Bulletin CAF N°69
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BULLETIN D’INFORMATION Décembre 2018 N°76 SOMMAIRE - André Japy p. 1 à 14 - La ligne Marseille-Alger (1923-1927) p. 15 à 21 - Vie du CAF p. 22 à 24 - Accident Bahreïn 12 juin 1950 p. 25 à 27 - Chronique aérophilatélique p. 28 André JAPY (1904-1974) 1 Remerciements Beaucoup de personnes ont participé à cet article consacré à André Japy, et il faut les en remercier avec une vive émotion pour les moments passés avec eux : Noëlle Japy dont le beau-père Albert Japy était aussi un aviateur, mais a dû reprendre des fonctions dans la société Japy. Fidèle amie, elle m'a fait découvrir l'empire Japy en me prêtant le livre "Les Japy Destinées d'une famille comtoise" et en me faisant rencontrer son fils Nicolas. Nicolas Japy : acteur majeur de la mémoire d'André Japy : Il veille activement à la restauration du Caudron Simoun qui devrait faire prochainement son premier vol, il renforce les liens entre les japonais de Kansaki et les français de Beaucourt, il facilite la diffusion du livre Les ailes blessées1 rédigé par Chiaki Gondo qui a rassemblé les souvenirs des derniers témoins de l'accident du mont Sefuri. Philippe Busch qui vient de sortir un excellent livre2 sur la vie d’André Japy. Sa collecte des écrits de Japy a été essentielle pour citer André Japy en décrivant son vécu d'une façon à la fois précise et passionnante. Dominique Petit qui a, comme toujours, veillé à la cohérence et participé activement à la mise en forme (les attaches de son épouse à la famille Japy l'ont largement motivé !). Jean-Pierre ARAGNETTI 1 Les Ailes blessées, le sauvetage d’André Japy sur le mont Sefuri, par Chiaki Gondo publié par l’Association des descendants de Frédéric Japy, Montbéliard (2016) 2 André Japy, Pilote de records (1904-1974), par Philippe Busch aux éditions de l’officine (2018) 2 André Japy Par Jean-Pierre ARAGNETTI « Le Lindbergh français »3 Famille protestante installée depuis le 16ème siècle dans la région de Belfort à Beaucourt, la famille Japy a marqué l’histoire industrielle française. En industrialisant les processus de fabrication horlogère, Frédéric Japy4 (1749-1812) est le patriarche fondateur d’un empire industriel, mais aussi un précurseur dans les domaines de l’organisation du travail et de la vie sociale ouvrière au 19ème siècle. Il se plaisait à énoncer : "je veux que mes ouvriers ne fassent avec moi et les miens qu'une seule famille. Mes ouvriers doivent être mes enfants et en même temps mes coopérateurs". En 1810 alors que Napoléon 1er veut le faire comte il répond : "Sire je vous remercie, mais ne puis accepter car je ne pourrais plus m'adresser à mes ouvriers de la même façon pendant les repas". Frédéric Japy s'attache à transmettre ces valeurs à ses enfants qui diversifient les productions5, et prolongent cette philosophie au-delà des changements politiques durant le 19ème siècle jusqu'à Henri Japy qui la protège en s'opposant souvent aux idées du conseil de gérance de la Société "Japy Frères". Son fils Fernand Japy continuera la défense de ces idées : à ses funérailles6, un délégué syndical déclare : "il fut pour toute la population un protecteur et un ami, pour tous les malheureux le bienfaiteur le plus discret." André Japy, est né le 17 juillet 1904 à Beaucourt, fils de Fernand Japy. Après ses études secondaires il intègre à Paris l'Ecole Supérieure d'Aéronautique, dont il sort avec le diplôme d'ingénieur, qu'il complète par une licence en sciences de la météorologie et un certificat de mécanique des fluides. Peu attiré par une carrière dans l’entreprise familiale, André montre un goût prononcé pour la vitesse et la solitude. Il se passionne pour les motos, l'automobile puis l'aviation, influencé par son frère ainé Albert, ancien observateur au sein de l’escadrille MS 140 durant la Première Guerre Mondiale, breveté pilote en 1927, propriétaire du Farman 200 F-AJDO dès 1929, et qui sera président de l’aéro-club de Belfort jusqu’à la seconde guerre mondiale. André Japy restera toute sa vie un pilote méticuleux, navigateur hors pair préférant la lignée des aviateurs aventuriers à celle des pilotes "de ligne". André Japy, l'homme des grands raids 1932 Avec pour moniteur Guy Bart7, il obtient le 24 mars 1932 à Orly son brevet de pilote "tourisme avion" (n°762), et dès le 4 juin, il achète un De Havilland DH.60 Gipsy-Moth équipé d’un moteur de 85 ch (immatriculé F-AMAR ex G-ABXC), dont il profite pour voler à sa guise : "À cette époque, j'habitais Belfort, je possédais un petit Moth 60 et partais par tous les temps pour ne pas rater un week-end à Paris. C'était un excellent entrainement et plus d'une fois j'ai dû me poser en campagne; excellent exercice !" Du 12 au 23 septembre, il effectue seul un voyage en Pologne (Poznań, Varsovie) via Stuttgart et Berlin, puis vers Amsterdam afin de se préparer aux grands raids. 3 Baptisé ainsi par les journalistes de l’époque. 4 Un intéressant musée à Beaucourt lui est consacré http://www.beaucourt.fr/action_sociale/musee_japy.htm. 5 Horlogerie, quincaillerie, machines à écrire, machines à café, les fameuses pompes Japy, etc… 6 Tombé au champ d’honneur le 13/08/1914 lors des combats du moulin de la Caille (68 - Montreux- Jeune) dans les premiers jours de la guerre 14-18. 7 Il formera aussi Maryse Bastié. 3 1933 : les premiers grands raids Du 15 au 25 avril il effectue à bord de son Gipsy-Moth un raid de 9400 km autour de la Méditerranée en 71 heures de vol : Belfort, Avignon, Naples, Athènes, Benghazi, Tripoli, Gabès, Alger (20 avril), Oran, Rabat. Le retour Oran - Lyon - Paris le 24 avril en 12h25 de vol constitue une performance remarquable. Retour à Belfort le 25 avril. "Le beau voyage en URSS" Départ du Bourget le 13 août à l'aube aux commandes de son Gipsy-Moth, arrivée à Berlin après 7h10 de vol en raison d'un fort vent de face. Le 14, départ à 6h30 de Tempelhof pour Moscou en suivant l'itinéraire des avions de la Deruluft8 .Un vent contraire l'oblige à une escale à Königsberg, puis Kovno (aujourd’hui Kaunas en Lituanie). Le 15, départ en matinée pour Moscou qu’il atteint après 6h30 de vol : "en arrivant à Moscou j'ai survolé un terrain sur lequel plusieurs pentamoteurs étaient rangés, l'après-midi j'assiste à un saut de démonstration de 40 parachutistes qui s'élancent simultanément munis de parachutes de couleurs différentes pour atterrir parfaitement en les manœuvrant en vol". Le 17, Moscou - Leningrad en 6h30 de vol. Le 18, départ vers Stockholm, mais une météo très mauvaise l’oblige à voler à très basse altitude et faire escale à Tallin (Estonie) avant d’atteindre Stockholm. Le 19 Stockholm - Oslo. Le 20 août, Oslo - Amsterdam - Paris : craignant de manquer de carburant après 10h30 de vol, il se pose en pleine campagne à proximité de Compiègne près d'une pompe à essence avant de rejoindre Le Bourget en 1h de vol. 1934 Le challenge "Paris-Saigon" ou "Coupe du Président de la République" consiste à effectuer le parcours France-Indochine dans un maximum de 360 heures avec un avion de poids à vide inférieur à 550 kg avant le 1er février 1934. Trois pilotes s'inscrivent : Maryse Hilsz, Joseph Chartoire et … André Japy avec son Gipsy-Moth. Parti d'Orly le 26 janvier à 10h53, Japy atterrit à Marignane à 17h, et en repart le lendemain à 6h27 pour atteindre Gabès en Tunisie à 21h. La tentative tourne court le 31 en Syrie où il tombe en panne. Aucun des engagés ne réussit le challenge. Japy cède son Gipsy-Moth à l'aéro-club de Damas. Au retour de ce voyage il s’engage dans une formation méthodique d'amélioration de ses performances, et de maitrise des paramètres de vol. Pour des raisons de coût et de conditions météorologiques, il choisit l'Angleterre afin de s’entrainer au P.S.V. (pilotage sans visibilité). "Après quelques vols de nuit, je me suis entrainé d'une façon graduelle et rationnelle : Paris- Oslo-Paris, Paris-Oran-Paris, Paris-Tunis-Paris. Je calculais chaque fois un itinéraire qui comportait environ 200 km de plus que le précédent pour vérifier aussi le rayon d'action exact de mon appareil ". 1935 : record de vitesse sur le trajet Paris - Saigon Il achète un monoplan Caudron C.600 Aiglon équipé d'un moteur Renault Bengali Junior 4Pgi de 100 ch immatriculé F-ANVB, et met immédiatement en pratique sa formation afin de se préparer aux grands raids. Le 21 août, il effectue le trajet Paris - Oslo et retour dans la journée : décollant de Paris à 3h15 il atteint Oslo à 10h30, d'où il repart à 11h35 pour se poser au Bourget à 19h30 (2 880 km en 15h10 de vol à la vitesse moyenne de 192 km/h). 8 La Deruluft (Deutsche-Russische Luftverkehr A.G.) est une compagnie aérienne russo-allemande (à parité 50-50) fondée en 1921, qui exploita jusqu’en 1937 des lignes entre l’Allemagne et l’URSS. 4 Le 1er septembre, il effectue un aller et retour Paris - Oran dans la journée (3050 km en 16h25 de vol à la vitesse moyenne de 190 km/h), suivi le 22 septembre par un Paris - Tunis - Paris dans la journée (3400 km en 17h05 à la vitesse moyenne de 199 km/h). "Je veux aller encore plus loin pour montrer les capacités de l'aviation moderne".