transforme en forêt en quelques décennies. Les feux de savane limitent donc toujours la strate arborée au profit de la strate herbeuse. Ce qui peut se traduire dans la pratique par une grande diminution des disponibilités du milieu en bois de feu, mais une augmentation des pâturages. Les conclu­ sions à en tirer dépendent de l'économie régionale. On ne peut, en soi, ni condamner ni recommander la pratique des feux en savane.

II'lEIDIE EN ~

En dehors des incendies occasionnels provoqués dans des circonstances climatiques particulières aux marges des forêts semi décidues, les incendies de forêt sont rares. Rares mais toujours graves de conséquence et parfois très étendus, comme dans l'est Kalimantan, en 1983.

51 La plupart des destructions liées aux feux en zones forestières ne sont pas accidentelles mais provoquées volontairement. Le cultivateur pour profiter de la mince pellicule d'humus à la surface du sol détruit les arbres qui l'ont déposée en les tuant par le feu: c'est l'écobuage en milieu forestier. La circulation périphérique de sève est en effet rapidement interrompue par un feu allumé à la base du tronc. Le bois de ces arbres tués sur pied est ensui te récupéré ou non suivant les besoins, mais son feuillage n'Intercepte plus le rayonnement solaire, qui parvient donc aux plantes mises en culture.

Les espèces de sous bois sont, elles aussi, très sensibles à ces feux qui ne font pas partie des contraintes de leur histoire évolutive. Quelques rares espèces pionnières sont seules capables de s'installer une fois que le terrain, épuisé, est délaissé. Le cultivateur itinérant va détruire une autre parcelle de forêt qui, avec l'accélération des rotations, est de plus en plus jeune, avec un sol de moins en moins riche, donc d'autant plus rapidement épuisé.

Cette végétation pionnière donne une brousse secondaire qui ne correspond pas à la végétation naturelle des chablis. Dans les chablis, la reconquête se fait sur un sol encore riche, souvent une butte soulevée par les racines d'un arbre tombé. Elle est favorisée par les animaux disséminateurs de graines et par une humidité qui reste élevée. Ainsi n'est-il pas assuré que la végétation secondaire des cultures abandonnées permette, même avec une protection absolue, de retrouver la richesse et la diversité du milieu primaire.

Lorsque les densi tés humaines sont faibles, lorsque les ressources naturelles de la forêt sont connues, encore existantes et bien utilisées, l'agriculture itinérante sur brOlis est compatible avec le maintien d'un équilibre. Sinon, l'accélération des rotations appauvrit la forêt et le sol. Il faut cultiver plus et sur de plus grandes surfaces. Ainsi débute le cercle vicieux des dégradations fores­ tières, dont le terme est l'exode rural.

I~IES EN Z

La fréquence maximale des feux ne correspond pas aux zones les plus sèches, mais à celles qui bénéficient de précipitations suffisantes (800 mm environ) pour développer une strate herbacée continue. En s'éloignant de ces zones de savanes régulièrement brOlées vers les zones sèches steppiques, les feux deviennent plus rares. Ils interviennent justement lorsque la saison des pluies a été exceptionnellement favorable, c'est-à-dire que l'on se retrouve dans les conditions d'isohyètes supérieurs. Cependant reste une profonde di fférence : la nature des plantes et la durée de la sécheresse.

Si les herbes brOlées sont des annuelles, il faut attendre la fin de la saison sèche pour qu'inter­ vienne la germinat ion. Si les plantes herbacées sont pérennes (hemicryptophytes), la capaci té de re­ verdir avant les pluies, grâce aux réserves d'eau de la plante et du sol, ne peut se manifester ici. Dans les deux cas les herbivores, le bétai 1 donc, se trouve sans autre ressource que les feui lIages accessibles des arbres pour se nourrir. De plus le sol reste sans protection contre les vents.

Certaines années apparaissent exceptionnellement favorables à l'apparition de jeunes arbres. Les causes de ces variations sont méconnues, et, de ce fait, la gestion des plantations et des pépinières ne tient pas compte de ces facteurs de succès ou d'échec. Les arbres, qui souvent échappent à l'incendie des maigres herbes des steppes, subisse indirectement le contrecoup des feux par l'utilisation intense de leur feuillage, dit "pâturage aérien", par les herbivores.

Un autre facteur bien connu de la destruction du couvert arboré des zones sèches par le feu est l'utilisation du bois à des fins ménagères. Pour être bien connu, le problème n'en est pas moins jusque là sans solution car on constate, là encore, le fonctionnement d'un cercle vicieux: plus le bois de chauffe manque, plus les arbres sont détruits et plus la pression exercée sur les arbres restants s'in­ tensifie. Seul l'éloignement des habitations, donc des points d'eau, limite la destruction: il suffit de forer un puits pour qu'elle s'étende. Il n'y a pas d'autre solution que de planter des arbres en assez grand nombre pour que la production de bois subvienne aux besoins, en uti lisant pour cela les périodes pendant lesquelles la sécheresse recule et favoriser la restauration du milieu naturel à partir des jeunes 5 tades.

Encore faut-il que les jeunes pieds ne soient pas incendiés ou engloutis, avec l'herbe, par le bétail. Dans les conditions naturelles, les grandes variations annuelles du nombre de germinations des espèces arborées pourraient bien être corrélées avec les précipitations, donc avec les probabilités d'incendie.

En zone sèche comme en zone humide, l'amélioration du couvert ligneux tient donc certainement en grande partie à la survie des germinations et des jeunes plantes qui, incluses dans la strate herbeuse, ne

52 retiennent pleinement l'attention ni des agrostologues ni des forestiers. Le renouvellement des popula­ tions naturelles de ligneux doit être abordé en termes de production et de démographie tenant compte des jeunes stades, en s'inspirant des modèles de gestion utilisés pour les ressources halieutiques.

Les effets catastrophiques des feux en zones forestières ne doivent pas être extrapolés à l'ensemble des formations végétales. Il semble que les feux soient d'autant plus destructeurs qu'ils sont plus rares, ce qui est assez banal pour un facteur écologique, et qui ne surprendrai t personne du gel par exenple.

Il serait donc intéressant de profiter des nouveaux moyens qu'offrent la télédétection pour con­ naître la répartition des feux dans le temps et dans l'espace en fonction des précipitations. Il serait utile aussi de préciser l'effet des feux sur les différentes espèces aux différents stades phénologiques et aux différents âges. Celà permettrait d'utiiiser au mieux les espèces existantes sans recourir aux interdictions de brGler qui sont irréalistes et même dangereuses dans la mesure où un milieu est d'autant plus sensible au feu qu'il en a été longtemps protégé.

53

L'ENTOMOFAUNE DES STOCKS DE VIVRIERS DES PAYSANS DE COTE D'IVOIRE

Kouahou Foua-Bi 1

LES PRODUCTIONS VIVRIERES

Les réductions des ressources financières dues à la crise économique de ces dernières années ont amené la plupart des gouvernements africains à s'orienter vers une production accrue de vivriers afin, d'une part, de réduire le recours à l'extérIeur et, d'autre part, d'atteindre l'autosuffisance alImentaire.

En C

TA8lEAU 1

Production et consommation des vivriers en Côte d'Ivoire (statistiques agricoles 1981 DSREA)

Produits Production disponible Consomra t ion totale· Ecart P-C 1000 T corrigée : 1000 T

Riz 214,5 519,5 - 305,3

l'lais 226,7 310,5 83,8

Autres céréales 63,7 40,9 + 26,4

Ignarre 338,0 848,5 + 389,5

Iv'anioc 218,0 887,1 + 330,9

Taro 212,8 76,2 + 136,6

Banane plantain 1 150,2 455,2 + 695,0

• pour une population de référence de 8.605.100 habitants en 1981.

Maître de Conférences du cours de Zoologie agricole, Ecole Nationale Supérieure Agronomique (ENSA), 08 B.P. 35, Abidjan 08, Côte d'Ivoire.

55 L'inadéquation entre l'augmentation rapide des besoins et les sources disponibles n'est pas due à une simple insuffisance de production (sauf pour le riz) où les facteurs à incriminer sont surtout d'ordre politique et économique (Richard, 1981), mais plutôt à une mauvaise confrontation de l'offre et de la demande. Le principal frein au développement se situe au niveau du système post récolte qui est lié notamment à des problèmes de conservation. Le caractère saisonnier de la plupart des productions vivrières et l'étalement de la consommation sur toute l'année rendent en effet nécessaire un stockage sur une longue période (Tableau 2). Le stockage étant rarement assurée par les circuits de commercialisation et la production vivrière étant encore essentiellement une production de substance a priori, son surplus n'est mis à la disposition du marché par les paysans qu'après constitution du stock de semences pour la campagne suivante et des réserves alimentaires destinées à l'auto-consommation pour assurer l'alimenta­ t Ion de la fami Ile au moins jusqu'à la prochaine récol te.

TABLEAU 2

Calendrier de disponibilité pour la consamBtïon des produits vivriers de base au niveau national

Cultures M. J. J. A. S. O. N. D. J. F. M. A.

Igname précoce

Igname tardi ve .~:~:~:~:~:~:~:~:~········· :~:~:~:~:~:~:~:~:~ :;:;:;:;:;:;:;:~: ;:;:;:;:;:;:;:~:~:· ..··.. ··11111111111 Banane plantain 1111111111111111111111 11111111111111111111

ManIoc

RIz 1111111111 :~~t~mmI ~;~;m;mmI mmmm~I~ m~~;~;~;~;~f; 111111

Maïs 111111111111111111111111111~tt ~~~~tt~~~~~ ~~~~~~~t~m~~; ~;IIII

111~~* Période d'abondance 111111111 Moindre produc t Ion Cl Stockage

Le principal stockage est donc à la charge du paysan qui en supporte les risques. Or, c'est à ce niveau qu'interviennent les pertes les plus importantes, notamment celles qui sont occasionnées par les Insectes, cause essentielle de la dégradation des produits stockés en zone tropicale (Tableau 3).

C'est pour combler en partie cet te lacune que l'ORSTO\1 (en zone de savane) et l'ENSA (en zone de forêt) ont lancé avec l'accord des Ministères de l'Education Nationale et de la Recherche, de l'Agricul­ ture et des Eaux et Forêts, ainsi que du Ministère du Développement Rural, un important programme de recherche sur l'état sanitaire des stocks vivriers paysans, une bonne connaissance des pertes et leur cause constituant un préalable indispensable à la recherche des voies d'amélioration aboutissant à la mise au point de méthodes efficaces et économiquement justifiées, permettant de les réduire à un niveau acceptable.

ElIf5 ET LIMITES

Les travaux entrepris en Côte d'Ivoire ont pour but

le recencement et l'identification des espèces constituant l'entomofaune des stocks vivriers

l'étude de leur répartition géographique et les fluctuations de leur population et leur biologie

l'estimation de l'incidence économique des principaux ravageurs

la mise au point de méthodes de lutte adaptées.

Ces travaux s'inscrivent donc dans une double optique de recherche fondamentale et de développement. En raison de l'ampleur et de la di versi té des questions à aborder, nous nous sommes 1imi tés dans un premier temps au recensement de la faune entomologique de trois productions vivrières: deux céréales (maïs et riz) et un tubercule (igname) qui sont les productions les plus importantes quantitativement et qualitativement et dont l'acuité des problèmes entomologiques est évidente.

56 TABLEJ\I.J J

Productions vivrières Taux des pertes à la product ion et au stockage en 1983

Produits Production brute Perte à la production Taux de perte 1000 T et au stockage 1000 T %

Riz paddy 360 90.6 25,2

Naïs grains 410 83.3 20,3

Mil 26 4.1 15,8

Sorgho 16.6 3.1 16,2

Fonio 5.6 0.9 15,3

Total céréales 818.2 182 22,5

Ignare 2170 741 34,2

Nanioc 1060 285.4 26,2

Taro 225 115.4 51,3

Patate 17 1.5 8,8

Total tubercules 3472 1143.3 32,9

Plantain 885 273.7 32,4

Arachides (coques) 80 11.2 14

Ell..D:: PRATla..E Œ5 PREI...e.ES

L'état des connaissances acquises en Côte d'Ivoire, comme au niveau mondial, n'est pas le même pour les trois denrées choisies, notamment en ce qui concerne la manière d'aborder le problème. C'est pourquoi nous avons été amenés à approcher différemment l'étude du maïs et du riz, d'une part, et celle de l'igname d'autre part.

En raison des contraintes de toutes natures, des biais plus ou moins systématiques ont été intro­ duits. Ainsi, l'accessibilité des villages toute l'année, la disponibilité et l'ouverture d'esprit des paysans, la quantité et la durée suffisante de stockage ont été les critères qui ont prévalu dans un premier temps.

PRII'CIPAUX RESlI...TATS

Mils

La forme de stockage de maïs la plus couramment rencontrée est l'épi en spathe, notamment dans le Nord­ Ouest (96 pour cent). La proportion diminue au profit des épis despathés et du maïs égréné en sacs.

Les structures de stockage dépendent de la forme du stockage et de la région : greniers en banco ou en secko dans le Nord. En ce qui concerne l'entomofaune des stocks, les paysans interrogés est iment avoir des problèmes de conservation et 93 pour cent les attribuent essentiellement aux insectes, l'autre cause importante invoquée étant les rongeurs.

57 A partir de l'analyse des échantillons au laboratoire, nous obtenons le Tableau 4. Les ravageurs les plus importants sont les charançons (Sitophylus spp.). Ils sont associés à plusieurs coléoptères ravageurs secondaires, essentiellement Carpophilus spp., Paloporus spp. et Tribolium spp.

TA8LEAI.J 4

Insectes ravageurs de lTBïs en Côte d'Ivoire

Ordre et familles Espèces nuisibles Importance relative

Coléoptères

Trogosidae Tenebrioi~es mauritanicus + Bostry.:hidae Rhizopertha dominica Lyct idae Lyctus sp. Ni ti 'dul idae Carpophilus dimidiarus + Cathartus quadricollis +++ Cucujidae Oryzaephilus surinamensis Cryptolestes minutus ++ Palorus subdepressus ++ Alphitobries sp. Tenebrionidae Tribolium castaneum +++ Tribolium confusum ++ Gnathocerus sp. Anthribidae Araecerus fasciculatus + Curcul ionidae Sitophilus oryzae +++ Sitophilus zeamais

Lépidoptères

Noctuldae Mussidia sp. +++ Pyralidae Corcyca cephalonica +++ Gelechi Idae Sitotroga cerealella +

Les lépidoptères comme les Corcyra spp. et Sitotriga spp. ne sont pas responsables d'attaques importantes. Par contre, les larves de Mussidia sp. (chenilles de l'épi) au champ subsistent au grenier tant que l'humidité des grains est assez élevée. La faune tertiaire (parasites et prédateurs) se compose entre autres de punaises Anthocoridae ainsi que de microlépidoptères Pteromalidae.

Les dégâts occasionnés par les insectes ravageurs ne sont pas homogènes aux endroi ts visités et l'évolution de la population des insectes n'est pas non plus uniforme d'un poste d'observation à un autre. De ce fait, les essais de produits chimiques par utilisation d'organophosphorés comme le pyrimi­ phomethyl (actelic), ou de pyrethrine de synthèse, en l'occurrence la deltamethrine (K-Othrine) ne se justifient pas toujours dans certains sites.

Riz paddy

En reglon centre ouest où les observations ont été menées, le riz est stocké sous forme de bottes rangées dans les greniers en bambou ou en bois, éventuellement dans les pièces en terre. Il s'agit généralement de la cuisine : la pièce est alors fréquemment enfumée. Les variétés locales de riz sont mélangées dans les greniers mais chaque botte correspond à une seule variété.

En ce qui concerne l'entomofaune (Tableau 5), le principal ravageur en paddy stocké est l'aluci te, SitotrCXja cerealella 01. (Gelechiidae). A l'exception de Sitophilus oryzae et S. zeamaïs, qui coexistent comme sur· le maïs, et Rhizopertha dominica, quasiment absent, tous les autres ravageurs rencontrés sont des ravageurs secondaires.

Des essais de traitements contre S. cerealella sont sans intérêt. De toute évidence d'autres facteurs masquent l'effet des traitements.

58 T~5

Insectes ravageurs des stocks de riz paddy

Ordre et familles Espèces nuisibles Importance relative

Coléoptères

Trogositidae Leptocatus purillus Bostrychidae Rhizopertha dominica Ni tudll idae Carpophilus dimidiatus Cucujidae Cathartus quadricollis Tenebrionidae Tribolium castaneum Tribolium confusum Anthribidae Araecerus fasciculatus Curcullonidae Sitophilus oryzae ++ Sitophilus zeamais lépidoptères

Gelechi idae Sitotriga cerealella +++

Entarofaune de l'ignane

Les méthodes de stockage fréquemment utilisées en Côte d'Ivoire sont la fosse, les claies (verticales et horizontales), et le vrac. Très limi tée dans les fosses, la populat ion entomologique se trouve à son maximum de pullulation dans les stocks en vrac. Le Tableau 6 rassemble l'entomofaune des stocks d'igname.

T~6

Insectes ravageurs des stocks d'ignare

Ordre et familles Espèces nuisibles Importance relative

Isoptères Amitermes evunciser +

Coléoptère

Anthribidae Araecerus fasciculatus +

Lépidoptères

Tineidae En cours de détenmination ++ Pyral idae Euzopherodes vapidella +++

I-broptères

Coccidae Aspidiella hartii ++++ Pseudococcidae Planococcus dioscoreae +

59 On peut les répart Ir en ravageurs primaires qui s'at taquent aux tubercules sains, c'est le cas des cochenilles (llspidiella hartii et Planococcus dioscoreae) , des 1é pidoptères (Europherodes vapidella et une Tineidae en cours de détermination) et des bruches (Araecerus fasciculatus); les ravageurs secon­ daires s'installent sur les tubercules déjà blessés ou dégradés par les ravageurs primaires dont ils aggravent les dégâts: c'est le cas de la plupart des coléoptères et des diptères. Quant à la faune tert iai re, elle est cons t i tuée surtout des hyménoptères parasi tes, dont lldelencyrtus femoralis semble être le plus important numériquement.

L'estimation des attaques et des pertes est malaisée surtout en ce qui concerne les pertes. On se contente généralement de l'estimation de l'attaque. Ainsi les cochenilles constituent le plus important numér iquement (92 pour cent).

En ce qui concerne la lutte contre les cochenilles, trois pulvérisations à la thypholine 0 à inter­ valle de 15 jours sur les ignames en claies donnent des résultats intéressants. Quant aux lépidoptères, une solution de Deltamédrine à 5 g. de m.a. pour 100 litres d'eau en formule CE et 2,5 à 5 g. en formule flow s'est avérée efficace contre les cochenilles et les lépidoptères. Le coût estimé est de 25 il 500 F CFA la tonne et les pertes évitées sont de l'ordre de 140 kg/tonne en fin de stock, soit un bénéfice de 200 à 450 F CFA par tonne, ce qui est insignifiant.

CX)oO..USI(JIl

L'entomofaune retrouvée dans les stocks vivriers des paysans représente celle que l'on trouve habituelle­ ment dans les magasins des villes ou des GVC, qui sont d'ailleurs approvisionnés il partir des premiers. Il faut cependant noter que la représentat ion géographique des différentes espèces sur le territoire national n'est ni régulière, ni homogène. Leur pullulation est par conséquent très hétérogène et de ce fait il n'est pas aisé de proposer des méthodes de lutte au plan national.

La recherche se poursuit par extension des aires d'observation et par l'étude de la dynamique des populations dans différentes régions en vue de la détermination des directions des recherches à privi­ légier dans l'avenir.

Cet exemple devrai t inci ter nos collègues d'autres pays à adopter une approche globale de leur résolution au niveau international afin de circonscrire les fléaux qui accentuent ce déficit alimentaire dans nos régions.

60 CONTRIBUTION A LA CONNAISSANCE DE QUELQUES INSECTES ENNEMIS DES GRAINS ET GRAINES CULTIVES EN BASSE COTE D' IVOIRE

Kouassi Bekon

1NTRn.CTI(Jol

Dans les reg IOns forestières de Côte d'Ivoire, l'activité principale des agriculteurs pendant longtemps fut orientée vers des productions essentiellement destinées à l'exportation: café, cacao, banane, ananas, palmier à huile et récemment coton, productions pour lesquelles la Côte d'Ivoire occupe générale­ ment une place de "leadership" au niveau africain et même mondial.

En plus de cet te product ion de cul tures de rente, les agricul teurs des régions forest ières ont développé des cultures vivrières de leur choix en association ou en rotation avec la culture principale (la cul ture d'exportation). Les autori tés de Côte d'Ivoire ayant constaté le déséquilibre manifeste régnant entre les productions destinées à l'exportation et les vivriers ont dynamisé depuis 1980 ce dernIer secteur dans le cadre d'un vaste programme national d'autosuffisance alimentaire. Cette polltl­ que, qui a permis une véritable promotion des vivriers, mérite d'être prolongée par des méthodes de conservation adéquates pour éviter des situations désastreuses (Bekon, 1982).

En effet, les spécialistes de la FAO (1976) estiment que les pertes lors de la conservation peuvent atteindre par an l'équivalent de 42 milliards de tonnes marchandes, soient 25 milliards de francs français et que 40 pour cent de ces pertes sont dues directement ou indirectement aux insectes (Gasga, 1978) .

Sigaut (1978) si tue les facteurs de détériorat ion des grains et graInes à trois niveaux: les ravageurs (insectes, oiseaux et rongeurs) ; la germination intempestive; et les microorganismes res­ ponsables de la fermentation (moisissures, pourriture bactérienne, réaction chimique et enzymatique, etc... ). Dans les régions forestières, qui sont d'ai lIeurs des zones chaudes et humides, ces causes de détérioration sont à leur intensité maximale.

La zone tropicale caractérIsée par des températures élevées toute l'année est propice à un dévelop­ pement continu des insectes. Alors que Troude (1982) a établi qu'un bon stockage doit être réalisé en deçà de 13 pour cent de teneur en eau, il n'est pas rare de constater qu'en région tropicale, de la récolte à la mise en stockage ou en conservation, les grains peuvent être à une humidité parfois supé­ rieure à 18 pour cent.

Il apparaît donc nécessaire de mieux connaître les ravageurs responsables des dégâts lors de la conservation, leur mode d'infestation, leur biologie, leur écologie, etc... , afin de prendre si possibie des dispositions dans le sens d'un contrôle rationnel et efficace.

IŒNTIFlCATI(Jol "RAPIŒ" ŒS INSECTES ŒS ~

La grande majori té des insectes des stocks appart iennent à deux grands ordres: les coiéoptères et les lépidoptères. Certains sont dits insectes à forme libre, alors que d'autres sont à forme "cachée" car

Enseignant Chercheur, Laboratoire de Zoologie, Ecole Nationale Supérieure Agronomique (ENSA), 08 BP 35, Abidjan 08, Côte d'Ivoire.

61 leur développement pré imaginal se déroule ent ièrement à l'intérieur du grain. Ces insectes posent le problème de leur détection avant la fin de leur développement dans les grains et graines.

Enfin des espèces nuisibles aux stocks causent des dégâts caractéristiques qui peuvent servir à les identifier de façon sommaire avant une détermination complète par un spécialiste.

D'après Fleurat Lessard (1982), cette distinction rapide peut être établie de la façon suivante

1. Grains perforés d'un trou

(a) Orifice à contour irrégulier la présence de petits coléoptères ayant un rostre de 2,5 à 5 mm de longueur et de couleur brun foncé à noire, évoque les charançons qu'on retrouve dans notre pays, essentiellement sur maïs et riz.

(b) Orifice à contour régulier: l 'observat ion de pet! ts papi llons aux ai les gr i s-jaunâtre br i llan­ tes indique la présence de l'alucite des grains. Il attaque le maïs, sorgho, riz, etc...

2. Grains rongés extérIeurement par des coléoptères adJltes ou larves sans toile ou fil

(a) Présence de petits coléoptères fins et agiles ayant 3 mm de longueur. Les larves issues des adultes sont minuscules et difficiles à trouver, elles se logent parfois dans les grains cassés: ce sont les si lvains. Ils at taquent et déprécient le riz, mi 1 et sorgho.

(b) La présence de coléoptères de couleur rouge-brun, de 4 à 5 mm de longueur, dont les larves jaunes, filiformes, peuvent atteindre 6 mm de longueur, sont imputables aux Tribolium. Ils déprécient le riz, le maïs et tous les sous-produits céréaliers.

3. GraIns rongés IntérIeurement et rêdJits en miettes par des coléoptères

(a) Les téguments des grains sont presque intacts, il y a un abondant dépôt de farine, avec présence dans le milieu de petits coléoptères de 2,5 mm de long à corps cylindrique et à tête encapuchon­ née: ce sont les capucIns. Ils se nourrissent de riz, maïs, sorgho, ml l, etc...

(b) Il n'y a pas de dépôt de farine, mais on observe la présence de petites larves grégaires, velues, de 2 à 5 mm de longueur. L'adulte est petit, ovoïde: c'est le dermeste ou trogoderme qui vit sur les tourteaux, le riz, le maïs et les légumineuses, etc...

4. Grains rongés extérieurement par des chenilles et agglaJérés par des fils fonmnt des toiles

Les dépouilles nymphales sont érigées à l'extérieur des grains. Si on rencontre dans ce milieu des petits papillons à ailes tachetées de noir, le déprédateur est la teigne elle attaque le maïs, les débris et les grains cassés.

5. Graines de légunineuses avec des trous réguliers

S'Il Y a des coléoptères de 3 à 4 mm de longueur, aux formes arrondies, gris ou bruns, avec des taches plus claires, il s'agit de bruches. Nous donnons ci-après la biologie de quelques uns des insec­ tes nuisibles.

ŒSCRIPTI~ ET BI

La bruche ITBcuiée (ou bnJChe à quatre taches) Callosobruchus maculatus

Les Bruchidae adul tes sont caractérisés par leur forme globuleuse et ramassée. Cet te fami lle cont ient des espèces spécifiques des légumineuses, mais, surtout, la spécificité des espèces de Bruches, pour une plante hôte, est encore plus poussée.

La bruche maculée, espèce à affinité climatique tropicale et subtropicale, mesure entre 2,6 et 3,3 mm au stade adulte avec une coloration générale rougeâtre. Elle présente généralement sur les élytres quatre taches foncées bordées de soies plus claires. Les antennes sont noires, les premiers articles roux. Cette espèce est certainement la plus polyphage des bruches et attaque les genres Phaseolus (haricot), Vigna (niébé) et Pisum (pois chiche). Le niébé reste cependant sa denrée favori te.

La ponte est extrêmement rapide après l'accouplement. Elle a lieu sur des surfaces lisses et, après l'éclosion, la larve pénètre invariablement au point d'adhérence de l'oeuf. La durée du cycle de

62 développement varie dans des limites assez larges selon la graine-hôte, son état d'hydratation et la tmpérature.

Les charançons (charançon du riz Sitophilus oryzae)

Les charançons se reconnaissent sans ambiguïté à la forme de leur tête prolongée par un rostre, les pièces buccales se trouvant situées à son extrémité.

Les charançons du genre Sitophilus ont un rostre plus court que le prothorax, celui-ci étant nette­ ment ponctué. Dans ce genre il existe trois espèces très connues: S. granarius (que l'on rencontre dans les pays tempérés), S. oryzae et S. zeamai's, se rencontrant tous deux en Côte d'Ivoire aussi bien en régions forest ières que de savanes. S. oryzae a une longueur moyenne de 3 mm et possède des ai les fonctionnelles, ce qui lui permet de voler. Il est classé parmi les plus nuisibles des insectes des stocks à travers le monde (Champ et Dy te, 1978).

L'insecte se reproduit essentiellement aux dépens des grains de céréales cultivées de taille suffi­ sante pour permettre le développement de la larve. L'état du grain influe également sur la ponte. Les grains de petite taille, les grains secs, les grains brisés, les grains hébergeant déjà une larve, reçoivent en moyenne moins d'oeufs que les grains, soit de grande dimension, soit humides, soit entiers ou encore indemnes d'at taque.

Les Charançons sont de moeurs nocturnes. Ils sont plus actifs la nuit que le jour, même s'ils vivent en permanence dans l'obscurité complète (Fleurat Lessard, 1982). Ils s'alimentent régulièrement et peuvent même consommer 1 mg de céréale par jour. La longévité des adultes, à 25°C et 70 pour cent HR, se situe aux environs de quatre mois.

Chez le genre Sitophilus, les accouplements occupent un dizième de leur vie. Ils sont souvent répétés sans la moindre nécessité. Avant de pondre, la femelle taraude le grain à l'aide de son rostre: la durée de ce travail est fonction de la dureté de l'amande. Lorsque la cavité a les dimensions requises, elle se retourne et dépose un oeuf dans la loget te qu'elle bouche avec un tampon de matière gélatineuse. La femelle ne pond jamais dans un grain contenant moins de 9 pour cent d'eau (Farjan, 1983). En conditions optimales, une femelle dépose 200 à 300 oeufs en moyenne, le nombre le plus élevé se situe autour de 600.

La larve creuse une galerie dans l'albumen jusqu'au pôle opposé à celui ou l'oeuf a été pondu. Là, elle se retourne et emprunte le chemin déjà parcouru en élargissant sa galerie car elle a augmenté de taille. A mesure qu'elle taraude, la larve comble la galerie d'un mélange de débris et de déjections dont elle se nourrit sur le trajet retour. Durant son évolution, une larve consomme environ un tiers de l'albumen. Enfin, dùns les conditions optimales (TO = 30-32°C, T en eau du grain = 13,4 à 14 pour cent), le cycle de développement est le plus court : 24 jours.

Tribolium castaneum

Il est, parmi les insectes des stocks, le plus ubiquiste et le plus polyphage. Sa taille varie entre 3 et 4 mm et son corps, allongé, est de couleur brun-rougeâtre. Les antennes ont les trois derniers articles légèrement élargis, formant une petite massue assez bien différenciée des autres articles.

L'adulte naît directement dans le milieu (insecte à forme libre). En cas de pullulation, les matières contaminées acquièrent une odeur désagréable qui provient de sécrétions quinoniques des adultes issues de glandes abdominales et qui se fixent sur les produits. Ce phénomène est surtout perceptible dans la farine.

Les adul tes et les larves ne s'implantent généralement dans les grains qu'après les at taques de charançons ou d'autres espèces primaires ou simplement se nourrissent de grains brisés et de farines (blé, maïs, orge, riz, etc... ). En dehors des grains, les principales denrées attaquées par cette espèce sont les produits céréaliers, les gateaux secs, les haricots, les tourteaux, etc... (Bekon, 1984). Facile à élever au laboratoire, l'insecte a fait l'objet de très nombreux travaux scientifiques.

Les lépidoptères

L'alucite des grains: Sitotroga cerealella

C'est un papillon de 11 à 16 mm d'envergure, avec les ailes gris clair, dorées ou argentées et longuement frangées de soies vers l'arrière. La femelle, peu de temps après l'accouplement, pond sur les épis ou, à défaut, entre les grains en vrac assemblés dans les greniers ou les cribs, un grand nombre d'oeufs (200 à 250) disposés en amas.

63 Les jeunes chenilles de premier stade sont actives et recherchent les grains propices à leur instal­ lation. Elles pénètrent à la base des grains de maïs, très près du germe. A l'éclosion de l'oeuf, la chenille ne mesure que 1,5 mm environ et passe inaperçue. Elle atteint son complet développement après avoir subi quatre mues qui amènent sa longueur définitive à de 10 à 13 mm. Le développement larvaire est en étroite relation avec la température pour un grain donné, à 35° il dure 20 jours. L'adulte émerge au niveau d'un opercule fait par la larve du dernier stade dans l'albumen corné. La multiplication est ininterrompue pendant toute l'année.

La teigne du cacao : Ephestia elutella

L'adulte de la teigne du cacao est un petit papillon aux ailes antérieures de couleur brun clair à brun foncé avec une bande d'écailles disposée transversalement, en position médiane. Il mesure de 8 à 10 rrm au repos. La femelle pond environ une centaine d'oeufs après l'accouplement.

La chenIlle est de teinte variable entre le rougeâtre et le gris selon la nature du substratum. Les chenilles tissent des toiles au cours de leurs déplacements, ce qui peut recouvrir les denrées attaquées comme d'un voile. La température et le mode d'alimentation influencent la durée totale du développement qui peut s'effectuer en 30 jours, dans le cas le plus favorable. Elie attaque régulièrement les graines de légumineuses, les produits céréaliers, les fèves de cacao, les fruits secs, le riz, les pâtes alimen­ taires, etc. Le germe est la partie du grain attaquée en priorité.

Les travaux portant sur une connaissance approfondie de la biologie et de l'écologie des différents insectes ennemis des denrées stockées doivent être poursuivis dans nos conditions locales, tant dans les écosystèmes forestiers que dans les savanes, car l'indépendance alimentaire dans les pays en voie de développement dépendra également des résultats de ces recherches.

Cela supposerait qu'une investigation à l'échelon national de tous ces déprédateurs soit effectuée et soit suivie d'études de laboratoire. C'est à partir d'une meilleure exploitation de ces données biologiques et écologiques acquises au laboratoire qu'une méthode de lutte rationnelle pourrai t être établie, devant permettre de sauvegarder, lors du stockage chez les paysans de Cate d'Ivoire une plus grande quantité des denrées récoltées.

BIBLIOGRAPHI E

BEKON, K., 1982. Les cultures vivrières peuvent-elles représenter un élément stratégique dans le déve­ loppement agricole ivoirien? Grenier, AUPELF, Paris, 3, 24 p. BEKON, K., 1984. Biologie du développement et comportement alimentaire de Tribolium castaneum (HERBST) (Coleoptera-Tenebrionidae) sur les semences de céréales. Thèse Doctorat-Ingénieur - ENSA de Rennes, 167 p. Q-IMIP, B.R. ; DYTE, C.E., 1978. Rapport de l'enquête mondiale de la FAO sur les insectes des céréales entreposées et leur sensibilité aux insectes. FAO Prog. veg. Prot. plant., Rome, 5, 374 p. FARJAN, M.A., 1983. Biodynamique en laboratoire de deux espèces ravageurs du blé - le charançon du riz: Sitophilus oryzae L. (Coleoptera : Curculionidae) et le capucin des grains: Rhizopertha dominica F. (Coleoptera-Bostrychidae) avec application aux conditions de conservation en Afrique du Nord. Mém. ing. Agron. Inst. Agr. Vet. Hassan II, Rabat, 99 p. FLEURAT LESSARD, F., 1982. "Les insectes et les acariens", in: MULTON, J.L. (dir. publ.), Conservation et stockage des grains et graines et produits dérivés, Lavoisier, Paris, vol. 1, pp.394-436. GASG\ (Groupe d'Assistance aux Systèmes concernant les Grains après Récolte), 1978. Priorités d'action pour la réduction des pertes de grains aprés récolte. Cheshire, London, 79 p. SIGAUT, F., 1978. Les réserves de grains à long terme. Technique de conservation et fonctions sociales dans l'histoire. Maison ScL, Lille, 202 p. TROUDE, F., 1982. "Eléments sur le stockage des céréales dans les pays en développement de la zone tropicale, 1085-1091", in : MULTON, J.L. (dir. pub!'), Conservation et stockage des grains...op. cit., vol.2, pp.579-1155.

64 PRINCIPAUX PROBLEMES ENTOMOLOGIQUES DES PLANTATIONS FORESTIERES EN COTE D'IVOIRE

Bemard M'lllet et Lffibert Kanga 1

LA SITUATI()Il F

Evolut ion de la forêt dense

La superficie de forêt dense humide est passée de près de 12 millions d'hectares en 1956, à 9 millions d'hectares vers 1966 et 6 millions d'hectares en 1976. Cette surface est actuellement de 3 à 4 millions d'hectares.

Cette diminution rapide de la surface forestière (200.000 à 250.000 ha/an) est liée principalement cl deux facteurs combinés :

l'exploitation forestière (3 à 4 millions de m3 /an actuellement), qui entraîne un appauvrissement de la forêt et ouvre des voies d'accès pour les agriculteurs

les défrichements agricoles, pour les cul tures vivrières (ignames, maïs, ...), les cul tures de rente (café, cacao), les cultures industrielles (palmiers, hévéa, ...), provoquant la destruction de la forêt.

Ces défrichements agricoles entraînent la destruction d'un volume de bois quatre à cinq fois supé­ rieur à celui qui est exploité. Cette diminution de la surface forestière s'est accompagnée d'une évolution des essences exploitées: orientée initialement vers les espèces de qualité supérieure (sipo, iroko, acajou, tété... ), et compte tenu du taux élevé de disparition de ces espèces (plus de 75 pour cent en 15 ans), l'exploitation s'est orientée vers des essences de moindre qualité (samba, fromager, ... ).

Cette évolution n'est pas sans conséquence, compte tenu du rôle de la forêt tant sur les plans écologiques (act ion sur le cl imat), économiques (plus de 10.000 salariés dans le secteur bois) que pour l'agriculture (protection des sols) et pour l'autosuffisance énergétique (bois de feu).

Les solutions mises en oeuvre

Face à cette situation, un certain nombre de solutions ont été préconisées par les autorités de Côte d'Ivoire:

constitution d'un domaine forestier permanent, d'environ 3 millions d'hectares, appartenant à l'Etat ;

création en 1966 de la SODE FOR , Société pour le Développement des Plantations Forestières: près de 60.000 hectares ont été plantés à ce jour, avec des essences de Côte d'Ivoire (fraké, ... ) comme exotiques (teck, ... );

démarrage de l'aménagement des forêts naturelles de l'Etat, et campagnes de sensibilisation du monde rural (feux de brousse, ... ).

Division de la protection du reboisement, Centre technique forestier tropical, 08 BP 33, Abidjan 08, Côte d'Ivoire.

65 Les plantations forestières

Oes plantations ont été effectuées depuis près de 50 ans en Côte d'Ivoire. En zone de forêt, il s'est d'abord agi d'enrichissements de la forêt naturelle, suivant diverses méthodes, ou de plantation de type "Taungya" (après défriche et cul tures vivrières).

Après la création de la SOOEFOR, les plùntations ont d'abord été réalisées suivant la méthode du recrû sous forêt empoisonnée, avec des essences de Côte d'Ivoire de bois d'oeuvre de valeur (sipo, a:ajou, niangon, ...), puis avec des espèces moins considérées (fraké, f rami ré, okoumé, ...).

Depuis 1977, la SOOEFüR s'est orienté vers des reboisements industriels après abattage totai de la forêt préexistante et préparation mécanisée du sol; les essences utiiisées sont le fraké, ie framiré, le Cedrela, le samba, le teck, ...

Parallèlement, de petites surfaces ont été réalisées dans l'optique de plantations papetières avec des eucalyptus, du pin et du gmel ina.

Le Centre technique forestier tropical

Dépendant du Ministère de la recherche scientifique et de l'éducation nationale, le CTFT-CI mène des activités de recherche appliquée et de recherche/développement concernant l'ensemble du secteur fores­ t ier.

Disposant de douze chercheurs et de neuf techniciens supérieurs, cet organisme mène actuellement les grands programmes suivants:

Production de Biomasse; Production de Bois d'oeuvre Amélioration du Matériel végétal Protection des Reboisements; Agroforesterie ; Aménagement de la Forêt naturelle Etude technologique des Bois.

PRlflClPAUX PfU3LEM::S ENT

Près de 60.000 ha de plantations forestières de bois d'oeuvre ont été effectuées à ce jour en Côte d'Ivoire, avec des essences de grùnde valeur économique ou d forte productivité de bois.

Ces plantations sont fréquemment attaquées par des insectes pouvant entraîner une baisse sensible de la productivité des peuplements et/ou une altérùtion de la qualité des bois.

De façon synthét ique, et compte tenu des données déjà acquises dans les plantat ions existantes en Côte d'Ivoire (industrielles et expérimentales), nous pouvons schématiser les risques potentiels encourus par les principales essences de reboisement dans le tableau à la page suivante. Il est bon de préciser, afin d'éviter les interprétations hâtives, que ce tableau n'est pas une représentation de l'état sani­ taire moyen des plantations, mais un descriptif des différentes types d'attaques qui ont pu être observés jusqu'alors dans certaines plantat ions de ces essences.

Essences actuellement mises en veilleuse

Il s'agit d'essences plantées jusqu'en 1976, suivant la méthode du recru sous forêt empoisonnée. Elles sont actuellement abandonnées du fait de problèmes phytosanitaires (:ajou, roko), ou de leur durée de révolut ion assez longue (sipo, niangon, makoré, ... ).

Acajou

Le principal obstacle aux plantations d'acajou en Côte d'Ivoire, comme plus généralement en Afrique, est l'attaque, puis la destruction du bourgeon terminal par les larves des microlépidoptères Hypsipyla robusta ("borer de l'acajou") et Gyroptera robertsii. Cette destruction entraîne la suppression de la dominance apicale du bourgeon terminal, le démarrage des bourgeons auxiliaires et la formation de four­ ches mul t iples. En Côte d'Ivoire, plus de 2.000 ha d'acajou (Khaya ivorensis surtout) ont été plantés jusqu'en 1976, avec' des résultats assez variables.

66 Type Défoliateurs M..doteurs Piqueurs Foreurs d'insectes Bois Tronc Bourgeons

Essence

Acajou 1 a 2 b 3 a b Badi 2 a Cedrela 1 b 1 b Eucalyptus 3 a Fraké 3 a 1 b 1 b 1 a Framiré 3 a 2 b 1 b 2 a 0Te1 ina 2 a Niangon 1 b Pins Teck 2 a 1 b Sipo 1 a Sarrba 1 a 3 a

1 négligeable a action sur la productivité 2 faible b action sur la qualité du bois 3 notable

Les recherches menées en Côte d'Ivoire ont fait ressortir les points suivants:

lutte sylvicole: les attaques apparaissent plus rapidement (un à trois ans) et sont plus graves lorsque les plantations sont effectuées en pleine lumière; par contre, les plantations sous ombrage (sous forêt j sous couvert de Leucaena leucocephala) ou en mélange à basse densité d'acajou peuvent être attaquées plus tardivement (trois à cinq ans) j

lutte chimique: l'utilisation de methidathion a donné de bons résultats en pépinières, mais n'est pas utilisable en plantation. Des traitements à l'aide d'insecticides systémiques, mélangés à des résines retards ont été testés, mais avec des résultats peu convaincants

lutte éthologique: l'isolement de la phéromone sexuelle d'Ho robusta a été réalisée en France par l'INRA, mais les tests réalisés en plantation en Côte d'Ivoire avec des analogues de synthèse de ces phéromones ne se sont pas révélés positifs;

lutte biologique: bien que les larves de borer présentent des hyperparasltes naturels (braconides, nématodes,... ), il n'a pu être mené de recherches sur ce thème jusqu'alors;

lutte génétique: les quatre espèces d'acajou (K. ivorensis, K. grandifoliola, K. anthotheca, K. senegalensis) sont également attaquées en Côte d'Ivoire. Un essai comparatif de provenances a été réalisé avec K. ivorensis, mais n'a ,as fait ressortir de provenance moins sensible aux borers.

Des recherches vont être entreprises afin d'identifier les médiateurs chimiques de l'attractivité des méliaacées vis-à-vis d'Ho robusta. En dehors des borers des pousses, on observe des attaques des graines par des larves de microlépidoptères, des attaques fréquentes de l'écorce (larves de cossides sous corticales, pontes d'orthoptères dans l'écorce), des mulotages du tronc dus à des coléoptères Bostrychi­ dae (Apate monachus) , ainsi que des défoliations par Zonocerus variegatus.

Niangon (Tarrietia utilis)

De nombreux insectes peuvent s'attaquer à cette espèce, en particulier des coléoptères foreurs des bourgeons (Glenea girafla ; Tragocephala castnia ; Sternotomis pulchra ; Acanthophorus maculatus : Ceram­ bycidae) ; des insectes défoliateurs (Syagrus calcaratus : coléoptère Eumolpinae j Anomis leona ; Earias biplaga : lépidoptères Noctuidae) ou enrouleurs de feuilles (Syllepta polycynalis ; Pyralidae et Argyro­ ploce sp. : Tortricidae) j des insectes foreurs du tronc (Eulophonotus myrmeleon: lépidoptère Megalo­ pygidae) des insectes s'at taquant aux racines (Popillia sp.: coléoptère Scarabeidae; Dysmicoccus brevipes : hémiptère Coccidae).

L'impact de ces attaques est en général mineur et ne compromet pas j'avenir des peuplements ou leur croissance (près de 1500 ha plantés) en Côte d'Ivoire.

Okoumé (Aucoumea klaineana)

Introdui t en Côte d'Ivoire depuis l'Afrique Equatoriale, l'Okoumé est sujet en Côte d'Ivoire à diverses attaques. En pépinières et jeunes plantations, des attaques de psylles (Pseudophacopteron sp.) sont assez fréquentes, provoquant des déformations en balais de sorcière sur les jeunes plants. Des traite­ ments à base de Vanidothion ont montré une bonne efficacité contre ces psylles.

67 En plantations, des attaques de chancres noirs peuvent être observées sur le tronc. C'est une infection complexe, combInant des attaques primaIres de cochenilles (Stietoeoeeus sp.), véhiculées par des fourmis (Crematogaster sp.j... ), à des attaques secondaires de champignons (Botryodiplodia theo­ bromae : fumagines) et des écoulements de résine.

Des recherches avaient été initiées dans les années 1970 sur ces attaques de psylles et sur les chancres noirs. L'arrêt de plantations de cette essence (920 ha de 1966 à 1970) a entraîné l'arrêt de ces recherches. Dl vers autres insec tes défol ia teurs (Diaerisia sp.: lépidoptère Arc t i idae j Syllepta balteata : Pyralidae), ou piqueurs (hémiptères Cercopidae) ont pu être observés, sans qu'ils causent de dégât s notables.

Iroko (Chlorophora regia et C. exeelsa)

Le principal facteur limitant aux plantations d'iroko est un insecte galligène s'attaquant aux jeunes feuilles et aux bourgeons. Il s'agit d'un hémiptère Psyllidae du genre Phytolima, et dont l'espèce la plus courante semble être P. lata. Les piqOres de ce psylle transforment les bourgeons et les jeunes feuilles en une galle. Il en résulte des déformations graves de l'arbre et des fourches multiples.

Des études ont été menées par le CTFT sur l'incidence des facteurs écologiques (influence de la lumière en particulier) ; sur les effets de la composition minérale des arbres sur leur attractivité; sur les facteurs de résistance des m~racées au psylle (greffages de l'Iroko sur diverses moracées résis­ tantes), et sur les possibilités de lutte chimique contre ce psylle. Quelques résultats ont été obtenus, mais l'arrêt des recherches sur cette essence forestière de valeur n'a pas permis une résolution de ce problème.

Parmi les problèmes secondaires, on peut noter des insectes foreurs du tronc ou s'at taquant aux jeunes tiges (Sternotomis pulehra: coléoptère Cerambycidae j Braehytrypes membranaeeus: orthoptère Gryll idae).

Sipo (Entandrophragma utile)

Plantée sur plus de 2.000 ha, cette essence prestigieuse de Côte d'Ivoire est actuellement mise en veilleuse du fait de sa faible croissance initiale, et de sa révolution très longue. Cette espèce présente peu de problèmes entomologiques.

On note quelques attaques de coléoptères Scolytidae (Xyleborus morstatti)dans les tiges, de chenil­ les défoliatrices (At tacidae : Pseudobunaea sp.) et parasi tant les graines (Hypsipyla sp.) j d'hémiptères piquant les jeunes rameaux et feuilles (Coccidae : Saissetia farquarsoni ; Lygaeinae : Oneopeltus fame­ lieus).

Essences de bois d'oeuvre actuelles de la S(IffOR

Ce sont des essences de plein découvert, actuellement plantées après abat tage mécanisé de la forêt préexistante, et présentant des caractéristiques sylvicoles et phytosanitaires globalement satis­ faisantes.

Teck (Teetona grandis)

Planté sur près de 15.000 ha, cette espèce de bois de grande valeur présente peu de problèmes entomologi­ ques graves. On observe parfois des attaques d'insectes foreurs du tronc, tels que des coléoptères Bostrychidae (Apate monaehus et A. terebrilns; xylopertha pieea), ou Cerambycidae (Carynoelytus reieh­ nenowi) sur arbres dépérissants, et des lépidoptères Noctuidae (Polydesma eollusoria). Des défoliations dues au criquet puant (Zonoeerus variegatus) sont parfois observées sur des surfaces importantes dans les jeunes plantations.

Badi (Nauelea diderriehii)

Cette espèce peu utilisée en reboisement jusqu'alors présente de fréquentes attaques des bourgeons dans les jeunes plantat ions, provoquées par les cheni Iles d'un lépidoptère, Orygomophora mediofoveata. Bien que les taux d'attaques puissent être élevés, les conséquences sur la croissance et la forme de l'arbre ne sont pas très marquées, celui-ci "récupérant" bien après les at taques et pouvent être élagué. Des traitements chimiques, à base de méthidation, s'avèrent également efficaces, mais du fait de leur faible rémanence doivent être réservés aux pépinières.

68 Cedrela odorata

Originaire d'Amérique Centrale, cette espèce a été plantée en Côte d'Ivoire depuis dix ans sur plus de 8.000 ha. Cet te mél iacée fort ement a t taqui:1e dans son ai re d'origine par Hypsipyla grandella n'est pas sujette en Côte d'Ivoire aux attaques de borer de i'Acajou.

Les principales attaques observées sont des piqOres sur le tronc, provoquées par des Platypodidae, Doliopygus conradti, entraînant la formation de flammes de décoloration à l'intérieur du bois, et la présence de poches de résine internes. On note également des attaques de coléoptères (Apate monachus : Bostrychidae ; Monochanus sp. : Cerambycidae) et de lépidoptères (xyleutes crassus : Cossidae ; Eulopho­ notus myrmeleon : Megalopygidae), foreurs du tronc et provoquant des galeries internes dépréciant le bois.

Des attaques de Curcuiionidae défoliateurs, d'orthoptères (pontes sous écorce; Brachytrypes membra­ naceus ou gri lIon coupe tige), d'hémiptères (Ceratoplates piquant le tronc) ou d'Isoptères nécrosant le tronc ou le collet, ont pu être observés sur certains arbres, sans qu'ils entraînent de dégâts notables.

Fraké (Terminalia superba)

Cette espèce couvre près de 18.000 ha de plantations en Côte d'Ivoire, et est sensible à de nombreux insectes entraînant des dégâts notables. Le problème majeur est actuellement constitué par les attaques de chen i Iles défol iatr ices, dont les plus importantes sont celles d'un lépidoptère Notodont idae, Epi­ cerura pergrisea, pouvant attaquer simultanément et successivement plusieurs centaines d'hectares, ce qui provoque une réduction de croissance notable et une certaine mortalité parmi les arbres.

Des études ont été menées sur cet insecte, d'une part sur la connaissance de sa biologie, et d'autre part dans l'optique de la mise au point de mi:1thodes de lutte pratiquement utilisables (lutte chimique en particulier). D'autres chenilles défoliatrices sont également observées, comme Trabala sp. (Lasio­ campidae) et Nudaurelia dione (lepidoptère Attacidae), ainsi que des défoliations de jeunes plants provoquées par le criquet puant, Zonocerus variegatus.

On observe également fréquemment (jusqu'à 50 pour cent des arbres attaqués dans certaines parceiies) des attaques de Cossidae (Eulophonotus sp.), forant le tronc des arbres, surtout au niveau des verticil­ les et des chicots d'élagage, et provoquant des galeries internes et des coulées de sève noirâtre sur le tronc. Des at taques de coléoptères foreurs du tronc (Bostrychidae Apate monachus) et des rameaux (Cerambycidae : Hecyra obscurator) sont parfois rencontrées.

Enfin des piqOres noires internes, provoqui:1es par des platypes (Doliopygus dubius et D. conradti), peuvent entraîner une dépréciation notable du bois de cette essence.

Des études ont été réalisées sur ces platypes, qui ont fait ressortir une certaine variabilité de sensibilité à ces insectes entre les diverses provenances de T. superba.

Framiré (Terminalia ivorensis)

Cet te espèce, plantée sur près de 5.000 ha, s'avère sensible à différents problèmes phytosani taires (dépérissements, en particulier), parmi lesquels on note de nombreuses attaques d'insectes.

Les graines sont fréquemment attaquées par deux Curculionidae (Nanophyes sp. et Auletobius kuntzeni), pouvant diminuer notablement le taux de germinat ion. Sur les jeunes arbres, de nombreuses attaques peuvent également être observées

galles foliaires, provoquées par des acariens Eriophydae ;

insectes défoliateurs (coléoptères Scarabeidae et Chrysomelidae lépidoptères Tortricidae, Geo- metridae ; Sphingidae ; orthoptères Acrididae) ;

insectes foreurs des jeunes pousses, parmi lesquels un microlépidoptère Thyrididae (Tridesmodes ramiculata) peut attaquer jusqu'à 80 pour cent des bourgeons;

insectes s'attaquant au tronc, formant parfois un complexe chancreux avec surinfections fongiques; on y observe des coléoptères Cerambycidae (Monochamus sp.), des larves de lépidoptères Aegeridae, des pontes d'hémiptères Membracidae.

Ces différentes attaques peuvent être jugulées par des traitements insecticides (dime­ thoate/acariens; methidathion/insectes foreurs des pousses; delta-methrine/défol-iateurs; ...). En plantations âgées, de nombreux insectes s'attaquent au framiré, dont les plus importants sont:

les chenilles défoliatrices, appartenant à la famille des Notodontidae (Epicerura pergrisea Epi­ donta pulverulenta ; ... ), provoquant des dégâts notables;

les insectes muloteurs du tronc parmi lesquels se trouvent des coléoptères (Cerambycidae : Plocae­ derus viridipennis ; Bostrychidae : Apate monachus) ; des lépidoptères (Megalopygidae : Eulophonotus myrmeleon ; Cossidae : Zeuzera coffeae).

69 Enfin, des attaques de platypes, de cochenilles (Cerococcus sp.), de Cerambycidae (Tragocephala sp.) annelant les jeunes pousses, ... peuvent être notées, sans qu'elles posent de problèmes notables.

Samba (Triplochyton scleroxylon)

Planté sur plus de 2.000 ha, le samba est une essence présentant trois problèmes entomologiques majeurs en Côte d'Ivoire:

En pépinières et jeunes planta t ions, des attaques de psylles (Diclidophlebia eastopi et D. har­ risoni) provoquent un gauffrage et un jaunissement des jeunes feuilles. Des traItements insecticides (vamidothion) sont efficaces en pépinières contre ces insectes.

En plantations, des mulotages, provoqués par un lépidoptère Cossidae (Eulophonotus obsus ?) en­ traînent une dépréciation notable du tronc: dans certaines plantations de 15 ans, plus de 80 pour cent des arbres ont subi des attaques, avec en moyenne sept galeries par arbre, concentrées dans la bille de pied de l'arbre. Des flammes de décoloration se développent autour de ces galeries et augmentent l'im­ pact. Peu de travaux ont été menés à ce jour sur ce problème important.

Enfin les graInes sont très fortement attaquées par un coléoptère Curculionidae, Apion ghanaensis, ce qui po3e des problèmes notables pour l'approvisionnement en graines pour les replantations, et a orienté les recherches vers la multiplication végétative (bouturage) de cette essence.

En dehors de ces problèmes majeurs, des attaques d'insectes défoliateurs (orthoptères Zonocerus variegatus ; lépidoptères: Anaphe ve.,ata ; coléoptères: Baris impolita), d'insectes foreurs du tronc (coléoptère: Apate monachus) ou d'isoptères s'attaquant superficiellement à l'écorce, peuvent être obser­ vés, sans qu'Ils ent raînent des dégâts notables.

Essences à vocation initiale papetière

Ces essences avalent été testées puis plantées initialement dans l'optique de production de pâte à papier. la mise en veilleuse du projet papetier a entraîné une réorientation de ces essences vers un but de bois d'oeuvre (Pins, Gmelina) ou vers un but de production de bois-énergie (Eucalyptus).

Gmelina arborea

Plantée surune centaine d'hectares, cette espèce présente peu de problèmes entomologiques en Côte d'Ivoire. On trouve en zone forestière des attaques d'orthoptères (zonocerus variegatus), pouvant en­ traîner une défoliation complète des jeunes plants, et en cas de forte attaque, provoquer un dessèchement des pousses par annelation de l'écorce.

Ces attaques peuvent, en jeunes plantations expérimentales, justifier des traitements insecticides (Dieldrine - delta-methrine). Des défoliations causées par un lépidoptère (Bunaeaalcinoe) sont également parfois notées. Oes at taques de bostryches foreurs du tronc (Apate monachus; Xylopertha picea) sont parfois signalées. Enf in, et principalement en zone de savane, des at taques de termi tes (Pseudocantho­ termes sp. ; Microtermes sp.) peuvent entraîner des dégâts sur écorce.

Pins (Pinus caribaea et P. oocarpa)

Originaires d'Amérique Centrale, et plantés sur près de 300 ha, les pins n'ont jusqu'alors pas fait l'objet d'attaques notables d'insectes en Côte d' Ivo ire. En pépinières, quelques a t taques de Spodoptera littoralis (lépidoptère Noctuidae) ont pu être observées. En plantations, on observe parfois des mor­ sures ou des piqQres sur les aiguilles, ainsi que des attaques secondaIres de coléoptères sur le tronc d'arbres dominés.

Eucalyptus

Près de 500 ha d'eucalyptus, espèces orIgInaires de l'Australie et des pays voisins, ont été installés en Côte d'Ivoire. En pépinières, on observe parfois des attaques de grillons "coupe-tiges" (Brachytrypes membranaceus) et de divers insectes défol iateurs (lépidoptères, coléoptères). En plantat ions, on peut observer occasionnellement de nombreuses espèces d'insectes, n'entraînant généralement que des dégâts minimes.

Ont été notés plus particulièrement:

des défoliateurs appartenant aux lépidoptères ( : Parasa sp., Notodontidae : Desmeocraea congoana, Pyralidae), coléoptères (Melolonthidae, ...), orthoptères (zonocerus variegatus) ;

des insectes s'at taquant aux jeunes pousses: coléoptères (Scarabeidae) j lépidoptères (Pyral idae)

70 des insectes piqueurs thysanoptères (Thripidae) ; homoptères ;

des coléoptères foreurs du tronc ou s'attaquant à l'écorce: Buprestidae, Cerambycidae, Bostrychidae (Xylopertha picea, Apate monachus).

Ces insectes, vivant normalement en équilibre avec leur milieu, présentent parfois des phases de recrudescence, avant un retour plus ou moins rapide à l'état antérieur. Une attaque brutale par un coléoptère Bostrychidae, Apate monachus, s'est ainsi développée en fin de saison sèche 1978 sur le chantier de reboisement SOOEFOR de Rapide-Grah, au sein d'une parcelle eucaly'ptus 12 ABL de trois ans. Cet insecte polyphage des cultures pérennes tropicales fore des galerles nutritionnelles dans les troncs et les branches des arbres; après accouplement dans les galeries, les adul tes vont pondre dans des crevasses de l'écorce de bois morts, dans lesquels se déroule le développement larvaire (deux ans et demi à trois ans). Les dégâts se caractérisent par des galeries internes ascendantes et rami fiées (8 à 12 cm de longueur), débouchant par des trous ovoïdes (0,6 à lem 0) sur le tronc, dépréciant le bois et en­ trafnant des risques de cassure.

Sur une zone at taquée d'un demi-hectare, le tiers des arbres présentaient des at taques avortées (galerIes de 1 cm), et 10 pour cent seulement des arbres avaient de véritables galerIes. Les attaques étaient concentrées sur le billon du pied, et affectaient principalement les arbres dominés. Les atta­ ques s'étaient ensuite arrêtées naturellement avec l'arrivée de la saison des pluies.

En zone forestière, des attaques de termites (isoptères) sont parfois observées dans les plantations d'eucalyptus, ne provoquant en général que des galeries sub-corticales sans incidence notable. En zone de savane, la situation est différente, et les termites deviennent le problème entomologique majeur des plantations d'Eucalyptus: naturellement et abondamment présents dans le sol, ils sont un danger poten­ tiel dès les premières années de plantatIon.

Parmi les espèces présentes, on note plus particulièrement Macrotermes bellicosus, attaquant le collet et le tronc, et Ancistotermes sp. s'attaquant préférentiellement au collet et aux racines. Les dégâts sont plus marqués sur Eucalyptus camaldulensis que sur E. ci triodora , et peuvent entrafner, dans les plantations villageoises pour lesquelles il n'a pas été effectué de traitement préventif, une morta­ lité notable.

La méthode de protection actuellement utilisée du fait de son efficacité et de sa rémanence d'actlon consiste en une pulvérisation du trou de plantation avec une solution acqueuse de Dieldrine, des traite­ ments de rappel pouvant être effectués si nécessaire.

Une attaque importante de chenilles d'un lépidoptère Desmeocraea ciprianii (Notodontidae) a toute­ fois eu lieu en 1978-79 dans les plantations d'Eucalyptus deglupta de San Pedro, entrarnant des défolia­ tlons notables et répétées sur plusieurs centaines d'hectares.

Des études ont été entreprises afin de connartre la biologie de cet insecte, et d'envisager des méthodes de lutte contre de ravageur nouveau pour la Côte d'Ivoire. Toutefois, après une phase de gradation de la population d'insectes, une récession naturelle a eu lieu et la population est redevenu endémique.

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71

LES LEPIDOPTERES DEFOLIATEURS DU FRAKE ET DU FRAMIRE EN COTE D' IVOIRE

Gi Iles Fêdiere l, LaTbert Kanga 2 et Annie Mlnsarrat 3

La Société pour le Développement des Plantations Forestières en Côte d'Ivoire (SOOEFOR) a décelé depuis plusieurs années des attaques sporadiques de chenilles défoliatrices dans les plantations de Terminalia ivorensis (.framiré) et de T. superba (fraké). Elle a contacté le laboratoire d'Entomo-Virologie de l'Institut français de Recherche scientifique pour le Développement en Coopération (ORSTOM) et la Division de la Protection des Reboisements du Centre technique forestier tropical (CTFT) afin de réaliser une étude pour l'identification de ces ravageurs.

LES PLANTATI()IlS M::CANISEES DE TERJUNALIA SP. EN COTE D'IVOIRE

Jusqu'en février 1985, la SODEFOR a planté plus de 22.000 ha de Terminalia sp. (fraké : 17.613 ha, framiré : 5.248 ha) aussi bien en plantations sous forêt empoisonnée qu'en plantations mécanisées. Ces deux essences de bois d'oeuvre à moyenne révolution (25 ans) sont les principales essences de reboisement en Côte d'Ivoire. Depuis 1977, les nouvelles plantations sont de type mécanisé; installées en plein découvert, après abattage de ia forêt naturelle et préparation du terrain selon le schéma suivant:

Abat tage au bouteur de la forêt préexistante -+ BrOlage du bois -+ Andainage -+ 2éme brOlage des andains -+ Ratissage au bulldozer -+ Planage -+ Plantatian. La densi té de plantation est de 700 tiges/ha avec actuellement une proportion de 80 pour cent de fraké (560 tiges/ha) pour 20 pour cent de framiré (140 tiges/ha).

De 1977 à 1983, près de 16.000 ha ont été ainsi plantés selon le calendrier suivant: 1977 ­ 437 ha ; 1978 - 1.000 ha ; 1979 - 2.743 ha ; 1980 - 2.135 ha ; 1981 - 3.167 ha ; 1982 - 1.934 ha ; 1983 ­ 4.133 ha. Les proposi tions pour la période 1985-1990 sont de 7.600 ha de nouvelles plantations avec une productivité d'environ 10 m'/ha/an.

Les plantations sur lesquelles ont été observées de sévères défoliations en 1984 représentent 18.992 ha réparties en quatre chantiers: Mopri - 5.116 ha; Sangoué - 5.061 ha ; Téné - 4.038 ha; et Irobo - 4.777 ha, comprenant une majori té de parcelles en plantations mécanisées mais également des parcelles antérieures à 1977 et plantées sous forêt empoisonnée (Mallet, 1984 ; Kanga, 1984).

Laboratoire d'Entomovirologie, Centre ORSTOM d'Adiopodoumé, B.P.V.51, Abidjan, Côte d'Ivoire. Division de la Protection du Reboisement, Centre technique forestière tropicale, 08 BP 33, Abidjan 08, Côte d'Ivoire. ORS TOM , Laboratoire d'Entomologie du Muséum National d'Histoire Naturelle, 75006 Paris, France.

73 A

B

Deux ravageurs secondaires des Terminalia. A Trabala sp. (Lasiocampidae), mâle ; B: Nudaurelia diane Fab. (Attacidae), mâle.

Photographies G. Fedière

74 LES LEPIIXPTERES ŒFQIATELRS

En 1980, des attaques sporadiques de chenilles défoliatrices furent signalées par la SODEFOR sur certains chantiers sans conséquences pour la survie des arbres.

L'année suivante, un développement important de ces foyers ponctuels fut observé par la Division de la Protection des Reboisements du CTFT. L'attaque la plus sérieuse a eu lieu sur le chantier de Sangoué où plus d'une centaine d'hectares furent ravagés. Depuis cette époque les attaques se poursuivent et en 1984 nous en sommes arrivés à de vastes pullulations touchant la majeure partie des plantations mécani­ sées citées précédemment.

Suite à des tournées de prospection sur les différents chantiers, nous avons pu mettre en évidence un ravageur principal et deux défoliateurs secondaires.

Le ravageur principal

Le ravageur principal est Epicerura pergrisea Hampson (lépidoptère : Notodontidae). Anciennement Stauropus pergrisea (Hampson - 1910) et Epiphalera uniformis (Gaede - 1928), l'espèce pergrisea a été, rangée dans le genre Epicerura par Ki r iakof f en 1963. E. pergrisea n'étai t signalé jusqu'à présent que, d'Afrique du Sud; elle n'était pas connue d'Afrique Occidentale où l'espèce E. pulverulenta est la plus répandue.

Les larves de ce lépidoptère Notodontidae sont responsables de plus de 90 pour cent des défoliations que nous avons observées sur le fraké et le framiré. La chenille n'ayant jamais été décrite, nous avons procédé à un élevage au laboratoire afin d'obtenir des adul tes. Les oeufs sont pondus groupés sur la face inférieure des feuilles, la période d'incubation est de trois à quatre jours. Dès l'éclosion, les jeunes chenilles restent grégaires. Jusqu'au 4ème stade larvaire, les chenilles vivent sur le même arbre, se déplaçant de feuille en feuille ne consommant pas l'intégralité de l'épaisseur foliaire. Les feuilles présentent alors un aspect de dentelle. A partir du 4ème stade larvaire, l'instinct grégaire disparaît.

La chenille migre d'un arbre à l'autre laissant entre les branches des amas de fils de soie. La larve de dernier stade (6ème) s'apparente au type classique des chenilles de Noctuidae. Le corps, presque glabre, mesure 37 mm et présente une teinte générale fuchsia. La face dorsale est rayée longi­ tudinalement de deux bandes jaunes pâles bordées de noir. Les faces latérales présentent également deux bandes de même type, plus rapprochées et de moindre épaisseur.

La tête, le premier segment thoracique et les deux derniers segments abdominaux sont noir luisant. La paire de fausses pattes anales est très développée.

La larve en fin de développement descend le long du tronc pour s'enfouir dans le sol à faible profondeur et se confectionner un cocon, fait d'un mélange de soie et de grains de sable. La durée de la vie larvaire est de deux semaines. La nymphose à l'intérieur du cocon dure 21 jours. La chrysalide est nue, de couleur marron. A partir de l'émergence, la maturation sexuelle des adultes est de deux jours. La durée du stade imaginaI est d'une semaine. L'adulte présente un thorax gris et un abdomen brun ochracé. Les ai les antérieures sont de teinte gris souris avec une bande médiane foncée aux contours flous, perpendiculaire au bord interne. Les ailes postérieures sont blanches finement bordées d'un liseré gris. Le mâle et la femelle sont de coloration identique mais diffèrent par l'envergure: la femelle - 36 à 38 mm ; le mâle - 26 à 28 mm.

Cette espèce présente un cycle biologique court (six semaines), avec un stade larvaire de quatorze jours, un stade nymphal de 21 jours, et la période de maturation sexuelle, ponte et incubation des oeufs de sept jours.

De juin à décembre 1984, plusieurs cycles se sont ainsi succédés sur la plantation de Mopri, les surfaces dévastées prenant de plus en plus de proportions. Fin décembre 1984, les défoliations touchaient plus de 60 pour cent des 5.000 ha de cette plantation. Lors de la dernière pullulation, une épizootie est apparue dans la population larvaire. L'agent causal de cette maladie semble être un virus isocaédrique associé à de très nombreuses petites particules de 8 nm de diamètre non identifiées. Cette maladie virale, responsable d'une forte mortalité dans les stades larvaires, n'a pas réussi pour l'instant à stopper la pullulation.

Un diptère Tachinidae parasite cause également la mort de nombreuses nymphes. La mouche pond ses oeufs sur le dos de la chenille. La larve du diptère pénètre dans le corps de la chenille et provoque sa mort lorsque celle-ci arrive au stade nymphal. Nous avons ainsi obtenu à partir de chenilles parasitées, récol tées en plantat ion, de nombreux adul tes de ce Tachinidae émergeant des cocons d'Epicerura.

Sur un lot de 1.347 larves de dernier stade (Tableau 1), nous avons observé 41 pour cent de morta­ li té au stade larvaire, causée par la maladie virale, puis 70 pour cent de mortali té sur les nymphes causée non seulement par la maladie virale mais aussi par le parasitisme du diptère Tachinidae.

75 A

B

Epicerura grisea (Notodontidae), parasite des Terminalia (Divo, 1985). A: chenille de dernier stade ;B: adulte.

Photographies G. Fedière

76 TABLEPlJ 1

Essai d'élevage au laboratoire d'Epicenlra pergrisea à partir de larves de dernier stade récoltées en plantation

Larves Larves rrortes Chrysal ide Emergence NYfTlJhes rrort es Date Durée vivantes de rraladie dans cocon d'adulte de rraladie virale virale et de parasi tisrre

21.12.84 1er jour 1.347

23.12.84 3ème jour 332 321 694

24.12.84 4ème jour 201 83 68

25.12.84 Sème jour 159 62 0

26.12.84 6ème jour 67 50 54

27.12.84 7ème jour 39 13 15

28.12.84 8ème jour 21 11 7

30.12.84 10ème jour 10 10

01.01.85 12ème jour 3 3 4

03.01.85 14ème jour 0 2

10.01.85 21 ème jour 16

11.01.85 22ème jour 53

12.01.85 23ème jour 50

13.01.85 24ème jour 38

14.01.85 25ème jour 19

15.01.85 26ème jour 13

16.01.85 27ème jour 7

TOTAL au 01.02.85 554 845 196 597

Les ravageurs secondaires

Trabala sp. (Iépidoptère Lasiocampidae) et Nudaurelia diane Fabricius (lépidoptère At tacidae) sont parmi les principaux ravageurs secondaires. Les larves de ces deux espèces ont été observés sur la plantation de Mopri, mais contrairement à E. pergrisea, elles ne créent pas de foyers denses de pullulations et la plupart du temps les défoliations se limitent à quelques arbres.

Trabala sp.

Le genre Trabala est connu d'Afrique et d'Asie méridionale. L'espèce T. lambourni a été signalée sur framiré au Nigéria et au Cameroun. Il ne nous a pas été possible d'identifier avec précision l'espèce défol iatrice des Terminalia en Côte d'Ivoire.

La durée du cycle biologique est de six semaines environ. La larve de dernier stade présente une teinte générale vert pélle. Elle mesure 50 mm et a le corps recouvert de longs poils, non urticants, formant une frange sur chacune des faces latérales. La tête est noire, ornée de deux taches jaune vif caractéristiques. Deux longues touffes de soies noires, supportées par le segment prothoracique, en­ cadrent la tête. La nymphose a lieu dans un cocon de soie fixé le long de la tige.

77 L'adulte a la tête et le thorax vert clair, l'abdomen étant blanc jaunâtre. Les deux ailes sont de teinte vert clair. Les ailes antérieures présentent un peu au-delà du milieu du bord interne une grande tache brun foncé triangulaire, touchant une ligne transversaie post-médiane. Près de la base de l'aile se situe une deuxième ligne transversale et entre les deux, dans la cellule, un point foncé. Une série irrégulière submarginale de taches brunes en crassant bordent l'aile de l'apex au bord interne. Les ailes postérieures également vert clair présentent une ligne transversale brun clair prolongeant la ligne post médiane de l'aile antérieure, un point dans la cellule, et une série irrégulière de croissants bruns forment une iigne submarginaie. Les deux ailes sont bordées d'un liseré brun.

Nous n'avons obtenu en élevage que des individus mâles dont l'envergure est de 34 à 36 mm.

Nudaurelia diane Fabricius

L'espèce diane, anciennement rangée dans le genre Imbrasia, a été également dénommée simplicia. Cette espèce ~st répandue dans toutes les régions tropicales d'Afrique.

Les larves de dernier stade que nous avons observées sur le fraké et le framiré mesurent 80 mm. Le corps, de teinte noir profond, et recouvert de grosses épines jaunes disposées longitudinalement en six séries parallèles. La nymphose a lieu dans le sol. La larve ne construit pas de cocon, la chrysalide de teinte noire est libre.

L'adul te a une envergure de 95 à 125 mm. Les ai les jaune-orangées présentent chacune un ocelle cerclé de jaune, noir, blanc et rouge. L'ocelle de l'aile antérieure est plus petit que celui de l'aile postérieure.

Les deux ailes sont traversées par une forte ligne brun foncé post-médiane et par deux lignes brunes, moins épaisses, en zig-zag, l'une externe, l'autre interne. La base des ailes antérieures présente une tache rouge violet.

Les attaques successives d'E. pergrisea, provoquant une défoliation de l'arbre après chaque redémarrage des bourgeons, entrafnent un affaiblissement marqué, une réduction notable dé croissance et la mort des extrémités des rameaux. Ces dégâts à long terme peuvent entrafner une modification du comportement des arbres mettant ceux-ci dans des conditions marginaies de déveioppement et provoquant la mort de certains d'en t re eux.

Il s'agit donc de mettre en oeuvre le plus rapidement possible des moyens de lutte contre ce ravageur. A courte échéance, il s'avère que seul un traitement par vole aérienne à l'aide d'insecticide chimique, tel la deltamethrine (ex. Décis), effectué en début de phase larvaire, peut enrayer la succes­ sion des cycles de pullulation que nous observons. Pour l'avenir, suite à la caractérisation du virus ayant causé une forte mortalité dans nos élevages, et à des tests de pathogénicité que nous allons entreprendre au laboratoire, nous pourrons envisager des essais de lutte biologique en plantat ion à l'aide de suspensions virales.

Nous remercions Monsieur J. Minet du Muséum National d'Histoire Naturelle de Paris, qui, ayant eu l'ama­ biiité de faire les genitalia sur les specimens que nous lui avIons fait parvenir, a pu déterminer sans équivoque l'espèce Epicerura pergrisea.

78 BI BUOGRAPH 1E

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79

EPICERURA PERGRISEA HAMPSON (LEPIDOPTERE NOTODONTIDAE) ­ DEFOLIATEUR PRINCIPAL DES TERMINALIA SP. EN COTE D'IVOIRE BIOLOGIE ET LUTTE

l..arbert H.B. Kangal

LES PlANTATI(lII5 ~TIEH:S OC TERlfINALIA SP. EN anE D'IVOIRE

Les Terminalia sp. appart iennent à la fami Ile des Combretac€.ae qui est représentée en zone de forêt dense par trois espèces: Terminalia ivorensis (framiré), Terminalia superba (fraké) et Pteleoptis hylo­ dendron (k0framiré). Depuis 1933, le f ramiré, essence de bois d'oeuvre à croissance rapide dans son milieu naturel, a été introduit en plantation dans les forêts de Yapo et Banco sur cultures ou après cul tures vivrières ou en layons sous forêt empoisonnée. A partir de 1977, les nouvelles plantations de framiré en mélange à 14 pour cent ou 20 pour cent avec le fraké ou le cedrela bénéficient d'une prépara­ tion mécanisée du terrain après abattage au bouteur de la forêt naturelle préexistante, endainage et brûlage du bois non récupérable pendant la saison sèche.

Dès 1985, plus de 22.000 ha de Terminalia sp., répartis sur les chantiers de Mopri, de Sangoué, de Tené et d'Irobo, ont été ainsi plantés par la Société pour le Développement des Plantations Forestières (SODEFOR). La densité des plantations (en 1985) est de 700 tigeS/ha avec une proportion de 560 tiges/ha de fraké pour 140 tiges/ha de framiré. Les proposItions pour la période 1985-1990 sont de 7600 ha de nouvelles plantations avec une productivité d'environ 10 m3 /ha/an.

LES ~ ENT

Les plantations de Terminalia sp. souffrent de dégâts importants causés par un certain nombre d'insectes. Parmi ces dégâts on note les piqûres noires de platype (Doliopygus sp.), les attaques de Cossidae, de Metarbelidae au niveau du tronc et des plaies d'élaguage entraînant des coulées de gomme qui s'oxydent et noircissent au contact de l'air. On observe aussi des attaques de Zonocerus variegatus sur les jeunes plants de fraké et framiré, des mulotages du tronc par Apate terebrans, des attaques de Tridesmodes ramiculata au niveau des bourgeons et jeunes pousses, etc...

Au problème du dépérissement du framiré observé dans les parcelles âgées de 20 ans et plus vient se greffer celui des attaques sporadiques de chenilles défoliatrices. En effet, en 1981 et 1982, une pullu lat ion de cheni Iles défol iatrices couvrant plus d'une centaine d'hec tares de Terminalia sp. fut observée sur les chantiers de Sangoué, de la Tené, d'Anguédédou et de Yapo. L'agent· principal étai t Epidonta pulverulenta Hampson (Lépidoptère Notodont idae).

Des attaques similaires furent enregistrées en 1983 puis en 1984, où elles connurent une ampleur considérable sur l'ensemble des chant iers de reboi sement de la SOOEFOR. Parmi les ravageurs, les plus importants sont respectivement Epicerura pergrisea Hampson (.lép. Notodontidae), Nudaurelia dione (lép. At tacidae) et Trabala sp. (lép. Lasiocampidae).

Nous allons nous intéresser particulièrement à la biologie et à la lutte contre Epicerura pergrisea qui est responsable de plus de 80 pour cent des défoliations observées au cours de cette année.

Centre Technique Forestier Tropical, 08 B.P. 33, Abidjan 08, Côte d'Ivoire.

81 L' INSECTE ET SA BIQOGIE

Epicerura pergrisea Hampson, anciennement connu sous les noms de Stauropus pergrisea Hampson 1910, puis Epiphalera uniformis Gaede 1928, est inféodé aux espèces botaniques de la fami Ile des Combretaceae, notamment les essences sylvicoles que regroupe cette famille. Il est originaire du Natal et du Zimbabwe et n'étai t pas connu d'Afrique occidentale où l'espèce Epicerura pulverulenta est la plus répandue.

Présentation de l'espèce tv'orphologie

L'oeuf est de forme ovale, mesure environ 0,9 rrrn de long sur 0,5 mm de hauteur. Lorsqu'il sort des voies génitales femelles, sa couleur est vert clair j au fur et a mesure qu'il vieillit, il devient ocre puis brun. La face intérieure de l'oeuf est collée à l'ooplaque grâce à un mucus secrété par les voies génitales de la femelle. Le temps d'incubation de l'oeuf est en moyenne de quatorze jours. Avant l'éclosion, la tête de la larve devient visible. On di t alors que l'oeuf est parvenu au stade tête noire.

La jeune chenille sort de l'oeuf en perçant latéralement la cuticule. C'est une chenille néonate de couleur jaune clair avec une tête brun noir. Elle mesure 2 rrrn et possède quatre paires de fausses pattes fonctionnelles. Elle secrète un fil de soie qui lui permet de ne pas perdre le support qu'elle lâche en cas de danger et à la recherche de nourriture. La chenille de dernier stade a le corps glabre. Elle mesure environ 37 rrrn et présente une teinte généralement fuchsia. De l'éclosIon à la chrysalidation, la larve effectue en moyenne cinq mues successives avant de se nymphoser. A chaque mue, celle-ci augmente de taille et rejette sa capsule céphalique. L'exuvie est souvent dévorée par la jeune larve.

Pendant le stade prénymphal, la chenille a la face dorsale rayée longitudinalement de deux bandes jaunes pâle bordées de noir. Ses faces latérales présentent également deux bandes de même type, plus rapprochées et de moindre épaisseur. Après la cinquième mue, la cheni Ile présente une phase d'act iv i té pendant laquelle elle arpente rapidement le terrain à la recherche d'un si te convenable de nymphose. Dans la nature, elle s'enfouit dans le sol à faible profondeur où elle construit une logette en agrégeant les particules de terre et de litière grâce à une secrétion salivaire ou se confectionne un cocon fait d'un mélange de soie et de grains de sable et s'y installe dans une posi t ion semi-enroulée.

C'est au sein de l'alvéole construite par la prénymphe qu'a lieu la mue nymphale. La nymphe est de couleur brun clair. Sa vie dépend de la qualité du cocon isolant préparé par la prénymphe. La durée de ce stade est de 18 à 21 jours.

En ce qui concerne l'adulte, le mâle et la femelle ont respectivement une envergure de 26 à 28 rrrn et de 36 à 38 mm. L'adulte devient actif à la tombée du jour. Il reste accrochée au bas de la végétation (Eupatorium odoratum) pendant la journée. Des accouplements interviennent peu après l'émergence. La durée de vie de l'adulte est de trois à quatre jours.

Caractères éthologiques

Les sites de ponte privilégiés des femelles gravides sont les pétioles des feuilles et les terminaisons non aoOtées des jeunes tiges et rameaux. Les oeufs sont pondus groupés et sol idement fixés par une ma t ière collante j ils sont alors di sposés avec régular i té en anneau autour d'une tige, d'un bourgeon et d'un pét iole de feui Ile. La femelle recouvre la ponte d'une couverture de poi Is ou d'écai Iles provenant de son extrêmité abdominale. La ponte dure de 12 à 24 heures.

La question de rythme d'activité des adultes a été appréhendée en utilisant les résultats de piégeage à la lumière : le piège lumineux est en effet le ref let de l'act i v i té des insectes, elle-même modifiée par les variations de différents paramètres (température, humidité relative, vent, lune, etc..•). Ces insectes montrent une activi té nocturne cycl ique de vol al ternant avec des phases de repos. Cette activité présente quatre pics qui se situent à 18 h, 22 h, 24 h et 6 ~

Etude biométrique

Détermination du nombre de stades larvaires

Des animaux de tous stades ont été prélevés dans la nature à différentes époques de l'année en cours. La mesure des largeurs des capsules céphaliques de ces individus et des élevages individuelS de chenilles au laboratoire ont permis de différencier les stades larvaires de l'insecte: 1er stade, largeur comprise entre 0,3 et 0,4 mm ; 2ème stade, 0,4 à 0,8 mm ; 3ème stade, 0,8 à 1,1 mm ; 4ème stade, 1,1 à 1,6 mm ; Sème stade, 1,6 à 2,4 mm ; 6ème stade, 2,4 à 3,6 l1YTl et plus.

82 Cycle biologique

La durée du cycle biologique (56-61 jours) est le suivant: stade larvaire - 24-26 jours; stade nyrrphal - 18-21 jours; maturation, ponte, incubation des oeufs - 14 jours. Le stade larvaire s'éche­ lonne sur cinq mues à intervalle de trois à quatre jours. On dénombre six générations par an. D'une pullulation à l'autre, il y a généralement 56-67 jours.

Les oeufs étant pondus sous forme d'ooplaque, les ovaires de femelles gravides ont été disséqués puis un dénombrement de larves néonates qui s'échappent pendant toute la période de ponte et d'éclosion a été effectué pour déterminer la capaci té de ponte de l'insecte. La femelle pond en moyenne 1.030 oeufs avec un taux moyen d'éclosion de 68 pour cent. L'élevage de chenilles réalisé au laboratoire donne une proportion 1/1 entre mâle et femelle.

Les sites de ponte des femelles gravides sont choisis de façon non ordonnée dans les parcellaires. Les arbres portant des oeufs sont complètement défol iés avant que les cheni Iles migrent sur l'arbre voisin. La colonisation des sites se fait de proche en proche. On observe cependant sur certains arbres des foyers d'at taque avortés.

Détennination des phases critiques du cycle

Les observations de terrain et celles de laboratoire nous ont permis de découvrir les causes essentielles de mortal i té :

Les parasi tes

Les populations d'E. pergrisea sont contrôlées par de nombreux parasites végétaux (champignons) ou animaux (insectes). Parmi ces derniers, les plus fréquents sont un diptère de la famille des Tachinidae (en cours de détermination) parasitant les larves et les nymphes, et des viroses. Le taux de mortalité des chenilles virosées est plus élevé à la fin du 4ème stade larvaire.

Les prédateurs

Les chenilles sont mangées par les oiseaux dont les plus fréquents sont les Calaos, par les fourmis du genre Oecophylla et Crematogaster. Ces fourmis se nourrissent également des oeufs d'E. pergrisea. Les prénymphes à la recherche d'un si te adéquat de nymphose sont at taquées par les guêpes, les mantes, les rept i les, etc...

Date de pullulation de l'insecte

Un intervalle de 56-67 jours sépare les différentes gradations de la population. Les différents facteurs biotiques (maladie, surpopulation, hyperparasi te, prédateur, etc...) et abiotiques (température, pluie, sécheresse, etc...) qui gouvernent la population densi taire du ravageur si tuent les périodes de pullula­ tion aux dates préconisées suivantes en 1985 : 24 janvier, 23 mars, 24 mai, 23 juillet, 26 septembre, 25 novembre. Ces dates ont été généralement respectées avec un décalage de plus ou moins deux à quatre jours.

r.ETl-DE lE LUTTE

L'iT11JOrtance du problème que pose ce ravageur (à savoir, défoliation totale des arbres sur plus d'une centaine d'hectares lors d'une pullulation, et attaques successives du ravageur après chaque redémarrage des bourgeons, entraînant la mort des extrémités des rameaux et ensuite de l'arbre) nécessite à court terme la mise en place d'une méthode de lutte.

Un screening de produits chimiques au laboratoire a révélé une grande efficacité de certaines formulations commerciales comme le Dimilin (inhibiteur de la synthèse de la chitine), le Bacillus thuringiensis (préparation commerciale de spores et d'indotoxine bactérienne), l'Evisect (poudre d'hydro­ genoxalate de thioryclam: Néréistoxine), la Del taméthrine (Decis: pyréthrinolde). Ces produi ts in­ secticides ont été testés en plantation sur des arbres de moins de 6 m de haut et munis de bâches à leur pied pour recevoir les chenilles touchées par le produit.

Les doses utilisées étaient les suivantes: pour le Dimilin - 50, 100, 150, 200 g de matière active dans 200 1 de bouillie/ha; pour le Bacillus thuringiensis - 200, 300, 400, 500, 700 9 de matière active dans 200 1 de bouillie/ha; pour l'Evisect - 200, 300, 400, 500, 700, 750 g de matière active dans 200 1 de bouillie/ha; et pour le Décis - 12 g de matière active dans 200 1 de bouillie/ha. Chaque dose de

83 produit a été répétée au moins quatre fois et cela à des périodes différentes de pullulation. Des arbres non traités ont été choisis corrwne témoins.

Résultats

Les effets de ces insecticides reportés sur un graphe donnent les droites de régression (Figure 1). Ces droi tes de régression obtenues sont l'expression de la sensibi 1i té des cheni Iles soumises à l 'ac t ion insecticide des produits utilisés. A la dose de 38 g de matière active/ha, le Dimilin n'a au aucun effet sur les chenilles traitées tandis que le Bacillus thuringiensis provoque un taux de mortalité moyen de 32,56 pour cent, contre 47,25 pour cent pour l'Evisect. L'activité insecticide du Dimilin va croître plus rapidement que les deux autres produits sans pour autant atteindre 50 pour cent de mortalité à la dose maximale de 200 g de matière active/ha généralement envisagée. Ce faible pourcentage moyen de mortalité de 37,5 pour cent obtenu serait probablement imputable à l'âge et à la non homogénéïté (pré­ sence de différents stades larvaires) du matériel biologique testé.

A cette dose de 200 g de matière active/ha, le Bacillus thuringiensis et l'Evisect entraînent respoctivement 52 pour cent et 72,5 pour cent de mortalité. A la plus forte dose utilisée (700 g de matière active/ha), l'insecticide microbien provoque 66 pour cent de mortalité contre 92 pour cent pour la Néréistoxine. La Deltaméthrine testée à 12 g de matière active/ha cause 96,4 pour cent de mortalité. Comme l'Evisect, l'action insecticide de contact de ce pyrethrihoïde est immédiate et efficace.

L'impact des produits utilisés sur l'entomofaune utile et la rémanence de ces insecticides seront précisés par des études ultérieures. Ces produits n'ont par ailleurs pas démontré d'effet phytotoxique.

Epicerura pergrisea, principal ravageur des Terminalia sp., présente un cycle biologique de 56-61 jours avec six générations par an. Chaque pullulation s'entoure de dégâts non négligeables suscitant à court terme une intervention rapide pour la survie des arbres. Les essais chimiques réalisés en plantations révélent la possibilité de lutter efficacement contre ce défoliateur par une pulvérisation de Bacillus thuringiensis à raison de 600 g de matière active/ha sur les premiers stades larvaires de l'insecte, d'Evisect à raison de 500-600 g de matière active/ha et de Deltaméthrine à raison de 12 g de matière . ac t ive/ha.

Compte tenu de la hauteur des arbres et de la répartition des différents foyers de l'insecte sur l'étendue de la plantation, une intervention par voie aérienne serait la plus indiquée.

A long terme, la recherche s'orientera vers d'autres voies de lutte

la voie biologique :

utilisation de parasite (diptère Tachinidae) utilisation de suspension virale

la voie sylvicole:

adéquation et meilleure répartition des essences

la voie génétique:

choix du matériel végétal recherche de matériel résistant

la voie intégrée.

La réussite de ces approches de lutte rend indispensable une bonne maîtrise de la biologie de l'insecte et des facteurs qui contrôlent la dynamique de sa population.

84 100

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Fig. 1 Droites de régression comparatives d' activité insecticide de troi s préparations commerciaies utilisées

85 ANNEXE

TABLEAU 1

Fla-E RECAPITIJ..ATIVE

Estimation du coût de traitement

Cycle Dates Date de Produi ts Dose de Apparei ls Zone de Superficie Coût de Coût biologique probables trai te­ à produi t de trai tement à trai 1e­ global de d'E. de pullu­ rœnt utiliser (g.m.a./ trai tement envisagea­ trai ter rœnt/ha l'opéra­ pergrisea lat ion ha) préconisés ble (ha) (Francs tion de trai te­ rœnt (Francs CFA)

24.01.85 13.02.85 Evisect 500-600 Porrpe Foyers centrifuge ponctuels d'at taque 23.03.85 12.04.84 Bacillus Wajax d'arbres 3.500 7.414 25.949.000 600 inférieurs 24.05.85 13.06.85 thurin­ mark 26 à 10 m 51-61 giensis de haut jours 23.07.85 12.08.85 Decis 12 Foyers 26.09.85 15.10.85 1 l/ha Hél i­ d'a t taque coptère général isés 3.500 13.228 46.298.000 Bell sur grande 25. 11 .85 14. 12.85 47 G2 superficie

Le produit insecticide utilisé pour l'estimation des coûts de traitement est le Décis.

"'''' Les dates de traitement doivent se situer entre le 18éme et le 20éme jour après l'éclosion des praniers oeufs.

Les références bibliographiques de cette contribution sont identiques à celles de la contribution de Fédiere et al., p. 79.

86 LES RECHERCHES D' ENTOMOVIROLOGIE DE L' ORSTOM A ADIOPODOUME

Gilles Fêdiere'

Les activités du Laboratoire d'Entomovirologie de l'ORSTûM à Adiopodoumé sont axées sur la lutte biologi­ que par virus en tomopa thogènes. Les recherches et les essais en cours ont trait aux insectes ravageurs du palmier à huile et du cocotier.

Les premières opérations consistent à mettre en évidence une maladie virale provoquant une épizootie naturelle dans la populat ion d'un insecte défol iateur apparu en pullulation dans les plantat ions. Le virus étant identifié et caractérisé, il sera alors multiplié par infection de l'insecte hôte maintenu en élevage. A part ir d'une suspension virale ainsi préparée, il sera alors procédé à des tests de patho­ génicité en laboratoire, puis à des essais de traitement aux champs par pulvérisation aérienne.

Une des opérations ayant abouti à un résultat de terrain en 1985 est la lutte biologique contre Casphalia extranea (Lépidoptère Limacodidae) défoliateur du palmier à huile et du cocotier en Côte d'Ivoire par un nouveau densovirus : les larves du Lépidoptère Casphalia extranea pullulent périodique­ ment sur les plantations de cocotier et de palmier à huile en Côte d'Ivoire.

Un des principaux facteurs de contrôle naturel de ces populations semble être un virus entomopatho­ gène que nous avons isolé (Fédière et al., 1981). 11 s'agit d'un petit virus icosaédrique de 22 nm renfermant de l'ADN. Par ses propriétés biophysiques et biochimiques de celles de son génôme, ce virus est considéré corrvne appartenant au genre Densovirus (Parvoviridae) (Fédière, 1983). Ce virus répandu en plantat ion est capable d'assurer le contrôle d'une populat ion. Des résul tats semblables ont déjà été obtenus avec un Picornavirus contre Latoia viridissima (Limacodidae). autre défoliateur des Palmaceae en Côte d'Ivoire (Fédière et al.. 1984).

La suspension virale du Oensovirus de Casphalia a été élaborée à partir de larves mortes infectées. Elles furent collectées sur la plantation de palmier à huile "Palmindustrie d'Eloka" en septembre 1984 lors d'une pullulation où apparut une épizootie naturelle.

Les extraits d'insectes furent préparés par broyage des larves infectées dans un tampon Tris 0,05 M à pH 7,8 additionné de 0,5 pour cent de SOS. Le broyat fut fiitré sur mO:.Jsseiine et le filtrat fut centrifugé à 8.000 g pendant dix minutes. Le surnageant obtenu constitue la solution mère.

Di fférentes doses de cet te suspension virale furent ut i 1isées pour les essais aux champs. Une pullulation de C. extranea se déclencha sur la plantation d'Eioka durant le mois d'août 1985 dans un bloc de 80 ha. Un traitement aérien par hélicoptère a été réaiisé. Deux parcelles (A et B) de la hectares chacune furent traitées avec la suspension virale aux doses respectives de 50 équivalent chenille/ha et 100 équivalent chenille/ha. Une parcelle adjacente (C) de la ha est utilisée comme référence et la dernière parcelle (0) de 50 ha a été traitée par un insecticide chimique (Deltametrine : 9 g/ha).

Deux semaines après le traitement, l'épizootie causa la mort de 92 pour cent des larves sur les parcelles traitées A et B (Tableau 1). La parcelle C, adjacente à A et à B. fut progressivement envahie par le virus, et le déclin de la population d'insectes fut plus lent. Le virus peut être répandu sur de grandes distances par l'act ion du vent et de la-----,pluie.

Laboratoire d'Entorrovirologie, Centre ORSTOM d'Adiopodoumé, B.P. V51, Abidjan, Côte d'Ivoire.

87 Tableau 1. Les résultats des essais en plantation

Parcelle A B C D

Nombre de chenilles par feui Ile, un jour avant le trai tement 25 26 25 28

5 jours après 7 5 18

2 sareines après 2 2 5 0,1

L'effet de la Deltamétrine fut presque instantané, mais son coOt élevé et certains inconvénients comme sa non spécificité doivent être pris en compte pour comparer les différents résultats.

Les recherches menées dans le Laboratoire d'Entomovirologie à Adiopodoumé consistent donc à mettre en évidence et à caractériser de nouveaux virus, à partir desquels est élaborée une collection d'anti­ sérums spécifiques. Il s'ensuit des travaux de terrain visant à tester les suspensions virales.

En marge de son activité principale, le laboratoire entretient une collection entomologique géné­ rale, mise à la disposi t ion des chercheurs opérant dans les di fférents inst i tuts de recherche de Côte d'Ivoire.

BlBUOGRAPH 1E

FEDlERE, G., 1983. "Recherches sur des viroses épizootiques de Lépidoptères Limacodidae ravageurs de Palmacées". Thèse Doctorat 3éme Cycle. Montpellier, 130 p. FEDIERE, G. ; DESMIER DE Q-IENJN, R. ; MARI AU, D. ; N'ONSARRAT, P., 1981. "Mise en évidence de maladies à épizootie de type densonucléose chez deux chenilles de Limacodidae Lépidoptères phyllophages du palmier à huile et du cocotier en Côte d'Ivoire". Colloque international sur la Protection des Cul tures tropicales, Lyon, France (8-10 jui llet 1981). FEDIERE, G•• r-JONSARRAT, P. ; PHILIPPE, R., 1984. "Biological control of a Limacodid oi 1 palm pest in Ivory Coast by use of a small isometric virus". First Regional Symposium on Biological Control. Kuala Lumpur, Malaysia (3-5 September 1984).

88 Traitement aenen par hélicoptère contre Casphalia extranea (Limacodidae) avec Densovirus il Eloka, 1985

Palmier à huile sain il Eloka, 1985

Palmier il huile défolié par Casphalia extranea (limacodidae) à Eloka, 1985

·-.. 1

Larve de Casphalia extranea (limacodidae), Eloka, 1985

Photographies G. Fedière

89

ETUDE DES POPULATIONS D'INSECTES

1. ENQUETES ET ECHANTILLONNAGES

Juste Boussienguet l

INTRXU::TIOol

Les investigations effectuées dans les conditions de plein champ en vue d'étudier les colonies d'insectes peuvent avoir plusieurs objectifs tels que l'étude:

de l'abondance d'un ravageur et de l'évolution saisonnière de ses populations;

de l'influence des facteurs abiotiques (température, hygrométrie, pluviosité, etc...) sur i'accrois­ sement des populations;

de la composition faunistique et du rôle du complexe entomophage sur la régulation des populations d'un ravageur

etc...

Chacun de ces objectifs nécessite l'application d'une méthode d'enquête et d'échantillonnage exten­ sive ou intensive appropriée. La suite de cet exposé se propose d'expliciter la méthodologie utilisable dans le cas particulier d'une cochenille.

Q-OIX [XJ TYPE D' 8'Q.ETE

Le choix entre enquêtes extensives (réalisées sur un vaste territoire) et enquêtes intensives (observa­ tions continues des populations du ravageur et de ses ennemis naturels dans une zone restreinte) dépend à la fois des objectifs, de la précision attendue et des moyens humains et matériels disponibles.

Enquêtes extensives

Les enquêtes extensives sont destinées à étudier la répartition géographique du ravageur et de ses ennemis naturels et/ou la relation existant entre les colonies du ravageur, les dégâts et les condi tions climatiques. Chaque zone retenue peut faire l'objet d'un seul ou tout au plus de quelques échantillon­ nages pendant la campagne. Il est évident que l'époque à laquelle ces enquêtes sont effectuées a une importance particulière. Ainsi, dans le cas particulier de la cochenille du manioc (Phenacoccus mani­ hoti), par exemple, la saison sèche (période de pullulation du ravageur) est la plus favorable aux enquêtes ex tensives.

Sur le plan pratique, ces enquêtes sont destinées à dresser des inventaires géographiques et à préciser le type d'infestation, et non à évaluer la population moyenne d'une région. Le protocole sera

Laboratoire de Zoologie et de Lutte biologique, Faculté des Sciences, Université Nationale du Gabon, BP 1886, Libreville, Gabon.

91 donc simple et rapide puisqu'il n'est pas nécessaire de randomiser l'emplacement des points d'échant il­ lonnage. Cet emplacement dépendra dans une large mesure des possibilités d'accès au terrain et on pourra, par exemple, opérer un échantillonnage systématique tous les X km le long des routes, pistes ou voies de navigation accessibles. Si les moyens de déplacement sont insuffisants, on pourra se contenter de quelques sites géographiques judicieusement choisis. Ainsi, pour la cochenille du manioc au Gabon, nous avons retenu comme sites Ntoum (centre-ouest, estuaire), Makokou (nord, forêt) et Tchibanga (sud, savane) .

Enquêtes intensives

Les données des enquêtes intensives portent sur l'étude quantitative de la dynamique de populations du ravageur et de ses ennemis naturels. On recourt aux enquêtes intensives, notamment, pour étudier la succession des générations dans la nature afin de déterminer les facteurs qui sont à l'origine des fluctuations de densité du ravageur. Mais ces enquêtes peuvent également viser des objectifs plus 1imi tés, tels que la composi t ion spéci f ique du complexe entomophage, la détermina t ion du niveau de parasitisme du ravageur, l'étude du parasitisme des entomophages, les fluctuations d'abondance du rava­ geur et de ses ennemis naturels, etc.

~ D'Eaw.rrILLe'N'WJE

Out re les obj ect ifs, plus ieurs facteurs interv iennent dans la déf ini t ion d'une méthode d'échant i llonnage adaptée aux problèmes à résoudre et aux particularités des populations étudiées. Ce sont: la disper­ sion, le niveau de précision et la conception de l'échantillonnage, le modèle d'échantillonnage et enfin la période d'échantillonnage.

Le modèle de dispersion

L'observation courante montre que les divers individus d'une population ont une répartition caracté­ ristique de l'espèce. Dans la nature, le type de répartition le plus couramment rencontré est la répar­ tition contagieuse (en agrégats), la répartition régulière étant rare. Le problème de l'échantillonnage est de s'assurer qu'aucune port ion de ia populat ion étudiée n'est exclue du processus d'échant i llonnage de par son modèle de comportement, ses préférences éco-trophiques, etc... La concept ion de l'échant i 1­ lonnage devra donc se faire â la lumière d'observations et d'enquêtes préliminaires destinées à éliminer un tel biais.

Concept ion de l'échanti llonnage

La conception de l'échantillonnage passe par différentes étapes: la sélection de l'univers en fonction des objectifs de l'étude, la sélection de l'unité de prélèvement et du nombre d'unités nécessaires par échantillon, la définition de la fréquence optimale d'échantillonnage, et enfin, la répartition des unités de prélèvement dans l'univers sélectionné.

Pour ce qui est de la sélection de l'univers, si l'on retient comme objectif l'étude de l'évolution des populations du ravageur et de ses ennemis naturels, on peut retenir comme univers un champ situé de 2 préférence dans une zone de culture du manioc et ayant une superficie minimale de 200 m •

En ce qui concerne la sélection de l'uni té de prélèvement et du nombre d'uni tés nécessaires par échantillon, tout d'abord l'unité de prélèvement choisie doit permettre à toutes les unités d'avoir une chance égale d'être prélevées; être convertible en unité de surface; être facilement délimitée en charrp; et avoir des dimensions permettant d'établir un équilibre entre la représentativité de l'échan­ ti llon et les coû t s de t rai tement.

Pour le choix de l'unité de prélèvement, les études préalables ont montré que dans le cas de la cochenille du manioc, les larves du premier stade obéissent à un phototropisme positif, d'une part, et d'autre part, que les stades âgés du ravageur sont relativement immobiles. Compte tenu de la dynamique de renouvellement des feuilles par les jeunes pousses des points de croissance et de la perturbation de cette croissance par la présence des cochenilles, les insectes se concentrent donc de façon préféren­ tielle sur l'apex et sur les premières feuilles sous-jacentes (Boussienguet, 1979 et 1984). Par consé­ quent, on retient comme unité de prélèvement les dix premiers centimètres de tige du manioc.

On admet généralement que le nombre d'uni tés à prélever est fonct ion de la précision recherchée, donc, de l'écart type de la distribution de la cochenille. On convient généralement que pour étudier la

92 dynamique des populations d'une agrocoenose, il faut chercher à prospecter de 25 à 30 pour cent de la surface du champ.

2 Soi t, pour un champ de 200 m', une surface opt imale de 50 il 60 m • Le nombre de prélèvements nécessaires dépendra donc de la densité de plantation du manioc. Habituellement, en parcelle paysanne, cette densité est comprise entre 0,5 et 1 pied au m' ; ce qui permet de fixer le numbre de prélèvements entre 25 et 30 tiges en période de faible abondance de la cochenille (saison des pluies). Ce nombre peut être diminué pendant la période de pullulat ion..

La fréquence optimale d'échantillonnage dépend évidemment du cycle de croissance des populations et tout particulièrement du cycle de développement de la cochenille. L'étude de ce cycle au laboratoire permet de fixer la fréquence d'échantillonnage à sept jours pour l'étude de l'évolution des populations dans la nature en relation avec les facteurs de milieu. Toutefois, dans les études extensives, on peut réduire le nombre d'observations, à condition d'opérer les scn':Jages pendant la période de pullulation.

En principe, l'échantillon doit être prélevé de façon aléatoire, de sorte que chaque unité ait une chance égale de sélect ion. C'est l 'échant i llonnage aléatoire i Il imi té: les prélèvements s'effectuent dans l'univers en nombre et à des endroits choisis au hasard ou par tirage au sort. Toutefois, cette randomisation absolue n'est pas une garantie absolue d'efficacité, les prélèvements pouvant provenir d'une seule et même partie du champ.

C'est pourquoi il est préférable d'utiliser une méthode d'échantillonnage aléatoire stratifié (Southwood, 1978) qui consiste à diviser l'univers en strates (ou sous univers) et à réaliser au hasard des prélèvements à partir de chacune de ces strates.

Suivant les objectifs et les moyens, on peut également recourir à l'échantillonnage systématique, à intervalle fixe (dans le temps et dans l'espace). Cet te méthode, qui présente l'avantage d'être simple et facile à exploiter, no tarrment pour un chercheur seul, a été retenu pour l'étude de la cochenille du manioc et de ses ennemis naturels. Nous y avons ajouté, pour l'inventaire faunistique, le prélèvement d'apex buissonnants et bien infestés, à intervalle régulier.

PRATIa..E OC L' EQ-WIlTILL

Les objectifs de l'étude peuvent être rappelés comme suit:

étude de l'évolution des populations du ravageur dans les conditions naturelles;

inventaire faunistique du complexe entomophage et étude des relations trophiques;

analyse quantitative et qualitative des relations biocoenotiques du ravageur avec ses ennemIs naturels.

Nous avons utilisé simultanément deux techniques d'échantillonnage systématique. La première, inspirée des travaux de Benassy (1961), consiste à prélever tous les sept jours, le long des trois plus grandes diagonales du champ, 10 cm de tige de manioc tous les cinq pieds: c'est le lot nOl.

La seconde, utilisée en combinaison avec la première, consiste à prélever délibérément dans le même champ dix à quinze apex buissonnants et donc bien infestés de cochenilles: c'est le lot n02.

Le matériel ainsi récolté est ramené au laboratoire pour être traité.

1RAlTI*NT [JJ M6.TERIEl ~ca... TE

Premier lot

Le matériel du premier lot est trié sous loupe binoculaire et traité comme suit:

Les cochenilles sont comptées, puis regroupées en classes d'âge, pour l'étude du cycle biologique dans la nature et de la densité de population. 'En outre, les individus parasités sont mis en éclosoir, à 25°C, dans un incubateur thermostaté et ventilé, afin de récolter et de dénombrer les parasites et les hyperparasites.

Les différents stades de développement des prédateurs sont classés par groupes taxonomiques et dénombrés. Puis les stades pré-imaginaux sont mis en élevage en présence de cochenilles élevées au laboratoire, afin de récolter et de dénombrer leurs parasites et d'étudier le parasitisme des prédateurs.

93 Deuxière lot

Le matériel du second lot est égaiement trié sous loupe binoculaire et traité comme suit:

Les cochenilles parasitées sont mises en éclosoir comme précédemment, en vue de récolter les para­ sites et les hyperparasites du ravageur.

Les stades adul tes des prédateurs sont récoltés, dénombrés et classés par groupes taxonomiques. Les stades larvaires sont élevés séparément et approvlsionnés avec des cochenilles élevées au laboratoire. Puis on récolte et on dénombre les stades adultes des prédateurs ainsi que leurs parasites.

En résumé, les résultats du premier lot permettent de recueillir des données sur le déroulement des cycles biologiques dans la nature, d'apprécier les fluctuations d'abondance du ravageur et de ses ennemis naturels, d'étudier l'influence des ennemis naturels sur les populations de la cochenille et de contrôler l'impact de l'hyperparasitisme et du parasitisme des prédateurs sur l'action régulatrice du complexe entomophage.

Le ma tériel du second lot fourni t quant à lui des données permet tant de compléter l'inventai re faunistique de l'entomofaune associée au ravageur et d'en préciser les rapports trophiques.

94 L'INSTITUT FRANCAIS DE RECHERCHE SCIENTIFIQUE POUR LE DEVELOPPEMENT EN COOPERATION

Jean Launay 1

Pour s'assurer que sa politique de recherche scientifique au service du développement du Tiers-Monde puisse être irrmédiatement concrét isée en termes de programmes opérationnels, le gouvernement français a estimé nécessaire de s'appuyer sur des institutions spécifiques: l'ORSTCM (Institut Français de Recher­ che Scientifique pour le Développement en Coopération) est l'une de ces institutions. Mais le gouverne­ ment a aussi rappelé la nécessité de pouvoir mobiliser progressivement dans la bataille pour le développement l'ensemble de la communauté scientifique et technologique française, publique et privée.

C'est ainsi qu'en fonction de ses compétences actuelles, mais aussi en fonction de ce que sont les grandes priorités pour le développement, l'ORSTCM a été réorganisé en hui t départements de recherches, qui constituent l'ossature scientifique et budgétaire principale de l'Institut. Ces huit départements correspondent à deux grands types de recherches

Le premier type concerne les recherches dont les objectifs essentiels sont la connaissance et l'explication du présent, c'est-à-dire des milieux actuels incluant l'action des hoomes qui y vivent. Il s'agi t donc d'étudier ces mi lieux et pour cela

d'inventorier leurs constituants et leurs structures aux diverses échelles

mesurer leurs fonctionnements actuels

à part ir de ces inventaires, de ces mesures et des témoignages de l'histoire, reconst i tuer leur passé, comprendre leur présent et imaginer leur avenir sous des contraintes extérieures par ailleurs recensées.

Quatre départements ont été mis en place ils couvrent la total i té du domaine de recherche de ce premier grand type et correspondent à quatre types de milieux de dimensions spatio-temporelles dis­ tinctes. Ce sont:

Oéparterœnt A Milieu physique et environnerœnt climatique Oéparterœnt B Milieux et sociétés Départerœnt C Connaissance et mise en valeur des écosystèmes aquatiques Départerœnt D Urbanisation et soclosystèmes urbains

Le deuxième grand type de recherches englobe toutes les démarches scientifiques dont le but est de se donner les moyens d'assurer l'avenir. Il faut en effet que la recherche précise aux peuples et à leurs dirigeants les fondements des choix que rerldent possibles les écosystèmes dont ils disposent et les sociosystèmes qui les constituent. Ce deuxième type de recherches peut être qualifié de "recherches expérimentales pour le développement", et s'est organisé autour de quatre départements orientant leurs travaux vers la connaissance des condi t ions de l'autosuff isance et de l'indépendance des pays et des peuples, à partir de leurs écosystèmes et de leurs sociosystèmes :

Directeur de l'ORSTOM en Côte d'Ivoire, Centre ORSTOM d'Adiopodoumé, B.P. V51, Abidjan, Côte d'Ivoire.

95 Départerent E Indépendance alimentaire Départerent F Etude et gestion des ressources: énergies, eaux et matières premières Départerent G Indépendance sanitaire Départerent H Conditions d'un développement indépendant

LE ŒNTRE O· ftOlŒUn.M::

Le Centre ORSTOM d'Adiopodoumé auquel sont rattachés les chercheurs de MAN et DIVO totalise actuellement un effectif de 83 chercheurs et techniciens supérieurs (dont 15 nationaux), rattachés aux départements A, B, E, F et G, avec une majorité pour le département E (Indépendance alimentaire), et regroupés en dix Uni tés de recherches.

Les activités scientifiques du Centre peuvent se décomposer en quatre volets

Connaissance du milieu naturel

L'objectif est l'aménagement et la gestion des ressources naturelles et traditionnelles organisa- tion et fonctionnement du système Sol-Eau-Plante-Climat.

Disciplines concernées: Pédologie, Hydrologie, Agroclimatologie.

Mise en valeur de ce mi 1 ieu

Amélioration génétique des plantes cultivées.

Etude des facteurs d'élaboration du rendement et des contraintes agronomiques des divers systèmes culturaux.

Défense des cultures.

Discipl ines concernées: Phytogénét ique, Physiologie végétale et Biotechnologie, Agronomie, Pédo­ logie, Ecophysiologie, Phytovirologie, Entomovirologie, Nématologie, Entomologie, Phytopathologie.

Santé huraine

Recherches sur l'épidémiologie des grandes endémies: leurs vecteurs, leur prévention.

Connaissance des cycles naturels de la Fièvre jaune, de la Dengue et autres arboviroses et des condi t ions favor isant leur ci rcula t ion et émergeance.

Disciplines concernées: Entomologie médicale et Ecologie des vertébrés.

Fomation

Le Centre accueille dans ses laboratoires de nombreux chercheurs et techniciens nationaux et étran­ gers pour des stages de durées et niveaux divers en vue de la formation à la recherche et par le recherche.

96 ETUDE DES POPULATIONS D'INSECTES

Il. METHODOLOGIE D'ETUDES DES PARAME TRES BIOLOGIQUES DU COMPLEXE ENTOMOPHAGE DE LA COCHENILLE DU MANIOC PHENACOCCUS MANIHOTI

Juste Boussienguet l

Il est parfois préférable, pour des raisons liées aux commodités de l'expérimentation, de réaliser l'étude des paramètres biologiques sur un hôte de substitution facile à cultiver et d'une manipulation peu contraignante. Habituellement, divers fruits et Cucurbitacées, des tubercules germés de pommes de terre, des boutures foliacées, etc... sont testés afin de sélectionner un support adéquat. Toutefois, il est indiqué de maintenir la souche à étudier sur l'hôte ainsi choisi pendant plusieurs générations, avant de commencer l'expérimentation proprement dite. En effet, il faut souvent attendre plusieurs générations pour que les insectes transférés sur un hôte de substitution acquièrent la durée de développement et les paramètres biologiques caractéristiques de la nouvelle plante-hôte (Grenier et al., 1983).

Cependant, cette méthode, utilisable dans le cas des cochenilles relativement polyphages, n'est pas applicable à la cochenille du manioc qui est une espèce inféodée aux espèces botaniques du genre Manihot (et peut-être à quelques rares autres Euphorbiacées).

Pour être fiable, l'étude du cycle et des paramètres biologiques du ravageur doit, autant que faire se peut, être réalisée simultanément au laboratoire et dans des conditions aussi proches que possibles des conditions de plein champ. En effet, l'expérimentation dans les conditions contrôlées du laboratoire permet de mieux séparer l'influence de facteurs souvent associés (comme la température et l'hygrométrie) et donc de permettre une meilleure interprétation des observations réalisées dans les conditions de plein champ.

La cochenille du manioc est une espèce parthénogénétique thélytoque (permanente). Du fait de son mode de déplacement et de ses pet i tes dimensions, cet te espèce peut être élevée sur des surfaces ré­ duites. Son observation s'effectue sous loupe binoculaire sans anesthésie.

Technique d'élevage des différents stades de développement

L'élevage se fait sur de jeunes plantes de manioc en pots. Les deux feuilles qui suivent le bourgeon apical sont isolées par un anneau de glu à la base du pétiole'. Pour réaliser l'infestation, ces feuilles sont mises en contact avec des organes foliaires contaminés. Par la suLte, on pince les feuilles apicales au fur et à mesure du développement du plant, afin d'éviter la formation de nouvelles feuilles qui risquent de gêner les observations au cours du cycle expérimental. Les plants ainsi in­ festés sont disposés dans une cage ajourée dans laquelle on enregistre la température et l'hygrométrie à l'aide d'unthermohygromètre réétalonné une fois par semaine.

La technique décrite précédemment est utilisée pour étudier l'influence de la température et de l'hygrométrie sur la durée des différents stades de développement et leur viabilité ainsi que la fécon-

Laboratoire de Zoologie et de Lutte biologique, Faculté des Sciences, Université Nationale du Gabon, BP 1886, Libreville, Gabon.

Pour entraver le déplacement des cochenilles.

97

Par la suite on examine les feuilles à la loupe binoculaire et on effectue les observations toutes les 24 h pendant les 30 jours environ que dure les développements embryonnaire et larvaire et la matura­ tion des femelles. Les jours suivants, on détache les ovisacs à heure fixe et on compte les oeufs. Une fois fixés, les individus se déplacent très peu et se maintiennent généralement de façon très satis­ faisante sur les feuilles. Les rares individus qui s'engluent accidentellement sont exclus des calculs.

La méthode exposée précédemment reconstitue assez fidèlement les conditions naturelles. L'élevage au laboratoire permet de contrôler les conditions climatiques (température et hygrométrie, notamment) et donc d'étudier l' inf luence de ces facteurs. Toutefois, cet te méthode est encombrante et l'examen des feuilles pour effectuer les notations est fastidieuse.

TedTlique d'incubation des oeufs â tmpérature constante

Cette technique est insplree des logettes utilisées par les acarologues pour l'étude des tétranyques. Les oeufs sont incubés dans des cellules constituées de trois épaisseurs de papier filtre reposant au fond d'un tube en plastique de 25 mm de diamètre sur 20 mm de hauteur, sur une couche de coton hydrophile imbibée d'eau distillée. Ces cellules sont fermées par un disque de soie à bluter à mailles très fines, maintenu en place par des boulet tes de paraff ine. Les uni tés d'incubation ainsi consti tuées sont dis­ posées dans des étuves thermostatées et ventilées.

Cette technique est utilisée pour étudier l'influence de la température sur la durée et la mortalité du stade embryonnaire. En effet, si on prend soin d'humidifier le coton toutes les 24 h, le papier filtre sur lequel reposent les oeufs reste légèrement mouillé en permanence. Dans ces conditions, l'incubation se fait de façon très satisfaisante, et on peut considérer que les oeufs sont maintenus à une hygrométrie constante voisine de 100 pour cent.

En pratique, on dispose dans chaque cellule d'incubation de 200 à 300 oeufs d'âge identique, pondus et choisis au hasard, dans les mêmes conditions que l'on a décrites ci-dessus. Les cellules d'incubation sont mises en étuve et on procède aux observations toutes les 24 h comme déjà expliqué.

lES ~ DE TERRAIN

Méthode d'élevage

Nous utilisons de jeunes plants de manioc en pots, au stade deux feuilles, infestés selon la technique exposée ci-dessus. La cage contenant les pots et un thermo-hygromètre est disposée à 50 cm du sol, sous un abri extérieur bien ventilé. Un thermomètre à maxima et minima permet de contrôler quotidiennement les amplitudes thermiques enregistrées.

Nous avons utilisé cette méthode pour étudier l'évolution des paramètres biologiques de la coche­ nille du manioc (durée et mortalité des différents stades, fécondité et longévité des femelles) dans des conditions ambiantes proches des conditions de plein champ.

Le protocole expérimental est le même que celui décrit plus haut. L'élevage sous abri extérieur sur feui Iles de manioc en pots permet de reconst i tuer les candi t ions de plein champ et de suppr imer les facteurs secondaires qui, dans les conditions de plein champ, influent sur les paramètres biologiques du ravageur. Les cages mettent les cochenilles élevées à l'abri des prédateurs éventuels et de l'action du vent, tandis que le toit de l'abri les préserve de l'action mécanique de la pluie. Enfin, le renouvelle­ ment des plants à chaque génération permet de minimiser l'influence des facteurs qui, comme la modifica­ tion de l'état physiologique de la plante-hôte, sont difficiles à contrôler.

Méthode d'infestation artificielle

On procède par infestat ion de pieds de man ioc sains et marqués sur le terra in, à l'aide de femelles pondeuses prélevées dans la nature. Après 24 h de ponte, les femelles sont sacrifiées et les ovisacs laissés en place. On procède aux observations une fois par semaine. Cette méthode approximative est utilisée pour contrôler la durée totale de développement du ravageur dans les conditions naturelles.

98 TectY1iques d'échantillonnage - Etude du catllIexe entarophage

Les investigations effectuées dans les conditions de plein champ peuvent avoir plusieurs objectifs:

étudier la durée et la succession des générations du ravageur dans la nature afin d'apprécier l'influence des facteurs abiotiques sur le développement, la distribution saisonnière et l'abondance de ses populations;

dresser l'inventaire faunist ique et étudier les relat ions des ennemis naturels associés au rava­ geur ;

étudier le rôle des ennemis naturels dans la régulation des populations du ravageur

etc...

Chacun de ces objectifs nécessite l'application d'une méthode d'échantillonnage extensive ou in­ tensive appropriée. Pour la méthode utilisable dans le cas des cochenilles, on se reportera au texte: enquêtes et échant i llonnages.

BIBLIOGRAPHIE

GRENIER, A.M. NARDON, P.L. ; WICKER, C., 1983. "Influence du changement de nourriture sur le développement, l'activité de la N. acetylglucosaminidase et des symbiotes de Sitophilus oryzae L." Bull. Soc. ent. fr. (N.S.), 88, (3-4), pp.324-332.

99

APERCU DE LA NICHE TROPHIQUE DES COLEOPTERES CERAMBYCIDAE DE LA REGION DE LAMTO (COTE D'IVOIRE)

Jean-MBrie Leroux 1

LA STATIel'l D'ECOLOGIE TRFICALE

La station d'Ecologie tropicale de Lamto est établie sur une réserve d'environ 2.700 hectares, à l'ex­ trême sud des savanes du pays baoulé. Cette région appartient à la zone tropicale humide est l'on y distingue globalement deux saisons: la saison des pluies, de mars à novembre, généralement coupée par une "petite saison sèche" en août, et la saison sèche proprement dite, qui dure de novembre à mars. La végétation forme une mosaïque forêt-savane: des galeries forestières serpentant le long de cours d'eau à travers des savanes qui vont de la savane herbeuse jusqu'aux savanes boisées denses ou arborées.

J'ai commencé cette étude sur les Cerambycidae par la collecte de nombreuses espèces aux pIeges lumineux, le bat tage d'arbres et l'élevage de larves recuei 11 ies dans des bois morts. Ces méthodes n'apportant que très peu de renseignements sur la biologie des cérambycides, dès 1984 cette recherche est élargie par une prospection systématique effectuée sur 177 espèces de ligneux différents et s'intègre dans les recherches du laboratoire ECOTROP, en relation avec le programme de Y. Gillon sur "le partage des ressources chez les insectes séminivores".

En 1985, l'expérimentation a porté sur 81 autres essences d'arbres non encore intégrées dans les relevés. D'autres essences auraient sans doute pu être exploi tées mais leur dispersion, leur rareté ou les difficultés de prélèvement n'ont pas permis de les inclure dans les relevés. Cependant de nombreuses branches mortes ont été ramassées et ces cotrets examinés puis stockés ont fourni des résultats pour 23 espèces de ligneux non étudiées par la pose de fagots.

Afin de déceler la niche trophique de ces coléoptères xylophages, nous suspendons des fagots com­ posés de bûchettes de bois vert de divers diamètres, longues de 20 cm. Les appâts sont posés sur des ligneux de même essence, à raison de trois par espèce. L'opération est répétée à intervalles réguliers de 45 jours, durant toute l'année.

Les cérambycides, rarement prédateurs d'arbres sains dans leur milieu naturel, sont attirés par les fagots fraîchement coupés où ils viennent pondre. Les fagots sont récoltés à raison d'un par arbre à intervalles de 30, 60 et 90 jours après leur pose. Le conditionnement en élevage de ces récoltes nécessite l'utilisation, pour chaque fagot, de deux boîtes de conserves d'un diamètre de 10 cm, dont l'une sans fond, superposées et collées puis fermées par un couvercle plastique grillagé.

Les élevages ainsi réalisés ont, pour l'expérimentation de 1984, déjà donné de nombreux résultats. Ceux de 1985 sont en cours et ne procèdent que partiellement à l'élaboration de cette contribution. Le terme "émergence" est employé ici pour indiquer la sort ie de l 'adul te.

Station d'écologie tropicale de Lamto, B.P. 28, N'Douci, Côte d'Ivoire.

101 Ie)LLTATS

Des 6.000 élevages actuellement en cours, on a obtenu plus de 9.000 émergences de cérambycides. [Je nombreux autres groupes, tels que buprestides, bostrychides, elatérides, anthribides, histerides et des hyménoptères parasites, sont également largement représentés.

Parmi les 258 espèces de ligneux régulièrement collectées sous forme de fagots, et les 23 autres espèces, dont des bois morts, qui ont été ramassées, nous avons dénombré 231 espèces qui sont hôtes de cérambycides. Le nombre d'espèces de cérambycides émergentes des élevages s'élève à 201.

Certaines plantes servent couramment à l'alimentation de cinq ou six espèces de cérambycides. Citons le cas d'une Papilionaceae commune à Lamto (Millettia zechiana Harms) qui peut assurer le dévelop­ pement post-embryonnaire de 27 espèces différentes de ces xylophages.

De même, certains cérambycides généralistes sont attirés par plusieurs dizaines de plantes où leurs larves peuvent se développer. Ainsi Coptops aedificator (Mesosini), un des cérambycides les plus communs en Côte d'Ivoire, est hôte, à Lamto, de 86 espèces de ligneux différents. Une étude plus approfondie effectuée à partir des 673 adultes de cette espèce obtenus des élevages montre que 30 de ces 86 plantes hôtes sont des légumineuses, 413 adultes ayant émergéS de cet ordre regroupant les Caesalpiniaceae, les Mimosaceae et les Papi l ionaceae. Ainsi de 68, le total des plantes-hôtes connues pour coptops aedifi­ cator at teint maintenant 144. Le tableau 1 montre que la niche trophique de ce xylophage est surtout axée sur six principales familles de plantes.

TN3LEAU 1

Réparti tion des 673 émergences de Coptops aedificator F. à l'intérieur des 27 famülles de plantes-hôtes

Familles Nombre d'espèces % Nombre d'espèces % Nombre % étudiées total hôtes total cérambycides total

Caesalpiniaceae 18 9,94 11 12,79 179 26,60 Moraceae 28 15,47 17 19,77 129 19,17 Mimosaceae 15 8,29 7 8,14 128 19,02 Papi 1ionaceae 19 10,50 12 13,95 106 15,75

Anacardiaceae 8 4,42 5 5,81 38 5,65 Sterculiaceae 9 4,97 5 5,81 26 3,86

21 autres Familles 84 56,41 29 33,72 67 9,i;l6

27 Familles 181 100% 86 100% 673 100%

Certaines émergences se produisent à la mêmes date pour des fagots mis en place à 45 jours d'inter­ valle; on peut en déduire que ces xylophages pondent aussi sur des bois déjà secs, l'attraction étant alors provoquée par l'apport d'un substrat fraîchement coupè. En tenant compte de ces éléments, une durée moyenne du développement post-embryonnaire peut être dégagée qui se situe entre 110 et 199 jours pour 65 pour cent des individus dans le cas de Coptops aedificator ; cela permet de supposer qu'un deuxième cycle au moins sera achevé au cours de la même année. A l'opposé, certaines larves mettent de neuf à seize mois minimum pour se développer. Ainsi des pontes de novembre-décembre peuvent assurer la pérennité de l'espèce seize mois plus tard, l'individu traversant deux grandes saisons sèches avant de se métamorphoser. Cet allongement de l'état larvaire peut, dans certains cas, avoir une origine alimentaire dQe à l'inadaptation de la larve au substrat ou à la mauvaise qualité de ce dernier.

La répartition des quelque 9.000 cérambycides émergeant des 231 piantes hôtes recensées montre que les familles de plantes les plus attractives pour Coptops aedificator se retrouvent dans l'ensemble trophique établ i, toutes espèces de cérambycides confondues (Tableau 2).

CXNl..USIa.J

Les résultats obtenus jusqu'à ce jour vont permettre de mieux connaître la niche trophique de nombreuses espèces de xylophages cérambycides ou autres, d'améliorer la connaissance de nombreux parasites de ces xylophages et de mettre en évidence la spécialisation d'espèces, voire de tribus de cérambycides pour des familles ou des espèces de plantes comme par exemple Tragocephalini et Moraceae.

102 TAaEAU 2

Répartition des 9.169 énergences de céraTbycides (201 espèces) à l'intêrieur des 59 famdlles de plantes êtudIées

FéITlilles Nombre d'espèces % Nombre d'espèces % Nombre % étudiées total hôtes total cérant:>ycides total rv'oraceae 28 9,96 27 11,69 1764 19,24 Papi 1ionaceae 19 6,76 18 7,79 1295 14,12 Caesalpiniaceae 18 6,41 17 7,36 652 7,11 Rutaceae 4 1,42 4 1,73 490 5,34 Mirnosaceae 15 5,34 14 6,06 422 4,60

Convolvulaceae 1 0,36 1 0,43 304 3,32 Stercu1iaceae 9 3,20 9 3,90 235 2,56 Ulrreceae 4 1,42 4 1,73 229 2,50 Boragi naceae 2 0,71 2 0,87 225 2,45 Sapindaceae 8 2,85 6 2,60 224 2,44 Apocynaceae 5 1,78 5 2,16 224 2,44 Asclepiadaceae 1 0,36 1 0,43 221 2,41 Ebenaceae 5 1,78 5 2,16 218 2,38 Di 1leniaceae 1 0,36 1 0,43 206 2,25 Loganiaceae 3 1,07 3 1,30 190 2,07 Euphorblaceae 20 7,12 14 6,06 165 1,80 Celastraceae 3 1,07 2 0,87 146 1,59 Anacardiaceae 8 2,85 8 3,46 130 1,42 Annonaceae 4 1,42 4 1,73 124 1,35 Hypericaceae 2 0,71 1 0,43 121 1,32 Bignoniaceae 3 1,07 3 1,30 110 1,20 Connaraceae 3 1,07 2 0,87 107 1,17 Sapotaceae 4 1,42 4 1,73 100 1,09

36 autres Familles 111 39,50 76 32,90 1267 13,82

59 Familles 281 100",6 231 100% 9169 100%

Cette finalité pourrait permettre des comparaisons intéressantes avec les recherches effectuées par G. Couturier sur les xylophages parasi tes des friches et des cul tures enclavées dans les zones fores­ t ières. En effet, mes diverses expérimentat ions ont permis de recenser à Lamto plus de 530 espèces de cérambycides (les recensements établis jusqu'ici en dénombraient juste 500 espèces pour toute la Côte d'Ivoire) et diverses prospections dans ce pays m'ont permis de collecter un total de plus de 800 espèces.

103

LE PROJET TAI HISTORIQUE ET REALITES

Henri Dosso 1

HISTœla..E

Le sud-ouest de la Côte d'Ivoire se présentait, il y a moins de vingt ans, sous l'aspect d'un grand massif forestier, limité à l'ouest et à l'est par les fleuves Cavally et Sassandra, encore à peine touché par l'emprise humaine sur ses franges. l'Aais à partir des années 60, ce "vide du territoire de Côte d'Ivoire" allait faire l'objet d'une pression croissante de la part des exploitants forestiers d'abord, puis des cultivateurs venus des zones de savanes à la recherche de terres vierges ensuite. Dans le même temps, la construction du pont de Soubré devait symboliser l'ouverture du sud-ouest de la Côte d'Ivoire au développement. Dès lors, deux contraintes antagonistes apparaissaient: le nécessaire développement économique et social du sud-ouest; la conservation de l'environnement primi ti f.

Le gouvernement allait répondre à ces deux contraintes par la mise en place d'une double politique:

Une politique de développement régional qui s'est affirmée dès 1965, d'une part par la mise en place d'une structure administrative particulière - l'Autorité pour l'Aménagement de la Région du Sud-Ouest (ARSOl, chargée de mettre en valeur cette région - et par la réalisation d'importants investissements permettant de désenclaver le sud-ouest et de développer le port de San-Pédro, d'autre part.

Une politique de conservation de l'environnement dont la manifestation concrète demeure le classe­ ment, autour du parc national de Tal, d'une série de forêts destinées à servir d'écran-tampon à la pénétration humaine dans un souci de protection des richesses naturelles du patrimoine national et des potent ial i tés forest ières.

Ainsi, ces impératifs du développement régional et national devaient rompre l'équilibre ancien au profit d'un nouvel équilibre à déterminer. La réponse de la recherche scientifique en Côte d'Ivoire à cette demande du développement devrait donc accompagner, si elle ne pouvait les précéder, les diverses phases de l'action humaine afin "de guider cette action, de la canaliser en dégageant grâce aux connais­ sances scientifiques et techniques acquises, quelques principes simples et rationnels d'aménagement ou d'utilisation de l'espace".

LE PK>JET TAI

Le Ministère de la Recherche scientifique élaborait, en 1973, un projet d'étude des caractéristiques de l'écosystème forestier tropical et de leurs transformations selon les modes d'utilisation qu'en ferait l'liomme, en vue d'en dégager des règles d'exploi taUon rationnelle. Le "projet Taï" devai t donc per­ mettre de comparer la structure et le fonctionnement d'un écosystème naturel primitif, forêt dense ombrophile préexistante, à ceux d'écosystèmes transformés, parce qu'aménagés selon les object i fs de différents systèmes d'exploitation du milieu naturel, correspondant aux nécessités des activités humaines à implanter dans cet te zone jusqu'alors peu touchée.

SecrétaIre technique du MAB en Côte d'Ivoire, InstItut d'Ecologie tropicale, 08 B.P. 109, Abidjan 08, Côte d'Ivoire.

105 Le projet en Côte d'Ivoire s'intégrait au Programme international de recherche sur l'Homme et la Biosphère (MAB) de l'Unesco. Par sa local isat ion et ses orientat ions de recherche, le projet de Côte d'Ivoire se rattache essentiellement au Projet du MAB "Effets écologiques du développement des activités humaines sur les écosystèmes des forêts tropicales et subtropicilles", bien qu'il soit lié avec d'autres thèmes axés sur des processus ou des impacts.

Cet te intégration, réalisée grâce à l'act ion conjointe du Ministère de la Recherche scient i fique et du Comité national fVIAB de Côte d'Ivoire, permet une collaboration scientifique au niveau international avec l'intervention déjà acquise de chercheurs d'autres pays par l'intermédiaire des Comités nationaux.

Le Projet Taï axé sur un problème de développement, aménagement régional intégré, doi t permet tre d'accroître en ce domaine et de développer une nouvelle approche scientifique par la collaboration entre disciplines et organismes de différents horizons, intimement mêlés dans la recherche d'un même objectif. Dans ce cadre, une place prépondérante devrait être réservée à la formation de jeunes chercheurs de Côte d'Ivoire.

Les grands axes de recherche relatifs

à la colonisation spontanée d'un espace nouvellement ouvert à la pénétration humaine;

à la mise en place d'un nouveau système de relations (infrastructure, projet de développement, etc. )

à la mise en évIdence des contraintes physiques et biotiques à l'utilisation de l'espace forestier, en particulier en vue de définir les relations entre agriculture et forêt, celle-ci étant considérée sous son double aspect économique et rôle écologique, ont abouti à l'élaboration des huit programmes suivants (voir aussi Tableau 1)

Evolution du milieu physique

Les différentes opérations de ce programme ont pour but de faire le bilan du potentiel abiotique du sud­ ouest de la Côte d'Ivoire; les études expérimentales et suivies à la station écologique de Taï seront étendues à l'ensemble de la région par des mesures plus simplGs et plus ponctuelles. On tentera de définir les contraintes essentielles à un développement agricole silvicole rationnel. Le modèle proposé devra pouvoir être appliqué aux autres régions forestières de Côte d'Ivoire.

Evolution biologique des sols

Toute action de développement agricole (la silviculture incluse) se doit d'être établie sur une bonne connaissance des sols. La connaissance des modifications concernant la productivité, la structure et la fertilité des sols, des risques de dégradation et des possibilités d'évolution et de stabilisation à la suite des interventions humaines est capitale. Elle est axée sur l'aspect biologique: activité de la microflore et de la microfilune, évolution des éléments organiques et de leur minéralisation.

Evolut ion de la végétat ion

L'évolution de la végétation est étudiée sous un double aspect

dynamisme interne en privilégiant tout particulièrement la régénération des espèces en termes de stratégie et de contraintes (lumière, eau, sol et facteurs biotiques) et devrait permettre d'appor­ ter des bases solides aux silviculteurs désireux de mettre au point une production de bois à partir d'une régénération naturelle contrôlée de la forêt;

rôle écologique de la couverture végétale sur l'évolution du milieu physique des sols et de quelques aspec t s du peup1emen t an ima 1.

Le problème de la succession secondaire après abandon des cultures est prioritaire, sa connaissance doit déboucher sur des propositions de contrôle et de gestion aux agricoles et silvicoles. Les études de botanique servent de cadres typologiques de référence pour la plupart des autres disciplines.

106 Programmes, opérations et niveaux d' intégration dans le projet Taï Situation en 1975 (d'après Guillaumet, Kahn et Lena, 1984)

PRQGRAMMES S y N THE SES

1 II III IV V Ni veau : uni tés NI veau : Obtention fonctionnelles 1 du produit final EVOLUTION DU EVOLUTION DES EVOLUTION DE LA EVOLUTION DES EVOLUTION DE MILIEU PHYSIQUE SOLS VEGETATION PEUPLEMENTS L'EMPRISE 1 Programme VI : ANIMAUX HUMAINE EVOLUTION DU 1 PAYSAGE FORESTIER

01 Systématique et dynamique des Cadres géomorpholo­ 01 Unités naturelles formes giques et climatiques 1 écosystématiques 02 Climat régional et leur agence­ 03 Effet de 01 Inventaire ment dans i1slère 02 Structure l'espace 04 Régénération de quelques 04 Un facteur espèces Structure et dynamI­ rntcroclimatique: forestières que du couvert il interception 05 Reconstitution végétal de la pluie globale 05 Eaux sou- 06 Adventices Bilan hydrique et terraines caractéristlques 06 Hydrométrie physiques des de surface 01 Caractéristiques sols 07 Eaux et physiques pédogénèse II. 03 Composantes du actuelle rendement 02 Matière orga­ 03 Stock et nique et flux Cycle de la matière éléments organique et des mInéraux éléments minéraux l . 1 03 Fourmis 04 ACti~itéS 04 Termites Effets des éléments microbio- 05 Acariens et biotiques sur la logiques:, 1 1 collemboles dynamique des sols bactéries et 06 Vers mycorhizes OS Diplopodes II.05 Remontées biologiques

~.. 07 Pourndlés 07 Nématodes Ravageurs des 10 Insectes et l cuitures régénérat ion Parasi tes et des essences prédateurs forestières 02 Rongeurs

01 Singes et Maladies para­ damans sitaires de l' homme, 09 Moustiques vecteurs et et simuiies 01 Structures réservoirs spatiales des communautés 02 Espace anthro­ pisé pré­ existant Structures spat laIes o 03 Le dynamisme de il espace ~ pionnier anthropisé 04 Effets des grands projets

d 1 aménagement Evolution des populations anûmBles et végétales parasites des cultures

Etude du dynamisme et du comportement des ravageurs, parasites et prédateurs des cultures parmi les plus importants. La rupture d'équilibre induite par le déboisement provoque une transformation radicale des peuplements: apparition de certaines espèces nuisibles pouvant apporter des contraintes importantes, disparition d'un grand nombre d'espèces forestières. Les recherches portent sur la connaissance des processus d'envahissement, la dynamique des populations, les équilibres hôte-parasites.

Evolut ion des populat ions anilTBles et santé

Connaissance des groupes animaux (vertébrés ou invertébrés) hôtes ou vecteurs d'agents pathogènes de l'homme. Les agents pathogènes en cause peuvent être des virus, des bactéries, des parasites. Par suite de la création de clairières consécutives à l'aménagement de la forêt, ces populations animales habituel­ lement cantonnées à la canopée peuvent se trouver au niveau des lisières en contact avec les populations humaines ainsi menacées d'affections graves. Une série d'opérations est particulièrement axée sur l'étude de la fièvre jaune. On sait en effet que la fièvre jaune fait peser une menace permanente dans toutes les régions inter-tropicales d'Afrique et d'Amérique où l'on sait que le virus amaril existe et où se rencontrent des moustiques vecteurs connus ou potentiels de fièvre jaune.

Evolution des populations de grands mammifères

Etude des populations, de la biologie et de l'écologie de quelques grands mammifères. Ce programme est essent iellement axé sur l'étude du Parc nat ional de Taï ; il a des conséquences sur la protect ion de la faune, le tourisme, l'éducation et les risques de transmission de maladies à l'homme et au bétail.

Evolution de l'errprise humine

L'objectif de ce programme est d'apporter un certain nombre de connaissances concernant le jeu des forces humaines dans l'organisation régionale de l'espace et l'utilisation du milieu forestier. Cet apport est d'importance majeure dans la mesure où les projets d'aménagement entrent en interaction avec un mode d'utilisation du milieu hérité du passé ainsi qu'avec des dynamismes spontanés récents de grande ampleur.

On a privilégié plusieurs études relatives à l'organisation spatiale du sud-ouest sous l'effet des créations et développements nouveaux: San Pedro, Soubré, réseaux routiers, programmes agro-industriels. L'analyse des di fférents dynamismes et de leurs relations réciproques devrai t permettre d'élaborer des précisions utiles pour la planification. 1

Evolution du paysage forestier

C'est un programme de synthèse de caractère ouvert qui utilise les données apportées par l'étude des milieux physiques, biologiques et humains afin de définir des normes d'aménagement de l'espace forestier conformes à la notion d'équilibre écologique. Une opération a eu pour buLl'application du concept de paysage à la cartographie: géomorphologie, utilisation pédologique, végétation, anthropisme, etc.

JET

Les participants du Projet relèvent de nombreuses institutions scientifiques de Côte d'IvoIre (lET, Un i vers i té, IGI, l HAA, CNF, IPCI ), ou étrangères. Ces dernières peuvent être des organ i smes étrangers basés en Côte d'Ivoire, des organismes interrégionaux, des organismes étrangers. Les participants se partagent entre chercheurs à temps plein, enseignants-chercheurs, étudiants stagiaires, techniciens et chercheurs associés.

La formation scientifique demeurant une des priorités de la politique du Ministère de l'Education nationale et de la Recherche scientifique, la formation des chercheurs aussi bien sur le plan national qu'international, l'organisation de séminaires, ont toujours fait partie des activités au sein du Projet Taï.

108 La publication par l'Unesco de la note technique "Recherche et aménagement en milieu forestier tropical humide: le projet Taï de Côte d'Ivoire" (Guillaumet, Couturier et Dosso, 1984) concrétise dix années d'activités et donne aussi quelques perspectives sur la suite des activités à Taï.

BIBL IOGRAPHI E

GJILLAUvET, J.L., COUTURIER, G., 00550, H. (dir. pub!.), 1984. "Recherche et aménagement en milieu forestier tropical humide: le Projet Taï de Côte d'Ivoire". Notes techniques du MAS 15. Unesco, Paris. GJILLAUvET, J.L., KN-N, F., LENA., P., 1984. Présentation du projet. In J.L. Guillaumet, G. Couturier et H. Dosso (dir. publ.), Recherche et aménagement en milieu forestier tropical humide: le Projet Taï de Côte d'Ivoire, pp.17-34, Notes techniques du MAS 15. Unesco, Paris.

109

LE PROGRAMME SUR L'EVOLUTION DES POPULATIONS D'INSECTES PARASITES DES CULTURES DANS LE PROJET TAI. PROBLEMATIQUE, METHODES DE COLLECTE, RESULTATS

Guy Couturier 1

Compte tenu de la problématique générale définie lors de l'élaboration du Projet Taï, les études d'ento­ mologie générale liées aux problèmes des ravageurs ont été axées sur les processus de transformation de la faune lors des défrichements et mises en culture. Dans cette région où la forêt climacique, primaire, est encore importante et proche des villages, on pouvait supposer que celle-ci représentait un réservoir potentiel de ravageurs des cultures.

Les recherches ont été orientées sur la connaissance des faunes des différents milieux existants, anthropisés ou non, afin de tenter de définir les processus de colonisation des milieux transformés par les insectes, et l'origine de ceux-ci. Un protocole d'échant illonnage a donc été défini et di fférents types de biotopes, dont les caractéristiques vont du milieu naturel non perturbé par l'homme à des milieux en situation d'anthroplsation croissante, ont été choisis:

la forêt primaire (milieu non perturbé), où l'on a distingué le souS-bois, la canopée et les châblis ;

les mi 1ieux peu anthropisés, représentés ici principalement par des pistes et clé!irières (anciens parcs à bois) en forêt, ouvertures discrètes, peu perturbantes, mais pouvant faci 1i ter la progres­ sion d'une faune allochtone ;

des cul tures, incluses ou non en forêt dense, toujours de type vi llageois et dont l "'histoire" nous étai t connue: le champ de riz "tradi t ionnel" plus ou moins inclus en forêt (cul ture sur brûl is, un an de culture puis jachère), permettant dans la plupart des cas une reconstitution "normale" du milieu forestier; la plantation de r.acaoyers dont la pérénnité entraîne une situation écologique tout à fait différente;

des milieux secondarisés d'âges et de situation écologique variés, le plus souvent consécutifs à des champs abandonnés à la jachère. Nous avons retenu pour étude: des jachères de quatre à six ans, brousses à Marantaceae, à Macaranga, représentat ives du stade arbust if pionnier; une forêt secon­ daire de 17 ans de végétation bien caractéristique de ce stade de reconstitution forestière.

Nous avions donc ainsi, très schématiquement bien sûr, défini quelques exemples des différentes étapes de la transformation de la forêt, évoluant soit vers la culture pérenne (plantation de cacaoyers, caféiers), soit vers la reconst'itution climacique (champ de riz -> jachère -> forêt secondaire... ) (figure 1).

LES r.ET1-DJES lE

Dans le cadre de ce programme, le travail de terrain a été exécuté avec des moyens matériels assez restreints. Nous n'avions pas, en effet, la possibilité d'aller récolter les insectes ni dans la canopée

ORSTOM, Centre de Bondy, 70-74 route d'Aulnay, 93140 Bondy, France.

111 B

A

La mise en culture de la forêt et l'étude des insectes dans la région de Taï. a - Abattage d~un arbre en forêt primaire avant la mise en culture ; b - Collecte d'insectes dans la frondaison d' un arbre abattu ; c - Champ de riz en forêt ; d - Collecte d' insectes dans un ancien champ de riz après une année de jachère.

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112 C Forêt sernndoire o pUIS reconstitution

N climocique : ~ C c > ~ ~ ~ ""U "U E ""U c ~ .2 E:::E J::: tf) ft" u :> U

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1

Cultures de rente Cofé, Cocoo Vieillissement N

~ B de 10 Forêt primoire .:> ~ plontotion C ,~ ....a ? o ~ >: ._------....._.... __ ._.. E > ,~ C v-; ~ ~ ,~ E ~ .2 > J::: u :> U ~ 0 1 1 1 1 1 ~ or iginelle ext~rieur) milieu orbustif. ?

'" exception foite de quelques errotique~

FIGURE.l Evolution de la faune entomologique après suppression de la forêt pour la mise en culture. A) Lorsque le défrichement est abandonné après 1 an, parfois 2 ans, de culture de riz. B) Lorsque la culture de riz est sui v ie d'une plantation pérenne caféiers ou cacaoyers. (Exception faite de quelques erratiques.) Les indications en abscisses et en ordonnées n'ont aucune valeur chiffrée ni dans le temps, ni dans l'espace, et n'ont pour objet que de matérialiser graphiquement les transformations d'une façon très schématique,

113 en place, ni dans les strates de végétation si tuées au-dessus de la portée d'un collecteur se déplaçant au sol, armé d'un filet fauchoir. Toutes les méthodes de capture étaient "pratiques", d'utilisation aisée par le personnel technique et peu coûteuses.

Il est donc bien évident que nos prélèvements faunistiques ne peuvent donner qu'une idée fragmen­ taire des peuplements entomologiques des milieux prospectés. Outre le fauchoir, notre technique de récolte principale, nous avons utilisé des pièges lumineux type Jermy et à drap (récolte sur un drap tendu entre deux piquets et au sol, et éclairé par une lampe) ; des pièges d'interception (gouttières de piégeage déjà utilisées par Pollet en 1975) et des pièges à eau colorée du type déjà utilisé en Côte d'Ivoire par Couturier et Duviar d (1976).

Le filet-fauchoir a été utilisé dans tous les milieux prospectés mais, compte tenu de la diversité structurale de ces mi 1ieux (tapis graminéen ras des pistes forest ières, végétat ion hétérogène des poly­ cultures, rideau serré des lianes de lisière, fouillis "suspendu" de la frondaison des arbres abat­ tus...), il eut été ridicule de chercher à quantifier de quelque manière que ce soit l'utilisation de cet instrument primitif quoique irremplaçable. Dans l'ensemble des biotopes prospectés, dans les milieux modi fiés par la pénétration humaine, comme, dans la plupart des cas, pour le sois-bois forest ier, les prélèvements au fauchoir ont pu être pratiqués toute l'année; deux hommes, munis chacun d'un filet, travaillaient ensemble pendant trois heures consécutives, entre 10 h du matin et 13 h. C'est avec cette méthode que nous avons prospecté la canopée; mais, dans l'impossibilité de travailler in situ, nous avons eu recours à l'abattage des grands arbres. Comme nous nous refusions absolument à pratiquer l'abattage aux seules fins de récoltes d'insectes, nous avons mis à profit les abattages réalisés par les paysans oubis et baoulés lors des défrichements réal isés en "forêt noire", c'est-à-dire (selon le sens attribué par les Oubis à ces mots qu'ils expriment d'ailleurs en français), dans des parcelles fores­ tières jamais utilisées à des fins agricoles, de mémoire d'homme.

La récolte d'insectes était pratiquée, au filet fauchoir, immédiatement après la chute des arbres, toujours grands (25 à 50 mètres de haut), sans qu'il soit matériellement possible de faire des dis­ tinctions en fonction des espèces abattues. La prospection, dans l'enchevêtrement des branches brisées ou intactes, et du feuillage, souvent réalisée plusieurs mètres au-dessus du sol, s'avérait extrêmement di ff ici le et épuisante.

Les défrichements ayant lieu en saison sèche, les prélèvements effectués dans les frondaisons ne présentent donc pas le même caractère diachronique que les autres et les résul tats qui en découlent donnent une image beaucoup plus saisonnière du peuplement entomologique de la canopée. Dans ce cas particulier, pour pouvoir travailler vite à la suite des abattages, les équipes de récolte étaient fortes de deux à cinq hommes, travai liant pendant une à dix journées consécut ives, selon l'importance des surfaces défrichées.

Une tentative d'utiliser par ailleurs les abattages pratiqués par les exploitants forestiers s'est avérée irréalisable étant donné le mode de travail des bûcherons en forêt primaire.

Les pièges lumineux Jermy, au nombre de deux, ont été mis en place de part et d'autre de la lisière d'une parcelle expérimentale de six à sept hectares ouverte en 1978 en forêt primaire, l'un en forêt primaire, l'autre au centre de la clairière. Les pièges ont fonctionné deux nuits par semaine de mai 1978 à juillet 1980.

Les plateaux colorés (bacs de 25 x 25 x 10 cm, peints intérieurement en jaune, À = 5800 .!.) ont été utilisés pendant la période allant de mars 1978 à décembre 1979. Q.Jatre saisons de piégeage ont été utilisées. Dans chacune des stations, trois bacs ont été utilisés à chacun des niveaux de piégeage (Duviard et Pollet, 1973) : bacs posés à la surface du sol et disposés sur des portoirs à 50 cm au-dessus du sol. Les pièges étaient mis en place 48 h par semaine, selon le protocole des piégeages colorés déjà utilisés en Côte d'Ivoire (Couturier et Duviard, 1976) et selon les techniques mises au point au Centre ORSTOM de Bondy (Roth et Chauvin, 1966).

Pour des études plus particulières, nous avons utilisé des méthodes spécialisées telles que les pièges à drosophiles, constitués d'une bouteille de plastique contenant des fruits fermentés, des "pièges à banane" pour les lépidoptères rhopalocères, constitués, eux, d'un cylindre de toile fermé dans le haut et séparé par quelques centimètres de son socle en bois. Le piège est hissé dans un arbre à l'aide d'une corde et les bananes fermentées posées sur le socle attirent les insectes.

Pour obtenir des drosophiles, nous avons aussi utilisé le principe des émergences: les fruits, fleurs ou tous autres organes susceptibles de contenir les insectes recherchés, le plus souvent à l'état larvaire, sont déposés sur un li t de sable sec, dans un récipient de préférence transparent et fermé d'une gaze; dès l'émergence, les insectes adultes sont récupérés manuellement ou à l'aspirateur à bouche. Cette méthode a permis d'obtenir de nombreuses informations sur la biologie des drosophiles de la forêt de Taï.

D'autres méthodes, générales, ont été utilisées par divers auteurs. On peut citer les biocenomètres utilisés par Gillon et Gillon (1965) dans la savane de Lamto en Côte d'Ivoire, et qui ont l'avantage de quantifier le peuplement sur une surface définie; cette méthode n'était pas applicable en milieu fores­ t ier. Le princ i pe des fumiga t ions, ut i 1i sé notamment par Erw in (1983) en Amazon ie brési 1ienne, n'a pas été retenu en raison des di ff icul tés d'approvisionnement en matériel.

114 -1 QI 0"

ie: GENRE, ESPECE Forêt Lisières Cultures GENRE, ESPECE Forêt Lisières Cul tures dense pistes en forêt dense pistes en forêt o e: Cl) .0 ACRIDOIDEA e: Leptog 1ossus membranaceus X ~ Anacatantops notatus X n. g. sp. X Cl) x Badistica lauta x x Omytus elongata n. var. X Cl) 3 )( "0 Badistica omata X" X PI ectropoda ob longipes X X if Chirtsta compta x.... X PI ectropodoides n. sp. X 0­ Duviardia oubitai X Cl) V! Gastrimargus procerus X "0 Cl). n Ho lopercna gerstackeM X Cl) V! Heteroptemis thoracica X PENTATOMOIDEA 0- MabacMs gui llaumeti X X 5' Aethemenes ch loris V! Mastachopardia zougueana X gambiensis X ~ Agonosce lis m Oxya hyla X X .... X V! Aspavia armigera n Stenocrobylus festivus X Aspavia hastator X .... X QI., QI TaiacMs coutuMe'; x Aspavia ingens X" X ...n ~ Bathycoe 1ia tha lassina X 1lr1lr1lr ;l COR EOIDEA ...V! Canthecona discolor X .0 e: Anoplocnemis curvipes X Carbula capito X Cl) V! Anoplocnemis tristator X X X Carbula esca lerai X 0­ QI:l Di'iycoctha tenuicomis X Catadipson aper X V! Erbu la southwoodi X Cyc logastMdea margina 1is X ro V! Kolleriella mim X Dorycoris pavoninus X

ê...... Iii' X présence, -: absence e: x * uniquement dans les bas-fonds éclairés à Marantaceae vivent sur les Gramineae "0 ** d *** peut de retrouver dans les plantations de cacaoyers ou V! elle devient un ravageur "0 ...~ ~ V!

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Quelques insectes forestiers de la reglOn de TaI. A: Petalocheirus rubiginosus Pal. beauv. (Reduviidae), B: Authenta quadridens Fab. (Reduviidae), C: Bathycoelia thalassina Schout. (Pentatomidae), 0 : Apoboleus sp., acridien du sous-bois.

116 En Amazonie encore, Adis (1981) et Adis et Schubart (1984) ont utilisé des pièges d'interception (photoeclectors) fixés sur les arbres pour montrer les déplacements verticaux et les affinités de la faune d'arthropodes dans les zones inondables (varzea) et de terre ferme de la région de Manaus.

Des tours permettant d'accéder à la canopée ont aussi été construites par Haddow et al. (1961) en Ouganda, et par Cachan (1963) en Côte d'Ivoire. Paul ian (1947) dans la forêt de Banco en Côte d'Ivoire encore, avai t ut i 1 isé une nacelle qui s'élevai t jusqu'à 37 mètres et lui permet tai t d'accéder aux branches pour effectuer ses collectes d'insectes. En Thaïlande, ce sont des passerelles qui permettent l'accès à la frondaison des arbres (Tongyai, 1980). Ces méthodes demandent des moyens matériels impor­ tants, elles ne permettent pas vraiment d'accéder à une masse importante de feuillage mais facilitent la disposition de toutes sortes de pièges à des hauteurs impressionnantes.

Au Costa Rica, Perry (1984) a "exploré" la canopée grâce à un réseau de câbles et de harnais permettant des déplacements sur plusieurs dizaines de métres in situ et muni d'un filet à insectes.

Différentes autres méthodes de prospection, plus ou moins spécialisées, viennent évidemment à l'esprit, elles sont ou seront utilisées par d'autres, en fonction des besoins de recherches différentes.

Les quelques cas cités ci-dessus ne font qu'illustrer la grande diversité des méthodes mises au point par les entomologistes et de très nombreux travaux, articles, ouvrages, relatent ces méthodes, qu'il est bon de connaître lorsque l'on veut entreprendre une étude écologique exhaustive en milieu forest ier tropical.

~TATS

Les résultats obtenus ont montré que la mise en place d'un champ en forêt crée d'importantes perturba­ tions sur le peuplement préexistant. L'abattage puis le brûlis entraînent la disparition totale de la faune d'origine. Dès l'apparition des premières plantules de riz et de la végétation adventice, on constate l'installation des dépredateurs classiques du riz, foreurs de tige, piqueurs, défoliateurs, ainsi que de nombreuses autres espèces d'insectes étrangères à la forêt.

Pour ce qu i concerne la faune des cacaoyers, il sembl e ne pas en êt re de même ; d'a i lleurs des échantillonnages effectués en forêt primaire ont révélé la présence de plusieurs espèces d'insectes potentiellement nuisibles au cacaoyer (Bathycoelia thalassina, Pardalaspis punctata). Les investigations devront cependant être poursuivies sur ce sujet.

Dans les autres milieux inventoriés, la faune est différente. En forêt, où l'on a échantillonné séparément la faune du sous-bois et celle de la canopée, on constate, en particulier chez les Acridoid~a, Pentatomoidea, Reduviidae, que les espèces sont différentes de celles presentes dans les cha~ps de rlZ. Il n'y a pas de passage de l'un à l'autre et ce fait met en c.ause l'orig:n~ allochtone des lns~ct~s du champ de riz. Le tableau 1 donne quelques indications d'especes caracterlStiques dans les prinCipaUX mi 1ieux prospectés.

Ces collectes nous ont amené à considérer non plus seulement l'aspect agroécologique des transforma­ tions du peuplement d'insectes, mais aussi la diversi té et la composi tion faunist ique du peuplement forestier. En effet, si sur le plan botanique cette forêt est relativement bien connue grâce aux recher­ ches qui y ont été menées depuis 1950, beaucoup reste à faire dans le domaine de la zoologie et en particulier de l'entomologie. Dernier bloc important de la forêt primaire de l'Afrique de l'ouest, la forêt de Taï revêt en effet une importance fondamentale pour la connaissance de la faune entomologique des forêt.s africaines en général.

Les prospections réalisées sur plusieurs années ont permis l'obtention d'un g'rand nombre de specl­ mens, dans des milieux variés, et montrent bien le peu de renseignements dont on dispose sur la faune forestière; ainsi les biotopes où se développent les insectes étudiés étaient souvent mal connus ou inconnus, et de nombreuses espèces nouvelles pour la science ont été découvertes et décrites. D'autres le seront ultérieurement. La canopée abrite à elle seule une faune très diversifiée, dont une infime partie seulement a été interceptée lors des prospections.

Si l'on songe que sur les rares espèces d'acridiens obtenues de la canopée, quatre étaient nouvelles pour la science, on conçoit ce qu'il en est pour des insectes plus discrets!

CDO..lJSI(JIl

Pour conclure, on ne saurait mieux faire que de citer cet extrait de la réunion de concertation des comités nationaux du MAS des pays francophones d'Afrique (Unesco, 1984) :

117 Quelques insectes de la région de Taï. A: Paracinema luculenta Karsch. (Acrididae), vivant dans les milieux ouverts ; B: Pochazia fasciata Fab. (Ricanidae) ; C: Cossutia flaveola Drury (Coreidae), fréquent dans les lisières forestières ; D: Aspavia armigera Fab. (Pentatomidae), vivant sur le riz.

118 ..."les forêts intertropicales humides qui figurent parmi les écosystèmes terrestres les plus riches, les plus complexes et les plus divers, sont menacées dans leur intégrité. Chaque année, environ 11 millions d'hectares sont gravement affectés, voire détruits dans le monde, dont à peu près le tiers se situe en Afrique... La connaissance des écosystèmes forestiers est indispensable à l'établissement de bases satisfaisantes pour leur utilisation durable et rationnelle."

Les études entomologiques doivent faire partie de ces préoccupations l'inventaire des espèces et la description de celles qui sont nouvellement découvertes sont le seul préalable possible à l'étude du rôle des Insectes dans l'équilibre de l'écosystème forestier. Chaque insecte joue un rôle, pollinisa­ teur, seminivore, phytophage, décomposeur, etc... dans le fonctionnement de la biocénose forestière et contribue à y entretenir une situation d'équilibre dynamique (climax) qui peut être altérée ou rompue par des événements exceptionnels, dont l'intervention de l'homme (exploitations forestières, défrichements) est une des plus marquantes.

Cette rupture d'équilibre entrafne la disparition de certaines espèces, plus rarement l'adaptation de certaines autres aux nouvelles conditions, l'apparition, voire la prolifération, d'éléments exogènes. Par ailleurs, certaines espèces sont suscept ibles de s'adapter aux plantes cul t ivées, comme c'est appa­ remment le cas pour le cacaoyer par exemple.

La bonne connaissance que nous avons du milieu végétal de la reglOn de Taï (forêt dense, champs cultivés, milieux en voie de reconstitution), doit inciter les entomologistes à compléter les données de base qui, plus tard, permettront une meilleure compréhension du fonctionnement de l'écosystème forestier. En forêt de Taï comme dans les autres forêts africaines, un immense effort est à accompl ir pour que ne disparaisse pas, avant d'avoir été connue, une faune d'une richesse inest imable... sans que ne soient expliquées les relations des groupements d'espèces entre eux et avec les autres composantes de l'éco­ système.

Pour plus de précisions sur les travaux réalisés, consulter le tome 7, fascicule 5, 1985, de la Revue française d'Entomologie.

BIBLIOGRAPHIE

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119

TECHNIQUES D'ETUDES ECOLOGIQUES DES TERMITES FORESTIERS

Yaya Sangarê l

OONTEXTE HISTœI

Avant 1960, date de l'indépendance du pays, le sud-ouest de la Côte d'Ivoire est resté en marge du développement économique malgré ses énormes potentialités naturelles. Il a néanmoins intéressé des scientifiques écologistes isolés parmi lesquels nous citerons sans aucune chronologie Schnell, Mangenot, etc... Les résultats importants au niveau floristique et faunistique ont incité en 1933 les autorités à décréter un Parc National dans cette région. Dès 1960, nous avons assisté à l'arrivée d'exploitants forestiers et d'agriculteurs qui commencent à enregistrer une baisse de rendement dans les régions est et nord du pays. En 1965, le Gouvernement de Côte d'Ivoire a opté pour un développement régional équilibré. Dès lors, le sud-ouest connaît un boom économique et le développement d'un important front pionnier qui n'est pas sans effet sur le milieu naturel jusque là en équilibre et peu perturbé.

Pour comprendre l'ampleur des "perturbat ions" et surtout pour accompagner le développement et même le guider, le Gouvernement initie en 1973 un programme pluridisciplinaire et multiorganisme appelé Projet Taï, du nom du village qui sera le site du projet. Entre 1975 et 1977, le projet devient une réalité et le Gouvernement crée toutes les Infrastructures d'un centre de recherches à la station de Taï. En 1984, après dix ans de recherches, les chercheurs et le Gouvernement, avec l'appui de l'Unesco, décident de faire le point des résultats et donner une nouvelle orientation au Projet Taï.

La philosophie du projet Taï est de comprendre la structure et le fonctionnement d'une forêt tropi­ cale humide climacique et d'évaluer les effets des activités humaines sur ce milieu.

Huit programmes ont ensuite été mis en place. Ils traitent du climat, du sol, des végétaux, des animaux, de la santé et des sciences humaines. Dans le cadre du thème "sol", nous nous occupons des Termi tes.

TEQiIlI

Pour de nombreux auteurs, le taux, le recyclage et l'utilisation de la matière organique conditionnent dans une large mesure le fonctionnement d'un écosystème naturel: maintien de la structure des sols, rétention en eau et production végétale. Les termites comme les autres constituants de la macrofaune du sol participent en Stimulant ou en inhibant l'activité de la microfaune dans les processus d'humification - minéralisation, Dans ce dernier processus, les termites jouent un rôle essentiel sur l'évolution des sols. Dans le cadre du Projet Taï, notre hypothèse de travail est de situer le niveau d'attaque des arbres par les termites, de voir l'influence du défrichement sur le peuplement des termites et enfin de comprendre les relations termites avec les autres micro- et macrofaunes du sol.

En forêt, les trois paramètres principaux régissant les peuplements et les associations d'espèces de Termites sont la couverture végétale, la morphologie du terrain et le profil pédologique. Ces paramètres doivent être pris en compte dans l'étude des Isoptères forestiers. Les techniques d'échantillonnage

Directeur, Institut d'Ecologie tropicale, 08 BP 109, Abidjan 08, Côte d'Ivoire.

121 doivent également tenir compte de la biologie et l'écologie des termites et groupes de termites. L'ubi­ quité des termites nous amène à combiner très souvent plusieurs techniques.

Travail sur transect

Les transects sont choisis sur différents massifs à couverture végétale bien caractérisée par les bota­ nistes (forêt primaire et différents stades de régénération de la forêt secondaire). Ces transects sont marqués de façon indélébi le afin d'étudier sur plusieurs années la dynamique des peuplements et des populations. Les transects sont tracés horizontalement suivant trois niveaux: sommet, milieu de pente, bas de pente. le long de ces transects, on fait les prélèvements:

1. L'inventaire et le dénombrement des nids arboricoles se fait par quatre techniciens sur une largeur de 10 m de chaque côté de la 1igne marquée. Le volume des nids est est imé, l'arbre porteur est marqué, les matériaux de construction du nid sont prélevés, et la hauteur nid-sol est marquée.

2. Les troncs d'arbres morts ou tombés à terre sont systématiquement explorés pour inventorier tous les termi tes de bois.

3. Le dénombrement des nids épigés, vivants et morts, chaque côté de la ligne marquée est comparè aux différents horizons du sol avoisinant dont les profondeurs de prélèvement sont variables en fonction des sites. les mensurations du nid sont faites, les matériaux de construction du nid sont prélevés, et la loge royale est décri te.

4. Pour les peuplements hypogés, les prélèvements se font à trois niveaux au niveau de la litière où se situent des zones de récolte à la fois des humivores, des xylophages et des champignonnistes; dans la couche de l'humus; dans les horizons plus profonds 10 à 30 cm.

Les techniques de prélèvement cOmprennent les "carrés" de fouille et les carottes. Pour les "carrés" de fouille, on découpe dans le sol un parallélélipède de 70 x 70 cm de côté (0,50m') sur 50 cm de profondeur en laissant un espace de 20 à 30 cm de chaque côté. Pour le deuxième type de prélèvement, on découpe dans le sol des "carot tes" de 10 cm de diamètre et de 50 cm de long à l'aide d'une tarière.

Au niveau des "carrés" de fouille, le nombre et la répartition des nids et meules sont marqués sur un plan le comptage des termites se fait soit par tri manuel sur le terrain soit par lavage de chaque horizon sur un tamis de maille de 0,3 mm et fixation du résidu au formol à 3 pour cent pour étude au laboratoire sous loupe binoculaire.

L'essairrage

Pour connaître le mode et la période d'essaimage, deux techniques sont prises en compte pour les études de terrain: le piège lumineux et le repérage et le marquage des nids qu'on doi t visi ter le plus régu­ 1ièrement possible.

122 LES FORMICIDAE TERRICOLES DE FORET OMBROPHILE METHODOLOGIE, RESULTATS OBTENUS

Tienoko Diamndé 1

"Les Formicidae terricoles de forêt ombrophile"constituent l'un des thèmes du Projet Taï, programme pluridisciplinaire de recherche, conçu par le Ministère de la Recherche Scientifique de Côte d'Ivoire pour l'étude complète de la forêt climacique de Taï et de l'impact des activités humaines sur ce milieu originel, en vue de dégager à terme quelques règles de gestion rationnelle de l'environnement.

Les méthodes d'étude utilisées font appel à des techniques qualitatives (pièges alimentaires, lumi­ neux, transects à faible largeur, celle d'une houe) et quantitatives (relevés par quadrats). Ces méthodes ont été mises au point dans une forêt semblable à celle de Taï et située près de l'Université d'Abidjan: la forêt de Téké. L'appl icat ion s'est fai te ensui te à la forêt de Taï.

Les données recueillies permettent d'envisager: l'inventaire de la faune myrmécologique ; l'évalua­ tion des paramètres du peuplement forestier originel et les modifications dues à la déforestation i l'évolution de quelques zones anthropisées vers le milieu originel; la mise en lumière des stratégies de cohabitation dans les communautés plurispécifiques.

RESlLTATS

Ainsi, concrètement, après une fouille de 2.500 m'environ, 120 espèces ont pu être récoltées. Elles appartiennent à 80 pour cent aux sous-famillesdes Ponerinae et des Myrmicinae. Le nombre de nids à l'hectare varie entre 3.000 et 3.500, avec des populations faibles de 30 à 2.500 individus en moyenne par nid; il en résulte des effectifs à l'hectare oscillant entre 1 et 3 millions (sans les Dorylinae). Les biomasses spécifiques sont faibles (800 g!ha pour Paltothyreus tarsatus, 33 g!ha pour Tetramorium acaxium) .

La déforestation réduit provisoirement le spectre faunistique au tiers de sa richesse spécifique initiale. Les espèces allogènes venues du secteur mésophile plus au nord profitent des voies d'accès à la forêt ombrophi le méridionale pour s'installer progressivement à côté d'espèces autochtones. Selon le degré d'ouverture et l'âge de la friche, les espèces allogènes d'abord savanicoles et hél iophi les cèdent la place à des allogènes sylvicoles. L'élimination de cette faune allogène doit se situer vers dix ans dans le processus d'évolution du milieu anthropisé vers la forêt initiale.

La richesse spécifique et la forte densité de nids observées en forêt ombrophile s'expliquent par une répartition judicieuse des fourmis dans l'espace (vertical et horizontal), dans le temps et par une diversification des régimes alimentaires assurant à chaque espèce un certain isolement trophique. Par suite, la compétition est faible entre espèces occupant la même strate et pratiquement nulle d'une strate à l'autre.

Directeur, Institut d'Entomologie médicale et vétérinaire de Bouaké, 01-BP 2597, Bouaké 01, Côte d'Ivoire. Empêché par d'autres obligations, l'auteur n'a pu présenter sa communication lors de la réunion. Ce texte en est le résumé.

123 Dans les friches, en revanche, la compétition se manifeste entre espèces allogènes et autochtones et entre arboricoles et terricoles.

Au total, en détruisant la forêt ombrophile climacique, l'homme installe de nouveaux milieux écolo­ giques proches par leur faune, leur flore et leur fonctionnement de ceux du secteur mésophi le, septen­ t r ional.

BIBLIOGRAPHI E

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124 UN CAMPEMENT BAOULE, REGION DE TAI, SUD-OUEST DE LA COTE D'IVOIRE

Anneke de Rouw 1

INTR:O.CTIO'l

Le vieux Sangbé et sa famille se sont installés à Taï en 1966. Ils étaient la deuxième famille baoulé, un peuple de la savane, à immigrer dans cet te zone forest ière. Les Oubi, autochtones, leur ont donné 15 ha de forêt pour convnencer des plantations. Plus tard, ils ont reçu d'autres parcelles de forêt pour planter des cultures vivrières et des cultures de rente. Les plus anciennes plantations qui restent en production datent de 1969.

Le campement Sangbékro abrite le vieux Sangbé, sa femme, quatre de leurs fils et leurs cinq femmes, enfin trois manoeuvres burkinabé. Ils cultivent 25 ha de productions vivrières, de caféiers et de cacaoyers.

Depuis 1966, les nombreux immigrés sont venus planter caféiers et cacaoyers à Taï. Les Baoulé préfèrent vivre dans les petits campements en brousse plutat qu'au village. Ils emploient souvent des manoeuvres baoulé venus du même village d'origine qui viennent travailler sur les plantations des parents immigrés. La plupart d'entre eux cherchent ensui te à commencer leur propre exploi tat ion. Bien que les Oubi cèdent maintenant moins facilement leur forêt, et que les nouveaux immigrés sont ainsi obligés de se contenter des quelques hectares donnés à la fois, les problèmes interethniques ne sont pas très sensi­ bles. Lors de son entret ien, le vieux Sangbé a bien di t qu'i 1 préfère rester à Taï tant que les Oubi sont d'accord.

LE cya...E ULn.n:: VIVRIERE-JAQ-ERE-QLn.n:: VIVRIERE (f igure 1)

Pendant la saison sèche de janvier-février, les petites surfaces, situées d'habitude près du campement, sont défrichées et brûlées. Les Baoulé, originaires de la savane, ont plutat l'habi tude de tuer les arbres en mettant le feu à la base du tronc, que de les abattre comme font les gens de la forêt. On peut reconnaître un champ baoulé tout de suite par ses nombreux arbres morts brûlés sur pied.

Il faut un sol propre pour y confect ionner les but tes d'igname. Toute la végétat ion est découpée, empilée autour des pieds des grands arbres et brûlée, afin de faciliter le travail du sol (mars-avril). Une fois la saison pluvieuse bien avancée (avril-mai), l'igname est plantée dans les buttes. Un mois plus tard, les cultures associées, comme le gombo, y sont adjointes. Dans le cas où le taro, par exemple, se développe trop vite, on enlève ses feuilles pour ne pas qu'il gène l'igname.

Les cul tures associées, essent iellement des légumes, sont récol tées au fur et à mesure qu'i ls sont mûrs et qu'on en a besoin. Trois mois après avoir planté l'igname, le champ est sarclé. En août, à la fin de la grande saison des pluies, la femme plante du manioc, puis elle ne revient que pour déterrer les ignames. La récol te d'igname se fai t selon la variété et l'urgence, et peut s'étendre de septembre jusqu'à mars de l'année suivante. Le taro et les tubercules de manioc sont enlevés selon les besoins. On les consomme généralement en période de soudure.

Centre néerlamJais, B.P. V.51. Abidjan, Côte d'Ivoire.

125 N ,g1g Ig8C 1981 ,gB2 Ig83 1984 IgB~ 0> JACHERE CULTURE CULTURE JACHERE JACHERE CULTURE JACHERE

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fig.2

Fig. 1 Evolution du cycle cultural sur 5 ans pour les cultures vivrières Fig. 2 Evolution du cycle cultural sur 5 ans pour les plantations de café et cacao Il arrive que la femme reprenne le même champ l'ann~e suivante pour y cultiver à nouveau l'igname en assocIation avec des légumes. Mais les gens de Sangbékro préfèrent planter leur culture principale sur un sol "frais" comme ils disent. Puis le champ est abandonné en jachère qui dure de trois à dix ans.

La production dans l'exploitation 'Sangbékro' a été suivie de près par un étudiant de l'Université agronomique de Wageningen dans le cadre de son stage. Toutes les données des tableaux sont de lui. La figure 1 montre l'évolution d'un champ vivrier de 1979 à 1985. Nous avons traversé ce champ lors de notre visite. En 1984, l'étudiant de Vries a pu déterminer les densités des cultures et la récolte d'igname (Tableau 1).

Densités des cultures vivrières (pieds/ha) sur deux champs, Sangbékro (une jachère auparavant de lTDins de dix ans). De Vries, 1984.

Charrp A Charrp B Récol te A Récol te B

Superficie 6600 m' 4550 m'

Cul ture

Igname précoce 268 240 7.5 t/ha 6.0 t/ha Igname tardive 8 36

Taro 204 300 MIniac 96 4 Palmier à hui le 3

Gctrbo 44 40 Aubergine 18 8 Mlïs 80 56 Tamte 2 2 Cucumeropsis sp. 28

~ "IIOI~" - Q.JLTIffS VIVRI~ ET Q.JLl1J~ PE::F~N\ES

Première année

Généralement, les hommes commencent à défricher plus tôt dans la saison s'il s'agit d'une forêt vierge (dite 'noire') ou une vieille forêt secondaire. Le travail nécessaire pour arriver à une terre nue est très important. Les grands arbres brûlés sur pied perdent leurs feuilles. Les premières cultures sont encore des cultures vivrières: igname, taro, légumes. Cela ne demande pas beaucoup de travail de semer ou de planter des caféiers et cacaoyers à côté des buttes. Les jeunes caféiers ou cacaoyers bénéficient de trois sarclages, le premier effectué en juin, le deuxième lors de la récol te des variétés d'ignames précoces en septembre, le troisième en décembre lors de la récolte des ignames à cycle long.

Deuxiême année

Il ne reste que quelques pieds de taro. Une deuxième année d'ignames peut se faire en l'absence des jeunes caféiers et cacaoyers. De Vries (1984) a rapporté une telle pratique chez les Sangbé. Sinon, les caféiers et cacaoyers peuvent être interplantés avec des bananes, du taro à nouveau. On tolère quelques pieds d'arbres spontanés à croissance rapide (parasolier, Trema guineensis. Macaranga spp.) pour fournir de l'ombre à la jeune plantation. Là où le caféier ou le cacaoyer sont morts, on replante.

Troisiême année

Le champ se transforme petit à petit en une plantation arborée. Le taro reste comme culture annuelle. Les trous de plantation sont comblés avec les petits caféiers ou cacaoyers.

127 Quatrième année et années suivantes

Quand le canopée se ferme, les cultures vivrières ne sont plus possibles. Quelques palmiers à huile (vin de palme, noix) et les arbres fruitiers (avocatiers, Cirrus spp.) , puis les arbres léguminoses (Albizia spp.) sont tolérés dans une plantation adulte.

Pendant notre visite, nous avons traversé de nombreuses plantations de café et de cacao, pas toujours en bon état. Après avoir replanté plusieurs fois au même endroit quand les caféiers et les cacaoyers meurent, les gens abandonnent la parcelle qui retombe à l'état de brousse. La végétation, au bord de notre route, formait une mosaïque de cultures de tous âges mélangées à des arbres secondaires typiques de la brousse. Là où apparaissent les plus mauvaises herbes, graminées, cypéracées et composées, on peut dire que l'endroit a été très souvent nettoyé, sans qu'une culture arborée ait pu convenablement s'installer. En outre, plus les graminées - étant adventices - sont envahissantes, plus il est difficile d'y cultiver les arbres.

De Vries a mesuré deux de ces types de champs, lors de la première année de culture (Tableau 2). La figure 2 montre l'évolution des cultures de rente d'un champ de 1979 à 1985.

TABLEAU 2

Densités des cultures vivrières (pieds/ha) sur deux champs, Sangbékro (succédant à la forêt primaire). De Vries, 1984.

Champ C Champ D

Superficie 2200 m' 3500 m'

Culture

Igname précoce Igname tardive

Taro M3ngue Banane

GaTbo Aubergine Piment Ananas

Toma t e Cucumeropsis sp.

BIBLIOGRAPHIE

DE VRIES, O., 1984. La cul ture d'igname des Bawlés dans le sud-ouest de la Côte d'Ivoire (Taï). Rapport de stage, Centre néerlandais, Abidjan et Université agronomique de Wageningen. 47 p. + annexes.

128 l 1 ETAT SAN 1TAI RE ŒS Q.LTURES A SAl'KEEI

Lors de la visite à la famille Sangbé, les participants de l'atelier ont pu constater que les cultures sont très diversifiées. Sur le plan entomologique, l'état sanitaire de celles-ci est à peu près satisfaisant, bien que l'on y retrouve beaucoup de ravageurs classiques.

A titre d'exemples, on peut citer Aspidiella hartii (Coccidae) et quelques ravageurs secondaires sur les ignames. Sur les gombos, plus attaqués, on trouve des défoliateurs tels que Sylepta derogata (Pyral idae), Podagrica decolorata et Nisotra dalmanni (Chrysomel idae), les piqueurs de gra i nes Dysdercus spp. (Pyrrhocor idae), ai ns i que Alcidodes brevirostris (Cur­ culionidae), dont les larves se développent dans les tiges.

Sur le riz, par ailleurs peu cultivé chez les baoulés, il y a peu de dégâts en champ causés par les insect es ; ceux-c i sont surt ou t dûs aux borers Chilo spp. (Pyral idae), Sesamia calamistis (Noctuidae), et Diopsis spp. (Diopsidae).

Les cacaoyers sont attaqués par de nombreuses espèces d'insectes, des défoliateurs tels que Anomis leona (Noctuidae) dont l'incidence est négligeable, des piqueurs parmi lesquels on a recensé treize espèces de cochenilles, des Helopeltis spp. (Miridae). Mais c'est surtout Distantiella theobromae (Miridae) qui cause les dég.'lts les plus importants et qui just if ie l'application régulière d'insecticides. la famille Sangbé utilise environ 20 litres d'Endrin par an pour l'ensemble de ses plantations de cacaoyers.

Sur les caféiers, il y a des borers et surtout Stephanoderes hampei, le scolyte des grains, dont l'incidence est limitée par la récolte précoce des cerises.

Compte tenu de l'incidence possible des déprédateurs sur leurs récoltes futures, les planteurs de Sangbékro met tent en cul ture des quant i tés suff isantes de chaque plante, faisant ainsi la "part des insectes".

Visite des cultures à Sangbékro au cours de l'Atelier

Chez les planteurs baoulé à Sangbékro, près de Taï

129

RECOLTE, ELEVAGE, CONSERVATION ET MONTAGE DES HYMENOPTERES PARASITES POUR ETUDES MORPHOLOGIQUES

Juste Boussienguet 1

ROm..TE ET ELEVA(LS

Leur aspect général, leur couleur souvent métall ique, leurs antennes géniculées et leurs déplacements habituellement saltatoires permettent d'identifier assez aisément les hyménoptères parasites dans leur milieu naturel. Ils peuvent ainsi être récoltés directement sur le terrain, de préférence par temps clair et non venté. La capture sera réalisée de préférence avec un aspirateur, sur les plantes en fleurs ou près des lieux de ponte, c'est-à-dire parmi les colonies de cocheni lles, de pucerons, etc...

Toutefois, le matériel qui a le plus de valeur biologique est celui qui est obtenu au laboratoIre, à partIr d'hôtes divers mis en observation dans des récipients (tubes ou boîtes) convenablement étiquetés et ajourés. Beaucoup de problèmes taxonomiques et biologiques ont été résolus en procédant de cet te façon. En pratique, on note le nom de l'hôte et son stade de développement, l'époque et le lieu de récol te, le nom du récolteur. C'est l'élevage de spécimens (hôtes) isolés qui donne les résul tats les plus fiables et les plus faci lement exploi tables, s'agissant notamment des relations trophiques.

En général, les condi tions thermo-hygrométriques du laboratoire sont tout à fai t favorables à l'émergence des parasites élevés, mais il peut être avantageux d'en accélérer le processus en utilisant une étuve thermostatée et ventilée qui permet d'entretenir une température constante d'incubation de 27 à 28°C. Quoiqu'il en soit, il est possible d'utiliser le phototropisme positif des chalcidiens au moment du transvasement d'un récipient à l'autre ou quand on examine une cage d'élevage.

Quand plusieurs parasi tes sont obtenus d'un seul hôte, il est possible d'obtenir une première appréciation du type de parasitisme par l'époque d'éclosion: les parasites secondaires (hyperparasites) éclosent généralement un peu plus tardivement que les parasites primaires. Un examen plus détaillé des dépouilles de l'hôte (après chauffage dans la potasse à 10 pour cent) et des exuvies du parasite permet généralement de se prononcer sur le type de parasitisme de façon plus formelle.

CD6ERVATIGl ET MNTAŒ

Les spécimens d'une taille de 2 à 3 mm peuvent être conservés à sec dans des tubes à essai isolés bouchés avec un tampon de coton pour les immobiliser. Les spécimens minuscules ou de dimensions moyennes peuvent être conservés dans des tubes à essai en présence d'un liquide conservateur (alcool à 60° plus traces de glycérine). Toutefois, il est souvent souhai table de conserver quelques spécimens secs dans sa collec­ tion de référence, les insectes conservés en alcool perdant rapidement leur coloration d'origine. Dans ce cas, les insectes sont collés sur de petits rectangles ou triangles de papier fort ou de carton à l'aide d'une colle spéciale (Sindetikon) ou du baume du Canada. Les individus ainsi conservés doivent être collés sur le côté, les ai les et les antennes étalées (autant que faire se peut).

Pour les déterminations et les dessins, il est souvent nécessaire de faire des préparations micro­ scopiques. Les préparat ions sont réal i sées selon les techniques microscopiques habi tuelles (les ai les,

Laboratoire de Zoologie et de Lutte biologique, Faculté des Sciences, Université NatIonale du Gabon, BP 1886, Libreville, Gabon.

131 antennes, pattes, etc.•• détachées sont déshydratées par passage dans des alcools de degrés croissants, éclaircies au xylol, puis montées dans le baume.

Des préparations temporaires peuvent être obtenues en montant le matériel dans la glycérine.

L'étude des scléri tes thoraciques et abdominaux nécessi te un trai tement à chaud à la potasse à 10 pour cent - pour les débarasser des muscles et des viscères - et, le cas échéant, un éclaircissement préalable à l'eau oxygénée (10 vol.).

ETlŒ ŒS LARVES

Les larves des parasi tes primaires et secondaires sont obtenues par dissection des specImens hôtes parasi tés - reconnaissables généralement à la décoloration noire du tégument - ou des momies. L'étude morphologique des larves du premier stade est réalisée de préférence en contraste de phase, à partir de préparations temporaires dans la glycérine. L'étude des stades larvaires plus âgés et donc moins fra­ giles nécessite un traitement particulier. La préparation de tels spécimens se fait en portant à 120°C pendant une heure les larves plongées dans un bain d'acide lactique faiblement coloré par quelques gouttes de noir chlorazol. Cette technique a l'avantage d'assurer en même temps la coloration de la cuticule et la destruction des tissus. En outre, elle évite les manipulations répétées nécessitées par la déshydratation des pièces, ces dernières pouvant être directement montées au baume du Canada, après un bref passage dans l' i sobutanol.

L'étude morphologique des larves nécessi te une at tent ion part icul ière dans l'examen du squelet te céphalique et des pièces buccales, de la segmentation, de l'appareil respiratoire (position, nombre, forme et dimensions des stigmates, itinéraires des tronc trachées, etc... ), de l'ornementation de la cut icule, etc...

La discrimination des différents stades larvaires nécessite l'examen des exuvies successives. Toutefois, l'étude des exuvies n'est pas toujours concluante. C'est pourquoi on recourt fréquemment à la comparaison de la taille des mandibules pour différencier les stades larvaires.

132 UTILISATION DES COCCINELLES PREDATRICES LOCALES POUR LA LUTTE CONTRE LA COCHENILLE AU CONGO

Antoine Kiyindou 1

PAIWoETŒS BIŒ

La cohorte d'entomophages s'attaquant en République populaire du Congo à la cochenille du manioc (Phena­ coccus manihoti Mat i le-Ferrero) est essentiellement composée de prédateurs polyphages. Parmi ces agents de contrôle biologique, deux coccinelles locales, Exochomus flaviventris Mader et Hyperaspis senegalensis hottentotta Mulsan s'observent régulièrement en grand nombre au cours de chaque saison sèche, au moment de la gradation du ravageur; on peut penser qu'elles jouent un rôle écologique important.

Nous avons entrepris depuis 1982 une étude des paramètres bioécologiques de ces deux coccinelles. Ce travail constitue un volet des programmes de lutte contre la cochenille du manioc au Congo. Au cours de cette étude, les paramètres suivants ont été étudiés dans les conditions du laboratoire:

Durée d'incubation des oeufs (E. flaviventris : 6,2 jours) (H. s. hottentotta : 6,5 jours)

Durée de développement de l'oeuf à l'adulte (E. flaviventris 40,8 jours) (H. s. hottentotta : 33,07 jours)

Temps de génération (E. flaviventris : 55,8 jours) (H. s. hottentot ta : 41,07 jours)

Longévité des femelles (E. flaviventris : 112,2 jours) (H. s. hottentotta : 172,3 jours)

Fécondité moyenne (E. flaviventris : 125,4 oeufs) (H. s. hottentot ta : 289,3 oeufs)

Capacité d'accroissement d'une population théorique (E. flaviventris : 0,05) (H. s. hottentotta : 0,07)

ETl..ΠlE ~IN

Une étude de terrain a été menée parallèlement à l'étude des variations chronologiques de l'abondance de la proie (Fabres, 1981). Ainsi, les fluctuations de densité des populations d'E. flaviventris et d'H.s. hottentotta ont été suivies dans un champ de manioc. Les méthodes suivantes ont été mises en pratique: dénombrement de tous les stades évolutifs de la cochenille sur 30 apex pris au hasard; dénombrement de tous les stades évolutifs des deux coccinelles présentes sur les colonies examinées; dénombrement des adultes des deux coccinelles récoltés sur pièges englués.

Laboratoire d'Entomologie Agricole, ORSTOM, BP 181, Brazzaville, Congo.

133 Les données obtenues ont permis le tracé du profil de gradation de la cochenille et des deux prédateurs (Fig. 1, Fabres et Kiyindou, 1985).

A 40

2.0

O~_..L:....:....:..::.:.:..:.:.:.:..:.:..:.:..:..:.:..::..:.:..:..~-=::~=:.:..~:..:...:..:.~.:.u::.:+~-T':":":':+";":';"~~ 40

o E. flaviventris

40 B

a H. senega/ensis

J J A s o N D

Figure 1. Profil de 9raclat ion de la cochenille Phenococcus manihoti (A) et des deux prédateurs (Fabres et Kiyindou, 1985) Les profils de gradation des deux coccinelles illustrent parfaitement les résultats de l'élevage au laboratoire. H.s. hottentotta augmente ses effectifs beaucoup plus rapidement que ne le fai t E. flavi­ ventris et son abondance est plus élevée (48 coccinelles dans la dernière semaIne d'octobre contre 39 pour E. flaviventris dans la troisième semaine de novembre). On remarque cependant que la présence d'E. flaviventris est plus constante dans les champs. La coccinelle apparaft au mois d'aoQt et reste rela­ tivement abondante jusqu'en fin décembre alors que H.s. hottentotta ne développe ses populations qu'au cours des mois d'octobre et novembre. Ainsi E. flaviventris peut se maintenir sur des populations du phytophage d'un niveau de densi té relativement faible et peut intervenir de façon précoce tout en déve­ loppant un potentiel de prédation plus faible que celui d'H.s. hottentotta. Cette dernière espèce est de ce point de vue la plus intéressante mais elle ne se développe qu'à partir de hauts niveaux de population de la cochenille sans pouvoir intervenir en début de gradation.

Il semble d'après ce qui précède qu'à présent, il devient possible d'intervenir contre la cochenille vu les caractéristiques bioécologiques et la complémentarité d'action des coccinelles locales. La seule difficulté reste cependant celui de leur intervention tardive par rapport à la pullulation de la proie. Pour contourner cet te di f f icu 1té, nous pensons aux lâchers i nondat i fs de coccinelles élevées au labora­ toire.

BlBLIOGRAPH 1E

FABRES, G. ; KIYINDOU, A., 1985. "Comparaison du potentiel biotique de deux coccinelles (Exochomus flaviventris et Hyperaspis senegalensis hottentotta, Col. coccinellidae) prédatrices de Phenococcus manihoti (Hom. Pseudococcidae) au Congo". Acta Oecologica Applicata (sous presse). KIYINDOU, A., 1983. Etude des paramètres biologiques et comportementaux d'Hyperaspis sp. (col. coccinel­ lidae) prédateur exotique de la cocheni Ile du manioc Phenacoccus man i hot i (Hom. Pseudococcidae) en République populaire du Congo. ORSTOM, Brazzaville, 36 p. ronéo.

135

LES COLLECTIONS DE REFERENCE, LES COLLECTIONS NATIONALES, LES IDENTIFICATIONS D'INSECTES

Guy Couturier 1

IlEŒSSITE ET LIMITES ŒS (X)LLECTICffi D'INSECTES

Généralités

Dans tous les cas d'études, l'entomologiste, qu'il travaille sur les plantes cultivées, qu'il soit écologiste ou forestier, aura intérêt à constituer une collection de référence pérenne, correcte et constituée d'un matériel identifié avec certitude et préparé avec soin. Nous reviendrons sur ces deux derniers points.

L'intérêt en est multiple. La collection de référence est avant tout un outil de travail auquel l'entomologiste se référera souvent au fur et à mesure de ses collectes. A ce propos, il faut souligner ici l'intérêt qu'il y a à encourager les collectes par les étudiants et les amateurs, et celà, non seulement pour les insectes spectaculaires tels que les Lépidoptères Rhopalocères et autres grands coléoptères, mais aussi parmi les autres ordres et familles d'insectes plus "discrets" mais qui compren­ nent souvent des espèces déprédatrices ou auxiliaires des cultures, ou encore présentant un intérêt biologique et écologique certain. On notera souvent à ce propos la rareté dans les collections générales des Diptères, Hyménoptères et autres "pet i ts insectes".

Pour en revenir à l'intérêt général des collections, je dirai qu'elles sont souvent aussi le témoignage d'un travail mené à son terme. Elles ont de plus une utilisation didactique très importante. Collection d'enseignement de la systématique, sur les ravageurs des cultures, sur les séquences écologi­ ques. Ces collections doivent être établies sur des critères de présentation rigoureux.

Ceci nous amène à parler des collections nationales qui en Afrique sont encore souvent peu importan­ tes, bien souvent pour des raisons historiques. Les collections que constituent actuellement les chercheurs africains prennent une valeur de patrimoine culturel et scientifique et doivent être déjà considérées comme des collections nationales auxquelles le plus grand soin devra être apporté afin d'assurer leur sauvegarde pour l'avenir.

On peut signaler ici, pour mémoire, l'initiative intéressante de l'Insect Identification and Bene­ ficiaI Insect Introduction Institute, qui distribue aux universités et stations agronomiques américaines des collections de référence d'insectes ravageurs dont la présence n'a pas encore été enregistrée aux Etats-Unis. Ceci afin de contribuer à prévenir l'installation d'espèces exotiques de ravageurs (Knutson et Lacey, 1984). C'est évidemment une entreprise de grande envergure qui nécessi te une organisation et des moyens considérables.

Cbject ifs de 1 '~TCM

Pour ce qui concerne l'ORSTO'vI, les systématiciens de l'Institut français de Recherche en Coopération, lors de leur réunion des 16 et 17 septembre 1985, se sont, je cite, "mis d'accord sur la nécessité de laisser, et de retourner, des collections les plus complètes possible dans les pays hôtes.

Centre ORSTOM de Bondy, 70-74 route d'Aulnay, 93140 Bondy, France.

137 "la constitution des collections s'accompagne du dépôt des types 1 nouvellement décrits dans les grands musées dont les collections sont internationalement reconnues. le devenir de ces collections a été longuement évoqué. l'assemblée souhaite donc:

"1 - sensibiliser les pays hôtes afin qu'ils prennent conscience de l'intérêt des collections consti­ tuées par les chercheurs ORSTOM , et qu'ils se donnent les moyens permettant de les maintenir en bon état de conserva t ion. 1l es t donc important d'associer étroi tement le pays hôte il tout nouvel inventaire ;

"2 - participer à la formation de personnel local capable de gérer, d'entretenir et de maintenir ces collections. Cette action de l'ORSTOM devrait être une priorité clairement affichée dans tous les programmes d'inventaire. Il est envisagé de proposer l'aide des spécialistes ORSTOM pour la gestion des collections nationales des divers pays hôtes;

"3 - inciter nos partenaires à se doter de l'infrastructure nécessaire il la conservation des collections, et participer à des études de muséologie;

"4 - attirer l'attention des partenaires sur l'importance des collections vivantes et des jardins botani- ques ... ".

Voilà donc, brièvement exposée, la position des systématiciens de l'üRSTOM. A propos de la dernière recommandation, il convient de signaler que cette réunion regroupait des systématiciens de nombreuses disciplines: botanistes, océanographes, phytopathologistes, entomologistes médicaux et agricoles, entre autres.

Ces considérations sur les collections nationales africaines m'amènent à aborder la question des ident i f ica t ions.

LE PfU3I.lM: ŒS 1lENT1FICATI()Il5

Généralités

Nous savons tous qu'une grande rigueur est nécessa i re dans l' ident i f ica t i on au niveau spéc if ique des insectes sur lesquels nous travaillons et une collection de référence, si riche soit-elle, ne permet que très rarement au non spécialiste de réaliser une identification certaine.

Celà peut entrafner de très regrettables confusions telle que celle de Coelenomenodera elaeidis et C. minuta (Hispinae du palmier à huile) et révélée il y a quelques années par Desmier de Chenon, et celle plus récemment découverte par Etienne (1984) au Sénégal à propos des Cecidomyiidae du mil.

On devra donc faire identifier son matériel par des spécialistes. Il faut savoir d'emblée que l'identification d'un insecte au niveau spécifique peut être extrêmement délicate et demander plusieurs jours de recherches et de travail. Si l'espèce est nouvelle pour la science, il faudra bien souvent attendre plusieurs années avant que le spécialiste ne la décrive!

les échantillons peuvent être adressés:

soit directement à un systématicien avec qui des contacts personnels ont pu être établis et qui est d'accord pour étudier dans des délais raisonnables le matériel et pour un partage équi table des échant ilIons

soit dans un grand musée spécialisé dans la faune africaine (British Museum of Natural History et son corollaire le Commonwealth Institute of Entomology, Muséum National d'Histoire Naturelle de Paris, Musée royal de l'Afrique Centrale de Tervuren et Institut des Sciences Naturelles de Bruxelles, etc...), ceci toujours après contacts préalables;

soit aussi par l'intermédiaire de services de faunistique spécialisés dont l'importance, les possi­ bilités et l'efficacité sont très variables (Centre d'identification de l'OIlB à Genève, ORSTOM à Bondy et à Paris, ClRAD à Montpellier, par exemple).

le matériel envoyé devra toujours être de grande qualité et sélectionné en fonction des besoins réels de la recherche. Il faut savoir que les systématiciens sont peu nombreux en rapport aux demandes

Il faut savoir que l'holotype, qui seul a servi à décrire une espèce nouvelle pour la science, doit être considéré comme irremplaçable. Bien souvent les travaux d'identification nécessitent de re­ chercher pour étude du matériel vieux de plusieurs dizaines d'années, voire beaucoup plus, et d'en obtenir la communication par le Musée qui a la charge de sa conservation.

138 des biologistes, écologistes... et que dans bien des cas, il n'existe même pas de spécialistes actuelle­ ment en mesure d'identifier bon nombre de groupes d'insectes. Les systématiciens sont donc bien souvent submergés de demandes dont, d'ailleurs, ils ne perçoivent pas toujours l'intérêt, alors qu'ils ont eux­ mêmes leur propre programme de recherche. C'est donc en instaurant une véritable collaboration que les mei lieurs résul ta t s seront obtenus pour le plus grand prof i t réciproque, l'intéressement au programme et éventuellement la publication de résultats en commun pouvant être l'aboutissement idéal de cette collabo­ ration.

Pour l'Amérique du sud et l'Amérique centrale, Lattin et Knutson (1982) ont effectué une enquête sur les possibilités et les besoins en taxonomie auprès de 400 instituts et spécialistes. Il en ressort que les difficultés à obtenir des services d'identification sont spécialement ressenties au niveau de la lut te contre les ravageurs et que c'est dans les pays en voie de développement que l'écart entre les besoins et les moyens est le plus critique. Il est certain que dans les régions où nous travaillons le problème est le même et que, sans un effort de centralisation des moyens et des besoins, la situation ira en s'aggravant dans les années à venir.

la transmission du rratériel

Lorsque le contact a été établi, on devra tenir compte, autant que possible, des souhaits du systémati­ cien en matière de présentation. Le matériel est en effet parfois, et ceci selon les groupes, préféré préparé sur épingle, ou encore sur couctle, ou en alcool...

On peut se demander s'il est opportun lorsque les échantillons sont en nombre limité, de garder au laboratoire quelques individus de référence. Cette pratique a l'avantage de sauvegarder des individus en cas de non retour du matériel; en revanche, elle peut avoir pour inconvénient d'avoir conservé involon­ tairement des individus d'espèces différentes mais très semblables morphologiquement. Nous optons per­ sonnellement pour la transmission de la totalité des individus, s'il y a la moindre risque de confusion d'espèces dans le lot d'insectes à identifier.

BlBLIOGRAPHIE

ETIENNE, J., 1984. Laboratoire d'entomologie de Djibelor, rapport d'acti vité 198]. ISAA, Mini stère de la recherche scientifique et technique du Sénégal, 87p. multigr. KNJTSON, L. ; LACEY, M.A., 1984. "Référence collections for identification of irrvnigrant pest insects", FAD Plant Proto Bull., 32(3), pp.95-103. LADIN, J.O. ; KNJTSON, L., 1982. "Taxonomic information services on arthropods of importance to human wei fare in Central and South America", FAD Plant Proc. Bull., 30(1), pp.9-12. ORSTOM, 1985. La systématique et l'DRSTDM. Compte rendu de la réunion des systématiciens. 16-17 septem­ bre 1985 a Bondy. ORSTOM, Paris, 31p. multigr.

139 Chasse aux insectes dans la forêt de Taï au cours de l'Atelier

Les participants à l'Atelier à l'issue de la réunion, à l' Institut

140 SEC T ION l V

ANNEXES

141

ANNEXE 1

LISTE DES PARTICIPANTS

1. PAYS ΠLA R::GI

BENIN Kouahou Foua-Bi Ecole nationale supérieure d'agronomie Ayi té Marcel Baglo 08 B.P. 35 Ecole nonnale supérieure Abidjan 08 Université nationale du Bénin B.P. 03-1831 Larrbert Kanga Cotonou Division de la protection du reboisement 08 B.P. 33 Abidjan 08

Jean Launay Daniel Diangana Direction de l'ORSTCM en Côte d'Ivoire Centre technique forestier tropicai 08 B.P. 2002 B.P. 764 Abidjan 08 Pointe-Noire Jean-Marie Leroux Antoine Kiyindou Station d'Ecologie de Lamto Centre ORSTCM B.P. 28 B.P. 181 N'Douci Brazzaville Bernard Mallet Division de la protection du reboisement COTE D' llA>lR:: Centre technique forestier tropical 08 B.P. 33 Laurent Ake Assi Abidjan 08 Centre national de Floristique 04 B.P. 322 Anneke de Rouw Abidjan 04 Centre de recherches néerlandais cio ORSTCM Kouassi Bekon B.P. V.51 Ecole nationale supérieure d'agronomie Abidjan 08 B.P. 35 Abidjan 08 Yaya Sangaré Directeur Coulibaly Dognenenan Institut d'Ecologie tropicale Ministère de l'Education nationale 08 B.P. 109 et de la Recherche scientifique Abidjan 08 B.P. V34 Abidjan Martine Tahoux Institut d'Ecologie tropicale Henri Dosso 08 B.P. 109 Secrétaire technique du Comité MAS Abidjan 08 Institut d'Ecologie tropicale 08 B.P. 109 Abidjan 08 Nadoclo Tuo Division de la protection du reboisement Gi Iles Fédiere Centre technique forestier tropical Centre ORSTCM d'Adiopodoumé 08 B.P. 33 B.P. V.51 Abidjan 08 Abidjan

143 COTE D'IVOIRE (suite)

N'gassoua Viviane Abbé Constance Agbogba Tanoh Assohou Département de Biologie animale Kone Yefagofye Laboratoire d'Ecologie Hine Kouakou Faculté des Sciences Koffi Placide N'Guessan Dakar Kouassi Eugène Yao

Etudiants, Ecole nationale supérieure TOro d'AgronOTIie 08 B.P. 35 Sanda Kolla Abidjan 08 Direction de la protection des végétaux B.P. 1263 Laœ-cacavely

Juste Lié Boussienguet ZAlRE Département de Biologie Faculté des Sciences Mino-Kahozi Kalibu Université nationale el Hadj Projet MAB/ZAIRE Onar Bongo B.P. 12.348 B.P. 1886 Kinshasa 1 Libreville Muzemba M'Pembele Paul Posso Projet MAB/ZAIRE Institut de recherches en B.P. 12.348 Ecologie tropicale Kinshasa 1 B.P.13.354 Libreville II. AUTRES REGI(lIIS

REPlI3Lla.E OC G..JI~

Bakary Coulibaly Division de l'Environnement Guy Couturier ICCRDG/DGRST Centre ORSTCM B.P. 561 70-74 Route d'Aulnay Conakry 93140 Bondy

Yves Gillon REPlI3L 1a.E ŒNT1W'RlCAlr-.E Département B- Milieux et Sociétés Direction générale de l'ORSTûM Eugène Kainé 213 rue Lafayette Faculté des Sciences 75480 Paris Cedex 10 Université de Bangui B.P. 908 Bangui 111 . (R;IINlSAT1(lIIS I~TICNtILES

Christophe Lah-Saraga Malcolm Hadley Institut supérieur de Développement Division des Sciences écologiques rural de M'Baiki Unesco Université de Bangui 7 place de Fontenoy B.P. 909 75700 Paris Bangui France

144 ANNEXE 2

PROGRAMME DE L'ATELIER

SPM:DI 23 ~ et DIMIIo/IOE 24 l'VIIEM3RE 1985

Arrivée à Abidjan des participants Accueil et installation des participants à l'hôtel Hamanieh par M. Tahoux.

LlNlI 25 ~

Matin à l'Institut d'Ecologie tropicale

Allocution de Monsieur le Directeur de l'Institut d'Ecologie tropicale Exposé de Monsieur le Secrétaire Technique du MAS en Côte d'Ivoire Exposé introductif par Monsieur le représentant de l'Unesco Ouverture de l'atelier par Monsieur de représentant du Ministère de l'Education nationale et de la Recherche scientifique.

Après-midi

Exposés techniques à l'Institut d'Ecologie tropicale:

Problématique et évolution de la recherche scientifique en Côte d'Ivoire par Coulibaly Dognenenan, directeur de la Programmation et du financement de la recherche. Les recherches entomologiques dans le cadre du projet MAS au Gabon par P. Posso. L'entomologie en République centrafricaine par E. Kaine. Le service de la protection des végétaux au Togo par Kolla Sanda.

Les exposés ont été suivis d'une discussion.

MI'\RlI 26 ~

Toute la journée à l'Ecole Nationale Supérieure d'Agronomie d'Abidjan.

Matin

Visite des plantations et exposés sur la biologie et la lutte contre les ravageurs des cultures visitées sous la conduite de K. Foua-Bi et M. Bekon.

145 Après-midi :

Le laboratoire d'Entomologie: accès aux collections. Exposés Les ravageurs de l'igname, par K. Foua-Bi Les insectes ennemis des denrées stockées en zone forestière, par M. Bekon Discussion

~I 27 t-oVEM3RE

Matin

Visi te des plantations expérimentales du CTFT à Yapo et exposé sur les problèmes phytosani taires dans les plantations forestières par B. Mallet et L. Kanga.

Après-midi

Visite du Centre national de Floristique, sous la conduite de son Directeur, L. Ake Assi.

JElDI 28 l'OJEMH:

Matin au Centre ORSTCM d'Adiopodouré.

Visi te du laboratoi re d'entomov i rologie de l 'ORSTCM et exposé sur les recherches en cours, par G. Fédiere. Interventions de C. Fauquet, sur la vection de la mosaïque du manioc, et A. Pollet, sur les insectes des denrées stockées. Visite de la collection d'insectes du laboratoire sous la conduite de G. Fédiere. Présentation des activités de l'ORSTOM, par J.-C. Launay, Directeur.

Après~idi

Les collections de référence, les collections nationales, rôle, intérêt, limites, par G. Couturier. Visite des plantations expérimentales de manioc de l'OR5TOM.

VEJllHDI 29 tO.IEMH:

Matin à l'Institut d'Ecologie tropicale.

Exposés

La niche trophique des coléoptères Cerambycidae dans la région de Lanto, par J.~. Leroux. Méthodologie d'étude des paramèt res biologiques et du complexe entomophage d'une cocheni Ile, par J. Boussienguet. Discussion - débat.

146 Aprês~idi à l'Institut d'Ecologie tropicale.

Conférence de Y. Gillon:

Distribution et caractéristiques biocéonotiques des forêts sempervirentes. Projection des films :

"Taï, patrimoine scientifique mondial", réalisé par G. Keita, produit par le Ministère de l'Education nationale et de la Recherche scientifique de Côte d'Ivoire;

"La cendre et la vie", réalisé par A. Devèz, produit par le CNRS/France.

Visite du 2èrre Salon de Côte d'Ivoire de l'invention et de l'innovation.

DltwWIO-E 1 DEŒM3RE

Voyage Abidjan-Taï

LlNJI 2 DEŒM3RE

Matin à la Station d'Ecologie

Historique de l'aménagement du sud-ouest de la Côte d'Ivoire et processus de transformation de la Société, par M. Tahoux. Présentat ion de la Stat ion d'Ecologie, résul tats obtenus et programmes développés dans le cadre du Projet Taï, par H. Dosso. L'étude des tenmites dans le programme sur l'évolution des sols, par Y. Sangaré.

Aprês~idi

Les recherches en entomologie générale à Taï: processus de transformation du peuplement lié à la mise en culture, résultats et méthodes de collecte, par G. Couturier.

Ml'lR>I 3 ŒŒM3RE

Matin - Visite des plantations d'une famille d'immigrants baoulés.

Aprês~idi

Les techniques d'étude des hyménoptères parasi tes appl iquées il la lut te biologique, par J. Boussienguet.

147 M:JUIDI 4 DEŒMH::

Matin - Circuit en forêt primaire dans le Parc national et collecte d'insectes.

Après-midi

Les méthodes de préparation des insectes, travaux pratiques, par G. Couturier.

JELOI 5 DEŒMlRE

Voyage de retour Taï-Abidjan

VEN:RDI 6 DEŒMH::

A l'Institut d'Ecologie tropicale

Matin:

L'échantillonnage de la cochenille du manioc, par J. Boussienguet. Motions lues par les participants. Clôture de l'atelier par H. Dosso et Coulibaly Dognenenan.

148 ANNEXE 3

ALLOCUTIONS D'OUVERTURE

Allocution de Yaya Sangaré, Directeur de l'Institut d'Ecologie tropicale

Monsieur le Directeur de la Programmation, du Financement et de la Promotion du personnel de la Recher­ che, Représentant Monsieur le Ministre de l'Education nationale et de la Recherche scientifique, Monsieur le Représentant du Directeur général de l'Unesco, Monsieur le Secrétaire du Comité National MAS/Unesco, Honorables délégués des pays amis, MesdëJTles, Messieurs.

L'Institut d'Ecologie tropicale est heureux d'abriter dans ses locaux pendant quelques jours l'Atelier de sensibilisation à la Recherche entomologique dans les écosystèmes forestiers, conjointement organisé par l'Unesco, le PNUE, le Réseau Africain des Biosciences et le Comi té MAS de Côte d'Ivoire.

Nous apprécions d'autant plus cet honneur qu'il est, nous semble-t-il, le témoignage de la confiance que le Ministre de l'Education nationale et de la Recherche scientifique voue à notre structure. Nous en sommes très sensibles et vous prions, Monsieur le Directeur de la Programmation et de la Recherche de transmettre au Dr Balla Keita toute notre gratitude et notre haute estime.

Monsieur le Représentant du Directeur général de l'Unesco, c'est un réel plaisir pour nous de vous accueillir dans notre modeste structure. Nous sommes d'autant plus comblés que pendant quelques jours nous serons le miroir de cette grande organisation pour la Science et la Culture. Soyez en remercié et i'IET par ma voix vous adresse la traditionnelle bienvenue.

Messieurs les délégués scientifiques des pays amis, votre nombre et vos compétences reconnues sont une assurance du succès des travaux de cet atelier et les retrouvailles entre scientifiques sont toujours des occasions d'échanges d'expériences et de raffermissement de réseaux de coopération indispensables. Soyez donc les bienvenus.

Monsieur le Représentant du Ministre de l'Education nationale et de la Recherche scientifique, Monsieur le Représentant de l'Unesco, Mesdames et Messieurs,

A tous nous disons AKWABA et vous assurons que l'lET ne ménagera aucun effort pour que cet atelier soi t un succès.

Je vous remercie.

*****

149 Allocution de Henri Dosso, Secrétaire technIque au ~ en Côte d'Ivoire

Monsieur le Représentant de l'Education nationale et de la Recherche scientifique, Monsieur le Représentant du Directeur général de l'Unesco, Monsieur le Directeur de l'Institut d'Ecologie tropicale, r-lesdaœs, r-lessieurs.

Après ce souhai t de bienvenue, je voudrais pour ma part si tuer simplement l'événement qui nous réuni t ce matin.

En effet, sui te à la réunion de concertation des Comi tés nationaux du MAB des pays francophones d'Afrique qui s'est tenue en aoOt 1984 à Yamoussoukro, notre capitale politique et administrative, le Comité MAB de Côte d'Ivoire a sollicité et obtenu de l'Unesco l'organisation d'un atelier de sensibilisa­ tion à la recherche entomologique dans les écosystèmes forestiers en insistant sur les aspects techni­ ques.

Cet atelier qui débute donc ce matin revêt une double importance: il va d'abord permettre aux chercheurs, aux ingénieurs, aux techniciens, aux enseignants de la sous-région de confronter leurs différentes méthodes et techniques d'études et aussi de confronter ieurs principaux résultats déjà acquis en matière de recherche entomologique.

Ensuite si on sait que les principaux ravageurs de nos cultures, qu'elles soient vivrières ou industrielles, sont les insectes, on peut alors dire que la tenue de cet atelier est amplement justifiée.

D'ailleurs disons que le thème choisi pour cet atelier nous préoccupe depuis déjà plus de dix ans, car il cons t i tue l'une des opéra t ions de recherche de l'un des hu i t programmes du Pro jet Taï et ce programme c'est: "L'évolution des populations animales et végétales parasi tes des cul tures".

En ce qui concerne le déroulement de l'atelier, le programme vous a été distribué. Qu'il me suffise de vous rappeler que deux phases sont prévues. La première phase qui aura lieu à Abidjan du 25 au 30 novembre sera faite d'exposés, de conférences, ,de démonstrations aussi bien dans les laboratoires que sur le terrain. La deuxième phase aura lieu à la Station écologique de Taï du 1er au 5 décembre.

Enfin, je voudrais terminer mon bref propos en disant que le Président du Comité MAB de Côte d'Ivoire, Dr Balla Keita, Ministre de l'Education nationale et de la Recherche scientifique, voudrait nous voir déboucher sur des conclusions heureuses à la fin de cet atelier afin d'enrayer totalement, sinon partiellement, les pertes énormes que subissent nos cultures.

Je vous remercie. •••••

Allocut ion de Milcolm Hadley, Division des Sciences Ecologiques de l'lilesco

Monsieur le Représentant du Ministre de l'Education nationale et de la Recherche scientifique, r-lesdaœs, r-lessieurs, Chers collègues.

C'est un plaisir et un honneur pour moi de vous accueillir de la part du Directeur général de l'Unesco, M. Amadou-Mahtar M'Bow, à cet atelier de sensibilisation à l'entomologie dans les écosystèmes forestiers tropicaux, qui est organisé dans le cadre du Programme intergouvernemental de l'Unesco sur l'Homme et la Biosphère (MAB).

Cornne vous le savez sans doute, le Programme MAB a été lancé par l'Unesco au début des années '70. Depuis cette époque il s'est fait une certaine réputation pour son approche originale visant à la fois: à lier la recherche scientifique aux problèmes de développement économique; à faire participer les

150 scientifiques d'un éventail de disciplines, les populations locales et les planificateurs à la solution des problèmes priori taires de gestion des ressources et d'aménagement du territoire; à développer un continuum de l'action comportant la recherche fondamentale et appliquée, la formation, l'éducation, la démonstration et la diffusion des résultats; à promouvoir l'idée d'associer la conservation de la diver­ sité génétique à l'utilisation des ressources naturelles.

Les pays d'Afrique de l'Ouest et Centrale ont joué un rôle capital dans le développement du Programme MtIB, tant par leur soutien de la philosophie et de l'approche du MtIB que par leur action sur le terrain. Ceci est illustré par le rôle du pays où nous nous trouvons aujourd'hui, la Côte d'Ivoire. Les scientifi­ ques de Côte d'Ivoire se sont toujours trouvés· au premier rang dans la planificat ion des act i vi tés du Programme MtIB, tant au niveau régional qu'international.

Par exemple dans les années récentes, M. Balla Keita, Ministre de l'Education nationale et de la Recherche scientifique de la Côte d'Ivoire, a joué un rôle important par sa présidence du Conseil Inter­ national de Coordination au cours de la période 1981-84. C'est sous sa présidence que le Programme MtIB a pris un certain nombre d'importantes nouvelles directions et orientations. C'est aussi durant la période de sa présidence qu'ont été organisées d'importantes réunions tel que le premier congrès international sur les réserves de la biosphère dont il est ressorti le Plan d'action pour les Réserves de la Biosphère, et ici même en Côte d'Ivoire, à Yamoussoukro, la réunion de concertat Ion des Comi tés Nat ionaux du MAS des pays francophones d'Afrique, point de départ d'un nouvel élan du Programme dans ces régions.

En remontant plus en arrière, les scientifiques de Côte d'Ivoire ont fait une intervention particu­ lièrement significative dans les activités du MAS sur les interactions des activités humaines et les forêts tropicales, par exemple par leur participation au groupe de travail international qui s'est tenu au Brésil en 1974 et à la réunion régionale sur ce même thème ayant eu lieu à Kinshasa en 1975 - réunions qui ont eu une grande influence sur le cadre conceptuel et logistique des actions du MAS dans les régions tropicales. C'est donc à la suite de ces réunions qu'a pris forme le noyau d'un réseau de projets pilotes de recherche, format ion et démonstration sur les forêts tropicales, réseau composé d'une quinzaine de sites dans les différentes régions des tropiques humides et subhumides. Parmi ces projets, le projet Taï, ici en Côte d'Ivoire, forme la base logistique aussi bien que substantielle, pour notre présent atelier de sensibilisation à l'entomologie.

Cet atel ier a pour but d'assurer un complément d' informat ion aux chercheurs, ingénieurs et techni­ ciens travaillant en zone forestière humide et se spécialisant en entomologie générale ou agricole. On espère que l'atelier donnera aux participants la possibilité d'améliorer leurs connaissances des techni­ ques et méthodologies liées aux recherches entomologiques, et qu'il servira aussi à promouvoir les contacts entre entomologistes africains francophones travaillant en zone forestière et à favoriser ainsi le développement des réseaux de recherche. La première partie de l'atelier est consacrée aux visites et exposés dans quelques laboratoires traitant différents aspects de l'entomologie, ici à Abidjan et aux environs. La deuxième partie se déroulera à la Station d'Ecologie Tropicale de Taï où il est prévu que seront exposés les objectifs et les résultats du projet Taï et de réaliser ainsi la partie technique du stage. Notre souhait est que nos activités prennent la forme d'un atelier informel et interactif où chacun partage ses connaissances et ses expériences.

Nous discuterons plus en détail cet après-midi le programme de cet atelier, ses objectifs et son contenu. Mais je voudrais ici exprimer, de la part de l'Unesco, nos vifs remerciements à toutes les inst i tut ions et personnes qui ont rendu possible cet atel ier. Je voudrais d'abord remercier et fél ici ter le Ministère de l'Education na t ionale et de la Recherche sc ient i f ique, le Comi té de Côte d' l voire pour le Programme MAS et l'Institut d'Ecologie Tropicale, pour tous leurs efforts dans l'accueil de cet atelier. Je voudrais aussi remercier les autres institutions de Côte d'Ivoire qui ont prêté leur concours à l'orga­ nisation de l'atelier, en particulier les institutions qui ont accepté de nous ouvrir leurs laboratoires et de présenter leurs travaux: l'Ecole Nationale Supérieure d'Agronomie; le Centre Technique Forestier Tropical; et l'Institut de Floristique. Je ne manquerai pas non plus d'exprimer notre reconnaissance à l'Institut français de Recherche Scientifique pour le Développement en Coopération pour sa collaboration et sa participation à l'organisation de l'atelier. Ici je citerai le nom de M. Guy Couturier, entomolo­ giste agricole de l'ORSTOM, depuis des années associé au travail à Taï, dont le rôle a été primordial dans la conception, la planification et le déroulement de cet atelier. Le Centre National de la Recherche Scientifique français a également eu l'amabilité de mettre à notre disposition son film sur la cendre et la vie qui vous sera présenté plus tard cette semaIne.

Enfin, sur le plan international, je dois faire mention de l'appui technique et financier du Programme des Nations Unies pour l'Environnement (PNUE) et du Réseau Africain des Biosciences (RAB) qui ont, avec l'Unesco et les institutions de Côte d'Ivoire concernées, conjugué leurs efforts pour permettre la tenue de cet atelier.

C'est avec ces remerciements que je clos ces remarques introductives, en vous souhaitant deux semaines fructueuses et stimulantes.

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151 Allocut ion de CoulibalY Dognenenan, Ministère de l'Education nationale et de la Recherche scientitique

Monsieur le Représentant du Directeur général de l'Unesco, Monsieur le Directeur de l'Institut d'Ecologie Tropicale, Messieurs les Professeurs, Mesdames, Messieurs.

Il Y a de cela un an, précisément en août 1984, la Côte d'Ivoire abritait, à Yamoussoukro, la Réunion de concertat ion des Comi tés nat ionaux MAS des pays francophones d'Afrique, donnant ainsi la preuve non seulement de l'importance qu'elle accorde à la coopération scientifique régionale et internationale, mais également de sa pleine insertion dans le tissu de coopération établi par l'Unesco à travers le monde.

Aujourd'hui, nous VOICI encore réunis, à l'initiative de l'Unesco, pour prendre part à l'Atelier de sensibilisation à la recherche entomologique dans les écosystèmes forestiers dont Monsieur Dosso Henri, Coordonnateur du Projet Taï et Monsieur Hadley, représentant du Directeur général de l'Unesco, viennent de nous donner les objectifs et les orientations générales.

Je voudrais pour ma part, au nom du Dr Balla Keita, le Ministre de l'Education nationale et de la Recherche scientifique, empêché, souhaiter la bienvenue, en terre de Côte d'Ivoire, à nos frères des pays amis venus confronter leurs expériences. Je voudrais également saluer l'heureuse initiative de la Division des Sciences Ecologiques de l'Unesco et féliciter les organisateurs et les "sponsors" de cet atelier.

Vous allez, Mesdames et Messieurs, pendant une semaine, aborder tous les aspects techniques de la recherche entomologique et je m'arrête à penser que vous passerez de belles et agréables journées de travail, car comne le disait un grand homme politique, "Le travail est toujours une fête lorsqu'il est bien fai t avec des gens qu'on aime".

Alors je vous souhaite une bonne fête et au nom de Monsieur le Ministre de l'Education nationale et de la Recherche scientifique, je déclare ouvert l'Atelier de sensibilisation à la recherche entomologique dans les écosystèmes forest iers.

Je vous remercie.

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