Guide D'utilisation
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LIBERTÉ D’EXPRESSION GUIDE D’UTILISATION Document préparé par Charles Montpetit [email protected] Édition révisée (2016), disponible en ligne au www.freedomtoread.ca/censorship-in-canada/index/#.VmBHDOK0L5w Une bibliographie en français sur la censure au Canada, et une analyse bilingue de la censure aux douanes sont aussi disponible au www.freedomtoread.ca/links-and-resources/#.V4bWdzVu3T8 Le site www.freedomtoread.ca est une initiative du Conseil des livres et des périodiques 192, av. Spadina, Toronto (Ontario) M5T 2C2 – tél. 416 975-9366 Photo de couverture : Shinxenius La rédaction de ce document a été financée en partie par le Conseil des arts et des lettres du Québec, et par le Conseil des arts du Canada SOMMAIRE Introduction Liberté d’expression ou Liberté de lire ? 2 Déclaration Principes de base / groupes signataires 3 Les piliers de la censure Assises des interdictions au Canada 4 Chronologie Dates à noter en marge de la littérature 5 L’accès à l’information L’obtention ardue de renseignements 10 Censure et Internet Le problème avec les filtres 11 Censure et violence Le problème avec l’art « agressif » 12 Censure et pornographie Le problème avec l’érotisme 14 Censure et cinéma Le problème avec les films au Québec 16 Le (bref) retour de l’enfer Un cas type : Bibliothèque de Hull, 2001 18 Index Interdictions et tentatives de censure d'œuvres disponibles en français 20 La censure indirecte Quelques façons détournées d’interdire 50 Quoi faire en cas de plainte Savoir réagir aux tentatives de censure 52 Sources Remerciements / documents consultés 54 Quand la censure frappe Une animation sur la libre expression 56 dans cette version française du Freedom to Read Kit. Si vous le voulez bien, réglons d’emblée une question qu’on nous pose souvent. Contrairement à ce qu’aurait donné une traduction littérale de « Freedom to Read », comment se fait-il que le présent document traite de « liberté d’expression » et non de « liberté de lire » ? Pour répondre à cela, il faut remonter quelques décennies en arrière. À l’époque, la lutte contre la censure accuse un certain retard chez les francophones d’Amérique. Aux États-Unis, la Banned Books Week a lieu fin septembre depuis 1982, et son pendant au Canada anglais, dès 1984. Mais c’est uniquement Lise Viens en 1996 que naît au Québec la Semaine de la liberté de lire L’auteur de ces lignes et les 110 livres (oui, le calque du nom canadien est de mise à ce moment-là). qu’un seul article de journal a stigmatisés en 2014 (voir page 23) Cet événement improvisé ne fait hélas pas long feu. Il faut at- tendre 2002 pour le voir réapparaître sous le nom Semaine de la liberté d’expression, une variante élargie qui couvre non seulement l’écriture, mais l’illustration, la radio, la télévision, le théâtre, le cinéma et la musique, entre autres médias (voir les signataires francophones de la « Déclaration », en page 3). Cette alliance s’avère nécessaire pour atteindre une masse critique au sein d’une communauté culturelle somme toute assez réduite. C’est pour cette raison qu’on conserve ce nom quand les initiatives canadienne et québécoise sont formellement fusionnées l’année suivante. C’est aussi pour cela que des incidents non littéraires figurent dans notre « Chronologie » (pages 5 à 9), que l’essai « Censure et violence » aborde les jeux vidéo (page 12) et qu’un texte traite de cinéma (page 16). Notre sujet principal demeure la littérature, mais comme les bibliothèques publiques incluent désormais bien plus que des livres dans leur inventaire, il nous semble approprié de conserver l’approche la plus inclusive, ne serait-ce que du côté francophone. Bonne lecture, 2 DÉCLARATION __________________________________________________________________________________________________________ La liberté d’expression est un élément essentiel de la vie démocratique. Mais de nos jours, cette liberté est menacée. Dans diverses régions de notre pays, des regroupements privés et des pouvoirs publics s’efforcent : d’empêcher la diffusion d’un titre donné d’étiqueter certains textes comme sujets à controverse de bannir une œuvre d’une école publique de faire circuler des listes de documents dits condamnables de censurer des artistes et des journalistes d’interférer avec la distribution des subventions. d’épurer nos médias et nos bibliothèques En vouant nos efforts à la diffusion de la culture et de l’information, nous défendons le droit qu’a tout le monde d’y avoir accès. Interdire des œuvres mine la pensée créa- trice, ce qui condamne la démocratie à disparaître et encourage la dictature. C’est pourquoi nous nous opposons à la suppression des idées : sans liberté d’expression, on ne peut pas débattre de sujets controversés d’une façon responsable. L’art et l’information sont les outils de la liberté. L’épuration ou l’interdiction d’œuvres sous le prétexte de la protection du public nous répugne. La vérité n’est pas obscène. Ce qui est obscène, c’est de taire la vérité et de faire disparaître les créations qui cherchent à susciter une meilleure compréhension de la condition humaine. La communication est indispensable à la survie d’une société libre et d’une culture créatrice. Les pressions exercées pour uniformiser notre vision limitent la portée et la diversité des questionnements et des expressions dont dépend la vitalité de notre LearningLark nation. Chaque collectivité doit préserver sa liberté d’expression, de façon à protéger la liberté elle-même. Les artistes et les journalistes jouent un rôle capital dans ce domaine. La liberté d’expression est un héritage précieux. À titre d’organismes professionnels concernés par la question, nous nous engageons à combattre la censure sous toutes ses formes. Access Copyright Canadian Telebook Agency Association canadienne des rédacteurs scientifiques Centre québécois du P.E.N. International Association canadienne des réviseurs Communication-Jeunesse Association des auteures et auteurs de l’Ontario français Conseil québécois du théâtre Association des auteurs et auteures de l’Outaouais Corporation des bibliothécaires professionnels du Québec Association des bibliothécaires du Québec Disticor Association des bibliothèques canadiennes Federation of British Columbia Writers Association des bibliothèques de l’Ontario Fédération professionnelle des journalistes du Québec Association des éditeurs de magazines canadiens League of Canadian Poets Association des écrivains québécois pour la jeunesse Ligue des droits et libertés Association des illustrateurs et illustratrices du Québec Literary Press Group of Canada Association des journalistes indépendants du Québec Manitoba Writers’ Guild Association des libraires canadiens Organization of Book Publishers of Ontario Association des libraires du Québec Pal Benefits Association des presses universitaires canadiennes Periodical Marketers of Canada Association des traducteurs-trices littéraires du Canada Periodical Writers Association of Canada Association nationale des éditeurs de livres Playwrights Guild of Canada Association of Book Publishers of British Columbia Regroupement des centres d’artistes autogérés du Québec Association of Canadian Publishers Saskatchewan Writers Guild Association of Canadian Book Wholesalers SF Canada Association pour l’avancement des sciences et techniques de la Société civile des auteurs multimédia documentation Société des auteurs de radio, télévision et cinéma Book and Periodical Council Société des auteurs et compositeurs dramatiques British Columbia Library Association The Writers’ Union of Canada Canadian Authors Association Union des artistes Canadian Book Manufacturers' Association Union des écrivaines et des écrivains québécois Canadian Children’s Book Centre Universal Logistics Canadian Copyright Institute Writers Guild of Alberta Canadian Publishers’ Council Vous désirez que le nom de votre organisme soit ajouté à cette liste ? Vous n’avez qu’à écrire à : Charles Montpetit – [email protected] 3 LES PILIERS DE LA CENSURE __________________________________________________________________________________________________________ La censure canadienne est régie par trois principaux documents : le Code criminel, articles 46-48, 59-62, 163-169, 318-319 - Interdit les « histoires illustrées de crime » et « l’exploitation indue des choses sexuelles » de concert avec « le crime, l’horreur, la cruauté [ou] la violence ». Le mot « indu » n’est pas défini, mais personne ne peut prétendre ignorer qu’une œuvre est obscène. La possession d’un tel document est passible de 10 ans de prison (ce qui est, dans bien des cas, plus que la pénalité prévue pour une véritable agression sexuelle). En 1993, la section 163 est modifiée pour inter- dire la représentation d’une activité sexuelle explicite si les protagonistes ont moins de 18 ans, même si l’âge du consentement est à l’époque fixé à 14 ans (il est haussé à 16 ans en 2008). Et en 2005, une exception en faveur des œuvres qui ont du « mérite » est rem- placée par une clause autorisant seulement celles qui visent « un but légitime » – voir la section « Censure et pornographie », page 28. le mémorandum D9-1-1 - Énumère ce qui peut être interdit à la frontière, entre autres pour cause d’obscénité ou de dégradation. Ceci inclut la description d’actes sexuels « avec douleur » ou « ridicule et/ou humiliation » (aucune exception n’est prévue si la douleur est due à une maladresse ou si les personnes sont consentantes). Quand la Cour suprême juge en 1987 qu’interdire le matériel « obscène et immoral » n’est pas raisonnable, le document est amendé pour autoriser les œuvres traitant d’actes sexuels légaux si elle ne sont pas « de nature lascive ». la décision R. c. Butler de la Cour suprême - Juge obscène toute exploitation sexuelle qui est considérée violente, dégradante ou déshumanisante par une commu- nauté donnée. On peut toujours se défendre en cour, mais il faut le faire après une arrestation ou une saisie, et l’interdiction est maintenue jusqu’à l’issue du procès. Ces directives sont généralement appliquées : aux douanes - Les saisies sont effectuées selon l’interprétation personnelle de la loi que fait la personne en service ce jour-là, et la procédure d’appel peut s’étendre sur un an.