Villes, Bourgs Et Franchises En Wallonie De 1250 À 1477
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V - VILLES, BOURGS ET FRANCHISES EN WALLONIE DE 1250 À 1477 DES TEMPS PLUS DIFFICILES A partir de 1250, les cadres généraux de la à d'autres cultures (le lin, la guède) voire à société subissent des modifications profondes l'élevage du bétail, les activités artisanales, et ces modifications se répercutent sur la pour leur part, subissent elles aussi des trans destinée des villes et, notamment, de nos formations structurelles sur lesquelles nous villes wallonnes. reviendrons plus loin : la draperie tradition Qu'il s'agisse du nombre d'hommes d'abord : nelle de qualité continue à se développer, la relative pression démographique qui mais s'essouffle visiblement au cours du s'exerce jusqu'aux environs de 1300 est bru XIVe siècle, tandis que la draperie rurale, talement remise en question par une succes moins exigeante mais dépendante de la sion de famines éprouvantes, -la plus rigou technique du moulin à fouler, connaît reuse étant celle de 1316. Pendant la seconde une expansion tout à fait remarquable. moitié du XIVe siècle, une série d'épidémies, De nombreux petits centres, comme Soignies, - la plus impitoyable étant la Grande Peste Walcourt et Arlon, s'équipent, parfois sous des années 1348-1349, - frappe à coups répé l'impulsion de leur seigneur, concurrencent tés la population des villes et des campagnes. les grandes villes sur les marchés régionaux, Mais surtout celle des villes où l'entassement atteignent même, comme Chimay, les foires des habitants et l'absence d'hygiène sont internationales de Paris (ca 1300), de Chalon particulièrement favorables à la propagation sur-Saône (XIVe s.) et de Genève (XVe s.). du fléau. On estime que le tiers de la popu D'autre part, la toilerie prend un essor in lation de l'Europe a disparu dans ces cir soupçonné, notamment en Hainaut, et anime constances. Il faut attendre le XVe siècle quantité de petites villes. L'industrie métal pour que se marque, dans l'ensemble, une lurgique ne semble pas connaître de ralentis certaine stabilisation, très variable selon les sement notoire. Tandis que le travail du localités et fort sensible aux opérations mili cuivre (bronze et laiton) devient l'apanage taires très fréquentes à cette époque. presque exclusif de Dinant et de Bouvignes, Quant à l'activité économique, elle évolue le travail du fer, produit, à la suite de progrès sensiblement, surtout après 1300. On a pu techniques, en quantité de plus en plus dire des 'crises du XIVe siècle' qu'elles étaient grande dans les forges campagnardes, se 'à l'origine d'une économie contractée'. répand dans de nombreuses localités aux Si l'agriculture marque un net repli par rap spécialités diverses (clouterie, armurerie, port à l'expansion antérieure et s'efforce de etc.). Tannerie et extraction de la pierre con pallier la baisse du prix du blé par le recours stituent également des activités florissantes, 131 mais jusqu'ici mal étudiées. Enfin, sur le plan politique, les XIVe et XVe Le commerce également subit des modifica siècles présentent une image beaucoup plus tions profondes. Dans sa forme d'abord: à dure que celle des siècles précédents. Rap partir du XIVe siècle, les grandes compa ports des villes avec le prince d'abord : gnies italiennes ou 'teutoniques' contrôlent dès le début du XIVe siècle, les villes liégeoi de plus en plus étroitement les échanges sur ses, mais aussi celles du roman pays de les places internationales. La supériorité Brabant, bataillent par la diplomatie ou par de leur organisation financière et commer les armes pour limiter le pouvoir du prince ciale élimine les anciennes fédérations ur et son arbitraire tant en matière judiciaire baines et, à plus forte raison, les concurrents qu'en matière financière ou politique. A livrés à eux-mêmes ou mal adaptés aux exi Liège, les conflits entre les villes et l'évêque gences nouvelles du marché. Si Dinant se sont sanglants et fréquents, provoquant joint à la Hanse Teutonique pour ses opé de véritables guerres quasi ininterrompues rations en Angleterre, il faut bien que ses qui rebondissent au XVe siècle au moment rivales s'efforcent de prospecter des mar où la maison de Bourgogne met la main sur chés de plus en plus lointains, - ceux de nos principautés: Dinant, Huy et, finale l'Europe centrale par exemple,- qui échap ment, Liège, vont tour à tour succomber pent provisoirement à l'emprise des 'grands' dans ce duel inégal. Rapports des habitants du commerce. En outre, entre 1250 et 1500 entre eux ensuite : il est difficile de conserver environ, les axes du commerce de nos partout le régime patricien qui se maintient régions, - pour autant qu'ils nous soient tant bien que mal jusqu'en 1300. Dans les connus autrement que dans leurs grandes villes les plus actives, les métiers se sont lignes, - changent de cap. Le port de Bruges groupés et les artisans réclament une part de devient décidément un des pôles de l'activité plus en plus grande à la gestion de la com commerciale depuis, surtout, que les galères mune: aussi les conflits éclatent-ils, déchirant génoises et vénitiennes ont fait leur ap la population urbaine. Triomphants à Liège, parition dans la Manche dans le dernier reconnus à Dinant et à Huy, mais trop fai quart du XIIIe siècle. Des routes commer bles pour s'imposer à Namur, à Mons ou ciales rayonnent à partir de lui : la 'route' dans les agglomérations de moindre impor Bruges-Cologne qui passe en dehors du pays tance, les métiers s'efforcent de trouver la wallon proprement dit, mais aussi la route place qui leur revient dans l'administration Bruges-Paris qui traverse Mons, la route de la ville. Conflits avec le prince, conflits Bruges-Italie, par Louvain, Namur (Huy), entre bourgeois, développent un climat d'in Luxembourg et Bâle, autant d'itinéraires sécurité préjudiciable à la prospérité des Nord-Sud qui irriguent certaines villes wal villes. lonnes et les maintiennent au cœur d'un Telles sont, brièvement esquissées, les prin grand mouvement commercial. D'autant cipales mutations qui affectent la vie urbaine que ni la Meuse, ni l'Escaut ne perdent leur dans les régions de l'actuelle Wallonie entre importance, même si la primauté du trans 1250 et 1477. Sans doute n'est-il pas inutile de port fluvial est parfois remise en question les examiner dans le détail. par le transport sur mer et sur route. 132 DES VILLES WALLONNES? Le pays wallon n'est pas, à proprement par ler, un pays de 'grandes villes' ni même de 'villes'. C'est plutôt une région d'habitat très dense où quelques villes moyennes fort actives s'appuient sur un réseau serré de petits bourgs et de gros villages. L'évolution générale de la période pourrait se résumer de la manière suivante. Sur la lancée du XIIIe siècle, les 'grandes villes' connaissent une période de prospérité jus qu'aux environs de 1300. Vient ensuite une période de décélération consécutive aux crises démographique, économique et fi nancière, à l'insécurité généralisée et aux conflits sociaux (1300-1420). Elle est suivie d'une période de reprise, sur le plan écono mique, qui s'accompagne, sur le plan politi que, des premières réactions à l'emprise de l'État centralisateur (1420-1500). Tel est, en tout cas, le profil de l'évolution écono mique des 'grandes villes' mosanes. Tournai n'a pas suivi exactement la même évolution. Son essor commercial se poursuit sans inter ruption jusqu'au milieu du XIVe siècle. C'est à partir de 1420 que le déclin de la vieille Cité s'amorce de manière irréversible. Les villes de 'petite' et 'moyenne' importance, par contre, réagissent différemment. Si Ath, Thuin, Chièvres et Bouvignes connaissent, PLAN DE BRAINE-LE-COMTE, AU XVIe SIÈCLE. - la conjoncture économique aidant, - D'après Jacques de Deventer. 'Atlas des villes des Pays une croissance spectaculaire, d'autres, comme Bas', Minutes originales (Bruxelles, Bibliothèque Royale Albert fer, Manuscrits, 22090, planche 11 ). Gembloux, voire Nivelles, s'endorment à peu près définitivement. Le facteur dominant du maintien de la prospérité des villes wallonnes paraît résider dans l'activité industrielle spécialisée, qu'il s'agisse d'une spécialisation ancienne comme la métallurgie à Dinant, à Bouvignes et à Thuin, ou d'une 'innovation' comme c'est le cas pour la draperie d'Ath et la toilerie hennuyère. 133 ÉVOLUTION DU PAYSAGE URBAIN Ce sont les grandes villes qui offrent l'image remarquablement étendus. Néanmoins, Liè la plus achevée du développement d'un ter ge (196 Ha) et Tournai (ca 195 Ha), ancien ritoire urbain. nes cités épiscopales, atteignent des super Elles traversent, aux XIIIe et XIVe siècles, ficies respectables, tandis que des villes une véritable vague d'aménagement et d'uni comme Huy (40 Ha) ou Dinant (ca 30 Ha) fication de l'espace qui leur est dévolu. La li sont confinées dans un espace nettement gne des fortifications est définitivement ar plus réduit, très honorable pour l'époque rêtée et délimite, désormais, une aire d'exten mais qui cadre mal avec leur étonnante vita sion dont les bornes ne seront plus guère lité. En surface, elles rivalisent avec Nivelles reculées avant le XIXe siècle. (27 Ha 300) et sont largement dépassées par Liège annexe le quartier de la Sauvenière sur Namur (60 Ha) qui ne furent pourtant jamais lequel le Chapitre de Saint-Lambert exer des centres économiques de premier plan. çait jusqu'alors sa juridiction (1287), Dinant Dans les villes de petite et moyenne importan s'empare du faubourg de Leffe et le rattache ce, la fièvre des fortifications se montra plus à son système défensif (1317), Huy, pour des tenace. Des murailles sont construites et en raisons stratégiques semble-t-il, incorpore à tretenues qui assurent la protection des habi sa franchise Statte et la terre d'Erbonne tants.