Que Retenir De L'expérience Béninoise ?
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REPUBLIQUE DU BENIN *********** NUL N’EST CENSE IGNORER LA LOI Trente ans sous le soleil démocratique : que retenir de l'expérience béninoise ? Contribution à la célébration des trente ans de la constitution de 1990 Rédaction : Serge AYADJI – Auditeur à la Faculté de droit et de science politique de l’Université d’Abomey Calavi ; Président de l’association NeCIL Prince MARIYO – Juriste publiciste ; Chargé des TICS au sein de l’association NeCIL www.necilbenin.com Décembre 2020 À la fin des années 1980, le gouvernement béninois, alors dirigé par le Général Mathieu KEREKOU, devait affronter de terribles pluies de mécontentement populaire ; la force, devenue stérile face à l’insurrection du peuple. Un peuple ayant fait les frais des arriérés de salaires et bien sûr, de la situation financière chaotique que connait le pays. Les mains quasiment liées, une assise nationale est annoncée. C’est dans un contexte assez tendu que nait donc l’idée de l’historique Conférence Nationale des Forces Vives de la Nation (CNFVN). Cette assise, en dépit des tensions, aura le mérite d’accoucher d’une édition revue et améliorée de l’histoire politique et constitutionnelle du Bénin qui par ses fils, a accepté prendre appuie sur le système démocratique en vogue, pour soigner les maux dont il a souffert depuis son accession à la souveraineté internationale. Cette volonté hardie des conférenciers se traduira ensuite par la norme de toutes les normes béninoises – la constitution qui fut promulguée le 11 décembre 1990 au plaisir de tout un peuple. Le décor est planté, tous voyaient en cet héritage qu’auraient laissé leurs ancêtres, aïeuls, pères, frères… l’espoir d’une vie nouvelle, d’un lendemain meilleur. Au bout de trois longues décennies sous le soleil démocratique, faut-il se réjouir ? Quelles leçons doit-on tirer ? À quoi s’attendre ? Ou, quel Bénin laisse-t-on à la descendance ? C’est là, autant de questions que chaque citoyen béninois est à même de se poser. De toute évidence, le système démocratique sur lequel a été remodelé le Bénin en 1990 est le meilleur qu’il soit – majoritairement, les peuples s’accordent sur ce fait. Cependant, elle a ses tares et dans bien de situations, elles sont remarquables. À Winston Churchill de déclarer que « La démocratie est un mauvais système, mais elle est le moins mauvais de tous les systèmes ». Aucune œuvre n’aura donc les faveurs de dame “perfection’’ ; la démocratie encore moins. Aux demeurant, la démocratie désigne à l’origine un régime politique dans lequel tous les citoyens participent aux décisions politiques ; aujourd’hui, elle est perçue comme un système politique dans lequel le peuple est souverain ; d’où la démocratie serait comprise par Abraham Lincoln comme « le gouvernement du peuple, par le peuple et pour le peuple ». De la monarchie à la démocratie ou du marxisme-léninisme (son idéologie au temps de la révolution) à la démocratie, il y a bien de quoi rêver ! À 30 ans, le petit Etat ouest africain a-t-il réalisé son rêve ? Il faut passer en revue, les acquis démocratiques et arroser les performances de la République (I) puis, de mettre un accent particulier sur les éclats auxquels fait face l’édifice démocratique (II) afin de pouvoir – sous réserve, prétendre répondre à la question ultime qu’est de savoir si la démocratie aura été un remède parfait pour la République du Bénin. www.necilbenin.com Décembre 2020 I- Les acquis ainsi que les performances de la République depuis 1990 1er août 1960, le Bénin accède à l’indépendance au même titre que plusieurs pays africains ayant été soumis à l’épreuve de la colonisation. Stupéfaction et extase se mélangèrent pour faire place à l’optimisme ; au rêve béninois. Malheureusement, s’était sans compter sur l’envie collective de la classe politique de gouter aux saveurs du pouvoir d’État – confondant même à plusieurs reprises, les fonctions de l’armé à celles civiles. Les coups d’État se succédèrent, obligeant la jeune République à vivre dans une instabilité politique des plus rares en Afrique jusqu’à l’arrivée au pouvoir du Général Mathieu Kérékou en octobre 1972. Dix-huit ans durant, celui-ci s’imposera avec pour idéologie le marxisme-léninisme. Il crée son parti politique, le PRPB (Parti de la Révolution Populaire du Bénin) courant 1975 et en fait le seul parti de la République. S’en suivra dès les années 1980 un soulèvement du peuple qui conduira, grâce à la CNFVN, au renouveau démocratique avec la constitution de 1990 – clé de voûte de la nouvelle ère. La démocratie avec ses principes de base, induira de profond changement sociopolitique dès 1990 avec la loi n°90-32 du 11 décembre 1990 qui connaitra fin 2019, un profond nettoyage. A- Les innovations de la loi n°90-32 du 11 décembre 1990 portant constitution de la République du Bénin L’arbre géant de la conférence étendra ses racines sur plus domaine dont la politique ; les droits humains et la justice. 1- Sur le plan politique C’est un fait, le Bénin est souvent cité comme un exemple de démocratie en Afrique. Les périodes d’instabilité sont depuis trois décennies, un mauvais souvenir. En d’autres termes, le renouveau démocratique aura apporté une stabilité politique enviable au peuple béninois pendant que plusieurs États voisins connaissent parfois des temps de vives tensions. La constitution de 1990 disposant en son article 5 que « Les Partis politiques concourent à l'expression du suffrage. Ils se forment et exercent librement leurs activités dans les conditions déterminées par la Charte des Partis politiques » a ouvert une brèche aux partis qui n’ont pas cessé d’augmenter. L’époque des partis unique est ainsi donc révolue. Les réformes constitutionnelles conduisent aussi à l’instauration d’un régime présidentiel. On note également une séparation (apparente pour certains) des pouvoirs entre l’exécutif, le législatif et le judiciaire. C’est alors que l’exécutif conduira la politique de la nation et assurera l’exécution des lois au même titre que celle des décisions de justice. Représenté par le gouvernement, ce pouvoir est incarné par le Président de la République : chef d’État, chef du gouvernement, chef de la magistrature suprême, chef suprême des Armées… Élu de la nation, le Président de la République « est le garant de www.necilbenin.com Décembre 2020 l'indépendance nationale, de l'intégrité territoriale et du respect de la Constitution, des traités et accords internationaux ». Avec un mandat limité à deux fois 5 ans au maximum, il est désormais impossible d’assister à un scénario dans lequel le premier magistrat s’accordera le privilège de s’éterniser au pouvoir. C’est ainsi que de 1991 à 2016, se succèderont respectivement les Présidents Nicéphore Dieudonné SOGLO (vainqueur des présidentielles de 1991) ; Mathieu KEREKOU (Vainqueur des présidentielles de 1996 puis de 2001) ; Thomas Boni YAYI (arrivé premier des élections de 2006 et celles de 2011) puis Patrice TALON (Président depuis avril 2016). Dans une imitation plus ou moins parfaite du régime présidentiel, il a été conçu, à côté de l’exécutif, un pouvoir législatif représenté par les députés : élus du peuple et porte-parole de celui-ci. Ils votent les lois et contrôlent l’action du gouvernement. La loi n°90-32 du 11 décembre 1990 portant constitution de la République du Bénin fait du Parlement, « une Assemblée unique dite Assemblée nationale ». Cette institution qui incarne le pouvoir législatif compte, jusqu’à sa 8ème législature (en cours), 83 députés dont le mandat de 4ans est renouvelable indéfiniment. L’institution est coiffée par un Bureau de 7 parlementaires élus par leurs paires. La première législature (1991-1995) a eu pour Président Adrien HOUNGBEDJI ; l’actuelle étant conduite par Louis VLAVONOU. Matériellement, le renouveau démocratique aura permis une répartition des pouvoirs entre les institutions qui, elles-mêmes, sont censées être au service du peuple. 2- La question des droits humains L’un des plus admirables progrès du texte de 1990, est la consécration des droits humains. Faisant tiennes les dispositions de la Charte des Nations unies de 1945 ; celles de la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme de 1948 et de la Charte Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples de 1981, le constituant béninois a consacré le titre II de la loi aux droits et devoirs de la personne humaine. En 33 articles, soit le quart de la constitution, le constituant a témoigné son attachement aux droits fondamentaux. Le caractère sacré et inviolable de la personne humaine ; le droit au développement ; le droit à la vie ; le droit de grève ; la présomption d’innocence ; la non- rétroactivité de la loi pénale ; l’interdiction de la torture et des traitements cruels – inhumains et dégradants ; la liberté de circulation – de pensée – de religion – d’expression – de la presse ; l’égalité devant la loi ; la protection de l’environnement… sont autant de droits inaliénables qui ont meublé le titre II de la loi. Cependant, pour mieux protéger ses droits, le constituant a cédé aux avances de la gardienne de la constitution. 3- Sur le plan judiciaire Dans la restructuration du fonctionnement de la République, le pouvoir judiciaire n’a pas été du reste. Elle a connu une véritable réorganisation de son organisation, avec la naissance de nouvelles institutions judiciaires. www.necilbenin.com Décembre 2020 En effet, les titres V et VI de la loi de 1990 ont prêté leurs lignes à la création des institutions judiciaires que sont : la Cour Constitutionnelle ; la Haute Cour de Justice et la Cour Suprême. La Cour Constitutionnelle « est la plus haute juridiction de l'Etat en matière constitutionnelle. Elle est juge de la constitutionnalité de la loi et elle garantit les droits fondamentaux de la personne humaine et les libertés publiques.