COMITE DE COORDINATION DU DEVELOPPEMENT DURABLE B.P. 5063 Yaoundé Tél. 21 15 39 Fax 22 80 83 E-mail : [email protected]

LA RESERVE DE FAUNE DE SANTCHOU :

MYTHE OU REALITE ?

RAPPORT DE PROJET

CARPE Central African Regional Program for the Environment

2

SOMMAIRE

Page

Remerciements……………………………………………………….. 3

Liste des Experts du Projet………………………………………….. 4

Avant-propos…………………………………………………….……. 5

Carte de la Réserve de Faune de Santchou et ses environs…………… 6

Résumé……………………………………………………………. 7

INTRODUCTION………………………………………………… 8

Chapitre I : METHODOLOGIE……….……………………………. 10

Chapitre II : DEROULEMENT DES ACTIVITES…………………. 19

Chapitre III : ORGANISATION DE L’ATELIER…………………. 31

Chapitre IV : ETAT DES LIEUX………………………………….. 41

Chapitre V : PROPOSITIONS DE SOLUTIONS………………….. 55

CONCLUSION……………………………………………………… 63

Bibliographie………………………………………………………... 64

Table des tableaux et figures………………………………………… 65

Annexes…………………………………………………………….. 66

Coupures de presse …………………………………………………..

3

REMERCIEMENTS

Au terme du ‘‘Projet Santchou 2000’’, nous aimerions adresser nos remerciements les plus sincères au CARPE / Central African Regional Program for the Environment pour son précieux appui financier. Et à travers le CARPE nous remercions grandement le BSP et l’USAID.

Nous remercions également les autorités administratives de l’Arrondissement de Santchou, notamment Monsieur le Sous-Prefet, Monsieur l’Adjoint d’Arrondissement et Monsieur le Maire, pour leur coopération active.

Le Projet s’est bien réalisé grâce à la collaboration technique du Service de Conservation de Santchou. Que Monsieur le Conservateur, ainsi que ses collègues, trouve ici l’expression de notre reconnaissance.

Que les autorités traditionnelles, notamment le Chef Supérieur Santchou et son représentant ainsi que les Chefs de 3è degré et les notables acceptent aussi nos remerciements. Mais nos remerciements spéciaux vont aux chefs traditionnels et aux populations des villages Mbongo, Mbokou, Balé, Mokot, Mankang, Mogot, Ngang, Nden- Matock et Moyong pour la chaleur de leur accueil, leur disponibilité, leur participation active aux différentes réunions que nous avons organisées, et surtout pour avoir pu conserver la Réserve jusqu’à nos jours.

Aux responsables religieux nous disons également merci, particulièrement à Monsieur le Curé de la Paroisse Notre-Dame de Santchou, pour sa contribution à la réussite de notre action et pour son amour pour la nature en général, et la Réserve de Santchou en particulier.

Un merci spécial à Monsieur Moumbé Germain, Comptable de profession, qui nous a Beaucoup aidé dans la réalisation du rapport financier de ce projet, ainsi qu’à Mademoiselle Azafack Rosette, qui a assuré le secrétariat du Projet avec une application particulière.

Pour terminer nous tenons à remercier tous ceux que nous n’avons pas cités mais qui ont, de près ou de loin, contribué à la réalisation du « Projet Santchou 2000 ».

4

LISTE DES EXPERTS DU PROJET

Les Membres et Experts suivants ont participé à la réalisation du Projet :

ADMINISTRATION

Directeur du Projet : * Dr NDE, Président Exécutif du CCDD Chef Secrétariat et Communication : * NAOUSSI André, Secrétaire Général

EQUIPE TECHNIQUE (Descente sur le terrain)

Chef d’équipe : * Dr NGOUO Lucas-Vincent, Biologiste / Ecologiste

Membres : * SOH Louis, Ingénieur géomaticien / Cartographe / Spécialiste en SIG * KUM NDONG Gabriel, Ingénieur informaticien, Spécialiste en Systèmes de Supports environnementaux * NSONKON Paul-Marie, Technicien Supérieur des Eaux et Forêts, Spécialiste en Faune

COMITE SCIENTIFIQUE (Rédaction du Rapport)

Coordonnateur : * Dr. NDE Membres : * Dr NGOUO Lucas – Vincent * SOH Jean-Claude, Ingénieur des Eaux et Forêts, Spécialiste en Gestion de l’Environnement * TAMGHE Jean-Marie, Ingénieur statisticien, Spécialiste en Evaluation des Projets * SOH Louis * NAOUSSI André 5

AVANT-PROPOS

C’est par Arrêté N° 262 du 27 juillet 1947 que la Réserve de Santchou fut créée, «en vue d’y favoriser le reboisement naturel et d’y faire exécuter des travaux de reboisement et de protection». Elle était donc au départ une réserve forestière. Mais par Arrêté du 29 septembre 1987 elle sera convertie en réserve de faune, à cause de la variété et de la densité de son peuplement animal, et particulièrement de la forte présence des éléphants.

Pour la petite histoire, la chefferie Santc hou est localement appelée «San’zo», c’est -à -dire «Père des Eléphants». La Réserve, qui fait partie intégrante de cette chefferie, est située dans sa partie Est, à sa limite avec le département du Haut-Nkam.

A l’intérieur de la chefferie ou groupement Santchou, la Réserve couvre entièrement ou partiellement le territoire de neuf villages : Mbongo, Mbokou, Mogot, Mokot, Nden Matock, Moyong, Mankang, Balé et Ngang. Elle est officiellement limitée au Nord par la rivière Olouono et la rivière Edep-Piagna ,au Sud par la rivière Métchié , à l’Est par la rivière Oloué et la rivière Edep-Mfomo ; et à l’ouest par la rivière /Nkam. Dans l’ensemble, la Réserve a donc des limites naturelles, sauf 500m de limite artificielle au Nord-Est entre la source de la rivière Edep-Piagna et la source de la rivière Edep-Mfomo. La Réserve de Faune de Santchou fait donc partie du groupement Santchou ; ce groupement appartient géographiquement à la Province de l’Ouest à majorité Bamiléké. Mais au niveau ethnico-culturel, il appartient à la tribu Mbô, l’une des tribus du groupe ethnique Sawa.

Sur le plan global, la Réserve est située entre le 5° 10’ et 5° 15’ de latitude Nord, et entre le 9° 5’ et le 10° de longitude Est.

6

CARTE

7

RESUME

Suite aux informations persistantes sur la dégradation de la Réserve de Faune de Santchou, l’ONG «Comité de Coordination du Développement Durable » (C.C.D.D) a entrepris des recherches sur le site pour mesurer l’ampleur du phénomène, identifier ses causes et envisager des solutions.

Ainsi, dans le cadre du projet intitulé «La Réserve de Faune de Santchou : Mythe ou réalité ?», le CCDD a mis sur pied une équipe d’experts qui a visité la Réserve et rencontré les habitants des villages riverains aux mois de mars, avril et mai 2000. C’est ainsi que, utilisant la méthode participative, plusieurs réunions sont organisées avec les populations de Mbokou, Mokot, Nden-Matock, Mankang et Balé, mais aussi avec des groupes de femmes et de jeunes de la ville de Santchou ; le tout est couronné par l’organisation d’un grand atelier réunissant les populations rurales et urbaines : l’«Atelier de réflexion et d’échanges sur la Réserve de Santchou et la réduction de la pauvreté».

Les visites de la forêt ont permis de constater une dégradation effective et multiforme : des parties de forêt détruites et remplacées par des maisons et des champs / plantations, des espèces d’animaux disparues ou menacées de disparition, bref une Réserve jadis riche en faune et en flore, mais aujourd’hui en plein déclin.

Les consultations participatives quant à elles ont permis de déterminer les différents facteurs responsables de la déforestation, de la dégradation forestière et de la disparition des espèces animales. Il y a ainsi des causes sociales (pauvreté, chômage, etc.), des causes économiques (élevage de bovins, agriculture extensive sur brûlis, braconnage, exploitation forestière illégale, etc.), des causes institutionnelles (service de conservation mal équipé et avec un personnel insuffisant, mal formé, mal payé, peu motivé, etc.) et autres.

La situation est très grave certes, mais elle n’est pas désespérée ; elle peut encore être redressée…

Le combat contre la dégradation et donc pour la restauration de la Réserve passe principalement par :

- la sensibilisation des populations locales, - la réduction de la pauvreté dans la région, - la promotion de la gestion participative, - la promotion de l’agriculture durable, - la promotion des activités alternatives, - la régénération forestière, - le renforcement des capacités institutionnelles. 8

INTRODUCTION

Dans toutes les régions et dans tous les pays, le système des aires protégées constitue l'un des maillons essentiels de la politique de conservation de la diversité biologique et surtout celle menacée d’extinction. L'institution de ces aires dans les pays tropicaux est d'autant plus nécessaire que l'on assiste, depuis plus de 50 ans, à une diminution de plus en plus inquiétante de la forêt et de ses ressources, laquelle diminution constitue un réel danger pour le maintien des équilibres climatiques globaux.

Les pays du Bassin du Congo n'échappent pas à ce fléau. Au Cameroun en particulier, et pour des raisons multiples (sociales, économiques, etc.), les forêts sont en pleine dégradation, et les aires protégées avec. A ce propos, la Réserve de Santchou est un cas particulièrement préoccupant. En effet, créée comme réserve forestière, par arrêté N° 262 du 27 Juillet 1947, puis convertie en réserve de faune en 1987, celle-ci n’a presque pas bénéficié de la part du Gouvernement ni des ONG du support technique dont elle avait besoin pour la gestion rationnelle de la riche bio-diversité dont elle regorgeait.

Et au fil des années, les informations en provenance de la région se font de plus en plus alarmantes. D’où les interrogations suivantes. Dans ce contexte multiforme qui est le leur, peut- on laisser la gestion des aires protégées aux mains des seules populations locales ? Bien plus, dans le contexte socio-économico-politique du Cameroun et des autres pays du Bassin du Congo, peut-on laisser la gestion des parcs nationaux, des réserves et autres aires protégées à la seule responsabilité des gouvernements et des administrations ? Ou alors faut-il un appui permanent des institutions non étatiques nationales et internationales ? Et quelles seraient les formes de cet appui ? Telle est la problématique qui soutient notre action. Pour le cas de la réserve de Santchou, l’on ne saurait y répondre avec certitude avant d’avoir effectué une descente sur les lieux.

Mais pourquoi précisément la Réserve de Santchou ? C’est que la région de l’Ouest Cameroun constitue un écosystème de transition, dont l'espace est partagé entre la forêt et la savane. Dans cette partie du pays particulièrement, la forêt est d'autant plus précieuse, et les aires protégées d'autant plus nécessaires que la région connaît depuis l'Indépendance une forte explosion démographique et une intense activité agricole et industrielle qui menacent chaque jour davantage la diversité biologique tant sur le plan floristique que faunique.

Pourquoi nous intéressons -nous particulièrement à la Réserve de Santchou ? La première raison est la singularité de sa situation géo-écologique. Elle se situe en effet au confluent de trois provinces : I’Ouest avec sa population dense, le Sud-Ouest et le Littoral moins densément peuplés ; et en même temps elle occupe une position à cheval entre la zone de forêt dense humide de type littoral dans sa partie sud, et la zone de savane afro-montagnarde dans sa partie nord. Elle réunit ainsi les caractéristiques de deux types d’écosystèmes et de peuplement humain.

Il est donc impérieux de préserver cette réserve unique en son genre et, d’une façon générale, de redynamiser le système de conservation des aires protégées dans cette région. Car si on n’y prend garde, d’ici quelques décennies, avec les pressions de toutes sortes, démographiques, agricoles, industrielles et autres, les aires protégées de cette partie du pays ne seront plus, comme disent les mathématiciens, que des “ensembles vides.” 9

C’est donc dans le but de contribuer à la préservation de ce joyau écologique que nous avons réalisé le projet qui fait l’objet du présent rapport. Entre autres objectifs, il s’agissait :

- de relever les manifestations de la dégradation forestière ; - d'identifier les causes profondes de cette dégradation ; - de déterminer les conséquences à court, à moyen et à long terme de la diminution du couvert végétal et du peuplement animal ; - de déceler les lacunes du système de conservation et de gestion de la Réserve ; - de recueillir les opinions, les préoccupations et les doléances des populations riveraines au sujet de la Réserve ; - d’identifier les potentialités naturelles et culturelles de la Réserve et des villages riverains en vue de leur rentabilisation (en tourisme, éco-tourisme, artisanat à base de produits forestiers non ligneux, etc.) ; - de sensibiliser les pouvoirs publics au niveau local et national, les populations riveraines et les ONG locales, nationales, internationales et étrangères sur la gravité de la situation de cette réserve et de bien d’autres ; - de proposer aux uns et aux autres des stratégies adaptées pour l’amélioration des conditions de conservation de la Réserve tout en tenant compte des aspirations légitimes des populations locales à l’amélioration de leur qualité de vie.

Pour atteindre ces objectifs, il a fallu élaborer une méthodologie appropriée et l’utiliser ensuite pour mener les différentes activités afin d’aboutir aux résultats escomptés. C’est ainsi que notre rapport comprendra :

1 – La présentation de la méthodologie, 2 – Le récit du déroulement des activités, 3 – Le rapport de l’organisation de l’Atelier, 4 – La présentation de l’état des lieux, 5 – Les propositions de solutions.

10

Chapitre I : METHODOLOGIE

A - CADRE GLOBAL : APPROCHE ET DEMARCHE

Pour réaliser les objectifs du Projet et pouvoir à la fin répondre à la problématique qui le soutend, nous avons donc opté dès le départ pour l’approche participative. Ainsi la méthodologie générale est inspirée du PRA (Participatory Rural Appraisal), de la MARP (Méthode Active de la Recherche Participative), et de la méthode de consultations participatives élaborée avec le concours de la Banque Mondiale et de la GTZ pour la réalisation du Document de Stratégie de Réduction de la Pauvreté au Cameroun. Mais loin d’être esclaves de l’une ou l’autre méthode, nous avons introduit au cours du projet, une innovation méthodologique. Nous avons en effet instauré ce qu’il convient d’appeler ‘‘réunion autonome’’ ; nous en expliquerons plus loin le mécanisme et le fonctionnement.

En application des principes de l’approche participative, nous avons pensé à impliquer dans le processus les principales parties prenantes, en commençant par les populations locales – premières gardiennes de la Réserve –, les autres parties prenantes étant l’Administration, le Secteur privé, et la Société civile comprenant les associations, les institutions religieuses, et les élites.

Quant à la démarche, elle s’inspire essentiellement de la méthode dite «MACRO» qui prévoit l’organisation des réunions avec les populations, suivie de la rédaction d’un rapport provisoire, suivie à son tour de la validation de ce rapport par les mêmes populations. Dans l’exécution du Projet, cette méthode a été intégrée dans la démarche globale dont nous présentons ci-dessous le schéma. 11

SCHEMA D’EXECUTION DU PROJET

REUNIONS PREPARATOIRES Conception Programmes et questionnaires

DOCUMENTATION ET INFORMATIONS

LIMINAIRES

VISITE DE PRISE DE CONTACT Diagnostic rapide

MISE A JOUR DES PROGRAMMES ET DES QUESTIONNAIRES

DESCENTE SUR LE TERRAIN Investigations – Collecte des données

REDACTION DU RAPPORT PROVISOIRE

Traitement statistique des données

VISITE DE PRESENTATION ET DE VALIDATION DU RAPPORT

FINALISATION DU RAPPORT DU PROJET

12

D’une façon schématique, le Projet s’est donc déroulé en huit phases principales :

Phase 1 : Réunions préparatoires Immédiatement après la réception de la première tranche du financement, une série de réunions est organisée pour informer les membres, expliquer le Projet aux personnes- ressources et discuter avec elles du déroulement de la phase d’exécution. C’est le temps de concevoir les divers instruments du travail sur le terrain, à savoir les fiches, les questionnaires, les calendriers, bref le programme.

Phase 2 : Documentation et informations liminaires L’Organisation entre en contact avec diverses institutions publiques et privées, ainsi que des individus, pour obtenir des documents nécessaires et des informations relatives au site du Projet, ainsi qu’à sa thématique générale, qui est la conservation des aires protégées.

Phase 3 : Visite de prise contact Cette visite a pour objet : - les formalités administratives, - le diagnostic rapide de la situation, - l’identification des villages riverains et le choix de ceux où se tiendront les réunions, - le test des instruments de travail, notamment les questionnaires.

Phase 4 : Mise à jour du programme Compte tenu des choses faites, vues ou entendues lors de la phrase précédente, une autre série de réunions et de séances de travail est organisée. C’est l’occasion d’apporter les modifications nécessaires aux différents éléments du programme, pour le rendre le plus opérationnel possible.

Phase 5 : Descente sur le terrain C’est le moment le plus important du projet. Suivant les différentes stratégies élaborées, des investigations sont menées à tous les niveaux pour collecter le plus de données possibles. L’Équipe a rendez-vous avec la nature et avec les hommes. On visite la forêt, on rencontre les populations. On prend des images, on prend des notes.

Phase 6 : Rédaction du Rapport provisoire De retour au siège, l’Équipe s’organise pour rédiger ensemble le rapport provisoire à base des notes prises sur le terrain, des images, des documents et autres supports. Pour ce qui est de la méthode, le travail est segmenté et distribué aux membres de l’ Équipe, et le Président en assure la coordination. Le statisticien particulièrement se charge du dépouillement des réponses au questionnaire individuel et du traitement statistique des données. Les résultats de ce travail seront utilisés pour illustrer telle ou telle section du Rapport.

Phase 7 : Visite de présentation et de validation du Rapport L’Équipe retourne sur le terrain et fait la ronde des villages – sans oublier la ville – pour leur présenter le Rapport provisoire. D’un public à l’autre, le Rappor t est présenté dans ses différentes articulations ; selon les centres d’intérêt des uns et des autres, différents chapitres, sections et passages sont examinés, corrigés, modifiés, complétés, et finalement validés.

Phase 8 : Finalisation du Rapport du Projet A cette étape ultime, il s’agit d’harmoniser les différentes parties du Rapport final, d’y apporter les dernières corrections, les dernières retouches, bref de le peaufiner pour obtenir, à 13 la fin, un document cohérent et équilibré. En outre, il faut parachever les documents qui accompagnent ce rapport, notamment l’album photos et le rapport financier.

De toute évidence il s’agit là d’un schéma directeur, qui met surtout en exergue les grandes étapes de l’évolution du Projet. Dans la pratique – cela va sans dire – nous l’avons suivi avec beaucoup de réalisme et de pragmatisme. Ainsi il pouvait parfois arriver que certains phases empiètent quelque peu sur d’autres, par anticipation ou par prolongation. De plus, les phases principales étaient parfois précédées, accompagnées ou suivies de phases intermédiaires et secondaires.

B - METHODE DES CONSULTATIONS

La tenue des consultations participatives s’insère donc dans le cadre méthodologique global que nous venons de présenter. Nous évoquerons ici leurs formes, leurs principes et leurs modes d’organisation. Les rencontres avec les différents groupes ont donc revêtu plusieurs formes. En gros nous pouvons distinguer deux catégories : les rencontres de masse et les rencontres d’individus. La première catégorie comprend les réunions consultatives, les réunions autonomes et les réunions-ateliers, alors que dans la seconde on peut classer les entretiens et les interviews. Nous insisterons surtout sur les rencontres de masse.

1- Les réunions consultatives

Cette forme de consultation a été développée avec les populations rurales et les groupes constitués au centre urbain, en l’occurrence ceux des jeunes et ceux des femmes. Les populations étaient celles des cinq villages présélectionnés, à savoir Mbokou, Mokot, Nden- Matock, Mankang et Balé, et les groupes constitués étaient l’Association des Femmes Sanzo et le Club des Amis de la Nature du Lycée de Santchou. Au cours de la première série de rencontres, chacune durait 1h 30 – 2h 30, et était structurée de la manière suivante :

1 - Présentation de l’Organisation ( CCDD) : 5min - 10 min. 2 - Présentation de l’objet de la rencontre : 10min - 15min 3 - Débats : 1h - 1h 30 4 - Rafraîchissements et sandwiches : 30 min.

Les débats portaient naturellement sur la Réserve, mais aussi sur les conditions de vie des populations – ce qui intéressait beaucoup. Les débats commençaient par les interventions liminaires des experts visant la sensibilisation des populations, et se terminaient par les mots de fin du Chef d’équipe et du Chef du village ou du groupe. Sur certains points des discussions, les populations répondaient qu’il leur fallait plus de temps pour réfléchir avant de parler et surtout pour harmoniser leurs positions. C’est cette situation imprévue qui nous a amenés à l’innovation méthodologique dont nous parlions plus haut à savoir l’organisation des ‘‘réunions autonomes’’.

Mais au cours de la seconde série – celle des réunions de validation – les rencontres duraient un peu moins ( 1h 30 environ), car chaque village s’intéressait surtout aux passages du Rapport qui le concernait.

La structure du programme était un peu modifiée et comprenait : 1. Présentation de l’objet de la rencontre (5 min - 10 min.) 2. Lecture des passages du Rapport et débats (45min - 60 min) 14

3. Rafraîchissements et sandwiches (30 min.) D’une manière générale, sur le plan méthodologique, l’Equipe a suivi les directives suivantes avant, pendant et après les réunions : - S’asseoir de manière à avoir une vue sur tous les participants et bien entendre ce qu’ils disent, - Commencer la séance par la présentation de l’Organisation ; - Présenter les objectifs de la consultation ; - Annoncer que ces consultations se sont tenues ou vont se tenir dans d’autres villages ou avec d’autres groupes ; - Annoncer qu’on leur présentera le Rapport des réunions ; - Expliquer le but et l’importance du processus participatif dans le cadre de la nouvelle approche des problèmes d’environnement et de développement ; - Faire parler le plus de participants possibles ; - Inciter les participants à parler librement, sans toutefois trop s’écarter du sujet du débat ; - S’assurer que tous les principaux points sont abordés au cours de la rencontre ; - Faire circuler une fiche de présence.

2 - Les réunions autonomes

Elles se tiennent un ou deux jours après les réunions consultatives, dont elles constituent le prolongement et l’approfondissement. Nous appelons ‘‘réunion autonome’’ une réunion à laquelle participent uniquement les populations locales pour débattre d’un problème posé à elle par une institution extérieure, débat dont les résultats seront ensuite remis à cette institution sous forme de rapports.

Ce type de rencontre a eu lieu dans chacun des cinq villages. Elle était présidée par le chef du village lui-même ou une autre personne choisie par lui. Le rapporteur pour chaque village avait été proposé par les habitants eux-mêmes et confirmé par l’Equipe ou vice-versa lors de la réunion consultative précédente.

L’objet, mieux le cadre du débat de la réunion autonome est bien précis : Il s’agit de répondre à un questionnaire collectif portant sur la Réserve et les conditions de vie dans la localité (Voir Annexes) ; mais les participants sont libres d’aller au-delà. Cette forme de consultation présente beaucoup d’avantages directs et indirects dont nous pouvons citer quelques-uns : - Libérés de la présence des étrangers (Équipe d’experts), les habitants peuvent s’exprimer sans influence, sans complexe et donc sans réserve. - Ils ont l’occasion de discuter entre eux et de s’entendre avant de donner des réponses aux questions. - Ils peuvent taire leurs dissensions internes et présenter aux yeux des étrangers l’image d’une communauté unie et soudée. - Cette forme de réunion renforce donc l’unité au sein de la communauté. - Dirigeant eux-mêmes la réunion, les habitants de chaque village évolue dans le programme à leur rythme, ce qui leur permet de se donner le temps qu’il faut pour certaines questions d’importance pour eux. - A la fin la communauté a le sentiment et la conviction d’être maître de son destin, ce qui est très important pour la fierté tribale. 15

3- Les réunions-ateliers

Alors que les réunions consultatives et les réunions autonomes sont réservées aux publics homogènes, la forme atelier a été choisie pour les publics hétérogènes. Il a donc fallu trouver un cadre approprié, faire circuler l’information, prendre d’autres dispositions concernant la logistique, la restauration, la sécurité, etc. Au reste il y a eu deux réunions de ce genre : la première lors de la phase de descente sur le terrain, et la seconde lors de la phase de validation du Rapport. a) Composition du public

En ce qui concerne la composition du public, deux principes fondamentaux ont été respectés : la représentativité et l’équilibre. Il a fallu s’assurer, pendant la confection des billets d’invitation, pour la première réunion que les grands groupes suivants sont représentés : - la population rurale ; - la population urbaine ; - les services administratifs et assimilés.

Une trentaine de personnes étaient invitées dans chaque groupe. Neuf villages en tout étaient représentés par trois ou quatre personnes : - le chef du village ou son représentant - un notable ou un conseiller municipal - une femme ou un jeune - le Rapporteur de la réunion autonome (pour les cinq villages où elles se sont tenues).

Pour le groupe urbain, les critères d’invitation étaient : - être un conseiller municipal - ou être un chef de quartier - ou être un leader d’opinion - ou être responsable / membre d’une association

Des rencontres séparées étant programmées avec les femmes et les jeunes, ces deux catégories étaient représentées aux ateliers par trois ou quatre personnes.

Quant au groupe des services, il comprend l’administration publique mais aussi l’administration privée tant laïque que missionnaire. Plusieurs secteurs étaient représentés : - Administration Territoriale ; - Conseil Municipal ; - Santé (hôpital) ; - Éducation (enseignement primaire, secondaire, privé) ; - Environnement et forêts ; - Agriculture (PNVRA, ex- SODERIM) ; - Sécurité (gendarmerie) ; - Religion (mission catholique, mission protestante) ; - Affaires Sociales ; - etc. b) Structure du programme

Pour les deux réunions-ateliers, la structure du programme est sensiblement la même. Grosso modo l’atelier dure un jour, et se déroule en trois séquences principales: 1° Plénière, 16

2° Travaux en commissions, 3° Plénière. La première plénière est réservée principalement aux exposés naturellement suivis de débats.

Après cette phase, les participants sont regr oupés en commissions pour approfondir les différents points abordés ou évoqués au cours de la plénière.

Chaque commission se choisit un président et un rapporteur, et est encadrée par un ou deux facilitateurs membres de l’Equipe. Pour guider les travaux des différentes commissions, des questionnaires ont été élaborés. ll y a deux types de questionnaires : 1° Un questionnaire collectif est prévu pour chaque groupe. Avec une partie commune à tous et une partie spécifique. 2° A la fin des travaux en groupe, un questionnaire individuel différent des autres est distribué à tous les membres des commissions. Son but est de permettre à chacun d’exprimer ses opinions personnelles sur certaines questions. Ce type de questionnaire fera l’objet d’un traitement statistique pour déceler les différentes tendances (Voir Annexes).

La dernière plénière est celle de la présentation des résultats des travaux en commissions. Le rapporteur de chaque groupe lit le rapport des travaux. S’ensuit un jeu de questions-réponses qui s’élargit en débat. Telle est donc la structure du programme du premier atelier, celui de la phase d’investigation.

Le second atelier, celui de présentation et de validation du Rapport provisoire, suivra le même schéma séquentiel, mais le contenu sera par endroits bien différent… Les exposés seront remplacés par la présentation des différentes parties du Rapport, et les questionnaires collectifs par les extraits dudit rapport.

Voilà donc les principes méthodologiques sur lesquels se sont déroulées les consultation participatives, qui ont impliqué des groupes autant que des individus. Mais comment ces groupes et ces individus ont-ils été sélectionnés ? à base de quels critères ? Autrement dit, comment les échantillons ont-ils été constitués ?

C - METHODE DE CONSTITUTION DES ECHANTILLONS

Nous avons constitué deux types d’échantillons différents : un échantillon de groupes et un échantillon d’individus. Le premier type concernait les communautés et les associations, et le second les habitants pris individuellement. La constitution du premier à obéi aux principes suivants :

· Assurer un dosage équilibré des agglomérations rurales situées dans la Réserve et de celles situées autour ; · Dans la zone urbaine, privilégier les groupes constitués. C’est ainsi que l’échantillon de groupes comprenait dans la zone rurale : · trois des cinq villages situés dans la Réserve : Makot, Nden Matock et Mankang ; · deux des quatre villages situés en dehors : Mbokou et Balé ; et, en ville : · une association de jeunes : le CAN / Club des Amis de la Nature, · une association féminine : NLATE BAN’SANZO et · la communauté urbaine en tant que telle, représentée par les membres du Conseil Municipal, les chefs de quartiers et les agents des services publics et assimilés. 17

Cela fait en tout un échantillon de huit groupes.

Quant à la constitution de l’échantillon d’individus, les principaux paramètres étaient : l’âge, le sexe, la composante ethnico-culturelle et, dans une certaine mesure, l’éducation/alphabétisation et la profession.

Les graphiques ci-dessous permettent d’observer concrètement les différentes compositions et les différentes proportions.

Fig. 1 : Répartition de l’échantillon par tranches d’âges

30 25 20 Masculins 15 Féminins 10 5 0 10-19 20-29 30-39 40-49 50-59 60-75 ans ans ans ans ans ans

Telle est donc la composition de la population interrogée par sexe et par tranches d’âges. Comme l’indique la figure, 145 personnes en tout ont répondu au questionnaire, sur 200 environ qui ont reçu les imprimés. En les répartissant par groupes d’âges, nous obtenons la figure suivante :

Fig. 2 : Répartition de l’échantillon par groupes d’âges et par sexe

80

60 Garçons Filles 40 Hommes 20 Femmes

0

En regardant simultanément les deux figures, l’on note que 52 jeunes ont été interrogés, parmi lesquels 34 garçons et 18 filles ; nous classons comme jeunes ceux et celles qui ont moins de 30 ans. Chez les adultes, 93 personnes ont réagi au questionnaire, dont 63 hommes et 30 femmes. En considérant le paramètre sexe, on voit donc que l’échantillon se compose de 97 hommes et 48 femmes tous âges confondus, ce qui donne toujours un total de 145 individus.

D’une façon pratique, la figure suivante fait ressortir la composition de l’échantillon en groupes sociaux, à savoir les hommes, les femmes et les jeunes.

18

Fig. 3 : Composition de l’échantillon en groupes sociaux

36% Hommes 43% Femmes Jeunes

21%

En prenant pour base la composante ethnico-culturelle, le dépouillement des réponses des 145 enquêtés donne les statistiques suivantes :

Tableau 1 : Composition ethnico-culturelle de l’échantillon Mbô (Santchou) Bamiléké Anglophones Autres Non déclarés TOTAL Hommes 30 18 8 5 2 63 Femmes 13 6 3 6 2 30 Jeunes 21 16 4 5 6 52 TOTAL 64 40 15 16 10 145 Pourcentage 44% 26,6% 10,3% 11% 7% 100%

La représentation graphique du total permet une vision simplifiée mais plus claire de la structure de la population enquêtée :

Fig. 4 : Structure ethnico-culturelle de l’échantillon

7% 11% 44% Mbo (Santchou) 10% Bamiléké Anglophones Autres Non déclarés 26,6%

Voilà donc présentée à grands traits la méthodologie que nous avons suivie dans notre approche participativ e au cours de la réalisation de notre projet. Maintenant, concrètement, par rapport au calendrier, comment les activités se sont-elles déroulées sur le terrain ? 19

Chapitre II : DEROULEMENT DES ACTIVITES

Les activités du “Projet Santchou 2000’’ ont été très nombreuses et variées. Cela nous oblige à procéder au préalable à la présélection des principaux éléments à présenter dans le présent rapport, avec un esprit de synthèse. Pour la démarche, nous appliquerons la méthode chronologique, dont l’avantage est qu’elle permet de suivre le développement du Projet dans l’espace et le temps.

Ainsi nous présenterons tour à tour :

· La première phase préparatoire ; · La visite de prise de contact ; · La seconde phase préparatoire ; · La descente sur le terrain ; · La rédaction du Rapport provisoire ; · La visite de présentation et de validation du Rapport ; · La finalisation du Rapport ; · La couverture médiatique.

A - LA PREMIERE PHASE PREPARATOIRE

C’est une phase en deux mouvements, comprenant d’une part les réunions préparatoires, et d’autre part la recherche des documents importants et des informations liminaires.

1 - Réunions préparatoires

Dans le cadre du ‘‘Projet Santchou 2000’’, le CCDD a tenu du 8 au 18 mars une série de réunions et de séances de travail. Elles ont permis d’identifier et de rechercher les documents scientifiques, techniques et administratifs nécessaires.

Il a fallu également définir ou revoir le profil des experts et autres personnes- ressources, et les contacter pour diverses dispositions. Ainsi les personnes-ressources suivantes ont été retenues pour constituer l’Equipe technique :

- Dr. Ngouo Lucas-Vincent, Biologiste / Ecologiste, Université de Yaoundé I, Faculté des Sciences, Département de Biologie et Physiologie végétales. Président de l’ONG ‘‘Centre Africain de Recherche et d’Appui à la Gestion de l’Environnement’’ (CARAGE).

· M. Soh Louis, Ingénieur géomaticien, Spécialiste en SIG et en cartographie numérique.

· M. Kum Ndong Gabriel, Ingénieur informaticien, Spécialiste en Systèmes de Supports environnementaux, 20

Président de l’ONG ‘‘Administrative Committee for the Coordination of Environmental Support Systems’’ (ACCESS)

- M. Nsonkon Paul-Marie, Technicien Supérieur des Eaux et Forêts, Spécialiste en Faune.

Un comité scientifique a également été mis sur pied pour la rédaction du Rapport final.

Les membres sont : · Dr. Ndé, · Dr. Ngouo · M. Soh Louis · M. Naoussi André · M. Soh Jean-Claude, Ingénieur des Eaux et Forêts Spécialiste en Gestion de l’Environnement · M. Tamghé Jean-Marie, Ingénieur statisticien, Spécialiste en Evaluation des Projets.

Ce sont ces différentes compétences qui ont conçu et développé les différents instruments de travail, notamment les trames de questionnaires, les fiches, les calendriers, etc.

Entre autres réunions s’est tenue, le 12 mars 2000, une Assemblée Générale Extraordinaire. A côté des questions relatives à la vie du CCDD, le principal point à l’ordre du jour concernait justement l’exécution du ‘‘Projet Santchou 2000’’, la première tranche du financement étant déjà disponible. A cette occasion les différents organes d’exécution ont été constitués, les tâches clarifiées, les responsabilités attribuées, le calendrier général du Projet arrêté et la date de la visite de prise de contact fixée.

2 - Recherche des documents et informations

Dès l’annonce du virement partiel du financement, et parallèlement aux réunions préparatoires, les membres de l’Organisation se sont investis dans la recherche documentaire et dans l’information. Plusieurs documents ont ainsi été consultés, empruntés ou achetés. Il s’agit des documents scientifiques, des revues spécialisées, des ouvrages d’experts, des travaux académiques, des brochures, des posters, des cartes et autres (voir Bibliographie).

Nous avons également recueilli de précieux renseignements au cours des rencontres ou des entretiens avec des élites et des personnes originaires de l’Arrondissement de Santchou résidant à Yaoundé.

Last but not least, le CCDD a sollicité et obtenu du Ministre de l’Environnement et des Forêts une autorisation officielle d’accès à la Réserve de Faune de Santchou, laquelle autorisation a été d’une importance capitale pour la phase suivante.

B - VISITE DE PRISE DE CONTACT

Elle s’est déroulée du 20 au 22 mars 2000, en deux phases, l’une à et l’autre à Santchou. L’équipe était composée de : Dr. Ndé, Président Exécutif du CCDD, M. 21

Naoussi André, Secrétaire Général, Dr. Ngouo, Chef d’Equipe Technique et M. Kum Ndong Gabriel, personne-ressource.

L’objet premier de la visite était de rencontrer les autorités administratives et les responsables de la gestion de la Réserve de Faune de Santchou au niveau provincial et local, pour leur présenter le Projet. Le second était de réaliser un diagnostic rapide de la situation actuelle de la Réserve.

Ainsi, à Bafoussam le 20 mars lors de la visite à la Délégation Provinciale de l’Environnement et des Forêts, nous avons eu à nous entretenir longuement sur le Projet et sur la Réserve avec le Délégué Provincial, M. Ngala Isaac. Celui-ci a vivement félicité le CCDD pour son initiative, et l’a encouragé à persévérer dans cette action salutaire pour la Réserve. Nous lui avons remis une copie de l’autorisation officielle d’accès à la Réserve.

Le même jour dans l’après-midi, l’équipe du CCDD est arrivée à Santchou. Elle a pris contact avec diverses autorités de l’Arrondissement : le Sous -Préfet, le Commandant de la Brigade de Gendarmerie, le Chef de Poste Agricole, le Chef de Poste Forestier, et le Conservateur de la Réserve de Faune.

Tout au long de son séjour, l’équipe du CCDD a identifié les leaders d’opinion, les chefs traditionnels et les dirigeants d’associations.

Une séance de travail a été organisée dans le bureau du Conservateur. Celui-ci a fait une présentation sommaire de l’état de la Réserve : La situation est des plus alarmantes.

Et l’équipe du CCDD s’en rendra compte au cours d’une descente dans la Réserve, en compagnie du Conservateur et d’un de ses collaborateurs. Des maisons en matériaux définitifs sont visibles un peu partout, de vastes clairières artificielles s’ouvrent dans les bois, les tronçonneuses font du bruit de toutes parts…

Néanmoins, en s’enfonçant dans la partie sud de la Réserve, on s’aperçoit qu’il existe encore de larges bandes de forêts intactes. Mais l’homme en est déjà si proche…

Au cours de la brève tournée dans le villages, les projet de questionnaire est testé, et les premières informations de terrain récoltées. Après trois jours de travail, l’équipe rentre à Yaoundé, inquiète pour la Réserve mais non pas désespérée…

C – SECONDE PHASE PREPARATOIRE

Une fois à Yaoundé, nous nous attelons à la préparation de la descente sur le terrain. Au cours des réunions et des séances de travail organisées à cet effet, on tire les leçons de la visite de prise de contact, et on revoit le programme dans le détail.

Pendant cette période une carte de la zone de la Réserve est réalisée, pour permettre une meilleure visibilité sur le terrain. Le thème de l’atelier est arrêté : «Atelier de Réflexion et d’Echanges sur la Réserve de Santchou et la Réduction de la Pauvreté ». De même le programme dudit Atelier est élaboré ; les thèmes et contenus des exposés sont discutés en réunion, et les conférenciers désignés.

22

Un calendrier général du Projet est adopté, ainsi que les calendriers spécifiques. Les derniers réglages terminés, le CCDD se remet sur la route de Santchou.

D – DESCENTE SUR LE TERRAIN

Du 10 au 19 avril 2000, l’Equipe Opérationnelle s’est donc déployée sur le terrain à Santchou. Elle comprenait :

· Dr Ndé : Président des séances de réunions · M. Naoussi André : Rapporteur · Dr Ngouo Lucas-Vincent : Chef d’Equipe Technique · M. Soh Louis : Animateur · M. Nsonkon Paul-Marie : Animateur · M. Ekémé Gabriel : Facilitateur/Interprète

Le Calendrier de la phase de descente sur le terrain se présentait comme suit :

Date Activités 9 avril Arrivée à Santchou 10 – 12 avril Formalités administratives Tournée d’information dans les villages Visites de la Réserve et prises de vues Préparation des réunions de consultation Préparation de l’Atelier du 17 avril 13 – 14 avril Consultations participatives dans les villages 15 – 16 avril Réunions autonomes dans les villages Consultations dans la ville Visites de la Réserve 17 avril Organisation de l’Atelier Interviews Entretiens 18 – 19 avril Visite des villages et feed-back de l’Atelier Visites de la Réserve Réunion-bilan 20 avril Départ pour Yaoundé

1- 10 – 12 Avril 2000

D’entrée de jeu, l’Equipe remplit les formalités administratives indispensables à son action : demande d’autorisation de réunion et demande de parrainage de l’Atelier, visas officiels sur les communiqués à afficher et sur les invitations à distribuer, etc. Une rencontre a lieu avec les responsables directement concernés par la Réserve : le Conservateur et le Chef de Poste Forestier.

Pendant ces trois jours, l’Equipe a des entretiens avec les Chefs traditionnels et les notables des villages à l’intérieur et autour de la Réserve. Elle se rend tour à tour à Mbongo, Mbokou, Mogot, Mokot, Nden-Matock, Moyong, Mankang et Balé. Seul le village Ngang n’est pas atteint, à cause de son éloignement et surtout de son enclavement. Fort 23 heureusement, le chef de ce village était à Santchou-ville pour un bref séjour ; nous en avons profité pour avoir des entretiens avec lui et l’inviter à l’Atelier du 17 Avril. Aux chefs traditionnels et aux notables, le Projet fut présenté dans le détail : sa philosophie, son approche, ses objectifs, ses avantages, etc. Après moult explications, ils finissaient par manifester leur intérêt, ce qui a constitué un atout décisif pour la suite des activités, particulièrement pour les réunions avec les populations.

Une action similaire est dirigée vers les chefs de quartiers et certains leaders d’opinion dans la ville de Santchou. Quelques-uns se montrent méfiants, voire réticents, alors que la plupart épousent vite notre cause. Mais tous acceptent l’invitation à l’Atelier.

Dans les après-midi, les membres de l’Equipe sillonnent la forêt, tantôt sur les motos, tantôt en voiture, tantôt à pied, pour constater l’ampleur des dégâts, mais aussi pour admirer sa beauté et ses richesses. C’est l’occasion pour le photographe et le caméraman de filmer la Réserve et ses multiples facettes.

2 - 13 – 14 avril 2000

Le 13 avril, trois séances de travail sont organisées respectivement dans les villages Mbokou, Mokot, et Nden-Matock. Ces réunions consultatives se déroulent en suivant la méthodologie présentée au Chapitre I.

A l’arrivée de l’Equipe à Mbokou les notables et les populations , avertis quelques jours plus tôt, se réunissent dans la cour de la chefferie, sous la conduite du chef du village en personne. Le facilitateur rappelle l’objet de la visite, dit un mot sur le CCDD et passe la parole au Président. Celui-ci remercie les populations de leur accueil chaleureux. Puis il expose l’objet, de la visite et pose la problème : Comment allons -nous faire pour arrêter le processus de dégradation de la Réserve ? Pourquoi se dégrade-t-elle ? qu’en pensent les Chefs et leurs populations ? A sa suite, le Conservateur évoque les dispositions de la loi et la nécessité de la préservation de la Réserve, dans l’intérêt de la population elle-même. D’autres membres de l’Equipe prennent la parole pour insister encore sur les menaces qui pèsent sur la Réserve et sur les conséquences de la dégradation, en citant les effets de la déforestation et de la perte de la biodiversité dans d’autres parties du Cameroun ou du monde.

Les réactions des populations laissent voir clairement qu’elles n’ont jamais été sensibilisées à fond sur la signification et la nécessité de cette Réserve. Elles se disent disposées à diminuer ou même à abandonner l’agriculture extensive et la chasse, pourvu qu’on les forme et les aide à développer d’autres activités rentables. Les jeunes, très nombreux ici, déclarent que c’est le chômage qui les contraint à se replier au village et à exploiter les richesses de la Réserve. Des exemplaires des questionnaires sont distribués. A la fin, les populations sont invitées à se réunir le 15 ou le 16 avril en session autonome, pour poursuivre les discussions sur le sujet et répondre aux questionnaires et d’en dresser le rapport qui sera remis au CCDD par leurs délégués lors de l’Atelier de 17 avril à Santchou. Ceux-ci apporteront également les exemplaires du questionnaire individuel dûment remplis.

Au village Mokot, l’ambiance et la démarche sont pratiquement les mêmes qu’à Mbokou. Ici, les habitants semblent plus hostiles à la notion de conservation ; ils réclament même de bonnes routes pour écouler facilement les produits de l’agriculture et du maraîchage. Néanmoins ils déclarent que la prise de conscience est désormais possible, pourvu que le CCDD ne s’en tienne pas aux belles paroles, mais aide concrètement les paysans à vivre mieux. A Nden-Matock, les participants avouent sans gêne que les plantations se créent à un 24 rythme accéléré ces dernières années. Un doigt accusateur est immédiatement pointé sur les populations allogènes (venant des provinces de l’Ouest, du Nord-Ouest et du Sud-Ouest) ; et pourtant, selon d’autres sources, ce sont les autochtones eux-mêmes qui leurs vendent les terres.

Ainsi s’achève la première journée de consultations participatives, riche d’enseignements. Le soir, l’Equipe se réunit pour faire le bilan de la journée, et revoir le programme pour la suite des travaux.

Le 14 avril, deux réunions sont organisées, l’une à Mankang et l’autre à Balé. La démarche est la même que celle adoptée la veille. Dans ces deux villages, l’on se plaint également de la forte pression démographique, agricole et économique exercée par les populations allogènes. Ici également, le chômage a renvoyé de nombreux jeunes au village. A Balé cependant, les populations et les élites se mobilisent pour contrecarrer toute vente de terrain à des étrangers. Un vibrant remerciement est adressé au CCDD, qui est invité à persévérer dans son initiative, et à revenir pour faire des choses concrètes.

3- 15 – 16 avril 2000

Ces deux journées sont réservées aux consultations participatives à Santchou-Ville, avec les jeunes et les femmes. Les deux groupes rencontrés sont : le Club des Amis de la Nature (CAN) du Lycée Bilingue de Santchou, et l’Association des Femmes Sanzo, dénommée NLATE BAN’SANZO (‘‘Sanzo’’ est l’appellation locale et originelle de Santchou).

Les jeunes sont rencontrés deux fois, eu égard à leur engouement, les 15 et 16 avril, dans les locaux du Lycée Bilingue de Santchou – où au reste le CAN mène des actions écologiques remarquables. Le premier jour, après le mot de bienvenue du Proviseur et les exposés liminaires du Dr Ndé et du Dr Ngouo, les débats s’engagent et se déroulent sur des chapeaux de roues. Nous avons été fortement impressionnés par l’ouverture d’esprit, la profondeur de réflexion et la pertinence des arguments des jeunes. Pour eux par exemple, le braconnage et l’agriculture extensive sont aggravés à Santchou par la pauvreté des habitants, la polygamie introduite par les populations allogènes (beaucoup de femmes signifiant beaucoup d’enfants, beaucoup de bouches à nourrir, et main-d’œuvre abondante), et les cultures industrielles (café, cacao) introduites par ces mêmes allogènes. De même la disparition des éléphants serait-elle due en partie à l’occidentalisation des jeunes, qui refusent de s’initier au totémisme...

Les jeunes souhaitent que la Réserve soit restaurée de toute urgence, pour qu’ils aient la chance ne serait-ce que de voir certaines espèces naguère présentes, dont on leur parle tant. Mais ils soulignent que pour amener les gens à se détourner de l’agriculture extensive et du braconnage, il faudrait expérimenter avec succès des activités alternatives génératrices de revenus. Bref, l’intérêt des jeunes était si grand et les discussions si riches et passionnantes qu’une seconde session fut organisée le lendemain, juste avant la visite chez les femmes.

La réunion participative avec les femmes se tient donc le 16 avril dans les locaux de la Mairie de Santchou. La démarche est la même que celle adoptée avec les jeunes. Et ici aussi les discussions sont vives, et l’engouement manifeste.

D’après les femmes, l’ignorance est la première cause de la destruction de la Réserve. Vient ensuite la pauvreté, accentuée des dernières années par la crise économique et surtout la fermeture de la SODERIM. En effet, les femmes recevaient gratuitement de cette entreprise étatique des parcelles aménagées, et faisaient le poids face aux hommes parce que le riz se 25 vendait très bien, parfois mieux que le café et le cacao. La Réserve est aussi détruite pour des raisons culturelles liées au totémisme : les uns utilisaient leurs éléphants-totems pour détruire les plantations des autres, et ceux-ci se vengeaient en tuant ces animaux nuisibles.

Les femmes de l’Association se disent mieux averties désormais, mais révèlent que les personnes qu’ils faut gagner à la cause de la conservation de la Réserve, ce sont surtout les hommes. Ils peuvent freiner l’agriculture, la déforestation et le braconnage, et même faire revenir la plupart des éléphants sous certaines conditions… Pour leur part, les femmes se disent prêtes à s’adonner aux activités alternatives qui peuvent générer des revenus substantiels.

Fait hautement significatif, les femmes ont tenu à clore la réunion par une séance de prière adressée au Tout-Puissant, pour qu’il aide le CCDD dans son action de sensibilisation des populations et de restauration de la Réserve.

Dans la même journée du 16 avril, nous avons rencontré tour à tour les ministres du culte (le Pasteur de l’Eglise Evangélique, et le Curé de la Paroisse Notre-Dame), et le s délégués des associations des populations autochtones (Mbô), et allogènes (Bamiléké, Anglophones) avec qui nous avons eu des entretiens fructueux. Le Curé, l’Abbé Gérard Tchientcheu, visiblement très intéressé, propose aux responsables du CCDD de faire une intervention au cours d’une messe dominicale pour sensibiliser les fidèles. Le CCDD ne se fait pas prier deux fois, et la date est fixée au dimanche 21 mai, lors de la visite de présentation du Rapport.

4 - 17 avril 2000

La journée du 17 avril est entièrement consacrée à l’«Atelier de Réflexion et d’Echanges sur la Réserve de Santchou et la Réduction de la Pauvreté».

Les délégués des villages ramèneront les questionnaires individuels remplis. Quatre villages déposeront les rapports des réunions autonomes : Mbokou, Mokot, Nden-Matock et Balé. Le délégué de Mankang quant à lui, fera un rapport oral de leur réunion autonome.

Des interviews seront réalisées sur cassette-vidéo, dont la plus importante étant celle accordée par M. Yonke Jean-Baptiste, anc ien Ministre de l’Agriculture, et ancien Directeur Général de la SODERIM (Société de Développement de la Riziculture de la Plaine des Mbô).

Nous reviendrons sur cet important atelier, qui fait l’objet du prochain chapitre.

5 - 18 – 19 avril 2000

Le le ndemain de l’Atelier est consacré aux séances de photos, et à un tournage vidéo au sein et autour de la Réserve, de l’aube au crépuscule. Dès 6 heures du matin, l’Equipe pénètre dans la forêt, accompagné du photographe et du caméraman. Surprise : c’est à l’aube que débute exploitation illégale des produits forestiers. L’Equipe du CCDD tombe en effet, aux premières lueurs du jour, sur plusieurs colonnes de cueilleurs de feuilles (une quinzaine de personnes par groupe), à la recherche des feuilles de «Maranthacée». Ces feuilles servent d’emballages traditionnels pour divers produits alimentaires sur les marchés et dans les ménages camerounais. Les exploitants les cueillent contre paiement d’une taxe aux chefs autochtones dans le domaine privé de l’Etat, et de surcroît une aire protégée !.

26

Le 19 avril, l’Equipe fait un dernier tour dans les villages, pour remercier les chefs traditionnels et les notables pour leur coopération, avoir le feed-back des consultations et de l’Atelier, et mesurer l’impact général de l’action.

Le 20 avril l’Equipe regagne Yaoundé, satisfaite du travail abattu, et particulièrement du fort taux de participation des population à chaque consultation participative.

Pour terminer cette section sur les consultations participatives, nous présentons sous deux formes les taux de participations des populations à chaque réunion.

Fig. 5 : Taux de participation aux réunions consultatives

Club CAN Femmes Sanzo Santchou - Ville Bale Mankang Nden-Matock Mokot Mbokou

0 10 20 30 40 50 60 70

Nombre de participants

Le tableau suivant donne des chiffres en plus précis sur l’affluence du public à chaque consultation dans les villages et en ville :

Tableau 2 : Chiffres des participations aux réunions consultatives

Village / Groupe Nombre de participants Mbokou 24 Mokot 52 Nden-Matock 15 Mankang 29 Bale 46 Santchou - Ville (* ) 65 Femmes Sanzo (NLATE BAN’SANZO) 32 Club des Amis de la Nature (CAN) 21 TOTAL 284 (*) Signalons qu’à Santchou-Ville la consultation s’est faite sur invitation, puisque c’était un atelier. Environ 90 invitations avaient été distribuées.

27

E - REDACTION DU RAPPORT PROVISOIRE

Une réunion de bilan et de compte rendu se tient au siège du CCDD le 24 avril 2000. Au cours de la même réunion, le travail de rédaction du Rapport provisoire est organisé. On convient de la structure générale et du contenu du document ; les différentes parties à rédiger sont distribuées, et les délais de remise des manuscrits au secrétariat sont arrêtés. Chacun se met à l’œuvre.

De son côté le statisticien reçoit les données brutes du terrain et les réponses au questionnaire. Il en est un traitement statistique que les autres exploiteront dans leurs rédactions respectives.

Le 15 mai 2000, le Rapport provisoire est déjà prêt pour exploitation. Il est question d’aller le présenter aux populations de Santchou en vue de sa validation.

F - VISITE DE PRESENTATION DU RAPPORT

Cette dernière visite à Santchou s’est déroulée du 18 au 22 mai 2000. Son calendrier était le suivant :

Date Activités 17 mai Arrivée à Santchou 18 -19 mai Réunions dans les villages 20 mai - Participation à la Fête Nationale du 20 Mai - Rencontres avec les élites extérieures 21 mai - Intervention à la messe - Réception au presbytère offerte par le Curé - Réunions avec les femmes et les jeunes 22 mai Atelier de présentation du Rapport à Santchou-Ville 23 mai Retour sur Yaoundé

1 - 18 -19 mai 2000

Comme à la phase de descente sur le terrain, trois rencontres sont organisées le 18 mai tour à tour avec les populations des villages Mbokou, Mokot et Nden- Matock. Cette fois le public est plus nombreux, il a presque doublé à Mbokou et à Nden Matock. Dans l’ensemble, les gens se reconnaissent dans le Rapport, mais tiennent à ce que l’on souligne avec force que la déforestation et l’agriculture extensive sont surtout dues à la misère dans laquelle ils vivent. L’autre facteur majeur étant le chômage des jeunes, qui arrêtent l’école faute de moyens financiers, ou qui ne trouvent pas d’emplois après les diplômes.

28

Dans les villages Mankang et Balé le 19 mai, même affluence des paysans. Et les attentes et les avis sont les mêmes que ceux des habitants rencontrés la veille dans les trois villages précédents. L’on ajoute à Balé qu’il faut recommander dans le Rapport que l’Etat mène des actions énergiques, pour combattre la vente de terres à l’intérieur de la Réserve.

2 - 20 mai 2000

C’est la Fête Nationale du Cameroun. Pour mieux apprécier et évaluer les richesses culturelles de la région, l’équipe du CCDD prend place à la tribune officielle sur invitation du Sous - Préfet de Santchou. Ladite tribune est d’ailleurs parée de nombreux posters géants du CARPE offerts par le CCDD lors des précédentes visites. Au cours du défilé les membres du Club des Amis de la Nature du Lycée Bilingue de Santchou défilent en brandissant des exemplaires de ces posters. Et la visite des groupes de danses permet au CCDD de découvrir les multiples facettes de la culture locale.

Nous profitons de l’occasion pour rencontrer les élites extérieures venues participer à la fête dans leur arrondissement d’origine. Beaucoup de ces hommes se disent agréablement surpris et contents du Projet du CCDD et surtout de l’approche participative pour laquelle il a opté. Affirmant leur soutient moral au projet, ils promettent de servir d’agents de conscientisation auprès des populations.

3 - 21 mai 2000

Le lendemain, dimanche 21 mai 2000 comme convenu, l’Équipe va à la messe. A cette occasion, Monsieur Naoussi André, le Secrétaire Général, prend la parole à l’autel de la Chapelle Notre-Dame de Santchou, pour les quinze minutes réservées à l’homélie dominicale. Son intervention souligne les enjeux et l’intérêt du «Projet Santchou 2000» pour les populations de Santchou, pour le Cameroun et pour l’Humanité. Puis elle rappelle avec insistance l’attitude nouvelle que l’on attend des populations locales envers la Réserve, ainsi que le rôle fondamental des élites intérieures et extérieures de l’Arrondissement de Santchou. Notons que la chapelle est archicomble, ceci grâce à la sensibilisation menée deux semaines durant par le Curé de la localité. Après la messe, celui-ci offre une réception au presbytère en l’honneur du CCDD ; de nombreuses élites font partie des invités.

Dans l’après-midi et la soirée, deux rencontres ont lieu, avec les jeunes d’abord, et les femmes ensuite. Suivant les centres d’intérêt des uns et des autres, les sections du Rapport sont sélectionnées, lues et éventuellement amendées ou complétées. Les jeunes demandent surtout que l’on insiste sur les programmes d’information et de sensibilisation, et que des activités alternatives stables soient proposées aux jeunes désœuvrés qui, pour subsister, sont ou seront obligés de s’attaquer à la Réserve. Réaction similaire chez les femmes qui approuvent le Rapport après l’avoir examiné dans la forme et dans le fond, et souhaitent que le Projet ne s’arrête pas là... Elles attendent ardemment, disent-elles, que le CCDD revienne à Santchou le plus tôt possible, cette fois-là avec des projets d’actions concrètes pour les femmes, les jeunes, les hommes et pour la Réserve.

29

4 - 22 mai 2000

Un atelier de présentation du Rapport est organisé à Santchou-ville. Le public est composé des mêmes groupes de participants qu’à l’atelier du 17 avril (cf. chapitre III), à l’exception du groupe des populations rurales. Cette fois d’autres jeunes ont été invités, d’autres femmes aussi, ainsi que les enseignants. Ceux-ci ont formé un groupe à part lors des travaux en commissions.

Ces travaux, qui consistaient en l’examen et la validation du Rapport, étaient organisés comme suit : - Commission N°1 : Services administratifs et assimilés Tâche : Chapitre III du Rapport (l’Atelier du 17 avril)

- Commission N°2 : Populations urbaines Tâche : Chapitre IV du Rapport (Causes de la dégradation)

- Commission N° 3 : Enseignants Tâche : Chapitre V (Solutions) A la fin des travaux, chaque commission présente en plénière ses observations sur son chapitre, et remet le texte annoté au bureau de séance composé de l’Equipe de CCDD. Après quoi l’Atelier prend fin sur une note de satisfaction générale.

En fin d’après- midi, une réunion interne de synthèse est organisée à l’hôtel où réside l’Equipe. Le lendemain, tout le monde regagne Yaoundé.

G - FINALISATION DU RAPPORT DU PROJET

Une fois à Yaoundé, on s’attèle immédiatement à la finalisation du Rapport du «Projet Santchou 2000». Une réunion de compte rendu de la visite de validation du Rapport et de bilan général des trois mois de présence à Santchou est tenue au siège.

Ensuite, au cours de diverses séances de travail l’on intègre les différents inputs qui sont les résultats des lectures croisées lors des réunions de terrain. Sous la coordination du Directeur du Projet, l’ensemble est harmonisé, et complété par les différents éléments annexes. Parallèlement l’on confectionne un album d’une centaine de photos pour accompagner le Rapport.

H - COUVERTURE MEDIATIQUE

En réalité cette section n’est pas une phase en tant que telle. Il s’agit ici d’un ensemble d’activités qui ont accompagné l’exécution du Projet dans les phases déterminantes.

30

La cellule de Communication du CCDD s’est beaucoup activitée auprès des médias d’Etat et des journaux privés, pour que le Projet bénéficie d’une couverture médiatique efficace. L’objectif majeur ici était et demeure de toucher l’opinion locale, nationale et internationale sur le triste sort de la Réserve de Faune de Santchou ; raison pour laquelle nous avons privilégié les journaux disposant d’un site Internet…

La couverture médiatique a donc été assurée par la presse écrite, la radio et la télévision. La photographie et la vidéo ont été mises à contribution comme supports de communication.

1 - Presse écrite

Ainsi, l’Assemblée Générale Extraordinaire du 12 mars 2000, dont l’ordre du jour portait essentiellement sur l’exécution du « Projet Santchou 2000 », a été annoncée deux fois, en français et en anglais, dans le quotidien national Tribune (N° 7057 / 3346 du 10 mars 2000, pp10 et 11). Ce quotidien est disponible sur Internet : http // : www.cameroontribune.net.cm. Le bi-hebdomadaire Mutations (N°312 du 10 mars 2000) qui paraît en français a publié l’annonce (p. 14), de même que l’hebdomadaire d’expression anglaise The Herald (N° 881 du 10-12 mars 2000, p.3).

Du 14 au 18 avril, un envoyé spécial de Mutations a séjourné aux côtés de l’Equipe du CCDD à Santchou. Son reportage a fait l’objet d’une annonce à la « une » et a constitué l’essentiel de la rubrique « Sciences et Environnement » de Mutations N°332 du 02 mai 2000 (pp.1 et 14). Ce journal dispose également d’un site Internet : http // : www. mutations.net.

Egalement, un envoyé spécial de l’hebdomadaire régional Ouest-Echos a couvert les travaux de l’Atelier du 17 avril. Son reportage est paru dans Ouest-Echos N° 136 (du 10 au 16 mai 2000 (p.4). Ce journal possède lui aussi un site Internet : http//:www. wagne.net/ouestechos.

2- Radio

L’Assemblée Générale Extraordinaire du 12 mars 2000 a également été annoncée plus d’une fois par le Poste National de Radio-Cameroun, les 9, 10 et 11 mars.

L’annonce a été diffusée, puis traitée comme information par la chaîne urbaine «Yaoundé FM 94», les 10 et 11 mars 2000. La station provinciale ‘‘CRTV-OUEST’’ à Bafoussam, a à maintes reprises annoncé et commenté la descente sur le terrain d’avril 2000, aussi bien en français et en anglais qu’en Mbô, qui est la langue parlée par les populations de Santchou.

3 - Télévision

La télévision nationale (CRTV) a couvert l’Atelier du 17 avril à Santchou. Les reportages ont été diffusés le 03 mai 2000 dans deux émissions : « Le quotidien des Provinces » (en français) et « Provincial News » (en anglais).

31

4 - Photographie

Au cours des activités de terrain, l’Equipe du CCDD était accompagnée par un photographe, dont le rôle était de filmer la Réserve dans ses multiples visages – les positifs comme les négatifs. A la fin du Projet il a réalisé près de trois cents photos sur la nature et les hommes.

Après sélection, ces photos seront réunies en un album thématique qui sera disponible dans la photothèque du CCDD, et un album d’une centaine de photos sur la Réserve sera confectionné et envoyé à CARPE-Cameroun.

5 - Vidéo

Tout au long de la descente sur le terrain d’avril 2000, le CCDD s’est attaché les services d’un caméraman. Guidé et orienté par les experts de l’Equipe, il a pris des images vivantes de la Réserve et de la région, ainsi qu’une partie des activités du Projet. Ces images sont disponibles au CCDD, sur deux cassettes VHS de 180 minutes chacune. 32

Chapitre III : ORGANISATION DE L’ATELIER

Dans le cadre du Projet, il a été organisé le 17 avril à l’Hôtel Yanzé de Santchou un séminaire-atelier intitulé «Atelier de Réflexion et d’Echanges sur la Réserve de Santchou et la Réduction de la Pauvreté». Cet atelier, regroupait un public mixte composé en majorité des habitants de la ville, mais aussi des délégués des neuf villages de la Réserve.

Pourquoi organiser tout un séminaire-atelier ? La raison et l’objectif, c’est qu’il fallait frapper les consciences en organisant un grand événement pour montrer la gravité du problème et leur en faire prendre conscience. Et, là-dessus, nous pouvons affirmer que l’objectif a été atteint, si on en juge par les impressions des uns et des autres après le séminaire. En effet, de mémoire d’autochtones, on n’avait jamais assisté à un ‘‘événement pareil et si grandiose’’ à Santchou, d’autant plus grandiose que, quelques temps après, le reportage est passé à la télévision nationale ! ‘‘Donc cette affaire de Réserve et de dégradation est si importante ! ?’’ se sont exclamés plus d’un…

Cette partie du Rapport résume les grandes articulations de cet important atelier. Ces articulations comprennent essentiellement la cérémonie d’ouverture, la séance des exposés, les travaux en commissions et la cérémonie de clôture. L’intégralité des discours et des exposés figure en annexe.

A - CÉRÉMONIE D’OUVERTURE

1- Mot de bienvenue du Maire de la Commune Rurale de Santchou

La cérémonie d’ouverture a démarré à 9h30 avec l’allocution du Maire de la Commune Rurale de Santchou. Le Maire s’est dit très heureux de recevoir dans sa localité la Délégation du CCDD. Il a terminé en souhaitant bon séjour à tous les membres de l’équipe du CCDD. Puis il a évoqué le problème de la dégradation de la Réserve tout en le liant à celui de la pauvreté ambiante dans l’Arrondissement de Santchou.

2 - Mot du Président Exécutif du CCDD

Le Président Exécutif du CCDD, le Dr. Ndé, va axer son intervention sur quatre articulations, à savoir l’objet de la rencontre, les objectifs du CCDD, les motivations de l’intérêt du CCDD pour la Réserve, et enfin les enjeux de l’Atelier.

Sur l’objet de la rencontre, l’orateur souligne qu’il s’agit d’un atelier de réflexion et d’échange d’idées sur la Réserve de Faune de Santchou et la réduction de la pauvreté dans la région. Il s’agit ici de tenter de trouver un début de solution à deux problèmes liés, à savoir la dégradation de la Réserve et la pauvreté de la population.

33

Au sujet des objectifs du CCDD, le Dr. Ndé a révélé qu’il s’agit d’une Organisation Non Gouvernementale (ONG) dont la mission première est de coordonner les actions visant une gestion et une utilisation rationnelles des ressources de la nature, de manière à ce qu’elles puissent amener un développement continu et croissant. Le CCDD lutte pour la protection de l’environnement et l’éradication de la pauvreté et de la misère.

Sur les motivations du choix de la Réserve de Faune de Santchou, le Dr Ndé a évoqué la fréquence des nouvelles alarmantes sur cette aire protégée et son importance sur le plan national et international, avant de louer les efforts et le rôle que les dynamiques populations ont joué pour sa gestion et sa protection avant l’arrivée des Blancs, pendant la colonisation et après l’Indépendance. Pour le Président Exécutif du CCDD, la gestion irrationnelle et irresponsable de la Réserve de Faune de Santchou que tout le monde décrie de nos jours ne saurait incomber aux seules populations locales et riveraines. La démarche du CCDD n’est pas de venir en gendarme auprès des populations. Le CCDD vient les écouter, les comprendre, leur parler, leur demander leurs problèmes, les aider à les résoudre.

Puis l’orateur présente les enjeux de l’Atelier : - créer un climat de dialogue franc et constructif entre les différentes parties intéressées ; - sensibiliser les uns et les autres sur la dégradation de la Réserve et ses conséquences ; - donner aux populations l’occasion de s’exprimer publiquement sur la Réserve ; - connaître les causes profondes de la dégradation de la Réserve ; - connaître les conditions de vie des populations ; - jeter les bases du processus de restauration de la Réserve.

Pour terminer, le Président Exécutif du CCDD plaide pour la renaissance de la Réserve de Faune de Santchou, en poussant un émouvant cri du cœur :

« La Réserve est l’âme de Santchou. Si la Réserve meurt, Santchou est mort. Si la Réserve revit, Santchou brillera comme une étoile spéciale dans le ciel de l’Ouest, du Cameroun, de l’Afrique et – pourquoi pas ? – du monde»

3- Discours d’ouverture du Sous-Préfet de Santchou

Dans son allocution, le Sous-Préfet de l’Arrondissement de Santchou souligne avec force que la Réserve de Faune de Santchou est un don de la nature pour les populations, et que l’État a pour seul devoir de les aider à la protéger. Il a regretté le fait que la Réserve soit devenue aujourd’hui un domaine de prédilection pour les habitats en matériaux définitifs et pour les planteurs de caféiers et cacaoyers. Il a souligné avec force que l’Etat du Cameroun est fermement engagé à jouer son rôle régalien de sauvegarde de la Réserve. Raison pour laquelle il a commis pour la Réserve un Conservateur avec résidence à Santchou.

Le Sous-Préfet de Santchou a tenu à féliciter l’initiative prise par le CCDD. Une initiative qui selon lui vient compléter celles prises par l’État dans le cadre de la lutte contre la pauvreté et la conservation des écosystèmes menacés. Il a émis le vœu que l’initiative du CCDD soit le début d’une collaboration durable entre l’Etat, la Société civile et les populations dans l’intérêt bien compris de ces populations et de la Réserve. 34

Il a terminé son propos en exhortant les participants à travailler avec détermination et franchise, tout en les rassurant du soutien du Gouvernement de la République et de sa volonté de résoudre les questions de l’environnement et du développement durable.

B- EXPOSES ET DEBATS

La première séance plénière a été consacrée à une série d’exposés suivis de débats.

1- Exposé N°1 : ‘‘La Réserve de Faune de Santchou au bord du naufrage’’

Cet exposé a été présenté par Monsieur Nsonkon Paul Marie, Conservateur de la Réserve de Faune de Santchou. On retiendra de cet exposé que la Réserve de Faune de Santchou date de l’époque coloniale, créée par arrêté Nº 262 du 27 juillet 1947 du Haut-Commissaire de la République française au Cameroun. Elle a été gérée successivement par le Ministère de l’Agriculture, puis par la Délégation Générale au Tourisme, et enfin aujourd’hui par le Ministère de l’Environnement et des Forêts.

Selon le Conservateur, l’état de la Réserve de Faune de Santchou aujourd’hui frise l’abandon. La Réserve est agressée par les agriculteurs qui construisent de façon anarchique et utilisent les feux de brousse pour créer les plantations. La faune sauvage a fortement diminué et certaines espèces ont même disparu. Les populations riveraines sont intimement liées à la Réserve d’où elles tirent l’essentiel pour leur survie.

Le Conservateur s’est interrogé sur la question de savoir comment concilier les besoins des populations qui ont des impératifs de survie et les objectifs de conservation chers au Gouvernement.

Une série de propositions ont été avancées, entre autres : - le reboisement des parcelles détruites, - le bornage de la Réserve, - une évaluation de la poussée démographique dans la Réserve, - l’initiation des populations aux activités alternatives, - le renouvellement, le renforcement et l’équipement du Service de la Conservation (moyens de transport, moyens humains, matériels et financier), - l’inventaire des espèces animales et végétales de la Réserve.

Le Conservateur a terminé en énumérant les avantages que pourrait procurer la Réserve si elle était restaurée.

1- Exposé N°2 : ‘‘Impacts de la déforestation et nécessité de la préservation de la Réserve de Faune de Santchou’’

L’exposé a été présenté par M. Ngouo Lucas Vincent, Docteur en Biologie Végétale, Président Exécutif du Centre Africain de Recherche et d’Appui à la Gestion de l’Environnement 35

(CARAGE). On retiendra de cette intervention que la déforestation a un impact tant au niveau du climat global (macro-climat) que local (micro-climat).

Au plan global, la déforestation peut être à l’origine de la dégradation de la couche d’ozone qui est un écran contre les radiations nocives provenant du soleil. La destruction de la couche d’ozone est à son tour à l’origine de l’effet de serre et du réchauffement du globe.

Au plan local, la déforestation sur les versants des montagnes est à l’origine des inondations constatées aujourd’hui dans la plaine de Santchou. Il a également révélé que la disparition de certaines espèces animales pourrait entraîner la disparition de certaines espèces végétales.

3 - Exposé N°3 : ‘‘Conditions de vie des populations de la zone de la réserve de Faune de Santchou’’.

Cet exposé a été présenté par M. Ekémé Gabriel, leader d’opinion et élite intérieure, donc résidant dans la localité, originaire du village Balé plus précisément.

A propos du niveau de vie des populations, M. Ekémé révèle que les populations vivant dans la Réserve sont extrêmement pauvres, et considèrent donc la Réserve comme leur mamelle nourricière. La jeunesse est peu scolarisée et cette situation a pour corollaire la délinquance juvénile et l’indifférence aux problèmes de protection de l’environnement.

L’habitat est médiocre malgré l’existence de quelques maisons en matériaux définitifs ou semi-définitifs.

Au plan santé, les populations souffrent de plusieurs maux ayant pour origine la malnutrition et le non-accès aux soins de santé à cause de l’enclavement de la Réserve.

Au plan de la structure sociale, la population est composée de trois principaux groupes ethniques : - les Mbô autochtones et propriétaires de terres ; - les Bamiléké allogènes acheteurs des terres pour l’agriculture et fin braconniers ; - les Anglophones du Nord-ouest et du Sud-ouest ; - À côté de ces trois grands groupes les Bamoun et les Tikar constituent une main- d’œuvre bon marché pour les grands planteurs.

Comme facteurs de destruction, on retiendra : - l’utilisation des scies à moteur pour couper les arbres ; - l’utilisation des pièges, fusils etc. pour la chasse au gibier ; - l’utilisation des feux de brousse pour créer les champs et plantations et éloigner les rongeurs, etc…

Selon M. Ekémé, les populations ont un jugement assez négatif de la Réserve. En effet, elles pensent qu’elles sont toujours en liberté surveillée. Les planteurs nourrissent une hostilité vis-à-vis des éléphants regardés surtout comme des animaux destructeurs des récoltes. 36

Pour terminer, l’orateur a suggéré les mesures suivantes pour lutter contre la déforestation et la dégradation de la Réserve en général :

- la sensibilisation des populations ; - l’ interdiction formelle de la vente des terres ; - la destruction de toutes les nouvelles installations ; - le développement des activités alternatives génératrices de revenus ; - le renforcement des services de contrôle et de surveillance de la Réserve.

L’exposé de M. Ekémé a été clôturé par une salve d’applaudissements dans l’assistance.

4 - Débats

Parmi les intervenants dans ce débat, on notera surtout la contribution de M. le Maire de la Commune Rurale de Santchou, et de M. Yonké Jean-Baptiste, ancien Ministre de l’Agriculture et ancien Directeur Général de la défunte SODERIM de Santchou.

Le Maire, dans son intervention, a fait remarquer que les populations de la Réserve de Faune de Santchou ont toujours pensé que l’Etat cherche à les priver de leurs terres ; et que, à cause du chômage des jeunes diplômés, la Réserve de Santchou est devenue leur seul refuge pour la création des plantations. Il a demandé à savoir si le CCDD, qui emboîte le pas à l’Etat pour protéger la Réserve, dispose de solutions de substitution pour les jeunes.

Quant au Ministre Yonké, il a d’abord loué l’initiative du CCDD avant de se demander si le taux de croissance démographique et l’identité des personnes occupant la Réserve sont aujourd’hui maîtrisés.

Il a voulu également savoir quels étaient les moyens mis en jeu par l’Etat pour protéger la Réserve dès sa création. Pour le Ministre Yonké, les projets agricoles développés dans la localité, en l’occurrence le Projet SODERIM, étaient en contradiction avec la conservation d’une réserve. Car si la défunte SODERIM avait atteint ses objectifs, Santchou serait devenue une zone de forte densité de population constituée de main-d’œuvre, ce qui aurait été une menace bien grave pour la Réserve située tout à côté. Il va terminer son intervention en faisant remarquer qu’il y a eu dérapage et qu’il faut rattraper le retard. Il a recommandé :

- le développement des activités de substitution à l’activité agricole ; - la création d’un corps d’agriculteurs d’élite capables de développer l’agriculture intensive ; - la reforestation des versants des montagnes dans la région.

A toutes ces préoccupations le Président du CCDD, Dr. Ndé, le Conservateur, M. Nsonkon, et le Biologiste Dr. Ngouo vont donner des réponses appropriées. Ainsi on retiendra que :

37

· L’étude monographique avait été effectuée dans la Réserve en 1981 et estimait la population cette année-là à 1000 âmes environ. Avec un fort taux de natalité et les migrations récentes, ce chiffre doit être aujourd’hui multiplié par deux ;

· La politique de la ‘‘Révolution Verte’’ initiée par le Gouvernement a fortement contribué à la destruction de la Réserve de Faune de Santchou.

· L’Etat n’avait pas développé des stratégies appropriées pour protéger la Réserve de Faune de Santchou.

· Le CCDD entend assister les habitants à développer dans la localité des activités alternatives génératrices de revenus à l’instar de la pisciculture, l’apiculture, la culture des champignons, etc…

Dans la suite de la séance plénière, les débats ont tourné sur les points suivants :

- L’effet de la destruction de l’ozone sur la localité de Santchou ; - Comment développer les activités alternatives sans détruire la Réserve ? - Comment concilier les considérations mystiques coutumières et superstitieuses avec les objectifs de conservation de la Réserve ? - Comment atténuer l’effet des inondations dans la région ?

C – TRAVAUX EN COMMISSIONS ET PRESENTATION DES RESULTATS

Après le déjeuner, trois commissions ont été constituées pour approfondir la réflexion sur les différents sujets évoqués en plénière. Les travaux étaient guidés par des questionnaires dont le rôle était de faciliter l’évolution des discussions en évitant les dérapages.

1 - Commission N° 1 : Populations rurales

Cette commission était présidée par M. Fondjou Tingué Robert, Chef du village Ngang. Les résultats de cet atelier ont été présenté par le Président lui-même. On retiendra du rapport de cette commission que la Réserve n’a plus beaucoup d’animaux sauvages comme auparavant, mais garde encore toutes ses espèces végétales. Au sujet de la déforestation et de la dégradation de la Réserve, la Commission relève que l’augmentation du taux de natalité et l’immigration en sont les principales causes.

Parlant du niveau de vie des populations à l’intérieur et autour de la Réserve, la Commission estime qu’il n’est pas bon du tout : la nutrition est ‘‘approximative’’, l’habillement ‘‘moyen’’, la santé ‘‘médiocre’’, eau potable ‘‘médiocre’’, l’agriculture demeure l’activité principale, l’habitation et l’équipement en meubles sont tout aussi ‘‘médiocres’’, routes ‘‘inexistantes’’, éducation également ‘‘médiocre’’, c’est-à-dire ‘‘déplorable’’.

Quant aux sources de revenus des populations, la Commission relève que les habitants, hommes comme femmes, tirent l’essentiel de leurs revenus mensuels et annuels de la Réserve. 38

Ces revenus sont au reste ‘‘dérisoires’’ et dépendent des forces de tout un chacun. La Commission affirme que si la Réserve est bien conservée elle sera utile aux populations rurales à plusieurs niveaux : bois de chauffage, pharmacopée traditionnelle, alimentation, lieux sacrés, viande sauvage, etc.

Pour que la Réserve arrête de se dégrader et retrouve progressivement ses richesses d’autrefois, la Commission pense qu’il faut introduire des cultures alternatives plus rentables et occupant moins d’espace.

Pour la Commission enfin, la Réserve et les populations doivent coexister pourvu qu’on aide celles-ci à améliorer leurs conditions de vie.

En conclusion, et pour citer leurs propres mots, les membres de la Commission affirment avec sagesse qu’il faut ‘‘utiliser la Réserve avec réserve’’. Cette formule finale a soulevé des applaudissements nourris dans l’assistance. 39

Liste des participants : Président : 1. Fondjou Tingué Robert 12. Kadji François Rapporteur : 2. Fosson Jules 13. Tam Baah Membres : 3. Mboujou Benoît 14. Elat Joseph 4. Kembeng Engelbert 15. Aketa Frédéric 5. Tabi Gérôme Iii 16. Milat Jean-Bosco 6. Nkoue Yves 17. Ndayon Pascal 7. Essoua Vincent 18. Fonguen Thomas 8. Makam Devis 19. Eboudian Nzie Alphonse 9. Ndé Grégoire 20. Matouka Bonaventure 10. Elat Benoît 21. Akwa Avi 11. Assoua Thomas 22. Kounendjou J.

2- Commission N° 2 : Populations urbaines

Cette Commission avait pour président M. Agnoh Bosco et pour rapporteur M. Fofack Ferdinand.

Elle va d’emblée se réserver de se prononcer sur la question de savoir si la Réserve dispose encore ou pas d’animaux sauvages et des essences de bois comme autrefois.

Elle affirme néanmoins que l’espace réservé à la forêt a diminué et s’est appauvri, et que les causes de cette dégradation sont multiples : culture extensive, conquête de l’habitat et braconnage.

La Commission affirme que le niveau de vie des populations à l’intérieur et autour de la Réserve est mauvais sur tous les plans et que les problèmes quotidiens des gens du village sont : sous-alimentation, santé précaire, sous-scolarisation, absence de moyens de communication. Ainsi, améliorer les conditions de vie des populations reviendrait à trouver des solutions à tous ces problèmes.

En ce qui concerne les sources de revenus des populations, les populations urbaines pensent qu’elles sont essentiellement agricoles : les hommes pratiquent essentiellement l’agriculture industrielle (café, cacao) et parfois la ‘‘vigne’’ (vin de palme). Les femmes vendent les vivres (macabo, banane, etc.). Mais d’une façon générale, les revenus sont maigres.

Cette commission pense que si la Réserve est bien conservée, elle favorisera le tourisme, contribuera à la protection de la biosphère et à l’amélioration du climat de Santchou. Cette commission note que c’est la pauvreté et la forte croissance des populations qui poussent les habitants à pénétrer dans la Réserve. Cette pénétration a une incidence certaine : à la longue elle peut tuer la vie culturelle du village et même de la ville.

40

La Commission affirme également que la disparition de la Réserve aurait des conséquences certaines sur l’Arrondissement de Santchou : changements climatiques, suppression de certains services administratifs, baisse du pouvoir d’achat des populations, etc. Elle pense aussi que l’élevage des gibiers tels que le porc-épic et le hérisson peut être porteur dans la localité. En ce qui concerne la valeur touristique de la Réserve, les populations urbaines estiment qu’elle n’a plus sa raison d’être du point de vue faune. Mais du point de vue paysage la Réserve conserve encore tous ses atouts pour le tourisme de récréation.

Pour terminer, les populations urbaines ont émis un certain nombre de souhaits quant à l’avenir de la Réserve : reboisement, entretien, sauvegarde, éducation des populations. Ces mots doivent être les maîtres-mots de la génération actuelle afin que cette Réserve devienne une réserve de référence en Afrique et – pourquoi pas ? – dans le monde.

Liste des participants : Président : 1. Agnoh Bosco 11. Mbah Justin Rapporteur : 2. Fofack Ferdinand 12. Dontsop Simon Membres : 3. Mme Kang Agnès 13. Tam Baah 4. Tchoupou 14. Akeme Georges 5. Djeutsop 15. Mme Nfotiok Cl2entine 6. Mlle Jeutang Lynda 16. Mme Mouazon Heleine 7. Mlle Djoumessi Aurelie 17. Etote Paul 8. Fotabong Roger 18. Mme Dissake Florence 9. Logmou Joseph 19. Mme Massoma Anne 10. Chimi Guim

3 - Commission N°3 : Services administratifs et assimilés

La Commission III était présidée par M. Kendo, professeur au Lycée de Santchou, avec pour rapporteur Mme Mossé Marie, Chef de bureau au Service des Affaires Sociales.

Cette commission estime qu’il n’y a plus d’animaux sauvages dans la Réserve comme avant et attribue cet état de choses à une exploitation abusive des ressources, à un braconnage sauvage, aux feux de brousse et à la croissance démographique.

Les agents des services administratifs et assimilés estiment que les populations dans et autour de la Réserve vivent comme tous les autres Camerounais, c’est à dire dans l’extrême pauvreté. Ces populations ont les problèmes de santé, d’enclavement, de malnutrition, de sous- scolarisation, de manque d’ espaces cultivables et de faibles revenus. Les revenus proviennent essentiellement des cultures vivrières pour les femmes et des cultures industrielles pour les hommes. Les hommes pratiquent aussi le braconnage, font le petit élevage, l’artisanat, l’exploitation des plantes médicinales et la vente du bois (bûches, planches, etc.).

Cette commission pense que 41

- la restauration de la Réserve de Faune de Santchou peut être utile pour la reconstitution de l’histoire de la localité ; · la création des sites touristiques entraînera le désenclavement de certains villages ; · les activités alternatives pourront améliorer le niveau de vie des populations et les détourner des ressources naturelles de la forêt ; · l’écosystème peut être préservé par une rationalisation de l’exploitation des ressources ; · les espèces en voie de disparition et les espèces rares doivent être inventoriées et bénéficier de mesures de protection strictes.

Pour que la Réserve puisse retrouver ses dimensions et ses richesses d’autrefois, la Commission estime qu’il faut prendre des mesures rapides et efficaces contre l’extension des champs et la pratique des feux de brousse. Le reboisement naturel et artificiel est fortement recommandé.

A la question de savoir si les agents de certains services publics et privés sont présents dans la Réserve, cette commission répond par l’affirmative et ajoute que cette pénétration est causée par la pauvreté, la baisse des revenus, et la préparation de la retraite pour les agents autochtones. La Commission pense qu’on peut remédier à cette situation en améliorant les conditions de vie des salariés, en sensibilisant les populations locales, en reconvertissant les retraités aux activités autres que l’agriculture, en renforçant le système de conservation par le recrutement et la formation des gardes autochtones, et en interdisant systématiquement le pâturage dans la Réserve.

Au sujet de la Faune, cette commission révèle que les céphalophes, les aulacodes, les varans, les singes, les hérissons, les serpents, les pintades, les porcs-épics, etc. sont les gibiers consommés dans la région. Certains membres de la Commission ont parlé de l’existence de quelques éléphants dans la région de Santchou, mais plutôt sur la rive droite de la Menoua, vers la limite avec Melong. D’autres affirment avoir vu une demi-dizaine de buffles entre Ngang et Nden-Matock, ce qui a provoqué des applaudissements dans la salle.

Cette commission pense qu’on peut faire revenir les éléphants en sensibilisant les autochtones, en prenant en compte certaines réalités culturelles de la région, et en bannissant le braconnage. D’autres encore certifient que les panthères et les sangliers (potamochères) existent encore dans la région de Santchou.

La conclusion que nous pouvons tirer de toutes ces révélation sur l’existence et la présence de ces espèces, c’est que si l’on prenait les mesures et menait les actions de restauration nécessaires, la Réserve se repeuplerait rapidement en faune, car les animaux ne sont pas loin…

Cette commission estime qu’à l’heure actuelle l’avenir de la Réserve est vraiment sombre. Elle soutient que le redressement de la situation est possible. Pour cela il faut une meilleure collaboration entre les différents services publics et privés, l’utilisation des méthodes dissuasives par les agents de contrôle, la construction de certains locaux du Service de Conservation à l’intérieur même la réserve, mais surtout le renforcement et l’application de la loi sur les aires protégées.

42

Comme souhait pour l’avenir, la Commission émet le vœu que la Réserve survive et retrouve au plus tôt ses lettres d’or…

Listes des participants Président : 1. Kendo 13. Nkenfack Clovis Rapporteur : 2. Mme Mossé Marie 14. Dounba Bell Membres : 3. Assontia Victor 15. Nde Ewouken Félix 4. Ndjalle Etube 16. L’Abbé Gerard Tchientheu 5. Sonfack Etienne 17. Le Pasteur de l’E.E.C. 6 Bignon Dany 18. Noubissi Edouard 7. Tchato Valentin 19. Mme Etamé Philomène 8. Ngangue Frédéric 20. Mlle Diwouta Agnès 9. Ngonganng Christophe 21. Soman Yves 10. Atabonfack Dieudonné 22. Mme Ekwele Fride 11. Dongmo Pierre 23. Tsalefack Daniel 12. Mme Ndinkop Marie 4 - Débats

Les différentes présentations sont suivies à chaque fois de questions et commentaires des participants, ce qui aboutit parfois à des ajouts ou à des rectifications.

D – CEREMONIE DE CLOTURE

1 – Mot de fin du Président du CCDD

Dr. Ndé a vivement remercié les représentants des populations rurales et de la ville de Santchou pour l’esprit de dialogue et de franche collaboration qui a prévalu tout au long des travaux. Il a déclaré que la gestion durable de la Réserve de Faune de Santchou ne saurait être l’ affaire d’un seul individu, ni d’une seule organisation mais une action de synergie entre les forces vives de la localité et les autres acteurs que sont les ONG, les services publics, le secteur privé et la société civile en général, l’idéal commun étant de passer intact à nos enfants ce riche patrimoine que nous ont légué nos ancêtres.

Pour l’orateur, le Séminaire - Atelier de Santchou marque un point de départ pour un dialogue positif et une collaboration constructive pour faire de la Réserve de Santchou comme d’aucuns le souhaitent, une réserve de référence, un exemple au Cameroun, dans le Bassin du Congo et dans le monde. Tout dépendra de la volonté, de la détermination et de l’engagement de toutes les parties prenantes. Il a terminé en déclarant qu’il a la ferme conviction que désormais le CCDD et les populations de Santchou œuvreront ensemble pour atteindre les deux objectifs complémentaires que sont la protection de la Réserve de Faune et l’amélioration des conditions de vie.

2 – Mot de clôture de Monsieur le Sous-Préfet de Santchou

Dans son mot de clôture, le Sous-Préfet a rendu un vibrant hommage au CCDD 43 qui a bien voulu porter son choix sur la localité de Santchou dans son programme de protection des écosystème menacés. Selon lui, l’engouement et l’intérêt que les populations ont manifestés à l’endroit du CCDD sont un signal fort qui engage les deux parties.

Il a exhorté les populations à œuvrer davantage pour la conservation de la Réserve et à dénoncer désormais tous les individus qui exploiteront frauduleusement les ressources des cette aire protégée.

Il a vivement remercié tous les participants au séminaire et en particulier les chefs et les délégués des villages, qui ont bravé le mauvais état des routes pour participer aux assises.

Il a clôturé les travaux, en invitant le CCDD à revenir à Santchou le plus tôt possible, car toutes les populations ont déjà pris goût à l’action qu’il a entreprise, et il ne faut pas les décevoir, car, dit-il, le désespoir serait total et la mort de la Réserve certaine.

3 - Cocktail

Après d’ ultimes séances de photos, tous les participants se sont retrouvés autour d’un cocktail offert par le CCDD dans le hall de l’Hôtel Yanzé où se tenait l’Atelier. 44

Chapitre IV : ETAT DES LIEUX

Ce chapitre, ainsi que le suivant, est un chapitre de synthèse. C’est le résultat des différentes activités, tant celles de terrain que celles de bureau. Il s’agit de faire succinctement l’état de lieux à partir des contacts faits lors des visites du site et des discussions lors des consultations participatives collectives et individuelles, tout en intégrant des informations et des données collectées de diverses autres sources. Ainsi nous présenterons le couvert végétal et le peuplement animal, avant de nous appesantir sur les multiples causes de la dégradation de l’espace forestier.

A- LE COUVERT VEGETAL : DETERIORATION ET DEFORESTATION

Le couvert végétal de la Réserve est sérieusement entamé. Tout au long de la route Fombap - Balé qui la coupe en deux, et à plusieurs autres endroits, la végétation n’est plus celle de 1947. Le couvert végétal naturel a été remplacé par les cultures vivrières et industrielles. Comme cultures vivrières nous trouvons le maïs, le macabo, la banane- plantain, le taro, bref toutes les variétés de cultures de la zone se retrouvent dans la Réserve. Il en est de même pour les cultures industrielles : café, cacao et palmier à huile. Champs et plantations s’enfoncent, à certains endroits, à plus d’un kilomètre à l’intérieur, sans épargner les flancs des montagnes ! Rongée de l’intérieur, la Réserve est aussi grignotée de l’extérieur. Ses limites, bien que naturelles, sont régulièrement violées par les paysans en quête de surfaces cultivables. La Réserve de Santchou se trouve ainsi agressée de part en part, et ce depuis plusieurs décennies, tant et si bien que, aujourd’hui, elle semble avoir déjà perdu 30 à 40% de son couvert végétal initial.

Non seulement de larges ouvertures sont opérées dans la forêt pour des raisons agricoles, mais aussi certaines essences sont exploitées à des fins commerciales. Comme l’affirme Monsieur Nsonkon Paul-Marie, le Conservateur de la Réserve, «les populations surexploitent la nature, on note par endroits des signes de dégradation avancée ; on estime à plusieurs centaines de m3 de bois prélevés chaque année, plusieurs dizaines d’hectares de forêt sont dévastés chaque année » (Voir Annexes)

Et pourtant, comme on le constate en parcourant le massif forestier restant, cette réserve jouit d’une grande diversité biologique. En effet plusieurs types de végétations alternent ou se succèdent, chacun présentant une richesse floristique considérable, comme en témoignage le tableau ci-dessous :

45

Tableau 3 : Types de végétation et espèces végétales de la Réserve

Type de végétation Espèces végétales FORET DE MONTAGNE Terminalia superba Piptadeniastrum africanum Erythorium manii Erblroma oblonga Pycnanthus angolensis Musanga cecropioides Entandrophragma angolense Ficues elastica FORET-GALERIE Mitragyna ciliata Tectona grandis Mapaca guineenis Terminalia ivorensis Pterocarpus soyauxii FORET MARECAGEUSE Lophira alata Mitragyna ciliata Tectona grandis Pandanus candelabrum Raphia sp Phoenix reclinata

Terminalia ivorensis SAVANE HERBEUSE Penisetum purpureum Eleusine indica Andropogon gayanus Andropogon chirensis Digitaria gayanus Imperata cylindrica

Epatorium odorantum Sporobulus pyramidalis Mimosa pegree Schyzachyruim sanguineum Oriza longuis taminata

Citons encore d’autres ligneux qui peuplent ces forêts : Khaya ivorensis, Chlorophora excelsa , Mansomia altisima, Canarium Schweinfurthii, Klainedoxa gabonensis, et la liste n’est toujours pas terminée…

Voilà donc autant de richesses et d’autres dont regorge encore la Réserve de Santchou. Tant de variétés géographiques et biologiques réunies en un seul écosystème ! Ajouté au monde animal tout aussi varié, ce patrimoine génétique se doit d’être surveillé à chaque instant, et ce dans l’intérêt du village Santchou lui-même, mais aussi du Cameroun, et du Bassin du Congo. Car, si le nombre des espèces paraît élevé, les surfaces et les quantités ne cessent par contre de diminuer au fil des ans, ce qui constitue un danger réel ou potentiel - pour le micro-climat, qui perd son équilibre, 46

- pour le climat global en contribuant à son réchauffement et à l’effet de serre, - pour la couche d’ozone par la libération du carbone, - pour les animaux qui perdent leur habitat et meurent, ou vont chercher ailleurs…

B- LE PEUPLEMENT ANIMAL : RAREFACTION ET DISPARITION

Globalement parlant, sur le plan faunique, la Réserve de Santchou n’est plus que l’ombre d’elle-même. Le temps n’est plus, où l’on ramassait le gibier à la pelle. De nos jours il est extrêmement difficile de rencontrer les animaux sauvages en parcourant la forêt. Tout au plus on peut en percevoir les cris lointains, en observer les crottes, ou les traces, ou d’autres indices de présence. Pourtant, il y a moins de 15 ans, lorsque l’Arrêté du Secrétaire d’Etat au Tourisme faisait de cette réserve une réserve de faune en 1987, la population animale était encore bien nombreuse. Les habitants de la zone se rappellent encore avec nostalgie les troupeaux d’éléphants qui venaient danser jusqu’en ville (!) lors des grandes fêtes.

En 1991 déjà, lorsque Fossi Abel faisait des recherches académiques dans la Réserve, il n’avait pu, à partir des indices de présence, dénombrer que 26 éléphants et un certain nombre d’autres animaux parmi lesquels les buffles. Aujourd’hui, tous les gens sont unanimes dans la zone pour affirmer que, depuis plus de cinq ans, ils n’ont plus aperçu l’éléphant, et que le buffle est rarissime. En un mot, la population animale ne cesse de baisser en qualité et en quantité.

Pourtant le règne animal dans cet écosystème est des plus diversifiés. En effet toutes les classes animales ou presque vivant sur la terre sont représentées dans la Réserve.

On y distingue - sur la terre : les mammifères, les reptiles, les mollusques ; - dans l’eau : les poissons, les crustacés ; - dans l’air : les oiseaux, les insectes.

1- Faune terrestre

a ) Les mammifères

Cette classe est représentée par plusieurs groupes ou ordres. Le tableau suivant nous donne une idée de la composition de chaque groupe :

47

Tableau 4 : Groupes et espèces de mammifères de la Réserve

Espèce Ordre/Groupe Nom usuel Nom scientifique PRIMATES Singes : * cercopithèques - hocheur Cercopithecus nictitans - mone Cercopithecus mone - singe vert Cercopithecus aethiops

* colobes - colobe guereza Colobus guereza

Lémuriens - potto de bosman Perodictus potte - galogo du Sénégal Galogo senegalensis ARTIODACTYLES Porcins - potamochère Potamocherus porcus

Ruminants - sitatunga ( guib d’eau) Tragelaphus spekei - céphalophe bleu Cephalophus monticola - guib harnaché Tragelaphus scriptus - buffle nain Syncerus caffer nanus VIVERRIDES - civette Viverra civetta - genette tigrine Genetta tigrina RONGEURS - aulacodes (hérisson) Thrynomys swinderianus - rat de Gambie Cricetomys gambianus - atherure Atherurus afrcanus PROBOSCIDIENS - éléphant pygmée Loxodonta pumilio b) Les reptiles La classe des reptiles comprend aussi plusieurs groupes. Les espèces qui les composent sont principalement les tortues, les lézards, les crocodiles et les serpents. Le varan (Varanus niloticus) est l’un des lézards les plus courants ; quant aux serpents, il y en a plusieurs espèces, parmi lesquelles la vipère du Gabon (Bitis gabonica), le boa, et bien d’autres.

c) Les mollusques Les mollusques les plus répandus sont les gastropodes , représentés essentiellement par les escargots.

2 - La faune aérienne.

a) Les oiseaux La classe des oiseaux est de loin la plus variée et la plus nombreuse. Le tableau suivant fait ressortir les grandes familles et les espèces qu’on peut rencontrer dans la Réserve :

48

Tableau 5 : Familles et espèces d’oiseaux

Espèce Famille / Ordre Nom usuel Nom scientifique - gand calao à casque noir Cenatogyma atrata BUCEROTIDES -calao à hupe blanche Tropicarnus albocris tatus

-calao rieur -calao pygmée

ACIPITRIDES -milan noir Milanus migrans PHASIANIDES -pintade cammune Numida moleagris -francolin Francolinus bical- caratus MEROPIDES -petit guepier vert Merops orientalis -guepier à rouge gorge Merops bulocki

ALCEDINIDES -martin chasseur MUSOPHAGIDES -touroco géant Corythacola cristala -touraco vert Touraco persa

CUCULIDES -coucal à ventre blanc

PYGNONOTIDES -bulbul commun Pyenonotus barbatus PASSERIFORMES - corbeau pic - tisserin gendarme

Signalons tout de suite que ce tableau est loin d’être exhaustif, et ce d’autant plus qu’une récente étude de Birdlife International aurait permis de dénombrer plus de 150 espèces d’oiseaux, parmi lesquelles trois espèces endémiques.

b) Les insectes La vie dans la Réserve n’est pas animée uniquement par les animaux terrestres ou les oiseaux, mais aussi par une myriade de petits êtres vivants qui voltigent dans l’air, c’est-à dire les insectes . Ils y en a de toutes les formes, de toutes les tailles et de toutes les couleurs. Seule une étude entomologique peut bien rendre compte de la diversité de cet autre monde.

Disons tout simplement que la Réserve de Faune de Santchou regorge : - d’abeilles à la recherche du pollen, - de papillons aux belles ailes, - de criquets bondissant dans le sissongo, - de grillons aux cris aigus, - de termites riches en huile, - de libellules virevoltantes, - et de mille autres espèces foisonnantes.

49

3- La faune aquatique

Le réseau hydrologique de la Réserve est des plus fournis (voir Carte p 6). Cette réserve est un véritable château d’eau. Plusieurs rivières y prennent leurs sources, ou la traversent, ou la bordent ; un lac même l’habite ; et l’ensemble crée ainsi des conditions favorables pour le développement de la faune aquatique. D’où l’abondance et la variété de la faune aquatique, toutefois dominée par les poissons et les crustacés.

a) Les poissons Les eaux de la Réserve sont peuplées de plusieurs espèces de poissons, parmi lesquelles on peut citer : - les tilapias, - les silures, - les clarias,

a) Les crustacés Le Nkam, la Métchié, l’Olouono, le Lac des Eléphants et les autres eaux sont peuplées de plusieurs variétés de crustacés, parmi lesquelles les crabes, les écrevisses, etc.

Ainsi donc, en terme de bilan, on constate que la Réserve de Faune de Santchou jouit encore d’une grande diversité biologique tant sur le plan floristique que faunique. Mais parmi les différentes espèces recensées, certaines risquent de disparaître dans un proche avenir, et d’autres sont déjà devenues invisibles.

Parmi les espèces apparemment disparues, on compte l’éléphant et le colobe guereza. On croyait le buffle aussi disparu, mais – à notre grand bonheur – nous avons appris qu’un petit troupeau d’une demi dizaine de têtes a été découvert au mois d’avril 2000 dans la Réserve.

Parmi les espèces menacées de disparition, on peut donc citer le buffle, les autres étant le sitatunga, le guib harnaché, le céphalope bleu et les singes.

Pour les autres espèces des autres groupes, le danger est peut-être encore loin, mais on le voit venir.

Et pour prévenir ce danger et redresser la situation, il est nécessaire d’identifier les différents facteurs qui sont à l’origine de la dégradation de la Réserve, c’est-à-dire de la déforestation, de l’exploitation abusive des espèces végétales, de la raréfaction et pour finir, de la disparition de certaines espèces animales.

50

C - IDENTIFICATION DES CAUSES DE LA DEGRADATION

Le drame écologique que vit la Réserve de Faune de Santchou a des causes multiples qui s’enchevêtrent et s’imbriquent les unes dans les autres. Elles sont de tous ordres : démographiques, sociales, économiques, écologiques, mystico-religieuses, infrastructurelles, institutionnelles, etc.

1- Causes démographiques

Sur le plan démographique, trois faits influent directement sur le devenir de la Réserve : la sédentarisation des populations, la forte croissance démographique interne et l’immigration . Des gens, des peuples habitent les lieux en permanence, et ce même avant la création de la Réserve en 1947. Ils occupaient donc l’espace, lequel va grandissant avec la forte croissance démographique due entre autres à la baisse du taux de mortalité infantile et à la couverture sanitaire qui n’a cessé de s’améliorer depuis 1947. Ajouter à cela l’installation progressive de personnes venant des villages , arrondissements et départements environnants et même de la lointaine province du Nord-Ouest.

La démographie de la Réserve a ainsi connu une montée vertigineuse. En 1947, il n’y avait que ‘‘quelques habitants vivant dispersés dans le périmètre de la forêt classée’’, comme le dit l’Arrêté du Haut-Commissaire français de l’époque. En 1985 près de 40 ans plus tard, les neuf villages de la Réserve comptent déjà ensemble plus de 1000 âmes !

Un Arrêté préfectoral signé en 1985 présente en effet les chiffres suivants :

Tableau 6 : Données démographiques des villages de la Réserve en 1985

Village Population Village Population Mbongo 59 hab. Moyong 230 Mbokou 144 Mankang 240 Mogot 42 Balé 423 Mokot 194 Ngang 34 Nden-Matock 19 TOTAL 1 374 hab.

Source : Arrêté préfectoral N° 229/AP/F.34/SP (Préfecture de )

L’histogramme ci-dessous fait mieux ressortir des villages les uns par rapport aux autres.

51

Fig.6 : La population des villages de la Réserve en 1985

Habitants 450 400 350 300 250 200 150 100 50 0

Mogot Mokot Ngang Mbongo Mbokou Moyong Mankang Nden Matock

Source : Arrêté préfectoral N° 229/AP/F.34/SP (Préfecture de Dschang)

Aujourd’hui, en l’an 2000, donc 15 ans après, avec la construction de la route qui fend la Réserve en deux et relie huit villages sur neuf, avec la ruée vers la Réserve qui s’en est suivie – ruée aggravée par d’autres facteurs –, toutes ces données sont évidemment déjà dépassées. Ce ne serait pas exagéré de dire que la Réserve compte aujourd’hui autour de 2000 personnes…

Et tout ce beau monde a besoin d’espace vital, et ne peut l’acquérir qu’aux dépens de la Réserve. Et plus ils sont nombreux, plus la Réserve perd du terrain et des ressources.

A cette pression humaine interne vient s’ajouter une aussi forte pression externe exercée directement ou indirectement par les populations des autres villages Mbô et Bamiléké qui entourent la Réserve. Les villages Mbo appartiennent à la Chefferie Santchou (dans le Département de la Menoua) et à Lelem (dans le Département du Moungo, Province du Littoral), alors que les villages Bamiléké font partie des chefferies Fombap, Fontsa-Toula et Fomopea (dans la Menoua), Mboebo et Foyemtcha (dans le Haut-Nkam).

2- Causes sociales

Les causes sociales sont principalement l’ignorance, la pauvreté, le chômage et la baisse des revenus.

En effet, au cours des multiples rencontres organisées dans les villages et même en ville, nous nous sommes rendus compte que la quasi totalité de la population ignorait ce que c’est qu’une «réserve » et a fortiori une «réserve de faune ». La désinformation aidant, beaucoup la confondaient avec la notion voisine de «parc national » et même de « jardin zoologique ». Alors, ils se sont mis à fantasmer, et dans l’imaginaire local, ils se voyaient expulsés manu militari, ou 52

au pire des cas, encerclés dans un vaste enclos grillagé, les hommes avec les animaux sauvages. En conséquence et par réaction, ils se sont mis sur la défensive, ils ont nourri envers la Réserve un profond sentiment d’hostilité qui n’a d’égal que leur amour pour leur terre natale. De plus, manquant de perspective, les gens n’avaient pas en idée que certaines ressources de la forêt pouvaient disparaître totalement un jour. D’où leur surprise pleine d’amertume et de remords de constater aujourd’hui que les éléphants qui faisaient la fierté de leur ville et de leur région, ne sortent plus de la Réserve pour venir participer à la célébration des grandes occasions, et n’en sortiront plus jamais peut-être, pour la simple raison qu’ils n’y sont plus…

Mais la pauvreté – avec son corollaire, la misère – est, de l’avis général, le facteur le plus déterminant de l’exploitation abusive des ressources naturelles dans la Réserve. Les conditions de vie sont déplorables. Les gens mangent mal, s’habillent mal, se soignent mal – s’ils se soignent même –, bref à Santchou, à l’intérieur comme à l’extérieur de la Réserve, on vit mal, parce qu’on est pauvre. Ainsi avec des sources de revenus très limitées, les habitants sont obligés de se rabattre sur la Réserve sans borne et sans mesure.

Le chômage des jeunes – diplômés et non diplômés – n’est pas pour arranger les choses. Eux aussi sont contraints, s’ils ne veulent pas devenir des bandits et autres «braqueurs », de s’enfoncer dans la Réserve pour s’occuper et trouver des moyens de subsistance. On avait fondé beaucoup d’espoir sur la SODERIM (Société de Développement de la Riziculture de la Plaine des Mbô) pour absorber la main-d’œuvre jeune et adulte. Malheureusement cette entreprise d’État a fermé ses portes depuis longtemps. Où sont allés les employés licenciés ? Où sont allés les jeunes qui rêvaient d’y travailler ? Certains se sont tout simplement taillé une ou plusieurs parcelles dans la Réserve, ne serait-ce que pour tenter d’échapper au stress et autres effets du chômage.

Parlant du chômage général, le faible taux des habitants qui ont un emploi salarié est un signe révélateur. Ces histogrammes réalisés à partir des données du questionnaire sont assez illustratifs :

Fig. 7 : Taux de salariés de l’échantillon Question : Avez-vous un emploi salarié ?

50

40

30 Oui Non 20 Sans réponse 10

0 Jeunes Femmes Hommes

Au niveau de chaque groupe social, comme dans l’ensemble, peu de gens ont donc un emploi salarié. Les salariés en question sont surtout des fonctionnaires et quelques employés du 53 secteur privé. Les non-salariés exercent en majorité des activités champêtres, commerciales, etc… ou des activités mixtes. Certains sont encore des élèves, mais beaucoup sont en fait des sans-emploi.

Le dernier facteur que nous évoquerons sur le plan social est la baisse généralisée des revenus des citoyens. La crise économique et la dévaluation du franc CFA qui ont frappé le pays, accompagnées de la chute des prix des matières premières, n’ont pas épargné Santchou. Les paysans comme les citadins, les salariés du secteur public comme ceux du privé, chacun a vu ses revenus baisser drastiquement. Alors, une fois de plus, beaucoup se sont enfoncés dans la Réserve, certains pour créer des plantations ou des champs, d’autres pour les étendre, question d’arrondir les fins de mois ou d’augmenter les productions agricoles.

54

3 - Causes économiques

Un coup d’œil sur l’économie de la région permet de comprendre pourquoi les terres et les ressources de la Réserve s’amenuisent au fil des ans. Sur le plan agricole d’abord, la pratique des cultures itinérantes sur brûlis est très répandue. De plus l’agriculture extensive est de règle. On abat les arbres ou on met le feu sur de larges pans de forêt ou de savane à des fins agricoles ou pastorales. D'où les larges étendues de monocultures ou de cultures mixtes des caféiers, de cacaoyers, de palmiers à huile, de maïs, de manioc, de macabo, etc… D’où également les larges clairières herbeuses pour le pâturage.

La transhumance justement constitue l’une des causes de la dégradation forestière. En saison sèche les bergers descendent des montagnes voisines avec leurs troupeaux de bœufs et investissent les savanes de la Réserve à la recherche de l’herbe fraîche.

Après l’agriculture et l’élevage, le commerce constitue l’une des menaces qui pèsent sur la Réserve de Santchou. Et surtout quel commerce ? ! Celui du gibier, du bois et de la terre… Le commerce du gibier amène les habitants de la zone à pratiquer le braconnage. Munis de toutes sortes d’armes – même des fusils FAL ! – les braconniers arpentent la Réserve, de jour comme de nuit, et tirent sur tous les êtres à pattes qu’ils rencontrent, sans se soucier des listes zoologiques du CITES – qu’ils ignorent d’ailleurs. Voilà comment les troupeaux d’éléphants ont fini par disparaître, voilà comment les bandes de singes finiront ou finiraient eux aussi par disparaître, et ainsi de suite.

Interrogés sur les techniques utilisées par les chasseurs, les enquêtés en ont cité tout une gamme, allant des pièges au poison, en passant par les fusils. La figure ci-dessous donne une idée des fréquences de réponses, qui traduit certainement les fréquences d’utilisation.

Fig. 8 : Techniques de chasse utilisées

Fréquences

140 120 100 80 60 40 20 0 Piège Fusil Filet Flèche Poison Autres

Le commerce du bois, bien qu’illicite, se fait au grand jour. Le bois se vend sous toutes les formes : bûches, planches, lattes, etc. Et il ne se coupe pas seulement à la machette ou à la hache, mais aussi à la tronçonneuse ! L’intention mercantiliste est ainsi clairement affichée. 55

Suivant les besoins de la clientèle, et mûs par leur soif d’argent, les exploitants illégaux abattent clandestinement toutes sortes d’arbres dans la forêt sans prendre en compte leur âge, ni leur diamètre, ni leur distribution, ni leur régénération, et ni les autres critères d’appréciation. De jour – et parfois de nuit –, au hasard des dents de la tronçonneuse, la forêt perd un à un les représentants de certaines essences de grande valeur économique telles le Terminalia superba (fraké), le Chlorophora excelsa (iroko), l’Entandrophragma cylindricum (sapelli), et bien d’autres.

A titre d’illustration et pour en avoir une idée plus précise, voici le graphique des produits de la Réserve vendus sur les marchés locaux :

Fig. 9 : Produits de la Réserve commercialisés.

Fréquences 60 50 40 30 20 10 0 s Bois de Planches Fruits et Miel Gibier Remède Autres chauffage lattes, feuilles piquets

Loin de se limiter à la vente des plantes et des animaux (leur chair, leur peau ou leurs dents / ivoires), certains habitants de la Réserve s’adonnent à la spéculation foncière. Oui ! on vend les terres dans la Réserve, qui fait pourtant partie du domaine privé de l’Etat. Le danger de cette pratique illégale, c’est qu’elle attire les étrangers ; ils arrivent par dizaines en provenance des autres villages Santchou, des villages Bamiléké et des provinces anglophones, achètent chacun une parcelle de forêt aux autochtones de Nden- Matock, de Mbongo ou d’un autre village, et s’installent parmi la population…

4 – Causes écologiques

A première vue, cela peut paraître paradoxal qu’un drame écologique ait des causes écologiques. Telle est pourtant la réalité dans la zone de la Réserve de Santchou. Les animaux sauvages sont en partie à l’origine de leur propre tragédie. Beaucoup d’entre eux causent des dégâts énormes dans les plantations et dans les champs. Et parfois ils s’attaquent à l’homme. C’est le cas des éléphants, des singes, des rongeurs et bien d’autres.

Les données suivantes montrent la forte proportion des personnes ayant subi des dégâts matériels ou corporels causés par ces animaux : 56

Fig. 10 : Les victimes des animaux sauvages

Question : Avez-vous déjà été victime des dégâts causés par les animaux sauvages ?

Jeunes Hommes Femmes

L'ENSEMBLE

1 Oui 2 Non 3 Sans réponse

Naturellement, les paysans victimes ne peuvent qu’encourager ceux qui diminuent le nombre de ces animaux nuisibles, si ce n’est pas eux-mêmes qui prennent le fusil ou la flèche… D’autre part, le danger que représentent les animaux amène le cultivateur – ce qui est dommageable pour la forêt – à créer une zone de sécurité autour de son champ en utilisant des feux de brousse.

En dehors des cultures, certains animaux détruisent également la végétation naturelle. Nous pensons ici, une fois de plus, aux troupeaux d’éléphants qui parfois cassent des branches d’arbres, déracinent des arbustes, rasent des buissons, bref ravagent des larges portions de forêt ou de savane soit pour se nourrir, soit pour créer leur route.

5- Causes mystico-religieuses

Dans notre recherche des causes profondes de l’appauvrissement continu de la Réserve de Faune de Santchou, nous ne pouvons nous empêcher de prendre en considération les hypothèses anthropologiques relatives au phénomène du totémisme. N’oublions pas que nous sommes dans un contexte africain et que, en Afrique, il n’y a souvent pas de frontière, de cloison étanche entre le rationnel et l’irrationnel, entre les phénomènes naturels et ceux mystico-religieux.

Cela dit, nous avons été amenés à comprendre, aux cours de nos investigations, que la population des éléphants a baissé jusqu’au nombre zéro pour plusieurs raisons. Primo les tensions entre les propriétaires de totems ; secundo le refus des jeunes de subir les rites de totémisation ; et tercio la migration volontaire des éléphants-totems.

Ainsi, parfois pour sanctionner, pour se venger ou pour régler ses comptes, un homme à totem peut offrir en holocauste l’éléphant-totem d’un autre homme à un chasseur. Pour cela il suffit de le décrire avec précision, de préciser sa position ou son rang dans la bande et d’indiquers le repère du groupe. 57

Sur un autre plan, la jeunesse occidentalisée par l’école rejetant les rites de totémisation, il y a de moins en moins d’éléphants-totems et donc d’éléphants tout court en brousse, car ceux qui meurent consécutivement à la mort de leurs propriétaires ne sont pas remplacés au fur et à mesure par de nouveaux éléphants-totems, comme cela s’est toujours passé de générations en générations.

La troisième et dernière hypothèse anthropologique explique que les éléphants se sont retirés eux-mêmes de la Réserve, ou plutôt, les hommes à totems-éléphants avaient choisi eux- mêmes de sortir leurs doubles pour les garder hors de la Réserve. Pourquoi ? Pour certains, c’était par crainte de se retrouver prisonniers dans la Réserve, car à une époque, une rumeur avait circulé, selon laquelle l’Etat allait construire une clôture tout autour de cette aire protégée. Pour d’autres, les gens ont retiré leurs totems pour amener l’Etat à déclasser la Réserve. Ayant appris que la zone avait été déclarée aire protégée à cause des éléphants, ils s’étaient convaincus ou laissés convaincre qu’en la vidant de ces animaux, il n’y avait plus de raison de maintenir son statut de réserve. Pour d’autres encore, les propriétaires des totems ont tout simplement tranféré leurs éléphants ailleurs à cause de l’insécurité permanente créée par le braconnage. Et dans un cas comme dans l’autre les éléphants-totems étaient suivis dans leur retraite par les éléphants ordinaires.

6- Causes infra-structurelles

Chaque médaille a son revers : la réalisation des infrastructures de communication est pour beaucoup dans l’accélération de la dégradation de la Réserve . Depuis sa création , elle était quelque peu enclavée. Les seuls moyens d’accès étaient les pirogues et les sentiers. A l’Est la route venant de la Moumée dans le Haut-Nkam s’arrêtait à Balé au bord de la Réserve. Du côté Ouest la route Melong-Dschang passait à Fombap, au moins à trois kilomètres de la Réserve. Malheureusement en 1985-87, sur ordre des autorités publiques, l’entreprise Edok-Eter a constuit une route diamétrale allant de Fombap à Balé en passant par Mbongo, Mogot, Mbokou, Mokot, Nden-Matock, Moyong et Mankang. Et voilà le boulevard, la voie royale pour tous les braconniers et les chercheurs de terres d’asile ou de culture.

De fait, depuis l’ouverture de cette route, renforcée actuellement par la construction des ponts en planches ou en béton armé, le rythme d’immigration s’est accentué, la population des villages s’est accrue, les champs et plantations se sont étendus sur les deux côtés et vers l’intérieur, le rang des chasseurs et autres tendeurs de pièges s’est allongé, et tout cela au détriment de la Réserve.

7- Causes institutionnelles

Tout compte fait, les institutions publiques portent la plus grande part de responsabilité dans la catastrophe écologique qui guette la Réserve de Faune de Santchou .

58

Les différents facteurs que nous venons de développer n’auraient pas causé des impacts d’une si grande ampleur si cette Réserve bénéficiait d’un système de conservation adéquat. A y regarder de près, ce système accuse beaucoup de lacunes et de défaillances.

Disons les choses telles qu’elles se présentent : La Réserve de Faune de Santchou est mal conservée, mal surveillée, mal gérée ; en un mot c’est ‘‘une aire non protégée’’. Cette situation déplorable est due aux différents facteurs évoqués plus haut, mais aussi au mode de gestion et aux problèmes de tous ordres auxquels est confronté le Service de Conservation de la Réserve.

Il y a tout d’abord les problèmes de finances. Le budget annuel de ce service est une maigre enveloppe qui n’atteint même pas trois mille (3000) dollars américains ! En plus des difficultés financières, le problème des ressources humaines se pose avec acuité. L’ensemble du personnel comprend le Conservateur assisté de deux agents seulement, pour une réserve de 7000 ha. Nous sommes bien en-deçà des normes de l’UICN… Ces agents déjà peu nombreux sont ensuite mal formés (formés sur le tas), et en conséquence mal payés, et donc tentés par la corruption. L’autre aspect du problème, c’est que le personnel – y compris le Conservateur – a été maintenu trop longtemps au même poste (plus de 15 ans pour les agents). Cet état de fait engendre très souvent la routine, la sclérose, les relations trop familières avec les populations, le laxisme et la corruption sous une forme ou sous une autre .

Les problèmes de logistique ne sont pas des moindres. Le service est logé dans des locaux étroits : une maisonnette qui abrite d’ailleurs un autre service public. Sans meuble, ou presque. Deux vieilles machines à écrire mécaniques. Sans téléphone (Il n’y en a pas au reste dans la ville). Quelques rares fournitures de bureau. Pas de voiture, pas de motos ou plutôt deux squelettes de motos tombées hors d’usage il y a belle lurette. Bref il y a tout ce qu’il faut pour décourager les esprits les plus entreprenants.

Le service de conservation est également confronté aux problèmes d’absence de soutien et de collaboration des autres services publics, et même de la hiérarchie ! Le Conservateur ne semble pas recevoir de ses supérieurs hiérarchiques et des autorités politiques, administratives et judiciaires tout l’appui qu’il était en droit d’en attendre dans l’accomplissement de sa lourde tâche.

Tout se passe comme si on lui avait abandonné l’aire protégée, ou pire, comme si on voulait le fragiliser, affaiblir son autorité et faire de lui un bouc-émissaire, et finalement le rendre responsable du déclin de la Réserve. Sinon, comment expliquer que le rapport alarmant envoyé par lui à la Hiérarchie – intitulé S.O.S. pour la Réserve de Faune de Santchou – soit resté lettre morte depuis cinq ans ? ! Comment expliquer également que les exploitants illégaux, les vendeurs de terrain et autres braconniers qu’il traîne en justice ne s’en sortent qu’avec des sanctions légères pour les fautes lourdes commises ?

La dernière cause institutionnelle que nous évoquerons porte sur le mode de gestion même de la Réserve, en commençant par le mode de prise de décision. C’est que, avant tout et au-dessus de toutes les causes, il y a un problème de fond : Il règne dans la région un malaise – mais pourquoi le cacher ? – une hostilité viscérale envers la Réserve. Quelle en est l’origine ?

59

En remontant l’histoire jusqu’en 1987, année de la création de la Réserve de Faune, et plus loin encore, en 1947, au moment de l’institution de la Réserve forestière de Santchou, une question fondamentale se pose : Le processus de prise de décision avait-il été participatif ? Puis une autre tout aussi fondamentale : Après la prise de décision, le mode de gestion a-t-il été participatif ? « Non », répondent les habitants à l’une et l’autre question. Tout au plus avait-on, en 1947, informé certains chefs traditionnels locaux, vaguement, sans trop leur expliquer les tenants et les aboutissants d’une réserve, sans leur faire savoir les implications de leur approbation sur les générations futures. Tel qu’il ressort du texte de l’arrêté de 1947, l’Administration coloniale s’était surtout basée sur un instrument juridique : l’avis de l’Assemblée Représentative, lequel avis portait du reste sur la création d’une série de Réserves dans l’Ouest- Cameroun, et non spécifiquement sur celle de Santchou.

Plus grave, en 1987, c’est un ministre qui a pris la décision de changer le statut de la Réserve forestière, et d’en faire une réserve de faune, toujours sans consulter les gardiens des lieux. Une fois la décision prise en haut, les habitants se sont vu imposer une série d’interdictions, en application d’un texte élaboré loin d’eux, sans eux et malgré eux.

L’on peut donc comprendre pourquoi, jusqu’alors, les populations et les autorités traditionnelles locales n’ont jamais totalement adhéré à ces décisions, et nourrissent plutôt à l’égard de la Réserve et des services de conservation une hostilité foncière et héréditaire. C’est que le mode de prise de décision et de gestion de la Réserve a été et demeure essentiellement exclusif et répressif.

Voilà donc, dans l’ensemble, ce qui nous semble constituer les principales causes du déclin progressif de la Réserve de Faune de Santchou, déclin qui se manifeste globalement par la déforestation et l'appauvrissement en ressources fauniques et floristiques.

Alors, que faut-il faire ?

60

Chapitre V : PROPOSITIONS DE SOLUTIONS

La situation de la Réserve de Faune de Santchou est donc grave et complexe, comme l’atteste l’état des lieux que nous venons d’en faire. Cependant la situation n’est pas désespérée. «La Réserve se meurt» certes, comme le titrent certains journaux (Mutations N° 332, Ouest Echos N°136), mais la Réserve n’est pas morte. Tout d’abord, malgré l’ampleur des attaques partant des zones périphériques et des bords de la route qui la traverse, elle conserve un noyau à peu près intact, un massif de forêt primaire, un massif de ‘‘forêt frontière’’ – pour employer la terminologie du WRI – couvrant au moins la moitié de la superficie totale. Ensuite, les impacts négatifs de l’action anthropique ne sont pas irrémédiables. Mais il s’agit d’agir vite ; sinon l’action de l’homme va s’étendre davantage, ses impacts vont se répandre, et bientôt le noyau sera attaqué, et la situation sera devenue irréversible.

Agir vite, oui, mais avant tout chercher ensemble les actions à mener et les stratégies appropriées. Il ne faut exclure ni négliger personne dans le processus, car nul ne détient le monopole du savoir. Raison pour laquelle le CCDD, dans sa quête des solutions aux multiples problèmes de la Réserve, a organisé les consultations participatives dont il a été longuement question dans ce rapport, et multiplié les contacts individuels. Le présent chapitre est donc la synthèse de nos observations et de nos réflexions, mais aussi des suggestions et doléances des uns et des autres. C’est un ensemble de mesures à prendre, d’actions à mener et de stratégies à développer à plusieurs niveaux, et qui concourent toutes à la restauration de la Réserve, qui est le but final.

1- Gestion participative

Le maître-mot, le principe stratégique de base dans la gestion de la Réserve doit être la participation. Elle ne doit plus être la seule affaire des pouvoirs publics. Les autorités et les populations locales doivent être associées au processus, à l’entreprise de gestion. Dans le système de conservation, les autochtones doivent occuper la place centrale qui est la leur, car ce sont eux les premiers gardiens de la forêt. C’est eux qui vivent dedans et autour, c’est eux qui y sont présents de jour comme de nuit, et pas seulement les jours ouvrables.

En les excluant, pire en les menaçant, comme cela a été le cas depuis longtemps, on les rend étrangers à leurs propres terres et dans leur propre territoire, et on ne peut en faire que des êtres hostiles et radicaux. Par contre, en les associant effectivement et pleinement aux prises de décisions et aux actions de conservation, cela favorise la réappropriation de la forêt par ceux-là mêmes qui en sont les premiers et les derniers gardiens. Se sentant et se voyant de nouveaux propriétaires des lieux – en fait co-propriétaires avec l’Etat – ils assumeront d’autant plus aisément leur part de responsabilité dans le destin de la Réserve.

Au reste, l’idée de gestion participative rejoint le souhait de la grande majorité de la population. Interrogés à ce sujet, les enquêtés ont réagi comme l’indique la figure ci-dessous : 61

Fig. 11 : Opinions sur la surveillance de la Réserve

Question : A votre avis, qui doit surveiller la Réserve ?

3% 10% Le conservateur et ses agents (3%) 75% 12% La population elle- même(10%) Sans opinion(12%)

Le conservateur et la population (75%)

Au-delà de la participation de la population locale, il faudrait développer un système de partenariat comprenant également le secteur privé, les ONG et la Société civile. Nous savons tous – et cela se voit dans le cas de Santchou – que l’Etat n’a pas les moyens de sa politique. L’une des grandes lignes de cette politique est de bien conserver les aires protégées actuelles et d’en créer de nouvelles, l’objectif final étant de protéger 30% du territoire national. Mais comment y parvenir si on ne maintient pas les acquis ? Et comment maintenir les acquis si l’Etat, avec ses moyens humains et financiers limités, ne recherche pas le concours des autres partenaires intéressés ?

2- Sensibilisation – Education – Formation – Information

Si la Réserve de Santchou est en plein déclin, c’est en grande partie, comme nous l’avons vu, à cause de la grande ignorance des populations, une ignorance dont elles ne sont nullement responsables. Pour d’abord stabiliser la situation, et ensuite inverser la tendance, il est maintenant urgent de mettre en œuvre un programme de sensibilisation et d’éducation environnementales à tous les niveaux. En plus il faut donner régulièrement aux habitants les informations susceptibles de les éclairer et de les amener à comprendre l’importance des aires protégées et l’intérêt qu’ils ont à conserver la leur.

De fait la plupart d’entre eux n’ont jamais visité une aire protégée, et ne peuvent donc pas facilement concevoir qu’elle puisse être un objet de fierté, une source de revenus, bref un patrimoine à conserver. Les données des figures suivantes en disent long sur leur ignorance :

62

Fig. 12 : Visite d’une aire protégée

Question : Avez-vous déjà visité une aire protégée ?

Hommes Femmes Jeunes

L'ENSEMBLE

1 Oui

2 Non

3 Sans Réponse

Ces résultats dévoilent leur état de fermeture et l’étendue de leur ignorance, d’où la nécessité d’intégrer la visite des autres aires protégées par les autochtones dans les stratégies de sensibilisation.

Pour finir, il serait également stratégique de former ou d’amener certains d’entre eux à se former aux techniques de conservation et de gestion durable des ressources naturelles et des aires protégées, même aux niveaux académiques les plus élevés. Ils pourraient rentrer appliquer leurs connaissances ou les faire appliquer dans leurs villages.

Mais sensibiliser qui ? Les populations locales, les femmes, les jeunes, mais aussi – et cela peut étonner – les pouvoirs publics ! Ceux-ci semblent avoir des préoccupations plus politiques et individuelles qu’écologiques. Tout se passe comme si certains tenaient à préserver ou à conquérir leur électorat, à garder ou à se faire une bonne image auprès de leurs administrés ou de leurs justiciables, et tant pis pour la Réserve… Laxisme ? complaisance ? démagogie ? ou simple inconscience ?

3 – Réduction de la pauvreté

Même bien sensibilisée, une population peut toujours s’attaquer au domaine privé de l’Etat si on la laisse s’enliser dans la pauvreté et la misère. Or tel est justement le cas dans la zone de Santchou. Le niveau de vie y est extrêmement bas, les conditions de vie sont des plus déplorables. Comment pouvait-on logiquement s’attendre à ce qu’une population si pauvre soit écologiquement «sage » au milieu de tant de richesses naturelles ? C’est demander à une chèvre affamée de vivre ‘‘sagement’’ sans rien brouter dans un enclos plein d’herbes …

63

Il faut donc assister les populations de la zone de Santchou, les aider substantiellement à améliorer leurs conditions de vie, si l’on veut qu’elles diminuent leur pression sur les ressources génétiques de la Réserve. Comment ? Par l’augmentation des revenus des différentes couches sociales : agriculteurs, éleveurs, commerçants, salariés du secteur public et du secteur privé, etc. Avec des conditions de vie meilleures, les gens seraient mieux disposés à écouter les discours écologiques, beaucoup refréneraient leurs actions destructives, certains sortiraient même de la Réserve, et d’autres qui frappaient déjà à la porte renonceraient à y pénétrer.

Les réponses données à l’un des points du questionnaire vont au reste dans ce sens. La question était de savoir s’ils pourraient accepter de diminuer ou même renoncer aux activités dans la Réserve. Ils ont répondu comme le présente la figure ci-dessous :

Fig. 13 : Conditions pour sortir de la Réserve

Question : Pouvez-vous accepter de diminuer ou de renoncer aux activités dans la Réserve ?

30

25 Oui si j'ai un emploi salarié 20 Une autre activité 15 lucrative Si je peux apprendre 10 un métier Sans réponse 5

0 Hommes Femmes Jeunes

4 – Promotion de l’agriculture durable

L’agriculture, nous l’avons vu, est la cause principale de la déforestation dans la Réserve. C’est elle qui a ravagé le quart ou le tiers de la forêt. Il est vrai, on ne peut pas demander aux paysans d’abandonner totalement leurs activités agricoles. On peut cependant en diminuer l’impact dévastateur, par le développement des méthodes d’agriculture durable, qui ont pour résultat final la réduction des surfaces cultivées. La notion de durabilité implique :

- que l’agriculture est intensive et non extensive ; - qu’elle privilégie l’utilisation des fertilisants naturels (compost, fumier, ordures ménagères, etc.) ; - qu’elle est intégrée, c’est-à-dire complémentaire avec d’autres activités (petit élevage par exemple) ; - qu’elle utilise des semences améliorées ; - qu’elle utilise les techniques modernes de multiplication végétative ; 64

- qu’elle utilise des techniques culturales pro-environnementales (techniques anti- érosion par exemple) et au final, elle permet de produire plus et mieux en utilisant moins d’espace.

C’est, à n’en pas douter, le type d’agriculture qui convient le mieux à une Réserve de petite dimension et de forte densité humaine comme celle de Santchou. Il s’agit de développer des stratégies appropriées pour généraliser cette pratique, stratégies qui comprennent la sensibilisation, la démonstration, la formation et l’assistance.

5 - Promotion des activités alternatives

La quasi-totalité de la population de la zone s’adonne à l’agriculture qui est la principale source de revenus. Il existe pourtant plusieurs autres activités plus rentables et moins pénibles, et qui ont l’avantage d’occuper moins d’espace.

A l’issue des différentes réunions, et comme le montre la figure ci-dessous, les habitants sont très réceptifs pour cette catégorie d’activités, et beaucoup sont prêts à tenter l’expérience. Il est donc opportun de mettre sur pied un programme d’activités alternatives génératrices de revenus pour tous les villages tant à l’intérieur qu’autour de la Réserve. Elles contribueraient beaucoup à la réduction de la pauvreté et ipso facto à la réduction de la pression humaine sur la forêt et ses ressources. En plus elles occuperaient quotidiennement beaucoup de personnes et les détourneraient ainsi du chemin de la brousse.

Ces personnes auraient moins de temps pour s’occuper de leurs multiples parcelles de terrain, et choisiraient elles-mêmes d’en diminuer le nombre ou les dimensions, pour se consacrer aux nouvelles activités plus avantageuses parce que plus proches, moins épuisantes, plus rapides, moins incertaines, et surtout donnant plus d’argent. Entre autres activités, il serait intéressant de développer :

- l’apiculture ; - la pisciculture ; - la culture des champignons ; - le maraîchage ; - l’élevage du gibier (aulacodes, rats de Gambie, francolins, etc.) ; - la création de pépinières et de vergers (arbres fruitiers et forestiers) ; - le petit élevage (poules, porcs, etc.) intégré avec la pisciculture et le maraîchage ; - l’artisanat (vannerie, sculpture, fabrication de meubles et autres objets en rotin, bambou, raphia, etc.).

Pour adhérer totalement à ces activités, les populations ont juste besoin des projets de démonstration, de la formation, de l’organisation et de l’assistance.

Au cours des consultations, elles ont manifesté beaucoup d’intérêt pour ces activités qui pourraient remplacer entièrement ou partiellement leurs activités agricoles. Les préférences 65 varient suivant les individus, et certains ont choisi plus d’une activité, ce qui se reflète dans cet histogramme :

Fig. 14 : Choix d’activités alternatives

40 35 30 25 Jeunes 20 Femmes 15 Hommes 10 5 0

Autres Artisanat Apiculture Pisciculture Elevage porcs Elevage poulets Culture champignon

6- Régénération forestière

Au cours de ces deux dernières décennies, la Réserve de Faune de Santchou a perdu beaucoup d’espace et beaucoup d’espèces. Pour qu’elle retrouve son abondance d’antan, il faut mettre sur pied un programme de régénération forestière accompagné d’un train de mesures préventives et protectrices. On ne peut pas attendre que tous les arbres repoussent seuls, il faut en replanter. Il faut donc organiser des opérations de reboisement dans les parcelles partiellement ou entièrement endommagées, en mettant l’accent sur les espèces rares et précieuses, et les espèces très sollicitées par les populations. Il faudrait penser à introduire des espèces nouvelles mais utiles, comme par exemple le Calyandra, qui attire les abeilles et est donc avantageux pour l’apiculture. A côté du reboisement des parcelles endommagées, l’autre méthode de régénération consistera, comme nous l’avons déjà évoqué, en la création de jardins forestiers réservés partiellement ou entièrement aux arbres sauvages potentiellement générateurs de revenus par leurs fruits, leurs écorces, leurs racines, leurs feuilles, leurs noyaux, leur sève, ou autres ; bref l’agro foresterie doit être promue.

Dans le même ordre d’idées, il faudrait compléter cette régénération végétale par une «régénération animale». On devrait réintroduire ou faire revenir les espèces disparues. On peut faire l’élevage insitu de certaines espèces disparues ou en voie de l’être, ce qui faciliterait leur réintroduction dans la nature. Par ailleurs selon les témoignages des autochtones Mbô, les hommes à totems, s’ils sont rassurés, peuvent ramener leurs doubles dans leur ancien habitat, s’ils 66 sont rassurés quant à leur sécurité ; ces totems seraient certainement suivis dans leurs mouvements migratoires par les éléphants ordinaires.

Mais pour que cette double régénération floristique et faunique aboutisse à la restauration effective de la Réserve, il faudrait qu’elle soit appuyée par des mesures énergiques, parmi lesquelles :

- le classement du noyau central (forêt primaire) en réserve naturelle intégrale avec interdiction d’accès et d’activité pour toute personne, - la délimitation matérialisée des zones d’habitation et d’activités agricoles, - la création de zones-tampons à l’intérieur et autour de la Réserve, - la réduction des voies de communication dans la Réserve au minimum nécessaire, avec fermeture des grands sentiers qui traversent les parties encore sauvages, - l’interdiction de pâturage pour les éleveurs de bovins, - le renforcement de la lutte contre le braconnage et l’exploitation forestière clandestine, - la réglementation – à défaut de l’interdiction – du commerce du bois de chauffe, accompagnée de la réduction de la consommation du bois par la vulgarisation de l’utilisation des foyers améliorés dans les zones rurales et urbaines.

7 – Réduction de la population dans la Réserve

Toutes les solutions envisagées n’auraient cependant pas leur plein effet si le nombre de personnes résidant dans la Réserve continuait à s’accroître au rythme actuel. Tout au plus réussirait-on à retarder l’échéance de l’effondrement final. Comme nous l’avons constaté plus haut, la démographie galopante au sein même de la forêt et même tout autour aggrave inexorablement la pression sur les ressources, et il y a fort à parier que l’explosion démographique causerait de facto l’explosion écologique. Il est donc urgent de développer des stratégies de réduction progressive de la population interne pour la ramener, avec le temps, à des proportions compatibles avec les dimensions de l’aire protégée. Ainsi il faudra :

- procéder d’abord au recensement démographique pour avoir des données exactes sur la situation actuelle (nombre d’autochtones, d’étrangers, d’hommes, de femmes, de jeunes, etc. par village), pour mieux contrôler son évolution ; - juguler l’immigration des allogènes par l’interdiction de la spéculation foncière (vente illégale des terres) ; - encourager et soutenir les déplacements et les réinstallations volontaires hors de la Réserve ; - susciter et favoriser l’installation des jeunes dans les zones urbaines par l’élaboration d’un programme d’éducation, de formation professionnelle et d’encadrement approprié. – Ne peut-on pas, par exemple, leur redistribuer les 4000 ha de l’ex- SODERIM ?

8 – Renforcement des capacités institutionnelles

Pour intervenir efficacement dans l’entreprise de redressement de la situation de cette aire protégée, les différentes institutions, étatiques et non étatiques, ont besoin de voir leurs capacités renforcées. Au Service de Conservation de Santchou, il faudrait fournir des matériels roulants et 67 d’autres moyens logistiques, c’est-à-dire une voiture de terrain adaptée et des motos pour permettre une plus grande mobilité du Conservateur et des gardes dans et autour de la Réserve. Il faut également un bureau mieux équipé, et créer des postes de contrôle à Santchou, Lélem, Kékem, Moumée – question d’encercler la Réserve pour décourager les braconniers et autres exploitants clandestins. Pour ce il faut nécessairement plus d’hommes mieux formés, mieux équipés et mieux motivés par un salaire raisonnable et d’autres avantages. Mais aussi un renouvellement du personnel s’impose : 15 ans sur place, cela émousse jusqu’aux gardiens les plus sévères…

Les ONG et les associations de protection de l’environnement ont également besoin de renforcement des capacités. Dans le contexte actuel marqué par l’inefficacité et les échecs répétitifs des institutions étatiques au Cameroun et ailleurs, les ONG se présentent de plus en plus comme des partenaires sur qui on peut compter dans le combat pour la protection de l’environnement, la réduction de la pauvreté et le développement durable en général.

9 – Développement de la recherche

Enfin, pour couronner le tout, toutes les solutions proposées, et donc toutes les opérations à engager dans la lutte contre la dégradation de la Réserve de Faune de Santchou, ont besoin de l’appui et de l’éclairage de la recherche pour atteindre pleinement leurs objectifs. Nous l’avons déjà dit en d’autres mots, la situation est grave et complexe, bien qu’elle ne soit pas désespérée. Et pour la redresser – et il le faut –, il est nécessaire, avant, pendant ou après une action, de cerner les contours du problème, de discerner les différentes facettes de la réalité, d’établir les liens et les rapports entre les faits, de collecter les données et les analyser, de faire des juxtapositions et des projections… En bref, la recherche s’impose, si on veut agir avec plus d’efficacité. Ainsi, entre autres activités de recherche sur le terrain, il y aura à : - réaliser une enquête socio-économique, - étudier les us et coutumes des autochtones, - étudier les composantes sociologiques de la région, - connaître les modes de production de la communauté, - connaître la géographie naturelle et économique des lieux, - étudier le savoir traditionnel local en matière de conservation, - réaliser une cartographie participative de la zone, - faire un inventaire multi-ressources de la Réserve, - faire l’étude de l’interface nature-culture, autant de sujets et bien d’autres dont les résultats permettront de mieux connaître le milieu naturel et le milieu humain, et guideront, justifieront et motiveront les actions des uns et des autres dans l’intérêt de la Réserve mais aussi de l’Homme.

Voilà donc des idées que nous émettons comme notre modeste contribution à la résolution de l’équation «Santchou », qui est de toute évidence une équation à plusieurs inconnues. Nous n’avons sûrement pas fait le tour de toutes les solutions possibles, tout comme nous n’avions pas fait le tour de tous les problèmes… Mais le plus important n’est-il pas d’avoir tiré la sonnette d’alarme sur cette petite perle naturelle abandonnée au fond du Bassin du Congo, et qui se meurt ?… 68

69

CONCLUSION

Ainsi donc, après la phase de conception, la phase d’exécution du « Projet Santchou 2000 » s’est déroulée avec succès. En effet, les différentes activités se sont réalisées suivant le calendrier et la méthodologie annoncés ; et surtout, les objectifs prévus ont été atteints. Sur plusieurs points même, le Projet est allé au-delà des activités et des objectifs initiaux ; nous pensons par exemple à l’organisation de l’Atelier, à l’enregistrement des images vidéo, etc.

A la fin des travaux, et à cet instant terminal du Rapport, que dire donc de la Réserve de Faune de Santchou ? Est-ce un mythe ? ou une réalité ? Et puis, pour reprendre la problématique de l’Introduction, peut-on laisser la gestion des aires protégées à la charge de l’Etat seul ou des populations locales ?

Fort de nos connaissances actuelles à la fin de ce projet, nous pouvons affirmer

· que la Réserve de Faune de Santchou n’est pas un mythe (c’est-à-dire une Réserve vide de faune et de flore), mais qu’elle n’est pas loin de le devenir ;

· que la Réserve de Faune de Santchou fut une réalité vivante et palpable, mais qu’elle tend aujourd’hui vers une réalité virtuelle ;

· que l’on ne saurait laisser la gestion des aires protégées en général et celle de la Réserve de Santchou en particulier à la charge de l’Etat seul, encore moins des populations locales, mais que le concours des ONG et des organismes internationaux est nécessaire ;

· et que, en dernière analyse, considérant ses richesses, ses potentialités, son originalité, son unicité dans la Province de l’Ouest, ses fonctions écologiques, socio-culturelles et autres, la Réserve de Faune de Santchou ne mérite pas le sort qui est le sien actuellement, et que ce serait une perte énorme à l’échelon local, national et global si elle venait à disparaître…

Que chacun prenne donc ses responsabilités devant l’Histoire. Car demain nous serons tous coupables d’avoir laissé mourir à petit feu cette perle écologique…

Quant à nous du CCDD, notre rôle était d’informer, de réveiller, d’inquiéter l’opinion publique nationale et internationale. Nous estimons l’avoir fait et pouvoir le faire à travers ce rapport de projet, et nous poursuivrons notre action.

Nous envisageons actuellement de nous engager dans la phase de suivi du Projet par des actions concrètes sur le terrain…

Notre dernier mot – ou plutôt notre dernier cri – c’est l’appel solennel que nous lançons à la conscience nationale et internationale, pour qu’ensemble nous aidions la Réserve de Faune de Santchou à renaître. La restauration de la Réserve de Faune de Santchou est un défi à notre conscience collective. Et nous devons ENSEMBLE relever ce défi… 70

BIBLIOGRAPHIE

Dirk Bryant et al : The Last Frontier Forests : Ecosystems and Economies on the Edge, Word Ressources Institute, Washington, 1997.

Daniel Bandji : Contribution à l’étude géologique et hydrologique de la plaine de Mbô (Ouest-Cameroun), Université de Yaoundé I, 1994 (Thèse de Doctorat de 3è Cycle).

CADIC : Pratique de gestion locale des forêts.

FAO : Unasylva, V. 45, Nr.176, Parks and Protected Areas, 1994/1 * «Protected areas for the twenty-first century : Working to provide benefits for society » by J .A. McNeely. * « Improving the lifestyles of people in protected areas of Viet nam » by N.N. Phuong and S.A. Dembner. FAO and UNEP : Three Years after Rio (Regional Perspectives on UNCED Follow-up in Foresty), 1995. Abel FOSSI : L’Habitat du Loxodonta africana dans la Réserve de Faune de Santchou, Ecole de Faune de Garoua, 1991 (Rapport de Stage).

Greenpeace : Buying Destruction, A Greenpeace Report for Corporate Consumers of Forest Products, 1999.

The Sustainable Agriculture Initiative : Sustainable Agriculture Solutions, London, Novello Press Ltd, 1999. * «Foresty and sustainable agriculture » by Dr Harry Kojwang, Director of Forestry, Namibia.

* «Conservation Reserve Areas in Developing Countries : Issues for their Role in a National Sustainable Agriculture Policy». by Dr Mark E. Smith and Dr Uptal Vasvarda, Economic Ressearch Service, United States Department of Agriculture.

* « Protecded areas and sustainability » by Prof. Adrian Philips, University of Cardiff, Chair of IUCN’s World Commission on Protected Areas.

Lisa Molloy : « Les Méthodologies d’enquêtes écologiques pour une meilleure conservation dans les aires protégées » in CARPE Infos, Vol. 1, N°3 de Janvier 2000.

Paul-Marie Nsonkon : S.O.S. pour la réserve de faune de Santchou, 1995.

Adolphe Obam : Conservation et mise en valeur des forêts au Cameroun, Yaoundé, Imprimerie Nationale, 1972.

Ralph Stone : Quel est votre rôle ?… Guide à l’intention des responsables de la formation à la gestion des aires protégées, Série Biodiversité Africaine N°5, Washington, 71

D.C., Biodiversity Support Program, 1998.

Dr Michael Boboh Vabi : « Enseignements tirés de l’application sur le terrain de PRA/RRA dans certains pays de la Sous-Région de l’Afrique Centrale » in Arbres, Forêts et Communautés Rurales, N° 15 et 16, Décembre 1998. 72

TABLE DES TABLEAUX ET FIGURES

I - Tableaux Pages Tableau 1 : Composition ethnico-culturelle de l’échantillon…………………… 18 Tableau 2 : Chiffres des participations aux réunions consultatives……………... 26 Tableau 3 : Types de végétations et espèces végétales de la Réserve…………... 45 Tableau 4 : Groupes et espèces de mammifères de la Réserve…………………. 47 Tableau 5 : Familles et espèces d’oiseaux de la Réserve………………………. 48 Tableau 6 : Données démographiques des villages de la Réserve 50

II – Figures Pages Fig. 1 : Répartition de l’échantillon par tranches d’âges…………………… 17 Fig. 2 : Répartition de l’échantillon par groupes d’âges et par sexe………... 17 Fig. 3 : Composition de l’échantillon en groupes sociaux……...…………... 18 Fig. 4 : Structure ethnico-culturelle de l’échantillon……….………………. 18 Fig. 5 : Taux de participation aux réunions consultatives…….……………. 26 Fig. 6 : La population des villages de la Réserve en 1985………………….. 51 Fig. 7 : Taux de salariés de l’échantillon…………………………………… 52 Fig. 8 : Techniques de chasse utilisées……………………………………... 54 Fig. 9 : Produits de la Réserve commercialisés…………………………….. 55 Fig. 10 : Les victimes des animaux sauvages……………………………….. 56 Fig. 11 : Opinions sur la surveillance de la Réserve ………………………… 61 Fig. 12 : Visite d’une aire protégée………………………………………….. 62 Fig. 13 : Condition pour sortir de la Réserve……………………………….. 63 Fig. 14 : Choix d’activités alternatives……………………………………… 65

73

ANNEXES

1 – Programme de l’Atelier du 17 avril 2000 2 – Liste des participants 3 – Discours du Président Exécutif du CCDD 4 – Allocution de Monsieur le Sous-Préfet de Santchou 5 – Exposé de Monsieur Nsonkon Paul-Marie 6 – Exposé du Dr Ngouo Lucas-Vincent 7 – Communication de Monsieur Naoussi André à la Messe du 21 mai 2000. Questionnaires collectifs des consultations participatives et de l’Atelier du 17 avril 2000 : 8 – Thèmes pour les populations rurales / Thèmes communs 9 – Thèmes pour les populations urbaines 10 – Thèmes pour les femmes 11 – Thèmes pour les jeunes 12 – Thèmes pour les services

13 – Questionnaire individuel

Rapports des réunions autonomes de : 14 – Village Balé 15 – Liste de présences à la réunion autonome de Balé 16 – Village Mokot 17 – Village Nden Matock 18 – Village Mbokou

19 – COUPURES DE PRESSE